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CHAPITRE I.QUESTIONS ENVIRONNEMENTALES

Ce chapitre examine essentiellement l’Impact stratégique de l'homme sur


l’environnement. Il commence par définir les concepts clés pour comprendre l’environnement
et pose les problèmes de l’écologie en passant par le sommet stratégique de la terre.

Section 1. Le concept d’environnement

§1. Définition de l'environnement et notion connexe

 C’est l’ensemble des éléments naturels ou artificiels qui conditionnent la vie


de l’homme (cf. Gd. Larousse de langue française de 1972)
 C’est l’ensemble des éléments physiques, chimiques ou biologiques,
naturels ou artificiels, qui entourent un être humain, un animal ou un végétal
ou une espèce (cf. Petit Larousse de 2004).
 C'est l’ensemble des caractéristiques physiques, chimiques et biologiques
des écosystèmes plus ou moins modifiées par l'action de l'homme.

De la sorte, les éléments de l’environnement sont l’air, l’eau, le sol, les ressources
naturelles, la faune et la flore, sans oublier les paysages. Cette conception rejoint d’ailleurs
celle du Droit International Public.

 Ainsi, le terme biosphère désignera la totalité de l’environnement,


l’ensemble des écosystèmes de la planète comprenant tous les êtres vivants
et leurs milieux.
 La biosphère correspond à la couche (20 Km maximum) qui comprend les
portions de l’atmosphère de l’hydrosphère et de la lithosphère où la vie est
présente (atmosphère : couche gazeuse constituant l’enveloppe la plus
externe de la terre ; hydrosphère : la totalité des eaux de la planète c'est-à-
dire océans, mers, lacs, cours d’eau, eaux souterraines ; lithosphère :
couche externe du globe terrestre constituée par la croûte et le manteau
supérieur).
 En fait, la biosphère entoure la terre sur une mince couche et pénètre à
quelques centaines de mètres sous la surface de la terre et bien entendu
sans les océans.
 On entend par écosystème, une unité fondamentale d’étude de l’écologie
formée par l’association d’une communauté d’espèces vivantes (biocénose)
et d’un environnement physique (biotope) en constante interaction. Ainsi une
forêt, un lac sont des écosystèmes.
 L’écologie est quant à elle, une science transdisciplinaire qui étudie les
relations des êtres vivants avec leur milieu.

Les manifestations de la dégradation mondiale de l’environnement


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− Du point de l’énumération indicative des problèmes menaces et drames


environnementaux, la situation est impressionnante :
a) En ce qui concerne les climats : les émissions de gaz à effet de serre
entrainent un réchauffement climatique, le niveau moyen des mers s’est
élevé, le contenu en chaleur des océans s’est accru, la couverture neigeuse et
l’extension des glaces ont diminué, la fréquence et la portée d’événements
extrêmes liés à la température comme les inondations, les sécheresses, les
déficits hydriques des sols, les incendies, les invasions d’insectes devraient
s’accroître dans certaines régions.
Les scientifiques prévoient un réchauffement accru durant le XXIème siècle.
Dans un monde où la moitié de la population vit en zone côtière les
conséquences seront considérables. Les pays pauvres et les plus peuplés
seront les plus touchés. Le groupe intergouvernemental sur l’évolution du
climat (GIEC) conclut à « une plus grande vulnérabilité de la santé humaine
des écosystèmes et des secteurs socioéconomiques ». ce bouleversement
majeur atteint toute la terre.On se demande jusqu’où les équilibres
fondamentaux de la planète vont résister.
− En ce qui concerne l’air : les atteintes s’appellent appauvrissement de la couche
d’ozone, retombées des pluies acides, pollutions chimiques diffuses et
accidentelles, pollutions radioactives d’origine civile et militaire, pollutions urbaines,
nuisances sonores, pollutions de l’espace orbital,…
− En ce qui concerne les eaux douces : la liste est longue elle aussi : atteintes à la
qualité de cours d’eau et de nappes phréatiques à travers des pollutions d’origine
agricole, industrielle et domestique, assèchement et empoissonnement de nappes
phréatiques, absence d’accès à l’eau potable, inondations, problèmes de quantités
de réserves d’eau produisant des situations de stress hydrique et de pénurie d’eau.
− En ce qui concerne le milieu marin : pollutions venant des fleuves et des côtes,
pollutions par immersions de déchets, de déchets dangereux, de déchets
radioactifs, pollutions accidentelles ou volontaires de navires et de plates−formes,
dégradation des ressources marines et côtières, surexploitation et disparition
d’espèces marines, …
− En ce qui concerne les sols : l’épiderme de la Terre est ici menacé, là malade à
travers la désertification, les atteintes sont très nombreuses par pesticides, nitrates,
métaux lourds, déchets mis en décharge, transports et stockages de déchets
toxiques.
− En ce qui concerne le flore, la faune, les paysages et la nature : appauvrissement
de la diversité biologique, espèces de la faune et de la flore décimées et menacées
d’extinction, marchandisation du vivant, risques liés aux organismes génétiquement
modifiés, artificialisation de la nature, prolifération de certaines espèces posant des
problèmes écologiques et économiques, régression d’habitats naturels, urbanisation
incontrôlée, destruction de paysages, destruction de cultures vivrières au profit de
grandes monocultures, …
− On constate aussi que les catastrophes sont plus fréquentes et plus graves : « au
cours de la décennie 1986 – 1995 les pertes dues aux catastrophes naturelles ont
été huit fois supérieures à celles enregistrées dans les années 60 » (GEO – 2000).

La sécurité alimentaire est de moins en moins assurée dans certaines régions,


d’autre part des aliments sont contaminés par des pollutions chimiques et radioactives, par
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des additifs alimentaires, par la dioxine, par des farines animales, sans oublier l’exposition
de travailleurs et de populations à des substances dangereuses (drame de l’amiante).

Section 2. Ecologie et le sommet stratégique de la terre

Les sciences de l'environnement étudient les conséquences de ces modifications sur


les plantes, les animaux et l'homme aussi bien à l'échelle de l'individu ou de l'écosystème
que de toute la biosphère. Il convient de distinguer les sciences de l'environnement de
l'écologie qui étudie (dans la mesure où il en existe encore) des milieux naturels ou peu
modifiés.

§1.Impact stratégique de l'homme sur la biosphère

Les premiers hommes, peu nombreux et dépourvus de moyens techniques, ont vécu
pendant longtemps en harmonie avec leur milieu, comme les autres animaux.
Aujourd'hui, il y a plus de six milliards d'hommes sur Terre, et certaines régions sont
surpeuplées. Les besoins en terres cultivables, en matières premières et en sources
d'énergie croissent constamment et les moyens techniques permettant de modifier ou même
de détruire le milieu ont une puissance considérable. En outre, les hommes se concentrent
dans des villes dont l'air est de plus en plus pollué et ils perdent le contact avec la nature.

La dégradation de la biosphère qui en résulte a déjà, et aura des conséquences de


plus en plus préoccupantes.

§2. Changement global stratégique

Ces expressions désignent un ensemble de perturbations dues à l'homme qui


affectent la totalité ou une partie importante de la biosphère. Beaucoup de programmes
internationaux se consacrent à ce sujet qui comporte trois thèmes principaux : l'effet de
serre, la couche d'ozone et les pluies acides.

1.Effet de serre :

L'utilisation des combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz naturel) libère dans
l'atmosphèreune partie du carbone qui était stocké dans le sous-sol sous la forme de
carbone fossile. La teneur de l'atmosphère en gaz carbonique était, semble-t-il, resté stable
pendant des siècles et était de l'ordre de 290 parties par million (ppm). Elle a augmenté,
depuis 1850 environ, et est aujourd'hui de 350 ppm. Ce changement important provoque
déjà des modifications de l'état général de la biosphère, et entraîne en particulier une
amplification de l'effet de serre. Depuis 1850, la température moyenne de la surface du globe
a ainsi augmenté de près de 1 °C. Les spécialistes prévoient que, si l'augmentation de la
teneur de l'atmosphère en gaz carbonique continue à ce rythme, l'élévation de température
sera dans un siècle comprise entre 2 °C et 6 °C.

Si rien n'est fait pour enrayer ces rejets de gaz carbonique, la fonte d'une partie des
glaces polaires entraînera une élévation du niveau des mers (estimée à 80 mètres en
l'an 2100), ce qui submergera des régions littorales, dont certaines sont très peuplées.
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Le gaz carbonique n'est pas le seul gaz capable d'augmenter l'effet de serre. Le
méthane, dont les émissions ont pour origine la décomposition organique anaérobie
(rizières, sols, décharges) et la fermentation microbienne de nourriture dans l’appareil
digestif des animaux d’élevage, ainsi que les chlorofluorocarbones (CFC) ont le même effet
et sont, eux aussi, libérés dans l'atmosphère en quantités croissantes.

L’augmentation de ces gaz à effet de serre est à relier d’une part à l’augmentation
de la population mondiale, et d’autre part au développement des techniques industrielles et
aux besoins qu’elles impliquent.

2. Couche d'ozone :

Il existe dans la stratosphère, vers 40 km d'altitude, une couche d’ozone (O3) qui
est formée par des réactions photochimiques : combinaison d’oxygène moléculaire (O2) et
d’oxygène atomique (O) libéré par le rayonnement solaire. Cette couche d'ozone arrête une
grande partie des rayons ultraviolets solaires et sans elle aucune vie ne serait possible sur
Terre. Une diminution inquiétante de la quantité d'ozone au-dessus de l'Antarctique a été
détectée entre 1970 et 1980. Cette destruction de l'ozone est liée à l'utilisation dans diverses
industries (climatisation, réfrigération, solvants, aérosols) de composés à base de fluor et de
chlore (le plus connu étant le Fréon) que l’on appelle communément les
chlorofluorocarbones (CFC). Les CFC, dont la durée de vie est de 60 à 120 ans, s’élèvent
jusqu’à la stratosphère, où les rayons solaires les dissocient, libérant leur chlore très réactif
qui brise les molécules d’ozone. Chaque molécule de chlore peut détruire jusqu’à
100 000 molécules d’ozone sans disparaître pour autant.

L'exposition à des doses de rayons ultraviolets plus importantes que la normale


entraîne des conséquences néfastes pour les animaux et les végétaux. Les ultraviolets
ralentissent le processus de la photosynthèse, affectent la croissance du phytoplancton dans
les océans et semblent, au moins en partie, responsables de phénomènes restés longtemps
mystérieux comme la disparition progressive sur toute la Terre des amphibiens (crapauds,
grenouilles, salamandres). Chez l'homme, les actions les plus évidentes des rayons
ultraviolets sont l'augmentation du nombre de cancers de la peau et des cataractes, ainsi
que la baisse d'activité du système immunitaire qui intervient en particulier dans la lutte
contre les maladies infectieuses.

Le trou dans la couche d'ozone ne se limite plus à l'Antarctique. Il commence à


apparaître d'une façon saisonnière au-dessus des régions peuplées des latitudes moyennes
de l'hémisphère Nord. Compte tenu de cette menace, beaucoup de pays ont abandonné et
interdit la production et l'utilisation des CFC. Cela a fait l'objet d'un accord international, le
protocole de Montréal, signé en 1986. Toutefois, ces produits demeurant dans la
stratosphère pendant plusieurs décennies, la diminution de la couche d’ozone va se
poursuivre. Reste à savoir si la biosphère pourra neutraliser à long terme les effets de cette
action humaine.

3.Pluies acides :

Les pluies acides sont, comme l'effet de serre, une conséquence de l'utilisation des
combustibles fossiles. Elles sont provoquées par les rejets de dioxyde de soufre (ou gaz
sulfureux) et d'oxyde d'azote dans l'atmosphère lors de la combustion qui a lieu dans les
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centrales thermiques, les chaudières de chauffage central ou les véhicules à moteur. Ces
produits, en présence des rayons ultraviolets solaires, réagissent avec la vapeur d'eau
atmosphérique et avec des oxydants comme l'ozone, se transformant en acide sulfurique et
en acide nitrique qui sont entraînés loin de leur lieu de production par les courants
atmosphériques. Ces particules acides se déposent et s’accumulent sur les feuilles des
arbres, puis sont lessivées par la pluie ou la neige. Ce lessivage entraîne alors une
augmentation de l’acidité dans le sol.

L'acidité se mesure en déterminant le pH, qui est d'autant plus bas que l'acidité est
plus forte. Les pluies normales ont un pH moyen de 5,6. Par définition, les pluies acides sont
celles dont le pH est inférieur à 5,6. Dans le nord-ouest de l'Europe, le p H moyen des pluies
est aujourd'hui de 4,3 et on a enregistré aux États-Unis un pH record de 2,3, égal à celui du
vinaigre.

§3.Pollutions stratégique localisées

À côté des pollutions généralisées à presque toute la planète existe un grand


nombre de pollutions, encore relativement localisées, mais qui se répandent de plus en plus.

1.Pollution atmosphérique :

Un phénomène voisin des pluies acides est celui de la pollution de l'air des villes par
le dioxyde de soufre provenant de la combustion de combustibles fossiles dans les
chaudières de chauffage et par les oxydes d'azote rejetés avec les gaz d'échappement des
véhicules à moteur. L'air pollué des villes contient de l'ozone, des oxydes d'azote et de
l'acide sulfurique. Dans certaines agglomérations, comme Los Angeles ou Athènes, situées
dans des régions ensoleillées, il se forme fréquemment une couverture grisâtre - renfermant
des gaz toxiques - due aux réactions photochimiques activées par les rayons solaires. Ce
brouillard toxique est connu sous le nom de « smog ».

Cette pollution atmosphérique est responsable d'un nombre croissant d'affections


respiratoires, surtout chez les enfants et les adultes fragiles. Les coûts induits par la
corrosion des métaux, des pierres et autres matériaux par l'air pollué des villes étaient déjà
estimés à 500 millions d’euros par an en 1980.

2. Pollution par les pesticides :

Les pesticides sont des produits destinés à lutter contre les insectes nuisibles
(insecticides), les mauvaises herbes (herbicides) ou les champignons nuisibles (fongicides).
La mise au point après 1945 d'insecticides de synthèse appartenant au groupe des
hydrocarbures chlorés (dont le plus connu est le DDT) et leur utilisation massive dans la lutte
contre les insectes ravageurs des cultures et nuisibles à l'homme, ont eu des effets
catastrophiques. Ces insecticides sont très stables et ils résistent pendant des années à la
dégradation.

Les inconvénients nombreux des pesticides, et en particulier des insecticides, sont


bien connus. C'est la raison pour laquelle on les remplace de plus en plus par la lutte
biologique ou la lutte intégrée. Ces procédés ne sont pas nocifs pour l'environnement et ont
déjà prouvé leur efficacité.
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3.Pollution nucléaire :

Même si les essais des armes nucléaires dans l'atmosphère ont été arrêtés par la
plupart des pays, éliminant une source importante de pollution radioactive, celle-ci demeure
cependant un sujet inquiétant. Les centrales nucléaires ne dégagent que des quantités
limitées de déchets radioactifs dans l'air et dans l'eau, mais les risques d'accidents
subsistent et les problèmes liés au stockage des déchets sont loin d’être résolus. L'accident
en 1986 de la centrale nucléaire de Tchernobyl, située alors en URSS et aujourd'hui en
Ukraine, doit inciter à la plus grande prudence.

4. Pollution de l'eau :

L'approvisionnement en eau potable, déjà mal réparti, est devenu difficile dans
beaucoup de pays. En effet 1 p. 100 seulement de l'eau présente sur Terre peut être capté
dans la nappe aquifère ou dans les rivières tandis que 97 p. 100 de cette eau se trouvent
dans les océans, ce qui la rend inutilisable (sauf si l'on emploie une méthode coûteuse, le
dessalement de l'eau de mer).

De plus en plus rare et infectée par le fait de la pollution, l’eau devient insalubre
dans plusieurs régions du monde où son utilisation cause des maladies qui tuent dix millions
de personnes chaque année.

5.Exploration pétrolière et pollution marine :

L'homme gagne progressivement du terrain sur des régions restées intactes -ou
presque- et inhabitées, s'étendant jusqu'aux contrées autrefois considérées comme
inaccessibles. Des besoins en énergie sans cesse croissants conduisent à l'exploitation
pétrolière des régions arctiques, mettant en péril le fragile équilibre des écosystèmes qui
constituent la toundra. Une catastrophe comme celle du naufrage sur les côtes de l'Alaska
du pétrolier Exxon Valdez, en 1989, a provoqué des dégâts considérables dans la riche
faune marine de cette région (voir hydrocarbures, pollution par les).

6.Déforestation :

Les forêts tropicales de l'Asie du Sud-est et du bassin de l'Amazone sont détruites à


un rythme alarmant pour en exploiter le bois, créer de nouvelles terres agricoles, des
plantations de pins et des zones d'habitation. Au cours des années 1980, ces forêts
tropicales ont disparu à la vitesse de 20 hectares par minute. Des Renseignement
stratégique s fournis par les satellites indiquaient la destruction de 15 000 km2 par an dans
le seul bassin amazonien. Le feu (allumé volontairement ou accidentellement) est un moyen
de déforestation qui peut anéantir des surfaces considérables. Voir aussi protection de la
nature ; espèces menacées ; parcs nationaux et réserves naturelles.

7.Érosion des sols :


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L'érosion des sols s'accélère sur tous les continents et elle concerne entre un
cinquième et un tiers des terres cultivées. Elle représente une menace considérable pour
l'approvisionnement en nourriture.

Dans de nombreux pays, les besoins croissants en nourriture et en bois de


chauffage ont conduit à la déforestation et à la mise en culture de terrains en pente sur
lesquels sévit une très forte érosion. Ce problème est aggravé par l'industrialisation, les
barrages, et le bétonnage, engendrés par l'urbanisation et la construction de routes.
L'érosion du sol et la disparition des forêts réduisent la capacité des sols à retenir l'eau et
provoquent une accumulation des sédiments dans les cours d'eau et les lacs ainsi que dans
les barrages qu'il faut périodiquement vider et nettoyer.

8.Accroissement démographique :

La population mondiale s'accroît rapidement d'une façon quasi exponentielle,


comme le montrent les chiffres suivants : en 1800, 900 millions ; en 1950, 2,5 milliards ; en
1989, 5 milliards ; en 2000, 6,05 milliards ; en 2025, près de 8 milliards (estimation). La
menace que fait peser sur l'humanité et sur la biosphère cette explosion démographique a
été dénoncée dès 1968 par l'Américain Paul Ehrlich qui a créé l'expression aujourd'hui
célèbre de « bombe P » (P comme population). Ceci aura pour conséquences :

 l'impossibilité pour beaucoup de pays de subvenir aux besoins alimentaires de leur population
malgré la recherche de nouvelles terres cultivables, de plus en plus rares (aujourd’hui, un
homme sur cinq est mal nourri) ;

 l'urbanisation accélérée de la population : les hommes s'entassent dans des agglomérations


gigantesques où les conditions de vie sont lamentables et les ressources inexistantes.
Aujourd'hui, un homme sur six ne possède pas d'habitation correcte ; un homme sur quatre ne
dispose pas d'eau potable).

La croissance de la population n'est évidemment pas la seule cause de cet état de


fait ; les structures économiques et sociales qui sont devenues à peu près les mêmes dans
tous les pays en sont également responsables. La croissance démographique, par les
besoins en espace et en ressources qu'elle engendre, et par la destruction accélérée de
l'environnement qu'elle provoque, est cependant l’un des problèmes qui engagent l'avenir de
l'humanité.

§4. Développement stratégique durable

En juin 1992, une conférence des Nations unies sur l'environnement et le


développement, appelée Sommet de la Terre, réunit les représentants de 172 pays à Rio de
Janeiro, au Brésil. Les principaux sujets abordés sont les changements climatiques, la
biodiversité et la protection de la nature. Un calendrier de protection de l'environnement est
adopté et ses conséquences politiques et économiques sont envisagées. Cette réunion, très
médiatisée, a toutefois bien peu de résultats concrets concernant la conservation de la
nature et les multiples problèmes liés à la dégradation de l'environnement. La volonté de ne
pas aborder des problèmes tels que ceux qui sont liés à la croissance démographique est
l’une des raisons de ce semi échec.
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La solution réside peut-être dans un ensemble de concepts et de propositions qui


constituent le développement durable, « développement qui répond aux besoins du présent
sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs » (définition de
l'ONU en 1987). Il s'agit de trouver les moyens d'éviter une croissance destructrice de
l'environnement (croissance démographique, industrielle, urbaine) et, par contrecoup,
menaçant l'avenir de l'homme sur une planète dont on perçoit enfin qu'elle a des possibilités
limitées et que ses ressources ne peuvent être exploitées et dilapidées indéfiniment.

