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LES
COMPAGNONS
DE JÉHU
(1857)
Table des matières
PROLOGUE
LA VILLE D'AVIGNON
La ville des prêtres, avec son palais des papes, ses cent
églises, ses cloches innombrables, toujours prêtes à sonner
le tocsin de l'incendie, le glas du meurtre.
Il se nommait Lescuyer.
La foule y accourut.
La seule idée qui lui vint fut que cette haine soulevée
contre lui avait pour cause la mutilation des affiches
pontificales ; il monta dans la chaire, comptant s'en faire
une tribune, et, de la voix d'un homme qui, non seulement
ne se reproche rien, mais qui encore est prêt à
recommencer :
Il hésita.
– Quatre, citoyen.
– Bien entendu.
– Vraiment !
– On le voit.
Puis continuant :
– Ah ! je comprends enfin.
– Sans exemple ?
– Sans exemple.
– C'est moi.
II – UN PROVERBE ITALIEN
– Assis, Roland !
– Laquelle, général ?
– Bon : je le saurai.
– Comment cela ?
– Je l'ignore ; mais quand je vous promets de le savoir,
je le saurai, dussé-je le lui demander, à lui.
– Peut-être…
III – L'ANGLAIS
– Soyez le bienvenu.
– Pourquoi cela ?
– À cause d'Aboukir.
– Mon passeport.
« Signé : BARRAS. »
– Vous avez lu ?
Roland s'inclina.
– Pourquoi ?
– Vraiment ?
– Tant mieux !
– Merci, dit-il.
L'Anglais s'inclina.
L'Anglais s'inclina.
– Peut-on entrer ?
« Charles de Valensolle. »
Et il attendit.
– Par ma foi ! vous avez raison, sir John ; voilà qui est
tout à fait bien. C'est vous qui avez réglé cela ?
– D'ici à Vaucluse ?
– Oui.
– Quatre lieues.
– C'est l'affaire d'une heure et demie ; nous n'avons
pas de temps à perdre ; débarrassons-nous donc des
choses ennuyeuses pour n'avoir plus que le plaisir.
– Dites.
Sir John regarda Roland avec cet œil étonné qu'il avait
déjà deux ou trois fois arrêté sur lui.
On descendit l'escalier.
– Postillon, à Vaucluse.
IV – LE DUEL
Sir John ouvrait la bouche pour lui dire que tout était
prêt ; mais lui, sans donner à l’Anglais le temps de parler :
– Les armes !
Roland tressaillit.
Et il attendit.
V – ROLAND
– Attendez, alors.
« Votre paladin. »
– J'allais partout.
– Dites.
– Oh !
– J'accepte, alors.
– Avec Valence ?
– Oui.
– Ah bah !
– À l’épée.
– Mais les sergents seuls ont des épées, et ils ne vous
en prêteront pas.
– Pourquoi demain ?
Et il s'éloigna.
– Tu y vas ?
– J'y vais.
– Tout de suite ?
– Tout de suite.
Valence partit.
– À Elliot, en ce cas.
– Tué aussi.
– Merci, général.
– Qui êtes-vous ?
Sulkowsky se leva.
VI – MORGAN
Il faut que nos lecteurs nous permettent d'abandonner
un instant Roland et sir John, qui, grâce à la disposition
physique et morale dans laquelle nous les avons laissés, ne
doivent leur inspirer aucune inquiétude, et de nous
occuper sérieusement d'un personnage qui n'a fait
qu'apparaître dans cette histoire et qui, cependant, doit y
jouer un grand rôle.
– Cela se fera-t-il ?
– On tâchera.
– Ça va ! répondit celui-ci.
Et la voiture passa sans s'arrêter devant la poste.
– Cela veut dire, fit le postillon, que, j'ai beau faire, j'y
vois d'un œil.
– Je comprends, reprit le jeune homme en riant, et si
je bouche l'autre œil…
Et il descendit de cheval.
Puis il écouta.
