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BASSISTE

BASSISTE

N°99 I Août - Septembre 2022


MAGAZINE.COM

PÉDAGO
5 TUTOS POUR
BOOSTER VOTRE JEU
FUNK • LATIN • ROCK
TECHNIQUE

MATOS
JOHN ENTWISTLE
Le plus grand bassiste rock
G. COSTANZO

de tous les temps ?


GUITAR PRO
BOWIE KRAVITZ AUDIOLITHE

GAIL ANN D'ADDARIO

DORSEY
CORT

BASSIST INSTINCT

INTERVIEWS
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Août - Septembre 2022 / 6,90 d

ELVIN BIRONIEN
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Directrice de la Publication : Olivia Rivasseau Être autodidacte, c’est souvent une fierté qu’on a tendance à exhiber comme un
Rédacteurs en Chef : Régis Savigny, Sébastien brevet de vertu. D’ailleurs, les plus grands n’ont-ils pas appris seuls ? C’est le cas
Benoits, Ludovic Egraz de nombre des stars de la basse interviewées dans ce numéro, dont Gail Ann Dorsey,
Maquettiste : Antoine Ladoué
pilier des sections rythmiques de David Bowie, Lenny Kravitz ou plus récemment de -M-.
Ont collaboré à ce numéro : Adrien Kah, Régis
Savigny, Sebastien Benoits, Ludovic Egraz,
Paul McCartney lui-même n’a-t-il pas appris tout seul ?
Gabriel Honoré, Leo Jarzabek, Lisa Vincent, Paolo Toutefois, il ne faudrait pas aller trop loin dans la glorification de l’apprentissage par
Coccina, Miguel Ferreira, Didier Saint-Grawal, Jack soi-même. D’une part, on hérite toujours d’une culture, animaux sociaux que nous sommes,
Beauregard, Manu Wino et se targuer de tout faire tout seul est souvent vain et illusoire. Le mythe du self made man
Transcriptions musicales : Bruno Ramos, Pascal
(ou de la self made woman) a la vie dure : n’oublions pas que nous vivons dans une société
Mulot, Bruno Tauzin, François C. Delacoudre, Jules
Brosset, Ludovic Egraz
qui valorise le héros, l’individu, rare et monétisable, tout en négligeant l’environnement
Couverture : © Nidhal Marzouk qui l’a créé.
Photos pages intérieures : © DR, sauf mention Apprendre seul passe souvent par des heures d’écoute et de transcription de chansons,
contraire de parties de basses, de solos, et ce n’est certainement pas être seul que de passer
Bassiste Magazine est un bimestriel
une journée ou une semaine en compagnie de Jaco Pastorius, même sur un disque.
(6 numéros/an) édité par B.G.O - 6 rue d’Estiennes
d’Orves - 92120 Montrouge
Même Gail Ann Dorsey revient à la théorie et essaie de combler des lacunes qui ont pu la
Contacts : freiner dans sa carrière pourtant irréprochable. Les plus grands moments d’apprentissage
Direction - direction@bassistemagazine.com sont souvent des révélations lors de concerts ou des répétitions acharnées où l’on s’y met
Rédaction - redaction@bassistemagazine.com à plusieurs pour tenter de trouver l’alchimie. Des points communs entre tous ces grands
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musiciens : leur capacité à aller trouver l’autre et leur soif d’apprendre des chansons,
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seuls moteurs capables de faire passer les étapes, bien au-delà des simples exercices
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techniques. Le passage par l’oreille reste d’ailleurs un invariant de l’équation : attention
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© Août - Septembre 2022 - N°99 la musique elle-même. Revenez aux versions originales, écoutez, transcrivez.
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BASSISTE 03
AOÛT -
SEPTEMBRE 2022 SOMMAIRE N° 99

05 / BASS INFOS
08 / FAITS DIVERS
BASS TALK
12 / GAIL ANN DORSEY
Life on Earth
20 / TIMOTHY B. SCHMIT (The Eagles)
Au jour le jour
24 / JENNY LEE LINDBERG (Warpaint)
Quatre filles dans le vent
36 / KYLE EASTWOOD - Cinematic bass
50 / ELVIN BIRONIEN - Briller avec sincérité
ET NOS RUBRIQUES
10 / Live Report - IRON MAIDEN
32 / Best of - « Les 10 albums qui ont changé
ma vie » : CHRIS KAEL (Five Finger Death
Punch)
12
40 / Bass Bazar
44 / Les Maîtres de la basse
JOHN ENTWISTLE - Thunderfingers :
20 ans déjà...
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À L’ESSAI
54 / D’ADDARIO - XPND-1 & PW-BLPBT-01 24 44
56 / GAETANO COSTANZO - Lolly Fretless
60 / GUITAR PRO 8
62 / CORT - GB-Modern 4
65 / AUDIOLITHE - Doomer Fuzz
ANCIENS NUMÉROS
66 / Complétez votre collection !
PÉDAGO
67 / Retrouvez les cours de nos profs et notre
sélection de grooves en partitions (+ vidéos) 56 62

04 BASSISTE
BASS INFOS
Un coffret de
PAUL MCCARTNEY
en solo
Alors qu’il vient juste de terminer sa tournée Got Back
aux États-Unis et de souffler ses 80 bougies, Paul McCartney sort un
coffret regroupant la trilogie de ses albums en solo : McCartney I / II / III.
Couvrant une période de cinquante années de carrière, il sera disponible
en CD ou vinyle dès le 5 août, accompagné de trois tirages photos et d’une
introduction de Sir Paul. Le premier album de cette série est sorti en 1970, peu
après la séparation des Beatles, le deuxième dix ans plus tard, en 1980, à la fin de
son aventure avec les Wings, et le dernier opus n’est paru qu’en décembre 2020. Alors que le multi-instrumentiste s’est retrouvé isolé en confinement,
il a rassemblé une collection éclectique de chansons spontanées et intimistes, basée sur des prises en direct de Paul au chant, à la guitare ou au piano,
en y ajoutant ensuite sa basse, sa batterie, etc. Pour ce McCartney III, il avait également fait appel à quelques invités prestigieux comme Anderson .Paak,
Phoebe Bridgers, St. Vincent, Beck et Khruangbin. À découvrir et redécouvrir.

OLIVER SIM se dévoile


dans son nouveau projet
Après « Romance With a Memory » et « Fruit », Oliver Sim bassiste et
chanteur du groupe The xx, vient de sortir « Hideous ». C’est le troisième
single de son nouveau projet personnel Hideous Bastard, qui devrait sortir
en septembre, produit par Jamie Smith, son partenaire dans The xx. Le
clip est extrait d’un court-métrage réalisé par Yann Gonzalez, présenté à la
Semaine de la critique du festival de Cannes. On y voit Jimmy Somerville
faire une apparition en être de lumière, qu’il incarne par sa voix, son
costume et son action en faveur de la cause LGBT+. En effet, ce projet a
été l’occasion pour Oliver Sim de dévoiler sa séropositivité depuis l’âge de
17 ans et d’utiliser la parole pour surmonter des sentiments de peur et de
honte qui l’ont habité pendant longtemps. Une expérience libératrice qui
transparaît dans cette chanson.

FIELDY toujours en pause


Lors de récentes interviews, les membres de Korn sont régulièrement
questionnés au sujet de Fieldy, Reginald Arvizu de son vrai nom, le bassiste
du groupe. Ce dernier avait annoncé l’année dernière être retombé dans
« de mauvaises habitudes » et qu’il lui avait été suggéré de prendre du
temps pour régler ses problèmes de son côté. Depuis, il est remplacé par
Ra Díaz de Suicidal Tendencies lors des concerts, et même pour quelques
photos promotionnelles. Et si Ray Luzier, le batteur de Korn, annonce qu’il
ne sait pas quand Fieldy reviendra dans le groupe, il donne tout de même
quelques nouvelles : « Il va bien. C’est notre frère, nous l’aimons, nous le
soutenons à 110 %. Un groupe, c’est un peu comme un mariage. Parfois, il
faut prendre du recul pour avoir une vue d’ensemble et comprendre ce qui
se passe dans sa vie personnelle. […] C’est un mec génial et c’est l’un de
mes meilleurs amis. Je ne sais pas ce qui va se passer dans le futur, mais
il nous manque vraiment. [Ra Díaz] fait un travail d’enfer. Mais Fieldy a un
son propre à Korn. Il a une signature sonore, peu de bassistes peuvent en
dire autant. » S’il n’est pas en tournée avec ses comparses, Fieldy a tout de
même joué sur le dernier album du groupe, Requiem. On lui souhaite un
prompt rétablissement !

BASSISTE 05
MORE WOMEN ON STAGE
Festival
Les 10 et 11 juin derniers avait lieu la première édition du
More Women On Stage Festival, à l’Olympic Café dans le 18e
arrondissement de Paris. À l’origine de cette initiative, Lola
Frichet, géniale bassiste de Pogo Car Crash Control et Cosse.
C’est en 2021, alors qu’elle joue dans un festival où elle est
la seule femme programmée, qu’elle inscrit au dos de sa
basse cette revendication qui donnera son nom à l’événement.
L’objectif de la manifestation ? Mettre les femmes de la musique
en avant : les artistes, certes, mais également tous les métiers
qui participent au fonctionnement du milieu. Deux soirées qui
se sont déroulées dans une ambiance chaleureuse, dans le
partage et la bienveillance. Lola dresse d’ailleurs un bilan plus
que positif de l’événement : « Le festival a été une vraie réussite
à nos yeux. Nous avons fait complet les deux soirs, ce qui
montre bien l’intérêt du public pour une scène plus mixte. » Au
programme : des concerts d’artistes comme SUN, Imparfait ou
encore Lou K, mais également des tables rondes, des blindtests
et des masterclasses données par plusieurs musiciennes, dont
Lola : « C’était important pour nous qu’un grand nombre de musiciennes soient présentes pour qu’elles puissent se rencontrer et échanger au sujet de leur
expérience. Les masterclasses données par des artistes professionnelles ont suscité beaucoup d’intérêt : on va encore développer d’autres ateliers pour les
prochaines éditions. » Le rendez-vous est donc pris pour l’année prochaine !

BON JOVI annonce la mort


d’ALEC JOHN SUCH
Le groupe américain Bon Jovi a annoncé sur les réseaux sociaux le décès
de l’un de ses membres fondateurs, le bassiste Alec John Such, le 5 juin
à l’âge de 70 ans. Ami d’enfance du batteur Tico Torres, il avait rejoint le
groupe dès ses débuts en 1983, aux côtés du chanteur Jon Bon Jovi, du
claviériste David Bryan puis du guitariste Richie Sambora, et il avait joué sur
les cinq premiers albums jusqu’à la compilation Cross Road en 1994. Il avait
alors annoncé son départ, expliquant avoir du mal à suivre le rythme très
intense des tournées du groupe, dont la gloire avait survécu à l’arrivée du
grunge. Il avait été remplacé par Hugh McDonald, qui tient toujours la basse
aujourd’hui pour Bon Jovi, actuellement en tournée avec l’album 2020. Alec
John Such avait retrouvé le groupe lors de son intronisation au Rock & Roll
Hall of Fame en 2018, expliquant alors son bonheur d’avoir participé à la
réalisation de « la vision » de Jon Bon Jovi.

Un nouveau rôle pour FLEA


Flea (Michael Balzary pour l’état civil), le bassiste des Red Hot Chili Peppers,
est également féru de cinéma et a fait des apparitions dans plusieurs films
dont Retour vers le futur ou The Big Lebowski. Dans la nouvelle série
Obi-Wan Kenobi de Disney+, inspirée par la saga Star Wars, il se fait
remarquer armé d’un blaster dans le rôle du méchant Vect Nokru, chef
d’un groupe de mercenaires engagé par l’inquisitrice Reva pour kidnapper
la jeune princesse Leia. Toutefois, ce terrible personnage n’apparaît que
dans les deux premiers épisodes, nous vous laissons découvrir dans quelles
circonstances si vous ne l’avez pas encore vu. Le rôle titre de la série est
interprété par Ewan McGregor. Deborah Chow, qui a réalisé Obi-Wan
Kenobi, a également travaillé cette année avec Flea sur le clip de « Black
Summer » des Red Hot Chili Peppers.

06 BASSISTE
Nouvelle
série chez
MARKBASS
Markbass n’y va pas par quatre chemins : avec la nouvelle série MB58R, la marque italienne sort
vingt nouvelles enceintes, huit combos et une nouvelle tête. Le principe : qualité et légèreté. Pour
la tête d’abord, la Little Mark 58R, elle intègre une boucle d’effet, une sortie XLR, et les contrôles et
connectiques se trouvent sur la face avant pour un meilleur accès. Ils comprennent notamment un
réglage d’égalisation à trois positions : Flat, Scooped ou Footswitch, et un switch pour muter l’ampli.
Le tout pour 2 kg seulement avec 500 watts de puissance. Une option 300 watts est aussi disponible.
C’est aussi cette tête que l’on retrouve dans les huit combos avec des configurations HP 2×10, 1×12
(standard et mini) et 1×15, déclinés en deux versions, Pure et P. La première possède un tweeter hi-fi
et des haut-parleurs néodymium pour des aigus cristallins, doux et nets, la seconde un tweeter piézo
et des haut-parleurs céramique offrant une réponse plus agressive. Le combo le plus léger de la série
est le Mini CMD 121 P qui affiche un poids de seulement 8,82 kg. Enfin, les vingt enceintes proposées
sont des 2×10, 3×10, 4×10, 1×12, 2×12 et 1×15, chacune déclinée dans trois versions, les Pure
et P citées précédemment, mais aussi les Energy avec un tweeter d’un
pouce qui fournit des aigus bien présents et accentués. Les enceintes
2×10 sont proposées dans des versions standard et XL : dans la
standard, les haut-parleurs sont placés verticalement alors que,
dans la XL, ils sont placés en diagonale. Et de nouveau, un
poids minimal grâce à des châssis allégés. Les tarifs ne
sont pas encore annoncés, mais rendez-vous sur le site
de la marque pour plus de détails : www.markbass.it

Dans l’intimité de
JEAN-JACQUES BURNEL
Le célèbre bassiste des Stranglers se dévoile dans un
livre, « Strangler in the Light », composé d’une année de
conversations entre Anthony Boile et Jean-Jacques Burnel.
Ce dernier y évoque avec ironie et sans détour son parcours
au sein de la formation de rock britannique avant-gardiste
et sans compromis. Il explique comment les Stranglers ont
pu influencer la scène punk, leur rapport au public et aux
médias, leur longévité... « Le plus français des Anglais et
le plus anglais des Français » s’attarde aussi sur son passé
tumultueux, le fait qu’il soit devenu bassiste puis chanteur plus
par les circonstances que par choix, et également ses diverses
collaborations avec Taxi Girl, Polyphonic Size ou son projet parallèle, Purple Helmets. Sa personnalité
ravageuse se fait sentir au fil des anecdotes et s’il n’y a pas de détails croustillants sur la vie d’une rock
star, l’Homme en Noir explore son rapport à la musique, à l’amour, aux arts martiaux et à la France. À
découvrir en librairie et à savourer accompagné d’une petite playlist des Stranglers.
FAITS DIVERS
EN BOUCLE À LA RÉDAC’

Warpaint Kendrick Lamar Primus Pogo Car Crash Control Porcupine Tree
Radiate Like This Mr. Morale & the Big Steppers Conspiranoid Fréquence violence Closure / Continuation
Basse : Jenny Lee Lindberg Basse : Thundercat, Bekon, Basse : Les Claypool Basse : Lola Frichet Contrebasse : Steven Wilson
Danny McKinnon

CITATIONS CULTES
« Je suis déçu que mon travail
avec Bob Marley et celui de mon
frère Carlton (batteur) n’ait pas été
« J’étais prêt à tout pour faire reconnu à sa juste valeur, car la
partie du groupe de Slash et je majorité des morceaux sont nés à
me serais même contenté d’être partir de jam. J’ai essayé d’obtenir
simple roadie ! » gain de cause, mais la soi-disant
Todd Kerns justice nous a déclarés « simples
(Slash feat. Myles Kennedy and accompagnateurs » ! C’est
The Conspirators) rageant de ne pas pouvoir récolter
les fruits de son travail. »
Aston “Family Man” Barrett
(Bob Marley & The Wailers)

« J’ai près de 5000 concerts à


mon actif, mais je ne me suis
jamais produit sur le continent
africain, ni en Antarctique. « Las Vegas peut être un
J’espère aller jouer en Afrique endroit très dangereux. Nous
l’an prochain. Pour l’Antarctique, avons détruit Las Vegas,
je vais plutôt faire l’éco-touriste, nous nous sommes détruits
jouer deux-trois notes, histoire là-bas et nos foies aussi. »
de pouvoir dire que j’ai joué Tobin Esperance
sur tous les continents de la (Papa Roach)
planète ! (rires) »
Billy Sheehan

08 BASSISTE
WHO
R E Y O U   ? THOMAS LAFFONT
A
que d’habitude du coup. J’ai quand même
quelques rendez-vous dont le La Londe Jazz
Festival avec mon quartet le 6 août. Toutes
mes dates sont à retrouver sur mon site. J’en
profite pour dire aux bassistes que le corps
prend cher quand on travaille beaucoup. Il
faut en prendre soin ! En parallèle, on prépare
l’enregistrement d’un EP avec MC Sirop et on
compose un second EP avec un autre projet
que l’on a ensemble : Les songes du singe.
Notre premier single « L’écolier » et le clip
qui l’accompagne sont d’ailleurs sortis en
septembre 2021.

QUEL MATOS ?
Basses : J’ai enregistré mon nouvel album
avec une singlecut 5 cordes de chez Marceau
Guitars. Je cherchais une basse confortable
et bien équilibrée. Elle répond parfaitement
à cette recherche. Je l’accorde en registre
« ténor » (EADGC) pour l’extension que ça
apporte dans le registre aigu de l’instrument.
J’ai aussi récemment fait l’acquisition d’une
QUI ? à cette période que je prépare la musique de Fender Jazz Bass de 1978. Le son est super
Je commence la basse à l’âge de 21 ans mon premier album sorti en 2019. précis et ça marche en toute circonstance.
et me mets à jouer rapidement avec des Amplis : Je joue sur la combinaison Aguilar
petits groupes. En 2008, de passage à QUOI ? Tone Hammer 500 + cabs SL 112 depuis
Paris pour mes études, je vais écouter Biréli Edgar, le second album de jazz de mon quelques années maintenant. Je trouve que
Lagrène avec son projet Electric Side. Là, quartet vient de sortir. Il raconte l’histoire le son de l’instrument est très bien retranscrit
je me prends une claque monumentale par de mon alter ego fictionnel, Edgar, à travers avec ces amplis. Pour les grosses scènes, je
ce jeune bassiste que je ne connaissais pas une série de 10 compositions, chacune demande souvent du Ampeg SVT. C’est une
du tout : Hadrien Feraud. Ce coup-ci c’est accompagnée d’une illustration et d’un texte. valeur sûre que tout le monde a en général.
sûr, je veux faire de la basse ! À la fin de Le clip qui met en scène ce personnage est Effets : Récemment, j’ai revu ma config pour
mon master en informatique, je m’inscris également dispo sur ma chaîne YouTube. Je utiliser principalement le HX Stomp XL de
donc à l’IMFP (Institut Musical de Formation tourne aussi avec l’écocirque d’André-Joseph chez Line 6. J’utilise une Dunlop DVP4 en
Professionnelle) pour approfondir mes Bouglione (un gros spectacle rock’n’roll circus pédale de volume/expression et je couple
connaissances musicales. Je continue au assez novateur) et le rappeur marseillais MC ça à quelques pédales analogiques que
conservatoire d’Aix-en-Provence jusqu’à Sirop. Autant dire que je suis très éclectique. j’affectionne particulièrement : une Boss
l’obtention de mon D.E.M. Musiques Actuelles J’ai aussi publié ma méthode « Des accords et OC-2, une EBS Bass IQ et une TC Electronic
en 2014. Janek Gwizdala est également une une basse » qui propose une étude des triades Flashback.
influence très importante pour moi. Je bosse et renversements issus de la gamme majeure.
beaucoup avec ses cours en ligne et son livre C’est un travail qui a beaucoup nourri mon jeu OÙ ?
« You’re a Musician. Now What? ». J’arrive et ma manière d’écrire la musique. Web : thomaslaffont.fr
même à le programmer pour une masterclass Instagram : @thomaslaffont
et un concert à Marseille lors de sa tournée QUAND ? Facebook : @thomaslaffontquartet
« Last Minute World Tour » de 2017. Je J’ai dû ralentir la cadence des concerts ces YouTube : Thomas Laffont
prends probablement la plus grande leçon derniers temps à cause d’une blessure (hernie
de musique de ma vie à ce moment-là. C’est discale aux cervicales…). L’été est plus calme

BASSISTE 09
Texte & photos @ Manu Wino

Initialement prévue il y a deux ans et décalée pour les raisons qu’on connaît, la
date parisienne de la tournée Legacy Of The Beast d’Iron Maiden s’est tenue à La
Défense Arena le 26 juin dernier, permettant ainsi aux Britanniques de poser leurs
flight cases pour la première fois dans cette gigantesque salle (ou ce petit stade,
au choix), la plus grande d’Europe nous dit-on. Ça change de Bercy où ils ont donné
13 concerts depuis 1986. Et il faut bien admettre qu’au moment de pénétrer dans
l’arène, la taille de l’enceinte impressionne fortement. Iron Maiden est certes à la
hauteur d’un tel challenge (ils ont joué dans bien plus grand un paquet de fois), mais
on se sent petit et perdu dans les premiers instants.

10 BASSISTE
Au moment où « Doctor Doctor » d’UFO retentit à fond
dans une salle surchauffée, il apparaît clairement que
le gigantisme de l’endroit ne sera pas un souci pour le
public. Et si le show de ce soir est à la hauteur de celui de
2018, lorsque la tournée est passée pour la première fois à
Paris-Bercy (Accor Arena), ce ne sera pas un problème
pour le groupe non plus.

