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PROSPECTION - EXPLOITATION

DE
L’URANIUM
&

TRAITEMENT DES MINERAIS


D’URANIUM

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MÉTHODES DE PROSPECTION DE L’URANIUM

← Introduction

← 1 - Méthodes de prospection de l’uranium

← 1.1 - Méthodes directes

← 1.2 - Méthodes indirectes

← 1.3 - Méthodologie de la prospection de l’uranium

← 2 - Gisements d’uranium

← 2.1 - Définition économique du gisement

← 2.2 - Minerais d’uranium

← 2.3 - Gisements

← 3 - Exploitation des minerais d’uranium

← 3.1 - Utilisation de la radioactivité

← 3.2 - Radioprotection

← 3.3 - Exhaure

← 4 - Ressources en uranium dans le monde

← 4.1 - Définition des différentes catégories de ressources

← 4.2 - État des ressources mondiales en uranium

← Annexe

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INTRODUCTION

Le minerai d’uranium diffère peu des minerais des autres substances métalliques, pour
l’extraction et la concentration, bien que sa teneur soit généralement plus faible ; en
revanche l’utilisation de l’uranium comme source d’énergie lui donne, pour l’économie
d’un pays, un rôle équivalent à celui du charbon et des hydrocarbures. Pour le
géologue et le prospecteur chargés de découvrir des gisements, le minerai d’uranium
offre la particularité intéressante d’être radioactif, donc d’être détectable par des
moyens physiques mettant en jeu cette propriété. Sa détection en surface ou en
subsurface combine donc les méthodes utilisant directement la radioactivité de
l’élément ou de ses descendants naturels (radium, radon, etc.) et les méthodes utilisées
habituellement pour la recherche minière ou pétrolière. Depuis une cinquantaine
d’années, l’uranium a été plus ou moins activement prospecté à travers le monde. La
hausse des prix des matières premières et de l’énergie au cours des années 1970 à
1980 a incité de nombreux pays à développer de vastes programmes de construction
de centrales nucléaires pour améliorer leur indépendance énergétique en diversifiant
leurs ressources. Il en résulte que la demande en combustible pour les centrales
nucléaires a augmenté de façon importante entre 1980 et 1990.

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SOMMAIRE

MÉTHODES DE PROSPECTION
DE
L’URANIUM

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1. MÉTHODES DE PROSPECTION DE L’URANIUM

1.1 Méthodes directes

1.1.1 Radiométrie de surface
1.1.2 Géochimie des sols, des eaux et des alluvions
1.1.3 Étude des gaz émis (hélium et radon)
1.1.3.1 Hélium
1.1.3.2 Radon
1.1.4 Diagraphies nucléaires dans les sondages d’exploration

1.2 Méthodes indirectes

1.2.1 Méthodes géophysiques
1.2.1.1 Méthodes électriques et électromagnétiques
1.2.1.2 Méthodes gravimétriques et magnétiques
1.2.1.3 Méthodes sismiques
1.2.2 Diagraphies ne mettant pas en jeu la radioactivité
1.2.2.1 Mesure de résistivité
1.2.2.2 Mesure de la susceptibilité magnétique
1.2.2.3 Mesure des ondes acoustiques (sonic logging)
1.2.3 Mesures tomographiques entre forages

1.3 Méthodologie de la prospection de l’uranium

1.3.1 Prospection générale
1.3.2 Prospection détaillée
1.3.3 Étalonnage radioactivité-teneur dans les sondages

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1.1 Méthodes directes

Elles font appel soit à la radioactivité d’un descendant de l’uranium, soit directement à
la teneur chimique en uranium dans les eaux ou dans les roches.

La méthode qui utilise les propriétés radioactives est la prospection radiométrique ;


celle qui mesure directement la concentration de l’uranium dans les eaux et les
alluvions est la prospection géochimique.

L’opération de mesure radiométrique faite dans un sondage constitue le


radiocarottage et son enregistrement est une diagraphie.

Un des descendants de l’uranium, le radon, est un gaz radioactif, donc facilement


décelable par des appareils qu’on appelle émanomètres. La méthode de prospection
par le radon s’appelle l’émanométrie.

La prospection par l’hélium 4, qui provient de la désintégration des noyaux d’uranium et


de certains de ses descendants, peut aussi être utilisée en prospection, mais elle pose
encore de nombreux problèmes d’interprétation.

1.1.1. Radiométrie de surface

Les premières grandes découvertes de gisements d’uranium, dans les années 1950,
ont été d’abord le résultat de la prospection faite au sol, au moyen du radiamètre à
tube compteur de Geiger-Müller (tube GM). À partir de 1952, le détecteur GM a été
supplanté en prospection par le radiamètre à scintillateur, appelé quelquefois
improprement scintillomètre. Le principe de ce détecteur est fondé, non plus sur
l’ionisation d’un gaz par le rayonnement radioactif (cas du tube GM), mais sur la
production, sous l’effet des radiations reçues, de photons lumineux dans un cristal
[habituellement un cristal d’iodure de sodium activé au thallium NaI(Tl) pour le
rayonnement gamma].

La sensibilité des scintillateurs a facilité la prospection au sol et surtout permis le


développement des méthodes aériennes.

Les progrès techniques réalisés depuis lors dans la fabrication des instruments
permettent de faire la discrimination entre les rayonnements issus des différentes
familles radioactives naturelles du potassium, de l’uranium et du thorium.

Pour la radiométrie aéroportée en avion ou hélicoptère, le volume des détecteurs doit


tenir compte de l’altitude de vol et de la vitesse de l’aéronef. Ainsi, un cristal de 16,4
litres pour une prospection héliportée (à 100 km/h de vitesse moyenne et à 60 m
d’altitude) est largement équivalent à un cristal de 32, voire de 40 litres à bord d’un
avion volant à 250 km/h à 120 m d’altitude par rapport au sol.

Les spectromètres actuels enregistrent le spectre gamma sur 256 ou 512 canaux
numériques. Des mesures supplémentaires d’altimétrie, de température et pression
atmosphérique, sont nécessaires pour réaliser les corrections au cours du traitement
des données.

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Au sol, on utilise couramment en prospection radiométrique des radiamètres à cristal
de NaI(Tl) et des radiamètres à tubes Geiger pour des mesures précises de
radioactivité dans les travaux miniers. Ces équipements donnent une mesure du
comptage gamma total.

Dans les environnements géologiques riches en thorium, on utilise également des


spectromètres portatifs qui permettent une discrimination entre les diverses familles
radioactives, notamment le thorium et l’uranium.

Familles radioactives naturelles du


potassium, de l’uranium et du thorium

Nom de la famille Isotope utilisé Énergie de la raie MeV Fenêtre de mesure MeV

Potassium Potassium 40 1,460 1,37 à 1,57

Uranium 238 Bismuth 214 1,760 1,66 à 1,86

Thorium Thallium 208 2,615 2,41 à 2,81

Comptage total − − 0,41 à 2,81

1.1.2 Géochimie des sols, des eaux et des alluvions

La prospection géochimique permet la mesure des teneurs en uranium des sols, des
eaux de surface et des alluvions de rivière.

La sensibilité des méthodes et des appareils employés permet de déceler couramment


0,1 µg.kg−1 d’uranium dans les eaux et 0,1 mg.kg−1 dans les alluvions.

Certains appareils mettent à profit la fluorescence rémanente de l’ion uranyle en


solution, à la suite d’une irradiation de courte durée d’une lumière ultraviolette délivrée
par un laser à azote ; leur sensibilité atteint 0,05 µg.kg −1 et est supérieure à celle des
méthodes fluorimétriques habituelles.

L’intérêt de la prospection géochimique est sa rapidité d’exécution et son faible coût.


Dans les régions à forte couverture végétale l’analyse des sols pallie le manque
d’affleurements. La géochimie des cours d’eau (alluvions ou eaux) permet d’obtenir des
valeurs représentatives du bassin versant situé en amont du point de prélèvement.

1.1.3 Étude des gaz émis (hélium et radon)

Rappelons brièvement qu’il se dégage deux groupes de gaz radiogéniques à partir

des familles radioactives naturelles, l’hélium ( ) et trois isotopes du radon :


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← le ou thoron , de période 54 s ;

← le ou actinon , de période 3,9 s ;

← le ou radon proprement dit , de période 3,8 j.


Ces gaz peuvent être considérés comme des traceurs de l’uranium et du thorium.
1.1.3.1 Hélium

La formation de résulte directement de la radioactivité α, les particules α ayant la


structure de noyaux d’hélium. Après ralentissement et capture de deux électrons, ces
noyaux forment des atomes d’hélium gazeux, en quantités égales au nombre de
particules α émises.

Figure 1 - Chaîne simplifiée de décroissance radioactive de l’uranium 238

Dans la nature, les particules α sont produites surtout par la radioactivité des produits
de filiation de l’uranium et du thorium selon le schéma suivant (figure 1) :

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La production d’hélium se fait tout au long de la durée de la filiation, en quantité à peu
près égale, avant et après la formation du radon. L’hélium étant un gaz inerte, on le
dose habituellement au spectromètre de masse. Il n’existe pas actuellement
d’équipement vraiment portatif. Les équipements portables sont généralement dérivés
des détecteurs de fuites industriels, calés sur la masse 4.

Pour résumer, si l’on est capable de faire actuellement des mesures d’hélium dans les
gaz des sols, leur interprétation demeure encore délicate. En effet, à la mobilité bien
connue de l’uranium en solution s’ajoute celle encore plus grande du gaz.

1.1.3.2 Radon

Dans la chaîne de décroissance radioactive de l’uranium et du thorium, les isotopes du


radon se situent entre un isotope du radium et un isotope du polonium.

Le radon est le seul gaz naturel émetteur de rayonnement α. On utilise


généralement cette propriété pour le déceler, au moyen de détecteurs de particules α :
chambres d’ionisation, chambres à scintillation, semi-conducteurs, films détecteurs de
traces, cristaux thermoluminescents. On peut aussi le détecter indirectement par
spectrométries β et γ, appliquées à ses descendants radioactifs solides.

On se contente souvent de mesures relatives exprimées en unités diverses (chocs/s,


nombre de traces/mm2, millirad pour une durée d’exposition donnée, etc.).

Il existe plusieurs types d’équipements de prospection par le radon, selon les types de
détecteurs mis en jeu.

Les équipements pour mesures instantanées (émanomètres ou hydroémanomètres)


à prise d’échantillons de gaz par pompage et lecture immédiate : il existe des appareils
à chambre à scintillation ou à chambre d’ionisation.

Les équipements pour mesures intégrées : ce sont des dispositifs qui permettent
d’exposer in situ des détecteurs, en leur assurant une protection efficace contre la
radioactivité α du milieu environnant. Dans la méthode par gravure de traces α, plus
connue sous le nom de méthode Track Etch (brevet Terradex), le détecteur est fixé au
fond de gobelets en plastique, lesquels sont exposés in situ en position renversée. Il
s’agit d’un film qui garde la trace des dommages provoqués par les particules α émises
par le radon qui se dégage du gaz ou de l’eau du sol. Les traces sont gravées sur le
film au laboratoire par un réactif, puis comptées. Les résultats sont exprimés en densité
de traces par unité de surface pour un temps donné.

Les procédés dits d’intégration à court terme (quelques dizaines de jours), utilisent
des détecteurs tels que le charbon activé, les alphamètres à semi-conducteurs, les
détecteurs luminescents. En outre, des mesures de concentration en ,

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descendant du radon, à période longue (22 ans), devraient rendre compte
indirectement de la radioactivité du radon intégrée sur plusieurs dizaines d’années.

La thermoluminescence des minéraux naturels du sol (quartz, calcite, feldspaths,


fluorine, etc.) peut donner une image qualitative de la radioactivité α du radon intégrée
sur des temps géologiques.

Si l’utilisation des gaz constitue une méthode efficace pour repérer la fracturation, elle a
en revanche très rarement permis de découvrir des minéralisations uranifères
économiques. Le principal problème vient de l’ambiguïté des signatures observées et
de l’impossibilité de localisation précise de la source de l’anomalie observée. Les
anomalies les plus fortes sont très souvent associées à des minéralisations de
subsurface qui n’ont pas le moindre intérêt économique.

1.1.4 Diagraphies nucléaires dans les sondages d’exploration


Diverses mesures radiométriques sont effectuées couramment dans les sondages soit
au stade de l’exploration, soit au stade de l’évaluation de gisements. On les regroupe
sous le nom de diagraphies nucléaires. Les différentes mesures sont enregistrées sous
forme numérique. Les restitutions analogiques sous forme de courbe de radiocarottage
en fonction de la profondeur constituent les diagraphies (ou logs) radiométriques.
Les mesures de radioactivité peuvent être classées selon la source de rayonnement.

← Mesure du rayonnement naturel.

Il s’agit essentiellement du rayonnement γ qui donne soit une image globale de la
teneur en élément radioactif par mesure du rayonnement total et, par déduction,
l’estimation de la passe minéralisée, soit une image sélective du spectre d’énergie
permettant de discriminer les rayonnements provenant de l’uranium, du thorium ou du
potassium.
Mesure de rayonnements provenant d’une source artificielle ou provoqués par
elle.

Ces mesures habituelles sont de quatre types :
 Mesure gamma-gamma : une source émettrice γ (généralement du cobalt 60 ou
du césium 137) placée en bout de sonde, irradie le terrain; une partie du
rayonnement, dégénérée par effet Compton, retourne vers la sonde où elle est
mesurée par un détecteur lui-même protégé du rayonnement direct de la source.
Plus la roche est dense plus le rayonnement incident est absorbé, diminuant
ainsi le rayonnement secondaire. Cette mesure fournit donc une image de la
densité de la roche.

 Mesure neutron-neutron : une source de neutrons rapides (habituellement
américium/béryllium ou californium 252) irradie le terrain; une partie du
rayonnement neutronique, amenée au niveau d’énergie thermique par chocs sur
les noyaux d’hydrogène présents, retourne vers la sonde où elle est mesurée
par le détecteur sélectif et fournit une image de la teneur en hydrogène, donc de
la teneur en eau totale de la roche. Cette mesure est à rapprocher de la mesure
classique de résistivité qui, à concentration constante de sels dissous, donne
une image de leur teneur dans l’eau contenue. La mesure neutronique présente
l’avantage de pouvoir être effectuée dans des forages tubés puisque les
neutrons traversent l’acier.

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 Mesure neutron-neutron de fission : dans ce procédé, on utilise le phénomène
où la capture neutronique est suivie de la fission de l’élément. La mesure porte
sur les neutrons émis lors de la fission, ou avec un certain retard, et on admet
que, dans les conditions in situ, la part thermique prédomine largement et que ce
phénomène n’intéresse que l’uranium. L’intérêt du procédé est qu’il permet
d’appréhender directement la teneur en uranium du minerai et des roches in situ,
et non plus seulement comme avec les procédés classiques, la teneur en
descendants émetteurs de γ. Lorsque l’uranium est en déséquilibre, cette
mesure devient capitale, car la mesure de la radioactivité gamma n’est plus le
reflet de la teneur en uranium.

 Mesure neutron-gamma de captures radiatives et neutron-gamma
d’activation : elles sont simplement citées ici pour mémoire, car elles ne
concernent pas l’uranium, mais des éléments qui peuvent être des traceurs
géochimiques de l’uranium, comme par exemple le fluor, le plomb, le titane, le
tungstène, etc.

