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THÈME 1

L’Europe face aux révolutions

CHAPITRE 1
La Révolution française et l’Empire :
une nouvelle conception de la nation
Introduction
En 1789, la France entre dans une décennie de bouleversements
qui marquent une rupture avec l’Ancien Régime. La Révolution
française correspond à un bouleversement politique radical qui a
transféré la souveraineté du roi à la nation. L’abolition de la
monarchie, en 1792, est suivie d’une série d’expériences politiques
qui, malgré leurs échecs successifs et la proclamation de l’Empire en
1804, ont durablement marqué l’histoire politique de la France et
l’Europe et ont enraciné certains principes de la Révolution. Ce sont
ces événements qui donnent naissance aux mouvements
révolutionnaires, issus de l’apparition de la notion de souveraineté
des nations. Entre 1789 et 1848, l’Europe connaît une vague de
révolutions changeant les régimes politiques de différents pays. À
l’origine, ce sont des soulèvements populaires demandant plus de
libertés.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
1. La crise de la monarchie de l’Ancien Régime
A la fin du XVIII siècle, la France compte
28 millions d’habitants : c’est le pays le plus
peuplé d’Europe. La société, hiérarchisée, est
divisée en trois ordres avec des très grandes
inégalités d’ordre juridique, notamment
l’exemption d’impôt :
-le clergé (130,000 personnes),
-la noblesse (350,000 personnes)
-le tiers état (les roturiers, 95 % des Français).
Le tiers état comprend les bourgeois des villes
(marchands, avocats…) et les paysans (3/4 de
la population), écrasés par les impôts.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
En France, le monarque absolu, élu de Dieu, sacré à
Reims, est considéré comme source de toute justice : il a
autorité totale sur ses sujets et décide de tout. Ses
pouvoirs sont toutefois limités par les lois fonda-
mentales du royaume, par les privilèges et par la
nécessité de déléguer son pouvoir dans les provinces.
En raison d’un système fiscal qui exempte les
« privilégiés » de l’impôt, le déficit est un mal
chronique de la monarchie. En outre, la France connaît
une crise agricole, qui entraîne la disette et le chômage.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
Comme les privilégiés refusent de
remettre en cause le système, Louis
XVI décide de convoquer les états
généraux, seule institution autorisée
à reformer les impôts, pour mai
1789. les députés de cette assemblée
sont élus dans le cadre de la société
des ordres. Tous les électeurs
formulent leurs « doléances » : à
l’exception des privilégiés, tous
attendent un changement politique.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
2. Le déclenchement de la Révolution (1789)
L’ouverture des états généraux a lieu à Versailles le 5 mai
1789, les députés des trois ordres se réunissent pour résoudre la
crise de la monarchie, mais leur travail est paralysé par les
divergences politiques. Les députés du tiers état déçus par le
discours du roi, qu’il ne semble s’intéresser qu’au problème
financier d’état, se proclament « Assemblée nationale », le 17
juin 1789.
Le 20 juin, réunis dans la salle du Jeu de paume, ils font le
serment de ne pas se séparer avant d’avoir donne une
Constitution à la France. Rejoints par les députés des autres
ordres, par leur actes révolutionnaires, ils mettent fin au pouvoir
absolu du roi.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
À Paris, le peuple excédé par la misère suit avec
passion les États généraux. Au début de Juillet les
Parisiens pensent que le roi veut rétablir son pouvoir
absolu en chassant la nouvelle Assemblée. L’émeute
éclate, les arsenaux sont pillés et le 14 Juillet 1789, ils
prennent d’assaut la forteresse royale de la Bastille,
afin de se procurer des munitions et des armes. Puis ils
s’emparent du pouvoir municipal et créent les gardes
nationales.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
La Révolution gagne les villes de province ou le peuple suit
l’exemple de Paris. Après le 14 juillet, dans les campagnes,
c’est la Grande Peur : la rumeur se répand que les seigneurs
font appel à des brigands pour détruire les récoltes. Des
violences contre les nobles embrasent plusieurs régions. Les
paysans se jettent sur les châteaux de leurs seigneurs et
brûlent les titres des droits seigneuriaux.
Pour mettre fin aux troubles dans les campagnes, les
députés votent dans la nuit du 4 août 1789, l’abolition des
privilèges, des droits seigneuriaux et de la dîme, c’est la fin
de la société des ordres.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