Fort de ses presque 50 ans d’expérience, Iron Maiden


sait faire ce qu’il faut pour qu’on n’ait jamais l’impression
d’assister au même concert deux fois. Et pour ce faire, le show
démarre avec trois titres du dernier album, Senjutsu , paru en
septembre 2021. Non seulement cela permet de découvrir
les versions live de ce nouveau répertoire (« Senjutsu »,
« Stratego » et « The Writing on the Wall »), mais on profite
aussi d’un magnifique décor japonais, en accord avec le
thème du dernier opus. À noter aussi la visite du Eddie de
la pochette du disque dès le premier titre ! (On s’émerveille
d’un rien, parfois…)

Une fois cette incartade à la thématique annoncée terminée, on


retourne dans quelque chose de beaucoup plus familier pour
ceux qui étaient là en 2018, une version un peu condensée
du Legacy Of The Beast Tour (ils n’ont joué que 12 des
16 titres de la tournée originelle). Il ne manque rien : les
flammes sur « The Number of the Beast » ou « Flight of
Icarus », les drapeaux et le costume sur « The Trooper »,
ou l’avion sur « Aces High » en clôture du show.

Le son est bon, très bon même, compte tenu de l’endroit


où l’on est, peu d’écho, un bon équilibre entre tous les
musiciens, des guitares claires et distinctes, un son de
basse puissant mais pas assourdissant, une batterie bien
mixée, et une voix légèrement saturée mais juste, bien
évidemment. Seule ombre au tableau, des décalages
assez surprenants entre Bruce Dickinson et le reste du
groupe, comme s’il avait un problème de retour et que le
son des musiciens lui arrivait parfois une demi-seconde
trop tard (il faut préciser qu’Iron Maiden est l’un des
derniers réfractaires à l’utilisation d’oreillettes. Cet incident
fera-t-il pencher la balance ?). C’est d’autant plus surprenant
qu’en bientôt 30 ans de concerts du groupe en ce qui me
concerne, je n’ai jamais remarqué ne serait-ce que le plus
petit grain de sable technique, le moindre pain, le moindre
raté dans les performances du groupe. Au final, rien qui
puisse gâcher la fête.

Steve Harris, pied sur le retour, reste bien entendu le pilier


de l’affaire, toujours au top avec cette énergie affolante
et cet engagement exceptionnel, le tout à 66 ans il faut le
rappeler. Il fait partie de ces rares musiciens qui n’ont pas
besoin de prendre le micro pour remercier le public et faire
passer un message. Tous ceux qui ont croisé son regard en
concert me comprennent. Il sait qu’on est là et que tant
qu’ils nous feront l’honneur de passer par chez nous, les
salles seront pleines. •
A N N
A I L
G ORSEYh
D
Life on Ea r t
Dans son jeu de basse comme dans la vie, Gail Ann Dorsey dégage quelque chose de simple, spirituel, intuitif et assuré. Et pour cause, elle
mène une solide carrière solo et s’est épanouie auprès de grands musiciens comme Tears For Fears, Lenny Kravitz, Seal, Charlie Watts ou
encore David Bowie, qu’elle a accompagné régulièrement pendant près de quinze ans. Plus grand-chose à prouver mais encore beaucoup à
dire, elle se tient aujourd’hui au côté de Matthieu Chedid avec le projet Rêvalité, paru le 3 juin. Le septième album du chanteur nous plonge
dans un monde violet de science-fiction, à la fois rêveur avec ses ballades acoustiques et dansant avec ses rythmes funk et ses refrains
accrocheurs, où l’Américaine pose sa basse et sa voix avec justesse et élégance. En tournée partout en France jusqu’à la fin de l’année avec
-M-, nous profitons d’un passage de Gail Ann aux Folies Bergère pour évoquer son parcours et sa vision de la basse, ce à quoi elle s’attache
avec patience et précision.

Par Lisa Vincent mesure que je bouge ma main sur le manche. théorie et pratique. Mais j’espère qu’un jour, ça
Photos @ Nidhal Marzouk Mais, si l’on me donne une grille d’accords, je va enfin tilter et que le cercle des quintes fera
ne trouve pas immédiatement la tonalité du parfaitement sens (rires). Pendant longtemps,
D’abord guitariste, tu as commencé la morceau. Du coup, je ne suis pas bonne en cette faiblesse m’a fait paniquer, par exemple,
basse un peu par nécessité... Comment improvisation, ça passe par pas mal de fausses lorsqu’un artiste changeait la tonalité d’un
s’est effectuée la transition ? notes (rires). Je suis une musicienne qui joue morceau au dernier moment et qu’il fallait tout
C’est vrai, comme beaucoup de bassistes, j’y à l’oreille, c’est instinctif. Je n’associe pas bien transposer, mais je m’en suis finalement très
suis arrivée presque par accident, en 1976.
La guitare était alors l’instrument dominant
aux États-Unis avec les groupes de rock et les
chanteurs à l’acoustique. À 14 ans, je cherchais
un petit boulot pendant les vacances d’été. Je
jouais de la guitare avec d’autres gamins du
voisinage et je pensais pouvoir trouver des gigs
payés. Je suis allée au magasin de musique où
les musiciens affichaient leurs petites annonces,
or tout le monde cherchait des bassistes. Je
suis autodidacte, j’ai appris en jouant avec
des disques. J’étais assez bonne guitariste et
tenter la basse avait l’air simple : il n’y a que
quatre cordes et tu joues une note à la fois
(rires) ! Alors j’ai emprunté une Rickenbacker et
je suis allée à une audition pour un groupe qui
recherchait un bassiste durant l’été. Ils jouaient
les hits de l’époque, j’avais toutes ces chansons
en tête et j’ai été retenue. Ma mère m’a offert
une basse Epiphone que je regrette de ne pas
avoir conservée par la suite, car j’envisageais
plutôt de reprendre la guitare. C’est seulement
à partir de la vingtaine, lorsque j’ai emménagé à
Londres, que j’ai repris sérieusement la basse.

Tu étais donc autodidacte, mais avais-tu


des connaissances théoriques ?
Non, et c’est d’ailleurs toujours une faiblesse.
Depuis cinq ans, je prends des cours au
Berklee College of Music de Boston. Ils ont des
programmes en ligne : j’en ai suivi plusieurs
sur la guitare acoustique, les gammes, les
accords de base à la guitare... Mais celui sur
la théorie est très compliqué à appliquer pour
moi. Sans doute, j’ai acquis des automatismes
pour apprendre et interpréter la musique :
j’entends une phrase, je la chante et, comme
j’ai appris avec le temps que certains motifs
sonnent d’une certaine manière, mon oreille
reconnaît les intervalles que je dois faire à

BASSISTE 13
bien sortie. J’ai pu m’exprimer et donner aux la contrebasse est Charles Mingus : tout son album et il a amené Eric Clapton et les autres
artistes avec qui j’ai travaillé ce dont ils avaient corps était une basse, il était l’instrument. La invités.
besoin. J’ai gagné en confiance en moi et j’ai basse fretless a toujours un son étrange à mon
accepté que l’on ne pouvait pas tous être un goût. Jaco et Pino Palladino sont probablement
génie de Berklee. les deux seules personnes que je supporte à la
fretless (rires). J’en ai joué sur quelques albums
Quelles étaient tes influences à tes et lives pour Bowie, parce qu’il avait pas mal de
débuts ? musiques qui nécessitaient une fretless, et j’ai
Mon groupe préféré est Queen que j’ai eu la eu une superbe basse faite main par Michael
chance de voir quand j’étais adolescente : le Tobias. Nous l’avons construite ensemble à
meilleur concert que j’aie jamais vu, avec les partir de rien alors elle a un manche agréable
quatre membres originaux. Brian May était un et les marques des frettes, sinon je serais
de mes héros, tout comme Neil Young, Eric incapable d’avoir un semblant de justesse !
Clapton, beaucoup de guitaristes britanniques. Donc je peux m’en sortir, mais je ne dirais pas
Pour l’acoustique, je suis une grande fan de que je suis une joueuse de fretless. Et plus tard, Bowie t’a appelée...
Joni Mitchell. J’essayais de reprendre ses Oui, même assez longtemps après. Mon
chansons, mais je n’avais pas encore découvert Lorsque tu as emménagé à Londres, tu premier album, The Corporate World, est sorti
les accordages alternatifs, alors je sautais d’une as sorti ton premier album solo (1988), en 1988. Il a assez bien marché, j’ai tourné un
note à l’autre aux extrémités du manche... Puis produit par Nathan East avec des invités peu en Europe, mais je trouvais les maisons de
j’ai acquis son songbook et là, tout s’est éclairé prestigieux : Eric Clapton, Steve Ferrone disques assez compliquées. Aujourd’hui, il n’y a
(rires) ! Joan Armatrading est une guitariste ou Andy Gill. Comment as-tu vécu cette quasiment plus de labels : tu as certes moins de
acoustique britannique que je trouve très expérience ? soutien, mais tu as plus de contrôle sur ce que
sous-estimée. C’est aussi une compositrice Oui, c’était un rêve devenu réalité. Je suis allée tu fais. Dans un grand label, j’avais le sentiment
extraordinaire, et sa voix... Ce fut une grande à Londres dans l’espoir d’avoir un contrat et de de ne jamais les satisfaire : ils auraient aimé
influence pour moi. À la basse, Joe Osborn est démarrer une carrière solo. Mon manager m’a n’avoir que des hits alors que je voulais être
peu connu du public, c’était un membre des fait participer à un show télé musical important créative. Je suis partie travailler à Amsterdam
Wrecking Crew. Il était musicien de session à à cette époque, The Tube, où passaient les sur de nouveaux projets. Plus tard, en 1992, j’ai
Los Angeles à partir des années 60 et il a joué nouveaux groupes les plus cool et qui mettait fait mon deuxième album avec Island Records,
sur les titres que j’écoutais à la radio comme chaque semaine en avant un instrument Rude Blue. Son fondateur, Chris Blackwell, a
ceux de The Partridge Family, The Carpenters, pendant quelques minutes. Je n’ai jamais été été génial : il m’a laissé un total contrôle mais,
Barbra Streisand, America... Leland Sklar est très à l’aise avec les solos de basse, je ne suis pendant que j’enregistrais, il a vendu Island
un peu comme une extension de Joe Osborn pas Mark King de Level 42 ou ce genre de à Polydor et la politique du label a changé.
à mes yeux. C’est le même type de musicien, bassiste qui était populaire à l’époque, mais Alors j’en ai eu marre des maisons de disques
capable de jouer de nombreux styles avec je ne voulais pas manquer cette occasion. J’ai et j’ai décidé d’accompagner d’autres artistes
beaucoup de goût et un superbe son. Je pense donc réfléchi à un moyen de jouer de la basse et de bosser sur ma carrière solo à côté. J’ai
aussi à Carol Kaye, une contemporaine de Joe et de chanter en même temps, et j’ai choisi notamment travaillé avec Gang of Four et Tears
Osborn ; ils ont travaillé sur pas mal d’albums de « Stop On By » de Bobby Womack, dans une For Fears. Avec Roland Orzabal de Tears For
pop américaine comme Sonny and Cher. Tony version de Rufus et Chaka Khan sur laquelle Fears, j’ai fait la tournée Elemental, alors qu’il
Levin aussi, qui est d’ailleurs un de mes voisins je m’entraînais à la basse. Comme ce show venait de se séparer des autres membres du
à New York. Chuck Rainey, qui a joué avec était suivi par toutes les grandes maisons de groupe pour quelques années, puis on
Steely Dan. Nathan East, bien sûr, qui a produit disques d’Angleterre, le lendemain, j’avais trois a fait un album ensemble, Raoul and the Kings
mon premier album solo. J’aime ce genre de propositions et j’ai choisi Warner Brothers. of Spain, et nous avons débuté un projet
musiciens qui ont une sensibilité pop, c’est mon J’avais déjà des compositions et, par hasard, solo pour moi. Nous étions en studio dans le
type de jeu favori. J’aime la musique Motown, j’ai rencontré Nathan East dans leurs bureaux. sud-ouest de l’Angleterre quand Bowie a appelé,
j’admire James Jamerson et Bob Babbitt, mais J’adorais son jeu et à cette époque, il était j’ai d’abord cru que c’était une blague, qu’un
je ne suis pas vraiment une artiste soul. Et je partout : il travaillait avec Eric Clapton, il venait ami imitait son accent (rires). Il m’a demandé
ne suis pas non plus branchée lignes de basse d’enregistrer « Easy Lover » avec Philip Bailey et si j’étais intéressée par une tournée de six
sophistiquées et slap... Phil Collins, il avait joué sur « Saving All My Love semaines… Comment ça, si je suis intéressée,
for You » de Whitney Houston... Il rencontrait combien de fois cela arrive que David Bowie
Alors pas Jaco ? les maisons de disques parce qu’il souhaitait te téléphone pour te demander de travailler
Non, j’aime bien Jaco, mais je ne suis pas fan du devenir producteur. Il m’a appris qu’il était de avec lui ? D’ailleurs, c’était une de ses grandes
son. Quitte à aller dans cette direction, autant Philadelphie comme moi et cela a créé un lien qualités : s’il voulait t’embaucher ou te virer, il le
jouer de la contrebasse ! Pour moi, le maître de immédiatement. Finalement, il a produit mon faisait en personne, et je trouve que cela inspire
le respect. Finalement, la collaboration a duré
quinze ans, il a complètement bouleversé ma
« Si David Bowie voulait t’embaucher ou te virer, il le faisait en vie. Je suis encore sous le choc de sa perte ;
nous avions une connexion, avec les duos que
personne, et je trouve que cela inspire le respect. » nous avons pu faire, toutes les tournées…

14 BASSISTE
« Pour moi, un bassiste doit avoir
une vision globale, être en soutien
pour mener l’ensemble dans une
certaine direction. »
Il y a quelques mois, Tim Lefebvre nous vit en France et, bien que j’aie toujours mon
expliquait que lorsqu’il avait travaillé avec logement à New York, je suis venue me confiner
Bowie sur Blackstar, ce dernier laissait une ici à la fin de l’année 2020. À Paris, nous logions
liberté créative à ses musiciens. As-tu eu la dans un petit appartement, donc j’avais besoin
même expérience ? d’un endroit pour travailler. J’ai appelé Alain
J’adore Tim ! J’ai eu exactement la même Lahana, un ami imprésario, et je lui ai demandé
expérience. David laissait toujours les musiciens s’il pouvait trouver une pièce toute simple où je
faire ce qu’ils savaient le mieux et il avait le don puisse apporter mon matériel pour composer.
de les associer pour obtenir une alchimie qui Il a passé quelques appels et m’a annoncé
se mariait parfaitement à ses chansons. Bowie qu’il avait trouvé un endroit très sympa. Je
était aussi un peintre, et pour moi, en quelque m’inquiétais un peu du prix parce que je ne
sorte, il peignait la musique : il savait que je travaillais pas beaucoup pendant cette période,
serais le bon rouge, tel autre le jaune parfait et mais il s’est avéré que c’était gratuit (rires) ! Il
que, en les mélangeant, il obtiendrait la bonne avait contacté Matthieu qui me suivait depuis
couleur. Cela donnait à chacun la liberté de se longtemps, car c’était un grand fan de Bowie.
dépasser, car il sentait des possibilités en nous Avec le confinement, il était à la campagne et il
que nous ne soupçonnions pas et il nous incitait préférait que son espace de travail parisien ne
à les tester. J’ai tant de souvenirs de lui qui rit reste pas inutilisé. Il se rapproche de David en
et qui tape dans ses mains parce que tu as fait ce sens, il est partisan de la créativité. J’avais
quelque chose de cool. C’était une expérience acheté un de ses disques, Qui de nous deux, que
incroyable de travailler avec lui, il y avait j’avais bien aimé à l’époque, mais je n’avais pas
beaucoup de créativité. suivi toute sa carrière et j’ai découvert à quel
point il avait percé... Il est incroyable ! Et d’une
Tu as aussi travaillé avec Lenny Kravitz, très grande gentillesse. Plus tard, je lui ai rendu
qui est également un bassiste accompli. visite pour la première fois dans sa maison à
Avait-il la même manière de diriger ? la campagne et il travaillait sur Rêvalité. Il m’a
Totalement à l’opposé. Lenny a un style bien proposé de jouer un peu de basse sur une
particulier qu’il voulait absolument garder. Je chanson, puis sur d’autres, puis de chanter...
crois d’ailleurs que c’est le premier job où je tout s’est fait naturellement. En parallèle, je
ne pouvais pas jouer sur ma propre basse : travaillais à Paris sur mes projets solo.
j’utilisais donc une Jazz Bass ’61 que j’essaie
d’ailleurs de récupérer (rires). C’était une très Tu envisages donc de sortir bientôt ton
belle basse, mais surtout, elle possédait le son quatrième album solo ?
spécifique de ses disques. Tous ses instruments J’espère pouvoir le terminer pour la fin de
étaient vintage. La musique de Lenny, bien l’année. Ce sont des chansons sur lesquelles
qu’elle puisse être parfois très pop, garde une Joe Osborn aurait pu jouer, dans une ambiance
ambiance rétro. Il faisait donc très attention singer songwriter des années 70, un peu à la
à tous les détails, la bonne combinaison de Carole King. Pas complètement rétro, mais
pédales, pas de compression sur la basse... focalisé sur la mélodie. Je recherche des
Il était plus dans le contrôle, il sculptait un couleurs, avec des instruments à cordes, et
son. D’autant qu’il joue généralement tous les je veux aussi travailler mon chant : l’album ne
instruments dans ses albums, la guitare, la sera pas centré sur la basse. J’ai commencé
basse, la batterie... C’était un peu plus limité à travailler avec des musiciens célèbres de
mais cela restait fun, le groupe était génial, j’ai Woodstock à New York, comme Jerry Marotta
beaucoup aimé travailler avec lui. à la batterie, David Spinozza à la guitare, un
grand musicien de session qui a joué avec
Donny Hathaway, Roberta Flack, Dr. John,
Paul Williams, très bon guitariste classique
également.

Pour l’album Rêvalité, tu es mise en avant


dans les clips et les chansons : quelle a été
ton implication dans la composition ?
Oui, j’étais surprise qu’on m’invite dans les
clips ! Je n’ai pas été très impliquée dans
Et comment en es-tu venue à travailler avec la composition, mais j’avais toutefois la
Matthieu Chedid sur Rêvalité ? liberté d’expérimenter. Matthieu développe
Encore une question de timing. Ma compagne ses chansons constamment : il enregistre

16 BASSISTE
« Je suis une musicienne qui joue à
l’oreille, c’est instinctif. Je n’associe
pas bien théorie et pratique. »
quelque chose puis y revient quelques jours
plus tard et change certaines parties, fait
de nouveaux arrangements... Pour certains
morceaux, il avait déjà trouvé les parties de « Je trouve de la joie dans le
basse, mais s’il cherchait un feeling un peu
différent, je pouvais proposer mes idées.
fait de servir la chanson, c’est
Quand un artiste me demande de jouer de ma raison d’être. »
manière très précise, je ne le prends pas
comme un manque de considération, c’est une
expérience enrichissante parce que j’aime aussi
comprendre la pensée d’un autre bassiste. Dans
« Ce jour-là », la ligne de basse hypnotique est
au centre de la chanson et j’ai trouvé cette idée
géniale : c’est très rare qu’un artiste écrive ainsi,
surtout pour une chanson si belle et tendre. Je
trouve de la joie dans le fait de servir la chanson,
c’est ma raison d’être. Pour moi, un bassiste doit
avoir une vision globale, être en soutien pour
mener l’ensemble dans une certaine direction.

Quelle est la basse que tu utilises ?


Ma basse préférée est ma Stingray 1985 ou
1986, je l’ai achetée à Londres. Lorsque j’ai vu
une photo de Marilyn Monroe où elle lit le script
du dernier film dans lequel elle a joué, où elle
essaie si dur de mémoriser les dialogues, je
me suis reconnue quand j’essaie d’apprendre
mes parties, alors j’ai fait placer cette photo
sous la plaque de ma basse. Je la joue sur la
plupart des tournées et albums, et elle a fini
par s’appeler Marilyn, comme B.B. King avec
Lucille. J’utilise donc cette basse aussi avec
Matthieu sur la plus grande partie du show.
Pour les amplis, j’ai toujours utilisé des Ampeg,
qui sont selon moi le top à la basse. J’aimais
bien les VR, mais je crois qu’ils ne font plus que
les Classic maintenant, c’est le même genre de
tête d’ampli. J’ai aussi des baffles 6x10 qui sont
parfaits pour cette tournée. Pour les pédales,
j’utilise des TC Electronic, mais j’en ai fait griller
une à cause du changement de voltage entre
les pays : c’est la TC Stereo Chorus, Pitch et
Flanger. J’aime beaucoup le compresseur
d’Aguilar ; j’ai aussi l’Envelope Filter de MXR en
ce moment. Et j’ai une pédale overdrive Boss,
l’ODB-3 que j’utilisais déjà avec Bowie, c’est
ma distorsion préférée. Mais je modifie mon
matériel et mes pédales en fonction des besoins
de l’artiste évidemment.

