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Par Robert Denton III

Traduction : Mika, Relecture : Flex


Mise en page : VanReignard

Quelque part dans l’Outremonde.

Kuni Yori rejoignit les restes épars de l’oni, en s’approchant bien plus près que ne l’avait
fait son apprenti. Des volutes de fumée se tortillaient encore au-dessus de la chair calcinée du
démon, juste à l’endroit où le rayon de jade l’avait touché. Des éclats de pierre verte marbrés d’une
couleur crème brillaient autour du cadavre, comme des gouttes de rosée. Il s’était attendu à devoir
recourir lui aussi à une prière, peut-être même à sacrifier un de ses précieux doigts de jade pour
en faire une offrande. Mais la Frappe de Jade de Tadaka avait été plus que suffisante pour venir à
bout de la créature.

Je l’ai sous-estimé. Lorsque Tadaka avait commencé à faire appel au kami pour se
matérialiser devant lui sous la forme d’une lumière de jade, Yori avait trouvé sa technique plus
ostentatoire que nécessaire et l’avait invité à suivre la procédure bien plus simple de la famille
Kuni. Loin de se montrer réticent (la famille Isawa pouvait se montrer si étroite d’esprit), Tadaka
prouva qu’il était plus conciliant que le reste des siens. Il était même parvenu à maîtriser tout à fait
ce rituel.

Ne le berce pas trop d’éloges. Il ne te montrerait aucun respect.

« S’il avait survécu, nous aurions pu l’interroger », remarqua Yori. « Mais, vous avez bien
agi. »

Tadaka ne pouvait pas regarder Yori dans les yeux. Avec un respect mêlé de tristesse, il lui
redonna l’objet qu’il lui avait emprunté : un petit peigne en os de baleine.

Il appartenait à la famille de Yori depuis des générations. Un de ses ancêtres l’avait lui-
même sculpté. Au cours des dernières décennies, l’esprit qui s’y trouvait avait spontanément
développé une conscience. Il était devenu un objet vivant, un nemuranai.

Yori frotta son pouce contre l’os poli et fossilisé. Le kami qu’il renfermait, l’esprit du
peigne, était parti. Ce n’était plus un nemuranai. Toute vie l’avait quitté.

Tadaka baissa la tête, envahi par la honte. « L’esprit qu’il contenait a accepté mon offrande,
mais s’est enfui immédiatement après. Je suis désolé, maître. Je ne pourrai jamais me racheter
auprès de vous. »

Des centaines d’années étaient nécessaires pour créer un nemuranai. L’objet devait
être utilisé avec soin, protégé, choyé, transmis de génération en génération. Chaque décennie
favorisait son éveil, sa puissance. Parfois, ce phénomène n’arrivait jamais. Et voilà que ce précieux
trésor familial était redevenu tout à fait commun. Perdu pour toujours.

Yori se contenta de le jeter. « Il a rempli sa mission. »


Tadaka n’en croyait pas ses yeux. Une réaction somme toute légitime. Malgré le temps
qu’il avait passé avec les Kuni, Tadaka avait continué à s’attacher aux objets. Pour lui, ses outils
restaient « sacrés ». Voilà ce qui le ralentissait : toutes ces cérémonies, ces marques de respect
inutiles. Il avait montré qu’il était un élève tout à fait décent, mais au bout du compte, c’était
toujours un Isawa.

« L’esprit du
nemuranai savait que
cet endroit finirait par le
corrompre en restant ici »,
expliqua Yori. « Ce qui le rend
plus malin que les humains.
Enfin », ajouta-t-il « plus malin
que nous, pour le moins ».

Le vent s’engouffra
dans le masque de tissu de
Tadaka. « Voilà pourquoi
les Kuni s’entourent de
nemuranai », réalisa-t-il.
«  Dans l’Outremonde, on ne
pouvait jamais être certain
que le kami répondant à nos
prières n’était pas Souillé. »

« Et nous utilisons le
jade pour nos offrandes, car
les kansen ne les acceptent
jamais. » Yori s’agenouilla à
côté de l’oni en prenant soin de ne pas toucher la maudite créature. « Bien sûr, en offrant du jade,
on prend le risque qu’aucun kami ne réponde à notre appel. »

« Toutes ces années… » murmura Tadaka. « Une seule invocation a suffi à les faire
s’envoler. »

C’était dans l’ordre des choses. Les mortels remportaient de petites victoires qu’ils
payaient au prix fort. Voilà ce que des siècles de deuils avaient enseigné aux Kuni. Il ne pouvait
attendre de Tadaka qu’il comprenne tout cela en une seule fois.

Mais il y parviendrait. Avec le temps.

Yori inspecta le cadavre. Il prit garde de ne pas prendre de trop grandes inspirations afin
de ne pas inhaler l’esprit qui le quittait. Les Chasseurs de Sorciers pouvaient être possédés de cette
façon. Les trois yeux bulbeux de l’oni restaient figés et sans expression. Ses trois langues pendaient
mollement sur le côté de sa bouche qui ne produisait plus aucun son.

