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LECTURES CL§

Vin$ mille lieues


sous les mers
JULES VERNE

NIVEAU
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1
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A1 til§RNATt*l!Át
Julns VpRNIn nait Ie 8 féwier
1828 á Nantes. Vingt ans plus
tard, il s'installe á Paris pour
commencer ses études de droit et suiwe la tradition
familiale : son pére est en effet un célébre avocat. Mais
Jules Verne n'a qu'une idée en téte : écrire.
II commence par le théátre et, gráce á sa rencontre
avec Alexandre Dumas, sa comédie les Pai,lles rom-
pues peut étre jouée.
Tout en continuant á travailler pour Ie théátre,
Jules Verne écrit ses premiers romans. En 1862, il
publie Ci,nq semai,nes en bal1on. Cette Guvre
connait immédiatement un grand succés.
Encouragé par ces résultats, Jules Verne ne cesse
aiors de travailler. Les Auentures du capi,ta,ine
Hattercs,s (1864), Les EnJants du capi,tai,ne Grant
(1867-1868), Vi,ngt mi,tle Lieues sous Les rners
(1870), Le Tour du monde en quatre-ui,ngts jours
(1873), U'n capitai,ne de qui,nze ans (1878), Dezt;r
ans de uacürLces (1888) et bien d'autres romans sont
publiés pour Ia grande joie de ses lecteurs.
Il meurt á Amiens le 24 mars 1905.
@ CLE International, 2017
ISBN: 978 2Og 031758 9

i
N' de projet | 10243087 - Dép6t légal : mars 201 7-
Imprimé en France en janvier 2018 par Ia Nouv-elle Imprimerie Laballery - N" 7L2221 o
-¿)-
C}IAPITRE I
Dans Vi,ngt mi,lle Li,eues sous Les m,ers, Jules
Verne nous fait voyager dans le monde mystérieux et
fascinant des océans. Tout au long du roman, I'auteur
nous fait découwir une faune' et une flore2 á Ia fois @
PISTE 1
extraordinaires et fantastiques.
Mais ce roman ne serait pas complet sans son per-
sonnage mythique, le capitaine Nemo, inventeur
génial du sous-marn Le Nauti,lus, personnage que J\ Iour soMMES sN 1866. Depuis quelque temps,
Jules Verne nous permet de retrouver dans un autre
/ \ / un événement étrange se produit ; un phé-
de ces romans : L'fle mgstérieuse.
I Y no^¿ne inexpliqué qu'on n'est pas prés
d'oublier.
Limage du capitaine Nemo, cet homme á la fois
En effet, plusieurs navires* ont rencontré, en mer,
humanitaire et misanthropes, marque en effet chaque
<< une chose énorme », beaucoup plus grande et rapi-
page du roman ; c'est á travers lui que les secrets de Ia
mer nous sont dévoilés et, tout comme Aronnax, le de qu'une baleine*. De quoi s'agit-il ? Personne ne Ie
narrateur de I'histoire, nous avons souvent Ie senti- sait. Mais les langues vont bon trainr et bientót on ne
ment, au cours de notre lecture, d'étre « prisonnier » parle plus que de ce monstre marin.
de Nemo et de son Nauti,lus. Le temps passe et le " monstre " continue á faire
de temps en temps son apparition.
Le 13 awil 1867, un naüre, du nom de Scot'i,a,ren-
contre aussi le << monstre >, mais, en plus, il est heur-
té par iui ce qui lui cause de nombreux dégáts.
Laffaire devient inquiétante et on décide de
réagir.
Une solution est proposée par l'Amérique : il faut
se débarrasser du monstre. On fait donc les prépara-
1. Faune : a¡rimaux de Ia mer. tifs d'une expédition destinée á Ie poursuiwe.
2. Flore : plantes de la mer.
3. Misanthrope : personne qui n'aime pas la compagnie des autres. Peu avant, alors que j'étais á New York, comme j'ai
déjá publié un livre intitulé Les Mystéres des fonds
[,es mots ou expressions suivis dans Ie texte sont
expliqués dans le Vocabulaire, 59.
1. Les langues vont bon train: les gens parlent beaucoup.

- l, :r- -5-
CHAPITRE II
sous-mnrins, Le New York Herald m'a demandé
d'écrire un article pour donner mon opinion sur le
probléme. @
J'ai déjá examiné plusieurs hypothéses sur cet PISTE 2

événement et j'en suis arrivé á la conclusion qu'il


s'agit d'un narval* géant. C'est ce que j'ai expliqué
dans mon article.
T J6l ouanr D'HEURE epnEs, nous quittons I'h6tel et
Tlois heures avant Ie départ de l'Abraham , / ,,orm nous rendons sur le bateau. Je demande
Li,ncoln,le bateau chargé de l'expédition, je regois L) aussitót á voir le commandant Farragut. Un
chez moi la lettre suivante : des marins* me conduit sur Ie pont* oü je me trouve
Monsieur Arontnen, professeur au Muséum d,e en présence d'un homme á I'air aimable qui me tend la
Pari,s main.
Hótel d,e la 5' auenlle, New York - Monsieur Pierre Arormax ? me dit-il.
- Lui-méme. Le commandant Farragut ?
Monsi,eur, - En personne. Soyez le bienvenu, monsieur le pro-
Si, uous uoulez uous joi,ndre d, t'erpéddtion d,e fesseur. Votre cabine vous attend.
lAbraham Lincolr¡ nou; serons heureu,r que la Je salue le commandant et vais m'installer dans ma
France so,tt représentée d,ans cette entrepri,se. Le cabine que je trouve parfaite.
commn;ndant* Farragut a une cab,ine* d, aotre d,is- - Nous serons bien ici, dis-je á Conseil.
posi,ti,on.
- Tout á fait, monsieur, me répond celui-ci.
Tbés cordi,alement, je remonte
Je laisse Conseil défaire nos bagages et
J.B. Hobson, sur le pont pour suiwe les préparatifs de départ du
' Secrétaire de la Marine* bateau.
J'accepte immédiatement l'offre du gouvernement Le commandant Farragut est un bon marin, digne
américain. du naüre qu'il commande.
Je fais tout de suite mes bagages avec l'aide de En ce qui concerne Ie <. monstre >>, aucun doute
mon fldéle domestique, Conseil, un homme fort et pour lui. C'est un cétacé* et il va se battre contre lui
calme d'une trentaine d'anqées, dix ans plus jeune pour en déIiwer les mers. Il a donc emporté dans son
que moi. .i .r.
:
;
bateau des appareils destinés á pécher le gigantesque

6 -7-

,-:'
cétacé : harponsl, fléches, balles explosives, etc. Tous Pour tout dte, on ne üt plus á bord ! Vingt fois par
Ies moyens de destruction sont tá. Mais il y a mieux jour, on examine la mer pourvoir s'il apparait. On croit
encore. Il y a Ned Land, Ie roi des harponneurs2. le voir mais en vain.
Ned Land est un Canadien, du Québec, d'enüron Cette recherche inutile se produit pendant des
quarante ans, grand, fort et qui est le meilleur dans mois. Le découragementr s'empare de tous.
son métier. Le 2 novembre, le commandant Farragut prend
Le commandant Farragut I'a engagé pour son une décision. Si dans trois jours Ie monstre n'est pas
adresse et son sang-froid3. Il faut étre une baleine apparu,le navire reprendra le chemin du retour.
bien habile pour échapper á son coup de harpon. Deux jours passent.
Au bout de quelques jours, je peux dire que, Ned Demain, á midi, expire le délai fixé par le comman-
et moi, sans doute parce que nous parlons tous les dant.
deux le frangais, sorrunes devenus amis. J'ai beaucoup La nuit approche. De gros nuages cachent la lune.
de plaisir á écouter ses récits de péche en mer. Je suis appuyé á I'avant sur le bastingage* de tribords.
Le 30 juin, c'est-á-dire trois semaines aprés notre Conseil, posté prés de moi, regarde devant lui.
départ, Ie navire se trouve á la hauteur du cap Blanc. - Que de temps perdu, lui dis-je, que d'émotions
Jusque-lá, le voyage s'est fait sans aucun incident. inutiles !

