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UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN


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~ L'Harmattan, 1999
ISBN: 2-7384-8061-6
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Gérard GERTOUX

UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN

Un Nom Encens

L'Harmattan L'Harmattan Inc.


5-7, rue de l'École Polytechnique 55, rue Saint-Jacques
75005 Paris - FRANCE Montréal (Qc) - CANADA H2Y IK9
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Je tiens tout d'abord à remercier les personnes dont les


noms suivent pour les précieux encouragements qu'elles m'ont
exprimés. C'est avec grand plaisir que je. les cite en précisant
toutefois qu'ils ne constituent en aucune façon une caution sur
J'ensemble des conclusions de mes travaux de recherche.

Il André Chouraqui (bibliste et traducteur) m'a personnellement


félicité pour ce travail qu'il a estimé très sérieux sur un sujet aussi
important. Il l'a cité dans son livre intitulé Moïse (p. 161).

Il Henri Cazelles (Directeur de l'Institut Catholique de Paris): «Je


vous remercie vivement de m'avoir envoyé votre "ln Fame only?"
d'une grande richesse de documentation. Je vais le déposer à la
Bibliothèque Biblique pour le plus grand profit des chercheurs...
Avec mes félicitations et remerciements.»

Il Edward Lipinski (professeur, exégète à la Katholieke


Universiteit Leuven): «Je tiens à vous remercier pour cet envoi et à
vous féliciter pour le travail consciencieux dont cette recherche fait
preuve. Je ne manquerai pas d'en faire usage si je reviens un jour
à ce sujet.»

Il Shelomo Morag (professeur à The Hebrew University of


Jerusalem): «The study is full of important evidence and gives a
good survey of the research.»

Il Daniel Faivre (professeur à l'Université de Franche-Comté,


CNRS): «Mon premier sentiment est très positif. Il s'agit d'un
impressionnant travail d'érudition sur le Tétragramme, qui dépasse
largement les analyses que j'ai développées dans mon dernier
ouvrage.»

Il Mireille Hadas Lebel (professeur à l'Université de Paris IV


Sorbonne): «Je suis impressionnée par le fait que le tétragramme
écrit en hiéroglyphes se prononce Yehua... Votre étude est si dense
et si riche qu'elle mériterait que je la relise de plus près.»

Il Marguerite Hari (professeur à l'Université de Paris IV


Sorbonne, traductrice et éditrice de la Bible d'Alexandrie): «Votre
envoi me remplit d'admiration... Encore une fois toutes mes
félicitations .»
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Il Jacques Duquesne (écrivain bi~lique): «En matière de


prononciation du tétragramme: je ne possède pas, sur ce sujet, une
érudition comparable à la vôtre. Mais votre démonstration me
paraît tout à fait convaincante et je suis très heureux d'en avoir
pris connaissance.»

Il Rabbin Josy Eisenberg (écrivain et animateur de l'émission "La


Source de Vien): «Je tiens à vous dire que je partage entièrement
votre sentiment. Il y a eu trop d'erreurs couramment véhiculées à
propos du Tétragramme.»

Il Jean Bottéro (écrivain et directeur d'étude en assyriologie):


«Vous m'avez l'air à lafois très informé et très exigeant: vous vous
en sortirez et nous ferez un beau travail, qui m'apprendra
beaucoup de choses! ... Vous avez un beau sujet de travail:
j'aimerais bien voir paraître et lire votre thèse. C'est peut-être vous
qui résoudrez les énigmes.»

Arrivé au terme de la présente étude, le lecteur constatera


qu'on peut la résumer en une seule et simple proposition: Le
Tétragramme YHWH est le nom propre de Dieu. Sa lecture ne
présente aucune difficulté puisqu'il se lit «comme il s'écrit» selon
les mots mêmes du grand Maïmonide.
Pour parvenir à comprendre cette vérité simple et
élémentaire, il fallait toutefois passer au crible les innombrables
erreurs qui se sont accumulées sur ce sujet depuis au moins vingt
siècles. Cela m'a conduit à entrer dans des questions linguistiques
parfois très techniques que le lecteur non spécialisé pourrait
redouter. J'ai donc annexé un lexique explicitant quelques notions
essentielles à une bonne compréhension du cheminement suivi et
des conclusions tirées.
~ En outre, les parties les plus techniques ont été placées entre
deux paires de ciseaux pour les signaler au lecteur non spécialiste
afin qu'il puisse les passer (s'il le souhaite) notamment lors d'une
première lecture rapide. ~
~ Pour aider le lecteur lors du cheminement de l'historique,
certains paragraphes ont été balisés par un pictogramme en forme
d'index.
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Le premier cadeau que vous ayez reçu: votre nom. Le


dernier souvenir qui restera longtemps après vous, gravé sur la
pierre: votre nom. Un chèque non signé ne vaut rien; votre nom est --'

donc vraiment important, n'est-ce pas? Affectivement c'est sûr;


lorsqu'on veut connaître quelqu'un, l~ première question n'est-elle
pas: "Comment vous appelez-vous?" Cette évidence, pourtant,
certains la refusent à Dieu.

Or, Dieu a un nom; la Bible l'affirme et toutes les religions


en conviennent; alors pourquoi si peu de personnes le connaissent?
En général, les religieux rétorquent que, soit ce nom est trop sacré
pour être utilisé, soit Dieu veut le cacher, ou soit cela est sans
importance. Cependant, dans la Bible, le seul personnage religieux
qui refuse de façon systématique d'utiliser le Nom est Satan le
Diable. Lorsque Jésus discuta avec Satan, la discussion est édifiante,
Jésus n'utilisa que le Nom, et Satan que le titre anonyme "Dieu" (Mt
4: 1-11 )00. Cet antagonisme n'est pas nouveau entre ceux qui évitent
le nom de Dieu (Ir 23:27) et ceux qui acceptent de l'utiliser (Jr
10:25). Connaître le nom de Dieu est même indispensable pour
notre salut d'après la Bible (JI 2:32; Rm 10:13).

Tout d'abord, l'écriture du nom de Dieu ne pose aucun


problème: il s'agit du nom de quatre lettres YHWH appelé le
Tétragramme. Comment prononcer un tel nom? Les dictionnaires
ou les encyclopédies indiquent que Yahvé (ou Yahweh) est une
vocalisation incertaine, et que Jéhovah est un barbarisme provenant
d'une mauvaise lecture. Aussi incroyable que cela puisse paraître,
cette dernière affirmation est délibérément fausse. Cette grossière
erreur fut pourtant dénoncée par des hébraïsants de toutes
confessions, y compris avec l'appui du Vatican (Congrégation de la
propagande), mais sans résultat.
Ce nom YHWH se lit sans difficulté puisqu'il se prononce
comme il s'écrit, ou selon ses lettres pour reprendre l'expression du
Talmud. En effet, jusqu'en 70 de notre ère, les grands prêtres
lisaient le jour du Yom Kippour la bénédiction de Nombres 6:24-
27 en prononçant YHWH selon ses lettres, c'est-à-dire comme il
s'écrit. En fait, ce nom est même le plus facile à lire de toute la
Bible puisqu'il est constitué de quatre voyelles comme le rappelle
Flavius Josèphe. La question de savoir quelles étaient les voyelles
accompagnant les lettres YHWH est absurde, car les voyelles
massorétiques ne sont apparues au plus tôt qu'au sixième siècle de
notre ère. Avant cela, les noms hébreux étaient vocalisés grâce aux
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trois lettres Y, W, H, comme les écrits de Qumrân l'ont largement


confirmé. La lettre Y était lue I (ou É), 'la lettre W: Û (ou 0), et la
lettre H: A à la fin des mots. Par exemple, YH se lit lA, YUWDH se
lit littéralement IHÛDA (Juda). Si le nom ne comportait pas de
lettres voyelles, on insérait alors }a voyelle a; ainsi YSHQ est lu:
ISaHaQ (Isaac), YRWSL YM: IRUSaLIM (Jérusalem); etc. Le nom
YHWH se lisait donc IHÛA (Ihoua). Pour mieux entendre la lettre
H (quasi inaudible) on pouvait lui adjoindre un e muet, ainsi le
nom YUWDH lu littéralement I-H-Û-D-A devient alors I-eH-Û-D-
A, soit l'équivalent exact du nom hébreu Yehoudah. Cette légère
amélioration donne pour le nom YUWH la prononciation I-eH-Û-
A (Iehoua), l'équivalent de la ponctuation massorétique YeHoWaH.
Cette coïncidence est remarquable; providentielle si l'on croit que
Dieu a veillé sur son Nom (visiblement à l'insu des copistes!).

Jésus a-t-il prononcé le Nom? Ayant dénoncé


vigoureusement les traditions humaines qui annulaient les
prescriptions divines (Mt 15:3), il paraît invraisemblable qu'il se
soit plié à cette coutume non biblique de ne pas prononcer le Nom.
Lorsqu'il a lu dans une synagogue (Le 4: 16-20)00 une partie du
texte d'Isaïe (Is 61: 1), il a rencontré le Tétragramme. Même s'il
s'agissait du texte de la Septante, cette traduction comportait, à cette
époque, le Nom en hébreu, comme on peut le constater dans toutes
les copies de ce texte datées avant 150. Or, d'après le texte
massorétique, tous les npms théophores à cette époque qui ont une
partie du Tétragramme intégré au début se prononçaient sans
exception YeHO-. Par conséquent, puisque le Tétragramme est le
nom théophore par excellence (sinon l'absurde serait roi), sa
lecture devait être YeHO-aH pour être cohérente avec l'ensemble
des autres noms théophores (car YHWH peut se lire YUW-H).

Tout est dit. Si les contestations sont nombreuses, certaines


paraissant même légitimes, prises dans leur ensemble, elles
constituent un faisceau dont l'objectif est cohérent, faire disparaître
le Nom. Première étape, le nom est-il réellement important?

OODansla traduction de C. Tresmontant (catholique) on lit le nom yhwh, dans


celle de A. Chouraqui (juive) IhvH et dans celle de J.N. Darby (protestante)
*Seigneur, c'est-à-dire Jéhovah d'après la note en Matthieu 1:20.
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Chapitre premier

Le Nom
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13

1.1 La puissance du nom


Le besoin de nommer est fondamental: la nomination
sépare, distingue, rend irremplaçable. Quelle mère oublierait de
donner un nom à son enfant? Ce qui est innommé est rejeté; ce qui
est innommable paraît, en général, ignoble. D'ailleu~s, l'étymologie _

latine de l'ignominie n'est elle pas justement la perte du nom?


Chaque société manifeste dans ce domaine des habitudes et
des besoins variables, avec cependant des constantes. Les êtres
humains et les lieux significatifs 'pour l'homme sont toujours et
partout désignables; ils sont le plus souvent désignés.
Rien n'est plus honteux pour l'homme que la perte du nom,
et rien n'est plus méprisable que les systèmes où les hommes sont
privés de leurs noms. Les communautés forcées (prisons, camps),
où la liberté est niée, commencent par enlever tout nom propre à
leurs membres pour leur assigner un numéro, modifiable,
remplaçable, destructeur de la personnalité. Mais les êtres humains
ne sont pas seuls à requérir ce signe d'identité.
Les lieux où des hommes s'assemblent pour vivre doivent
eux aussi être signalés par des noms. En outre, qu'un être, au sens
le plus large, devienne important pour quelqu'un, et sa nomination
est requise: dans nos cultures, les animaux domestiques ou asservis
(au cirque, par exemple), les navires, les établissements publics,
certaines habitations, reçoivent des noms. Des systèmes
métaphoriques, transférés, peuvent remplir des besoins nouveaux:
des prénoms servent à désigner des camions, des cyclones et même,
horriblement, des engins mortels (ainsi, la bombe d'Hiroshima fut
baptisée Little Boy). Des éléments du langage commun affectés à
un tel repérage peuvent aussi devenir des noms propres, tels les
adjectifs utilisés par les éleveurs pour désigner leurs bêtes
(Blanchette, la Noiraude, etc.) 1.
Dans nos sociétés modernes, l'État reconnaît et impose l'état
civil, le nom de famille. Autrefois, on était plutôt connu par un
surnom, imposé par les origines ou le milieu. C'est encore ce qui se
passe souvent: à l'école, dans un village ou sur le lieu de travail par
exemple. Par opposition, le surnom peut exprimer la façon dont
une personnalité est perçue par l'opinion publique (le fou chantant,
l'ennemi public n° l, etc.).
Pour mettre leur' empreinte sur des populations, les
systèmes totalitaires ont souvent imposé aux individus de changer
de nom. Nous avons des exemples dans l'histoire de Daniel et de
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14 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

ses compagnons. La déchéance d'un bagnard sera totale s'il n'est


plus désigné que par un numéro matricule2.

1.1.1 Le nom est plus qu'une étiquette


Le nom représente la personne. Par mon nom, j'exerce une
autorité (au nom de). En connaissant mon nom, les autres
disposent d'un certain pouvoir sur moi. Ainsi, mon nom ne signifie
pas seulement ma personne physique, mon corps, mes paroles, mes
gestes, mes actions. Il s'applique à tous les prolongements de ma
personnalité.
Jadis, le titre nobiliaire d'une lignée était symbolisé par les
armoiries, apposées sur les grilles des châteaux et sur les portes des
carrosses. Il me suffit d'inscrire mes initiales pour marquer mon
argenterie, mon linge, les bagages qui m'appartiennent.
J'appose ma signature sur un morceau de papier; mon nom
me représente valablement, il suffit à m'engager corps et biens. Le
chèque n'est rien; mon nom lui confère la valeur que je veux lui
donner. J'achète une propriété; mon nom figurera au cadastre sur
la parcelle considérée, souvent longtemps après ma mort. Une lettre
adressée à mon nom est à moi; personne en dehors de moi n'a le
droit de l'ouvrir. Je donne délégation de signature à un fondé de
pouvoir; j'en fais un autre moi-même. J'adhère à un manifeste, je
souscris à un emprunt, j'entre dans une organisation. Dans tous ces
actes, «je donne mon nom», et je confère ainsi une parcelle de mon
autorité. J'ai la propriété littéraire de tout document écrit signé de
moi, et ce droit sera transmis à mes héritiers. On pourrait' continuer
évidemment cette énumération... Il y a une contrepartie.
Tant que vous ignorez mon nom, vous n'avez guère
d'emprise sur moi. Sans état civil, nous n'avons aucun droit, mais
nous n'avons plus d'obligation. Récemment, un homme se
présentait à une maison d'arrêt pour purger la peine de prison
qu'un tribunal lui avait infligée. Il s'est vu refouler, car on lui avait
volé ses papiers en route; on n'avait plus le droit de l'admettre.
Si vous me connaissez uniquement de vue, vous dites bien:
«Je ne connais pas cette personne, je suis incapable de dire
comment elle s'appelle»; vous ne pouvez pas m'appeler. Vous ne
pouvez parler de moi en bien ou en mal. Vous ne pouvez pas me
critiquer, me dénigrer, me dénoncer. II en est tout autrement
quand vous avez réussi à percer le nom «auquel je réponds». Je
suis obligé de répondre, je suis peut-être contraint à répondre de
mes faits et gestes.
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1.1 - LA PUISSANCE DU NOM 15

On n'aime pas à livrer son nom en pâture à la curiosité des


indiscrets. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles certains
abonnés refusent de figurer sur les annuaires téléphoniques.
De plus, «la connaissance d'un nom donne prise sur l'être
qu'il désigne; c'est un des principes de la magie». En effet, les
jeteurs de sorts prononcent dans leurs incantations les noms des
personnes qu'ils prétendent soumettre à leurs maléfices. Les cris de
haine proférés contre des adversaires politiques ou autres lors de
manifestations publiques: «À mort, untel!» montrent des restes de
ces mentalités.
Nous ne pouvons croire que le destin d'un enfant soit lié à
son nom. Il n'y a pas de nom qui porte malheur. Il n'yen a pas qui
attire la chance. Néanmoins, le désir de déposer dans le berceau
d'un nouveau-né un nom favorable est assez naturel. Pensons aux
appellations données à une maison, à un bateau. Elles expriment
en général des vœux de prospérité, de bonheur, d'heureux voyages.
De nombreux lieux-dits de nos campagnes et de nos villes sont
placés, d'une façon analogue, sous le vocable d'un saint patron. Le
nom ne lie pas de façon irrévocable, il exprime un souhait, oriente
dans une direction, place dans une sphère de croyances.
Les religions païennes nous fournissent de nombreux
exemples de noms théophores, c'est-à-dire composés à partir d'un
nom de dieu ou de déesse. Chez les Assyriens, c'est le nom d'Assur
que l'on retroùve dans Assurbanipal; chez les Puniques, il yale
nom de Baal dans Hannibal, etc. Les Babyloniens donnent aux
jeunes Juifs qu'ils déportent le nom de leurs dieux. On les retrouve
dans les vocables Beltéshassar, Méshak, Shadrach, Abed-Nego, dont
Daniel et ses compagnons sont affublés.
La tradition juive, depuis Abraham, est constante. En
passant par la Torah de Moïse, jusqu'à nos jours, les croyants de la
plus ancienne religion monothéiste reconnaissent dans leurs
appellations la souveraineté du Dieu unique. Ni nom de héros ni
nom de saints, pas de patronage humain. Il n'y a pas de dérogation
à ce principe.
Les noms israélites sont composés, soit à partir d'El (dieu)
comme Daniel (Dieu est mon juge), Eliézer (Dieu est secours),
Eliya, etc., soit à partir du Tétragramme YHWH. Du point de vue
biblique, le nom donné à l'enfant est un acte de reconnaissance
envers Dieu qui l'a donné~ ce peut être aussi une prophétie; non
pas un geste superstitieux qui prétendrait lier l'avenir et exorciser le
mauvais sort, mais, dans la foi, un témoignage de confiance en la
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16 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

- direction divine qui doit encourager l'enfant et plus tard l'adulte à


ne pas désespérer dans les moments difficiles.

1.1.2 Le nom dans la Bible3


On peut lire: «Toute famille au ciel et sur la terre doit son
nom.» (Ep 3: 14, 15) Dieu, en effet, a formé le premier couple
humain et a doté Adam et Ève de la faculté d'engendrer des
enfants. On peut donc dire que toutes les familles de la terre lui
doivent leur nom. II est également le Père de sa famille céleste. Et
puisqu'il appelle les étoiles sans nombre par leurs noms (Ps 147:4),
il a aussi attribué un nom aux anges (Jg 13:18; Le 1:19).

1.1.3 Un nom poor exister


Dieu accorda au premier homme le privilège de nommer
les créatures inférieures (Gn 2: 19). Adam leur donna
apparemment des noms descriptifs, comme le suggère le nom
hébreu de certains animaux ou même de certaines plantes: "celle
qui tond" ou "qui coupe" semble s'appliquer à la chenille,
"fouisseur" au renard, "celle qui saute" ou "qui bondit" à l'antilope.
Le nom hébreu de la tourterelle imite manifestement le cri plaintif
de l'oiseau: "tor-r-r tor-r-r." L'expression "celui qui se réveille"
désigne l'amandier, sans doute parce que cet arbre a une floraison
des plus précoces.
Des hommes ont parfois donné leur nom, le nom d'un de
leurs enfants ou celui d'un de leurs ancêtres à un lieu. Caïn, par
exemple, construisit une ville et lui attribua le nom de son fils
Hénoch (Gn 4: 17). Nobah commença à appeler Kenath, la ville
qu'il avait conquise, de son propre nom (Nb 32:42). Après avoir
pris Leschem, les Danites l'appelèrent Dan, du nom de leur ancêtre
(Jos 19:47). Comme ce fut aussi le cas pour des autels (Ex 17: 14-
16), des puits (Gn 26:19-22), des sources (Jg 15:19) et des
monuments (2 S 18: 18), des lieux reçurent souvent un nom en
fonction des événements qui s'y étaient produits. Citons par
exemple Babel (Gn 11:9), Béer-Shéba (Gn 26:29-33), Bethel (Gn
28:10-19), Galéed (Gn 31:44-47), Succoth (Gn 33: 17), Massah et
Meribah (Ex 17:7), etc.
Par ailleurs, des particularités physiques ont été à l'origine
du nom d'un lieu, d'une montagne et d'un fleuve. Les villes de
Gueba et de Guibeah (collines, dans les deux cas) devaient sans
doute leur appellation au fait qu'elles étaient bâties sur des
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1.1 - LA PUISSANCE DU NOM 17

hauteurs. Il semble que le Liban (blanc) tire son nom des nuances
claires de ses versants abrupts et de ses cimes calcaires, à moins
qu'il ne le doive à ses sommets qui sont enneigés pendant la'
majeure partie de l'année. Le Jourdain (descendant) perd
rapidement de l'altitude, d'où probablement son nom. Selon
qu'elles étaient situées près d'un puits, d'une source ou de prairies,
les villes ont souvent reçu des noms comportant le préfixe "en"
(source), "beer" (puits) et "abel" (prairie). D'autres noms de villes
dérivaient de caractéristiques telles que leur étendue, leurs activités
ou leur production: par exemple Bethlehem (maison du pain),
Bethsaïda (maison de pêche), Gath (pressoir) et Bézer (forteresse).
Des lieux ont également reçu des noms d'animaux et de plantes,
souvent des noms composés. Citons entre autres Aiyalôn (endroit
des biches ou des cerfs), En-Guédi (source du chevreau), En-
Églaim (source des deux veaux), Beth-Hoglah (maison de la
perdrix), Acrabbim (scorpions), Baal-Tamar (propriétaire du
palmier) et En-Tappuah (source des pommiers), "Beth" (maison),
"baal" (maître, propriétaire) et "kiriath" (ville) forment souvent la
première partie des noms composés. Ainsi, pour un Sémite (mot
qui vient de Shém, c'est-à-dire "nom") il en résulte un principe:
« Tout ce qui existe porte un nom, et
tout ce qui a un nom porte un sens.»
Cette notion se dégage dès les premières pages de la Bible
(Gn 1:5, 8, 10). Si cela est vrai pour les choses et les animaux, à
plus forte raison pour les créatures intelligentes.

1. 1.4 Donner et recevoir on nom


Dans les premiers temps de l'histoire biblique, les enfants
recevaient un nom à leur naissance. Toutefois, par la suite, les
garçons hébreux ne furent nommés qu'au moment de leur
circoncision, le huitième jour (Lc 1:59; 2:21). C'était
habituellement le père ou la mère qui donnait un nom à l'enfant
(Gn 4:25; 5:29; 16: 15; 19:37, 38; 29:32). Mais il y eut une
exception notable à cette règle dans le cas du fils que Boaz eut de
Ruth: ce furent les voisines de Naomi, belle-mère de Ruth, qui
appelèrent le garçon Obed (serviteur ou celui qui sert) (Rt 4: 13-
17). Dans certains cas, de~ parents furent guidés par Dieu dans le
choix du nom de leur enfant. Parmi ceux qui reçurent leur nom de
cette façon, citons Ismael "Dieu entend" (Gn 16: Il), Isaac "rire"
(Gn 17:19), Salomon "pacifique" (1 Ch 22:9), etc.
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18 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Le nom d'un enfant avait souvent un rapport avec les


circonstances de sa n3:issance, ou avec les sentiments qui animaient
son père ou sa mère à ce moment-là (Gn 29:32 à 30:13, 17-20, 22-
24; 35:18; 41:51,52; Ex 2:22; 1 S 1:20; 4:20-22). Ève appela son
premier-né Caïn (acquisition ou chose acquise), car elle dit: «J'ai
produit un homme avec l'aide de Dieu.» (Gn 4: 1). Au fils qui lui
naquit après le meurtre d'Abel, Ève donna le nom de Seth (nommé,
substitué) parce qu'elle considérait qu'il remplacerait son frère (Gn
4:25). Isaac appela le plus jeune de ses jumeaux du nom de Jacob
(qui supplante ou qui tient le talon) du fait que le garçon tenait en
naissant le talon d'Ésaü, son frère (Gn 25:26). Parfois, c'était
l'apparence du bébé à sa naissance qui lui valait son nom. Ainsi, le
premier-né d'Isaac fut appelé Ésaü (velu) parce qu'il vint au monde
avec un système pileux très développé (Gn 25:25).
Les noms d'enfants comportaient souvent le mot El (Dieu)
ou une abréviation du nom divin. Ils exprimaient parfois l'espoir
des parents, la gratitude dont les remplissait la naissance d'une
postérité ou les remerciements qu'ils adressaient à Dieu. Citons
Yehdeyahou (que Yah lui-même donne la joie), Elnathan (Dieu a
donné), Yônathan (YÔ a donné), Yehôzabad (Yehô a fait cadeau),
Eldad (Dieu a aimé), Abdie) (serviteur de Dieu), etc.
Ainsi que l'indique la répétition de certains noms dans les
listes généalogiques, il semble que l'habitude ait été prise de donner
à un enfant le nom d'un parent (1 Ch 6:9-36). Voilà pourquoi les
parents et les connaissances d'Élisabeth objectèrent lorsque celle-ci
leur révéla que son bébé s'appellerait Jean (Le 1:61).
Les noms d'animaux ou de plantes ont également inspiré
des noms de personnes, tels Déborah (abeille), Dorcas ou Tabitha
(gazelle), Yona (colombe), Rachel (brebis), Schaphan (blaireau des
rochers), Tamar (palmier) et Suzanne (lis).
Ainsi, plus qu'aujourd'hui, où le nom est choisi pour le son
agréable qu'il produit, dans le passé le choix était fonction du sens
agréable qu'il portait.

1.1.5 Changer de nom


Au premier siècle de notre ère, il n'était pas rare pour un
Juif de porter à la fois un nom hébreu ou araméen et un nom latin
ou grec; c'était souvent le cas des Juifs qui vivaient hors de
Palestine ou dans des villes à populations juive et non juive
mélangées. C'est sans doute la raison pour laquelle Dorcas était
appelée Tabitha, et l'apôtre Paul Saul. On considérait parfois le
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1.1 - LA PUISSANCE DU NOM 19

nom comme le reflet de la personnalité ou des tendances de celui


qui le portait. Au sujet de son frère, Ésaü déclara: «N'est-ce pas
pour cela qu'on l'appelle du nom de Jacob (qui supplante), en ce
qu'il devait me supplanter ces deux fois? Mon droit d'aînesse, il l'a
déjà pris, et voilà que maintenant il a pris ma bénédiction!» (Gn
27:36). À propos de son mari, Abigail fit cette remarque: «Tel son
nom, tel lui-même. Nabal ["insensé"] est son nom, et il y a chez lui
de la déraison.» (1 S 25:25). Estimant que son nom ne lui
convenait plus après tous les malheurs qui l'avaient accablée,
Naomi demanda: «Ne m'appelez pas Naomi ["mon délice"].
Appelez-moi Mara ["amère"], car le Tout-Puissant a rendu les
choses très amères pour moi.» (Rt 1:20).
Quelquefois, pour une raison bien précise, on changeait le
nom d'une personne ou on lui donnait un nom supplémentaire.
Alors qu'elle se mourait en couches, Rachel appela son nouveau-né
Ben-Oni (fils de ma douleur), mais son mari Jacob, lui, choisit le
nom de Benjamin (fils de la droite) (Gn 35:16-19).
Dieu changea le nom d'Abram (père d'exaltation ou père
élevé) en celui d'Abraham (père d'une foule de nations), et le nom
de Sarai (a lutté Y[ah]) en Sara (princesse), ces deux nouveaux
noms étant prophétiques (Gn 17:5, 6, 15, 16). Devant la
persévérance avec laquelle Jacob lutta avec un ange, Dieu lui dit:
«Tu ne seras plus appelé du nom de Jacob, mais Israël [Dieu lutte,
ou qui lutte avec Dieu], car tu as lutté avec Dieu et avec les
hommes, si bien qu'à la fin tu l'as emporté.» (Gn 32:28). Ce
changement de nom était un gage de la bénédiction divine et il fut
confirmé ultérieurement (Gn 35: 10). Le "nom nouveau" dont les
Écritures parlent en termes prophétiques semble donc être un nom
qui représente bien celui qui le porte (Is 62:2; 65: 15; Ap 3: 12).
Une personne qui était élevée à une haute position
gouvernementale ou à qui l'on octroyait un privilège spécial
recevait parfois un nouveau nom. Du fait que ce nom lui était
donné par un supérieur hiérarchique, il pouvait aussi représenter la
soumission de celui qui le recevait à celui qui l'attribuait. Lorsqu'il
devint administrateur des réserves de vivres de l'Égypte, Joseph
reçut le nom de Tsaphnath-Panéah (Gn 41:44, 45). Quand le
pharaon Nécoh établit Éliakim comme roi vassal en Juda, il
changea son nom en celui de Yehôiakim (2 R 23:34).
Nebucadnezzar fit la même chose lorsqu'il désigna Mattanyah à
une position de vassal: il changea son nom en celui de Sédécias (2
R 24: 17). Daniel et ses trois compagnons hébreux, Hananyah,
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20 UN HISTORIQUE--DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Mischael et Azaryah, se virent attribuer des noms babyloniens


après avoir été choisis pour recevoir 'une formation spéciale à
Babylone (Dn 1:3-7; 4:8).

1.1.6 Se faire un nom, avoir du renom


Dans les Écritures, le mot "nom" emporte l'idée de "re-nom-
mée" ou de réputation. Faire une mauvaise renommée à quelqu'un,
c'était le calomnier, salir sa réputation (Dt 22: 19). L'homme dont le
"nom était rejeté comme méchant" avait terni sa bonne réputation
(Le 6:22). Voulant se faire un nom célèbre au mépris de Dieu, les
hommes entreprirent après le déluge de bâtir une tour et une ville
(Gn Il :3, 4). Plus tard, Dieu promit à Abram (Abraham) de rendre
son nom grand s'il quittait son pays et sa parenté pour aller dans le
lieu qu'il lui indiquerait (Gn 12:1,2). Cette promesse s'est réalisée,
comme le prouve le fait qu'à ce jour peu d'hommes du passé
égalent Abraham en renommée, surtout pour avoir exercé une foi
remarquable. Dans le même ordre d'idées, Dieu fit un grand nom à
David en le bénissant et en lui accordant la victoire sur les ennemis
d'Israël (1 S 18:30; 2 S 7:9).
À sa naissance, un individu n'a pas de réputation, et son
nom n'a donc guère plus de valeur qu'une étiquette. C'est pourquoi
Ecclésiaste 7: 1 déclare: «Mieux vaut un nom que la bonne huile, et
le jour de la mort que le jour de la naissance.» Ce n'est pas à la
naissance, mais dans le cours de la vie, que le nom d'une personne
prend - sa pleine signification parce qu'il l'identifie alors, soit à
quelqu'un qui pratique la justice, soit à quelqu'un qui se livre à la
méchanceté (Pr 22:1). Notion qui reste vraie en grec (Ap 3:1).
Salomon, à qui on avait souhaité que son nom soit rendu
"plus splendide" que le nom de David, mourut avec la réputation
d'avoir abandonné le culte pur (1 R 1:47; 11:6,9-11). Ainsi, un
nom peut se révéler comme de la bonne huile (Ct 1:3).
En revanche, "le nom des méchants pourrira" ou deviendra
une puanteur détestable (Pr 10:7). Pour cette raison, un beau nom
"est préférable à d'abondantes richesses" (Pr 22: 1).

1.1.7 Un nom inscrit 00 effacé?

Le nom de celui qui mourait sans avoir engendré de


descendant mâle était en quelque sorte "retranché" (Nb 27:4; 2 S
18: 18). Aussi, la disposition du lévirat prévue par la loi mosaïque
avait-elle pour rôle de perpétuer le nom du défunt (Dt 25:5, 6).
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1.1 - LA PUISSANCE DU NOM 21

Inversement, l'anéantissement d'une nation, d'un peuple ou d'une


famille entraînait l'effacement de son nom (Dt 7:24; 9: 14; Jos 7:9;
1 S 24: 21; Ps 9:5).
On comprend ainsi qu'un homme sans nom symbolise un
insensé (Jb 30:8) ou, pire, un ennemi à retrancher (Ps 41:5). De la
même façon, dans sa controverse avec les faux dieux, le vrai Dieu
annonce qu'il détruira et retranchera le nom même de leurs idoles
(Dt 12:3;Os2:17; Za 13:2) pour les faire disparaître (Is 2:18; Jos
23:7). Par contre, Dieu désire que l'on connaisse son nom, et c'est
pour cette raison principale qu'il s'opposa à Pharaon (Ex 9: 16; Rm
9: 17).
Figurément parlant, Dieu inscrit des noms dans le livre de
vie depuis la "fondation du monde" (Ap 17:8). Il semble bien que
le nom d'Abel ait été le premier à être inscrit dans ce rouleau
symbolique. Toutefois, ceux dont le nom est écrit dans le rouleau
de vie n'ont pas été prédestinés par Dieu à recevoir son approbation
et la vie (Is 56:5). En effet, les Écritures révèlent qu'un nom peut
être "effacé du livre de vie". Apparemment le nom d'une personne
n'y est inscrit qu'à partir du moment où elle commence à servir
Dieu, et il n'y reste que si elle lui demeure fidèle (Ap 3:5; 17:8; Ex
32:32, 33).

1.1.8 Agir "au nom de"


Parler ou agir "au nom" de quelqu'un, c'est être son
représentant (Ex 5:23; Dt 10:8; 18:5, 7, 19-22; 1 S 17:45; 1 R
21:8; Est 3:12; 8:8, 10; 1 Co 1:12, 13) et aussi assumer les
conséquences de cette représentation (Mt 24:9; Le 9:48; Ap 2:3).
Pareillement, recevoir une personne qui vient au nom de quelqu'un,
c'est reconnaître celui qui l'envoie. Par conséquent, accueillir un
prophète "en sa qualité de prophète" signifie le recevoir en raison
de ce qu'il est (Mt 10:41). Être baptisé "au nom du Père et du Fils
et de l'esprit saint" (Mt 28: 19) suppose que l'on reconnaît surtout
l'autorité liée au nom plutôt que le nom lui-même, car il n'est pas
dit "aux noms" mais "au nom".

En conséquence, agir au nom de quelqu'un implique avoir


reçu le nom (aujourd'hui on dirait la signature ou la procuration),
ce qui permet d'utiliser l'autorité du mandataire (Lc 10:17), à
condition que cela soit légal (Mc 9:38, 39; Ac 8:16; 19:13-16).
Cependant, cette délégation peut amener des ambiguïtés sur
la paternité de la signature. Si, par exemple, il est facile de
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22 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN~ UN NOM ENCENS

comprendre dans les passages suivants: «c'est Salomon qui lui a


bâti une maison», «Jéroboam bâtit Sichem», «Caïn bâtit une ville"
(Ac 7:47; 1 R 12:25; Gn 4: 17) que les per~onnages cités sont
seulement responsables d'une action qu'ils n'ont pas accomplie, il
arrive que la confusion entre le mandataire et le mandaté soit
paradoxale, comme dans le cas de Jacob qui a acheté le droit
d'aînesse à Ésaü et peut légalement dire à son père: «Je suis Ésaü.»
(Gn 27:19; 25:33). De même les cas suivants: la mère de Jacques et
Jean (Mt 20:20; Mc 10.35), les anciens des Juifs envoyés par
l'officier (Mt 8:5; Le 7:3), et plus généralement les anges envoyés
par Dieu qui parlent à la première personne (Ga 3:19; Ac 7:38,53;
He 2:2).
.Ainsi, on confond l'ange et Jéhovah lui-même (Gn 16:7,
13), ce qui est légitime si l'ange est le porte-parole de Dieu (Jn
1:14; Gn 18:2,22,33; 19:1); mais pour éviter la confusion entre la
représentation juridique et l'identification avec Dieu, l'ange porte-
parole refusera de donner son nom (Gn 32:29; Jg 13:18), alors que
les autres anges accepteront (Dn 8:16; 10:13).

1.1.9 Noms d'anges

La Bible ne mentionne que le nom de deux anges: Gabriel


(un brave de Dieu) et Michel (qui [est] comme Dieu?) (Lc 1:26;
Jude 9). Peut-être pour éviter d'être l'objet d'une vénération ou
d'honneurs excessifs, des anges cachèrent parfois leur identité à
ceux à qui ils apparurent (Gn 32:29; Jg 13:17, 18).
Comme pour les humains, le nom des anges peut être
changé: ainsi l'ange de l'abîme (Ap 9: Il) devient Abaddon ou
Apollyon (destruction).

1. 1. IOLe nom divin

Celui qui a donné à l'homme le pouvoir de nommer s'est


réservé le droit de se nommer, le droit de se présenter. Il a même
pris le risque inouï que son ,nom soit déformé, bafoué, blasphémé
et même, ce qui est le comble, oublié!
Nous sommes incités à chercher ce Nom dont il est dit:
«Mon peuple connaîtra mon nom.» (Is 52:6) et: «Le nom de
YHWH est une tour forte: le juste y court et reçoit protection.» (Pr
18:10).
Est-il réellement possible de connaître ce nom, et qu'est-ce
que cette connaissance implique?
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23

1.2 Connaître le nom de Dieu


Connaître le Nom implique beaucoup plus que connaître
l'existence de sa graphie ou de sa prononciation (2 Ch 6:33). En
fait, cela signifie connaître la personne même de Dieu: son dessein,
ses activités et ses qualités, autant de choses que nous révèle sa
Parole (1 R 8:41-43; 9:3, 7; Ne 9:10). C'est donc plus qu'une
simple connaissance intellectuelle. C'est ce que montre le cas de
Moïse, un homme que Dieu "connaissait de nom", autrement dit
qu'il connaissait intimement (Ex 33: 12). Moïse eut le privilège de
voir une manifestation de la gloire de Dieu et d'entendre
"proclamer le nom de YHWH". II ne s'agissait pas simplement de la
répétition de ce nom, mais de la proclamation en sa présence des
attributs et des actions de Dieu (Ex 34:6, 7). Pareillement, le chant
de Moïse, qui contient ces paroles: «Car je proclamerai le nom de
YHWH», raconte les rapports que Dieu entretenait avec Israël et
décrit sa personnalité (Dt 32:3-44).
Sur terre, Jésus Christ "manifesta le nom de son Père" à ses
disciples (Jn 17:6, 26). Bien que connaissant déjà ce nom et étant
familiarisés avec les œuvres de Dieu consignées dans les Écritures
hébraïques, ces disciples parvinrent à une connaissance bien plus
approfondie de Dieu grâce à celui "qui est auprès du Père, à la
.

place dite du sein" (Jn 1:18).


De même, lorsque Dieu annonça à Moïse qu'il n'avait pas
fait connaître son nom à ses ancêtres en Exode 6:3, Moïse
comprenait que Dieu n'avait pas fait connaître son renom (pour la
traduction de "nom" par "renom", voir Gn 6:4; Nb 16:2; Ap 3:1;
etc.) ou sa réputation à ses ancêtres (Ex 9: 16; 2 S 7:23; Ne 9: 10). Il
ne s'agissait pas de la vocalisation de ce nom, car cela est contraire
au contexte. D'ailleurs, les Égyptiens vont apprendre eux aussi à
connaître ce nom (Ex 7:5), et il est clair qu'il ne s'agissait pas de la
prononciation, que Pharaon connaissait (Ex 5:2).
Il est donc surprenant de constater que de nombreux
commentateurs, mais pas tous4, comprennent le passage d'Exode
6:3 de façon littérale, c'est-à-dire comme concernant la
prononciation. Pourtant, lorsqu'une personne utilise l'expression "il
va voir comment je m'appelle" ou encore "il va apprendre à me
connaître", il serait naïf de croire que cette personne désire
simplement donner des cours de diction. En fait, même
aujourd'hui, on utilise l'expression "appeler les choses par leur
nom" pour signifier "être bien clair sur ces choses".
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24 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

~ [La compréhension littérale du texte implique que le Nom


n'était pas connu avant Moïse, mais cela contredit la Bible (Gn .

4:26). Cette conception est à la base de la théorie des sources,


élohistes pour les textes où il yale nom "èlohim", et jéhovistes
pour les textes où il yale nom "Jéhovah" pour désigner Dieu, les
scribes ayant "habilement" fusionné ces deux sources.] ~

1.2.1 Connaître de nom


Enfin, ne pas connaître un nom, c'est refuser de reconnaître
la position du mandaté (Ac 19:15) ou du mandataire. Par exemple
Nabal dit: «Qui est David?» (1 S 25: 10) ou Pharaon dit: «Qui est
Jéhovah?» (Ex 5:2). Il ne s'agit pas ici d'apprendre à connaître une
prononciation! De ce qui 'précède, il ressort que seuls les serviteurs
obéissants de Dieu connaissent vraiment son nom (Is 52:6). C'est à
ce genre de personnes-là que s'applique Psaume 91: 14: «Je le
protégerai, parce qu'il a connu mon nom.» Ce n'est pas que ce nom
renferme en lui-même des pouvoirs magiques, mais plutôt que
Celui qu'il désigne peut protéger ceux qui se sont voués à lui.
Le nom de Dieu représente donc sa personne même (Ps
75: 1; Is 30:27). Voilà pourquoi le livre des Proverbes déclare: «Le
nom de YHWH est une tour forte. Le juste y court et reçoit
protection.» (Pr 18: 10). Pareillement, aimer son nom (Ps 5: Il),
exécuter des mélodies pour lui (Ps 7:17), l'invoquer (Gn 12:8), lui
rendre grâce (1 Ch 16:35), jurer par lui (Dt 6:13), s'en souvenir (Ps
119:55), le craindre (Ps 61:5; Dt 28:58), te rechercher (Ps 83:16),
mettre sa confiance en lui (Ps 33:21), l'exalter (Ps 34:3) et espérer
en lui (Ps 52:9), c'est faire tout cela par rapport à Dieu lui-même.

1.2.2 Invoquer le Nom


Un nom particulier pouvait être "invoqué" sur une
personne, une ville ou un édifice. Lorsque Jacob adopta les fils de
Joseph, il déclara: «Que soit invoqué sur eux mon nom, et le nom
de mes pères, Abraham et Isaac.» (Gn 48:16; Is 4:1; 44:5). Le nom
de Dieu était invoqué sur les Israélites, ce qui indiquait qu'ils
constituaient son peuple (Dt 28:10; 2 Ch 7:14; Is 43:7; 63:19; On
9:19). Yôab choisit de ne pas parachever la prise de la ville de
Rabbah afin que son nom ne soit pas invoqué sur elle, autrement
dit pour que cette action ne soit pas portée à son crédit (2 S 12:28).
Invoquer le Nom signifiait donc demander une protection ou une
part de gloire (Rm 10:13; Ac 2:21; JI 2:32).
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1.2 - CONNAiTRE LE NOM DE DIEU 25

1.2.3 Lorsque le Nom est placé sur ou dans


En réponse à l'invocation, Dieu, pour accorder protection et
gloire (comme le fait encore aujourd'hui un mari envers sa femme
et ses enfants), plaçait son nom sur ses serviteurs (Nb 6:27; Is 43:7;
Ac 15:14). Dieu mit aussi son nom sur Jérusalem et sur son temple,
montrant par là qu'il les reconnaissait comme le centre de son culte
(2 R 21:4, 7). Le principe est le même pour les autres noms que
Dieu place sur des personnes ou des édifices (Ap 3:12; 21:14). En
conséquence, celui qui reçoit ce nom possède une certaine autorité
(comme lorsqu'on a la signature ou la procuration). De plus, pour
des missions différentes, l'intéressé peut recevoir plusieurs noms
(voir "Changer de nom").
Enfin, pour indiquer une représentativité ou une autorité
permanente, le nom (c'est-à-dire la signature donnant procuration)
n'est plus placé sur la personne (ou l'objet), mais dans la personne
(Ex 23.21; ou l'objet, 1 R 9:3). Jésus a rappelé qU'Il bénéficiait
d'une telle disposition (Jn 17:Il, 12, 22).

1.2.4 Blasphémer le Nom

Puisque le Nom représente Dieu lui-même (Ps 75: 1; 1 Ch


17:24; Is 30:27), parler en termes injurieux du nom divin revient à
blasphémer contre Dieu (Lv 24: 11-16). Jéhovah est jaloux pour
son nom; il ne tolère nulle rivalité ni infidélité en matière de culte
(Ex 34: 14; Ez 5: 13). (On trouve encore aujourd'hui quelques
traces de tels abus dans les expressions, que certains utilisent dans
un sens blasphématoire, comme "nom de dieu" ou "nom de nom").
Il ordonna aux Israélites de ne pas même mentionner le nom
d'autres dieux (Ex 23: 13; Jos 23:7). Mais puisque le nom de
plusieurs faux dieux apparaît dans la Bible, l'interdiction portait sur
le fait d'utiliser le nom de ces faux dieux pour leur rendre un culte.
De plus, puisque les Israélites portaient le nom de leur Dieu
(Is 43:7, 10), leurs mauvaises actions rejaillissaient sur son Nom et
le profanaient (Ez 36:23; Lv 18:21). On comprend alors mieux la
mise en garde sur l'utilisation de ce nom (Dt 5: Il) ou parfois
même l'interdiction de l'utiliser (Am 6:10).
Du temps de Jésus, le blasphème contre le Nom pouvait être
appliqué abusivement à d'autres cas (Mt 26:65; Lc 5:21; Jn 10:36),
ce qui était excessif; cependant, les chrétiens devaient veiller à ne
pas blasphémer le Nom par leur conduite (Rm 2:24) et être
vigilants dans l'utilisation de ce nom (2 Tm 2: 19).
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26 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

1.2.5 Se souvenir do Nom

De tout ce qui précède, on voit que le nom de Dieu dans la


Bible est assimilé à Dieu lui-même, à sa gloire, à sa réputation, à
son autorité; cependant, même si sa prononciation est secondaire,
Dieu désirait que l'on se souvienne de son nom (Ps 119:55).
D'ailleurs, aujourd'hui, on ne voudrait pas oublier le nom des êtres
aimés, car celui-ci recèle une valeur sentimentale. En tout cas, il
serait grave d'oublier le nom de Dieu (Jr 23:27; PSI 44:20); par
contre, ceux qui le servent allaient le conserver (Mi 4:5). Jésus a
confié cette mission à ses frères (He 2: 12), ce qui permettrait de
répandre parmi les nations (Ml 1:11) ce nom qui, finalement, un
jour, sera unique (Za 14:9).
Enfin, on notera la répugnanceS de Satan à utiliser le nom
divin; la discussion avec Jésus en est un exemple caractéristique, car
si Satan utilise chaque fois le terme Dieu, Jésus par contre utilise
systématiquement le nom divin dans ses réponses (Mt 4: 1-10).
Cette répugnance pour le Nom, également partagée par les démons
(Le 4:34, 41; 8:28), provient tout simplement du refus de rentrer
dans l'intimité de celui à qui l'on s'adresse, comme les personnes
qui, pour marquer leur distance avec un individu indésirable,
préféreront dire "Bonjour monsieur" plutôt que "Bonjour Untel",
en utilisant son nom.

1.2.6 Le nom de Dieu dans les religions


Le nom de Dieu est, en théorie, l'élément centraI de l'édifice
religieux, car- toutes les religions parlent d'un Dieu créateur et
invoquent son nom. Cependant, pour les millions d'hindous, le
Dieu créateur Brahmâ ne reçoit aucun culte. Pour les millions de
membres de la chrétienté, malgré la récitation quotidienne de la
prière du "Notre Père", qui commence par "que ton nom soit
sanctifié", Dieu n'a de nom que le titre Seigneur (ou Éternel). De
même, les musulmans qui récitent les sourates du Coran, lesquelles
commencent toutes par "au nom de Dieu" (sauf la IX), répondent
que Dieu a 99 noms, c'est-à-dire aucun en propre; et enfin les Juifs,
qui récitent la prière appelée "Shéma Israël" dans laquelle ils
demandent que le nom de Dieu soit béni, refusent de le prononcer
sous peine de commettre un blasphème.
Ainsi, malgré le respect apparent qu'on semble lui porter, le
nom de Dieu n'est qu'un titre qui ne joue aucun rôle pratique au
quotidien. Seuls les prêtres exorcistes et les spirites attachent
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1.2 - CONNAITRE LE NOM DE DIEU 27

apparemment de l'importance à l'invocation du nom de Dieu6.


Tout au plus évite-t-on de prononcer l'expression "nom de Dieu"
dans les conversations courantes, sans d'ailleurs savoir expliquer
correctement pourquoi.
Bien sûr, la Bible tenant le nom de Dieu pour sacré, il ne
pouvait être prononcé qu'avec respect (Ex 20:7), faute de quoi on
encourait la peine de mort pour blasphème (Lv 24:11, 16).
Cependant, connaître et invoquer ce nom, c'est-à-dire le
crier avec supplication (Ac 2:21; Rm 10: 13; JI 2:32), est une des
conditions capitales pour rester en vie lors de l'intervention de Dieu
et ne pas subir sa colère (Jr 10:25). Ainsi, connaître ce nom c'est
rester en vie, l'ignorer c'est se condamner à mort.

Une lutte à mort s'est donc engagée entre ceux qui vont
faire connaître ce nom (Ex 9: 16; MI 3: 16) et ceux qui vont le faire
oublier (Jr 23:27; Ps 44:20). La Bible identifie l'instigateur de cette
ignominie, de ce plan diabolique; il est en effet facile de vérifier
que Dieu, dans la Bible, a bel et bien un nom propre: YHWH, qu'on
ne peut traduire par Seigneur (Adon), Mon Seigneur (Adoni), Le
Seigneur (Haadon), mes Seigneurs (Adonay), Dieu (El), Éternel
(Olam), Tout-Puissant (Shaday), Très-Haut (Elyon), Créateur
(Boré), Cieux (Shamaïm), etc.
La connaissance du Nom se trouve ainsi au cœur de la
controverse entre Satan et Jésus.
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29

1.3 Jésus, Satan, leur controverse avec le Nom


Bien que le nom divin apparaisse tout au début du récit
biblique (Gn 2:4), des traducteurs de la Bible ont remarqué que le
Serpent, que les Juifs avaient identifié au Diable (Sa 2:24), Satan
d'après les Évangiles (Ap 12:9), refusait d'employer ce nom dans
son dialogue avec Ève et préférait utiliser le titre anonyme "Dieu"
(Gn 3: 1-5). Cette façon de procéder n'est pas due au hasard,
puisqu'on la retrouve tout au long de la Bible, sans exception. Par
contre, Jésus utilisa systématiquement le Nom dans son discours
avec le Diable (Mt 4: 1-10); même Ève l'utilisa (Gn 4: 1).
On l'a vu: reconnaître un nom c'est reconnaître l'autorité
liée à ce nom. Or, en refusant délibérément l'autorité de Dieu, Satan
refuse aussi la reconnaissance de ce nom, propageant activement
son état d'esprit subversif. La première polémique religieuse dans
la Bible concerna donc l'utilisation du Nom comme en témoigne
Genèse 4:26.
D'après ce verset, dont la traduction laisse parfois à désirer,
les hommes commencèrent à "invoquer le nom divin". Les
traducteurs ont été gênés par cette précision, car, le Nom étant déjà
connu, ils ont pensé qu'il s'agissait d'une erreur. Cependant, le
contexte de ce verset indique que l'humanité était devenue
méchante (Gn 6:5); puisque ce nom était invoqué, c'est-à-dire crié
avec supplication d'après le sens du terme hébreu, il l'était donc,
dans un mauvais dessein. Le Targum du Pentateuque confirme
cette explication, car il est précisé, concernant Genèse 4:26, que les
hommes attribuaient le nom divin à des idoles, comme ils le firent
par la suite à plusieurs reprises (Ex 32:4, 5; Is 44: 17).
Ainsi, ce verset, correctement rendu dans le texte hébreu,
sous-entendait que cette invocation était faite en mal, et par
conséquent dans le but de nuire au Nom pour le discréditer. Par la
suite, une nouvelle attaque de grande envergure contre le Nom
allait se produire. En effet, la profusion des noms de divinités
provenant du polythéisme allait noyer le nom unique sous une
avalanche d'appellations. Les Israélites, pour se protéger de ce
piège, devaient détruire le nom de ces idoles (Ex 23: 13; Dt 12:3),
car le but de cette prolifération de noms était bien sûr de faire
oublier le Nom unique (Jr 23:27; Ps 44:20).
Pour lutter activement contre cette ignominie, c'est-à-dire la
perte du nom, les Juifs étaient encouragés à invoquer ou à crier
avec supplication ce nom (Dt 32:3). D'ailleurs, la raison principale
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30 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

qui opposa Dieu à Pharaon était justement de favoriser la


proclamation du Nom sur toute la terre (Ex 9: 16), ce qui reste un
thème de la Bible (Rm 9: 17). Dans sa prescience, Dieu a prévu dès
le début d'écraser la tête de Satan grâce à la Semence (Gn 3: 15),
Semence qui sera identifiée à Jésus (Ga 3:16). Ainsi, Jésus est venu
principalement pour démolir les œuvres du Diable (He 2: 14) et
surtout pour proclamer le nom de Dieu (He 2: 12) et le faire mieux
connaître (Jn 17:6, 26).
En effet, pour faire échouer le projet satanique, qui
malheureusement finirait par réussir avec les Juifs (Jr 44:26), Dieu
avait prévu la délégation personnelle d'un ange (Is 63:9) avec son
Nom en lui (Ex 23:21). Jésus a précisé qu'il était effectivement le
détenteur du Nom (Jn 17: Il). L'identification de cet ange serait
indispensable pour connaître le nom véritable. Or, si le Nom est
l'élément central du système religieux autour duquel tout gravite,
comme le centre de notre galaxie qui exerce son attraction sur tout
le reste du système, il reste cependant invisible à l'œil ordinaire,
d'où l'importance d'identifier l'ange gardien du Nom.

1.3.1 Identification de Jésus et de Satan


Ces deux personnages sont parmi les plus connus
aujourd'hui, pourtant, ils ne se sont dévoilés que relativement
récemment dans l'histoire de l'humanité. Rares sont ceux qui
connaissent exactement la raison qui les opposa. Qui connaît en
effet aujourd'hui leur histoire, leur origine, leur rôle exact, et en
quoi leur conflit a des implications sur la vie de chaque humain, et
surtout pourquoi il est capital d'en connaître l'enjeu?

1.3.2 Quelle est la signification du nom de Satan?


Bien que très ancien, Moïse le connaissait déjà (Jb 1:6).
Satan ne fut pas un nom très répandu dans la littérature avant notre
ère. Connaître la signification d'un nom en hébreu donne souvent
un indice sur la fonction du personnage. Effectivement, Satân (~~)
signifie en hébreu "adversaire, accusateur". Ce nom traduit en grec
par Diable (Ataf}oÀ.oç) dans la Septante signifie "calomniateur,
médisant". Satan a reçu d'autres noms qui sont autant de
qualificatifs, comme Beelzebul (Mt 12:24), déformation probable
de Baalzebub (2 R 1:2), le nom du dieu d'Ékrôn. Ce nom
Baalzebub ("Maître des mouches" en hébreu!), que l'on trouve à
Ugarit (14e siècle avant notre ère), signifie "le prince Baal" et a sans
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1.3 - JÉSUS, SATAN, LEUR CONTROVERSE AVEC LE NOM 3i

doute été déformé en Baalzebul qUI signifie en araméen "Maître du


fumier" (ou "Maître d'une demeure élevée" en hébreu!). On trouve
souvent dans les écrits ra~biniques le terme Bélial (2 Co 6: 15), qui
signifie en hébreu "sans profit" ou vaurien (Pr 16:27), avec d'autres
qualificatifs comme Tentateur, Méchant, Ennemi, etc.
La signification du nom de Satan est bien établie; d'ailleurs,
dans certains versets, les traducteurs hésitent entre garder le nom ou
le traduire, comme en Psaume 109:6. Par contre, son rôle de dieu
du monde en lutte contre le Dieu de l'univers n'apparaît clairement
défini que dans les Écritures grecques chrétiennes (2 Co 4:4).
On peut cependant noter que dans la religion perse apparaît
la lutte d'un principe du mal Ahriman contre le dieu de la lumière
Ahura Mazda, lutte popularisée vers le 7e siècle avant notre ère par
Zarathoustra. Cette vision de deux entités opposées, bien et mal,
aboutira plus tard, vers le 3e siècle, au manichéisme.

1.3.3 Quel est leur rôle actuel d'après les religions?


Dans la religion chrétienne, Jésus est considéré avant tout
comme le Messie, le Verbe et le Fils de Dieu; Satan étant, lui,
qualifié de Prince du monde ou de principe du Mal. Dans la
religion musulmane, Jésus (appelé Issa, vocalisation arabe du nom
Ésaü) est considéré comme le Messie et le Verbe de Dieu (Ku'ran,
4: 171); d'autre part, Shaytan le rebelle est qualifié, lui, d'opposant à
Dieu et à l'homme. Dans la religion juive, Jésus (Yehôshua'), c'est-
à-dire Josué en latin, est considéré comme le Verbe de Moïse, et
-
Satan qualifié d'opposant à Dieu ou de principe du Mal.
Si le nom et le rôle de Satan paraissent assez clairs, par
contre le nom et le rôle de Jésus paraissent nettement plus
embrouillés. En fait, cela est lié à la confusion sur le Nom, car
connaître le Messie c'est connaître le Nom, et réciproquement, car
le Messie possède le Nom, selon ce qui est écrit en Exode 23:21:
"Mon nom est en lui."
Assez rapidement, les Juifs ont compris que cet ange
puissant jouerait un rôle particulier. Il a ainsi été identifié à l'''ange
de la face" (Is 63:9) et aussi au ,grand prince angélique, Mikaël, le
protecteur d'Israël (On 12:1). Etant donné que Mikaël est décrit
comme plus puissant que les autres anges (Dn 10:20, 21), on a
déduit qu'il était le chef des anges, ou archange, ce que confirme
Jude 9 lorsqu'il relate le différend qui opposa l'archange Mikaël et
Satan. De plus, le livre de la Révélation indique que Mikaël et ses
anges l'ont emporté dans une guerre sur le dragon et ses anges (Ap
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32 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

12:7). On peut remarquer qu'il n'y a qu'~n archange dans la Bible;


même Satan, le chef des anges méchants, n'est pas qualifié
d'archange. Au début de notre ère, les Juifs identifièrent
progressivement cet ange puissant, qui a le Nom en lui, à Métatron.
Métatron étant un pseudonyme, car son vrai nom, Yahoel, aurait pu
dévoiler le noin de Dieu. En effet, Yahoel signifie en hébreu "Yaho
c'est Dieu". Par contre, les chrétiens identifièrent l'archange Mikaël
à Jésus (1 Th 4:16; 2 Th 1:7), mais apparemment ils n'établirent
aucun lien entre la prononciation du nom divin et le fait que Jésus
possédait le Nom en lui (Jn 17: Il, 26).
De cette rapide analyse, on peut déduire que pour les
Musulmans, si Issa (Jésus) est le Messie, il ne joua aucun rôle pour
connaître le nom propre d'Allah, car Allah est simplement une
contraction de aI-Ilah (Le Dieu). La tradition musulmane affirme
seulement que Dieu possède 99 beaux noms, c'est-à-dire aucun en
propre? Cette tradition affirme cependant que le nom propre de
Dieu (le centième) sera connu à la fin des temps. Pour les Juifs,
c'est Métatron, c'est-à-dire Yahoel, qui possède le Nom; le nom
Yaho joua ainsi un grand rôle dans la mystique juive. Enfin, pour
les chrétiens, c'est Jésus qui fut reconnu comme le Messie.
Cependant, si Jésus possède effectivement le Nom en lui, comment
cela aide-t-il à retrouver le nom divin?
Le nOQl Jésus n'est que la transcription du nom hébreu
Yéshoua. Si quelques dictionnaires mentionnent les anomalies
concernant la signification et la prononciation de ce nom, aucun ne
s'attarde à les expliquer. Une analyse plus poussée en vaut pourtant
la peine (voir l'historique du nom de Jésus), car elle permet
-
d'établir que, grâce à l'assonance avec le Tétragramme, le Nom est
littéralement dans le nom de Jésus.
Avant d'examiner l'historique du Nom, il est bon de
connaître sur quels arguments les spécialistes s'appuient pour
retenir les vocalisations actuelles des noms hébreux, car le choix de
la méthode entraîne ipso facto le choix de la vocalisation.

[N.B. Les dates (avant notre ère) données dans ce livre reflètent un
consensus (non unanime) entre différents spécialistes et sont donc
seulement indicatives de la chronologie des périodes de l'histoire.]
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33

1.4 Le Nom lu distinctement


Comme on pourra le constater lors -de cette analyse, les
critiques modernes se sont principalement focalisés sur la
prononciation du Nom ("Nom lu distinctement" selon l'expression
talmudique), et certains linguistes, tels les Chevaliers du Graal, ont
cherché à retrouver cette prononciation mythique du
Tétragramme. En fait, comme les cabalistes sincères du Moyen-
Âge qui voulaient avoir accès au secret de cette prononciation, les
linguistes modernes ont abouti au même résultat: une grande
confusion.
Pour éviter les résultats désastreux de cette recherche
légitime, il faut en fixer plus clairement les limites. Par exemple, on
peut améliorer la prononciation du nom de Moïse. En effet, en
tenant compte de l'hébreu, on devrait plutôt prononcer ce nom
Môshèh; cependant il faut préciser dans ce cas qu'il s'agit de
l'hébreu massorétique, et que cette vocalisation reflète donc la
langue biblique au début de notre ère (et un peu avant), car si l'on
remonte plus loin dans le temps on devrait avoir la prononciation
plus "archaïque" Moushah, confirmée par le nom arabe Moussa.
Cependant, vouloir remonter à une prononciation plus
"archaïque" va introduire de la confusion, car cette période
archaïque (non datée en général) est souvent assez indéterminée
pour recevoir toutes les interprétations. Ainsi, certains vont éclairer
cette "antique" prononciation par son étymologie égyptienne
probable "mosis" (fils), que l'on trouve fréquemment à cette
époque dans les noms égyptiens Thoutmosis, Ahmosis, etc.
Cependant, les adeptes des étymologies exotiques "oublient" de
signaler que la vocalisation des noms égyptiens est très
hypothétique, certains préférant plutôt utiliser les formes
Thoutmès, Ahmès, etc. Deuxièmement, cet éclairage égyptien du
nom de Moïse contredit l'étymologie biblique d'Exode 2: 10, qui
relie ce nom au verbe hébreu "tirer" (Mashah en hébreu). Enfin, les
inconditionnels de l'archaïsme qui voudraient, en désespoir de
cause, retrouver la prononciation du nom de Moïse grâce à son
étymologie biblique, constateront que cela conduit une nouvelle
fois à une impasse, car la conjugaison donne la forme "Mashouy",
qui signifie exactement en jhébreu "[étant] tiré".
~ L'exemple précédent permet de comprendre pourquoi le
fait de chercher à retrouver une prononciation originale bien avant
le début de notre ère est une quête plus mystique que scientifique.
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34 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Pour se convaincre que cette recherche légitime ne peut remonter


bien avant le début de notre ère, le nom 'bien connu Jésus illustrera
tous les problèmes rencontrés.

1.4.1 La prononciation du nom de Jésus

"Au départ", le nom de Jésus, d'après l'hébreu massorétique,


fut une transformation du nom Hôshéa' en Yehôshoua' (Nb
13:16), nom qui s'abrégea ensuite en Yéshoua' (1 Ch 24:11). Puis
Yéshoua' fut prononcé Yéshou' en araméen, forme qui donna le
nom lèsous en grec.

HÉBREU ARAMÉEN
~ii1 .tr-Wii1" .t)1W" .t)1W~

Hô~a' -+ yehô~ûa '-+ Y é~ûa' -+ Y é~û '


Hoshéa Yehôshua Y éshua Y éshu

ARAMÉEN GREC LATIN FRANçAIS


.t)1W~ Ill<Jou[ç] I[h]esu[s] Jésus
Yé~û' -+ lèsou[s] -+ lesu[s] -+
y éshu Ièsou Iesu

Histoire de compliquer "encore les choses, Jérôme, qui


traduisit la Bible à partir de l'hébreu, préféra traduire le nom
Yehôshoua' par Josué. Enfin, on pense généralement que le nom
araméen Yéshou' donna la forme grecque Jason.