3. La Construction d’une nouvelle France (1789 – 1791)
Il faut définir les bases d’une nouvelle société, c’est l’objet de la
Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen adoptée le 26 août
1789 par les députés. Inspirée des idées des Lumières, elle énonce les
droits naturels des individus (liberté, égalité), les libertés de culte,
d’opinion et de presse, proclame la souveraineté de la nation et
affirme l’autorité de la loi, expression de la volonté générale.
Dans un contexte de grave crise économique et de tensions très fortes
entre les députés et le roi, le 5 et 6 octobre 1789, les femmes de Paris,
suivies par des hommes se rendent à Versailles pour obliger le roi à
contresigner les décrets sur l’abolition des privilèges et la Déclaration
des droits. Elles le ramènent dans la capitale, avec l’Assemblée, ou il
s’installe avec sa famille au palais des Tuileries.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
À l’Assemblée, les députés travaillent sans relâche à la
réorganisation du royaume. Ils simplifient l’administration avec la
création des départements (décembre 1789), eux-mêmes
subdivisés en districts, cantons et communes ; ils reforment
l’Église soumise à la Constitution civile du clergé (juillet 1790),
les évêques et curés deviennent des fonctionnaires payés par l’État.
Dans le domaine économique, ils suppriment les douanes
intérieures, unifiant le marché intérieur. Pour résoudre les
problèmes financiers, l’Assemblée confisque et vend les biens du
clergé et met en place des impôts payés par tous. Ils imposent le
libéralisme économique, notamment avec la loi le Chapelier sur
l’interdiction des associations ouvrières (juin 1791).
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
La Constitution adoptée le 3 septembre 1791 officialise la
monarchie constitutionnelle qui fonctionne depuis 1789. Les
pouvoirs sont séparés : le pouvoir législatif revient à
l’Assemblée formée de 745 députés élus au suffrage
censitaire : seuls les « citoyens actifs » (4 millions), 15 % des
hommes payant un certain niveau d’impôt, peuvent voter. Le
pouvoir exécutif appartient au « roi des Français » dont les
prérogatives sont étendues ; Louis XVI dispose notamment du
droit de veto sur les lois, dont il peut interdire l’application. Et
finalement le pouvoir judiciaire, indépendant des deux autres
appartenant aux tribunaux.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
Avec la liberté d’expression, journaux et pétitions se
multiplient. L’ensemble de la société se passionne pour les débats,
à l’Assemblée, dans les clubs, les sociétés populaires. Les femmes
sont de toutes les mobilisations, certaines, telle Olympe de
Gouges, revendiquent en vain l’égalité politique avec les hommes,
d’autres tiennent un salon influent en entretiennent une
correspondance politiques avec diverses personnalités, comme
Manon Roland.
Le 14 juillet 1790, une cérémonie grandiose (Fête de la
fédération) est organisée pour célébrer l’anniversaire de la prise de
la Bastille, l’unité de la nation et l’aube d’une ère nouvelle. Au
Champ-de-Mars les délégués des gardes nationales, les députés et
la famille royale prêtent serment de fidélité « à la nation, à la loi, au
roi ».
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
Mais le nouveau régime n’est pas accepté par tous. En effet,
dès 1789, beaucoup de nobles ont alors quitté le pays : c’est
l’Émigration. En parallèle le Pape condamne la Constitution
civile du clergé, provoquant une division parmi les prêtres et
la population. Le roi qui n’a accepté qu’a regret le processus
révolutionnaire tente de s’enfuir (21 juin 1791), avant d’être
arrêté à Varennes. Cet événement aggrave les divisions
politiques entre les partisans du roi et ceux qui réclament
désormais l’instauration d’une république.
A. La rupture révolutionnaire (1789 - 1792)
À ces divisions s’ajoutent des tensions avec les monarchies
étrangères qui débouchent en avril 1792 sur la déclaration de
guerre à l’Autriche. Les premières défaites et l’invasion du
territoire provoquent la panique. l’hostilité au roi grandit, on le
soupçonne de soutenir les Autrichiens. Le 10 août 1792, une
insurrection éclate ; le palais des tuileries est envahi par les
sans-culottes et les fédérés, le roi, accusé de trahison, est
arrêté et emprisonné avec sa famille et annonce l’élection
d’une nouvelle Assemblée, la Convention, au suffrage
universel masculin.
B. La République en échec: la nation déchirée (1792 – 1799)
1. Les débuts de la République, 1792 – 1793
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)