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1.2 Méthodes indirectes

1.2.1 Méthodes géophysiques

Comme les rayonnements naturels sont pratiquement absorbés en totalité par des
morts-terrains (stériles) d’un mètre d’épaisseur, le prospecteur d’uranium, à la
recherche de concentrations profondes ou cachées, se retrouve donc souvent dans la
même situation que le prospecteur des autres substances métalliques. Toute recherche
de gisement d’uranium passe certes par l’étude des affleurements de surface, mais,
comme le manteau d’altération (ou la couverture végétale) masque la roche en place
dans de nombreux cas, on doit recourir aux méthodes géophysiques pour mieux
connaître la géologie du sous-sol. Dans la recherche de l’uranium en surface, on fait
appel, par ordre d’importance décroissante, aux méthodes électriques et
électromagnétiques, aux méthodes sismiques, magnétiques et gravimétriques. Dans les
forages, on réalise des diagraphies de résistivité quand les trous ne sont pas tubés. On
mesure couramment les déviations de sondage et le diamètre des trous. Enfin, dans
certains cas, on peut utiliser des sondes de mesure de la susceptibilité magnétique, de
la conductivité électrique des roches ou des sondes acoustiques.

1.2.1.1 Méthodes électriques et électromagnétiques

Les prospecteurs d’uranium ont adapté à leurs besoins ces méthodes qui permettent
d’obtenir une connaissance détaillée du terrain aux échelles de la prospection minière
(1/1 000 à 1/5 000). Ces techniques permettent de rechercher efficacement les
structures tectoniques, les épisyénites ou les corps graphiteux susceptibles d’être
porteurs de minéralisations uranifères.

Deux techniques sont utilisées pour mesurer la résistivité des roches en place ; elles
sont basées sur l’injection dans le sol de courant électrique. Dans la technique du
dipôle électrique (méthode électrique), le courant continu ou alternatif est injecté
directement à l’aide d’électrodes plantées dans le sol. Dans celle du dipôle magnétique
(méthode électromagnétique), le courant, obligatoirement alternatif, est injecté par
induction à partir de boucles horizontales ou verticales dans lesquelles circule un
courant primaire.

De nombreux dispositifs de mesure de la résistivité permettent d’adapter la mise en


œuvre des méthodes électriques en fonction du problème géologique (sondages
électriques, profilage électrique, cartographie de résistivité, panneau électrique, etc.).
Leur profondeur d’investigation peut varier, selon le dispositif de mesure, de la
subsurface à plusieurs centaines de mètres. Une variante de cette méthode, la
polarisation provoquée, mesure, outre la résistivité électrique des terrains, leur
chargeabilité, souvent en relation avec des sulfures disséminés ou du graphite,
caractéristiques de zones réductrices favorables au piégeage de l’uranium.

Il existe trois grandes méthodes électromagnétiques suivant l’origine du champ :

 La méthode magnéto-tellurique (MT) utilise le champ naturel.


L’audiomagnéto-tellurique (AMT) utilise des fréquences plus hautes capables
de caractériser les terrains moins profonds. Cette technique est de moins en
moins utilisée, car les signaux naturels, très souvent perturbés par l’activité
industrielle, donnent des mesures rarement répétitives ;

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 La méthode VLF (Very Low Frequency) utilise un champ artificiel créé à de
très grandes distances par des émetteurs radio puissants, à très basse
fréquence (15 à 30 kHz). Elle est très employée, au sol ou aéroportée, dans la
prospection de l’uranium, pour la cartographie de la fracturation des terrains
cristallins. La profondeur d’investigation est fonction de la résistivité des terrains
(entre 10 et 50m).

Si l’émetteur se situe dans la bande des fréquences audio, il s’agit de méthode


audiomagnéto-tellurique à source contrôlée ou CSAMT. Leur profondeur
d’investigation est de quelques centaines de mètres :

Les autres méthodes électromagnétiques (EM) utilisent un champ artificiel, créé sur
place, à proximité immédiate du point de mesure. Ces méthodes appartiennent à deux
grandes familles : les méthodes électromagnétiques fréquentielles et les méthodes
électromagnétiques transitoires.

Leur profondeur d’investigation est fonction de la géométrie du dispositif émission-
réception et du moment magnétique de la bobine émettrice. Elle varie, selon
l’équipement, de quelques mètres à plusieurs centaines de mètres.

Les matériels existants utilisent trois principes différents pour la mesure de la résistivité
(ou de la conductivité) :

 La méthode magnéto-tellurique [champs naturels (MT) ou artificiels (CSAMT et


VLF)] mesure du rapport E/H où E est le vecteur champ électrique et H le
vecteur champ magnétique ;

 La méthode électromagnétique fréquentielle mesure du rapport Hs /Hp où Hp


est le vecteur champ primaire créé par l’émetteur, et Hs le vecteur champ
secondaire fourni au récepteur par le courant induit dans le sol (méthode des
champs artificiels créés sur place) ;

 La méthode électromagnétique transitoire mesure la décroissance, en


fonction du temps, du champ secondaire Hs fourni au récepteur par le courant
induit dans le sol, pendant l’interruption du champ primaire inducteur.

Les constructeurs de matériel de prospection électromagnétique sont principalement
canadiens.

Ces trois catégories de méthodes peuvent être mises en œuvre lors de campagnes
aéroportées ou au sol. Les campagnes aéroportées permettent de réaliser rapidement
la cartographie des structures tectoniques ou des conducteurs susceptibles de porter
des minéralisations. Les campagnes de détail au sol sont indispensables pour préciser
la localisation et la géométrie de ces structures avant l’implantation des forages.

1.2.1.2 Méthodes gravimétriques et magnétiques

Elles sont fondées respectivement sur la mise en évidence et l’interprétation des


anomalies de la pesanteur et du champ magnétique terrestre, liées aux propriétés
physiques (densité et susceptibilité magnétique) des roches et, plus rarement, de
certains minerais eux-mêmes. On peut mettre en œuvre ces méthodes à petite échelle
pour des reconnaissances régionales (1/50 000 à 1/100 000). Elles permettent de

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mesurer les grandes anomalies régionales, qui traduisent des contrastes de densité ou
d’aimantation et d’obtenir ainsi une cartographie lithologique et structurale générale. On
peut par exemple repérer les irrégularités d’un socle plus dense et plus magnétique
sous une couverture sédimentaire, la présence de corps granitiques de faible densité et
de faible aimantation contrastant avec un encaissant métamorphique plus dense et plus
magnétique. Les mesures sont faites soit le long de profils aériens parallèles, soit au sol
à une maille hectométrique ou kilométrique. Elles sont restituées sous la forme de
cartes d’anomalies magnétiques ou gravimétriques. La sensibilité des appareils est de
l’ordre de 1 milligal (mGal) en prospection gravimétrique aéroportée et de 0,001
nanotesla (nT) en prospection magnétique aéroportée.

On peut aussi utiliser les méthodes magnétiques et gravimétriques pour des


reconnaissances détaillées, à grande échelle, en utilisant des appareils très sensibles
et en rapprochant les stations de mesure (maille hectométrique, décamétrique ou
même métrique).

On peut déceler par méthode microgravimétrique des anomalies associées à des


structures géologiques à l’échelle minière, voire certains gisements à teneur élevée, au
moyen de gravimètres dont la sensibilité atteint 10 −6 Gal (1 Gal = 10−2 m.s−2).

Deux types de magnétomètres sont couramment utilisés en prospection :

 les magnétomètres à précession de protons à sensibilité environ 0,01 nT le


plus souvent utilisés pour les levés au sol ;

 les magnétomètres nucléaires à pompage optique de vapeur de césium de
sensibilité 0,001 nT, utilisés pour les mesures magnétiques aéroportées.

1.2.1.3 Méthodes sismiques

Elles sont basées sur l’étude de la propagation des ondes élastiques de compression
dans le sous-sol. Selon le mode de propagation des ondes utilisées, on distingue, la
sismique réflexion et la sismique réfraction.

Ces méthodes, très efficaces dans l’étude de la morphologie des bassins sédimentaires
pour la recherche pétrolière, sont également employées pour la recherche de l’uranium.
En effet, la mobilité de l’uranium au sein des nappes aquifères est conditionnée par la
structure des bassins (flexures, failles, zones subsidentes ou de plate-forme, etc.). Or,
pour appréhender la géologie de moyenne profondeur à l’échelle des objectifs miniers,
c’est-à-dire du 1/5 000 au 1/10 000, les méthodes sismiques s’avèrent particulièrement
indiquées.

L’adaptation de cette technique à des objectifs de faible profondeur (sismique réflexion


haute résolution) permet d’obtenir des informations sur la géométrie des couches du
sous-sol dans la zone proche de la surface du sol.
Les performances des systèmes d’acquisition des données ainsi que celles des
techniques de traitement ont connu des progrès spectaculaires au cours des dernières
années.

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1.2.2 Diagraphies ne mettant pas en jeu la radioactivité

1.2.2.1 Mesure de résistivité

Dans les sondages non carottés et non tubés exécutés dans la recherche d’uranium en
terrain sédimentaire, on réalise couramment des mesures de résistivité des terrains et
de polarisation spontanée (PS).

Il existe de très nombreux dispositifs destinés à mesurer la résistivité, mais le plus


simple et le plus employé est le dispositif mono-électrode qui mesure la résistance de
prise d’une électrode dans le fluide de forage.

Les diagraphies de résistivité, de type normal ou latéral, sont également utilisées, de


même que, dans certains cas, des diagraphies de polarisation provoquée (PP).

Dans les sondages forés à l’eau claire et tubés, la mesure de résistivité est souvent
remplacée par la mesure de la teneur en eau totale des roches au moyen de la sonde
neutron-neutron. Il existe des outils capables de mesurer en forage la conductivité
électrique des roches par induction. Cette technique s’accommode des tubages pourvu
qu’ils soient non métalliques.

1.2.2.2 Mesure de la susceptibilité magnétique

L’utilisation dans les sondages des paramètres relatifs aux propriétés magnétiques
intrinsèques des roches est peu développée en prospection de l’uranium.

Il existe toutefois des outils de petit diamètre capables de mesurer la susceptibilité


magnétique des roches, ainsi que le champ magnétique total en forage. Ces
diagraphies ont un grand intérêt pour la caractérisation lithologique des formations
géologiques.

1.2.2.3 Mesure des ondes acoustiques (sonic logging)

Cette diagraphie consiste à mesurer la vitesse des ondes acoustiques dans la formation
géologique entourant le forage entre un dispositif piézo-électrique émetteur générant
des ondes acoustiques de fréquence 10 à 30 kHz et plusieurs récepteurs.

La généralisation de la technique de carottage acoustique (sonic logging full wave)


permet d’enregistrer la totalité du train d’onde comportant une onde de compression P,
une onde de cisaillement S et une onde de Stoneley (onde de surface). Cette
diagraphie renferme un nombre important d’informations permettant de caractériser la
nature, le degré d’altération, les modules mécaniques ainsi que la fracturation (ouverte
ou fermée) de la formation géologique au voisinage du forage.

1.2.3 Mesures tomographiques entre forages

Les techniques électriques, électromagnétiques et sismiques commencent à être


utilisées pour imager des volumes rocheux situés entre forages ou entre forages et
galeries de mines. Ce mode de mise en œuvre, appelé tomographie, permet de
valoriser les forages existants pour reconnaître, à proximité même d’un gisement, des
zones non recoupées par les forages, en vue de trouver de nouvelles extensions.

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Ces techniques devraient connaître un développement important dans le futur tant pour
l’acquisition des mesures que pour le traitement et l’interprétation.

1.3 Méthodologie de la prospection de l’uranium

La méthodologie de la prospection de l’uranium fait appel aux différentes méthodes


décrites précédemment. Elle est fonction de nombreux facteurs dont les plus importants
sont la nature du terrain, la profondeur des cibles recherchées, le type de région
prospectée (équatorial, désertique, tempéré, glaciaire), la législation minière en vigueur,
la pression de la concurrence, etc.

Les travaux de prospection sont souvent réalisés par phases successives, de l’échelle
régionale à l’échelle détaillée :

 une phase de reconnaissance qui a pour but de rechercher les provinces


géologiques et métallogéniques favorables à la présence de minéralisations
uranifères (échelle 1/50 000 à 1/500 000) ;

 une phase d’exploration (échelle 1/5 000 à 1/25 000) qui comprend les travaux
effectués entre le début des recherches et la mise en évidence de
minéralisations susceptibles de constituer des gisements au sens industriel du
terme ;

 une phase de développement (à l’échelle minière : 1/1 000 à 1/100) qui permet


de préciser les caractéristiques économiques (géométrie, teneur) des
minéralisations reconnues.

1.3.1 Prospection générale

On commence souvent, à ce stade, par une prospection géophysique aéroportée


(hélicoptère ou avion) associant habituellement spectrométrie gamma, magnétisme et
électromagnétisme transitoire ou fréquentiel.

Le positionnement des lignes de vol et des mesures est réalisé par satellites [GPS
(Global Positioning System) différentiel] avec une précision absolue de l’ordre de 5 m.

Ces techniques permettent de couvrir très rapidement et de façon homogène avec une
gamme de plusieurs méthodes, de vastes surfaces, parfois peu accessibles. Après
traitement, les cartes qui en résultent constituent un outil efficace pour la cartographie
géologique et la recherche de cibles.

Ces travaux sont complétés par des prospections géophysiques et géochimiques au


sol.

1.3.2 Prospection détaillée

À ce stade, on a recours largement aux méthodes magnétiques et gravimétriques, mais


surtout aux méthodes radiométriques, électriques ou électromagnétiques de détail pour
rechercher les guides de la minéralisation (filons, failles, zones altérées, contacts
lithologiques, etc.) et caractériser leur signature géophysique. Les levés de détail
permettent de caler les levés aéroportés et de préparer des cibles pour les forages.
Dans les sondages, on utilise couramment les diagraphies de radioactivité, les
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diagraphies électriques ainsi que les diagraphies densité (gamma-gamma) et porosité
(neutron-neutron).

1.3.3 Étalonnage radioactivité-teneur dans les sondages

Au stade du développement, souvent réalisé au moyen de sondages non carottés, il est


très important de bien apprécier les teneurs en uranium du minerai en place à partir des
diagraphies de radiocarottage.

En France, on utilise couramment la méthode de corrélation par droite de


correspondance dite de radioactivité-teneur. La droite est établie à partir de couples de
mesures constituées par la teneur chimique en uranium, sur la passe minéralisée du
sondage et la mesure du rayonnement émis par la paroi du trou correspondant à cette
passe et mesurée au cours du radiocarottage.

Cette manière de procéder permet de tenir compte de phénomènes non mesurables


d’une manière simple, tels que la distribution de la minéralisation dans le minerai en
place, sa nature, son état d’équilibre radioactif, ses variations de densité, etc. Elle est
d’autant plus correcte que l’échantillonnage est plus représentatif de la population
minéralisée et que l’on dispose d’un nombre suffisant de mesures pour faire un calcul
statistique.

Les géologues russes et américains préfèrent calibrer leurs sondes de radiocarottage et


leurs radiamètres à partir d’étalons, sources de radium ou blocs de béton à teneur en
uranium connue. Ces mesures peuvent être entachées d’erreurs, quelquefois
importantes, si les étalons artificiels n’ont pas les mêmes caractéristiques de matrice et
d’équilibre radioactif, par exemple, que les minerais.