HÉBREU LATIN FRANÇAIS


.tr-Wii1" Josue Josué
yehô~ûa-+ Iosue
Yehôshua Josue

ARAMÉEN GREC FRANÇAIS


.P1W~ :rb"... Ia,<Jov Jason
y é~û' -+ Yason -+ Iason ..
y éshu Yason lason

Il existe donc actuellement cinq prononciations possibles


du nom original Yehôshoua', c'est-à-dire: Jésus, Josué, Jason,
y éshoua' et Yehôshoua'. Quelle est la bonne?
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 35

Tout le monde conviendra que, pour retrouver la version


originale, l'idéal serait de revenir à la prononciation hébraïque. .
Cependant, même dans ce cas, la Bible hébraïque donne deu_x
versions: Yehôshoua' et Yéshoua'. Laquelle choisir? Si l'on s'en
tient à l'époque où vécut Jésus, la prononciation usuelle était
y éshoua', comme le confirme l'excellente traduction d'Aquila
(128-132), qui rendit ce nom en grec par Ièsoua (Illooua; Dt
1:38). De plus, le fait de fixer le début de notre ère comme période
de référence pour les noms propres permet de s'appuyer sur deux
témoins d'une qualité exceptionnelle: le premier est le texte de la
Septante, qui reflète la vocalisation hébraïque autour de -280; et le
second est le texte massorétique, qui reflète la vocalisation
hébraïque autour de. -100 (et même probablement autour de -300
à -400)8. Paradoxalèment, la vocalisation du texte massorétique
semble antérieure à celle de la Septante, bien que sa fixation soit
postérieure. D'ailleurs, la Septante a été révisée sur un modèle
massorétique dès le 1er siècle.
Cette limite fixée, on peut améliorer la majorité des noms
bibliques d'après leur vocalisation massorétique, ce qui les
rapproche, non de leur modèle d'origine, mais de leur
prononciation au début de notre ère. C'est cette voie que suivent de
nombreuses traductions modernes, et certaines franchissent le pas
(comme celle d'A. Chouraqui) même pour des noms vénérables
comme Moïse, Jésus, Salomon, Noé, etc., qui redeviennent Moshè,
léshoua', Shelomo, Noah, comme au 1er siècle. Peut-on retrouver
la prononciation du Tétragramme, p\lisque à cette époque il était
encore prononcé, du moins dans le Temple? La réponse est oui, en
dépit du fait que cette vocalisation n'est pas indiquée directement ni
dans le texte de la Septante ni dans le texte massorétique.

1.4.2 Méthodes pour retrouver une prononciation

On peut retrouver cette vocalisation du Nom (au premier


siècle) de plusieurs manières. En effet, supposons que l'on ait
perdu la prononciation hébraïque d'un nom; on pourrait la
retrouver au moins de quatre façons, chacune étant plus ou moins
fiable. Les quatre méthodes sont les suivantes:
1- Méthode de l'étymologie.
2- Méthode des témoins.
3- Méthode de l'onomastique.
4- Méthode de lecture des lettres.
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36 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

1- Méthode de l'étymologie. On suppose que le nom


s'identifiait à son étymologie, quand celte-ci existe.
2- Méthode des témoins. On suppose que les noms grecs de
la Septante ont gardé les vraies voyelles.
3- Méthode de l'onomastique. On suppose que lorsqu'un
nom a été intégré à un autre il n'a pas été trop déformé.
4- Méthode de lecture des lettres. On suppose que
lorsqu'un nom est écrit en écriture pleine, cette vocalisation selon
ses lettres correspond à sa vocalisation réelle. Pour lire un nom, on
adopte alors la manière suivante: Y est lu I, West lu Û (prononcé
ou) et H final est lu A. On lit alternativement une consonne avec
une voyelle, et en l'absence de voyelle on utilise le son A. De
même, une consonne gutturale, même accompagnée d'une voyelle,
est lue avec le son A.

Il est intéressant de tester ces quatre méthodes sur des noms


connus pour évaluer leur fiabilité respective, avant de les appliquer
au nom divin.

Il Rbraham
1- L'étymologie, en Genèse 17:5, indique que ce nom signifie
"Père d'une foule", soit Abhamon en hébreu.
2- La Septante a transcrit ce nom Abraam.
3- Les noms liés à Abraham sont Abiram (1 R 16:34), Abishûa'
(1 Ch 8:4), pour le début du nom (Ab). La partie finale raham ne
signifie rien en hébreu; elle est rattachée parfois à RaJ!am (1 Ch
2:44), signifiant "il eut compassion". La forme reconstruite est
donc Abraham (on notera que le nom Abra-ham, plutôt que Ab-
raham, est proche de l'expression "Je les crée~1 Je les engendrerai"
[cD ~1~~]).
4- Le nom écrit 'brhm se lit selon ses lettres A-ba-ra-ham.

Il Jésus
1- Comme on l'a vu, l'étymologie du nom Jésus (Yéshûa') en
Matthieu 1:21 permet de retrouver la forme hébraïque Yôshia' ,
signifiant "il sauvera".
2- On trouve la transcription Ièsous dans la Septante.
3- Les noms liés à Jésus sont Yesha'yah (Esd 8:7), Yishi' (1 Ch
2:31), pour le début, et Èlishûa' (2 S 5: 15) pour la fin. La forme
reconstruite est Yeshûa' ou Yishûa.
4- Ce nom est écrit en hébreu avec quatre consonnes, soit: Y~w';
sa lecture selon ses lettres est donc I-~û-a', soit Ishûa'.
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~
1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 37

IlNoé
1- L'étymologie en Genèse 5:29 indique que Noé (Noah)
consolera; donc, si on suppose que ce nom signifie "il consola", on
.

obtient Naham en hébreu.


2- La Septante transcrit ce nom Noé.
3- Les noms liés à Noé sont Yanôa!! (2 R 15:29), Manôa!! (Jg
13:2). La forme reconstruite est donc Nôah..
4- Ce nom Nwb peut se lire selon ses lettres Nû-ab.

III sraël
1- L'étymologie, en Genèse 32:28, indique qu'Israël signifie "Il
a lutté [avec] Dieu", comme en Hoshéa 12:3, soit Seraél en hébreu.
D'ailleurs, Serayah en 2 Samuel 8: 17 signifie, lui aussi, "Il a lutté
[avec] Yah".
2- La Septante transcrit ce nom Israèl.
3- Les noms liés à Israël sont Yisraéli (2 S 17:25), Yisreélit (Lv
24: 10) pour le début, et la fin en él est bien attestée, ce qui donne
la forme reconstruite Yisraél.
4- Ce nom Ysr'l peut se lire selon ses lettres Is-ra-'al.

. Juda
1- L'étymologie, en Genèse 29:35, indique que ce nom signifie
"il louera", ce qui donne en hébreu soit Yôdèh, soit Yehôdèh.
2- La Septante transcrit ce nom Iouda.
3- Les noms liés à Juda sont Yehûdi (Jr 36: 14, 21), Yehûdit (Gn
26:34), Yehûdim (Jr 43:9) pour le début, et Hôdawyah (1 Ch 9:7)
pour la fin. La forme reconstruite est donc Yehûdah.
4- Ce nom Yhwdh peut se lire selon ses lettres I-hû-da.

. Moïse
1- L'étymologie, en Exode 2: 10, indique que ce nom signifie "il
a été tiré [de l'eau]", soit en hébreu Mashûy, signifiant "étant tiré".
2- La Septante transcrit ce nom Môusès.
3- Il n'y a qu'un seul nom lié à Moïse: il s'agit de Nimeshi (2 R
9:2). La forme reconstruite est donc Meshi.
4- Ce nom Mw~h peut se lire selon ses lettres Mû-sha.

Il Jérusalem
1- L'étymologie, en Hébteux 7:2, indique que la partie "Salém"
de ce nom signifie "paix". La première partie "Yerû-" signifie
littéralement "fondé" ou "fondation", c'est-à-dire "ville". Donc,
l'expression "fondation de paix" donne en hébreu Yerûshalôm.
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38 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

2- La Septante transcrit ce nom Iérousalèm. D'autres ouvrages


(Josèphe, livre des Maccabées) donnent' Iérousalüma.
3- Il n'y a qu'un seul nom lié de façon sûre à la partie finale de
Jérusalem: il s'agit de Shalém (Ps 76:2). Pour le début, il y a
Veruél (2 Ch 20:16). La forme reconstruite est donc Yerushalém.
Remarque importante, la forme massorétique a plusieurs variantes:
Yerûshalayim (1 Ch 3:5; 2 Ch 25: 1; Est 2:6), Yerûshalayem (2 Ch
32:9; Ez 8:3), Yerûshelèm (Dn 6: Il). Ainsi, malgré le choix
massorétique retenu (Yerûshalaïm), la forme Yerûshalém est
actuellement privilégiée, car on a retrouvé plusieurs transcriptions
concordantes de ce nom. Par exemple, Urusalima (ville de Salim)
dans les tablettes d'Ébla (-2300), Urusalim à Tell EI-Amarna (-
1300), et Urusalimmu dans un texte de Sennacherib (-700).
4- Ce nom Yrw~lym peut se lire selon ses lettres I-ru-~a-lim, soit
Irushalim.

Il Babel
1- L'étymologie, en Genèse Il :9, indique que ce nom signifie
"confusion" ou "[étant] confuse", ce qui donne en hébreu soit Balûl
au masculin, soit Belûlâ au féminin. (Vu ce désaccord, certains
proposent Balbél, une forme araméenne du participe passé.)
2- La Septante a transcrit ce nom par Babülôn.
3- Il n'y a qu'un seul nom lié à Babel: il s'agit de Zerûbabèl (Za
4:6). La fonne reconstruite est donc Babèl.
4- Ce nom Bhl peut se lire selon ses lettres Ba-hal.

En supposant que le texte massorétique ait conservé la


prononciation authentique de ces noms au premier siècle (sauf
peut-être pour Jérusalem), il suffit d'évaluer l'écart que donne
chacune des méthodes par rapport à ces noms qui servent de
référence. Pour calibrer objectivement, on peut attribuer 2 points
lorsque la voyelle (i, é, [e], è, a, 0, û) est identique, et 1 point si elle
se trouve seulement décalée d'un cran, comme a mis à la place de è
ou de o. De plus, comme certaines consonnes servent de voyelles
en hébreu, on obtient les équivalents Ya=ia, Yi=ï, Wa=ûa, WU=û.

NON! SELON: L'Ér{MOLOGIE LES TÉMOINS


RÉF.
y éshûa 8 Y ôshia 4 lèsous 5
Abraham 6 Abhamon 5 Abraam 6
Noah 4 Naham 3 Noé ')...
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 39

Yisraél 6 Seraél 4 Israèl 5


Yehûdah 7 Yehôdèh 5 Iouda 6
Moshèh 4 Mashûy 1 Mousès 3
Babèl 4 Balûl 2 Babülon 2
Yerûshalém 9 Yerûshalom 7 lérousalèm 8
100% ~48 65% ~31 77% 137
Sarah 4 Sarah 4 Sarra 4
Shemûél 5 Shealtiél 3 Samouèl 3
Y ôséph 6 Yôsiph 5 Iosèph 5
Kayin 4 Kanuy 2 Kain 4
Zebûlûn 5 Izebol 1 Zaboulon 3
Yaaqôb 8 Yaeqob 6 lakôb 6
Hawuah 6 Hayiah 4 Eüa 4
100% l86 65% j56 77% 166

Yhwh Yihyèh Iaô

NOi\1 SFLON: L'ONOMASTIQUE SES LETTRES


RÉF.
y éshûa 8 Y éshûa 8 Ishûa 6
Abraham 6 Abraham 6 A baraham 6
Noah 4 Noah 4 Nûah 3
Yisraél 6 Yisraél 6 Israal 4
Yehûdah 7 Yehûdah 7 Ihûda 6
Moshèh 4 Meshi 0 Mûsha 2
Babèl 4 Babèl 4 Babal 3
Yerûshalém 9 Yerûshalém 9 Irûshalim 7
100 %.1 ~48 92 ~) 144 77% 137
Sarah 4 - Sara 4
Shemûél 5 - Shamûal 2
Yôséph 6 - lûsaph 3
Kayin 4 - Kin 2
Zebûlûn 5 - Zabûlûn 4
Yaaqôb 8 - laqûb 5
Hawuah 6 - Aûa 6
I
100% ~86 92% i 73% 163

Yhwh Yehowah Ihûa


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40 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

On peut constater à l'aide des tableaux ci-dessus que si l'on


désirait retrouver un nom dont on aurait perdu la prononciation, la
meilleure méthode consiste à retrouver ce nom perdu en le
recherchant à l'intérieur des autres noms hébreux associés; c'est la
méthode par l'étude onomastique des noms. En second, dans
l'ordre de la fiabilité, on trouve la méthode des transcriptions
grecques des noms dans la Septante. En troisième, mais de peu, on
trouve la méthode de la lecture d'un nom par ses lettres. Et enfin, la
dernière et donc la plus mauvaise méthode, c'est-à-dire celle qui
consiste à reconstituer le nom grâce à son étymologie.
Paradoxalement, c'est cette dernière méthode qui est actuellement
privilégiée pour retrouver la prononciation du Tétragramme,
méthode que certains combinent avec les témoignages grecs en
Iaô.
Pour améliorer le résultat, on peut effectivement combiner
les différentes méthodes, et obtenir une prononciation finale plus
fiable, mais pour cela il faut aussi connaître l'origine des écarts
provenant de chaque méthode pour être en mesure de l'apprécier
au cas par cas.

1.4.2.1 ÉT Y MOL 0 6 I E

L'étymologie biblique n'a pas vocation à être scientifique. Il


suffit d'examiner quelques cas pour s'en convaincre, et constater
que les explications bibliques sont plus des jeux de mots que des
définitions linguistiques9.

NOM 1-fT~fMOLOGIE 2- ÉII"MOLOGIE I\1EIlLEUR


ClASSIQlJE BIBUQUE AC<X>RD
Jésus salut il sauvera Josué
Moïse tiré hors étant tiré hors Nimshi
Israël il Iuttera, Di eu ill utta, Dieu Serayah
Joseph il ajoutera il rassemblera Asaph
Lévi [étant] enlacé il enlacera

Bien qu'il y ait un lien évident entre la définition biblique et


l'étymologie (au sens grammatical), il n'y a pas d'équivalence
absolue 10.Par exemple, le nom Jésus est plus proche du mot "salut"
(Yeshûa'h en hébreu) que de l'expression "il sauvera" (Yôshîa').
En fait, l'étymologie biblique est basée davantage sur un jeu de
mot, ou sur une assonance entre les mots, que sur une stricte
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 41

définition grammaticale, car le but premier de la Bible est de


donner un enseignement religieux. Ainsi, l'étymologie d'un nom
constitue en fait une déclaration prophétique. Par exemple., le nom
Moïse, expliqué en Exode 2: 10 comme "étant tiré hors [de l'eau]",
annonçait prophétiquement que le peuple tout entier serait lui aussi
"tiré hors [de l'eau]" par le moyen de celui qui allait devenir
l'homme "tirant hors [de l'eau]." (Is 63: Il., 12)
De la même façon qu'il peut y avoir plusieurs prophéties
concernant un seul personnage, de même il peut y avoir aussi
plusieurs étymologies pour un seul nom, ce qui prouve le caractère
non scientifique de ces étymologies. Par exemple, le nom Yôséph
signifie à la fois "il ajoutera", soit Yôsiph en hébreu (Gn 30:24), et
aussi "il rassemblera", soit Yè'soph en hébreu (Gn 30:23). Par
conséquent, il arrive parfois que les étymologies bibliques soient
complètement déconnectées de l'étymologie au sens scientifique 11.
Par exemple:

NOM 1-Éf'{MOLOGIE 2- ÉrYi\10LOGIE ~lLElTR


CLASSIQlTE BIBUQlTE ACCDRD
Samuel nom [de] Dieu demandé à Dieu Shealtiel
Saül
Noé repos il consolera Nahum
Nehémia
Babel porte de Dieu confusion
Reuben vois, un fils il a vu ma détresse -
Caïn épée? acquis
Abraham père a compati? père d'une foule
Zeboulôn demeure élevée il honorera Jezabèl

On peut noter le "gouffre" qui sépare ces deux sortes


d'étymologies. Plutôt que de chercher à les faire coïncider, il faut
se rappeler que l'explication de ces écarts est toujours la même: le
but des définitions bibliques est de donner avant tout un message
religieux. Du reste, quel serait l'intérêt d'expliquer à un Hébreu le
sens d'un nom hébreu? Ainsi., il est évident pour un Hébreu que le
nom Noé signifie scientifiquement "repos"; cependant le verset de
Genèse 5:29 nous précise que ce "repos" signifiera bibliquement "il
consolera", car Noé allait jouer un rôle prophétique consolant. De
même., au premier siècle de notre ère, Barnabas, un nom araméen
signifiant scientifiquement "fils de prophétie", allait signifier
bibliquement "fils de consolation". (Ac 4:36)
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42 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Ainsi, la Bible peut modifier notablement le sens d'un nom


pour enseigner un message important pour l'avenir. Par exemple,
les Babyloniens ont probablem.ent appelé leur ville Babèl, car on
trouve des transcriptions babyloniennes très anciennes "Bâb-ili"
signifiant littéralement "porte de Dieu". Mais la Bible va changer ce
noble nom en un autre nom prophétique plus approprié
"Confusion", car Babel serait le symbole grandiose de la confusion
religieuse, d'après Révélation 18:2, 23. On dirait aujourd'hui, pour'
conserver le jeu de mots biblique, que cette "Porte de Dieu" était
plutôt une "Perte de Dieu". Cette façon "d'étymologiser" les noms
est très ancienne, puisque les Babyloniens eux-mêmes la
pratiquaient au début du deuxième millénaire avant notre ère. Il est
évident que la plupart de ces étymologies babyloniennes sont
considérées aujourd'hui comme folkloriques, car elles s'appuient
plus sur le lien symbolique et sur l'assonance entre les mots que sur
leur lien linguistique 12.
~ Par conséquent, toutes ces étymologies religieuses n'ont pas
de valeur scientifique, car tel n'était pas leur but. D'ailleurs, ceux
qui veulent se servir d'Exode 3: 14 pour retrouver le Nom devraient
aussi se servir d'Exode 34: 14, qui dit: «Jéhovah dont le nom est
jaloux, c'est un Dieu Jaloux» ainsi que d'Isaïe 63: 16, qui dit: «â
Jéhovah, Racheteur d'autrefois, tel est ton nom», et encore de
Hoshéa 2: 16, qui dit: «Tu m'appelleras Mon mari», et enfin,
pourquoi pas, de Zekaria 14:9, qui dit: «Mon nom est Un.» Toutes
ces étymologies, comme on peut le constater, ne sont bien
évidemment pas à prendre au pied de la lettre, à moins de penser
que- Dieu s'appelle réellement Un, Mari, Jaloux, Racheteur, etc.
D'ailleurs, comme on l'a vu, Moïse n'a pas cherché à connaître
"quel est le nom de Dieu", puisqu'il le connaissait déjà, mais "qu'est-
ce que ce nom", c'est-à-dire: que signifierait-il pour les Israélites?

1.4.2.2 TÉ MO INS

Les écarts qui proviennent des transcriptions grecques de la


Septante peuvent s'expliquer par les raisons suivantes.
Premièrement, dans la langue grecque, à cette époque, il y eut un
phénomène appelé le iotacisme, qui amenait principalement à
confondre les sons i,é,è,ai. Deuxièmement, la Septante a
probablement été écrite à Alexandrie, dans un milieu araméen; or
cette langue sœur de l'hébreu vocalise justement les mots d'une
façon légèrement différente, ce qui a sans doute influencé certaines
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 43

Troisièmement,
transcriptions. l'oreille grecque n'aimait pas les
sons gutturaux de la langue hébraïque, et, comme l'explique par
exemple Havius Josèphe, de nombreux noms ont été hellénisés
pour satisfaire le lecteur grec (Noah fut transformé en Noé,
Yéshoua' en lèsous, etc.). Ces problèmes existaient déjà dans
d'autres langues: ainsi les Akkadiens ont "akkadianisé" les noms
hébreux, les Hébreux ont "hébraïsé" les noms akkadiens, etc.,
chacun suivant ses affinités sonores.
Lorsqu'on examine les nombreux témoignages des noms
divins 13,on observe une assez grande variété des transcriptions de
noms pourtant identiques au départ. Le cas le plus critique
concerne justement les lettres Y et W, qui ont connu une évolution
de prononciation assez importante. Par exemple, en araméen puis
en hébreu, la lettre W fut prononcée successivement dans le temps
OU > Ô > V > I! > B14 (I! étant prononcé BV). Les Samaritains
confondaient en permanence les sons OU et 015. Dans ces
conditions, on peut comprendre que, pour apprécier la valeur
d'une transcription, il faille connaître à quelle époque elle est
apparue et qui l'a donnée.

1.4.2.3 L E TT RES

Le procédé de lecture selon les lettres est, par principe, très


rudimentaire, car il ne comporte que les trois sons I (Y), Û (W) et
A, alors que la langue hébraïque en possède sept en tout (i, é, [e], è,
a, 0, û). En dépit de ce handicap intrinsèque, cette méthode de
lecture donne d'assez bons résultats dans l'ensemble, car elle
respecte le caractère vocalique de la langue hébraïque. On constate
en effet que, dans la lecture des noms propres, l'hébreu privilégie la
lecture vocalique, et l'araméen la lecture consonantique. Par
exemple, le groupe YW dans un mot sera lu préférentiellement 10
ou lU en hébreu, alors qu'en araméen on préférera lire YaW ou
-YW -. On peut voir cette particularité dans quelques mots à
l'écriture identique mais prononcés différemment.

NO~" f\R.AMÉEl\! RÉF.


Ywn Yawan Gn 10:2
I
Dryw~ Daryawèsh Esd 5:7
Sywn Siywan Est 8:9
Kywn Kéywan 16 Am 5:26
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44 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

NOM HÉBRElJ RÉF.


Ywnh Yonah Jon 1: l '
Dryw~ (Daryosh) Esd 10:16
Sywn Siyon Is 1:8
Kywn Kiyûn Am 5:26

On constate que les noms d'origine non israélite tels que


Yavân, Darius, Sivân, Kaiwan (probablement pour des raisons anti-
idolâtriques ce nom orthographié Raiphan [Ac 7:43] fut modifié à
la- mode hébraïque pour donner Kiyûn), ont une prononciation
consonantique. Par contre, dans les noms israélites le groupe YW
est toujours vocalisé JO ou IÛ sans exception. On constate le même
phénomène dans la Peschitta, traduction araméenne de la Bible: par
exemple, Ioséph (Le 3:26) est devenu Yawsèph, Ionah (Le II:30)
est devenu Yawnan. La langue araméenne influença rrandement la
langue hébraïque sur une grande période de temps 1 ; le contraire
fut moins vrai.

-900 -700 -500 -300 -100 200


HÉBRElJ ~i1 ~i1/ 11 11 i i i i
hu' hû hû û ô ô ô
ARAMÉEN ~i1
T'.. ..
i1T 1T 1T 1T 1T 1T 1T
hu'a ahu aw aw aw aw av ab
HÉBREI T 1i1" 1i1" 1" i" i" i"
îhû îhû îû îô îô îô
jj 1
,,, ,,, ,,,
ARt\MÉEN i" i"
Ihu IW ÎW ÎW ÎW îv îb
HÉBRElT ~it
. it" T
1;'1ii"T / ii1"
T
1jj" 1jj"
T i" i"T i"T
yâh hu' yâh hû yahû yahû yaô yaô yaô
~i1iT" ,.,
ARt\MÉEN T',.
ii1" / 1" i"T i"T i"T i"T
yah hu'a yahaw yaw yaw yaw yav yab
1 2 3 4 5 6 7

Pour donner un exemple marquant de '.'énorme influence


de l'araméen sur la Bible, l'expression: "son frère" ("frère [de] lui"
en hébreu), que l'on trouve très souvent dans la Bible, est écrite 4
fois sous sa forme hébraïque' aHIHÛ, et 113 fois sous sa forme
araméenne 'aHIW. Toutes ces variations ont fait l'objet de
nombreuses études 18.En appliquant les résultats de ces recherches,
on peut reconstituer la prononciation des trois noms divins YH, YW
ou YHW, et YHWH, juste avant le début de notre ère.
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1.4- LE NOM LU DISTINCTEMENT 45

GREC HÉB. ARAM. HÉB. ARAM. HÉB. ARAM.


YU VW VHWH
(Iaû) -400 lâ Yah lû Yaw Ihûâ Yahwah
laô -100 lâ Yah lô Yaw Ihôâ Yahwah
laüe +200 lâ Yah lô Yav Ihôâ Yahvah
Iabe +300 lâ Yah lô Yab Ihôâ Yahbah

Comme on le voit dans ce tableau, les témoignages grecs


confirment sans ambiguïté la vocalisation araméenne. En fait, le
problème est resté le même jusqu'à aujourd'hui, puisque la langue
arabe, qui est une descendante de la langue araméenne, vocalise le
mot YHWD non pas Ye-HÛD (IHÛD) comme les Juifs, mais Ya-
HUD. Cette vocalisation Ye- est propre à l'hébreu, on ne la retrouve
pas dans les autres langues apparentées. Par exemple, le mot
Yehudi en hébreu est lu Yahudi;un en arabe, Yaudayyu en
akkadien et Vaudayya en assyrien.1

1.4.2.4 0 NOM R S T I QUE

ltF Cette dernière méthode est la plus fiable, car les noms sont
très stables dans le temps, souvent beaucoup plus que les mots de la
langue eux-mêmes. Les noms propres sont en quelque sorte une
mémoire des sons du passé ou des "phonogrammes". De plus, la
langue hébraïque fut, malgré quelques variations, très stable sur
une grande période de temps. Par exemple, l'hébreu des lettres d'El
Amama datant du 14e siècle avant notre ère peut encore être
compris par un Israélien moderne. Ainsi, on peut reconstituer un
nom avec un taux de confiance très élevé si le nom à retrouver est
préservé dans plusieurs autres noms. Or, sous cet aspect, le nom
divin est extrêmement favorisé, puisqu'il fut intégré dans des
centaines de noms propres. La seule difficulté est d'éviter de
confondre le grand nom YHWH (Jr 44:26), avec le petit nom YH
(Ps 68:5). Ces deux noms peuvent d'ailleurs être utilisés en
parallèle, comme en Isaïe 12:2 et 26:4, en Psaume 130:3, etc. En
général, le petit nom, Yah, plus affectueux, fut surtout employé
dans les chants (Ex 15:2), comme les Psaumes de David et dans
l'expression fréquente "Louez Yah" (AlIélouia). À cause de cette
prééminence du grand n~m Yehowah par rapport à l'autre nom
Yah., les Hébreux., comme on le constate dans le tableau ci-après,
ont veillé scrupuleusement à ce qu'il soit toujours uniquement à la
tête des noms propres (Yehô-), et jamais à la fin.
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46 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

M.T. LXX TRADUCTION "SCIENTIFIQUE" .

(B.H.S.) (Rahlf s) (Browni' Driver/ Briggs// Gesenius)


,
, Abiyâ Abia (1Ch3:10) mon père [est] Yah .

, Abiyahû Abia (2Ch13:20) mon père [est] Yah lui-même


Adayâ Adaia (I Ch8:21) [il l'] a paré, Yah
'Adayahû
, Adaia (2Ch23:1) [ill'] a paré, Yah lui-même
, Adoniyâ Adônia (1Ch3:2) mon seigneur [est] Yah
,Adoniyahû Adôniou (l R 1:8) mon seigneur [est] Yah lui-même
, Ahazyâ Okozias (2R 1:2) [il] a empoigné, Yah
, Ahazyahû OkozioU(2R 1:18) [il] a empoigné, Yah lui-même
, Ahiyâ Akia (l S 14:3) mon frère [est] Yah
, Ahiyahû Akia (2Ch10:15) mon frère [est] Yah lui-même
, Ahyô (Ahiw)* (2S6:3) frère [de] Yô/ (mon frère, lui)*
, Amaryâ Amaria (Esd10:42) [il] a dit, Yah
, Amaryahû Amarias (2Ch19:II ) [il] a di t, Y ah lui-même
,Amasyâ Amasias (2Ch17:16)[il] a porté la charge, Yah
, Amasyâ Amasias(Am.7:10) fort [est] Yah
, Amasyahû Améssiou (2R14:18)fort [est] Yah lui-même
, Ananyâ Anania (Ne3:23) [il] m'a couvert, Yah
, Anayâ Anaia (Ne10:23) [il] m'a répondu, Yah
, Asayâ Asaia (2Ch34:20) [il] a œuvré, Yah
, A!alyâ A!élia (Esd8:7) [il] a exalté, Yah ?
, A!alyahû Go!olia (2Ch22:2) [il] a exalté, Yah lui-même?
, A!ayâ Ataia(Ne Il:4) [mon] temps [est] Yah?
, Asalyahû É;éliou (2R22:3) [il] a distingué, Yah lui-même
, Azanyâ Azania (Ne10:10) [il] a prêté l'oreille, Yah
, Azaryâ Azaria (l Ch 2:8) [il] a secouru, Yah
, Azaryahû Azariou (2R 15:6) [il] a secouru, Yah lui-même
Azazyahû Ozazias (2Ch31:13) [il] s'est montré fort, Yah lui-même
Baaséyâ Baasia (I Ch6:25) dans ce qu'a fait Yah ?
Baqbuqyâ Bakbakias (Ne12:9)flacon [de] Yah
Bealyâ Baalia (l Ch12:5) maître Yah
Bédyâ Badaia (Esd10:35) [ser]viteur de Yah ?
Benayâ Banaia (Esd10:25) [il] a construit, Yah
Benayahû Banaiou(Ez Il:1) [il] a construit, Yah lui-même
Bera'yâ Baraia (I Ch8:21) [il] a créé, Yah
BèrèkYâ Barakia (1Ch3:20) béni de Y ah
BèrèkYahû Barakiou(Za 1:7) béni de Yah lui-même
Besôdyâ BasOdia(Ne3:6) dans le secret de Yah
Buqiyahû Boukias (1 Ch 25:4) [il] a éprouvé, Yah lui-même
Delayâ Dalaia (Ne7:62) [ill'] a tiré [de là], Yah
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 47

Delayahû Dalaias (Jr 36:12) [ill'] a tiré [de là], Yah lui-même
Dôdawahû
, Dôdia (2Ch20:37) bien aimé de lui [Y ah]
Éliyâ Élia (Esd10:21) mon dieu [est] Yah
'Éliyahû Éliouo R 17:1) mon dieu [est] Yah lui-même
'Èlyehô'énay Éliôènai (1Ch26:3)vers Yehô mes yeux
'Èlyô'énay Éliôènai (1 Ch 4:36) vers Yô mes yeux
Gegalyâ Gadalia (Esd10:18) [est] grand, Yah
Gegalyahû Godolia (1Ch25:3) [est] grand, Yah lui-même
Gemaryâ Gamariou (Jr29:3) [il] a complété, Yah
Gemaryahû GamariOU(Jr36:10) [il] a complété, Yah lui-même
Haggi yâ Aggia (1Ch6:30) festi vi té [de] Yah
Hakalyâ Akalia(Ne 1:1) attend Yah ?
Hananyâ Anania (1 Ch 8:24) [il] fit faveur, Yah
Hananyahû Ananiou(Jr36:12) [il] fit faveur, Yah lui-même
Hasaç!yâ Asadia (1Ch3:20) [il] est tendresse, Yah
Ha~aQenyâ Asbania(Ne3:10) [il m'] a estimé,Yah ?
Ha~aQyâ Asabia(1 Ch25:19) [il] a tenu compte, Yah
Ha~aQyahû Asabia (2Ch35:9) [il] a tenu compte, Yah lui-même
Hazayâ OZia(Ne 11:5) [ill regarda, Yah
Hilqiyâ Élkia(Ne 1l:1I) ma part [est] Yah
Hilqyahû Kélkiou(Jr 1:1) ma part [est] Yah lui-même
-;-
Hizqiyâ Ezékia (1 Ch 3:23) [il] a renforcé, Yah
Hizqiyahû Ézékiou (2R20:20) [il] a renforcé, Yah lui-même
HOQayâ Ébia (Ne7:63) [il m'] a caché, Yah
HôQ.awyâ Odouia(1 Ch5:24) loue le Yah
HôQ.aywahû Odouia (1Ch3:24) ma dignité [est] wah lui-même?
HôQ.iyâ OdOUia(Ne 10:14) dignité [est] Yah
Hôdwah Oudouia (Ne7:43) loue []wah ?
Hô~a'ayâ ÔSaia(Ne 12:32) [il] a sauvé, Yah
Kenanyâ Kônénias (lCh 15:27)ferme [est] Yah.
Kenanyahû Kônénia (lCh.15:22)fermement établi [est] Yah lui-mê.
Krenanyahû Kônéniou (2Ch31:13)fermement établi [est] Yah lui-mê.
Krenyahû lékonias (Jr 22:24) établi [parl Yah lui-même
Mre 'adyâ Maadias (Ne12:5) célébration de Yah ?
Ma'aséyâ Maasaia(Ne 10:25) œuvre de Yah
Ma'aséyahû Maassaiou (2Ch26:11)œUVrede Yah, lui-même
Ma ' az yâ Maazia (Ne10:8) forteresse [est] Y ah
Ma'azyahû Maassai (1Ch24:18)forteresse [est] Yah lui-même
Mahséyâ Maasaiou (JrI51:59)refuge [est] Yah
Malkiyâ Mélkia (Ne10:3) mon roi [est] Yah
Malkiyahû Mélkiou(Jr38:6) mon roi [est] Yah lui-même
Matanyâ Ma!ania (Esd10:26) don de Yah
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48 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Matanyahû Mattanias (2Ch29:13)don de Yah lui-même


Mati!yâ Mata!Îa (Esd10:43) don de Yah
Mati!yahû Mattathia (lCh 15:18)donde Yah lui-même
Melatyâ Maltias (Ne3:7) [il] a délivré, Yah
Me~èlèmyâ Masalami (ICh.9:21)[il] a compensé, Yah
Me~lèmyahû Mosollamiaoch26:l)[il] a compensé, Yah lui-même
Mikayâ Mikaia (Ne12:35) qui [est] comme Yah
Mikayahû Mi!ç.aias (2Ch17:7) qui [est] comme Yah lui-même
Mikayehû Mikaias(Jr36:11) qui [est] comme [Yah] lui-même
Miqenéyahû Makénia 0 Ch15:18)acquisition de Yah lui-même
Môadyâ Kairos (Ne12:17) célébration de Yah ?
Môriyâ Amoria(2Ch3:1) pourvu par Yah ?
Ne'aryâ Nôadia(1 Ch4:42) jeune de Yah
Neda!2yâ Nadabia (1Ch3:18) magnanime [est] Yah
Nehèmyâ Néémia(Ne7:7) [il] console, Yah
Nériyâ NèrioU(Jr32:12) ma lampe [est] Yah
Nériyahû NèrioU(Jr36:14) ma lampe [est] Yah lui-même
Netanyâ Natanias (l Ch 25:2) [il] a donné Yah
Netanyahû Nataniou(Jr36:14) [il] a donné Yah lui-même
Nô'adyâ Nôadia(Ne6:14) [il] a fixé rendez-vous, Yah
'Obadyâ Abadia (Esd8:9) serviteur de Yah
'Obadyahû Abdiou (l R 18:3) serviteur de Yah lui-même
Pedayâ fadaia (Ne3:25) [il] a rédimé, Yah
Pedayahû fadaia(l Ch27:20) [il] a rédimé, Yah lui-même
Pelalyâ ~alalia (NeIl:12) [il est] arbitrant, Yah
Pelatyah ~éttia (l Ch 4:42) [il] a fait échapper, Yah
Pelatyahû faltian (Esd11:1) [il] a fait échapper, Yah lui-même
Pela'yâ .~éléÎa(Ne 10:11) [il] a agi prodigieusement, Yah
Pelayâ £alaia (l Ch 3:24) [il] a distingué, Yah
Peqahyâ £akéïas (2R 15:22) [il] a ouvert [les yeux], Yah
Petahyâ ~hétaia(1 Ch24:16) [il] a ouvert [la matrice], Yah
Qôlayâ Kôlia (NeIl:7) voix de Yah
Qû~ayahû Kisaiou (l Ch 15:17) [il] a leurré, Yah lui-même?
Ra'amyâ Daémia(Ne7:7) [il] a tonné, Yah
Ramyâ Ramia (Esd10:25) élevé [est] Yah ?
Re'ayâ Raia(1 Ch4:2) [il] a vu, Yah
Re'élayâ Réélias (Esd2:2) [il] a fait trembler, Yah
Reha!2yâ Raabia (l Ch23:17) [il] donne du large, Yah
Reha!2yahû Raabias (1Ch26:25) [il] donne du large, Yah lui-même
Remalyahû Roméliou (2R16:1) [il] a orné, Yah ?
ReQayâ RaQaia (1Ch7:2) [il] a guéri, Yah
Semakyahû Sama!ç.ias (lCh26:7)[il] a soutenu, Yah lui-même
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 49

Sel!anyâ Sal!ania (lCh.6:2l) [il] a mis en lieu sûr, Yah


Sel!anyahû S0l!onian (lIR.25:18)
[il] a mis en lieu sûr, Yah lui-même
Serayâ Saraia (NeIl:Il) [il] a lutté, Yah
Serayahû Saraia (Jr36:26) [il] a lutté,Yah lui-même
Shehanyâ Sabania(Ne 10:11) [il] a ? Yah
She!lanyahû Sobnia (1 Ch 15:24) [il] a ? Yah lui-même
Sheharyâ Saaria (l Ch 8:26) [il] a langui,Yah ?
Shekanyâ Sa!ç.ania (Esd8:3) résidence de Yah
Shekanyahû Sékonias (2Ch31:15)résidence de Yah lui-même
Shèlèmyâ Sélémia (Esd10:39) [il] a compensé, Yah
Shèlèmyahû Sélémiou (Jr36:14) [il] a compensé, Yah lui-même
Shemaryâ Samaria (Esd10:32) [il] a gardé, Yah
Shemaryahû Samaria (l Ch12:5) [il] a gardé, Yah lui-même
Shema'yâ Samaiao Ch3:22) [il] a écouté, Yah
Shema 'yahû Samaiou (Jr 26:20) [il] a écouté, Yah lui-même
Shel!atyâ Sal!atia(I Ch 3:3) [il] a jugé, Yah
Shel!atyahû Sal!atias (lCh27:16) [il] a jugé, Yah lui-même
Shérébyâ Sarabia(Ne 12:8) [il] a réchauffé, Yah
Sidqiyâ Sédékias (IR 22:1l) ma justice [est] Yah
Sidqiyahû Sédékiou (IR 22:24) ma justice [est] Yah lui-même
Tebalyahû Tablai (I Ch 26:11) [il] a immergé, Yah lui-même
Tôhiyâ Tôbia(Ne7:62) bon [est] Yah
Tôbiyahû Tôbias(2Ch 17:8) bon [est] Yah lui-même
'Ûriyâ Ouria(Esd8:33) ma lumière [est] Yah
'Ûriyahû Ourias(Jr26:20) ma lumière [est] Yah lui-même
'Uziyâ OZia(Esd 10:21) ma puissance [est] Yah
'Uziyahû Oziou (2Ch26:22) ma puissance [est] Yah lui-même
Y a 'arè~yâ larasia (l Ch8:27) [il] a engraissé, Yah ?
Ya'azanyâ Iézonian (Jr 35:3) [il] prête l'oreille, Yah
Ya'azanyahû lézonias(Ez8:11) [il] prête l'oreille, Yah lui-même
Ya'aziyâ OZia(1 Ch24:26) [il] a affermi, Yah ?
Yahzeyâ lazia (Esd10:15) puisse apercevoir, Yah
YehèrèkYahû Barakiou(ls8:2) [il] a béni, Yah lui-même
Yef!a' e yâ Iadia (NeIl: 10) [il] a connu, Yah
Yef!ayâ Iédaia(Ne3:10) [il] a loué Yah ?
Yef!iQ.yah Idédi (2S 12:25) bien-aimé de Yah
Yèhdeyahû ladia (1 Ch24:20) qu'il réjouisse, Yah lui-même
Yehiyâ lia (l Ch15:24) qu'il vive, Yah
Yehizqiyâ Ézékia (Esd2:16) puisse renforcer, Yah
Yehizqiyahû ÉzékiOU(Jr 15:4) puisse renforcer, Yah lui-même
Yehô'ada Iôiada (1Ch8:36) Yehô [s'est] paré
Yehô'adan lôadén(2Ch25:l) Yehô [est] plaisir
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50 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Yehô'adin lôadin (2 R 14:2) Yehô [est] plaisir


Yehô' ahaz lôakaz (2 Ch36:1) Yehô a empoigné
Yehô'a~ lôas (1 R 14:8) Yehô a procuré de l'aide?
Yehôhanan lôanan (Esd10:28) Yehô a favorisé
Yehônadab lônadab (2 S 13:5) Yehô [est] magnanime
Yehônatan lôna!an (1 S 14:6) Yehô a donné
Yehôram IÔram(2Rl:17) Yehô [est] élevé
YehôsaQ.aq lôsadak (1 Ch5:40) Yehô fait justice
y ehô~ab' at lôsabé! (2 Ch22:11) Yehô [est] serment?
Y ehô~al!a! lôsal!at (1 Ch 18:15) Yehô a jugé
Y ehô~è ba ' lôsabéé (2 R II:2) Yehô [est] serment
Yehô~ûa' lèsou (2 R 23:8) [Yehô est] salut
Yehôyada ' lôadaé (1 Ch 12:28) Yehô puisse connaître
Yehôyakin lôakim (2 R 24:12) Yehô établira fermement
Yehôyaqim lôakim (1 Ch3:15) Yehô élèvera
YehôyariJ2 lari b (1 Ch 24:7) Yehô plaidera
Yehôzabad lôzabad (1 Ch 26:4) Yehô a fait cadeau
Yéhû' lèou (1 Ch2:38) Y é[ho], lui-même
Yekrelyahû Kalia (2 R 15:2) [il] fut capable, Yah lui-même
Yekrenyâ lékonias (1 Ch3:16) [il] a établi fermement, Yah
Yekrenyahû lékonian (Jr24:1) [il] a établi fermement,Yah lui-mê.
Yeqamyâ lékémia (1 Ch3:18) [il] a élevé, Yah
Yeri yâ loudias (1 Ch 26:31) puisse pourvoir, Yah ?
Yeriyahû lédiou (1 Ch24:23) puisse pourvoir, Yah lui-même
Ye~a 'yâ lésia (Esd8:7) [est] salut, Yah
Ye~a'yahû Esaias (Is 1:1) [est] salut, Yah lui-même
Yé~ûa ' lèsou (l Ch 24:11) [Yé. est] salut
Yezanyâ lézonias(Jr42:l) Iii] a prêté l'oreille,Yah
Yezanyahû lézonias (Jr40:8) [il] a prêté l'oreille,Yah lui-même
YiJ2neyâ Ibanaa (I Ch9:8) [il] bâtira, Y ah
Yihniyâ Banaia (I Ch9:8) [il] bâtira, Yah
Yigdalyahû Godoliou (Jf35:4) [il rendra] grand, Yah lui-même
Yiillteyâ léQéria (l Ch 8:25) [il] a rédimé, Yah
Yir'îyâ Sarouias (Jf37:14) [il] voit, Yah
Yirmeyâ lérmia (Ne10:3) [il] exaltera, Yah ?
Yirmeyahû lérémiou (2Ch36:21) [il] exaltera, Yah lui-même?
Yi~iyâ Isia (l Ch24:25) [il] a fait oublier, Yah
Yi~iyahû lèsouni (l Ch 12:7) [il] a fait oublier, Yah lui-même
Yi~ma 'yah Samaias (l Ch 12:4) puisse entendre, Yah
Yi~ma'yahû Samaias (lCh 27:19) puisse entendre, Yah lui-même
Yismakyahû Samakia (2Ch31:13) [il] a soutenu,Yah lui-même
Yiziyâ lazia (Esd10:25) [il] fait jaillir, Yah
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 51

Yizrahyâ lézria (l Ch 7:3) [il] a fait briller, Yah


Yô' ab lôab (2 S 8:16) YÔ [est] père
Yô'ah lôaa (l Ch 26:4) Yô [est] frère
Yô'cihaz lôakaz (2 Ch 34:8) Yô a empoigné
Yô'a~ lôas (I R 22:26) YÔ a procuré de l'aide
Yô' éd lôad (Ne 11:7) Yô [est] témoin
Yô'él lôèl (l Ch 5:12) YÔ [est] Dieu
Yô'èzèr I ôazar (1 Ch 12:7) Yô [est] secours
Yôha' lôka (l Ch 8:16) Yô a favor[isé] ?
Yôhanan I ôanan (Ne 12:22) Yô a favorisé
Yôkèbèd lôkabéd (Ex 6:20) Yô [est] gloire
y ônadab lônadab (2 S 13:3) Yô [est] magnanime
Yônatan lônatan (l S 14:1) Yô a donné
yôqim lôakim (l Ch 4:22) YÔ [a] élevé
Yôram lôram (2 R 8:21) Yô [est] élevé
yôsadaq lôsédék (Ne 12:26) Yô a fait justice
Yô~agat lôsagat (l Ch Il :43) Yô a jugé
Yô~awyâ lôsia (I Ch Il :46) [il] fait résider, Yah ?
Yô~iQyâ Isabia (I Ch 4:35) [il] fait résider, Yah
Yo'~iyâ lôsi OU (Za 6: 10) [il] a soigné, Yah
Yo'~iyahû lôsia (Jr 1:2) [il] a soigné, Yah lui-même
YôsiID'â lôségia (Esd 8:10) [il] ajoutera, Yah
Yôtam I ôa!am (2 R 15:36) Yô [est] complet
Yôyada lôada (Ne 12:22) YÔ puisse connaître
Yôyakin I ôaki m (Ez 1:2) YÔ établira
Yôyaqim lôakim (Ne 12:10) YÔ élèvera
Yôyarib lôiari b (Ne 12:6) YÔ plaidera
Yôzabad lôzabad (l Ch 12:4) YÔ a fait cadeau
Yôzakar lézikar (2 R 12:21) Yô s'est souvenu
ZehaQyâ Zabadia (I Ch 8:15) [il] a fait cadeau, Yah
ZehaQyahû Zabadias (lCh 26:2) [il] a fait cadeau, Yah lui-même
Zekaryâ Zakaria (Esd 8:II) [il] s'est souvenu, Yah
Zekaryahû Zakariou (2Ch 26:5) [il] s'est souvenu, Yah lui-même
Zerahyâ Zaraia (Esd 7:4) [il] a brillé, Yah ?

~ On constate ainsi un accord assez remarquable entre ces


deux textes, malgré une transmission indépendante sur plus de
vingt siècles. Les écarts, assez mineurs, peuvent s'expliquer par le
fait que la traduction de latSeptante fut sans doute influencée par la
langue araméenne de ses rédacteurs. La prononciation hébraïque
authentique est probablement plus proche de la vocalisation
massorétique. Ainsi, 60 % des textes trouvés à Qumrân20, datés de
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52 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

-275 à 7021, sont en accord avec le texte mas soréti que, ce qui, par
contrecoup, confirme aussi sa vocalisation. De plus, la Septante fut
révisée très tôt, vers la moitié du premier siècle, sur un texte
conforme au texte massorétique22.
~ En observant les transcriptions de ces noms dans le texte de
la Septante, on constate un phénomène extrêmement curieux. En
effet, si les formes Yehô- des noms hébreux sont devenues lô- en
grec, cela est simplement dû au fait que 13:lettre h n'existe pas en
grec (même en hébreu, cette lettre était devenue inaudible); par
contre, la finale des noms en yahû est systématiquement et sans
exception déformée. Ce phénomène est trop répétitif pour être
seulement dû au hasard. On observe la même anomalie dans les
textes de Qumrân. Par exemple, dans le plus vieux texte d'lsaïe23,
daté entre -150 et -100, on note que le copiste a systématiquement
modifié les terminaisons -yahou (-yhw) des noms propres en -yah
(-yh). Il s'agit bien d'une modification volontaire, car
premièrement ces noms sont bien écrits -yahou sur les sceaux datés
du 7e siècle avant notre ère, et deuxièmement le scribe connaissait
bien cette orthographe puisqu'il l'a utilisée par inadvertance dans
ses corrections du texte en Isaïe 1:1 et 38:21. Un siècle plus tard,
dans une copie d'lsaïe24 datée de -50, les terminaisons en -yahou
ont été rétablies. Lorsque la Septante sera révisée par Aquila, vers
130, celui-ci rétablira finalement ces terminaisons dans le texte
grec. Par exemple, le nom lôs-ia redevient lôs-iaou (2 R 23: 16, 19,
23, 34), le nom Kélk-ias (parfois écrit Kélk-iou) redevient Élk-iaou
(2 R 23:24), etc.
De ce qui précède, on peut déduire que, autour du 3e siècle
avant notre ère, la prononciation laou était devenue taboue pour les
Juifs. Était-ce la prononciation du nom de Dieu? En fait, il s'agit
simplement de la prononciation du substitut Yahou utilisé par les
Juifs au 5e siècle avant notre ère dans les lettres d'Éléphantine, dont
la vénération était en passe d'égaler celle du Tétragramme.

Peut-on cependant retrouver la prononciation du Nom


grâce au témoignage de la Septante? La réponse est oui si on se
rappelle que le Tétragramme n'a jamais été mis à la fin des noms
théophores mais seulement en tête, ce qui constitue une exception.
En effet, le mot "ÉI" (Dieu) peut se trouver soit au début des noms,
comme dans Eleazar, Èlqana, Eldad, etc., soit à la fin, comme dans
Daniel, Gabriel, Béthel, etc. Cela est vrai pour tous les autres
qualificatifs comme "adon" (seigneur), "ab" (père), etc.
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1.4 - LE NOM LU DISTINCTEMENT 53

y ~1h1~'
ahaz ' Abazy ~1h1
Y ~1h1~hanan Banany ~1h1 ~JEllhanan Hanan~ ~ll
Y ~1h1~nadab NegaQy~1h1
y ~1h1~natan Ne!any~1h1 ~JEllnatan Netan~ ~ll
y ce1h1~saQ.aq Sigqiy~1h1
1f ce1h1~~al!a! ~ella!y ~1h1 ~Èllî~a1?a!
Y ce1h1~~ûa' Y e~a 'y Œl1h1 ~JÈllî~ûa'
Y ce1h1~yada ' Yega' ey~1h1 ~Èllyada' Yedî'a~~ll
y ~Ih1~zabad ZehaQ..y ~1h1 ~JÈllzabad Zabdî9 ~II

IŒ" On peut donc vérifier que, sans exception, les noms


théophores commençant par YHW - sont vocalisés YeHO- (10- dans
la Se{?tante), et ceux qui se terminent par -y HW sont vocalisés
-YaHÛ (-lA et -IOU dans la Septante). Autre remarque, la voyelle
a suit la séquence YeHO-, ce qui donne la séquence complète
YeHO-a- (une étude générale sur les noms bibli~es a montré une
fréquence très élevée de la série vocalique e-ô-a) . Cette séquence
YeHO-a- est tellement universelle dans les noms théophores (on ne
trouve jamais, par exemple, YeHO-i-, YeHO-é, etc.) que d'autres
noms furent complètement aspirés par elle. Ainsi, certains noms
propres ordinaires vont être "théophorisés" par assonance. On
trouve les traces de ce phénomène, qui a dû se produire avant la
rédaction de la Septante, dans les noms suivants: lôatam (Jg 9:7,
57; 2 R 15:5,32; etc.), lôakéim (1 Ch 4:22), lôas (1 Ch 23:10, Il),
lôasar (1 Ch 2: 18), lôakal (Jr 37:3), etc. De même, dans une lettre
d'Égypte datée de -257, on trouve le nom lôanai26. Dans certains
cas,
, la transformation est même très surprenante, comme le nom
ahazyahû qui devient lôakas (2 R 14: 13).
Une analyse fine des noms propres de la Septante permet
donc de conclure que vers le 3e siècle avant notre ère la
prononciation laou était devenue trop sacrée pour être encore
écrite, et que la prononciation plus ancienne laô avait eu une
grande influence, puisque le début de certains noms propres était
même devenu lôa-. On l'a vu, cette puissante assonance est aussi à
l'origine de la transformation du nom de Yehôshûa' (Josué) en
Yéshûa' (Jésus). Dans ce cas, la séquence YeHO-Û-a- est devenue
Yé-OU-a-. Enfin, dernier point concernant la prononciation, le H
final dans les noms se terminant par -WH est toujours vocalisé -A
(les terminaisons -èH proviennent d'un ancien -aH; par exemple le
nom Ninwéh est prononcé Ninua dans un texte assyrien de Cyrus,
daté du 6e siècle avant notre ère).
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54 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

M.T. LXX RÉFÉRENCE


'Alwah Gôla Gn 36:40
Hawah Euan Gn 4: 1
I~wah Iésoua Gn 46:17
,
Iwah Aua 2 R 19:13
Ninwéh Ninéuè Gn 10: Il
Puwah Poua Nb 26:23
~awéh Sauè Gn 14:5
Tiqwah Tékoué 2 R 22:14

1.4.3 Conclusions sur la prononciation du nom divin


On a pu le constater, en dehors de la vocalisation
massorétique, il existe plusieurs méthodes pour retrouver la
prononciation d'un nom au premier siècle de notre ère. Cependant,
sur les quatre méthodes de reconstitution, celle fondée sur
l'étymologie biblique (qui est en fait un enseignement religieux),
par essence non scientifique, ne peut être utilisée dans ce but. Les
trois autres méthodes donnent par contre des résultats concordants.
Dans le cas du Tétragramme, ces trois méthodes donnent
successivement les trois prononciations, Iaô, Yehowah et Ihûa.
L'examen du contexte historique a permis d'expliquer la
discordance en Iaô. En effet, à cette époque le substitut hébraïque
YHW, ou son homologue araméen YW, était encore largement
utilisé parmi les Juifs. De plus, les témoignages en Iaô ont évolué
avec le temps, reflétant simplement l'évolution de la prononciation -
du nombre 16 (interdit), soit YaW. Ainsi, on constate un bon
accord entre les deux prononciations Yehowah et Ihûa, aussi
satisfaisant que Yehûdah et Ihûda, Yésûa' et Isûa', etc. Eu égard à
cette concordance, l'unanimité sur la vocalisation aurait dû être
facile à obtenir!
En fait, la difficulté provient d'une utilisation fautive des
témoignages sur le Nom. En effet, de nombreux auteurs "oublient"
de préciser l'époque (ce qui est crucial à cause de l'emploi des
substituts pour le Nom), et le lieu (ce qui est crucial à cause de
l'emploi de la langue utilisée [hébreu ou araméen], et donc de la
vocalisation). L'historique qui suit permettra de situer l'utilisation
des noms divins YHWH (Yehowah), YHW (Yahou), YW (Yaw) et
YH (Yah) dans leurs époques et dans leurs lieux respectifs.
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Chapitre second

Historique
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57

2.1 D'Adam à Moïse [-4000-1500]


Pendant cette ~riode la Bible est catégorique: le Nom est
connu. Par exemple, Ève l'a utilisé (Gn 4:1), et Abraham l'a
invoqué (Gn 12:8), c'est-à-dire crié avec supplication, d'après le
sens du terme hébreu. Comment un nom imprononçable serait-il
crié? De plus, à cette époque, et dans toutes les cultures
(égyptienne, babylonienne, etc.27), un Dieu sans nom est un Dieu
qui n'existe pas. La culture sémite ne fait pas exception; être sans
nom est même un non-sens (Jb 30:8).

2.1.1 Conception magique de l'emploi des noms


Cependant, une différence de taille sépare les Hébreux des
autres peuples concernant la conception du nom de la divinité:
Dans les peuples de l'Antiquité, le fait d'invoquer le nom du dieu
contraint celui-ci à agir, c'est une conception magique du nom;
alors que chez les Hébreux le fait d'invoquer le nom de Dieu est
seulement une supplication et non une incantation (1 R 8:33, 34).
Cette nuance est capitale. Par exemple, dans son dialogue avec
Jésus, Satan cita Psaume 91: Il, 12 dans le sens d'une obligation
pour Dieu; c'est la conception magique de la prière (analogue à la
lampe d'Aladin). Jésus rectifia cette conception erronée (Mt 4:6, 7).
Pour les Égyptiens, les Babyloniens28, etc., une chose ou un
être n'a d'existence réelle qu'à partir du moment où il a reçu un
nom, et le fait d'être en possession de ce nom crée, pour celui qui le
connaît, un véritable pouvoir sur l'être ou la chose. D'où
l'importance de la prononciation exacte du nom29, et aussi de sa
répétition pour renforcer le pouvoir de l'énonciation. D'où, encore,
le pouvoir de l'écriture, qui n'est que le langage matérialisé, et des
représentations figurées. Cette démarche procède de la croyance à
la possibilité d'exercer une contrainte sur la divinité si l'on emploie
les mots qu'il faut, et par conséquent de l'importance du rituel.
Cette conception entraîne des conséquences paradoxales. Pour ne
pas risquer d'être contraints, les dieux et les pharaons ne livreront
pas leurs vrais noms mais seulement des pseudonymes. D'ailleurs,
le nom Amon signifie "le caché"~, car seuls les initiés connaissaient
son nom véritable, et pouvaient donc l'obliger à agir. Pour éviter
qu'un personnage ne nuise d'aucune façon, on détruisait
littéralement son nom (en fait son pseudonyme). Par exemple, les
noms des pharaons ou des dieux tombés en disgrâce furent
martelés. De même, dans un procès on ne mentionnait jamais le
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58 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

nom des coupables, de peur que ces noms ne produisent


ultérieurement une mauvaise influence. '
Ainsi, à cause de cette conception magique du nom31, il
était sans intérêt pour les peuples de l'Antiquité de connaître, et
d'utiliser, le nom du dieu des Hébreux, pour au moins deux
raisons. Premièrement, de façon pragmatique, ces peuples
pouvaient constater que le fait d'utiliser le Tétragramme ne
produisait aucun avantage pour eux (Dt 7:6). Deuxièmement, les
rapports conflictuels des Hébreux avec leurs voisins ont
certainement amené ces derniers à considérer le dieu des Hébreux
comme un ennemi, et, comme on l'a vu, pour se protéger de son
influence ils ont donc évité d'utiliser son nom. La seule exception à
cette règle de conduite se produisait lorsqu'on jetait un sort sur ses
ennemis. En effet, on écrivait le nom de l'ennemi à combattre sur
une figurine représentant cet ennemi et on détruisait ensuite cette
figurine pour sceller son destin. Par la suite, lorsque l'ennemi était
battu, ses dieux étaient pris en butin et leurs noms pouvaient être
utilisés (par contrainte, "conception: lampe d'Aladin ").