« Regardez son visage. Trois yeux. Trois langues. » Il hocha la tête. « C’est le rejeton d’un
seigneur oni. L’engeance d’Akuma no Oni. »
Tadaka avala sa salive. « Je n’avais pas réalisé qu’il en existait encore. »

Intéressant. Tadaka avait déjà vu de pires horreurs et il n’avait jamais reculé. Mais à ce
moment, il paraissait troublé, voire pâle. Pourquoi cette créature l’intriguait-il à ce point ?

L’Empire avait depuis longtemps oublié ce que la famille Kuni n’avait cessé de se
transmettre : jadis, un Maître Élémentaire avait créé le seigneur oni. Le nom d’Isawa Akuma était très
puissant et en l’offrant à un oni, il avait donné naissance à l’une des créatures les plus redoutables
de l’Outremonde. À cette époque, la Muraille Kaiu n’avait pas encore été achevée. Il avait fallu se
résoudre à bien des sacrifices pour parvenir à tuer cette créature.

Il réalisa qu’Akuma avait jeté la honte sur les Isawa. Voilà qui expliquait l’appréhension de
Tadaka.

Je ne peux pas me permettre de voyager avec un compagnon aussi bouleversé, pensa-t-il. Il


lui fallait rassurer Tadaka en lui suggérant que l’opprobre que portait sa famille était tout à fait sans
conséquence, pour le moment en tout cas. Tadaka pensait peut-être qu’il s’agissait d’un fardeau
qu’il valait mieux qu’il dissimule, ou qu’il devait porter seul. Mais avec l’expérience, Yori avait appris
que les malédictions pouvaient également se révéler bénéfiques, si on y accordait suffisamment
d’attention.

Au-delà, les ombres se rassemblaient dans le ravin de pierre. Le soleil saignait. Bientôt, il
ferait nuit. « La famille Kuni existe depuis plus d’un millier d’années », dit-il. « Elle a compté plus
de daimyō qu’il n’y a eu d’empereurs de la dynastie Hantei. » Il jeta un coup d’œil à son élève.
« Combien d’entre eux ont été corrompus par les forces du mal d’après vous ? »

Tadaka hésita. « Peut-être quatre ou cinq », risqua-t-il finalement. « Mais je suis certain
qu’un très grand nombre parvint à résister. »

« Non, Tadaka-sama. Quasiment tous furent Souillés, au bout du compte. »

Tadaka ne répondit rien. Il se contenta de regarder devant lui.

« Certains ont échappé à ce sort, mais ils sont l’exception qui confirme la règle. Voilà ce qui
attend ceux qui luttent contre les ténèbres. C’est inévitable. Par conséquent, de quel droit les Kuni
pourraient-ils se permettre de juger les autres familles ? »

« Pourquoi me dîtes-vous cela ? » murmura Tadaka. « Ce secret pourrait détruire les Kuni. »

C’était un bon élève. Il écoutait. Il apprenait. Et il enseignait aussi, sans le savoir.

« Peut-être que, par la force des choses, je vous ai considéré comme l’un d’entre nous »,
répondit Yori en mettant le feu à la carcasse. Elle brûlait à ses pieds à mesure que le ciel s’assombrissait.

« Il aurait pu devenir un héros », dit-il tout bas, tout en sachant que le vent porterait ses
paroles aux oreilles de Tadaka. « S’il avait eu le sens des priorités, s’il avait su apprendre de ses
leçons, alors on se souviendrait d’Isawa Akuma comme d’un héros, et non comme d’un scélérat. »
Tadaka contempla l’oni qui se calcinait. Le Maître de la Terre n’offrit aucune réponse.

Asako Tsuki se réveilla en sursaut. Après être resté aussi longtemps sur des rochers, son
cou était raide comme un gourdin. Quand s’était-elle assoupie ? Elle se maudit de son manque de
vigilance. Combien de temps était-elle restée allongée là, sans défense alors que les dangers de
l’Outremonde la menaçaient de toutes parts ?

Elle tourna les yeux vers le ciel avant de se rappeler qu’elle ne pouvait pas se fier
à la position du soleil pour suivre le passage du temps. L’obscurité gagnait et l’astre du jour se
transformait en un éclat de lune, comme un œil grand ouvert qui se fermait peu à peu.

Combien de jours s’étaient écoulés ? Combien de semaines ?

Ses muscles se tendirent en entendant quelque chose entrer avec fracas dans le bosquet
abrité. Mais elle se détendit en voyant la démarche digitigrade de la nouvelle venue et la longue
queue qui pendait au sol derrière elle. Tsuki reconnut le vêtement drapé autour des frêles épaules
de la créature. Il s’agissait de son propre manteau. Elle ne le portait pas correctement, mais plutôt
comme une cape ou un capuchon. La chose était penchée au-dessus d’un panier contenant toutes
sortes de trésors glanés çà et là. Sur son visage triangulaire recouvert de fourrure, des vibrisses
s’agitaient sous des yeux bruns et bulbeux.