17
Gisements d’uranium

18
2. Gisements d’uranium

2.1 Définition économique du gisement

2.2 Minerais d’uranium

2.2.1 Minerais d’oxydes

2.2.2 Autres minerais

2.3 Gisements

2.3.1 Gisements sédimentaires

2.3.2 Gisements hydrothermaux liés aux granites ou aux volcanites acides

2.3.3 Gisements magmatiques

2.3.4 Gisements liés spatialement aux discordances protérozoïques

19
2.1 Définition économique du gisement

La notion de gisement d’uranium est déterminée par des paramètres économiques qui
dépendent des fluctuations économiques du marché, mais aussi d’autres facteurs
inhérents au pays dans lequel est situé le gisement.

Parmi ceux qui jouent sur la faisabilité, on peut citer entre autres, la législation minière,
les règles financières d’amortissement, les impôts et taxes aux divers stades de la
production, les coûts des personnels, des matériels et des transports.

En général, les gisements à teneur élevée sont assez peu sen-sibles aux fluctuations
économiques. En revanche, l’exploitabilité d’un gros gisement à faible teneur peut être
remise en cause si l’un des paramètres a été mal évalué lors des études de faisabilité.

2.2 Minerais d’uranium

L’uranium dans la nature se présente sous deux valences : une forme réduite (4+) et
une forme oxydée (6+). Les minéraux qui entrent dans la composition du minerai
d’uranium sont extrêmement nombreux, car ils peuvent appartenir à ces deux valences,
et de plus l’uranium s’associe à de nombreux autres éléments dont les plus importants
sont les phosphates, vanadates, silicates, arséniates, molybdates, titanates,
niobotantalates, etc., souvent doubles d’uranium et d’un autre cation tel que le plomb, le
cuivre, le calcium, le baryum, le potassium, etc.

Cependant, dans les gisements, souvent l’une des formes domine largement sur les
autres et détermine la nature du minerai : oxyde d’uranium, silicate, titanate, etc. Il
existe des gisements où la majeure partie de l’uranium n’est pas exprimée
minéralogiquement. C’est le cas de certains gisements de phosphates où l’uranium est
camouflé dans le réseau d’un minéral, l’apatite. Dans d’autres cas l’uranium est très
finement dispersé dans le sédiment, associé à la matière organique, ce qui complique
son extraction.

2.2.1 Minerais d’oxydes

Les oxydes ont pour formule UO 2,x , parce que, bien qu’essentiellement formés
d’uranium réduit à la valence 4+, une partie est à la valence 6+. La valeur de x varie de
01 à 7. L’oxyde peut présenter des formes cristallines très nettes et on l’appellera
uraninite. L’uraninite se forme à température relativement élevée, 350 à 400 oC. Mais
dans la majorité des cas les oxydes se sont formés à plus basse température (180 à
200 oC) et présentent des formes rappelant un dépôt colloïdal que l’on appelle
pechblende. C’est la forme la plus courante des minerais d’uranium.

Ces minerais comme tous les autres peuvent être oxydés en surface, ou sur une
profondeur importante dépendant de la fracturation et de la pénétration des eaux
météoriques.

2.2.2 Autres minerais

La coffinite, silicate d’uranium, est un minéral fréquent d’altération de l’oxyde. Elle


représente souvent une fraction non négligeable de la production.

20
La brannérite est un titanate d’uranium très exploité autrefois au Canada (gisements
d’uranium dans les conglomérats protérozoïques (2,2 milliards d’années) d’Elliot Lake-
Blind River en Ontario) et encore actuellement en Russie dans le district uranifère de
Streltsovka (Transbaïkalie).

D’autres minerais considérés comme réfractaires, car l’uranium est coûteux à extraire,
peuvent être des minerais potentiels pour l’avenir. Il s’agit en particulier des minerais
phosphatés où l’uranium est camouflé dans le réseau du phosphate de calcium.

2.3 Gisements

Les gisements d’uranium proviennent tous de la concentration par différents


mécanismes d’un uranium contenu dans une source (souvent des roches granitiques
ou volcaniques acides). On distingue ainsi des gisements sédimentaires, des gisements
hydro-thermaux liés aux granites ou aux roches volcaniques acides et des gisements
magmatiques. Enfin des gisements, parmi les plus importants, sont associés
spatialement aux discordances protérozoïques et se sont formés à l’interface entre un
bassin durant son évolution diagénétique et un socle cristallin sous-jacent.

De 1980 à 1995, le prix de l’uranium en dollars US n’a pas cessé de baisser. Cette
baisse continue a entraîné un profond bouleversement de l’industrie minière dans le
domaine de l’uranium. Nombre de gisements à faible teneur, les gisements dans les
grès, les conglomérats à uranium détritique, certains gisements hydrothermaux ont
cessé toute production, faute de pouvoir être exploités de façon rentable.

2.3.1 Gisements sédimentaires

Les gisements sédimentaires se rencontrent dans les grands épandages détritiques


gréseux qui proviennent de la destruction par érosion des grandes zones de socle
cristallin, tels que les boucliers canadien, australien et africain.

Les plus anciens gisements formés entre 3,1 et 2,7 milliards d’années en Afrique du
Sud, ou vers 2,2 milliards d’années au Canada (Ontario) sont le résultat d’une érosion
et d’un transport mécanique, sans mise en solution de l’uranium. À cette époque
l’atmosphère ne contenait pas suffisamment d’oxygène pour que l’uranium passe en
solution.

Pour tous les gisements datant de 2,0 milliards d’années (Oklo) ou plus récents,
l’uranium a été dissous et transporté dans une solution aqueuse.

De grands gisements sédimentaires ont été exploités au Wyoming et au Nouveau-


Mexique aux États-Unis. Ceux de la région d’Agadès, au Niger, contiennent encore des
quantités significatives d’uranium économique, dans des roches d’âge paléozoïque et
mésozoïque. Enfin les gisements d’Asie centrale (Ouzbékistan et Kazakhstan) ont
produit d’importantes quantités d’uranium et contiennent encore des réserves
significatives.

2.3.2 Gisements hydrothermaux liés aux granites ou aux volcanites acides

Les gisements hydrothermaux liés aux granites ont fourni des quantités importantes
d’uranium dans un passé récent, en particulier en Europe : Saxe, Bohème, Limousin et
Vendée. La mine du Bernardan, au nord de Limoges, est encore en activité.
21
Les gisements de type filonien associés aux roches volcaniques acides de la caldeira
de Streltsovka en Russie (Transbaïkalie) forment la totalité de la production actuelle en
Russie. Enfin le gisement de cuivre-uranium de Olympic Dam en Australie, également
associé à des roches volcaniques, contient probablement la moitié des réserves
d’uranium de ce pays.

2.3.3 Gisements magmatiques

Ce sont les gisements où l’uranium s’est essentiellement concentré au moment de la


cristallisation de la roche, à partir du bain silicaté. Le seul gisement magmatique qui ait
fourni des quantités significatives d’uranium est celui de Rössing en Namibie. Il est
encore en exploitation.

2.3.4 Gisements liés spatialement aux discordances protérozoïques

Ce type de gisement découvert à la fin des années 1960, forme une part importante des
réserves mondiales actuelles. Il fait l’objet de recherches intensives. Les principaux
gisements sont localisés au Canada (Saskatchewan) et en Australie (Territoire du
Nord). Ce sont pour l’essentiel des gisements à haute teneur, en particulier au Canada,
et à gros tonnage. Ils se situent soit à la discordance, soit à son voisinage, entre un
socle cristallin protérozoïque inférieur ou archéen (1,8 milliard d’années ou plus ancien)
et un bassin sédimentaire protérozoïque moyen (1,5 milliard d’années).

22
EXPLOITATION
DES
MINERAIS D’URANIUM

23
3. EXPLOITATION DES MINERAIS D’URANIUM

3.1 Utilisation de la radioactivité

3.2 Radioprotection

3.2.1 Les types d’exposition

3.2.2 L’organisation de la radioprotection

3.3 Exhaure

24
Le lecteur pourra se reporter à l’article « Production de concentrés d’uranium naturel».
L’exploitation minière de l’uranium se présente comme celle des minerais métalliques
avec toutefois des aspects particuliers :

 une radioactivité des minerais qui joue un rôle favorable important ; en effet la
mesure des radioactivités permet d’obtenir une bonne image de la répartition
des teneurs et de guider l’exploitation à tous les stades ;

 une radioactivité du minerai et des poussières et une présence de radon,


dans l’atmosphère des travaux souterrains en particulier, qui exposent le
personnel à des irradiations internes et externes nécessitant des mesures
spéciales de détection et de protection ;

 un contrôle des teneurs en uranium et en radium des eaux d’exhaure


rejetées.

3.1 Utilisation de la radioactivité

Pour un gisement ou une partie du gisement, il est possible d’établir une corrélation
entre la radioactivité du minerai et la teneur en uranium. Des mesures de radioactivité,
donc de teneur, sont faites dans les sondages à tous les stades depuis l’exploration
jusqu’à l’abattage du minerai, sur les parements minéralisés, sur le minerai abattu en
tas, en chantier ou dans une berline, un camion, un conteneur ou sur une bande
transporteuse ou dans une tuyauterie sur de la pulpe.

3.2 Radioprotection

3.2.1 Les types d’exposition

L’exploitation des minerais d’uranium conduit à l’exposition à la radioactivité


naturelle des agents intervenant au cours de toutes les phases de l’exploitation et du
traitement.

Considérant les types de rayonnement et les éléments radioactifs de la chaîne de


l’uranium (figure 1), deux types d’exposition sont susceptibles d’être rencontrés.

Exposition externe

Le mineur est en permanence au contact avec le minerai, il est donc soumis à distance
aux rayonnements bêta et gamma provenant de la désintégration de certains éléments
issus de l’uranium 238.

Si la part de l’exposition bêta est considérée comme négligeable, car ce type de


rayonnement, peu pénétrant, est arrêté facilement par les vêtements de travail par
exemple, c’est l’exposition externe due aux rayonnements gamma qui doit être
considérée. Pratiquement l’intensité du rayonnement étant en première approximation
proportionnelle à la teneur du minerai, on considère que l’exposition aux rayonnements
gamma doit être gérée avec rigueur pour des teneurs supérieures à 0,5 %.

25
Exposition interne

Le mineur respire de l’air chargé en aérosols radioactifs et il va inhaler ces particules
qui vont se fixer et se désintégrer à l’intérieur du corps. Ce type d’exposition concerne
les émetteurs alpha faiblement pénétrants mais très énergétiques. On distingue deux
types d’exposition interne :

 l’exposition interne due aux descendants à vie courte du radon 222 : au


milieu de la chaîne de l’uranium 238 se trouve le radon 222, gaz rare
descendant du radium 226, qui peut sortir de la gangue rocheuse et migrer à
l’interface sol-atmosphère. Le radon, inerte chimiquement, n’est lui-même
pas dangereux, par contre il va se désintégrer en formant des descendants
solides à vie courte. Ceux-ci, en se fixant sur les aérosols atmosphériques,
vont pouvoir être inhalés et se déposer au niveau des poumons.

Il a été démontré par des études expérimentales et épidémiologiques que l’exposition


aux descendants à vie courte du radon augmentait le risque d’apparition du cancer du
poumon pour des concentrations relativement importantes. Ce type d’exposition est
directement lié aux conditions de ventilation de l’exploitation souterraine ;

 l’exposition interne due aux poussières en suspension dans l’air : les
opérations d’exploitation provoquent la formation de poussières de minerai,
contenant tous les éléments de la chaîne de l’uranium et, en particulier, les
radioéléments émetteurs alpha dits à vie longue comme 238U, 234U, 230 Th, 226
Ra et 210Pb.

Dans les usines de traitement, il faudra considérer les émetteurs alpha à vie longue
existant dans les poussières d’uranate présentes dans les ateliers de finition.

3.2.2 L’organisation de la radioprotection

La surveillance radiologique des mineurs est réglementée, comme dans tout le cycle du
combustible, avec une particularité liée aux expositions internes dues à la présence de
radon 222 et de ses descendants à vie courte.

Les bases de la réglementation française proviennent des recommandations établies


par la Commission internationale pour la protection radiologique (CIPR). Ces
recommandations ont été intégrées dans le droit français sous la forme :

 du décret no 66-450 du 20 juin 1966, modifié par décret no 88-521 du 18 avril


1988, relatif aux principes généraux de protection contre les rayonnements
ionisants ;

 du décret no 86-1103 du 2 octobre 1986, modifié par décret n o 88-662 du 6


mai 1988 et no 91-693 du 19 décembre 1991, relatif à la protection des
travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants ;

 du décret no 89-502 du 13 juillet 1989 complétant le Règlement général des


industries extractives (RGIE), relatif à la surveillance radiologique des
travailleurs dans les industries extractives.

26
Concernant la protection de l’environnement, le décret no 90-222 du 9 mars 1990 a
complété le RGIE avec une seconde partie au titre « rayonnements ionisants » relative
à la protection de l’environnement pour le cas des travaux et installations de surface et
dépendances légales des exploitations de substances radioactives.
D’ici l’an 2000, la directive européenne du 13 mai 1996 issue des recommandations n o
60 et suivantes de la CIPR devra être intégrée dans le droit français.

En regard de la réglementation, l’exploitant doit mettre en place la radioprotection de
l’installation avec les objectifs principaux suivants :

 Mise en œuvre d’une politique de prévention des risques radiologiques


sur les lieux de travail,

 L’organisation des postes de travail,

 la mise en place d’écrans entre les opérateurs et les sources d’exposition


(possible surtout en usine),

 la rotation du personnel constitue quelques moyens de prévention contre


l’exposition externe.

En ce qui concerne le risque d’exposition au radon et ses descendants, en dehors


de l’aérage qui reste la technique de base pour la prévention, mais qui peut trouver des
limites au niveau du coût d’exploitation, du confort et des risques bronchiques, les
principales techniques de réduction de l’exposition sont :

 l’épuration des descendants du radon pour l’aérage secondaire ;

 le contrôle du transport convectif du radon dans les roches encaissantes (mise


en pression des installations) ;

 le revêtement des parois par des produits limitant les flux d’émanation du radon.

 L’arrosage pendant les différentes phases de l’exploitation constitue la principale


technique pour diminuer l’empoussiérage.

L’efficacité des moyens de prévention mis en œuvre doit être contrôlée


quotidiennement par les agents de radioprotection qui effectuent des contrôles de
l’ambiance du travail pour tous les risques radiologiques susceptibles d’être rencontrés.

Gestion de la surveillance dosimétrique des agents.

La dosimétrie des agents effectuée à partir des contrôles d’ambiance jusqu’en 1983, a
subi une évolution majeure avec le développement et la mise en place par le CEA d’un
système intégré de dosimétrie individuelle, qui équipe depuis plus de dix ans les
mineurs d’uranium français et étrangers. Ce système permet de mesurer chaque mois
pendant le temps de travail de l’agent, les trois composantes de l’exposition du mineur
d’uranium.

Les résultats fournis mensuellement par le dosimètre sont reportés sur la fiche
dosimétrique individuelle de chaque agent, conservée dans son dossier médical.

27
Gestion de la protection et de la surveillance de l’environnement pendant et
après les phases d’exploitation :

cela demande d’assurer la gestion des produits radioactifs qu’ils soient solides, liquides
ou gazeux et de contrôler l’impact radiologique des installations sur l’environnement
pour les termes sources répertoriés (la présence d’uranium et de radium dans les rejets
liquides, les rayonnements gamma directs issus des installations et la présence dans
l’atmosphère de descendants à vie courte du radon et de poussières radioactives à vie
longue).