2.1.2 Traces extra-bibliques du nom divin


De ce qui précède, on peut déduire que retrouver le nom de
Dieu est très hasardeux (mais possible dans des conditions très
précises). Pourtant, les archéologues proposent plusieurs traces du
nom divin durant cette période, mais l'interprétation en est délicate.
Par exemple, dans les tablettes d'Ébla écrites en cunéiforme entre
-2400 et -1800 apparaissent plusieurs fois des noms qui pourraient
être théophores, c'est-à-dire avec la composante "ia" ou "ia-u" à
l'intérieur du nom. Ainsi, le nom Mi-ka~ia pourrait se traduire par
"qui [est] comme ia", car le nom Mi-ka-il signifie "qui [est]
comme dieu". Cependant, la composante "ia" signifie aussi "le
mien "32, sous-entendu "le mien [de dieu]", ce qui affaiblit
considérablement l'identification de ce nom avec celui du Dieu
biblique. Ainsi Mi-ka-ia peut aussi se traduire par "qui [est] comme
le mien [de dieu]". De même, la-ra-mu peut se traduire par "ia [est]
exalté" ou "le mien [de dieu est] exalté"; ~u-mi-a-u peut être traduit
par "fils de ia-u" ou "fils du mien [de dieu]"; etc. En fait, ces
identifications sont seulement basées sur une homophonie; rien ne
permet de dire s'il s'agit d'une coïncidence ou non. De même, dans
le passé, certains érudits avaient relié le nom Jupiter (père jov[ial])
avec le Tétragramme, sans entraîner l'adhésion générale.
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2.1 - D'ADAM À MoïsE [-4000-1500J 59

~ Les noms babyloniens33 Ya-u-um-ilu, Ya-u-ba-ni,-etc., que


l'on trouve durant la première dynastie (-1900-1600), présentent la
même difficulté puisqu'on peut traduire Ya-u-um-ilu par "Ya-u
[est] dieu" ou "le mien [de dieu est] dieu", et Ya-u-ba-ni par "Ya-u
[est] créateur" ou "le mi en [de dieu est] créateur", etc. Il est très
improbable que ces noms soient théophores, car, comme on l'a vu,
les Babyloniens ne vouaient aucun culte au Dieu de la Bible.
Deuxièmement, si ces noms étaient d'origine hébraïque, ils auraient
probablement été échangés contre des noms babyloniens, comme
ce fut le cas pour Daniel et ses compagnons (Dn l :7).
Les noms amorites (autour de -1800) :J'osent le même
problème. Certes un nom comme celui de Ili-ya peut se traduire
par "mon dieu [c'est] ya35", mais le contexte cultuel favorise plutôt
la traduction "mon dieu [c'est] le mien", comme le nom biblique
Eliel qui signifie "mon dieu [c'est] Dieu", car aucun des écrits
amorites retrouvés ne corrobore l'existence d'un culte au dieu yah
I(ou yahou). Les noms amorites36 présentent une autre particularité:
~Plusieurs commencent par la composante Ya-wi-, qui se rapproche
phonétiquement du nom divin biblique. Par exemple, le nom
I
amorite Ya-wi-AN correspond exactement au nom akkadien
Iba~~i-AN, c'est-à-dire qu'il se lit Ya-wi-i-Ia et qu'il signifie "il est
I
dieu"37 ou plus exactement "il se révèle être dieu".~
L'expression "il se révèle être dieu" que l'on trouve dans les
noms amorites est une définition théologique identique à celle de
la Bible (Ex 3: 14), mais en fait cela ne prouve rien sur la
prononciation du Tétragramme, à moins d'admettre deux choses:
premièrement que l'amorite était une langue identique à l'hébreu, et
deuxièmement que le Tétragramme se confondait avec sa
définition théologique. Cependant, cette dernière affirmation est
douteuse, car, comme on l'a vu, il y a de nombreuses exceptions
dans la Bible, notamment concernant les noms les plus connus dont
la signification étymologique "scientifique" est complètement
différente de l'étymologie biblique. D'ailleurs, à cette époque, cette
façon de procéder est fréquente dans les documents égyptiens ou
babyloniens, où les étymologies sont pl us des expressions
symboliques que des définitions linguistiques (qui étaient de peu
d'intérêt), c'est-à-dire plus basées sur l'assonance ou le jeu de mot38.
Il est donc préférable de parler d'étymologies religieuses. De plus,
si le Tétragramme était vfraiment équivalent à son étymologie
biblique "Il est" (ou mieux "il se révèle être "), la Bi ble, ou pl us
exactement le Pentateuque, aurait été illisible, car il y aurait eu des
confusions permanentes entre les milliers de Tétragrammes (yhwh)
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60 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

et les milliers de formes verbales "il est" (yihyèh), ce qui n'a jamais
été le cas en hébreu. Par contre, en araméen, cette confusion est
possible avec la forme verbale "il est" (yihwèh)39 et le nom yhwh.
Les noms provenant des annales égyptiennes sont plus
intéressants, car durant cette période (-1750-1500), d'après la Bible,
les Hébreux vécurent en Égypte. Effectivement, les annales
égyptiennes relatent que durant cette période vécut un peuple
asiatique appelé Hyksos, dont certains membres régnèrent même
sur l'Égypte avant d'être boutés hors du pays par le pharaon
Ahmosis. Vers 280 avant notre ère, le prêtre égyptien Manéthon
précisa, dans ses chroniques historiques, que ces myriades de
renégats expulsés d'Égypte étaient les aïeux des Juifs qui
occupèrent ensuite la Judée, fondèrent Jérusalem et bâtirent le
Temple (quelques années auparavant, vers -300, l'écrivain grec
Hécatée d'Abdère mentionnait déjà cet événement).
Cependant, les annales égyptiennes relatent que ces
Asiatiques reçurent des noms égyptiens40, pratique confirmée par
la Bible (Gn 41:45), rendant l'exploitation des noms extrêmement
délicate, voire impossible. Par exemple, on trouve des personnages
égyptiens d'origine asiatique nommés Touya et Youya, mais la
signification exacte de ces noms est inconnue; de plus ces noms ne
sont probablement pas d'origine hébraïque. On trouve aussi le nom
divin Horus-ia, ou Horus-iaou, durant cette période41. Un papyrus
égyptien daté autour de -100 mentionne le nom Horus-yah (ou
yahou) dans un hymne araméen42 traduit en démotique, très
proche de Psaume 20:2-7. Mais là encore, ces coïncidences
fondées sur l'homophonie sont peu concluantesJ car ces
rapprochements sont trop hasardeux. De même qu'une déesse
grecque qui se nomme 10 n'a provoqué aucun rapprochement avec
le Tétragramme.
Le seul point notable sur les noms égyptiens concerne le
fait que les Pharaons ont fait inscrire leurs noms officiels sur des
scarabées, car en langue égyptienne il y a un jeu de mot provenant
de l'homophonie entre le mot "scarabée" (hepri) et la formule
signifiant "il vient à être". On remarque que cette dernière
expression a un lien avec la définition théologique du
Tétragramme en Exode 3:14. Le pharaon Wahkare Khety II
(autour de -2100), pour exprimer qu'il agissait puissamment contre
les bédouins, clama pour le démontrer: «Je suis tant que je suis», ce
qui prouve que la conception théologique d'un Dieu qui "se révèle
être" avait des versions rivales chez les Égyptiens et chez les
Amorites.
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2.1 - D'ADAM À MoïsE [-4000-1500J 61

2. 1.3 Problèmes de transcription et de vocalisation

On constate que tous ces noms théophores extra-bibliques


qui viennent d'être répertoriés favorisent les deux radicaux Ya et
Yahou. En admettant qu'ils reflètent les noms divins de la Bible, ce
qui, comme on l'a vu, est impossible à démontrer dans l'état des
données actuelles, plusieurs problèmes restent à résoudre, car les
transcriptions d'un nom (roi, ville, etc.) dans une autre langue
étaient très fluctuantes, et de nombreux écarts sont difficiles à
expliquer aujourd'hui. De plus, concernant les voyelles dans les
langues sémitiques, on ne peut rien pronostiquer de façon sûre, car
c'est un élément faible et donc très variable. Exemple des variations
que l'on accepte dans les transcriptions des noms, le terme
"Israélite", Yisr'éli en hébreu (2 S 17:25), est considéré comme
équivalant au nom akkadien sir-'i-Ia-a-a (qu'il faut lire Sir'ilaya)
dans la stèle de Shalmaneser III. Autre exemple: le nom Môab écrit
en cunéiforme Mu-'a-ba est très souvent aussi écrit Ma-'a-ba, car
le son a était apprécié et souvent préféré en dépit de la vraie
voyelle43!
~ Deuxième problème, souvent passé sous silence par les
auteurs de commentaires, les transcriptions cunéiformes en
akkadien sont des transcriptions syllabiques qui, malheureusement,
n'ont qu'un seul signe pour représenter les sons suivants: ya, ye, yi,
yu, wa, we, wi, wu. En fait, il n'existe qu'un seul signe spécifique
pour préciser le son -ia, et aucun pour le son h. Donc, le nom
Yehudah ne peut être transcrit, dans le meilleur des cas, qu'en Ia-u-
da ou la-hu-da; le nom Yô'ash par la-ash ou la-'a-shu; etc.
.Conséquence logique de ce qui précède, si le Tétragramme se
I

prononçait Yehowah en hébreu, la transcription akkadienne de ce


nom ne pouvait être, dans le meilleur des cas, que Ia-'u-'a ou
encore Ia-hu-'a. On remarquera d'ailleurs que le nom Yéhou'
(Ièou dans la Septante) a été transcrit Ia-'u-'a (et Ia-'u) dans les
~textes44 de Shalmaneser III, au ge siècle avant notre ère. ~

IŒ Dernier problème, les informations provenant des noms


théophores durant cette période sont-elles bibliquement
significatives? Une fois de plus la réponse est, hélas, négative. En
effet, avant Moïse les noms théophores sont rares; il n'yen a qu'un
seul mentionné explicitement dans le Pentateuque, c'est le nom de
Yôkèbèd, qui signifie "YÔ [est] gloire". En fait, la pratique des
noms théophores ne se généralisera que vers le lIe siècle avant
notre ère, à partir du règne de Salomon.
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62 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

~ Actuellement, le plus vieux nom théophore probable est


Yôhanan gwhnn), écrit en paléo-hébreu et daté du lie siècle avant
notre ère (époque qui utilise déjà les matres lectionis à l'intérieur
des noms.46) Cependant, l'influence du nom Yahou est telle que ce
nom Yô!lanan est plutôt lu yaw!lanan, alors que le nom Y~', de la
même époque, est lu Yi~a' et non Ya~a', car proche du nom Yi~y
(1 S 20:27). De plus, il y a une tendance à vocaliser tous les noms
anciens en Ya-, ceci étant favorisé par la croyance que tous les
noms sémitiques ortt suivi une évolution générale Ya> Yi> Ye,
d'après une loi linguistique assez bien vérifiée (loi de Barth-
Ginsberg)47. Cependant, cette loi est souvent appliquée à l'envers,
c'est-à-dire Ye<Yi<Ya, ce qui est manifestement faux. Par exemple,
le nom Yisra'él aurait dû s'écrire Ia-a~-ra-il à cette époque; or à
Ébla, dans des documents datés de la fin du troisième millénaire
avant notre ère, on rencontre le nom I~-ra-il, équivalent exact de
Yisraél. En fait, des études ont montré que des formes verbales et
des noms pouvaient se vocaliser Yi- plutôt que Ya- à Ébla48.
D'ailleurs, dans les textes de Mari49, datant de la même époque, des
spécialistes ont abouti à la même conclusion sur la vocalisation Yi-
plutôt que Ya- dans de nombreux cas. Il est donc actuellement
admis que, parmi les plus vieux textes connus, cette loi (Ya>Yi> Ye)
comportait de nombreuses exceptions.
~ De plus, si les noms théophores se prononçaient encore
Yaho- (en hébreu) au début du 3e siècle avant notre ère (voir ~
2.7.2), les traducteurs de la Septante auraient dû conserver ces
noms en Iaô- puisqu'ils ont généralement gardé la première voyelle
des noms propres (Zakaria, Nathania, Qahath, au lieu de Zekaria,
Nethania, Qehath, etc.). Or, parmi les milliers de noms théophores
dans la Bible grecque, il n'yen a aucun qui soit resté en Iaô- (ou
même en Ia- seulement), ce qui aurait dû être fréquent si ces noms
commençaient par Yahow- (ou Yaw-). Par exemple, tous les noms
"théophores" du dieu Nabou (commençant par Nebo- en hébreu)
sont écrits Nabou- dans la Septante. Donc le début en lô- des noms
théophores atteste la vocalisation Y(eh)o- et non Y(ah)o-. ~
Ainsi, supposer que tous les noms théophores hébreux
actuellement vocalisés Yehô- proviendraient d'une forme Yahû-
"archaïque" est injustifiable sur le seul fondement des lois
linguistiquesSO. Non seulement la vocalisation de ces noms reste
très hypothétique, mais même leur sens, ou leur étymologie,
reflètent davantage, malgré les justifications philologiques parfois
proposées, les convictions des auteurs actuels, que des preuves
solidement avérées51.
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63

2.2 De Moïse à David [-1500-1000]


Moïse joua effectivement un grand rôle dans la diffusion
du Nom (Ex 3: 14). Cependant, affirmer que le Tétragramme n'était
pas connu avant lui c'est, comme on l'a vu, contredire le texte
biblique. Pourtant, de nombreux biblistes acceptent cette
affirmation, ou bien affirment que le Tétragramme est une forme
verbale, ce qui revient au même. En effet, assimiler le nom divin à
une forme verbale, c'est admettre tacitement une équivalence entre
la définition d'Exode 3: 14 et le nom de Dieu. Accepter cela, c'est
admettre que, soit ce nom n'était pas prononçable avant Moïse, soit
les Hébreux du temps de Moïse ne comprenaient pas l'hébreu, d'où
la nécessité d'une explication grammaticale sur le Nom! Tout cela
n'est pas très logique et contredit la Bible. De plus, se servir
d'Exode 6:3 pour justifier le fait que le nom de Dieu n'était pas
connu avant'MoIse c'est ignorer que le mot "nom" a souvent le sens
de renom dans la Bible (Gn 6:4; Nb 16:2; etc.); et croire, comme
l'indique MaImonide dans son livre Le guide des égarés, que la
connaissance d'une bonne prononciation du Nom aurait pu
pousser les Israélites à l'action, c'est visiblement croire à un non-
sens, car comment quelqu'un de raisonnable serait-il motivé par la
connaissance d'une prononciation correcte du Tétragramme?
Les Israélites n'ont pas demandé à connaître la
prononciation du Nom (puisqu'ils -la connaissaient), mais la
signification de ce nom. Asservis par les Égyptiens depuis plus de
deux siècles, il semblait que leur Dieu était impuissant face aux
dieux égyptiens. D'ailleurs, même Pharaon posa plus tard à MoIse à
peu près la même question: «Qui est Yehowah pour que j'obéisse à
sa voLr?» (Ex 5:2), pour savoir ce que représentait ce nom, et non
la prononciation, qu'il connaissait visiblement.

2.2.1 Comment comprendre Exode 3:13, 14 ?


Cette mauvaise compréhension est facilitée par une
mauvaise traduction de la question en Exode 3: 13. En effet, dans
de nombreuses Bibles on peut lire la question: «Quel est son
nom?», comme en Juges 13: 17, lorsque Manoah veut connaître le
nom" c'est-à-dire la pronoQciation du nom, de l'ange qui vient le
voir; alors qu'en fait les Israélites demandent plutôt à MoIse:
«Qu'est-ce que son nom?», c'est-à-dire «Qu'est-ce que signifie son
nom?» ou encore «Qu'est-ce que signifie son renom?»
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64 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

~ On peut vérifier qu'en hébreu l'interrogation "qu'est-ce que,


quoi" se dit mâ (iT~)et "quel, qui" se d~t mî (ltr;).Ainsi, il y a une
grande différence lorsqu'on demande à connaître un nom parce
qu'on l'ignore, comme en Ezra 5:4, et lorsqu'on demande à
connaître la signification d'un nom qu'on connaît déjà, comme en
Genèse 32:27, 28 où l'ange demande à Jacob de lui rappeler la
signification de son nom, signification qu'il connaissait (Gn 27:36),
pour lui en proposer une nouvelle. ~
Ainsi, lorsque Moïse demanda à Dieu: «Qu'est-ce que son
nom?», celui-ci donna effectivement l'explication «Je serai qui/ce
que je serai» (èhyèh ashèr èhyèh). Là encore, malheureusement, de
nombreux traducteurs se sont laissé influencer par la philosophie
grecque sur l'être en tant qu'existence, développée par Platon dans
plusieurs de ses ouvrages, dont le Parménide. Par exemple, la
Septante va traduire ce passage par "moi je suis l'étant" (égô éimi 0
ôn en grec), c'est-à-dire: "Je suis celui qui est"; alors que la
traduction d'Aquila, plus fidèle à l'hébreu, traduit cette phrase par:
"Je serai: je serai" (ésomai ésomai en grec). Comme l'a indiqué une
étude sur la traduction de cette phrase, la difficulté provient des
traducteurs qui veulent expliciter cette traduction à l'aide de leurs
croyances personnelles, et bien souvent sous l'influence de la
philosophie grecque; sinon il n'y a pas de difficulté52. Par exemple,
on trouve ces mots èhyèh juste avant (Ex 3: 12) et juste après (Ex
4: 12, 15) et les traducteurs n'ont aucun problème pour les traduire
par «Je serai avec toi». C'est d'ailleurs cette explication qu'a retenu
le Talmud pour expliquer la signification du Nom (Berakhot 9b,
Midrash Aggadah).
Il est vrai que la réponse «Je serai qui je serai» nécessite
l'éclairage du contexte. Or, certains traducteurs indiquent en note
que Dieu refusa en fait de répondre, ce qui, comme on l'a vu, est un
réel contresens par rapport au contexte, et constitue une attaque
supplémentaire contre le Nom. La difficulté vient du fait que le
verbe "être" en français a le sens d'exister, sens qu'il n'a pas en
hébreu ancien. D'ailleurs, les dictionnaires d'hébreu biblique
indiquent que ce verbe exprime l'idée d'être et de devenir.
Pour résoudre ce problème et éviter de choisir
arbitrairement de traduire ce verbe par "être" ou par "devenir"
suivant les cas, ce qui manque de rigueur, certains traducteurs ont
proposé de remplacer cette double traduction par une seule qui
exprime ce verbe "être" dynamique avec ses deux notions "être et
devenir". La traduction "se révéler être" ou "en venir à être"
exprime assez bien cette double notion53.
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2.2 - DE MoïsE À DA VID [-1500-1000J 65

La phrase peut donc être légèrement améliorée en «Je me


révélerai être qui je me révélerai être» ou «J'en viendrai à être qui
j'en viendrai à être». Les Égyptiens pouvaient parfaitement
comprendre cette expression puisque les pharaons l'utilisaient eux-
mêmes à leur profit pour exprimer leur puissance sur leurs
ennemis. En fait, Dieu va trancher cette prétention par «Tu vas voir
qui je suis» ou <<jeme révélerai être [le vrai Dieu J».
Cette explication est confirmée par une situation similaire.
En effet, Dieu dit en Exode 33: 19: «Je favoriserai qui je favoriserai
et je ferai miséricorde à qui je ferai miséricorde», non pour
exprimer une incertitude ou un refus d'intervenir, mais pour
rap~ler que cela dépend de lui uniquement, comme le confirment
les Écritures grecques chrétiennes (Rm 9: 15-18) qui commentent
ce passage. On pourrait donc traduire Exode 33: 19 par: "Je
favoriserai qui je veux favoriser et je ferai miséricorde à qui je veux
faire miséricorde." De la mêine façon, on pourrait encore traduire
"Je me révélerai être qui je me révélerai être" par "Je me révélerai
être qui je veux me révéler être". Cette façon de s'exprimer n'est pas
propre à Dieu puisque des humains l'utilisent aussi. Par exemple,
en Jean 19:22, «ce que j'ai écrit, je l'ai écrit» peut aussi se traduire
par "ce que je veux écrire, je l'ai écrit". De même, «à l'endroit où
sera mon seigneur (...) là sera ton serviteur» (2 S 15:21), exprime
l'idée "à l'endroit où sera mon seigneur (...) là ton serviteur veut
être"; ou encore, «par la faveur imméritée de Dieu je suis ce que je
suis» (1 Co 15:10) exprime l'idée "par la faveur imméritée de Dieu
je suis ce que je veux être".
Ainsi, l'expression "Je serai" traduit bien la qualité
dominante de l'action de Dieu, qui a souvent rappelé à ses
serviteurs: "Je serai avec toi" (Gn 26:3; 31:3; Dt 31:23; etc.), mais
parfois aussi: "Je ne serai pas à vous" (Os 1:9). Donc, si Dieu dit en
parlant de lui-même "Je serai qui je serai", en parlant de Dieu on
devrait dire "Il sera qui il sera"; ou bien, si l'on utilise "Je suis qui je
suis" on devrait dire en parlant de Dieu "Il est qui il est". Certains
biblistes préfèrent la forme causative "II fait être qui il fait être" ou
"II fait devenir qui il fait devenir". Cependant, ce choix est
arbitraire, car, premièrement, la forme causative du verbe "être" en
hébreu n'existe pas; deuxièmement, le traducteur se laisse
influencer par l'idée d'un Dieu créateur qui fait être les choses, ce
qui constitue manifestement une extrapolation du texte d'Exode
3: 14, car Dieu dit "Je serai" et pas "Je fais être" ou "Je fais devenir".
Pour respecter le texte hébreu, la signification du nom de Dieu est
"II sera" ou plus exactement "Il se révélera être", sous-entendu "Il se
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66 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

révélera être [un Juge], [un Législateur], [un Roi], [un Sauveur],
I
etc. (Is 33:22)".

2.2.2 Étymologie religieuse et étymologie scientifique


Dernier point, vouloir confondre la définition biblique "Il
sera" (yihyèh) avec la vocalisation du Tétragramme (yhwh), c'est
mélanger les étymologies bibliques avec les étymologies
scientifiques, ce qui traduit une méconnaissance sérieuse du rôle de
ces étymologies religieuses54. En effet, quel est l'intérêt d'expliquer
à un Hébreu la signification hébraïque d'un nom hébreu? Par
exemple, Noé signifie en hébreu "repos", mais la Bible précise que
ce nom signifiera "consolation" (Gn 5:29). Cette signification est
évidemment prophétique et non grammaticale.
~ Ce piège qu'est la confusion des étymologies religieuses et
scientifiques est très ancien. Au premier siècle, un écrivain juif,
Philon, pour expliquer "scientifiquement" la signification du nom
Abraham, proposa la traduction grecque "père élu du son", dans
son livre sur les changements de noms (De mutatione nominum
~66), alors que la Bible propose "père d'une foule de nations" (Gn
17:5) ou "père de nombreuses nations", selon la Septante. Croyant
bie_fifaire, Philon a "amélioré" la phrase "père d'une foule" (Ab-
hamôn) en rapprochant le mot raham qui ne signifie rien du mot
ra 'am (c.pj) qui signifie effectivement "bruit" en hébreu.
Aujourd'hui, les traducteurs ne font pas mieux lorsqu'ils
rapprochent le mot raham du mot ra!lam (cr:r;) signifiant "il
compatit". Ces traducteurs oublient que dans la Bible les
étymologies sont avant tout des enseignements religieux. De
nombreux grammairiens, ne comprenant pas l'origine de ces écarts,
qualifient ces étymologies de populaires. En fait, une étude55
portant sur les 60 étymologies du Pentateuque a conclu qu'environ
un quart s'écartait notablement du sens scientifique, mais cette
étude préférait parler alors d'étymologies religieuses. ~

Nom hébreu Etymologie scientifique Etymologie religieuse


Yehoudah Il sera loué (Youdah) Il louera (Yôdèh)
(Gn 29:35)
y éshoua' Salut (Veshoua'h) Il sauvera (Vôshia')
(Mt 1:21)
Vehouah Il sera (Yihwèh Il sera (Yihyèh)
(Ex3:14) en araméen)
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2.2 - DE MoïsE À DAVID [-1500-1000J 67

~ On constate dans ce tableau que, par rapport à l'explication


I biblique, l'étymologie religieuse paraît "moins rigoureuse". En
fait, les deux méthodes procèdent de façon inverse. Par exemple, le
nom Yehoudah signifie d'abord "il louera", soit Yôdèh en hébreu,
construit d'après l'expression "je louerai" (forme hiphil) de Genèse
29:35; puis cette forme Yôdèh est modifiée par assonance avec
Yehouah, le nom de Dieu56, pour donner la forme hybride
Yehoudah. Par contre, "scientifiquement" ce nom est d'abord plus
proche phonétiquement de la forme (houphal) hypothétique
y oudèh signifiant "il sera loué". ~

2.2.3 Un témoignage égyptien


Pour trancher cette question de la vocalisation du
Tétragramme, trouve-t-on un témoignage archéologique (tout en
sachant que, d'après la Bible, seuls les Égyptiens ont eu un contact
prolongé avec les Hébreux)? Raisonnablement, on ne peut pas
espérer trouver une inscription en hiéroglyphes qui relate les
exploits du dieu hébreu sur les Égyptiens. De plus, si une
inscription dans un temple égyptien avait mentionné ce nom, après
le départ des Hébreux, on l'aurait immanquablement martelé pour
le faire disparaître. Cependant, on a trouvé un bon candidat à
Soleb57, daté de l'époque d'Amenophis III (-1391 -1353).

\
, ~t~cc-==
wswS3 t3
~
«~ ~)1- ITl ~~
[WI w3 h y
.WDD

Ita sasûw yehûa[wJl


L'inscription est facile à déchiffrer58. En effet, on peut
transcrire cette phrase écrite' en hiéroglyphes par "13 ~3-sw-w y-h-
w3-w". Cette expression est vocalisée dans le système conventionnel
par "ta shasouw yehouaw", que l'on peut traduire par: "pays des
bédouins ceux de yehoua".
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68 UN HISTORIQUE_ DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

== ~ '+ ~
t3 83 sw w

~~ ID f1
y h [w3]

,!J Ita sasûw yeh[ûawll


Ces écussons comportent des inscriptions suffisamment
courtes pour être passés à travers un éventuel martelage. De plus,
ces bédouins shasou désignent habituellement pour les Égyptiens
des bédouins vivant avec leurs baluchons, dans la région au nord
du Sinaï. Certains spécialistes préfèrent identifier Yehoua à un
toponyme inconnu. De toute façon, cette distinction est impossible
à prouver, comme dans les cas des toponymes bibliques "pays de
Judah" (Dt 34:2); "Pays de Ramsès" (Gn 47: Il); ou des toponymes
égyptiens de la liste -de Thoutmosis III "[pays de] Jacob-El"; "[Pays
de] J osep- El "59 .
3« Cependant, on constate une mauvaise volonté évidente dans
la vocalisation de ce nom Yhw3, car la totalité des dictionnaires
indiquent soit yhw', ce qui est illisible, soit Yahweh, ce qui n'est pas
en accord avec la vocalisation conventionnelle, mais jamais
Yehoua. Certains spécialistes objectent que l'on connaît mal les
voyelles60 des mots égyptiens, ce qui est vrai. Cependant, pour les
mots étrangers, ce qui est le cas ici, les Égyptiens utilisaient une
sorte d'alphabet standard avec des matres lectionis, c'est-à-dire des
semi-consonnes qui servent de voyelles. Justement dans ce système
on a les équivalences: 3 = a, w = ou, y = i, et c'est pourquoi la
lecture par le système conventionnel donne des résultats
acceptables. Par exemple, dans la stèle de Memeptah datée du 13e
siècle avant notre ère, le nom Israél est transcrit en hiéroglyphes
Yysri31, qu'on peut lire: Yisrial (système conventionnel), ce qui
n'est pas trop mauvais. Malgré tout, certains spécialistes qui
refusent le système classique lisent ce nom YasariaI à cause de son
âge reculé. Pourtant, presque un millénaire avant, à Ébla, on lisait
ce nom I~raiI, ce qui contredit la lecture YasariaI. Ainsi, dans l'état
actuel de nos connaissances, le système conventionnel de lecture
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2.2 - DE MoïsE À DAVID [-1500-1000J 69

des hiéroglyphes est la meilleure alternative, et dans ce système le


I
nom (OUtoponyme) Yhw3 se lit "scientifiquement" Yehoua'. ~ I

2.2.4 Petit Nom et Grand Nom


1& La lecture en Ya- est favorisée par une confusion entre les
deux noms de Dieu: le grand nom YeHoWaH (Ps 83: 18) et le peti t
nom YaH (Ps 68:4). Les Juifs ont réservé un traitement différent à
ces deux noms puisqu'ils ont toujours accepté de prononcer le petit
nom, contrairement au grand nom qui a été remplacé vers le 3e
siècle avant notre ère par le substitut Adonay (Seigneur). Ainsi, on
trouve le petit nom Yah dans les Écritures grecques chrétiennes
dans l'expression Alléluia (Ap 19:1-6), qui signifie "Louez Yah".
D'ailleurs, dans les écrits de Qumrân, le Tétragramme a parfois été
écrit en paléo-hébreu dans du texte hébreu, ce qui ne fut pas le cas
du nom Yah. On constate aussi que ce nom a spécialement été
utilisé dans les chants (Ex 15:2) et dans les psaumes.
~ De la même façon qu'il y eut des noms théophores élaborés
à partir du grand nom, c'est-à-dire des noms commençant par
Yehô- ou sa forme abrégée Y(eh)ô-, il y eut aussi des noms
théophores élaborés à partir de Yah. Cependant, une remarque
capitale s'impose dans la Bible, qu'elle soit grecque ou hébraïque:
les Hébreux ont pris le soin de faire soit commencer leurs noms
par Yehô- ou YÔ-, soit terminer leurs noms par -yah, mais jamais le
contraire, sans exception.. Ainsi, dans la Bible, il est impossible de
trouver, parmi les centaines de noms théophores existants, un seul
nom commençant par Yah-. Donc, ceux qui vocalisent YHWH en
Yahweh sont obligés d'admettre que le Tétragramme, le nom
théophore par excellence, n'appartient pas à la famille des noms
théophores, ce qui est un comble on en conviendra. Cette absurdité
apparaît bien lorsqu'on ouvre un dictionnaire, où l'on constate que
le nom Yahvé est complètement isolé des autres noms théophores:
Josué, Jonathan, Jésus, Jean, etc.
~ De même que la partie initiale Yehô- a été abrégée en YÔ-,
de même la partie finale -yah eut un diminutif -yahou, ce dernier
terme signifiant en hébreu "Yah lui-même". Ce terme est apparu
pour deux raisons. Premièrement, le terme hébreu hou' signifiant
"lui-même" (sous-entendu Dieu lui-même) commença à jouer un
grand rôle dans le culte. Par exemple, pour se démarquer des
autres dieux et marquer sa permanence, Dieu s'est souvent exprimé
en utilisant l'expression hébraïque 'ani hou', c'est-à-dire "moi-
même" ou plus exactement "moi lui-même" (Dt 32:39; Is 52:6;
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70 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

etc.). Bien que des humains puissent u,iliser cette expression pour
se désigner "eux-mêmes" (1 Ch 21:17), en général quand on disait
"Lui" ou "Lui-même" il s'agissait de Dieu (2 R 2: 14).
Les Hébreux n'ont donc pas tardé à intégrer cette
appellation divine dans leurs noms, comme dans les noms suivants
Abihou' (mon père [c'est] Lui-même), ou encore Èlihou' (mon
dieu [c'est] Lui-même) ou Yéhou' (Yé[ho c'est] Lui-même). Par la
suite, la lettre finale de ces noms étant muette, elle n'a plus été
écrite. Par exemple, le nom Èlihou' est très souvent écrit Èlihou.
Les noms Abiyah (mon père [c'est] Yah), et Èliyah (mon dieu
[c'est] Yah) existant aussi, il y eut un amalgame entre Yah et Hou'
pour obtenir les noms Abiyahou' (mon père [c'est] Yah Lui-
même), ou encore Èliyahou' (mon dieu [c'est] Yah Lui-même).
~ Cette association a donc provoqué l'apparition d'un
nouveau nom divin, que l'on ne trouve pas dans la Bible, sauf à la
fin de certains noms théophores: le nom Yah hou', abrégé en
Yahou. L'assonance de cette expression avec le Tétragramme a sans
doute favorisé l'émergence de cette abréviation. D'ailleurs, on
trouve ce nom seul (YHW), inscrit à côté du Tétragramme (YHWH),
dans les inscriptions de Kuntillet Ajrud, datées du ge siècle avant
notre ère.

Pour résumer, le nom Yéhou' provient d'une contraction de


YeHoWaH Hou' en YeH-[oWaH]-ou'. Par contre, YaHou provient
de la contraction des deux noms YaH-Hou'.
~ Certains spécialistes objectent que la terminaison en ou
serait plutôt un résidu d'un nominatif archaïque. Cependant, ce
serait là encore un cas unique61; de plus, cette explication est
d'autant moins convaincante qu'on ne l'applique pas au nom
Èlihou. 3«
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71

2.3 De David à Sidqiya [-1000-600]


Cette période est riche en inscriptions hébraïques contenant
le Tétragramme. La plus ancienne, la stèle de Mésha, datée du
milieu du ge siècle avant notre ère, relate des événements que l'on
retrouve consignés dans la Bible en 2 Rois 3:4-27. Cette inscription
permet de conclure qu'à cette époque le Tétragramme, qu'on peut
lire à la dix-huitième ligne, était déjà répandu, puisque les Moabites
eux-mêmes le connaissaient.
~~ Comment les Moabites prononçaient-ils ce nom? Étant
donné que leur langue était très proche de l'hébreu, il est difficile
de le savoir. Cependant, on constate que les noms usuels pour eux
sont écrits sans matres lectionis, c'est-à-dire sans les semi-consonnes
qui servent de voyelles. Ainsi, Moab est écrit M'b sur la stèle, alors
~
que dans la Bible il est écrit Mw'b; de même le nom du dieu
Kamoush est écrit Km~ sur la stèle et Kmw~ dans la Bible. Les
Inoms de Omri, Israél ou Yhwh étaient considérés par les Moabites
comme des noms étrangers, et il est raisonnable de penser qu'ils les
ont écrits comme ils les prononçaient. Donc, si on accepte de lire
t'Omri et non 'Omray le nom écrit 'mry sur cette stèle, de même si
lie nom écrit Ysr'l est lu Israél et non Yasraél, alors il faut accepter
~de lire Yhwh comme il est écrit lui aussi, c'est-à-dire Ihoua. ~
Pour trouver un témoignage vocalisé du nom divin à cette
époque, il faut réunir au moins deux conditions. Tout d'abord, que
les Hébreux soient vaincus dans un conflit, de façon à ce que les
vainqueurs rédigent un rapport mentionnant les vaincus et leur
Dieu. Deuxièmement, il faut que la langue des vainqueurs soit
vocalisée, et à cette époque la seule langue qui vocalise
distinctement les sons ye" ya" yi, yu, we, wa, wi" wu, est le syllabaire
chypriote, appelé Linéaire B. Malheureusement, il y a peu
d'inscriptions dans cette langue; de plus, les Hébreux n'ayant pas eu
de conflit avec Chypre, on ne peut espérer aucun récit de victoire.
Le problème est le même avec les Grecs, outre que cette langue ne
pénétrera vraiment en Palestine qu'à partir du 6e siècle avant notre
ère. Les hiéroglyphes égyptiens du temps du Pharaon Néko
pourraient faire l'affaire, si la vocalisation étai t pl us fiable.
Remplissant les deux conditions, il ne reste que les Assyriens et les
Babyloniens. Cependant, comme on l'a vu, la langue akkadienne ne
possède qu'un seul signe pour transcrire les sons ye, ya, yi, yu, et
aucun signe spécifique pour les sons we, wa, wi, wu et h.
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72 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Il Stèle de Mésha

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~~~~':-~j.",' : . 34
.
~! I

Bien qu'aucun des noms théophores ne débute par Ya- dans


le texte biblique (M.T. ou LXX), ils ont pourtant tous été vocalisés
en Ia- dans les transcriptions akkadiennes.
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2.3 - DE DAVID À SIDQIYA {-lOOO-600} 73

Nom hébreu grec akkadien


(MT) (LXX)
Yehûdâ louda Yahudu
Yéhû' Ièou Yaua
Yehôyakin lôakim Yakukînu
Y eh ô ' ahaz lôakaz Yauhazu
Hizqiyahû Ezékiou Hazaqiyau

~ On remarque par contre que la finale -yahou est bien


retranscrite dans le nom Hizqiyahou. Certains spécialistes estiment
que ces transcriptions sont fiables et qu'elles reflètent simplement
l'évolution bien connue Ya>Yi> Ye (loi de Barth-Ginsberg). Ils
estiment aussi que si la prononciation avait été Ye-, l'akkadien
aurait plutôt utilisé le signe qui représente la voyelle i-. Par
exemple, pour le nom Yehûdâ on aurait dû avoir la translittération
~

!i-hu-da, plutôt que ia-hu-da. Cependant, les langues sémitiques


privilégient les consonnes, qui en sont les éléments stables; donc, si
le groupe Yi- peut être assimilé par défaut au signe akkadien pour
i- (ainsi Yisraél est translittéré I~-ra-il), le groupe Ye- est plus
proche du signe ia- que du signe i-. De plus, les transcriptions
I akkadiennes favorisent le son a au début des mots en dépit de la
vraie voyelle d'origine. Ainsi, des spécialistes estiment que le signe
I
akkadien ia- pourrait aussi être lu ie- ou io-62. ~

2.3.1 Influence de l'araméen sur l'hébreu

En observant les inscriptions où l'on trouve le nom divin


datant des ge et 8e siècles avant notre ère, on constate que
l'évolution de la langue a effectivement joué un rôle, notamment
l'influence de l'araméen sur l'hébreu.
À Kuntillet Ajrud, près du Sinaï, des inscriptions datées
autour de -800 ont été découvertes63; elles contiennent soit le nom
YHW soit le Tétragramme YHWH. Par exemple, dans l'inscription
ci-dessous on peut lire la phrase: "à Obadyaw fils d'Adnah puisse-t-
il être béni par Yhw." (l'bdyw bn 'dnh brk h' lyhw)64

I/~~~~, l'''~''~~~ ..~,.


.
. '.'
~~ .~
\ .
Y <1 gJ-Y
.' .'
"', \JJ C" ".
I
. .. ../ -.qo;.,J
:
. J-
. '. ';..~",'. . ><.:1 ..,
3./ ...
!...;'~:'. ..
\ '.
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74 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

On peut aussi lire les phrases suivantes:


"Je vous bénis par Yh~h de Samarie et par (son)
""1"+ asherah." (brkt 'tkm Iyhwh smm wi' srth)

M' "Je te bénis par Yhwh de Ternan et par (son)


asherah." ('t brktk Iyhwh tmn wi' srth)
(asherah étant un poteau sacré, arbre ou totem,
comme en Deutéronome 16:21, 22)
"et puisse Yhw lui donner comme son cœur." (wntn lh yhw klbbh)
"Yhwh a fa"itdu bien." (hytb yhwh)
Daté de -775, un sceau a été trouvé avec l'inscription
suivante: "Miqnêyaw serviteur de Yhwh / à Miqnêyaw serviteur de
Yhwh." (rnqnyw 'bd yhwh / Imqnyw 'bd lyhwh).65

Ce qui frappe dans ces inscriptions, c'est que les noms


théophores se terminent en -yaw et non en -yahou. Comment
expliquer cette anomalie? La raison en est simple: le nom yaw,
prononcé en fait yaou, e~t un équivalent phonétique de yahou,
puisque le h était peu audible, surtout dans un contexte araméen.
Effectivement, on n'observe cette anomalie que dans les
inscriptions trouvées en dehors de Judée, car dans ce territoire les
noms théophores sont toujours écrits avec -yahou en finale, et non
avec -yaw. On suppose que les Judéens parlaient un hébreu plus
correct que les Hébreux du Nord (Samarie et Galilée) qui avaient
une langue plus relâchée.

2.3.2 Témoignages archéologiques


Par exemple, à Khirbet el-Qom, à environ 30 km au sud-
ouest de Jérusalem, une épitaphe datée de -750 a été découverte,
avec l'inscription: "Ouriyahou le riche l'a écrit, béni soit Ouriyahou
par Yhwh." ('ryhw h'sr ktbh brk 'ryhw lyhwh)66
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2.3 - DE DAVID À SIDQIYA [-1000-600J 75

À Nahal Yishai, près de En-


1~::1 Guedi, une grotte a été découverte avec.
~-¥ l'inscription suivante, datée de -700:

~.TJ9
. l-l~Y~ "béni soit Yhwh." (brk Yhwh)67

Sur les murs d'une grotte funéraire à Khirbet Beit Lei, à


environ 35 km au sud-ouest de Jérusalem, on peut lire des
épigraphes hébraïques datées aux environs de -700.
.n hl 1~

\~~
Le Tétragramme apparaît dans les phrases suivantes:

"Sauve nous [Y]hwh"


"Yhwh le Dieu de toute la terre
(...) soit miséricordieux pardonne Yh Yhwh"68.

(Quelques lettres sont illisibles mais les mots Yh Yhwh


apparaissent bien.)

. Plaques d1argent69
Deux plaques d'argent ont été trouvées à Ketef Hinnom
près de Jérusalem, datées autour de -625. Sur la plaque II, il Y a
trois tétragrammes. Il est intéressant de noter que les deux plaques,
contiennent la bénédiction de Nombres 6:24,25; ainsi ce texte est à
l'heure actuelle le plus vieux texte de la Bible.
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76 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Par exemple, de la
I ligne 14 à la ligne 18, on
fi
peut lire le texte suivant:

7
8

10

11

12
}, St:~'1.- 14. k[wO]r ybr
~\\ 15. k yhwh [w]
16. [y]~mrk [y]
17. 'r yhwh
15
18. [p]n[yw'ly]

16
1~¥4 19.

C'est-à-dire: "Que
Yhwh te bénisse et te
111 ~~~I garde. Que Yhwh fasse
..; ''1'
,.:~
" briller sa lumière vers toi
'
et qu'il te favorise. "

Il est intéressant de noter ce qui est écrit dans ce verset (Nb


6:27): «Ils devront mettre mon nom sur les fils d'Israël, pour que
moi, je les bénisse.» C'est-à-dire que les prêtres devaient prononcer
le Nom à voix haute sur le peuple pour obtenir la bénédiction. En
fait, la tradition juive relate qu'avec le temps les prêtres ont
seulement prononcé ce nom dans le Tem~le, et qu'ailleurs ils ont
utilisé un substitut (Sifre Nombres 39, 43). 0

Il Ostraca dlRrad71
Quelques ostraca, datés de -700 à -600, ont été découverts
sur le site de Tell Arad. Dans l'ostracon n018, il yale texte
suivant: 72
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2.3 - DE DAVID À SIDQIYA [-1000-600J 77

1. '1 'dny.'ly
2. ~b.yhwh y~
3. '11~lmk.w't
4. tn.l~mryhw
()
9. byt.yhwh

Qui signifie:
s - "À mon seigneur
Eliashi b, puisse
y hw h chercher
7
ton bien-être. Et
maintenant donne
8 à Shemaryahou.
()
9 ()
maison de Yhwh."

Quelques ostraca de la même période (-600) ont été trouvés


sur le site de Lakish, avec l'inscription suivante73 sur l'ostracon n02:
. Lettres de Lalcish74

I~'(."'I

1__'"~I

1- '1 'dny.y'w~ y~m' 4- k klb ky.zkr 'dny 't.


2- yhwh 't 'dny.~m't ~l 5- (']bdh.ybkr.yhwh 't'
3- m.'t kym 't kym my.'bd 6- ()
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78 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Cette inscription est bien en accord avec les événements


décrits en Jérémie 34:6, 7. La traduction est: "À mon seigneur
Yôash. Que Yhwh fasse entendre à mon seigneur une nouvelle de
paix en ce jour même, en ce jour même. Qu'est ton serviteur, un
chien, pour que mon seigneur se souvienne de son serviteur? Que
Yhwh permette à mon seigneur (...)"
~ Tous ces témoignages sont utiles pour prouver que le
Tétragramme était largement utilisé dans la vie quotidienne, au
moins jusqu'en -600. Du point de vue archéologique, ce nom a
disparu juste après cette date (excepté dans la Bible), c'est-à-dire
après la destruction du premier Temple. Pendant cette période, de
-900 à -600, on a recensé environ 40 tétragrammes75 dans les
inscriptions hébraïques.
Ainsi, le Tétragramme joua un grand rôle dans le culte76,
même si parfois, comme la Bible l'indique, le petit nom Yah fut
aussi utilisé. L'unique différence est en rapport avec le nom Yahou,
qui ne fut jamais utilisé dans la Bible, à l'exception de la
terminaison des noms théophores. De plus, la prononciation fut
toujours -yahou et jamais -yaw (excepté peut-être le nom 'row
prononcé Ahîô, qui proviendrait de AhYaw).
Comme on l'a vu, le nom Yahou (Yah lui-même) est un
diminutif provenant du nom Yah. Comme ce dernier, il fut plus

.
utilisé dans les occasions moins formelles, telle l'inscription sur des
jarres ou des sceaux. Ainsi, plusieurs estampilles de jarre datées du
8e siècle avant notre ère ont été trouvées77 soit avec le nom Yah,
comme dans l'inscription de Khirbet Beit Lei, soit avec Yahou,
comme à Kuntillet Ajrud.

~[~
J"";'~">;"
'. \. '... ,,
.' .
=
..' '.'
."'
i-£E

Yah àYab Yabou àYaw

~ On peut noter que ces noms sont précédés de la particule


hébraïque L signifiant "à, pour" (Is 44:5), ce qui laisse supposer
que ces objets étaient destinés au Temple, peut-être en tant que
dîmes (dans certains cas le nom YHW, durant le second temple, est
surmonté d'un symbole hébreu &3 signifiant "sheqel" c'est-à-dire le
sicle de la contribution pour le lieu saint selon Exode 30: 13).
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2.3 - DE DAVID À SIDQIYA [-1000-600J 79

On constate aussi que la lettre H est parfois écrite à l'envers


et déformée, imitant son homologue araméenne. On peut en
déduire que la langue araméenne a dû commencer à influencer la
langue hébra que très tôt, aussi bien dans sa prononciation que
dans son écriture. On constate que dans la langue araméenne la
chute du H dans les mots s'est effectuée assez tôt, autour de -800,
puisque souvent les terminaisons -WHY deviennent _WY78; de
même les terminaisons -YaHaW sont devenues -YaW79, c'est-à-dire
-YaÛ80. De plus, la prononciation de la lettre heth H devait elle
aussi être faible, car on la confond avec la lettre H dans certains
mots81.
La langue hébra que suivra un peu plus tard, vers -400, le
I
même processus; de plus, la prononciation aû évoluera en ô82.
Malgré ces changements, on a cependant continué à écrire les
noms théophores avec leur terminaison -yahou en Judée83. On a
même trouvé une estampille à Tell Djedeideh, avec la double
orthographe -yahoul yaw: [Shebanyahou Azaryahou IShebanyaw
iAzaryaw] (iii"'fl' iii"j:Jwl i"'fl' i"J:JtD)84. ~
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81

2.4 De Sidqiya à Simon le Juste [-600-300]


Un événement capital va se produire au début de cette
période: il s'agit de la destruction du premier Temple et cela aura
bien sûr d'importantes conséquences pour le culte et, par la suite,
sur la prononciation du Nom. Comme l'a confirmé l'archéologie.,
avant cette destruction, le Nom était largement employé par les
Hébreux, mais, comme l'a fait remarquer Maimonide, cela prouve
aussi que le Nom ne possédait aucun pouvoir magique. Le fait d'en
posséder la bonne prononciation n'a été pour les Hébreux ni un
avantage matériel, ni une protection contre leurs ennemis.
Le récit biblique des événements qui se sont produits avant
et après la destruction du premier Temple permet de comprendre
le processus de la disparition progressive du Nom. En effet,
quelques années avant -600, le pharaon Néko écrasa le roi Yoshiya
puis établit Èlyaqim (Dieu élèvera) comme vassal; peut-être par
provocation, changea son nom en Yehôyaqim (Yehô élèvera). Cela
prouve en tout cas que Neko connaissait le grand nom du Dieu des
Hébreux (2 R 23:34). Quelques années plus tard, de la même façon
et dans le même contexte, le roi babylonien Nebouchadnezzar
établira comme vassal le roi Matanyah (don de Yah) et changera
son nom en Sidqiya (justice de Yah), ce qui prouve que lui aussi
connaissait le nom divin, mais seulement la forme plus familière
Yah, et non sous la forme du grand nom (2 R 24: 17).

2.4.1 Le Nom cesse d'être utilisé avec les non-Juifs


Il est facile de comprendre l'enchaînement logique des
événements. Être ainsi écrasés par des souverains païens a dû être
en effet une terrible humiliation pour les Hébreux. Par la force des
choses, puisque les dieux étrangers paraissaient plus puissants, les
Hébreux ont dû prendre grand soin de ne plus profaner le Nom
(Ez 36:20, 21; Ml 1:6) et ils ont dû se rappeler toutes les mises en
garde qui leur avaient été faites en ce sens (Is 52:5; Am 6: 10). On
peut d'ailleurs remarquer qu'après le retour d'exil, les prophètes
eux-mêmes évitèrent d'utiliser le Tétragramme avec les non-Juifs.
Par exemple, Daniel utilisa le Tétragramme (On 1:2; 9:2-
20), mais avec les non-Juifs il n'utilisa que des substituts comme: le
Dieu dans les cieux (On 2j28), le Révélateur des secrets (On 2:29),
le Dieu du ciel (On 2:37, 44), le Très-Haut (On 4: 17, 24, 32), les
Cieux (On 4:26). De la même façon, Ezra et Nehémia utilisèrent le
Tétragramme avec les Juifs (Esd 3: 10, Il; 8:28, 29; Ne 4: 14, 8:9),
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82 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

mais n'utilisèrent avec les non-Juifs que des substituts: Dieu (Esd
5: 17), le grand Dieu (Esd 5:8), Dieu des cieux (Esd 5: 12; Ne 2:4,
20), Dieu des cieux et de la terre (Esd 5: Il). On peut noter aussi
que les non-Juifs n'utilisèrent plus le Tétragramme dans leurs
réponses aux prophètes (Dn 3:29), comme ils l'avaient fait par le
passé. Les prophètes continuèrent cependant d'employer le
Tétragramme avec les Juifs, car, si on ne trouve pas ce nom dans le
livre d'Esther, il apparaît de nombreuses fois dans le dernier livre
de Malaki écrit à l'intention des Juifs.

2.4.2 Changement de langue et d'écriture


Une autre conséquence très importante de la destruction du
premier Temple fut la captivité de 70 ans à Babylone, période
pendant laquelle le peuple apprit la langue araméenne. D'ailleurs,
c'est à cette époque que plusieurs parties de la Bible furent rédigées
en araméen (Dn 2:4-7:28; Esd 4:8-6: 18; 7: 12-28). Ainsi, quand les
Juifs revinrent de captivité, une grande partie d'entre eux avait
perdu leur langue maternelle85 (Ne 13:24). Selon le Talmud
(Sanhédrin 21b), Ezra, pour permettre aux .Juifs de pouvoir lire la
Bible, aux alentours de -460, changea les vieux caractères hébreux
en caractères araméens, c'est-à-dire en hébreu carré moderne. De
plus, pour aider le peuple, il lisait et expliquait le texte biblique
(Esd 7:6; Ne 8:8, 9). L'ancienne écriture hébraïque, le paléo-
hébreu, fut cependant conservée par les Samaritains (Esd 4:7-10).

Si le Tétragramme disparaît de la circulation vers cette


époque, les deux autres noms divins, Yah et Yahou, continuèrent
d'être utilisés, au moins jusqu'au 3e siècle avant notre ère. On a
d'ailleurs trouvé ces deux noms à Éléphantine et à Padua86 dans
plusieurs papyri araméens écrits par des Juifs entre -514 et -398.
On peut lire dans ces missives les noms YHW (très souvent), YHH
(plusieurs fois) et YH (une fois)87. On a également trouvé une
douzaine d'ostraca avec le nom YHH88.
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2.4 - DE SIDQIYA À SIMON LE JUSTE (-600-300] 83

~ Des spécialistes lisent cependant ces deux noms YHW et


YHH de la même façon. En effet, ils partent du principe que ces
deux noms sont identiques en prononciation, puis déduisent que le
seul son commun aux deux matres lectionis finales est le son Ô, car
effectivement la lettre W peut être lue en voyelle soit ou soit ô., et le
H final peut être lu soit â soit parfois ô. Cette conclusion très
astucieuse est probablement erronée, au moins pour les deux
raisons suivantes. Premièrement, si effectivement en hébreu on
rencontre cette anomalie d'un h final vocalisé ô, cette bizarrerie
n'existe pas en araméen89; or ces missives sont justement écrites en
araméen. Deuxièmement, comme la lettre H est devenue quasiment
inaudible, on la redoublait fréquemment, comme dans le suffixe
féminin de la 3e personne du singulier écrit indifféremment HI YHI
YH'/YHH90. ~
Ainsi, en araméen, les prononciations Yâ (YU), YaH (YHH)
et Va' (Y') sont plus ou moins les mêmes; en fait, ce sont
quasiment des équivalents phonétiques, comme le nom araméen
Yaw (YW) prononcé Yaou à cette époque, qui est un équivalent
phonétique du nom hébreu Yahou (YHW). D'ailleurs, dans les
papyri araméens d'Égypte, on retrouve ces mêmes approximations
dans les noms théophores91.

au début du nom à la fin du" nom


Yâ Yâ a donné(YHNTN)
a jugé, Yâ (Y~DNYH)
a jugé, Yâ(YDNYH)
a acquis, Yâ (QNYH)
ma lumière [est] Yâ CWR'YH)
Yah Yah [est] lumière(yTHJrWR)
serviteur de Yah('BDYHH)
Ya' a acquis, Va' (QNY~)
ma lumière [est] Y a' (I-IWR'Y~)
a jugé, Ya' (YDNY~)

Yahû Yahû a donné()rHW~"N)


Yahû [est] lumière(,rHW~WR)
mon père [est] Yahû CBYHW)
serviteur de YahûCBDYHW)
Yaw frère de Yaw ('!!YW)
a couvert, Yaw (HrYV0
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84 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

~ On remarque dans ce tableau que tous les noms théophores


sont écrits avec une orthographe assez libre (en fait phonétique), ce
qui contraste énormément avec la rigueur du texte massorétique.
Cependant, on retrouve le nom YHH, au lieu de YH, dans quelques
codex92. On peut supposer que, dans un contexte araméen, les
auteurs de ces missives ont voulu dissocier le nom divin YH de la
particule vocative YH signifiant "Oh!", car, comme on peut le
vérifier, ces deux mots sont des homonymes en araméen. De plus,
cela avait l'avantage de rendre le H plus audible.
En fait, on retrouve ces mêmes hésitations dans le texte
biblique, qui indique par un point à l'intérieur de la lettre (mappiq)
si le H final devait être prononcé ou non. On constate ainsi que,
dans la Bible, tous les noms théophores se terminant en -yah sont
écrits sans mappiq à l'exception de Yedidyah (2 S 12:25) et
devraient donc se prononcer -yâ (ïT:).Par contre, le nom divin Yah
seul est toujours écrit avec un mappiq excepté dans le Cantique 8:6,
c'est-à-dire qu'il devrait se prononcer Yah (~) et non Yâ.
Ces subtilités de prononciation sont sans conséquence
aucune, ni sur le sens, ni même sur la prononciation de ces mots.
Cela montre simplement que les Massorètes avaient le désir de
conserver toutes les nuances qui leur avaient été transmises p~r la
tradition. Ainsi, ils ont même noté que le mot Yah pouvait parfois
être prononcé Yiah (i!) comme en Psaumes 94:7, 12; 118:18, etc.
De la même façon, ils ont noté que le mot "divinité" se prononçait
en hébreu soit Eloah noté avec un mappiq (Jb 3:4; 6:4; 16:21), soit
Eloa, noté sans mappiq (Jb 4:9; Il :7; 15:8).
Enfin, il faut savoir, pour ceux qui voudraient prononcer
Yahô le nom YHH, que dans la Bible il n'existe aucun nom se
terminant par -hh qui soit vocalisé -hô. Les noms se terminant par
-hh sont toujours vocalisés -ah, comme Bilhah (Gn 29:29),
Yogbehah (Nb 32:35), etc. De même, à Qumrân, les mots se
terminant par -HH sont toujours vocalisés soit -Hâ, soit -aH. ~

Aux problèmes de prononciation, qui obscurcissent


l'existence de ces deux noms Yah et Yahou, s'ajoutent aussi les
problèmes d'écriture. En effet, les Juifs du temps d'Ezra ayant
abandonné leur ancienne écriture, le paléo-hébreu, pour l'hébreu
moderne; ils continueront, par nostalgie, d'utiliser l'ancienne
écriture pour les inscriptions prestigieuses comme les pièces de
monnaie, les sceaux, et bien évidemment pour écrire les noms
divins. Cependant, l'influence de l'araméen qui s'exerça sur la
prononciation de l'hébreu s'exerça aussi sur son écriture. Par
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

2.4 - DE SIDQIYA À SIMON LE JUSTE [-600-300J 85

exemple, on a retrouvé environ 60 estampilles de jarre avec le nom


YH, et 40 avec le nom YHW93, datées entre -500 et -300.

YH YHW
Au départ, ces estampilles avaient été lues Yah et Yahou
(YH et YHW), mais sous l'influence des spécialistes israéliens toutes
ces estampilles sont maintenant lues Yehoud (YHD). Cependant,
ces spécialistes reconnaissent honnêtement que cette lecture pose
de gros problèmes. En effet, il faudrait admettre qu'il y ait eu une
évolution de l'écriture de ce nom lu Yehoudah (YHWDH) en
écriture pleine, comme sur l'ostracon n040 d'Arad94 daté autour de
-750, en un nom Yehoud (YHD)95 écrit défectivement, ce qui est
contraire à l'évolution normale et constituerait un cas unique d'une
évolution inverse. De plus, il faudrait admettre que les Juifs ont
préféré utiliser dans ce cas une écriture étrangère, le paléo-
araméen, plutôt que la leur, le paléo-hébreu96. Cela est contraire au
fait que, par nationalisme, les Juifs ont toujours privilégié leur
ancienne écriture, le paléo-hébreu, sur leurs pièces de monnaie, au
moins jusqu'à la révolte de Bar-Kochba en 135 de notre ère. Cette
confusion de lecture entre Yahou et Yehoud a débuté avec la
trouvaille des pièces effectivement marquées Yehoud (YHD).

'(- \V~" {CSt '\ ~'


-
j3J~~
'05

YHW (1)
~

~
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YHW (2)
,

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?YHD (3) ?YHD (4)


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YHWD (5)
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86 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Toutes les estampilles ci-dessus sont actuellement lues


Yehoud97. Même sans être un expert~ on peut remarquer une
aberration de lecture. En effet, les estampilles n03 et 4 sont lues
YeHûD (YHD), car elles sont écrites en paléo-hébreu. L'estampille
nOSest lue YeHÛD (YHWD) car cette fois elle est écrite en paléo-
araméen. En observant bien, on voit que la forme de la lettre H est
différente; or cette forme est caractéristique, car, à cette époque, la
confusion d'écriture n'existe pas en paléo-araméen98, c'est-à-dire
que dans les estampilles n° 1 et 2, le H ne peut pas être paléo-
araméen mais seulement paléo-hébreu. Donc, si la lettre appartient
au paléo-hébreu, le reste du mot aussi, car il serait illogique de
supposer qu'un rédacteur écrive les lettres d'un même mot dans des
écritures différentes. On peut vérifier cette affirmation sur les
inscriptions des pièces de Judée99.

YH? (2) YHDH (3)

On peut lire la mention Yehoud (YHD) sur la pièce n° 1, et


la mention Yehoudah (YHDH) sur la pièce n03. Seule la pièce n02
pose problème, car on devrait logiquement la lire Yahou (YHW)100,
mais le H est de type paléo-araméen. En fait, en raison de
l'influence araméenne, les variations d'écriture avec cette lettre sont
fréquentes en paléo-hébreu 101. On peut d'ailleurs observer ci-
dessous, dans l'étude 102des inscriptions sur des estampilles et des
sceaux, une grande variété d'écritures en paléo-hébreu.

~cd] 'q1? cd]

..
[Y) I.t
~~ftJ r~ w t~ 4 W
!)TIJ'A~~ ~~~.~;r~Â\3~
~~:z.t.~~~ ~~~YJ~1,/v =t .:L YJ

estampilles sceaux pièces


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2.4 - DE SIDQIYA À SIMON LE JUSTE [-600-300J 87

On peut observer que cette variété d'écritures est beaucoup


plus faible sur les sceaux que sur les estampilles. En fait, ce
conservatisme dans les sceaux provient certainement du fait qu'ils
étaient réalisés par des "imprimeurs" professionnels. Concernant les
pièces de monnaie103, qui sont plus tardives (du 3e au 1er siècle
avant notre ère), on constate une dégénérescence encore plus
grande du paléo-hébreu.

2.4.3 Judée: un nom sacralisé

En outre, la lecture de certaines estampilles en Yehoud-pose


des problèmes de chronologie. En effet, d'après la Bible, le district
juridictionnel de Yehoud (Judée) est ~paru après -600 (Esd 5:8);
or certaines estampilles sont datées 1 de plus d'un siècle avant
l'existence de ce district, ce qui est paradoxal. Certains spécialistes
admettent ainsi que l'analyse épigraphique doit s'accorder avec les
données historiques 105,et donc que ces estampilles devraient être
lues Yah (YH) et Yahou (YHW), et non Yehoud (YHD). Ensuite,
puisque les noms Yah et Yahou existaient avant le 7e siècle de
notre ère et aussi après le 2e siècle de notre ère, si toutes les
estampilles sont lues Yehoud, ces deux noms disparaissent
mystérieusement pendant cette période. Enfin, dernier problème de
taille, si les estampilles marquées YH sont considérées comme des
abréviations du nom Yehoud (YHD), il faut admettre que les Juifs
de cette époque acceptaient la confusion entre le nom divin Yah
(YH) et cette abréviation. Or, cette supposition paraît absurde, car
lorsque les Juifs ont changé leur système de numérotation, vers le
2e siècle avant notre ère 106, ils ont scrupuleusement évité la
confusion des nouveaux nombres avec les deux noms divins. Ainsi,
le nombre 15 n'a jamais été écrit YH mais plutôt TW; de même le
nombre 16 n'a lui non plus jamais été écrit YW mais TZ; d'ailleurs,
cette modification a subsisté jusqu'à nos jours.
Pour harmoniser les données historiques paléographiques,
archéologiques et bibliques, on peut admettre le déroulement
suivant. Avant -600, les Juifs du pays de Juda parlent et écrivent
l'hébreu, en fait le paléo-hébreu. Ils utilise'nt largement le
Tétragramme et quelquefois les noms Yah et Yahou. Après la chute
de Babylone, lorsqu'ils reviennent à Jérusalem, beaucoup de Juifs
ont appris à parler et à écrire en araméen, et un grand nombre ne
parlent même plus leur langue maternelle, l'hébreu. Ainsi, Ezra,
d'après le Talmud (Sanhédrin 21 b), vers -460, réécrira la Bible
dans ces nouveaux caractères araméens.
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88 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Concernant le Nom, on constate que les Juifs, après leur


retour d'exil, n'emploieront plus le Tétragramme avec les non-Juifs,
wais seulement les deux substituts Yah et Yahou, comme à
Éléphantine et à Padoua. On constate de plus que le nombre des
noms théophores en yahou chute très rapidement à partir de cette
période 107.Le Talmud (Yoma 39b) signale que vers le 3e siècle
avant notre ère, du temps du grand prêtre Simon le Juste, l'usage du
Tétragramme devient réservé au Temple uniquement, et il précise
qu'avec le temps les noms divins inscrits sur les estampilles des
jarres seront même retirés pour en préserver la sainteté (Shabbat
61b, Arakhin 6a).
Par contre, le nom Judée ira en grandissant. Ainsi, après la
chute de Babylone, en -539, apparaît le district juridictionnel de
Judas (Esd 5:8) avec ses gouverneurs (Ag 1:1). On peut noter que
le nom hébreu Yehoudah (Esd 4:6) est prononcé Yehoud en
araméen (Esd 7:14). Pendant la période des 70 ans de captivité, il y
avait uniquement des inspecteurs, ou des commissaires en Judée.
Du reste, on a retrouvé un sceau araméen 108,daté autour de -550,
avec l'inscription "Inspecteur de Judée [Yehoud]" (lpqd yhd), ce
qui montre l'exactitude des termes bibliques pour désigner ces
dirigeants, car la Bible fait la distinction entre le titre d'inspecteur
(paqid en hébreu) que reçut Guedalia (2 R 25:19-23) et le titre de
gouverneur (pèhah en hébreu) que reçut ensuite Zorobabel (Ag
I: 14), puis tous ses successeurs (Ne 5: 15).
On remarque que cette inscription
ne pose pas de difficulté de lecture, car on
ne peut pas confondre les deux lettres D et
: W. Si les Babyloniens préféraient utiliser
l'expression Yehoud (YHD) pour le nom
Yehoudah (YHWDH), les Juifs d'Égypte,
par contre, du Se au 3e siècle avant notre
ère, préférèrent écrire ce nom en écriture
pleine c'est-à-dire YHWDH ou YHWD,
mais jamais YHD109.

La ressemblance entre le nom araméen Yehoud (YHD) et le


nom hébreu Yahou (YHW) a certainement favorisé l'émergence du
nom hébreu Yehoud (YHD) sur les estampilles et les pièces de
monnaie, car, comme on l'a vu, cette orthographe défective en
hébreu est anormale. De plus, quand on observe la fréquence
chronologique de ces deux noms, on constate que, vers le 3e siècle
avant notre ère, il y a un renversement de tendance, les inscriptions
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2.4 - DE SIDQIY A À SIMON LE JUSTE [-600-300J 89

Yehoud (YHD) remplaçant les inscriptions Yahou (YHW). En fait,


ce changement traduit la lente altération du royaume religieux de
Juda (Yehoudah) en un district politique de Judée (Yehoud). Cela
traduit aussi l'émergence d'une conception nationaliste du pouvoir
au détriment d'une conception religieuse. Cette concurrence entre
Yahou et Yehoud aboutira finalement, au premier siècle, à choisir
entre Dieu et César (Jn 19: 15).

2.4.4 Quelques témoignages vocalisés du Nom?

La langue grecque commençait à largement se répandre


depuis le 6e siècle avant notre ère 110,et un auditeur grec' aurait pu,
lors d'une lecture de la Bible, identifier ce nom. D'ailleurs, d'après
Eusèbe, il y eut des traductions de la Bible en grec à cette
époque111, mais la lettre d'Aristée (Lettre d'Aristée XII,312-316)112
précise que ces tentatives échouèrent. Théopompe (-378 -323),
disciple d'Isocrate, puis Théodecte (-375 -334) essayèrent, mais ils
reçurent des "punitions divines ", une folie passagère pour le
premier et une cataracte momentanée pour le second. Hécatée
d'Abdère 113mentionne, vers -300, l'existence d'une loi de Moïse,
mais sans préciser s'il s'agit d'un texte grec.
Puisque d'après le Talmud les Juifs ont utilisé ce nom
même en dehors du Temple jusqu'à Simon le Juste, existe-t-il des
témoignages vocalisés du Tétragramme durant cette période de
-600 à -300? En fait, le seul témoignage biblique du Nom écrit en
grec est très tardif, puisqu'il s'agit d'un manuscrit de la Septante
(4QLXXLevb) daté du 1er siècle avant notre ère, où l'on peut lire
Iaô (I<x(o)à la place du Tétragramme. Mais, vu le contexte, on peut
seulement conclure qu'il s'agit probablement du substitut hébraïque
Yahou.
D'autre part, à Salamine, ville où il y avait des Juifs depuis
longtemps (Ac 13:5), on a retrouvé une pièce chypriote 114datée de
-450 où l'on peut restituer cette inscription grecque rédigée dans le
syllabaire chypriote: "E-u-wa te-o-se". Cependant, cette inscription
est trop courte pour être correctement interprétée. S'agit-il d'un roi
inconnu nommé Évanthès (Euave"t) ou bien de l'inscription leoua
Theos (IEoua 8~oç), c'est-à-dire lehoua Dieu, comme sur une pièce
allemande 115 de 1635?
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91

2.5 De Simon le Juste à Jésus [-300-0]


Au début du 3e siècle avant '~QW NC:>-.: ..
notre ère, la langue araméenne s'est
imposée parmi le peuple. La plupart ~NC'O'{ é
des commerçants parlent aussi le
grec116. L'aristocratie juive parle } )YkAJTAt
certainement l'hébreu en plus du grec,
même si ce grec et cet hébreu e'l~O r-H:rO(.:ê~
diffèrent légèrement du grec littéraire f" ~-~-:
. --:v~~ .~
et de l'hébreu biblique 117.Aussi, dans
un souci didactique vis-à-vis du À OlH .I \~'I .0 .
peuple, le texte hébreu de la Bible fut
paraphrasé en araméen. Ces T'')XCA.1'-~e e.,. C-r
.
I
traductions populaires sont appelées
les Targums. Pour la diaspora juive N(.~ YC' rctoh f<'
qui parlait surtout le grec, on effectua
aussi, vers -280, une traduction .'\.e \:CQi~TA1
. .
grecque des cinq premiers livre de la ~ONT.~Anc
Bible: la Septante 1~8.
:~.tt:J ~
. Papyrus Fouad 266 '.
.

l1F Cependant, les traducteurs ont dû résoudre un épineux


problème. En effet, même si à cette époque il n'y avait pas
d'interdiction formelle, les Juifs n'employaient déjà plus le
Tétragramme avec les non-Juifs. Comme cette traduction allait être
aussi accessible à des païens, les traducteurs ont donc préféré laisser
le nom divin écrit en hébreu dans le texte free, comme on peut le
constater dans ce papyrus de la Septante 19 (daté entre -100 et
-50). On peut noter que le Nom fut écrit en hébreu carré, c'est-à-
dire l'écriture qu'Ezra avait retenue pour la nouvelle mouture du
texte bi blique.