Tu es en tournée en France jusqu’à la fin


de l’année. Comment se sont passés les
premiers shows et comment te prépares-tu
pour un concert habituellement ?
Les premiers concerts avec -M- se sont très
bien passés : c’est une expérience incroyable
d’observer l’énergie et la connexion de Matthieu
avec son public. Les spectateurs sont une

18 BASSISTE
partie importante du show, ils n’ont pas un rôle de trouver le code rythmique, parce que ma
passif, c’est une sensation exaltante. Pour me mémoire musculaire va l’enregistrer. Pour
préparer, j’aime passer un peu de temps seule. cela, j’utilise un métronome et je ralentis les
Je me maquille, je fais quelques exercices pour parties les plus complexes, en examinant
m’échauffer la voix et, si je peux, je déroule mon consciencieusement comment la basse et le
tapis de yoga pour faire des étirements afin chant se marient. Ensuite, je reviens au tempo
d’activer la circulation. Enfin, je passe quelques original. Avec l’entraînement, le processus
minutes à méditer et à respirer profondément. devient plus rapide. C’est une approche
J’en profite généralement pour exprimer éprouvée qui continue d’être efficace.
intérieurement ma gratitude de pouvoir faire de
la musique. Je fais rarement des échauffements Pourquoi joues-tu souvent pieds nus sur
à la basse avant un concert, généralement scène ?
le soundcheck suffit, mais je fais quelques Si je pouvais, je vivrais sans chaussures ! Je me
étirements des mains et des poignets juste sens plus stable, enracinée et connectée à la
avant d’entrer en scène. terre et à moi-même. Sur scène, être pieds nus
me donne confiance en moi. Quand je joue,
Souvent, tu joues de la basse et tu chantes j’oublie toutes les sensations et distractions
en même temps : est-ce difficile ? pour me concentrer sur ma musique. Pour le
Oui et je défie quiconque de soutenir le moment, lors des concerts avec -M-, je porte
contraire ! Lorsque cela donne l’impression de la des bottes parce que cela fait partie de mon
facilité, c’est que le musicien a trouvé la clé pour costume. J’adore le look créé par Agnès B., mais
jouer et chanter en même temps deux mélodies je pense que je vais revenir aux pieds nus pour
différentes. Je le vois comme un puzzle : tu les concerts cet été, à condition que les scènes
as toutes les pièces en main, il faut prendre le soient sans danger évidemment ! •
temps et se concentrer pour les assembler et
que l’image finale apparaisse enfin. J’essaie

« La basse fretless a toujours un son étrange à mon goût. »

MATOS
Basses : Music Man Stingray 4 et 5 cordes, MTD fretless
Amplification : Ampeg SVT VR et CL, baffles Ampeg 6x10
Effets : TC Electronic SCF, Aguilar TLC Compressor, MXR M82 Bass Envelope Filter, Boss ODB-3
TIMOTHY B. SCHMIT
Au jour le jour

Les rapaces les plus célèbres des États-Unis ont presque tous réalisé des vols planés en solo et y ont obtenu
quelques belles réussites. Il en va de même pour ce superbe opus signé Timothy B. Schmit, le bassiste du
groupe. Si les Eagles sont emblématiques du son californien de la West Coast, lui seul en est réellement
originaire. Toutefois, son nouvel album, Day by Day, montre d’autres facettes de son jeu et de ses talents de
compositeur. Le chanteur, bassiste et guitariste, qui a également travaillé avec Poco, Toto, Ringo Starr, Elton
John, America, Jimmy Buffett ou Steely Dan, a développé au fil des ans un large éventail de styles et de
compétences. Sur Day by Day, il s’est donc adjoint de nombreux anciens collaborateurs et on retrouve entre
autres aux voix et aux instruments Jackson Browne, John Fogerty, Kenny Wayne Shepherd, Jim Keltner,
Benmont Tench, Chris Farmer et Matt Jardine. De superbes harmonies vocales rappellent Crosby, Stills &
Nash ou les Beach Boys, et les rythmes tantôt reggae, tantôt soul, tantôt rock ou encore country sont magnifiés par son toucher
chaud et groovy à la basse. Timothy B. Schmit prend le temps d’évoquer son parcours et son nouvel opus avec Bassiste Magazine.

Par Lisa Vincent expérience définit la manière dont tu penses et deuxième face. Mais je suis ouvert à tout,
c’est une évolution permanente. j’écoute du jazz, du classique, du reggae et
j’essaie de me tenir au courant de ce qui sort de
Day by Day est ton septième album solo. Cet album témoigne des divers styles que nos jours, même si c’est plus difficile pour moi.
Comment as-tu évolué en tant tu apprécies : le reggae, la country, la folk, J’ai aussi eu l’occasion de jouer avec beaucoup
qu’auteur-compositeur ? la soul, le rock... Quel genre de musique d’artistes. Si mes chansons sont si variées, cela
J’ai le sentiment de m’améliorer sans cesse. écoutais-tu enfant ? vient du type d’auditeur que je suis.
Petit à petit, j’ai réussi à consacrer de plus J’ai toujours écouté beaucoup de styles
en plus de mon temps à ces projets : c’est différents. Mon père était musicien, il jouait Tu as dit que cet album était un peu le
certainement le plus gros changement et surtout dans des clubs. Quand j’avais 5 ans, troisième d’une trilogie avec Expando et
aussi le plus efficace (rires). Il y a de bons et de mes parents ont acheté un mobile home pour Leap of Faith. Quelles sont les similarités
mauvais jours pour la composition comme pour que nous puissions l’accompagner dans ses dans ton approche ?
le reste, mais les jours infructueux, ceux où tu tournées. Il jouait dans des bars où je n’étais C’est assez simple : Expando est le premier
luttes sans succès, sont aussi nécessaires. pas autorisé à rentrer en soirée, mais j’allais le album pour lequel je n’ai pas collaboré avec
voir plus tôt dans la journée et il m’a beaucoup quelqu’un au niveau de la composition. Ces
J’imagine que tes nombreuses influencé. Par ailleurs, j’écoutais tout ce qui trois opus sont ceux que j’ai entièrement écrits
collaborations et tes multiples expériences passait à la radio. Je suis né à une époque seul. Voilà la similarité, mais ce n’est pas une
au fil des ans t’inspirent aussi. presque pré-rock’n’roll : il y avait encore trilogie à proprement parler. C’est un tournant
Tout est une inspiration pour moi : ce que je beaucoup d’autres musiques et j’ai assisté que je voulais prendre depuis longtemps,
vois, les gens que je rencontre, les expériences au développement du genre. Le tout premier mais je n’avais pas encore sauté le pas. Pour
que je vis... C’est certainement vrai pour tout disque que j’ai acheté était Hound Dog, un moi, c’est un processus assez lent et, quand
le monde : tu es modelé par ton passé, ton single d’Elvis avec « Don’t Be Cruel » sur la j’étais plus jeune, j’étais trop anxieux, je

20 BASSISTE
« Comme mon travail
solo ne constitue pas ma
principale source de revenus,
je peux laisser libre cours
à ma créativité. C’est aussi
l’avantage d’être dans les
Eagles. »
voulais tout finir au plus vite. Cela compromet grâce à la radio, j’étais comme une éponge à Il y a un switch sur mon ampli, ce qui est
le travail de se précipiter et de se mettre des l’époque. assez nouveau pour moi. À l’époque, j’utilisais
deadlines. Il faut composer au rythme où les des têtes SWR, mais on n’en trouve plus que
choses arrivent. Et comme mon travail solo ne Travailles-tu toujours ton jeu de basse d’occasion aujourd’hui et on ne sait jamais
constitue pas ma principale source de revenus, aujourd’hui ? combien de temps elles vont tenir. Alors j’ai
je peux laisser libre cours à ma créativité. C’est Je ne dirais pas que je le travaille, je joue découvert ces Gallien-Krueger : c’est fou à quel
aussi l’avantage d’être dans les Eagles. surtout lorsqu’on est en tournée. Nous allons point elles sont légères et peu encombrantes
partir pour quelques semaines, puis revenir un de nos jours et leur switch permet de choisir un
Donc ton approche est assez différente moment avant de repartir, donc je dois rester son plus doux ou plus fort. Voilà toute l’étendue
avec les Eagles et dans ton travail en forme. C’est assez physique, je joue de la de mon utilisation des effets, sauf pour le titre
personnel ? basse depuis très longtemps et cela demande « The Boys of Summer » de Don Henley, où
Nous n’avons pas fait d’album depuis un long beaucoup au corps : on joue des concerts de je joue une fretless Pedulla avec un peu de
moment et je doute que cela arrive dans le trois heures, alors je pratique beaucoup plus chorus. Mais je suis assez basique, je ne suis
futur. De toute façon, les gens préfèrent écouter pendant ces périodes qu’en dehors. C’est pas très effets.
les vieux morceaux. En solo, tout commence presque comme être un athlète.
et s’arrête avec moi, et sans être égocentrique, Au sein des Eagles, tu dois te caler à la
j’adore ne pas devoir faire de compromis ou Quel matériel as-tu utilisé sur Day by Day ? basse sur le jeu de batterie de Don Henley,
demander la permission. Je peux littéralement J’ai de vieilles Jazz Bass Fender des années 60, mais aussi t’accorder avec le reste du
décider de ce que je mets ou non sur l’album, dont une de 1962 que j’appelle la numéro 1 et groupe au niveau du chant. Est-ce difficile
c’est libérateur. Si tu interroges les autres qui est ma basse de prédilection. J’en ai aussi pour toi ?
membres des Eagles qui ont une carrière solo, une de 1961 avec des potards concentriques Pas vraiment. Je joue de la basse et je
ils diront la même chose. et des cordes filées plat : je l’adore, elle a un chante en même temps depuis l’époque du
look un peu destroy mais c’est comme ça que lycée. Certaines chansons sont un peu plus
On entend de belles lignes de basse sur je l’avais achetée dans les années 70. Sur compliquées, mais ce n’est pas un énorme
Day by Day, même si l’instrument n’est pas quelques chansons, comme « Day by Day » ou challenge pour moi. Et si j’ai vraiment du mal,
beaucoup mis en avant. Pour toi, la basse a « Question of the Heart », j’ai joué une Höfner. je persiste jusqu’à ce que j’y arrive, c’est une
un rôle de soutien dans les compositions ? Je fais des essais sur chaque morceau pour simple question de répétition.
Quels bassistes admires-tu ? voir ce qui sonne le mieux. Pour l’amplification,
Oui, c’est un instrument de soutien et c’est la j’ai une tête Gallien-Krueger qui reste en Comment as-tu rejoint les Eagles à la fin
chanson qui dicte à quel point tu peux prendre permanence dans mon studio et je la fais des années 70 ?
ou non de la place et de quelle manière. passer dans un baffle SWR 4x10. Pour le live, J’étais dans le groupe Poco, qui n’avait pas
Généralement, quand j’écris un morceau, c’est la même chose mais en plus gros, avec un autant de succès que j’espérais. Nous avions
je ressens où la basse devrait se poser. Je 1x15 et des 4x10. Je n’ai pas de pedalboard. déjà partagé la scène avec The James Gang
pourrais citer beaucoup de super musiciens :
Paul McCartney évidemment, James Jamerson,
le bassiste original de la Motown, Willie Weeks,
« Avec les Eagles, nous essayons de jouer les morceaux le plus
Nathan East et bien d’autres. fidèlement possible par rapport au disque, [...] le public aime
Comment as-tu appris à jouer de la basse, les chansons dans la version qu’il connaît. »
car il me semble que tu as fait tes premiers
pas à la guitare ?
Vers la fin des années 1950, la musique folk
passait sans cesse à la radio. J’avais deux amis
qui voulaient comme moi jouer et chanter,
et le frère de l’un d’eux possédait de vieux
instruments qui traînaient. On a commencé
à apprendre par nous-mêmes en écoutant
des albums de folk. On essayait de faire des
harmonies ensemble... Vers 15 ans, on a décidé
de passer à l’électrique. On a emprunté des
instruments, mais nous voulions tous les trois
jouer la guitare lead : le choix s’est imposé
comme une évidence au fil des répétitions
(rires). Et j’ai fini à la basse, ce qui me convenait
bien parce que j’aimais et j’aime toujours
beaucoup cet instrument, qui est l’une des
fondations du morceau. J’ai beaucoup appris

22 BASSISTE
entendu dire que les Eagles étaient finis et j’ai
appelé Glenn qui me l’a confirmé. J’étais assez
choqué et triste ; j’ai dû revoir mes projets
d’avenir.

Puis quatorze ans plus tard, vous vous


retrouvez. Y a-t-il eu un revirement
d’opinion ?
En quelque sorte. Comme d’autres membres
l’ont dit, nous avions travaillé si intensément
que nous nous étions accordés trop peu de
moments de répit. Peut-être que si nous avions
été moins collés en permanence ensemble,
nous aurions pu continuer. En tout cas, après
presque quatorze années où chacun a mené
sa propre carrière, de l’eau avait coulé sous
les ponts et nous nous sommes doucement
rapprochés. Par exemple, à un concert caritatif
où je me trouvais avec Don et Glenn, nous
avons joué une chanson ensemble. Nous avons
aussi participé à un morceau de l’album de
country de Travis Tritt, « Take It Easy ». Lorsque
nous avons tourné le clip vidéo de cette
chanson, c’était la première fois que nous nous
retrouvions tous les cinq dans la même pièce
depuis notre séparation. Avec le temps, nous
avons voulu retenter l’expérience, pensant que
cela n’allait durer que trois ou quatre mois, mais
ça a eu tellement de succès que nous avons
continué.
« Je joue de la basse depuis très longtemps et cela demande
Tu n’étais pas encore dans le groupe à
beaucoup au corps : on joue des concerts de trois heures, […] l’époque de l’album Hotel California, que
c’est presque comme être un athlète. » vous reprenez actuellement en tournée.
Comment approches-tu ces chansons ?
Nous essayons de jouer les morceaux le plus
dans lequel était Joe Walsh et je m’étais un plus tard, il quitte les Eagles et ces derniers me fidèlement possible par rapport au disque.
jour retrouvé avec Don et Glenn à jouer sur passent un coup de fil. C’était assez fou. J’ai étudié ce que Randy jouait sur ces
une chanson de Linda Ronstadt, donc nous enregistrements : je ne voulais pas trop le
nous connaissions tous. Et au moment où je Ton premier morceau avec les Eagles, modifier même si certaines parties ne sont
me sentais un peu déçu de mon évolution avec « I Can’t Tell You Why », est devenu un peut-être pas exactement les mêmes, car le
Poco, j’ai reçu un appel de Glenn un matin, classique... public aime les chansons dans la version qu’il
qui m’a demandé si j’étais intéressé. J’étais Oui, je l’ai coécrit avec les gars et c’est le seul connaît. Ces morceaux parlent aux gens. Je
évidemment ravi. où je chante la voix principale sur l’album. crois que Don et Glenn avaient le talent de
C’était important pour moi, parce que cela me composer des morceaux très « radio-friendly ».
Pour l’anecdote, d’abord dans Poco, puis prouvait que j’allais dans la direction que je
dans les Eagles, tu as remplacé Randy souhaitais. Vas-tu tourner avec Day by Day ?
Meisner... Tout le monde me pose la question : j’aimerais
Nous sommes toujours restés amis, mais c’est Au moment de l’enregistrement de The beaucoup, car j’adore ça et je pourrais jouer
vrai que c’était une blague récurrente que de Long Run (1979), pressentais-tu que le dans des salles plus petites avec un super
lui demander quel était son prochain projet groupe allait bientôt se séparer ? groupe, mais je dois attendre de savoir ce qui
(rires). C’est un hasard cocasse : j’avais passé Tous les groupes ont des problèmes, donc va se passer pour la fin de l’année avec les
des auditions pour Poco, mais je n’avais pas été je ne voyais pas de situation anormale et je Eagles avant de planifier autre chose. •
sélectionné parce que je risquais d’être enrôlé n’en prenais pas exactement la mesure. Je
dans l’armée. Comme Randy est excellent, il ne connaissais pas les détails de leur histoire MATOS
avait été choisi mais il est parti quelques mois parce que je n’étais pas dans le groupe à ses Basse : Fender Jazz Bass 1961 et 1962, Höfner
plus tard et ils m’ont rappelé pour me proposer débuts et je ne me doutais pas de la gravité de 500/1, Pedulla Buzz Fretless
le poste que j’ai accepté. Et sept ou huit ans leurs sentiments. C’est par la rumeur que j’ai Ampli : Tête Gallien-Krueger et baffle SWR
4x10

BASSISTE 23
y Le e
Je n n
d be rg
L i n ANS L E S D
R E F I L
Q U AT E N T
LE V

Formé en 2004 par quatre amies soudées, Emily Kokal et Theresa


Wayman aux guitares, Jenny Lee Lindberg à la basse et sa sœur
Shannyn Sossamon à la batterie, Warpaint conquiert rapidement le public
avec son rock intimiste mais mature, à la fois dépouillé et riche, dont l’ambiance
aérienne est soulignée par les nappes de voix et d’instruments. L’Australienne Stella Mozgawa est
recrutée au rôle de nouvelle batteuse et Warpaint sort son premier opus en 2010, The Fool, acclamé par
la critique. Au fil des albums, le quatuor pousse le rock en dehors de ses carcans et se fait remarquer
pour son alchimie sur scène, avec une musique émancipée et des performances qui virent souvent aux
longues jams expérimentales. Cette liberté se confirme dans ce nouvel effort, Radiate Like This, où le
groupe joue des dissonances et des fusions de styles, passant de ballades acoustiques à des morceaux
groovy dont les rythmes mêlent sons électroniques et batterie. Ces deux dernières années ont été pour
les musiciennes l’occasion de se poser et de sortir un album travaillé et abouti, où elles évoquent l’amour
sous toutes ses formes, ses contradictions, ses victoires, ses frustrations, mais aussi l’amour de soi et
la bienveillance. En pleine tournée, de passage à La Cigale à Paris, Jenny Lee Lindberg prend un moment
pour discuter avec Bassiste Magazine de son ressenti pendant la pandémie, de la conception du nouvel
opus de Warpaint, ainsi que de son deuxième album solo, Heart Tax.

Par Lisa Vincent


Photos @ Nidhal Marzouk

BASSISTE 25
Après votre précédent album Heads Up Oui. Les deux projets étaient en cours de pendant ces sessions d’enregistrement,
en 2016, tu es partie en tournée avec réalisation simultanément. L’album de donc pour la plupart des chansons, la basse
Warpaint pendant près de trois ans. Warpaint aurait dû être déjà terminé, mais et la batterie était déjà posées. Puis, nous
As-tu vécu la pandémie comme une nous devions sans cesse repousser, alors avions prévu de faire une pause pour les
pause nécessaire ? j’ai finalisé ces deux opus à peu près au fêtes de fin d’année, car Emily était enceinte
Oui, nous en avions toutes grand besoin. même moment. Pour moi, il est important de et devait accoucher peu après. Avec l’arrivée
Pour moi, ce fut un moment apaisant. Nous m’exprimer individuellement pour préciser de la pandémie, les choses sont restées en
enchaînions albums et tournées dans un ma vision artistique. Je pense que c’est bien suspens pendant un moment, nous avons
cycle incessant depuis près de dix ans et d’explorer cela d’abord seul avant de revenir repoussé nos deadlines. Nous devions
j’avais besoin d’un rythme plus calme. Avec au groupe. Cela permet aussi d’être un peu encore terminer d’enregistrer pas mal de
la Covid, personne ne savait exactement moins dans le contrôle, moins réticent et plus guitares, de voix, de lignes mélodiques mais
ce qui allait se passer. Nous étions certes ouvert, laisser les choses se faire de manière le gros du travail était alors entre les mains
en train de terminer cet album, mais tout plus fluide plutôt qu’essayer d’imposer d’Emily et de Theresa. Il fallait évidemment
a été repoussé à de multiples reprises, car ses idées, que tout se passe de manière que je reste disponible pour les harmonies
nous vivions dans des endroits différents. déterminée et de donner des directives. Je vocales, pour donner un retour en général et
Malgré les incertitudes, ce fut étrangement suis plus détendue lorsque je peux exercer pour montrer mon soutien dans le processus.
rafraîchissant pour nous qui étions si ma créativité de mon côté. C’était difficile de ne pas être dans la même
habituées à avoir un calendrier très rempli, pièce pour s’inspirer les unes des autres,
avec des échéances prévues sur plus d’un Comment s’est déroulé l’enregistrement mais cela n’avait pas que des mauvais côtés :
an. Comme mon emploi du temps n’était de Radiate Like This ? c’était sympa d’avoir chacune notre espace
plus entièrement planifié, j’en ai profité pour Nous avons travaillé dans différents studios. pour développer nos idées librement, même
faire de la musique, de la peinture, de l’art en Nous avons commencé par des sessions si cela m’a manqué de ne pas avoir de retour
général, des hobbies en tous genres. Je viens pour composer et enregistrer des démos immédiat. C’est la première fois qu’on fait
d’emménager en Utah : c’est un bel endroit, en 2018, avant d’entrer vraiment en studio un album de cette manière mais on s’est
très inspirant, où il y a beaucoup à faire. vers la fin 2019 jusqu’au début 2020. Stella débrouillées pour que ça marche et on en est
et moi avons fait la majorité de nos parties fières !
Tu as donc travaillé sur ta première
exposition artistique, mais aussi sur ton
deuxième album solo Heart Tax. Peux-tu « Pour moi, il est important de m’exprimer individuellement
nous en parler ?
J’ai fait le plus gros de cet album en Utah
pour préciser ma vision artistique. »
pendant la pandémie. Je l’ai coproduit avec
mon compagnon ; il fait partie du groupe
Goldensuns avec ses frères, qui m’ont
également accompagnée. Pour mon premier
album solo, j’avais vécu l’expérience en
studio classique, les musiciens venaient
pour enregistrer, mon coproducteur Norm
Block était aussi le batteur, il y avait
beaucoup d’interactions d’un point de vue
musical. Cette fois, j’avais de nombreuses
restrictions et je n’avais pas un très gros
budget, donc j’ai fait une bonne partie du
travail préparatoire moi-même. Par la suite,
je n’avais pas accès à un grand nombre de
musiciens, malgré l’aide de Goldensuns. Par
exemple, je n’ai pas pu jouer en personne
avec Stella, qui était aussi batteuse sur ce
projet, donc beaucoup de rythmes ont été
programmés en amont. Cet album reflète
bien mon état d’esprit à cette période : il a
un côté très introspectif car j’étais un peu
isolée, sans mon groupe d’amis, à cause de
mon déménagement et de la pandémie.
MATOS
Penses-tu que ces expériences Basses : Rickenbacker 4001 1978, Fender Precision Bass
personnelles t’ont aidée pour écrire de la Amplis : Ampeg SVT CL Classic avec baffles SVT 8x10
musique en groupe avec Warpaint ? Effets : Boss OC-3 Super Octave et CE-2 Chorus, Electro-Harmonix Holy Grail Reverb

26 BASSISTE
Revenons à tes débuts : comment as-tu
abordé la basse ?
J’ai commencé à jouer de la basse vers
18 ans, un peu par hasard. Je venais de
déménager de Reno à LA et j’avais envie
d’apprendre à jouer d’un instrument.
J’hésitais entre la batterie, la basse et le
piano, mais ce dernier a vite été écarté
car il était hors de portée du point de vue
financier. Quant à la batterie, je n’avais pas
d’endroit pour l’entreposer. Et alors que je
rendais visite à un ami dans la ville de Reno
où j’ai grandi, il m’a donné une basse et
un ampli. Le choix s’est donc fait un peu
tout seul et j’ai commencé à apprendre par
moi-même. J’ai rapidement adoré : je n’avais
pas de difficulté à jouer sans me disperser,
c’était la première fois de ma vie que je
réussissais à rester concentrée cinq heures
d’affilée.