3.3 Exhaure

Les mines rejettent les eaux d’exhaure qui doivent, éventuellement, être clarifiées avant
rejet et subir un traitement pour répondre aux normes en vigueur. En ce qui concerne
les teneurs en éléments radioactifs, il peut être nécessaire de procéder à un traitement
pour réduire les teneurs en radium soluble et en uranium qui peuvent, dans certains
cas, être importantes. Certaines mines récupèrent l’uranium contenu dans l’eau.

28
RESSOURCES EN URANIUM
DANS LE MONDE

29
4. RESSOURCES EN URANIUM DANS LE MONDE

4.1 Définition des différentes catégories de ressources

4.2 État des ressources mondiales en uranium

30
4.1 Définition des différentes catégories de ressources

Les estimations des ressources sont divisées en catégories distinctes qui


correspondent à des degrés différents de certitude des quantités considérées.

Les Ressources raisonnablement assurées (RRA), c’est-à-dire récupérables à un


coût donné, se trouvent dans des gisements de minerais connus dont le volume, la
teneur et la configuration ont été determinées. À l’intérieur de ces RRA, on détermine
les quantités récupérables à différents coûts.

Les Ressources supplémentaires estimées (RSE) sont des estimations moins


fiables, car elles ne résultent pas de mesures mais de présomptions fondées sur des
données géologiques. On n’en tiendra pas compte ici.

4.2 État des ressources mondiales en uranium

Les besoins mondiaux en uranium à court terme sont relativement aisés à prévoir, dans
la mesure où la construction des centrales nucléaires est un processus lent. La
puissance électro-nucléaire mondiale installée est de 355 GW électriques. Elle devrait
s’élever à 475 GWe en 2010. Les besoins en combustible sont donc prévisibles.

Cependant le marché futur de l’uranium naturel sera très dépendant de la décision de


convertir une partie de l’uranium hautement enrichi des ogives nucléaires en
combustible pour centrales et par les ventes d’uranium de la Communauté des États
Indépendants (ex-URSS). En l’an 2010, on estime que les besoins seront voisins de 72
kt et que ces besoins seront satisfaits à 50 % par les centres de production existants,
commandés, prévus ou envisagés. Et dans la période allant de 1995 à 2010, les
besoins cumulés seront proches de 1 million de tonnes.

Le ralentissement des programmes électronucléaires et la conviction qu’il n’y aurait pas,


à court terme, de pénurie d’uranium sur le marché a entraîné une baisse continue du
prix de l’uranium de 1979 à 1994. Cette baisse des prix a nécessité une réduction des
coûts de production (exploitations à ciel ouvert), la mise au point de méthodes moins
coûteuses comme la Lixiviation in situ (LIS) très développée en particulier dans la
Communauté des États indépendants et, bien sûr, la fermeture de nombreuses mines.

31
Annexe

1 Données économiques

2 Bibliographie

32
1. Données économiques

À l’intérieur des ressources raisonnablement assurées, on détermine les quantités


récupérables à différents coûts. Ici on retiendra la tranche des coûts inférieurs à 40 $/
kg d’U, qui correspond approximativement au prix de l’uranium en 1997, et la tranche
des coûts compris entre 40 et 80 $/ kg d’U qui pourra devenir intéressante dans le futur.

De 1979 à 1994, le prix de l’uranium est passé de 43 à 6 $ US la livre d’oxyde (soit de


112 $/ kg d’U à 16 $/ kg d’U) sur le marché à court terme (Spot Market). Début 1997, le
prix est remonté à 16 $ US la livre soit 42 $/ kg d’U (230 F/kg au cours de 5,5 FF/ $).

Durant la première moitié des années 1990, le marché a donc été dominé par une
consommation mondiale d’uranium supérieure à la production. Ainsi en 1994, la
consommation a été voisine de 57 kt et la production de 31 kt. La différence a été
comblée par prélèvement sur les stocks.

La répartion par pays des ressources raisonnablement assurées au prix actuel (


$/ kg d’U) ou à moins de 80 $/ kg d’U est donnée tableau .

Ces chiffres publiés par les différents pays producteurs doivent être considérés avec
une certaine prudence, car ils ne tiennent pas compte des pertes de récupération lors
de l’exploitation. Par ailleurs, la précision des estimations peut varier considérablement
d’un pays à l’autre.

Les principaux pays producteurs, ainsi que les zones de production, sont indiqués sur la
figure.

Figure 1 - Principaux pays producteurs d’uranium

33
Tonnage (en 103 t d’U)
Pays
$/kg d’U 40 à 80 $/kg d’U $/kg d’U

34
Afrique du Sud 108 97 205

Australie .......................................... .......................................... 633

Brésil 56 106 162

Canada .......................................... .......................................... 260

Espagne .......................................... .......................................... 9

États-Unis .......................................... .......................................... 113

France .......................................... .......................................... 16

Gabon 7 3 10

Kazakhstan 321 119 440

Mongolie 11 51 62

Namibie 79 82 161

Niger 39 19 58

Ouzbékistan .......................................... .......................................... ?

République Tchèque .......................................... .......................................... 12

Russie .......................................... .......................................... ?

Ukraine .......................................... .......................................... 43

autres 2 6 31

Total > 623 > 483 > 2 215

35
2. Bibliographie

CUNEY (M.) - LEROY (J.) - PAGEL (M.) - L’uranium. - 123 p. 1992 Que Sais-je ?
Presses Universitaires de France. Paris.

DAHLKAMP (F. J.) - Uranium ore deposits (les gisements d’uranium). - 460 p. 1993
Springer-Verlag Berlin.

CHAPOT (G.) - COUPRIE (R.) - DUMAS (J.) - LEBLANC (P.) - KEROUANTON (J. L.)
- L’uranium vendéen. - 221 p. 1996 Cahiers du Patrimoine. Nantes.

VALSARDIEU (C.) - Regards sur l’uranium. - Tome 1, De l’uranium en terre à


l’électricité. 280 p. 1995, Tome 2, Exploration-Production. 304 p. 1997 Éditions ESKA
Paris.

PAUCARD (A.) - La mine et les mineurs de l’uranium français. - Tome 1, Les temps
légendaires (1946-1950) 102 p. 1992. Tome II, Le temps des conquêtes (1951-1958)
351 p. 1994. Tome III, Le temps des grandes aventures (1959-1973) 431 p. 1996.
Éditions Thierry Paquet, 19100 Brive.

Uranium 1995, Ressources, production et demande. - 392 p. 1996 OCDE Paris.


La radioprotection. - 84 p. 1996. Revue Générale Nucléaire. Paris. Informations utiles. -
70 p. 1995 Direction de la Communication, CEA Paris.

MICHEL (P.) - Production de concentrés d’uranium naturel. - Techniques de l’ingénieur,


traité Génie nucléaire BE 3580, 1997.

36
Traitement des minerais

37
SOMMAIRE

← Introduction

← 1 - Sources d’uranium et extraction des minerais

← 1.1 - Minerais de teneurs classiques
← 1.2 - Minerais de teneur faible ou très faible
← 1.3 - Minerais à haute teneur en uranium
← 1.4 - Minerais mixtes
← 1.5 - Sous-produit d’une autre industrie

← 2 - Considérations sur la production d’uranium et son économie

← 2.1 - Prospection et évaluation de gisement
← 2.2 - Extraction minière
← 2.3 - Traitement des minerais
← 2.4 - Charges diverses
← 2.5 - Charges exceptionnelles
← 2.6 - Observation sur les coûts

← 3 - Traitement des minerais

← 3.1 - Minerais de teneurs classiques
← 3.2 - Minerais à haute teneur
← 3.3 - Sources annexes

← 4 - Conclusion

← Annexe

38
INTRODUCTION

L’uranium naturel, c’est‐à‐dire, isotopiquement parlant, tel qu’on le trouve à l’état


naturel, est la matière première indispensable à la fabrication des combustibles
nucléaires.

L’uranium naturel est une matière première très particulière :

 elle est dispersée dans des minerais à faible teneur, ce qui conduit à traiter le
minerai à proximité de la mine ;
 les minerais qui la contiennent présentent des nuisances devant faire l’objet de
soins particuliers.

Bien qu’aujourd’hui on ne compte presque plus de réacteurs électrogènes fonctionnant


à l’uranium naturel (modérateur graphite ou eau lourde), ce dernier constitue la matière
de base pour produire l’uranium enrichi qui, lui, sera utilisé pour la fabrication des
combustibles nucléaires modernes.

Le cycle du combustible offre la possibilité d’un recyclage des matières fissiles


résiduelles (uranium enrichi) et générées (plutonium), après passage dans le réacteur.
Cette possibilité est encore peu utilisée aujourd’hui pour diverses raisons de caractère
technique sauf en France ou un programme de recyclage de plutonium dans des
combustibles d’oxydes mixtes (MOX) est lancé. Même si elle l’était pleinement, comme
la plupart des réacteurs nucléaires, à part les réacteurs à neutrons rapides, qui sont
aujourd’hui au stade de prototypes industriels, consomment plus d’éléments fissiles
qu’ils n’en produisent, la compensation du déficit doit être assurée par la production de
matière première neuve. On a donc besoin d’uranium pour :

 fournir la première charge des nouveaux réacteurs ;


 assurer le renouvellement du combustible des réacteurs en service.

39
1. SOURCES D’URANIUM ET EXTRACTION DES MINERAIS

Minerais de teneurs classiques

1.1.1 Mines à ciel ouvert (ou en carrière)

1.1.2 Mines souterraines

1.1.2.1 Puits et galeries
1.1.2.2 Exploitation en descenderie

1.1.3 Problèmes de sécurité du travail en mine

1.1.3.1 Mines à ciel ouvert


1.1.3.2 Mines souterraines

1.2 Minerais de teneur faible ou très faible

1.3 Minerais à haute teneur en uranium

1.4 Minerais mixtes

1.4.1 Association cuivre-uranium
1.4.2 Association uranium-or

1.5 Sous-produit d’une autre industrie

40
La production d’uranium s’appuie sur des sources classiques qui sont les gisements de
teneur économique et des sources annexes qui sont de plusieurs types.
L’extraction des minerais d’uranium utilise des techniques minières, habituelles pour
d’autres minerais métallifères, au moins pour les minerais d’uranium de teneurs
classiques.

1.1 Minerais de teneurs classiques

La phase de prospection s’achève par une évaluation géostatistique des réserves


d’uranium, qui entraîne ensuite une étude de faisabilité de l’exploitation, tant minière
que du traitement puisque le traitement est toujours effectué au voisinage des
sites d’extraction.

Dans cette étude, on va notamment choisir la méthode d’extraction sur la base de


critères économiques et techniques. Deux grands types de méthodes d’exploitation sont
appliqués.

1.1.1 Mines à ciel ouvert (ou en carrière)

La zone minéralisée n’étant pas trop profonde (généralement à moins de 100 m de la


surface) on va découvrir cette zone en enlevant une grande quantité de roches stériles,
puis très peu minéralisées, créant ainsi une très vaste cavité stable permettant l’accès
des équipements d’exploitation : pelleteuses, camions-bennes, bouteurs, etc.

Les couches de minerais reconnues par les géologues d’exploitation sont forées et
abattues à l’explosif.

Cette méthode, lourde à cause de la découverture, mais facile à mettre en œuvre avec
du matériel standard, est préférée chaque fois qu’elle est possible techniquement et
économiquement.

1.1.2 Mines souterraines

Quand la méthode précédente n’est pas applicable, on exploite en mine souterraine.


Avec de multiples variantes, il existe en fait deux grandes catégories de mines
souterraines.

1.1.2.1 Puits et galeries

C’est la grande méthode traditionnelle. Des puits verticaux sont forés jusqu’aux niveaux
des couches à exploiter. À partir de là, des galeries horizontales vont permettre
d’accéder aux couches minéralisées. L’abattage du minerai se fait aussi par explosif et
son transport jusqu’aux puits n’utilise plus aujourd’hui les traditionnels wagonnets sur
rails. Il est réalisé au moyen d’engins motorisés de dimensions adaptées à celles des

41
galeries, avec, en fait, une tendance à adapter les dimensions des galeries à celles des
engins. Les puits sont munis d’appareils élévateurs qui transportent le personnel dans
des cabines tandis que le minerai est dans un skip placé au ‐dessus de la cabine.

On ne s’étendra pas ici sur les variantes d’exploitation qui, compte tenu de la qualité
des terrains, commencent par le bas (tranche montante) ou le haut (tranche
descendante) des zones minéralisées. Bien d’autres techniques encore sont utilisées.
L’extraction souterraine est très sélective, compte tenu des coûts beaucoup plus élevés
par tonne déplacée qu’en mine à ciel ouvert.

1.1.2.2 Exploitation en descenderie

Dans cette variante, on atteint les zones à exploiter par des galeries inclinées partant
de la surface qui permettent les transferts vers le fond ou en provenance du fond au
moyen d’engins et de véhicules motorisés standards. Pour le reste, les techniques
d’extraction elles‐mêmes sont très semblables à celles qui sont évoquées au
paragraphe précédent 1.1.2.1. Dans certaines exploitations, le minerai est remonté à la
surface (au jour) au moyen de bandes transporteuses, parfois assez longues.

1.1.3 Problèmes de sécurité du travail en mine

1.1.3.1 Mines à ciel ouvert

Il n’y a pas de problèmes différents de ceux que l’on rencontre dans la plupart des
carrières. L’aérage naturel élimine la plupart des risques radiologiques que l’on va
voir 1.1.3.2.

1.1.3.2 Mines souterraines

Outre les risques habituels, liés à la tenue des terrains dans lesquels on creuse, les
mines d’uranium présentent, pour les exploitants, des risques particuliers,
essentiellement de nature radiologique.

Irradiation directe

Les minerais d’uranium sont radioactifs et donc susceptibles de causer des dommages
physiologiques aux travailleurs par irradiation.

En fait, pour les minerais classiques dont la teneur en uranium (et donc de ses
descendants) est inférieure à 1 % en masse, le risque d’irradiation par les rayons γ,
seuls vraiment dangereux, est très faible et à peu près négligeable par rapport aux
autres risques. Il est néanmoins mesuré en continu (voir ci ‐après «  contrôle
radiologique »).

42
Contamination par les poussières radioactives

Ce risque, également mesuré en continu, est plus important. Pour le réduire, on


procède à l’humidification du minerai abattu, par pulvérisation d’eau. Ainsi l’envolement
des poussières est-il réduit, et on constate que ce risque, ainsi pris en compte,
n’intervient que pour une faible part dans le bilan radiologique. L’emploi de masques
antipoussières est parfois prescrit pour certaines opérations.

Contamination par inhalation de radon

Le radon, descendant gazeux radioactif du radium, représente pour l’organisme le


risque le plus difficile à combattre. Son inhalation prolongée et répétée accroît
sensiblement la probabilité de cancer du poumon, car le radon produit, par
décroissance radioactive, des descendants radioactifs solides, eux-mêmes émetteurs
alpha.

Pour réduire ce risque au minimum, les mines souterraines sont fortement ventilées, ce
qui dilue le radon et l’amène à un taux extrêmement bas.

Le contrôle radiologique des mineurs est effectué en continu, dans leur poste de
travail, au moyen d’un appareil individuel qui mesure chaque type d’exposition. Les
relevés de ces mesures contribuent au contrôle de santé de ces travailleurs, contrôle
plus suivi que celui des employés des industries traditionnelles.