« Êtes-vous raveillée ? » articula sa voix à la fois douce et éraillée.

« Réveillée », corrigea Tsuki en se relevant. « Et oui, je le suis à présent. »

Lorsque Tsuki vivait encore du bon côté de la Muraille et qu’elle jouissait d’une paisible
ignorance des choses de l’Outremonde, elle ne connaissait que très peu d’informations concernant
les nezumi : il s’agissait de créatures semblables à des rats qui ne pouvaient pas être Souillées et
qui collectaient de nombreuses choses. Elle avait tiré ces connaissances d’une pile de parchemins
poussiéreux longs comme le bras contenant quelques lignes de texte et l’illustration d’un rongeur
vêtu d’un kimono et se tenant sur ses pattes arrière. Lors des semaines précédentes, elle avait plus
appris sur les nezumi qu’elle n’avait cru pouvoir le faire un jour.

La femme-rat vida sa corbeille. « Nous avons de la chance. J’ai trouvé de la bonne


nourriture aujourd’hui. » Ses vibrisses remuèrent. « C’est le bon mot ? Nourriture ? »

« Oui », répondit Tsuki en époussetant ses robes de soie en loques. « Ton Rokugani est
très bon ».

« Meilleur que votre Nezumi ! »


Tsuki éclata de rire. Elle ne pouvait rien objecter sur ce fait. La nezumi la corrigeait à chacune
de ses tentatives. Elle l’invitait à « libérer le bon musc » avec chaque syllabe. Elle n’aurait jamais pu
imaginer un langage dans lequel les odeurs tenaient lieu d’intonations. Une telle sophistication la
fascinait. Elle y voyait un ensemble des signes et de connaissances cachés derrière un puzzle qu’elle
ne pourrait jamais résoudre.

La femme-rat avait bien meilleure mine qu’auparavant. Quelques semaines plus tôt, elle
l’avait trouvée couverte de sang, une dent aiguisée comme un poignard planté dans son flanc. Tsuki
ne s’était pas attendue à ce qu’elle survive. Lorsqu’elle avait commencé à récupérer, elle s’était
présentée sous le nom de « Pique-dans-les-Boyaux ». Tsuki lui avait trouvé un diminutif Rokugani et
s’adressait à elle par le simple nom de « Pique ». La nezumi en était tellement fière qu’elle gloussait
à chaque fois que Tsuki l’employait.

« En avez-vous fait un autre ? » Les dents de Pique frottaient les unes sur les autres avec
un léger crissement : elle grinçait des dents. Tsuki avait progressivement compris que cela était
équivalent à une forme de rougissement : une réaction involontaire à des émotions spécifiques.

Tsuki savait ce que voulait la nezumi. Elle plongea la main dans la sacoche de fortune que
Pique lui avait donnée et en retira une de ses réalisations quotidiennes : une feuille de papier vierge
pliée à la manière d’un oiseau, les ailes déployées avec une queue en éventail.

Les yeux humides de Pique se mirent à briller. Elle accueillit délicatement l’origami entre ses
mains, comme si elle risquait de le briser en le serrant trop fort.

« Appuie un peu sur sa queue », conseilla Tsuki.

Le mouvement ainsi imprimé se répercuta mécaniquement sur le reste du papier, ce qui fit
bouger un peu les ailes. Tsuki fronça les sourcils ; l’oiseau devait donner l’impression de s’envoler,
mais les pliures n’étaient pas assez nettes.

Pique poussa néanmoins un cri de surprise à ce spectacle. « C’est de la magie », dit-elle en


reprenant son souffle. Ses dents se mirent à grincer de nouveau.

Pique revenait toujours avec quelque brique à braque. Des morceaux de papier déchirés,
de petites boîtes en bois, des pierres à aiguiser abandonnées. Tsuki savait que le papier avait été
récemment confectionné. Parmi les tâches dévolues aux bibliothécaires, la plus importante était
la copie de tous les livres et rouleaux, lesquels étaient constamment soumis aux effets délétères
du temps. Le parchemin résistait plus longtemps, car il était fabriqué à partir de peaux d’animaux.
Les rouleaux de bambous ne venaient qu’en second : ils n’étaient en fin de compte que des nattes
tressées. Mais en séchant, le papier se désagrégeait en seulement quelques générations, ou se
transformait en une pâte informe dans des régions très humides. Comment Pique avait-elle fait pour
trouver du papier de mûrier intact dans l’Outremonde ? Tsuki l’ignorait totalement.