Quelles étaient alors tes influences ?


Je n’ai pas vraiment pris de leçons, mais
j’avais des amis bassistes qui m’ont un peu
guidée et conseillée. Je savais déjà que je
n’allais pas me plonger dans la théorie dès
le début, parce que je me doutais que ce
ne serait pas très satisfaisant pour moi. Ce
dont j’avais envie, c’est de pouvoir jouer
rapidement une chanson et des vraies
parties de basse. Alors un de mes amis m’a
montré la ligne de basse de « Lovesong »
des Cure. C’est la première que j’ai jouée,
puis il y a eu « Sexy Boy » de Air et « Only
in Dreams » de Weezer. Ce sont les trois
premiers morceaux que j’ai travaillés à la
basse et je les ai répétés sans cesse pendant
un bon moment. Par la suite, j’ai commencé
à faire mes propres lignes de basse, j’ai
appris les gammes, puis je me suis procuré
une boîte à rythmes et je m’entraînais à
jouer et improviser par-dessus des batteries
programmées pendant des heures tous les
jours. Je crois que ces premiers morceaux
que j’ai appris ont un peu influencé la
manière dont je joue aujourd’hui. bien qu’elles se sont retrouvées à vivre dans c’est donc un peu à son initiative que tout a
le même logement. C’est ainsi que nous débuté. Elle s’est chargée de l’organisation
Et comment as-tu rencontré les autres avons sympathisé toutes les quatre. À cette pour qu’on commence à répéter toutes
membres de Warpaint ? époque, je jouais déjà depuis deux ans et ensemble, elle a été très généreuse et a
J’ai rencontré Emily lors d’un casting pour j’étais très impliquée dans ma pratique. Mon beaucoup investi pour nous. Je ne suis pas
une pub, vers 2001. Nous avons un peu but principal était de m’améliorer à la basse, sûre que nous existerions aujourd’hui si elle
ressenti un coup de foudre au premier ça en devenait presque obsessionnel. Ma n’avait pas fait tout ça.
regard, nous étions très enthousiastes de sœur, qui jouait de la guitare de son côté,
faire connaissance. Nous sommes donc a vu mon intérêt et elle était partante pour Quel matériel utilises-tu sur Radiate Like
rapidement devenues amies, puis Theresa, qu’on monte un groupe ensemble. Alors This ?
qui était une copine d’enfance d’Emily, a qu’elle était à New York pour jouer dans un En studio, on a utilisé mon Ampeg SVT
emménagé à LA peu de temps après. Son film, elle m’a appelée pour me proposer de Classic ; il y avait aussi un ampli vintage
petit ami était le colocataire de ma sœur, si monter un groupe avec Emily et Theresa, Fender, peut-être un Bassman. Sur cet

BASSISTE 27
album, j’ai joué principalement ma de titres qu’il n’en fallait : nous avions seize la création : il faut que nous ayons confiance
Rickenbacker ’78. Je me souviens aussi morceaux et il a même fallu en abandonner les unes envers les autres.
m’être amusée avec un Höfner, mais je ne quelques-uns. Donc, il me semblait
suis plus certaine si la prise a finalement été contre-productif de proposer des titres Tu chantes beaucoup d’harmonies en
retenue pour le disque. J’utilise beaucoup supplémentaires et je les ai gardés pour mon même temps que tu joues de la basse.
ma pédale Boss Chorus, la Holy Grail Reverb projet solo. Est-ce naturel ou compliqué pour toi ?
d’Electro-Harmonix, un octaver de chez Boss, Ça n’a pas été immédiat, ça m’a demandé
l’OC-3. Je suis restée assez basique, rien de Après vingt années passées avec les beaucoup de travail. Au début de Warpaint,
trop complexe. autres membres du groupe Warpaint, je me concentrais sur mon jeu de basse,
quelles leçons pouvez-vous tirer de cette seules Emily et Theresa chantaient. Par la
Il y a beaucoup de variété dans vos expérience ? suite, j’ai commencé à m’y intéresser, je
chansons. Vous mélangez sons L’une des choses les plus importantes voulais faire des harmonies vocales. Au
électroniques et naturels, mais aussi, que nous avons apprises, c’est que la début, je n’ajoutais que quelques sons aux
du point de vue du rythme et des communication est la clé de la longévité, chœurs puis, à force de m’accrocher, j’ai pu
harmonies, on entend des influences de mais aussi qu’il faut être honnête envers chanter complètement les morceaux. Il m’a
world music, d’electro, de folk, de rock… soi-même, connaître ses sentiments et fallu aussi surmonter une autre difficulté : au
Où trouvez-vous les inspirations pour ce pouvoir les communiquer aux autres sans départ, je détestais le son de ma voix. Par la
genre de morceaux complexes ? que cela ne devienne personnel. Être suite, j’ai compris que, lorsque je reprenais
Généralement, c’est Theresa, Emily ou moi en relation avec une personne est déjà une chanson, j’essayais de la chanter de
qui propose une idée de chanson et le reste difficile, alors avec trois, dans le cadre d’une la même manière que l’artiste original, et
du groupe l’embellit. C’est simplement la collaboration artistique, il y a beaucoup forcément, je ne pouvais pas. Il a fallu que je
combinaison de nos quatre personnalités. de défis à relever. Après les qualités de découvre ma propre voix et que j’apprenne à
Lorsqu’un morceau débute, il est souvent communication, il faut aussi faire preuve l’aimer.
assez simple, puis chacune apporte ses de compréhension, savoir se mettre à la
propres influences. Il me semble que, sur cet place des autres et également savoir être Y a-t-il d’autres projets dont tu voudrais
album, aucun morceau ne venait d’une de vulnérables ensemble. Être ouvertes et parler ?
mes idées. J’ai contribué à la composition honnêtes permet d’avoir l’impression que Oui, le groupe Goldensuns qui a coproduit
dans un second temps, pendant les sessions nous évoluons dans un endroit sûr où l’on mon album solo est super : allez l’écouter sur
de répétition, mais nous avions déjà plus peut s’exprimer librement. C’est nécessaire à Spotify ! •

« Être en relation avec une personne est déjà difficile, alors avec trois, dans le cadre d’une
collaboration artistique, il y a beaucoup de défis à relever. »

Jenny, Emily Kokal, Stella Mozgawa & Theresa Wayman


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C hr i s K a e l
S 1BUMS
0 A L
«" LE É M A V I E   "
N T C H A N G
QUI O
Depuis ses débuts à Las Vegas en 2005, Five Finger Death Punch s’est imposé comme l’une des
formations incontournables du paysage metal actuel. Juste avant de livrer au public sa neuvième
ogive baptisée AfterLife, le quintette s’est lancé dans une tournée marathon en Europe, avec
un passage très remarqué à la bouillonnante édition 2022 du Hellfest. Bassiste Magazine a pu
s’entretenir avec le charismatique bassiste Chris Kael, dont l’imposante carrure n’a d’égale que
la gentillesse. Avec le rythme de la tournée, Chris ne touche plus terre, mais il a tout de même
trouvé le temps de vous balancer sa sélection d’albums rock, punk et thrash metal pas piquée
des hannetons !
Par Adrien Kah

3 ¦ The Ultra-Violence (1987) ultra-technique de Dave Lombardo (batterie),


1 ¦ Alive II (1977) DEATH ANGEL la patte de Rick Rubin à la production...
KISS Basse : Dennis Pep Avant d’intégrer Five Finger Death Punch, je
Basse : Gene Simmons Étonnamment, ce groupe jouais de la basse et chantais dans diverses
Il s’agit d’un des tout ne fait pas vraiment formations et c’est un peu Tom Araya qui
premiers albums que partie de mes influences m’a mis le pied à l’étrier. Je me disais à
j’ai eus et probablement principales mais un titre l’époque : « Si Tom le fait, je peux le faire ! »
celui que j’ai le plus m’a marqué à jamais à cause de la partie de J’ai toujours été admiratif de son jeu au
écouté dans ma jeunesse. J’ai eu la chance basse. C’est sur le pont du morceau « Evil médiator : Tom ne va pas souvent chercher
de voir Kiss sur scène à ses débuts. Je ne Priest ». J’adore tellement cette partie de dans le registre aigu de l’instrument, mais
savais pas vraiment ce qu’était une basse basse qu’elle m’est rentrée dans le crâne sa capacité à rivaliser avec les guitares en
électrique à l’époque mais, en voyant Gene pour de bon ! Je l’ai relevée à l’oreille en termes de vélocité force mon respect !
Simmons débarquer avec cet instrument et passant un peu de temps à comprendre
ce look incroyables, j’ai tout de suite su ce comment le bassiste faisait pour obtenir ce 6 ¦ Perseverance (2002)
que je voulais faire de ma vie ! Je ne jouais son. Creuser ce genre de détails a renforcé HATEBREED
pas encore de guitare ou de basse électrique mon intérêt pour les effets à la basse. Basse : Chris Beattie
en ce temps-là mais j’avais un énorme Je vais citer cet album
poster du groupe dans ma chambre devant 4 ¦ The Game (1980) rien que pour le son de
lequel je m’amusais à imiter la gestuelle QUEEN basse phénoménal de
scénique de Gene Simmons tout en faisant Basse : John Deacon Chris Beattie ! Pour la
de l’air bass et en écoutant cet album à plein Queen est un groupe petite histoire, juste après avoir décroché
volume (rires)  ! majeur dans l’histoire le poste de bassiste au sein de 5FDP, je me
du rock et John Deacon suis branché avec le bass tech de Hatebreed
2 ¦ Master Of Puppets (1986) n’est pas étranger à pour avoir des infos sur la manière dont
METALLICA ce succès. Ce bassiste m’a touché par sa Chris obtenait ce son. Il m’a invité à venir
Basse : Cliff Burton créativité. Il suffit d’écouter la ligne de discrètement en backstage pour regarder
Cet album m’a permis « Another One Bites The Dust » pour mettre ce que Beattie utilisait comme ampli, effets,
de me trouver en tant tout le monde d’accord ! Il y a aussi « Dragon etc. Il y avait un ampli Ampeg et, parmi ses
que bassiste. Lorsque Attack », un autre titre de cet album, moins pédales d’effets, j’ai remarqué une SansAmp
j’ai commencé à jouer connu du grand public mais qui contient de Bass Driver de Tech 21. C’est en voyant cette
de la basse électrique, j’écoutais beaucoup super lignes de basse. John Deacon est un pédale que j’ai compris comment il arrivait
Metallica dont je tentais de relever les titres musicien solide au son très compact qui m’a à obtenir ce son mordant avec une basse.
à l’oreille. Je savais que Cliff jouait aux fait réaliser que les bassistes étaient eux J’ai pris quelques photos de ses réglages qui
doigts et, en essayant de décortiquer son aussi capables de composer des tubes. m’ont clairement servi de base pour élaborer
jeu, je me suis rendu à l’évidence : je ne mon propre son pour 5FDP. Quelque temps
pourrais jamais jouer comme lui... Ce mec 5 ¦ Reign In Blood (1986) plus tard, j’ai fini par confesser à Chris
joue à la vitesse d’un guitariste de metal SLAYER Beattie qu’une bonne partie des sons de
rien qu’avec ses doigts (rires)  ! Mon jeu aux Basse : Tom Araya basse qu’il pouvait entendre sur nos albums
doigts étant ce qu’il était à cette époque, je Il n’y a pas grand-chose à était des réglages que je lui avais piqués
me suis plutôt intéressé à James Hetfield jeter sur ce disque, tout (rires)  ! Depuis ce moment, la SansAmp Bass
et Jason Newsted dont le jeu rapide au est absolument génial ! Driver ne me quitte plus !
médiator collait plus à mon style. Les riffs, les solos, le jeu

« En voyant Gene Simmons débarquer avec cet instrument et ce look incroyables, j’ai tout de suite su
ce que je voulais faire de ma vie ! »

BASSISTE 33
7 ¦ Against The Grain (1990)
LE RIG DE
sur une chanson. Je suis bassiste et je fais
BAD RELIGION des chœurs au sein de 5FDP, donc il est
Basse : Jay Bentley important pour moi de savoir où me placer

CHRIS KAEL Je suis un grand fan


de punk et de punk
d’un point de vue vocal et harmonique. Je
remercie Bad Religion d’avoir facilité cette
hardcore. Cet album prise de conscience.
Chris est un bassiste au jeu frontal m’a inspiré mais pas
doublé d’une attaque puissante au seulement au niveau de la basse. Lorsque 8 ¦ Dirt (1992)
médiator. Son arsenal se compose tu joues d’un instrument, que tu composes, ALICE IN CHAINS
principalement de basses quatre cordes il est important de penser aussi aux autres Basse : Mike Starr
accordées en Si-Mi-La-Ré montées éléments qui t’entourent. Écouter Bad Voici un album
avec un tirant plutôt costaud : 130, 110, Religion ne m’a pas seulement appris à jouer qui est cher à mes
90, 70. des trucs rapides à la basse : ce groupe yeux. Je l’écoute
S’il a longtemps joué sur Spector, Chris m’a montré l’importance des harmonies systématiquement avant
utilise désormais un modèle signature vocales et l’impact qu’elles pouvaient avoir de monter sur scène, je chantonne les
développé avec BC Rich Guitars,
fortement inspiré du look de la Warlock.
Cette basse se compose d’un corps en
acajou, une touche en ébène repose sur « John Deacon est un
un manche constitué d’un assemblage
de cinq pièces d’érable et de wengé, musicien solide au
la tête est surmontée de mécaniques
Grover. son très compact qui
L’électronique de la basse est une
configuration « P/J » somme toute
m’a fait réaliser que
assez classique avec des micros EMG, les bassistes étaient
deux potards de volume (un par micro)
et une équalisation à deux bandes (un eux aussi capables de
boost / cut pour les aigus, un pour les
graves). La basse est disponible dans composer des tubes. »
deux finitions : blanc ou noir satiné.
Simple, efficace !

Chris utilise principalement une seule


pédale d’effet : la SansAmp Bass Driver
de Tech 21.
Côté amplification, il joue sur des
amplis Mesa/Boogie : une tête Bass
Strategy 8:88 et des baffles Traditional
PowerHouse 8"x10", de quoi faire
trembler n’importe quel plateau !

Spector CK-4 BC Rich White BC Rich Black

34 BASSISTE
parties vocales, ça m’aide à me chauffer la qu’un seul, ce serait celui-ci. Le mix est juste
voix et à me mettre dans le bon mood. Le massif ! J’ai découvert cet album à la radio,
morceau d’ouverture « Them Bones » est à une époque où il était monnaie courante
pour moi un classique du grunge qui n’a pas d’entendre ce style de musique sur les
pris une ride ! ondes. J’ai tout de suite été scotché ! J’étais
d’ailleurs loin de me douter que c’était un
9 ¦ Vulgar Display Of Power morceau de Pantera. Je croyais au début
(1992) qu’il s’agissait d’un nouveau titre d’Exhorder
PANTERA (groupe de thrash metal américain ayant
Basse : Rex Brown sévi dans les années 80/90, ndlr) . Je
Pantera est plaisantais même en disant qu’Exhorder
incontournable aux s’était enfin décidé à mettre plus de thunes
États-Unis, beaucoup dans ses productions studio (rires)  ! Lorsque
d’albums de ce groupe j’ai réalisé qu’il s’agissait de Pantera, je
m’ont marqué mais si je ne devais en citer me suis précipité chez mon disquaire pour
acheter l’album.

10 ¦ Far Beyond Driven (1994)


PANTERA
Basse : Rex Brown
Encore un album de
Pantera, sorti après
Vulgar Display Of Power .
Cet album est une bonne
synthèse de tout ce que j’aime dans le rock :
le côté punk hardcore avec des titres comme
« Strength Beyond Strength », le côté groove
avec des riffs comme celui de « I’m Broken ».
J’ai énormément de respect pour Rex
Brown, pas seulement en tant que musicien
mais aussi en tant que personne. J’ai eu la
chance de le rencontrer et nous sommes
devenus amis : c’est vraiment un mec en
or ! J’ai d’ailleurs joué sur le même modèle
de basse que lui lorsque j’ai décroché mon
premier endorsement avec Spector. Par la
suite, nous avons développé mon premier
modèle signature, celui avec le chevalet en
forme de poing américain (voir photo dans
l’encadré) . Tout cela, c’était bien avant que
je ne passe chez BC Rich mais, sans Pantera,
cette basse n’aurait probablement jamais
existé ! •

« Écouter Bad Religion ne m’a


pas seulement appris à jouer
des trucs rapides à la basse, ce
groupe m’a montré l’importance
des harmonies vocales et
l’impact que cela pouvait avoir
sur une chanson. »
KYLE
EASTWOOD
CINEMATIC BASS
Depuis ses débuts en 1998, avec une carrière qui l’a vu enregistrer dix albums et des bandes originales de films cultes (Mystic River, Million
Dollar Baby ou Lettres d'Iwo Jima), Kyle Eastwood a acquis la réputation d’un leader de groupe et contrebassiste au style simultanément
mélodique et hard bop. Rencontre à l’occasion de sa récente tournée française et de son passage au festival Jazz à Saint-Germain-des-Prés,
à Paris.

Par Jack Beauregard comme Gran Torino que j’ai coécrit pour le une grille d'accords. Ensuite, c’est à moi
Photos @ Jérôme Bonnet film de mon père. de trouver un arrangement, quelques
changements d’accords qui permettent
Vous venez de jouer au théâtre de Lors de notre dernière rencontre, vous de mettre en valeur la mélodie. Puis je
l’Odéon. Qui sont les musiciens qui vous aviez évoqué l’idée d’enregistrer votre père suis libre de trouver les musiciens qui
accompagnent en ce moment ? au piano sur des standards, pour rajouter conviennent et d’enregistrer une première
J’essaie de changer le line-up selon ensuite une section rythmique avec vous à version.
l’endroit où l’on joue. J’ai trois QG, Los la basse. Cela va se faire ?
Angeles, Londres et Paris où j’ai un Probablement pas. Mon père a été pianiste Vous avez un studio spécifique ?
appartement près de la place des Invalides. de jazz dans les bars, mais c’était il y a Il y a tout ce qu’il faut dans les bureaux
Pour le show de l’Odéon, j’ai fait appel à longtemps, et il a ensuite enregistré un de sa société à Los Angeles. Mais la
la vocaliste Camille Bertault pour notre album de country music quand il jouait dans musique de film se divise en trois jeux
version des « Moulins de mon cœur » de la série TV Rawhide … Aujourd’hui, c’est de balles complètement différents. La
Michel Legrand. Notre invité spécial était difficile pour lui de revenir en arrière. composition se fait chez nous, dans notre
le trompettiste Ibrahim Maalouf. Le groupe salon, autour du piano. Ensuite, si c’est un
est constitué de musiciens britanniques Comment composez-vous avec lui ? thème principal, il est enregistré comme
qui connaissent bien le répertoire et C’est très simple, il s’assied au piano et un disque dans un studio. Mais pour
tournent avec moi partout cette année : me joue ce qu’il prévoit : la mélodie et l’illustration sonore, le film passe sur un
Andy McCormack au piano, le batteur
Chris Higginbottom, le trompettiste
Quentin Collins et Brandon Allen au sax. « Je cherche toujours à sonner comme Ron Carter
J’allais oublier le chanteur londonien Hugh
Coltman qui chante tous ces thèmes, et Dave Holland. »
écran et nous suivons l’action, en soulignant j’ai une relation unique avec le cinéma. J’ai Lalo Schifrin pour le film Bullitt avec Steve
ou en nuançant ce qui se passe sur l’écran. choisi un mix de titres que j’avais écrits et McQueen, Bernard Herrmann et la musique
Il faut être conscient du script bien avant de de bandes originales de films classiques. de Taxi Driver (qui était aussi l’un des
commencer à jouer pour être synchronisé D’ailleurs, l’album a tellement bien marché compositeurs favoris de Hitchcock), Ennio
avec l’action. Le timing apparaît sur le bas de que le label Jazz Village m’a demandé Morricone pour Per le Antiche Scale , etc. J’ai
l’écran et on suit au dixième de seconde près. de faire la suite. Nous allons enregistrer tenu à inclure ce clin d’œil au compositeur de
Cinematic 2 à l’automne. la série des westerns de Sergio Leone dans
Votre avant-dernier album, In Transit lesquels jouait mon père.
(2017), était jazz et très influencé par Comment avez-vous choisi les titres ?
l’école anglaise, façon Dave Holland. Selon quels critères ? Vous avez aussi choisi deux thèmes
Qu’est-ce qui a motivé Cinematic (2019), Ce sont des thèmes que j’ai toujours d’Henry Mancini…
beaucoup plus diversifié ? appréciés et, surtout, ils se prêtaient bien à Un très grand compositeur. Son thème pour
C’était un projet naturel pour moi parce que de nouveaux arrangements. J’ai donc revisité le film Charade de Stanley Donen est l’un des
plus connus…

Mais celui de La Panthère Rose (« Pink


« Le plus important, c’est le beat, le rythme. » Panther Theme ») est bien plus connu.
Qu’est-ce qui vous a inspiré ?
C’est basiquement un morceau de jazz, avec
un beat élastique comme la démarche de la
panthère. As-tu remarqué que la panthère
rose est un mâle ? J’ai passé des heures
quand j’étais un kid à regarder la série de
dessins animés qui en a été tirée. Mais mon
idée était de revisiter cette période datant
d’avant ma naissance (je suis né en 1968),
quand les 45 tours de jazz instrumentaux
étaient classés dans les charts. Mon père
avait, et a toujours, une collection de 45
tours que j’ai compilée sur mon iPod. Des
classiques tels que « The Sidewinder » de
Lee Morgan ou « Blues March » d’Art Blakey
& The Jazz Messengers. Je pense être arrivé
à intégrer mon propre feeling dans cette
version de « Pink Panther Theme ».