2.5.1 Yahou: un substitut du Nom sur le déclin


Cette façon de procéder120 a été suivie au moins jusqu'en
135 de notre ère, car on ne trouve aucun texte biblique avant le
début du 3e siècle de notre ère avec le terme "Seigneur" à la place
du Tétragramme. Cette prbcédure adoptée par les copistes juifs a
cependant eu deux conséquences néfastes pour le Nom. La
première: comme le nom Yahou était considéré comme un
substitut du Tétragramme, il fut lui aussi "protégé", c'est-à-dire que,
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92 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

comme il apparaissait à la fin des noms théophores, ces noms ont


été rectifiés en -ia et -iou, au hasard des déclinaisons grecques.
Ainsi, dans la Septante, malgré la présence de milliers de ces noms
théophores, on n!en trouve aucun en -iaou.

UF Une seconde conséquence de cette sacralisation des noms


divins fut beaucoup plus néfaste. En effet, les traducteurs, pour
auto-justifier leur choix, vont aller jusqu'à modifier les versets de
Lévitique 24:15, 16, qui deviennent ainsi: «Un homme qui maudira
Dieu encourra la faute; mais pour avoir nommé le nom du
Seigneur, qu'il meure absolument; que toute la communauté
d'Israël le lapide avec les pierres; qu'il soit immigré ou autochtone,
pour avoir nommé le nom du Seigneur, qu'il meure.» 121
Paradoxalement, comme l'a noté Philon, un philosophe juif du
premier siècle (-13 à SO), dans son livre sur la vie de Moïse (De vita
Mosis II,203-206), nommer Dieu était plus grave que le maudire!
Comme on pouvait s'y attendre, cette innovation influença
en retour le culte juif. En effet, la Septante interdisait aux Juifs de
langue grecque de prononcer le Nom, alors que les Juifs de langue
hébraïque pouvaient continuer à l'utiliser, situation paradoxale
pour les Juifs bilingues. En fait, le Talmud de Babylone (Yoma
39b) indique que, dans la pratique, l'utilisation d'un substitut pour
le Tétragramme se généralisa en Israël à cette époque, sauf au
Temple de Jérusalem. Cette rapidité dans l'enchaînement des
événements est facile à expliquer. L'hellénisme, répandu à une
vitesse foudroyante en Israël, entraînait en effet déjà un
affaiblissement du culte, comme le confirment certains livres
historiques juifs (1 M 1:11-15,41-57; 2 M 4:14; 6:6). Cette
interdiction formulée en langue grecque touchait en fait la majorité
de la population juive, qui intégra cette coutume.122
D'après les témoignages historiques du Talmud de
Babylone, de La lettre d'Aristée et des Antiquités juives de Havius
Josèphe (Antiquités XII,2,4[43]), la traduction de la Se~tante (-
280) et la disparition du Nom sur le sol d'Israël (-270)1 3 furent
des événements contemporains, puisque ces témoignages indiquent
tous que Ptolémée Philadelphe et Simon le Juste vivaient au même
moment. Cependant, pour essayer d'harmoniser certaines données
historiques (incompatibles) entre elles, beaucoup de spécialistes
préfèrent actuellement décaler ces dates autour de -200. On peut
enfin noter que, d'après le Talmud Palestinien (Yoma 3,6-7), la
disparition complète du Nom eut lieu après la destruction du
second Temple en 70 de notre ère.
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2.5 - DE SIMON LE JUSTE À JÉSUS [-300-0J 93

~ Pendant la période intermédiaire qui a précédé la


destruction du Temple, le Talmud (Sota 7,6 Tamid 33b) précise
qu'on utilisait des substituts du Nom dans la liturgie palestinienne.
Ces substituts furent nombreux, comme on peut le constater dans la
littérature de cette époque (2 M 1:24, 25; 15:3; Si 23:4; 50: 14-19).
Une contrainte technique, le chant, allait cependant favoriser deux
de ces substituts: "Messire" (Adonay en hébreu), qui est un pluriel
d'intensité signifiant "mes sires" comme en Genèse 19:2; et "Dieu"
(Èlohim en hébreu) qui est lui aussi un pluriel d'intensité signifiant
"dieux". Ce deuxième substitut est principalement utilisé à la place
de YHWH dans l'expression "Messire YHWH", qu'on lisait donc
"Messire Dieu" pour éviter la répétition "Messire Messire". On peut
noter que ces deux substituts hébreux, Adonay et Èlohim, ont aussi
leurs correspondants araméens, utilisés notamment dans les
Targums: Mariya' (Le Monseigneur) et Èlaha' (Le Dieu).
Le chant a effectivement favorisé ces substituts. Même si
nous ignorons la cantilation exacte des textes bibliques 124, nous
savons, par exemple, que les Psaumes étaient chantés sur
d'anciennes mélodies connues de l'époque, qui sont d'ailleurs
indiquées dans les suscriptions (Psaumes 9; 22; 45; 46; 59; 60; 69;
75; 80; 81; 84; 120-134). On sait aussi que ces chants, inaugurés
sous le règne de David, furent chantés au moins jusqu'en 70 de
notre ère (Mt 26:30; Jc 5: 13). Après la disparition du Temple, puis
de la langue hébraïque, ces mélodies furent probablement perdues.
On peut en tirer une conclusiùn logique. Si le Nom fut remplacé
par un substitut vers le 3e siècle avant notre ère, et que les Psaumes
furent chantés du lOe siècle avant notre ère jusqu'au 1er siècle de
notre ère, on peut en déduire que, pour ne pas modifier la mélodie,
on a dû choisir un substitut de même structure syllabique que le
Nom.
, Or, on constate que les deux substituts retenus ('a-do-nay et
è-Io-him) ont effectivement une structure syllabique identique de
deux syllabes et demie (1/2,1,1), exactement la même que le nom
Ye-ho-wah.
~ Une deuxième remarque tirée des contraintes du chant, c'est
que l'assonance 125joua un grand rôle dans la poésie antique. Pour
aider les chanteurs à mémoriser les Psaumes, qui parfois étaient
assez longs, le texte contenait des acrostiches, des parallélismes, des
jeux de mots et des assonances. Par exemple, en Psaume 3:8 on
peut lire: "layehowah ha'ye~û' ah 'al' ammeka !!irkatèka"; en
Psaume 118:25, 26 on peut lire la phrase: "'ana' yehowah
hô~î'ah na' 'ana' yehowah haslîbah na'''. Ce dernier Psaume
était très connu puisqu'on le cite en Matthieu 21:9; 23:39. Le
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94 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Talmud (Mishna Soukka 3:9) précise- aussi que le Nom était utilisé
dans cette bénédiction, mais il la cite en araméen (ana Shema
hosanna). Dans les Targums trouvés à Qumrân 126, datés du 1er
siècle avant notre ère, le s~bstitut utilisé était Èlaha (~v~~), une
adaptation du mot hébreu Elôah (~) signifiant "Dieu" ou "Dieu,
Lui". Des spécialistes estiment que l'assonance a également joué un
rôle dans la formation des noms comme Yehoudah 127.Le Talmud
lui-même avait remarqué cette ressemblance du nom de Yehoudah
avec le Tétragramme (Sota lOb 36b). ~
Le fait d'utiliser le substitut Adonay à la place du Nom a
entraîné de nouvelles conséquences. Ainsi, lorsque les scribes ont
effectué des copies de la Bible sous la dictée, ils ont parfois
confondu les vrais Adonay avec les tétragrammes prononcés
Adonay. Cette façon de recopier était déconseillée, car elle
engendrait des erreurs, mais comme elle économisait du temps elle
fut malheureusement utilisée. Les Sopherims, qui furent les
précurseurs des Massorètes, localisèrent heureusement les 134
endroits, comme on peut le constater en lisant la note massorétique
de Genèse 18:3, où l'on remplaça un tétragramme par un Adonay.
De plus, le procédé consistant à écrire le Nom en hébreu dans le
texte grec impressionna les copistes juifs, qui, pour marquer eux
aussi leur révérence envers le Nom, écrivirent parfois le Nom en
paléo-hébreu dans le texte hébreu. Comme on peut le voir ci-
dessous dans la copie du livre des Psaumes 128,datée de 3D-SO, les
tétragrammes ont été écrits dans un bon paléo-hébreu.

Cette façon de procéder influença en retour les copistes de


la Septante qui essayèrent à leur tour d'imiter ces étranges
tétragrammes.
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2.5 - DE SIMON LE JUSTE À JÉSUS [-300-0J 95

~ Comme on peut
le constater dans les
cop i e s ci-contre 129, I\-~ t~tP~L'i~~ti~
datées du début de
notre ère, le style \~\t;e-ot'iA)..,\:E l ~E;t-
d 'écri ture en paléo-
hébreu fut de
~,~u..>N. .~-"t-\c-e~~(
nettement moins bonne
qualité. De plus, ces ""~\J,.)Ko¥ce~#. ~ I
~

procédés favorisèrent
une attitude mystique ~Q'eeinPOcO'K1\~~
envers les noms divins.
Du reste, le Talmud ~!tt:z.1~~~
pré cis e qu'on
commença à retirer ces
noms des estampilles . __ e..N ~~ !O<::~1.~
~..

de jarre (Arakhin 6a; / ',HMA.\A..'oroYI77J...~~I~;


Shabbat 61 b) pour en
préserver la sainteté. 1<AJ~C KaY 1<Â'1-'.. r~)
De même, par .07J ~''7$~''~
respect, on devait éviter
P+SA
d'utiliser le Nom dans erl011W)4 J<AI rrACu).J..
la conversation, comme
le prouvent ces :CrÂH~!<AI re-~.Jv\Âe
remarques, dans les
livres juifs écrits avant 4TH}oJ
"TY'r 0 C KAt C<!f ..
notre ère: «Ne prends
pas l'habitude de crfOJoJ Jo( Ce-~ .--fO~i:':
prononcer le nom du ~
Saint. Car de mêlne uH eel--#. 'it:,~~,. ~-~-:.c ~ ~
"l~ ,. . . .
qu'u n domestique
toujours surveillé joÔJ c:=SOY~I~C'N Ar,
n'échappera pas aux
coups. ainsi celui qui :'><
)YN l<Â1 ~YCJ 0.'1
jure et invoque le Nom
à tort et à travers ne
e:.'T~.At\JN J~yr5=J
sera pas exempt de M1i1 'J A.'('TN~.i4~ r~~
faute.» (Si 23:9,10).

On considérait que le privilège de prononcer le Nom était


réservé exclusivement au service du Temple (Si 50:20), et qu'on ne
devait pas communiquer ce nom aux étrangers (Sg 14:21).
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96 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

En dehors de la
Palestine, les copies de
la Septante que l'on a
trouvées montrent une
détérioration rapide de
l'écriture des lettres du
Nom, comme dans
cette copie d'Égypte du
début de notre ère 130.
Lorsque les Juifs changèrent de système de numérotation,
entre le 3e et le 1er siècle avant notre ère, ils modifièrent les
nombres 15 et 16. Au lieu d'utiliser YH et YW pour représenter ces
nombres, ils utilisèrent à leur place TW et TZ. Par contre, quelques
siècles plus tôt, vers le 4e siècle avant notre ère, les Juifs avaient
utilisé le nombre YW pour une mesure de liquide.131
ancien système (Bible) nouveau
WJ) iTJ):Jï~ 14 Ï'
ïWJ) iTwon 15 ~ au lieu de it'
ïtD.t,) ÏfWfD 16 tC!3au lieu de l'
ïWJ) iil':lfD 17 r
Ce changement peut facilement s'expliquer dans un
contexte araméen. En effet, dans cette langue les noms YHW et YW
avaient une prononciation identique avant -200 (Yahou et Yaou,
car la lettre H était inaudible). On peut vérifier ce fait - en
remarquant que tous les noms théophores qui se terminaient par
-yahou en Judée, où on parlait l'hébreu, ont été écrits -yaw dans les
territoires extérieurs à la Judée où on parlait l'araméen.
De plus, les légères variations survenues dans la
prononciation de la langue araméenne permettent d'expliquer les
différences des témoignages provenant des auteurs anciens. En
effet, on suppose qu'il y a eu deux grandes périodes pour
l'araméen: de -700 à -200 il y eut l'araméen officiel, qui devint de
-200 à 200 l'araméen moyen. L'hébreu connut lui aussi
approximativement les mêmes périodes lorsque l'hébreu du second
temple devint l'hébreu rabbinique. Les changements principaux
concernèrent justement la prononciation des lettres y et w. Par
exemple, en hébreu, ay devint é, aw devint ô, hou devint soit ô soit
w, éhou devint aw, etc132.En araméen, la:8rononciation de la lettre
w évolua dans le temps: w => v => !2. 1 , ce qui donne en grec
l'évolution: ou => ô => Ü => l2..(!2 correspond au son bv).
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2.5 - DE SIMON LE JUSTE À JÉSUS [-300-0J 97

La prononciation araméenne du mot Yaw donna en grec la


succession: (Iaou) => laô => laüe => labe, succession identique à
celle donnée par les témoins anciens pour le nom de Dieu.
AUTEUR ÉPOQUE LANGUE NOM
Varron 134 -116 -27 Latin lao 1
LXX papyrus 1~ -100-0 Grec laô 2
Diodore de Sicile 130. -90-0 Grec laô 3
Irénée de Lyon 131 130-202 Grec laô 4
Ecrivain gnostique 138 150-180 Copte Yaüe 5
Clément d'Alexandrie 139 150-215? Grec laoué 6
Tertullien 14U 155-222 Latin lao 7
Ecrivain gnostique 141 200? Ethiopien Yâwê 8
Origène 142 185-253 Grec laô 9
Eusèbe de Césarée 143 265-340 Grec laô 10
Epiphane 144 315-403 Grec Iabé Il
Jérôme 14~ 347-419 Latin laho 12
Théodoret de Cyr 146 393-458 Grec labé 13
(1- Antiquitates... divinarum~ 2- 4QLXXLevb~ 3- Histor.I,94,2~ 4- Adversus
Haereses L4,l~ 1,2L3~ 5- L'apocryphe de Jean ILL24~ 6- Stromateon V,VL34,5~
7- Adversus Valent. XIV,3; 8- Mss Aeth9.5 Bodleian Library; 9- Selecta in Ps
II,2-4; Joannes 1:1 (11,7); Contra Cels.VI,32; 10- Demo. Evan. IV, 17,23;
X,8,28; 11- Panarion XXVI,10,1; XXXI,354; Adversus Haereses 1,111,40,5;12-
Breviariumin Psal. VIII,2; 13- Quaestiones in Exodus XV)
~ Lorsqu'ils donnent
la prononciation du nom
divin, ces auteurs ne
précisent jamais s'il s'agit du
substitut araméen YW, ou du
nom YHWH réservé au
Temple. Même si dans le
papyrus de la Septante, daté du 1er siècle avant notre ère, l'on
trouve laô à la place du Tétragramme, on peut encore supposer
qu'il s'agissait du substitut, puisque à Qumrân il était interdit de
vocaliser le Nom sous peine d'exclusion de la communauté. Un
autre facteur subtil qui a dû dissuader un juif (connaissant le Nom
complet) de le livrer à un étranger, est la confusion (inconvenante)
avec le nom loua signifiant' "fille de louis [Jupiter]" ou "Jupiterette"
selon Varron!147 (Des érudits effectueront d'ailleurs, par la suite, un
rapprochement entre les noms loua [Iehoua] et Jupiter). Varron a
donc cité le nom lao mais il ignorait qu'il s'agissait d'un substitut.
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98 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

~ Un dernier indice, permettant d'appuyer une prononciation n

araméenne yaw (YW) et yahaw (YHW)~ provient de la constatation


suivante: de nombreux noms hébreux de deux ou trois lettres se
terminant par un -Wont été transcrits par une finale en -aÜ dans la
Septante (correspondant au son -aW [W=ou]), et par un -6 dans le
texte massorétique (correspondant à un son -Û [û=ou] d'origine,
son que l'on retrouve d'ailleurs dans les noms "théophores". Par
exemple, les noms construits à partir de Nabû (ou de Ra'û),
commencent par Nabou- (ou Ragou-) dans la Septante (au lieu de
Nabaü et Ragaü), et Nebû- (ou Re'û-) dans le texte massorétique.)
NOM GREC HÉBREU ASSYRIEN RÉF.
(2 lettres) (LXX) (M.T.) (B.D.B.)
Ww Ouaü Waw Dû Ps 119:41
Zw Ziou Ziw Ziû 1 R 6:37
Tw Taü Taw Ps 119: 169
Yw (Iaü) (Yaw) (Iû)
(3 lettres)
Hzw Azaü Hazô Hazû Go 22:22
Yllw loppè Yallô lapû Jos 19:46
Nbw Nabaü Nebô Nabû Nb 33:47
Nkw Nékaô Nekô Nikû 2 Ch 35:20
'dw Addô 'Iddô 2 Ch 13:22
'kw Akkô Akkô Akkû Jg 1:3 1
'sw Esaü 'Esaw Gn 32:19
R'w Ragaü Re'û Gn Il: 18
Yhw (Iaü) (Yehô) (la û) (1 Ch 2:38)

Cependant, les noms propres hébreux de quatre lettres et


plus se prononçant comme ils s'écrivent (pour la majorité), les
traducteurs de la Septante devaient les lire de cette manière et
certaines erreurs de lecture de leur part confirment ce fait. Ainsi,
l'expression "vers lui" ('lyw en hébreu) a été lue comme elle s'écrit,
c'est-à-dire Èliou (IR 17:2, 8; 18:8, 17), "ses frères" ('byw) a é~é
lue Akiou (1 Ch 26:7), "la colline de Morè" (gb'! hmwrh) a été lue
Gabaa! Amôra (J g 7: 1), etc. On constate qu'une expression
contenant le Tétragramme (1 R 17:20), et signifiant "vers yhwh"
('I-yhwh) a même été lue par erreur Èl-iou, et que le Tétragramme
a aussi été lu /ouda à deux reprises (Jg 1:22; 2 S 1:12)!
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99

2.6 De Jésus à Justin [0-150]


Au début de notre ère, la révérence pour le Nom est
devenue très grande, et l'expression "Que ton nom soit sanctifié"
(Mt 6:9) est tout à fait en accord avec cette attitude, sans toutefois
justifier la coutume' de s'abstenir de prononcer le Nom. D'ailleurs,
le Talmud relate qu'on avait le droit de prononcer le Nom comme
il s'écrit, mais dans l'enceinte du Temple exclusivement, puisque
dans cet endroit les prêtres étaient obligés de le prononcer pour
effectuer la bénédiction conformément à Nombres 6:23-27.
Cependant, pour réduire encore cet usage, d'après le Talmud
(Yoma 3:6; 40d; 66a), d'autres prêtres chantaient à tue-tête pour
couvrir la proclamation du Nom.
Le substitut habituel dans la liturgie palestinienne était
Adonay (Talmud Sota 40b 7,6) et quelquefois Elohim (Écrit de
Damas XV,I)148. Dans la vie quotidienne, la liste des substituts était
beaucoup plus longue, comme on peut le constater dans les
Évangiles où l'on trouve pour désigner Dieu les termes: les Cieux,
Père, le Très-Haut, le Béni, le Nom, etc. Le Talmud précise aussi
(Berakhot 63a 9,9) que l'on devait utiliser le Nom dans les
salutations. En fait, vu le contexte, il devait s'agir du nom Yah mais
pas du nom complet, car on utilisait encore souvent ce nom dans
les louanges à Dieu, comme dans l'expression Alléluia, qui signifie
"louez Yah", que l'on trouve encore écrite dans le livre de la
Révélation (Ap 19:1-6) rédigé par l'apôtre Jean vers 96.
Comme on peut le voir dans le livre des Psaumes, trouvé à
Qurnrân149, le nom Yah est écrit normalement, contrairement au
Tétragramme qui est écrit en paléo-hébreu. On constate aussi que
plusieurs "Adonay" ont pris la place du Tétragramme. Plusieurs
particularités de ces rouleaux 150 peuvent aujourd'hui s'expliquer
sans difficulté. Par exemple, l'usage du paléo-hébreu, qui a parfois
aussi été utilisé pour écrire le nom hébreu "ÉI" (Dieu) 151,exprime
seulement une grande révérence des scribes envers les noms divins.
D'après le Talmud (Shabbouot 35a), il était même interdit d'effacer
un nom divin écrit par erreur. On pouvait malgré tout l'effacer
virtuellement en écrivant des points au-dessus ou au-dessous 152.
Les scribes rajoutaient aussi au-dessus du texte les mots
qu'ils avaient oubliés. Par, exemple, dans la séquence YHWH
Adonay, que l'on trouve dans le livre d'Isaïe (Is 3: 15; 28: 16; 30: 15;
65: 13)153, le scribe avait visiblement dû entendre [Adonay]
Adonay et écrivit seulement [Adonay], c'est-à-dire YHWH; puis,
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100 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

après vérification, il rajouta les Adonar manquants -au-dessus des


tétragrammes, non pour indiquer la prononciation du Nom, mais
parce qu'HIes avait oubliés.

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2.6.1 L'usage du Nom dans le Temple
IŒ En fait, la prononciation Adonay était bien connue.
Cependant, le Talmud précise que, dans le Temple, lorsque le Nom
était prononcé à voix haute (Kiddouchin 71a; Yoma 40d; Tamid
30b), ce n'était pas cette prononciation qui était utilisée. Dans ce
cas, le Tétragramme était prononcé comme il s'écrivait. Remarque
importante, cette prononciation était faite en hébreu et non en
araméen; ainsi les informations que l'on pouvait tirer des noms
théophores en araméen constituaient en fait des fausses pistes.

NOM CONSONNE ARAMÉEN PHONÉI1QUE


Y ehôshaphat Yhw~J2.t Y ahaw~aJ2.at Iâôshafat
,
Ahio ' byw Abyaw Ahiaô
,
Ahiyah ' byhw Abyahaw Ahîâô
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150J 101

NOM CONSONNE HÉBRElT PHONÉfIQUE


Y ehoshaphat Yhw~~t y ehô~~at Ieôshafat
,
Ahio ' I:)yw Al:)yô Ahiô
,
Ahiyah ' byhw Abiyahû Ahîaû

On peut remarquer, d'après ce tableau, que la prononciation


araméenne semble beaucoup plus cohérente que la prononciation
hébraïque, puisque dans tous les cas le nom divin extrait de ces
noms théophores est lu Iaô, alors qu'en hébreu on trouve les
variantes leô, lô et laou. On constate de plus que la majorité des
mots qui se terminent par -WH à Qumrân sont en fait vocalisés -oH
dans le texte massorétique 154. Ainsi, impressionnés par tous ces
témoignages en Iaô, de plus en plus de spécialistes concluent que la
prononciation du nom YHWH pourrait être YaHWoH155.
Cette vocalisation reconstituée contredit cependant tous les
témoins qui avaient accès à la prononciation du Nom dans le
Temple, au premier siècle. Par exemple, Flavius Josèphe (37-100),
qui avait accès à la prêtrise de cette ép<XJue,précisa que, lorsque les
Romains ont attaqué le Temple, les Juifs ont invoqué le redoutable
nom de Dieu 156,tout en précisant qu'il n'avait pas le droit de
révéler ce nom à ses lecteurs 157.Cependant, dans un de ses livres, il
donna une indication capitale sur cette prononciation qu'il ne
voulait pas dévoiler.
IrE On peut lire en effet dans son ouvrage Les antiquités juives
la remarque suivante: «Le grand prêtre avait la tête couverte d'une
tiare de lin fin bordée d'un liseré violet, et entourée d'une autre
couronne, en or, ;Jui portait en relief les lettres sacrées: ce sont
quatre voyelles.» 1 Cette description est excellente; d'ailleurs, elle
complète celle que l'on trouve en Exode 28:36-39. Cependant,
comme chacun sait, il n'y a pas de voyelles en hébreu, mais
seulement des consonnes. Malheureusement, au lieu d'expliquer
cette anomalie apparente, certains commentateurs (influencés par la
forme Yahwèh) induisent les lecteurs de Josèphe en erreur, en
indiquant en note que cette lecture était IAUE. Or, il est évident
que les "lettres sacrées" désignaient le Tétragramme écrit en paléo-
hébreu, et non en grec. De plus, en hébreu ces consonnes Y, W, H,
servent justement de voyelles; elles sont d'ailleurs appelées "mères
de lecture" (matres lectionis). Les écrits de Qumrân ont montré
qu'au premier siècle le Y en tant que voyelle servait uniquement
pour indiquer les sons I et É, le W servait uniquement pour les sons
Ô et OU, et le H final servait pour le son A. On peut vérifier ces
équivalences sur des milliers de mots. De plus, le H ne servait de
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102 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

voyelle qu'à la fin des mots, et jamais ~ l'intérieur159.Ainsi, lire le -

nom YHWH comme quatre voyelles, c'est le lire IHOUA ou ÉHÔA.


IF Un second témoignage de la même époque, provenant de
personnages qui avaient accès à la prêtrise, est celui des rabbins
eux-mêmes dans le Talmud. En effet, dans le Talmud le
Tétragramme est désigné par l'expression "Shém hamephorash",
qui signifie "le nom lu distinctement" ou "le nom lu suivant ses
lettres". Certains cabalistes affirment que le mot "mephorash"
signifie "caché", mais, une fois de plus, cela contredit le sens que la
Bible donne à ce mot (Ne 8:8; Esd 4: 18). De plus, le Talmud _
(Sanhédrin 101 a; 10: 1) mettai t en garde contre l'utili sation
magique de certaines citations bibliques comme Exode 15:26, et
précisait que ceux qui faisaient cela n'auraient pas part au monde à
venir. Le rabbin Abba Shaül rajouta (vers 130-160? de notre ère)
que celui qui "prononce le Nom selon ses lettres" n'aurait pas part
non plus au monde à venir. L'expression "prononcer le Nom selon
ses lettres" signifie prononcer le Nom comme il s'écrit, ou selon le
son de ses lettres, ce qui est différent d'épeler un nom selon ses
lettres. En effet, il était autorisé d'épeler le nom YHWH selon ses
lettres (puisque le Talmud lui-même le fait), c'est-à-dire en hébreu
Yod, He, Waw, He (ou Y,H,W,H en français); par contre, il était
interdit de le prononcer selon ces mêmes lettres.
En hébreu, la majorité des noms propres, en écriture pleine,
peuvent être lus selon leurs lettres. Au premier siècle, on a
l'équivalence Y = I, W = OU, H = A en final. De plus, on a
quasiment toujours l'alternance consonne-voyelle dans la lecture de
ces noms, sauf dans le cas d'une gutturale ou d'un H final, qui sont
vocalisés A. Lorsque la voyelle n'est pas indiquée dans un nom, on
vocalise aussi les consonnes avec un a.

NOM LV SES SES LA LES


SELON CONSONNES LEITRES SEPfANTE MASSORÈTES
1 Ch 3:5 YIW~lym Irou~alim lérousalèm Yerou~alayim
Gn 29:35 Yhwdh Ihouda Iouda Yehoudah
Gn 25: 19 'brhm ' Abaraham Abraam ' Abraham
Gn 25: 19 Ysbq Isabaq Isaak Yisbaq
Lv 26:42 Y'qwb Iaqoub Iakôb Ya'aqôb
2 Ch 27: 1 YIW~h Irou~a Iérousa Yerou~ah
Gn 46:17 Y~wh I~oua Iésoua Yi~wah
1 Ch 2:38 Yhw' Ihou' Ièou Yéhou '
Gn 3: 14 Yhwh Ihoua (Kurios) (Adonay)
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150J 103

On constate dans le tableau ci-dessus un accord


remarquable entre la lecture des noms selon la Septante et leur
- lecture selon leurs lettres (en langue hébraïque).
Un troisième témoignage, toujours de la même époque,
venant de personnages qui avaient accès à la prêtrise, est celui des
traducteurs de la Septante. Ce texte avait en effet fixé la
vocalisation des noms propres juste avant que ne fût adoptée la
coutume de ne plus utiliser le Nom en dehors du Temple. Or, on
constate que tous les noms théophores commençant par YHW -()
dans la Bible hébraïque ont été vocalisés lô-(a)- dans la Septante
(sauf Yéhou'., mais la vocalisation de ce nom en Yéhoua' aurait
créé une confusion avec le nom divin), et jamais en la-. Ainsi, le
nom divin, constituant le nom théophore par excellence (soit YHW-
H), pour être en accord avec tous les autres noms théophores aurait
dû être vocalisé lô-a en grec, soit en français., si on restitue le H
muet: Ihooa. \

Cette vocalisation Ihoua, ou Yehoua en tenant compte des


noms théophores du texte massorétique., permet d'expliquer une
anomalie dans les textes <Je Qumrân. En effet, il était interdit de
prononcer le nom divin., même lors d'une lecture d'un texte
biblique, sous peine d'exclusion de la communauté160. On peut
donc déduire de cette remarque que, pour appliquer cette règle, il
fallait connaître la prononciation de ce nom. Pour respecter cette
règle, on constate que souvent dans certains textes le Tétragramme
a été remplacé par le substitut ftLui-mêmeft161,soit en hébreu Hou',
substitut que les Targums utilisèrent également162. Cependant., ce
dernier mot a été écrit Hou'a avec un a "harmonique "163.
L'explication la plus simple de cette anomalie paraît être
l'assonance avec le nom divin. En effet, on pouvait même
remplacer le nom Yehoua interdit par l'expression autorisée Yah
Hou'a. On peut noter que la langue arabe a conservé cette
ancienne expression fa Huwa (moi [c'est] lui)164 dans la sourate
27:9 du Coran: «â Moïse! Certes, le soi est moi Allah Tout-
Puissant, le Sage.» 165

Était-il vraiment interdit de prononcer le Nom au premier


siècle? La réponse est non, car., d'après le Talmud, cette interdiction
est apparue seulement au milieu du deuxième siècle de notre ère.
De plus, il n'y a aucune trac~ d'une telle interdiction dans la Bible, à
l'exception bien précise du blasphème (Lv 24: Il, 16). La seule
remarque que l'on puisse faire d'après les Évangiles, c'est que la
notion de blasphème avait été élargie à l'apostasie (Mt 9:3; 26:65).
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104 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

2.6.2 L'emploi du Nom par les premiers chrétiens


Jésus a-t-il prononcé le Nom? Premièrement, comme il a
dénoncé vigoureusement les traditions humaines qui annulaient les
prescriptions divines (Mt 15:3), il paraît peu vraisemblable qu'il se
soit plié à cette coutume non biblique de ne pas prononcer le Nom.
Deuxièmement, l'Évangile précise que Jésus a lu dans une
synagogue (Le 4:16-20) une partie du texte d'Isaïe (Is 61:1); or,
ces versets comportent le Tétragramme. Même s'il s'agissait du
texte de la Septante, cette traduction comportait à cette époque le
Nom en hébreu, comme on peut le constater dans toutes les copies
de ce texte datées d'avant ISO.
Le fait que Jésus prononça le Nom a-t-il surpris son
auditoire? Comme ses auditeurs étaient galiléens, ils devaient parler
l'araméen et aussi connaître le substitut Yaw, car l'archéologie a
fourni de nombreux témoignages grecs en Iaô. De plus, le nom
Yaho joua un grand rôle dans la mystique juive166. Par exemple, on
le retrouve dans un ouvrage écrit vers 100 (Apocalypse d'Abraham
10:3-11 :5), où on peut lire les remarques suivantes: «Iaôel (Iaô
[est] Dieu) est un agent visible de Dieu appelé du même nom, par
la médiation de mon nom ineffable» 167;pour cacher son nom, cet
ange Yahoel fut plus tard appelé Métatron. Comme on l'a vu,
même à Qumrân et malgré l'interdiction, les °noms Yah et Hou' a
étaient autorisés, et par conséquent l'expression Yah Hou' a, c'est-à-
dire "Yah lui-même", aussi. On peut facilement comprendre que la
prononciation hébraïque du Nom, même si elle était un peu
différente des substituts araméens, a dû être identifiée par les
auditeurs galiléens de Jésus. D'ailleurs, aujourd'hui, le problème est
resté le même: lorsqu'un lecteur lit la Bible, il peut choisir entre le
nom hébreu Jéhovah et le nom araméen Yahwèh; l'auditoire
comprendra sans problème.
Si Jésus a employé le Nom, il semblerait cependant qu'il en
ait fait, comme ses apôtres, un usage prudent dans ses conversations
courantes. De plus, pour éviter d'être accusé de blasphème durant
son jugement, Jésus respecta la restriction judiciaire de ne pas
prononcer le Nom avant l'annonce finale du jugement (Sanhédrin
56a 7,5). C'est pour cette raison que, pendant l'interrogatoire, seuls
des substituts furent utilisés, comme: "le Dieu vivant", "la Puissance"
(Mt 26:63, 64), "le Béni" (Mc 14:61, 62). D'ailleurs, pour éviter une
accusation postérieure injuste, Jésus respecta scrupuleusement cette
restriction judiciaire et continua de ne plus employer le nom divin
jusqu'à sa mort.
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150J 105

Ce problème toucha aussi les premiers chrétiens (d'origine


juive), car ceux-ci étaient considérés par les Juifs comme des
apostats (Dt 13: 10) et donc aussi comme des blasphémateurs
méritant la mort (Ac 26:10). Ainsi, un supposé blasphémateur
signait son arrêt de mort s'il prononçait le Nom; c'est par exemple
ce qui arriva à Étienne (Ac 6:11; 7:33,58)168. On peut facilement
comprendre que dans un tel contexte les premiers chrétiens usèrent
de prudence en milieu juif, car ils risquaient maintenant leur vie
s'ils utilisaient le Nom.
En dehors d'Israël, la situation n'était guère meilleure à
cause des lois sur les superstitions (Lex superstitio illicita). Cette loi
punissait de la peine de mort quiconque introduisait une nouvelle
divinité non autorisée. L'interdiction était la suivante: «Personne
n'aura des dieux nouveaux ou différents, ni d'adorera des dieux
privés inconnus, à moins d'avoir une autorisation publique.»
Socrate, par exemple, fut mis à mort à cause de cette loi, ce qui
montre qu'on ne badinait pas avec les écarts religieux. L'apôtre
Paul connaissait, bien sûr, cette loi redoutable (Ac 16:21; 17:18;
18: 13) et donc, par prudence, évita soigneusement l'utilisation du
Tétragramme dans ses discours, préférant utiliser des substituts
comme "Dieu", "Seigneur du ciel et de la terre", "Être divin" (Ac
17:21-32). Pour résumer, les chrétiens, sauf à exposer leur vie, ne
cherchèrent pas à propager le Nom 169. De plus, pour eux, la
connaissance du nom de Jésus était devenue un élément primordial
(Mt 12:21; Jn 16:24; 20:31; Ac 4: 17-18; 9: 15; Rm 1:5; 1 Jn 5: 13),
et même les exorcistes pouvaient constater que le nom de Jésus
était puissant (Mc 9:38; Mt 7:22).
Comment les premiers chrétiens écrivirent-ils le
Tétragramme lorsqu'ils copièrent la Bible? Comme ils étaient
d'origine juive (judéo-chrétiens), ils avaient accepté la Septante
grecque (~ui était une traduction juive) et ils continuèrent à la
propager1 0. Au départ, ils ont probablement continué d'écrire le
Nom en hébreu dans un texte grec 171,au moins jusqu'à la mort du
dernier apôtre (d'origine juive) vers 100 de notre ère (2 Th 2:7). Il
est d'ailleurs intéressant de noter que rabbi Tarphon (Shabbat
116a) relate, entre 90 et 130, le problème de la destruction de
textes hérétiques (chrétiens) avec le Tétragramme.
~ Après la destruction du Temple en 70, puis de la
malédiction officielle 172des' chrétiens (judéo-chrétiens) par les juifs
vers 90-100, de profonds changements vont se produire. Tout
d'abord, l'hébreu cessera pratiquement d'être parlé après le 2e
siècle 173. De plus, avec l'internationalisation du christianisme,
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106 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

l'étrange coutume juive d'écrire un "mot hébreu" que l'on prononce


"Seigneur" (Kurios en Grec) va être abaOdonnée par les copistes 174,
chrétiens (pagano-chrétiens pour la majorité), probablement entre
70 et 135, car ceux-ci vont simplement écrire le mot "Seigneur" à
la place de l'étrange Tétragramme hébreu. Cependant, la séquence
Kurios YHWH posa un problème de traduction. D'ailleurs, on peut
constater le grand choix de solutions retenues pour traduire cette
expression, qui devint en grec "Kurios Kurios", "Kurios Theos",
"Kurios Adonay" ou "Kurios" (expressions que l'on peut vérifier
dans la Concordance de Hatch et Redpath). Cela engendra aussi
une foule de variantes dans les Évangiles 175.
~ Les Juifs, en réaction contre les chrétiens, rejetteront avec le
temps leur traduction de la Septante et produiront de nouvelles
versions 176,comme celle d'Aquila (129) de Symmache (165) et de
Théodotion (ISO?). Mais, contrairement aux traducteurs chrétiens,
les copistes juifs garderont leur coutume d'écrire le Nom en paléo-
hébreu à l'intérieur du texte grec, comme on peut le constater dans
cette copie d'AquiIa 177datée du Se siècle.

Origène confirma
cette coutume d'écrire le
Tétragramme en hébreu
ancien dans le texte grec '~IeI.AeC'C"Nn~
dans un commentaire 178 sur Tr~'T'f'O'N"OX'A ONrTO-;'
les Psaumes. Cependant, un
Mer~NTorY~ON'e1
peu plus tard, Eusèbe puis
Jérôme préciseront que les .AoyerCDr.Al.AaiM1
Juifs utilisaient de nouveau /It,.YIONe{c"X'elrr~.,coy
l'hébreu moderne pour
écrire le Nom, et que CHM6JONJ</A ,"r"'NCO
malheureusement ces lettres CHOT)er"col~;11
(~ i i1 ..) étaient confondues
avec des caractères grecs de J</J\.1e1TT6rN~ '1;..00 E N-r1
forme similaire (n I nI), Ne1"J<~lerneN'I~.A6
comme on peut le constater
Aerell~reN"TreCI
dans de nombreuses copies
des Hexaplès 179. Jacques XO"N'-r(1)Nr..-1<JJN6
AJ'
d'Édesse, vers le 7e siècle, ~

observait encore ce curieux nb...r X'CONJ<~ 1e11T6


phénomène d'écrire le Nom
sous la forme n I n I.
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150J 107

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On peut observer l'utilisation de l'hébreu (moderne) pour


écrire le Nom dans ce manuscrit Ambrosien du ge siècle 180. Au
début, au moins jusqu'en 135, les copies des Écritures grecques
chrétiennes furent probablement faites de cette façon 181 (c'est-à-
dire avec des tétragrammes écrits en paléo-hébreu). Mais a-t-on des
traces de cette ancienne pratique? Oui, dans deux cas au moins.
Dans le premier cas, il s'agit du plus vieux papyrus chrétien,
le P52, le seul qui appartienne à cette période, puisqu'il est daté de
125. Ce papyrus contient une "anomalie" que l'on ne rencontre
plus dans aucun des manuscrits chrétiens postérieurs. En effet, il ne
contient pas de nomina sacra 182, c'est-à-dire que l'on n'a pas
remplacé les noms considérés comme sacrés par des abréviations.
Dans le deuxième cas, il s'agit du nombre inexplicable
d'erreurs concernant la confusion entre les termes "Seigneur" et
"Dieu" dans les Évangiles. En effet, comme on l'a vu, l'expression
Kurios YHWH avait posé un sérieux problème aux traducteurs de
la Septante. Cette expression est beaucoup plus rare dans les
Évangiles; par contre, le titre "Seigneur" (Kurios) est fréquemment
appliqué à Jésus, ce qui pouvait engendrer une confusion avec
l'autre "Seigneur", traduction de YHWH. Aussi, certains copistes,
pour éviter cette confusion, préférèrent traduire YHWH par "Dieu"
(Théos) ou simplement omettre ce nom, comme on peut le
constater dans les passages suivants: Le 1:68; Ac 2: 17; 6:7; 7:37;
10:33; 12:24; 13:5, 44, 48; 15:40; 19:20; 20:28; Rm 14:4; Col
3:13, 16; 2 Tm 2:14; Je 3:9; Jude 5; 18:8. La liste des variantes
Afa
est grande pour ces quelques versets 83. Comment expliquer que
des traducteurs aient buté sur la lecture ou la compréhension de
mots aussi simples et bien connus que "Dieu" et "Seigneur"? Des
spécialistes admettent ~ue plusieurs "Seigneur" ou "Dieu" aient pris
la place de YHWH1 . Ces remplacements furent très rapides,
puisque après le 2e siècle de notre ère on ne trouve ~uasiment plus
de traces de l'écriture et de la prononciation du Nom 85,à part chez
quelques érudits chrétiens.' Paradoxalement, un lecteur chrétien
pouvait même croire que le Dieu de la Bible s'appelait Sabaôth,
puisqu'il trouvait ce nom dans l'expression Seigneur Sabaôth
(Kuptoç }:uf3uro{t)en Romains 9:29 et en Jacques 5:4.
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108 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Que le nom de Dieu ait joué un grand rôle pendant les


deux premiers siècles en milieu chrétien~ on peut le vérifier dans les
" écrits de plusieurs écrivains de cette époque, dont les remarques186
montrent qu'ils avaient une profonde vénération pour le Nom.
?? [70-100] - La Didachè (10:2, 3; 14:3)
Clément de Rome [?-96] - EpÎtre aux Corinthiens (43:2, 6; 45:7
58: 1; 59:2, 3; 60:4; 64)
Ignace d'Antioche [?-117] - Lettre aux Éphésiens (1:2; 3:1; 7:1)
- Lettre aux Magnésiens (1 :2)
- Lettre aux Philadelphiens (10:1, 2)
Polycarpe [70-160] - Lettre aux PhiIippiens (10:3)
- Le martyre (14:1)
Hermas [?-140] - Le Pasteur (9:9; 10: 1; Il:5 12:3 23:4)
~ Cependant, ces auteurs, tout en accordant beaucoup
d'importance au nom divin, ont utilisé le substitut "Seigneur" même
lorsqu'ils citaient les Saintes Écritures. Néanmoins, ils évitèrent
soigneusement la confusion entre YHWH (désigné par "Seigneur"
et "le Dieu"), et Jésus (désigné par "le Seigneur" et "Dieu"). Ainsi, la
présence ou l'absence d'article permettait de savoir de qui on
parlait, de Jésus ou de YHWH187. Malheureusement, cette subtilité
de langage disparaîtra après le 2e siècle.
Le terme "Seigneur", à cette époque, était-il accepté comme
un nom propre? La réponse est non, en dépit des citations qui
suivent. Par exemple, Polycarpe expliquait qu'il ne pouvait dire
«César est Seigneur» (Le martyre de Polycarpe, VIII,2); de même
Josèphe relatait qu'il ne pouvait reconnaître César comme un
seigneur ni prononcer ce mot (La guerre des Juifs, VII,418); et
enfin l'apôtre Paul, qui disait «bien qu'il y ait beaucoup de
seigneurs (...) il n'y a qu'un seul Seigneur.» (1 Co 8:5, 6)
Cependant, il faut resituer toutes ces citations dans leur contexte.
Dans les Évangiles, il ne s'agit que d'un titre, puisqu'on
l'applique également à des humains (Jn 12:21; 20:15; Ac 16:30).
De même, le philosophe juif Philon (-13, 50) utilisa ce titre pour
désigner le "Seigneur Gaius" (Legatio ad Gaium 44-46). De même
encore, on rencontre fréquemment ce terme "seigneur" dans du
courrier de la période de Bar-Kochba 188,écrit en grec et en hébreu
vers 135. Enfin, ce terme n'a soulevé aucune controverse avec les
autorités politiques de cette époque.
L'explication est en fait très simple: le terme "Seigneur"
supporte à la fois un sens religieux et un sens politique. Cependant,
pour les premiers chrétiens il y avait une différence entre les titres
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150J 109

politiques, qui devaient être respectés (Rm 13:7), et les titres


religieux, qui devaient être rejetés (Mt 23:8-10). Or, César cumulait
une fonction politique d'empereur et une fonction religieuse de
souverain pontife. L'écrivain Tertullien expliqua que c'était là que
se situait le vrai problème (Apologétique XXXIV,I).
En effet, pour un chrétien, le titre de "Seigneur" dans un
sens politique ne posait aucune difficulté, mais le titre de
"Seigneur" dans un sens religieux ne pouvait revenir qu'à Dieu
seul. Ainsi, lorqu'on a demandé à Polycarpe de dire «César est
Seigneur;>, le contexte montre qu'on lui a demandé de le dire
suivant la procédure régulière, ce qui impliquait de reconnaître
César comme souverain pontife (Le martyre de Polycarpe, IX,2), ce
qui était impossible pour Polycarpe.
Comme on pouvait s'y attendre, le fait de désigner Dieu par
le titre "Seigneur" limita rapidement le rôle du nom de Dieu pour
les chrétiens 189.Plusieurs autres facteurs vont se combiner pour
faire tomber rapidement le Nom dans l'oubli: la mauvaise
traduction de Lévitique 24: 15, 16, une révérence mystique envers
le Tétragramme, l'influence de la législation concernant les
superstitions, l'accroissement des persécutions, l'importance du rôle
joué par le nom de Jésus et l'influence de la philosophie grecque
dissertant sur l'impossibilité humaine de nommer Dieu.

2.6.3 Philosophes et religieux s'opposent au Nom

De façon surprenante, ce sont les philosophes et les chefs


religieux qui furent les opposants au Nom les plus pernicieux 190.
En fait, plusieurs ouvrages du philosophe grec Platon (-427-347)
eurent une grande influence sur eux et sur leur conception du nom
de Dieu. Platon affirmait en effet dans ses ouvrages (Timée 28b,c;
Cratyle 400d; Parmenide 142a) qu'aucun nom ne désignait
parfaitement Dieu; de plus, avoir un nom impliquait de l'avoir reçu
de quelqu'un de plus ancien, ce qui était impossible pour Dieu;
donc Dieu ne pouvait avoir de nom. De façon incroyable, ces
arguments furent souvent intégrés, avec le temps, dans
l'enseignement biblique.
Philon, par exemple, philosophe juif du premier siècle (-15,
50), avait une bonne connaissance biblique sur le Nom, puisqu'il
indiquait dans son livre sur la vie de Moïse: «Il y avait aussi une
plaque d'or travaillée en forme de couronne et portant les quatre
caractères gravés d'un nom que seuls avaient le droit d'entendre et
de prononcer dans les lieux saints ceux dont l'oreille et la langue
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110 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

avaient été purifiées par la sagesse, et personne d'autre et


absolument nulle part ailleurs (u.) Sur le turban se trouve la plaque
d'or, sur laquelle sont imprimées les gravures des quatre lettres qui
fonnent, est-il dit, le nom de Celui qui est, vu que sans l'invocation
de Dieu rien de ce qui existe ne peut tenir debout.» (De vita Mosis,
II, 114-132)191 Cette déclaration paraît limpide. Pourtant, dans le
même ouvrage, Philon expliquait paradoxalement, en commentant
Exode 3: 14 dans la traduction de la Septante, que Dieu n'avait pas
de nom propre (De vita Mosis I, 75)!
Pour réussir à concilier ces deux affirmations absolument
contradictoires, Philon procéda par étapes successives.
Premièrement, il justifia l'habitude de ne pas prononcer le nom de
Dieu par l'analogie suivante (De vita Mosis, II, 207): Des enfants,
par révérence envers leurs parents, n'utilisent généralement pas
leurs noms pour les désigner, mais préfèrent utiliser les titres de
père et de mère (ou papa et maman). Ensuite, il expliqua que le
nom propre de Dieu était lui-même un substitut, puisque Dieu avait
refusé de révéler ce nom aux humains. Pour prouver cette dernière
affinnation, il citait192 les passages d'Exode 6:3 et de Genèse 32:29.
Ainsi, il passa une bonne partie de son temps à prouver que le nom
de Dieu n'était pas un nom véritable!193
En fait, Philon appartenait plus au monde des philosophes
qu'au monde de la Bible, car, même s'il connaissait les deux
substituts du nom divin "Seigneur" (Kurios en grec et Adonay en
hébreu) et "Dieu" (Théos en grec et Elohim en hébreu), sa
connaissance biblique provenait surtout de la Septante, comme ses
nombreuses citations le prouvent. Par exemple, pour expliquer le
changement de nom en Nombres 13:17, même s'il est capable de
traduire le nom Osèe par "salut", il traduit le nom Ièsous par "Salut
du Seigneur"194. De plus, prouvant que sa connaissance hébraïque
était très lacunaire, il écrivit que les caractères qui servaient à écrire
le Tétragramme étaient peut-être le symbole des quatre premiers
chiffres (De vita Mosis, II, lIS)!
Justin (100-165) est un autre exemple de cette insidieuse
opposition contre le Nom. Comme Philon, Justin expliqua souvent
dans ses ouvrages qu'il était impossible pour l'homme de nommer
Dieu195, et une fois de plus l'argument principal qu'il donne
(Apologies II, 6, 1) est extrait de l'œuvre de Platon (Timée).
Cependant, une anomalie intéressante dans ses citations (comme le
passage de Mika 4: 1-7 repris dans son Dialogue avec Tryphon
~109) permet de supposer qu'il connaissait le nom de Dieu. En
effet, ses citations bibliques ne s'accordent ni avec la LXX ni avec
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2.6 - DE JÉSUS À JUSTIN [0-150} . III

le texte massorétique, mais seulement avec les textes bibliques ci-


dessous, trouvés à Qumrân.

::t~t~'WN.è.~N~M~4)N 6~A~M'f:N. OrlRAN.


-r~C O( "Ao t n oPE-rCON""C Ât ENON. OMA "C'lSE.OrA'£T:Wt1.
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Comme on peut le voir, en dépit du fait que le


Tétragramme apparaît bien (en paléo-hébreu) dans ce texte grec196,
Justin ne l'a pas compris comme un nom propre. Peut-être a-t-il
pensé qu'il s'agissait d'une procédure archaïque d'écriture pour le
mot "Seigneur". D'ailleurs, à cette époque, même Irénée de Lyon
(130-202) croyait que le mot Iaô (Iaro en grec, [Iah] en latin)
signifiait "Seigneur" en hébreu primitif (Contre les hérésies II,
24:2). Irénée estimait que l'usage de ce mot hébreu laô, pour
désigner le Nom du Père inconnu, était destiné à impressionner les
esprits crédules dans les cultes à mystères (Contre les hérésies l,
2 1:3) .
l1F Cette activité philosophi?9ue produisit, avec le temps, une
abondance de sectes gnostiques 7, avec cependant deux grandes
tendances concernant le Nom. Un groupe, le plus important,
affirmait que nommer Dieu était impossible, car quiconque a un
nom est la création d'un autre. On trouve déjà ce genre de
conception dans un ouvrage (Eugnostos le béni III, 3, 72) 198daté
de la deuxième moitié pu premier siècle. Un autre ouvrage
(Ascension d'Isafe 7:37; 8:7; 9:6) rédigé aux environs de 100 de
notre ère affirme que Dieu ne peut être nommé et que le nom de
Jésus n'avait pas été révélé.
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112 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Cette tendance agissait en réaction contre les croyances


polythéistes qui abusaient du principe de dénomination des
divinités. Un second groupe, beaucoup plus restreint, insistait par
contre sur l'importance de l'invocation du nom de Dieu dans le
culte. Dans la pratique, cela déboucha sur une profusion de
nouveaux noms mystiques comme: Yaoth, qui signifie en hébreu
"y ah [est] signe/ lettre/ miracle"; Yaldabaoth (Elle engendra en
signe); Yaô (Yah, lui-même), etc.
Dans son ouvrage contre les hérésies, Irénée dénonça du
reste une telle multiplication de noms, car cela constituait en fait un
retour au polythéisme. Il précisa aussi dans son livre que parmi la
liste des hérétiques, Marcion (85-160) fut le premier (vers 140) qui
ait eu l'audace de mutiler tes Ecritures (Contre les hérésies l, 27:2-
4). Concernant cet apostat, Tertullien rapporta qu'une des
modifications touchait la prière du Notre Père dont la phrase "Que
ton Nom soit sanctifié" devenait dans les copies marcionites "Que
ton esprit soit sanctifié".

[Des études récentes ont montré que les premiers chrétiens


(avant 70) étaient principalement des judéo-chrétiens; c'est-à-dire
des juifs devenus chrétiens qui voyaient surtout en Jésus le Messie
(Christos en grec). Par la suite, entre 70 et 135, ce petit groupe de
chrétiens va être rapidement submergé par la masse des pagano-
chrétiens, c'est-à-dire des païens devenus chrétiens, or ces derniers
voyaient plutôt en Jésus un nouveau Seigneur (Kurios en grec).
Paradoxalement, les judéo-chrétiens seront considérés à la fois par
les juifs et par les "chrétiens" comme des hérétiques (les juifs les
qualifiaient de secte du Nazaréen en Actes 24:5, et les "chrétiens"
les traitaient de partisans de la circoncision en Actes 15: 1-5), ce qui
entraînera leur rejet (qui sera complet après 135) par les deux
communautés.]199
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113

2.7 De Justin à Jérôme [150-400]


Très tôt, une nouvelle interprétation va émerger, qui
réconciliera les deux grandes tendances du gnosticisme concernant
le nom de Dieu. Il est écrit par exemple dans les Évangiles:
«Quiconque invoquera le nom de YHWH sera sauvé.» (Ac 2:21;
Rm 9:17; 10:13) Ce nom était lu "Seigneur" à cette époque. Or,
Jésus était lui aussi appelé "Seigneur", et comme il était venu sauver,
conformément à son nom, on ne tarda pas à faire une identification
entre le nom de YHWH et le personnage de Jésus qualifié de
Seigneur. Comme on le sait, avec le temps, dans la chrétienté,
l'étape suivante sera l'identification complète du "Seigneur"
(YHWH) avec "le Seigneur" (Jésus).
Cet enseignement est clairement explicité dans un ouvrage
daté autour de 140-180 et appelé L'évangile de vérité,2f.XJoù on
peut lire: «Le nom du Père est le Fils (...) Il lui a donné son nom
qui lui appartient (...) car vraiment le nom du Père n'est pas
énoncé, mais il est apparent à travers un Fils.» Cette innovation
deviendra rapidement officielle. Justin affirme par exemple dans
son Dialogue avec Tryphon, ouvrage rédigé vers 150, que dans le
livre de l'Exode Moïse révéla un mystère qui était celui-ci: «Le
nom de Dieu c'est Jésus.»201 Pour justifier cette révélation, Justin
affirmait, aux chapitres 58 et 75 de son livre, l'avoir reçue
directement de Dieu lui-même! On constate aussi que, dans son
Contre les hérésies2fJ2écrit vers 180-200, Irénée de Lyon adhérait à
cet enseignement.

2.7.1 Généralisation des abréviations

On peut comprendre que, dans un tel contexte, la


généralisation des nomina sacra, c'est-à-dire la sacralisation des
noms, a dû être totale. En effet, même s'ils restaient quelques
étranges noms ~ , ~ dans le texte biblique, noms qui furent très
~

souvent écrits il I il I, ils étaient de toute façon prononcés Seigneur


(Kurios en grec). Ainsi (après 70), les copistes chrétiens ont inventé
et généralisé cette procédure des nomina sacra203, qui consistait à
écrire les noms sacrés en abrégés et surlignés. Par exemple, le mot
grec KYRIOC fut seulement écrit KC, KYRIE fut écrit KE,
IESOYC fut écrit IC, etc. Cette façon de remplacer un nom sacré
par une abréviation a sans doute été inspirée par la coutume juive
de remplacer le nom sacré YhwH par son substitut YH204.
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114 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

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Comme on peut le voir dans ce codex du 6e siècle205, les


mots KC, etc., ont pris la place du nom divin. Cependant, à chaque
fois le copiste a indiqué dans la marge la présence du Tétragramme
(en fait ITI IT I); de plus, dans une note marginale sur Ézékiel 1:2
et Il: I, le nom Iaô (lam) apparaît. Plusieurs copies hexaplériques
(Q, 86, 88, 234mg, 264) furent écrites de cette façon206. La
procédure des nomina sacra fut utilisée systématiquement dans
tous les manuscrits chrétiens (après 135), comme on ~eut le vérifier
dans les papyrus: P90 et Egerton 2 (écrits vers 150) 7, P46 et P66
(écrits vers 2(0), dans le Sinaïticus du 3e siècle, etc. Avec le temps,
lorsque le grec sera supplanté par le latin, les noms sacrés seront
remplacés par leurs équivalents latins. Par exemple, les abréviations
KC seront remplacées par le terme Dominus (Seigneur en latin).
Comme on l'a vu, les copistes grecs avaient parfois hésité entre
"Seigneur" et "Dieu" (Kurios et Théos en grec) pour traduire les
tétragrammes. Les copistes latins perpétueront cette confusion
entre les deux termes (Dominus et Deus en latin).
Cette confusion n'a pas eu lieu dans le monde juif, car
l'écriture du Tétragramme fut maintenue dans la Bible. Cependant,
à part cette notable exception, dans les autres écrits religieux
comme les Targums, la Mishna, le Talmud, etc., le Tétragramme fut
aussi remplacé par des substituts. En fait, un substitut particulier
joua avec le temps un rôle prépondérant et finit même par
s'imposer: il s'agit de l'abréviation YY (,,).
Son histoire est assez ancienne, car très tôt la lettre Y était
devenue une abréviation du nom YHWH. On peut déjà noter par
exemple que le nom Abdy (2 Ch 29: 12) signifie "serviteur de Y.",
et que Yéhou (I Ch 2:38) signifie "Yé. c'est lui", etc. Certaines
erreurs dans la Septante peuvent s'expliquer par la présence de
cette abréviation208, c'est-à-dire ce simple Y pour le Tétragramme.
Comme on l'a vu, vers le 2e siècle avant notre ère, lorsque les Juifs
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2.7 - DE JUSTIN À JÉRÔME [150-400J 115

changèrent leur système de numérotation, ils évitèrent d'utiliser les


symboles YH et YW pour les nombres 15 et 16, car en langue
araméenne, on pouvait vocaliser ces symboles en YaH et YaW, les
deux substituts du Nom. Si l'utilisation profane du premier (YH)
était tolérée, ce n'était pas le cas pour le deuxième (YW). Or,
comme on peut le constater dans les écrits de Qumrân, les lettres
hébraïques Y (~) et W (i) se confondent aisément, ce qui engendra
bien sûr quelques erreurs de lecture. Ainsi, en confondant le nom
YW (~~)avec YY C'~),on s'affranchissait de l'interdiction. Avec le
temps, YY (It~) fut aussi écrit YYY (1tIttt)209et même
occasionnellement YYYY! Par exemple, on trouve ce nom YY (~~)
écrit en paléo-hébreu (~) dans un papyrus de la Bible daté du 3e
siècle210.
S'agissant de la prononciation du Nom, les Juifs utilisaient,
dans la liturgie, le mot à lire bien connu Adonay; cependant, dans
la vie quotidienne le Tétragramme était désigné par l'expression
"Le Nom", comme en Lévitique 24: Il, c'est-à-dire soit Hashém
(~) en hébreu, soit le plus souvent Shema' (~) en araméen. II.
est d'ailleurs intéressant de noter que les Samaritains ont conservé
jusqu'à aujourd'hui ce ~eré araméen (Shema) pour lire le
Tétragramme dans la Bible 11.Comme on l'a vu, le nom YaW (soit
Iaô en grec) était considéré en milieu araméen comme un
équivalent du Nom.
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116 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

En milieu hébraïque on retrouve son homologue Yahou,


qui joua de même un grand rôle dans la mystique juive. Par
exemple, il est appelé le grand nom à côté de YHWH dans Le livre
de la/ormation (Sepher Yetsira I ~13)212,ouvrage rédigé vers le 3e
siècle de notre ère. Comme on peut le vérifier dans l'échantillon ci-
dessus, de nombreuses amulettes213 de cette époque rédigées en
grec contiennent le nom laô, parfois écrit à l'envers.
Comme on peut le voir, le nom le plus fréquent est de loin
le nom laô214, même si quelquefois on trouve aussi les autres noms
la, Sabaot/ Sabao, Adonai, laot, etc. Ainsi, il y a une bonne
correspondance entre le nom grec laô et son homologue hébreu
Yhw (Yahou), de même entre les noms la et Yh (Yah), Sabaôt et
Sb'wt (Sebaot), Adonai et 'dwny. Pour confirmer cette
équivalence, on peut examiner des amulettes juives215 datées de la
même époque (150-400).