Mais elle éprouvait de la gratitude pour chaque feuille qu’elle ramenait. Elles passaient
le plus clair de leur temps à tenter de contourner la barrière de la langue et marcher toujours plus
au nord, alors cette activité était la seule joie qu’elle parvenait à s’offrir lorsqu’elle n’épiait pas les
ombres qui dansaient autour d’arbustes a priori inoffensifs ou qu’elle ne pensait pas aux larges trous
qui s’épanouissaient dans ses chaussettes.
Ou à la nezumi. Pique semblait insensible à son environnement, dans tous les sens du
terme. Les kansen ne s’intéressaient pas à elle. Elle pouvait même se permettre de boire dans les
eaux saumâtres. Tsuki s’était demandé si la seule présence de la femme-rat à ses côtés avait suffi
à la tenir à l’écart de tout danger. Force était de reconnaître que Pique était la chandelle qui la
préservait des ténèbres.

En d’autres
circonstances, Tsuki aurait aimé
étudier Pique et ses semblables,
pour comprendre comment ils
parvenaient à prospérer dans
une contrée aussi hostile. Elle
désirait ardemment connaître la
culture d’un peuple aussi différent
des humains. Quelles étaient
leurs valeurs ? Qu’avaient-ils
accompli ? Avaient-ils acquis des
connaissances en mathématiques
ou en philosophie ? Avaient-ils
développé quelque forme d’art ?
Étaient-ils nomades ? Avaient-
ils des villages ? Elle voulait
savoir quel genre d’histoires
ils racontaient à leurs petits
et comment ils parvenaient à
préserver leur identité dans cet
endroit où rien ne poussait. Elle
voulait comprendre leur point de
vue, car leur vision du monde pourrait considérablement enrichir sa compréhension des choses.
Un rouleau de parchemin vermoulu ne pouvait pas leur rendre justice. Ils étaient merveilleux. Elle
voulait absolument tout savoir sur eux.

Mais avant cela, il lui faudrait atteindre les Plaines au-delà du Mal et retourner à Rokugan.
Chaque fois que le soleil se levait, en déversant sur la terre sa lumière rouge sang, cette possibilité
semblait s’éloigner un peu plus.

« Ces petites choses continuent de vous divertir ? » demanda Tsuki. Cet origami devait être
le huitième qu’elle lui offrait depuis qu’elles s’étaient rencontrées.

Le visage de Pique s’illumina. Ses yeux sortirent presque de leurs orbites. « Bien sûr ! Ce
sont mes trésors ! »

Le cœur de Tsuki s’emplit de joie. Chez elle, personne n’avait jamais porté attention aux
origamis qu’elle tentait maladroitement de confectionner. En réalité, elle ne parvenait pas à se
souvenir d’une seule fois où quelqu’un l’avait si vivement félicitée.

Des Trésors. Pique s’était sans doute trompé de mot. Ces pliages ne pouvaient tout de
même pas avoir autant de valeur à ses yeux.
Pique attisa le feu de camp pendant que Tsuki retirait le contenu du panier pour préparer
le dîner. Des ingrédients glanés çà et là : des herbes fibreuses qui ressemblaient à des oignons, une
poignée de glands, quelque chose qui ressemblait probablement à un caillou…

Son estomac criait famine. Elle avait perdu beaucoup de poids et flottait de plus en plus
dans son kimono. Certaines nuits, il lui semblait que son ventre était en feu. Mais elle ne pouvait se
permettre de manger autre chose que la nourriture de fortune que lui rapportait Pique. Aucun autre
aliment ne pouvait avoir sa confiance.

D’habitude, les oignons se révélaient plutôt bons. « Il y a de belles trouvailles aujourd’hui. »

« J’ai pris des risques pour les récupérer. Je me suis presque fait attraper ! »

« Bakemono ? » demanda Tsuki. Elle espérait qu’il ne s’agissait de rien de plus gros. Elle
ne pouvait pas envisager de vivre ici sans son alliée solitaire, et elles auraient été incapables de se
battre contre quoi que ce soit de plus imposant qu’un gobelin. »

« Un oni, je pense. Mais j’ai eu de la chance : les zakseker s’en sont débarrassé. Il ne m’a
même pas remarquée. »

« Zakseker ? » Un mot nezumi. Pique ne l’avait jamais prononcé auparavant.

« Zakseker. Ils avaient des vêtements un peu comme les vôtres. »

Des vêtements comme les miens ?

Elle fit tomber un champignon de sa main .

« Étaient-il humains ? » demanda-t-elle doucement. « Comme moi ? »

Elle savait qu’elle ne devait pas trop espérer. Elles étaient trop loin de la Muraille. Même
les patrouilles du Crabe comme celle qui avait cessé de la poursuivre ne s’aventuraient jamais si
profondément dans l’Outremonde.

Mais à ce moment une petite étincelle dansait dans sa poitrine. Une maigre flamme qu’elle
avait désespérément besoin de garder allumée pour s’éclairer à sa faible lumière.

« C’étaient des zakseker », insista Pique. Ensuite, elle hocha la tête. « Mais oui, des
humains. »

Elle aurait pu embrasser la femme-rat. Des humains. Des individus de son espèce. Elle
s’effondra à genoux.