Nous rencontrons des bateaux de péche américains Vous avez raison, monsieur, mais...
-
qui nous apprennent qu'il n'y a aucune nouvelle du Conseil ne peut finir sa phrase. Au müeu du silence
narval. général, on entend la voix de Ned Land qui s'écrie :
Nous poursuivons notre route. Le temps est favo- - Le voilá ! Devant nous !
rable et le voyage se fait dans les meilleures condi- A ce cri, nous nous précipitons tous vers Ie har-
tions. ponneur.
Le 20 juillet, le navire traverse Ie tropique du Lobscurité est profonde et je me demande com-
Cancer et se dirige vers les mers de Chine. C'est 1á que ment Ned a pu le voir. Mais il ne s'est pas trompé et
Ie cétacé est apparu pour la derniére fois ! tous, nous apercevons l'objet qu'il indique de la main.
A environ 500 métres du navire, la mer semble étre
L. Harpon : i¡rstrument qui a I,a foq¡e d'une longue fléche.
2. Harponneur: peñonne qui péch ávec un harpon. 1. Découragement: sentiment de tristesse que I'on éprouve quand
3. Sang-froid: calme ., : on perd coura€ie.
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-8 -9-
illuminée par-dessous. C'est le monstre qui, immergé á attend tous Ie lever du jour en faisant les préparatifs du
quelques métres de la surface des eaux, projette cet combat.
éclat intense mais inexplicable. A fruit heures, il fait enfin jour. On examine I'horizon
mais on ne voit rien.
- Ce n'est qu'un groupe de molécules phosphores- La journée se passe sans autre nouvelle.
centesl, s'écrie r¡n membre de l'équipage*.
En-fin,le soir venu, Ned s'écrie tout á coup :
- Non, monsieur, dis-je. Cet éciat est éIectrique...
D'ailleurs, voyez, voyez ! Il se déplace ! Il bouge en - Il est lá, á bábord*, par derriére !
avant, en arriére ! Il s'éIance sur nous !
Nous regardons tous vers Ie point indiqué. Lá, á
plusieurs métres de nous, la clarté électrique de la
- Machine en arriére ! s'écrie Ie commandant veille est de nouveau apparue et nous distinguons un
Farragut.
Les ordres sont immédiatement exécutés et Ie navi- corps noir qui émerge' d'un métre au-dessus de I'eau.
re décrit un demi-cercle et s'éloigne du point lumineux. - Tout le monde est prét ? demande le comman-
Mais je vois alors l'étrange animal se rapprocher de lui dant. Alors, á I'attaque !
á une grande vitesse.
Llheure de la lutte a sonné.
Le navire continue de fuir mais n'attaque pas.Éton- Le navire se dirige sans bruit vers l'animal. On ne
né, j'en fais la remarque au commandant. respire plus á bord. Un silence profond régne sui le
pont. Ned Land, accroché d'une main au bastingage,
- Monsieur Aronrtax, me répond-il, je préfére Iéve son terrible harpon de I'autre. Tout á coup, son
attendre le jour pour attaquer car nous sommes face á
un puissant ermemi. bras se détend et le harpon est lancé. J'entends Ie
choc sonore de I'arme qui üent de toucher un corps
- Vous n'avez pas de doute sur Ia nature de I'animal,
commandant ? dur.
La cLarté électrique s'éteint alors et deux énormes
- Non, monsieur. C'est r¡n narval gigantesque mais jets d'eau tombent üolemment sur Ie pont du navire,
aussi un narval électrique.
Vers minuit, l'animal disparait. Est-ce qu'il s'est faisant tomber les hommes.
enfui ? Un terrible choc se produit et, soudain, je suis pré-
Cependant, personne ne pense á dormir et on cipité dans la mer.
Je suis d'abord entrairé á une certaine profondeur

1. Phosphorescent : qui dolne de- la lumiére dans l'obscurité.


l. Émerger: sortir de I'eau.

-10- - 11 -
mais, comme je suis assez bon nageur, je parviens á mais aucune barque* á la mer.
remonter á Ia surface. Conseil crie de temps en temps :

Je regarde autour de moi. La nuit est trés obscure. -Anous!Anous!


J'apergois l'Abrohnm Li,ncoln qui s'éloigne. Je me Tout á coup, j'ai l'impression qu'un cri répond á
mets á crier : celui de Conseil.
-Amoi!Amoi! - As-tu entendu ? dis-je á Conseil.
Mais en vain. Mes vétements collent á mon corps et -Oui!Oui!
paralysent mes mouvements. Je coule. Soudain, mes Et Conseil pousse á nouveau un cri désespéré.
vétements sont saisis par une main forte et je me sens Cette fois, pas d'erreur possible ! Une voix humai-
ramené á la surface. J'entends une voix familiére me ne répond á la nótre.
dire: Conseil s'appuie sur mon épaule et se dresse en
- Si monsieur veut bien s'appuyer sur mon épaule, dehors de I'eau.
il nagera beaucoup plus facilement. - Qu'as-tu vu ?

Je saisis d'une main Ie bras de mon fldéle Conseil. - J'ai vu... murmure-t-i1... mais ne parlons pas, gar-

- Toi ! dis-je, toi ! Le choc t'a ptécipité dans I'eau en dons toutes nos forces !...
méme temps que moi ? Et nous nous remettons á nager.
- Non, monsieur, mais comme je suis á votre servi- Soudain, je heurte un corps dur et je m'évanouis.
ce, je vous ai suivi. Peu aprés, je reviens á moi.
- Merci, mon ami et Ie navire ? - Conseil ! dis-je.
- Quand vous étes tombé á la mer, le gouvernail* a C'est alors que j'apergois un visage qui n'est pas
été brisé par les dents du monstre ; Ie bateau ne celui de Conseil mais que je reconnais aussitót.
répond plus. -Ned!
- Albrs, nous sofilmes perdus ! dis-je' - En personne, monsieur.
Nous continuons á nager. Comme nos vétements - Vous avez aussi été précipité á,Ia mer ?
nous génent, nous nous aidons á retirer le plus lourd - Od, monsieur, mais j'ai eu plus de chance que
et nous reprenons notre nage. vous, car j'ai pu assez vite me réfugier sur un ilot flot-
Vers une heure du matin, je me sens épuisé. tant.
Conseil doit me soutenir. ".* - - Un ilot ?
La lune se léve ulors au Ioin le naüre - Oui, ou pour mieux dire, sur notre énorme nar-
t- "ti'ubergois
-t2- -13-
i¡--
val. Et je sais pourquoi mon harpon n'a pas pu Ie bles-
ser : c'est parce qu'il est en acier.
Je suis trés surpris d'entendre ce que dit Ie
Canadien.
Je me souviens alors d'avoir heurté un corps dur
et je me rends enfin compte que je suis couché sur
ce corps dur. Je le touche et le doute n'est plus pos-
sible. Lianimal, Ie monstre a été faít par Ia main de
I'homme. Nous sommes sur Ie dos d'un bateau sous-
marin !
- Mais alors, üs-je á Ned, cet appareil doit avoir un
mécanisme pour se déplacer et des hommes pour Ie
manGuwer.
- C'est éüdent, répond Ned. Pourtant, voilá trois
heures que je süs ici et il ne s'est rien passé.
- Ce bateau n'a Pas marché ?
- Non, monsieur Aronnax. II ne bouge pas.
C'est alors qu'on entend un bruit venant du bateau
et il se met en mouvement. Nous avons juste le temps
de nous accrocher á sa partie supérieure qui sort Iégé-
rement de I'eau.
- Tant qu'il navigue horizontalement, dit Ned, tout
va bien. Mais s'il Plonge, alors...
Je comprends qu'il devient urgent de nous mettre
en contact avec les hommes de cette machine' Je
cherche un panneaur, tme ouverture pour pouvoir
entrer. Mais en vain. D'autre part, Ia lune vient de dis- i
l. Pa¡rneau : surface planq (porte) que l'on peut ouwir ou fermer'