1.2 Minerais de teneur faible ou très faible

Ces minerais, d’une teneur de moins de 0,1 % en masse, peuvent être économiques
soit momentanément soit en raison de leur mode d’exploitation et de traitement plus
rustiques. Dans cette catégorie, on peut considérer plusieurs cas :

 Minerais à faible teneur : ils sont situés à faible profondeur, exploités
exclusivement en mine en ciel ouvert 1.1.1 et traités le plus souvent par
lixiviation statique 3.3.1.

 Minerais marginaux d’une exploitation de minerais économiques auxquels


on n’impute aucun frais d’extraction minière : ils sont toujours traités par
lixiviation statique à proximité de l’usine de traitement, qui reçoit et traite les
liqueurs produites.

 Minerais traités en place : ce sont des minerais dans un contexte géologique


particulier, dont l’extraction minière classique serait onéreuse ; on les traite, sans
les extraire, par lixiviation in situ 3.3.2.

43
1.3 Minerais à haute teneur en uranium

Des gisements récemment découverts au Canada (Province du Saskatchewan),


notamment le gisement de Cigar Lake, sont à des teneurs en uranium très élevées,
allant de plusieurs pour-cent à quelques dizaines de pour-cent. Les risques
radiologiques deviennent, en mine souterraine, insurmontables et, notamment, le risque
d’irradiation directe devient important. Par suite, les méthodes classiques d’exploitation,
exposées dans les paragraphes 1.1.2.1 et 1.1.2.2, ne sont plus applicables. C’est
pourquoi des méthodes d’extraction à distance, complètement nouvelles, sont en cours
de mise au point ; elles éviteront toute présence humaine à proximité des minerais.

1.4 Minerais mixtes

Il s’agit de minerais dans lesquels l’uranium, à une teneur faible ou très faible, est
associé à un autre métal exploitable. L’uranium ne supporte alors pas (ou très peu) les
dépenses d’extraction minière. Ce cas n’est pas très fréquent, mais on en connaît deux
exemples typiques.

1.4.1 Association cuivre-uranium

Un seul exemple de ce type est connu, il s’agit du gisement d’Olympic Dam en Australie
du Sud, dans lequel l’or est également présent. La capacité nominale actuelle, à partir
de minerais contenant environ 3 % en masse de cuivre ; 0,12 % en masse d’uranium et
0,5 g/t d’or, est, par an, de 6 500 t de cuivre, 1 600 t d’uranium et 800 kg d’or. Le
procédé appliqué permet de récupérer en parallèle le cuivre et l’uranium 3.1.5.3.

1.4.2 Association uranium-or

Ce cas est rencontré en Afrique du Sud, où l’uranium est presque systématiquement


présent dans les minerais d’or, à une teneur n’excédant pas 200 ppm (0,02 % en
masse). Selon les époques et les conditions du marché de l’uranium, celui ‐ci a été
récupéré ou non. Dans les années 80, la production d’uranium était si rentable que de
nombreuses unités ont été mises en place à cette fin ; certaines même l’ont été pour
retraiter les résidus de production d’or et en extraire l’uranium. L’économie de la
récupération de l’uranium est possible dans la mesure où l’or supporte toutes les
dépenses d’extraction minière et de broyage 3.1.5.3. L’uranium n’est alors qu’un sous-
produit.

1.5 Sous-produit d’une autre industrie

Le cas typique est celui des phosphates naturels utilisés comme matière première des
engrais phosphatés. Très souvent, les apatites (phosphates naturels de calcium)
contiennent de l’uranium, à des teneurs variant de 50 à 300 ppm, la moyenne la plus
fréquente (cas des phosphates du Maroc) étant de 130 à 150 ppm.

44
Au cours de la préparation de l’acide phosphorique par attaque sulfurique, l’uranium est
en grande partie dissous. Il peut alors, par un procédé approprié, être récupéré à partir
de cet acide phosphorique 3.3.3. À deux époques, et en particulier dans les années 80,
de l’uranium a été produit en quantités significatives à partir d’acide phosphorique,
particulièrement aux États-Unis, où plus de 1 000 t/an d’uranium ont été ainsi extraites.

2. CONSIDÉRATIONS SUR LA PRODUCTION D’URANIUM ET SON ÉCONOMIE

Prospection et évaluation de gisement


2.2 Extraction minière
2.3 Traitement des minerais
2.4 Charges diverses
2.5 Charges exceptionnelles
2.6 Observation sur les coûts

La production d’un concentré d’uranium comprend, comme on l’a vu, une suite
d’opérations dont les coûts cumulés vont contribuer à constituer le coût total de
production. On peut ranger ces opérations en cinq catégories principales, auxquelles il
conviendra d’ajouter les phases de post-exploitation qui seront abordées au
paragraphe 3.1.4.

2.1 Prospection et évaluation de gisement

La prospection, au sens large, peut s’étendre sur des années avant toute découverte
exploitable, selon la connaissance géologique générale de la région à prospecter dont
on dispose initialement. Ces dépenses seront effectuées avant toute possibilité de faire
des profits. Elles sont comptablement cumulées et amorties ensuite sur les productions
ultérieures. Dans ces dépenses sont inclus, non seulement les coûts de prospection
proprement dits (et notamment les sondages et carottages), mais aussi l’évaluation du
gisement (position dans le sol, étendue et estimation des réserves exploitables).

2.2 Extraction minière

La première étape 2.1 ayant abouti à un gisement dont les réserves et les teneurs
semblent satisfaisantes, on procède à une étude de faisabilité dans laquelle sont
notamment sélectionnées les méthodes d’exploitation. Si les conclusions de l’étude
sont positives, on engage des travaux préliminaires qui ne sont accompagnés d’aucune
production :

 découverte d’une mine à ciel ouvert ;


 creusement des galeries des mines souterraines ;
 mise en place des installations de surface (ateliers d’entretien, magasins,
vestiaires, bureaux, etc.).

Ces dépenses sont considérées comme des investissements qui seront amortis sur
l’ensemble des productions (ou sur les cinq ou dix premières années de production).

45
L’exploitation proprement dite peut alors commencer. Les dépenses qu’elle entraîne
sont classiques et comprennent surtout des charges de structure :

 main-d’œuvre ;
 entretien du matériel.

Les charges opérationnelles sont principalement constituées de dépenses d’énergie


(électricité, carburants), d’explosifs et de pièces d’usure des appareils et engins.

Il s’y ajoute des dépenses spécifiques : extension des galeries, remblaiement après
exploitation, soutènement, protection des travailleurs (radon), etc.

2.3 Traitement des minerais

Il s’agit d’une opération industrielle classique, comparable à ce que l’on peut voir dans
la production de métaux comme le cuivre, le zinc, le nickel ou l’or.

La structure des coûts est classique :

 investissements ;
 charges de structure ;
 charges opérationnelles, comprenant principalement des dépenses de
réactifs et d’énergie, qui constituent une part plus importante des charges
totales que pour l’exploitation minière.

Là aussi une étude de faisabilité, s’appuyant sur des essais effectués avec des
échantillons aussi représentatifs que possible, obtenus au cours des carottages de la
phase de prospection, est réalisée au préalable. On y propose la meilleure adaptation
du procédé général de traitement 3.1.

Le point fondamental qu’il faut retenir est que les charges opérationnelles sont
essentiellement proportionnelles aux quantités de minerais traitées et non à la quantité
d’uranium produite. Cela montre à quel point la teneur en uranium du minerai va être
déterminante pour le prix de revient de production de l’uranium.

2.4 Charges diverses

On inclut dans cette rubrique toutes les charges de gestion :

 gestion dans chaque maillon de la production ;


 gestion centrale ;
 frais financiers, si l’on a dû emprunter pour financer le projet ;
 frais de commercialisation des concentrés, incluant les opérations de contrôle de
teneur et de qualité de ces concentrés, qui sont souvent réalisées

46
contradictoirement avec le client ou un organisme désigné par celui ‐ci, et/ou
avec le raffineur ;
 frais de reconstitution de site, incluant les frais de fermeture et de
démantèlement, qu’il faut provisionner.

2.5 Charges exceptionnelles

Quand l’exploitation doit avoir lieu dans une zone peu ou pas habitée (désert africain ou
australien, grand nord canadien), il faut aussi prévoir et investir dans une base de vie,
qui peut ne concerner que les travailleurs (cas du Canada) ou, au contraire, qui doit
inclure la vie des familles de ces travailleurs (Afrique, Australie). Il faut alors créer une
ville avec toutes ses infrastructures : santé, éducation, approvisionnement en produits
alimentaires, etc.

Tous ces investissements sont naturellement à amortir sur la production d’uranium.


Dans tous ces cas, l’éloignement des zones industrialisées conduit à des transports
coûteux pour tous les produits et les équipements nécessaires à la production et à la
vie des humains.

Certains réactifs peuvent être alors fabriqués sur place pour réduire le poids de ces
coûts. Par exemple, en France, on peut transporter l’acide sulfurique de son lieu de
production à celui de son utilisation ; au Niger, on transporte le soufre (trois fois moins
de poids transporté) et on produit l’acide sur le site d’utilisation.

2.6 Observation sur les coûts

Toutes ces considérations montrent que les structures de coût et les prix de revient
peuvent varier sensiblement en fonction de nombreux paramètres et il n’y a donc pas
de structure standard de référence.

Si l’on prend comme référence un gisement donnant des minerais de teneur moyenne
0,18 %, une usine traitant 800 000 t/an et produisant 1 360 t/an d’uranium, le prix de
revient de l’uranium dans de telles conditions sera pris comme base 100.

Si nous considérons les cas du tableau 1, il est clair que l’influence de la teneur est
sensible, sans qu’il y ait pour autant proportionnalité.

On voit que, à capacité similaire de production d’uranium, les coûts diminuent quand la
teneur augmente, passant de 100 pour le cas de référence (0,18 % en masse) à 42
pour les minerais à 3 % en masse (cas 1,2 et 3). La comparaison des cas 2 et 4, et 3 et
5 montre l’effet d’échelle. Pour une production environ 2,4 fois plus grande, les coûts
sont environ 40 % plus faibles. En revanche, les très hautes teneurs (7 %) n’apportent
plus de gros avantages, toutes choses égales par ailleurs (cas 5 et 6), pour les raisons
exposées au paragraphe 3.2.

47
Relation entre coûts de production et teneurs
en uranium du minerai

Cas 1 2 3 4 5 6

Minerais

Teneur (% en masse) — 0,3 1 3 1 3 7

500 00 150 00 350 00 120 00


quantités annuelles(t) — 50 000 50 000
0 0 0 0

Usine

U produit (t/an) 1 435 1 465 1 470 3 420 3 530 3 440

Coût relatif [1] 75 50 42 31 24 22
 [1] -La base 100 a pour référence un minerai contenant 0,18 %, en masse,
d’uranium.

Relation entre coûts de production et teneurs en uranium du minerai

Selon la situation géographique et si l’on considère la séquence de prospection


détaillée, d’études minières et de procédé de traitement, d’ouverture des travaux
miniers et de construction de l’usine de traitement, le délai entre le début de ces
opérations et la production d’uranium varie de 7 ans (meilleur des cas) à 10 ans. On
voit donc qu’il s’agit d’opérations à grande inertie. La fermeture d’exploitations, dans les
conditions réglementaires des pays occidentaux, peut prendre également 3 ans, voire
plus, en y intégrant le démantèlement des installations, la remise en état des terrains et
le conditionnement des résidus solides, le cas échéant.

48
3. Traitement des minerais

3.1 Minerais de teneurs classiques

3.1.1 Généralités

3.1.2 Bases chimiques du traitement des minerais

3.1.2.1 Propriétés chimiques de l’uranium


3.1.2.2 Propriétés chimiques des éléments accompagnateurs

3.1.3 Étapes du traitement

3.1.3.1 Stockage
3.1.3.2 Préparation mécanique
3.1.3.3 Mise en solution de l’uranium

3.1.3.3.1 Choix du réactif
3.1.3.3.2 Conditions opératoires et rendement
3.1.3.3.3 Technologie

3.1.3.4 Séparation solide-liquide
3.1.3.5 Purification et concentration de l’uranium

3.1.3.5.1 Conditions opératoires
3.1.3.5.2 Mise en œuvre

3.1.3.6 Préparation des concentrés

3.1.4 Gestion des résidus et des effluents liquides

3.1.4.1 Période d’exploitation

3.1.4.1.1 Résidus solides
3.1.4.1.2 Effluents liquides

3.1.4.2 Période post-exploitation
3.1.4.3 Cas particuliers
3.1.4.4 Résidus et effluents miniers

3.1.5 Traitements particuliers

3.1.5.1 Triage radiométrique
3.1.5.2 Attaque des minerais réfractaires
3.1.5.3 Minerais mixtes

3.2 Minerais à haute teneur

3.3 Sources annexes

49
3.3.1 Lixiviation statique
3.3.2 Lixiviation in situ
3.3.3 Récupération d’uranium à partir de phosphates

50
3.1 Minerais de teneurs classiques

3.1.1 Généralités

L’objectif du traitement est d’extraire du minerai le maximum économique d’uranium, de


le purifier et de le concentrer de façon à obtenir un produit, appelé concentré ou yellow-
cake riche en uranium (plus de 70 %) et répondant aux critères de pureté imposés par
les raffineurs.

Le prix auquel l’uranium peut être vendu dans un concentré conduit à définir et à
modifier une teneur de coupure après extraction : toutes les roches extraites dont la
teneur est inférieure à une valeur définie économiquement ne seront pas traitées en
usine. On peut par ailleurs définir plusieurs coupures :

 la teneur de coupure économique, au‐dessus de laquelle les minerais sont traités


en usine ;

 la teneur de coupure marginale ; au‐dessous de cette teneur, les roches extraites


ne sont plus considérées comme des minerais, mais comme des stériles ; les
minerais dont la teneur est intermédiaire entre ces deux teneurs, peuvent être
valorisés par un traitement plus rustique, mais d’un moindre rendement.

Pour des commodités d’exploitation, on peut réaliser aussi une coupure haute, de façon
à disposer d’un stock de minerais plus riches permettant de régulariser la teneur de
l’alimentation de l’usine.

À titre d’exemple, pour des conditions économiques moyennes en France, au début des
années 90, les coupures suivantes étaient pratiquées :

Coupure haute t > 0,5 %


Coupure économique t > 0,08 %
Coupure marginale t > 0,025 % (traitement par lixiviation statique) ;
t < 0,025 % (stérile).

Ces coupures sont faites sur la base d’une mesure globale, donc approximative, de la
radioactivité sur un élément de transport du minerai : skip à la mine, camion à l’usine.

La radioactivité mesurée est l’émission γ du radium 226, descendant de l’uranium, dont


on a vérifié au préalable l’équilibre, dans un rapport constant, avec l’uranium. Ainsi la
mesure de la radioactivité du radium est une mesure indirecte de la teneur en uranium.

La coupure à la teneur marginale est faite au stade de l’extraction du minerai  ; les


autres sont effectuées à l’arrivée sur le carreau de l’usine. Dans quelques exploitations,
on a utilisé la radioactivité pour réaliser un tri précis dit radiométrique avec des moyens
plus perfectionnés. Ce tri est effectué, après concassage, sur une tranche
granulométrique de 30 à 90 mm. Ainsi dans l’usine de la SIMO à Lodève (Hérault),
environ 15 % des minerais entrants (40 % de la tranche 30 à 90 mm) est éliminé avec
une coupure entre 0,03 et 0,04 %.

51
Le deuxième problème général est le choix du procédé de traitement. La plupart des
minerais de métaux non ferreux, de teneur relativement faible (< 2 % par exemple),
sont enrichis par des procédés physiques utilisant :

 soit la différence de masse volumique entre le minéral métallifère et la gangue


(méthodes gravimétriques diverses [2]) ;
 soit les propriétés de surface du minerai intéressant, souvent un sulfure
(flottation [3]).