Vous jouez toujours sur des contrebasses


de David Gage ?
J’en ai deux : il y a une trois-quarts facilement
transportable et une full-scale que je joue en
studio et dans les grands concerts.

Comment obtenez-vous ce son à la fois


grave et bien défini ?
Je cherche toujours à sonner comme Ron
Carter et Dave Holland. Je m’en approche
avec deux étages différents d’amplification.
Sur la David Gage d’abord, avec un micro
DPA placé sur le chevalet. C’est mon arme
secrète. Ensuite, c’est le réglage de mon
Ampeg, je monte les fréquences graves puis
j’équilibre la définition avec suffisamment
de médium pour que le son soit clean. Ce
qui est variable suivant l’endroit où je joue.
C’est toujours réglable à partir de la sono de
façade, mais je préfère avoir le son voulu à la
source.

38 BASSISTE
Avez-vous des basses électriques ?
J’ai une nouvelle Gibson cinq-cordes Custom
de couleur verte fabriquée spécialement pour
moi par le Custom Shop. Elle est inspirée par
la basse prototype de Bunny Brunel, que j’ai
toujours chez moi. C’était une Carvin, mais
fabriquée par Gibson, ils avaient déjà les
plans de la Carvin originale. Le modèle que
j’ai maintenant n’est pas commercialisé par
Gibson, mais il existe une ESP Bunny Brunel
qui s’en rapproche.

Comment avez-vous commencé la basse ?


J’ai d’abord joué avec des groupes dans
mon lycée : R&B, reggae, Motown… Je
tenais à m’affirmer et à jouer la musique de
ma génération, en laissant de côté les gens
que mon père m’avait présentés : Count
Basie, Dizzy Gillespie… et les disques que
j’entendais dans ma famille : Thelonious
Monk, Stan Kenton, Brubeck, Miles. Je
me suis éloigné de cela mais, quand j’ai
commencé à prendre des leçons avec Bunny
Brunel, j’ai réalisé que lui aussi écoutait et
respectait les mêmes choses et je suis revenu
à ce que j’avais appris depuis mon enfance.
Le moment est arrivé où j’ai dû choisir ce que
je voulais faire : du cinéma ou de la musique…

Le cinéma, c’était sérieux ?


J’ai joué dans les films de mon père dès l’âge
de 8 ans : Josey Wales (1976), Bronco Billy
(1980), Honkytonk Man (1982)…
« Il y avait toujours cette question qui me trottait dans la tête :
Qui est, soit dit en passant, la meilleure "Pourrai-je faire aussi bien que mon père ?" et la réponse était
biographie de Hank Williams jamais
tournée… Avez-vous suivi une formation toujours : "N’y pense même pas !" Alors je me suis dirigé vers
d’acteur ?
Le tour complet, à 360° : comment me une carrière de musicien. »
placer et respecter les marques devant la
caméra, mes entrées et sorties du plateau n’a pas été déçu, je crois qu’il savait qu’il est avec quelques shows sur la Côte d’Azur.
de tournage, les cours de diction avec toujours difficile pour les enfants d’acteurs Puis, nous irons travailler le répertoire de
des exercices du type : « The five fyfes are de réussir. Sauf pour Jamie Lee Curtis, fille de Cinematic 2 et pour l’enregistrer à l’automne.
playing for the flying fighters of freedom. » Tony Curtis et Janet Leigh.
Et aussi comment vivre un rôle de l’intérieur, Pour terminer, quel serait votre conseil aux
mémoriser un script, etc. Mais il y avait Musicalement, vous avez une approche lecteurs de Bassiste Magazine ?
toujours cette question qui me trottait dans qui aborde aussi bien la world music que le Le plus important, c’est le beat, le rythme.
la tête : « Pourrai-je faire aussi bien que mon funk ou la musique africaine… Téléchargez sur votre smartphone une
père ? » et la réponse était toujours : « N’y C’est la base du jazz ! Tu mets tout dans app avec un métronome électronique et
pense même pas ! » Alors je me suis dirigé un shaker et tu secoues. Il y a aussi une utilisez-la chaque fois que vous travaillez,
vers une carrière de musicien, principalement synchronicité qui te fait rencontrer les même si ce n’est que pour un quart d’heure
parce que la musique - tout particulièrement personnes qu’il faut quand tu voyages, et je d’échauffement. Vous constaterez assez vite
le jazz - a toujours été importante dans ma passe mon temps sur la route à rechercher un changement dans votre jeu. •
famille. Mon père et ma mère jouent tous ces rencontres et inspirations musicales. Je
deux du piano et ma grand-mère aussi. Le pense y revenir après Cinematic … MATOS
côté musical était solidement ancré et c’est Contrebasse : David Gage
ce sur quoi j’ai commencé ma carrière de Quels sont vos projets immédiats ? Ampli : Ampeg
musicien. Quand je l’ai annoncé à mon père, il Nous allons terminer la tournée européenne Basse : Gibson 5-cordes Custom

BASSISTE 39
BASS BAZAR POGO CAR CRASH
CONTROL
FRÉQUENCE VIOLENCE
Panenka Music

Voilà un groupe qui tel un millésime, semble


se bonifier avec le temps ! Brutal, massif, on
se prend d’entrée de jeu le mur de guitares
de nos Frenchies et l’on constate que le son
de Pogo Car Crash Control s’est encore affiné
avec ses riffs redoublant de technicité et de
subtilité (mention spéciale aux harmoniques
naturelles façon Machine Head sur « Tourne
pas rond »). La facette mélodique du groupe
semble également être plus assumée
qu’auparavant quitte à se coller une petite
étiquette FM (« Cristaux liquides »)... Et
franchement ce n’est pas pour déplaire. On apprécie d’autant plus ces petites plages de respiration pour reprendre
derrière une bonne déferlante de riffs dans la tronche (« Reste sage ») ! Le son de basse de Lola Frichet est tout
simplement mortel et ferait pâlir d’envie le bassiste de Royal Blood ou des Queens Of The Stone Age. La cheffe
de file du mouvement « More Women On Stage » fait rugir la Fender Mustang avec des sonorités que l’on ne
soupçonnerait pas sur une basse shortscale (perso, si je pouvais avoir la recette de la disto…). Si l’on devait mettre
un bémol sur ce Fréquence Violence, ce serait peut-être sur le traitement des voix, parfois un peu trop noyées dans
le mix... Cela mis à part, si vous cherchez du bon punk/metal pour vous arracher la tête à la place d’une soupe
ensoleillée qui pue le monoï, n’allez pas plus loin : consommez français !
Gabriel Honoré

À une époque où les duos basse / batterie survitaminés deviennent monnaie courante, il est plutôt rare de voir LYAR
émerger des formations de type trio, constituées de deux bassistes, pour toujours plus de fréquences graves.
Lyar est l’une d’entre elles, made in France qui plus est ! Ce jeune groupe revendique des influences punk, grunge LYAR
voire post-punk (Hole, Fugazi et j’en passe...), très présentes sur ce premier EP à son nom. Le son global est,
certes, brut de décoffrage, mais le trio sait aussi faire dans la nuance pour proposer des ambiances plus psyché Les Disques Abrasifs /
(« You »). Si pour le chaland moyen le fait d’avoir deux basses au sein d’une formation ne suffit pas à souligner French Fries Publishing
l’originalité de ce projet musical, sachez
qu’en outre, le chant lead est assuré par
le batteur Anthony dont la voix flirte avec
celle de Kurt Cobain (« Far Away »). Côté
basses (et je vous rappelle qu’il y en a deux),
le job est assuré par Leslie et Yannick qui,
en plus de proposer de bons riffs (« Kill It »),
usent et abusent de la distorsion et autres
pédales de fuzz ! Une première réalisation
qui laisse un goût de trop peu, mais attise
notre curiosité quant à ce que le trio pourrait
proposer sur du long terme... Avec une
production studio plus léchée, le potentiel de
Lyar pourrait bien éclore !
Adrien Kah

40 BASSISTE
THE BLACK KEYS
DROPOUT BOOGIE
Warner
Huilez vos barbes, faites couler un peu de liquide
houblonné et mettez en pause votre quête de basses
vintage sur eBay. Les Black Keys sont de retour. C’est
déjà le troisième album depuis leur come-back en
2019 et les Blues Brothers d’Akron reviennent avec des
cheveux gris et une fournée de chansons originales. En 10 titres et 30 minutes,
est-ce l’album de la maturité ? Sur « Wild Child », premier single glam-funk de
l’album, Pat Carney, le batteur, se charge de la basse et nous régale de quelques
beaux slides. À l’unisson du riff et bien collé au kick, Pat le bassiste n’oublie
pas de laisser de la place aux fills de batterie. Un beau travail d’équipe. Dans
l’ensemble, les lignes jouées par nos deux compères sont plus épurées, moins
fuzzy qu’à l’accoutumée. Ce groove en finesse qui sent bon la P-Bass et les
filées plat vient porter le très soul et élégant « How Long ». Le ton de ce Dropout Boogie est varié, un « dropout » désignant quelqu’un qui a lâché les
études. Avec le catchy et gentiment crétin « Your Team is Looking Good », on rit un peu avant d’affronter la crise de la quarantaine. « Burn the Damn
Thing Down », avec son titre agressif, est pourtant un morceau country, sur deux musiciens crevés, essayant sans trop y croire d’atteindre la prochaine
ville. Un « burnout boogie » donc, teinté de désillusions et ils le disent eux-mêmes : « Happiness, it isn’t known to us. » Musicalement, la prise de risque
est minime. Certains regretteront l’énergie des hits produits par Danger Mouse. Mais nous, on ne boude pas notre plaisir. Surtout quand Billy Gibbons
vient faire parler la poudre sur « Good Love ». On remercie aussi les Black Keys de nous aider à chasser nos idées noires avec leurs notes bleues. Mission
accomplie, alors !
Leo Jarzabek

PORCUPINE TREE
CLOSURE / CONTINUATION
Music For Nations
Voilà plus de dix ans que l’on n’avait plus eu de nouvelles
d’un des plus gros groupes de rock progressif des années
2000. Certains membres avaient en effet éprouvé le besoin
de s’épanouir au sein d’autres projets musicaux, voire
d’embrasser une carrière solo. Le guitariste chanteur Steven
Wilson avait lui-même lâché en 2019 que Porcupine Tree était
« mort et enterré ». À croire qu’il n’y a que les imbéciles qui
ne changent pas d’avis ! Voici donc un nouvel album studio
qui sonne comme une réunion en demi-teinte… En effet, une
bonne partie des titres ont été composés en binôme par
Wilson et Gavin Harrison (batterie), Richard Barbieri (claviers)
se greffant ponctuellement sur des sessions de travail.
Wilson s’est lui-même chargé de jouer les basses de l’album et à en juger par l’intro du titre « Harridan », morceau
d’ouverture, il semble être aussi à l’aise sur la cinq que la six-cordes. Quid alors de Colin Edwin, emblématique
bassiste du groupe ? Difficile de répondre à cette question, Steven Wilson prétextant ne plus avoir de nouvelles de
Colin depuis des années... Bref, trêve de spéculations : les Britanniques s’affichent officiellement comme un trio et
il est confirmé que la basse sera tenue par Nate Navarro, qui sera là uniquement en tant que musicien de session
pour la prochaine tournée. Pour en revenir à la musique, on constate sur cet album que Porcupine Tree n’a rien
perdu de sa splendeur d’antan : la voix vibrante de Wilson, le jeu de batterie sublime de Gavin Harrison, la pureté
des sons de guitares, tout est là (« Rats Return »). Les parties de basse sont très bien exécutées et l’on pardonne
aisément l’approche guitaristique de Steven sur notre instrument car chez Bassiste Magazine, on sait aussi apprécier
le claquant d’un jeu au médiator. En terrain connu, ce nouveau répertoire sent bon la nostalgie et sonne un peu
comme une thérapie nécessaire pour les Anglais. Dommage que celle-ci ait laissé du monde sur le carreau...
Gabriel Honoré

BASSISTE 41
GROUNDATION Il est vrai que l’on pense rarement à placer des
chroniques de reggae dans nos colonnes (mea
ONE ROCK culpa), mais lorsqu’une formation majeure du genre
nous dégaine un nouvel album, impossible de faire
Baco Records / l’impasse ! La bande californienne emmenée par
French Fries Publishing son charismatique frontman et guitariste Harrison
Stafford dévoile donc One Rock, dixième opus studio
où les thèmes humanistes et sociétaux dressent un
tableau contrasté de l’état actuel de notre monde. Si
certains titres restent dans la pure tradition du reggae
avec des riffs de cuivres percutants, une basse bien
ronde et la rasade de chœurs qui va bien, d’autres détonnent par leurs rythmiques ternaires aux allures de valse
(« Greed »). Groundation fédère toujours autant : il suffit de voir les guests de choix (Israel Vibration, The Abyssinians)
répondant présent au nom de la grande cause qu’est le Riddim. Côté fréquences graves, si Ryan « Iron » Newman,
membre fondateur du groupe, ne fait plus partie de l’équipe, sachez que le flambeau a été passé avec brio. Isaiah
Palmer nous démontre toute sa créativité avec des lignes de basse simples et épurées (« Absolutely Clear ») et sait
également apporter de la variété à son jeu avec des introductions plus lyriques et des tournes ponctuées de double
stops (« Market Price »). Groundation évite l’écueil de la monotonie (le pire ennemi du reggae) grâce à des cassures
de dynamiques et autres changements de métriques tout en laissant de l’espace à des musiciens qui savent improviser dans un esprit jazz. Du bon
boulot en somme ! Le groupe est à l’affiche de nombreux de festivals français cet été et reviendra nous rendre visite dans le courant de l’automne 2022 :
ouvrez l’œil !
Gabriel Honoré

FLASH PIG Né en 2008, Flash Pig est un quartet jazz qui n’en est pas à son coup d’essai. Le combo a déjà
quatre albums à son actif et ses musiciens se sont tous distingués à travers moultes collaborations.
LE PLUS LONGTEMPS POSSIBLE Ce nouvel opus est le fruit d’un travail né durant les confinements à répétition, ô combien
propices à l’effervescence musicale ! Flash Pig, c’est du jazz décomplexé qui cherche avant tout
Astérie / L’Autre Distribution à s’affranchir des codes du genre sans pour autant renier les saintes écritures. Le groupe propose
des compositions intimistes et vibrantes auxquelles se mêlent des covers assez culottées, dignes
d’intérêt ! Sean Paul et Lana Del Rey seraient agréablement surpris d’entendre avec quelle subtilité
leurs morceaux ont été revisités par nos jeunes jazzmen (« Get Busy », « Video Games ») ! À la
contrebasse, on retrouve un habitué de nos
colonnes, qui semble tracer sa voie avec une
jolie constance : Florent Nisse. Ce dernier met
son jeu pizzicato au service du collectif, sachant
tantôt s’effacer, tantôt prendre la place qui lui
revient de droit sur certaines introductions
(« Le plus longtemps possible »). Il nous gratifie
également de quelques chorus en fin d’album
qui ne sont pas pour nous déplaire. Attention,
jazz de haut niveau !
Gabriel Honoré

42 BASSISTE
DRAMACALLED
TERRA NULLIUS
Autoproduction

DramaCalled naît de la rencontre entre une chanteuse, Julie, et un


bassiste, Florent Perreton (peut-être que certains d’entre vous se souviennent du groupe
MyPollux au sein duquel il a officié au début des années 2000...). Armés d’une motivation sans faille, les deux
amis débutent une collaboration fondée sur des principes simples : composer pour le plaisir en mélangeant
leurs univers musicaux et surtout, sans faire le moindre compromis ! Le résultat de leurs efforts est condensé
dans Terra Nullius, terme latin désignant les terres qui n’appartiennent à personne... Les morceaux mêlent rock, electro, avec un soupçon de prog, et la
voix puissante de Julie évoquera Portishead ou K’s Choice aux plus anciens d’entre vous. Même si les influences anglo-saxonnes sont très présentes, il
est agréable de souligner quelques textes en français disséminés ici et là. À l’écoute des compositions, on sent que Florent a joué un rôle majeur dans
l’écriture des morceaux. La cinq-cordes est omniprésente avec des graves profonds, quelques effets (saturation, chorus, harmoniques) utilisés avec
parcimonie et des fills dosés comme il faut pour que les rythmiques ne tournent pas à la foire d’empoigne. La réalisation signée Chris Edrich (Leprous,
Klone, Devin Townsend Project) fait vraiment honneur à ce premier album, auquel on pourrait reprocher des esthétiques parfois similaires au fil des
titres… Mais c’est bien là que la notion de « sans compromis » prend tout son sens !
Adrien Kah

PRIMUS
CONSPIRANOID
ATO Records

Primus vs complotistes, c’est l’affiche du


match de ce soir. Menés par le Captain Les
Claypool et sa Pachyderm quatre cordes, le trio
insaisissable est prêt à en découdre. Après un The Desaturating Seven (2017) en
demi-teinte, on ne savait pas trop à quoi s’attendre avec ce nouvel EP engagé. En
effet, en attaquant les divers leaders complotistes, les membres de Primus ont le
courage de se mettre à dos certains de leurs fans, sans pour autant renoncer à
leur humour absurde. Musicalement, on peut dire que Conspiranoid redresse la
barre et nous fait entrevoir un virage progressif plus traditionnel. Certains signes
ne trompent pas : sur sa dernière tournée, le groupe rejoue en intégralité Moving
Pictures de Rush, avec la bénédiction de Geddy Lee.
L’EP commence par l’épique « Conspiranoia » de 11 minutes. Le morceau s’ouvre
sur une intro de basse mélodique gorgée d’octaver, pour mieux se fondre dans un
groove irrésistible. Claypool slappe et griffe, le son est massif. Ensuite, « Follow
the Fool » repose principalement sur une seule note, un Ré à vide chargé de wah-
wah, bon exercice de slap, tandis que sur « Erin on the Side of Caution », la basse
en accords saturés complète à merveille les harmoniques de la guitare. Un bon
cru, pour l’un des trios les plus créatifs de ces 30 dernières années, qui, selon
certains commentaires YouTube, serait composé d’aliens. Pour une fois, on y
croit !
Leo Jarzabek

BASSISTE 43

T W I S T L E
J O H N E N 20 ans déjà...
u n d e r fi n g e rs :
Th
Il y a tout juste vingt ans, le 27 juin 2002 pour être précis, disparaissait celui que l’on surnommait The Ox (« le bœuf », en raison de
sa robuste constitution capable de venir à bout de n’importe quelle substance, liquide, solide ou en poudre), l’un des bassistes les
plus importants de la scène rock internationale. Dès 1965, John Entwistle avait gravé le solo de basse du méga-succès des Who « My
Generation », chose assez rare à l’époque, pour ne pas dire inédite, à l’exception peut-être de « Nivram » des Shadows commis par Jet
Harris et sorti en 1961. Son jeu de basse tout comme son attitude avaient fait de John Entwistle un cas à part dans le monde du rock.
Alors que son partenaire privilégié, le batteur fou Keith Moon, fracassait tout sur son passage, que Pete Townshend parcourait la scène
en tous sens en faisant de grands moulinets rageurs, que Roger Daltrey jouait à Thierry la Fronde avec son micro, John restait de marbre
dans ce tumulte indescriptible. Ce calme apparent était de toute évidence sciemment calculé, John ayant déclaré en 1970 : « Quand les
autres démolissent leurs instruments, je m’adosse à l’ampli et j’astique ma guitare. » Ce flegme très britannique n’a pourtant jamais
empêché Entwistle de balancer au triple galop des lignes de basse titanesques qui valorisaient incontestablement l’aspect mélodique
de la musique des Who, Pete Townshend étant plutôt connu pour ses rythmiques incomparables, un art dans lequel il était passé maître.
Bassiste Magazine retrace le parcours de ce phénomène exceptionnel qu’était John Entwistle.