-t4-
CHAPITRE III
paraítre et nous soflunes plongés dans une profonde
obscurité.
Il est maintenant impossible d'étre sauvés par le @
PISTE 3
commandant de l'Abraham Li'ncoÜn. ll nous faut
attendre Ia possibüté de nous mettre en contact avec
les hommes de I'étrange machine.
Vers quatre heures du matin, I'appareil se met á üs eun LE pANNEAU sE REFERME sIrR MoI, on nous

avancer plus vite. Nous nous accrochons encore plus conduit dans une cabine que I'on referme aus-
fortement pour ne pas tomber darts I'eau. sitót á clé, nous laissant tous Ies trois seuls.
Enfin, cette longue nuit se termine. Le jour parait. Avec les hommes qui nous ont conduits jusque-lá, nous
Je commence á examiner I'appareil quand je sens n'avons pas échangé un seul mot.
qu'il commence á s'enfoncer darts I'eau. Ned est en colére.
Ned se met á frapper dessus en appelant au - Voilá des peronnes peu aimables et qui ne savent
pas accueillir les gens ! Nous traiter de cette fagon !
secours.
Soudain, un bruit se fait entendre, un panneau se - Calmez-vous, lui répond Conseil, et attendons
souléve et un homme apparait. En nous voyant, il patiemment la suite des événements.
pousse un cri et rentre dans la machine. Une demi-heure plus tard, on entend un bruit de
.Quelques instants plus tard, huit hommes appa- verrousl et deux hommes entrent dans la cabine.
raissent á leur tour et nous font entrer dans le formi- Ijun est petit et trés musclé. Llautre est grand et il
dable appareil. a I'air fier et supérieur. Par son aspect, il semble étre
Ie chef á bord.
Ii commence á nous examiner avec attention sans
prononcer une parole. Puis il se tourne vers son com-
pagnon et lui parle dans une langue que je ne com-
prends pas.
L'autre répond avec un hochement de téte puis, du
regard, il semble m'interroger.

1. Verrou : systéme de fermetu¡e qui permet de bloquer une porte.


I r. r.

-16- -t7 -
plique á l'appareil, sarrs aucun doute, mais la Iettre N
- Que monsieur raconte notre histoire, me dit
reste une énigme.
Conseil, ils comprendront peut-étre quelque chose.
Ned et Conseil ne se posent pas autant de ques-
Je me présente et présente mes compagnons puis
je me mets á raconter nos aventures. tions que moi. Affamés, ils mangent tout ce qu'on nous
sert.
Lhomme qui semble étre le chef m'écoute tran-
quillement mais ne prononce pas une parole. Quand Aprés le repas, on débarrasse la table et on nous
j'ai flni mon récit, les deux hommes sortent de la cabi- enferme.
Ned et Conseil décident alors de dormir ; ils s'al-
ne et ferment á nouveau les verrous.
longent sur le tapis qui couwe le sol de Ia cabine et
La colére de Ned est encore plus for[e.
s'endorment aussitót.
- Ces hommes-lá ont un étrange comportement' En ce qui me concerne, j'ai plus de mal á m'endor-
Ce sont sürement des coquins'...
mir mais la fatigue me gagne bientÓt et je tombe dans
- Bon ! üs-je et de quel PaYs ? un profond sommeil.
- Je l'ignore. Mais j'ai l'impression qu'ils ont tm lan-
gage á eux pour qu'on ne les comprenne pas mais Je dois dormir longtemps car, quand je me réveille,
je me sens parfaitement reposé. Mes compagnons dor-
qu'eux, par contre, nous comprennent parfaitement.
ment toujours.
Et puis, j'ai faim, vont-ils nous servir á manger ?
Rien n'a changé pendant mon soñlmeil. Je reste un
Comme il dit ces mots, la porte s'ouwe et un
moment allongé á réfléchir.
homme vient mettre des couverts en argent sur Ia
Conseil et Ned se réveillent presque en méme
table.
temps.
Peu aprés, on nous sert un excellent repas, com-
posé surtout de Poissons. - Monsieur a bien dormi ? me demande Conseil.
Le service de table est trés élégant et d'un goüt - Trés bien, merci.
parfait.'Chaque ustensile de table porte ia devise sÚ- - Il doit étre I'heure de di:rer, dit Ned.
vante: - Ou, mieux dit, de déjeuner, dis-je, car nous avons
MOBILIS IN MOBILE dormi au moins vingt-quatre heures, iI me semble.
.N C'est alors qu'on entend le bruit des verrous qu'on

Mobi,te d,ans L'élément mnbile / Cette deüse s'ap-


ouwe. Le commandant entre avec un autre homme.
- Messieurs, dit-il en frangais d'une voix trés
calme.
1. Coquin : mauvaise personne, brigand.

_18_ -19-
En voyant notre air étonné en l'entendant parler les fonds marins, que j'ai souvent lu. Il est trés inté-
frangais, il ajoute : ressant mais vous ne savez pas tout, vous n'avez pas
- Eh oui, je parle le frangais, I'anglais, I'allemand et tout vu. En restant á mon bord, professeur, vous
le latin. J'aurais pu vous parler frangais hier, mais je découwirez des choses incroyables. Vous allez voya-
voulais d'abord vous entendre pús réfléchir. Je sais ger dans le pays des merveilles.
maintenant qú vous étes tous les trois. J'ai mis long- J'avoue que les paroles du commandant font beau-
temps á venir vous trouver car je voulais prendre une coup d'effet sur moi. Je me sens á ia fois fáché p¿r sa
décision á votre sqjet. J'ai longtemps hésité. Je ne maniére de nous traiter et fasciné par ce qu'il nous
savais pas si je devais vous garder ou si je devais me raconte.
séparer de vous. J'ai décidé de vous garder Vous serez - Monsieur, nous restons donc á votre bord puis-
libres d'alIer, de venir, de voir et d'observer tout ce qui qu'il n'y a pas d'autre possibilité et j'espére que notre
se passe ici, mais vous ne pourrez plus sortir d'ici. rencontre nous apportera á tous de gfandes choses.
- Mais, cela signifie que nous sornmes vos prison- Une derniére question, si vous me permettez.
niers ! -Parlez, monsieur Ie professeur.
- En quelque sorte. Vous connaissez maintenant le - Comment dois-je vous appeler ?
secret de mon existence et persorme ne doit le - Je sús Ie capitaine* Nemo et vous voyagez avec
connaitre. Je me sús coupé du monde pour des rai- moi dans leNautihn.
sons qui ne concernent que moi et je ne veux pas que Le capitaine Nemo appelle un marin. Il lui parle
l'on sache oü je üs et comment je üs. dans cette langue que je ne comprends pas. Puis il dit
- Ainsi, vous nous donnez á choisir entre la vie ici á Conseil et Ned :
ou Ia mort, dis-je. - Un repas vous attend dans votre cabine. Suivez
- Tout simplement. cet homme, je vous prie.
- Pmfait. Il n'y a pas grand chose á répondre á qa. Puis il me dit :
Mais sachez que rien ne nous unit á vous. - Et maintenant, monsieur Aronnax, notre déjeu-
- Bien. ner est prét, accompagnez-moi, s'il vous plait.
Puis Ie commandant {oute d'une voix plus douce : - A vos ordres, capitaine.
- Je vous corulais, monsieur Aronnax, et je sais que Je süs le capitaine Nemo. Nous entrons dans une
vous serez heureux d'étre,ici. Vous trouverez, parmi salle á manger. Au centre de Ia piéce, il y a une table
Ies liwes que j'utilise po¡rirr". études, votre liwe sur richement servie.
I ;- :.