Ces méthodes n’ont pu être appliquées aux minerais d’uranium, en particulier la


flottation, les minéraux uranifères étant le plus souvent, sous la forme d’un oxyde.

C’est donc un procédé hydro-minéralurgique qui a été retenu. Le principe général est
de mettre en solution, aussi sélectivement que possible, l’uranium. Une fois en solution,
on pourra séparer l’uranium de la plupart des impuretés, le concentrer et le mettre sous
une forme solide, conforme aux spécifications et transportable.

Selon la nature de la roche encaissante, l’uranium se trouve dans des microfissures ou


dans le liant des grains des minerais sédimentaires. Pour être accessible aux réactifs,
l’uranium doit être libéré, ce qui est obtenu par une réduction dimensionnelle du
minerai. La dimension maximale admissible pour permettre une bonne récupération est
appelée maille de libération. Elle varie beaucoup avec la nature du minerai, de 0,15 à
2 mm. Pour les minerais granitiques, elle est de l’ordre de 0,5 mm et pour les minerais
gréseux de 0,6 à 1,2 mm. Enfin, certains minerais complexes, dans lesquels une partie
de l’uranium est enfermée dans des espèces particulières (bitumes par exemple),
doivent être réduits encore plus finement, jusqu’à 0,15 mm.

3.1.2 Bases chimiques du traitement des minerais

Le traitement des minerais s’appuie sur un petit nombre de propriétés chimiques, de


l’uranium d’abord, et de certains éléments ensuite qui l’accompagnent, dans la gangue
et dans les solutions.

3.1.2.1 Propriétés chimiques de l’uranium

On considérera principalement les propriétés permettant la mise en solution de


l’uranium.

Valence 6

La mise en solution de l’uranium n’a lieu facilement que s’il est à la valence 6 ; cela
correspond à l’oxyde UO3, à l’état solide, et au cation oxygéné , en solution. Les
précipités que l’on produit en fin de procédé contiennent aussi l’uranium à la valence 6.
Le plus souvent, dans les minerais, une partie au moins de l’uranium est à la valence 4
(oxyde UO2). Pour la mise en solution, on a donc toujours un problème d’oxydation de
l’uranium. En milieu acide, cette oxydation est facilitée par la présence de fer, selon un
mécanisme qui n’est pas parfaitement connu. Le plus probable est le suivant :

52
Le fer doit alors être réoxydé au moyen d’un oxydant ajouté, tel que le dioxyde de
manganèse ou le chlorate de sodium

Avec le chlorate de sodium, l’ensemble des réactions est le suivant :

3UO2 + 3Fe2(SO4)3 ® 3UO2SO4 + 6FeSO4

6FeSO4 + NaClO3 + 3H2SO4 ® 3Fe2(SO4)3 + NaCl + 3H2O

Le fer est naturellement présent dans le milieu de solubilisation, provenant soit de la


gangue du minerai, soit du broyage (usure des corps broyants).

L’acide universellement utilisé, pour diverses raisons qui sont exposées 3.1.3 est l’acide
sulfurique.

Formation de complexes

La seconde propriété de l’uranium utilisée dans le traitement est son aptitude à former
des complexes sulfatés :

UO2SO4 ;

 ;

Cette propriété est utilisée pour séparer l’uranium de la plupart des impuretés solubles
au moyen d’échangeurs d’ions solides (résines) ou liquides (solvants). Les résines sont
des composés d’ammonium quaternaire, du type R 4N+, qui fixent préférentiellement
dans un milieu peu acide (pH = 1,8) pour éviter la compétition défavorable
avec les ions ou libres.

Les échangeurs d’ions liquides, appelés extractants, sont aujourd’hui toujours des
amines tertiaires R 3N, dont les radicaux R comprennent 9 à 12 atomes de carbone

Là, le milieu peut être fortement acide, les amines ayant une très forte affinité vis‐à‐vis
des ions et faible vis‐à‐vis de et .

La récupération de l’uranium à partir d’une résine (élution) ou d’un extractant


(désextraction) est réalisée par substitution d’anion ou changement de milieu.

Pour l’élution, deux milieux différents sont couramment utilisés : la solution de chlorure
de sodium et la solution d’acide sulfurique concentré (3N) :
53
(1)

La réaction [1] est utilisée quand la solution résultante est soumise à une extraction
pour une purification complémentaire.

Pour la désextraction, le milieu est choisi en fonction du concentré que l’on veut
produire ensuite. Trois solutions ont été et sont encore couramment utilisées : chlorure
de sodium, sulfate d’ammonium + ammoniaque, carbonate alcalin.

(2)

(3)

La tendance actuelle est à la généralisation de la réaction [2] , effectuée à pH contrôlé,


entre 4 et 4,5.

La réaction [3] montre la formation d’un complexe soluble uranyle tricarbonate. Cette


propriété est également utilisée pour la mise en solution alcaline de l’uranium à partir
d’un minerai quand un acide ne peut pas être utilisé (consommation excessive). Dans
ce cas, l’oxydation est obtenue par l’oxygène dissous sous pression dans la liqueur de
lixiviation :

Pour éviter l’élévation de pH due à la production de soude qui pourrait reprécipiter


l’uranium, on utilise un mélange de carbonate et de bicarbonate de sodium. Ce dernier
neutralise la soude :

Caractère amphotère

Cette propriété de l’uranium est utilisée pour préparer des concentrés par précipitation.
En présence de bases, il donne soit un hydroxyde, soit un sel insoluble (uranate). En
fait, on obtient un mélange des deux espèces :

54
Pratiquement, trois bases sont utilisées : la magnésie, l’ammoniaque et la soude :

Un autre précipité peut être obtenu, dans une réaction plus sélective avec le peroxyde
d’hydrogène, à pH contrôlé entre 3 et 4.

Le composé UO4, 2H2O est appelé peroxyde d’uranium.

3.1.2.2 Propriétés chimiques des éléments accompagnateurs

La plupart des minerais contiennent peu d’éléments gênants. La solubilisation de


l’uranium, que l’on cherche à réaliser aussi sélectivement que possible et appelée
lixiviation, est accompagnée néanmoins de la solubilisation de quelques impuretés. Les
plus courantes sont le fer, l’aluminium, la silice. Les résines et les extractants
permettent une très bonne séparation entre l’uranium et ces impuretés.

Certains minerais, toutefois, contiennent des éléments solubles en milieu acide ou


alcalin, dont la séparation est plus difficile. Les plus fréquents sont le molybdène, le
vanadium et le zirconium dont les teneurs dans les concentrés sont assez restrictives.
Le cas du molybdène est bien illustré, au Niger, par les minerais de la COMINAK. Le
procédé de séparation utilise un extractant amine classique qui extrait conjointement
l’uranium et le molybdène (surtout sous forme de complexes phosphomolybdiques).
L’uranium est désextrait par une solution de chlorure de sodium qui entraîne peu de
molybdène. Dans une seconde étape, le molybdène est désextrait par une solution de
carbonate de sodium. Ces opérations sont toujours imparfaites et l’on retrouve toujours
un peu de molybdène dans l’uranium et d’uranium dans le molybdène.

3.1.3 Étapes du traitement

Le schéma de traitement, représenté dans la figure 1 comprend six étapes.

3.1.3.1 Stockage

Le stockage du minerai est fait selon les principes déjà exposés 3.1.1. Il s’agit
essentiellement de constituer des tas de minerais selon leur teneur et leur qualité. La
difficulté économique est d’optimiser le stock avant traitement, l’optimum se situant
autour de trente jours de réserve, sachant que l’on ne peut alterner les qualités trop
souvent et qu’il est préférable que les campagnes, pour chaque qualité, ne durent pas
moins de deux semaines.

55
Figure 1 - Principe du traitement des minerais d’uranium par voie acide

3.1.3.2 Préparation mécanique

Les minerais sont livrés avec des dimensions variables, les plus gros blocs étant
équivalents à des cubes de 200 mm à 1 000 mm d’arête. L’uranium se trouvant soit
dans des microfissures, soit en joints de grains, il faut le libérer 3.1.1. À cette fin, on
procède à une réduction de taille par concassage et broyage. Il n’y a pas de schéma
type, chaque minerai posant, dès cette étape, des problèmes particuliers. Pour des

56
minerais à base de roches cristallines, on peut considérer comme classiques les
opérations suivantes [4] [5] :

 concassage primaire : réduction jusqu’à 150 à 250 mm ;


 concassage secondaire : réduction jusqu’à 50 à 70 mm ;
 concassage tertiaire : réduction jusqu’à 15 à 30 mm ;
 broyage par broyeur à barres : réduction jusqu’à 1 à 2 mm ;
 broyage par broyeur à boulets : réduction jusqu’à la dimension finale voulue (150
à 600 µm).

Des opérations complémentaires permettent :

 de séparer, après concassage primaire ou secondaire, les fines des cailloux


(débourbage consistant en un lavage à l’eau) ;
 de séparer, entre deux opérations, les grains de diverses tailles de façon à
n’envoyer vers les appareils que ceux qui ont besoin d’y passer ; ce sont des
criblages entre les divers concasseurs et des classifications (par cribles,
panneaux tamiseurs, classificateurs à râteaux ou à vis, hydrocyclones, etc.)
avant les broyeurs.

Les opérations de concassage sont effectuées en général sans eau ; les opérations de
broyage peuvent être réalisées à sec mais, le plus souvent, elles le sont en présence
d’eau, qu’il faut éliminer en grande partie avant d’envoyer le minerai broyé à l’attaque.
Selon les cas, cette séparation de l’eau est obtenue par décantation, filtration,
cyclonage, etc.

Les minerais sédimentaires, principalement gréseux, peuvent être réduits par des
opérations plus simples : concassage primaire, puis broyage semi-autogène donnant
directement, avec une classification, la taille finale recherchée.

3.1.3.3 Mise en solution de l’uranium

L’incidence économique de cette opération est très importante. On l’appelle parfois


attaque, mais le plus souvent lixiviation, car il s’agit d’une attaque sélective par un
réactif approprié.

3.1.3.3.1 Choix du réactif

A priori, les acides minéraux conviennent tous pour dissoudre l’uranium sans attaquer
pour l’essentiel la gangue.

Trois raisons sont en faveur de l’acide sulfurique :

 il est moins cher par tonne traitée ou par kilogramme d’uranium produit ;
 il est également moins polluant, les sulfates pouvant être précipités à la chaux ;
 enfin, étant moins agressif, il offre plus de possibilités dans le choix des
matériaux des cuves d’attaque.

Aussi, la plupart des usines de traitement de minerai d’uranium dans le monde utilisent-
elles cet acide comme réactif d’attaque. Les quantités nécessaires, très variables, vont,
dans la plupart des cas, de 25 à 100 kg/t de minerai traité. Les besoins propres à

57
l’uranium sont très faibles et la consommation est liée à la composition de la gangue.
Sont finalement consommateurs d’acide :

 les oxydes, hydroxydes et sulfures métalliques, principalement de fer ;


 des silicates et des silico-aluminates de métaux alcalins et alcalino-terreux et,
parfois, d’autres métaux (fer, cuivre) ;
 des carbonates, le plus souvent de calcium (calcite), de magnésium (dolomie) et
de fer (sidérite).

Ces carbonates sont déterminants pour le choix du procédé de traitement. En effet, s’ils
sont trop abondants, ils entraînent une dépense en acide rapportée à l’uranium produit
trop élevée ; aussi est-on conduit à choisir un réactif d’attaque dont la consommation
est insensible à la présence de carbonates, tel que le carbonate de sodium 3.1.2.1.

L’attaque par le carbonate de sodium est beaucoup plus sélective et, à part un peu de
silice, on ne dissout pas grand chose en plus de l’uranium. Elle n’est toutefois retenue
que lorsqu’il apparaît impossible d’employer l’acide sulfurique, cela pour trois raisons
principales :

 les conditions d’attaque sont beaucoup plus dures (température élevée, pression
de plusieurs bars, durée plus longue) et exigent un matériel plus sophistiqué ou
beaucoup plus volumineux et, dans tous les cas, plus cher ;
 malgré ces conditions sévères, le rendement est souvent inférieur de 1 à 5 % à
celui qu’on aurait pu obtenir avec une attaque à l’acide sulfurique ;
 le problème des effluents est beaucoup plus difficile à résoudre 3.1.4.

En milieu acide, l’oxydant le plus souvent utilisé est le chlorate de sodium dont la
consommation peut varier de 1 à 5 kg/t de minerai.

En milieu alcalin, la consommation d’oxygène est très variable, notamment avec la


nature de la gangue et la pression de fonctionnement. À Lodève, où la gangue est riche
en sulfures qui consomment de l’oxygène et du carbonate, les consommations sont de
40 à 45 kg/t pour le carbonate et près de 15 Nm3/t pour l’oxygène.

3.1.3.3.2 Conditions opératoires et rendement

La température de lixiviation peut varier selon :

 le caractère plus ou moins réfractaire du minerai ;


 le matériau utilisé pour les cuves.

En milieu acide, la température se situe le plus couramment entre 30 et 65  oC. Le


chauffage est le plus souvent réalisé par injection directe de vapeur.

En milieu alcalin, la température doit être plus élevée ; pour éviter l’ébullition, on opère
souvent à des pressions de 200 à 1 000 kPa, ce qui permet d’utiliser des températures
pouvant atteindre 100 à 150 oC. La pulpe est préchauffée dans des échangeurs de
chaleur.

58
La durée de séjour dans les réacteurs d’attaque est fonction :

 du caractère plus ou moins réfractaire du minerai ;


 de l’agressivité du réactif ;
 de la température choisie.

Usuellement, les durées de lixiviation se situent entre 3 et 10 h aussi bien en milieu
acide qu’en milieu alcalin et peuvent atteindre 24 h quand on opère à température
ambiante.

La valeur classique du rendement avec des minerais moyens (en réactivité et en


teneur) est de 96 à 97 %. Toutefois, une notion plus normale à retenir serait la teneur
résiduelle après attaque : moins de 70 g/t est considéré comme un bon résultat.

Partant de ce chiffre, on obtient les rendements suivants :

 93 % pour un minerai de teneur initiale 0,1 % ;


 96,5 % pour un minerai de teneur initiale 0,2 % ;
 97,7 % pour un minerai de teneur initiale 0,3 %.

En lixiviation alcaline, avec des minerais de teneur initiale 0,3 %, le rendement n’excède
pas 93,5 %.

3.1.3.3.3 Technologie

En milieu acide, le réacteur le plus couramment utilisé est la cuve munie d’un agitateur.
En général, pour garantir un temps de séjour minimal aux fines particules, on dispose
plusieurs cuves en série et en escalier de manière à ce que la pulpe se déverse par
gravité d’une cuve à l’autre. Le nombre de cuves est de trois au minimum.

Le matériau de construction, quand la température ne dépasse pas 70 oC, est le plus


souvent de l’acier, revêtu de caoutchouc synthétique, et parfois du bois ; ces deux
matériaux ont l’avantage de résister à la fois à la corrosion et à l’abrasion.

La caractéristique principale de la pulpe est sa densité. On l’exprime souvent en rapport


massique liquide/solide qui est fréquemment voisin de 1 mais parfois inférieur (pulpe
dite épaisse). L’intérêt de diminuer ce rapport est de réduire la consommation de
réactifs et d’énergie de chauffage. La limite est liée à la viscosité de la pulpe.