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Même si le nom léôa (lEma) est rare, on le retrouve malgré
tout dans quelques papyri de cette épo~ue216. On peut lire par
exemple dans L'évangile des Égyptiens2 la phrase suivante: «â
glorieux nom, réellement véridique, ô éon existant, Iéèouôa (plus
exactement en grec: LLLLEEEEllllll1l00oouuuummmmaaaa),son nom
irrévélable est inscrit sur la tablette (...) le Père de la lumière de tout
(...) lui dont le nom est un symbole invisible. Un mystère invisible
et caché devint Iéouèao (chaque voyelle est répétée 22 fois).» Ces
vocalisations sont intéressantes, car elles sont antérieures à la
ponctuation du texte hébreu, et elles prouvent que la vocalisation
laô n'était pas complètement universelle. D'ailleurs, Eusèbe (265-
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2.7 - DE JUSTIN À JÉRÔME [150-400J 117

340), un écrivain grec bon connaisseur de la Bible, a écrit dans sa


Préparation évangélique XI,6,36-37: «Le nom (de Dieu) qu'il n'est
permis à personne de prononcer a quatre lettres en hébreu et sept
voyelles (Iéèouôa?) en grec.»218

Malheureusement, cette connaissance, qui fut conservée un


certain temps dans quelques cercles magiques, devint rapidement
incompréhensible à cause de l'amalgame toujours plus grand qui se
produisait avec d'autres "savoirs" ésotériques. De plus, l'hébreu
biblique avait été remplacé par l'hébreu rabbinique, qui fut à son
tour submergé par l'araméen, puis par la langue arabe, ce qui
obscurcissait les anciennes vocalisations. L'aristocratie juive préféra,
elle, utiliser la langue grecque219.
Vers le 4e siècle, le grec lui-même fut supplanté par le latin.
Ainsi, Jérôme commença, sur la demande du pape Damase, vers
382, une nouvelle traduction de la Bible dans cette langue. Cette
nouvelle traduction, La Vulgate, allait remplacer une traduction
antérieure, rédigée vers le 2e siècle: La vieille latine (Vetus latina).
Jérôme, traducteur réputé, précisa ~ans un commentaire sur
Psaume 8:2: «Le nom du Seigneur en hébreu 'a quatre lettres, Yod,
He, W aw, He, qui est le nom propre de Dieu, que certaines
personnes, à cause de leur ~g!10rance, écrivent en Grec n I n I et
qu'on peut prononcer YahoZlU.»
Ces remarques de Jérôme confirment qu'à cette époque la
disparition du nom de Dieu était en "bonne voie". D'ailleurs,
Jérôme écrivit dans son prologue des livres de Samuel et des Rois
(Prologus Galeatus): «Nous trouvons le nom de Dieu, le
Tétragramme, dans certains rouleaux grecs, même jusqu'à ce jour,
exprimé en lettres anciennes.»
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-. ,
j-,:.";Io,O'~.( .
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Psaume 69:30,3]
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118 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

On peut effectivement supposer que la disparition du


paléo-hébreu fut très rapide, car le style fantaisiste utilisé pour
écrire le Tétragramme dans cette copie221 de la version de
Symmaque, datée d'environ 300, confirme que les copistes avaient
alors une incompréhension totale de la lecture du nom divin.
Comme on peut le concevoir, ces changements auront aussi
des conséquences sur les LXX d'origine juive dans lesquelles il y
avait le nom de Dieu en hébreu i1 i i1 '. Les copistes chrétiens, en
recopiant ces exemplaires, vont d'abord transformer ces noms en TI
I TI I, puis les remplacer par l'abréviation grecque KC. Il y a eu
aussi le cas où le copiste a lu réellement le. mot TII TI I en grec, soit
Pipi. Par exemple, l'évêque Paul de Tella, lorsqu'il traduisit la
Septante en S~aque, vers 616, utilisa le nom étrange Pypy, pour
désigner Dieu. De même, dans un commentaire que l'on attribue
à Évagre le Pontique (345-399), on lit la remarque suivante: «Le
Tétragramme, qui est ineffable, est écrit en hébreu loth, e, ouau, e,
c'est-à-dire le Dieu JtLJtL!223»En plus, il donna une information
assez étrange, en ajoutant que le nom du Seigneur était ioth, e,
ouab, eth, avec la lettre hébraïque s (appelé shîn) au milieu. Que
voulait-il dire exactement, puisque le nom de Jésus en hébreu est
Jehoshoua' (.t>Wiri') et non Jehoshouah (n1\Drt')?À moins qu'il ait
voulu simplement commenter la prononciation hébraïque de ce
nom224, que l'on trouve d'ailleurs dans la version d'Aquila (Dt
1:38), c'est-à-dire lésoua (Illooua). Cela supposerait une
prononciation Iéoua pour le Tétragramme.

2.7.2 Le Tétragramme se prononçait-il Yaho?

Au sujet de la prononciation, il est intéressant de noter que


l'écrivain Eusèbe cita un écrivain phénicien de haute antiquité
(estimé avant -1200?), appelé Sanchuniathon, qui parla exactement
au sujet des Juifs, dans le chapitre quatre de son Histoire
Phénicienne. Cet ouvrage fut traduit en grec, au début de notre ère,
par Philon de Byblos. L'écrivain phénicien affirmait tenir ses
informations de léroubal (Jg 7: 1?), le prêtre de léüô (I£um)225.
Cette dernière vocalisation pourrait bien être un vestige de la
prononciation du Tétragramme, car beaucoup de noms hébreux
ont perdu leur a final dans les transcriptions grecques, comme
Noah qui est devenu Noé, Yéshoua' qui est devenu Ièsous, etc. De
même, le nom hébreu Yehouah pourrait être devenu Iéüô en grec.
Ce témoignage, considéré par Eusèbe comme valable (sans qu'il
fasse de lien avec le nom divin, car la prononciation admise à son
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2.7 - DE JUSTIN À JÉRÔME [150-400J 119

époque était Iaô comme le prouvent ses remarques dans son livre
Démonstration évangélique), est intéressant par son antiquité.
~ De nombreux linguistes postulent que même si ce nom se
prononçait Yehouah au premier siècle il proviendrait en fait d'un
"archaïque" Yahowah ou Yahwoh avec une chute classique (à cause
de l'accent tonique) de la voyelle initiale, c'est-à-dire que la
première syllabe Ya- est devenue Ye-. Or, si cette évolution est
attestée pour de nombreux noms (quoique l'influence de la langue
araméenne sur l'hébreu puisse aussi expliquer cette modification),
il n'y a aucune trace de ce phénomène pour le nom divin. Par
exemple, les noms modernes Zekaryah, Nethanyah, Sedôm, etc.,
devaient se prononcer dans les "temps anciens" Zakaryah,
Nathanyah, Sadouma, etc., car la Septante a conservé les formes
anciennes avec leur voyelle initiale (Zakaria, Nathania" Sodoma,
etc.). Elle a ainsi gardé de nombreuses traces de ce processus qui
s'est déroulé au 3e siècle avant notre ère226.
I~ Si, selon l'hypothèse des linguistes précités, les noms
théophores se prononçaient encore Yaho- (en hébreu) au début du
I3e siècle avant notre ère, les traducteurs de la LXX auraient dû
conserver ces noms en laô-. Or, parmi les milliers de noms
théophores dans la Bible grecque (ou hébraïque), il n'yen a aucun
qui soit resté en laô- ou même en la- seulement. De plus, la seule
exception proposée est le nom d'origine araméenne Jason (Ia-sôn;
Ac 17:7), l'équivalent probable du nom hébreu Jésus (Yé-shoua).
Les lois linguistiques ne permettent donc pas d'expliquer pourquoi
la Septante n'a gardé aucune trace de ce terme laô- qui aurait
.
pourtant dû être très répandu si le Nom avait été Yahwoh.
Une deuxième explication est alors proposée: il y a eu une
transformation du nom laô pour des raisons théologiques
(protection du nom de Dieu). Cette deuxième affirmation, qui
repose sur un fait bien admis, est elle aussi réfutable. En effet, si le
Tétragramme se prononçait Yahwoh (la forme Yahowah est
aberrante, car elle signifie en hébreu "Yah [est] howah", c'e~t-à-dire
calamité), le nom complet (ce qui est déjà surprenant) aurait été
intégré au début des noms théophores, et tous ces noms en Yaho-
f seraient devenus lô- (forme constatée dans la LXX à quelq_ues rares
exceptions près comme lé-zikar, lé-zébouth [2 R 12:21]; Iè-soué
i
[1 Ch 7:27]; -iarib [1 Ch 24:7]). Cette transformation est illogique,
~

car lorsque les finales en -yahou furent modifiées, on constate que


le choix retenu fut partagé entre -ia et -iou; or la transformation de
Iaô- en lô- aurait été unanime (ce qui est déjà difficile à croire, car
même lorsque les copistes chrétiens ont échangé le nom divin par
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120 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

le titre "Seigneur" certains ont préféré le titre "Dieu ") et en


désaccord avec le choix précédent en -ia pour la finale des noms
théophores (ce choix théologique en ia- était le plus logique car il
conservait la forme courte (Yah) du nom divin). ~
L'explication la plus raisonnable est donc de considérer que
le terme lô- grec provient simplement d'un Y(eh)o- hébreu.
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121

2.8 De Jérôme aux Massorètes [400-900]


Le processus qui a conduit à ne plus prononcer le
Tétragramme va induire de nouvelles conceptions. Dans le monde
chrétien, comme le "démontra" l'écrivain Denys l'Aréopagite dans
son livre intitulé Les noms divins, rédigé vers 540, «il est impossible
pour l'homme de nommer Dieu». Dans le monde juif, la
prononciation était devenue tellement incertaine que beaucoup
commencèrent à croire qu'elle serait de nouveau dévoilée dans
l'époque messianique du monde à venir. Par contre, d'autres Juifs
imaginèrent que cette prononciation devenue secrète, seuls ceux
qui la connaissaient encore pouvaient jouir de son pouvoir
protecteur (Pessikta Rabbati ch.22 foI.114b). Avec le temps, ce
genre de croyances débouchera sur un ésotérisme biblique et sur
des spéculations cabalistiques autour du nom divin.
En consultant les ouvrages de cette époque (5e-6e siècle)
on s'aperçoit que, malgré tout, il existait encore quelques îlots de
résistance. Par exemple, le nom laô (Ia<o) est encore mentionné
dans quelques copies de la Septante227 à propos de noms
théophores, et des écrits chrétiens apocryphes228 qui l'appliquent à
Jésus (Livre de la Résurrection de Barthélemy 6: 1). Certains
auteurs, comme Sévère d'Antioche (465-538), utilisèrent la forme
lôa (loo(x)229dans une chaîne de commentaires sur le chapitre huit
de l'Évangile de Jean, en précisant que c'était le nom hébreu de
Dieu. Un autre écrit (Éloge de Jean-Baptiste 129:30) fait aussi
allusion au nom lôa écrit iota, oméga, alpha.
En commentant un ouvrage de Sévère d'Antioche, le grand
savant Jacques d'Edesse (633-708) précisa vers 675 dans une
scolie, que les copistes de la Septante (à son époque) étaient
partagés entre deux attitudes pour écrire le nom divin Adonay, soit
le garder dans le texte grec sous la forme n I n I (correspondanten
fait au nom hébreu YHYH comme il l'indiquait en remarque), soit
le traduire par Kurios et l'écrire en marge du manuscrit230.
Ces citations sont cependant l'exception, car la grande
majorité penchait pour l'ineffabilité du nom de Dieu. Isidore de
Séville par exemple (560-636), connaissait les dix noms de Dieu
(El, Eloim, Eloé, Sabaoth, Elion, Eie, Adonai, la, Tétragramme,
Saddai)231 grâce à la lettre numéro 25 de Jérôme, mais il pensait
que le Tétragramme ineffable provenait du nom double laIa. De
même, Alcuin (735-804), un traducteur célèbre de la Bible en latin
(Albinus Flaccus Alcuini), précisait que si le nom de Dieu était écrit
JOOHe Vau Heth, il se lisait cependant Domini (Seigneur en latin),
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122 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

car ce nom était ineffable232. Toutes ces remarques proviennent'


d'érudits qui avaient quelques notion~ d'hébreu, mais elles ne
traduisent pas la croyance générale des lecteurs de la Bible, qui
ignoraient, dans leur immense majorité, que Dieu avait un nom.
Si le Nom avait disparu de la Bible, à l'exception du texte
hébraïque, on pouvait encore en soupçonner la présence grâce aux
noms théophores hébraïques, mais la prononciation de l'hébreu lui-
même devenait multiple dans le monde juif et donc incohérente.
~ Probablement sous l'influence des techniques arabes
d'écriture, un groupe de Juifs pieux, nommés Massorètes,
décidèrent, à partir du 6e siècle, de ponctuer le texte hébreu pour
en sauve~der la prononciation authentique ainsi que la
cantilation . Au début, seuls les mots douteux furent pointés,
c'est-à-dire que l'on indiquait par un groupe de points quelle était
la voyelle à prononcer; puis finalement, vers le ge siècle, tout le
texte fut à la fois pointé pour en indiquer les voyelles, et ponctué
pour indiquer la tonalité du chant234. Ce processus s'est déroulé par
étapes, en une succession d'améliorations: tout d'abord le système
palestinien, puis le système babylonien et enfin le système tibérien,
qui l'emporta sur les deux autres235. Le but principal des
Massorètes était de préserver l'écriture et la prononciation du texte
biblique. Ils essayèrent de se rapprocher d'un archétype fiable en
se référant à des manuscrits dignes de confiance en ce qui
concerne l'écriture; et quant à la prononciation, ils se fièrent à la
mémoire de certains lecteurs, mémoire qui était prodigieuse236. Le
résultat final de ces travaux force aujourd'hui l'admiration, car
malgré la somme impressionnante de connaissances accumulées
depuis, on n'a pas réussi à faire mieux. On a seulement réussi à
élucider quelques-unes de leurs "erreurs".
En effet, les Massorètes ont noté scrupuleusement toutes les
variations qu'ils observaient dans le texte. Ainsi, 90 % de leurs
remarques concernent les "mères de lecture" (matres lectionis)237,
ce qui prouve qu'ils ne comprenaient plus le rôle exact de ces
lettres. Cela s'explique par plusieurs raisons. Premièrement, leur
langue naturelle était l'araméen et non l'hébreu, comme le prouve
le fait qu'ils ont rédigé toutes leurs notes marginales (la Massora)
dans cette langue. Deuxièmement, ils furent fortement influencés
par les règles de grammaire d'une langue sœur: l'arabe.
Troisièmement, ils ignoraient qu'avant notre ère le texte biblique
avait été partiellement vocalisé par ces matres lectionis, faute de
quoi toute lecture aurait été impossible. Ignorant ce fait, les
Massorètes vocalisèrent le texte biblique une nouvelle fois.
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2.8 - DE JÉRÔME AUX MASSORÈTES [400-900J 123

2.8.1 Les Massorètes vocalisent le Tétragramme

Comme on peut le voir dans le tableau ci-dessous, la Bible


hébraïque possède deux systèmes de vocalisation qui se
chevauchent. Un système de matres lectionis, le plus ancien, et le
système des points-voyelles inventé par les Massorètes. On peut
ainsi noter que souvent les deux systèmes se superposent.

V ocalisation par matres lectionis


.,
r1* , *(en fin de mot)
Vocalisation par points -voyelles
X X X X X X X
T ..
X X X X
.. T:
Vocalisation mixte
., ., .,
. r1* ,T ; 1
. ~,
T

1 e e a ce 0 OU e (ou rien)

~ Malgré la rigueur du système massorétique, le système


mixte reste ambigu, car il est difficile de savoir si ces consonnes
particulières servent de voyelles (matres lectionis) ou restent de
vraies consonnes. Par exemple, le mot 'WN (Ji.;.';Ps 51 :7), que l'on
pourrait lire 'aON, doit en fait être lu 'a WoN (Ji1.v;Ps 59:5). De
même, le mot connu YSR'L (~~1~~) doit être lu dans le système
mixte YiSRa'éL et non ISRa'éL. Certes, ces variations sont faibles,
et il n'est pas capital de savoir si on doit lire, par exemple,
PouWWaH (Gn 46:13), PouWaH (Nb 26:23) ou POU'aH (Jg 10:1),
ou encore choisir entre PIHOU et PIW (Ex 4: 15), etc. Cependant,
ces ambiguïtés de lecture concernent souvent les noms théophores,
I
car le choix de lecture Yi-, 1- ou Ye- n'est pas toujours évident238.~
Eu égard au mode de fonctionnement de ce système, la
remarque du Talmud interdisant de prononcer le Tétragramme
selon ses lettres, ne pouvait plus être comprise. De plus, les
Massorètes lisaient le Nom par son substitut habituel: Adonay.
Toutefois, ils ont rencontré une difficulté inattendue lorsqu'il a
fallu pointer ce mot. Au début, comme ce qeré était bien connu,
seul le Tétragramme dans l'expression Adonay YHWH fut pointé
avec les voyelles du mot Èlohim, pour éviter au lecteur la répétition
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124 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Adonay Adonay. Ainsi, l'expression 'aDoNaY YèHoWiH était lue


'aDoNaY 'èLoHIM, et non, bien sûr, Adonay Yèhowih. Cependant,
pour éviter de laisser croire que ces voyelles auraient pu être les
voyelles du Nom, les Massorètes ont finalement pointé tous les
tétragrammes.
Puisque les voyelles de 'aDoNaY (,~~) sont a, 0, a, on
aurait dû avoir le Nom pointé YaHoWaH (jj~H~);or on ne rencontre
jamais cette forme. Des ouvrages pourtant sérieux invoquent une
raison grammaticale pour justifier le changement de la première
voyelle a en e. Cette explication est triplement absurde239:
Premièrement, elle est déjà fausse dans le cas du mot YèHoWiH
(iij~.~),lu Èlohim, car, comme on peut le voir dans de nombreux
codex, la voyelle è de ce mot n'a pas été modifiée en e pour donner
YeHoWiH (jj)h~). Deuxièmement, quand les Massorètes indiquent
qu'un mot à lire (le qeré) est différent du mot écrit (le ketib), c'est
justement pour indiquer que ce mot est différent, et qu'il n'y a pas
de lien entre les deux mots. Troisièmement, avant le 12e siècle, le
Tétragramme n'a pas été pointé e, 0, a, mais seulement e, a, voire
parfois seulement avec un a final, ce qui exclut les raisons
grammaticales, car il devient impossible d'expliquer la disparition
de la voyelle 0 de cette façon.
La raison de cette "anomalie" est pourtant fort simple. Si le
Tétragramme avait été effectivement pointé avec les voyelles du
mot Adonay, c'est-à-dire YaHoWaH, cette forme aurait présenté un
inconvénient rédhibitoire pour la lecture. En effet, si un lecteur, par
inadvertance, lisait les voyelles de ce mot avec ses consonnes, ce qui
était tout à fait possible, ce lecteur commettait un blasphème, car le
mot HoWaH dans la Bible (Is 47: Il; Ez 7:26) signifie calamité, et
donc l'expression YaHoWaH lue littéralement signifie "y aH [est]
calam-". Ainsi, pour éviter ce genre de méprise, les Massorètes ont
sagement choisi un autre qeré. Puisqu'ils désignaient ce nom par
son expression araméenne SHeMa' (~), signifiant simplement
"Le Nom "240, expression que les Samaritains utilisent encore
aujourd'hui pour lire le Nom241, ils ont simplement pointé le
Tétragramme avec les voyelles e, a du mot SHeMa', obtenant la
forme YeHW aH, pour indiquer qu'il fallait lire le Nom par Adonay,
et non par Èlohim.
~ Il est intéressant de noter qu'un homonyme du mot
calamité (HoWaH ïrtt), signifiant "venant à être", a lui aussi été
modifié pour éviter un contre sens blasphémateur. Ainsi,
l'expression YeHoWaH HoWaH en Exode 9:3, signifiant "Yehowah
venant à être", fut modifiée en YeHoWaH HOYaH (i1:iiiii)'~). ~
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2.8 - DE JÉRÔME AUX MASSORÈTES [400-900J 125

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J ..

tJ
Comme on peut le voir dans le Targum de Ruth242 ci-
dessus, le Tétragramme a été pointé YeHW aH dans le texte hébreu,
et YeYa dans le texte araméen. Par la suite, on constate une
évolution des qerés du nom divin. En effet, on observe une
influence mutuelle des deux qerés YeHWaH et YèHoWiH, car
apparaissent aussi les deux autres formes YeHoWaH et YeHWiH.
Après le douzième siècle, il y aura une stabilisation des deux
formes YeHoWaH et YèHoWiH dans les Bibles juives, formes qui
furent retenues par les premières Biblia Hebraica de Rudolf Kittel
(BHK). Par contre, les éditions scientifiques suivantes (BHS)
reviendront aux formes plus anciennes YeHWaH et YeHWiH.
~ Ainsi, la forme actuelle YeHoWaH, que l'on trouve dans les
Bibles juives, est le fruit d'une longue histoire. De plus, ce
processus complexe s'est déroulé à l'insu des protagonistes. On
peut supposer, si Dieu attache vraiment de l'importance à son nom,
que toutes ces coïncidences ne furent pas nécessairement fortuites.
Par le plus grand des paradoxes, le système du qeré/ketib qui était
censé protéger le nom de Dieu l'a ainsi réellement protégé, au
détail près "amusant" qu~ le Nom a été codé par ses propres
voyelles, ce qui est, on en conviendra, le summum du codage. Par
conséquent, dans cette polémique avec ceux qui se gaussent de la
lecture "naïve" Yehowah, les naïfs ne sont peut-être pas ceux qu'on
croit.
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126 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Cette pratique dû qeré/ketib, q~i consiste à prononcer un


mot à la place d'un autre, fut utilisée au départ pour se protéger de
l'idolâtrie. Par exemple, lorsque Dieu demanda en Hoshéa 2:16 de
cesser d'utiliser le titre Baal (c'est-à-dire propriétaire) pour le
désigner, ce fut sans doute pour aider les Israélites à se démarquer
du culte de Baal. Cependant, ceux-ci appliquèrent même ce
commandement sur des noms propres. On constate par exemple
que Eshbaal (1 Ch 8:33) est devenu Ishboshèt (2 S 2:8), et que _

Yeroubbaal (Jg 6:32) est devenu Yeroubbéshet (2 S Il:21). Ainsi,


le mot Baal (propriétaire) a été remplacé par le mot Boshèt (honte).
Ce système avait l'inconvénient grave de modifier le texte biblique;
on inventa donc le système du qeré/ketib, c'est-à-dire de noter les
endroits où le mot écrit Baal serait en fait prononcé Boshèt.
Les Massorètes ont conservé cette vieille tradition en
indiquant à côté du mot écrit les voyelles du mot à lire. Par
exemple, le dieu Molok (Ac 7:43) était seulement écrit MLK dans
la Bible hébraïque, et les Massorètes ont donc ponctué ce mot par
les voyelles 0, è du mot BoSHèT pour indiquer qu'il fallait en fait
lire Boshèt, c'est-à-dire "honte", à la place du mot écrit MLK. On
obtient donc, dans le texte, la forme hybride MoLèK (1 R Il :7)
que la Septante a vocalisée Molok, alors que beaucoup de Bibles
modernes, produites par des traducteurs qui ignoraient ce système
complexe, la transcrivent simplement Molèk, mélangeant de fait les
voyelles 0, è du mot à lire Boshèt avec les consonnes MLK du mot
écrit. Ainsi, ignorer que ce système avait été conçu au départ pour
préserver l'exclusivité du Nom, c'est vraiment pour ainsi dire "la
honte" .
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127

2.9 Des Massorètes à Maimonide [900-1200]


Cette période apparaît particulièrement faste concernant la
renaissance de la Bible en Orient, car de nombreux codex sont
publiés. Le point de départ de ce travail d'édition semble être la
découverte fortuite de très vieux rouleaux, près de Jérich0243, vers
l'an 800. Après cette date apparaissent notamment plusieurs codex
de qualité comme le Codex D62 de Karasu Bazar (847), le Codex
du Caire (895) et le Codex P de St. Petersbourg (916)244.
On peut noter que, parallèlement, apparaît une analyse
grammaticale du texte avec les travaux de Saadia Gaon (892-942),
travaux qui seront poursuivis par de nombreux grammairiens245.
Pendant cette même période, en Occident, la diffusion de la Bible
va elle aussi connaître une accélération très importante, sous
l'impulsion de Charlemagne. Celui-ci demandera en effet de
promouvoir la diffusion du texte biblique dans tout son royaume.
Par une coïncidence surprenante, cela eut lieu aussi vers l'an 800,
et, pour effectuer ce travail, la Vulgate révisée par Alcuin fut
préférée à la Vieille Latine (Vetus Latina). Concernant le nom
divin dans la Bible hébraïque, on notera que les copistes ont
tâtonné assez longtemps avant d'uniformiser les différents qerés.
QERÉ
DATE CODEX ADONAY ÈLOHIM
1008 Leningrad B 19a~4t5
rrJrr~ (e"a) rrJrr~ (e"i )
925 Alepp~41 rrjrr~ (e,o,i)
rrJrr~ (e, ,a)
Pal ati ni248 rr,rr" ("a) rrjD.: (è,o,i)
T
(Gueniza)~49* * rrJrr~ (e, ,i)
rrJrr~ (e, ,a)
1105 Reuchlianus~ rrJrr~ (e, ,a) rrJD.: (è"i)
Petrograd~' ** rr,rr" (,,) rrjD.: (è,o,i)
Urbinati 22~2 rr~.,,, (, ,a) rr)rr" ("i)
T
950 Or .4445 rrJrr~ (e"i)
rrJrr~ (e, ,a)
Paris Hébreu 1
, rrJrr~ (e, ,a) rrjD~ (è,o,i)
Berlin~~ rr,rr" ( , ,a) rr,rr' (,,)
T

** (vocalisation babylonienne partielle)


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128 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

À l'intérieur d'un même codex, ce système complexe de


qerés multiples a engendré de nombreuses erreurs. Par exemple,
dans le codex B 19a, qui est considéré par les spécialistes comme
l'une des meilleures copies, o.n peut trouver sept pointages
-différents du Tétragramme. L'erreur la plus fréquente est la
transformation des voyelles e,a du qeré en e,o,a254, ou encore des
. .255
voye Iles e,l en e,O,l .
QERÉ A DONA Y ÈLOI-llM
usuel n,n" (e, ,a) njn~ (e"i)
T
Gn 3: 14 nin" (e,o,a) nji1.: (è"i ) Gn 15:2, 8
T
Ps 144: 15 n,n" (a, ,a) njn~ (e,o,i) I R 2:26
T -:
nin" (è,o,i) Jg 16:28
La situation est tout à fait identique dans les autres codex.
L'erreur la plus fréquente est la transformation e,a en e,o,a, c'est-à-
dire le passage de la forme YeHWaH en YeHoWaH, forme que l'on
trouve dans le codex Alep (Ez 3: 13; etc.) et dans le codex Or4445
(Ex 16:7; 40:29; etc.). Ces erreurs sont très anciennes, puisqu'on
peut les observer sur des fac-similés de fragments bibliques256 datés
entre 700 et 900.
Ce qui a sans doute facilité ce genre d'erreur, malgré
l'attention scrupuleuse des copistes, c'est la présence d'un signe de
cantilation, le rebia, très difficile à différencier du point
représentant la voyelle o. On observe ainsi du 12e au 15e siècle
une évolution du qeré e,a (conservée par l'actuelle BHS) en e,o,a
(conservée par les premières BHK) qui deviendra le qeré standard
dans les Bibles juives.

2.9.1 Dans le monde chrétien


Cette soudaine renaissance du travail d'édition et de
diffusion de la Bible va être à l'origine d'une réaction en chaîne qui
aboutira finalement à la renaissance du Nom. En effet, pour mieux
comprendre la Bible, la noblesse et le clergé apprécieront de plus
en plus les annotations (ou gloses) sur l'histoire juive et la
philologie hébraïque. Anselme de Laon (1050-1117) systémati sa
l'utilisation de ces gloses bibliques. Avec le temps, cette abondante
accumulation de notes fut compilée par Pierre le Mangeur dans
son ouvrage célèbre intitulé Historia scholastica, qui parut vers
1170. Durant cette période apparaissent également des
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2.9 - DES MASSORÈTES À MAÏMONIDE [900-1200J 129

dictionnaires et des concordances pour permettre l'étude de la


Bible. Malgré sa qualité, cette recherche intellectuelle ne toucha pas
le peuple.
Cependant, un riche marchand lyonnais, Pierre Valdo
(1140-1205?), touché par le message évangélique, décida, entre
1170 et 1180, de prêcher ce message au peuple. Pour cela, il
demanda à deux prêtres de lui traduire la Bible latine en langage
courant, et il se mit aussitôt à prêcher, grâce à des copies
rudimentaires de sa traduction. Ce mouvement eut visiblement une
extension fulgurante, et le clergé organisa les ordres mendiants,
comme les Dominicains ou les Franciscains, dans le but d'étouffer
cette hérésie. Cette contre-attaque nécessitait cependant une
abondante production de Bibles dont le texte fasse l'unanimité; les
universitaires furent mis à contribution.
Pour améliorer l'étude du texte, un universitaire anglais,
Stephen Langton, lors de son passage à l'Université de Paris,
standardisa l'usage des chapitres (en 1203). Cette Bible de
l'Université s'imposa comme une référence. Il est intéressant de
noter qu'à la fin du livre de la Révélation, on trouve un glossaire
des mots hébreux (Aaz apprehendens) et une interprétation des
noms hébreux. Cependant, la traduction de certains noms
théophores commençait à créer des embarras. Par exemple, on note
que le nom Ioel est traduit "Le Seigneur (Dominus en latin) est
Dieu", Adonia "Le Seigneur est seigneur", Elia "Le -Dieu est
Seigneur", etc. Par contre, le mot Alléluia est parfois traduit par
"Louez la". Ce dilemme de traduction entre "Le Seigneur" et "la"
n'était en fait que le sommet de l'iceberg que constituaient les
problèmes de compréhension du texte hébreu.
Dans le but d'améliorer leur compréhension de la langue
hébraïque, des universitaires chrétiens commencèrent un riche
échange, accompagné aussi de sérieux désaccords257, avec des
universitaires juifs. De plus, comme certains Juifs s'étaient convertis
au catholicisme, ils améliorèrent grandement la connaissance de
l'hébreu ainsi que la connaissance des noms divins. Par exemple,
Pierre Alphonse (1062-1110?), appelé Moïse Sephardi avant son
baptême en 1106, fut sans doute le premier à relier la Trinité
ineffable avec le nom ineffable. C'était un bon connaisseur de la
langue hébraïque, car il précisa les nuances de traductions des
noms divins comme Eloha (dieu), Elohai (mes dieux/ mon Dieu),
Elohi (mon dieu), Elohim (dieux/ Dieu), Adon (seigneur), Adoni
(mon seigneur), Adonai (mes seigneurs/ mon Seigneur), etc. Puis il
ajouta que le Tétragramme était secret, écrit seulement avec trois
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130 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

lettres différentes (\ iT,1) en quatre figures ./.",_._~


(iT1jj8t,
iT\ 'iT, iT), c'est-à-dire trois figu'res
géométriques en une seule258.
Pierre de Blois (1135-1204),
écrivain chrétien, compléta ces remarques.
Dans son court exposé contre les Juifs259,
et de nouveau pour prouver la Trinité, il
écrivit que le nom de Dieu était constitué
de quatre figures, c'est-à-dire de 1o, he,
val, he, de: 1o, he, un autre nom de Dieu
(Iah), et enfin de deux autres noms altérés de Dieu: he, vaf (Hou)
et val, he (?). Le Nom commençait ainsi à réapparaître dans le
monde chrétien.

2.9.2 Dans le monde juif

Dans le monde juif aussi, une succession de puissants


bouleversements vont entraîner, paradoxalement, le même
phénomène. Tout d'abord, du lIe au 12e siècle, l'expansion de la
chrétienté avec ses croisades et le déferlement de l'islam vont
générer une énorme pression de l'extérieur. Mais le plus grand
facteur de déstabilisation vint des cercles juifs eux-mêmes. La
philosophie, les croyances gnostiques et mystiques, voire
astrologiques, accroissaient puissamment leur influence sur la
pensée juive. Cette influence provenait principalement de l'ouvrage
rédigé vers le 3e siècle et intitulé le Livre de la formation (Sepher
Yetsirah), qui spéculait sur les noms divins et plus spécialement ~ur
les lettres de ces noms.
Dans le but de combattre ces tendances destructrices et de
consolider le judaïsme, Maïmonide (1138-1204), appelé aussi
Rabbi Moïse ben Maïmon, universitaire juif et talmudiste de grande
réputation, élabora une définition nouvelle et complète du
judaïsme. Le point central de sa réflexion fut le nom de Dieu, le
Tétragramme. Dans son ouvrage intitulé Le guide des égarés260,
rédigé en 1190, il exposa le puissant raisonnement suivant: Tout
d'abord, le dieu des philosophes n'implique aucun culte, sinon une
reconnaissance polie de son existence, car ce Dieu (Èlohim) est
sans nom et il est donc impossible d'établir une quelconque
relation avec un tel type de dieu. Puis il démontra que le
Tétragramme, le nom lu distinctement (Shém hamephorash), était
justement le nom personnel de Dieu, différent de tout autre
qualificatif divin comme Adonay, Shadday, Elohim, etc., car de tels
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2.9 - DES MASSORÈTES À MAiMONIDE [900-1200J 131

qualificatifs ou titres divins (que l'on utilisait parfois [Adonay,


Eloim, Sabaoth, etc.] dans certaines Bibles latines à cette époque261)
ont une étymologie, ce qui n'est pas le cas du Tétragramme.
~ Maïmonide connaissait cependant le redoutable problème
de la prononciation du Nom, car la tradition juive affirmait qu'elle
avait été perdue. Il savait aussi que certains Juifs croyaient à
l'influence quasi magique des lettres ou de la bonne prononciation
des noms divins. Il mit tout d'abord en garde le lecteur contre la
sottise et la perversité d'une telle conception, absolument contraire
à l'essence même de l'enseignement divin. L'aspect remarquable de
son argumentation réside dans le fait qu'il réussit à éviter la
controverse sur un sujet aussi délicat. Il affirma en effet qu'en fait
c'était seulement le culte véritable qui avait été perdu, et non la
prononciation authentique du Tétragramme, car celle-ci était
toujours possible suivant ses lettres. Pour étayer cette idée
fondamentale (le culte véritable a de l'importance et non la
prononciation véritable), il cita Sota 38a pour prouver que le Nom
est l'essence même de Dieu, raison pour laquelle il ne fallait pas le
blasphémer. Il cita ensuite Zekaria pour prouver l'unicité de ce
nom, et un commentaire biblique connu (Sifre Nombres 6:23-27)
pour rappeler que les prêtres étaient dans l'obligation de bénir le
peuple par ce nom uniquement.
Ensuite, pour prouver que la prononciation du Nom ne
posait aucun problème dans le passé, et ne comportait aucun aspect
magique, il cita d'abord Kiddouchin 71a, qui disait que ce nom
était transmis par certains rabbins à leurs fils. De plus, selon Yoma
39b, cette prononciation était largement utilisée avant la prêtrise de
Simon le Juste, ce qui prouve l'inanité des conceptions magiques,
puisque à cette époque si le Nom était utilisé il n'avait aucun aspect
surnaturel, excepté l'aspect spirituel. Maïmonide insistait donc sur
le fait que ce qu'il fallait retrouver c'était la spiritualité liée à ce
Nom, et non la prononciation exacte. Pour bien démontrer cette
notion capitale, comprendre le sens et non le son véhiculé par ce
nom, il cita un exemple pertinent. En effet, en Exode 6:3 le texte
nous indique qu'avant Moïse le Nom n'était pas connu; il s'agit bien
évidemment du sens exact de ce nom, et non de sa prononciation,
car comment quelqu'un de raisonnable peut-il croire qu'une bonne
prononciation aurait pu pousser soudainement les Israélites à
l'action, à moins de supposer une action magique de ce nom, ce qui
est en contradiction avec la suite des événements? Pour conclure sa
démonstration, Maïmonide cita Exode 3: 14 pour montrer que le
nom èhyèh ashèr èhyèh, qu'on peut traduire par "Je serai qui Je
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132 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

serai", est avant tout un enseignement spirituel. Puisque le


Tétragramme n'avait pas d'étymologi~ (scientifique), ce lien au
verbe "être" (haya) exprimait avant tout une "étymologie"
religieuse, c'est-à-dire un enseignement sur Dieu, qui peut se
définir comme "l'Être qui est l'Être" ou "l'Être nécessaire".
Il est intéressant de noter que Judah Hallévi (1075-1141),
autre universitaire juif, donna sensiblement les mêmes arguments
dans son livre Le Kuzari262 publié quelques années auparavant, en
1]40. Il écrivait en effet que la principale différence entre le dieu
d'Abraham et le dieu d'Aristote était le Tétragramme (Le Kuzari
IV:] 6). Il prouva aussi que ce nom était le nom personnel de Dieu
(idem IV: 1) et qu'il signifiait "Il sera avec toi". Pour démontrer là
encore que c'était la signification de ce nom qui était importante et
non sa prononciation, il cita Exode 5:2 où Pharaon demandait à
connaître ce Nom: non pas la prononciation qu'il utilisait, mais
l'autorité de ce Nom (idem IV: 15). Il précisa enfin que les lettres
du Tétragramme ont la propriété remarquable d'être des matres
lectionis, c'est-à-dire des voyelles associées aux autres consonnes,
comme l'esprit est associé au corps et le fait vivre (idem IV:3).
Ces deux érudits donnèrent ainsi des informations
convergentes qui marquèrent un tournant dans l'histoire du Nom.
Cependant, l'expression "prononcé selon ses lettres" que
Maïmonide a rappelée (lettres voyelles comme le précisa Judah
Hallévi) n'est strictement exacte qu'en hébreu. Or, Joachim de Flore
(Gioacchino da Fiore, 1 ]30-]202) donna une translittération
grecque du Tétragramme (I-E-U-E, soit IEUE) dans son ouvrage
intitulé Expositio in Apocalypsim263, qu'il acheva en 1195. Il utilisa
aussi l'expression "Adonay IEUE tetragramaton nomen" dans un
autre livre intitulé Liber Figurarum.264.
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2.9 - DES MASSORÈTES À MAÏMONIDE [900-1200J 133

Comme on peut le voir sur l'illustration, Joachim de Flore


donna aussi les trois autres noms: lE, EV, VE, qu'il associait au
Père, au Fils et à l'Esprit Saint!
La vocalisation du Tétragramme (IEUE) associée au nom
de Jésus (EU) va être rapidement améliorée par le pape Innocent
III (1160-1216) dans un de ses sermons265 écrit aux environs de
1200. En effet, il remarqua que les lettres hébraïques du
Tétragramme loth, Eth, Vau (c'est-à-dire Y, H, W) servaient de
voyelles, et qu'ainsi le nom IESUS avait exactement les mêmes
voyelles I, E et U que le nom divin. Comme Joachim de Flore, il
décomposait le nom divin IEUE en IE-EV-VE, ce qui lui permit de
supposer que le nom lE-SUS contenait le nom de Dieu lE. Il fit
aussi un parallèle entre le nom écrit IEVE mais prononcé Adonai
et le nom écrit IHS mais prononcé JESUS. Le rapprochement de
ces deux noms jouera par la suite un rôle déterminant dans le
processus de revocalisation du Tétragramme.
Dans les années qui suivront, la connaissance de la langue
hébraïque progressera fortement, s'agissant notamment du rôle des
matres lectionis. D'ailleurs, Judah Hallévi précisait déjà dans son
ouvrage que le yod (Y) servait de voyelle I, de même que le waw
(W) servait pour le 0, et que le hé (H) et le alèph (') servaient pour
le A. Selon ces indications rudimentaires, on pouvait déjà lire
approximativement le nom YHWH "selon ses lettres", soit I-H-O-A
[car le H n'est jamais utilisé comme voyelle à l'intérieur des mots;
dans ce cas exceptionnel on préfère utiliser la lettre aleph, comme
dans les mots: Da' g (Ne 13:16), Mela'kim (2 S II: I), etc.].
Par exemple, le nom YH est prononcé selon ses lettres I-A
en hébreu, I-H en latin et I-E en grec. De même, le nom YHWDH
est prononcé selon ses lettres IHÔDA (Yehoudah) en hébreu,
IHÔDE (Jude) en latin et lEUDE (Ioude) en grec.
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135

2.10 De Maimonide à Tyndale [1200-1500]


Cette période connut des hébraïsants de grande qualité~ et
l'un des plus remarquables de ce 13e siècle fut sans doute
Guillaume de La Mare (?-1290)266. (Son nom latin fut très
fluctuant: Wilhermus de Mara, Wilhelmi de Mara, Guillelmi de
Mara, Guillelmus de Lamarra, etc.) Cet écrivain en langue latine.
vécut à Paris où il écrivit son ouvrage clé De hebrœis et grœcis
vocahulis glossarum Bibliœ267, approximativement entre 1260 et
1270, dans lequel il exposait la grammaire et la prononciation de la
langue hébraïque. Une de ses principales innovations, qui
contribua à l'amélioration de J'étude de cette langue, fut
l'établissement d'une équivalence entre l'alphabet latin et l'alphabet
hébreu. Par exemple, le nom hébreu Yéhou s'écrit en hébreu lod,
he, vau, aleph, ce qui donne en latin l'écriture I.h.v.a. De plus, il fit
de nombreuses remarques concernant la prononciation des noms
hébreux. Par exemple, il précisa que le nom Iesus de la Septante
était l'équivalent du nom losue de la Vulgate, mais qu'en fait ce
nom se prononçait lehossua' en hébreu. Il précisa que la lettre vau
pouvait, comme en latin, servir soit de consonne (V), soit de voyelle
(U). Enfin, concernant le "tetragramaton" (sic), il précisa qu'il était
écrit en hébreu lod, he, vau, he, mais qu'il était prononcé Adonay.
De plus, ce nom ineffable était appelé en hébreu Semamphoras.
En parallèle à cette connaissance de la langue, l'ouvrage de
Maïmonide fit très rapidement autorité, aussi bien parmi les
universitaires chrétiens que parmi les érudits juifs. Les
universitaires chrétiens s'y référaient souvent lors de leurs
controverses avec les docteurs juifs. Le cas de Raymond Martin
( 1220-1284) en est un bon exemple.
Ce moine espagnoJ utilisa la forme Yohoua, pour le nom de
Dieu. dans son ouvrage Pugio fidei (Poignard de la foi) ~blié en
1278, comme on peut le voir dans la copie ci-après. Tout
d'abord" il est aisé de vérifier que cet érudit qui connaissait la forme
hébraïque (YeHoWaH) ne l'a pas transcrite "normalement"
Yehouah en latin, mai s Yohoua. Dans son ouvrage, Raymond
Martin explique longuement les raisons de ces choix. Tout d'abord,
il rappela les références talmudiques données par R. Moseh Ben
Maymon dans son Guide des égarés, spécialement celles des
chapitres 60 à 64 de la partie I, qui concerne le Nom. Ainsi, le
Tétragramme, le nom unique de Dieu d'après Zekariah 14:9, était
écrit en hébreu lod He Vau He, et prononcé Adonai. Ce nom était
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136 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

dés~gné par l'expression


l~.
r.:r.i..a:ê
r~tiêf~~('...
'»CUt... \J,JIN;MI fttt' .='~ :"t ~..,tllt
Shemhamephoras, qui signifie
t""""'......
",ac~"".~~"
i ci.. r .J.t, "adh
l'''"'
/w,..,f'\. ,.,..~.,. *fftN14Jtt "le Nom lu distinctement" ou
~. ,... -,\. c;;""I, w "'." ' '"" '"
"le Nom lu selon ses lettres".
,

;, 1#.
"'''''''''1'.1'
,.....~.,.,.--
~...t.."~~~
.,..,..",-~
.~~ ..J..

...""......
.
D'ailleurs, un rabbin du
b~.~.~ ~.~.--,.",~ deuxième siècle, Abba Saul,
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~.).,;JI YI<~ .".. Jt...,.,~~ avait interdit de prononcer ce


lr~ ~ ~f~.I( ~..f.. c."-1. ,.,.," r..,. '.""".".,."..
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tow nom selon ses lettres. Cette
~~. ~ .~,. =- "",
~.:..r
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t..".\. :elll~. remarque amena Raymond

.
T
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,

Martin à déduire que le Nom


,

»- ..1IfI ...,'-
._ '"r' ~ ~ r......
f.a-
;
~ 'JI.t.tt...",...,~ se prononçait donc Y -H-U-A,