a) Le consulat (1799 – 1804) : une république autoritaire


La nouvelle constitution suite au coup d’État conserve la République
et ses symboles (drapeau, calendrier, Marseillaise). Mais c’est régime
autoritaire : le premier Consul, Bonaparte, chef de l’exécutif, à
l’initiative des lois et des pouvoirs étendus. Divisé en deux
assemblées, le pouvoir législatif est affaibli : l’une, le Tribunat, discute
des lois, l’autre, le corps législatif, les vote.
Le suffrage universel masculin est rétabli mais encadré : les 6
millions de citoyens ne font en effet que voter pour des listes,
généralement de riches propriétaires , dans lesquelles Bonaparte choisit
ceux qui seront membres des Assemblées. Les citoyens parfois aussi
appelés à se prononcer sur des plébiscites, comme celui sur la nouvelle
Constitution en 1799.
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)

Bonaparte s’appuie sur des administrations étroitement


dépendantes de l’exécutif, les préfets, en particulier, nommés par
le premier consul à la tête de chaque département, apparaissent
comme la cheville ouvrière de ses reformes. Ils ont une mission
très large : ils représentent l’État, encouragent les activités
économiques, établissent des statistiques et des rapports sur la
population de leur département.
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)
b) L’œuvre de réorganisation de la société
Pour favoriser la prospérité et la stabilité, un établissement de crédit est fondé
en 1800 (28 nivôse an VIII), la Banque de France, puis une nouvelle monnaie
est créée, le franc germinal (1802). Pour former des élites compétentes et
dociles d’officiers et de fonctionnaires, les lycées publics sont institués en
1802. Enfin la légion d’honneur récompense ceux qui ont montré leur
dévouement à l’État et permet à Bonaparte de s’attacher l’élite de la nation.
L’œuvre d’unification des lois civiles est une réalisation fondamentale du
Consulat, à laquelle ont participé des juristes éminents, et Bonaparte lui-même.
Le Code civil (1804) fixe durablement les bases des relations sociales. Il
confirme les conquêtes révolutionnaires (l’égalité, la propriété), mais impose
aussi une conception très autoritaire de la famille et des relations dans le
travail. Il établit des règles juridiques claire entre les individus et communes à
tous.
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)

Bonaparte mène une politique de réconciliation nationale. Pour


réconcilier les catholiques avec l’État et les rallier au régime,
Bonaparte signe en 1801 un Concordat avec le Pape Pie VII. La
liberté de culte est garantie et le catholicisme est reconnu comme
la « religion de la grande majorité des Français ». Désormais, les
membres du clergé doivent prêter serment de fidélité à l’État qui
les rémunère
Après la pacification intérieure, le traité d’Amiens de 1802
ramène la paix en Europe. Mais dans les colonies, le rétablisse-
ment de l’esclavage provoque de nouvelles révoltes, et en 1804 les
Français doivent quitter Haïti, devenue indépendante.
« Le premier baiser depuis dix ans ! ou la rencontre
entre Britannia et le Citoyen français. »
Le Citoyen français : « Madame, permettez-moi de
témoigner de ma profonde estime envers votre
charmante personne et de sceller sur vos lèvres
divines mon attachement éternel ! » Britannia : «
Monsieur, vous êtes un gentleman vraiment bien
élevé ! Bien que vous me fassiez rougir, vous
embrassez si délicatement que je ne puis rien vous
refuser, même si j'étais certaine que vous me
tromperiez encore ! ». Caricature de James Gillray
(1er janvier 1803).
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)
c) L’Empire (1804 – 1814)
En 1804, la proclamation de l’empire puis le sacre changent la nature du
régime en instaurant une nouvelle dynastie, les Bonaparte. Entouré des fastes
de la vie de cour, l’empereur s’appuie sur une élite sociale de la propriété et
des talents qu’il distingue par de nouveaux titres de noblesse. Proscrivant tout
débat politique, il consolide son pouvoir personnel autoritaire. Si Napoléon
s’engage par le serment du sacre à maintenir l’égalité et les libertés, la société
est en réalité soumise à une stricte hiérarchisation et une surveillance
policière omniprésente.
La Révolution, ses valeurs de liberté et d’égalité ont d’abord suscité
l’enthousiasme dans une grande partie de l’Europe à partie de 1792, la guerre
présentée comme une lutte contre les rois, a même abouti à la formation de
Républiques sœurs (1795 – 1799), associées à la France érigée en modèle.
Mais cette fraternité révolutionnaire est éphémère car les réquisitions et les
pillages rendent la présence française impopulaire. À partir du Consulat,
cette oppression entraîne des résistances croissantes, malgré la diffusion du
code civil.
C. Du Consulat à l’Empire (1799 - 1815)

L’influence française inquiète les cours européennes, notamment


l’Angleterre, l’adversaire irréductible que Napoléon pense pouvoir
asphyxier économiquement. La guerre reprend en 1805 et, par des
campagnes militaires victorieuses (Austerlitz 1805), l’Empereur
redessine la carte de l’Europe : les annexions et les alliances doivent
rendre efficace le blocus continental contre l’Angleterre. Cette
hégémonie ainsi les coûts humains et matériels de la guerre créent
partout une hostilité croissante. L’échec de l’effroyable campagne de
Russie en 1812 marque un tournant : les européens se soulèvent contre
Napoléon, sa défaite militaire devient une défaite politique, et il abdique
en avril 1814.

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