20 -2r -
Le capitaine Nemo me montre ma place et me üt :
* Asseyez-vous, je vous prie, et mangez comme un
homme qui doit mourir de faim.
Tous les plats qui composent le déjeuner sont
excellents et trés flns.
- Tous ces aliments viennent de la mer ? dis-je au
capitaine Nemo.
- Oui, monsieur le professeur. La mer fournit á
tous mes besoins'. ElIe me permet de me nourrir d'une
fagon trés saine mais aussi de m'habiller. Tout ici est
fait avec des produits de Ia mer.
- Vous aimez la mer, capitaine.
- Oui, je I'aime ! La mer est tout pour moi !
Le repas terminé, le capitaine me dit :
- Maintenant, monsieur le professeur, je vais vous
faire visiter le Nautilus.
Le capitaine se léve. Je le suis. J'entre dans une
bibliothéque. Elle est pleine de liwes. Je commence á
Ies regarder.
- Capitaine Nemo, dis-je, cette bibliothéque est
merveilleuse. Vous possédez au moins six ou sept
mille liwes.
- D6uze mille, professeur. Ces Iiwes sont á votre
üsposition ponr poursuiwe vos études, si vous le dési-
tez.
- Merci, capitaine. Je vois que vous avez plusieurs
liwes de sciences fort intéressants.
1. Fourni¡ aux besoins de qúelquffil donner á quelqu'tm toutes les
choses dont il a besoin. :i :
I
)o
CHAPITRE IV
Cette bibliothéque n'a pas seulement des liwes
extrordinaires mais aussi des tableaux merveilleux et
un orgue'. Il me semble incroyable de trouver tout cela @
4
dans un bateau qui navigue sur les océans. PISTE

J'observe tout et je dois dire que je suis totalement


fasciné.
Le capitaine Nemo a également un petit musée 7l ¡fiun ooMMENCE sun LE N,qwruus. Je passe mes
composé de piéces qui provierment de la mer : I I / I journées á étudier les liwes du capitaine et á
plantes, coquillages*... des objets extraordinaires. L Y I bavarder avec mes compagnons d'aventures.
Je vois trés peu Ie capitaine Nemo.
-Vous examinez mes coquillages, monsieur le pro-
fesseur, ils sont intéressants, n'est-ce pas ? Le 10 novembre, je me réveille aprés un long som*
- En effet, capitaine. Aucun muséum d'Europe ne meil de douze heures. Conseil vient, coÍune d'habitu-
posséde une si belle collection de produits de I'océan. de, me proposer ses services.
Je vous remercie de me faire découwir tout cela et de Je prends mon petit déjeuner avec lui et Ned. Puis
me permettre de les étudier. je me rends á la bibliothéque, oü il n'y a personne, et
Aprés étre resté un long moment dans Ia biblio- je me mets á étudier la collection d'objets marins du
théque, nous visitons le reste du Nauti,Lus puis Ie capitaine. Je fais des croquisl et prends des notes.
capitaine Nemo me conduit dans ma cabine qÚ se Lajournée se passe de cette faqon.
trouve á cóté de la sierme. C'est une cabine élégante Le 11 novembre, de grand matin, je sens I'air frais
et trés confor[able. á f intérieur du Nautilus et je comprends que nous
Je remercie le capitaine Nemo et je commence á sorrunes remontés á la surface de I'océan.
m'installer dans cet étrange bateau. Je m'habille rapidement, je me dirige vers l'escalier
central et je monte sur la plate-forme2.
Il est six heures du matin. Le temps est couvert
mais la mer est calme. Je reste un moment á respirer
l'air marin puis je redescends dans ma cabine et com-
mence mes actiütés.

1. Orgue : grand insnument a" $,Élqru qui ressemble á un piano 1. Croquis: dessins.
et qui est composé de tuyryrr, I 2. Plate-forme : surface plate sur le dos du sous-marin.

2,4 -áD-
F,l

Cinq jours se passent ainsi. Chaque matin, je - Vous avez coupé avec Ia terre, m'avez-vous dit un
monte sur Ia plate-forme puis je me remets á étudier. jour, alors pourquoi allons-nous faire une partie de
Je ne rencontre jamais le capitaine Nemo. chasse sur la terre ?
Le 16 novembre, alors que je rentre dars ma cabi- - Parce que cette partie de chasse ne va pas se
ne avec Conseil et Ned, je trouve une lettre sur ma faire sur la terre, mais dans la mer.
table. - Dans la mer ? Comment ? A pied ?
Je I'ouwe aussitót. Voilá ce qu'elle dit :
- En effet, á pied et avec un fusil á Ia main.
M onsi,eur le proJe sseur Aron;n o,fr, Je regarde Ie capitaine avec un dróIe d'air. I1 s'en
16 rrcuembre rend compte mais ne dit rien.
Nous entrons dans la salle á manger et le capitaine
Le cap'i,taine Nemo uous inuite, a'ins'i que uos Nemo m'inüte á prendre le petit déjeuner avec lui.
anl;is, d,une parti,e d,e chasse qu'i aura tieu d,emai'n - Mangez bien car nous dinerons sürement trés
mati,n. J'espére qu,e uou,s accepterez son inui,ta- tard.
ti,on. Nous mangeons sans échanger d'autres paroles.
Le com,mandont du Nautilus, Puis le capitaine me dit :
Capi,taine Nemo. - Quand je vous ai dit que nous allions chasser
- Une chasse ! s'écrie Ned. Il va donc á terre. dans lamer, professeur, vous m'avez regardé comme si
- Apparemment ! dis-je. Nous acceptons, n'est-ce j'étais fou...
pas ? - Mais, capitaine...
- Oui, répond Ned car j'ai waiment envie de man- - Ecoutez-moi. L'homme peut viwe sous l'eau s'il
ger un peu de viande fraiche. Je suis fatigué de tous emporte avec lui sa provision d'air. Eh bien, le
ces poissons. Nauti,lus a tout pour pouvoir se promener tranquille-
Le lendemain, 17 novembre, á mon réveil, je sens ment pendant neuf ou dix heures... et, pour chasser,
que leNazt'ilus estimmobile. Je m'habille rapidement nous utüserons un fusil á vent.
et descends dans Ia bibliothéque. - Vous avez donc tout prévu pour viwe éternelle-
Le capitaine Nemo est Iá. Il m'attend, se léve, salue ment sous l'eau.
et me demande de I'accompagner. - C'est bien cela, professeur. II est temps de nous
- Puis-je vous posqr ut%e guestion ? dis-je. préparer.
- Naturellement. Je yo{r"s écoute.
lr
Le capitaine me conduit vers I'arriérc duNauti,lus.

26 -27 -
En passant devant la cabine de Ned et de Conseil, je
les appelle pour qu'ils nous suivent.
Nous arrivons dans une cabine. Lá, une douzaine
de scaphandres' nous attend. En les voyant, Ned fait
une grimace.
- Eh oui, mon bon Ned, dis-je, Ia promenade est
sous-marine.
Deux marins nous aident á mettre nos scaphandres
puis nous donnent un fusil á chacun.
On nous conduit ensuite darts une autre cabine. On
referme alors Ia porte et une profonde obscurité nous
envahit.
Depuis la veille, le Nauti,lus est de nouveau dans le
fond de Ia mer.
Tout á coup, on ouwe une porte percée dans le
mur du sous-marin et uninstant aprés, nous marchons
sur le fond de Ia mer.
Le capitaine Nemo marche devant avec un autre
marin. Ned, Conseil et moi nous marchons derriére.
Le scaphandre, que j'ai trouvé trés lourd quand je
I'ai mis, ne pése plus du tout dans I'eau.
Nous marchons sur un sable fin.
Tout ce que je vois autour de moi -Ies poissons, les
algues- me semble merveilleux.
Nous marchons depuis une heure environ.
En ce moment, nous descendons une pente puis

1. Scaphanüe : équipement contposé d'un casque et d'une combi-


naison pour respirer sous I'e4u. 1
i: :