– Jéhu.
– Quelle est la maison qu'ils doivent exterminer ?
– Celle d'Achab.
– Je suis prophète.
– Où cela ?
– À Fronsac ?
– Oh ! non, mais à Avignon. Je me suis douté qu'un
homme si soigneux devait s'être arrêté à la première ville
un peu importante pour prendre des informations sur ses
deux cents louis. Je ne me trompais pas : je m'informe à
l'hôtel si l'on connaît le citoyen Jean Picot ; on me répond
que non seulement on le connaît, mais qu'il dîne à table
d'hôte. J'entre. Vous devinez de quoi l'on parlait : de
l'arrestation de la diligence. Jugez de l'effet de
l’apparition ! le dieu antique descendant dans la machine
ne faisait pas un dénouement plus inattendu. Je demande
lequel de tous les convives s'appelle Jean Picot ; celui qui
porte ce nom distingué et harmonieux se montre. Je
dépose devant lui les deux cents louis en lui faisant mes
excuses, au nom de la société, de l'inquiétude que lui ont
causée les compagnons de Jéhu. J'échange un signe
d'amitié avec Barjols, un salut de politesse avec l'abbé de
Rians, qui étaient là ; je tire ma révérence à la compagnie
et je sors. C'est peu de chose ; mais cela m'a pris une
quinzaine d'heures : de là le retard. J'ai pensé que mieux
valait être en retard et ne pas laisser sur nos traces une
fausse opinion de nous. Ai-je bien fait, mes maîtres ?
– Pas un sou.
– Parfaitement.
– En voici la copie.
« Signé : Louis. »
– Adopté, répondirent-ils.
IX – ROMÉO ET JULIETTE
– Charles !
– Amélie !
X – LA FAMILLE DE ROLAND
– Oui.
– Quoi donc ?
– Personne.
XIII – LE RAGOT
Roland se retint.
– À vingt pas.
Jacques arriva.
Édouard resta non seulement jusqu'à ce que l'ordre fût
donné au jeune homme de partir pour Montagnat, mais
jusqu'à ce qu'il fût parti.
– Qui cela ?
– Le grand frère.
– Mais non, qu'il n'y en aurait pas eu, dit l’autre, qui
semblait venu là pour être l'écho affirmatif de ce que disait
son compagnon.
– Lequel ?
– Oui, lequel ?
– Dame…
– Voilà quoi ?
– Pourquoi cela ?
Sir John se leva pour lui offrir son flacon de sels ; mais
vivement :
– Poltrons !
– Tu les as vus ?
– À aucun prix.
– Venez toujours.
– Oh ! nous viendrons.
– C'est-à-dire que, du moment où vous nous dites :
« Venez ! » vous pouvez être sûr que nous n'y manquerons
pas, monsieur Louis.
– De qui ?
– Des fantômes.
XV – L'ESPRIT FORT
– Impossible, oh !
– Impossible ! Pourquoi ?
– Non.
– Expliquez-moi cela.
– Oui.
– Oui.
– Non.
– Parfaitement.
– À la chartreuse.
XVI – LE FANTÔME
– Bon ! dit tout haut Roland, je crois que c'est ici que
je dois établir mon quartier général ; chauves-souris et
chouettes sont l’avant-garde des fantômes.
Là, il attendit.
Mais les heures de la nuit sonnèrent successivement
jusqu'à ce qu'elles devinssent les heures matinales et que
les premiers rayons du jour teignissent de leurs tons
blafards les murailles du cloître.
XVII – PERQUISITION
– Rien.
– Ni à toi ni à personne ?
– Ni à moi ni à personne.
– Et tu n'as rien vu ?
– Ah ! je respire.
– Laquelle ?
– Je n'ai pas retrouvé les balles parce que l’on est venu
les enlever ; on est venu les enlever pour que je ne visse
pas l’empreinte qu'elles avaient conservée sans doute.
– Tirez au visage.
Même silence.
C'était possible.