Par Paolo Coccina

LE TOUT DÉBUT
John Alec Entwistle est né le 9 octobre 1944
à Chiswick dans la banlieue de Londres. Dès
l’âge de 6 ans, il s’initie au piano et un peu
plus tard à la trompette et au cor anglais. Mais
le rock alors naissant attire Entwistle qui se
passionne pour la basse. Influencé par le jeu de
Jet Harris des Shadows et par le rock’n’roll de
Gene Vincent, Eddie Cochran et Buddy Holly,
il est le premier à utiliser une Fender Precision
en Angleterre.
Avec un camarade de classe guitariste
nommé Pete Townshend, il rejoint le groupe
The Scorpions (rien à voir avec le groupe de
hard rock allemand), puis les deux compères
retrouvent un autre camarade de classe Roger
Daltrey, chanteur du groupe les Detours, qui
deviendront ensuite les Who.
Fort de son éducation musicale multiforme,
Entwistle commence à développer un style
de basse très personnel, au sens mélodique
exacerbé et à la vélocité peu commune,
valorisé par une technique inhabituelle de Arrangeur déterminant, il écrit les parties EN SOLO
jeu percutant à la base du manche dite de de cuivres de l’opéra rock Tommy et assure En 1971, alors que les Who explosent avec
« typewriter technique » (machine à écrire), lui-même l’intro du titre au cor anglais. Il « Won’t Get Fooled Again » et Who’s Next, sans
bien des années avant le slap et le tapping. devient ensuite le directeur musical des films doute le meilleur album de l’histoire du rock
La section rythmique qu’il constitue avec Quadrophenia et The Kids Are Alright. Nous (avec « Baba O’Riley », « Behind Blue Eyes »
le batteur « no limits » Keith Moon reste un ne saurions trop vous conseiller le visionnage et « My Wife », une chanson d’Entwistle), ce
modèle du genre, jamais égalé. du DVD Tommy and Quadrophenia Live, dans dernier est le premier Who à publier un album
En 1965, il grave, avec un son redoutablement lequel on peut voir Entwistle en pleine action. solo, sobrement intitulé Smash Your Head
saturé, le premier solo de l’histoire de la John chantait fréquemment sur scène et en Against the Wall, littéralement Tape ta tête
basse électrique sur le single des Who, « My studio, assurant le plus souvent les chœurs contre le mur.
Generation » élevant ainsi la quatre-cordes au avec Pete Townshend, ou doublant le chant Ce sera le prélude d’une abondante production
rang d’instrument de premier plan. de Daltrey. Il a ainsi chanté les parties de voix discographique et d’une longue liste de
Mais ses talents musicaux vont bien au-delà de tête très présentes notamment dans les projets personnels : Ox, Rigor Mortis, John
de la basse : compositeur patenté, Entwistle chansons « A Quick One », « While He’s Away », Entwistle Band (avec le batteur Steve Luongo)
contribue de façon notable au répertoire « I Can’t Explain », « Happy Jack »… qui ne connaîtront pas toujours le succès
du groupe, écrivant notamment les fameux Il assurait aussi le chant principal sur la plupart escompté, d’autant qu’ils viendront souvent en
« Cousin Kevin », « My Wife », « Boris The de ses compositions, introduisant au sein des concurrence avec les diverses reformations des
Spider » ou « Heaven and Hell », titre phare des Who le chant guttural, présent notamment sur Who. Mais ils permettront à ce musicien très
Who joué à chaque début de concert. « Boris The Spider ». éclectique d’explorer de vastes territoires avec

BASSISTE 45
le lyrisme qui l’a toujours habité. Un coup d’œil m’apprenant que John Entwistle était décédé.
au DVD The John Entwistle Band Live enregistré J’étais choqué ! Je connaissais John et j’avais
en 1999 devrait suffire à vous en faire une idée. toujours apprécié sa compagnie. C’est ensuite
le manager des Who qui m’a appelé pour me
THE WHO : ET APRÈS ? demander si je voulais assurer deux gigs dont
En 1978, après les albums The Who By Numbers le show à Hollywood Bowl. J’étais désemparé,
et Who Are You parus respectivement en 1975 mais mon instinct me disait qu’il fallait que je le
et 1978, Keith Moon disparaît et c’est Kenney fasse ! J’avais déjà joué et enregistré avec Pete
Jones des Faces qui est appelé pour combler Townshend et Roger Daltrey, et ils devaient avoir
le gouffre béant. Sur l’album It’s Hard paru en confiance en moi, mais j’étais quand même
1983, Entwistle se fendra de trois titres : « It’s surpris. Quand j’ai rejoint Pete à Los Angeles, il
Your Turn », « Dangerous » et « One at a Time ». m’a bien précisé qu’on ne s’attendait pas à ce
De 1990 à 1994, Entwistle se joint au groupe que je copie les parties de John. Il fallait juste
The Best avec Keith Emerson aux claviers, que je joue aussi fort que possible. Les Who sont
les guitaristes Jeff Skunk Baxter des Doobie un groupe puissant dans lequel la basse joue un
Brothers et Joe Walsh des Eagles, ainsi que le rôle clé et il me fallait assurer cette fonction. un morceau tellement chargé d’histoire. Je
batteur Simon Phillips. S’ils n’enregistrent aucun C’était parfois effrayant d’écouter les parties commence donc comme John, enfin aussi
album studio, ils ont toutefois publié un album de basse de John : "Mais comment il a fait proche que possible et ensuite je me laisse
live, ainsi qu’un DVD en 2010 qui témoigne ça (rires) ?" L’accueil des fans et du groupe a été aller selon mon inspiration. Au début, j’ai utilisé
d’un concert donné à Yokohama au Japon le 9 fantastique. Parfois je jouais les mêmes lignes plutôt ma Moon Larry Graham, mais on me l’a
septembre 1990. John y interprète deux de ses que John parce qu’elles sont essentielles à la volée. Je me suis donc rabattu sur la Fender
compositions, « My Wife » et « Boris the Spider ». chanson, mais je ne voulais pas me contenter Jaguar que j’aime beaucoup. C’est une Jazz
John Entwistle est mort d’une crise cardiaque de l’imiter. C’était important pour moi de jouer Bass mais active et avec un son plus rock. J’ai
en 2002 à Las Vegas et c’est le non moins grand les chansons comme je les ressentais, d’autant beaucoup appris avec les Who sur le son d’une
Pino Palladino (voir encadré) qui a depuis pris la qu’elles sont tellement fortes ! Dès que résonne basse dans un groupe de rock et aussi sur la
relève au sein des Who. la première note de "Baba O’Riley" ou "Won’t façon d’occuper l’espace entre la guitare de Pete
Le grand bassiste gallois raconte : « Je travaillais Get Fooled Again", ce qu’il faut jouer devient et la batterie de Zak Starkey. » •
à Philadelphie sur un album de hip-hop avec une évidence. Pour le solo de "My Generation",
Common quand j’ai reçu un appel de ma femme j’ai essayé de l’apprendre parce que c’est

John, Roger Daltrey, Keith Moon & Pete Townshend

46 BASSISTE
L’ H É R I TA G E
Les bassistes illustres revendiquant avoir été influencés par John Entwistle
sont légion. En voici quelques témoignages édifiants…

GEDDY LEE (RUSH)


« John Entwistle a eu beaucoup d’influence sur moi. C’était le premier à avoir ce gros son avec beaucoup d’aigus. Il
n’était pas relégué dans les profondeurs du registre grave. Les Who ont eu beaucoup d’impact sur Rush ; Neil Peart et
moi étions très impressionnés par la section rythmique que constituaient John Entwistle et Keith Moon. »

CHRIS SQUIRE (YES)


« Les Who étaient mon groupe préféré lorsque j’étais ado et forcément, j’ai été très influencé par John Entwistle.
Je me suis payé une Rickenbacker montée avec des cordes Rotosound et j’ai joué avec un médiator à cause de lui.
Musicalement, j’ai beaucoup appris en l’écoutant sans parler de l’énergie et de l’attitude que dégageait ce groupe
incroyable. »

NOEL REDDING (JIMI HENDRIX EXPERIENCE)


« John était un musicien brillant ; il avait ce bagage classique qui lui donnait une approche unique. Je suis devenu ami
avec John et Keith en 1966 et quand j’ai rejoint le Jimi Hendrix Experience, je suis allé voir John pour qu’il me conseille
sur le matériel. Il m’a orienté sur une Fender Jazz Bass et un ampli Marshall et ensuite il m’a emmené chez Rotosound
pour choisir des cordes filées rond. Un parfait gentleman ! »

ROGER GLOVER (DEEP PURPLE)


« C’est le solo de « My Generation » qui m’a impressionné le plus chez lui. Dans la vie de chaque musicien, il y a toujours
quelques chansons qui vous marquent à jamais et celle-ci en fut une pour moi. Comment a-t-il joué ça ? Comment a-t-il
obtenu ce son ? Je lui suis très reconnaissant pour cela ! Il a fait reculer les limites du possible. Il se tenait là impassible
avec ce son énorme qui déferlait ! C’était un géant ! »

TIM BOGERT (VANILLA FUDGE, CACTUS)


« Je l’ai vu pour la première fois lorsque Vanilla Fudge a fait la première partie des Who en 1967 et il m’a estomaqué !
J’étais sur le côté de la scène près de ses amplis et je n’en perdais pas une miette. Il venait juste d’acquérir une Fender
Precision blonde avec manche érable que je trouvais fabuleuse. Mais par-dessus tout, John montrait au monde quelles
choses étonnantes et inimaginables on pouvait faire avec une basse. »

BILLY SHEEHAN (MR. BIG, THE WINERY DOGS)


« "Substitute" a été la seconde chanson que j’ai apprise, "Gloria" étant la première. J’étais devenu un grand fan des Who
que j’ai vus avec Keith Moon à la batterie chez moi à Buffalo. À l’époque, je reprenais pas mal de leur répertoire avec mon
groupe Talas. Le son et le style de John étaient uniques et je peux dire que parmi tant d’autres musiciens, il m’a beaucoup
influencé. C’était un innovateur. »

LES CLAYPOOL (PRIMUS)


« Il était difficile de grandir dans les années 1970 sans être influencé par John Entwistle. Il a aidé des gars comme moi
à sortir de l’ombre en étant le premier à porter la basse au devant de la scène. De nos jours, il y a beaucoup de bassistes
qui pratiquent le slap, le tapping avec des sons saturés ou fuzzy, et c’est John qui a initié tout cela. Dans les Who, il était
entouré de personnalités uniques. Je ne connais aucune autre combinaison d’individus qui pouvait sonner comme eux et
les lignes de basse de John en étaient une composante essentielle. »

Pour conclure en beauté, rappelons que Lemmy avait dédié l’album Inferno de Motörhead, sorti en 2004, à la mémoire de John Entwistle.

BASSISTE 47
HANS J. KULLOCK : « JOHN ÉTAIT BRITISH JUSQU’AU BOUT DES ONGLES »
Notre éminent collaborateur Hans J. Kullock, à qui nous avons rendu hommage dans notre numéro 97, a eu l’immense privilège de côtoyer
le bassiste légendaire, entre autres lors de plusieurs tournées au Japon pour la marque Warwick. Il nous avait confié : « Fan des Who depuis
toujours, vous pouvez imaginer ma joie lorsque Warwick m’envoya au Japon durant quinze jours en 1988 pour défendre, en alternance avec
John Entwistle, les qualités de cette marque sur le salon de Tokyo. Lui, avec le modèle Buzzard de sa conception, moi avec la Dolphin. Inutile
de préciser que j’en ai tiré des profits artistiques énormes et des souvenirs inoubliables. John était British jusqu’au bout des ongles et même
pendant les concours de buveurs de saké – qu’il gagnait d’ailleurs à chaque fois -, il restait gentleman.
À cette époque, les Who étaient séparés et John tentait vainement de monter son projet The Rock avec le fils de Ringo à la batterie. Malgré
une musique géniale, aucun label ne se décidait à le signer, car tout le monde avait entendu des bruits annonçant qu’une réunion des Who
était dans l’air. John souffrait de cet état de fait et il n’était pas surprenant qu’il puisse déjanter de temps à autre. Deux années plus tard,
nous sommes repartis pour quelques démonstrations de basses Warwick dans diverses grandes villes du pays du soleil levant. La réunion
des Who était imminente, la maison de disques avait fait une grosse avance et tout était au beau fixe pour John. J’ai pu alors mesurer son
énorme popularité, avec des fans qui campaient devant les hôtels pour voir la star de près.
Durant le voyage de retour en Europe, John m’a conté durant de longues heures la vie rock’n’roll, la vraie. Avec
notamment des courses en Harley-Davidson dans les couloirs d’un grand hôtel à Los Angeles,
des concours de groupies avec les membres des Stones, le travail acharné durant toute une
nuit à New York pour coller les meubles de la chambre d’hôtel au plafond avec de la superglue
seulement pour voir le visage de la femme de ménage en entrant dans la chambre le lendemain,
toutes les escapades amoureuses ratées de Pete Townshend... John déménagea en Californie et nos
retrouvailles furent plus espacées. Notre dernière rencontre eut lieu en janvier 2002 au NAMM Show
à Los Angeles. Il insista pour que ma femme et moi nous nous rendions à son exposition de peinture
à Las Vegas. Il mourut le 27 juin de cette même année, le soir suivant son vernissage, la veille de la
tournée du John Entwistle Band. Je regretterai toute ma vie de ne pas y être allé. »

48 BASSISTE
M AT É R I E L

** LES BASSES **
Durant sa longue et prolifique carrière, John Entwistle a joué sur
une multitude de basses diverses : des Fender Precision et Jazz Bass
pendant les années 60, des Gibson Thunderbird et Explorer dans les
années 70, des Alembic, Danelectro ou Mosrite dans les années 80…
Collectionneur compulsif d’instruments, il possédait près de deux
cents guitares et basses à sa mort. On peut en avoir un bon aperçu
dans l’ouvrage Bass Culture : The John Entwistle Guitar Collection
(Sanctuary Publishing, Ltd). Signalons au passage, que John Entwistle
fut l’un des premiers bassistes à monter des cordes filées rond sur ses basses et qu’il développa une relation étroite avec le fabricant Rotosound,
notamment pour concevoir la gamme RS66 Swing Bass et cela dès 1966.

** THE BUZZARD PROJECT **


C’est finalement avec Warwick qu’il va développer son modèle de basse le plus personnel, la Buzzard JE Signature, fruit de sa rencontre
avec Hans Peter Wilfer, le fondateur de Warwick. Ce dernier nous raconte : « L’histoire a commencé en 1984 au salon de Francfort
lorsque John Entwistle est venu sur notre stand me demander s’il pouvait acheter l’une de nos basses Nobby Meidel. Ce fut le début
d’une relation intense entre John et moi. Nous avons longuement discuté de la réalisation d’un instrument et on peut considérer que ce
fut le départ du Buzzard Project. Rentré à la maison, je faisais des dessins que j’envoyais à John par la poste et dont nous parlions ensuite
au téléphone. À l’été 1984, j’ai commencé à faire des prototypes que j’apportais à Londres pour les montrer à John. Il a fallu au moins
une dizaine de tentatives avant que John soit vraiment content du résultat. J’avais proposé différents types de bois et finalement John
opta pour le wengé pour le manche et le zebrano pour le corps. Il m’a fallu toute l’année 1985 pour finaliser cette basse et définir ses
caractéristiques si particulières encore valides de nos jours : le tranchant de sa crosse effilée, le contour tourmenté du corps… C’est une
basse sauvage, tout comme John le souhaitait, au charme exotique et avec quelques extravagances comme ces incrustations (chiffrées)
en abalone paua qui numérotent les frettes. John Entwistle attendait d’une basse qu’elle délivre des graves puissants tout en réagissant
très rapidement à son jeu très personnel, qu’elle ne soit pas trop lourde et confortable à jouer. Ce n’était pas un pari facile, surtout si l’on
considère que j’avais démarré ma société en 1982 avec peu de moyens et qu’il m’avait fallu investir beaucoup d’argent et surtout
beaucoup de temps pour le mener à bien. En ce qui concerne l’électronique, John recherchait avant tout la simplicité. Il détestait les
systèmes alambiqués et me répétait à l’envi qu’un bassiste a surtout besoin d’un bouton de volume et que le reste vient des doigts et
de la façon de jouer. Le circuit conçu par MEC Electronic comportait une simple égalisation deux bandes. Au début, les deux micros P,
les préférés de John, dont fut dotée la Buzzard, étaient des EMG, puis ensuite des MEC. La question du prix n’était pas prioritaire
pour John. Il voulait avant tout la meilleure basse possible, facile à jouer avec un son d’enfer. Il n’a jamais été intéressé par le fait
de la décliner en 5 cordes. La Buzzard est un modèle Signature de haute qualité destiné à rester produit en quantité limitée. J’ai
conservé certains modèles et j’en ai même récupéré plusieurs auprès de John. »
La Buzzard JE Signature a connu diverses modifications au fil du temps, comme l’apparition du micro jazz en aigu et surtout
du chevalet-cordier en deux parties, qui a remplacé le Schaller original. Elle a également été déclinée en version fretless, avec
un manche Modulus Graphite, et même en 8 cordes en 1989 avec trois micros pavés. La Buzzard JE Signature est toujours au
catalogue chez Warwick, disponible en de multiples finitions.

** L’AMPLIFICATION **
Au fur et à mesure de l’évolution technique du matériel, Entwistle est passé du Vox AC15 aux amplis Marshall, Hiwatt, Sunn, Trace Elliot puis Ashdown.
L’utilisation de la sortie stéréo des Alembic lui permettait d’employer deux systèmes d’amplification avec des réglages différents. Pete Townshend a
mentionné que John fut le premier à utiliser un ampli Marshall et que ça sonnait tellement fort, qu’il devait absolument s’en procurer un à son tour.
Mark Gooday, qui sévissait au sein de Trace Elliot avant de fonder Ashdown, a bien connu John Entwistle, grand utilisateur de ces deux marques
d’amplis basse. Il nous raconte : « John aimait les configurations en bi, voire en tri-amplification, avec de la distorsion sur les aigus et des graves très
profonds. Pendant pratiquement vingt ans, il a utilisé des produits que j’ai construits. Il avait des enceintes bass bin 15" (construction spécifique avec
un ou plusieurs haut-parleurs disposés en V ; Adam Clayton de U2 utilise les mêmes) ainsi que des 12". Un peu avant sa disparition, il avait adopté des
enceintes avec 8 HP pour son nouveau système qui à ma connaissance n’a jamais tourné. En studio, il emmenait le même matos gigantesque. »

BASSISTE 49
ELVIN
BIRONIEN
Briller
avec sincérité

Dans le précédent numéro de Bassiste Magazine, Elvin Bironien


nous avait interpellés avec Lueurs, un album coloré, aux textures
sonores audacieuses, mélangeant jazz, fusion, musique antillaise,
et évitant le piège de la mièvrerie bassistique au profit du
collectif… Nous sommes allés à sa rencontre.
L
e parcours d'Elvin démarre comme celui de beaucoup d'entre nous : les copains montent un
groupe et un bassiste manque à l’appel… Classique ! Essentiellement autodidacte à ses débuts, il
arrête assez tôt l'école pour écumer diverses formations toulousaines. À 16 ans, il pousse la porte
de la Music'Halle où il suivra un cursus en musiques actuelles. Il devient professionnel à l'âge
de 20 ans et à 27, il part pour la capitale tenter sa chance. Principalement tourné vers les musiques du
monde, Elvin collabore actuellement avec la chanteuse-violoncelliste algérienne Nesrine, ainsi qu'avec le
Kanazoé Orkestra, formation d'afro beat moderne menée par le balafoniste burkinabé Seydou Diabaté. Il
se produit également aux côtés du pianiste martiniquais Xavier Belin. Dans le flot de toutes ces activités,
il trouve encore le temps de réaliser un deuxième album solo, objet de l'entretien d'aujourd'hui.

Par Adrien Kah

« Je me suis jeté à corps perdu dans la musique, en mode


Tu revendiques un héritage culturel
antillais de par ton grand-père. Dans
"ça passe ou ça casse !"
quelle mesure a-t-il façonné ton profil de Ça ne m'a pas donné d'autre choix que de bosser… »
bassiste ?
Je n'avais pas vraiment pris conscience
du poids de cette culture à mes débuts. sur l'occasion pour enregistrer mon premier voulais que l'album sonne. Je savais où j'allais
C'est vers mes 20 ans que les choses ont album, même s'il n'y avait pas d'ambition et ce que je voulais faire en post-production
commencé à évoluer. J'avais un trio avec particulière derrière cet opus. pour donner du relief à mes morceaux.
Arnaud Dolmen, un batteur guadeloupéen,
qui m'a fait découvrir des artistes que je ne Tu as sorti des albums sous des noms Est-ce que l'album s'est composé aussi
connaissais pas. C'est à ce moment-là que j'ai différents : comment peut-on classer vite qu'il s'est enregistré ?
fait le lien avec mes origines et que je me suis Lueurs dans ta discographie ? Quand même pas ! J'ai mis environ un an et
dit qu'il y avait matière à creuser... Je me suis On va dire que c'est mon deuxième album demi à écrire les morceaux, et puis il y a eu
alors progressivement laissé influencer par la solo. Il y a eu d'autres créations qui sont le vortex de la Covid qui est passé par là...
musique antillaise. nées sous mon impulsion, mais c'était à une (rires) Je cherchais surtout un son... Un son
époque où je n'assumais pas bien le rôle que j'avais en tête, mais que je ne savais
Tu es rapidement sorti du système de leader... Je n'ai jamais voulu faire de la pas comment retranscrire... Puis j'ai croisé
scolaire pour tenter ta chance dans la musique de « Bass Heroes », ce n'est pas Grégory Privat (claviers) qui m'a fait écouter
musique. As-tu eu des craintes ? mon truc, je n'ai pas ce profil. Tu remarqueras des choses lors d'un festival en Martinique et
Ma mère, oui, mon père un peu moins... J'ai d'ailleurs que sur Lueurs, je fais très peu ça a été le déclic : c'était LE son que je voulais
moi-même une fille de 5 ans et si elle me de solos. J'adore le rôle de la basse en tant pour mon album !
dit qu'elle veut faire comme moi à 16 ans, qu'instrument de soutien et j'ai remarqué que
je pense que je ne serai pas trop d'accord lorsque tu te mets en avant sur un disque ou Est-ce que la basse a été le point de départ
(rires) ! Quand je me suis lancé, je n'ai pas une affiche, les gens s'attendent à quelque de tes compositions ?
pensé à tout ça : je me suis jeté à corps perdu chose d'extravagant, mais ce n'est pas dans Pas sur tous les morceaux... Je peux partir
dans la musique, en mode « ça passe ou ça mon tempérament de slapper à genoux d'une mélodie ou d'une série d'accords que je
casse ! » Ça ne m'a pas donné d'autre choix devant le public (rires) ! Aujourd'hui c'est joue à la basse, parfois je pars de la guitare
que de bosser, de toucher à différents styles, différent, j'assume ma place de leader sans avec mon modeste niveau... J'aime aussi aller
de prendre des remplacements de dernière forcément chercher à en faire des tonnes. chercher des rythmes afro-caribéens, faire
minute... Tout cela a été formateur, je ne des ostinatos (motif rythmique ou mélodique
regrette rien. Ce nouvel album a été enregistré en trois répété en continu, ndlr) et construire autour
jours : c’est très rapide ! de ça. Ce qui est important pour moi, c'est de
Au cours de ta carrière, à quel moment Oui et non. Par rapport à un album de pop trouver la mélodie qui suscite l'accroche et de
naît l'envie de développer des projets plus ou de rock ça peut paraître rapide, mais de laquelle va découler tout le reste du morceau.
personnels ? nombreux albums de jazz sont enregistrés en
Quand je suis arrivé à Paris, j'avais quelques peu de jours, de façon ultra-spontanée… J'ai Quels sont les bassistes qui t'influencent
compositions sous le coude. Je connaissais l'habitude de préparer des concerts ou des le plus ?
depuis un moment le batteur qui accompagne séances de dernière minute, je l'ai beaucoup À mes débuts j'ai écouté beaucoup de
le pianiste André Manoukian. Cet ami m'a fait fait en arrivant à Paris, donc ça ne m'a pas bassistes et de contrebassistes de jazz
part du fait qu'André avait un super studio à stressé plus que ça. On a répété avant d'entrer comme John Patitucci, Anthony Jackson,
Chamonix au pied du Mont Blanc, la Maison en studio tout de même ! Je trouve que ne Christian McBride... Ces gars m’ont mis le
des Artistes, où l'on te propose des résidences pas trop jouer avant d'enregistrer apporte pied à l'étrier niveau jazz… Puis, il y a eu
et un enregistrement gratuit en échange de beaucoup de fraîcheur à la musique. Et puis, des bassistes francophones tels que Michel
deux concerts dans la semaine. J'ai sauté j'avais aussi ma petite idée de comment je Alibo, Hadrien Feraud, Linley Marthe,