~~
,

-
~~~~~- soit Yhoua. (À cette époque, la
#

.'. .."
~=-~I! '''!l'' transcri ption inhabi tuelle Y
... IN'~='" ....
plutôt que I est fréquente
[Elohym pour Elohim, Helye
pour Eli, etc.]. On constate
aussi que le H était très
mouvant [Jesu, Hiesu, Jhesu et
lehsu ]269.)
Raymond Martin ne
prétendait pas à J'exactitude de
cette prononciation, mais
insistait sur la nécessité de
l'utiliser270; il citait pour cela
Isaiah 52:6, qui dit: «C'est
pour cette raison que mon peuple connaîtra mon nom.» (II est
intéressant de noter que pendant cette période s'est produite une
uniformisation du qeré du nom divin. En effet, le qeré e,a [qui
sont en fait les voyelles du mot araméen Shema (Le Nom) mis
pour Adonay] devient e.o.a. Par contre, pour le qeré Èlohim on a
soi te. i. soi t è. 0 . i. )
La plupart des universitaires qui suivront ne se
passionneront guère pour cette question de la prononciation. Par
exemple, Arnauld de Villeneuve (Arnaldi de Villanoua, 1240-
1311), pourtant ancien étudiant de Raymond Martin, se
passionnera bien pour le nom de Dieu, comme on peut le constater
en lisant son ouvrage intitulé A//ocutio super Tetrag rama ton271
publié en 1292, mais ses considérations sur la prononciation du
Nom sont de nature cabalistique. Si au début de son ouvrage
Arnauld de Villeneuve explique, comme Raymond Martin, qu'il
faudrait utiliser le Tétragramme (il cite pour cela de nouveau Isaïe
52:6), il ajoute, en citant Isaïe 29: Il, que l'impossibilité actuelle
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2.10 - DE MAiMONIDE À TYNDALE [1200-1500J 137

pour les Juifs de prononcer ce nom était prophétisée puisqu'il est


écrit dans ce passage: «Lis ceci à haute voix, s'il te plaît, et il lui faut
dire "Je ne peux pas car il est scellé".» Dans la suite de son exposé,
il mélange en permanence le vocalisme et le symbolisme des lettres,
pour effectuer des rapprochements entre le nom de Jésus et le
Tétragramme. Bien qu'il mentionne les équivalences des consonnes
y et V avec leurs voyelles respectives I et U, il n'en tire aucune
conclusion sur la prononciation du Tétragramme mais effectue
plutôt des rapprochements sur la ressemblance de celui-ci, qu'il
écrit IHVH, avec le nom de Jésus, qu'il écrit soit IHS, soit IHESVS.
Il spécule ensuite sur la place de ces lettres I, H, V dans ces noms et
sur leur symbolisme respectif pour prouver la Trinité. Remarque
intéressante, même si sa démonstration est assez alambiquée, il
cautionnera (après Evagre le Pontique et Innocent III) le
rapprochement entre les deux noms IHVH et IHSV.
Peu de temps après, un autre érudit, Porchetus de Salvaticis,
va achever un livre intitulé Victoria Porcheti adversus impios
Hebraeos272 (Victoire de Porchetus sur les Hébreux impies), publié
en 1303. Comme Raymond Martin, il utilisa la forme Yohouah
(Ihouah dans l'édition de 1520), vocalisation qui était en accord
avec les noms théophores de l'ouvrage (exemple: Yohoyaqim pour
Joaqim). On peut noter qu'il n'employa jamais la forme Yehouah.

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f~. ULrru1U\l'it).~..Ut'\'~
,m\{fI1.lnglt'f~1'fAlmo" ..~1. . ' ;ut1'u,ü.
Comme Raymond 'Martin, il va abondamment citer Rabi
Mosse ben Maimon pour justifier ses affirmations sur le Nom. Il
rappela que le Tétragramme, écrit Yod He Vau He, était le nom
unique de Dieu. Il cita quelques versets du livre de Jérémie (Jr
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138 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

23:5, 6; 33: 15, 16) pour faire remarquer que le Messie avait reçu le
nom de Dieu dans son nom, car, d'après ces versets, le nom du
Messie devait signifier "YHWH est notre justice". Il insista sur le fait
qu'on devait utiliser le nom de Dieu pour être béni (Ps 20: 1,7; 79:6,
9; Mi 5:4), et que ce nom ne pouvait avoir disparu, car, d'après la
Bible, seul le nom des méchants pourrira (Pr 10:7). Enfin,
concernant la prononciation, il montra l'absurdité d'accepter d'un
côté de prononcer le nom lah dans l'expression Halleluiah, et de
refuser d'un autre côté de prononcer YHWH, car YH et YHWH sont
considérés, chacun séparément, comme le nom de Dieu (Ps 68:4;
83: 18); alors pourquoi accepter de prononcer l'un et pas l'autre?
Ces remarques pertinentes étaient réservées au petit cercle
des érudits chrétiens et juifs dans leurs controverses. Cependant,
l'ensemble de la population était dans une ignorance épaisse sur ce
sujet, et, fait aggravant, des théologiens érudits enseignaient à leurs
ouailles qu'il était absurde de nommer Dieu. Par exemple, le
célèbre théologien Thomas Gallus (?-1246), abbé de Verceil,
affirmait dans plusieurs de ses ouvrages sur le nom de Dieu,
comme le De Divinis Nominibus publié en 1242, que l'homme était
dans l'impossibilité de nommer Dieu. On pouvait seulement espérer
qu'avec le temps les arguments puissants des érudits hébraIsants
finiraient par l'emporter, mais è'était sans compter avec deux
puissants facteurs, l'un juif et l'autre chrétien, qui allaient s'opposer
à la diffusion de ces informations sur le Nom.
L'opposition la plus subtile vint des Juifs eux-mêmes. À
cette époque, le nom divin était devenu l'objet d'une vénération
extrême pour certains. Par exemple, Abraham ibn Ezra (1092-
1167) écrivit un livre intitulé le Livre du Nom (Sepher Hashem),
publié en 1155, favorisant une attitude quasiment mystique envers
le Tétragramme. Cette attitude, ainsi que toutes les autres formes
d'ésotérisme, furent à l'origine de l'ouvrage de MaImonide, qui
chercha à introduire un comportement plus rationnel dans le culte
à Dieu.
Contrairement à ce qu'on aurait pu penser, l'argumentation
maImonidienne, au lieu de calmer les conceptions mystiques, va
plutôt, par réaction, les exciter. En effet, scandalisé que, selon
MaImonide, l'invocation du Nom ne puisse avoir qu'un effet
spirituel et non réel, un mouvement apparu en Provence, dans le
Sud de la France, appelé la Cabale, va s'employer à démontrer la
puissance de l'invocation des lettres du Nom.
Par une étrange ironie de l'histoire, le catalyseur essentiel de
ces idées cabalistiques fut R. Abraham Aboulafia (1240-1291), un
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

2.10 - DE MAÏMONIDE À TYNDALE [1200-1500J 139

des premiers commentateurs du Guide des égarés, qui introduisit


par la suite de nouveaux éléments ésotériques, c'est-à-dire très
exactement ce que Maïmonide avait condamné273.

2.10.1 La Cabale

Comment Aboulafia réussit-il ce tour de force incroyable?


Tout d'abord, il reconnut être redevable à Maïmonide pour ces
puissants éclaircissements, et déclara accepter l'ensemble de son
enseignement, à un détail près: la connaissance du Nom. Il écrivit
par exemple: «En effet, je t'informe que la vraie connaissance du
Nom ne peut être apprise ni du Livre de la formation (Sepher
Yetsira) seul., même si tu connais tous les commentaires précités sur
lui, ni également du Guide des égarés seul, même si tu connais tous
les commentaires à son sujet. Mais quand les deux sortes de
connaissances de ces deux livres seront liées ensemble.»274 Il
déclara par la suite: «Dans le Nom, ma raison a trouvé une échelle
qui lui permet de monter vers les degrés des visions. Et la totalité
de l'ensemble de la parole s'accomplit en lui et par l'examen et par
l'expérimentation. Inconnu des philosophes, son nom est la clé de
l'intelligence.»275 Continuant sa quête mystique, Aboulafia, autour
de 1280, "recevra même une révélation de Dieu" qui lui aurait dit:
«Il est Moi et Je suis Lui; il est interdit de divulguer cet énoncé de
manière plus explicite que cela. Mais le secret du nom corporel est
le Messie de Dieu.»276
Ainsi, les cabalistes développèrent une attitude
contradictoire envers le Nom. À première vue, ils semblaient
apprécier le Tétragramme, puisqu'ils appelaient même sa
vocalisation "désir ardent" (Héshèq en hébreu), vocalisation qui
servait à coder les trois voyelles e. o. a du Tétragramme (ces
voyelles sont appelées en hébreu: Holam [0.1, Shewa [e], Qamats
[a), constituant le mot HéShèQ)277. Cependant, il est intéressant de
savoir ce que pensait Aboulafia de cette prononciation triviale
YeHoWaH. Voilà ce qu'il écrit: «Aux fous (à la masse des incultes)
il fut interdit de prononcer ce nom; c'est pourquoi ils ne le
prononcent pas selon son vrai nom (mais suivant des
circonlocutions). Les initiés reçurent la permission de le prononcer,
et grande fut leur joie de connaître les moyens (procédures)
permettant une telle prononciation.» Et il concluait que c'était dans
ce but que Dieu voulait que son nom restât caché, pour que les
initiés cherchent et découvrent que l'authentique prononciation
était en fait, selon Aboulafia, AHUI (aleph, he, waw, yod), car
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140 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

YHWH était le nom caché constitué des consonnes de


l'occultation !278Autour de 1270, un ~utre cabaliste, Jacob ben
Jacob Cohen, développa une idée différente qui aboutit
sensiblement au même résultat. En effet, il affirmait que Dieu avait
en fait 72 noms authentiques.
Ainsi, avec le temps les cabalistes découvrirent sans cesse de .

nouveaux noms, tous plus authentiques et plus cachés les uns que
les autres. Ils arrivèrent à la conclusion surprenante que le Nom
c'est la Torah elle-même (on se souvient que les chrétiens avaient
abouti à la conclusion: le Nom c'est Jésus lui-même). Ces
recherches convergèrent donc vers la conclusion suivante: Dieu a
effectivement un nom propre qui est multiforme, c'est-à-dire qu'il
reflète tous les autres noms saints, et finalement il n'en a aucun en
propre.
Cet aboutissement était exactement ce que Maïmonide et
aussi Judah Hallévi avaient combattu. Le résultat pratique de tous
ces savoirs complexes fut de discréditer, aux yeux des hébraïsants,
les prononciations triviales du Nom, comme Ihua (lu selon ses
lettres) ou mieux Yehowah.

2.1 0.2 L'inquisition

Le deuxième puissant facteur d'opposition à la


connaissance et à la diffusion du Nom vint du monde chrétien. En
effet, pour neutraliser la prédication des Vaudois, le clergé avait
réclamé leur bannissement, et, en 1199, le Pape Innocent III
interdit la prédication aux laïcs. Ensuite fut interdite la traduction
de la Bible en langage courant sans la permission expresse de
l'autorité religieuse. Enfin, les Bibles qui n'avaient pas reçu ces
autorisations devaient être brûlées. La terrible Inquisition allait
commencer, et, ra~idement, il devint même dangereux de posséder
une simple Bible2 9.
On comprend, au vu de ce contexte mouvementé, que le
Nom allait redevenir le domaine de quelques érudits. Par exemple,
un habile talmudiste, Abner de Burgos (1270-1340), nommé
Alfonso de Valladolid après sa conversion au catholicisme autour
de 1330, écrivit un ouvrage intitulé Le Maître de justice (Mostrador
de Justicia)280, dans lequel il utilisa, du moins au début, le nom
yehabe (quelquefois aussi orthographié yahabe, yahaba ou yaba).
Ce Tétragramme vocalisé yehabe (en espagnol le b est prononcé
comme le v) est plus une tentative de traduction du nom ("il fera
être" ou "il constituera" en hébreu) qu'une lecture selon ses lettres.
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2.10 - DE MAÏMONIDE À TYNDALE [1200-1500J 141

IΠPar la suite, en raison des violents conflits religieux, les


échanges entre érudits chrétiens et juifs disparurent. Ainsi, Nicolas
de Lyre (Nicolaus de Lyra, 1270-1349) fut certainement un des
derniers grands hébraïsants chrétiens de cette époque. Dans ses
commentaires sur la Bible (Postillre super totam Bibliam, de 1330 à
1340), ceux sur Exode 3: 14 et Jérémie 23:6 sont intéressants, car il
fait référence à Rachi et à Maïmonide. Il précise même que
l'expression latine "je suis qui je suis" (ego sum qui sum) devrait
être corri gée en "je serai qui je serai" (ero qui ero) si on tenai t
compte de l'hébreu. Concernant la prononciation du Nom, il se
contente de rappeler les informations données par Maïmonide.
Par contre, un talmudiste célèbre, Pablo de Sancta Maria de
Burgos (Paulus Burgensis, 1353-1435), converti au catholicisme
vers 1390, recopia la Bible de Nicolas de Lyre en rajoutant ses
propres commentaires à ceux déjà existants, l'un de ceux-ci
concernant justement la prononciation du Nom. Après les
commentaires sur Exode 3: 14, il indiqua en effet que le
Tétragramme s'écrivait Y.h.b.h (ou peut-être Y.h.v.h), et que ce
nom était très proche du nom de Ihesus, puisque ces deux noms
avaient tous les deux quatre lettres, la première et la troisième lettre
étant identiques (écrites p et v dans le plus vieux manuscrit281,
probablement pour y et v). Il précisa que les consonnes y et v
pouvaient servir de voyelles (i et u), et que les gutturales
hébraïques, c'est-à-dire le h final et le ayn, étaient ignorées dans la
langue latine, ce qui augmentait la similitude de ces deux noms.
Cependant., il ne vocalisa aucun de ces deux noms dans la langue
hébraïque.
Ces remarques de spécialistes embrouillèrent visiblement
certains copistes en langue latine qui ignoraient l'hébreu. En effet.,
on constate de nombreuses variantes dans les copies, car certains
copistes ont écrit le nom de Ihesus sous la forme des quatre lettres
latines lesu, pour le rapprocher du nom Ihvh; mais, dans ce cas, les
remarques précédentes ont dû laisser perplexe le lecteur sur
l'identification de la troisième lettre! (En fait, Pablo de Burgos
précisait simplement que le Tétragramme Y.h.b.h en hébreu [iTijrt]
est proche du nom de Ihesus en hébreu [.t'1rD~], car effectivement ces
deux noms "lus selon leurs lettres" sont assez similaires dans leur
écriture et leur prononciation, c'est-à-dire: I.h.u.a et I.~.u.a', avec
l'équivalence: Y = I, V = 0, H final = ' = A.)
Un théologien érudit, le cardinal Nicolas de Cues (Nicolaus
de Cusa, 1401-1464), se passionna pour ce sujet qu'il commenta à
plusieurs reprises dans ses sermons. Il possédait d'ailleurs dans sa
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142 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

bibliothèque personnelle l'ouvrage d'Arnauld de Villeneuve intitulé


Allocutio super Tetragramaton, et conSacra son premier sermon
(sur Jean 1:1) à expliquer les liens entre le nom de Dieu et le nom
de Jésus. Par exemple, dans ce sermon intitulé Au commencement
était le verbe (ln principio erat verbum), écrit vers 1428, il
expliqua, grâce aux travaux de Rabbi Moyses, les différents noms
de Dieu (Adonaï, Jab, Sabaoth, Schaddai, etc.) et la signification du
Tétragramme, qu'il vocalisait lehoua282. Il commença à développer
dans ce sermon l'idée que Jésus était l'élément dicible (le Verbe) du
Dieu (indicible ou ineffable).
Il expliqua dans un autre sermon283, écrit en 1440, que le
nom de Jésus signifie "sauveur" et se prononce Ihesua en hébreu, et
que ce nom "sauveur" est aussi le Verbe de Dieu. Il précisa que le
nom ineffable est Ihehoua en hébreu. Dans deux autres sermons284,
écrits en 1441, il poursuivra ce rapprochement entre le
Tétragramme grec ineffable, soit lot, He, Vau, He, et le nom
exprimable de Ihesus qu'il écrit souvent Ihûs. Puis dans un
sermon285 écrit en 1445, il exposera en détail les raisons
grammaticales permettant un rapprochement entre ces deux noms.
Le nom de Dieu est le Tétragramme grec qui s'écrit en hébreu loth,
He, Vau, He; or ces quatre lettres servent de voyelles, soit I,E,O,A en
grec, car dans cette langue il n'y a pas de voyelle spécifique pour le
son ou. Ainsi, en grec, la transcription IEOUA serait plus exacte et
refléterait mieux le son ou du nom hébreu leoua, soit en latin
lehova ou Ihehova, car la lettre H est inaudible et la voyelle U sert
aussi de consonne (V). Il nota enfin que la forme hébraïque
IESUA du nom de Jésus ne se distingue du nom divin que par une
sainte lettre "sin" (la lettre shin en hébreu) qui s'interprète donc
comme "l'élocution", c'est-à-dire le Verbe de Dieu et aussi le salut
de Dieu. Il poursuivra encore, dans un autre sermon286, ce parallèle,
entre le nom de Dieu (Ieoua) et le nom de Jésus (Iesoua).
Cependant vers la fin de sa vie il écrira plusieurs ouvrages
importants (De Possest en 1460, De Non Aliud en 1462, etc.), pour
expliquer le caractère purement symbolique du nom de Dieu qui a
tous les noms et donc aucun en particulier. Contrairement à ses
Iivres, ses sermons ne furent quasiment pas diffusés.

2.10.3 L'humanisme

Des lecteurs cultivés ont commencé malgré tout à exploiter


ces informations importantes. Par exemple, Denys le Chartreux
(Denys van Leeuwen, Ie Carthusien de Rickel, 1402-1471), qui était
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2.10 - DE MAiMONIDE À TYNDALE [1200-1500J 143

un ami de Nicolas de Cues, fut aussi un fervent lecteur de "Rabbi


Paulus". Celui-ci écrivit, entre 1452 et 1457 (mais la première
édition de ce livre est sans doute perdue), un commentaire sur le
livre de l'Exode intitulé Enarrationes in Exodum, où il explique
que grâce à Pablo de Burgos il connaissait le nom de Dieu, vocalisé
lehoua dans les versions suivantes287.
Ces auteurs se sont simplement servis du rapprochement de
prononciation entre le nom de Jésus et le Tétragramme. Or, la
prononciation hébraïque du nom de Jésus pouvant être connue
(Iesoua en latin), il devenait facile, en échangeant la lettre s de ce
nom contre un h, de trouver la prononciation lehoua. D'ailleurs,
même un non-hébraïsant pouvait connaitre la prononciation Iesoua
de Jésus; il suffisait pour cela d'avoir accès à la traduction d'Aquila.
Cependant, comme l'orthographe du nom de Jésus était fluctuante
(Iesu, Ihesu, Hiesu), on note que ces variations ont aussi influencé
la vocalisation du Tétragramme. Par exemple, Marsile Ficin
(Marsilio Ficino, 1433-1499) indiquait dans son ouvrage intitulé
Livre de la religion chrétienne (Liber de Christiana Religione),
publié vers 1474, que le nom de Dieu était Hiehouahi et que ce
nom exprimait tous les temps du verbe être288.
~ On observe ainsi vers la fin du 15e siècle, grâce aux travaux
de plusieurs humanistes chrétiens, un regain d'intérêt pour l'hébreu
ainsi que pour le nom de Dieu, retrouvé indirectement par le biais
du nom de Jésus. Cependant, une fois de plus, l'influence de la
Cabale va freiner ces progrès. Jean Reuchlin (Johannes Reuchlin,
1455-1522), un des promoteurs des études hébraïques et grecques
en Europe, se passionna aussi pour la Cabale. Il publia en 1494 un
livre intitulé La parole mirifique (De Verbo Mirifico)289, où il
expliquait à la fois les règles de prononciation des noms de Jésus et
du Tétragramme, mais aussi les liens symboliques entre ces deux
noms grâce à leurs lettres.
Jean Reuchlin expliquait dans son livre que le nom Ihesu
(orthographe certainement favorisée par son homologue grec
IHLOY) était en fait une déformation du nom de Ihosue, et que l'on
pouvait donc améliorer ce nom, car la partie finale avait été
escamotée dans les transcriptions grecques puis latines. Il remarqua
que cette finale avait parfois été préservée dans la Vulgate, car le
nom lesu était aussi orthographié Iesue en Esd 3:2 et en 1 S 6: 14
(on trouve également cette, forme dans la Septante en 1 Ch 7:27).
Puis il souligna que cette transcription grecque IESUE avait
l'avantage de réintroduire les quatre voyelles du nom divin (ce qui
sous-entendait donc que le nom de Dieu devait être lu IEUE), mais,
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144 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

la transcription latine du Tétragramme étant IHVH, il précisa pour


harmoniser ces deux transcriptions que la lettre grecque E
équivalait à la lettre latine H dans la prononciation; donc la forme
grecque IESUE devrait donner la forme latine I"SVH, ce qui
rendait plus probant son lien avec la forme latine du Tétragramme
IUVU. Dans les éditions suivantes, on perfectionna cette
ressemblance en explicitant les formes hébraïques de ces noms
IUSVH (i11tttt~) et IUVH (ii\i'), ce qui produisit un résultat contraire
à l'effet escompté. En effet, les hébraïsants sérieux pouvaient
vérifier que cette forme hébraïque du nom de Jésus n'avait jamais
existé dans la Bible hébraïque; de plus, dans cette langue, Jésus ne
se prononçait pas Iesue mais, comme on l'a vu, Iesoua [même le
nom ISVH (i11W')en Genèse 46: 17 se prononce lesoua dans la
Septante, et non Isue].
On peut noter ces embarras dans les commentaires
bibliques de l'hébraïsant Jacques Lefèvre d'Étaples (1435-1536)
dans sa traduction du livre des Psaumes en français, intitulée
Psaumes quintuples (Quincuplex Psalterium)290 parue en 1509. En
effet, grâce aux remarques de Jean Reuchlin, Jacques Lefèvre
d'Étaples notait qu'il était facile de prononcer le Tétragramme
IHVH comme il est écrit, c'est-à-dire I-he-u-he qui donne la forme
latine Ihevhe. Il observait cependant que la forme hébraïque du
nom de Jésus était Ihesuha (I-he-su-ha), alors qu'on aurait dû avoir
Ihesuhe (I-he-su-he).
Voulant démêler cet écheveau, un des plus brillants érudits
de cette époque, l'humaniste italien Jean Pic de la Mirandole
(Giovanni Pico della Mirandola, 1463-1494), ami et ancien
étudiant de Marsile Ficin, s'attaqua à ce problème dans son livre
intitulé Débat contre les astrologues (Disputianum adversus
astrologos), qui fut publié en 1496. Cependant, après coup, on
constate que grâce à sa vaste connaissance il fit des rapprochements
brillants, mais finalement assez hasardeux. En effet, pour prouver
la supériorité de la Bible il essaya de démontrer que les religions
païennes étaient en fait des plagiats de la religion biblique. Il
affirmait par exemple que le dieu romain Jupiter était en fait une
contrefaçon idolâtrique du Dieu des Hébreux, et que même
l'étymologie de ce nom Jupiter "loué pater" (Père loué) en était
une copie frauduleuse291.
Ce rapprochement, hasardeux car non défendable, résultait
simplement d'une analogie phonétique faite par Jean Pic de la
Mirandole. Cette prononciation pouvait facilement être améliorée
en loua (comme losué pouvait être amélioré en Iosua), et cette
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2.10 - DE MAÏMONIDE À TYNDALE [1200-1500J 145

nouvelle équivalence losua pour le nom de Jésus et loua pour le


nom divin permettait d'harmoniser l'ensemble des données. Ainsi,
le nom loua était inclus dans le nom losua, ce nom "loua pater"
pouvait être déformé en Ju-piter, et enfin loua, qui comporte
quatre voyelles, correspondait à la prononciation "selon ses lettres"
du nom hébreu YHWH (soit IHÛA, le H étant muet). Cette nouvelle
prononciation loua (ou Jova, car en latin la prononciation est la
même) commença à se répandre292; on la trouve dans les versets de
certaines Bibles. Par exemple, Sébastien Casteillon expliqua dans
un livre293publié en 1549 que ce nom IOY A, même s'il avait peut-
être un rapport avec le nom lupiter, devait être utilisé dans la Bible
(ce qu'il fit dans sa traduction française de 1555.)294
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147

2.11 De Tyndale à l' American Std. Version


~ Pour mettre de l'ordre dans les variantes de prononciation
du Tétragramme, Pierre Galatin (Petrus Galatinus, 1460?-1540?)
consacra une bonne partie de son ouvrage intitulé Arcanes de la
vérité universelle (De arcanis catholice ueritatis)295, publié en 1518,
à expliquer les raisons (hébraïques) de cette prononciation. Tout
d'abord, il cita abondamment le livre de Maïmonide Le guide des
égarés, spécialement les chapitres 60 à 64 de la première partie,
pour rappeler que le Tétragramme est le nom propre de Dieu, et
qu'on peut le prononcer selon ses lettres. Cependant, il démontra
que la prononciation loua, admise à son époque, était trop
approximative, et il en donna les raisons. Il expliqua par exemple
que le nom propre luda, écrit iTr\-- (YWDH), était en fait une
abréviation du nom lehuda, écrit ;Ti\!' (YHWDH). Tous les noms
propres hébreux commençant par YHW- [ii1--] sont d'ailleurs
toujours vocalisés Ieh-. En conséquence, si le Tétragramme se
prononçait vraiment loua on l'aurait écrit en Hébreu i1r (YWH), ce
qui n'a jamais été le cas. Ainsi, puisque le Tétragramme est écrit mï--
(YHWH), on doit entendre la lettre H à l'intérieur du Nom. Il
concluait donc que, puisque ce nom se prononçait selon ses lettres,
la meilleure transcription était la forme I-eh-ou-a (Iehoua), plutôt
que la forme I-ou-a (si Pierre Galatin avait transcrit directement la
forme massorétique, il aurait obtenu Yehouah et non lehoua). -
De même, le traducteur Pierre Robert Olivétan (1506?-
1538) reconnut dans son Apologie du translateur (parue en 1.535)
que le nom de Dieu était en hébreu lehouah plutôt que loua, car
cette dernière forme n'exprimait pas les aspirations de la lettre H296.
La forme lehoua est évidemment très proche de la forme
massorétique, mais néanmoins pas tout à fait identique.
Contrairement à ce qu'affirme la totalité des dictionnaires actuels,
cette forme vocalisée ne doit rien à une lecture erronée du
Tétragramme dans la Bible hébraïque. En fait, l'aboutissement de
cette vocalisation du nom divin en lehoua est extrêmement
surprenant, car sa proximité avec la forme massorétique constitue
une coïncidence des plus étranges.
La démonstration de Pierre Galatin fut bien acceptée par les
hébraïsants de l'époque. Ainsi, lorsqu'on réédita (après 1518) les
ouvrages anciens, les différentes vocalisations Yohoua, Ihouah, lôa,
Hiehouahi, etc., furent progressivement remplacées par une seule
considérée comme la plus fiable: lehoua puis, assez vite, lehouah.
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148 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Martin Luther (1483-1546) connaissait l'existence de ce


nom (grâce aux sermons de Nicolas dé Cues) puisque dans un
sermon sur Jérémie 23: 1-8 écrit en 1526 on lit: «Ce nom lehouah,
Seigneur, appartient exclusivement au vrai Dieu.»297 Il écrira en
1543, avec la franchise qui le caractérisait: «Qu'ils [les Juifs]
allèguent maintenant que le nom de Dieu est imprononçable, ils ne
savent pas de quoi ils parlent (...) si on peut l'écrire avec l'encre et
la plume, pourquoi ne pourrait-on pas le prononcer, ce qui serait
autrement mieux? Sinon, pourquoi n'en proscrivent-ils pas
également l'écriture, la lecture et la pensée? Tout bien considéré,
tout ceci est infect.»298 On peut déduire de cette remarque que la
prononciation lehouah du Tétragramme n'était plus contestée.
Ainsi, William Tyndale (1494-1536), dans son ardent désir
de faire connaître la Bible au peuple, choisit d'introduire ce nom
dans sa traduction des cinq premiers livres de la Bible qu'il publiera
en 1530. Il utilisa ce nom lehouah dans plusieurs versets (Gn 15:2;
Ex 6:3; 15:3; 17:16; 23:17; 33:19; 34:23; Dt 3:24) et il précisa
dans une note: «Iehovah est le nom de Dieu (...) en outre, chaque
fois que vous voyez le mot SEIGNEUR en grandes lettres (sauf
erreurs d'impression) c'est lehovah qui apparaît en hébreu.» De
même, le cardinal Giacoma de Vio Cajetan (Tommaso, 1469-1534)
utilisa constamment ce nom dans ses commentaires sur le
Pentateuque édités en 1531. On peut d'ailleurs noter qu'à cette
époque la plupart des traductions anglaises comportent le nom de
Dieu, très souvent en Exode 6:3, à l'exception de la version de
Coverdale (1535). Par exemple, la Bible de Matthew (1537)
explique dans une note sur Exode 6:3: «Iehouah est le nom de
Dieu, et aucune créature n'a reçu un tel nom, qui signifie: celui qui
est par lui-même et qui ne dépend de rien d'autre.» On peut noter
aussi que le nom de Dieu apparaît pour la première fois dans un
dictionnaire299 en 1557.
IIF Cet apparent accord général sur la prononciation sera de
courte durée car plusieurs facteurs vont de nouveau s'opposer
puissamment à sa diffusion. Le premier fut le conformisme. Par
exemple, lorsque Martin Luther publia en 1534 sa traduction
complète de la Bible basée sur les langues originales, il n'utilisa pas
le nom de Dieu, qu'il connaissait bien, comme on l'a vu, mais
préféra utiliser le substitut HERR (Seigneur). Un autre exemple de
cette attitude inconsistante est Jean Calvin (1509-1564). En effet,
dans la plupart de ses livres et de ses sermons, il encouragea
régulièrement ses lecteurs à ne pas utiliser le nom de Dieu!300
Cependant, lorsqu'il publia ses commentaires sur les cinq livres de
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2.11- DE TYNDALE À L'AMERICAN VERSION [1500-1900J 149

Moïse301 à Genève en 1563, il utilisa systématiquement la forme


lehoua, y compris dans le texte biblique, et dénonça, dans un
commentaire sur Exode 6:3, la superstition juive conduisant à
remplacer lehoure par Adonaï. La seconde raison qui brisa cet
accord général fut l'apparition d'une forme rivale, représentant une
tentative de traduction du Tétragramme plutôt qu'une transcription
approchée. William Tyndale avait introduit le nom lehouah dans
quelques versets de sa traduction (en 1530); Sébastien Châteillon
fit de même mais avec le nom loua (en 1555). Par contre, dans sa
deuxième version (en 1537) Pierre Olivétan, hésitant à utiliser le
nom lehouah (à cause de la forme loua qu'il mentionne), remplaça
cel ui -ci par l'essai de traduction: "Éternel", sauf dans quelques
versets (Gn 22: 14; Ex 6:3; etc.)302 où il conserva lehouah. Des
hébraïsants comme François Vatable (?-1547) et Paul Fagius
(1504-1549) utilisant lehouah, Robert Estienne (1503-1559)
choisit d'utiliser systématiquement ce nom (aussi écrit lehoure ou
lehoua)303 lorsqu'il publia en 1556 sa Bible (Psaumes) en latin.

2.11.1 Retour à la question des étymologies

L'origine de ce désaccord, et donc de cette forme rivale,


vint paradoxalement cette fois d'une connaissance accrue des règles
de la grammaire hébraïque. Par exemple, Sanctes Pagnini (1470-
1541), sans doute le meilleur hébraïsant de son temps. (il fut le
premier, après Jérôme, à traduire la Bible en latin directement de
l'hébreu, et il fut aussi le premier à numéroter systématiquement les
chapitres et les versets304), améliora effectivement les noms latins
usuels de Josue en lehosvah, de Jesus en lesua, etc. Certains verront
dans la traduction de ces noms un garant de la prononciation
lehovah. Il expliqua dans son Thesaurus305, paru peu après en
1529, que le mot yhwh, qu'il vocalisait yèhèwèh (i1)n~),provenait
d'un verbe "être" (hawah; iiT1) et que ce mot yhwh signifiait en
araméen "il sera". Par un concours de circonstances incroyable, ces
informations, toujours considérées comme valables de nos jours, à
quelques détails près, furent pourtant à l'origine d'une grande
confusion concernant le Nom.
En effet, avant cette date, on accordait peu de crédit aux
transcriptions grecques en Iaô (lam); tout au plus certains les
associaient-ils à la forme, hébraïque Yahou (~ii~)du nom divin.
Après cette date, la forme laô sera progressivement associée au
Tétragramme pour appuyer la forme "archaïque" Yahwèh (iij~,,)306.
Dans un curieux basculement, la quasi-totalité des théologiens
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150 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

explorèrent cette nouvelle piste sur la vocalisation du Nom (YHWH


= "II sera"), confondant l'étymologie (stientifique) et l'explication
biblique, qui, comme on lia vu, est avant tout un enseignement
religieux. Cependant, Michel Servet (1511-1553) préférait encore
(en 1531) le nom lehouah plus proche du mot "salut" en hébreu.
que sa forme grammaticale supposée (futur piel à l'époque!)307.
Fortement influencés par les remarques de Jean Reuchlin et
de Jean Pic de la Mirandole, les grammairiens de l'époque ont cru
que lehoua était une amélioration du nom Jupiter, déformation de
loua-pater signifiant "Père loua". Angelo Canini308 précisait
cependant, dans sa grammaire écrite en 1554, qu'il préférait lehoua
à loua, car lehoua ressemblait plus aux noms leshoua et lehouda.
La suspicion envers la vocalisation lehoua fut progressive.
Le théologien hébraïsant Gilbert Genebrard (1537-1597) écrivit en
1569, dans son livre sur la Trinité309, que le nom lehoua provenait
d'une évolution du nom païen loue (Jupiter) en loua puis lehoua;
il précisait qu'en hébreu la forme yhwh devait se lire lehué.
Craignant de favoriser un nom d'origine païenne, le traducteur
Benito Arias Montano (1527-1598), qui pensait lui aussi que
lehoua provenait d'une transformation de louis en loua, remplaça
partout ce nom dans sa traduction latine des Psaumes310 (1574) par
lA (forme courte et plus sûre). Le cardinal Robert Bellarmin311
affirmait d'ailleurs (en 1596) que la forme lehoua était erronée, car
elle avait les voyelles e, 0, a, du qeré Adonay (a, 0, a devenant e, 0, a
pour des raisons grammaticales!)
Si tous les biblistes reconnaissent que les étymologies
bibliques sont quelquefois déroutantes (ce qui n'est pas étonnant
puisqu'il s'agit en fait souvent de jeux de mots), rares sont ceux qui
acceptent cette évidence pour le Tétragramme. Pour étayer ce point
capital, il faut savoir qu'une étude des étymologies bibliques
concernant les noms propres a montré que dans la moitié des cas,
ces étymologies avaient un rapport "élastique" avec l'étymologie
"scientifique", et que dans un quart des cas il n'y avait aucun
rapport, mis à part l'assonance des mots312. Pour illustrer ce
problème, prenons des cas où le rapport étymologique est
"élastique" (cas fréquents en pratique).
~ L'étymologie biblique du nom Judah (Yehoudah) par
exemple est donnée en Genèse 29:35, où on peut lire: «Je louerai
Jéhovah. C'est pourquoi elle l'appela du nom de Juda.» Puisque la
phrase "je louerai [Jéhovah]" s'adressait à Juda, on devrait dire en
parlant de lui "il louera [Jéhovah]", ce qui constitue l'étymologie
biblique de son nom. Or, "je louerai" se dit en hébreu 'ôdèh (~
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2.11- DE TYNDALE À L'AMERICAN VERSION [1500-1900} 151

forme future du hiphil, 1re personne du singulier), d'où on a


déduit "il louera", soit en hébreu Yôdèh (iï!i" forme future du
hiphil, 3e personne du singulier) ou Yehôdèh (i1jt1~,Ne Il: 17). On
constate alors que cette étymologie est fausse (scientifiquement),
puisque les formes Yôdèh ou Yehôdèh diffèrent de la vocalisation
massorétique Yehûdah.
Constatant ce léger désaccord, les scientifiques rectifient
cette étymologie. En effet, ils supposent qu'au départ la forme
devait être Yûdèh (i111" forme future du houphal, 3e personne du
singulier), signifiant "il sera loué". Cette correction a deux
inconvénients: Premièrement, la forme verbale supposée (houphal)
du verbe "louer" n'existe pas en hébreu. Ensuite, on modifie le
message biblique qui était "il louera" en "il sera loué", ce qui est
. une douce mais authentique apostasie. ~
L'explication biblique est beaucoup plus subtile. Comme
on l'a remarqué dans l'explication précédente, on a ignoré un mot
important de la définition "il louera [Jéhovah]", mot qui est
justement le Tétragramme. En toute rigueur, on aurait dû traduire
cette expression en hébreu par "Yehôdèh [Iehouah]". Le rédacteur
biblique a ensuite intégré le Tétragramme, par assonance, dans le
mot Yehôdèh; ainsi "Yehôdèh [Iehouah]" devient "Yehûdah."
Autre exemple, l'étymologie biblique du nom de Jésus
(Yéshoua'), donnée en Matthieu 1:21, est: «Tu devras l'appeler du
nom de Jésus, car il sauvera son peuple de ses péchés.»
L'identification est simple; le nom Jésus signifie bibliquement "il
sauvera", soit en hébreu Yôshia' (lrWi"forme future du hiphil, 3e
personne du singulier) ou parfois Yehôshia' (~.,~t1~;1 S 17:47; Ps
116:6). On constate de nouveau que cette étymologie est fausse
"scientifiquement" puisque la forme Yôshia' (ou Yehôshia') ne
colle pas avec la vocalisation massorétique Yéshoua' .
Paradoxalement, les dictionnaires bibliques glissent sur
cette anomalie et traduisent le nom Jésus par "Jéhovah est salut".
En donnant cette définition, ils rectifient implicitement le "Il
sauvera" (Yôshia') en "salut" (Yeshua'h), et admettent tacitement,
en traduisant par "Jéhovah est salut" et non uniquement par "salut"
(Yeshua 'h en hébreu), que ce mot a une forte assonance avec le
Tétragramme. En fait, dans l'étymologie biblique "Il sauvera", Dieu
est effectivement sous-entendu dans le "Il". On peut donc dire que
Jésus signifie bien "[Jéhovah] sauvera", soit en hébreu "[Iehouah]
Yôshia'''; le rédacteur biblique a ensuite intégré le Tétragramme,
par assonance, dans le mot Yôshia' de l'expression "[Iehouah]
Yôshia''', qui devient donc simplement "Yéshoua'''.
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152 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

NOM ÉIYMOLOGIE roINf AGE CHOIX


BIBUQUE MASSORÉfIQUE PHILOLOGIQUE
Judah Yôdèh (iiji~) Yehûdah (i1,n~) Yehûdâ (Ihuda)
Jésus Y ôshia' (lrWi~) Y éshûa' (l!1~:) Y eshûa' (I~u')
Jéhovah (héb. Yihyèh (;'1.~~~) Y ehowah (iTjJ1~)* Yehûâ (Ihua)
"Il sera" (aram. Yihwèh (;'1)~~) Yehû' (~iii~) Yabwab (Yhwh)

* Y ehwah (i'i)i~) avant 1100

Comme on le constate dans ce tableau, la lecture des noms


dans le texte hébreu est plus proche de leur lecture selon leurs
lettres (choix philologique) que selon leur forme reconstruite
"scientifiquement" d'après l'étymologie biblique. La raison de cet
accord est simple. La Bible fixe le sens des noms, non d'après des
voyelles qui peuvent changer avec le temps, mais d'après une
déclaration divine que l'on peut traduire sans ambiguïté dans toutes
les langues. Le nom de Dieu ne fait pas exception à cette règle; dès
le début on pouvait le lire suivant ses lettres, mais le sens
"religieux" (et non "scientifique") fut donné plus tard à Moïse.
Ainsi, il n'est pas nécessaire de mélanger "scientifiquement"
la prononciation philologique Iehouah du Tétragramme, c'est-à-
dire selon ses lettres, avec son étymologie biblique d'Exode 3: 14,
sinon ce mélange va créer une confusion (BaBèL selon la BiBLe).
D'ailleurs, encore aujourd'hui, cette lecture naturelle du
Tétragramme ne pose aucun problème. En effet, même si les Juifs
refusent actuellement de prononcer le nom YHWH, ils prononcent
deux mots voisins sans difficulté~ comme le nom YHWH-NN qui
est lu Yehôha-nan, et N-YHWH (apaisant) qui est lu N-ihôah. dans
n'importe quel dictionnaire. Donc, la prononciation "naturelle" du
Nom- est Yehôah ou Yehouah.
~~ Par contre, la signification du Tétragramme est donnée en ~

~Exode 3: 14. En effet, si Dieu dit, en parlant de lui, "Je serai", soit en
~hébreu 'èhyèh (~~ forme future du qal 1re personne du
!
singulier), quelqu'un parlant de Dieu devrait dire "Il sera", soit en
~
hébreu yihyèh (~:~~,forme future du qal 3e personne du singulier).
La traduction "Il est" plutôt que "II sera" est doublement ambiguë.
IEn effet, en hébreu biblique (mais pas en hébreu moderne), le
Iprésent n'existe pas; deuxièmement, la traduction "I) est" peut être
jcomprise dans le sens "II existe"~ ce qui était absurde pour un
Sémite puisque l'existence de Dieu ne pouvait se contester (Ps
I14:1). De plus, l'expression "Il est" dans le sens de "II existe" (~t) est
!différente en hébreu ancien. Certains érudits rectifient la forme
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2.11- DE TYNDALE À L'AMER/CAN VERSION [1500-1900} 153

biblique "il sera" par une autre forme verbale de leur cru comme "il
fait être", ce qui a deux inconvénients graves. Tout d'abord, cette
forme verbale (hiphil) du verbe "être" n'existe pas en hébreu;
ensuite, il faut rectifier scientifiquement le sens biblique de
l'expression "Je serai" en "Je fais être" ou "je fais devenir". (Certains
érudits reconnaissent que l'hypothétique Yahweh est plus un choix
.théologique que philologique.313) ~

2.11.2 La forme Jéhovah

En dépit de cette controverse lehouah contre lahue,


jusqu'en 1900 la plupart des hébraïsants considéraient la forme
lahue comme douteuse. Par exemple, Baruch Spinoza utilisa la
forme Jehova dans son traité intitulé Tractatus theologico-politicus
publié en 1670, ainsi que dans sa grammaire de l'hébreu
Compendium Grammatices Linguœ Hebrœœ314. Il précisa dans cette
grammaire que les voyelles e, 0, a du nom divin représentaient, à
son avis, les trois temps: le passé, le présent et le futur du verbe être.
Un érudit français, Antoine Favre d'Olivet, démontra dans
son ouvrage La Langue hébraïque restituée, publié en 1823, que la
meilleure prononciation du nom divin selon ses lettres était Ihôahl
lôhahl Jhôah315. D'ailleurs, lorsqu'il commença à traduire la Bible
(Genèse, des chapitres I à X), il utilisa systématiquement le nom
Ihôah dans sa traduction. Antoine Favre d'Olivet, polyglotte réputé,
connaissait de nombreuses langues orientales, ce qui l'a amené à
privilégier le choix philologique (plutôt que théologique), c'est-à-
dire qu'il a refusé de mélanger le son avec le sens du mot.
Paul Drach, rabbin converti au catholicisme, expliqua dans
son ouvrage De l'harmonie entre l'église et la synagogue, publié en
1842, pourquoi il était logique que la prononciation Yehova, qui
était en accord avec le début de tous les noms théophores, soit la
prononciation authentique, contrairement à la forme d'origine
samaritaine Yahvé316. Il démontra le côté farfelu des critiques
contre la forme Yehova, comme l'accusation de lecture erronée
attribuée à Galatin. Il cita Raymond Martin et Porchettus de
Salvaticis pour récuser cette allégation. Puis il démontra le côté
délirant de la transmutation des voyelles a, 0, a du mot Adonay en
e, 0, a, car cette règle de grammaire hypothétique (et contre nature
concernant un qeré/ketib) était déjà battue en brèche avec le mot
Èlohim qui garde ses trois voyelles è, 0, i sans avoir besoin de les
changer en e, 0, i. Malgré le soutien du Vatican à l'époque, ces
démentis eurent peu d'effet.
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154 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Bien qu'ayant de nombreux détracteurs, la prononciation


Jéhovah avait encore au début de rlotre siècle de nombreux
défenseurs. Par exemple, le professeur juif J.H. Levy expliqua
pourquoi il préférait la forme Y'howah, au lieu de Yahweh, dans
son article publié en 1903 dans The Jewish Quarterly RevieW317.De
même, en 1923, le célèbre grammairien catholique Paul Joüon
préférait garder l'ancienne forme Jéhovah plutôt que
l'hypothétique Yahweh318. On peut encore constater que, dans le
dictionnaire encyclopédique de la Bible publié en 1935, le
professeur protestant Alexandre Westphal préférait aussi le nom
Jéhovah à la forme Yahvé, car, selon lui, les explications
grammaticales étaient inférieures aux explications bibliques319.
NOM DE LA VERSION. PUBLIÉE EN: NOM DIVIN UfILISÉ
ANGLAISE (quelquef oi s)
Tyndale 1530 Lorde (Iehouah) .

Rheims-Douay 1582-1610 Lord


King James Version 1611 LORD (Jehovah)
Young 1862-98 Jehovah
English Revised 1881-95 LORD (Jehovah)
Emphasised Bible 1878-1902 Yahweh
American Standard 1901 Jehovah
An American Translation -1923-39 LORD (Yahweh)
Revised Standard 1946-52 LORD
New English Bible 1961-70 LORD (Jehovah)
Today's English Version 1966-76 LORD
Revised Authorised Version 1979-82 LORD
New Jerusalem Bible - 1985 Yahweh
.
ESPAGNOlE.
Reina 1569 lehoua
Valera 1602 Jehovà
Moderna 1893 Jehovà
Nàcar-Colunga 1944 Yavé
Evaristo Martin Nieto 1964 Yavé
Serafin de Ausejo 1965 Yahvéh, Senor
Biblia de Jerusalén 1967 Yahveh
Cantera-Iglesias 1975 Yahveh
Nueva Biblia Espanol 1975 Senor
PORTUGAISE
Almeida 1681,1750 Jehovah
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2.11- DE TYNDALE À L'AMERICAN VERSION [1500-1900J 155

Figueiredo 1778-90 Senhor


Matos Soares 1927-30 Senhor
Pontificio Instituto Biblico 1967 Javé
Jerusalém 1976, 1981 Iahweh
ALLEMANDE
Luther 1522, 1534 HErr
Zwingli (Zürcher) 1531 HERR, HERREN
Elberfelder 1855, 1871 Jehovah
Menge 1926 HErr
Bibel in heutigem Deutsch 1967 Herr
Einheitsübersetzung 1972, 1974 Herr, Jahwe
Revidierte Elberfelder 1975, 1985 HERR, Jahwe
FRANÇAISE
Olivétan 1535, 1537 Eternel (Iehouah)
Estienne R. (Latin) 1556 lehouah
Darby 1859, 1885 Eternel (Jéhovah)
Crampon 1894-1904 Jéhovah
Jérusalem 1948-54 Yahvé
T.O.B. 1971-75 Seigneur
Osty 1973 Yahvé
Segond révisée 1978 Eternel
Français courant 1982 Seigneur
Chouraqui 1986 IhvH
HOLLANDAISE
Statenvertaling 1637 HEERE
Leidse Vertaling 1899-1 912 Jahwe
Petrus-Cani siu sv ertal in g 1929-39 Jahweh
NBG- Vertaling 1939-51 HERE
Willibrordvertaling 1961-75 Jahwe
Groot Nieuws Bijbel 1972-83 Reer
ITAUENNE
Diodati 1607, 1641 Signore
Riveduta 1921-30 Eterno
Nardoni 1960 Signore, Jahweh
Pontificio Instituto Biblico 1923-58 Signore, Jahve
Garofalo I 1960 Jahve, Signore
Concordata 1968 Signore, lavè
Paroi a del Signore 1976-85 Signore
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156 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

IΠDans le Nouveau Testament, l'introduction du nom divin


fut beaucoup plus lente, mais le processlus débuta, paradoxalement,
lors des controverses entre juifs et chrétiens. Lors de leurs
échanges, ces protagonistes utilisaient en effet un Évangile de
Matthieu rédigé en hébreu (qui semble être une copie d'un original
hébraïque plutôt qu'une traduction à partir du grec). Ces copies
hébraïques du livre de Matthieu sont très anciennes, puisqu'on les
trouve dans des ouvrages comme:
- Le livre de Nestor320 (datant d'avant le ge siècle)
- Le Milhamot HaShem par Jacob ben Reuben (1170)
- Sepher Joseph Hamekane par Rabbi Joseph ben Nathan Officiel
( 13e siècle)
- Le Nizzahon Vetus (dernière partie du 13e siècle)
- Even Bohan par Shem-Tob ben Isaac Ibn Shaprut (1385).

Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'apparition du nom


divin "Le Nom" (HaShém) au lieu du classique "Seigneur" dans des
textes chrétiens cités par des juifs est intéressante321. L'étape
suivante fut le remplacement de ce nom divin "Hashém" par le
Tétragramme. On peut voir par exemple le Tétragramme dans les
traductions suivantes: la première, où Ephésiens 5: 17 est traduit en
hébreu (1599)322, et la seconde, où Matthieu 21:9 est traduit dans
le langage du Massachusetts (1661 )323.

9 J\..~h mod t8aDuteg Degonfbicbe!1 kala


aCuk.auO&1lJClWuttauatOnkquL£uog.kab D\D-
waoa') H\)'àuua wW1nautnOllub
D~
numau uGlapaoat ut Gh,cfuODaaai Jehovah,
KoranDa. QQatlonkq\116 t.
&0 Kan il paune: Jerufalem J W~rDeotan

Au milieu du 16e siècle parurent plusieurs éditions savantes


du Nouveau Testament comportant le Tétragramme:
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2.11- DE TYNDALE À L'AMERICAN VERSION [1500-1900J 157

Anton Margaritha -Évangiles (héb.) Leipzig 1533. Sebastian


Mün~ter -Matthieu (héb. lat.) Basel 1537. J. Quinquarboreus
-Matthieu (héb.) Paris 1551. J. Mercier -Matthieu (héb. lat.) Paris
1555 Ed. J. du Tillet. F. Petri -Évangiles (héb.) Wittemberg 1573.

Au début du 20e siècle, les exégètes protestants choisirent


un texte fiable (A.T.) pour obtenir une traduction de qualité. Fait
remarquable, cette traduction (American Standard Version de
1901) fit le choix d'utiliser Jehovah systématiquement. Les
exégètes catholiques firent la même démarche et produisirent aussi
une Bible de qualité. Cette traduction terminée en 1904, œuvre de
l'érudit abbé Crampon, choisit de mettre aussi Jéhovah pour rendre
le Tétragramme. Enfin, ce qui montre qu'à cette époque ce choix
était unanime, le traducteur juif Samuel Cahen choisit, pour réaliser
la première version israélite française (de 1836 à 1852), d'utiliser
systématiquement le nom Jéhovah (Iehovah), comme le fit encore
le traducteur orthodoxe russe Makarios (de 1860 à 1867). On peut
constater en observant le tableau (p. 154) qu'après 1904 (année qui
marquait la quasi-unanimité du choix) tous les traducteurs
changèrent d'avis: les juifs revinrent au terme Éternel (aucune
traduction juive n'utilisa le nom Yahweh), les catholiques, les
protestants et les orthodoxes aux termes Dieu, Seigneur, Yahweh,
etc. Malgré ce revirement soudain et spectaculaire des traducteurs,
l'impulsion donnée au début du siècle avait été trop puissante pour
être complètement renversée, et l'on trouve souvent la forme
Yehowah ou un équivalent dans les Bibles des langues suivantes:
LA1\JGlTE NOM DIVIN LANGtTE NOM DIVIN

Afrikaans Jehovah Maltais Jehovah


Albanais Jehovait Maori Ihowa
Allemand Jehovas Marshall Jeova
Anglais Jehovah Mooré Zeova
Bicol Jehova Ndonga Jehova
Bislama Jeova Niue lehova
Cantonais Yehwowah Norvégien Jehova
Cebuano Jehova Pal uan Jehovah
Chichewa Yehova Pangasinan Jehova
Cinghalais Jehova Papiamento Jehova
Croate Jehovini Pidgin mélan. Jehova
Danois Jehova Pidgin Salome Jehovah
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158 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Efik Jehovah Polonai~ Jehowy


Espagnol Jehova Ponape Siohwa
Estonien Jehoova Portugais Jeova
Ewe Yehowa Rarotonga lehova
Fidjien Jiova Roumain lehova
Finnois Jehovan Samar-Ieyte Jehova
Français Jéhovah Samoan leova
Futuna Ihova Sango Jéhovah
Ga Yehowa Sepedi Jehofa
Goun Jehovah Sesotho Jehova
Grec lékhoba Shona Jehovha
Groenlandai s Jehovap Slovène Jehovove
Haoussa Jehovah Sranan tongo Jehovah
Hiligaynon Jehova Suédois Jehova
Hiri motu lehova Swahili Yehova
Hollandais Jehovah Tagalog Jehovah
Hongrois Jehova Tahitien lehova
Igbo Jehova Tchèque Jehovovi
Iloko Jehova Tongan Sihova
Indonésien Yehuwa Truk Jiowa
Islandai s Jehova Tshiluba Yehowa
Italien Geova Tsonga Yehova
Japonais Ehoba Tswana Jehofa
Kikamba Yehova Turc Yehova
Kiluba Yehova Tuvalu leova
Kinyarwanda Yehova Twi Yehowa
Kirundi Yehova Venda Yehova
Kisi Jehowaa Vietnamien Giê-hô-va
Kwanyama Jehova Xhosa uYehova
Lingala Jéhovah Yap Jehovah
Luganda Yakuwa Yoruba Jehofa
Malgache Jehovah Zoulou uJehova

Comme on peut le voir dans ce tableau, il y a quelques


variations324, mais celles-ci sont pour la plupart négligeables. On
peut noter que les Juifs utilisent actuellement le terme Eternel dans
leurs traductions de la Bible; par contre, certains musées en Israël
utilisent le nom Yahvé (ou Yahweh), et les autorités religieuses
privilégient le nom Ye.ho. va325.
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159

2.12 Le nom de Jésus, ses liens avec le Nom


Comme on l'a vu dans le chapitre précédent, le nom de
Dieu: lehouah (puis Jéhovah), s'est imposé dans une majorité
écrasante de Bibles (de 1500 à 1900). Le nom de Jésus a joué un
rôle très surprenant (et très mal connu) pour retrouver cette
vocalisation. Ce nom (en fait Josué) est ancien, puisque Moïse le
connaissait sous sa forme hébraïque Yehôsboua (Nb 13: 16). À
première vue la signification de ce nom paraît bien établie puisque
la majorité des dictionnaires s'accorde pour le traduire par
"Jéhovah [est] salut"326.

Après examen, l'histoire de l'écriture et de la prononciation


de ce nom est cependant plus complexe qu'il n'y paraît, mais riche
d'enseignements. Ainsi, dès le début et jusqu'à aujourd'hui, ce nom
a été lié à l'histoire tourmentée du Tétragramme. En effet, en
Nombres 13: 16, on trouve l'explication suivante: «Moise appela
Hoshéa' fils de Noun: Yehoshoua'.»
~ Première constatation: ce nom est déjà unique parmi les
noms théophores puisqu'il possède trois orthographes différentes
(dans le texte massorétique). À côté de l'orthographe classique, il y
a une vocalisation pleine: Yehôshoûa' (.tr\tUn';Dt 3:21; Jg 2:7) et
une abréviation que l'on rencontre fréquemment: Yéshoûa' (.t>iW~).
Deuxième constatation: la construction de ce nom est
anormale. En effet, tous les noms théophores (c'est-à-dire incluant
une partie du nom divin) sont construits sur le même modèle. Par
exemple, Nathan signifie en hébreu "Il a donné", le "Il" étant Dieu.
Ce nom devient théophore en ajoutant à la fin le nom court Yah
(Nathan-yah, signifie "Il a donné, Yah "), ou le diminutif Yahou
(Yah lui-même, pour obtenir Nathan-yahou signifiant "Il a donné,
Yah lui-même"). On peut aussi obtenir un nom théophore en
ajoutant Yehô- au début, ce qui donne Yehô-nathan signifiant
"Yehô a donné", ou la forme abrégée Yô-nathan, Yô- étant la forme
abrégée de Y(eh)ô-. Il n'y a donc que quatre possibilités (au
maximum) pour un nom théophore.

Nathan Il a donné 2 S 7:2


Nathan- Yah Il a donné - Yah 1 Ch 25:2
Nathan- Yahou Il a donné - Yah lui-même Jr 36:14
Yehô- Nathan Yehô - a donné 1 S 14:6
YÔ- Nathan YÔ - a donné 1 S 14: 1
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160 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Tous les noms théophores I


suivent cette règle de
construction, sans exception, sauf deux: Yéhou' et Yéshoua'.
L'explication de ces anomalies est très instructive, car elles éclairent
l'influence puissante du Tétragramme sur ces noms.
Pour Yéhou' la raison est la suivante: la construction aurait
normalement dû être Yehô-hou' signifiant "Yehô [c'est] Lui-
même", comme Èlihou' signifie "mon Dieu [c'est] Lui-même".
Mais Yehôhou' s'écrit en hébreu YHWH-W' avec le Tétragramme
complet à l'intérieur, ce qui constituait un manque de respect pour
le Nom. L'abréviation logique aurait dû être YWHW' avec la chute
classique de la lettre H, quasi inaudible, soit Yôhou'; or on a
Yéhou'. La Septante confirme en outre cette vocalisation anormale
puisqu'on peut aussi lire Ièou (Illou) dans le texte grec.
Pour expliquer cette anomalie, peu de solutions
satisfaisantes sont proposées. Certains supposent que Yéhou' ne
serait pas un nom théophore, mais proviendrait d'une contraction
d'un ancien nom Yehi-hou' (Il se révélera être Lui-même) en
Yehé-hou' puis en Yé-hou'; mais rien ne le confirme. Ainsi la
quasi-totalité des ouvrages considère que ce nom est bien
théophore. Mais comment expliquer cette bizarrerie que l'on
retrouve d'ailleurs avec le nom de Jésus?
On constate par exemple que la vocalisation de plusieurs
noms hébreux qui aurait dû être normalement o-ou devient soit é-
ou, soit i-ou, avec dissimulation de la première voyelle. On
n'explique pas clairement la raison de cette modification327. Cette
constatation pourrait pourtant s'expliquer, car beaucoup de noms
ont en fait une assonance avec le nom divin Iehoua. Il y aurait
donc une sorte d'attraction vers cette série vocalique i-ou-a (ou é-
ou-a). On constate ainsi que le nom Yehôdèh (il louera) est en fait
vocalisé Yehoudah; Ouroushalim (ville de Shalém) devient
Yeroushalém; etc. Yéhou est ainsi un nom théophore grâce à son
assonance, car Yéhou est plus proche de Yehoua que Yôhou.
Le cas du nom de Jésus est encore plus extraordinaire. La
Septante a transcrit tous les noms commençant en hébreu par
Yehô- en Ihô-, ou Iô- puisque la langue grecque n'a pas de lettre h.
Cependant, en Nombres 13: 16 on lit: «Moïse donna à Ausè fils de
Navè le nom de Ièsou.» La contraction de Yehô- en Iè- est
anormale puisque tous ces noms, à cette unique exception près, ont
été lus Iô- dans la Septante. On peut d'ailleurs noter que, dans la
Vulgate latine, ce nom a été corrigé en Josué. Comment expliquer
cet écart? Tout d'abord, dans un contexte araméen, la majorité des
terminaisons en -a des noms hébreux a disparu, et on aurait dû
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2.12 - LE NOM DE JÉSUS, SES LIENS AVEC LE NOM 161

seulement avoir Josu. Mais comment expliquer la transformation


anormale du 0 en é? En fait, seule la connaissance de l'histoire du
Nom permet de répondre à cette question de façon satisfaisante.

2.12.1 Quelle est la signification du nom de Jésus?


Tout d'abord, Hoshéa' signifie "causer le salut" ou
simplement "salut", proche de Hoshia' (il causa le salut). La
construction du nom théophore aurait dû être Yehô-hoshéa' (Yehô
[est] salut) ou Yehô-hoshia' (Yehô causa le salut), mais l'écriture
aurait inclus le Tétragramme, puisque Yehôhoshéa s'écrit YHWH-
WS'; donc ce nom a été abrégé en Yehôshoua' (YHWS'). Cette
dernière écriture, ainsi que la vocalisation provenant du texte
massorétique, semble très fiable, car on la retrouve à l'identique
dans plusieurs sceaux datés du Se au 6e siècle avant notre ère328.
Cependant, ce nom n'est pas théophore de façon classique,
en supposant une forme Yehô-shoua'. En effet, le mot shoua'
signifie "noble, magnanime" et non "salut". On retrouve d'ailleurs
ce nom sous les formes suivantes: Shoua' (Go 38:2), Abishoua' (1 -
Ch 8:4), Élishoua' (1 Ch 14:5), Malkishoua' (1 Ch 10:2). De plus,
l'abréviation en Yéshua, qui apparaît très tôt (1 Ch 24: Il), est
surprenante, car la forme Yôshua aurait été beaucoup plus logique
avec la chute classique du H, Y(eh)ô- devenant YÔ-.
Ainsi, certains hébraïsants, pour expliquer cette bizarrerie,
supposent que ce nom n'était pas théophore au départ, mais qu'il
s'agissait plutôt du nom "Il se révélera être magnanime", c'est-à-dire
Yehi-shoua' (1!iW-"D~), qui évolua en Yehé-shoua' (1!itD-"ij~) puis en
Yé-shoua' (1!itZt),mais cela reste malgré tout très hypothétique329.
De plus, cela contredit tous les auteurs juifs ou chrétiens du
début de notre ère, qui ont toujours expliqué que ce nom signifiait
"salut". Par exemple, dans la version grecque du Siracide écrite vers
la fin du 2e siècle avant notre ère, on trouve la remarque suivante
(Si 46: 1): «Josué fils de Nûn (...) lui qui, méritant bien son nom, se
montra grand pour sauver les élus.» Philon (-13 à 50), philosophe
juif, explique dans un de ses livres (De mutatione nominum, 121)
que Ôsèé signifie "un tel est sauvé", et Ièsou "salut de Seigneur".
Dans le Talmud de Babylone (Sota 34b), on trouve cette
explication du nom de Yehôshoua': "y ah, il causera ton salut"
( l'v'IDi" ;-ritl'tDii1"'). ,
Les auteurs chrétiens du premier siècle, eux aussi, ont
toujours lié ce nom au salut sans toutefois préciser si ce nom était
théophore. Par exemple, en Matthieu 1:21 l'auteur précise que ce
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162 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

nom signifie "11sauvera"; Justin rappelle aussi que ce nom signifie


"sauveur" (Apologies 1,33:7) mais il dé~lore que les Juifs en aient
oublié la signification (Dialogue avec Tryphon 113:2).
Il semblerait donc qu'au premier siècle seule la signification
divine de ce nom posait problème; mais l'explication par shoua'
signifiant "noble" n'a jamais été retenue. Puisque le mot shoua'
possède aussi un autre sens qui est "appeler au secours" proche de
"causer le salut", les commentateurs ont visiblement accepté de
confondre ces deux sens. Par exemple, Eusèbe, autour de 310 de
notre ère, dans un de ses livres (Démonstration évangélique
IV.,17:23), indique que ce nom, lèsu en grec, devient lôsoué en
latin, mais qu'il se lit Isoua en hébreu et signifie dans cette langue
"Iaô est salut", car laô est le nom de Dieu en hébreu
(Démonstration évangélique X,8:28).
A priori, cette explication paraît satisfaisante puisqu'elle
corrobore les autres. De plus, tous les témoins grecs et latins du 1er
siècle avant notre ère (Terentius Varron, Diodore de Sicile,
manuscrit 4QLXXLevb) donnent tous la forme laô pour le nom
divin. On sait aussi que le nom laô a joué un grand rôle dans le
mysticisme juif330; d'ailleurs, on le trouve inscrit sur de nombreuses
amulettes de cette époque.
Dans un livre écrit vers 100 (Apocalypse d'Abraham 10:3-
11 :5), on précise que l'ange médiateur Métatron est aussi appelé
Yahoel, car son nom est comme celui de Dieu (Yahoel signifiant en
hébreu: Yaho [est] Dieu). Le Livre de la création (Sépher Yetsira
I: 13) précise qu'à côté du nom YHWH il y a aussi le grand nom
YHW. Les commentateurs juifs ont ainsi identifié l'ange qui a le
nom de Dieu en lui, selon Exode 23:21, à Métatron et à l'archange
Michel.
Jérôme précisa, dans un commentaire sur Psaume 8:2, que
le Tétragramme qui s'écrit Yod, He, Vau, He, peut se prononcer
Yaho. Les nombres 15 et 16, qui auraient dû être écrits en hébreu
YH et YW, vont être remplacés par TW et TZ, car en araméen on
aurait eu, en les prononçant YaH et YaW, les deux noms divins, soit
la et Iaô en grec.
Concernant la prononciation Isoua, elle paraît elle aussi
correcte. En effet, il suffit de consulter le traducteur juif Aquila,
dont la traduction, faite vers 130, est considérée comme très fiable
et très littérale. Par exemple, il transcrit le nom Yehôshoua' qui se
trouve en Deutéronome 1:28 par lèsoua, confirmant ainsi le choix
de la Septante (Ièsou) [en contexte araméen le a final est tombé].
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2.12 - LE NOM DE JÉSUS, SES LIENS AVEC LE NOM 163

Paradoxalement, si Iaô est le nom de Dieu, il devient


impossible d'expliquer comment il a pu se contracter en lé dans le
nom Ièsoua, à moins d'admettre que laô n'est pas la prononciation
du Tétragramme qui avait cours dans le Temple de Jérusalem
jusqu'en 70. En fait, Flavius Josèphe (écrivain juif qui avait
fréquenté la prêtrise) précise dans un de ses livres que certains Juifs
connaissaient le grand Nom, et que ce nom (le Tétragramme) est
constitué de quatre voyelles (La guerre des Juifs V:235,438). Dans
le contexte du 1er siècle (époque de Qumrân), cette information est
facile à saisir puisqu'il s'agit d'une lecture par les lettres Y, W, H qui
servent aussi de voyelles (matres lectionis) soit I, Û, A (Û est
prononcé ou). D'ailleurs, Abba Shaül, vers le milieu du 2e siècle,
interdira la prononciation du Nom suivant ses lettres (Talmud
Sanhédrin IOIa). C'est la destruction du Temple en 70 qui va