-28 -
nous arrivons á l'entrée d'une forét de plantes
marines.
Nous marchons pendant un moment au milieu de
ces plantes extraordinaires.
A une heure, le capitaine ordonne de se reposer et
nous nous étendons sur le sable, entre ces arbres
magiques.
Ce repos me parait délicieux.
Au bout d'un moment, mes yeux se ferment et je
dors un peu. Combien de temps, je I'ignore mais,
quand j'ouwe les yeux, Ie capitaine s'est déjá relevé.
Je commence á m'étirer quand une apparition inat-
tendue m'oblige á me lever rapidement.
A quelques métres de moi, une monstrueuse arai-
gnée de mer*, haute de un métre, me regarde, préte á
se jeter sur mol
Conseil et le marin dt¿, Nauti,lus se réveillent á ce
moment-Iá. Le capitaine Nemo montre I'horrible béte
á son compagnon qui la tue aussitÓt d'un coup donné
avec la crossel de son fusil.
Cette apparition me fait penser qu'il peut y avoir
d'autres monstres dans ces fonds marins et je décide Nous repartons par une autre route plus courte
de faird plus attention quand nous reprendrons notre mais aussi plus pénible.
route. Nous avangons au müeu de poissons de toutes les
Au bout d'un moment, Ie capitaine Nemo nous espéces, que le compagnon du capitaine chasse de
indique qu'il est temps de rentrer. temps en temps pour les rapporter au sous-marin.
Soudain, je vois le capitaine préparer son fusil et

fusil : partie t$ique l'on pose sur l'épaule pour


tirer. Un animal tombe sur le sable á quelques pas de
1. Crosse d'un Ou
tirer. nous.

-30- -31-
CHAPITRE V
C'est une magnifi.que loutre de mer*. Le compa-
gnon du capitaine la charge sur son épar:le et nous
nous remettons en route. @
Nous marchons pendant un bon moment. Nous PISTE 5

devons étre prés duNauti,tus.


Tout á coup,le capitaine Nemo se précipite sur moi
et m'oblige á me coucher par terre. Son compagnon E TEMps pAssE et nous continuons notre vie á
T
fait de méme avec Ned et Conseil. Je suis un peu sur- I - bord du Nauti,tus. Mes recherches avancent et
pris mais je me rassure en voyant le capitaine se cou- L-l :" découwe des choses passionnantes que
cher prés de moi puis me montrer quelque chose au- j'ignorais sur les fonds marins. Conseil m'aide souvent
dessus de nous. Je vois alors passer deux énormes dans mes travaux.
masses'. C'est un couple de tintoréas, des requins* Ned est celui d'entre nous qui a le plus de mal á
terribles, á Ia queue énorme. viwe la situation dans laquelle nous nous trouvons. Il
Heureusement, ces arrimaux voraces2 voient mal. réve de revenir sur la terre. Je parle souvent avec lui
Ils passent sans nous apercevoir. et lui conseille d'6tre patient.
Une fois Ie danger passé, nous reprenons notre Le 1 "' janvier 1868, de bon matin, Conseil vient me
route. Une demi-heure plus tard, nous arrivons au trouver sur la plate-forme pour me souhaiter une
Nauti,Lu,s. bonne année.
Lá, nous retirons nos habits et, aprés un bon diner, Nous sommes dans Ia mer de Corail, sur la cóte
nous allons nous coucher, épuisés mais émerveillés de nord-est de lAustralie.
cette surprenante excursion au fond de la mer. Le 4 janüer, nous nous trouvons prés des cótes de
Papouasie. Le capitaine Nemo m'apprend alors qu'il a
l'intention de gagner I'océan Indien par Ie détroit de
Torrés.
Ce détroit est fort dangereux. Le jour oü nous le
traversons, la mer est trés mauvaise. Je reste avec mes
amis sur la plate-forme du sous-marin pour observer
1. Masse : chose énorme qúh'a fas une forme définie. ce qui se passe. Tout commence trés bien mais sou-
2. Vorace: qui mange beaucoup, , dévore. dain, un choc me renverse. Le Nauti,hts, que dirige le
I ;: .

ññ oo
¿t¿ - t)r) -
capitaine, vient de toucher un écueil'et iI reste immo- Mes amis et moi, nous sorTunes trés impressiormés
bile. de toucher la terre. II n'y a que deux mois que nous
Quand je me reléve, j'aperqois sur Ia plate-forme le solnmes les « prisonniers » du capitaine Nemo et,
capitaine Nemo et I'un de ses marins qui sont en train pourtant, j'ai f impression de viwe dans le Nautilus
d'examiner lia situation. depuis trés longtemps.
- Un accident ? üs-je au caPitaine. Nous commengons notre excursion sur llle.
- Non, un incident, me répond-il. Nous allons vite Nous trouvons bientÓt des noix de coco que nous
réparer cela. Darts 5 jours, nous repartirons. cassons aussitót pour en boile Ie lait.
Sur ce, le capitaine et son aide retournent á I'inté- - Excellent ! dit Ned.
rieur du sous-marin. - Exquis ! ajoute Conseil.
- Eh bien ! monsieur ? me dit Ned. - Je ne crois pas que le capitaine dira quelque
- Eh bien, mon ami, dans cinq jours, apparemment, chose si nous rapportons quelques noix de coco á
nous repartons. bord, dit le Canadien.
- II y a une ile, lá-bas, je vois les arbres. Il y a aussi - Non, dis-je, mais il n'en mangera pas.
sürement des animaux. J'ai bien envie de faire une - Tant pis pour lui ! dit Conseil.
petite partie de chasse mais, cette fois, sur terre. * Continuons notre excursion, dis-je en riant.
- Lidée de Ned me plait, dit Conseil. Monsieur, Cherchons plus de fruits pour rarnener á bord.
pourquoi vous ne demandez pas au capitaine Nemo de C'est ce que nous faisons et bientót nous avons une
nous transporter á terre ? grande provision de bananes, de mangues et d'ananas.

- Je peux le lui demander, dis-je, mais je crois qu'il -Parfait, dis-je. Voilá de quoi étre satisfait.
va refuser. - Pas tout á fait, monsieur, dit Ned, il manque la
A ma grande surprise, le capitaine accepte ma pro- üande...
positioñ sans aucun probléme. Il faut dire aussi qu'il - Bien, alors cherchons quelques animaux.
n'y a aucun danger de s'échaPPer. Et nous reprenons notre route. Nous traversons
Le lendemain, on met un canot* á notre disposition une plainer couverte de buissons2. Je vois alors des
et, armés de haches et de fusils, nous nous dirigeons oiseaux magniflques s'élever dans le ciel.
vers llle.
1. Plaine : étendue de pays plate et peu élevée.
de I'eau. 2. Buisson : groupe de peüts arbres serrés les uns cont¡e les autres.
1. Éeueil : rocher qui se trouve

34 -35-
CHAPITRE \1
- Des oiseaux du paradis ! dis-je. Ned, pourriez-
vous en prendre un pour moi ?
- Nous essaierons, me répond le Canadien. @
Soudain, je vois Conseil s'approcher avec l'un de PISTE 6

ces oiseaux dans la main.