– En ce cas, il vit.
– La peine de mort.
– Ma parole.
Roland répéta :
– Qui n'ont pas l’air d'en faire tout à fait deux, j'en
conviens. Écoutez et inclinez-vous : « De ce point que l'on
appelle Ventre della Vacca. »
– Par qui ?
– Dépêche particulière ?
– De sa main ; voyez !
– C'est probable.
Puis à Roland :
– Y es-tu ?
– Oui, général.
– Comment, après ?
– Oh ! c'est vif.
– Je le présume bien.
– Non.
– Niais ! dit-il.
– À propos, et l’Anglais ?
– Où cela ?
– À la chartreuse, donc.
– J'en ai vu un.
– Alors ?
– Diable !
– Et il est mort ?
– Tu as entendu, Bourrienne ?
– Quand, général ?
– Eh bien, demanda-t-il ?
– Donnez.
« Le président,
« 16 brumaire an VII.
« GOHIER. »
– Pourquoi donc ?
– J'en répondrais.
– Barras ?
– Rien…
Puis, se reprenant :
–Ah ! ma foi, au reste, je puis bien vous le dire ! Savez-
vous ce que Barras a avoué hier à dîner devant moi ? qu'il
était impossible de marcher plus longtemps avec la
constitution de l'an III ; qu'il reconnaissait la nécessité
d'une dictature ; qu'il était décidé à se retirer, à
abandonner les rênes du gouvernement, ajoutant qu'il
était usé dans l'opinion et que la République avait besoin
d'hommes nouveaux. Or, devinez sur qui il est disposé à
déverser son pouvoir – je vous le donne, comme madame
de Sévigné, en cent, en mille, en dix mille ! – sur le général
Hédouville, un brave homme… mais je n'ai eu besoin que
de le regarder en face pour lui faire baisser les yeux ; il est
vrai que mon regard devait être foudroyant ! Il en est
résulté que, ce matin, à huit heures, Barras était auprès de
mon lit, s'excusant comme il pouvait de sa bêtise d'hier,
reconnaissant que, seul, je pouvais sauver la République,
me déclarant qu'il venait se mettre à ma disposition, faire
ce que je voudrais, prendre le rôle que je lui donnerais, et
me priant de lui promettre que, si je méditais quelque
chose, je compterais sur lui… oui, sur lui, qu'il m'attende
sous l'orme !
Moreau parut.
Bonaparte continua :
– Moreau ?
– Je le croyais républicain.
– Pourquoi cela ?
– Et pourquoi cela ?
– Le bruit en court.
– On s'en doute.
– Le général Bernadotte.
– Eh bien ?
– Pourquoi cela ?
– Vos défaites.
– Pardon, général, vous voulez dire les défaites de
Scherer ?
– Ou en accusateur !
– Comment, perdus ?
– Général, dit-elle.
Bernadotte s'inclina.
Lucien parut.
Bonaparte respira.
Et il continua :
« Art. 2. Ils y seront rendus demain 20 brumaire… »
Bonaparte reprit :
– Lequel ?
« Citoyens !
Roland sortit.
– Rentres-tu au salon ?
– À merveille !
– Laquelle ?
– Rendu quand ?
« Citoyen président,
« Salut fraternel,
Le messager sortit.
Un huissier entra.
– Un événement grave ?
– Peut-être.
– Va !
– Va ! dit-il, va !
– Vous savez ?
– Rien au monde !
– Comment ?
– Qui
– Eh ! Bonaparte !
– À sa droite !
Roland entra.
En ce moment, on annonça :
– Vous ?
– Oui, moi.
– Au nom du Directoire ?
– Me demandez-vous le secret ?
– Non…
– Laquelle ?
Bernadotte sourit.
– Je le soupçonne, dit-il.
– Bien disposés ?
– Justement !
– Vite, Roland, un brevet en blanc ; remplis-le aux
noms du général, que je n'aie plus qu'à y mettre mon nom.