Louées soient les Fortunes ! Que chacune d’elles soit dix mille fois remerciée !

Des êtres humains. Ils pourraient sans doute lui fournir de la nourriture, un abri…
Et une cellule non loin de la Muraille s’il s’agissait de Crabes. C’étaient probablement des
Crabes, n’est-ce pas ? Qui d’autres pourraient-ils être ?

Le cas échéant, elle devrait tout de même prendre le risque de les retrouver. Ils étaient sa
seule chance. Elle pourrait tenter de s’expliquer, tenter de les raisonner. Elle devait essayer.

« Peux-tu me mener à eux ? » demanda-t-elle. « Pique, dans quelle direction sont-ils


partis ? »

Le visage d’un nezumi n’était pas semblable à celui d’un humain. Leurs expressions faciales
étaient différentes. Leur anatomie ne permettait pas de faire de comparaisons. Mais au cours des
semaines qu’elle avait passées avec Pique, Tsuki avait appris à lire son langage corporel. Elle voyait
bien que Pique hésitait. Elle ne lui disait pas toute la vérité.

« Trop dangereux », répondit finalement la nezumi. Elle continuait d’attiser le feu.


« Oubliez ce que j’ai dit. » Une fenêtre s’était ouverte, mais Tsuki avait l’impression qu’elle venait
de se refermer juste aussi soudainement. La petite flamme dans sa poitrine commençait à vaciller.
Chaque instant qui passait les éloignait peut-être un peu plus. Elle devait absolument les retrouver !
Ils étaient sa seule chance.

Pique tremblait. Une odeur de moisi se répandait depuis sa fourrure emmêlée. Était-ce
de la peur ? Elle avait traversé maints dangers d’un pas sûr, sans hésiter. Pouvait-elle réellement
craindre quelques humains ?

« Ce sont des morts-vivants ? » Elle chercha ses mots. « Non-vivants » ?

« Oubliez-les. » Elle continua de remuer les braises. « Les Zakseker sont dangereux. Ne
pas faire confiance. Ne pas prendre de risques. »

Elle me protège, réalisa Tsuki. Pique pensait probablement que Tsuki avait perdu la raison.

Et comment ne pas la comprendre ? Cela pouvait très bien être un piège. L’Outremonde
savait comment manipuler le cœur des êtres humains. Il percevait leurs désirs et s’en servait pour
les piéger. Même si les zakseker avaient l’air d’hommes, cela ne signifiait pas qu’ils avaient été là.
Et, en toute logique, dans ces environs, il n’y avait jamais personne. Se méfier de l’Outremonde,
éviter tout contact : voilà comment les nezumi avaient survécu. Tsuki le savait. Cette leçon avait
même failli lui coûter la vie.

Mais cette petite flamme qui brûlait en elle, n’était-elle pas devenue un feu de joie ?
Comment ne pas croire qu’il s’agissait là de sa dernière et unique chance ? Étant donné les
circonstances, n’avait-elle pas le droit de s’éloigner un peu de la raison ?

Tsuki s’assit directement en face de la nezumi. Elle ne bougea pas avant que Pique ne lève
son museau de rongeur et que leurs regards se croisent.

« Pique, je vais mourir si je reste ici. Cet endroit prendra plus que ma vie. Il m’arrachera
aussi mon âme. S’il y a des humains non loin d’ici qui peuvent me ramener… »
Sa petite étude avec la fenêtre qui donnait vue sur la mer.

Son petit bureau avec le livre non terminé sur l’étagère. L’odeur salée des rouleaux de
parchemins et de l'océan. Chez elle. Tout disparaissait.

Elle laissa ses larmes couler librement. Devant son peuple, un tel spectacle l’aurait couverte
de honte. Mais pleurer était une des rares choses que les humains et les nezumi avaient en commun.
Pour être certaine d’être comprise sans aucun doute, elle devait lui montrer sa détresse. « Pique, s’il
te plaît. Il s’agit peut-être de ma seule chance de rentrer chez moi. »

« Chez moi », murmura Pique. Une expression Rokugani.

Ensuite, doucement, elle hocha la tête. « D’accord ».

Derrière un nouveau flot de larmes, un large sourire s’épanouit sur le visage de Tsuki. Chez
elle. Elle retournait chez elle.

« Je vous conduirai jusqu’à eux. » Pique serra l’épaule de Tsuki. Ses yeux trahissaient son
sentiment d’urgence. « Mais soyez prête à courir. »

Les zakseker, comme Pique les appelaient, avaient installé leur propre camp non loin du
bord d’un ravin. Ils l’avaient entouré d’un rideau de chanvre, un jinmaku, sur lequel était brodé
le mon du Clan du Crabe. De cette façon, ils se protégeaient du vent et de la poussière tout en
dissimulant leur nombre. Astucieux.