Des réacteurs différents, appelés pachucas, sont employés, le plus souvent par charge
(de manière discontinue), pour traiter des minerais pauvres (cas fréquent en Afrique du
Sud où l’uranium est un sous-produit de l’or). Ils sont constitués par deux tubes
concentriques ; dans le tube central, on injecte de l’air et, éventuellement, de la vapeur
qui entraînent la pulpe et l’agitent. Dans les pachucas de grande hauteur (10 à 20 m),
on obtient à la base des pressions de 200 à 300 kPa et des températures pouvant
atteindre 80 à 100 oC.

En milieu alcalin, les réacteurs les plus fréquemment utilisés sont les autoclaves, le plus
souvent en acier inoxydable. Montés en série, ils sont de technologie plus lourde (haute
pression et haute température). Il faut des pompes à haute pression pour injecter la
pulpe dans les échangeurs et les autoclaves. Avec des minerais peu réfractaires, on a
parfois utilisé des pachucas.

59
3.1.3.4 Séparation solide-liquide

La pulpe sortant de la lixiviation doit être traitée pour séparer les liqueurs contenant
l’uranium, d’une part, du minerai épuisé (en uranium), d’autre part, avec le meilleur
rendement possible. Ce rendement ne peut être obtenu que par des lavages à l’eau
répétés, ce qui augmente le volume de liqueurs. Pour cela, diverses techniques sont
employées concurremment ou simultanément.

Lavage à contre-courant en décanteurs

La pulpe est introduite après addition de floculant dans un décanteur i où le solide se


dépose sur le fond. Généralement, un râteau ramène une pulpe épaissie vers le fond
conique (la pointe) d’où elle est pompée pour être envoyée dans une cuve. Elle y est
repulpée avec la liqueur du décanteur (i + 2) et envoyée dans le décanteur (i + 1) où le
même processus se déroule. L’opération est répétée de 3 à 6 fois pour obtenir un
rendement de lavage d’au moins 99 %. On traite de préférence dans ces appareils des
particules de taille inférieure à 150 µm et la pulpe épaissie contient 30 à 50 % de solide
dans le meilleur des cas. La liqueur obtenue représente au moins un volume de 3 à
4 m3/t de minerai.

Lavage à contre-courant en classificateurs

Le principe du contre-courant est le même qu’en lavage en décanteurs. Les


classificateurs (à râteaux ou à vis) font remonter le solide en le brassant dans le liquide
qui s’écoule vers le bas. La liqueur obtenue représente un volume de 1,5 à 2  m3/t. Les
classificateurs ne sont utilisés en lavage que pour des particules relativement grosses,
de taille supérieure à 150 µm.

Filtration

On essore la pulpe additionnée de floculant en la faisant passer sur une toile à faible
porosité et soumise à une dépression. Deux types principaux de filtres sont utilisés :

 les filtres rotatifs continus : un tambour muni d’une toile plonge dans une cuve où
la pulpe est maintenue en suspension ; l’inconvénient majeur de ces filtres est
que les particules les plus fines se déposent d’abord, colmatent la toile et
diminuent le débit de filtration ; on lave mal sur ces filtres et il faut repulper entre
deux étapes de filtration, pour avoir une bonne efficacité ;
 les filtres à bande continue : ils sont plus rationnels ; la pulpe est déposée sur la
toile qui repose sur une bande de caoutchouc perforée qui assure le
déplacement de l’ensemble et l’étanchéité dynamique avec les boîtes à vide. Les
grosses particules forment une précouche ; le débit spécifique est souvent
élevé : 200 à 1 000 kg/(h · m2) et le lavage sur filtre efficace (rendement souvent
supérieur à 99 %).

Avec des filtres, on peut obtenir des résidus essorés contenant de 60 à 80 % de solide
et le volume de liqueur peut descendre à 1m3/t, le chiffre le plus courant étant de 1,5 à
2,5 m3/t.

60
3.1.3.5 Purification et concentration de l’uranium

On a expliqué 3.1.2.1 les paramètres chimiques de la purification de l’uranium par


résines et/ou solvants.

3.1.3.5.1 Conditions opératoires

On a vu que, pour les résines, il faut ajuster le pH autour de la valeur 1,8, ce qui
implique, le plus souvent, une neutralisation partielle de la solution. Pour travailler en lit
fixe 3.1.3.5.2, il faut également clarifier la liqueur entrante pour éviter de colmater le lit
de résine par des particules solides.

Les résines, aujourd’hui, sont principalement utilisées avec des liqueurs pauvres (moins
de 0,5 g/L d’uranium) comme première étape de concentration. L’élution est alors
effectuée par une solution d’acide sulfurique d’environ 3N, puis la liqueur d’élution est
envoyée à l’extraction par solvant (teneur en uranium 5 à 7 g/L). Pour l’extraction, on
procède aussi à une clarification préalable, les solides en suspension ayant tendance à
s’accumuler dans les appareils d’extraction. Le solvant est généralement ternaire :

 l’extractant (amine tertiaire), à une teneur de 0,1 à 0,2 M ;


 le diluant, hydrocarbure de préférence saturé, à la fois peu visqueux et
possédant un point éclair supérieur à 70 oC ;
 le modificateur, dont le rôle est d’assurer le maintien en solution organique du
complexe amine-uranium, à une teneur de l’ordre de 2 à 5 % en volume. C’est
généralement un monoalcool lourd (10 à 13 atomes de carbone).

En extraction, on traite soit les liqueurs d’élution des résines, soit directement les
liqueurs produites par la lixiviation, de teneur supérieure à 0,5 g/L et, de préférence, au
moins égale à 1 g/L en uranium. La désextraction permet d’obtenir des solutions, titrant
20 à 40 g/L en uranium, qui peuvent être utilisées directement pour la production de
concentrés.

Pratiquement, le réactif d’élution ou de désextraction est constitué d’eaux-mères de


précipitation préalablement réajustées, qui sont ainsi recyclées en forte proportion.

3.1.3.5.2 Mise en œuvre

Échangeurs d’ions solides (résines)

Les résines sont utilisées soit en lits fixes, soit en lits mobiles.

En lits fixes : dans ce cas, les opérations sont discontinues et successives ; la résine
est placée dans des colonnes ; les liqueurs chargées en uranium traversent le lit de
résine jusqu’à ce que l’on constate une fuite en uranium ; à ce moment, on cesse de
charger la résine et l’on procède éventuellement à un lavage et à l’élution selon la
même technique ; on dispose de plusieurs groupes de colonnes en parallèle pour
assurer la continuité du procédé.

Si la clarification des liqueurs ne peut pas être assurée, on peut fonctionner en lit
fluidisé, mais sans transfert de résine d’une colonne à l’autre.

61
En lits mobiles : plusieurs techniques ont été développées en France, au Canada, aux
États-Unis et en Afrique du Sud, pour procéder aux opérations de fixation, lavage et
élution en continu ; la résine se déplace dans ce cas à contre-courant des réactifs ; les
brevets ont surtout porté sur les dispositifs permettant de véhiculer les résines en
évitant au maximum l’attrition (usure des grains par frottement).

Ces procédés ont été surtout utilisés avec des pulpes légères, c’est à dire dont les
grosses particules (sables) avaient été séparées.

Échangeurs d’ions liquides (solvants)

Les opérations d’extraction par solvant sont toujours réalisées en continu. Les appareils
le plus souvent utilisés sont les mélangeurs-décanteurs. En général, on utilise 4 à 5
étages à l’extraction et 3 à 5 étages à la désextraction. Dans certains schémas, il y a 1
à 3 étages de lavage entre extraction et désextraction, et 3 étages de régénération pour
la désextraction du molybdène. Le temps de séjour dans les mélangeurs n’excède pas
3 min, et rarement plus de 20 min dans les décanteurs. Les modèles utilisés sont très
variés et aucun ne s’est vraiment imposé. Dans tous les cas, on recycle 3 à 10 fois le
débit effectif de la phase réceptrice pour assurer un bon transfert.

Les unités de faible ou moyenne capacité peuvent être avantageusement équipées de


colonnes pulsées (débit d’alimentation en phase aqueuse  80 m3/h).

3.1.3.6 Préparation des concentrés

La précipitation par une base est réalisée à chaud, dans des cuves munies d’un
agitateur, le temps de séjour pouvant varier de 2 à 6 heures selon le composé précipité
et la composition de la liqueur uranifère. La régulation du procédé vise à maintenir la
concentration du réactif libre dans des limites assez strictes.

Dans le cas de la précipitation par le peroxyde d’hydrogène, le débit du réactif est


asservi au débit d’uranium entrant.

La pulpe obtenue est épaissie dans un décanteur classique et la sous-verse du


décanteur est essorée et lavée soit sur filtre (rotatif ou à bande), soit par centrifugation.
La pulpe essorée contient encore, en général, près de 50 % d’eau.

Les procédés de séchage sont très variés et aucun ne s’est réellement imposé. Le plus
fréquemment employé aux États-Unis est le four à soles (Multiple hearth dryer ) qui
permet de sécher ou de griller entre 700 et 750 oC (cas du diuranate d’ammonium). En
France, et dans les usines construites par la France, la technique la plus répandue
aujourd’hui est le séchage par atomisation, la chaleur étant fournie de préférence par la
combustion d’un gaz (gaz naturel, propane).

Les difficultés du séchage sont dues surtout aux poussières entraînées par l’air chaud,
que l’on doit donc traiter. Pour le dépoussiérage aussi, il n’y a pas de solutions types,
les plus utilisées étant les combinaisons suivantes :

 filtre à manches – laveur à eau ;


 laveur à eau – électrofiltre.

62
Le séchage est suivi d’un stockage en trémie avant mise en emballage (fûts de 220 L
non réutilisés). En France, on a utilisé des conteneurs de 1,5 m3 en acier inoxydable
qui étaient retournés vides, par le raffineur, aux usines. Au passage, on prélève un
échantillon proportionnel (environ 2 kg) qui sert aux déterminations d’humidité et de
teneurs en uranium et en impuretés. Il sert également, ainsi que les échantillons de
minerais prélevés au concassage et au broyage, à établir le bilan matière de l’usine et à
déterminer le rendement en uranium.

3.1.4 Gestion des résidus et des effluents liquides

3.1.4.1 Période d’exploitation

Le traitement des minerais donne lieu à la production directe de résidus solides et de


deux effluents liquides.

3.1.4.1.1 Résidus solides

Il s’agit 3.1.3.4 du minerai épuisé en uranium et qui se présente sous forme de pulpe


épaisse (décantation) ou de gâteau de filtration, plus pauvre en eau.

Dans le premier cas, leur traitement est inséparable de celui des effluents liquides. Ils
sont repulpés avec ces derniers préalablement traités et envoyés au stockage qui sera,
normalement, définitif.

Il s’agit d’un champ d’épandage dans lequel la digue va progressivement être


constituée des sables des résidus (particules supérieures à 0,15 mm préalablement
séparées par cyclonage) et la suspension de fines va décanter naturellement ; celles-ci
vont s’amasser sur les parois du champ d’épandage et constituer une couverture
imperméable du fait de leur nature argileuse. Il va de soi que le terrain initialement
choisi pour établir le champ d’épandage est peu perméable. La liqueur claire
surnageante est rejetée dans le milieu naturel, généralement un cours d’eau, sa
conformité aux normes de rejet étant contrôlée au moyen d’échantillons prélevés en
ligne et analysés selon une fréquence, déterminée en France par l’administration de
tutelle.

Dans le second cas, le stockage est souvent fait en remblai d’exploitations épuisées,
principalement d’anciennes mines à ciel ouvert. Cette technique a été pratiquée
notamment à Bessines (Haute-Vienne) et Lodève (Hérault).

3.1.4.1.2 Effluents liquides

Deux principaux effluents liquides (figure 2) sont produits lors du traitement des
minerais.

L’effluent le plus volumineux provient de l’échange d’ions 3.1.3.5. Il s’agit de la solution


qui contenait l’uranium et qui ne contient plus que ce qui n’a pas été extrait  : acide
sulfurique résiduel, sulfates de métaux précipitables, chlorures (provenant du chlorate),
descendants radioactifs de l’uranium (essentiellement le radium 226). Le traitement de
ces effluents, qui doit permettre leur rejet dans le milieu naturel, comporte deux
aspects : conformité biochimique et conformité radiologique.

63
La conformité biochimique (en fait essentiellement chimique) exige finalement la
neutralisation de la liqueur jusqu’à un pH compris entre 6,5 et 8. En utilisant le calcaire
et la chaux comme neutralisants, on va en même temps précipiter les métaux
hydrolysables (fer, aluminium) sous forme d’hydroxydes et les ions sulfate sous forme
de sulfate de calcium très peu soluble. Ce précipité est séparé (par décantation ou
filtration) et joint aux résidus solides 3.1.4.1.1.

La conformité radiologique conduit à éliminer la majeure partie du radium en solution.


Bien que le radium soit très peu soluble en milieu sulfate, une fraction inférieure à 1 %
du radium initial est solubilisée. Cela conduit à des teneurs variant de 50 à 400 pg/L
(1 picogramme = 10–12 g) alors que la norme courante de rejet en France est celle de
l’eau potable, soit actuellement 10 pg/L. Le traitement consiste à ajouter du chlorure de
baryum qui, avec les ions sulfate de la liqueur, produit un précipité de sulfate de baryum
qui entraîne le radium sous une forme mal déterminée.

Figure 2 - Principe du traitement des effluents liquides

De cette façon, les liqueurs sont facilement ramenées à moins de 10 pg/L de radium. Le
précipité très faible, généralement séparé par décantation, est joint au résidu solide
principal.

Le second effluent liquide est constitué par la fraction des eaux-mères de précipitation
qui n’est pas recyclée à la désextraction ou à l’élution 3.1.3.5.1. C’est donc la purge de
ces eaux-mères qui est susceptible d’un traitement. En fait, seules les eaux-mères
ammoniacales nécessitent un traitement spécial ; les autres eaux-mères (chlorurées ou
magnésiennes) sont jointes à l’effluent principal, qu’elles peuvent contribuer à
neutraliser.

64
Deux voies de traitement ont été appliquées :

 la récupération par cristallisation du sulfate d’ammonium, dans des pays où il


pouvait être valorisé comme engrais (Canada) ;
 la caustification : l’ajout de chaux à l’effluent provoque la précipitation de sulfate
de calcium (qui rejoint les résidus solides) et libère de l’ammoniac qui est
réabsorbé dans de l’eau et recyclé dans l’usine. De cette façon, les ions
ammonium ne sont pas rejetés dans le réseau hydrographique.

3.1.4.2 Période post-exploitation

Seuls les résidus solides stockés posent un problème de réaménagement après


l’exploitation, les effluents liquides ayant été traités, puis rejetés pendant l’exploitation.

En fait, il convient d’assurer :

 la stabilité mécanique du stock pour éviter que les résidus puissent se déplacer,
voire se répandre hors de leur site de stockage ; en principe, cela est assuré lors
de leur mise à stock, mais on peut être conduit à réaliser quelques
renforcements de certaines parois des champs d’épandage ;
 l’inocuité du stock pour l’environnement.

Si l’on considère que le risque principal est celui dû au dégagement de radon, on est
amené à recouvrir le stock d’une couche de matériaux stériles, de préférence naturels,
empêchant pratiquement l’émission de radon dans l’environnement. En outre, cette
couche imperméable peut empêcher la pénétration des eaux pluviales et, par suite, la
mobilisation des éléments solubilisables, notamment les éléments radioactifs.