Je le signerai sur l'arçon de ma selle.
– Roland ?
– Ni sa femme ?
Un domestique parut.
Et il sortit.
À la porte, il rencontra Roland.
Roland sourit.
– Toi, Bourrienne ?
– Tu as décacheté la lettre ?…
– Général, Sextus Pompée donnait à dîner sur sa
galère à Antoine et à Lépide ; son affranchi vint lui dire :
« Voulez-vous que je vous fasse empereur du monde ? –
Comment cela ? – C'est bien simple : je coupe le câble de
votre galère, et Antoine et Lépide sont vos prisonniers. – Il
fallait le faire sans me le dire, répondit Sextus ;
maintenant, sur ta vie, ne le fais pas ! » Je me suis rappelé
ces mots, général : Il fallait le faire sans me le dire.
– Oui ; donne vite à Lefebvre son brevet, et, s'il n'a pas
de cheval, qu'il en prenne un des miens. Je lui donne
rendez-vous dans la cour des Tuileries.
– Raison de plus.
Alors, regardant autour de lui, Bonaparte vit
Beurnonville et Moreau qui l'attendaient ; leurs chevaux
étaient tenus par des domestiques. Il les salua du geste,
mais déjà bien plus en maître qu'en camarade.
– Qu'allez-vous faire ?
– Et il ne m'arrivera rien ?
– Oui.
– À quoi ?
– Vous allez aux Tuileries ?
– Sans doute.
– Non.
XXIV – LE 18 BRUMAIRE
– Et que fîtes-vous ?
– Je le jure !
– Je le jure !
– Lisez !
Bonaparte lut.
– Comment ! prisonniers ?
– Non.
Un dernier mot.
« Monsieur le gouverneur,
« MORGAN,
– Oui.
– Qui cela ?
– L'homme d'Avignon.
– Ah ! ah ! et que demande-t-il ?
– À me voir, moi ?
Roland sortit.
– Quel Louis ?
« 3 janvier 1800,
« LOUIS. »
– Georges Cadoudal.
– Vous ?
« BONAPARTE. »
Et, pliant et cachetant la lettre, il écrivit l'adresse : À
monsieur le comte de Provence, la remit à Morgan, puis
appela Roland, comme s'il pensait bien que celui-ci n'était
pas loin.
– Ah !… Et d'où vient-il ?
– Il a eu tort.
– Venez, alors.
Arrivé là :
– Chut, Cadenette !
– J'ai connu des gens qui l’ont été pour moins que
cela, Cadenette. Mais expliquez-moi comment vous vous
trouvez être un ci-devant ; j'aime à me rendre compte de
tout.
La porte s'ouvrit.
Ceux-là cumulaient.
L'autre, irrité par les injustices dont son père avait été
victime, avait d'abord embrassé avec ardeur les principes
révolutionnaires, et, à la place de l'Année littéraire, morte
et étranglée en 1775, il avait, en 1789, créé l'Orateur du
peuple. Envoyé dans le Midi, comme agent extraordinaire,
Marseille et Toulon gardent encore aujourd'hui le souvenir
de ses cruautés.
– Je cherche quelqu'un.
– Affaire pressée ?
– Compagnie de Jéhu.
Et il continua sa recherche.
– À lui-même.
– L'a-t-il lue ?
– À l'instant.
– Et vous l’avez ?
– La voici.
– Et savez-vous le contenu ?
– C'est un refus.
– Positif ?
– Je le lui ai dit.
– Et il a répondu ?
– Très bien !
– Eh bien ?
XXVIII – EN FAMILLE
– En te mariant.
Bonaparte le regarda.
– Vous croyez ?
– Auguste…
– Eh bien ?
–Parce que j'ai pensé que les faits et gestes d'un gamin
de cet âge-là ne vous intéresseraient pas beaucoup.
– Quoi, général ?
– Comment cela ?
– Dans ce cas ?
– Comment, la fille ?
– Oui, ma sœur.