§5. Prise de conscience stratégique

1. Quelques dates : 28 ans séparent la première grande réunion internationale consacrée à


l’environnement de l’an 2000. Depuis, l’accélération du rythme des conférences
internationales montrent que cette prise de conscience est effective, notamment depuis le
sommet de Rio de 1992 ; l’énumération ci-dessous le démontre clairement :

 1972 Première conférence mondiale sur l’environnement à Stockholm


 1981 Conférence de Cancun, sur le développement
 1987 Conférence de Montréal, sur les changements climatiques
 1992 Conférence de Rio, « Sommet de la Terre »
 1994 Conférence du Caire, sur la population et le développement
 1995 Conférence de Berlin, sur les changements climatiques
 1996 Conférence de Rome, sommet alimentaire mondial
 1997 Conférence de Rio, bilan de 5 ans après le Sommet de la Terre
 Conférence de Kyoto, sur les changements climatiques
 1998 Convention de Buenos Aires, sur les changements climatiques
 2002 Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg

Cependant, à souligner que le « Sommet de la Terre » de 1992 est déterminant, les


principales décisions s’y sont prises ; toutes les conférences ultérieures jusqu’à nos jours ne
les ont ni modifiées, ni véritablement complétées.

2. Le nouvel ordre écologique :

Vingt ans après la conférence de Stockholm, la communauté mondiale se


remobilise et décide de définir la politique écologique de la prochaine décennie. Au sommet
de Rio, tenu du 3 au 14 juin 1992, étaient présents 178 états et 117 chefs d’Etat et de
gouvernement ; et ce, dans un contexte international totalement bouleversé : la guerre (anti-
paix) stratégique froide est révolue, la menace d’une guerre (anti-paix) stratégique
mondiale semble écartée depuis le consensus issu de la crise du Golfe, le souci d’une
harmonisation entre le développement et la préservation de la planète semble possible.

La nouvelle répartition mondiale met en présence des pays industrialisés divisés sur
la question de l’environnement. Ainsi, à Rio, George Bush affirme qu’il privilégiera l’économie
sur l’écologie ; il ne signe pas en conséquence la convention sur la biodiversité, qui aurait pu
heurter le monde des affaires. Le Japon, lui aussi, reste en retrait, ne voulant pas donner
l’impression de profiter de l’isolement des Etats-Unis.
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Il est le seul grand Etat à ne pas avoir envoyé son Premier ministre, et refuse de
porter son aide à 0,7%, il signe en revanche les conventions relatives au climat et la
biodiversité. La CEE, relativement homogène, est handicapée par son manque de moyens.
Mais les pays scandinaves, la France et l’Allemagne s’engagent à consacrer 0,7% de leur
PNB à l’aide publique et au développement. Les pays du sud sont eux aussi divisés, l’OPEP
se démarque en s’opposant violemment à la taxation des combustibles fossiles.

Enfin, ne pouvant aider le tiers monde, mais ne pouvant pas non plus prétendre à
l’aide financière de l’ONU au tiers monde, les pays de transition, les pays de l’est
notamment, sont confrontés au coûteux désastre écologique révélé par la faillite de l’empire
soviétique.

Son ampleur justifierait un véritable « plan Marshall » de l’écologie, financé


essentiellement par l’Europe occidentale, les Etats-Unis et le Japon.

Le nouvel ordre écologique est donc calqué sur le nouvel ordre mondial, et risque
de renforcer la domination des membres du G7 (Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie,
Etats-Unis, Canada et Japon). Il est révélateur que les négociations aient achoppé sur des
orientations décisives concernant les multinationales ou la recherche ; de même, des sujets
aussi importants que l’impact de la dette et les négociations au sein du Gatt (General
Agreement on Trade and Tariffs) ont été exclus.

3. Absence d’unanimité :

La conférence de Rio, comme toutes les autres conférences internationales, n’a pas
suscité l’adhésion, ni de l’ensemble des nations, ni de la totalité de la communauté
scientifique ; la controverse scientifique, déjà largement évoquée dans la première partie, a
été flagrante à Rio, elle évoquait la responsabilité des chercheurs face aux menaces pesant
sur le milieu naturel, en particulier lorsque ces dernières sont liées aux contraintes du
développement.

Le débat a été lancé par une déclaration signée à Heidelberg par environ 200
scientifiques et intellectuels du monde entier, dont une soixantaine de prix Nobel, déclaration
présentée au début de la conférence de Rio par un académicien brésilien.

Ce texte dénonce « l’émergence d’une idéologie irrationnelle qui s’oppose au


progrès scientifique et industriel et nuit au développement économique et social ». Affirmant
« la responsabilité et les devoirs de la science envers la société dans son ensemble », les
signataires mettaient en garde les autorités contre « toute décision qui s’appuierait sur des
arguments pseudo scientifiques ou sur des données fausses ou inappropriées ». Ils
concluaient que « les plus grands maux qui menacent notre planète sont l’ignorance et
l’oppression et non pas la science, la technologie et l’industrie » dont les instruments « sont
des outils indispensables » qui permettront à l’humanité de venir à bout de fléaux tels que la
faim et les pandémies.

Cette déclaration, à son tour, a suscité plusieurs contre-appels et pétitions ; certains


n’ont pas hésité à affirmer que le texte, qui évoque plusieurs fois le rôle positif de l’industrie,
aurait été inspiré par les intérêts des industries pharmaceutiques !
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La controverse existe donc plus que jamais, elle pose désormais le problème de la
science en termes politiques, dans ses rapports avec les pouvoirs publics d’une part, avec
l’industrie de l’autre.

Section 3. Les risques environnementaux

L'article 2 de la convention cadre du 5 juin 1992 sur la biodiversité définit


l'écosystème comme étant « le complexe dynamique formé de communautés de plantes,
d'animaux et de microorganismes et de leur environnement non vivant qui, par leur
interaction, forment une unité fonctionnelle ». Le concept d' « unité fonctionnelle » met
clairement en évidence le fait que la protection de l'écosystème, ou, pour employer un terme
plus génétique, de l'environnement, suppose nécessairement des engagements pris au
niveau international et non seulement national. La notion d'environnement met donc en
cause la souveraineté étatique (la pollution n'a pas que faire des frontières politiques et
géographiques). Elle concerne en outre la question des rapports Nord−Sud, renvoie aux
concepts d'interdépendance, desolidarité, de précaution, au nom d'un intérêt supérieur, celui
de la planète elle-même, conditionnant ainsi la survie de l'espèce humaine.

Si la fin des années 1980 marque la prise de conscience planétaire des risques
environnementaux et de la nécessité d'assurer la protection de l'environnement, il n'en
demeure pas moins que cette protection s'avère difficile à mettre en place en ce que
l'écosystème présente également un enjeu économique.

§1. L’émergence du droit de l’environnement

a) La protection textuelle de l'environnement

Alors que, depuis le milieu des années 1960, les scientifiques lançaient des cris
d'alarme quant à la détérioration de l'environnement du fait des activités humaines
polluantes et que des catastrophes écologiques marquaient les opinions publiques (Torrey
Canyon, 1967 ; Seveso, 1976 ; Amoco Cadiz, 1978, Bhopal, 1984, Tchernobyl, 1986, Exxon
Valdez, 1988, …), la communauté internationale n'a commencé à véritablement réagir qu'à
la fin des années 1980 (la première conférence des Nations Unies sur l'environnement s'est
tenue en 1972, mais elle a été sans retombées immédiates sur le plan juridique, bien qu'elle
ait posé des principes qui sont toujours pertinents). Pourquoi un si tardif prise de
conscience ? D'une part, parce que les mouvements écologistes ne jouaient pas un rôle
déterminant dans les années 1970−1980 ; d'autre part, en raison de la multiplication des
catastrophes technologiques au cours de la décennie 1980. Le mouvement s'est très
rapidement accéléré à partir de 1987.

Ainsi la CEE décida-t-elle de faire de 1987«l'année de l'environnement», sans


grande réussite néanmoins; cette même année, la Commission mondiale sur
l'environnement et le développement (instituée par les Nations Unies en 1984) publiait un
rapport dans lequel elle affirmait que l'avenir «est conditionné par la prise immédiate de
mesures politiques décisives pour commencer à gérer les ressources de l'environnement
(l'eau, l'air, l'espace), de manière à assurer un progrès durable et à garantir la survie de
l'Humanité». En septembre 1987, était adopté le Protocole de Montréalsur les substances
qui appauvrissent la couche d'ozone.
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En janvier 1989, J. Delors, président de la Commission européenne proposait aux


États membres de la CEE la création d'une Agence européenne de l'environnement,
création acquise à la fin de l'année. En mars 1989, les Nations Unies réunissaient une
conférence internationale visant à réglementer les exportations de déchets toxiques,
conférence à l'issue de laquelle était adoptée la Convention sur le contrôle des mouvements
transfrontières de déchets dangereux et leurélimination.

À la suite du sommet du G7 de juillet 1989, une déclaration économique fut signée,


évoquant amplement la question environnementale: «La pollution de l'air, des lacs, des
rivières, des océans et des mers; les pluies acides et les substances dangereuses; la
rapidité de la désertification et de la déforestation sont autant de sujets d'inquiétude
grandissante. [...] Il est urgent de prendre des mesures pour comprendre et protéger
l'équilibre écologique. [...] Nous recommandons vivement à tous les pays de donner un
nouvel élan à la recherche scientifique sur les problèmes d'environnement, de développer
les technologies nécessaires et de faire des estimations précises des coûts et de s
avantages économiques des politiques d'environnement. [...] La protection de
l'environnement est inséparable du commerce, du développement, de l'énergie, de
l'agriculture, des transports et de la planification économique. Il faut donc en tenir compte
dans toute prise de décision économique. Politiques économiques et politiques de
l'environnement se valorisent mutuellement.» (Points 33, 34 et 37.)

L'appel était lancé pour l'élaboration d'un véritable droit de l'environnement et non
plus la simple adoption de mesures sectorielles et fragmentées. On va ainsi évoluer d'un
droit « à» l'environnement à un droit « de» l'environnement. La distinction est importante. Le
droit « à» l'environnement - le droit à un environnement sain - a tout d'abord été affirmé en
tant que droit de l'homme. Il appartient aux droits de l'homme qualifiés de « troisième
génération», parmi lesquels se trouve le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le droit
à la paix, le droit au développement... Il s'agit de droits à la fois individuels et collectifs, en ce
sens que, s'ils concernent directement l'être humain, ilsne peuvent être mis en œuvre que
par le biais d'une concertation internationale. L'existence de ce nouveau droit « à
l'environnement » et, surtout, l'importance qu'il revêt au sein des droits de l'homme sont
clairement consacrées par la Déclaration de La Haye du II mars 1989 sur la protection de
l'atmosphère, dont le premier paragraphe dispose: « Le droit de vivre est à la base de tous
les autres. Sa garantie est un devoir absolu pour les responsables de tous les États du
monde. Les conditions même de la vie sur notre planète sont aujourd'hui menacées par les
atteintes graves dont l'atmosphère est l'objet. » De cette obligation d'assurer le respect du
droit à un environnement sain découle tout naturellement l'émergence d'un droit «de»
l'environnement, ayant pour objet d'assurer la protection de la biosphère.

Ainsi, parmi les grands textes récents du droit de l'environnement, on peut


mentionner la convention cadre de Rio de 1992 sur la biodiversité, la Convention cadre des
Nations Unies sur les changements climatiques, adoptée le 9 mai 1992, complétée par le
Protocole de Kyoto du 11 décembre 1997, la Convention internationale de lutte contre la
désertification du 17 juin 1994, la Déclaration politique et le Plan de mise en œuvre adoptés
par le Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg le 4 septembre
2002.

Désormais, la question environnementale est incontestablement perçue comme


~ 12 ~

nécessitant d'adopter une approche transversale de tous les domaines, qu'ils soient
économiques, techniques. Ainsi, les objectifs du millénaire pour le développement, établis en
2000 par les Nations Unies se fixent notamment pour but d' « inverser la tendance actuelle à
la déperdition des ressources environnementale » (cible 9 de l'objectif 7) et de « réduire de
moitié d'ici à 2015, le pourcentage de la population qui n'a pas accès de façon durable à un
approvisionnement en eau potable » (cible 10 de l'objectif 7), (cf. annexe 3).

Au plan régional, des mesures sont également adoptées. Ainsi, l'article 174 du
Traité instituant une communauté européenne dispose : « 1. La politique de la Communauté
dans le domaine de l'environnement contribue à la poursuite des objectifs suivants: la
préservation, la protection et l'amélioration de la qualité de l'environnement, la protection de
la santé des personnes, l'utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles, la
promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes
régionaux ou planétaires de l'environnement. 2. La politique de la Communauté dans le
domaine de l'environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la
diversité des situations dans les différentes régions de la Communauté. Elle est fondée sur
les principes de précaution et d'action préventive, sur le principe de la correction, par priorité
à la source, des atteintes à l'environnement et sur le principe du pollueur-payeur. »

b) La lutte contre le réchauffement climatique (Cf. infra)

§ 2.La notion de patrimoine commun de l'humanité

Ce concept, plus symbolique que véritablement opérant, vise à faire de l'humanité


sont le représentant est la communauté internationale des États la détentrice exclusive de
droits sur des espaces ou des ressources que l'on considère comme ne devant
appartenir à aucun État.

Cette idée, déjà ancienne: a été affirmée, bien que l'expression n'ait pas été
employée, pour la première fois à l'égard de l'espace extra-atmosphérique (article 1erdu traité
sur les principes régissant les activités des États en matière d'exploration et d'utilisation de
l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes, 27 janv. 1967 :
«l'exploration et l'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres
corps célestes, doivent se faire pour le bien et dans l'intérêt de tous les pays, quel que soit le
stade de leur développement économique ou scientifique; elles sont l'apanage de l'humanité
toute entière »). Par la suite, la notion a été étendue aux valeurs artistiques et culturelles
(Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel, 23 nov. 1972, dont
l'article 6 dispose que le patrimoine culturel et naturel «constitue un patrimoine universel
pour la protection duquel la communauté internationale tout entière a le devoir de coopérer
»), à la science (mais pas à la technologie), a la Zone des grands fonds marins et à leur
sous-sol (Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982), aux ressources
génétiques végétales (qualifiées de patrimoine commun de l'humanité par la FAO en 1989 et
2001). Toutefois, on assiste, depuis quelques années, à une appropriation et à une
marchandisation de ces ressources.
~ 13 ~

§3. Le cadre traditionnel du droit sur les ressources partagées

Le cadre traditionnel du droit des ressources présente une image faussement


simple et organisée.

Le monde est divisé en 211 États, chacun est souverain sur son territoire, ce qui
implique qu'en principe chacun dispose d'un titre exclusif sur les ressources de son territoire
et est compétent pour développer des politiques et des législations régissant l'accès et
l'exploitation de ces ressources (cf supra chapitre 6). En outre, les États disposent de droits
souverains et d'une compétence limitée sur la zone économique exclusive. Cela laisse un
certain nombre d'espaces sur lesquels aucun État ne dispose d'un titre ou d'une compétence
exclusive: la haute mer, ainsi que ses fonds et sous-sol,l'espace extra-atmosphérique et
l'Antarctique. Enfin il faut noter qu'aujourd'hui un certain nombre de ressources sont
considérées comme partagées. Bien qu'il n'y ait pas de définition internationalement établie
des « ressources naturelles partagées», on s'accorde néanmoins sur leur contenu: les
systèmes hydrographiques internationaux, certaines masses d'air et les espèces
migratrices(telles que les thons et les tortues).

Dans ce cadre, la communauté internationale a cherché à ordonnancer la mise en


œuvre des droits sur les ressources:

− d'autre part, en ce qui concerne les ressources naturelles partagées, la qualification


des droits des États riverains est déterminée sur la base du concept de «
communauté d'intérêt» et de l'égalité parfaite entre tous les États riverains dans
l'utilisation de l'ensemble de la ressource (CPJI, AC, 10 sept. 1929, Commission
internationale de l'Oder (Allemagne et a. c/Pologne) ; CI), 25 sept. 1997, Projet de
Gabcikovo-Nagymaros (Slovaquie c/Hongrie)). Concrètement, cela implique que les
États riverains d'un fleuve international, par exemple, ne sont pas souverains. En
outre, s'il existe des droits souverains, tels que dans la zone économique exclusive,
ils ne peuvent être exercés qu'en tenant compte des droits des autres États
intéressés
− d'une part, pour les ressources qui se trouvent exclusivement à l'intérieur du territoire
d'un État et qui ne sont pas reliées au territoire d'un autre État, les États disposent,
au nom du principe de souveraineté permanente sur les ressources naturelles, d'un
titre exclusif et jouissent d'une pleine souveraineté sur ce territoire
− enfin, les droits collectifs de la communauté internationale, sur des espaces ou des
ressources que l'on qualifie de « patrimoine commun de l'humanité, insusceptibles
d'appropriation étatique.

Cependant, cette présentation n'est simple qu'en apparence. En effet, la mise en


œuvre de ces réglementations s'est heurtée aux réticences, non seulement des pays
industrialisés, à même d'assurer l'exploitation de ces espaces, mais aussi des pays en
développement, qui ont perçu les intérêts financiers qu'il y avait à l'appropriation des
ressources naturelles

§4. Les vicissitudes de la protection internationale de l'environnement


~ 14 ~

a)L'appropriation et la marchandisation du patrimoine commun de l'humanité

 Considérations générales

Les facteurs d'explication de ces appropriation et marchandisation tiennent à la fois


de l'évolution politique et des avancées scientifiques et technologiques. En effet, une des
caractéristiques de la société moderne est l'affirmation du capitalisme comme modèle
dominant, non seulement à l'intérieur de l'État, mais également entre les Etats. Or ce modèle
implique, entre autres, la marchandisation des différentes ressources, la prééminence de la
propriété privée des moyens de production et le déclin de l'interventionnisme étatique. Ces
caractéristiques sont de plus en plus marquées dans les relations internationales modernes,
ce qui induit un double phénomène d'appropriation étatique des ressources naturelles d'une
part, et de marchandisation ou de privatisation de ces ressources d'autre part.

L'appropriation des ressources naturelles est considérée comme une extension des

droits étatiques souverains. En outre, la protection des droits de propriété privée se reflète
de manière croissante dans les instruments internationaux visant à protéger les
investissements étrangers. En résumé, ce que ces développements semblent mettre en
évidence, c'est une extension des droits de propriété étatique aux dépens de la propriété
commune (propriété commune qu'implique la notion de « patrimoine commun de l'humanité
») et un rôle croissant du secteur privé, encouragé par la protection juridique des intérêts
privés.

Ces deux domaines d'évolution sont influencés par deux facteurs, l'un politique,
l'autre technologique. Le facteur politique tient à la transformation profonde de la pensée
politique et économique au niveau national. Les idées de Mme Thatcher ou de M. Reagan
dans les années 1980, de MM. Bush, Blair et Chirac dans les années 2000, visant à « faire
reculer les frontières de l'État », à redéfinir les relations entre l'État et les particuliers, ont
conduit à mettre en œuvre une économie de marché radicale dans presque tous les champs
d'activités. Cela a mené à une privatisation de pans entiers de l'économie nationale, allant de
l'eau aux ondes hertziennes en passant par les transports et l'électricité. Quoique l'on pense
de cette idéologie et de ses conséquences, son caractère désormais dominant dans la
pensée politique actuelle ne fait pas de doute, ce qui n'est pas resté sans conséquences sur
les relations internationales et le droit international public.

Parallèlement, des modifications technologiques significatives sont apparues, et ce


dans plusieurs domaines: capacités d'exploitation des ressources, télécommunications,
biotechnologies. Ces innovations technologiques ont en commun de nécessiter la
mobilisation de capitaux importants. Or, dans la pensée politique et économique actuelle,
ces ressources financières sont considérées comme ne pouvant provenir que du secteur
privé. Cependant, pour pouvoir mettre ces capitaux à disposition et être incité à l'innovation,
le secteur privé a besoin d'un cadre réglementaire stable y compris au plan international.
Ces considérations ont commencé à très nettement infiltrer les règles matérielles du droit
international, tant pour ce qui est de l'exploitation de la Zone que des ressources génétiques
végétales.