Toute une équipe d’éclaireurs se tenait probablement en embuscade derrière cette


étoffe. On la recherchait peut-être encore. Seulement quelques semaines auparavant, elle s’était
cachée pour leur échapper. Se jeter dans la gueule du loup serait vraiment stupide. Ils la tueraient
certainement, n’est-ce pas ? À quel point était-elle désespérée ?

Suffisamment, décida-t-elle en se redressant.

Pique la força à rester à couvert, derrière les broussailles. « Mauvaise idée. Attendez. Flairez
leur odeur. »

« Je ne peux pas. » Elle devait parvenir à lui faire comprendre. « Je dois prendre le risque. »

« Pourquoi ? » insista Pique. « Je peux toujours vous guider jusqu’au nord pour contourner
le Mur. Cela ne durera qu’un mois ou deux. »

« Je ne tiendrai pas un mois ou deux. »

Pique piaula en lui serrant la main. « Et je ne peux pas vous protéger d’eux. »
La culpabilité lui creva le cœur. Sans cette nezumi, elle n’aurait jamais pu survivre aussi
longtemps. Pique lui avait sauvé la vie. Tsuki pouvait-elle réellement s’enfuir comme si de rien
n’était ?

Personne n’y pouvait quoi que ce soit. Aucune d’elle ne pouvait exister dans le monde de
l’autre. Elle émergea du buisson en ravalant ses regrets. « Alors, vas-t’en avant qu’ils ne te voient. »

Une pause interminable suivit. « Au revoir », murmura Pique. « Que votre vie soit longue. »

Sa queue fouetta les broussailles. Elle était partie. Tsuki cligna des yeux pour chasser ses
larmes. Ses paroles avaient été plus mordantes qu’elles ne l’avaient souhaité. Mais il était trop tard
pour les retirer à présent.

Tsuki parcourut la distance à découvert. Son regard resta fixé sur les rideaux à chaque
instant. Sa langue vint humidifier ses lèvres sèches. « Il y a quelqu’un ? » appela-t-elle d’une voix
tremblante.

Le mon du Crabe flottait au vent sur l’étoffe.

« Je suis Asako Tsuki », continua-t-eIle en risquant un pas de plus dans l’inconnu. « Je suis
perdue. Mais je ne suis pas Souillée. Puis-je approcher ? »

Rien.

Et puis, les rideaux


s’ouvrirent. Elle n’en croyait
pas ses yeux. Elle était certaine,
alors, qu’il ne pouvait s’agir que
d’une illusion de l’Outremonde.
Comment expliquer autrement
la présence de l’homme qui
venait de sortir du jinmaku ? Le
vent faisait onduler les robes
orange et rouge du Phénix
autour de ses larges épaules
et un bout de tissu inhabituel
sous son chapeau en forme de
cône masquait le bas de son
visage. Les symboles héraldiques
qu’il arborait marquaient son
appartenance à la famille Isawa,
mais il portait également les
armoiries argentées du Maître
de la Terre.

Impossible. Tellement évident que c’en était ridicule. Un piège naïf, à peine déguisé et —
« la nièce d’Azunami » ? Il pencha la tête légèrement sur le côté. Un chapelet de perles de jade brillait
autour de son bras imposant. « Que fait une bibliothécaire au beau milieu de l’Outremonde ? »
Ce n’était pas une illusion. C’était lui. Isawa Tadaka, le Maître de la Terre.

Son rire se déversa comme une rivière, si fort qu’elle en tremblait, manquant de tomber
à genoux. Même lorsqu’il la fixa des yeux, en la regardant comme si elle avait perdu l’esprit, elle
continua d’exprimer sa joie jusqu’à ce que des larmes lui coulent du visage. Elle comprenait à présent
pourquoi les Fortunes l’avaient guidée jusqu’ici.

« Maître vénéré, je vous ai enfin trouvé ! Je… »

Elle était très sale. Elle se frotta la joue et découvrit que sa main était maculée de boue. Le
Maître de la Terre était là après tout ce temps, mais dans quel état se présentait-elle devant lui !

Tadaka garda ses distances. Il l’observait avec des yeux calmes et inquisiteurs. Elle essaya de
ne pas remarquer que cela le rendait séduisant.

Et bien sûr, elle ne pouvait faire autrement que se donner en spectacle comme une mule
crasseuse.

« Isawa-sama, excusez ma… euh… mon apparence. Je porte une missive pour vous depuis
votre terre natale. » Son sourcil se fronça. « Tsuki-san, je dois avouer que vous êtes peut-être la
messagère la plus dévouée que j’ai jamais rencontrée. »

Elle lui offrit un sourire fatigué. « En effet, Maître vénéré. »

Les rideaux s’ouvrirent. Un homme sortit de la tente.

Tsuki se figea à la vue du maquillage Kabuki qui couvrait son visage, de ses longues
moustaches et du symbole de la famille Kuni cousu sur ses robes. « Une invitée inattendue »,
remarqua-t-il en haussant un sourcil.

Les parchemins mahō qu’elle avait trouvés dans son laboratoire. Le couteau de tsukai. Les
expériences. Tout lui revint en un instant.