accélérer le processus de disparition du Nom, car à la fin du 2e
siècle l'hébreu n'était quasiment plus parlé et fut remplacé par
l'araméen. C'est pourquoi ces remarques ne furent plus comprises.
consonnes nom prononcé nom prononcé
du nom hébreu
.
selon ses lettres selon la Septante
YH lA la
YHWDH IHUDA louda
YSW' ISU'a Ièsou
Y'QWB l'aQUB lakôb
YSHQ ISa!!aQ Isaak
YRWSLYM IRUSaLIM lérousalèm
YHWH IHUA Kurios
La lecture de ces noms hébreux suivant leurs lettres
correspond ainsi assez bien à leurs vocalisations grecques dans la
Septante, même le nom de Jésus lu Isoua colle de près à la lecture
faite par Eusèbe. Cependant, la lecture Ihoua du Tétragramme
semble sans rapport avec Iaô. En fait, ce nom grec correspond au
substitut hébreu Yahou (YHW) que les Juifs utilisaient déjà
couramment à Éléphantine au Se siècle avant notre ère. On le
trouve déjà à Kuntillet Ajrud (autour de -800) à côté de YHWH.
Eusèbe, hébraïsant de grande qualité, reconnaissait dans ses
commentaires sur les Psaumes que le nom de Jésus était en fait
phonétiquement très :Eroche'du mot "salut" (Isoua) en hébreu, mais
qu'il "signifiait" la 1, la étant le nom du "Seigneur" Dieu
habituellement prononcé Adonai et parfois écrit en hébreu dans le
texte grec.
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164 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Donc, comme pour le nom ~e Yéhou qui est devenu


théophore par assonance, de même l'abréviation logique Yôshoua'
est devenue Yéshoua' pour se rapprocher de la suite vocalique ie-
ou-a de Yehouah, suite vocalique que l'on trouve dans tous les
autres noms théophores sans exception (Yehônatan, Yehônadab,
Yehôram, Yehôyaqim, etc.)
Ainsi, même si on trouve, dans des papyri du 3e et 4e siècle,
le nom de Dieu écrit sous les formes: Iéôa, Iéèôoua, etc., la majorité
des amulettes porte le nom Iaô, ce qui obscurcit l'assonance des
noms théophores avec le nom divin. Il n'y a eu qu'Evagre le
Pontique, vers le 4e siècle, pour rapprocher le Tétragramme avec le
nom du Seigneur qu'il suppose écrit YHSWH332.

2.12.2 Quelle est l'histoire du nom de Jésus?


Comme on l'a vu, l'écriture YHWS' (l'tDii1~)provenant du
texte massorétique, semble très fiable (confirmant ainsi la
vocalisation Yehôshoua '), car on la retrouve à l'identique sur des
sceaux datés du 8e au 6e siècle avant notre ère. De plus, les Juifs
ont toujours considéré le nom Yéshoua' comme un nom
théophore évoquant le salut, et cela pour deux raisons.
La première: la cause du salut viendrait indiscutablement de
Dieu. Il était donc sous-entendu que l'on pouvait traduire
Yehôshoua' par "[YHWH] causera le salut" et Yéshoua' par
"délivrance [de YHWH]". La deuxième raison est plus décisive. Les
Juifs considéraient comme un grand privilège de recevoir une lettre
du nom de Dieu dans leur nom pour se rapprocher de ce dernier et
bénéficier de sa sainteté. Par exemple, le Talmud signale que
Joseph a reçu un H (en Psaume 81:6) en raison de sa sainteté, car
Yôseph est écrit à cet endroit YeHôseph, et que Juda (Yehûdah), lui,
a reçu toutes les lettres du nom divin (YHWdH) à cause de sa très
grande sainteté (Talmud Sota lOb et 36b). Concernant Yéshoua, il
est écrit (Talmud Sota 34b) que ce nom signifie "YH causera ton
salut", car il a effectivement reçu un Y, Hoshéa' (HWS') devenant
YeHôshoua' (Y-HWS '), d'après Nombres 13: 16.
En fait, les variations de prononciation peuvent avoir été
favorisées par la proximité d'autres noms dont le sens était proche,
comme Isaïe (en hébreu Yesha 'yah signifiant "il sauva, Yah "), ou
comme le mot Yeshou'ah (étant sauvée ou délivrance). Donc, le
nom Yehôshoua' (~4i1~), dont le sens étai t proche de Yehôs~ia'
(lr~~) signifiant "il causera le salut", a pu être abrégé en Yéshoua'
(~1~:) proche du mot Yeshou 'ah (i1~1uJ~) qui signifi e "délivrance", et
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2.12 - LE NOM DE JÉSUS, SES LIENS A VEC LE NOM 165

ce pour une raison capitale. En effet, tous les noms théophores


dans le texte massorétique suivent le schéma phonétique "Yehô-a".
On ne trouve jamais les suites Yehô-i, Yehô-é, etc. La seule
exception notable étant Yehôshoua' avec la suite Yehô-ou-a.
~ Les scribes ont donc "théophorisé" ce nom en modifiant
légèrement son écriture et sa prononciation. Ainsi, le nom
Yehôshoua' (YHWS') est devenu Yéhshoua' (YHSW'). Les textes
bibliques de Qumrân montrent que ce nom, écrit YHWS' (W7irT")
dans le texte massorétique, est écrit dans les textes en paléo-hébreu
datés des 3e et 2e siècles avant notre ère sous la forme YHSW'
(.t'im..)333,c'est-à-dire sans le premier W mais toujours avec le
second. Ceci laisse perplexe, car en général l'orthographe de
Qumrân est assez généreuse en matres lectionis. On retrouve aussi
cette anomalie dans plusieurs textes bibli~s, datés du 1er siècle
avant notre ère, écrits en hébreu classique. D'autre part, certains
livres, comme le livre de Josué, contiennent une orthographe très
fiuctuante de ce nom, allant de YHS' (.t'WiT') à YHSW' (.t'iWiT')et
YHWSW' (.t'itUrr).
~ Cette anomalie d'écriture pourrait expliquer les anomalies
de prononciation de ce nom. En effet, vu l'utilisation des matres
lectionis à Qumrân, ce nom YHSW' devait être lu IHSÛa', c'est-à-
dire Yeshoua', car le H était devenu inaudible. Cependant,
l'alternance consonne-voyelle permettait aussi de lire ce nom sous
la forme IHaSÛa', c'est-à-dire Yashoua', d'autant plus facilement
que ce dernier nom signifie "étant sauvé". On constate d'ailleurs
que, dans le courrier bilingue de Bar-Kochba, écrit vers 125, ce
nom, toujours écrit YSW' en hébreu (.t'itD"),est transcrit de diverses
manières en grec par Ièsou, lassou et même par Èsou335. Il est
probable que cette confusion est à l'origine du nom grec Jason.
(Iassou a donné lasôn, comme Babèl donna Babulon, etc.) ~
À cause de l'assonance avec le nom divin IHÔA, certains
autres noms ont été "théophorisés". Par exemple, dans la Septante,
de nombreux noms ont eu leur début transformé en lôa-: comme
lôatam (Jg 9:7, 57; 2 R 15:5, 32); lôalç.éim (1 Ch 4:22); lôas (1 Ch
23:10, 1]); lôasar (1 Ch 2:18); lôakal (Jr 37:3); lôakas (2 R
14:13); etc. Même dans les écrits de Bar-Kochba (autour de 125)
le nom Joseph, orthographié YWSP (:pi') dans le texte
massorétique, est toujours écrit soit Yehôsèph (tpiiT'), soit Yôhasèph
(tp.".,) et transcrit lôsèpos eI'l grec.
En fait, le sort de ces deux noms va continuer à être
étroitement lié. Les chrétiens prononçaient en effet le Tétragramme
"Seigneur" (Kurios en grec), soit l'équivalent de l'hébreu "Messire"
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166 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

(Adonay). De plus, entre 100 et 1351 les copistes chrétiens ne


comprenant pas l 'hébreu vont rapidement remplacer le
Tétragramme écrit en hébreu dans un texte grec (c'était le cas dans
toutes les Septantes écrites avant le 2e siècle) par Seigneur (ou
quelquefois par Dieu). Plusieurs auteurs des deux premiers siècles
(Clément de Rome, Ignace d'Antioche, Polycarpe, Hermas, etc.)
reconnaissaient que le nom de Dieu jouait un grand rôle.
Cependant, certains auteurs de cette même époque précisèrent que
pour eux, le nom de Dieu était Jésus! Cette identification est
clairement exprimée dans l'ouvrage intitulé L'évangile de vérité.
Elle est confirmée par Justin (Dialogue avec Tryphon 75) et par
Irénée de Lyon (Contre les Hérésies N, 17,6).
Les Juifs, par une révérence excessive, écrivaient YH pour
désigner YHWH; les chrétiens firent de même avec le terme grec
KURIOS (Seigneur), qui s'appliquait à Dieu mais aussi à Jésus. Ils
l'écrivirent sous la forme abrégée KS surmontée d'un trait, ou KE
pour KURIE, etc. Jésus, vu le contexte, méritait le même traitement;
il eut donc droit à une sacralisation de son nom suivant ce procédé
des nomina sacra, c'est-à-dire que IHSOUS est devenu IS (ou IHS);
de même IHSOU est devenu lU, etc. On peut noter que le plus
vieux papyrus chrétien (P52), daté vers 125, ne contient pas de
noms sacrés, ce qui permet de supposer que ce procédé n'a été
systématique qu'après 135.
Par contre, les polémistes juifs, pour distinguer ce nom du
Yéshu' biblique (Josué), vont préférer l'écrire YSW (itD"I)dans leurs
controverses, en accord avec sa prononciation araméenne Yéshou.
Par exemple, on le trouve écrit de cette façon dans le Talmud de
Babylone (Sanhédrin 43a), dans le Livre de Nestor (écrit avant le
ge siècle de notre ère) etc. L'explication de cette orthographe est
variable. Irénée de Lyon (en 177), dans son livre Contre les
hérésies (II, 24, 2), explique que ce nom Jésus, écrit ISW en hébreu,
signifie dans cette langue "Iaho Samaïm Wa'arets", c'est-à-dire
"Seigneur du Ciel et de la Terre". Par contre, dans les Toledoth
Yeshû (écrit après le 6e siècle de notre ère?) on trouve l'explication
suivante sur la signification de YSW en hébreu: "Ymah Shemo
Uzikrino", c'est-à-dire "que l'on efface son nom et son souvenir."
La façon d'écrire Jésus en abrégé durera jusqu'au 4e siècle"
car lorsque la Bible fut traduite du grec en latin les termes KS
furent remplacés par des Dominus, c'est-à-dire Seigneur en latin, et
les IS par des IESUS, quoique parfois on ait gardé des abréviations
IHS (lES en grec). D'ailleurs, Irénée explique dans son livre
(Contre les hérésies /, 3, 2) que certains gnostiques pensaient tirer
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2.12 - LE NOM DE JÉSUS, SES LIENS AVEC LE NOM 167

des renseignements mystiques de ces abréviations grecques,


puisque IH (iota, èta) représentait le chiffre grec 18. Par exemple,
l'auteur d'un ouvrage rédigé entre 115 et 135 (Épître de Barnabé
9:8)336 effectuait un rapprochement entre le nombre 318 de
Genèse 14:14, écrit TIH en grec, et la croix (T) de Jésus (IH)!
Du 4e au 6e siècle la confusion deviendra totale. À cette
époque, on trouve encore des Septantes avec le nom Iaô dans des
commentaires sur les noms théophores. Par contre, Sévère
d'Antioche, en commentant Jean chapitre 8, dans une chaîne de
versets, utilisa lôa pour le Nom. Isidore de Séville ayant visiblement
lu la lettre XXV de Jérôme à Marsala, pensait que le Tétragramme
venait de IaIa; enfin le pseudo-Denys (dans son ouvrage Les noms
divins) avait conclu qu'il était impossible de nommer Dieu. Les
Juifs pensaient eux que la bonne prononciation appartenait
dorénavant au monde messianique à venir, et que la venue du
Messie révélerait la prononciation authentique.
Du 6e au 10e siècle les Massorètes ponctuèrent le texte
biblique. Leur .choix concernant le Tétragramme est intéressant. En
effet, ce nom divin, qui était prononcé Adonay, n'a pas été ponctué
par a, 0, a, les voyelles du mot 'aDoNaY; cela aurait pu donner la
forme YaHoWaH, mot à risques. En effet, un lecteur distrait aurait
pu lire ces voyelles avec les consonnes, ce qui aurait donné "Yah
[est] calam-", car .Howah signifie calamité en hébreu (voir Isaïe
47: Il et Ézékiel 7:26).
Les Massorètes ont donc sagement et providentiellement
choisi de ponctuer le Tétragramme par son qeré profane e, a, c'est-
à-dire les voyelles du mot araméen SHeMa' (~~) signifiant tout
simplement "Le Nom", mot que les Juifs prononcent aujourd'hui de
nouveau en hébreu HaSHéM (~), comme en Lévitique 24: Il.
Donc, YHWH est devenu durant cette période YeHW aH.
Au 12e siècle, plusieurs événements vont mettre en marche
un processus aboutissant à retrouver le sens et la prononciation du
Nom divin et du nom de Jésus. Sous l'influence des qerés Adonay
et Èlohim, la voyelle 0 est ajoutée au qeré profane Shema,
(YeHWaH devenant YeHoWaH). En parallèle, Juda Halévi précise
dans son livre (Le Kuzari IV:l-l6) que le Tétragramme est le nom
unique de Dieu, et que ces lettres y, W, H servent de voyelles, c'est-
à-dire I, 0, A, pour toutes les autres consonnes.
Maïmonide, talmudiste réputé, confirma dans son livre (Le
guide des égarés 1:61-64) que YHW" est le seul nom sans
étymologie, contrairement aux autres noms divins. Il précisa aussi
que seul le vrai culte s'était perdu, car la prononciation du nom
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168 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

divin pouvait toujours s'effectuer suivantj ses lettres. Ces remarques


de Maimonide inspireront de nombreux commentateurs chrétiens.
Joachim de Flore transcrivit le Tétragramme selon ses lettres
grecques soit IEUE. Il décomposa ensuite ce nom en trois, lE pour
le Père, EU pour le Fils et UE pour l'Esprit Saint. Le pape Innocent
III poursuivra ce rapprochement entre le nom' divin IEUE, écrit
aussi IE-EU-UE, et le nom de Jésus écrit lE-SUS.
Au 13e siècle, l'hébraïsant Raymond Martin préféra la
forme hébraïque Yohoua. Porcheti de Salvaticis utilisa plusieurs
fois le nom Yohouah dans son livre (Victoire de Porcheti contre les
Hébreux impies), et fit remarquer que Dieu avait donné ce nom au
Messie d'après Jérémie 23:5, 6. À cette époque la position de la
lettre H paraît fluctuante. Par exemple, le nom Iesu est amélioré en
Ihesus, quelquefois en Hiesu et parfois même en lehsu. Arnauld de
Villeneuve, élève de Raymond Martin, va relier ces deux noms
grâce à leurs transcriptions latines respectives, c'est-à-dire IHV" et
IHSV, dans son ouvrage consacré au Tétragramme. La cabale
chrétienne va, par l'intermédiaire de la prononciation des lettres
voyelles et de leurs symbolismes, lier ces deux noms.
Au 14e siecle, Pablo de Santa Maria, ancien rabbin, précisa
que le Tétragramme et Jésus ont tous les deux quatre lettres en
hébreu, et que la première et la troisième sont des voyelles
identiques.
Au 15e siècle, le cardinal Nicolas de Cues, dans ses
sermons, va encore rapprocher ces deux noms en signalant que
IESÛA, la forme hébraïque du nom de Jésus, est proche du
Tétragramme grec IEOUA, car ce nom en hébreu s'écrit avec
quatre voyelles (I-E-O-A). Johann Reuchlin, dans son ouvrage De
Verbo Mirifico, poursuivra ce rapprochement. En effet, constatant
que le nom Iesu a parfois été transcrit dans la Vulgate par IESÛE,
il supposa que ce nom provenant de la Septante grecque pouvait
être transcrit en latin par IHSÛH (car le H latin correspond au E
grec. )
Au 16e siècle, Jacques Lefèvre d'Étaple constata qu'en fait,
si le Tétragramme devait être lu I-HE-Û-HE suivant ses lettres, le
nom de Jésus n'était pas en hébreu I-he-sû-he mais plutôt I-he-sû-
ha. Les hébraïsants chrétiens de cette époque ont même cru que les
Juifs avaient volontairement enlevé la finale en a du nom de Jésus
pour lui ôter une part de sa divinité. Pour améliorer ce nom, le
grand hébraïsant Sanctes Pagnini transcrivit donc les noms Josue et
Jesus en lehosvah et lesua dans sa traduction latine de la Bible en
1528.
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2.12 - LE NOM DE JÉSUS, SES LIENS AVEC LE NOM 169

Cependant, les traductions ultérieures reviendront toutes


aux noms de Josué et de Jésus, à l'exception des traductions
israélites qui garderont léshoua et lehoshoua, comme celle de
Samuel Cahen (de 1836 à 1852). Cependant, après 1852, le nom
lehovah sera remplacé par Éternel dans les éditions suivantes.
Malgré tout, le Nom restera en filigrane dans les noms Yéshoua et
Yehoudah par son assonance, car ces noms auraient dû
"normalement" se prononcer Yôshoua et Yehôdèh.
Alors que le nom Yehouah devait s'imposer, il a été
largement attaqué depuis le début du siècle. Il est intéressant de
savoir que la Bible associe la fin de cette controverse à la fin des
temps à venir (Ez 38: 16, 23).
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Chapitre troisième

Le dénouement
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173

3.1 Fin générale de la controverse


Les traditions juive et musulmane annoncent une révélation
(miraculeuse) du nom divin à la fin des temps. Le domaine du
miracle relevant davantage de la foi que de la raison, il est plus
"raisonnable" de se référer au texte biblique qui annonce seulement
que Dieu ferait connaître son nom à toute la terre (Ex 9: 16; Rm
9: 17). Cependant, pour que les nations espèrent en son nom (Mt
12:21) et soient sauvées (Rm 10: 13), cette déclaration suppose que
ce nom soit accessible à tous et donc que la Bible soit traduite.
Les premiers traducteurs, ceux de la Septante, ont éludé le
problème en gardant le nom divin en hébreu dans le texte grec. Par
la suite, les copistes pagano-chrétiens, qui ignoraient l'hébreu, ont
remplacé ce "sigle" incompréhensible par le mot Seigneur, ou plus
exactement par son abréviation, pour conserver un caractère sacré
au nom de Dieu. Les traductions ultérieures ayant été réalisées
principalement à partir du texte de la Septante, le Nom semblait
condamné à l'oubli.
La fin du 4e siècle fournit pourtant une occasion unique.
L'hébraïsant Jérôme effectua une révision de la traduction latine de
la Bible directement à partir du texte hébreu. À cette époque la
connaissance de l'hébreu avait malheureusement commencé à
décliner, et, plus grave encore, les témoignages vocalisés du nom
divin ne concernaient plus que les substituts. Ainsi, Jérôme se
contenta de noter le problème en précisant dans ses commentaires
bibliques que le nom divin était le Tétragramme hébreu, écrit yod
hé waw hé, qu'on pouvait prononcer laho. Ces maigres indices
seront, pendant les 800 ans qui suivront, les seules informations
(sur l'écriture et la lecture) que les lecteurs cultivés pourront
trouver concernant le Nom. Le premier facteur qui relancera les
traducteurs sera une meilleure compréhension de l'hébreu.

3. 1. 1 Grâce à la renaissance de la langue hébraïque


IŒ' Même si de son propre avis la connaissance de l'hébreu
était devenue très imparfaite, Maïmonide, grâce à son ouvrage Le
guide des égarés, donna une puissante impulsion dans la recherche
de la vocalisation du Tétragramme par les hébraïsants chrétiens.
L'idée fondamentale qui fut retenue par J'ensemble de ces érudits a
été que le Nom se prononce comme il s'écrit. Cependant, la
connaissance de l'hébreu biblique étant encore balbutiante, les
premières tentatives de vocalisation furent hésitantes.
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174 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Nom de l'auteur Nom divin utilisé date


I
Joachim de Flore IEUE 1195
Pape Innocent III IEUE 1200
Raymond Martin YOHOVA 1278
Porchetus de Salvaticis YOHOVAH 1303
Alphonse de Valladolid YEHABE 1330
Nicolas de Cues IEHOUA 1428
Nicolas de Cues IHEHOVA 1440
Nicolas de Cues IEOA 1445
Marsile Ficin HIEHOVAHI 1474
Jacques Lefèvre d'Etaples IHEVHE 1509
Pierre Galatin IEHOVA 1518
Michel Servet IEHOVAH 1531
Sébastien Casteillon lOUA 1549

Ce tableau récapitulatif de différentes vocalisations du Nom


permet d'affirmer deux points importants: ces hébraïsants ne
croyaient pas que le Tétragramme était imprononçable; ensuite, la
ponctuation massorétique YeHoWaH, qu'ils connaissaient tous et
qui aurait donné la forme Yehouah ou lehouah s'ils l'avaient lue
"naïvement", n'a en fait joué aucun rôle pour établir la forme
proposée, puisque aucun d'entre eux n'y fait référence (l'ouvrage
de Maïmonide est par contre souvent cité.)

3.1.2 Pourquoi une telle pluralité de formes?


Au premier abord, les nombreuses formes observées
semblent prouver une difficulté à trouver la prononciation exacte
du Nom. En fait il n'en est rien, car chaque choix exprime un
compromis qui peut se justifier. Par exemple, le premier choix
IEVE correspond à l'équivalence succincte Y=I, H=E et W=U; de
plus, cette forme a l'avantage d'être proche du nom théophore
IESV, comme le notait le pape Innocent III. Ces arguments seront
repris par Jean Reuchlin, puis par Jacques Lefèvre d'Étaples qui
utilisera une variante latine dans la correspondance, soit Y=I,
H=HE et W=V. Cependant, Lefèvre d'Étaples signala une faille
qu'il trouvait gênante: le nom de Jésus en hébreu n'était pas IESUE,
même si cette forme apparaît parfois dans la Vulgate, mais IESVA.
Selon ce raisonnement, si le nom divin était proche du nom
théophore Jésus dans le passé, la forme la plus exacte du Nom
aurait dû être lEVA (et non IEVE).
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3.1 - FIN GÉNÉRALE DE LA CONTROVERSE 175

lUES inte :nic U abConû.Na dcrfero awhore Paulo ell nomé quod ea Cuper onlllC non,~.
Et de quo ad Romanos:lHESVS Chnlhu hen SChodie apte at ill (ecula.qi! & tatt vcrfuj quadrat.
£(de quo PetrUs IDAébs.no e11.11al'quo alio falus. nec enialiud en nomé rub celo datü honlini:l
bus:in quo oporteat nos faluos fieri.quod &fcquétl\'erlui haud lnaccomodabsteVldctutI\'bi d tClt_
a benedlcenrur in ipfo ols tnbus tcrre:OJnnes gentes mJgmf'('"Jbunr cü.C ufa In fcrmon.bus ;fCIl:2
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fit hoc admirabde & benediaü nOfné~totü In fe ch..ldcre curD media Ctn,.d dl Ilttera m3gnunl del
tneffablle nomen tetragram3ton 'quatUor httCds iod1; he/vau/h~uod his hueras nonriS
~uoquo p3do reprefent.1re pofi"utnus J HE V HE.juntam iic~iunge igltUr fin Id dl:
r in medso:11et IHESVHE oonaé bencdrd,ü rrgiR nol1'l i( faluatorls ommu.& dco kal113Co/Înctf3
btle fadum et1eifabde.Illud tdé f([lplit l\1.lranduJa.SC de eodéhbrü cdJdit clcgJnutfllnU5"& finc co
~~erfia Inter Sueuos doéhRimus Ioannes. Capnton:culus paulo ante: m~mimlUus.qué qUldé Il:1

Ia.Httera hincinde triadë (OJ~ectcntc. tUe au velligiü rue vetÏt:1tt" fuoqJ exe~lari Înfertû I id en qèl
d una~ê SCftmiJi~diné de! fuerat in princi pio aCatfi a diufno \.erbo :Iffüp tü ; el tü c il1ctf~l.u!e
".
ffabile factü cU. vr Ul annotatiolU b9 pfalani 71 diaü ell. ,ppnü fie repCcntaf IHSVH. cOlnunc tiC
H_SYA& iJ~tcrdü metatltdi Iftterarû IHVSA.trSc:40\ycr(u.jjoccupen19facié eiusin a3fdli5e:

La présence de la lettre H n'améliore pas fondamentalement


la prononciation du Nom. Le cardinal de Cues expliquait lui aussi
dans ses sermons que cette lettre latine permettait seulement de
mieux exprimer le son du H hébraïque. Pour exprimer le
Tétragramme dans la langue grecque, il préférait la forme I-E-Q-A .
plutôt que I-E-U-A, car il pensait que le son Q était plus proche du
W, tout en reconnaissant que l'idéal serait d'utiliser une voyelle
grecque (qui n'existe pas, comme en français) pour exprimer le son
OU. Cela aurait donné la forme I-E-OU-A, que l'on pouvait
améliorer en latin en I-EH-QU-A, écrit lehova comme on peut le
constater ci-après dans son premier sermon (vers 1428).
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176 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Le nom de lesu étant fréquemment écrit Ihesu en latin, le


nom lehova fut aussi écrit Ihehova dans ses sermons, mais c'est la
forme lehoua (ou lehova, car en latin la prononciation était
identique) que le cardinal Nicolas de Cues privilégia.

3.1.3 Premier dilemme: lehoua ou loua?


Les traducteurs qui s'appuyaient sur les écrits de
Maïmonide (qui se référait lui-même au Talmud) aboutissaient à la
forme loua, puisque le Nom se prononçait comme il s'écrivait. (les
formes avec la lettre Y sont des transcriptions savantes, mais
habituellement en latin c'est la lettre I qu'on utilise; de plus,
l'introduction de la lettre H dans le nom loua constituait seulement
une amélioration orthographique.) Le seul point qui gênait les
traducteurs était la ressemblance de cette vocalisation avec le mot
latin loua signifiant "fille de Jupiter" ou "Jupiterette", comme le
signalait déjà l'écrivain latin Varron (-116 à -27). A cause de cette
homonymie, plusieurs érudits (dont Jean Pic de la Mirandole) ont
pensé que le nom Jupiter provenait d'une évolution de l'expression
"loua-pater" (père loua) en "loue-pi ter" (Jupiter). Le traducteur
Sébastien Casteillon retourna cet argument en précisant que si les
païens avaient utilisé fortuitement le nom divin, même déformé, à
plus forte raison les chrétiens devaient-ils l'utiliser.

o S diatagos , ttattc9 V 5 .112Con1nia Jka~liri.

œ
'E

m chariGimi, comporai..
mus, Vtpucri haberent,.
.vndc eadem opera, Be:
mores ChriRianos,& orationem
latinam difcercnt .Itaquc corum
I.
,..
. . :1d bune modum cffatus eft:
,Ego Cum loua DeQs tUU5,
q.Uit~c<i~xiex)omic:ilio-fcr
. ustuttS Acgyptl~. .'
1 Deo$ alios nullos,przter me,habero.
ruditati in primo libro fcruiui. t. SilnuL,chrum vl1ius rci)quzcxt~t aut
mus,fcrmonc &cilimo,eoquc mi. fuprà in cœto, aut infrà in terra', aut it\
DÙS cleganti,&: tamcn brina Vten aqui,' fub terra!, ne tacito-, nive ca vene..
~

tcs:& pueris q~ przmanfum (i rator) néve colito. N am efo~cus


bum in os inièrentes. In cëneri 5
. 'tuus , Deus, im~tiet1s foci;,. parcntu\u
iam cJegantjùs Joqui cUlpam etiam1in liberos pcrfcquor ) Ctiam
~od autë DcÎnomcn
Hcbrzii vfurpauimus,quo
lam Dei proprium
I

nomen
~ V
nul~
latinl~
ad pronepotes vCque ') & abnepotes 0(0-
rum mei : clcmcntiaq; V10r ad .millcfima1"i1
vfquc. fti'rpem crga.mei alDaJ1tcs, rndquc
extat(niû fortè Iupitcr ~ fed id~v.t: pr~nferuaotcs.
poUutWD,omimunus) id CIDpria' - J ~itui~aomcn in2hitcrnc'adh::..
cipio vidcbitUl' fortafte duri1l5,ta...-
bcEo:nc'l,enim 'net impuniN.q loua~q11i
men vfu mbllefcet:& quod' "

A l'instar de certains traducteurs, Pierre Robert Olivétan,


tout en reconnaissant que le Tétragramme pouvait se prononcer
loua, préféra utiliser la forme lehouah dans sa Bible (en 1535).
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3.1 - FIN GÉNÉRALE DE LA CONTROVERSE 177

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A5rnnd'.Mmal8lmcant~h.(~tfo...
..,.... l'&1ùaRtmontli
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J)GrqUop""
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l'IIftItlrr ...... lip'u
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Ire hltamllpoarfigniflftfrtpmoCoafl. ~rrr,. ~rrCtsJ>aF'1I8
tfogrdpft,PIGnadGa'09b mot"n,DotI'pointr- Jtltumofoprntmtfmt lte (.mtfC'ClIan (commrnris
artrrfhngr,~re4I""'--"':1ku , Ir J)Cfdr)"o(mrCt nOl1)bfcrCUf:arC",'r""
r 11II dlr poffC6rr)pGI Cf
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poumlrQffl'n'''J~&nnt'*'''tlfic''" 1fII' nlta (oItqtffrtll fClc,10111",*
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~.,.." fald'!JrluIIruC8moI5/OIIfIcaunrs ~ m",pftque.qaaiI8iC bft:(Jt faf. qui ,... et ~fo.,


Af..,.,.,.,(nult~C ,..rla fJ'O~.. IIpoccaCpp.j.quCtffoffJeP ."qufrmr.6I£dui1.1,.
pourtl rll.~__' ,pgnf(fcldlov. "filii pnkitItaou 'u (au prDltGllttI,rsr"nttinrll

L'argumentation linguistique du Talmud étant simple (et


donc puissante), certains traducteurs ont défendu cette vocalisation,
comme on peut le constater, ci-après, dans la Bible337 allemande de
Johann Babor (1805), sous la forme Ihoua (Le 4: 18), ou dans la
Bible française (partielle) de 1823 d'Antoine Favre d'Olivet, sous la
forme IHÔAH. (Gn 8:20,21)

ttlt .~r4ijt~1 IUtt)fil! et"~ aufrt'Ur" ft.,. ~truO abtr fpr,,((J lai. il) I .23
l""
.. 8 ~er Cf AUr f~(Bfnbe (5ttUt I id) i~r t~nttt mi~ frt'U~ bal epfi~.
~erb, "om œ,ijlt ~.~ .360U4 4"= 'Y0r~ '''od,a('t~: 9(rJt!. ~i(f bi~ I

ttr't~tl1, kr lnici,trrO fru ~11r


t), refb~! ufrrÎd)tt .ult(ih, Willt'" tt~.

",;~ ~ Mi"~- f)~ 1)~,?~


20. Et.il.édifia, Hoa", un.lieu
de-sacrifice à ,186.\.11;et.il'pl'i~ de-
"\~'fI~S~1M;o~j\Ci1~'":!
: TG~ tout-quadrup~de e-la-purete, et.
. ..: . .. rl1i1 ~)l"
.. W"de-taut-volatile de-la-})ureté; et.
i1-éleva une-élé'Tation (il nt ex\\a\er
une exhalaison) de-ce-lieu-de-sa-
crince.
21. Et-il-respira, IIBÔÂB~cet-
M~n'''~N''nn'Jnn''Tr\~m~M!'~!
,;~ ";)7~~~ .~inèl; ~~~ esprit-odorantde-douceur;et-il-
dit, IIBÔAB,I devers-Ie-cœ1.1r-sien,

Le linguiste Favre d'Olivet préférait la vocalisation Ihôah au


classique lehovah, car cette forme respectait la lecture naturelle des
lettres voyelles en hébreu. Çependant, la vocalisation hébraïque des
noms théophores et notamment du nom de Jésus a puissamment
influencé les traducteurs. De plus, le texte massorétique s'étant
révélé particulièrement fiable, il fut progressivement accepté.
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178 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

3.1.4 Le rôle des noms théophores dans le dilemme


I
Dès le début de la vocalisation du Nom (au 12e siècle), les
hébraïsants ont effectué un rapprochement avec les autres noms
théophores (ainsi leve est comparé à lesv). Porchetus de Salvaticis,
qui prononçait les noms théophores en Yoho- (par exemple, il
écrivait Yohoyaqim le classique Joaqim), a certainement harmonisé
/ le Voua de départ en Yohouah pour le rendre conforme aux autres
- noms thé9phores de son livre. Le nom qui a eu la plus grande
influence sur la vocalisation définitive fut le nom Jésus, qui se
prononçait leshoua en hébreu. Le cardinal de Cues établissait
d'ailleurs dans certains de ses sermons un parallèle (déjà noté au 4e
siècle de notre ère par Évagre le Pontique) entre les deux noms
lehoua et lesoua.
De plus, comme le remarquait Michel Servet dans son traité
contre la Trinité en 1531, le nom lehouah est très proche du mot
hébreu "salut" (Iesuah), qui est la signification biblique du nom de
Jésus (Iesua). Ce rapprochement lui paraissait plus convaincant que
la forme grammaticale supposée par les cabalistes de son époque:
un futur piel (actuellement vocalisé YeHaWèH et signifiant "il fera
être" ou "il constituera"). Cette forme hébraïque avait d'ailleurs été
utilisée par Abner de Burgos, un Juif espag"nol converti, dans son
ouvrage intitulé "Le Maître de justice" (1330).

Ii etf._.eIJ;jfw"'~'*JiIIiM

!S
iJkri!'EIohim:.C 1II4f""or~iT pitre
t, cbri/t-tfillirptcttltflr:a...cv ~ . rMIIftr~e tbD f!rl~illtfl
lit,. E4IthIt"'~"'k(.t /.... W,ille{il,tÏII~ ., lri~iasC~
. :tll
-",tt-rJf.De~"_B~1i
zitM.ai4,UlWitIf'itit8'.. il 'D&W,.,...
~II r,. ~"3r\u''''' ItfIllb,tJllDl&.."."
~ g.
DIio,~ , Ji BWil8tf""","" ~
u.: .Jà19.J.OeI0re (!J tllijs ij~d1..l«is.
.,.,n", idtlf;tnt~ JDrasAJt~~ g.
EtÜC~ltbc8iltt...~,.,. pircbri/W ~-!1!f!;;~ ~!fr~s,'t~ ,:i#I[4' C44li~$
f.ÙIM,t...Ilft8 """'lepri ':_r""i~.~6 pl4r: tÜep,f(llloclf,oru.
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~ .~.~~t) ellJitur. pict!~ tllJignifj
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3.1 - FIN GÉNÉRALE DE LA CONTROVERSE 179

Cette forme grammaticale n'a jamais réussi à convaincre les


traducteurs, pour les raisons suivantes: elle est peu usitée (on ne la
trouve pas dans la Bible); sa vocalisation est incertaine (Abner de
Burgos a d'ailleurs hésité entre les formes yehabe, yahabe, yahaba,
etc.); le sens est difficile à définir; et enfin cette forme (piel du
verbe être) n'a joué aucun rôle dans les commentaires bibliques ou
talmudiques sur le Nom.
Ainsi, à partir du ISe siècle, quelques traducteurs ont accès
au débat sur le Nom. Bien qu'ils ne l'aient pas utilisé dans leurs
écrits, des commentateurs bibliques au 17e siècle précisent que des
traducteurs comme Johannes Heynlin de Lapide (1430-1496), qui
imprima la première Bible française en latin (1476), ou encore
Johannes Wessel Gansfort (1419-1489), penchaient pour la forme
lehoua. Ce qui se révélera déterminant pour vaincre l'hésitation des
traducteurs entre les formes lehoua et loua sera l'ouvrage de Pierre
Galatin. En effet, il rappela en citant Le guide des égarés de
MaÏmonide que, puisque le Nom se prononce comme il s'écrit, on
obtient loua (il notait que le rapprochement avec le nom lovis,
l'ancien nom de Jupiter, était fortuit). Cette forme loua était
différente du substitut Adonaï que les Juifs prononcent lorsqu'ils
lisent le Tétragramme.
lDeum IIDlcum ml .. ZC 013 pr£ .th a i 0 cs. m IDOD.
.
€APNIO ».Îc Qbfeao:hOcDOIDmquatuorlitcruum~Ut Ccripti
cI.'-'cuc JitGfipfifODlllt:quomodoprofcatUr.CALA TlN ys.
~~ a DOftrÎI:Hunt: hoc110111CD in DOtlris Iitrris {OD2f~Io1Ul.A
.
quo dicuœ forte Ipud aDtiquos DOllIeD louis ilJCPfilc Sed muimc
~fe&tocrriuhuiufm6igétilitatisblaifcmii ta !mao Domiaiinfaéta.

~
NODA~ q1lâUOr literr gtpuaaat£fUDt)cgm(rouapddUDU
(~( ut ipcoptimc:DOfti)Imou dficiüt.9uislud£i illu probÜCÏ8r
C ut
raïfti é.DÔaudcéfcd loco :. . 'P4~~" idéé5~ Dii&S~fc. .

ni *Ut~ iUudia noftrisJitftÏs.~oall'e cotâldunt :


Il considérait cependant que la forme loua était trop
approximative par rapport à la vocalisation massorétique des autres
noms propres hébraïques. Par exemple, lorsqu'ils commencent par
la forme pleine YHW - en hébreu, ces noms sont toujours vocalisés
leho-, bien qu'on puisse effectivement les abréger en YW -, c'est-à-
dire 10-, comme lehosua en losua, etc. Cette démonstration
marquera une étape importante dans l'établissement du nom divin
Iehoua, ce qui encouragera quelques traducteurs à l'utiliser dans
leur traduction de la Bible, au moins dans quelques versets.
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180 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

lituam 6mul perf'Dcopamaufcrri.Nam aép]i snü:a~rrnM' ebuda.


no Dung m1' luda at:fcribit' «,pniicia(:& 3'",", Ichofua~ loruz.
It pn1' Irhoiacmn l':1\' Ioizchin Beo-LznnrcbiJim ~n tillim..&
rdiqUJ multa id gmUS.Q.!!Od']i~ ~UOCJinhocnomine Dei
.
mapo fieri uolunt Qya a re,iIlud loua pud DOS(onarc iDfmanb
~m iDco Caul Jittrahé litcr:tm~ unsprzcedât.Qyod fi ucrum
rflmipfum nomen DOb M!M: f£d ill' 1iQCfcma a he litera Ccribaetur.
apue apud Talmudiltas..lpfum igi( nomé Dà tdr.agrammltOD cum
(cma at he litera quz Iman habet afpiratioDé, Be{aibi proDunciari.
'"
IIfCtffceft. uarr ~Ca11t nœj ~o~ tOIW'Caffirm:mr.
,~d
NOb mi loua D Icoua, c Iehoua m ICDIIplratione.licut fai,.-

William Tyndale utilisera ce nom dans sa Bible en 1530,


Pierre Robert Olivétan en 1535, etc. Par la suite, d'autres
traducteurs franchiront définitivement le pas en l'utilisant dans tout
le texte biblique (R. Estienne en 1556, C. de Reina en 1569, etc.).
Cependant, si le nom lehoua avait eu en loua un rival complice, il
n'en sera pas de même avec une nouvelle forme qui apparaît vers le
début du 17e siècle: le nom lahue.

3. 1.5 Deuxième dilemme: lehoua ou lahue?


Le débat de savoir s'il fallait utiliser lehoua ou loua avait
été une querelle feutrée d'hébraïsants. Cependant, lorsque la forme
victorieuse commencera à atteindre le grand public, le débat
changera de nature pour devenir beaucoup plus théologique et
polémique. Le premier qui lança les hostilités fut l'archevêque
Gilbert Génébrard, dans son livre écrit en 1569 pour défendre la
Trinité, dans lequel il consacra plusieurs pages à démontrer les
erreurs de S. Casteillon, P. Galatin, S. Pagnin, etc.
Tout d'abord, il attaqua la forme loua utilisée par Casteillon
en rappelant que saint Augustin avait expliqué grâce à l'écrivain
Varron que les Juifs avait adoré loue (Jupiter!), et que l'emploi de
loua était donc un retour au paganisme. Il indiquera même dans sa
préface des commentaires sur les Psaumes que ce nom loua était
barbare, fictif et irréligieux. Concernant les témoignages de
Clément d'Alexandrie (Iaou), de Jérôme (Iaho), de Théodoret
(Iabe), il considérait qu'ils reflétaient des formes altérées de loue, et
de toute évidence ces témoignages lui apparaissaient comme peu
fiables, car trop tardifs puisque les Juifs ne prononçaient plus le
Nom depuis plusieurs siècles. Enfin, il reprocha à P. Galatin (et à S.
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3.1 - FIN GÉNÉRALE DE LA CONTROVERSE 181

Pagnin), qui avait utilisé la forme lehoua, de n'avoir tenu aucun


compte de la signification théologique "Il est" pour retrouver la
vocalisation. En effet, depuis la traduction de la Septante, on savait
que le nom divin signifiait essentiellement "Il est". Génébrard
chercha à confirmer cette définition grâce à ses connaissances de la
langue hébraïque. Ainsi, puisque Dieu se désigne en Exode 3: 14
par l'expression "Je suis", (en hébreu Ehie), on devrait dire en
parlant de Dieu "Il est", c'est-à-dire en hébreu fihié. À cause des
lois linguistiques, il était probable que cette forme Iihié provînt
d'une forme plus archaïque fehué. Génébrard faisait alors
remarquer que l'abbé Joachim de Flore avait utilisé cette forme
plus exacte (feue) dans son livre sur l'Apocalypse.
La démonstration de Génébrard, à défaut de s'imposer,
impressionna beaucoup par son érudition; d'ailleurs, pendant le
siècle qui suivra, les commentateurs bibliques citeront souvent à
côté de lehoua cette forme lehue (ou liheue). Toutefois, malgré
l'aspect brillant de la démonstration, celle-ci restait spéculative à
cause de l'absence de témoignages (par la suite, pour pallier cette
lacune, les théologiens protestants réhabiliteront les témoignages
historiques des premiers siècles). L'innovation majeure de
Génébrard fut ainsi d'introduire la signification théologique du
Nom dans la recherche de sa vocalisation, procédé qui engendra (la
connaissance de la langue hébraïque et de son histoire augmentant)
un foisonnement de formes vocalisées inédites.
!~ Par exemple. Jan Drusius (1550-1616) ~blia en 1603 un
long article consacré à la vocalisation du Nom. Ses principaux
arguments étaient: la ponctuation massorétique du Tétragramme ne
peut servir à vocaliser le Nom, puisqu'il s'agit d'un qeré; ainsi la
forme lehovih (provenant du qeré elohim) serait une absurdité. Il
en concluait que lehovah était aussi un barbarisme. Il reprit les
mêmes arguments que Génébrard contre la forme loua, puis il
rappela que l'expression "Il est" devait se vocaliser leheve selon les
meilleurs grammairiens de l'époque. Effectivement, on trouve cette
forme dans les thesaurus de Jean Mercier (?-1570) et de Sanctes
Pagnini (1470-1541) sous la forme hébraïque YèHèWèH, futur qal
araméen "Il sera" que l'on vocalise actuellement YiHWèH. Ensuite il
supposa, en donnant quelques exemples, que la forme leheve (ou
lihveh) provenait d'un lahave (ou Iahveh) archaïque, et pour finir il
constata que cette forme ~ahave était identique à la prononciation
samaritaine lave donnée par Théodoret. Louis Cappel (1585-1658)
consacra339 presque une centaine de pages à la vocalisation du
Nom dans un article publié en 1650. Tout en reprenant de
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182 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

nombreux arguments de Drusius, il précisa quelques points. Il


confirma que le début était certainementl en Iah-, car de nombreux
noms avaient perdu leur voyelle initiale, comme Nabô qui était
devenu Nebô, mais il insista sur le fait que les témoins les plus
anciens (donc les plus fiables) étaient principalement en Iaô; il
pencha donc pour une forme lahuoh, plutôt que lahave ou lahue.
La forme lahué finira cependant par l'emporter sur toutes
les autres pour deux raisons importantes; tout d'abord, elle
conservait le début en la- des témoins anciens (elle s'appuyait aussi
sur la forme complète donnée par Épiphane, Théodoret et Clément
d'Alexandrie), et surtout il était possible de l'associer à une forme
grammaticale commençant par Ya- signifiant "Il causera à être" ou
"Il fera exister" (hypothétique futur hiphil, actuellement vocalisé
YaHaYèH provenant d'un archaïque [?] YaHaWèH). ~
Cette construction extrêmement sophistiquée pour justifier
la forme Yahwèh déstabilisa certains traducteurs qui avaient utilisé
le "simpliste" Iehoua. Cependant, la connaissance de la langue
hébraïque progressant toujours, certains linguistes se sont aperçus
que le son -èH ne pouvait être archaïque puisqu'il provenait d'un
son -aH plus ancien. Le débat s'enflamma de nouveau, certains
proposant Yahw-ah pour être en accord avec cette nouvelle donnée,
d'autres proposant Yahwo-h, au motif que c'était la lettre W qui
avait servi de voyelle, comme dans les noms Jéricho-h ou Nebo-h.
Bien évidemment, cette querelle de linguistes sur la
vocalisation du Nom sema le trouble chez la majorité des
traducteurs (et pour éviter de prendre part à cette polémique, la
plupart des éditions scientifiques actuelles refusent de vocaliser le
Tétragramme et reviennent à la forme "muette" YHWH.)

3.1.6 Dernier dilemme: lehoua ou YHWH?


Pour justifier le choix de YHWH (nom imprononçable) à la
place d'une forme vocalisée, un traducteur invoque généralement le
doute et le respect œcuménique (!) de la tradition juive (maintenant
bimillénaire) concernant l'interdiction de prononcer le Nom. Si ces
arguments étaient valables, pourquoi ne pas les appliquer aussi au
nom Jésus, qui deviendrait de la même manière YSW'? Cette forme
aurait même l'avantage d'être un choix théologique plus cohérent
avec la graphie YHWH! Cependant, comme on le voit, le nom
YSW' se lit leSÛa sans difficulté (en hébreu), comme il s'écrit, de
même que YHWDH qui se lit IeHÛDA et que YHWH qui se lit
IeHÛA, à moins d'aimer la controverse!
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183

3.2 Conclusion sur le Nom


Le nom de Dieu ressemble en quelque sorte à l'épée,
coincée dans l'enclume, de la légende de Merlin l'Enchanteur. Bien
que tous les hommes puissants du royaume de l'époque aient voulu
se l'approprier, seul un jeune homme naïf réussit à l'arracher de
l'enclume, ignorant la difficulté.de par sa naïveté. De même, dans le
passé, les enfants pouvaient lire le Nom sans difficulté, puisque ce
nom se prononçait comme il s'écrit. L'affaire prit une tournure
amusante lorsque les Massorètes décidèrent de revocaliser le texte
hébreu et choisirent, par un cheminement long et complexe, de
pointer ce nom avec les voyelles e., 0, a. En fait, pour revenir au
conte, l'épée était magique et Merlin veillait bien sur elle pour
éviter qu'un imposteur s'en empare. De même, Celui qui a fait
écrire la Bible a promis de veiller sur elle (Ps 12:6, 7) pour la
préserver. Vu l'importance qu'il accordait à son nom, on peut
penser qu'il a fait de même pour celui-ci.
Comme le faisait remarquer Maïmonide dans son ouvrage
Le guide des égarés, il est impossible de nouer des relations
profondes avec un Dieu (Èlohim) anonyme. Juda Hallévi exprima
les mêmes idées dans son livre Le Kuzari, en précisant que
connaître le Dieu des philosophes n'implique de toute façon aucun
culte, sinon une reconnaissance polie de l'existence de ce créateur.
Ces deux auteurs étaient parfaitement d'accord pour reconnaître
que ce qui différenciait le Dieu d'Abraham du Dieu d'Aristote
c'était son nom, un nom unique et pas simplement un titre ou un
qualificatif honorifique comme Dieu, Seigneur, Tout-Puissant, mais
un nom propre, le Tétragramme YHWH. D'ailleurs, quand on veut
connaître quelqu'un qui semble attirant, la première question ne
concerne-t-elle pas justement son nom? Le "comment vous
appelez-vous?" est souvent les prémisses d'une relation que l'on
espère heureuse.
Alors comment s'appelle Dieu? Car YHWH, ou la
transcription latine IHVH, est imprononçable dans nos langues
modernes. La transcription grecque IEUE a l'avantage d'être
prononçable, mais le grand prêtre dans le Temple au premier
siècle, pour lire la bénédiction en Nombres 6:24-27, ou Jésus dans
sa lecture d'Isaïe 61: 1 dans la synagogue de Nazareth,
prononçaient ce nom eri hébreu. Maïmonide, qui connaissait
l'hébreu, savait aussi, grâce à sa fantastique connaissance du
Talmud, que ce nom fut interdit seulement au 2e siècle, au temps
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184 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

d'Abba Shaül, mais qu'avant la prêtrise de Simon le Juste (au 3e


siècle avant notre ère) ce nom était utilisé, même en dehors du
Temple. Comment était-il prononcé? Maïmonide ne s'attarde pas
sur cette question puisque, à juste raison, il considérait que le culte
rendu à Dieu était plus important qu'une prononciation, de toute
façon sans difficulté, le Nom se prononçant selon ses lettres. Juda
Hallévi précisait même que pour prononcer les mots hébreux on
avait besoin de rajouter les voyelles qui étaient justement les lettres
du Tétragramme, soit I pour le Y, 0 pour le W et A pour le H en
final. Donc, le seul nom hébreu dont on connaît toutes les voyelles
est le Tétragramme, et, comme le notait Havius Josèphe, ce nom est
unique' puisqu'il est constitué, non de quatre consonnes, mais de
quatre voyelles (soit IHOA, car le H n'est voyelle qu'en fin de mot).
Dans la Bible, refuser de prononcer le nom d'un dieu c'est
refuser d'accorder un culte à ce dieu. C'est pour cette raison que les
Israélites ne devaient jamais mentionner le nom d'autres dieux (Ex
23:13; Jos 23:7), montrant ainsi qu'ils refusaient le culte de ces
dieux. Puisque refuser de prononcer son nom, c'est refuser
d'accorder un culte au dieu ~oncemé, Satan, par le moyen des
prophètes de Baal, va pousser les Israélites à ne plus prononcer le
Tétragramme (Jr 23:27). L'Histoire lui donnera malheureusement
raison (Jr 44:26). Jérémie avait pourtant rappelé que le refus de
prononcer le Nom coûterait la vie, même à un non-Israélite,
lorsque Dieu interviendrait pour déverser sa fureur (Jr 10:25). Oui,
ce jour-là, il sera impératif de crier ce nom pour être sauvé (JI 2:32,
Rm 10:13).
Aujourd'hui, la situation n'a guère changé, les prophètes de
Baal sont toujours là. Ils prétendent toujours servir le vrai Dieu,
mais refusent de le nommer, sous différents prétextes. Certains
objectent par exemple que c'est une très lourde responsabilité que
de nommer Dieu. Effectivement, la lettre à Timothée précise que
dans ce cas il faut renoncer à l'injustice (2 Tm 2: 19); cela n'en
vaut-il pas la peine?
D'autres affirment qu'ils seraient prêts à l'utiliser s'ils en
connaissaient la prononc~ation exacte. Mais que veulent-ils dire par
"exacte"? La réponse est alors: "La prononciation du temps de
Moïse (voire même encore avant!), c'est-à-dire la vraie
prononciation." En plaçant la barre aussi haut, même le champion
du monde devient hors course (il est cependant amusant de
remarquer que le tétragramme écrit en hiéroglyphes, trouvé à
Soleb et daté du 14e siècle avant notre ère, se lit Yehoua en lecture
conventionnelle!) En remontant aussi loin dans le temps, ils
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3.2 - CONCLUSION SUR LE NOM 185

considèrent par conséquent que la prononciation utilisée par les


grands prêtres dans le Temple (au premier siècle), et par Jésus dans
sa lecture à haute voix du texte d'Isaïe, n'était pas valable. En
agissant ainsi, ils deviennent plus royalistes que le roi. En effet, le
grand prêtre d'Israël, la plus haute autorité pour les Juifs, et Jésus,
fondateur du christianisme et la plus haute autorité pour les
chrétiens, ne prononçaient pas le nom correctement; ce serait un
comble, on en conviendra!
Certains se retranchent derrière l'impossibilité de connaître
la prononciation exacte du Nom au premier siècle. Cette dernière
objection est réfutable, car, comme on l'a vu d'après le texte
massorétique, à cette époque, les noms théophores qui ont une
partie d~ Tétragramm~ intégrée à leur début se prononçaient tous,
sans exception, YeHO-. Par conséquent, puisque le Tétragramme
est le nom théophore par excellence (sinon l'absurde serait roi), sa
lecture devait être YeHÔ-aH, pour être cohérente avec l'ensemble
des autres noms théophores, car il s'écrit YHW -H.
Certains objecteront que les témoins grecs de la
.
prononciation du Nom au premier siècle sont tous en Iaô. En effet;
cela prouve d'abord qu'on cherchait encore à prononcer le nom de
Dieu à cette époque. Cependant, ces témoignages concordants
évoluent avec le temps, confirmant ainsi la prononciation du
substitut hébreu Yahou (ou de son équivalent araméen YaW) et non
du Tétragramme, principalement réservé au Temple. En effet, avant
-200, la Septante évite le nom Iaou; de -200 à 150, on trouve des
témoins en Iaô; puis de 150 à 300, des témoins en Iaüé
apparaissent; et enfin après 300 ces témoins deviennent Iahé. En
fait, on pourrait dire sans être trop méchant que cela reflète assez
bien la prononciation araméenne du nombre 16 (YW), que les Juifs
ne prononcent d'ailleurs plus aujourd'hui.
Pour renforcer cette observation, on constate que les
témoins de cette époque, qui avaient accès à la prêtrise, sont eux
aussi concordants; de plus, ces témoignages proviennent de
personnes qui connaissaient la prononciation au Temple et qui
savaient qu'on utilisait ailleurs un substitut. Le premier témoin est
le Talmud, qui précise qu'avant la destruction ce nom se prononçait
comme il s'écrit (ou selon ses lettres) dans le Temple. Le deuxième
témoin est Flavius Josèphe, qui précisait que ce nom, prononcé
dans le Temple, était écrit avec quatre voyelles. Ces remarques bien
sûr n'ont de sens qu'en hébreu. Au premier siècle, on vocalisait les
mots hébreux avec le système suivant: Y servait pour le son Il É, W
pour le son Ûl 0, et H pour le A en fin de mots. Par exemple, le
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186 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

nom divin YH est lu lA, le nom YHWDH = IHÛDA, le nom YSW'


= ISÛa', etc. On peut améliorer légèrement ces prononciations
pour mieux entendre certaines consonnes: ainsi, le nom I-H-Ù-D-A
devient I-eH-Û-D-A, le nom I-S-Û-a' devient I-eS-Û-a', et la
prononciation I-H-Û-A du Tétragramme devient l-eH-Û-A.
C'est grâce à ces remarques, comprises par les hébraïsants
seulement vers la fin du 12e siècle, que les érudits chrétiens
retrouvèrent la prononciation du Nom, et non par une lecture
fautive du Tétragramme dans la Bible hébraïque, comme beaucoup
de spécialistes le croient encore (on aurait eu dans ce cas la forme
Yehouah plutôt que lehoua). Certes, il est paradoxal que les
Massorètes aient décidé de choisir le pointage e, 0, a, puisqu'ils
prononçaient ce nom Adonay. Le "hasard" a voulu qu'ils
choisissent d'abord les voyelles e, a du mot araméen Shema' (Le
Nom). Avec le temps (après 1100), sous l'influence de la voyelle 0
commune à Adonay et à Èlohim, cela a provoqué un "mélange",
transformant le groupe e, a en e, 0, a.
Les "prophètes de Baal" modernes objectent alors que c'est
accorder beaucoup trop d'importance au texte biblique et que de
toute façon il y a trop d'inconnues, faisant paradoxalement de leur
doute une certitude. Selon cette conception, on peut affirmer que
le texte biblique a dû évoluer à partir de quelques sources
primitives (qu'il est impossible de préciser et de dater!), et que le
Nom lui-même a dû évoluer à partir d'une source archaïque (qu'il
est impossible de préciser et de dater!), qui pourrait être Yah. En
fait, la théorie de l'évolution est omniprésente à chaque étape du
raisonnement. Comme on le sait, selon cet "évangile de l'évolution",
ce n'est plus Ève qui fut la première femme, mais Lucy. La Bible
avait pourtant mis en garde contre cette conception des choses,
comme on peut le lire en Psaume 100:3, car celui qui croit à
l'évolution ne bénira plus le Nom (Ps 100:4).
Il est intéressant de savoir que la théorie des sources fut
accouchée par un médecin français340 en 1753, et la pierre de
touche de sa démonstration fut le nom divin. En effet, puisque
dans la Bible Dieu était appelé soit lehouah, soit Elohim, il en
déduisit qu'il y avait eu deux dieux (Iehouah et Elohim) et donc au
moins deux sources!
Attaquant sur le terrain biblique, les "évolutionnistes"
objectent que le patriarche Abraham ne pouvait bénir et invoquer
ce nom, puisque Moïse, cinq siècles plus tard, posa à Dieu cette
question: «Quel est ton nom?» (Ex 3: 13), ce qui prouve que ce
nom n'était pas connu avant. Le passage d'Exode 6:3 semble
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3.2 - CONCLUSION SUR LE NOM 187

appuyer cette conclusion puisqu'on y apprend que Dieu ne s'était


pas fait connaître à Abraham concernant son Nom. Cependant, en
affirmant cela, les "évolutionnistes" endossent les habits du
théologien, car ils interprètent la réponse biblique. Or, Moïse ne
posa pas cette question (!), mais celle-ci: "S'ils me demandent
qu'est-ce que son nom? Que leur répondrai-je?" La question porte
sur la signification ("qu'est-ce que" [pronom hébreu mâ]) et non
sur la prononciation ("quel est" [pronom hébreu mî]), comme en
Juges 13: 17, où Manoah posa bien cette question, car il ignorait
effectivement le nom de l'ange (Jg 13:6). Comme le fait remarquer
Juda Hallévi, Pharaon lui-même connaissait ce nom puisqu'il a
demandé: «Qui est Yehouah?» (Ex 5:2). Cependant, il en ignorait
visiblement le renom. Finalement, comme le démontre Maïmonide,
c'est obligatoirement ce sens de "renom", comme en Genèse 6:4,
Nombres 16:2, etc., que le mot "nom" possède en Exode 6:3; sinon
il faudrait admettre que la révélation de la prononciation aurait
poussé les Israélites à l'action, ce qui est absolument contraire à la
raIson.
En fait, la Bible fait la distinction entre la prononciation et
la réputation. Pour reprendre la question du Pharaon, la réponse
qui lui fut faite met bien en évidence ces deux aspects du nom:
appellation et réputation. En effet, on peut lire en Exode 9: 16:
«C'est pour cela que je t'ai laissé exister: c'est pour te faire voir ma
force [et donc ma réputation] et afin qu'on proclame mon nom
dans toute la terre.» Ainsi, même si ces deux aspects sont fortement
liés, on ne peut les mélanger comme le font ceux qui confondent la
prononciation Yehouah avec sa réputation, c'est-à-dire avec sa
signification religieuse ("Il sera"). Cette définition provient de la
déclaration de Dieu qui se désigne par "Je serai" (Ex 3: 14). Il est
alors logique de conclure qu'on dirait en parlant de Dieu: "Il sera"
(en hébreu "Yihyèh" ou "Yahwèh?"), écart normal puisqu'on ne
raisonne pas sur le même niveau. On constate en effet que le nom
bien connu Yehoudah (prononciation) ressemble, mais ressemble
seulement, à sa signification Yôdèh ("Il louera"); de même le nom
Yéshoua' (prononciation) ressemble à sa signification Yôshia' ("il
sauvera"); etc.
Cette confusion entre la prononciation et la réputation
entraîne la confusion entre Dieu et Jésus. Il est vrai que l'on peut
lire la phrase suivante: «Dieu l'a élevé (Jésus) à une position
supérieure et lui a donné volontiers le nom qui est au-dessus de
tout autre nom.» (Ph 2:9). Certaines notes bibliques précisent que
Jésus reçoit ici le nom de Dieu. Manifestement, une fois de plus, il
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188 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

y a confusion entre le nom et le renom, pour au moins trois


raisons. Tout d'abord, Jésus avait déjà Ireçu le nom de Dieu bien
avant ce récit, puisqu'il disait selon Jean 17: Il,12: «Père Saint,
veille sur eux à cause de ton nom que tu m'as donné.» Cependant,
comme Jésus n'a jamais été désigné par le Tétragramme, même par
ses disciples, il faut comprendre, comme il le précisa d'ailleurs lui-
même: «la gloire que tu m'as donnée» (Jn 17:22). Cette
équivalence du nom de Dieu avec la gloire de Dieu est ancienne
(Ex 33:18, 19; Is 42:8). Deuxièmement, le nom de Jésus a toujours
été distinct du nom de Dieu, comme le confirme le dernier livre de
la Bible chrétienne (Ap 3: 12; 14:1). Troisièmement, même la Bible
affirme que le "nom de Dieu" n'est pas au-dessus de tout, puisque
"la parole de Dieu" est au-dessus de son nom (Ps 138:2). Alors,
pourquoi Jésus précisa-t-il que Dieu lui avait donné son nom? Que
signifie exactement cette expression dans la Bible?
L'explication est fort simple! Quand quelqu'un donne son
nom à un autre, cela signifie simplement qu'il autorise cette
personne à signer ou à parler en son nom. C'est d'ailleurs le sens
que la Bible donne à cette expression -(I R 21:8; Est 3: 12; 8:8, 10;
Le 10:17). Cette délégation de son nom à une autre personne, cette
procuration l'autorisant à parler ou à signer en son nom, accorde
au délégataire l'autorité et donc aussi une part de la gloire du
délégateur. Par exemple, Dieu a placé son nom sur son peuple (Nb
6:27; Ac 15: 14), c'est-à-dire qu'il l'autorisait à parler et à agir en
son nom (Ex 5:23; Dt 10:8; 18:5,7; 1 S 17:45). Cette autorisation
juridique de parler en son nom pouvait, dans certains cas, devenir
permanente, quand le nom était placé, non plus sur, mais dans (Ex
23:21; 1 R 9:3; 2 R 21:4, 7). Cependant, comme on peut le
comprendre, cette équivalence juridique d'autorité entre le
délégataire
.
et le délégué peut parfois devenir ambiguë.
Évidemment, si le délégataire outrepasse ses droits, l'autorité
du délégateur n'est pas engagée (Dt 18:19-22; Ac 19:13-16). Mais,
ce cas mis à part, l'action du délégataire reste valable, même si elle
paraît étrange à certains (Mc 9:38, 39). Il est évident, lorsqu'on lit
«Salomon lui a bâti une maison» (Ac 7:47), «Yarobam bâtit
Sichem» (1 R 12:25), «Caïn (...) entreprit de bâtir une ville» (Gn
4: 17), que les personnes citées n'ont fait que donner
Uuridiquement) leur nom à des actions qu'elles n'ont pas
personnellement accomplies. Dans certains cas, cependant, cette
ambiguïté peut devenir paradoxale. Par exemple, Jacob, après avoir
acheté légalement son droit de premier-né à Esaü (Gn 25:33), peut
ensuite "juridiquement" dire à son père: «Je suis Ésaü ton premier-
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3.2 - CONCLUSION SUR LE NOM 189

né.» (Gn 27: 19). De la même façon, on peut confondre les


délégateurs Jean et Jacques (Mc 10:35) avec leur délégataire, leur
mère (Mc 10:20). De même, on peut confondre l'officier
délégateur (Mt 8:5) avec les anciens qu'il a délégués (Le 7:3); et,
plus généralement dans la Bible, il y a confusion Uuridique) entre
l'ange de Dieu (Gn 16:7) et Dieu lui-même (Gn 16:13).
Bien évidemment, les anges parlaient au nom de Dieu;
d'ailleurs le mot ange signifie en hébreu "messager". Cependant, la
Bible fait une différence entre ces porte-parole occasionnels et le
porte-parole personnel de Dieu (Is 63:9), qui possède lui une
autorité permanente puisque le nom même de Dieu est en lui (Ex
23:21). Cet ange pouvait donc être "juridiquement" désigné par le
nom de Jéhovah (Gn 18:2, 22, 23; 19:1); cependant, pour éviter
toute méprise, cet ange refusa de donner ce nom (Gn 32:29; Jg
13: 18) lorsqu'on le questionna, pour éviter une confusion
dommageable entre la personne "juridique" et la personne
"authentique" de Dieu. Ce comportement n'est pas unique dans la
Bible. Par exemple, Moïse, bien qu'il fût établi Dieu
"juridiquement" (Ex 4: 16; 7: 1), n'a jamais prétendu être Dieu;
néanmoins la loi de Moïse est aussi juridiquement la loi de Dieu.
De même, certains hommes furent établis "juridiquement" dieux
(Ps 82:6; Jn 10:34, 35), mais eux non plus n'ont jamais prétendu
être des dieux, même si "juridiquement", lors des jugements, ils
représentaient Dieu (Dt 1:16, 17).
Cet aspect juridique du nom est capital pour éviter les
confusions. Ainsi, la Bible ne se contredit nullement lorsqu'elle dit
qu'on «ne peut voir la personne [authentique] de Dieu et vivre» (Ex
33:20, 23; Jn 1:18); par contre, certains hommes pourraient voir la
personne [juridique] de Dieu et vivre (Ex 33: Il; Gn 32:24, 28-30;
Jg 13:22; Jn 14:9). Dans ce dernier cas, on comprend que ceux qui
ont vu Uuridiquement) Dieu ont en fait vu (physiquement) un de
ses représentants. Ainsi, les paradoxes disparaissent, puisque
lorsque Dieu donne son nom à des anges ou à des humains il les
autorise simplement à parler en son nom comme porte-parole.
Cette procuration peut être occasionnelle ou permanente, restreinte
ou étendue, Dieu étant évidemment celui qui fixe les limites des
pouvoirs qui découlent de l'utilisation de son nom. Recevoir le
nom en soi (Ex 23:21), c'est recevoir les pleins pouvoirs (Mt
28:18). I

Le personnage puissant qui a reçu le Nom est identifié à


Jésus par les chrétiens. Pour les Juifs d'aujourd'hui, seul le Messie
sera en mesure de révéler la prononciation du Tétragramme. Or,
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190 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Jésus avait affirmé en Hébreux 2: 12: «Je veux annoncer ton nom à
mes frères.» Cependant, cette promesse honcemant le nom de Dieu
n'a laissé aucune trace au premier siècle; ce ne pouvait donc être
qu'une prophétie. Effectivement, le prophète Mika avait annoncé
que dans la période finale des jours chacun marcherait au nom de
son dieu, mais que son peuple marcherait au nom de Yehouah (Mi
4.1,5).
Les Juifs pensaient aussi que l'expression "avoir le nom en
soi ", si elle devait être comprise avant tout dans un sens symbolique
(l'autorité de ce personnage), devait aussi avoir un sens littéral,
comme la plupart des prophéties bibliques. Cependant, la tradition
juive (!!agiga 15a; Sanhédrin 38b) a identifié progressivement ce
personnage puissant à l'ange Métatron, de son vrai nom Yahôel,
d'où on a déduit que le nom de Dieu devait être Yahôh. Si les Juifs
avaient reconnu en Jésus le Messie, ils auraient déduit, suivant ce
même raisonnement, que le nom qui est phonétiquement en
Yéshoua' est Yéhoua. Ce nom Yahô avait l'inconvénient de ne pas
bien coller avec le nom Yehoudah, car le Talmud (Sota lOb, 36b)
précise que le nom de Dieu était aussi dans ce nom. Effectivement,
les Évangiles confirment que Juda reçut en son temps une grande
autorité (Mt 2:6; He 7: 14). De plus, on constate que le nom qui est
phonétiquement en Yehouda est encore Yehoua. Il est intéressant
de savoir que des chercheurs israéliens ont montré que "l'ange de la
face" (Is 63:9) était appelé Yôshoua par les judéo-chrétiens, et non
Métatron ou Yahoel, et que c'est pour cette raison que les Juifs
utilisent toujours ce nom "Jésus" (Yôshoua) dans les invocations
rituelles juives du nouvel an341.
Que la controverse sur le Nom trouverait son dénouement
dans la période finale des jours, c'est ce qu'indique à de