 La Zone
~ 15 ~

La Convention sur le droit de la mer de 1982 a mis en place un régime relatif à


l'exploitation des ressources des fonds marins: un système de licences accordées par
l'Autorité internationale de la Zone à des entreprises nationales pour l'exploitation de cette
Zone. En outre, ces entreprises, aux termes de la Convention, doivent assurer un transfert
de technologie, à des conditions préférentielles, vers l'Entreprise (organe rattaché à
l'Autorité, et chargé de l'exploitation de la Zone au nom de la communauté internationale) et
vers les pays en développement. Or, depuis 1994, sous la pression des pays industrialisés,
a été intégrée, pour l'exploitation de cette Zone, une approche fondée sur l'économie de
marché. Désormais, le développement des ressources doit prendre place « conformément
aux principes d'une saine gestion commerciale» (Accord relatif à l'application de la Partie XI
de la Convention de Montego Bay, 29 juil. 1994). Les paiements financiers faits en
application des contrats doivent être équitables pour le contractant; l'Entreprise ne peut
mener ses activités minières dans la Zone que par le biais « d'accords d'entreprise
conjointe» (avec le secteur privé) et ces activités doivent être conformes aux principes d'une
saine gestion commerciale. Les États parties n'ont plus à financer les activités de
l'Entreprise. Les transferts de technologies du nord vers le sud doivent être encouragés,
mais seulement s’il-sent accomplis « selon des modalités et à des conditions commerciales
justes et raisonnables [et] compatibles avec la protection effective des droits de propriété
intellectuelle». Enfin, les États dont les investissements sont les plus importants quant aux
fonds marins, soit directement, soit par le biais de leurs nationaux, se voient, de fait,
accorder un droit de veto sur les décisions importantes prises par l'Autorité.

L'objet de ces changements est d'introduire le concept d' « économie de marché» dans
les champs d'activités internationales. Ce concept vise à encourager la maximisation des
profits privés et des activités du secteur privé. La fonction rédistributive de l'Autorité et de
l'Entreprise, telle qu'elle devait résulter du nouvel ordre économique international, est
remplacée par le principe du marché.

 Les ressources génétiques végétales

Cet exemple est intéressant en ce que l'on note une transformation des droits
d'accès et d'utilisation des ressources génétiques, vers une sorte de « privatisation»
internationale (au sens d'étatisation).

Les implications pratiques de la qualification donnée par la FAO en 1989 aux


ressources génétiques végétales en tant que « patrimoine commun de l'humanité» n'avaient
pas été envisagées complètement. Aucun régime n'avait été mis en place ni même proposé
en vue d'interdire l'appropriation étatique ou privée de ces ressources et d'établir un système
central en régissant l'accès et l'exploitation. Au contraire même, puisque l'on souhaitait que
ces ressources soient généralement disponibles « sans restriction », afin de permettre aux
États parties à l'engagement d'accéder aux échantillons de ressources, rendant possible leur
exportation et rendant ces échantillons librement et gratuitement disponibles.

C'est toutefois à peu près au même moment que la communauté scientifique a


commencé à développer non seulement la capacité d'identifier les ressources génétiques,
mais aussi les conditions de leur utilisation et de leur exploitation, en particulier en matière
médicale et pharmaceutique. Dans un tel contexte, il est évident que la valeur commerciale
de ces ressources a augmenté de manière on ne peut plus significative. Les conditions
~ 16 ~

étaient réunies pour que les propriétaires potentiels les États revendiquent leurs droits et
s'approprient des ressources qui, en réalité, étaient celles de la communauté internationale
dans son ensemble.

Les premiers pas en ce sens ont été faits dès 1991: une résolution de la FAO
réinterprète la notion de « patrimoine commun de l'humanité» en affirmant que ce concept
était « sujet à la souveraineté des États sur leurs ressources génétiques végétales ». Il y a là
une nette contradiction entre les droits de la communauté internationale d'une part, et les
droits des États d'autre part. La tendance à l'étatisation de ces ressources s'est confirmée
l'année suivante avec l'adoption de la convention de 1992 sur la biodiversité. Elle établit un
régime Juridique étrange: l'accès aux ressources génétiques végétales doit se faire dans
des conditions ayant fait l'objet d'un accord mutuel entre l'État et l'entreprise intéressée; les
États parties doivent légiférer « pour assurer un partage juste et équitable des résultats de la
recherche et de la mise en valeur ainsi que des avantages résultant de l'utilisation
commerciale et autre des ressources génétiques avec la Partie contractante qui fournit ces
ressources» (art. 15-7). Cela implique, par exemple, que si une entreprise pharmaceutique
obtient des ressources génétiques à Madagascar, une partie des bénéfices doit être
rapatriée en fonction de ce qui a été convenu dans l'accord - à Madagascar. Ainsi, ce que
vise la convention de 1992, ce sont les conditions de la « marchandisation » des ressources
génétiques végétales couplée avec une « dés−internationalisation », une « étatisation» des
droits sur ces ressources au bénéfice, entre autres, des pays hôtes (en général des pays en
développement).

Allant dans le même sens, le 3 novembre 2001 un accord international sur les
ressources génétiques agricoles et alimentaires a été signé. Le texte règle l'accès aux
ressources génétiques agricoles et établit un système multilatéral de partage des
bénéficiées liés à leur exploitation. Le traité ne contient plus de référence au patrimoine
commun de l'humanité.

b) La lutte contre le réchauffement climatique

Dès la fin du XIX siècle, le chimiste suédois Arrhenius prédisait une augmentation
de la température de la terre, en raison de l'utilisation de combustibles fossiles par
l'industrie. Cependant, à cette époque, on n'envisageait pas ce réchauffement comme
susceptible d'entraîner des conséquences dangereuses pour l'écosystème, telles l'élévation
du niveau des mers, la dégradation des sols, la multiplication des catastrophes climatiques
(tornades, ouragans ...). En 1988, le Programme des Nations Unies pour l'environnement
(PNUE) et l'Organisation météorologique mondialeont institué un Groupe d'experts
intergouvernemental sur l'évolution du climat (Intergovernmental panel on climate change).
Sa mission est d'évaluer, de façon méthodique, claire et objective, les meilleures
informations d'ordre scientifique, technique et socio-économique à ce sujet dont on peut
disposer à l'échelle du globe. Son premier rapport d'évaluation, publié en 1990, a confirmé
les informations scientifiques sur lesquelles étaient fondées les préoccupations relatives à
l'évolution du climat. Il a amené l'Assemblée générale des Nations Unies à élaborer une
Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée en 1992 et entrée
en vigueur en mars 1994. Que prévoit cette Convention? Globalement, elle engage les États
développés à ramener leurs émissions de gaz à effet de serre à leurs niveaux de 1990(à cet
égard, il est intéressant de noter que l'article 3 de la Convention met en œuvre le principe de
~ 17 ~

précaution, stipulant que: «Quand il y a risque de perturbations graves ou irréversibles,


l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour différer
l'adoption de mesures de précaution pour prévoir, prévenir ou atténuer les causes des
changements climatiques et en limiter les effets néfastes. Ce dernier passage a cependant
rarement été invoqué par la communauté scientifique, politique ou médiatique). Cette
Convention soulève néanmoins d'importantes difficultés. En effet, l'objectif est très souple,
empli d'échappatoires permettant aux États d'invoquer l'équité et d'autres principes pour
justifier le non-respect de l'objectif fixé. En outre, dans cette convention, les pays en
développement ont montré qu'ils n'étaient pas prêts à adopter des mesures visant à traiter
leurs émissions de gaz à effet de serre, ces États ne s'engageant qu'à participer à la
Convention et à développer des inventaires nationaux et des plans, pour lesquels ils doivent
recevoir une compensation financière par les États industrialisés. Sur ce plan, l'article 4 § 1
est clair en ce qu'il dispose que les engagements des États tiennent « compte de leurs
responsabilités communes mais différenciées et de la spécificité de leurs priorités nationales
et régionales de développement».

Cette convention, outre l'engagement des États à réduire leurs émissions, prévoit,
en s'inspirant du modèle du Protocole de Montréal de 1987 sur les substances qui
appauvrissent la couche d'ozone, un accord global basé sur la marchandisation du dioxyde
de carbone et d'autres émissions dans l'atmosphère.Ce système est largement influencé par
les États-Unis, qui ont mis en place un système de commerce des émissions de dioxyde de
soufre en droit interne.

Ainsi, la Convention inclut un engagement à développer une « mise en œuvre


conjointe», par les États parties, de leurs obligations (art, 4, § 2 a et b), En d'autres termes,
ce qui est envisagé est la conclusion d'accords par lesquels deux ou plusieurs parties
pourraient joindre leurs efforts en vue d'atteindre leurs objectifs réciproques.Un État pourra
fournir un financement pour un autre afin qu'il réalise des réductions d'émission pour son
compte, réductions créditées à l'actif de l'État investisseur, Un État dont les émissions sont
supérieures à la limite fixée pourra donc acheter des réductions d'émissionà un État dont
les niveaux sont inférieurs à cette limite,

En 1995, ont été déterminées, dans le cadre de la conférence de Berlin, des lignes
directrices sur la « mise en œuvre conjointe» ; de plus, la conférence a engagé les États
parties à la Convention à adopter, avant la fin 1997, un protocole définissant des objectifs de
réduction et un calendrier plus détaillés et prêts à être exécutés par les pays en
développement, tout cela dans un contexte scientifique de plus en plus alarmant. Ainsi, en
décembre 1997, les États parties à la convention de 1992 ont souscrit au protocole de Kyoto:
il établit des objectifs et un calendrier de réduction spécifiques pour les pays industrialisés:
réduction de 8%pour l'Union européenne, 7% pour les États-Unis, 6 % pour le Japon et des
augmentations autorisées de 10%pour l'Australie et l'Islande (annexe B).Ces objectifs
doivent être atteints pour la période 2008-2012 (art. 3, § 1); toutefois, une certaine marge de
flexibilité est envisagée dans leur réalisation.Ce protocole ne prévoit en revanche aucun
calendrier ni objectif pour les pays en développement.

Néanmoins, il organise un régime plus détaillé pour le commerce des droits


d'émission de carbone, Ainsi l'article 17 dispose que: « La Conférence des Parties définit les
principes, les modalités, les règles et les lignes directrices à appliquer en ce qui concerne
~ 18 ~

notamment la vérification, l'établissement de rapports et l'obligation redditionnelle en matière


d'échange de droits d'émission. Les Parties visées à l'annexe B peuvent participer à des
échanges de droits d'émission aux fins de remplir leurs engagements au titre de l'article 3.
Tout échange de ce type vient en complément des mesures prises au niveau national pour
remplir les engagements chiffrés de limitation et de réduction des émissions prévu dans cet
article,» Mais ce qui est plus remarquable encore, est la possibilité de mettre en jeu, dans
cette politique de réduction, des acteurs non étatiques, en particulier d'importantes sociétés
multinationales, Ainsi l'article 12 § 9 dispose que: « Peuvent participer au mécanisme pour
un développement "propre", […] des entités aussi bien publiques que privées ; la
participation est soumise aux directives qui peuvent être données par le conseilexécutif du
mécanisme.»

Donc, si une entreprise française investit dans une nouvelle centrale électrique en
Inde, centrale, par exemple nucléaire, qui aurait pour effet de réduire les émissions de
dioxyde de carbone en Inde de 1 00 tonnes par an, alors une partie de cette réduction serait
créditée en retour sur les obligations de la France.On notera à cet égard que le 13 octobre
2003, la Communauté européenne a adopté une directive mettant en place, au niveau
intracommunautaire, un système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre,

Le protocole propose d'autres solutions que le commerce des émissions de gaz à


effet de serre. En effet, le texte prévoit également la possibilité pour les pays industrialisés
de constituer des « puits de carbone»plutôt que de réduire leurs émissions; en d'autres
termes, il s'agit de lieux où le carbone est absorbé naturellement, telles les forêts tropicales.
Mais cette solution a un effet pervers étant donné que les forêts tropicales anciennessont
très denses et en situation d'équilibre, voire de rejet de carbone; les promoteurs forestiers
ont donc proposé de raser ces forêts et de replanter des variétés d'arbres à croissance plus
rapide (acacias, eucalyptus...), qui absorbent beaucoup plus rapidement le carbone, mais
qui ne sont pas nécessairement adaptées aux zones dans lesquelles elles vont être
implantées."

Ce protocole étant entré en vigueur le 16 février 2005, sa mise en œuvre est


désormais acquise, Néanmoins les États-Unis, qui à eux seuls émettent 30 à 35 % du total
des gaz à effet de serre d'origine humaine, ont décidé en 2001 de ne pas ratifier le
Protocole. En outre, lors de la réunion du « Partenariat Asie-Pacifique pour le
développement propre et le climat», en janvier 2006, les six États concernés (États-Unis,
Australie, Inde, Corée du Sud, Japon et Chine) ont affirmé clairement que « les énergies
fossilessont à la base de nos économies et demeureront une réalité durant toute notre vie et
au-delà ». Or, ces six États produisent près de la moitié des émissions mondiales de gaz à
effet de serre; de fait, ils soulignent ainsi clairement leurs réticences à lutter contre le
réchauffement climatique. À l'issue de cette réunion, le Premier ministre australien a même
affirmé: « L'idée que nous pouvons gérer le problème du changement de climat avec succès
aux dépens de la croissance économique est non seulement irréaliste mais également
inacceptable. » Pour les représentants de ces États, la responsabilité de la lutte contre
leréchauffement incombe en premier lieu au secteur privé, Une telle attitude, mettant en
opposition et en compétition économie et environnement, ne laisse d'inquiéter, notamment
au regard des implications négatives qu'elle aura sur le concept de développement durable
et sur sa mise en œuvre effective; et ce malgré les nombreuses affirmations de principe
.émanant tant des Nations Unies (Objectifs du millénaire pour le développement) que de
~ 19 ~

l'OMC (cycle de Doha).

Section 4. La protection de l’environnement

« Le monde a pris conscience de la nécessité de mieux préserver l'équilibre


écologique, notamment en ce qui concerne les graves menaces pesant sur l'atmosphère et
pouvant entraîner, à l'avenir, des modifications du climat. La pollution de l'air, des lacs, des
rivières, des océans et des mers; les substances dangereuses; la rapidité de la
désertification et de la déforestation sont autant de sujets d'inquiétude grandissante. Une
telle dégradation de l'environnement met en péril les espèces et compromet le bien-être des
individus et des sociétés. Il est urgent de prendre des mesures pour comprendre et protéger
l'équilibre écologique [...] afin de préserver 110S objectifs économiques et sociaux et de
remplir nos obligations envers les générations futures (Déclaration du G7 du 16 juillet 1989).
»

Le rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement « GEO- 2000»


souligne que malgré les efforts de ces trente dernières années l'environnement et la base
des ressources naturelles qui entretenaient la vie sur terre continuent de se détériorer à une
cadence alarmante,

La protection de l'environnement est devenue un problème essentiel des relations


internationales.

La première grande conférence des Nations unies sur l'environnement a été la


conférence de Stockholm de 1972, une conférence à l'origine du concept «
d'écod*éveloppement » qui s'efforçait déjà de concilier croissance et préservation des
ressources naturelles. Cette conférence a conduit à la création de ministères de
l'Environnement dans les États qui en étaient encore dépourvus. Elle a débouché sur la
création du Programme des Nations unies pour l'environnement et du Programme des
Nations unies pour le développement.

Vingt ans après Stockholm, la Conférence des Nations unies sur l'environnement et
le développement (également appelée Sommet de la Terre), qui s'est tenue en juin 1992 à
Rio de Janeiro, a introduit une nouvelle dynamique en donnant notamment naissance à de
nouvelles conventions multilatérales sur l'environnement: la convention-cadre des Nations
unies sur le changement climatique, la convention sur la diversité biologique et la convention
sur la désertification.

Pour la première fois, un grand nombre d'États (171) se sont réunis pour débattre
de l'avenir de la planète et ont adopté un plan en faveur du développement durable (Action
21).

La déclaration de Rio sur l'environnement et le développement vient consacrer un «


devoir d'assistance écologique' ».

Enfin, le deuxième Sommet de la Terre qui a été jugé décevant, s'est tenu à Johannesburg
en 2002. Le Sommet mondial sur le développement durable a permis de mesurer le chemin qui reste
à parcourir. Avancés d'entre eux» ainsi que les « situations dans lesquelles l'élimination ou la
~ 20 ~

réduction des restrictions et des distorsions des échanges serait bénéfique pour le
commerce, l'environnement et le développement»,

§1. Les grandes conventions internationales concernant l'environnement

- 1973: La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de


flore sauvage menacées de disparition. Cette convention, élaborée sous l'égide de l'ONU, a
été adoptée le 3 mars 1973.

- 1982: La convention de Montego Bay sur le droit de la mer qui comporte des
dispositions relatives à la protection et à la préservation du milieu marin. Cette convention
des Nations unies sur le droit de' la mer a été adoptée le 10 décembre 1982.

- 1985: La convention de Vienne sur la protection de la couche d'ozone. Cette


convention adoptée à Vienne, le 22 mars 1985, a été complétée en 1987 par le Protocole de
Montréal sur les substances qui appauvrissent la couche d'ozone. Le protocole organise
l'élimination des 96 produits attaquant la couche d'ozone selon un calendrier précis.

- 1989: La convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de


déchets dangereux et leur élimination. Cette convention élaborée sous l'égide du
Programme des Nations unies pour le développement a été adoptée le 22 mars 1989.

- 1992: La Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique


(CCNUCC). Cette convention, signée à Rio de Janeiro en 1992 a adopté l'objectif d'une
stabilisation des émissions de gaz à effet de serre. Elle impose effectivement aux États
signataires d'organiser des programmes nationaux de réduction des émissions de gaz à
effet de serre et de soumettre des rapports périodiques, les Etats industrialisés devant
stabiliser leurs émissions au niveau de 1990. Elle a été complétée en 1997 par le protocole
de Kyoto qui cherche à rendre la démarche juridiquement contraignante. L'entrée en vigueur
de ce protocole, adopté le 1 1 décembre 1997: a été conditionnée à sa ratification par au
moins cinquante-cinq signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur le
changement climatique dont des États industrialisés qui sont responsables ensemble d'au
moins 55 % des émissions de CO2 en 1990.

À Kyoto, les pays dits «de l'annexe 1» (les États membres de l'Organisation de
coopération et de développement économique (OCDE), les pays d'Europe de l'Est, l'Ukraine
et la Russie) se sont engagés à limiter de 5 % en 2012 leurs émissions de gaz à effet de
serre par rapport au niveau de 1990. Trois mécanismes sont définis par le protocole de
Kyoto :

− L'échange des permis d'émission de gaz à effet de serre entre États de


l'annexe I.
− « L'application conjointe» entre États de l'annexe I permettant à un pays X
d'obtenir des crédits d'émission de gaz à effet de serre au titre d'un
investissement physique, comme la modernisation d'une usine, diminuant
les gaz à effet de serre dans un pays Y. Ce mécanisme concerne
notamment les investissements que pourrait faire un pays industrialisé vers
un pays en transition.
~ 21 ~

− Le « mécanisme de développement» qui permet comme le précédent


l'échange d'une aide technique contre un crédit d'émission. Ce troisième
mécanisme concerne une transaction entre pays de l'annexe I et pays du
Sud.

Entré en vigueur en février 2005, le protocole de Kyoto a été ratifié par plus de 160
États. Parmi les pays riches, l'Australie et les États-Unis sont les seuls États à ne pas l'avoir
ratifié.

− La conférence de Montréal sur les changements climatiques, organisée par


l'ONU en 2005, est parvenue à assurer la pérennité du protocole de Kyoto
après 2012. Il a été aussi décidé de rassembler tous les États ayant ratifié la
CCNUCC, y compris les États-Unis, autour d'un processus de dialogue
informel et non contraignant.
− La conférence de Nairobi, qui est la douzième conférence des Nations unies
sur le changement climatique, a achevé ses travaux le 17 novembre 2006. Il
a été convenu d'ouvrir en 2008 la révision du protocole de Kyoto, laquelle
devra permettre de déboucher sur de futurs engagements de réduction des
émissions de GES.

Le Secrétaire général de l'ONU a estimé le 15 novembre 2006 que le changement


climatique était désormais l'une des principales menaces à la paix et à la sécurité.

1992: La Convention sur la diversité biologique (ou biodiversité). Cette convention,


adoptée en 1992, qui repose sur une approche globale et non plus sectorielle, elle a été
complétée en 2000 par un protocole sur la prévention des risques biotechnologiques. Ce
protocole a été signé par la quasi-totalité des États existants.

1994 : La Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification adoptée
à Paris le 17 juin 1994.