BASSISTE 51
Étienne Mbappé… Depuis quelque temps, je entre l'un et l'autre tant le Mesa/Boogie est Tu as un agenda bien rempli et pas
m'intéresse davantage à des musiciens qui super neutre ! uniquement sur le territoire français !
se mettent plus en retrait sur leur instrument Est-ce facile de défendre un album solo
comme Pino Palladino, Tim Lefebvre... J'aime Utilises-tu des effets ? lorsque l'on joue beaucoup pour d'autres
aussi beaucoup Sam Wilkes, moins connu du J'ai un octaver signature de Tim Lefebvre, artistes ?
grand public, mais qui propose une musique l'Octabvre de chez 3 Leaf Audio. J'aime aussi Je n'ai pas besoin de cet album pour vivre de
très intéressante. empiler les effets comme le vibrato du Shaker la musique, cela m'enlève déjà une certaine
de TC Electronic, avec un POG réglé à l'octave pression. J'ai quelques dates prévues pour la
Il y a très peu de chorus de basse sur supérieure et une reverb Hall Of Fame. La fin de l’année, mais je ne veux faire que de
Lueurs, mais on entend quand même un combinaison de ces trois effets est mortelle : belles choses autour de ce disque sans me
solo de basse sur le titre « Latè A ». La on peut l'entendre sur quelques passages de précipiter ou accepter n'importe quel concert.
basse a d'ailleurs un timbre très proche mon album. Paradoxalement, il y a du bon qui se profile
d'une basse piccolo... pour cet album et c'est tant mieux ! •
Pour la petite histoire, j'avais enregistré ce
solo sur une démo avec une Sire Marcus
Miller à 400 euros. Le son un peu Lo-Fi que
« Lorsque tu te mets en avant sur un disque ou une affiche, les
l'on entend est dû au fait que j'avais utilisé gens s'attendent à quelque chose d'extravagant, mais ce n'est
une carte son un peu pourrie (rires) ! C'est
en mixant l'album avec mon frère que l'on a pas dans mon tempérament de slapper à genoux devant
choisi de garder le solo tel quel : on a fait un
peu d'édit pour lui donner une allure plus sexy, le public. »
mais non, il ne s'agit pas d'une basse piccolo.
Je joue juste dans les aigus.

Sur quel matos joues-tu ?


Principalement sur deux basses assemblées
par Stevie G : une Jazz Bass et une Precision
montée en filets plats. La Jazz Bass a une
finition Paisley noire et la Precision une
finition Paisley mais bleue ! J'ai aussi une
basse cinq cordes faite par le luthier Matthieu
Combe, un instrument que m'a vendu Michel
Alibo quand je suis arrivé à Paris. Mais je ne
la joue pas beaucoup, je préfère le côté plus
organique de la quatre cordes. Je n'utilise
plus d'ampli depuis un moment. J'ai bien
un petit Markbass micro cube à la maison,
mais pour reprendre la basse dans une
sono j'utilise principalement ma pédale de
préamp Mesa/Boogie Subway Bass, qui est
équipée d'une sortie en direct. En tournée, je
demande souvent en plateau du Aguilar ou
de l'Ampeg, mais mon son vient surtout de la
pédale Mesa/Boogie qui me permet d'avoir
le même son partout. J'adore cette pédale, je
trouve que le grain se rapproche beaucoup
du préampli Noble qui, lui, est excessivement
cher. Je mets d'ailleurs au défi les meilleurs
ingénieurs du son de me dire la différence

MATOS
Basses : Stevie G Jazz Bass, Stevie G Precision
Bass (montée en filets plats), Combe Alys 5
cordes
Effets : Préamp Mesa/Boogie Subways Bass,
3 Leaf Audio Octabvre, TC Electronic Shaker,
TC Electronic Hall of Fame, Electro Harmonix
POG.
Ampli : MarkBass Micro cube

52 BASSISTE
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RÉSUMÉ
Pedalboa
rd e
guide-câb xtensible avec

D’Addario
les intégré
Housse se s.
mi-rigide
compatib dédiée
le avec la
des peda plupart
lboards u
du march ne rangée
é.

XPND-1 et PW-BLPBT-01
On monte en gamme

D
’Addario, fabricant de cordes
bien connu, a fait depuis
quelques années son nid sur
le marché des accessoires.
En plus des capodastres et
autres accordeurs, le constructeur a décidé
de frapper fort en entrant sur le juteux
marché des pedalboards qui ne cesse
de prendre de l’importance. Plutôt que
de sigler un produit d’entrée de gamme,
D’Addario a choisi d’investir le haut du
marché et propose un pedalboard dont la
particularité est de s’étendre à mesure de
l’augmentation des besoins. C’est en tout
cas l’argument publicitaire. Il se peut que
ce soit plutôt l’inverse qui soit intéressant.
Nous avons également pu tester l’étui
semi-rigide qui l’accompagne, compatible
avec tout pedalboard dont les dimensions
coïncident.

Par Didier Saint-Grawal

PLUS... OU MOINS...
Le XPND -1 est le premier
pedalboard de la gamme. Le
second modèle (XPND -2) , qui propose
une rangée supplémentaire, fonctionne
sur le même principe. Son apparence est pédales trop profondes comme cer taines mini - pédales de volume et de wah, mais on
plutôt massive pour un board ajouré et Electro - Harmonix, par exemple. Les ne peut pas dire qu’en termes de confor t,
permet d’envisager de disposer des pédales pédales de wah ou de volume sont bien ce soit la panacée. En tout cas, le XPND -1
plutôt massives. Sa seule limitation est bien évidemment à proscrire sauf à les intégrer inspire toute confiance, on dispose de deux
évidemment qu’on ne peut y assembler en dehors du board, ce qui est souvent le clips pour passer les câbles, ce qui permet
que des pédales compactes, en une seule cas quand on veut voyager léger mais ne pas de câbler plutôt proprement. Deux autres
rangée. Le format Boss / MXR étant le perdre cer tains contrôles sur le son. Bien clips sont fournis si on souhaite mettre plus
plus adapté, on devra renoncer à des évidemment, on peut aussi opter pour des de pédales car, et c’est le côté sex y de ce

54 BASSISTE
bien compris et nous l’indique par le prix,
qui n’en fait pas du tout un accessoire mais
plutôt un compagnon de même statut que
le pedalboard lui-même. Pourquoi d’ailleurs
rechigner à protéger correctement pour une
centaine d’euros des pédales et une alim qui
peuvent coûter près de 1000 euros
l’ensemble ? Toutefois,
nous comprenons
tout à fait que
certains trouvent
l’addition
finale un peu
salée puisque
l’on at teint les
200 euros pour le
package complet. Ce
prix est bien évidemment
à met tre en rappor t avec
la qualité de l’ensemble qui
dépasse largement les solutions
bas de gamme du marché.
C’est un choix que les plus
exigeants feront sans hésiter,
mais qui n’est pas sans
conséquence sur le budget.
pedalboard, on peut augmenter sa longueur Notez que, pour ceux qui
en faisant coulisser les deux parties qui le ont choisi de réduire
composent. Ces dernières s’emboîtent sans la taille du board, on
jeu et permettent de passer d’une taille de dispose d’un compartiment
35 cm à un généreux 63 cm. De quoi voir supplémentaire pour transporter des
venir, puisque cela permet d’envisager pas accessoires ou une pédale qu’on n’aurait pu
loin de trois pédales supplémentaires, ce mettre sur le pedalboard du fait de sa taille,
qui, quand on est bassiste, ressemble fort à comme la wah wah précitée. Enfin, ceux
une opulence folle. On apprécie les larges plus qu’avoir un board avec un creux. Il est qui disposent déjà d’un pedalboard à une
barres recouver tes de velours (les bandes donc for t probable que c’est la possibilité rangée peuvent éventuellement envisager
de crochets sont fournies) qui assurent de passer d’une taille maxi à une taille mini, d’utiliser ce gig bag sans passer par le
un grip optimal. On ne retrouvera pas les plutôt que l’inverse, qui fasse la force de XPND -1. Idem pour ceux qui ont fabriqué
pédales en vrac dans l’ étui, même après ce pedalboard. le leur ou s’apprêtent à le faire, tant que
un stockage à la verticale (ne faites pas ça, les dimensions coïncident.
sur n’importe quel board, stockez à plat, ça
L’HABIT QUI VA BIEN Au final, D’Addario prouve une fois de plus
vous évitera des surprises au déballage) . son sérieux et sa volonté de faire bouger
Là où on se dit que le marketing est une Le PW- BLPBT- 01, autrement appelé Backline quelques lignes en présentant des produits
chose mais que l’usage en est une autre, Pedalboard Transpor ter 1, est un étui fiables, adaptés à la réalité du marché et
c’est qu’en général, quand on se concocte semi - rigide dont la taille est adaptée au plutôt orientés haut de gamme. De bien
un pedalboard, on a tendance à en met tre XPND -1 dans sa longueur maximale. De fait, beaux outils qui donnent envie de prendre
un peu trop, au cas où, et on finit toujours il est totalement indiqué pour ce dernier la route. •
par dégager une ou deux pédales qui ne et of fre une sensation très rassurante
ser vent à rien (non, Mar tine, la reverb de solidité et de rembourrage doux pour
n’est pas indispensable sur ton board) . le contenu qu’il devra transpor ter. Il est
De fait, en procédant à un rétrécissement équipé d’une large poche d’accessoires et
du board, on gagne en compacité et en d’une sangle tout à fait adaptée à la rude
dario.com
propreté tout en conser vant un sentiment vie de musicien de tournée. Ce genre de www.dad
CONTACT 9€
XPND-1 : 1d0Transporter :
de plénitude dû à un board dont la taille board étant conçu pour prendre l’avion,
est par faitement adaptée. Je sais bien le train et en tout cas beaucoup voyager,
qu’on entre dans des considérations qui disposer d’une protection à la fois solide et edalboar
sont à la limite du fétichisme mais certains le rendant facile à transporter est un atout Backline P 97 €
maniaques préfèrent mettre une pédale de non négligeable, d’ailleurs D’Addario l’a

BASSISTE 55
GAETANO
RÉSUMÉ
Basse de
luthier av
en frêne d ec corps
es marais
érable vis , manche
sé,
fretless, m touche ébène

COSTANZO
icro doub
bobinage le
, électron
active / p ique
assive

LOLLY FRETLESS
Retour dans les 80’s

N
ous connaissons bien maintenant
Gaetano Costanzo, ce luthier
italien installé en plein centre de
Naples et dont nous avons déjà
testé les modèles Jazz Bass et Precision
(Bassiste Magazine # 88 et # 89). Mais c’est
de tout autre chose qu’il s’agit cette fois
avec ce modèle Lolly fretless, réalisé à la
demande du bassiste Rosaire Riccobono.

Par Paolo Coccina


Photos @ Pascal Vicart

POIDS PLUME
On découvre ici un instrument radicalement
différent des standards emblématiques définis
par Leo Fender, conçu à partir du modèle
Lolly mais avec des particularités notoires.
Le corps, à la forme Lolly caractéristique,
est constitué de frêne des marais recouvert
d’une peinture nitro trois tons sunburst satin.
Il est vissé en quatre points à un manche
érable surmonté d’une touche ébène. Le
réglage de la courbure du manche se fait
par une vis immédiatement accessible en
bout de touche côté micro. Le sillet et le
chevalet, de fabrication maison, sont en
laiton. Les mécaniques sont des Hipshot
Ultralite. Quant à l’électronique, elle aussi
signée Gaetano Costanzo, elle est gérée par

BASSISTE 57
deux potentiomètres de volume et deux autres très rapidement ses marques sur cette touche mais avec un certain manque
dosant les graves et les aigus. ébène très confortable et on se surprend à d’épaisseur sur les notes
On est d’ailleurs surpris de trouver deux jouer d’emblée avec un jeu d’une justesse aiguës. En se positionnant
potentiomètres de volume pour un seul gros très honorable, grâce notamment aux sur l’autre bobinage,
micro (signé Gaetano Costanzo avec des pôles repères gravés sur le haut de la touche en ouvrant donc l’autre
de 10 mm en Alnico V), mais cela permet entre et sur les extrêmes aigus sous la corde de volume et en fermant le
autres de régler indépendamment chaque Sol. La large découpe de la corne inférieure premier, on ne note pas
bobinage de ce micro double, qui n’est pas permet une accessibilité optimale jusqu’à d’énormes différences au
sans rappeler une certaine Music Man. deux octaves au-dessus des cordes à vide niveau des sons, avec seulement
Le potentiomètre de volume côté manche (équivalent à 24 cases donc). une légère réduction des graves
est doté d’un système push / pull qui offre Pour la petite histoire, il faut savoir que Rosaire sur tout le spectre.
la possibilité de basculer d’un mode actif Riccobono voulait, avec cette Lolly fretless, Avec ce réglage, on peut s’attaquer
à un mode passif. En mode passif, tous les retrouver le son de Pino Palladino dans les avec bonheur à Jaco Pastorius, en
réglages d’égalisation deviennent inopérants. années 1980. Nous allons donc ressortir notre se lançant dans un « The Chicken »
bon octaver Boss OC-2 pour entendre si le endiablé, surtout si on attaque les
EN ACTION but est atteint. cordes avec la main droite (gauche
pour les gauchers) tout près du
C’est l’extraordinaire légèreté de l’instrument
PASSIF OU ACTIF ? chevalet.
qui frappe le plus lorsqu’on s’empare de cette Mais très vite, il faut se rendre à
Lolly, de façon très pratique par la corne Commençons par nous positionner en l’évidence : le meilleur résultat s’obtient
supérieure par exemple. La composition mode passif en tirant le potentiomètre en ouvrant les deux volumes à fond.
du corps et le choix de Hipshot pour les de volume en position haute. Ouvrons Le son devient alors très chantant, très
mécaniques y sont certainement pour totalement ce dernier en laissant l’autre expressif avec un sustain remarquable
beaucoup. Bien équilibrée, la basse ne pique potentiomètre de volume fermé. Seul le qui autorise tous les effets du type glissé
pas du nez une fois sanglée sur l’épaule. bobinage côté manche est donc mis à ou vibré, et qui va se révéler idéal pour
Rappelons que nous sommes en présence contribution. Rappelons qu’en mode revisiter tous les classiques du genre,
d’une basse fretless et pourtant, on trouve passif, les deux réglages de graves et Pino Palladino en tête, surtout si on se
d’aigus deviennent inopérants. décide à insérer le fameux octaver Boss
Avec cette configuration, nous OC-2 entre la basse et l’ampli. Le résultat
obtenons les sonorités caractéristiques est tout simplement bluffant ! On peut se
d’une basse fretless, très chantante refaire tous les tubes de Paul Young. Il est
aussi possible de s’inspirer de certaines lignes
de fretless mémorables de Tony Franklin
ou Guy Pratt.
Mais nous sommes loin d’avoir fait
le tour de cette Lolly, car il nous
reste le mode actif.

CHANGEMENT DE MODE
D’une simple pression
sur le potentiomètre de
volume, nous voilà en
mesure de doser les
graves et les aigus, et
de sculpter le son selon
les types de sonorités que
l’on veut obtenir.
Pour ma part, je finis,
après quelques essais, par
trouver le son qui me ravit en
réduisant un peu les aigus, déjà
très généreux sur cette basse au
départ, et surtout en gonflant
les graves au-delà de la position
médiane. Non seulement cela
apporte encore une plus grande
consistance aux sons produits,

58 BASSISTE
mais le volume de sortie s’en trouve bonifié.
La définition est exemplaire, que l’on joue
dans les graves ou dans les aigus, et tout ce
que l’on a vu précédemment en mode passif
prend encore plus d’ampleur en mode actif.
C’est un véritable régal de laisser courir ses
doigts sur cette basse : on peut même se
mettre à jouer en slap sans que cela paraisse
incongru.

BILAN
Avec cette Lolly fretless, un instrument très
agréable à jouer, à la qualité de fabrication
et au son exceptionnels, Gaetano Costanzo a
une fois de plus fait la preuve de son talent.
Le prix non négligeable de 2100 € (variable
selon les options) est tout à fait justifié pour
un instrument aussi remarquable. •

CONTACT uthier
/ G a e ta n o CostanzoL
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www.face
2100 €

BASSISTE 59
RÉSUMÉ
Logiciel d
en
audio syn otation, piste
chronisab
partition le,
lue
RSE d’inst via module
ruments v
compatib irtuels,

Guitar Pro 8
le Mac ou
compatib PC,
le avec le
dernières s
puces Ap
ple.

Pour nous, les bassistes

N
on, ce n’est pas une énième L’interface principale
provocation, et puis cela fait
tout de même une éternité
que nous, bassistes, devons
nous adapter en détournant
des objets à usage guitaristique. Si on
ajoute à cela l’affaire du Fender Bassman
honteusement repris à leur compte par les
six-cordeux, croyez bien qu’il ne faut avoir
aucun scrupule à lorgner sur cette huitième
version de Guitar Pro, le célèbre logiciel
de notation musicale qui fait de plus en
plus de choses, notamment en intégrant
de plus en plus d’audio. Petit passage en
revue des améliorations apportées par
cette V8.
le temps de créer un compte chez l’éditeur. Il est L’accordeur polyphonique
loin le temps où il fallait faire preuve de capacités
Par Régis Savigny intellectuelles et divinatoires hors du commun pour
activer un logiciel lambda.

ÉCRAN UNIQUE GÉNÉRATION AUDIO


Point de menus à tiroirs et d’interface compliquée La grosse nouveauté de cette version concerne bien
avec des écrans qui se succèdent en fonction évidemment l’ajout d’une piste audio synchronisée
des usages qu’on pourrait avoir de Guitar Pro. à la partition. Cela permet de toujours envisager les
Ici, tout se répartit autour d’une fenêtre centrale notes écrites dans un contexte. Certes, le moteur RSE
qui présente dans une seule vue la partition, un (Realistic Sound Engine) qui gère les sonorités MIDI
affichage sommaire des différentes pistes en jeu, (échantillons de notes déclenchées par commande
une boîte à outils pour l’édition, un inspecteur (qui informatique) avait déjà constitué un gros progrès,
permet de garder l’œil sur les caractéristiques de la mais ici on parle de véritable audio, et pourquoi pas
partition, les noms et crédits de l’œuvre, la mise en l’audio originel de la chanson tant que cela reste
page…) et diverses interfaces pour saisir les notes. à visée pédagogique. On peut aussi envisager un
D’ailleurs, les habitués des versions précédentes backing track adapté à l’instrument pour peu qu’on
ne seront pas perdus, même avec les nouvelles ait les capacités de l’enregistrer par ailleurs ou bien
fonctions que nous détaillerons plus bas. qu’on l’ait acheté sur la toile (cela existe, il y a de
Avant d’utiliser le logiciel, il convient bien nombreux sites spécialisés). D’ailleurs, il est fort à
évidemment de l’installer. La procédure est parier que l’application et le site mysongbook.com
ultra-simple et rapide, surtout si vous avez pris profitent de cette amélioration pour modifier le

60 BASSISTE
La saisie des notes s’effectue via la souris, le clavier
de l’ordinateur, un clavier MIDI externe ou bien
une interface sous forme de manche qui permet
aux non-lecteurs de commencer à se débrouiller.
Avec le temps, on finit toujours par apprendre les
notes, pour peu qu’on soit assez malin pour vouloir
gagner du temps. Il est évident que connaître les
Des plugins pour traiter les sons bruts notes sur le manche aide un peu à la vérification
de ce qu’on est en train de noter mais, pour qui
dispose d’une bonne oreille, on s’en sort très bien
également. La possibilité de réduire la vitesse
de jeu de la séquence est très utile pour le côté
pédagogique. Il est aussi possible de programmer
des incrémentations, ce qui est parfait pour travailler
des exercices d’échauffement, par exemple, ou
des études.
Une autre nouveauté importante concerne la
présence de diagrammes de gammes. Ils offrent un
support pédagogique assez intéressant, notamment
si on veut bosser l’improvisation ou la faire travailler
à ses élèves, qui peuvent ainsi avoir un mémo très
Vue sur la piste audio totalemennt synchronisable la partition utile quand on utilise des grilles qui modulent.