– Parfaitement :
– Quel âge ?
– Dix-sept ans.
– Jolie ?
– Charmante !
– Bureau de mariages.
– Ah çà ! mais, si tu ne veux pas te marier, toi, ce n'est
point une raison pour que ta sœur reste fille. Je n'aime pas
plus les vieilles filles que les vieux garçons.
– Aucunement.
– Quand cela ?
– Oh ! rien ne presse, et, pourvu que tu partes demain
matin…
– Secondairement.
– Parbleu !
– Où cela ?
– Où vous le rencontrerez.
– Près d’Alexandrie ?
– Qui, Cadoudal ?
– L'abbé Bernier ?
– Oui.
– Parfaitement !
– À merveille !
– Oui, général.
– Je me charge de tout.
– Chez un ami.
– Oh ! général !
– Entièrement.
– Quoi ?
– L'argent.
– Et y en a-t-il beaucoup ?
– Sur quoi ?
– Quoi ?
Et il montra le Genevois.
– Monsieur Féraud ?
– Tu verras.
– Malheureux !
– À la bonne heure.
Puis au conducteur :
– Pourquoi me taire ?
– Ne comprends-tu pas ?
– Non.
La voiture s'ébranla.
– Comment cela ?
– Moi ?
– Comment, arrêtés ?
– Oui.
–Pas précisément.
– Là ! tu vois, maman.
Bourrienne partit.
– À quatorze ans.
– De Bourg.
– Général…
– Comment, la vôtre ?
– Oui.
– J'y étais.
– Combien étaient-ils ?
– Quatre.
– Non, général.
– Eh bien ?
– Le frère de Roland.
– Oui, général.
– Pourquoi ne me l'avez-vous pas amené ?
– Où cela ?
Puis, à l'enfant :
– Soldat d'abord.
– Comment, d'abord ?
– Général !
Il est vrai que ces gars sont fidèles aux traditions : tels
on les a vus combattre aux côtés de la Rouërie, de Bois-
Hardy et de Bernard de Villeneuve, tels ils combattent aux
côtés de Bourmont, de Frotté et de Georges Cadoudal ;
c'est toujours le même courage et le même dévouement ;
ce sont toujours les soldats chrétiens et les royalistes
exaltés ; leur aspect est toujours le même, rude et
sauvage ; leurs armes sont toujours les mêmes, le fusil ou
le simple bâton que, dans le pays, on appelle une ferte ;
c'est toujours le même costume, c'est-à-dire le bonnet de
laine brune ou le chapeau à larges bords, ayant peine à
couvrir les longs cheveux plats qui coulent en désordre sur
leurs épaules ; ce sont encore les vieux Aulerci Cenomani,
comme au temps de César, promisso capilto ; ce sont
encore les Bretons aux larges braies, dont Martial a dit :
– De Pouancé, général !
– Quelles nouvelles ?
– Donne.
– Ah ! fit-il.
– Son air ?
– Déterminé !
– Combien d'hommes ?
– Tu en es sûr ?
– Je les ai rencontrés en route ; le commissaire était à
cheval près du colonel, je l’ai parfaitement reconnu. Il a
fait exécuter mon frère, et j'ai juré qu'il ne mourrait que de
ma main.
– À la première occasion.
– Jamais, général.
– Et ton cheval ?
– Laquelle ?
– C'est que Vannes a un nouvel évêque.
– Audrein !
– Le régicide ?
– Audrein le renégat.
– Et quand arrive-t-il ?
– Vous sortez ?
– Justement.
– Oui, colonel.
– Quand ?
– De quelle façon ?
Cadoudal sourit.
– J'accepte.
Cadoudal sourit.
– Alors à table !
– Laquelle ?
– Très bien.
– Comment cela ?
– Si je meurs, général…
– Quand pars-tu ?
– Cette nuit.
– Demain.
Bénédicité sortit.
– Pas un.