Et maintenant, il était là.

« Kuni-sama », parvint-elle à articuler, en se rappelant de s’incliner. « Quel… honneur


inattendu ». C’était la présence de Kuni Yori qui avait effrayé Pique. N’importe quel nezumi aurait
reconnu un mahō-tsukai en le voyant. Était-ce cela que signifiait le mot « zakseker » ?

Elle respira calmement en se redressant. Elle ne pouvait pas dire ce qu’elle savait. Attends
d’être seule avec Tadaka, pensa-t-elle. Ensuite, elle lui révèlerait qui était réellement Kuni Yori.

« Vous dîtes que vous étiez porteuse d’une missive ? » demanda Tadaka.

Sa main s’était dirigée vers son obi. Il n’y avait rien. Elle n’avait plus le rouleau, n’est-ce
pas ? « Ah, il semble que… je l’ai égarée, mais je connais son contenu. Shiba Tsukune-ue vous l’avait
adressé. »
« Tsukune ? » La surprise se lisait dans les yeux de Tadaka. « Que s’est-il passé ? »

Elle jeta un bref regard à Yori. Il les observait. Avec beaucoup d’attention.

« Vous pouvez parler librement », dit Tadaka. « Le daimyō Kuni est un ami des Isawa. »

Elle se mordit la langue. Tadaka ne le savait pas ? Comment pouvait-il l’ignorer ? Le Maître
de la Terre était-il incapable de sentir un déséquilibre en la présence d’un mahō-tsukai ?

Elle s’éclaircit la gorge. « Cela concerne Maître Ujina. Il n’est plus. »

Tadaka observa le silence pendant un long moment. « Comment ? » parvint-il finalement


à prononcer.

« Disparu. Nous n’en savons pas plus. » Elle baissa la tête. « Je suis désolée, Tadaka-sama. »

« Mes condoléances, » dit Yori.

Le Maître du Vide était le père de Tadaka. Avant toutes ces mésaventures, Tsuki s’était
entraînée à lui annoncer cette nouvelle, en parlant à son propre reflet. Mais à cet instant, épuisée
comme elle l’était, elle se demandait si elle n’avait pas manqué de tact. Mais sa fatigue ne lui
permettait pas de ressentir d’autres émotions. Ils restèrent immobiles, en silence.

« Le conseil doit donc choisir un autre Maître », déduisit Tadaka d’une voix à peine
tremblante. « Ma sœur le remplacera. Sa connexion avec le Vide est plus importante encore que
n’était la sienne. »

« Elle a refusé. En tant qu’Akodo, elle ne peut servir deux clans. » Tsuki s’inclina très bas.
« Le conseil se réunira bientôt. Ils ont besoin du Maître de la Terre. » Elle fit une pause pour se
rappeler des mots précis qu’elle devait utiliser. « Tsukune-ue a besoin de vous. »

Il eut un moment de faiblesse en entendant ce nom. Tsuki fit semblant de ne pas le


remarquer.

Les rumeurs étaient donc vraies, alors.

« Tadaka-sama », intervint Yori, « si votre clan a besoin de vous, alors vous devriez peut-
être retourner auprès de lui. »

Et te laisser le champ libre pour quel genre de besogne, sorcier ? Tsuki retint sa langue.

Tadaka lui tourna le dos. « Elle n’a pas besoin de moi. », murmura-t-il. « Plus maintenant. »
Il se redressa, avec une détermination nouvelle. « Cela est plus important. Le conseil peut choisir
sans moi. » Il fit de nouveau face à Tsuki. « Dîtes leur... »

« Non », dit-elle tout bas. « Vous retournez chez vous. »



Un silence étourdissant s’abattit. Elle-même fut surprise de sa réaction. Et pourtant, elle se
sentait bien d’avoir prononcé ces mots. Aussi étonnant que cela pouvait l’être.

Yori lança un regard à Tadaka. « Les Phénix sont-ils si désobéissants d’habitude ? »

Elle essaya de ne pas lui jeter un regard noir, mais elle sentait qu’elle ne pourrait se retenir
très longtemps. Elle ne pouvait pas se forcer à respecter un homme qui pactisait avec le mal tout en
se donnant des airs de champion de la vertu.

Tadaka respira profondément et se montra patient. « Je sais que vous êtes stressée, Tsuki-
san. Mais n’oubliez pas à qui vous vous adressez. »

Un rappel à l’ordre. Une menace. Elle avait fait preuve d’insubordination. Il était le Maître
de la Terre, et elle, un simple grain de poussière.

Mais elle réalisa que cela lui importait peu.