2001: La convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants. Cette


convention, qui est entrée en vigueur le 24 mai 2004, «permettra de sauver des vies et de
protéger l'environnement [...] en prohibant la production et l'usage de certains des
composants chimiques les plus toxiques qu'ait connus l'humanité », a déclaré le directeur
exécutif du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE).

Six pays de la zone Asie-Pacifique (États-Unis, Chine, Australie, Inde, Japon, Corée
du Sud) ont dévoilé, le 28 juillet 2005, un plan environnemental parallèle au protocole de
Kyoto visant à réduire les effets de serre.

Les six pays signataires, qui représentent à eux seuls presque la moitié des
émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde, ont décrit leur initiative comme un
complément au protocole de Kyoto. Cet accord non contraignant doit conduire les États à
réduire leurs émissions de GES en privilégiant des échanges de technologie.

Le 12 janvier 2006, les États-Unis ont conclu avec .la Chine, l'Australie, l'Inde, le Japon et la
Corée du Sud un partenariat prévoyant en particulier des échanges technologiesc.
~ 22 ~

CHAPITRE II : LE TERRORISME INTERNATIONAL

1°/ Définition
C'est une action politique violente, un moyen de pression à laquelle recourent les
individus ou de minorités organisées contre des personnes, des biens ou des institutions
pour exprimer une revendication. Il se distingue, selon Patrice GUENIFFEY, des autres
formes de violence politique par sa nature délibérée. Il est, selon l'auteur précité, une «
stratégie qui vise à terroriser un sujet afin de le contraindre ou de le soumettre en annihilant
en lui toute faculté d'action ou de résistance, et cela, non par la souffrance ou la mort, mais
par le spectacle de la souffrance et de la mort infligées préalablement à un certain nombre
de victimes éventuellement choisies selon le principe du hasard»1 .

Pour cet auteur, il existe un rapport étroit entre violence et terrorisme au point qu'il
n'est pas permis d'opérer une confusion quant à leur utilisation. En effet, « tous les actes
terroristes sont violents» alors que « tous les actes de violence ne sont pas terroristes» ; si
bien que « dans le terrorisme, la violence est un moyen », alors que « dans la violence, la
terreur est un effet»2. La violence terroriste, note-il, « est déterminée par un calcul et vise à
produire certains effets en vue d'une fin déterminée. Peu importe que cette fin soit ou ne soit
pas rationnelle; peu importe que le terrorisme ne permette quasiment jamais d'atteindre le
but recherché. Le terrorisme est rationnel indépendamment de ses effets réels; il est
rationnel en ceci que le terroriste choisit délibérément ce moyen en fonction d'un calcul
même erroné, sur le coût respectif des moyens disponibles, rapporté à la fin qui est la sienne
»3. « La violence (lynchage, massacre ou assassinat), poursuit l'auteur, met en scène deux
acteurs, le tueur (...) et sa victime (...) ; le terrorisme exige toujours au moins trois acteurs: le
terroriste, la victime qu'il frappe, enfin la cible qu'il s'agit d'atteindre ... Il y a toujours trois
protagonistes, et c'est l'existence du troisième, autrement dit la distinction entre la victime et
la cible, qui fonde la rationalité de cette stratégie» 4. Le terrorisme a pour autre particularité
«d'être une stratégie de la communication: la violence y est toujours un message adressé à
la cible visée, même si une partie du public, à commencer par les victimes, peuvent ne
jamais en connaître la teneur»5.

Le terrorisme est devenu un des instruments les plus puissants de la guerre


moderne. A tout moment, il peut faire des otages ou des victimes d'un groupe d'hommes
décidés à imposer leur volonté à un Etat ou à un groupe. De la sorte, le terrorisme est la
plus violente de la guerre psychologique, - l'objectif fondamental étant de créer une
psychose auprès du public, de déstabiliser les esprits. Les actes de violence à laquelle les
terroristes recourent créent un climat d'insécurité, la peur, le désordre.

Les combattants du terrorisme se recrutent parmi tous les groupements


révolutionnaires du Moyen-Orient, des gouvernements des révoltés des pays occidentaux.

Les types d'actions auxquelles recourent les terroristes sont la guérilla urbaine
marxiste-léniniste dans les pays industriels, la guérilla rurale dans les pays en

1
GUENIFFEY Patrice, « Généalogie du terrorisme contemporain », in Le Débat, n0126, 2003, p. 158
2
Ibidem
3
Ibidem
4
GUENIFFEY Patrice, art.cit., pp.158-159
5
Idem, p.159
~ 23 ~

développement, l'action des mouvements autonomes (comme l'Armée Républicaine


Irlandaise -IRA- ou le mouvement séparatiste basque -ETA) et la collaboration des groupes
néo-fascistes (Allemagne, Italie, France) avec des organisations d'extrême gauche. Il s'agit
là des actions spectaculaires qui doivent avoir une efficacité médiatique pour impressionner
les pays occidentaux et les conduire à accepter les conditions posées par les terroristes6.

2°/ Objectifs et moyens d'action

Les objectifs du terrorisme peuvent être très variés: obtenir de l'argent (C'est le cas
de différentes actions qui ont permis à l'OLP de gagner de l'argent. C'est aussi le cas de la
prise d'otages, de différentes primes versées par les compagnies aériennes pour éviter les
détournements d'avions, des versements des pays pétroliers qui réglaient toutes les
livraisons d'armes soviétiques et qui alimentaient le budget de l'OLP, ...), tuer des
personnalités qui risquent de gêner leur action (Les premières victimes seront les modérés
de l'OLP partisans d'un dialogue avec Israël. On se rappelle aussi des attentats contre de
nombreux diplomates de plusieurs pays et ceux contre Ronald REAGAN et le Pape Jean
Paul Il), tuer pour tuer, faire peur aux populations des pays occidentaux et conduire les
gouvernements à composer avec les terroristes (attentats dans la rue, dans les trains, dans
les magasins, dans les bateaux, détournement des avions), obtenir l'autonomie, renverser le
régime établi, lutter contre certains aspects de la politique économique d'un Etat, provoquer
le durcissement de l'appareil étatique afin d'en affaiblir les bases et la légitimité
démocratique, ...7

Les motifs qui conduisent au choix du terrorisme comme moyen d'action sont variés.
Il s'agit surtout de déstabiliser les sociétés civiles et les gouvernants par la peur, de pousser
les appareils étatiques à prendre des mesures répressives impopulaires, d'éliminer les
personnalités gênantes, de faire pression sur l'opinion publique et parfois, de camoufler
l'action d'un Etat derrière les terroristes. Le terrorisme peut aller jusqu'à la remise en
question de l'ordre politique social existant ou jusqu'à déclencher la révolution. Nous disons
tout de même que le terrorisme pourrait être une arme des lâches dont les auteurs préfèrent
opérer dans la clandestinité plus obscure au point de faire périr les innocents.

Les Etats démocratiques et libéraux, dont la culture dominante accorde une grande
valeur à la vie humaine, à la propriété des biens et à la paix sociale offrent un terrain très
favorable aux actions terroristes. La relative liberté d'action et de circulation, l'urbanisation
rendent plus difficiles les réponses policières au terrorisme. Ce sont aussi des sociétés très
médiatisées, au sein desquelles la terreur est amplement diffusée par les medias, qui
peuvent ainsi servir indirectement la cause terroriste.

3°/ Formes de terrorisme

Il existe plusieurs variétés de terrorisme8. Citons notamment :

1. Le terrorisme régional ou autonomiste: il est le fait des nations ou de minorités


opprimées et méconnues. Ce genre de terrorisme est repérable dans beaucoup de

6
Lire, à cet effet, DIUR Katond, Introduction aux relations internationales, Université de Kinshasa, 2004, pp.185-191
7
DIUR Katond, op.cit, p. 95 ; Lire aussi GOUNELLE Max, Les relations internationales, Paris, 3éme éd. Dalloz, 1996, p. 127
8
GOUNELLE Max, Idem, p. 128
~ 24 ~

pays et principalement en Irlande, au Pays bas, en France, ...


2. Le terrorisme d'extrême gauche: il est observé en Allemagne, en Italie chez les
extrémistes nazis et fascistes.
3. Le terrorisme issu de l'instabilité et des désespoirs (déséquilibres) du Moyen et du
Proche- Orient. C'est le cas de terrorisme palestinien, du terrorisme de référence
islamique et anti- occidental.
4. Le terrorisme soutenu plus au moins directement par certains Etats comme la Libye,
l'Iran, la Syrie, l'Irak, le Soudan. Ce genre de terrorisme par les dirigeants de ces
Etats se présente comme un instrument conjoncturel de politique extérieure.
5. Le terrorisme d'Etat, consistant en l'anéantissement des opposants par des
méthodes et des groupes apparemment distincts de l'Etat, mais en réalité manipulés
par lui (c'est le cas de la Grèce des colonels, du Chili du général PINOCHET, de
l'Argentine du général VIDELA).

Avant de clore ce point, notons que la guerre et le terrorisme sont deux formes
de violence figurant à l'agenda de la « grammaire des relations internationales ». Ils sont
tous deux l'expression d'une lésion. Le terrorisme s'entoure souvent de l'anonymat pour
poser ses actes surprises et des fois suicidaires afin d'infléchir la position de celui vers qui
l'action est destinée tandis que le guerrier est mieux identifié car appartenant à une armée
régulière bien connue. Par contre, le conflit et la crise servent de thermomètre pour évaluer
la température dans l'appréciation d'une guerre qui pointe à l'horizon pour l'une ou l'autre
raison. Ceci nous amène naturellement à examiner les causes de la guerre.

§1. La lutte contre le terrorisme

Originairement, c'est un crime inscrit dans les frontières nationales. Le terme


apparaît dans le langage juridique après la Révolution française: en réaction àl'invasion
étrangère et aux menaces intérieures, la Convention nationale adopte, pour consolider les
avancées révolutionnaires, des mesures d'exception, au nom de la Terreur proclamée en
août 1793. Lorsque les révolutionnaires renversent Robespierre le 9 thermidor an II (27
juillet 1794), ils ne peuvent pas le rendre responsable de la terreur, puisqu'ils l'avaient eux-
mêmes proclamée; aussi l'accusent-ils de terrorisme, signifiant par ce terme une utilisation
abusive de la terreur exercée par l'État. Ainsi, lorsqu'en 1798, le mot «terrorisme» apparaît
pour la première fois dans le dictionnaire de l'Académie française, il désigne un mode de
gouvernement.

Cependant, presque simultanément (en 1800, Bonaparte échappe à un attentat à la


bombe perpétré par les royalistes chouans), se produit un glissement sémantique, qui
aujourd'hui encore obscurcit le débat sur le terrorisme: de la terreur d'État à la terreur contre
l'État; en d'autres termes, de la violence politique à la violence criminelle, du terrorisme
d'État au terrorisme international.

Le terrorisme s'en prend à toutes les valeurs, notamment celles défendues par les
Nations Unies: respect des droits de l'homme, primauté du droit, protection des civils,
tolérance entre les peuples et les nations, et règlement pacifique des conflits ... Cette
menace n'a cessé de grandir ces dernières années. Les réseaux transnationaux de groupes
terroristes opèrent sur toute la planète. Cette nouvelle forme de terrorisme, ayant des
~ 25 ~

objectifs etusant de nouveaux moyens d'action, nécessite de nouveaux moyens


d'intervention et a des diverses formes.

1. Les objectifs et moyens du terrorisme

a) Les moyens financiers

Voir texte p. 15 de ce document.

Les terroristes doivent nécessairement s'appuyer sur des structures fortes pour
mener leurs actions. Lorsqu'ils occupent et maîtrisent un espace territorial conséquent, et se
transforment en guérilleros, ils ont un accès à des ressources capitales: en Angola, en
République démocratique du Congo, en Afrique occidentale, les diamants et les ressources
minières alimentent de façon quasi inépuisable leur « trésor de guerre », En effet, le trafic de
ces matières n'est pas difficile, ce qui permet aux mouvements de recueillir des sommes
élevées. Le trafic de stupéfiantspermet également de mobiliser de fortes sommes d'argent;
qu'il s'agisse de la culture de l'opiumen Afghanistan et en Birmanie, de la cocaen Colombie
... tous ces trafics, très lucratifs, entretiennent par le biais des consommateurs européens et
américains notamment - les mouvements terroristes. Dans certains cas, des individus
disposant d'une imposante fortune, tels Oussama ben Laden, assurent la logistique.

b) Les modes d'action terroristes

Les techniques terroristes se sont perfectionnées avec l'évolution des technologies,


recourant ainsi aux moyens qu'ils jugent les plus efficaces, quant à l'ampleur des dégâts
causés et aux retombées médiatiques. Il est en outre indispensable de garder à l'esprit un
autre élément qui conditionne ou explique la mise en œuvre de certains modes d'action: le
fondement doctrinalou religieux, de l'organisation terroriste. En effet, l'identité dont se
revendique le mouvement lui fera privilégier telle ou telle méthode: opération
kamikase,attentat à la bombe, enlèvement de personnalités ...

Les attentats ayant frappé les États-Unis le II septembre 2001 sont des actions qui,
bien que particulièrement meurtrières et médiatiques, n'en ont pas moins usé de techniques
anciennes. Ainsi, des avions ont déjà été détournés à l'aide d'armes blanches(cf,dans les
années 1970, les actions commises par l'Armée rouge japonaise, groupe d'inspiration
marxiste-léniniste radical) ; les attentats-suicides sont des pratiques relativement courantes
(Tigres tamouls au Sri Lanka, Ramas ou Djihad islamique en Palestine ...).

Toutefois, l'attentat à l'explosif demeure encore le mode d'action le plus employé


par les organisations terroristes. La raison en est qu'il est relativement facile de se procurer
des informations sur la fabrication des différentes substances chimiques explosives et les
modalités d'utilisation; en outre, cette technique peut faire, à peu de frais, un relativement
grand nombre de victimes (attentats de la station de métro Saint-Michel à Paris en juillet
1995, explosion d'une bombe à la station RER Port-Royal en 1996, attentat à la bombe
contre une discothèque à Bali en octobre 2002, attentats de Casablanca en mai 2003,
attentats de Londres en juillet 2005 ... ).

Cependant, ce qui suscite les plus vives inquiétudes est l'éventuelle acquisition par
lesorganisations terroristes d'armes de destruction massive. De telles armes sont, pour ainsi
~ 26 ~

dire, en vente libre sur le marché: missiles balistiques, missiles de croisière, produits
cyanurés, virus, toxines ... Ces craintes sont justifiées. En effet, les vagues d'arrestations au
sein de la mouvance djihadiste en 2002 ont mis en évidence des tentatives d'attentat au
cyanure. Toutefois, l'une des armes biologiques les plus dangereuses est la ricine (6000 fois
plus toxique que le cyanure et pour laquelle il n'y a pas d'antidote connu) : de très faibles
quantités sont suffisantes, ce qui rend sa détection difficile.

Le risque d'attaques radiologiques (dispersion de matière radioactive par


l'intermédiaire d'explosifs classiques) est également avéré. En effet, il est relativement aisé
de localiser les lieux dans lesquelsdes substances radioactives se trouvent: centres
hospitaliers, installations militaires, centres universitaires de physique nucléaire, centrales
nucléaires.Une attaque contre de telles installations pourrait faire un grand nombre de
victimes (directement et indirectement) et contaminer de vastes zones urbaines. En outre, le
vol de produits nucléaires est envisageable; on estime en effet que seuls 20 % des sites
abritant des produits radioactifs font l'objet d'une surveillance adéquate. Selon les experts, il
suffirait à des terroristes de disposer de 50 kilogrammes d'uranium hautement enrichi - qui
tiendraient dans deux ou trois boîtes à chaussures - pour confectionner un engin nucléaire
artisanal capable de raser une ville de taille moyenne. Les terroristes ont encore peu utilisé
ces armes, car leur maniement nécessite de fortes compétences techniques, qu'ils ne sont
pas encore tous capables de mobiliser. Néanmoins, le risque existe; l'on soulignera à cet
égard l'adoption, par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 13 avril 2005, de la
convention sur la répression des actes de terrorisme nucléaire.

c) Formes du terrorisme voir p. 16 de ce document

2. Les modalités d'intervention contre le terrorisme

Depuis les attentats du II septembre 2001, on ne parle plus de terrorisme, mais d' «
hyper-terrorisme ». notion permettant d'évoquer l'organisation en réseaux qu'est Al-Qaida,
utilisant les moyens technologiques et financiers modernes pour relier des individus et des
groupes terroristes indépendamment de toute base territoriale fixe. Certes, il est toujours
possible d'identifieret de localiser quelques camps d'entraînement et des infrastructures,
abrités par des États plus ou moins complices, mais l'immatérialité de l'organisation favorise
son adaptabilité. Dans ces conditions, comment lutter efficacement contre ces nébuleuses?
Deux modalités d'action sont envisageables: soit unilatéralement (cf.l'intervention des États-
Unis immédiatement après le 11 septembre 2001 contre les talibans afghans, puis en Irak),
mais les faits montrent que cette technique n'est pas efficacecontre le terrorisme; soit par le
biais d'actions multilatérales. Dans cette seconde hypothèse, trois actions doivent être
impérativement menées en parallèle: d'une part, établir une définition juridique du
terrorisme, d'autre part, criminaliser son financement, enfin, globaliser la répression pénale.

a) La recherche d'une définition du terrorisme

L'établissement d'une définition du terrorisme est une entreprise à la fois


polémique et subjective, en ce que les enjeux politiques qui s'y attachent sont considérables.
Toutefois, définir le terrorisme n'a pas pour seule fonction de permettre une meilleure
compréhension du phénomène « terrorisme ».Cela permet aussi, voire principalement, de
~ 27 ~

définir et de justifier les moyens choisis pour le contrer. Cependant, un constat s'impose
immédiatement: il n'existe pas encore de définition conventionnellement admise du
terrorisme en droit international. Il est intéressant de noter à cet égard que ni la Convention
du 15 décembre 1997 sur la répression des attentats terroristes à l'explosif ni la Convention
du 9 décembre 1999 pour la répression du financement du terrorisme ne contiennent de
définition !

En revanche, certaines conventions régionales de lutte contre le terrorisme


contiennent des définitions. Ainsi, l'article 1, § 3 de la Convention de l'OUA sur la prévention
et la lutte contre le terrorisme, adoptée le 14 juillet 1999 dispose: « Est "Acte terroriste": (a)
tout acte ou menace d'acte en violation des lois pénales de l'État Partie susceptible de
mettre en danger la vie, l'intégrité physique, les libertés d'une personne ou d'un groupe de
personnes, qui occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens privés ou publics,
aux ressources naturelles, à l'environnement ou au patrimoine culturel, et commis dans
l'intention: (i) d'intimider, de provoquer une situation de terreur, de forcer, d'exercer des
pressions ou d'amener tout gouvernement, organisme, institution, population ou groupe de
celle-ci, à engager toute initiative ou de s'en abstenir, d'adopter, de renoncer à une position
particulière ou d'agir selon certains principes; ou (ii) de perturber le fonctionnement normal
des services publics, la prestation de servicesessentiels aux populations ou de créer une
situation de crise au sein des populations: (iii) de créer une insurrection générale dans un
État Partie. (b) Toute promotion, financement, contribution, ordre, aide, incitation,
encouragement, tentative, menace, conspiration, organisation ou équipement de toute
personne avec l'intention de commettre tout acte mentionné au paragraphe a (i) à (iii) ».

Voir p. 13 de ce document.

L'établissement d'une définition acceptable, et donc acceptée, est plus aisé au


niveau local ou régional qu'au niveau universel, étant donné que ce qui serait perçu comme
subjectif par certains au niveau général sera considéré comme objectif (ou moins subjectif) à
un niveau régional,les valeurs partagées par les États en cause étant, si ce n'est identiques,
à tout le moins très proches. Ainsi, pour l'Occident, le terrorisme est un acte de violence
individuelle ou en groupe alors que pour les pays du Tiers-monde, il est essentiellement un
mode de gouvernement pour asseoir une politique raciste et/ou colonialiste. Ainsi, pour
l'Algérie, sont qualifiés de terrorisme des actes internes dirigés contre le régime en place; le
Koweït se réfère à l'invasion de l'Irak en 1990 et la Russie aux mouvements sécessionnistes
tchétchènes ... le résistant des uns est bien souvent le terroriste des autres.