– J'ai demandé trois cents hommes dans une demi-
heure, et, dans une demi-heure, ils seront là ; j'en eusse
demandé cinq cents, mille, deux mille, qu'ils eussent été
prêts aussi promptement.
– Branche-d'or ?
– Mon général !
– Six cents dans les landes d'Arzal, six cents dans les
bruyères de Marzan, trois cents à Péaule, trois cents à
Billiers.
– Quatre cents.
– Douze cents.
– Merci, Bénédicité.
Roland sourit.
– Oui, c'est fort, n'est-ce pas ?
– Comment ?
– Et vos hommes ?
– Où cela ?
– Partout.
– Quand ?
– Partons.
– Tout chargés ?
– Alors à cheval.
– En totalité ou en partie ?
– Trois cents.
– Cent.
– Cinquante.
– Et l'arrière-garde ?
– La Giberne.
On continua de marcher.
– Pourquoi s'arrête-t-il ?
– Quoi ?
– Un signal.
– Et à ce signal, il répondra ?
Roland le suivit.
– Est-il dedans ?
– On le croit.
– Grâce ! grâce !
Roland frissonna.
– Est-ce vrai ?
– Je ne le nie pas.
– Citoyens…
– Messieurs…
– Quelle réserve ?
– Combien de chariots ?
– Dix-sept.
– Je le crois.
– Contre qui ?
Cadoudal l'imita.
– Laquelle ?
Cadoudal se leva.
– Dites, monsieur.
– C'est probable.
– Et alors ?
– Lesquelles ?
– Formulez-la.
Roland s'inclina.
Cadoudal sourit.
– Pourquoi le premier ?
– Oui, général.
– Feu !
– Vive le roi !
– Ordonnez, général !
Il sauta en selle.
Sur cette carte était son adresse. Sir John logeait rue
de Richelieu, hôtel Mirabeau.
– Vous le voulez ?
– Je vous en supplie.
– Oh ! j'adore elle.
– Pourquoi cela ?
– Moi.
– Et vous me quittez ?
– Cher ami, j'ai un congé de quelques heures : j'en ai
donné une à ma mère, deux à vous, j'en dois une à votre
ami Édouard… Je vais l'embrasser et recommander à ses
maîtres de le laisser se cogner tout à son aise avec ses
camarades ; puis je rentre au Luxembourg.
– Quelle chose ?
– L'attaque de la diligence.
– Oui.
– La diligence où était ma mère a été arrêtée ?
– Vous avez vu madame de Montrevel, et elle ne vous
a rien dit ?
– Qu'avez-vous encore ?
– Un projet.
– Vous m'en ferez part.
– Ma foi, non ; mes projets, à moi, ne tournent pas
assez bien pour vous.
– Merci.
Revenons à Bonaparte.
– Écrivez, Bourrienne.
XXXVII – L'AMBASSADEUR
– Général !
Roland entra.
– Et la seconde ?
– Maintenant, la troisième ?
Le ministre s'inclina.
– Ah ! ah ! il a fait la demande ?
– Officielle.
– Et tu as répondu ?…
– Volontiers, général.
– Tu dis ?
– Où est-il ?
– À Paris.
– Va le chercher et amène-le-moi.
– Alors, écrivez.
Et il dicta :
Bonaparte s'arrêta.
– Tu as ton Anglais ?
– Adressée à qui ?
– Eh bien, dites-lui…
« La voulez-vous ?
« Non.
« PAUL. »
Bonaparte continua.
« Ma fille bien-aimée,
« CLOTILDE DE MONTREVEL »
« Je t'embrasse.
« ROLAND »
– Que faire ?
– Dis.
– Jamais.
– Tes engagements ?
Il lut :
– Eh bien ?
– Non.
– Pour nous ?…
– On l'a vu ! où ? Qui ?
– Qui l’a vu ?
– Oui.
– Eh bien ?
– Aussi sûr que peut l'être tout asile ayant deux issues.
– Charles ! murmura-t-elle.
– Je te le promets, Charles.