- Bravo, Conseil, mais comment as-tu fait ?
- Ce n'était pas trés compliqué, répond Conseil. T pprés
28 ;eNvtnn, je constate que nous sornmes
Cet oiseau est iwer de muscadez qu'il dévorait quand I . de ITle de Ceylan. Je me rends alors dans
je I'ai pris. I¿l h bibliothéque pour chercher un liwe qui
- Merci, mon ami. parle de cette ile.
Mais le temps passe et il faut poursuiwe la chasse Je suis en train d'examiner une carte quand le
car nous devons rentrer sur Ie Nautilus. capitaine Nemo apparaÍt. Il jette un coup d'eil sur la
Ned trouve enfin les animaux qu'il révait de rap- carte et me dit :
porter au sous-marin : des pig¡eons, un cochon des bois -Llile de Ceylan, une terre célébre pour ses perles.
et méme une petite troupe de kangourous. Aimeriez-vous aller en p6cher, professeur ?
Nous sommes trés satisfaits de notre chasse et - Sans aucun doute, capitaine.
nous retournons heureux sur le Naut'iltts oü Ned se - Vous n'avez pas peur des requins, n'est-ce pas ?
charge de préparer tous ces animaux pour les conser- - Des requins ? dis-je. J'avoue que je n'aime pas
ver et pouvoir les consommer peu á peu. beaucoup ces animaux.
Comme prévu, Ie Naut'ilus reprend son voyage le - Nous sommes habitués á eux, nous autres, et
9 janvier. nous serons armés pendant notre excursion alors,
aucun probléme. Donc, rendez-vous demain matin, de
trés bonne heure.
Le lendemain, á quatre heures du matin, je suis
réveillé par un marin. Je m'habille rapidement et je
vais dans la salle á manger.
Le capitaine Nemo m'attend.
1. Iwe : qui a trop bu, ici, qui a tri$*nangé de muscade. - Monsieur Aronnax, me dit-il, vous étes prét á
2. Muscade : graine du fruit dlun prbre exotique, épice. partir ?
{ ;:. :

ot'7
36 - t)I -

I
- Je suis prét.
- Alors, suivez-moi.
- Et mes compagnons, caPitaine ?
- IIs sont prévenus et nous attendent, me répond
le capitaine.
- Nous allons revétir nos scaphandres ?
- Pas encore. Nous Aons en canot jusqu'á l'endroit
oü nous allons plonger et Iá, nous mettrons nos véte-
ments pour l'expédition sous-marine.
Nous allons sur Ia plate-forme oü mes amis et cinq
marins nous attendent.
Nous montons dans le canot qui se dirige vers Ie
sud. Le capitaine Nemo fait bientÓt signe de jeter
I'ancre*.
- Nous voici arrivés, professeur, me dit-il. Revétons
nos scaphandres et commenqons notre promenade'
Nous nous habillons et nous entrons dans I'eau
avec I'aide des marins.
Puis nous coñrmengons á marcher sur Ie sable fin
en suivant Ie capitaine.
Nous trouvons ensuite des rochers couverts de
toutes sortes de mollusques* que j'observe avec beau-
coup d'iirtérét. Puis nous atteignons enfin l'endroit oü
Ies hrritres* perliéres se reproduisent par millions.
Pendant que j'examine ces hlÍtres, Ned en proflte
pour en mettre le plus possible dans un fllet qu'il a
apporté.
Mais nous devons pourqúwe notre route'
Le capitaine nous,confluit devant I'entrée d'une

-38-
immense grotte. Il y entre et nous Ie suivons. Mes pense tout de súte á un requin mais je me trompe. I1
yeux s'habituent vite á I'obscurité. s'agit d'un homme, un Indien, un pécheur qui vient
Nous descendons une pente'. Lá, le capitaine faire sa récolte de mollusques. J'apergois le fond de
Nemo s'arréte et nous montre un objet de la main. son canot au-dessus de nous. Il plonge, remplit un sac
Je m'approche et je découwe quelque chose de de mollusques et remonte á la surface. Une pierre qu'il
merveilleux : iI s'agit d'une huitre de dimension extra- serre du pied tandis qu'une corde ia rattache á son
ordinaire dont la largeur dépasse deux métres. bateau lui permet de descendre plus rapidement au
Le capitaine coruraissait son existence, de toute fond de la mer.
évidence. Il ne nous voit pas. Llombre du rocher nous cache
Les derx valvesz du mollusque sont entrouvertess. á ses yeux.
Le capitaine s'approche et introduit son poignard Je I'observe avec une grande attention quand tout
entre les coquilles pour les empécher de se refermer. á coup, alors qu'il est á genoux sur le sable en train de
C'est alors que je découwe une perle d'une grosseur pécher, je le vois changer d'expression. Il a I'air
égale á une noix de coco. EIle est superbe ! C'est ut effrayé. Il se reléve et prend son élanl pour remonter
bijou d'une valeur incalculable. Emporté par la curio- á la surface de l'eau.
sité, j'étends la main pour la saisir mais Ie capitaine Je comprends sa frayeur. Une ombre gigantesque
m'arréte et me fait ur signe négatif. Il retire son poi- apparait au-dessus de lui. C'est un requin de grande
gnard et les deux valves se referment rapidement. taille qui s'avance en üagonale, l'GiI en feu, les
La visite est terminée. Nous quittons la grotte et máchoires ouvertes.
remontons Ia pente. Je suis muet d'horreur. lncapable de faire un mou-
Nous marchons séparément, chacun admirant et vement.
observant différents éIéments. Le requin s'élance vers l'Indien qui l'évite de jus-
Dix rtrinutes plus tard, Ie capitaine Nemo s'arréte tesse en se jetant de cóté.
et nous tait signe d'aller nous réfugier derriére des Cette scéne dure á peine quelques secondes. Le
rochers. requin revient et, se retournant sur Ie dos, il se prépa-
A cinq métres de moi, une ombre apparait. Je re á couper Ie pauwe homme en deux. C'est alors que

I. Pente : surface inclinée qui desc"end.


2. Valve : chaque partie de la coquille de certains mollusques. 1. Prendre son élan : faire un mouvement rapide vers I'avant pour
3. Entrouvert : légérement ouvert.' sauter, aller plus vite.
1

-40- -4t-
je sens Ie capitaine Nemo, qui est prés de moi, se lever
rapidement. Puis, son poignard á la main, il se précipi-
te sur le monstre, prét á lutter cofps á corps avec lui.
Le requin, au moment oü il va mordre I'Indien,
apergoit son nouvel adversaire et, se replagant sur le
ventre, il se dirige rapidement vers lui.
Le capitaine Nemo attend tranquillement l'énorme
animal. Lorsque ce dernier se précipite sur lui, il évite
le choc et lui plante son poignard dans le ventre. Mais
tout n'est pas fini. Un terrible combat cornmence.
IJhomme et l'animal luttent corps á corps. Le coura-
geux capitaine cherche á frapper son ennemi en plein
c@ur mais il n'y parvient pas.
Je veux courir au secours du capitaine mais je suis
cloué par l'horreur et je ne peux pas bouger.
Le capitaine Nemo tombe soudain au sol, renversé
par le monstre qui se précipite aussitót sur lui, les
máchoires ouvertes. C'est alors que Ned lance son
harpon et atteint l'animal en plein ceur.
Les eaux deüerurent rouges. Quelques instants
plus tard, fanimal est mort.
Ned aide le capitaine á se relever. Celui-ci se pré-
cipite verd l'Indien qui a perdu connaissance, coupe
rapidement la corde qui le retient á sa pierre, le prend
dans ses bras et le remonte á la surface.
Nous le suivons et afivons prés du canot du
pécheur. L'homme reüent peu á peu á la üe. Il ouwe
enfn les yeux. Sa surprise eS'grande quand il nous
voit penchés sur lui. , .1 :

-42- -43-
I

CHAPITRE VII
Le capitaine Nemo sort alors de la poche de son
v6tement un sac plein de perles, qu'il donne au
pécheur, puis il nous fait un signe et nous replongeons
@
dans l'eau et regagnons notre canot. PISTE 7