Ces divergences de vue apparaissent très nettement dans les travaux du comité
spécial chargé d'élaborer une convention générale sur te terrorisme international; ce comité
a été instauré en 1996 et n'est toujours pas parvenu à adopter une définition du terrorisme;
la-raison en est qu'un certain nombre de délégations considèrent que doivent être excluesde
la définition les méthodes employées par les mouvements de libération nationale. Toutefois,
ainsi que le souligne le Secrétaire général des Nations Unies: « Le droit de résister à
l'occupation doit être entendu dans son sens véritable. Il ne peut s'étendre au droit de tuer
ou de blesser intentionnellement des civils.» (« Dans une liberté plus grande:
développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous», 24 mars 2005,
A/59/2005, p. 31.)
~ 28 ~

Bien qu'il n'y ait pas de définition conventionnellement établie et admise, le


terrorisme a toutefois été défini par le Conseil de sécurité, sur le fondement du chapitre VII,
dans la résolution 1566 (2004) du 8 octobre 2004qui dispose que sont des « actes criminels,
notamment ceux dirigés contre des civils dans l'intention de causer la mort ou des blessures
graves ou la prise d'otages dans le but de semer la terreur parmi la population,un groupe de
personnes ou chez des particuliers, d'intimider une population ou de contraindre un
gouvernement ou une organisation internationale à accomplir un acte ou à s'abstenir de le
faire ». Ilest intéressant de noter que ce texte ne fait pas référence au terrorisme d'État.
Faut-il y voir une lacune? Pas véritablement; en effet, le terrorisme d'État peut être rattachéà
la question de l'usage illicite de la force armée domaine déjà largement réglementé par le
droit international (cf. supra chapitres 3 et 5).

Pour conclure, la définition du terrorisme doit mettre en évidence trois éléments : la


terreur, la violence et l'élément intentionnel. G. Guillaume définit ainsi l'acte criminel de
terrorisme: des actes de violence de nature à provoquer des morts ou des dommages
corporels graves; une entreprise individuelle ou collective tendant à la perpétration de ces
aces; un but avoué: créer la terreur dans le public (« Terrorisme et droit international ».
RCADI, 1989-111, vol. 215, p. 304).

L'on soulignera à cet égard que le Code pénal français adopte une définition du
terrorisme très proche, reprenant tous les éléments nécessaires à la définition d'une
infraction pénale: l'élément matériel- actes de violence -, l'élément intentionnel- entreprise
tendant à la perpétration de ces actes -, et le mobile- créer la terreur ou troubler gravement
l'ordre public - (art. 421-1 : «Constituent des actes de terrorisme, lorsqu'elles sont
intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but
de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, les infractions suivantes :
1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne,
l'enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d'aéronef, de navire ou de tout
autre moyen de transport [ ... ] 2° Les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et
détériorations, ainsi que les infractions en matière informatique [ ... ] 3° Les infractions en
matière de groupes de combat et de mouvements dissous [ ... ] 4° Les infractions en matière
d'armes, de produits explosifs ou de matières nucléaires» ; art 421-2: «Constitue également
un acte de terrorisme, lorsqu'il est intentionnellement en relation avec une entreprise
individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation
ou la terreur, le fait d'introduire dans l'atmosphère, sur le sol, dans le sous-sol, dans les
aliments ou les composants alimentaires ou dans les eaux, y compris celles de la mer
territoriale, une substance de nature à mettre en péril la santé de l'homme ou des animaux
ou le milieu naturel»).

b) La criminalisation du financement du terrorisme

Au lendemain des attentats du 11septembre, le Conseil de sécurité, par la


résolution 1373 (2001) a chargé un comité contre le terrorisme de fournir une assistance
technique aux États et de promouvoir la coopération internationale; il a en outre instamment
demandé aux États de ratifier la convention du 9 décembre 1999 pour la répression du
financement du terrorisme. Cependant, la véritable innovation de cette résolution est
d'imposer à tous les États d'ériger « en crime la fourniture ou la collecte délibérée par leurs
nationaux ou sur leur territoire » de fonds destinés à perpétrer des actes de terrorisme et de
~ 29 ~

geler « sans attendre les fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques des
personnes qui commettent, ou 'tentent de commettre, des actes de terrorisme» (point 1, a et
b). Les États sont ainsi appelés à criminaliser le financement du terrorisme en considérant ce
financement comme une infraction « en amont» et à part entière.

Dès octobre 2001, le Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux
(GAFI, organisme intergouvernemental) a étendu sa mission au financement du terrorisme; il
a ainsi adopté, en 2003, quarante recommandations à l'intention des institutions financières,
notamment concernant les opérations financières suspectes. Les réactions nationales ne se
sont guère faites attendre. Ainsi, la France a-t-elle, dès le 15 novembre 2001, adopté une loi
inscrivant dans le Code pénal l'infraction de financement du terrorisme (art. 421 – 2 – 2 :
« Constitue également un acte de terrorisme le fait de financer une entreprise terroriste en
fournissant, en réunissant ou en gérant des fonds, des valeurs ou des biens quelconques ou
en donnant des conseils à cette fin, dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou bines
utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie, en vue de
commettre l'un quelconque des actes de terrorisme prévus au présent chapitre,
indépendamment de la survenance éventuelle d'un tel acte »).

La Convention du 9 décembre 1999 sur la répression du financement du terrorisme


contient trois obligations principales pour les Etats parties. D'une part, les Etats parties
doivent ériger le financement d'actes de terrorisme en crime au regard de leur droit interne.
D'autre part, ils doivent œuvre en coopération étroite avec les autres Etats parties et leur
prêter une assistance judiciaire pour les questions traitées par la Convention. Enfin, ils
doivent adopter des mesures d'identification et de signalement d'indices de financement
d'actes de terrorisme à la charge des institutions financières.

Toutes ces mesures sont incontestablement nécessaires, mais elles sont


susceptibles de conduire à des dérives inquiétantes pour les libertés publiques ; en effet, les
listes de terroristes sont élaborées par les services d’espionnage, principalement américain,
de façon unilatérale et sans grande transparence ; les services financiers n’ont en outre
aucun moyen de contrôler la fiabilité de ces listes. En outre, avant de mettre en place, au
niveau mondial, une telle stratégie, il aurait fallu s’entendre sur une définition commune du
terrorisme.

c) La globalisation de la répression pénale

Toutes les conventions relatives au terrorisme tentent de développer la procédure


d'extradition. Néanmoins des conditions strictes sont posées pour que cette extradition
puisse avoir lieu : d'une part, il faut que l'incrimination existe à la fois dans l'Etat requis et
dans l'Etat requérant l'extradition ; d'autre part, l'Etat requis à la possibilité de refuser
l'extradition si les motifs sont d'ordre politique ou si l'infraction est elle-même politique. L'on
perçoit clairement en quoi cette dernière condition est un obstacle à grand nombre de
demandes d'extradition de personnes soupçonnées ou accusées de terrorisme.

Aussi, les conventions de lutte contre le terrorisme ont tenté de pallier cette double
difficulté en obligeant les Etats à intégrer dans leur législation nationale des infractions
définies en termes identiques, et en énumérant les infractions qui ne peuvent plus être
qualifiées d'infractions politiques. La volonté est nettement de « dépolitiser » le terrorisme,
~ 30 ~

afin de favoriser l'entraide policière internationale.

Depuis les années 1980, on observe, à ce sujet, une extension progressive


deL’activité d'Interpol aux activités terroristes, alors que son statut exclut explicitement toute
intervention dans des affaires présentant un caractère politique.

Toutefois, un véritable changement a été marqué en Europe par l'adoption


simultanée, le 13 juin 2002, de deux décisions cadres, l'une relative à la lutte contre le
terrorisme, l'autre instaurant le mandat d'arrêt européen, supprimant ainsi la procédure
d'extradition et imposant la remise des suspects à l'Etat qui en fait la demande, notamment
en matière de terrorisme. On notera à cet égard qu'il a fallu modifier la constitution française
(art. 88−2, al. 3) avant d'introduire le mandat d'arrêt européen en droit français, car la
décision cadre ne permettait pas, selon le Conseil d'Etat (CE, avis du 26 septembre 2002),
d'assurer le respect du principe, de valeur constitutionnelle, selon lequel l'Etat doit se
réserver le droit de refuser l'extradition pour des infractions qu'il considère comme des
infractions à caractère politique (principe dégagé par le Conseil d'Etat dans l'arrêt Koné du 3
juillet 1996).

Toutefois, l'extradition n'est pas le seul instrument de répression pénale du terrorisme. En


effet, si l'extradition n'est pas possible, il repose sur les Etats une obligation de juger le
responsable de l'infraction. En outre, afin de permettre aux Etats d'exercer une compétence
effective, la convention de la Haye de 1970 relative aux détournements d'avions a institué la
règle de la compétence universelle ; en d'autres termes sera compétent l'Etat sur le territoire
duquel l'auteur présumé de l'infraction se trouve, même si l'acte n'a pas été accompli sur son
territoire, que l'auteur n'est pas un ressortissant de cet Etat, et qu'aucune victime n'a la
nationalité de cet Etat. L'objectif est de réduire les hypothèses d'impunité. A cet égard, l'idée
a été soulevée de reconnaître la Cour pénale internationale compétente pour les crimes de
terrorisme, mais ce projet n'a pas encore vu le jour.
~ 31 ~

CHAPITRE III : LA SECURITE NUCLEAIRE

La Seconde Guerre mondiale a pris fin dans le Pacifique de façon pour le moins
terrible et brutale avec le lancement, les 6 et 9 août 1945, de l'arme atomique contre
Hiroshima et Nagasaki. La stupeur une fois passée, le monde entier a pris conscience, outre
de l'hypothèse de la disparition de l'humanité en tant qu'espèce, de la suprématie
américaine dans le domaine du nucléaire militaire. Ce monopole ne dura cependant que peu
de temps, le « duopole nucléaire», établissant en ce domaine l'équilibre de la terreur.
Toutefois, cette politique de dissuasion nucléaire n'a pu être durablement tenue et,
rapidement, s'est fait jour la nécessité de ralentir la course aux armements nucléaires.

§1. La dissuasion nucléaire

Les stratégies des deux Grands ont rapidement dû prendre en considération la


multiplication des participants au jeu nucléaire.

1. Les stratégies nucléaires

Dans l'optique américaine, l'arme nucléaire était, paradoxalement, une arme de


paix,
en ce sens qu'elle devait, empêcher les guerres. Ainsi que l'affirmait le président
Eisenhower: « Il n'y a pas d'alternative à la paix.» De 1945 au milieu des années 1950, les
États-Unis sont les maîtres de l'arme nucléaire, mais conscients de la volonté de l'URSS
d'acquérir cette technologie, acquisition qui sera achevée en 1952.

Cependant, entre-temps, a lieu la guerre de Corée. Le président Truman décide


alors de l'envoi dans l'océan Pacifique de bombardiers susceptibles de transporter des
bombes atomiques. L'usage de cette arme est envisagé lorsque les forces des Nations
Unies se font attaquer par des divisions de la Chine populaire. Le projet est finalement
abandonné, car l'emploi de la bombe, étant donné la configuration et du terrain, et de
l'armée chinoise, très fragmentée, aurait été peu efficace. Ce conflit a cependant été le
premier test grandeur nature de l'utilisation de l'arme nucléaire comme arme de dissuasion
d'une part, et de coercition d'autre part. L'important est donc moins l'arme elle-même que la
menace de son emploi. Toutefois, en 1954, l'administration américaine prend conscience
des risques que la stratégie de guerre préventive fait courir non seulement à la planète, mais
également aux États-Unis qui seraient, dans l'hypothèse d'une guerre atomique
catastrophique dont ils sortiraient vainqueurs, chargés de l'occupation et de la reconstruction
du territoire vaincu. Ce qui, financièrement, serait ingérable. Aussi le secrétaire d'État John
Foster Dulles propose-t-il le concept de « représailles massives», à savoir faire en sorte que
les conflits locaux le demeurent et ne se diffusent pas au reste de la région, et ce en
employant l'arme atomique. Mais ce concept intervient lorsque les États-Unis perdent
définitivement le monopole nucléaire. Cette stratégie de dissuasion n'est plus tenable dans
le cadre de la dissuasion bilatérale; aussi l'administration américaine va-elle adopter, dans
les années 1960, la doctrine de la « riposte souple, flexible, graduée», consistant à
proportionner la riposte à la menace (à la guerre conventionnelle, on répond par des armes
conventionnelles; à la guerre nucléaire, on répond par des armes nucléaires).

Cependant, à deux reprises, lors des crises de Berlin en 1961 et de Cuba en 1962,
~ 32 ~

nous frôlerons la guerre nucléaire. La crise des missiles de Cuba marque, à cet égard, un
tournant dans l'histoire des relations internationales: la fin de la guerre froide. Depuis ce 22
octobre 1962, le monde n'a pas connu d'autre crise impliquant l'éventualité d'une escalade
nucléaire,toutefois, des menaces localisées existent, notamment celle de la Corée du Nord
et le problème du conflit inde-pakistanais. En outre, cette crise marque le début du dialogue
Est-Ouest en matière de maîtrise de l'armement nucléaire.

Cependant, la question de savoir si l'arme atomique est véritablement la réponse


absolue à tous les dangers de conflits peut être discutée. Ainsi que le soulignait R. Aron, «
Plus l'horreur de la guerre thermonucléaire est grande, moins la menace d'y recourir est
plausible. [...] On ne peut pas affirmer que l'holocauste thermonucléaire est trop horrible pour
que personne ne le déclenche et, en même temps, compter sur l'efficacité de cette menace
en toute circonstance» (Paix et guerre entre les nations, Calmann-Lévy, Paris, 1962). Il n'en
demeure pas moins que cette stratégie nucléaire à longtemps dominé les relations
internationales et a servi de justification aux autres puissances pour se doter de l'arme
atomique.

2. La multiplication des participants au jeu nucléaire

Le duopole thermonucléaire a, très rapidement, été concurrencé. Ainsi, dès 1947,


le gouvernement britannique travailliste de C. Attlee décide, dans le plus grand secret, de
lancer un programme de réalisation d'armes nucléaires: la première bombe A explosé, le 3
octobre 1952 et la première bombe H le 15 mai 1957. Toutefois, afin de ne pas heurter les
États-Unis - qui voient dans toute force nucléaire indépendante une source d'instabilité -, la
Grande Bretagne mène une double politique visant à montrer, non seulement qu'elle existe
face aux États-Unis, mais également que sa force nucléaire complète leur dispositif.

La France adoptera une attitude différente de celles des Britanniques. Le général


De Gaulle est initié au secret nucléaire dès le 11 juillet 1944, et comprend immédiatement
l'importance politique de cette nouvellearme. En décembre 1954, Pierre Mendès de France,
président du Conseil, prend la décision de principe de doter la France d'un armement
nucléaire indépendant. La première bombe atomique française explose le 13 février 1960.
Le général De Gaulle décide alors de doter la France d'une véritable stratégie nucléaire,
stratégie dite « du faible au fort»; en d'autres termes, le faible doit être capable d'infliger des
dommages au moins équivalents à la valeur de l'enjeu qu'il représente pour le fort, l’option
atomique sera présentée dans un discours du 3 novembre 1959: « Il faut que la défense de
la France soit française [...] Naturellement, la défense française serait, le cas échéant,
conjuguée avec celle d'autres pays. [...] il faut que nous sachions nous pourvoir, au cours
des prochaines années, d'une force capable d'agir pour notre compte, de ce qu'on est
convenu d'appeler "une force de frappe", susceptible de se déployer à tout moment et
n'importe où. Il va de soi qu'à la base de cette force sera un armement atomique.» S'ouvre
alors un grand débat autour du nucléaire militaire, débatqui marque les décennies 1960-
1980 et qui porte sur la crédibilité du « parapluie nucléaire» américain sur l'Europe. Se pose
en effet la question de savoir si, en cas de guerre en Europe, les États-Unis déclencheraient
le feu atomique, risquant ainsi une riposte soviétique du même type. Des alliances restent
donc nécessaires. Il n'en demeure pas moins que la France, en 1966, quitte l'organisation
militaire intégréede l'OTAN, mais reste membre de celle-ci. L'idée défendue par le général
De Gaulle est que la France doit rester souveraine au moment d'engager ses forces, d'où la
~ 33 ~

conclusion d'accords spécifiques entre le commandement militaire de l'Alliance atlantique et


l'état-major français, fixant les conditions d'emploi de l'armée française en cas de guerre.

La République populaire de Chinese dotera, quant à elle, de l'arme atomique dans


les années 1960, affirmant ainsi sa volonté d'assurer sa protection seule, indépendamment
de son allié soviétique.

Aux côtés de ces cinq puissances nucléaires, sont apparus, plus récemment, l'Inde,
le
Pakistan, Israëlet la Corée du Nord(État qui, bien que signataire du Traité de non-
prolifération nucléaire de 1968, n'en a pas moins acquis l'arme nucléaire, donc en violation
de ses engagements internationaux). Outre ces Étatsdisposant de l'arme atomique, d'autres
pays mettent en œuvre un programme nucléaire, à des fins officiellement civiles, mais que la
communauté internationale soupçonne d'être militaires. Tel est le cas de l'Iran, du Brésil, de
l'Arabie Saoudite, de l'Algérie, de la Syrie. Cette prolifération de l'armement atomique ne
laisse pas d'inquiéter les différentes instances internationales (AIEA, ONU) et soulève la
question de la nécessaire maîtrise de l'armement nucléaire.

§2. La prolifération des armes de destruction massive

La lutte contre la prolifération des armes dites de « destruction massive »,


lesquelles regroupent les armes nucléaires9, chimiques10 et biologiques11 ainsi que les
missiles balistiques, s’avère être l’un des grands défis actuels de la communauté
internationale.

La prolifération de ces armes, qui suscitent la peur, constitue une menace pour la
paix et la sécurité internationales.

À. partir des années 1970, toute une série de traités, d'accords et d'arrangements
ont été élaboré pour faire face à la prolifération de ces armes dites aussi non
conventionnelles.

Mais le système de traités et de règlements mis en place durant les années 1970 à
1990 n’est pas parvenu à enrayer la prolifération des ADM.

Comme on le sait, l'élimination des armes de destruction massive de l'Irak a fait


partie des « buts de guerre- » fixés par le président des États-Unis lors de l'opération Iraqi
Freedom lancée le 9 mars 2003.

Le sommet qui réunit chaque année les dirigeants des États-Unis et ceux de l'Union
européenne a été l'occasion de publier à Washington, le 25 juin 2003, une déclaration
commune « sur la prolifération des ADM ».

9
Ces armes utilisant l’énergie nucléaire sont des armes de dissuasion. On distingue notamment la bombe atomique (bombe A), la bombe à
hydrogène (bombe H) et la bombe à neutron (bombe N). L’arme nucléaire a été utilisée le 6 août 1945 (Hiroshima) et le 9 août 1945
(Nagasaki).
10
On distingue trois grandes catégories d’armes chimiques : les suffocants comme le chlore ou le phosgène qui agissent sur les poumons ;
les vésicants comme le gaz moutarde qui attaquent la peau ; les neurotoxiques comme le VX ou le sarin qui agissent sur le système nerveux.
11
Les armes biologiques ou bactériologiques sont des armes utilisant des virus, des microbes et autres substances infectieuses (le ricin, le
bacille de charbon…).
~ 34 ~

Ce texte signé par le président américain, le Premier ministre grec, président du


Conseil européen et le président de la commission européenne affirment que les Etats-Unis
et l'Union européenne s'engagent « à utiliser tous les moyens disponibles pour prévenir la
prolifération des ADM et les calamités qui s'en suivraient ».

Les signataires ont notamment pris l'engagement de « soutenir des inspections


inopinées quand ce sera nécessaire» et demandent aux États possédant des équipements
nucléaires de ratifier et de respecter les accords de sauvegarde et les protocoles
additionnels de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

Ce sommet annuel euro-américain est intervenu après le sommet européen de


Thessalonique qui, le 21 juin 2003, a adopté les lignes directrices d'une stratégie
européenne contre les ADM qui représentent pour l'Union européenne une menace
mondiale majeure.

Le 28 avril 2004, le Conseil de sécurité a adopté à l'unanimité sa première


résolution sur les ADM : la résolution 1540 oblige les États membres à « adopter et
appliquer » des législations «interdisant à tout acteur non étatique de fabriquer, de se
procurer, de mettre au point, de posséder, de transporter ou d'utiliser des armes nucléaires,
chimiques ou biologiques12 ». Enfin, le G8 a adopté à Sea Island, en juin 2004, un plan
d'action contre les ADM qui prévoit un renforcement des mesures contre la prolifération des
matériaux nucléaires.