– Je t'en supplie.
– Oui.
– Tu entends, Amélie ?
– Lequel ?
– D'Assas.
– Oui.
– Où est-il ?
– Allons.
– D'où viennent-elles ?
– Bon ! Après ?
– Vous êtes avec des amis, dit une voix, n'ayez donc
pas peur.
– Votre nom ?
– J'en ai deux.
– Votre nom de guerre ?
– Morgan.
– Donne.
– Restons !
– Me suivre.
– Je suis prêt.
– Oui.
XL – BUISSON CREUX
– Pourquoi pas ?
– Je crois bien !
– Pourquoi la question ?
– Mais parce que c'est la meilleure, et que, si vous ne
la prenez pas, nous la donnerions à la personne qui arrive,
dans le cas où elle ferait séjour.
– Qu'est-ce donc ?
– Ah ! ah !
« MONTBAR »
« MORGAN.
– Pourquoi cela ?
– Il y en a fit Antoine.
– C'est beaucoup.
– Mettons un vingtième.
– Soit.
– Cela fait cinq mille.
– Eh bien ?
– Justement.
– Je l'ai dit.
– Moi ?
– Toi.
– À vous ?
– Tu me donnes ta place ?
– Avec plaisir.
– Laquelle ?
– Lequel ?
– Les voilà.
Le conducteur s'inquiéta.
– Halte-là, conducteur !
« Monsieur,
« J'ai reçu et mis sous les yeux du roi la lettre que vous
m'avez transmise par l'intermédiaire de mon neveu lord
Tanlay. Sa Majesté, ne voyant aucune raison de se départir
des formes qui ont été longtemps établies en Europe pour
traiter d'affaires avec les États étrangers, m'a ordonné de
vous faire passer en son nom la réponse officielle que je
vous envoie ci-incluse.
« GRENVILLE »
« Soldats !
– Vous croyez ?
– Lisez.
Sir John jeta les yeux sur la note, qui lui paraissait
familière, s'arrêta au dixième paragraphe et lut :
– Ah ! ah ! fit Bonaparte.
L'Anglais continua :
Bonaparte relut.
Bonaparte réfléchit.
Puis, appelant :
– Bourrienne !
Bourrienne parut.
– Oui, général.
– Au Luxembourg !
– On en a.
– Par qui ?
– Contre qui ?
– Oui.
– Non.
– Comment, non ?
– Qu'est cela ?
Bonaparte lut :
« Au citoyen Fouché, ministre de la police, en son
hôtel, à Paris.»
« MORGAN.
« De la Maison-Blanche, route de Mâcon à Lyon, le
samedi, à neuf heures du soir. »
– Où allez-vous ?
– Aux Tuileries.
Fouché se retourna.
XLIV – DÉMÉNAGEMENT
Revenons à Murat.
10 AOÛT 1792
LA ROYAUTÉ EST ABOLIE EN FRANCE
ET NE SE RELÈVERA JAMAIS
– À merveille !
– Non général.
– C'est convenu.
Michel accepta.
Il arriva à la patte-d'oie.
– Je cherche un affût.
La grille s'ouvrit.
« Amour à moi !
« Ce n'est pas moi, cette fois, qui irai à toi, c'est toi qui
viendras à moi ; comprends-tu bien ? tu peux te promener
dans le parc, personne n'ira suivre la trace de tes pas.
« Ton CHARLES.
– Et pourquoi cela ?
– Et pourquoi cela ?
– Non.
– Alors, viens !
– Où vas-tu ?
– Amélie !
– Quoi ?
– Aux armes !
– C'est convenu.
C'était Roland.
Et il apprêta sa carabine.
– Et pourquoi pas ?
Bonaparte sourit.
– Et si je refuse ?
– À Londres, général.
– Tant mieux.
– Après ?
– Eh bien ?
– Vous les comparerez à ceux contre lesquels vous
vous êtes battu… Seulement, une fois sorti de France,
colonel…
Bonaparte s'arrêta.