nombreuses reprises le prophète Ézékiel par cette expression:
«Alors ils sauront que je suis Yehouah.» Les Évangiles indiquent
aussi clairement que Jésus est venu pour détruire les œuvres du
Diable (1 Jn 3:8) et finalement réduire à rien le personnage lui-
même (He 2: 14) dans la période finale. Cependant, la controverse
entre ces deux personnages est-elle ancienne? Si oui, les Écritures
hébraïques en parlent-elles? En fait, dans sa prescience, Dieu avait
fixé dès le début comment finirait cette controverse. Fait plus
extraordinaire, il l'avait même révélé par écrit, sans craindre d'être
mis en échec, annonçant dès les temps anciens que le puissant
Behémot écraserait en apothéose la dernière tête du Léviathan.
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191

3.3 Aimer la vérité, le Nom, et l'encens


Aimer Dieu, c'est aussi aimer la vérité (2 Th 2: 10), soit sous
sa forme orale (Jn 14:6), soit sous sa forme écrite (Jn 17: 17), la
Bible. De toute façon, ces deux formes se confondent (Jn 1:14;
8:42, 47). Comment reconnaître la vérité? D'après la Bible, la vérité
a une odeur particulière (2 Co 2: 14-16) qui attire les uns et
repousse les autres. En effet, d'après cette lettre aux Corinthiens, les
vainqueurs répandaient de l'encens, brûlé durant le cortège
triomphal. Cela signifiait pour eux l'apothéose de la victoire; et cet
encens "sentait" donc la gloire et l'honneur. Par contre, pour les
vaincus, cet encens devenait une odeur de mort, car il leùr rappelait
leur exécution à venir.
La Bible accorde beaucoup d'importance à l'encens, qui
symbolise l'intimité des relations spirituelles avec Dieu. Pour cette
raison, on devait utiliser de l'encens en permanence dans le culte au
Temple; et cet encens devait être unique, sous peine de mort (Ex
30:7, 37, 38). Préparer une prière, c'est préparer de l'encens (Ps
141 :2); faire une prière, c'est faire brûler de l'encens (Ap 5:8).
Cependant, l'odeur de cet encens spirituel était agréable seulement
si le nom de la personne qui priait avait lui-même une bonne odeur
(Qo 7: 1). Si le nom d'un sage était comparable à une huile
parfumée à cause de sa sagesse (Qo 10: 1; Ph 4: 18), le nom d'un
méchant était puant (Gn 34:30) en raison de sa pourriture (Pr
10:7). Par conséquent, le nom du Sage suprême ne pouvait être
que d'un parfum très agréable pour les sages.
Cette idée centrale est développée dans le Chant des Chants
de Salomon. En effet, aussi bien les juifs que les chrétiens ont vu
dans ce chant d'amour indéfectible de la bergère pour son fiancé le
reflet de l'attachement indéfectible du peuple choisi pour son Dieu.
Et ce chant magnifique commence par cette expression: «Ton nom
est comme une huile parfumée qu'on répand.» (Ct 1:3). Il y a en
hébreu un jeu de mot entre le mot "ton nom" (Shemè}ç,a) et "tes
huiles parfumées" (Shemanè}ç,a), car le nom de Dieu est
comparable à un encens. Ce mot "encens" se dit en hébreu
"Qetourah", comme le nom de la femme qui consola Abraham (Gn
25: 1), et on peut comprendre que, pour Abraham, sa femme
Qetourah avait vraiment un, nom encens, un nom qu'il aimait. Pour
Abraham, cela va de soi, le nom de Dieu était le Nom Encens par
excell ence.
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RnneHe
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4.1 - LISTE DES ABRÉVIATIONS, LEXIQUE, ALPHABET 195

. Liste des abréuiations:

A.S.O.R. American Schools of Oriental Research; Newhaven


B.A.S.O.R. Bulletin of the American Schools of Oriental Research; Newhaven
B.LO.S.C.S Bulletin of the International Organization for the Septuagint and
Cognate Studies; LISA
B.O.S.E.B. Bibliothèque Œcuménique des Sciences et Études Bibliques; Paris
C.A.T.A.B. Centre d'Analyse et de Traitement Automatique de la Bible; Lyon
C.R.A.I.L. Comptes Rendus de l'Académie des Inscriptions & Belles-Lettres;
Pari s
E.B.O.R.C. Études Bibliques et Orientales de Religions Comparées~ Leiden
H.t T.C.r\. Hebrew lInion College Annual; Cincinnati
I.E.J. Israel Exploration Journal; Jerusalem
J.B.L. Journal of Biblical Literature; Philadelphie
J.J.S. Journal of Jewish Studies; Londres
J.s.e).T. Journal of the Study of the Old Testament; Sheffield
O.T.S. OudT estamentische Studien; Leiden
P.L. Patrologire Latina; Paris
R.B. Revue Biblique; Paris
\T.T. Vetus Testamentum~ Leyde
Z.A.W. Zeitschrift für die Alttestamentliche Wissenschaft; Berlin

Les abréviations des livres bibliques sont les mêmes que


celles de la Bible de Jérusalem. Les citations bibliques proviennent
de la Traduction du Monde Nouveau ou de la Bible de Jérusalem.
Les références au Talmud dans ce livre sont normalisées sur
deux éditions usuelles. Par exemple: Sota 40b; 7,6 fait référence à
80ta 40b dans: The Babylonian Talmud -I. Epstein. London 1948
et: Sota 7,6 dans: Le Talmud de Jérusalem -M. Schwab. Paris 1933

. Le Hique:
Ketib
Mot araméen signifiant "[ce qui est] écrit". Cette expression
désigne les consonnes du mot écrit, puisque avant le 6e siècle de
I
notre ère le texte biblique était écrit en hébreu sans ses points-
voyelles. Par exemple, le ketib du mot Molok (Ac 7:43) est MLK.
Les Massorètes auraient dû normalement ponctuer ce ketib
MoLoK (avec les voyelles 0, 0).
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196 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

Qeré

Mot araméen signifiant "[ce qui est] lu". Cette expression


désigne les voyelles (massorétiques) du mot à lire. Par exemple, le
qeré du mot Molok (1 R Il :7) est 0, è, qui sont les voyelles
(massorétiques) du mot BoSHèT qui signifie "honte" en hébreu.
Les traducteurs qui par ignorance mélangent le qeré ("honte") avec
le ketib (MLK) obtiennent la forme hybride MoLèK (par contre,
dans la Septante, on lit Molok).

Matres lectionis

Cette expression latine qui signifie "mères de lecture"


désigne principalement les trois consonnes Y, W et H, pouvant
servir de voyelles dans le texte pré-massorétique. Le Y sert pour
vocaliser le son I (ou É), le W pour le son Û (ou 0) et le H final
uniquement pour le son A (Û est prononcé "ou"). On dit que le
mot est en "écriture pleine" si ses voyelles sont indiquées par des
matres lectionis, sinon le mot est en "écriture défective". Par
exemple le mot DWD en écriture pleine se lit DOD (qui signifie
"bien-aimé") mais peut aussi se lire DaWaD en écriture défective.
Le nom David (DaWiD) est souvent écrit avec sa mater lectionis
(c'est-à-dire DWYD au lieu de DWD), ce qui permet de le
prononcer sans ambiguïté DaWID (on suppose qu'il y a une
alternance consonne-voyelle). En "écriture pleine" DL YLH se lit
(lecture selon ses lettres) DaLILA, HGR se lit HaGaR, YSHQ se lit
ISaHaQ, Y'QWB se lit l'aQOB, 'BRHM se lit 'aBaRaHaM, 'DM se
lit 'aDaM, YHWDH se lit IHÛDA, etc.

Étymologie religieuse

Cette expression désigne l'étymologie que donne le texte


biblique, et qui peut être différente de l'étymologie grammaticale
ou scientifique. Par exemple, le nom Noé signifie en hébreu
"repos", mais la Bible relie ce nom à l'idée de "consolation" (Gn
5:29). Pour éviter une confusion entre ces deux étymologies, on
précise alors que "repos" est l'étymologie scientifique, et que
"consolation" est l'étymologie religieuse ou biblique.
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4.1 - LISTE DES ABRÉVIATIONS, LEXIQUE, ALPHABET 197

Nom théophore

Nom propre qui contient, soit le nom divin Yah, soit une
partie du nom divin complet Yehowah. Par exemple, Yehô-natan et
EIi-yah sont des noms théophores.

Forme grammaticale

La "conjugaison" hébraïque d'un verbe se caractérise par


deux états (accompli et inaccompli) que l'on rend en français par
trois temps (passé, présent, futur), trois modalités (simple, intensive,
causative) et trois voix (active, passive, réfléchie). Par exemple,
pour le verbe hébreu "tuer" à l'état accompli, cela donne pour la
troisième personne du masculin singulier les sept combinaisons
suivantes (possibles) :

Forme Simple Intensive Causati ve


(accomplie) (énergi q uement)
Active qatal (qal) qittél (piél) hiqtil (hiphil)
il a tué il a tué éner. il a fait tuer
Passive niqtal (niphal) qouttal (poual) hoqtal (hophal)
il a été tué il a été tué éner. on l'a fait tuer
Réfléchie hitqattél (hitpaél)
il s'est tué éner.

La forme qal du verbe "tuer" en hébreu pour la troisième


personne du masculin singulier à l'état accompli est le mot qatal
dans le tableau ci-dessus, mot que l'on peut traduire par "il a tué".
(À l'état inaccompli la forme qal du verbe "tuer" en hébreu pour la
troisième personne du masculin singulier est le mot yiqtol qui peut
se traduire par le futur "il tuera" ou le présent "il tue".)
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198 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

IIRlphabet: I
Consonnes

tran grec valeur


hébreu nom , scr. ,
~Alèph
:l Béth b (J3) b
b B J3 bv
:J b (J3,u) v
~Gîmèl g r y g
J g (y) g/r
*1 Dalèth d (Ô;t) dit
d A ô d
, d (ô,8) dlz
jj Hé h h
ii h h
, Waw w (u,ou) w
1 \WI (u,ou) ouw
t Zayin z Z î; z
n Héth h h/kh
~Téth t T 't t
~Yôd Y (L) Y
~yy (L) iy
~Kaph k K K k
.; ~k X X kh
? Lamèd I A A I
~Mém m M f.t m
j Noun n N v n
,
~Ayin 'tg
0 Samèkh s ~(J s
~Pé p n 3t p
.... ~l? <I> <P
ph
~Tsadé ~ts
Qôph q (K) q
i' Résh r P p r
..,
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4.1 - LISTE DES ABRÉVIATIONS, LEXIQUE, ALPHABET 199

tv Sîn s ~a s
\D Shîn ~sh
n Taw t T 't t
ri Thaw t e 8 th
x -
~.... ; x
tp
'tV
ps

VoyeUes
. A
1 e e~" a re 0 0 OU Ü
(e)
Points-voyelles massorétiques
.
X X X X X X X
T .
X X X X
.. T:

Matres lectionis (avec leurs points-voyelles)


, , , r1* , ; 1
. T T

V oyelles grecques
E H A AY 0 Q OY Y
L E fl a au 0 m ou u
(E,fl)
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Notes bibliographiques
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4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 203

CHAPITRE 1.1

1Le Robert - Dictionnaire Universel des noms propres (préface) pp.I2,13


2Encyclopedia Universalis Art. Nom pp.384- 7
3F. Vigouroux - Dictionnaire de la Bible Art. Nom
Ed.Letouzey et Ané 1908 pp.1670-8
A. Westphal - Dictionnaire Encyclopédique de la Bible 3e édition Art. Nom
pp.224-6,294-6
o. Odelain R. Séguineau - Dictionnaire des noms propres de la Bible
Paris 1988 Ed. Cerf
L. Pirot A. Robert H. Cazelles - Dictionnaire de la Bible Supplément Art.
Onomastique
Ed. Letouzey et Ané 1960 pp.732-44.
M. Viller F. Cavallera - Dictionnaire de la Spiritualité Art. Nom
Ed. Beauchesne 1982 pp.398-4IO
A. Chouraqui - La vie quotidienne des hommes de la Bible
Ed.Hachette 1978 pp.146,308-10
R. de Vaux - Les Institutions de l'Ancien Testament
Ed. Cerf 1989 pp.74-8,165
Auxiliaire pour une meilleure intelligence de la Bible
New \'ork 1992 Ed. Watch Tower Bible and Tract Society pp.766-76,1086-9

CHAPITRE 1.2

4L. Pirot A. Clamer - La Sainte Bible Tome 1,2 Exode


Paris 1956 Ed. Letouzey et Ané p.84
50sty - Bible note sur Gen.3: 1
1973 Seuil p.40
6lJniversité pontificale de Salamanque
-Code de droit canonique annoté (Can.1172). Ed.Cerf/Tardy 1989 p.646

CHAPITRE 1.3

7Encyclopédie de l'Islam
Leyde 1960 Ed. E.J. Brill Tom.I p.418; Tom IV p.85

CHAPITRE 1.4

aD.N. Freedman - The Massoretic Text and the Qumran Scrolls: A Study in
Orthography. 1962 in Textus 2 p.91
9Herbert Marks -Biblical Naming and Poetic Etymology
in: Journal of Biblical Literature 114/1
1995 Ed. The Society of Biblical Literature pp.21-42
J. Barr - Etymology and the Old Testament
in: Oudtestamentische Studiën XIX. Leiden 1974 Éd. E.J. Brill pp. 1-28
10A. Strus - Nomen Omen
in: A.nalecta Biblica 80. Rome 1978 Éd. Biblical Institute Press pp. 82-89
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

204 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

11Uerbert Marks - Biblical Naming and PoetiF Etymology


in: Journal of Biblical Literature 114/1.
1995 Ed. The Society of Biblical Literature pp.21-42
J. Barr - Etymology and the Old Testament
in: Oudtestamentische Studiën XIX. Leiden 1974 Éd. E.J. Brill pp. 1-28
12J.B. Pritchard - Ancient Near Eastern Texts
Princeton 1969 Ed. Princeton University Press p.69 note 112
F.M.Th. Bohl in: Archiv für Orientforschung nOXI (1936) pp.191-218
13G.J. Thierry - The Pronunciation of the Tetragrammaton
Leiden 1948 O.T.S. vol.. V Ed. EJ. Brill pp.30-42
B. Alfrink - La prononciation 'Jehova' du tétragramme
Leiden 1948 O.T.S. vol.. V Ed. E.J. Brill pp.43-62
A. Lukyn Williams - The Tetragrammaton -Jabweh, Name or Surrogate?
Z.A.W. vol.54 1936 pp.262-9
F. Vigouroux - Dictionnaire de la Bible
Paris 1912 Ed. Letouzey et Ané pp.1220-42
F. Dunand - La transcription du tétragramme dans les traductions grecques de la
Bible. in: Papyrus grecs bibliques Volumina de la Genèse et du Deutéronome.
Le Caire 1966 Ed. IFAO p.39-64
B.D. Eerdmans - The name Jabu
Leiden 1948 O.T .S. vol.. V Ed. E.J. Brill pp.I-29
14J. Margain - Les particules dans le Targum Samaritain
in: Hautes études orientales n029
Paris 1993 Ed. Librairie Droz, Genève pp.177,256
K. Beyer - Die Aramaischen Texte vom Toten Meer
Gôttingen 1984 Ed. Vandenhoeck & Ruprecht pp.126-l28
15A. Saenz-Badillos - A History of the Hebrew Language
Cambridge 1996 Ed. Cambridge University Press pp. 152-154
16D. Barthélemy - Critique textuelle de l'Ancien Testament
in: Orbis Biblicus et Orientalis 50/3
Gôttingen 1992 Éd. lTniversitaires Fribourg p.667
17W. Randall Garr -Dialect Geography of Syria-Palestine 1000-586 B.C.E.
1985 Philadelphia Ed. Univ. of Pennsylvania Press pp.12,35-41,54-58,106-109
18A. Saenz-Badillos - A History of the Hebrew Language
Cambridge 1996 Ed. Cambridge lJniversity Press pp. 50-55
D.N. Freedman - The Massoretic Text and the Qumran Scrolls.: A Study in
Orthography. Ed. Textus 2, 1962 pp.88-102
D.N. Freedman K.A. Mathews - The Paleo-Hebrew Leviticus Scroll
Ed. A.S.O.R. 1985 pp.52-54,58,68,79,82
E. Qimron - The Hebrew of the Dead Sea Scrolls
in: Harvard Semitic Studies n029 Atlanta 1986 Ed. Scholars Press p.59
19G. Bergstrisser - Introduction to the Semitic Languages
Indiana 1995 Ed. Eisenbrauns p.8
2OE. Tov - Textual Criticism of the Hebrew Bible
Minneapolis 1992 Ed. Van Gorcum p.115
21D.N. Freedman K.A. Mathews - The Paleo-Hebrew Leviticus Scroll
1985 Ed. A.S.O.R. pp.55,56
22M. Bari G. Dorival O. Munnich - La Bible grecque des Septante
C.N.R.S. 1988 Ed. Cerf pp.159,160
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 205

23M. Burrows - The Dead Sea Scrolls of St. Mark's Monastry


New Haven 1950 Ed. A.S.O.R.
24E.L. Sukenik - The Dead Sea Scrolls of the HebrewUniversity
Jerusalem 1955 Ed. The Magnes Press
25G. Gertoux - In Fame Only? A Historical of the Divine Name
1998 Paris B.O.S.E.B. T594GER pp.31-33
26V.A. Tcherikover A. Fuks - Corpus Papyrorum Judaicarum
1957 Harvard lTniversity Press pp.132,133

CHAPITRE 2.1

27R. Labat A. Caquot M. Sznycer - Les religions du Proche-Orient


1970 Ed. Fayard-Denoël
- Prières de l'Ancien Orient
in: Documents autour de la Bible. Paris 1989 Ed. Cerf
28G. Contenau -De la valeur du nom chez les Babyloniens
in: Revue de l'histoire des religions LXXXI n° 3 1920 pp.316-324 G.
G. Contenau -La civilisation d'Assur et de Babylone
ln: Grandes civilisations disparues. Genève 1975 Ed. Famot pp.125,138,15O,185
29p. Barguet - Les textes des sarcophages égyptiens du moyen empire
in: Littératures anciennes du Proche-Orient n° 12
Paris 1986 Ed. Cerf pp.l07,211,269,287,303-09,359-63,461,664
3OR.J. Thibaud - Dictionnaire de mythologie et de symbolique Égyptienne
1996 Ed. Dervy pp.21,221,222
31Encyclopredia Universalis
Art. Égypte Religion p.l014
32G. Pettinato - The Archives of Ebla. An Empire Inscribed in Clay
New York 1981 pp.248,249,260,261,276-283
- Dictionnaire encyclopédique de la Bible
Turnhout 1987 Ed. Brepols pp. 1348-9
33D. Faivre - L'idée de Dieu chez les Hébreux nomades
Paris 1996 Ed. L'flarmattan p.197
34A. Finet - Y'ahvé au Royaume de Mari
in Res Orientales vol. V Bures-sur- Y'vettes 1993 p.20
35G. Pettinato - B~~RInterviews
in: Biblical Archaeology Review Sept./Oct. 1980 Vol.VI n05 pp.49-52
36B. Barwell Huffmon -Amorite Personal Names in the Mari Texts
Baltimore 1965 Ed. The Johns Hpkins Press pp.13-161
37R. de Vaux -Histoire ancienne d'Israël
Paris 1986 Éd. J. Gabalda pp.324,325
38J .B. Pritchard - .~ncient Near Eastern Texts
Princeton 1969 Ed. Princeton lTniversity Press p.69 note 112
F.M.Th. Boh) in: Archiv für Orientforschung nOXI (1936) pp.191-218
39J .A. Fitzmyer - The Aramaic Inscriptions of Sefire
in: Biblica et orientalia -19/ A
'
Roma 1995 Ed. Pontifico Istituto Biblico pp.18-20, 126 pl.IX
4OJ.B. Pritchard - Ancient Near Eastern Texts
Princeton 1969 Ed. Princeton University Press pp.553-555
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

206 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

41P. Barguet - Les textes des sarcophages égyptiens du moyen empire


I
in: Littératures anciennes du Proche-Orient n° 12.
Paris 1986 Ed. Cerf pp.176,189,196,267,
42c. Nims R. Steiner - A Polemical Poem from the Aramaic text in Demotic
script. in: Journal of Near Eastern Studies vo1.43. 1984 pp.89-113
43I.J. Gelb - Pour une théorie de l'écriture
1973 Aammarion pp.163-166
44J. Briend M.J. Seux - Textes du Proche-Orient ancien et histoire d'Israël
Paris 1977 Ed. Cerf p.89
45F .M. Cross - Newly Discovered Inscribed Arrowheads of the Il th Century
BCE. in: Biblical Archaeology Today 1990.
1993 Jerusalem Ed. Israel Exploration Society pp.533-542
46J. Naveh - Early History of the Alphabet
Jerusalem 1982 Ed. The Magnes Press p.89 note 52
47p. Joüon T. Muraoka -A Grammar of Biblical Hebrew Part One
in: Subsidia biblica - 14/1Roma 1993 Ed. Pontifico Istituto Biblico p.l28 ~41e
48E. Lipinski - Formes verbales dans les noms propres d'Ébla et système
verbal sémitique. in: La lingua di Ebla. Seminario di Studi Asiatici XIV
Napoli 1981 Ed. Istituto Universitario Orientale pp.191-210
49B. Bardwell Buffmon - Amorite Personal Names in the Mari Texts: A
structural and Lexical Study
Baltimore 1965 Ed. The Johns Hopkins Press pp.64,76,82
SOS. Moseati - An Introduction to the Comparative Grammar of the Semitic
Languages. Wiesbaden 1980 Ed. o. Harrassowitz pp.141-143
51J. Barr - Sémantique du langage biblique
Paris 1988 Éd. Cerf pp. 1-22

CHAPITRE 2.2

52B. Albrektson -On the Syntax of iT'~ i~ ~~ in Exodus 3: 14


in: Words and Meanings.
Cambridge 1968 Ed. Cambridge lTniversity Press pp.15-28
53James Barr -Sémantique du langage biblique
Paris 1988 Ed. Cerf pp.78,79,132;133
54J. Orr -The International Standard Bible Encyclopaedia Vol. II
Grand Rapids 1984 Ed. WM. B. Eerdmans Publishing CO. p.1266
55A. Strus -Nomen Omen
in: Analecta Biblica 80. Rome 1978 Éd. Biblical Institute Press pp. 82-89
56M. Reisel - The Mysterious Name of Y.H.W.H
in: Studia Semitica Neerlandica. Assen 1957 Ed. Van Gorcum pp.41,52
57J. Leelant - Les fouilles de Soleb
in: Annuaire du Collège de France 1980-1981 pp.474-475
J. Leelant - Les fouilles de Soleb
in: Nachrichten der Akademie der Wissenscaften in Gôttingen I 1965 pp.205-216
58J. Leelant - Le "Tétragramme" à l'époque d'Aménophis III
in: Near Eastern Studies. Wiesbaden 1991 Ed. Otto Harrassowitz pp.215-219
M.C. Astour - \'ahweh in Egyptian Topographic Lists
Bamberg 1979 in: Festschrift Elmar Edel pp.17-32
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 207

59J.B. Pritchard - Ancient Near Eastern Texts


Princeton 1969 Ed. Princeton University Press p.242
6OW.A. Ward - A New Look at Semitic Personal Names and Loanwords in
Egyptian. in: Chronique d'Égypte LXXI( 1996) N° 141
Ed. Fondation Égyptologique Reine Élisabeth Bruxelles pp.17-47
61J.D. Fowler - Theophoric Personal Names in Ancient Hebrew
in: J.S.O.T. Supplement n049 Sheffield 1988 Ed. Academic Press pp.122-125
.
CHAPITRE 2.3

62J. Huehnergard - Ugaritic Vocabulary in Syllabic Transcription


in: Harvard Semitic Studies n032. Atlanta 1987 Ed. Scholars Press pp.236-239
René Labat - Manuel d'épigraphie Akkadienne
Paris Ed. Librairie Orientaliste Paul Geuthner S.A. p.101
Gary A. Rendsburg - Eblaitica: Essays on the Ebla Archives and Eblaite
Language. Indiana 1990 Ed. Eisenbrauns pp.96,,97,,111,l16,l18
63Z. Meshel- Kuntillet 'Ajrud a Religious Centre From the Time of the Judaean
Monarchy on the Border of Sinai.
Jerusalem 1978 The Israel Museum Cat. n° 175 pp.1 0-24
Z. Meshel C. Meyers - The Name of God in the Wilderness of Zin
in. Biblical Archeologist March 1976 pp.6-10
64J .M. Hadley
- Some Drawings and Inscriptions on Two Pithoi From Kuntillet
'Ajrud. in: VT XXXVII Leiden 1987 pp. 180-211
Amihai Mazar - Archaeology of the Land of the Bible
Ne\\' \'ork 1990 A.B.R.L. pp.446-451
65 F.M. Cross - The Seal of Miqnêyaw" Servant ofYahweh
in: Ancient seals and the Bible pp.55-63" PI.IX-X
Mali bu 1983 Congress International institute for Mesopotamian Studies" Undena
&3blications
W.G. Sever -Iron Epigraphic material From the Area of Khirbet EI-Kom
in: H.U.C.A. XL-XLI Cincinnati 1969-70 pp. 139-201
J.M. Hadley -The Khirbet El-Qom Inscription
in: V.T. XXXVII Leiden 1987 pp. 50-62
67p. Bar-adon -An Early Hebrew Inscription in a Judean Desert Cave
I.E.J Vol. 25 Jerusalem 1975 pp. 226-232
68J. Naveh -Old Hebrew Inscriptions in a Burial Cave
in: I.E.J. Vol.13 Jérusalem 1963 pp.74-92
J .A. Sanders -Near Eastern Archaeology in the Twentieth Century
in: Essays in honor of N. Glueck -New York 1970 pp. 299-306
A. Lemaire - Prières en temps de crise: Les inscriptions de Khirbet Beit Lei
in: RB L~XXIII Paris 1976 pp.558-.568
P .D. Miller - Psalms and Inscriptions
in: SVT XXXII Leiden 1981 pp.311-332
69G. Barkay - The Priestly Benediction on Silver Plaques From Ketef Hinnom
in Jerusalem. in: Tel Aviv Vol.19 n02 1992
R. Martin-Achard - RemarqJes sur la bénédiction sacerdotale
in: Études Théologiques & Religieuses Tome 70 1995/1 pp.75-84
70J. Bonsirven - Textes Rabbiniques des deux premiers siècles
Roma 1955 Ed. Pontificio Istituto Biblico pp.50-51
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

208 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

71y. Aharoni -I.E.J. Vol.16 n° 1


Jérusalem 1966 pp. 1-7
72y. Aharoni -Arad Inscriptions
Jerusalem 1981 Ed. The Israel Exploration Society pp. 1-35
73E.M. Blaiklock R.K. Harrison -The New International Dictionary of
Biblical Archaeology. Michigan 1983 Ed. Regency p.284
A. Lemaire -Inscriptions hébraïques Tome I, Les Ostraca
ln: Littératures anciennes du Proche-Orient n09 Paris 1977 Ed. Cerf pp.93-143
74J.G. Février -Histoire de l'écriture
1984 Ed. Payot p. 213
75G.I. Davies - Ancient Hebrew Inscriptions, Corpus and Concordance
Cambridge 1991 Ed. Cambridge University Press pp.366-367
76K.A.D. Smelik -Writings from Ancient Israel
Westminster pp.150-186
77L.D. Vincent -Les épigraphes Judéo-araméennes postexiliques
in: Revue Biblique LVI Paris 1949 Ed. J. Gabalda pp.274-294
78J.A. Fitzmyer -A Wandering Aramean
California 1979 Ed. Scholars Press pp. 82 ~95, 181 ~69
7gB.G. May -An Inscribed Jar from Megiddo
1933 In: American Journal of Semitic Languages L,pp.l0-14
8Op. Benoit J. T. Milik R. de Vaux -Les grottes de Murabbaât
Oxford 1961 Ed. Clarendon Press p.100
81A. Van den Branden -Grammaire Phénicienne
1969 Beyrouth Éd. Librairie du Liban pp.5,6
82D.N. Freedman -The Massoretic Text and the Qumran Scrolls. A Study in
Orthography. Ed. Textus 2, 1962 pp.88-102
D.N. Freedman K.A. Mathews -The Paleo-Hebrew Leviticus Scroll
Ed.A.S.O.R. 1985 pp.52-54,58,68,79,82
83A. Lemaire -Inscriptions hébraïques Tome I, Les Ostraca
in: Littérature anciennes du Proche-Orient n09 Paris 1977 Ed. Cerf pp.47,48,253
84L.D. Vincent -Les épigraphes Judéo-araméennes postexiliques
in: Revue Biblique LVI Paris 1949 Ed. J. Gabalda p.277 note 4

CHAPITRE 2.4
85M. Dadas- Lebel - Histoire de la langue hébraïque
1986 Ed. Publications Orientalistes de France pp.95-105
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in: Littératures anciennes du Proche Orient n05. Paris 1972 Ed. Cerf
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1989 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities pp.XLIV,64,74,75
88A. Dupont-Sommer - \Taho et Yaho-Sebaoth sur les ostraca araméens inédits
d'Éléphantine. in: C.R.A.I..L. 1947 p.175-191
89F.I. Andersen A. Dean Forbes -Spelling in the Hebrew Bible
Rome 1986 Ed. Biblical Institut p.324
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 209

9OK. Beyer -Die aramaischen Text,vom Toten Meer


Gôttingen 1983 Ed. Vandenhoek Ruprecht p.451
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91J.D. Fowler -Theophoric Personal Names in Ancient Hebrew
in: J.S.O.T. Supplement n049. Sheffield 1988 Ed. Academic Press pp.325-364
M.D. Silverman - Religious Values in the Jewish Proper Names at Elephantine
in: Alter Orient und Altes Testament.
Vluyn 1985 Ed. Verlag Butzon & Bercker Kevelaer pp.215 221
B. Porten A. Vardeni - Textbook of Aramaic Documents from Ancient Egypt,
2 Contracts
1989 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities pp.XL VIIXL VIn
B. Porten A. Vardeni - Textbook of Aramaic Documents from Ancient Egypt,
3 Literature
1993 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities pp.L VII,LVIII
92Codex Vaticanus gr.244 folio 2r
Codex lTrbinatus gr.84 folio 215r
93y. Aharoni - Excavations at Ramath Rahel 1954
in: LEJ. vo1.6 n03 1956 pp.I44-151
Y. Aharoni - Excavations at Ramath Rabel 1961-62
Roma 1964 Ed. Centro di studi semitici pp.20-46 pl.19,20
94G.I. Davies - Ancient Hebrew Inscriptions, Corpus and Concordance
Cambridge 1991 Ed. Cambridge University Press pp.25,364,365
95J. Naveh - The Development of the Aramaic Script
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96U. Rappaport - The First Judean Coinage
1981 in: Journal of Jewish Studies 32 pp.I-17
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Jerusalem 1982 Ed. The Magnes Press pp.112-119
97E. Stern - The Material Culture of the Land of the Bible in the Persian Period
Jerusalem 1973 Ed. LE.S. pp.200-205
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in: Cathedra 24 Jerusalem 1982 Ed. Yad Izhak Ben-Zv i Publications pp.4-29
98F. Moore Cross - Judean Stamps
in: Eretz-Israel vol.9. Jerusalem 1969 Ed. LE.S. pp.20-27
Y. Meshorer S. Qedar -The Coinage of Samaria in the Fourth Century BCE
in: Numismatic Fine Arts International. Jerusalem p.43
99L. Mildenberg - 'Yehud: A Preliminary Study of the Provincial Coinage of
Judaea. in: Essays in honour of M. Thompson, Wetteren 1979 pp.183-1%
A. Kindler - Silver Coins Bearing the Name of Judea from the Early Hellenistic
Period. in: LE.J. vol.24 n02 1974 pp.73-145
100S.A. Cook - The Yahu Coin
in: Z.A.W. vo1.5.6 1938 pp.268,-271
101N. Avigad - A New Class of Yehud Stamps
in: LEJ. vol.7 n03 1957 pp.146-153
102C.C. McCown - Tell En-Nasbeh, Archaeological and Historical Results
New Haven 1947 Ed A.S.O.R. pp.I56-174 pl.57
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

210 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

103J. Maltiel-Gerstenfeld - 260 years of Ancient Jewish Coinage


Tel Aviv 1982 Ed. Kol printing service pp.41,4!,103-109
Y. Meshorer -A Treasury of Jewish Coins from the Persian Period to Bar-
Kochba. Jerusalem 1997 Ed. Yad Izhak Ben-Zvi Publications pp.171-256
104S. Moscati -L'epigrafia Ebraica antica,1935-1950
Roma 1951 Ed. Pontificio Istituto Biblico pp.88-91
1050. Oiringer -Le Iscrizioni antico-ebraiche Palestinesi
1934 Firenze pp.128-137
L.D. Vincent -Les épigraphes Judéo-araméennes postexiliques
in: Revue Biblique LVI Paris 1949 pp.274-294
M. Oelcor -Des diverses manières d'écrire le tétragramme sacré dans les anciens
documents hébraïques. in: Études bibliques et orientales de religions comparées
Leiden 1979 Ed. E.J. Brill pp.22-24
106J. Naveh -Dated Coins of Alexander Janneus
Jerusalem 1968 in: Israel Exploration Journal N° 18 pp.24,25
107Z. Zevit - A Chapter in the History of Israelite Personal Names
in: B.A.S.O.R. 250 pp.3-14
108A. Caquot -Charges et fonctions en Syrie-Palestine
in: Comptes rendus de Janvier-Mars 1986.
Paris. Éd. Académie des Inscriptions & Belles-Lettres pp.305-307
109B. Porten A. Yardeni - Textbook of Aramaic Documents from Ancient
Egypt, 1 Letters. 1989 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities pp.67-70
&-Porten A. Yardeni - Textbook of Aramaic Documents from Ancient Egypt,
3 Li\erature
1993 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities pp.258,259
110E.M. Laperrousaz - La Palestine à l'époque Perse
Paris 1994 Ed. Cerf pp.245-260
111Eusèbe - Préparation évangélique XIII,12,1
in: Sources Chrétiennes n0307 Paris 1983 p.311
112A. Pelletier - Lettre d'Aristée à Philocrate
in: Sources Chrétiennes n089 Paris 1962 Ed. Cerf pp.234-237
113Menahem Stern - Greek and Latin Authors on Jews and Judaism Tom.!
Jerusalem 1976 Ed. The Israel Academy of Sciences and Humanities pp.20-44
114M. Amandry - Le monnayage des royaumes Chypriotes
in: Dossiers d'archéologie n0205 Dijon 1995 Ed. Faton p.l04
115Deutsche Taler
1967 Ed. Germany's Federal Bank

(~HAP[TRE 2.5

116M. BarI - La langue de Japhet


Paris 1992 Ed. Cerf pp.267-75
M. Carrez -Manuscrits et langues de la Bible
1991 Ed.Société Biblique Française pp.32-47
117M. Dadas-Lebel - Histoire de la langue Hébraïque
1986 Ed. Publications Orientalistes de France pp.I48-158
118M. Hari G. Dorival o. Munnich - La Bible Grecque des Septante
1988 Ed. Cerf C~~S p.58
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 211

119Z. Aly L. Koenen - Three Rolls of the Early Septuagint: Genesis and
Deuteronomy. Bonn 1980 Ed. R.Habelt Verlag
120B.M. Metzger - Manuscripts of the Greek Bible
New York 1991 Oxford University Press pp.33-36,59-64
121p. Uarlé D. Pralon - La Bible d'Alexandrie 3 Le Lévitique
Paris 1988 Ed. Cerf pp.195, 196
122A. Pietersma - Kyrios or Tetragram: A renewed Quest for the Original LXX
in: De Septuaginta: Studies in honour of J.W. Wevers
1984 Ed. Beuben Publications pp. 99-1 01
123lTniversité de Louvain - Recueil Lucien Cerfaux Tome I
1954 Ed. J. Duculot S.A. Gembloux pp.149-172
124S. Haik Vantoura - La musique de la Bible révélée
Paris 1978 Ed. Dessain et Tolra
125L. Pirot - La Sainte Bible tome V
Paris 1937 Ed. Letouzey et Ané p.XXIII
126J.A. Fitzmyer - A WanderingAramean
California 1979 Ed. Scholars Press pp.88,89
127M. Reisel - The Mysterious Name of Y.H.W.H
in: Studia Semitica Neerlandica. Assen 1957 Ed. Van Gorcum pp.41,52
1281.£smanuscrits de la Mer -morte
in: Les dossiers d'archéologie n° 189 janvier 94 p.46
129E. Tov - From Nahal Hever 8HevXIIgr
Oxford 1990 Ed. Clarendon Press
130E.G. Turner -Theological Text
in: The Oxyrhynchus Papyri Vol.L, papyrus n03522
London 1983 Ed. Egypt Exploration Society pp.I-3; pl.I
131B. Porten A. Yardeni - Textbook of Aramaic documents from ancient
Egypt,3 Literature. 1993 Ed. Israel Academy of Sciences and Humanities p.XXXVI
132J.A. Fitzmyer -A Wandering Aramean
(:alifornia 1979 Ed. Scholars Press pp. 61 ,82 ~95,181 ~69
D.N. Freedman -The Massoretic Text and the Qumran Scrolls: A Study in
Orthography. Ed. Textus 2,1962 pp.88-102
D.N. Freedman K.A. Mathews- The Paleo-Hebrew Leviticus Scroll
Ed. A.S.O.R. 1985 pp.52-54,58,68,79,82
E. Qimron -The Hebrew of the Dead sea Scrolls
in: Harvard Semitic studies n029 Atlanta 1986 Ed. Scholars Press p.59
133K. Beyer -Die aramaischen Texte vom Toten Meer
Gôttingen 1984 Ed. Vandenhoeck & Ruprecht pp.126-128
134B. Cardauns -M. Terentius Varro Antiquitates rerum divinarum
Wiesbaden 1976 Ed. Akademie der Wissenschaf tom.! p.22 n017 tom.II p.l46
E. Norden - Varro über den Gott der Juden
Tübingen 1921 p.298
135p. W. Skehan -Qumran cave 4 IV
in: Discoveries in the Judaean Desert IX. Oxford 1992 Ed. Clarendon Press p.174
136Diodore de Sicile -Naissance des dieux et des hommes
Paris 1991 Ed. Les Belles Lettres p.112
137Irénée de Lyon -Contre les hérésies
Paris 1991 Ed. Cerf
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

212 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

138J.M. Robinson -The Nag Hammadi Library


Leiden 1988 Ed. E.J. Brill p.119 I
139A. le Boulluec -Les Stromates V
ln: Sources chrétiennes n0278,279 Paris 1981 Ed Cerf
140Tertullien -Contre les valentiniens
in: Sources chrétiennes n0280 . Ed. Cerf 1980 p. 115
141S.R. Driver -Recent Theories on the Origin and Nature of the
Tetragrammaton. in: Studia Biblica vol.l 1885 pp.1-20
142Biblica -vo1.22 1941 pp.339-355
R. Devreesse - Introduction à l'étude des manuscrits grecs
Ed. Paris 1954 pp.l08-111
Origène -Commentaires sur St Jean
in: Sources chrétiennes n0120 . Ed. Cerf 1966 p.213
Origène -Contre Celse
in: Sources chrétiennes n0147. Ed. Cerf 1969 p. 259
143Eusebii Pamphili - Demonstrationis Evangelica
in: Patrologire Grrecre XXII Éd. J.P. Migne Paris pp.334,766
144St Epiphane -The Panarion of St Epiphanius Bishop of Salamis
Ed. Oxford University Press 1990 p.79,114
145St Jerome -S. Hieronymi presbyteri opera
in: corpus christianorum Series Latina vol. LXXII (Psaume 8:2)
Ed. Brepols 1959 p.191
146N.F. Marcos A.S. Badillos -Theodoreti Cyrensis Quaestiones in
Octateuchum. Madrid 1979 Ed. Cardenal Cisneros p.112

CHAPITRE 2.6

147M. Nisard - De la langue latine IX,55


Paris 1875 in: Macrobe Varron Pomponius Méla Ed. Firmin-Didot p.561
148A. Dupont Sommer - Les écrits esséniens découverts près de la mer morte
1959 Ed. Payot pp.176,214
149J.A. Sanders -The Psalms Scroll of Qurnrân Cave Il
in: Discoveries in the Judaean Desert of Jordan IV
Oxford 1965 Ed. Clarendon Press pp.24-38
150M Delcor -Des diverses manières d'écrire le tétragramme sacré dans les
anciens documents hébraïques
in: Etudes bibliques et orientales de religions comparées.
Leiden 1979 Ed. E.J. Brill pp.I-29
L.U. Schiffman -The lIse of Divine Names
in: Sectarian Law in the Dead Sea Scrolls. Ed. Scholars Press pp. 132-154
151J.p. Siegel -The Employment of Palaeo-Hebrew Characters for the Divine
Names at Qumran in the Light of Tannaitic Sources
in: H.lJ.C.A. n042 1971 pp.159-172
152P.W. Skehan -The Divine Name at Qumran, in the Masada Scroll, and in the
Septuagint
in: B.LO.S.C.S. n013 1980 Ed. The Catholic University of America. pp.l4-44
153M. Burrows -The Dead Sea Scrolls of S1. Mark's Monastry
New Haven 1950 Ed. A.S.O.R.
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 213

154A. Sperber -A Grammar of Masoretic Hebrew


Copenhagen 1959 Ed. E. Munksgaard p. 183
E. Qimron -The Hebrew of the Dead Sea Scrolls
in: Harvard Semitic Studies n029 Atlanta 1986 Ed. Scholars Press p.21
155A. Lemaire -Le nom du Dieu d'Israël.
in: Le monde de la Bible N° 110. Paris avril 1998 pp.l0,11
156Flavius Josèphe - La guerre des Juifs (V,438) Tome III
1982 Ed. Les Belles Lettres p.172
157Flavius Josèphe -Les Antiquités Juives (11,275) ou (11,12,4 )
1992 Ed. Cerf p.130
158Flavius Josèphe -La guerre des Juifs (V,235) Tome III
1982 Ed. Les Belles Lettres p.142
159F.1. Andersen A.D. Forbes - Spelling in the Hebrew Bible
in: Biblica Orientalia 41 Rome 1986 Ed. Biblical Institut Press p.92
160A. Dupont-Sommer - La règle de la communauté VI,27-VII,2
in: Les écrits esséniens découverts près de la mer morte. 1959 Ed. Payot p.l64
Flavius Josèphe - La guerre des Juifs II,145
1980 Ed. Les Belles Lettres p.34
161E. Qimron -The Hebrew of the Dead Sea Scrolls
in: Harvard Semitic Studies n029 . Atlanta 1986 Ed. Scholars Press p.57
162R. Le Déaut -Targum du pentateuque II
in: Sources chrétiennes n0256. 1979 Ed. Cerf pp.32 ~12,49 ~5,220,22,457 ~23
163p. Joüon -Grammaire de l'hébreu biblique
Rome 1987 Ed. Institut Biblique Pontifical p.108 ~48d
164R.A. Nicholson -Studies in Islamic Mysticism.
1921 Cambridge p. 96
I. Goldziher -Die Richtungen der Islamischen Koranauslegung.
1952 Leiden pp.260-2
P. Benoit J.T. Milik R. de Vaux -Les grottes de Murabbaât
Oxford 1961 Ed. Clarendon Press pp.286-290
165AIi-Rhida ArCa - Quatre textes d'Ibn' Arabî, Abdol-Karîm et Gîlî
1978 Paris in: Dieu et l'être. Ed. Études Augustiniennes C.N.R.S. pp.191-202
166G. Scholem - Les grands courants de la mystique juive
1994 Paris Éd. Payot pp.81-83
167David B. Capes - Old Testament Yahweh Texts in Paul's Christology
1992 Tübingen Ed. J.C.B. Mohr p.170-172
168A. Crampon- La Sainte Bible
Paris 1905 Ed. Cie de Jésus p. 143 note 58
169A. Hamman -La vie quotidienne des premiers chrétiens
1971 Ed. Hachette pp.95-126
170M. Hari G. Dorival O. Munnich -La Bible grecque des septante
1988 Ed. Cerf/C.N.R.S. pp.274-288
171G. Howard -Biblical Archaeology Review Vol IV n° 1
march 1978 p.12-14
172S.C. Mimouni - Le judéoLchristianisme ancien, essais historiques
Paris 1998 in: collection Patrimoines Éd. Cerf pp.161-188
173M. Hadas-Lebel -Histoire de la langue hébraïque
1986 Ed. Publications Orientalistes de France pp.117-158
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

214 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

174p.E. Kahle -The Cairo Geniza


Oxford 1959 Ed. B. Blackwell pp.222-225
C.B. Roberts -Manuscript, Society and Belief in Early Christian Egypt
Oxford 1979 Ed. University Press pp.28-31
175L. Vaganay C.B. Amphoux -Initiation à la critique textuelle du Nouveau
Testament. 1986 Ed. Cerf pp.138-147
176M. Hari G. Dorival O. Munnich - La Bible grecque des Septante
1988 Ed. Cerf CNRS p.142-167
177F. Crawford Burkitt - Fragments of the Books of Kings According to the
Translation of Aquila. 1898 Cambridge pp.3-8
1780rigène - Selecta in Psalmos 2.2
in: Patrologire Greca XII pp.l1 03-11 04. Turnholti (Belgium) Ed. Brepols
1790rigène -Origenis Hexaplorum tomus II
(Psalm.XXVI,I~ XXVII..4,7~ XXVIII,I~Jesaias 1,2)
1964 Ed. Georg olms verlagsbuchhandlung Hildesheim pp.124,-127, 431
180G. Mercati Psalterii Hexapli Reliquiae.Pars prima. Codex Rescriptus
Bybliothecae Ambrosiane 039. Rome 1958 pp.l1,97,101
B.M. Metzger -Manuscripts of the Greek Bible
New York 1991 Oxford University Press pp.l08,109
181G. Howard - The Tetragram and the New Testament
1977 J.B.L. vo1.96 pp.63-83
182Carsten Peter Thiede - Qurnrânet les Évangiles
Paris 1994 Ed. F.X. de Guilbert pp.22,23, 112, 113
183B.M. Metzger -A Textual Commentary on the Greek new Testament
Stuttgart 1975 Ed. {]nited Bible Societies
184G.D. Kilpatrick -The Principles and Practise of New Testament Textual
Cri tici sm
in: Bibliotheca ephemeridum theologicarum lovaniensium XCVI;
Leuven pp.207-222
185J. Daniélou -Théologie du judéo-christianisme
1974 Ed. Desclée/Cerf pp.235-262
1860. Bertrand - Les Pères apostoliques
Paris 1991 in: Foi Vivante Ed. Cerf
187J.P. Audet - La Didachè, instructions des apôtres
in: Études Bibliques. 1958 Ed. J. Gabalda pp.188-191
188Dictionnaire Encyclopédique de la Bible
Paris 1960 Ed. Brepols Turhout pp.1700-04
N.Lewis Y.Yadin J.Greenfield -The Documents from the Bar-Kokhba
Period in the Cave of Letters
Jerusalem 1989 Ed. Israel Exploration Society pp.17 ,42,43,52,60,139,
189J. Daniélou -Théologie du judéo-christianisme
1974 Ed. Desclée/Cerf pp.235-262
190N.A. Dahl A.F. Segal -Philo and the Rabbis on the Names of God
in: Journal for the study of judaism . Leiden 1978 Ed. E.J. Brill pp.I-28
191Philon - De vita Mosis
in: Les œuvres de Philon d'Alexandrie n022. Lyon 1967 Ed. Cerf pp.243,251
192Philon - De mutatione nominum 11-15
in: Les œuvres de Philon d'Alexandrie n° 18. Lyon 1964 Ed. Cerf pp.37-39
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 215

193Philon - in: Les œuvres de Philon d'Alexandrie. Lyon Ed. Cerf.


1962 n019 p.119 - De somniis 1,230
1963 n07-8 p.117- De gigantus quod deus sit immutabilis 109
1965 n05 p.117- Quod deterius potiori insidiari soleat 160
1966 n015 p.249- Quis rerum divinarum heres sit 170
194Philon - in: Les œuvres de Philon d'Alexandrie. Lyon Ed. Cerf.
1964 n018 p.87- De mutatione nominum 121
195A. Wartelle - Saint Justin Apologies 1,10,11,61,11 1,63,1 II,12,4
in: Études Augustiniennes. Paris 1987 Ed. I..C.P. pp.109,183,185,205,215
196D. Barthélemy - Les devanciers d'Aquila
in: V.T.S. vol. X Leiden 1963 Ed. E.J. Brill pp.203-212
197M. Simon A. Benoit - Le Judaïsme et le Christianisme antique
1991 Ed. P.O.F. pp.I44-162
198J.M. Robinson - The Nag Hammadi Library
Leiden 1988 Ed. E.J. Brill pp.220-224
1995.C. Mimouni - Le judéo-christianisme ancien, essais historiques
Paris 1998 in: collection Patrimoines Éd. Cerf pp.475-493

CHAPITRE 2.7

200J .M. Robinson - The Nag Hammadi Library


Leiden 1988 Ed. EJ. Brill pp.38-52
201D. Barthélemy -Justin martyr. Œuvres complètes
Paris 1994 Ed. J.P. Migne pp.220,188
202A. Rousseau - Irénée de Lyon: Contre les hérésies 1,14,4 II,32,5 IVJ7,6
Paris 1991 Ed. Cerf pp.81,263,460
203C.H. Roberts - Manuscript, Society and Belief in Early Christian Egypt
Oxford 1979 Ed. University Press pp.26-48
204C. Rabin - University Library Cambridge
in: Textus vol. II 1962 Jerusalem Ed. Magnes Press
205I.osepho Cozza-Luzi -Prophetarum codex Graecus Vaticanus 2125
Rome 1890, Biblioteca Vaticana pp.205,509,588
206B.M. Metzger -Manuscripts of the Greek Bible
New '{ ork 1991 Ed~ Oxford lTniversity Press pp.35,94,95
207G. Stanton - Parole d'Évangile?
Paris 1998 Éd. Cerf Novalis pp.57,106-109,pI.9
208Textus vol I 1960 Ed. Magnes Press Jerusalem p.IV
S. Olofsson -The LXX version
ln: Coniectanea Biblica n030
Stockholm 1990 Ed. Almqvist & Wiksell Internationl p.49
209G.E. Weil -Fragment inédit de ms babylonien
in: Textus vol VI . Jerusalem 1968 Ed. Magnes Press pp.100-103
M.L. Klein -A Palestinian Fragment-Targum
In: Textus vol X. 1982 Jerusalem Ed. Magnes Press pp.28-31
A. Chester -Divine Revelation and Divine Titles in the Pentateuchal Targumim
Tübingen 1986 Ed. J.C.B. Mohr p.325
210A.S. Hunt -The Oxyrhynchus Papyri VII
London 1910 pp.l,2
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

216 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

211p.E. Kahle - The Cairo Geniza


Oxford 1959 Ed. B. Blackwell pp.318-335
212A. Abécassis -LamystiqueduTalmud
in: Encyclopédie juive. Paris 1994 Ed. Berg International pp.152,153
213Montfaucon - L'antiquité expliquée et représentée en figures vol.11
Paris 1722
K. Preisendanz -Papyri Graecae Magicae
I Leipzig 1928 II Berlin 1931 Stuttgart 1974 XVlla 1-2
Kopp -Paleographia critica vo1.3,4
Mannheim 1817-1829
C.W. King-The Gnostics and their Remains. London 1864
214M. Philonenko -L'anguipède alectorocéphale et le dieu laô
in: C.R.A.I.L. Paris 1979 Ed. Klincksieck pp.297-304
Campbell Bonner -Studies in Magical Amulets
Oxford 1950 Ed.University Press Pl.I-XXI
Hans Dieter Betz -The Greek Magical Papyri in Translation
1992 Ed. The University of Chicago press p. XLVII
A. Delatte Ph. Derchain - Les intailles magiques gréco-égyptiennes
Paris 1964
215J. Naveh - A Recently Discovered Palestinian Jewish Aramaic Amulet
in: Arameans, Aramaic and the Aramaic literary tradition.
Tel-Aviv 1983 Ed. Bar-Ilan University Press pp.81-88
J. Naveh S. Shaked - Amulets and magic bowls
Jerusalem 1985 Ed. Magnes Press pp.40-61
J.A. Montgomery -Aramaic Incantation Texts from Nippur
Philadelphia 1913 Ed. University Museum pp.145,146,165,209,210
216B. Alfrink -La prononciation 'Jehova' du tétragramme
in: O.T.S. vol V 1948 pp.43-62
Paf' gr. C~XI l.528-540 (3rd century) British Museum Library
21 J.M. Robinson - The Nag Hammadi Library
Leiden 1988 Ed. E.J. Brill pp.210,217
218Eusèbe de Césarée - Préparation Évangélique XI,6,36-37
in: Sources chrétiennes n0292. Paris 1982 ed. Cerf p.87
219J Margai n -Essais de sémantique sur l'hébreu ancien
.
Paris 1976 Ed. Geuthner p.173
M. Simon A. Benoit -Le judaïsme et le christianisme antique
Paris 1991 Ed. Presses Universitaires de France pp.50-20 1
220St Jerome - S. Hieronymi presbyteri opera
in: corpus christianorum Series Latina vol. LXXII (Psaume 8: 2)
Ed. Brepols 1959 p.19t
221Carl Wessely - Studien zur Palaeographieund Papyruskundevol.XI
Leipzig 1911 p. 171
222B.M. Metzger - Manuscripts of the Greek Bible
New 'York 1991 Ed. Oxford lTniversity Press pp.35
223Paul de Lagarde - Onomastica Sacra
Hildesheim 1966 Ed. Georg alms Verlagsbuchhandlung pp.205,206,230
224_ Ad tomum III operum S. Hieronymi appendix
in: Patrologire Latina XXIII Éd. J.P. Migne Paris 1845 pp.1275-1280
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 217

225Eusèbe de Césarée - La préparation évangélique 1,9,21


in: Sources chrétiennes n0206 Ed.Cerf Paris 1974 pp.179,303-305
226S.A. Kaufman - The History of Aramaic vowel reduction.
in: Arameans, Aramaic and the Aramaic literary Tradition.
Ramat-Gan 1983 Ed. Bar-l1an University Press pp.47-55
A. Dupont-Sommer - La tablette cunéiforme araméenne de Warka
in: Revue d'Assyriologie )L~XIX (1944) pp.60-61

CHAPITRE 2.8

227A. Deissmann - Die Septuaginta-Papyri


1905 Heidelberg Ed. Carl Winter's Universitatsbuchhandlung pp.86-93
228F. Bovon P. Geoltrain - Écrits apocryphes chrétiens
in: Bibliothèque de la Péiade. Paris 1997 Éd. Gallimard pp.317,1562-3
229Balthafar Corderius - Catena Petrvm Grrecorvm in Sanctvm loannem
Parisii 1630 Bibliothèque des Sources Chrétiennes Lyon p.244
230Eberhard Nestle - Jacob von Edessa über den Schem hammephorasch und
andere Gottesnamen. in: Zeitschrift der Deutschen morganIandischen Gesellschaft
Leipzig 1878 tom.XXXII pp.465-508,735
231S. Isidori Hispalnesis episcopi. - Etymolgiarum lib. VII
in: Patrologire Latina LXXXII Éd. J.P. Migne Paris 1859 pp.259-262
232Albini seu Alcuini. - Lib. De Divinis officiis caput XXXVIII-XXXIX
in: Patrologire Latina CI Éd. J.P. Migne Paris 1851 pp.I239-1244
233G.E. Weil P.Rivière M. Serfaty -Concordance de la cantilation
1978 Ed. C.N.R.S. C.A.T.A.B. pp.I-XVI
234p.E. Kahle - The Cairo Geniza
Oxford 1959 Ed. B. Blackwell pp.339-344
Israël Yeivin - Geniza Bible Fragments
Jerusalem 1973 Ed. Makar Publishing Ltd
Hermann L. Stack - Codex Babylonian of Petrograd
New York 1971 Ed. Ktav Publishing House
235p.E. Kahle - The Cairo Geniza
Oxford 1959 Ed. B. Blackwell pp.51-75
236D. Barthélemy - Critique textuelle de l'Ancien Testament
in: Orbis Biblicus et Orientalis Éd. Université de Fribourg 50/1
1982 p.*108~ 50/2 1986 p.*5~2
237p. Cassuto - Isomorphie consonantique et hétéromorphie vocalique
in: Bible et Informatique: méthodes, outils, résultats, Jérusalem 9-13 Juin 1988.
~on 1988 Ed. C.A.T.A.B. pp.177-207
Angel Sàenz-Badillos - A History of the Hebrew language
Cambridge 1996 Ed. Cambridge University Press pp.94-102
P. Joüon T. Muraoka - A Grammar of Biblical Hebrew
in: Subsidia Biblica 14/1.Roma 1993 Ed. Pontificio Istituto Biblico p.94 ~26e
239p .L.B. Drach De l'harmonie entre l'Église et la synagogue
Gent (Belgium) 1978 Ed. Socii' Sancti Michaelis pp.480,481
24Op. Joüon T. Muraoka - A Grammar of Biblical Hebrew. p.73 ~6
241p.E. Kahle-TheCairoGeniza
Oxford 1959 Ed. Basil Blackwell pp.318-32
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

218 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

242E. Levine - The Targum to the Five Megillot


Jerusalem 1977 in: Codex Vatican Urbinati I Ed. Makor Publishing Ltd

CHAPITRE 2.9
243p .E. Kahle - The Masoretic Text of the Bible and the Pronunciation of
Hebrew. in: J.J.S. n07 1956 pp.133-153
244D.N. Freedman A. D. Forbes F.I. Andersen - Studies in Hebre\\' and
Aramaic Orthography
San Diego 1992 in: Biblical and Judaic Studies pp.21,256-258
245p. Guillemette M. Brisebois - Introduction aux méthodes historico-
critiques. ln: Héritage et projet n035. Québec 1987 Ed.Fides pp.59-63
246Jerusalem 1971 O.S. Loewinger Ed. Makor Publishing
247Jerusalem 1976 M.D. Goshen Gottstein Ed. Magnes Press
248Copenhagen 1959 Alexander Sperber Ed Ejnar Munksgaard
249Jerusalem 1973 Israël Veivin Ed. Makor Publishing Ltd.
250Copenhagen 1956 Alexander Sperber Ed Ejnar Munksgaard
251New York 1971 Hermann L. Stack Ed. Ktav Publishing House
252Jerusalem 1980 E. Levine Ed. Makor Publishing Ltd.
253Jerusalem 1972 Israël Veivin Ed. Makor Publishing Ltd.
254Gn 3: 149:26 18: 17; Ex 3:2 13:3,9,12,15 14: 1,8; Lv 23:34 25: 17; Dt 31:27
32:9 33: 12,13~ 1 S 1: II; I R 3:5~ Jr 2:37 3: 1,21,22,23,25 4: 1,3,4,8~
5: 2,3,9,18, 19,22,29; 6:9~ 8: 13 30: 10 36:8; Ez 33:23 44:5 46: 13; Os 10:3; Na
1:3~ Ml 3:23~ Ps 15: 1 40:5 47:6 100:5 116:5,6~ Pr 1:29
2551 R 2:26~ Is 50:4; Jr 1:6 7:20; Ez 2:4 3: Il,27 5:5 8: 1 12: 10 13: 16 14:21,23
16:36 17:9 20:39 21:33 22:31 23:32 24:6,14~ 26:21 28:2 30:22 33:25 35: Il
36:2 39: 17 43:27 46: 16; Za 9: 14; Ps 73:28
256p. Kahle - Masoreten des Westens
Stuttgart 1927 Ed. V.V.W. Kohlhammer
p:..17/1 sheet 930 p. 19/3 sheet 946 p.24/8 sheet 1017
257Gilbert Dahan - Les intellectuels chrétiens et les Juifs au Moyen Age
Paris 1990 in: Patrimoines Judaïfme Ed. Cerf
258Petrus Alfunsus - Dialogi Petri Alphonsi ex jud~o christiani
in: Patrologi~ Latina CLVII Éd. J.P. Migne Paris 1854 pp.607-612
259petri Blesensis - Contra perfidiam Jud~orum
in: Patrologi~ Latina CCVII Éd. J.P. Migne Paris 1855 p.833
260M. Maimonide - Le guide des égarés
Paris 1979 in: collection "Les Dix Paroles" Ed. Verdier
2611200# Bible. Bibliothèque Nationale. BN 15392 fo1.42b,245
262J. Hallévi - Le Kuzari, apologie de la religion méprisée
Paris 1993 in: collection "Les Dix Paroles" Ed. Verdier
263Gioaeehino da Fiore - Expositio in Apocalypsim
Venise 1527 folio 37b,38
264L. Tondelli - Il Libro delle figure dell'abate Gioachino da Fiore
Torino 1953 Ed. Societa Editrice Internazionale tom.I pp.225,226 tom.!1
tav.Xla,Xlb
265Innoeentii III papœ - Sermones de sanctis. Senno IV, in circumcisione
domini. in: Patrologi~ Latina CCXVII Éd. J.P. Migne -Paris 1855 pp.465-470
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 219

CHAPITRE 2.10
266E. Longpré - Dictionnaire de Théologie Catholique
Paris 1924 Tome 8 pp.2467-2470
267Guillelmi de Mara - De hebrreis et grrecis vocabulis glossarum Biblire
1279 Bibliothèque Municipale de Toulouse ms.402 part 3 foI.230-280
268Raymvndvs Martini - Pvgio Christianorvm
Paris 1300? Bibliothèque Sainte Geneviève ms.I405 folio 162b
269Miehel Quereuil - La Bible française du XIIIe siècle
in: Publications romanes et françaises nOI83 Paris 1988 Éd. Droz pp.65-67
270Raymvndi Martini - Pvgio Fidei
Lyon 1651 Bibliothèque La Part Dieu. 21296 pp.448..514-546
271J. Carreras Artau - La Allocutio super Tetragrammaton de Arnoldo de
Vilanova. Madrid-Barcelona 1949 in: Sefarad 9 pp.75-105
272Poreheto de Salvaignis - Victoria Porcheti adversus impios Hebraeos
1380 Bibliothèque municipale de Dijon ms.231 folio 169
273M. Idel - Maïmonideet la mystiquejuive
in: Patrimoines judaïfme 1991 Paris Cerf pp.II-89
274A. Abulafia - Otsar Eden Ganouz.. ms. Oxford.. 1580.. fol. 16b-17a
275A. Abulafia - Maftéah ha-Raayon.. fiS. Vatican, 291, fol.21a
276A. Abulafia - Séfer ha-Edout.. ms. Rome, Angelica 38, fol. 14v-15r, ms.
Munich 285.. fol. 39b
277N. Séd - Celui qui est
in: Patrimoines 1986 Ed. Cerf pp.25-27
278Gershom Seholem - Le Nom et les symboles de Dieu dans la mystique juive
in: Patrimoines judaïsme 1988 Ed. Cerf pp.78-83
279D. Lortseh - Histoire de la Bible française
1989 Montreux Ed. P.E.R.L.E. pp.12-16
280Alfonso de Valladolid (Abner de Burgos) - Mostrador de Justicia
1350'1 Bibliothèque Nationale ms. Espagnol43 fol.l-l1
281paulus de San et a Maria - Additiones ad Postillam Nicolai de Lyra. Vol.I
1429 Bruxelles Bibliothèque Royale Albert 1er..ms.240 fo1.36-38
282Nieolai de Cusa - Opera omnia. Sermo I In principio erat verbum
Hamburg 1970 Ed. Felix Meiner. Academia Heidelbergensis Tom.XVI..l pp.I-19
Nikolaus de Cusa - Codex Cusanus 220 fo1.56,57
Berkastel-Kues (Germany) 1430 Bibliothek des Cusanus Stites
283Nieolai de Cusa - Opera omnia. Sermo XX Nomen eius Jesus
Hamburg 1977
Ed. Felix Meiner. Academia Litterarum Heidelbergensis Tom.XVI,3 pp.30 1-317
284Nieolai de Cusa - Opera omnia. Sermo XXIII, XXIV Domine, in lumine
vultus tui. Hamburg 1984
Ed. Felix Meiner. Academia Litterarum Heidelbergensis Tom.XVI,4 pp.358-433
285Nieolai de Cusa - Opera omnia. Sermo XLVIII Dies sanctificatus
Hamburg 1991 I
Ed. Felix Meiner. Academia Litterarum Heidelbergensis Tom.XVII,2 pp.200-212
286Nieolai de Cusa - Opera omnia. Sermo LXXI
Hamburg 199*
Ed. Felix Meiner. Academia Litterarum Heidelbergensis Tom.XVII,4 pp.
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

220 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

287Dionysii Carthvsiani - Enarrationes pirelac eruditre, in quinque Mofaique


1;is libros. Cap VI. 1534 British Museum Library 3837.g.7. folio CLVI
Marsilii Ficini Florentini - Liber de Chriftiana Religione. Capitum
XXX. Aorence 14711 British Museum Library C.9.b.4. fo1.83b
289Johann Reuchlin - De Verho Mirifico. liber III Cap. XII-XIX
BasIe 1494 British Museum Library IB.37366
290Jacques Lefèvre d'Étaples - Qvincvplex PfaIterium Cap. LXXII,CL
Lyon 1509 Bibliothèque La Part Dieu. Res.l05024 pp.l09, 127b, 143b, 148b,
231, 231b
291Ioannis Pi ci Mirandvlœ - Dispvtianvm adversvs astrologos liber V,VI
1496 Lyon. Bibliothèque La Part Dieu. inc.645 Liber V,VI
292Adrian Relandl J. Drusii - Decas exercitationum philologicarum de vera
~onunciatione Jehova. 1707 British Museum Library 1568/3014 pp.I48-150
3Sebastianvs Castalio - Dialogorvm sacrorvm
1549 Lvgdvni Bibliothèque La Part Dieu 800472 pp.l-60
294Sebastian Chateillon - La Bible novvelement translatée
1555 Bale Ed. Iehan Heruage Bibliothèque mun. de Toulouse Rés.A.XVI.68

CHAPITRE 2.11

295Petrus Galatinus - Opus toti chriftiane reipublice maxime utile, de arcanis


catholice ueritatis
~on 1518 Bibliothèque La Part Dieu. 100766 Liber II pp.XLI-LVIII
60livetanus Pierre Robert - La Bible
1535 Lyon Bibliothèque de la Part Dieu Rés.23748
297Johann Georg Walch -Samtliche Schriften. Sechster Theil, welcher die
Auslegungen [ ] propheten. Magdeburg 1741 column 1367,1393
298Johann Georg Walch - Samtliche Schriften. Zwanzigster Theil, welcher
die Schriften [ ] Türken. Magdeburg 1747 column 2528,2564,2565
299G.F. Moore - Old Testament & Semitic Studies Vol.I
in: Notes on the Name -1. The pronunciation Jehovah
3OOJ. Calvin - Sermons de M. lean CaIuin fur le V. Hure de Moyfe nommé
Deuteronome
Geneue 1567 Bibliothèque Lyon La Part Dieu 100830 pp.I84-190
301J. Calvin - Commentarii loannis Calvini in qvinqve libros Mosis
1573 Genevre Éd. Gaspard de Hus Bibliothèque Lyon La Part Dieu. 21321
3020livetanus Pierre Robert - Bible
1535 Bibliothèque de la Part Dieu Rés.23748
303Roberti Stephani - Liber Psalmorvm Davidis
1556 Bibliothèque de la Part Dieu 327510
304Sancte Pagnino - Biblia
1528 Lyon Bibliothèque La Part Dieu. Rés.317377
305Sancte Pagnino - Thefaurus Lingure fanctre
1548 Lyon Bibliothèque La Part Dieu. 341631 pp.223,418
~Adrian Relandl J. Drusii - Decas exercitationum philologicarum de vera
~onunciatione Jehova. 1707 British Museum Library 1568/3014
7M. Serueto - De trinitatis erroribvs
1531 Bibliothèque d'Aix en Provence Res.s.23 fo1.98-101
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

4.2 - NOTES BIBLIOGRAPHIQUES 221

~Angelo Caninio Anglarenfi - De nomine Iesv et lova


in: Institutiones lingua Syriacre 1554 Lyon Bibliothèque La Part Dieu. 349745(3)
309G. Genebrardo - S. Trinitate
1569 Lyon Bibliothèque La Part Dieu. 329938 pp.56-62
310B. Aria Montano - Davidis Regis (eo)Psalmi
1574 Parisiis Lyon Bibliothèque La Part Dieu 327652 pp.8,9
311Roberto Bellarmino - Institvtiones Lingvae Hebraicae
1596 Lyon Bibliothèque La Part Dieu. 811323 pp.183-188
312A. Strus -Nomen Omen
in: Analecta Biblica 80. Rome 1978 Éd. Biblical Institute Press pp. 17,82-89
313André Caquot - Les énigmes d'un hémistiche biblique
1978 Paris in: Dieu et l'être. Ed. Études Augustiniennes C.N.R.S. p.24 note 23
314B. Spinoza -Traité Théologico-politique
Paris 1965 Ed. GF Aamm~ion pp.59,231
B. Spinoza - Abrégé de grammaire hébraïque
Paris 1987 Ed. Librairie J. Vrin pp.25-27
P. Cassuto - La place de l'hébreu (Thèse n08716404 C)
1991 Lyon lTniversité J. Moulin Lyon III pp.97-99,333-6
315A. Fabre d'Olivet - Grammaire Hébraïque p.19 / Cosmogonie de Moïse
pp.28,67 -71. in: La langue hébraïque restituée. 1985 Ed. L'âge d'homme
31Sp.L.B. Drach - De l'harmonie entre l'église et la synagogue
1978 Belgium Ed. Socii Sancti Michaelis pp.370,473-498
317J.H. Levy - The Tetra(?)grammaton
in: The Jewish Quarterly Review Vol.XV (1903)
1966 Ed. Ktav Publishing House pp.97-99
318p. J oüon - Grammaire de l'Hébreu biblique
Rome 1923 Ed. Institut Biblique Pontifical p.49 ~ 16f note 1
319A. Westphal - Dictionnaire Encyclopédique de la Bible
Valence 1973 Éd. Imprimeries Réunies pp.294,295,839
320J.D. Eisenstein-O~Wikuhim
Israel 1969 pp.310-315
321G. Howard - Hebrew Gospel of Matthew
Georgia 1995 Ed. Mercer University Press pp.160,229-32
322Elias Hutter - Novum Testamentum Domini Nostri lesu Christi
Nuremburg 1599
323John Eliot - The Ne\\l Testament of Our Lord and Saviour Jesus Christ
Cambridge Massachuset 1661
324M. Taillé - Dieu et dieux: noms et Nom
1982 Ed. tTniversité catholique de l'ouest p.220
325A.J. Kolatch -Le livre juif du pourquoi
Genève 1990 Éd. MJR pp.IX,347

CHAPITRE 2.12
t

326W.E. Vine - An Expository Dictionary of New Testament Words


Nashville 1985 Ed. Thomas Nelson Publishers p.333
327p. Joüon T. Muraoka - A Grammar of Biblical Hebrew
in: Subsidia biblica 14/1 Roma 1993 Ed. Pontificio Istituto Biblico ~29h p.lOl
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

222 UN HISTORIQUE DU NOM DIVIN. UN NOM ENCENS

328G.I. Davies - Ancient Hebrew Inscriptions., Corpus and Concordance


Cambridge 1991 Ed. Cambridge University Press p.369
329B. Davidson - The Analytical Hebrew and Chaldee Lexicon
Massashussetts 1990 Ed. Hendrickson Publishers p.354
33OG. Scholem - Les grands courants de la mystique juive
1994 Paris Éd. Payot pp.81-83
331Eusebii Cœsarienisis - Commentaria in Psalmos
in: Patrologi~ Gr~c~ XXIII Paris 1857 Éd. J.P. Migne pp.99-100~685-8~ 702-4
332Ad tomum III operum S. Hieronymi apyendix
in: Patrologi~ Latina XXIII Paris 1845 Ed. J.P. Migne pp.1275-1280
333,. W. Skehan J.E. Sanderson Qumran Cave 4.IV Paleo-Hebrew and Greek
Biblical Manuscripts
in: Discoveries in the Judaean Desert IX Oxford 1992 Ed. Clarendon Press p.63
334E. Ulrich F.M. Cross Qumran Cave 4.VII Genesis to Numbers
in: Discoveries in the Judaean Desert XII
Oxford 19924 Ed. Clarendon Press pp.l01~212~213
335y. Yadin J.C. Greenfield - The Documents from the Bar Kokhba Period in
the Cave of Letters. Jerusalem 1989 Ed. Israel Exploration Society pp.19~162
336S.C. Mimouni - Le judéo-christianisme ancien~ essais historiques
Paris 1998 in: collection Patrimoines Éd. Cerf pp.237 note 4~ 239

CHAPITRE 3.1

337 Die Bibel


Vienna 1805 Ed. Johann Babor
338J. Drusii - Tetragrammaton sive de nomine dei proprio
1696 in: Critici Sacri Tom. VI,IX
Bibliothèque LC.L. de Lyon H-31-B-I-l/6 pp.2141-2189~ H-31-B-I-l/9 p.451
339Ioannis Cappelli - Critica Sacra
Paris 1650 Bibliothèque I.C.L. de Lyon A2631 pp.666-739

CHAPITRE 3.2

340Jean Astruc -Conjectures sur les mémoires originaux dont il paroit que
Moyse s'est servi. 1753 Bruxelles
341Charles Mopsik -Le livre hébreu d'Hénoch
Dijon 1989 in: Collections «Les Dix Parole» Éd. Verdier pp.39~40
Yehouda Liebes -Les anges de la sonnerie du Chofar et 'Yochoua le Prince de la
Face (en hébreu)
Jérusalem 1987 in: Jerusalem Studies in Jewish Thougnt V01.6 (1-2) pp.176-196
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25

Table des matières


Il Le Nom. Chapitre premier

1.1- l..,a,pui ssance du nom 13


1.2- Connaître le nom de Dieu 23
1.3- Jésus, Satan, leur controverse avec le Nom 29
1.4- Le Nom lu distinctement 33

Il Hist orique. Chapitre second

2. 1- D'Adam à Moïse [-4000-1500]. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . .. 57


2.2- De Moïse à David [-1500-1000] 63
2.3- De David à Sidqiya [-1000-600]. 71
2.4- De Sidqiya à Simon le Juste [-600-300] 81
2.5- De Simon le Juste à Jésus [-300-0] 91
2.6- De Jésus à Justin [0-150] 99
2.7- De Justin à Jérôme [150-400] 113
2.8- De Jérôme aux Massorètes [400-900] 121
2.9- Des Massorètes à Maïmonide [900-1200] 127
2.10- De Maïmonide à Tyndale [1200-1500] 135
2.11- De Tyndale à l'American Std Version [1500-1900] 147
2.12- Le nom de Jésus, ses liens avec le Nom 159

Il Le dénouement. Chapitre troisième

3.1- Fin générale de la controverse 173


3.2- Conclusion sur le Nom 183
3.3- Aimer la vérité, le Nom, et l'encens 191

Il HnneHe

4.1- Liste des abréviations, Lexique, Alphabet. 193


4.2- Notes bibliographiqu~s 201
Licence accordée à Sebastien Cote taro.tattoos@gmail.com - ip:74.15.201.25
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Collectioll Religioll & Sciences Humaines


dirigée ]Jllr François Houtart et Jean Rémy
collaboration: M.Pierre Goisis et Vassilis Saroglou

Déjà parus

Section 1 : Faits religieux et société

Structuration psychique de l'expérience religieuse. La J'onction


paternelle, Vassilis SAROGLOU
Le religieux des sociologue.\'. Trajectoire.r per.-;onnelle.s::et débat.s::
scientiJïques, (dir) Yves LAMBERT, Guy MICHELAT & Albert
PIETTE
Le vaudoux haïtien, Re.flet d'une société bloquée, Fridolin SAINT-
LOUIS
Bouddhi.\'l1le et ()ccident, La diffusion du /Jouddhi.s::metibétain en
France, Lionel OBADIA.
Élie Gounelle, apôtre et inspirateur du christillnisl1le social, Jacques
MARTIN

Section 2 : Sciences humaines et spiritualité

Essai sur Thérèse Manin, Thérèse MERCURY


L'Évangile oublié, André BEAUGÉ
Le dessein tel1tporelde Jésus, Jean LABBENS
Dieu à hauteur d'hol1une, Albert GAILLARD
Isla/nifé et laïcité, Maxin1e JOINVILLE-ENNEZAT
Le ntalllu.fëI1Linin,Ivone GEBARA
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d'Imprimeur: 29918 - Dépôt lé9al : février 2006 -Imprimé en France

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