Par ailleurs, la prolifération des armes de destruction massive a conduit à modifier


radicalement le débat stratégique. Elle contribue à rendre caduque la doctrine traditionnelle
dite de «destruction mutuelle assurée» (MAD selon le sigle anglais, Mutual Assured
Destruction), une doctrine à la base de la dissuasion.

Selon cette théorie, chacune des deux grandes puissances, qui laisse son territoire
sous la menace permanente des missiles de l'autre supergrand, hésiterait à déclencher le
feu nucléaire car elle sait qu'en retour elle se verrait infliger des dommages irréparables. En
juin 2000, les États-Unis ont fait connaître leur intention de se doter d'un bouclier stratégique,
c'est-à-dire d'une batterie de missiles antimissiles.

Le « Il septembre 2001 » a ensuite « accéléré la définition d'une stratégie


(américaine) plaçant à son centre la prévention et la préemption, mais cette évolution avait
été entamée dès le début des années 1990 face à l'avènement de la prolifération des ADM
dans les États voyous - les rogues states, formule passée dans le langage officiel dès le
premier mandat du président Clinton - trafiquant entre eux el agissant le cas échéant en
liaison avec des groupes terroristes- ».

§1. Les grandes étapes de la lutte internationale contre la prolifération des armes de
destruction massive
− 1925: Signature du protocole de Genève «concernant la prohibition d'emploi à la
guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques ».

12
~ 35 ~

Ce protocole adopté le 17 juin 1925 à Genève, qui proscrit l'utilisation des armes
chimiques et bactériologiques ainsi que des gaz asphyxiants, interdit l'usage en temps de
guerre de ces armes intervient au lendemain du premier conflit mondial au cours duquel les
armes chimiques sont apparues. .

Il souligne dans son préambule que l'emploi à la guerre de gaz asphyxiants,


toxiques ou similaires ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues a été à juste
titre condamné par l'opinion générale du monde civilisé.

Toutefois, le protocole de Genève, qui n'a pas été d'une efficacité absolue, présente
de nombreuses lacunes. Il ne prévoit aucune procédure de vérification. Il n'interdit pas la
possession des armes chimiques et biologiques.

La fabrication de ces armes reste autorisée par ce texte qui a été ratifié par plus de
cent vingt-cinq Etats.
− 1959 : Le traité de l'Antarctique. Le traité de Washington du 1er décembre. 1959 a
prévu la démilitarisation de l'Antarctique13. L’article 8 y interdit les activités
nucléaires,
− 1963 : Le traité de Moscou d'interdiction partielle des essais nucléaires. Ce traité
signé le 5 août 1963 sous l'égide des États-Unis, de l'URSS et du Royaume-Uni
interdit les essais nucléaires dans l'atmosphère, l'espace extra-atmosphérique et
sous l'eau. Il n'autorise que les seules explosions souterraines.
− 1967: Le Traité sur les principes régissant les activités des États en
matière d'exploration et d'utilisation de l'espace extra-atmosphérique, y compris la
lune et les autres corps célestes. Les États parties au traité du 27 janvier 1967 :

s'engagent à ne mettre sur orbite autour de la terre aucun objet porteur d'arme
nucléaire ou de tout autre type d'armes de destruction massive, à ne pas installer de
telles armes sur des corps célestes et à ne pas placer de telles armes de toute autre
manière dans l'extra-atmosphérique (article IV).

− 1967: Le traité de Tlatelolco. Ce traité signé le 14 février 1967 dénucléarise le


territoire de l'Amérique du Sud. C'est le premier accord international prévoyant une
zone exempte d'armes nucléaires,

1968: Le traité de non-prolifération (TNP). Le traité de non-prolifération (TNP) signé


er
le 1 juillet I96S par la Grande-Bretagne, les Etats-Unis ainsi que l'URSS, et entré en vigueur
15 mars 1970, qui fixe des limites à la prolifération nucléaire, a chargé l'Agence
internationale de l'énergie atomique (AlEA) de vérifier le respect de leurs engagements par
les États non nucléaires. Le traité de non-prolifération entré en application en 1970 pour 25
ans et qui a été signé par 178 pays, repose sur la distinction entre les puissances nucléaires
et les puissances non nucléaires. Les puissances nucléaires sont les États qui prennent
l'engagement de refuser de transférer à des États non nucléaires les technologies nucléaires
militaires et d'œuvrer pour le désarmement. Il s'agit des États qui ont procédé à une
explosion atomique avant le 1er janvier 1967: les Etats-Unis, l'URSS, le Royaume-Uni, la
France et la Chine. Les pays non nucléaires s'interdisent, quant à eux, d'acquérir des
technologies nucléaires militaires.

13
~ 36 ~

Le TNP, qui a joué un véritable rôle de garde-fou, repose sur la garantie donnée aux
pays qui acceptent de prendre l'engagement de ne pas se doter de l'arme nucléaire qu'ils ne
seront jamais la cible d'une attaque de ce type de la part des Etats disposant de la force de
frappe.

Mais plusieurs Etats non signataires du Traité ont élaboré et, parfois même testé
des bombes atomiques, Le Pakistan, Israël ou l'Inde qui n'ont pas signé le Traité, possèdent
l'arme atomique. La communauté internationale a décidé, le 11 mai 1995, de rendre
permanent le Traité de non-prolifération nucléaire, Celle décision a été prise sans vote par
une «majorité» des 175. Etals représentés il la conférence organisée par les Nations unies à
New York.

En mai 2000, à l'issue de la conférence de révision du Traité de non-prolifération les


cinq grandes puissances nucléaires reconnues (France, Chine, États-Unis, Grande-
Bretagne, Russie) ont accepté « un engagement sans équivoque d'accomplir l'élimination
totale de tous les arsenaux nucléaires ». Toutefois, l'accord ne prévoit aucun calendrier. Cet
engagement a été salué par le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan qui l'a qualifié de
«consensus historique ».

Cela étant précisé, le Traité de non-prolifération, qui n'a donc pas empêché certains
pays d'accéder à la bombe, apparaît bien fragile. 'Pour François Godement, chercheur à
l'institut français des relations internationales, il fait aujourd'hui «eau de toute part » : a: on Ile
sait plus tracer la frontière entre les États qui « ont le droit» et ceux qui « n'ont pas le droit »,
Du jour où les programmes pakistanais, indiens, israéliens n'ont pas attiré de réelles
sanctions, le TNP a perdu toute efficacité. La riposte juridique, qui prône le tout (possession
légale d'arsenaux par certains) ou le rien (interdiction totale de tels arsenaux pour d'autres),
ne peut plus répondre à la diversité des situations géopolitiques. » (Entretien au Monde du
18 mars 2003),

L'Agence internationale de l'énergie atomique, dont le siège est établi à Vienne, a


pour objectif l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire, et la protection contre la
rétroactivité. Elle a pour origine le fameux discours (« des atomes pour la paix ») prononcé le
8 décembre 1953 par le président des États-Unis Dwight David Eisenhower devant
l'Assemblée générale de l'ONU. Le statut de l'AlEA a été adopté en 1956 et est entré en
vigueur le 29 juillet 1957.

Le prix Nobel de la paix a été attribué le 7 octobre 2005 à cette agence spécialisée,
liée à l'ONU, qui regroupe 139 États membres, et à son directeur. Mohammed el-Baradei.

Les relations entre l'AlEA et l'ONU sont définies par un accord approuvé par
l'Assemblée générale des Nations unies, le 14 novembre 1957. Chaque année, l'Agence
internationale de l'énergie atomique doit remettre un rapport à l'Assemblée générale de
l'ONU. L'ALEA peut aussi être amenée à adresser un rapport au Conseil de sécurité de
l'ONU.

− C'est la fameuse résolution 114-1 adoptée à l'unanimité par ce dernier, le 8


novembre 2002, qui a prévu le retour des inspecteurs de l'AlEA en Irak. Cette
résolution a institué un régime renforcé de vérification du désarmement de l'Irak
dont l'exécution a été confiée à l'AlEA et à la Commission de contrôle, de
~ 37 ~

vérification et d'inspection des Nations-Unies (COCOVINU) 14. La résolution


1141, qui ordonne la reprise des inspections en Irak, impose au régime de
Saddam Hussein des conditions très strictes pour le travail des inspecteurs en
désarmement. Elle exige de l'Irak une coopération pleine et entière avec la
COCOVINU et l'AlEA. Elle accorde aux inspecteurs un accès immédiat,
inconditionnel et sans restriction à la totalité des sites irakiens. L'article 13 de la
résolution 1141 rappelle que le Conseil de sécurité « a averti à plusieurs
reprises l'Irak des graves conséquences auxquelles il aurait à faire face s'il
continuait à manquer à ses obligations »,
- Dans une résolution adoptée à l'unanimité. le 29 novembre 2002, par son
conseil des gouverneurs15, l'AIEA a « sommé » la Corée d'abandonner
«immédiatement et de façon vérifiable tout programme d'armement nucléaire ».
- La République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui a expulsé le 31
décembre 2002 les derniers inspecteurs de l'AlEA présents sur son territoire, a
annoncé le 10 janvier 2003 qu'elle se retirait du TNP. Elle a reconnu avoir
poursuivi son programme nucléaire en secret en violation de l'accord-cadre du
21 octobre 1994 (l'Agreed Framework) qui en prévoyait le gel. En juillet 2003, la
Chine, principal allié du régime de Pyongyang a pressé la RPDC d'accepter
une reprise rapide des pourparlers sur son programme nucléaire. Pour la
première fois depuis le début de la crise nucléaire nord-coréenne, en octobre
2002, les six États directement concernés (Chine, Corée du Nord, Corée du
Sud, États-Unis, Japon, Russie) se sont retrouvés à Pékin, du 27 au 29 août
2003, afin d'engager des discussions destinées à obtenir de la RPDC l'abandon
de son programme nucléaire. Il s'agit là de la première tentative de concertation
multilatérale sur la péninsule coréenne et la sécurité en Asie orientale.

Le 19 septembre 2005, une déclaration conjointe entre les Six en vue de la « paix et
de la stabilisation dans la péninsule coréenne» a été signée. Dans ce document, Pyongyang
se déclare prêt à « renoncer à ses programmes nucléaires existants » et à rejoindre le TNP.

En réaction à l'essai nucléaire nord-coréen du 9 octobre 2006, le Conseil de


sécurité a adopté, le 14 octobre 2006, la résolution 1718 qui impose des sanctions
financières et des restrictions en matière d'armement à la RPDC. Finalement, le 13 février
2007, les pourparlers à six ont abouti à un accord aux termes duquel le régime de
Pyongyang accepte de « désactiver » son programme nucléaire en échange de la fourniture
d'énergie et de garanties de sécurité par les Etats- Unis.

L'Agence internationale de l'énergie atomique a constaté, le 16 juin 2003, que


Téhéran ne s'est pas acquitté des obligations lui incombant dans le cadre du TNP - auquel
l'Iran est lié depuis 1974 - en omettant de «signaler certains matériels et activités nucléaires
». En décembre 2003, l'Iran a accepté de signer le protocole additionnel au TNP afin de
permettre à ses inspecteurs de visiter à l'improviste n'importe qu'elle installation nucléaire
iranienne. Le 6 juin 2006, le Haut représentant de l'Union européenne pour la politique
extérieure. Javier Solana, a remis à l'Iran une offre destinée à le convaincre de suspendre
son enrichissement d'uranium. Élaborée par les cinq membres permanents du Conseil de
sécurité de l'ONU et par I' Allemagne, cette offre comporte une série de propositions de
coopération en matière économique et nucléaire en échange de cette suspension. Mais, le
14

15
~ 38 ~

22 août 2006, Téhéran a refusé une suspension immédiate de son enrichissement d'uranium
tout en proposant des « négociations sérieuses » sur le sujet.

Le 31 juillet 2006, le Conseil de sécurité a adopté la résolution « 1696» qui exige de


Téhéran la suspension de son programme d'enrichissement d'uranium avant le 31 août
2006. Cette résolution prévoit des « mesures appropriés» en cas de refus iranien. Dans un
rapport publié le 31 août 2006, l'AIEA a indiqué que l'Iran n'a pas respecté l'ultimatum fixé
par l'ONU. Le 23 décembre 2006, le Conseil de sécurité a imposé des sanctions à l'Iran
touchant à ses programmes nucléaire et balistique, pour son refus de suspendre ses
activités nucléaires sensibles (résolution 1737).

Notons par ailleurs que la Libye a scellé sa réconciliation avec la communauté


internationale en signant, le 10 mars 2004, un protocole additionnel à l'accord de garantie du
TNP autorisant des inspections renforcées des experts de l'ONU pour vérifier que des
matières nucléaires ne sont pas détournées à un usage militaire.

1971: Traité interdisant de placer des armes nucléaires et d'autres armes de


destruction massive sur le fond des mers et des océans ainsi que dans leur sous-sol. Ce
Traité international multilatéral du Il février 1971 a prévu la dénucléarisation des fonds
marins. Il est entré en vi sueur le 18 mai 1972.

1972: La Convention d'interdiction des armes biologiques. Cette convention signée


à Londres, Moscou et Washington le 10 avril 1972 interdit l'utilisation, la fabrication et le
stockage des armes bactériologiques ainsi que les recherches dans ce domaine. Mais elle
ne dispose pas d'un système d'inspection et de contrôle alors que les programmes d'armes
bactériologiques sont faciles à dissimuler. Cette convention internationale dite convention de
Londres-Moscou- Washington' est le premier exemple de traité international interdisant une
catégorie d'armes de destruction massive16. Plus de ISO États dont la France et les États-
Unis ont ratifié le Traité sur l'interdiction totale des armes bactériologiques, un traité qui n'a
pas empêché certains États de poursuivre des études sur le potentiel militaire d'agents
biologiques! Le 25 juillet 2001, les États-Unis Ont rejeté le protocole de vérification de la
Convention d'interdiction des armes biologiques, La nécessité d'assurer la protection des
programmes américains de bio-défense, le poids des visites sur l'industrie biotechnologique
et pharmaceutique des États-Unis et les insuffisances des procédures de vérification sont les
trois raisons qui permettent d'expliquer la décision de rejet prise par Washington (voir T.
Delpech, «Désarmant refus des États-Unis», Libération, 22 août 2001). .

1975: Le traité de Bangkok. Le traité de Bangkok du 15 décembre 1995 instaure


une zone dénucléarisée en Asie du Sud-Est.

1976 : La création du Nuclear Suppliers Group (NSG). Le Groupe des fournisseurs


nucléaires (NSG), qui a été constitué en janvier 1976, a pour objectif de définir des principes
stricts pour l'exportation de matériels nucléaires. II comprend 34 pays dont les États-Unis, la
France, l'Allemagne, le Canada, le Royaume-Uni et les principaux pays d'Europe centrale et
orientale. À J'origine du NSG il y a la volonté des États-Unis de permettre le renforcement du

régime de non-prolifération établi par le Traité de non-prolifération qui cherche à limiter, on


l'a vu, le nombre des États détenteurs de l' arme nucléaire.

16
~ 39 ~

1985 : Le traité de Rarontonga. Ce traité, qui est entré en vigueur le 1er décembre
1996, instaure une zone dénucléarisée dans le Pacifique Sud, C'est un nouvel accord
international établissant une zone exempte d'armes nucléaires.

1987: Le Régime de contrôle de la technologie des missiles (MTCR). Il s'agit d'un


regroupement informel de pays qui souhaitent faire obstacle à la prolifération des vecteurs
pilotés d'armes de destruction massive. Le MTCR, qui a été créé en 1987 par 7 États
possesseurs de technologies balistiques (Canada, Allemagne de l'Ouest, Royaume-Uni,
France, Italie, Japon, États-Unis), réunit aujourd'hui 33 pays et fonctionne selon la règle de
l'unanimité. En coordonnant leur contrôle en matière d'exportation, ces États s'efforcent de
freiner la prolifération des missiles balistiques qui sont des missiles susceptibles d'emporter
une charge nucléaire. Les missiles balistiques ont été utilisés lors de la guerre Iran-Irak
(1980-1988) et lors de la guerre du Golfe (1990, missiles SCUD).

- 1992: Définition par le Groupe des fournisseurs nucléaires (NSG) d'une liste de 60
technologies duales interdite à l'exportation.

- 1993: La Convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du


stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction, Cette convention
internationale signée à Paris le 13 janvier 1993 est entrée en vigueur le 29 avril 1997. Son
préambule souligne la volonté de réaliser des progrès effectifs vers un désarmement général
et complet sous contrôle international strict et efficace, y compris l'interdiction et l'élimination
de tous les types d'armes de destruction massive.

La convention de Paris de janvier 1993 a prévu l'interdiction totale des armes


chimiques ainsi que la destruction des stocks existants, Elle vient remédier aux insuffisances
du protocole de Genève de 1925 qui interdisait seulement l'utilisation de ces armes souvent
présentées comme « l'année nucléaire du pauvre ». Elle introduit également des
mécanismes de surveillance rigoureux. L'Organisation internationale pour l'interdiction des
armes chimiques (OIAC) dont le siège est établi à La Haye contrôle la mise en œuvre de la
Convention. L'OIAC a pour mission de réaliser l'objet et but de la présente Convention, de
veiller à l'application de ses dispositions, y compris celles qui ont trait à la vérification
internationale du respect de l'instrument (article 8).

Elle est chargée de vérifier les activités des industries chimiques. La Convention
dispose d'un système d'inspection dans les pays adhérents (inspections régulières et
inspections surprises ou « inspections par défi »). Tout État partie au traité peul demander à
l'Organisation internationale pour l'interdiction des armes chimiques de procéder à une
inspection avec un préavis de douze heures dans n'importe quel site.

Cette Convention internationale signée en janvier 1993 constitue le premier accord


multilatéral de désarmement doté d'un régime efficace de vérification bannissant
complètement une catégorie d'armes de destruction massive 17 ; une catégorie d'arme de
destruction massive très facile à fabriquer et qu'il est facile d'employer. Après la Première
Guerre mondiale les armes chimiques ont été utilisées pour la première fois durant la guerre
Iran-Irak (1980-1988). Elles ont aussi été employées en 1988 par l'Irak contre les Kurdes
irakiens à Halabja.

17
~ 40 ~

- 1992: Le programme Cooperative TI/rem Reduction (CTR). Par des accords


bilatéraux avec les pays issus de l'ex-URSS (Programme CTR), les Etats-Unis ont à partir de
1992 assuré le financement du démantèlement et du contrôle des arsenaux soviétiques. En
juin 2002, lors du sommet de Kananaskis au Canada, les pays membres du G8 18 ont décidé
de rendre le programme CTR multilatéral.

- 1996: L'arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations d'armes


classiques ainsi que des produits et techniques à double usage. En juillet 1996, 33 États ont
adopté des directives dans le cadre de l'arrangement de Wassenaar. Ils cherchent à
uniformiser leur réglementation en matière d'exportation des armes classiques ainsi que des
produits et techniques ayant des applications aussi bien militaires que civiles. Les pays,
membres de l'arrangement de Wasscnaar ont pour objectif de faire obstacle à la livraison
d'armes perfectionnées les États mis au ban de la communauté' internationale.
L'arrangement de Wassenaar est venu remplacer le Comité de Coordination des contrôles
multilatéraux sur les exportations (COCOM). Pendant la période de la guerre froide, le
COCOM avait été créé par les pays occidentaux et était chargé d'empêcher l'exportation de
technologies militaires ou « duales » vers les Etats du bloc soviétique.

− 1996 : Le traité de Petindaba. Ce traité, qui a été signé le 11 avril 1996 au


Caire, établit une zone dénucléairisée en Afrique.
− 1996 : Le Traité d'interdiction totale des essais nucléaire (CTBT). Ce traité
international Comprehensive Test Ban Treaty) a été négocié dans le cadre de la
Conférence sur le désarmement à Genève entre janvier 1994 et août 1996 19. Il
a été adopté le 10 septembre. 1996 par l'Assemblée générale de l'ONU par 155
voix contre trois20 et cinq abstentions21. Il proscrit toute explosion nucléaire,
militaire, ou civile, souterraine ou dans l'atmosphère et dispose d'un système de
surveillance internationale spécifique. Le CTBT a été perçu comme la clé de
voûte de la stratégie de lutte contre la prolifération des armes nucléaires. Il
prévoit des inspections internationales sur les sites nucléaires militaires. Cela
étant précisé, l'établissement d'un ordre nucléaire mondial a été remis en cause
après les essais nucléaires auxquels ont procédé l'Inde et le Pakistan en mai
1998. Par ailleurs, le 13 octobre 1999, la ratification du traité d'interdiction
généralisée des essais nucléaires a été refusée par le Sénat américain à
majorité républicaine, en dépit des pressions du président Clinton. L'entrée en
vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires a été
subordonnée à sa ratification par quarante-quatre Etats nommément désignés.
Il s'agit des puissances nucléaires en des Etats dits « du seuil » à potentiel
nucléaire. On remarquera que la France a été avec le Royaume-Uni le premier
pays doté de l'arme nucléaire à ratifier et 1998, le CTBT.
Enfin, pour terminer sur ce point, on observera que la Cour internationale de
justice qui considère la non-prolifération comme un objectif essentiel, reconnaît
cependant l'utilisation souveraine de l'arme nucléaire dans certaines conditions.
Elle a admis « le droit fondamental qu'a tout Etat à la survie, et donc le droit qu'il
a de recourir à la légitime défense conformément à l'article 51 de la Charte des

18

19

20

21
~ 41 ~

Nations unies, lorsque cette survie est en cause » (Avis consultatif de la CIJ sur
la licéité de la menace ou de l'emploi d'armes nucléaires).