Une fois débarrassés de nos scaphandres, la pre-


miére parole du capitaine Nemo est pour Ned :
- Merci, maitre Land. Et maintenant, auNauti,lus ! T E voyAGE sE pounsurr A TRAVERS LEs MERS. Mes
A fruit heures, nous sofiunes de retour á bord du I . travaux avancent et j'ai commencé á écrire un
sous-marin. l-rl liwe sur le merveilleux monde sous-marin. Je
Lá, je me remets á penser aux incidents de la jour- supporte assez bien notre situation. Conseil aussi mais
née, au courage et á la bonté du capitaine Nemo envers ce n'est pas le cas de Ned.
le pauwe pécheur. Cet homme étrange et si froid a Nous sommes « prisonniers » á bord du Nautilus
donc encore des sentiments. Je lui en fais la remarque depuis 6 mois. Ned pense que cela peut continuer
et il me répond d'un ton un peu ému : éternellement. Il est nerveux. Il ne pense qu'á s'enfuir.
- Cet Indien, monsieur le professeur, est un habitant J'ai de longues conversations avec lui et j'essaie de lui
du pays des opprimés et je suis et serai toujours de ce faire prendre patience.
paysJá. Un jour, il me redit son désir de partir. Je com-
mence á penser colnme lui car mon liwe est presque
terminé et j'aimerais qu'il soit un jour pubJié. Mais il
faut attendre...
Le 20 awil, nous nous trouvons dans les mers
chaudes des Antilles.
Ned, Conseil et moi, nous admirons de grandes
roches recouvertes de hautes herbes par les vitres de
la salle á manger útNautilus.
Soudain, Ned attire mon attention sur un mouve-
ment qui semble se produire entre les herbes.
- Ici, dis-je, il doit y avoir de véritables grottes á
poulpes*. Il se peut qu'on voit un de ces monstres.
I'"

-44- -45-
-
De simples calmars*, des monstres ! fait Conseil.
Ici, les poulpes sont de grande dimension, dis-je.
-
J'ai entendu dire qu'ils peuvent entrainer des bateaux
I Nauti,lus qui avance assez lentement.
Tout á coup, il s'arréte. Un choc se fait sentir et le
sous-marin reste immobile.
dans Ie fond de Ia mer... mais les herbes ne bougent Le capitaine Nemo entre alors dans la salle á man-
plus, il n'y a rien, apparemment. ger. Sans nous dire un mot, il va observer les poulpes.
Nous continuons á parler ainsi des monstres - Curieuse collection de poulpes, lui dis-je.
marins tout enjetant de temps entemps un coup d'eil - En effet, monsieur le professeur, et nous allons
par les vitres. les combattre corps á corps.
Soudain, Ned s'écrie : - Corps á corps ?
- I-iépouvantable béte ! - Oui, monsieur. Llhélice* est arrétée. Je crois que
Je regarde á mon tour et mes yeux s'agrandissent l'un de ces monstres l'a bloquée avec ses tentacules.
d'horreur. Devant nous s'agite un calmar d'au moins - Et qu'allez-vous faire ?
huit métres de long. Il marche á reculons trés rapide- - Remonter á la surface et les tuer á la hache.
ment en direction dtt Nauti,lus. P afiois les ventousesl * Et au ha4ron, monsieur, dit le Canadien, si vous
de ses tentacules s'appüquent sur les vitres de la salle acceptez mon aide.
á manger. Sa bouche s'ouwe et se referme verticale- - Je l'accepte, maitre Land.
ment. - Nous vous accompagnons, dis-je.
Llanimal semble irrité car sa couleur change rapi- Nous nous dirigeons vers I'escalier central. Lá, une
dement, passant du gris au brun. Son irritation est dizaine d'hommes, armés de haches, se tiennent préts
sans doute causée par la présence dtt Nautilus sur á combattre.
lequel ses tentacules n'ont aucun pouvoir. Conseil et moi, nous prenons une hache. Ned son
Je surmonte mon horreur et je prof,te de l'occasion harpon.
pour exanliner cet étrange animal. Je prends méme Le Nauti,lus est á la surface de l'eau. Un marin
¡ns fsuills et un crayon et je commence á le dessiner. ouwe le parureau qui donne sur la plate-forme.
Bientót, d'autres poulpes apparaissent. J'en comp- AussitÓt un long tentacule $isse comme un ser-
te sept. pent dans l'ouverture. D'un coup de hache, le capitai-
Je continue mon travail. Ces monstres suivent le ne le coupe.
Deux autres tentacules entrent alors, saisissent un
1. Ventouse organe d'aspiraüo¡ de gertains a¡rimaux. des marins et I'enlévent.

-46* -47 _
Nemo pousse un cri et se précipite dehors. Nous le
suivons tous.
Le malheureux marin crie á l'aide. Le capitaine
Nemo se précipite sur le poulpe et lui coupe un autre
tentacule. Nous nous mettons tous á nous battre féro-
cement á coups de hache contre les monstres. Ned
enfonce son harpon dans les yeux de ces animaux.
C'est horrible ! Mais le malheureux marin ne parvient
pas á se dégager. Le capitaine continue á attaquer Ie
monstre. Llanimal lance alors une colonne d'un liquide
noir. Nous ne pouvons plus voir. Quand I'eau redevient
normale, nous constatons que le poulpe a disparu,
emportant le marin.
Soudain, je hurle de perr. Un poulpe ouwe son
énorme bouche et va saisir Ned. Heureusement, le
capitaine Nemo lui donne un coup de hache et Ned lui
plante son harpon dans le ceur.
- C'était á mon tour de vous sauver la vie, dit le
capitaine á Ned.
Ned s'incline sans lú répondre.
Ce combat dure un quart d'heure. Les monstres,
vaincus, blessés, disparaissent dans l'eau.
Le capitaine Nemo, rouge de sang, reste un long
moment sur Ia plate-forme á regarder la mer qui a tué
I'un de ses compagnons. De grosses Iarmes coulent
sur ses joues.
Aucun dq nous n'oubliera jamais cette terrible
scéne du 20 awü. -: i.I."
Le lendemain, je Ia raco4tefraiis mon liwe. Je Ia lis
í: :

- 48 -;;
r

CHAPITRE VIII
á Conseil et á Ned. Ils la trouvent intéressante mais ils
pensent qu'elle m¿Inque de force. Il faut étre un grand
écrivain pour pouvoir la décrire.
Je ne vois pas le capitaine pendant quelques jours.
@
PISTE B
La mort de son compagnon l'a, de toute évidence,
empli de tristesse.
Le Nauti,lus a cependant repris sa route.
T6ur soMMES LE 1,* ¡r-ux et nous nous trouvons
/ \/ prés des cótes d'Europe. Depús quelques
J-^ Y jours, le Nauti,tus est immobile, á la surface
de l'eau. On a l'impression qu'on attend quelque
chose.
Le capitaine Nemo monte de temps en temps sur
la plate-forme mais il n'échange pratiquement aucune
parole avec personne. II a l'air sombre'.
Ce matin, je sús sur la plate-forme en train d'ob-
server la mer et j'apergois au loin un navire.
IJaprés-midi, je remonte sur la plate-forme avec
mes compagnons et je constate que le naüre s'est
beaucoup rapproché de nous mais, chose étrange, le
capitaine ne cherche pas á se cacher.
Je demande á Ned :
- A votre avis, quel est ce navire ? D'oü üent-il ?
- Je ne sais pas, répond Ned, il n'a pas de drapeau
mais j'ai l'impression que c'est un navire de guerre.
Tout á coup, j'entends une détonation, et quelque
chose de lourd tombe dans l'eau, assez prés de nous.