« Punissez-moi », dit-elle. « J’accepte d’être jugée pour le ton que je viens d’employer. Mais
je ne partirai pas sans vous. » Elle se tint droite devant lui, et leva les yeux vers la silhouette qui la
dominait. « J’ai enduré bien des épreuves pour vous trouver, Maître vénéré. J’ai risqué mon âme
elle-même. Un homme de bien a donné sa vie. » Shiba Koetsu. Son malheureux yōjimbō. Sa gorge se
serrait, mais elle ne laissa pas son chagrin l’arrêter. « J’ai douté des Fortunes après qu’elles m’aient
conduite dans cet endroit maudit. Mais je ne doute plus. Elles m’ont menée à vous. Comment
pourrais-je revenir bredouille sur les terres du Phénix ? Si je déçois Tsukune-ue, je n’oserai plus
jamais me présenter devant elle. »

Il hésitait. Elle pouvait voir qu’il pesait chaque décision, envisageait chaque chemin.

« Une question, Asako-san », intervint Yori. « Dîtes-nous précisément comment vous êtes
parvenue à faire une si longue route loin de la Muraille ? Les Crabes ne permettent que rarement de
pénétrer en ces lieux. Vous devez sans doute posséder un document attestant de la bénédiction de
mon clan ? »

Elle se sentait comme une souris dans les griffes d’un tigre.

« Donc », poursuivit-il devant son mutisme, « vous êtes venue seule, si loin de la Muraille,
sans aucun laissez-passer ni aucune preuve de ce “message” que vous prétendez destiné à Tadaka.
Pourquoi devrait-il vous croire ? »

Yori était un daimyō. L’ami de Tadaka. Elle n'était… personne. Sa parole avait plus de valeur
que la sienne. Et les relations entre Asako et Isawa étaient pour le moins difficiles. Même en cet
instant, elle pouvait lire la suspicion faire effraction dans les yeux Tadaka, comme une idée se
transmettant sans mot dire entre un maître et son disciple.

Elle tenta de garder son calme. « Maître vénéré, Je suis une Phénix. Nous servons tous les
deux le conseil. En ignorant mon message, vous jetteriez le déshonneur sur vous et moi. »


S’il vous plaît, faites-moi
confiance, pensa-t-elle en essayant
de parler avec les yeux. Je ne mens
pas ! Yori n’est pas ce qu’il semble
être ! Vous voyagez avec une
vipère !

« Mais je connais une


autre raison qui pourrait expliquer
votre présence, seule, ici même »,
dit Yori, sa main s’approchant
doucement de son wakizashi.

Quelque chose sortit des


buissons, si soudainement qu’elle
était impossible à suivre, plus
rapidement que Tsuki n'aurait pu le
croire. Mais elle savait exactement
de qui il s’agissait, dès l’instant où
elle l’avait entendu, au moment
même où elle avait aperçu la
longue queue de rat.

« Laisse-la tranquille ! », couina Pique en plantant ses incisives dans le bras de Yori.

Tadaka s’avança brutalement. Tsuki s’effondra au sol. Des mots s’échappèrent des lèvres de
Tadaka. Elle sentit de l’encens, une offrande.

De la lumière de jade fusait de ses mains. Les rayons couvrirent la clairière d’un brillant vert
émeraude qui se déversa sur la femme-rat et le shugenja. Elle entendit à peine le cri de Yori.

Tadaka avait dû confondre Pique avec un gobelin ou un bakemono quelconque. Par chance,
le Souffle du Dragon de Jade ne devait théoriquement faire aucun mal à la nezumi.

Tsuki se remettait difficilement sur pieds lorsque la lumière mourut. Tadaka avait saisi ses
deux étuis à parchemin en céramique comme des hanbō, un dans chaque main, pour se préparer à
combattre la nezumi. À grand renfort de coups de pied, Pique se dégagea pour s’éloigner de Yori. Ce
dernier s’agitait au sol, à quatre pattes, en grognant et sifflant bruyamment. Tadaka leva ses armes.

« C’est une amie ! » cria Tsuki.

Mais Tadaka avait retenu sa main dès qu’il avait réalisé la nature de Pique. Il baissa les bras.
Les nezumi étaient leurs alliés contre l’Outremonde. Il aurait été vain de l’attaquer.

Mais Pique était toujours en train de cracher. Elle tentait de paraître plus volumineuse
qu’elle ne l’était derrière son manteau et faisait face au daimyō Kuni dans une position qui était à
mi-chemin entre la fuite et l’agression. Elle émit un grognement. « Zakseker ».

Yori râla en se relevant. Il était brûlé là où la lumière de jade l’avait touché.

Sans un mot, d’un coup sec, il retira l’amulette de pierre verte qu’il portait autour du cou et
la serra dans ses mains. Il murmura quelque chose, les yeux fermés en essayant de ressentir quelque
chose. Lorsqu’il les rouvrit, il avait l’air vaincu. Plus petit. Il jeta l’objet en jade aux pieds de Tsuki.
« Un cadeau », dit-il. « Elle ne me fera plus aucun bien. »

Tadaka écarquilla les yeux lorsque Yori lui sourit d’un air narquois. « Je vous avais prévenu,
mon élève, que ce destin devait un jour être le mien. »

Illustrations :

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