– J'attends, fit Cadoudal.
– Et toi ? demanda-t-il.
« Louis »
LI – L'ARMÉE DE RÉSERVE
Le général se retira.
On l’escalada.
Puis, à Fouché :
– Non, général.
– Votre sœur ?
Bonaparte sourit.
– Et puis après ?
– Rien.
– Elle a refusé ?
– Oui.
– Laquelle ?
– Mais encore ?
– Laquelle ?
Bonaparte calcula.
– À une condition.
– Laquelle ?
– Justement.
– Alors, venez.
– À propos ?
– À propos de mariage.
LII – LE JUGEMENT
– Eh bien ?
Un gendarme passa.
Puis un second.
Au moment où il passait :
Le président rentra.
Le silence se rétablit.
– Silence !
Un froid mortel enveloppa le cœur d'Amélie, une
sueur glacée perla son front, ses genoux plièrent et
tremblèrent sous elle.
Il entra.
– Pauvre Amélie !
Charlotte obéit.
La voix disait :
La grille s'ouvrit.
– Alors, venez.
LIV – LA CONFESSION
– Ainsi soit-il.
Roland se retourna.
Amélie une seconde fois prononça le nom de son frère.
– Seul.
– Je te voyais venir.
Roland frissonna.
– Quand cela ?
– La nuit dernière.
– Et la lettre ?
– Alors, réponds-moi.
Roland lut :
Amélie respira.
LV – L'INVULNÉRABLE
Roland s'inclina.
Et Roland salua.
Sir John lui rendit son salut ; et, tandis que le jeune
homme s'éloignait, il rentra au balcon et alla reprendre sa
place.
On se battrait au pistolet.
– Très bien.
– Une seule.
– Faites.
– Est-ce tout ?
– C'est tout.
Et, jetant son pistolet loin de lui, il tendit les bras à sir
John.
CONCLUSION
Il est midi.
– Roland ! dit-il.
– Comment, à temps ?
– Regarde !
C'était Desaix.
« Madame,
« BONAPARTE. »
UN MOT AU LECTEUR
Puis je revins.
Mon fils était à la campagne à Sainte-Assise, près
Melun ; ma chambre m'attendait ; je résolus d'y aller faire
mon roman.
– Alors, tu m'aideras.
– Voilà tout ?
– Voyons.
– Après ?
– Très bien.
– Hum !
– Quoi ?
– C'est rude !
– Rude, comment ?
– J’attends.
– Oui.
– Où vas-tu ?
– À Bourg en Bresse.
– Quoi faire ?
***
Le Rouennais me répondit :
– Oui, vous.
– Qu'est-ce ?
– Ma foi, non.
– Eh bien !
– Après ?
– Après, c'était une insulte pour Corneille, monsieur
Dumas ; voilà pourquoi les Rouennais vous en veulent et
vous en voudront encore longtemps.
Textuel !
– Il en est à 1822.
– C'est possible.
– C'est ainsi… Ces quatre jeunes gens se nommaient
Guyon, Leprêtre, Amiet et Hyvert.
– Charles Nodier.
***
– Allons au Palais.
– Parfaitement.
– La forêt de Seillon.
– Bravo !
– Alors permettez…
– Quoi ?
– Inspecteur de quoi ?
– De la forêt.
– Et dans la forêt ?
– Quel château ?
– Très bien.
– Oui.
– Où allons-nous ?
– Justement.
– Laquelle ?
Je tirai ma montre.
– Non ; où cela ?
– Justement.
– Voyons un peu.
– Oh ! oh ! infortunat.
– Dame…
– Donnez-la !
– Non.
– Sans doute.
– Parlons-lui.
Il reconnut M. Leduc.
– Aucunement.
– Je l’irai prendre.
– Eh bien, victoire.
– Le procès-verbal d'exécution.
–…?
– De vos hommes.
– Le voici.
Je pris et je lus :
Alex. Dumas.