UN OUTIL DU QUOTIDIEN
Guitar Pro n’est pas un outil ultra-spectaculaire
ni même haut de gamme. En revanche, il est
taillé pour une utilisation de tous les jours, en
bloc-notes pour conserver une idée musicale ou
pour écrire un score complet jouable par une grosse
formation. Ses plus grosses limitations concerneront
Les diagrammes de gammes
essentiellement la musique classique et a fortiori
la musique contemporaine qui nécessitent des
format des partitions proposées en intégrant une piste audio. Autre manière options très fines. Pour les musiques actuelles,
La palette d’édition
de procéder : on garde les pistes MIDI pour l’accompagnement et on ajoute c’est 100 % efficace et totalement adapté. Les
la piste audio de l’instrument retranscrit pour plus de réalisme dans les nouveautés le rendent encore plus polyvalent
informations à interpréter. Cette amélioration préfigure certainement le et le fait qu’il soit adossé à un abonnement à
multipiste qui arrivera, n’en doutons pas, dans quelque version future. En mysongbook.com, pour un temps limité, permet
parlant de multipiste, il est possible d’afficher piste par piste ou un score de profiter à plein du côté pédagogique du logiciel.
complet, très utile pour qui veut diriger un ensemble. Dernière info importante, le programme éducation
Pour plus de réalisme, on peut traiter les sons bruts du moteur audio via de l’éditeur est très bien pensé puisqu’il offre les
des pédales virtuelles dont la présentation s’est grandement améliorée. licences aux établissements et enseignants, tout
Dire que les bassistes sont comblés par les modélisations spécifiques à en proposant une conséquente réduction pour les
l’instrument est un peu exagéré mais on va se débrouiller avec ça. élèves des établissements agréés. De quoi favoriser
l’échange entre musiciens et éviter l’utilisation de
NOTATION FLUIDE logiciels piratés, encore malheureusement légion.
Une version très réussie qui a tout pour plaire aux
Pour qui n’a pas besoin de notation contemporaine (au sens classique bassistes que nous sommes. Son prix est presque
du terme) ou de fonctions avancées, l’interface d’édition de partition est donné au vu des services rendus. Top. •
ultra-complète. On peut ainsi éditer en un temps record une partition de
basse, pour soi ou pour un élève, disposant de toutes les informations
nécessaires à une bonne interprétation. Les subtilités de jeu sont toutes
représentées, qu’il s’agisse des liaisons, des effets de jeu de type bend,
ar-pr o.com
release bend, appoggiatures, glissés, mordants, tapping, etc. On dispose même des options slap et www.guit
pop, ce qui montre bien que nous ne sommes pas laissés pour compte. On peut envisager la partition CONTACT

69,95 €
sous l’angle du solfège seul, de la tablature seule ou bien d’une combinaison des deux, sachant qu’il
est possible de configurer une basse à quasi autant de cordes que nécessaire et d’accorder chacune
comme on le souhaite.

BASSISTE 61
RÉSUMÉ
Basse 4 c
ord
active. Liv es passive /

Cort
rée en étu
Cort, mic i ri
ros Nordst gide
Big Single rand
s, électro
Markbass niq
, chevalet ue
mécaniqu Ba
es Hipsho bicz,
t.

GB-Modern 4
Les nouveaux standards

L
es époques passent et, au fur et
à mesure, les standards évoluent,
notamment en ce qui concerne
l’équipement de ce qui constitue
une basse professionnelle. En
dehors des normes du vintage qui ne
souffrent aucune remise en cause (on sait
ce que sont une Jazz Bass, une Precision,
une Rick 4001…), on peut se demander
comment doit être équipée une basse qui
se veut actuelle et capable d’embrasser
un peu tous les styles. Cort semble avoir
une réponse à nous proposer avec la
GB-Modern 4, qui semble vouloir cumuler
tous les équipements les plus hype du
moment tout en restant un instrument
totalement dans les clous. Voilà qui est
intéressant et nous intrigue.

Par Régis Savigny

FULL OPTIONS
Autant on aime les instruments simples, autant
quand on nous promet du toutes options, on a
aussi très envie de savoir à quel point on est gâtés.
Cela commence par l’étui rigide rectangulaire aux
dimensions généreuses, pas le plus pratique à manier
certes, mais terriblement efficace. Il faut dire que
la basse est plutôt jolie, même si pour cela, il faut
accepter de voir du bois, du bois et du bois. La finition
Charcoal Grey laisse apparaître toute la figuration
de la table en peuplier pommelé. Cette dernière
recouvre un corps en paulownia / érable, ce qui
annonce clairement la légèreté de l’instrument. On
trouve également des filets en noyer. Le manche
vissé est en érable torréfié (il aurait été étonnant

62 BASSISTE
Avec sa plaque transparente et son manche torréfié,
le tout combiné à des bois de table spectaculaires,
la GB-Modern 4 a de grandes qualités esthétiques
qui raviront les amateurs de spectacle. Les tenants
du pur vintage devront bien évidemment repasser
ou jeter leur dévolu sur d’autres instruments de
la gamme.

ULTRA-POLYVALENCE
Le jeu sur la GB-Modern 4 est un modèle de
confort. Le manche est parfaitement taillé, pas
nécessairement trop fin façon Jazz Bass, on serait
sur un entre-deux avec un manche de type Precision.
Le jeu sur ce dernier est facile et sans effort, ce qui
ravira ceux qui aiment jouer fusion, un peu moins
ceux qui aiment batailler, mais il suffit pour cela
de remonter un peu les cordes si vraiment l’action
basse gêne le musicien. Les contrôles sont faciles à
manipuler et on n’a pas l’impression d’avoir affaire
à une usine à gaz. Tout est à sa place et on trouve
très vite ses marques.
Les mécaniques font un boulot remarquable : la
Cort est stable et ne nécessite pas qu’on s’accorde
en permanence, si on fait bien le travail de montage
et de stabilisation des cordes neuves.
que cette mode n’arrive pas à un moment dans le Pour l’électronique, c’est également un couple Première chose qu’on notera, c’est la faculté du
monde de la basse, tant cela a fonctionné sur le disparate qui a été choisi. Les deux micros sont des corps et du manche à résonner. On sent bien les
marché de la guitare). L’avantage du traitement Nordstrand Big Singles qui sont un peu la coqueluche notes sur le ventre quand on joue juste acoustique.
est une stabilité accrue, une densité moindre et, du moment, notamment aux USA où ils font fureur Belles sensations unplugged donc.
a priori, une sonorité plus chaude, ce qui, pour ce et sont encensés sur les forums dédiés. Ces pickups Une fois branchée, on comprend pourquoi les
dernier point, reste une accroche marketing mais sont de gros micros simples disposant de bobines Nordstrand sont des micros aussi bien cotés. C’est
pas nécessairement une réalité tangible. élargies, le tout dans un format pile entre le micro à la fois défini et charnu, et surtout, on a tout de
Question hardware, on trouve ici une combinaison JB et le pavé. Le contrôle de cette électronique se suite un son exploitable. Le mode passif est déjà
chevalet Babicz et mécaniques Hipshot Ultralite. Ces fait via un préamp Markbass (qui fournit donc les impressionnant de polyvalence : en jouant sur les
deux éléments sont désormais un passage obligé autres constructeurs en plus d’alimenter sa propre deux volumes et la tonalité, il y a déjà de quoi se
sur les basses non vintage, même si le Babicz est production), lequel s’enclenche via un push pull faire une sacrée palette de sons. Le micro aigu
un peu plus marginal. Autant dire que question sur le potard de tonalité. Il offre trois bandes, rien mord un peu moins qu’un micro JB, mais est quand
accastillage, on se retrouve avec le top du top et on de compliqué. Les contrôles passifs de la basse se même suffisamment agressif si on souhaite utiliser
ne voit pas vraiment ce qui pourrait un jour donner composent de deux volumes, un par micro donc, un drive avant l’ampli ou pousser un peu le préamp
envie de changer ces éléments. et d’une tonalité. de ce dernier. Le micro grave est sans doute le

BASSISTE 63
plus intéressant : il donne de la profondeur aux Le préampli Markbass intégré est un modèle de pile-poil là où il faut pour pouvoir intervenir là où
notes, tout en conservant une attaque suffisante fonctionnement. Débrayable, il donne accès à ça fait systématiquement mal : des basses trop
pour sonner rock. La combinaison des deux, très l’égalisation trois bandes et à la partie active de présentes ou pas assez rondes, des médiums plus
moderne, ne sera pas aussi piquante que sur une l’électronique. Ce qu’il faut souligner, c’est son chantants, des aigus qu’on trouve trop présents
JB, mais permet d’envisager tous les grooves à absolu silence de fonctionnement avec une pêche ou justement pas assez. Pas de souci, ce que vous
base de belles fondamentales pleines de sustain. terrible en boost et un côté très musical quand on voulez, il va le faire. Attention d’ailleurs à ne pas
La tonalité joue très bien son rôle avec la capacité décide de couper certaines fréquences. D’ailleurs, exagérer là-dessus, car le préamp y va franchement.
de faire un peu plus chanter le micro aigu si on on peut souligner le travail de l’équipe Markbass Les styles abordables avec cette GB-Modern 4
prend la peine de lui rentrer dedans. pour l’étalonnage de son EQ. Les fréquences sont sont très nombreux, mis à part du pur metal ou
des choses vraiment spécifiques (le côté ultra-sec
d’une Höfner par exemple). Elle sera donc difficile à
prendre en défaut, sauf si vous ne jurez que par les
sons purement vintage. Mais si vous vous fichez des
étiquettes et que vous avez le budget pour, cette
Cort est sans doute la meilleure affaire du moment
en termes de rapport prix / équipement de série.
Pas si Jazz Bass que ça, elle demande un essai
pour se convaincre de ses immenses qualités. •

ars.com
w w w.cortguit
FABRICANT az o n e d umusicien
.com
.l
EUR www
DISTRIBUT
1449 €
RÉSUMÉ
Pédale fu
zz à doub
le étage

Audiolithe
de gain, M
ade in Fra
boost sur nce,
le second
contrôle d éta
es médium ge,
tonalité, sw s et
itch pour
les médiu creuser
ms.

Doomer Fuzz
Impitoyable

I
l y a les fuzz faites pour donner dans le
vintage et il y a les fuzz qui n’ont aucun
sentiment et sont là pour dézinguer
votre signal et le faire basculer dans
une autre dimension. L’Audiolithe
Doomer Fuzz est de celles-là. Cette pédale
fabriquée en France avait atterri dans
les locaux de nos confrères de Guitare
Xtreme, nous la leur avons empruntée
pour voir ce que ça donne sur une basse.
Poussez-vous de devant le stack, ça va
piquer !

Par Miguel Ferreira

SOBRIÉTÉ réglage de boost assorti à ce canal se trouve sur


le potentiomètre Roar justement. Voici donc trois
La Doomer Fuzz est un modèle de sobriété sons accessibles au pied, le son dry, le premier Évidemment, quand on enclenche le switch Roar,
graphique, au moins en ce qui concerne les coloris. circuit et les deux ensemble. Simple et basique. on oublie l’attaque et on fait place à un grain d’une
Comme l’autre modèle de la marque, elle est belle complexité qui se déploie tout au long de
sérigraphiée en noir sur le métal brut. Les deux
FURIE SONORE la note. Parfait pour les expériences noisy ou les
grizzlys représentés renseignent sur le projet du passages bien gras dans un titre pop.
constructeur et, manifestement, on est là pour Si nous ne disposons pas d’un réglage de mélange Proposée à un prix plutôt contenu, l’Audiolithe
décoller du miel. La pédale fonctionne sur une qui nous permettrait de rajouter du son clair pour Doomer Fuzz est un véritable instrument qui mérite
double architecture, permettant de n’enclencher conserver de l’attaque, la Doomer Fuzz surprend qu’on s’y attarde. Plutôt destinée aux quatre-
qu’un seul des deux circuits de gain ou de faire tout de même puisque, avec le premier circuit cordes, les amateurs de cinq-cordes devront être
fonctionner les deux. Les contrôles ne sont pas seulement, on peut tout à fait conserver une attentifs à ne pas trop charger le bas du spectre,
sommaires mais assez simples à comprendre quand attaque très présente, ce qui nous rappelle qu’on idem pour les joueurs de basses actives. Mollo
on prend le temps de lire la notice (oui, je sais…). n’est pas sur une distorsion ou un overdrive sur les basses, donc, mais ce conseil mis à part,
Outre les réglages de gain et de niveau de sortie, mais bien une fuzz, dont le comportement peut faites-vous plaisir. •
baptisés Fuzz et Level, nous trouvons une tonalité parfois surprendre quand il s’agit de rester dans
classique et un réglage des médiums sous les un domaine plutôt clean. D’ailleurs, la pédale
étiquettes Tone et Anger. Un mini-switch permet supporte très bien l’utilisation du potard de volume
iolith efx.com
www.aud
FABRICANT
de choisir deux pré-égalisations, une neutre et de la basse et offre de ce fait une plus grande

239 €
l’autre très creusée dans les médiums, sans doute palette sonore. Le son est plutôt agressif mais
plus efficace pour la guitare. Si le premier circuit pas du tout caricatural et permet de poser de
s’enclenche via le switch Engage, le deuxième belles lignes bien charnues et capables de faire
circuit s’allume avec le footswitch baptisé Roar. Un le lien entre la grosse caisse et la guitare.

BASSISTE 65
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SOMMAIRE
DES PARTITIONS
EN VIDÉO :

68 BRUNO RAMOS
La ligne de basse de « Morrow Bay » (United Guitars, Vol.3)

70 PASCAL MULOT
5 exercices sur la gamme pentatonique

74 BRUNO TAUZIN
Le style latino : « Recado » (Djalma Ferreira)

76 FRANÇOIS C. DELACOUDRE
« Square One » (Soho Riot)

78 JULES BROSSET
Technique : les harmoniques naturelles

BASSISTE 67
VIDÉO

BRUNO RAMOS

LA LIGNE DE BASSE DE « MORROW BAY »


(UNITED GUITARS, VOL.3)
Après un passage par le jazz rock dans mon précédent tuto pour le
magazine, j'ai eu envie de revenir aux fondamentaux avec une ligne de
basse rock simple et efficace, que j'ai enregistrée lors des sessions de
l'album United Guitars, Vol.3. Il s'agit du titre « Morrow Bay », composé
par Nicolas Chona, guitariste bien connu dans nos contrées et taulier de
la chaîne YouTube Tone Factory. La ligne que j'ai façonnée accompagne des parties des riffs
de guitare, mais vient parfois les compléter avec subtilité. N'hésitez pas à retrouvez la vidéo
pédagogique consacrée à ce morceau sur la chaîne Tone Factory, et bien sûr à regarder la
vidéo de la session de studio sur la chaîne de United Guitars.

= 100
Intro
D Asus4/C # G Em Bm D A

5 4 2 5
3 0 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5 5

Couplet
3x
9 10 11 12

7 5 5 4
0 0 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 5

Solo 3x

5 5 4 5 4 0 5 5
0 0 0 0 3 0 0 0 0

Refrain
3x

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

2 2 2 2 2 2 2 2 5 4 0 7 7 7
68 BASSISTE 4 4 4 4 4 4 4 4 4 4 4 5
5 5 4 5 4 0 5 5
0 0 0 0 3 0 0 0 0

Refrain
3x

2 2 2 2 2 2 2 2 5 4 0 7 7 7
4 4 4 4 4 4 4 4 4 4 4 5

Pont
D sl. Asus4/C # G Em Bm D A
H P

sl.
H P
7 7 9 6 4
7 5 9 4 7
5 7 9 7 5 7 7
5

D Asus4/C# G Em Bm D A

5 4 2 5
3 0 5 5 5 5 5 5 5 5 5

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 69
VIDÉO

PASCAL MULOT

5 EXERCICES SUR LA GAMME PENTATONIQUE

Salut les amis de la quatre-cordes et les autres ! J'ai choisi de vous parler de la pentatonique, une gamme à cinq notes comme
son nom l'indique, et plus précisement la gamme pentatonique mineur, tout simplement parce qu'elle est incontournable dans le
funk, mais plus globalement dans la musique binaire moderne. Par le biais des exercices que j'ai développés, je vais essayer de
vous donner quelques clés pour jouer efficace et pour groover.

LA GAMME PENTATONIQUE MINEURE

Je commence par vous présenter la penta mineure. Pour résumer, ce sont cinq notes qui sonnent la mort qui découlent du blues et qui ont été
adaptées au funk. Je vous propose de vous familiariser avec le doigté suivant : 7e mineur, fondamentale, tierce mineure, quarte et on glisse jusqu'à
la quinte. Avec ce genre de doigtés, qui ne sont pas scolaires et plutôt blues, vous aurez accès plus facilement aux appogiatures, trilles et autres
ornementations. Vous pouvez essayer de la retrouver partout sur le manche, ce qui représente déjà un boulot conséquent.

= 120
Bm7
sl.

V pos sl. VII pos

5 7 9
5 7

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

70 BASSISTE
EXEMPLE 1

Pour ce premier exercice, nous n'allons utiliser qu'une seule note, la fondamentale, c'est-à-dire le Si. Il s'agit d'un exercice de technique et de mise
en place, puisqu'il faudra placer cette note sur le premier temps, ce que j'appelle « hit the one ». Si vous envoyez un fill, vous devez toujours être
capable de garder le groove et de retomber pile-poil sur le premier temps.

EXEMPLE 2

Pour ce second exercice, nous allons utiliser la fondamentale et la 7e mineure. Ces deux notes sont jouées sur deux octaves différentes. J'attire
votre attention sur les notes muettes ou « ghost-notes », qui ne sont pas forcément perceptibles à l'oreille dans un arrangement global, mais que
l'on perçoit en écoutant une ligne de basse isolée. Ces mulitudes de petites notes font vraiment groover l'histoire, par exemple en marquant la
caisse claire.

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 71
EXEMPLE 3

Cette fois, nous allons utiliser trois notes de notre penta : fondamentale, 7e mineure et tierce mineure, à nouveau sur deux octaves. Notez toujours
l'utilisation des ghost-notes et d'une petite trille.

EXEMPLE 4

En route pour l'exercice numéro 4, qui utilise... quatre notes : fondamentale, tierce mineure, la 7e mineure et la quarte sur la seconde partie du
plan. Là encore, une petite trille pour donner du relief, mais également des liaisons main gauche. N'hésitez pas à utiliser des effets type octaver ou
Mutron qui peuvent renforcer l'efficacité de votre jeu et vous amener à jouer plus simple.

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

72 BASSISTE
EXEMPLE 5

Vous l'aurez compris, dans ce dernier exercice, nous allons utiliser toutes les notes de la gamme : fondamentale, tierce mineure, quarte, quinte et
7e mineure. L'appogiature apporte de la souplesse. Pour résumer ce cours, la règle numéro un, c'est de toujours retomber sur vos pieds. Même
si vous ne placez qu'une seule note sur le premier temps toutes les deux mesures, comme sur « Jam » de Michael Jackson, elle doit tomber
exactement là où il faut, aussi bien rythmiquement qu'émotionnellement.

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 73
VIDÉO

BRUNO TAUZIN

LE STYLE LATINO
« RECADO » (DJALMA FERREIRA)

Hello les bassistes, je suis heureux de vous retrouver dans ce nouveau numéro de Bassiste Magazine. Au programme, du
soleil, avec de la musique latine, et plus particulièrement le morceau « Recado » de Djalma Ferreira. Voici l'occasion de travailler
l'alternance fondamentale / quinte, ainsi que le rythme noire pointée / croche / blanche, à vitesse rapide.
Amusez-vous bien et n'oubliez pas de visionner la démonstration pour le cours... Bon été et que la basse soit avec vous !

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

74 BASSISTE
Si vous voulez développer votre créativité,
je vous recommande ma méthode
« Lignes de Basse Latino Evolutives »,
disponible au format livre, PDF, Ipad et
Android, sur mon site : BasseBruno.com

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 75
VIDÉO

FRANÇOIS C. DELACOUDRE

« SQUARE ONE » DE SOHO RIOT

Bonjour à toutes et à tous ! Si vous suivez mes tutos pour le magazines et ma chaîne YouTube, vous connaissez mon goût
immodéré pour le rock sous toutes ses formes, mais principalement celui des années 1970 et 1990. La musique que je compose
pour mon groupe Soho Riot, qui a sorti son premier album il y a quelques mois, synthétise vraiment mes influences à la basse. Je
vous propose d'étudier quelques lignes issues du single « Square One ». N'hésitez pas à aller voir la vidéo sur la chaîne YouTube
du groupe.

EXEMPLE 1

Le rock se nourrit de nombreuses influences : la pulse ternaire ou « shuffle » en est une majeure dans ce style. Dans « Square one », titre issu
de l'album du même nom, paru chez Mistiroux Productions, l'idée première du riff était d'avoir la sensation d'une énorme locomotive à vapeur
chauffée à blanc (voir Retour vers le futur 3 pour se faire une idée !), traversant les oreilles. L'utilisation des pull-off sur les cordes à vide participe
de beaucoup au rebond de cette ligne et c'est un excellent exercice pour apprendre à maîtriser cette technique.

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

76 BASSISTE
EXEMPLE 2
Sur le refrain, j'ai décidé de donner un balancement différent du shuffle classique, en faisant ressortir le côté « tribal » de la ligne en modifiant les
appuis dans le triolet : idem, beaucoup de cordes à vide. À bosser lentement pour bien comprendre l'articulation.
Attention, l'accordage est un demi-ton en-dessous !

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 77
VIDÉO

JULES BROSSET

Retrouvez le Groovy Cast, un podcast spécial pour les


bassistes, présenté par Jules Brosset et Max Rami, sur
toutes les plateformes de streaming.

TECHNIQUE
LES HARMONIQUES NATURELLES
Les harmoniques naturelles (que l'on obtient en effleurant les cordes au-dessus des frettes à des endroits bien précis) représentent
une ressource incontournable sur à peu près tous les instruments à cordes, et de par leur son particulier, elles font largement
partie du vocabulaire de la basse. Par le truchement du premier exercice, je vais vous montrer les différents intervalles que l'on
peut obtenir sur chaque cordes. Le plus important sera évidemment de les mémoriser. Viennent ensuite trois exemples pour
mettre tout cela en pratique. Reportez-vous impérativement sur la vidéo que vous retrouverez sur la chaîne YouTube de Bassiste
Magazine. Bon courage !

PRÉAMBULE : LES HARMONIQUES NATURELLES SUR LA CORDE DE SOL

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

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EXEMPLE 1 :

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

BASSISTE 79
EXEMPLE 2

EXEMPLE 3

Ces partitions ont été éditées avec Guitar Pro 7.5.

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