Il n’y a pas aujourd’hui ni à l’échelle internationale, ni à l’échelle nationale, de règles sur


la nature et l’épaisseur des matériaux de recouverture. Ces derniers font l’objet de
nombreuses études d’optimisation. Le choix d’une épaisseur ou d’une autre n’est pas
économiquement indifférent. Si l’on prend, par exemple, un stock de résidus dont la
surface à recouvrir serait de 500 000 m2, et que l’on recouvre par 10, 50 ou 100 cm de
matériau, le volume à déplacer et à damer sera respectivement de 50 000, 250 000 et
500 000 m3 pour constituer la couche de couverture. Le coût en sera pratiquement
proportionnel à l’épaisseur.

Pour conclure, la phase post-exploitation est prise en compte désormais, dans les pays
développés, dès la demande d’autorisation d’exploiter. Le dossier constitué à cet effet
comporte les mesures qui seront prises à l’arrêt des mines et des installations de
traitement. Pendant toute la durée d’exploitation, des provisions sont constituées pour
permettre de réaliser les travaux de réaménagement, le moment venu.

3.1.4.3 Cas particuliers

Les usines utilisant un procédé alcalin produisent des effluents liquides qui ne peuvent
être traités par les techniques décrites au paragraphe 3.1.4.1. Dans le cas de l’usine de
Lodève, l’effluent liquide principal est constitué d’une solution de sulfate de sodium. Les
sulfates alcalins ne pouvant être précipités par addition de chaux, il a fallu trouver une
autre méthode. Le choix s’est porté sur la cristallisation du sulfate de sodium avec, pour
objectif, sa commercialisation. Pour répondre aux critères de pureté exigés, il faut
éliminer, de la solution de sulfate, le molybdène, puis les matières organiques qui

65
pourraient colorer le sulfate, enfin les traces d’uranium. La cristallisation est réalisée en
trois temps :

 concentration par évaporation (évaporateur 4 corps, utilisant la recompression


mécanique de vapeur) ;
 purification de la solution concentrée ;
 cristallisation du sulfate par évaporation (même technique que ci‐dessus).

L’atelier de traitement des effluents représente sensiblement le quart des


investissements et des coûts d’exploitation.

3.1.4.4 Résidus et effluents miniers

L’exploitation des mines produit fatalement des volumes importants de stériles ou


quasi-stériles qui sont entreposés en tas. Ils ne posent en fait de problèmes qu’à l’issue
de l’exploitation. En réalité, ils peuvent avoir, en tout ou en partie, trois destinations :

 servir de matériaux de recouvrement des résidus de traitement 3.1.4.2 ;


 servir de matériaux de remblai d’excavations (mines à ciel ouvert) ;
 rester en place, faute des deux destinations précédentes ; dans ce dernier cas,
le réaménagement peut conduire à un remodèlement des tas et à des
plantations de végétaux (herbe, arbustes, arbres).

Les mines produisent également des eaux, dites d’exhaure, qui peuvent nécessiter un
traitement avant rejet :

 presque toujours, l’élimination de solides en suspension ;


 parfois, l’élimination de radium (méthode décrite au § 3.1.4.1.2) ;
 exceptionnellement, l’élimination d’uranium par précipitation et coagulation.

Après exploitation, il n’y a normalement plus d’eaux d’exhaure.

3.1.5 Traitements particuliers

Les procédés décrits ont donné lieu à de nombreuses variantes destinées à s’adapter
aux particularités des minerais. Il serait vain de vouloir toutes les citer, mais quelques-
unes méritent une mention particulière.

3.1.5.1 Triage radiométrique

Les minerais d’uranium étant radioactifs, principalement par les descendants de


l’uranium, notamment le radium 226, il est possible, sous réserve d’avoir vérifié la
constance du rapport 226Ra / 238U, de connaître une valeur approchée de la teneur en
uranium par la mesure de la radioactivité γ du minerai. Cette méthode a été utilisée
dans quelques unités de production pour éliminer des fractions pauvres en uranium.

Pour sa réalisation industrielle, il convient de respecter certaines contraintes :

 le minerai est soumis à une mesure de radioactivité après concassage ; seules


les particules de dimensions comprises entre 30 et 90 mm sont susceptibles de
subir un triage ; on procède donc à un criblage et à un lavage des particules
avant leur envoi au triage ;
66
 pour trier convenablement, il faut mesurer deux paramètres : la radioactivité et le
volume des fractions de minerais. En effet, une particule peu riche, mais
volumineuse, peut donner une valeur globale de radioactivité du même ordre de
grandeur que celle d’une particule petite et riche. C’est évidemment la
radioactivité par unité de volume (correspondant à la teneur) qu’il faut connaître.

Le système utilisé comporte donc des bandes transporteuses, divisées en couloirs, qui
permettent de faire défiler des cailloux bien séparés sous les dispositifs de mesure  :
radioactivité et volume ; la combinaison de ces deux mesures permet de décider de
garder ou de rejeter un caillou. Le rejet est réalisé par un soufflage d’air comprimé, qui
modifie la trajectoire du caillou concerné et le sort du circuit des cailloux conformes.

De telles installations fonctionnent (ou ont fonctionné) en France (Lodève) et en Afrique


du Sud, notamment.

3.1.5.2 Attaque des minerais réfractaires

Dans certains minerais (figure 3) une partie de l’uranium se trouve liée fortement à des
espèces chimiques réfractaires aux conditions d’attaque classique (titanates, sulfures
par exemple). C’est le cas, en particulier, des minerais du Niger qui, dans une lixiviation
classique, ne libéreraient que 70 % au plus de leur uranium.

Un type d’attaque par de l’acide concentré et en milieu fortement oxydant a donc été
mis au point. Le minerai broyé est malaxé avec un mélange d’acide sulfurique et de
nitrate (oxydant), le rapport liquide sur solide étant inférieur à 0,2. La réaction dégage
des oxydes d’azote qui sont collectés et envoyés dans une tour où ils sont reconvertis
en acide nitrique. Le minerai imprégné mûrit dans un tunnel sur une bande à
avancement lent pendant quelques heures et est enfin délité dans une solution
légèrement acide qui solubilise les produits de l’attaque, dont l’uranium avec un
rendement supérieur à 95 %.

3.1.5.3 Minerais mixtes

L’uranium est parfois récupéré en sous-produit d’autres métaux, tels que l’or et le
cuivre 1.4.

En Afrique du Sud, l’uranium est associé à l’or qui supporte tous les frais d’extraction
minière et de préparation mécanique. L’uranium est alors le plus souvent récupéré
classiquement par lixiviation sulfurique des résidus de minerais d’or, suivie souvent
d’une fixation de l’uranium par résines échangeuses d’ions à partir de la pulpe (broyée
très finement pour la récupération de l’or). Dans certaines installations récentes,
l’uranium était récupéré avant l’or ; la pulpe, épuisée en uranium, était neutralisée avant
de récupérer l’or par cyanuration.

Dans le cas de l’association cuivre-uranium, le minerai est broyé et le sulfure de cuivre


est flotté. Le résidu de flottation subit une lixiviation sulfurique qui solubilise le cuivre
résiduel (moins de 10 %) et l’uranium. Le cuivre est d’abord récupéré par extraction par
solvant (LIX 64 ), l’uranium est ensuite également extrait par solvant (amine).

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Figure 3 - Attaque concentrée après broyage à sec

3.2 Minerais à haute teneur

On a vu l’incidence des hautes teneurs en uranium sur l’extraction des minerais 1.3.


Pour le traitement de ces minerais, les problèmes de radioprotection sont également
significatifs, tout particulièrement en ce qui concerne les risques d’irradiation directe des
opérateurs.

On peut relever les caractéristiques de traitement suivantes :

 le procédé général est applicable ; la différence principale concerne la


consommation d’acide, qui est plus élevée par tonne traitée (150 à 400 kg/t),
mais reste faible par kilogramme d’uranium produit (6 à 15 kg/kg contre 18 à
35 kg/kg pour les minerais classiques) ;
 technologiquement, les appareils sont beaucoup plus petits puisque les quantités
traitées sont faibles ;
 la radioprotection conduit à installer des protections biologiques autour des
appareils utilisés en début de traitement, notamment les cuves de lixiviation
(béton, fonte) et aussi des aspirations de radon ; la suite du traitement, où
l’uranium est séparé de ses descendants, ne nécessite plus de protection
particulière ;
 le stockage des résidus de lixiviation (fortement radioactifs) pose un problème
particulier, à l’issue de l’exploitation, en exigeant une couverture constituant une
protection biologique stable, mais le volume à protéger est assez faible.

D’une manière générale, on doit privilégier les opérations automatiques ou conduites à


distance, d’une façon analogue (mais plus légère, compte tenu des risques nettement
plus faibles) à la pratique du retraitement.

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3.3 Sources annexes

L’uranium peut être récupéré à partir de diverses sources secondaires 1 exploitées ou


non, selon les prix de vente de l’uranium dans les concentrés.

3.3.1 Lixiviation statique

Ce procédé a été le plus souvent appliqué en complément de celui du traitement


classique (figure 4). Il concerne les fractions pauvres des minerais extraits, séparées à
la suite d’un contrôle de teneur par comptage simplifié 3.1.1. Ces minerais vont faire
l’objet éventuellement d’un concassage, mais pas d’un broyage.

Figure 4 - Principe de la lixiviation statique

Dans ce procédé, le minerai est disposé soit tel quel, soit concassé à moins de 70 mm,
sur une aire étanche et légèrement pentue. Dans les installations modernes de
lixiviation statique, les aires sont construites de telle manière qu’elles sont à la fois
étanches et mécaniquement résistantes (possibilité de roulage d’engins chargeurs) et
elles sont munies d’un drainage de sécurité en cas (non constaté) de pénétration de
liqueur.

Les tas sont de préférence peu hauts (moins de 3 m), les autres dimensions étant, en
principe, indifférentes. L’usage a montré que des tas de plus de 10 000 t ne sont pas
faciles à gérer.

Le minerai est alors arrosé par une liqueur acide au moyen d’une série de tubes
plastiques perforés qui distribuent l’acide par pulvérisation. L’acide percole à travers le
tas, dissolvant au passage l’uranium et quelques impuretés. La durée du contact étant
insuffisante, l’acide récupéré, dans un bassin connecté à l’aire, est recyclé plusieurs
fois. Lorsque l’on constate que les teneurs en uranium et en acide ne varient plus, on
considère que l’attaque est terminée. Le tas est alors rincé, d’abord par une solution

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faiblement acide, pour chasser l’uranium, puis par de l’eau industrielle, pour chasser
l’acide. Le minerai épuisé est alors évacué vers un stockage définitif, puis remplacé par
une nouvelle charge. La durée totale d’un cycle complet est variable de 2 à 4 mois en
moyenne.

L’uranium n’étant pas totalement libéré, on obtient des rendements de récupération qui
atteignent rarement 80 %.

Les liqueurs claires (liqueurs d’attaque et de lavage acide) obtenues ainsi sans
opération de séparation solide/liquide sont envoyées dans l’usine de traitement où elles
rejoignent celles produites par le procédé principal.

À titre d’exemple, certaines années, plus de 200 t d’uranium ont été ainsi produites à
l’Ecarpière (Loire-Atlantique), soit près de 30 % de la production totale.

3.3.2 Lixiviation in situ

Certains minerais à teneurs faibles 1.2, situés à une profondeur qui exclut une
extraction minière économique, sont traités sans déplacement (in situ ) par injection
d’un réactif (figure 5). Cela suppose que le gisement réponde à plusieurs critères :

 la gangue porteuse de l’uranium est suffisamment poreuse pour permettre la


circulation du réactif, sans appliquer de pression très élevée ;
 la roche minéralisée est isolée naturellement des roches environnantes (souvent
couches argileuses) pour éviter la dispersion des réactifs (pollution et perte de
rendement).

Le plus souvent, le réactif utilisé est un carbonate alcalin, car l’uranium se trouve dans
des roches sédimentaires (grès), accompagné de minéraux basiques (calcaire,
dolomie). On peut y ajouter un oxydant (oxygène dissous, peroxyde d’hydrogène).

La liqueur est traitée sur place par échange d’ions (résines) ; la liqueur épuisée est
réajustée en réactif et recyclée. L’uranium fixé est élué et précipité, et le concentré
envoyé au raffinage.

Il est difficile de connaître le taux de récupération de l’uranium. L’opération est


interrompue lorsque la rentabilité devient insuffisante ; ce qui, en pratique, correspond à
des concentrations d’uranium, dans les liqueurs d’attaque, inférieures à un seuil
économique.

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Figure 5 - Lixiviation en place. Vue schématique

3.3.3 Récupération d’uranium à partir de phosphates

Les phosphates naturels, utilisés pour la production d’engrais 1.5, contiennent le plus


souvent un peu d’uranium, probablement sous la forme d’un phosphate uraneux
enfermé dans le réseau cristallin de l’apatite (phosphate naturel de calcium). Dans les
procédés de préparation d’engrais, on passe aujourd’hui toujours par la production
d’acide phosphorique par attaque sulfurique de l’apatite. L’uranium passe naturellement
en solution dans l’acide phosphorique. À partir de cet acide, de concentration
habituellement exprimée par 30 % de P2O5, on peut imaginer, au passage, d’extraire
l’uranium. Cette extraction présente de nombreuses difficultés :

 le milieu phosphorique est très complexant et il faut disposer d’échangeurs


d’ions, liquides ou solides, extrêmement puissants ;
 si l’échangeur d’ions est puissant, la désextraction sera difficile.

L’acide phosphorique industriel est un produit brut très impur, qui contient des matières
en suspension (gypse, acide fluosilicique) et en solution (matières organiques) très
défavorables à l’extraction. En outre, même purifié, la moindre baisse de température
entraîne la précipitation de gypse dans les appareils.

En dépit de ces circonstances défavorables, plusieurs procédés ont été mis au point et
appliqués pendant quelques années. Ils utilisaient tous l’extraction par solvant au
moyen de mélanges synergiques. Le plus couramment appliqué (avec de nombreuses
variantes) était le procédé mis au point à Oak Ridge par Hurst et Crouse en 1974 qui
utilisait un mélange de TOPO (trioctyl phosphine oxide) et de D2EHPA (di-2, éthyl-
hexyl-phosphoric acid) dilué dans un hydrocarbure. Le procédé comportait deux
étapes :

 une concentration : extraction par le mélange TOPO-D2EHPA, désextraction par


réduction de l’uranium, en milieu phosphorique, par la poudre de fer ;

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 une purification : nouvelle extraction par le même mélange avec désextraction
par le carbonate d’ammonium et cristallisation de l’uranyle tricarbonate
d’ammonium.

La Cogema avait mis au point deux procédés :

 l’un utilisait le mélange précédent, mais en une seule étape, avec désextraction
par l’ammoniaque et le carbonate d’ammonium, l’uranium étant maintenu en
solution, puis précipité selon les procédés classiques ;
 l’autre suivait la même démarche, mais avec un mélange synergique plus
puissant dans lequel le D2EHPA était remplacé par le BIDIBOPP (bis-dibutoxy 1-
3, propyl 2-phosphoric acid).

L’extraction doit être précédée d’une préparation qui comporte le refroidissement de


l’acide (de 60 oC à 35 oC environ), sa clarification et, le cas échéant, l’élimination des
matières organiques.

Bien qu’aujourd’hui le prix de l’uranium ne permette pas cette récupération, elle reste
une possibilité à tout moment. La mise en place des installations nécessaires n’excède
pas deux ans.

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