§2. La stratégie des Etats-Unis face à la prolifération des armes de destruction massive

Le 20 septembre 2002, l'administration américaine a rendu public un document


relatif à sa « stratégie nationale de sécurité » dans lequel elle explique les raisons pour
lesquelles elle souhaite lancer des actions préventives contre des « Etat voyous », des Etats
« déterminés à acquérir des armes de destruction massive, de même que d'autres
technologies militaires de pointe, et à s'en servir […] ».

Ce document, qui présente la nouvelle doctrine américaine de préemption, fait la


synthèse des deux grandes catégories d'ennemis des Etats-Unis : le terrorisme et les Etats
possesseurs d'armes non conventionnelles22.

« Le plus grand danger qui menace (les Etats Unis) se situe à la croisée du
radicalisme (c'est à dire de l'extrémisme) et de la technologie »23.

Annoncée par le président Bush dans son discours de West Point du 1 er juin 200224,
la National security Strategy (NSS) présente le concept de frappe préventive 25 comme
relevant du droit de légitime défense. La nouvelle « Stratégie de sécurité nationale»
américaine publiée le 16 mars 2006 par la Maison-Blanche continue de faire de l'action
militaire préventive l'un des pivots de la protection des États-Unis

1. Le National Missile Defense

Le programme américain NMD (National Missile Defense), qui a relancé le débat


stratégique a pour objectif d'assurer la protection de l'ensemble du territoire des États-Unis
contre des missiles balistiques. Il cherche à développer un système d'armement capable de
détruire en vol tout lanceur de têtes nucléaires, biologiques, chimiques' et traduit la volonté
américaine « de prendre l’avantage décisif dans la compétition stratégique mondiale26».

Il s'agit de mettre le territoire américain à l'abri du risque que peuvent représenter


des «États voyous » (rogue states) détenteurs d'armes non conventionnelles pointées sur lui'
et ne partageant pas les règles du jeu de la dissuasion"

Le chantier du bouclier antimissile s'est ouvert en Alaska en juin 2002 quelques


jours après l'abandon unilatéral par les États-Unis du fameux Traité ABM qui servait de clef
de voûte à la dissuasion nucléaire depuis 1972, un traité perçu par la Russie et l'Europe
comme un pilier essentiel de la stabilité stratégique

Signé le 26 mai 1972 et révisé en 1974. Ce Traité ABM (Anti Ballistic Missile) limitait
strictement le nombre de site antimissiles et ne concernait que les États-Unis et la Russie

22

23
Document sur la stratégie de sécurité nationale des Etats Unis, 17 septembre 2002

24

25

26
~ 42 ~

comme héritière de l’URSS. Initialement, il fixait pour 'chaque superpuissance à deux le


nombre de sites opérationnels où pouvaient être basés des missiles antimissiles. Puis, ce
traité, signé par Richard Nixon et Leonid Brejnev, a été révisé en 1974 et a limité à un le
nombre des sites possibles.

Les États-Unis ont pris la décision, en décembre 2001, de se retirer de ce traité, qui
organisa donc pendant trente ans l'équilibre nucléaire entre Moscou et Washington, afin de
lever tout obstacle au développement d'une défense antimissile de leur territoire.

Le président George W. Bush, qui a annoncé le 13 décembre 2001 le retrait des


Etats-Unis du Traité ABM, a notamment déclaré: Je suis arrivé à la conclusion que le traité
ABM entrave la capacité de notre gouvernement à protéger notre peuple de futures 'attaques
terroristes ou d'attaques d'États hors la loi. Le traité ABM de 1972 a été signé par les États-
Unis et l'Union soviétique à une époque très différente et dans un monde bien différent
[...]. Aujourd'hui, comme les événements du 11 septembre l'ont montré de façon éclatante,
les plus graves menaces pesant contre nos pays viennent non pas de nos deux pays ou
d'autres grandes puissances, mais de terroristes qui frappent sans prévenir ou d'États hors
la loi qui cherchent à détenir des armes de destructions massives […].

En 2007, l'annonce du projet américain de déploiement d'un bouclier antimissile en


Europe centrale (Pologne, République Tchèque) a rencontré l'hostilité de la Russie. Le 19
avril 2007, les États membres de l'OTAN se sont accordés pour soutenir que le projet
américain n'était pas dirigé contre la Russie, mais qu'il visait à contrer la menace de missiles
balistiques dont pourrait se doter l'Iran.

Par ailleurs, après le tir par la Chine d'un missile antisatellite en janvier 2007, la
rivalité stratégique sino-américaine a été relancée

2. La position des États-Unis concernant l'utilisation de l'arme nucléaire

La Nuclear Posture Review, document rendu public en mars, 2002, modifie la


doctrine militaire des États-Unis en préconisant le développement et l'utilisation éventuelle
de nouvelles armes nucléaires; des armes nucléaires miniaturisées capables de percer des
bunkers ou des usines souterraines de production et de stockage d'armes de destruction
massive. L'étude cite plusieurs États contre lesquels ces «miro bombes atomiques»
pourraient être utilisées (Irak, Iran, Syrie, Libye, Corée du Nord et Chine en cas d'agression
contre Taiwan).

Enfin, pour terminer sur ce thème, on notera que le Secrétaire général de l'ONU a
vivement regretté l'échec de la Conférence d'examen du Traité.de non-prolifération nucléaire
(TNP) qui s'est terminée le 27 mai 2005 sans accord. Le 27 juillet 2005, Kofi Arman a salué
l'initiative sur la non-prolifération nucléaire et le désarmement lancée par les ministres des
Affaires étrangères de l'Australie, du Chili, de l'Indonésie, de la Norvège, de la Roumanie, de
l'Afrique du Sud et du Royaume-Uni.
~ 43 ~

§3. La maitrise de l'armement nucléaire

Cette maîtrise passe par un double politique de non-dissémination et de non-


prolifération de l'arme atomique d'une part, et par la volonté de limiter la course aux
armements nucléaires d'autre part.

1. Non-dissémination et non-prolifération

Bien qu'on les confonde souvent, ces deux concepts recouvrent des réalités
différentes. La non-dissémination implique l'interdiction de livraison d'armes nucléaires par
des pays producteurs à des pays qui ne sont pas producteurs; la non-prolifération implique
la non-augmentation des pays producteurs. Plusieurs conventions ont été adoptées, qui
poursuivaient ces objectifs:

− le traité de Moscou du 5 août 1963, conclu à l'initiative des deux Grands, interdit
aux États parties les essais nucléaires dans l'atmosphère, dans l'espace extra-
atmosphérique, sous l'eau et « dans tout autre milieu si une telle explosion
provoque la chute de déchets radioactifs en dehors des limites territoriales de l'État
sous la juridiction ou le contrôle duquel a été effectuée l'explosion». Toutefois, ce
traité comporte une clause qui en limite considérablement la portée; en effet, tout
État partie peut, après un préavis de trois mois seulement, le dénoncer s'il estime
que certains événements : pour l'interprétation desquels il dispose d'un pouvoir
discrétionnaire exigent qu'ii reprenne sa liberté afin de sauvegarder ses intérêts
suprêmes. Cet accord a été complété par plusieurs autres accords: l'accord du 5
avril 1974 sur la limitation des explosions nucléaires souterraines; l'accord du 28
mai 1976 sur les expérimentations nucléaires à des fins pacifiques; le traité de New
York du 10 septembre 1996sur l'interdiction complète des essais nucléaires,
− le traité de ricin-prolifération nucléaire (TNP) est signé par Moscou, Londres et
Washington le 1erjuillet 1968. Ce traité a été conclu sous l'impulsion de l'Assemblée
générale des Nations Unies qui, dès 1966, adoptait une résolution priant les États
membres d'adopter un tel traité de non -prolifération et de s'abstenir de toute action
pouvant contribuer à cette prolifération (rés. AG, 2149 (XXI), portant renonciation
des États à toute action pouvant faire obstacle à la conclusion d'un accord sur la
non-prolifération des armes nucléaires). Dans ce traité, les États dotés de l'arme
nucléaire s'engagent à ne pas transférer à d'autres États de telles armes ni d'autres
« dispositifs nucléaires» et à ne pas les aider à en acquérir (art. 1: «Tout État doté
d'armes nucléaires qui est Partie au Traité s'engage à ne transférer à qui que ce
soit, ni directement ni indirectement, des armes nucléaires ou autres dispositifs
nucléaires explosifs, ou le contrôle de telles armes ou de tels dispositifs explosifs; et
à n'aider, n'encourager ni inciter d'aucune façon un État non doté d'armes
nucléaires, quel qu'il soit, à fabriquer ou acquérir de quelque autre manière des
armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs, ou le contrôle de telles
armes ou de tels dispositifs explosifs.»). Les États non dotés d'armes nucléaires
renoncent pour leur part à en acquérir (art. Il: «Tout État non doté d'armes nucléaires
qui est Partie au Traité s'engage à n'accepter de qui que ce soit, ni directement ni
indirectement, le transfert d'armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires ou du contrôle
~ 44 ~

de telles armes ou de tels dispositifs explosifs; à ne fabriquer ni acquérir de quelque autre


manière des armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs; et à ne rechercher
ni recevoir une aide quelconque pour la fabrication d'armes nucléaires ou d'autres
dispositifs nucléaires explosifs. »). Ces États non- nucléaires acceptent en outre le
système de «garanties » de l'Agence Internationale à l'énergie atomique (AIEA), qui
est un système visant à contrôler que l'énergie nucléaire ne sera pas «détournée de
ses utilisations pacifiques» (art. III). Ce traité est entré en vigueur le 5 mars 1970; la
France n'y a toutefois adhéré qu'en 1992.

2. Le ralentissement de la course aux armements nucléaires

Dans les premiers temps de la détente Est-Ouest, cette volonté se manifeste à


travers
d'une part des discussions en vue de mettre fin à la course aux armes antimissiles,
d'autre part la conclusion d'un accord portant dénucléarisation des fonds marins.

Ce ralentissement de la course aux armes antimissiles est consacrée par ce qui


constituera l'apogée de la détente: la conclusion des accords SALT l (Strategie Arm's
Limitation Talks) le 26 mai 1972. Lisne visent ni au désarmement ni à l'arrêt de la course aux
armements mais à établir entre les deux Grands un ensemble de contraintes encadrant cette
course. Il s'agit de préserver la vulnérabilité réciproque, notamment en autorisant les deux
États à ne disposer que de deux zones de déploiement; en d'autres termes donc est interdite
la mise en place d'un système protégeant le territoire dans son ensemble. Ces accords sont
conclus pour une «durée illimitée », chacune des parties gardant néanmoins le droit de se
retirer après un préavis de six mois. Ils ne sont plus en vigueur, mais continuent d'être
respectés. Les accords SALT II sont conclus le 18 juin 1979; leur objet n'est pas de réduire
les armements, mais de limiter les progrès de leur modernisation. Toutefois, à la suite de
l'entrée de l'Armée rouge en Afghanistan, le 27 décembre 1979, le Sénat américain refuse
de ratifier les accords.

Autre preuve de la volonté des deux Grands, pendant la détente, de limiter la


course aux armements: la conclusion, le Il février 1971, de la convention portant
dénucléarisation du fonds des mers. Par cet accord, les États s'engagent à dénucléariser le
plateau continental à partir de la limite externede la mer territoriale et acceptent de surcroît
le contrôle des autres États sur cette zone qui est sous la juridiction de l'État côtier; cette
convention institue donc un contrôle international sur des espaces non internationalisés.

Parallèlement aux initiatives américano-soviétiques, furent créées, au niveau


régional. des zones de dénucléarisation. Ainsi le traité de Tlateloco, signé le 14 février 1967
établit la première zone non internationalisée exempte d'armes nucléaires; cette zone couvre
l'intégralité de l'Amérique latine. Les parties à ce traité s'engagent à n'utiliser le matériel
nucléaire qu'à des fins pacifiques, à ne pas tolérer la présence d'armes nucléaires sur leur
sol et à accepter le contrôle de l'OPANAL (Organisme pour l'interdiction des armes
nucléaires en Amérique latine). Deux protocoles ont été signés; l'un, ouvert à l'adhésion des
États extérieurs à la région mais possédant des dépendances territoriales dans cette zone,
prévoit la dénucléarisation de ces territoires; le second précise que les États nucléaires
s'engagent à respecter le statut de la zone et à ne pas recourir à la menace ou à l'emploi
d'armes nucléaires contre les États parties. Ultérieurement, le traité de Rarotonga, signé le 6
~ 45 ~

août 1985, par quatorze États du Pacifique, établit une zone dénucléarisée qui s'étend de
l'Équateur à l'Antarctique. Plus récemment, le 2 août 1995, les États du continent africain ont
conclu un accord instituant l'Afrique en zone exempte d'armes nucléaires (Traité de
Pelindaba). Répondant à la même logique, le 15 décembre 1995, fut instituée, par le Traité
de Bangkok, une zone dénucléarisée en Asie du Sud-est, couvrant les territoires du Brunei,
du Cambodge, de l'Indonésie, du Laos, de la Malaisie, du Myanmar, des Philippines, de
Singapour, de la Thaïlande et du Viêtnam, ainsi que leur plateau continental respectif et leur
zone économique exclusive respective (art. 1). Ces instruments couvrent plus de la moitié
des pays du monde et tous les territoires de l'hémisphère Sud.

On notera également, pour conclure, que certains États, individuellement, ont


interrompu leurs programmes d'acquisition de l'arme nucléaire: l'Afrique du Sud, l'Argentine,
la Biélorussie, le Kasakhstan et l'Ukraine, la Libye et l'Irak.

Section 4. La lutte contre les dangers transfrontières

Bien que le monde soit fractionné en entités étatiques, ces dernières ne sont
néanmoins pas isolées les unes des autres. La liberté de circulation reconnue aux individus
est tout à la fois facteur de développement économique, social et culturel, et l‘acteur
d'instabilité et de risques, se traduisant tant à travers la question terroriste, que dans le
domaine environnemental.

CHAPITRE II. LA CIA ET LE MONDE EN 201527

Sous le titre Global Trends 2015 : a dialogue about the future with nongovernment
experts, la CIA a rendu public, au début de 2001, un document de 56 pages dans lequel est
présenté ce que pourrait être le monde en 2015. C'est là un exercice auquel elle se livre à
intervalles réguliers. C'est là aussi un exercice délicat, car, le moment venu, on ne se privera
pas, si on se reporte à ce texte, de relever toutes les erreurs qu'il contenait. Et il en
contiendra. Il ne peut en aller autrement. Ce rapport a, d'ailleurs, l'honnêteté de relever,
sinon les bévues grossières, du moins les erreurs d'inflexion déjà apparues entre les
prévisions exposées dans son précédent rapport sur l'horizon 2010 et certaines évolutions
qui se sont dessinées au cours des cinq premières années de la période couverte. Sans
doute le prochain rapport fera-t-il, de la même manière, amende honorable pour certains
points mal appréciés ou insuffisamment évalués. Mais, après tout, là n'est pas le plus
important. La CIA n'est pas une pythie infaillible et n'a pas la prétention de l'être. Ce texte est
important à un autre titre. A n'en point douter, il va compter parmi les textes qui nourriront la
réflexion des responsables américains et pourront aller jusqu'à inspirer leurs options en
matière diplomatique et stratégique.

La méthode suivie mérite de retenir l'attention. Pour cette enquête prospective, la


CIA n'a pas recruté des James Bond sophistiqués, mais s'est tournée vers des experts
d'instituts de recherches en relations internationales et en sciences politiques souvent liés à
de grandes universités. Pour ne prendre que quelques exemples, on y trouve les Universités
de Georgetown, Harvard, du Maryland, la Brookings Institution et l'International Institute for
Strategic Studies de Londres. D'autre part, l'enquête n'a pas été menée à la va vite. Elle
27
Jean-Paul Bled, In http://www.strategicsinternational.com/f5bled.htm
~ 46 ~

s'est étendue sur quinze mois. Il s'agit donc d'une étude qui, dans les limites du genre,
présente toutes les garanties requises de sérieux.

Le rapport commence par distinguer les sept facteurs dominants qui devraient
façonner le visage de la planète au cours des quinze prochaines années : la démographie -
les ressources naturelles et l'environnement - les sciences et la technologie - l'économie
globale et la globalisation - la " gouvernance " nationale et internationale - les futurs conflits -
le rôle des Etats-Unis. Aucun de ces facteurs n'exercera une influence dominante. De
surcroît, leur impact ne sera pas uniforme, il variera, au contraire d'un pays ou d'une zone à
l'autre. Autre point capital, ces facteurs ne se renforceront pas nécessairement, dans bien
des cas, leur action se contredira. Après avoir posé cette liste, les auteurs du rapport
s'empressent encore de souligner que, si les prévisions sur certains de ces facteurs
(démographie et ressources naturelles) comportent de faibles risques d'erreurs, il n'en va
pas de même pour les autres où la somme de variables est beaucoup plus élevée. A partir
de là, il devient souvent nécessaire de concevoir une diversité de scénarios. On le voit bien
dans le cas de l'avenir de la Chine qui préoccupe fortement nos analystes. Ils n'imaginent et
ne discutent pas moins de trois scénarios fort différents les uns des autres.

Cette intervention de l'imprévu conduit déjà les auteurs du rapport à corriger


certaines des conclusions établies dans le document précédent pour l'horizon 2010. Au
cours des cinq dernières années, certaines tendances lourdes ont développé un impact plus
fort qu'il n'avait été initialement envisagé. Il a été ainsi nécessaire de réévaluer les effets de
la globalisation. Une plus grande importance a dû être attribuée aux problèmes de la "
gouvernance " (gouvernements et acteurs non-gouvernementaux), notamment aux défis
auxquels le crime international et les réseaux terroristes la confrontent. Le rapport fait
également une place plus grande au rôle des sciences et de la technologie (informations -
biotechnologie) comme moteur du développement global. La question des ressources
naturelles (alimentation -eau - énergies) a pris une acuité nouvelle qu'il a fallu prendre en
compte. Les événements des dernières années ont d'autre part amené à majorer le facteur
de la puissance américaine, à la fois comme facteur objectif et facteur subjectif (campagnes
contre l' " hégémonie américaine). Ils ont également conduit à réévaluer la puissance
montante de la Chine et le déclin de la Russie. Dans les deux cas, les tendances observées
précédemment se sont intensifiées.

Démographie

Les calculs permettent de prévoir que la population mondiale passera entre 2000 et
2015 de 6, 1 milliards d'habitants à 7, 2 milliards. Le taux de croissance continuera toutefois
à diminuer, passant de 1,7% en 1985 à 1% en 2015. Ces valeurs globales continueront,
cependant, de cacher de forts contrastes. La croissance démographique concernera pour
l'essentiel des pays en voie de développement et les zones urbaines. L'Inde verra sa
population passer de 900 millions d'habitants à 1, 2 milliards ; à l'inverse, de nombreux pays
africains, frappés de plein fouet par le SIDA, perdront des habitants. Ainsi la population de
l'Afrique du Sud devrait tomber de 43,4 millions à 38,7 millions. De son côté, la Russie, sous
le coup d'une mortalité élevée et d'une faible natalité, connaîtra un sensible recul
démographique, passant de 146 millions d'habitants à 135 au mieux et 130 au pis.
~ 47 ~

Parmi les pays développés, l'Amérique du Nord, l'Australie et la Nouvelle-Zélande


continueront de connaître la plus forte croissance, entre 0,7% et 1%. Elles la devront
principalement à l'immigration qui se poursuivra à des rythmes élevés. Leur situation se
distinguera fortement de celle de la plupart des pays européens où l'augmentation de
l'espérance de vie aggravera les tensions sur le marché du travail et pèsera lourdement sur
le traitement du problème des retraites. Il en résultera une forte pression migratoire en
provenance d'Afrique du Nord, du Moyen-Orient, d'Asie du Sud-Est ainsi que des Pays
d'Europe orientale. Les gouvernements européens, prévoient les auteurs du rapport,
chercheront à trouver une voie médiane entre les besoins de leurs économies en main
d'œuvre et les réactions d'hostilité d'une partie des populations autochtones.