!+'
1. Sombre : triste et inquiet.
2. Détonation : bruit üolent de quelque chose qui explose.
I.r. ;

-50- -51-
- Comment ? dis-je, ils tirent sur nous !
On entend une autre détonation.
Le capitaine apparait sur la plate-forme. Il a l'air
féroce.
A ce moment, un boulet' frappe le Nauti,tus. Le
capitaine redescend dans le sous-marin et revient
bientót avec un drapeau noir qu'il place á l'avant du
Nauti,lus.
- Descendez, me dit-il, vous et vos compagnons.
- Monsieur, vous n'allez pas attaquer ce navire ?
- Non, je vais le couler. Descendez, je vous prie.
- Mais, capitaine, pourquoi faites-vous cela ?
Alors, d'une voix pleine de haine, le capitaine
Nemo s'écrie :
- C'est á cause de lú que j'ai perdu tout ce que
j'aimais : femme, enfants, pére, mére, patrie. Tout ce
que je déteste est lá. Taisez-vous et descendez !
Nous descendons sans rien dire.
Le soir vient. Il ne se passe rien. Je ne peux pas
dormir de toute la nuit.
A cinq heures, j'entends de nouveau des détona-
tions, de plus en plus proches.
C'est alórs que je sens que le Nauti,Lus s'immerge
sous I'eau.
Quelques instants plus tard, je pousse un cri. Un
choc terrible vient de se produire et je sens que la

1. Boulet : grosse boule de métal que Iangaient les canons, avant,


pour attaque

-52-
CHAPITRE IX
vitesse du sous-marin augmente. J'entends des cra-
quements horribles.
Fou d'angoisse, je cours dans Ia salle á manger voir
ce qui se passe.
@
PISTE 9
Le capitaine Nemo est lá. Muet, sombre, il regarde
par Ia vitre.
Une masse énorme entre dans l'eau. Le Nauti,lus
p nur.lrnn DANS MA cHAMBRE oü Ned et Conseil se
vient de percer la coque* du navire qui est en train de
couler. Je vois alors les malheureux marins chercher . ¡/ tiennentpour
silencieux. J'éprouve une véritable
\J horreur Ie capitaine Nemo. Il a dü souffrir,
á remonter á la surface, chercher á se sauver.
c'est certain, mais il n'a pas le droit d'agir ainsi.
C'est un spectacle horrible, effrayant. Maintenant, je le sais, je veux waiment m'enfuir et
Paralysé d'angoisse, je ne peux détacher mes yeux je le dis á mes amis.
de la vitre et je regarde horriflé cette scéne mons- Le Nauti,lus a repris sa route et parcourt un long
trueuse. trajet.
Llénorme navire s'enfonce lentement. Le Nauti,lus J'éüte le capitaine. Je dors peu et ne mange
observe tous ses mouvements. presque rien.
Tout á coup, on entend une explosion. C'est fini ! Ce matin, le Nauti,lus est remonté á la surface.
Je me retourne vers le capitaine Nemo, cet homme Nous voyons d'es terres au loin depuis la plate-forme.
si dur qui regarde froidement l'horreur qu'il vient de Je parle avec Conseil et Ned. Nous avons décidé de
provoquer. proflter de cette circonstance pour prendre le canot et
Il sort de la piéce et se dirige vers sa charnbre. II nous enfuir le soir méme.
ouwe la porte et entre. Je Ie suis et regarde. Nous prenons rendez-vous pour dix heures du soir,
Sur le rfiur du fond, je vois le portrait d'une jeune prés du canot.
femme et de deux petits enfants. Le capitaine Nemo Je passe ma journée á revoir toutes les merveües
les regarde pendant quelques instants, leur tend les que j'ai découvertes sur le Nauti,lus.
bras puis il tombe á genoux et se met á pleurer.
A nuit heures du soir, je mets de solides vétements
de mer. Je rassemble mes notes et les glisse dans mes
vétements. Mon c@ur bat trés fort.
I ;r' : A aix heures moins le quart, je sors de ma
*54-
-55*
chambre. Alors que je passe prés de la bibliothéque, Ma téte üent frapper contre le bord du canot et je
j'entends le capitaine jouer de I'orgue. Une mélodie perds connaissance.
triste et mélancolique. Puis, soudain, j'entends le capi- Quand je reviens á moi, je suis couché dans une
taine pousser un profond soupir et s'écrier d'une voix cabane de pécheurs, en Norvége. Mes deux compa-
lamentable: gnons sont sains et saufs et se trouvent prés de moi.
- Assez ! Assez ! Nous nous embrassons.
Est-ce le remordsl ? Nous allons attendre maintenant un bateau pour
Je cours vers I'escalier et j'arrive au canot oü m'at- regagner la France.
tendent mes amis. J'ai mes notes avec moi et je vais pouvoir publier
Soudain, on entend des cris á f intérieur du sous- mon liwe et poursuiwe mes recherches. Me croira-t-
marin. Qu'y a-t-il ? On s'est aperQu de notre fuite ? Je on ? Je l'ignore et pourtant tout ce que je dis est wai.
sens Ned qui me glisse un poignard dans Ia main. Mais qu'est devenu Ie Nautdlus ? A-t-il résisté au
- Oü, dis-je, nous saurons mourir. tourbillon ?
Mais on entend alors un mot effrayant qui est Ia Je l'espére. Et si le Nauti,lus poursuit sa route et si
cause de l'agitation qui se fait dans le Nauti,lus. le capitaine Nemo habite toujours dans les océans,
- Maeistróm2 ! Maelstróm ! répéte alors Ned, l'air j'espére que la haine va s'apaiser dans son ceur. eue
effrayé. la contemplation de tant de merveilles qui peuplent
Le Nauti,lus vient d'entrer dans ce tourbillon et le les mers puisse á jamais éteindre en lui son esprit de
canot avec lui. Quelle situation ! Nous sommes ballo- vengeance !
tés3 de tout cóté.
- Il faut tenir bon, dit Ned. Nous sommes encore
attachés au Nauti,lus, en restant ainsi...
Mais il rie peut pas finir sa phrase. Le canot, arra-
ché du sous-marin, est lancé dans le tourbillon.

1. Remords : tristesse et malaise que l'on ressent aprés avoir fait


une mauvaise action. Í+.
2. Maelstróm : gigantesque towbillon.S "l
3. Etre ballotté : étre secoué d*§ gens et dans un autre.
V¡r

*56-
-57 -
VOCABULAIRE

[a navigation

Ancre : grosse piéce d'acier fixée á une chaíne que l'on


jette á I'eau pour retenir un bateau.
Bábord: cóté gauche d'un bateau quand on regarde
vers I'avant.
Barque : petit bateau qu'on fait avancer avec des
rarnes.
Bastingage : barriére qui est placée le long du pont
d'un bateau.
Cabine : charnbre dans un bateau.
Canot : petit bateau léger.
Capitaine : chef d'un bateau.
Commandant: officier qui commande un navire.
Coque : fond extérieur d'un bateau.
Équipage: ensemble des marins d'un navire.
Gouvernail : appareil qui sert á diriger un bateau.
Hélice : appareil qui tourne et permet de faire avancer
un bateau.
Maxin: personne qú navigue sur un bateau.
i;l :

-58- -59-
Marine : ensemble des navires (de coflunerce et de Nan¡al : grand mammifére des mers arctiques qui
guerre), flotte d'un pays. porte une longue défense.
Navire : grand bateau construit pour transporter des Poulpe : animal marin qui a huit tentacules avec des
hommes et des marchandises. ventouses.
Pont : plancher qui recouwe ia coque d'un bateau. Requin : trés grand poisson puissant et dangereux.
Tribord : cóté droit d'un bateau quand on regarde vers
l'avant.

[a faune marine

Araignée de mer: gros crabe qui ressemble á une arai-


gnée.
Baleine : trés grand mammifére qui vit dans Ia mer.
Calmar: mollusque marin dont Ia téte est entourée de
huit bras et de deux tentacules.
Cétareé: animal marin qui ressemble á un poisson
mais qui est un mammifére (baleine, dauphin...)
Coquillage.: animal marin dont le corps est protégé
par une coquille.
Huitre : mollusque marin qui produit des perles.
Louhe de mer: animal brun qui a des pattes palmées
et qui se nourrit de coquillages et de poissons.
Mollusque : animal au corps mou qui est souvent
recouvert d'une coquillg.

-60- -61-
LECTUR-§S CLE

VINCT M¡ILE LIEUES SOUS LES MERS


J u les Verne
Un monstre marin parcourt toutes les merc du globe et lerrifie les
navigateurs. Le gouvernement américain décide d'en finir avec lui et
offre au professeur Aronnax, un célébre savant frangais, de
participer á une expédition destinée á le poursuivre. Le professeur
accepte. C'est alors que commenc€ pour lui l'aventure la plus
inimagirable.

MOTS ¿oo A zoo zoo Á r¿oo + BE l70O


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A1 A2 B2
CECR

Audio sur

¡sBN 978'209-031758-9

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