Ressources naturelles et Environnement

Résultat d'une progression régulière de la production agricole, les besoins


alimentaires seront globalement couverts. En réalité le monde montrera là aussi de forts
contrastes. La malnutrition risque de gagner encore du terrain dans l'Afrique sub-saharienne.
Des famines y sont à craindre sur le type de celles qui frappèrent la Somalie au début des
années 90 et plus récemment la Corée du Nord.

Mais les problèmes les plus graves viendront de la pénurie d'eau qui devrait toucher
en 2015 près de la moitié de la population mondiale, notamment en Afrique, au Moyen-
Orient, dans l' Asie méridionale et dans le nord de la Chine. Le problème n'est pas nouveau,
mais il risque de prendre des proportions encore inconnues et de provoquer des conflits
entre Etats riverains d'un même fleuve. Ainsi l'aménagement du Tigre et de l'Euphrate par la
Turquie affectera directement la Syrie et l'Irak et pourrait conduire à de sérieuses tensions
dans la région.

Dans le domaine de l'énergie, les demandes, bien qu'appelées à grandir, devraient


être satisfaites. L'Asie, en premier lieu la Chine et l'Inde, verra sa consommation de pétrole
et de gaz augmenter fortement. Il faut prévoir qu'en 2015, les trois-quarts du pétrole du Golfe
Persique seront exportés vers les marchés asiatiques, contre seulement 10% vers l'Ouest.

Les problèmes liés à l'environnement ne devraient trouver que partiellement des


solutions. La dégradation des sols arables et la déforestation tropicale devraient se
poursuivre. Les perspectives pour 2015 ne sont toutefois pas uniformes. Les questions
d'environnement continueront à nourrir des débats dans les pays développés. Les problèmes
seront néanmoins beaucoup plus aigus dans les pays en voie de développement,
notamment en liaison avec le mouvement d'urbanisation. Certaines mégapoles comme
Mexico, Sao Paulo, Lagos et Pékin seront tout particulièrement frappées. D'autre part, la
Russie, l'Ukraine et plusieurs pays d'Europe centrale et orientale continueront d'être
confrontés, dans ce domaine, à l'héritage de l'ère communiste.

Sciences et Technologie

Les technologies de l'information sont promises à connaître des développements


spectaculaires au cours des prochaines années. D'autre part le temps compris entre les
découvertes et leur application pratique ne va cesser de se réduire. Il va de plus en plus se
confirmer que la révolution liée à la diffusion de ces technologies représente pour l'humanité
~ 48 ~

le bouleversement le plus considérable depuis les débuts de la Révolution industrielle dans


la seconde moitié du XIX° siècle.

La révolution informatique ne se diffusera cependant de manière égale à travers le


globe. L'Inde devrait y occuper une place de pointe. La Chine enregistrera également des
résultats positifs, avec toutefois un fort contraste entre les villes et les campagnes. La Russie
présentera un tableau sensiblement voisin. L'Amérique latine connaîtra une explosion
exponentielle dans ce domaine.

Les quinze prochaines années seront également marquées par le développement


de la révolution biotechnologique. Elle contribuera à améliorer la qualité de la vie,
notamment en favorisant le progrès médical et en aidant à la réduction de la pollution. Mais
elle profitera surtout aux pays occidentaux et seulement à quelques segments des autres
sociétés.

Economie globale et Globalisation

Caractérisée par des flux croissants d'informations, d'idées, de capitaux, de biens et


de services, la globalisation devrait, estiment les auteurs du rapport, favoriser une expansion
de l'économie qui retrouvera les taux de développement des années soixante ou du début
des années soixante-dix. Cette croissance forte bénéficiera également à plusieurs des "
marchés émergents ", en particulier aux deux géants asiatiques, l'Inde et la Chine. La
globalisation devrait favoriser également une plus grande stabilité politique. Ses bienfaits ne
seront cependant pas universels. Il est même dans la nature de la globalisation de générer
des frustrations dans les régions, les pays ou les groupes qui en seront tenus à l'écart. Ce
partage risque de nourrir des conflits aussi bien politiques, ethniques qu'idéologiques ou
religieux.

Gouvernance nationale et internationale

Les Etats continueront d'être les acteurs principaux de la scène internationale. Mais
ils seront confrontés de plus en plus aux défis auxquels la globalisation les soumet. Ils auront
de plus en plus de mal à contrôler les flux, licites ou non, d'informations, de technologies, de
transactions financières, sans compter les pressions migratoires, les transports d'armes, les
épidémies qui ignorent les frontières étatiques.

Les auteurs du rapport prévoient que la globalisation favorisera la transparence des


prises de décision gouvernementales, un processus qui ne pourra que gêner les régimes
autoritaires. Inversement elle compliquera, voire fragilisera les pratiques de la démocratie
traditionnelle et conduira, de ce fait, à des aménagements progressifs.

Ces défis contraindront, en tout cas, les Etats à revoir leurs structures
gouvernementales, faute de quoi ils se condamneront rapidement à l'inefficacité. Leur
efficacité dépendra aussi de leur aptitude à coopérer avec des acteurs non-étatiques, un
processus notamment lié à la libéralisation des échanges et des marchés. Mais ces acteurs
seront également de plus en plus présents dans des secteurs non tournés vers le profit.
~ 49 ~

L'un des plus grands défis auxquels les Etats seront tenus de répondre sera celui
de la lutte contre le crime organisé dont les réseaux sont appelés à grandir et à se diversifier.
Il faut en outre prévoir que ceux-ci étendent leurs champs d'action. Le risque est grand qu'ils
interviennent jusque dans le secteur des armes nucléaires, biologiques et chimiques.

L'hétérogénéité ethnique de la plupart des Etats de la planète constituera aussi un


levier pour ces groupes qui s'appliqueront à en jouer pour entretenir et développer des
besoins auxquels ils s'emploieront à répondre. Les facteurs religieux se grefferont sur ces
problèmes dans de nombreux pays et contribueront à en faire des poudrières.

La capacité à répondre à ces défis établira un nouveau partage entre les Etats. Les
analystes de la CIA prévoient que les Etats occidentaux y parviendront. Un autre groupe de
pays, parmi lesquels la Turquie, la Corée du Sud, l'Inde, le Chili et le Brésil, se rapprochera
de cet objectif. Un peu plus loin, on devrait trouver Singapore, Taiwan, peut-être la Chine, et
quelques Etats moyen-orientaux et latino-américains. La plupart des autres Etats, faute
d'équipes dirigeantes adéquates et de moyens, devraient faillir dans cette tâche.

Les dernières années ont vu le développement d'institutions et d'organisations


internationales. Ce mouvement devrait s'amplifier, car le nombre de problèmes à se traiter à
ce niveau augmentera.

Futurs Conflits

Le rapport distingue entre deux types de conflits : conflits internes et conflits entre
Etats. Les premiers, trouvant leur origine dans des querelles ethniques, religieuses,
économiques et politiques, continueront de faire rage. Ils mineront notamment la stabilité et
l'unité d'Etats déchirés par des divisions. Les Nations-Unies continueront de s'impliquer dans
ces crises dans l'espoir d'y trouver des solutions. Les grands Etats, en revanche, tendront à
se désengager de ces opérations.

Le risque de guerres entre Etats développés est considéré comme faible. En


revanche les rivalités entre L'Inde et le Pakistan, la Chine et Taiwan pourraient déboucher
sur de graves conflits. Le rapport s'intéresse tout particulièrement au cas de la Chine.
Différents cas de figure sont envisagés. La Chine accordera-t-elle la priorité à son
développement économique et à la défense de sa stabilité intérieure ? Ou bien cherchera-t-
elle à utiliser sa puissance pour réaménager à son avantage l'espace asiatique ?

Le déclin programmé de la Russie est un autre facteur d'incertitude. Incapable de


maintenir ses forces conventionnelles à un niveau performant, elle concentrera ses efforts
sur ses armes nucléaires. Le Japon se découvre également comme un facteur d'incertitude.
Le recul de son hégémonie économique dans la région devrait y entraîner une érosion
corrélative de son leadership politique. L'Inde renforcera sûrement son rôle comme grande
puissance régionale. Mais ses moyens lui permettront-ils d'intervenir au-delà de ce cercle ?

Le rôle des Etats-Unis

On se rassurera en apprenant que les experts de la CIA tiennent pour acquis que
les Etats-Unis resteront la puissance dominante à l'échelle du monde. Aucun Etat ne sera en
~ 50 ~

mesure de contester leur primauté tant économique, technologique que stratégique et


politique. Ce sera donc toujours le temps du global leadership américain.

Et pourtant ce leadership ne parviendra pas à s'imposer aussi aisément que durant


la dernière décennie. Plusieurs obstacles se mettront en travers. La période verra augmenter
le nombre des Etats en mesure de jouer un rôle sur la scène mondiale. Certains d'entre eux
s'emploieront à contrarier l'exercice de cette hégémonie. Il leur sera sans doute difficile de
constituer des coalitions anti-américaines. Mais les Etats-Unis seront amenés à opérer
certains infléchissements de leur politique dans le but de contrer ces tentatives. Il leur sera
plus malaisé de bâtir autour d'eux des coalitions dont la principale raison d'être serait de
servir leurs intérêts.

Il faut d'autre part s'attendre à ce que les Etats-Unis soient rapidement la cible
d'attaques informatiques qui livreront le combat jusqu'au cœur du système américain. Ces
agressions auxquelles il faut ajouter des actions terroristes viseront le sanctuaire de la
puissance américaine qui, face à ses adversaires, pourrait démontrer sa vulnérabilité.

Il ne sera pas non plus sans importance que les Etats-Unis auront de plus en plus
de mal à mobiliser le secteur privé américain au service d'une politique extérieure
ambitieuse.

Régions et Espaces

En guise de conclusion, les analystes mobilisés par la CIA procèdent à un examen


des principales régions du globe et s'emploient à en préciser les évolutions au cours des
quinze prochaines années.

L'Asie orientale et sud-orientale est le premier espacé étudié. De nouveau l'analyse


tend à privilégier la Chine, une preuve supplémentaire de la place qu'elle occupe dans les
préoccupations américaines. La région sera en effet dominée par les incertitudes liées à la
Chine, même si d'autres facteurs sont appelés à interférer : les interrogations sur la
réunification de la Corée et la capacité du Japon à maintenir ses positions.

Il est à prévoir que des tensions pèseront sur l'unité de la Chine. Alors que l'ouest
de la Chine connaîtra un faible niveau de développement qui le rapprochera d'Etats pauvres
comme le Cambodge, le Laos et le Vietnam, le sud du pays intensifiera ses liens avec
Taiwan, Hong-Kong et s'intégrera de plus en plus à l'économie mondiale.

Il est à prévoir que le Japon et d'autres Etats chercheront à maintenir une présence
américaine significative comme contrepoids à l'influence croissante de la Chine. Des liens
économiques se tisseront entre la Chine et le Japon sans suffire, toutefois, à éliminer entre
les deux Etats les tensions liées aussi bien au passé qu'à des différends d'ordre stratégique.
La Chine s'emploiera à développer ses liens économiques avec les Etats-Unis, mais, dans le
même temps, sera attentive à maintenir des relations étroites avec la Russie dans le but de
s'assurer une marge de manœuvre face aux pressions américaines et de peser sur le
soutien des Etats-Unis à Taiwan.
~ 51 ~

***

Le rapport de la CIA s'intéresse ensuite à l'Asie méridionale dont l'Inde s'affirmera


comme la grande puissance régionale. La période verra notamment s'accroître l'écart entre
l'Inde et le Pakistan. Les disparités, politiques, économiques, sociales entre les deux Etats
s'accuseront. Alors que la démocratie indienne saura résister aux épreuves d'origine
religieuse et ethnique auxquelles elle sera soumise, et connaîtra un fort niveau de
développement, le Pakistan aura beaucoup de mal à sortir de décennies de crises politiques
et économiques. La région continuera d'être dominée par le conflit entre les deux Etats,
mais, compte tenu des forces en présence, celui-ci devrait tourner à l'avantage de l'Inde.

Les auteurs du rapport misent sur un déclin de la Russie. Celle-ci s'emploiera sans
doute à maintenir son influence sur les Etats de l'ancienne Union Soviétique. Dans une
perspective américaine aura des résultats négatifs.Il se mettra en travers de la volonté de
l'Ukraine de se rapprocher de l'Occident et freinera le développement des Etats du Caucase
et d'Asie centrale vers des formes stables et ouvertes d'organisation politique. Cette
réaffirmation de la volonté de puissance russe se trouvera néanmoins en contradiction de
plus en plus évidente avec la difficulté du pays à s'intégrer au système financier et
commercial mondial. En 2015, l'économie russe devrait représenter tout au plus un
cinquième de l'économie américaine, un constat qui fixe naturellement ses limites au pouvoir
d'influence de la Russie. Celle-ci cherchera sans doute à développer ses liens en Europe et
en Asie pour s'imposer comme un partenaire incontournable des Etats-Unis dans le
traitement des affaires mondiales. Mais il est clair que ces efforts n'impressionnent pas les
auteurs du rapport.

Celui-ci examine ensuite la région s'étendant du Maroc à l'Iran. Sur l'ensemble de


cet espace, les régimes en place seront soumis à un double défi : à l'intérieur les pressions
aussi bien démographiques, économiques que sociales, à l'extérieur la montée de la
globalisation. Il leur sera impossible de développer une réponse unique. Dans le même
temps, l'islamisme dans ses différentes versions politiques exercera une forte puissance
d'attraction sur les masses de ces pays.

Dans le conflit israélo-palestinien, le rapport développe un optimisme modéré. Une


paix fragile sera revenue ; un Etat palestinien aura vu le jour, mais les relations entre les
deux peuples resteront tendues. Les vieilles rivalités entre l'Egypte, la Syrie et l'Irak auront
refait surface. Le Golfe Persique restera une zone d'une importance cruciale, mais les Etats
riverains Irak, Iran, Arabie Saoudite réussiront à s'assurer une plus grande autonomie, ce qui
aura pour effet d'y compliquer un peu plus le jeu.

Le maintien d'une forte pression démographique constituera un dénominateur


commun à la plupart des Etats de la région. En 2015, la tendance lourde sera que les
habitants du Moyen-Orient seront plus pauvres, plus urbanisés et plus amers. Les jeunes de
moins de vingt ans continueront d'y représenter plus de la moitié de la population, ce qui
signifiera une augmentation de 3,1% de la population entrant chaque année sur le marché
du travail. Ce sera là un défi impossible à relever et, du même coup, il en résultera une
situation génératrice de crises.

***
~ 52 ~

Un constat pessimiste s'impose également pour l'Afrique subsaharienne. Les


populations, mal encadrées par des Etats fragiles, auront à souffrir à la fois de la pauvreté et
de la maladie. La région connaîtra une très forte urbanisation, au point que la population de
nombreuses villes devrait doubler d'ici 2015. Mais celle-ci s'opèrera dans des conditions très
critiques. Ces villes seront de plus en plus des foyers d'insécurité et d'instabilité. Les
problèmes alimentaires ne trouveront pas leur solution. Pis, la malnutrition devrait augmenter
de 20% au cours de la période.

Les perspectives de développement économique de cette zone sont extrêmement


sombres, même si le Nigéria s'affirmera comme un des grands producteurs de pétrole.
L'Afrique du Sud et le Nigéria tiendront sans doute le rôle de puissances principales, mais
sans devenir pour autant des locomotives économiques. De même n'auront-ils pas la
capacité de stabiliser la région.

***

Le rapport examine ensuite le cas de l'Europe. L'Union européenne, prévoit-il, aura


fortement avancé dans la voie de son intégration et de son élargissement. Une dizaine
d'Etats supplémentaires devraient y être entrés. Il faut toutefois que les problèmes soulevés
par cet élargissement provoqueront de sérieuses tensions dans certains Etats centre et est-
européens

Le cas de la Turquie retient aussi nos analystes. Aura-t-elle pu rejoindre l'Union


européenne ? Le rapport ne se prononce pas. Il prévoit, cependant, que le chemin sera long
et difficile. De plus, il est acquis que la Turquie continuera de déployer sa politique extérieure
dans plusieurs directions, l'Europe bien sûr, mais aussi le Caucase et l'Asie centrale, sans
oublier ses voisins proche-orientaux. En revanche, le rapport est étrangement muet sur les
liens entre la Turquie et Israël.

L'Union européenne développera ses relations commerciales et ses


investissements à travers le monde. Elle cherchera à s'impliquer dans les affaires mondiales,
mais les auteurs du rapport doutent que cet engagement prennent, sauf exception, la forme
d'interventions militaires. L'OTAN qui se sera encore élargi à de nouveaux Etats d'Europe
orientale, sera le lieu privilégié du partenariat entre les Etats-Unis et l'Union européenne.

***

Dernier cas étudié, l'Amérique latine présente un tableau contrasté. Globalement le


subcontinent connaîtra une forte expansion, mais celle-ci ne se distribuera pas de manière
égale. Le Mexique, le Brésil, l'Argentine et le Chili en seront les grands bénéficiaires, alors
que les pays andins seront à la traîne. Le même constat s'impose pour l'avenir des
institutions démocratiques. Elles s'enracineront dans les Etats appelés à participer à cette
forte croissance. L'avenir est en revanche plus préoccupant pour les autres. Le cas de Cuba
est évidemment évoqué. L'évolution dépendra dans une large mesure des conditions dans
lesquelles la transition s'effectuera après la disparition de Castro. Enfin, à la mesure de leur
développement des pays comme le Mexique et le Brésil entendront accroître leur
engagement politique sur la scène internationale.

***
~ 53 ~

Encore une fois, ce rapport ne doit pas se lire comme parole d'évangile. Ses
auteurs savent fort bien que trop de variables interviennent pour qu'il soit raisonnable de se
montrer péremptoire. Au reste, en guise de conclusion, ils examinent quatre scénarios
possibles à l'échelle mondiale. Mais le plus intéressant n'est peut-être pas là. Ce texte nous
en apprend finalement autant sur les Etats-Unis eux-mêmes que sur l'état du monde à
l'horizon de 2015. Il nous découvre où leurs principaux centres d'intérêt ont déjà commencé
de se tourner et se tourneront de plus en plus. Sa lecture nous montre ainsi que l'Europe est
appelée à occuper une place déclinante dans leurs préoccupations dans le même temps où
leur attention devrait tendre de plus en plus à privilégier l'Asie, et tout particulièrement la
Chine.

CHAPITRE II : COOPERATION EN MATIERE DE PAIX ET DE SECURITE


INTERNATIONALES

L'emploi de la force armée est, d'un point de vue légal, proscrit des relations
internationales. Les différentes réserves que l'on peut opposer à l'effectivité de ce principe
conduisent à reconnaître que la guerre demeure néanmoins l'un des modes de relations
entre États. Aussi, les États cherchent-ils à assurer leur sécurité, tantôt individuellement- par
le biais d'un renforcement de leur puissance militaire -; tantôt en prenant conscience des
intérêts communs qui les unissent, par le biais d'alliances, mais aussi de garantie de sécurité
mutuelle dans le cadre d'une action collective, dont les Nations Unies constituent
actuellement l'aboutissement. Toutefois, il est un type de recours à la force que la Charte
des Nations Unies n'avait pas envisagé, celui établi sur la menace ou l'emploi de
l'armenucléaire. En outre, au XXI°siècle, les menaces pour la paix et la sécurité ne sont pas
seulement la guerreet les conflits internationaux, mais aussi la violence civile, la criminalité
organisée, le terrorisme et les armes de destruction massive. Il faut compter aussi avec la
pauvreté, les épidémies mortelles et la dégradation de l'environnement, tout aussi lourdes de
conséquences. Tous ces phénomènes sont meurtriers ou peuvent compromettre la survie.
Ils peuvent tous saper les fondements de l'État en tant qu'élément de base du système
international. Le développement de ces dangers transfrontières conduit nécessairement à
rechercher une diversification des moyens de lutte.

La sécurité collective

La notion de sécurité collective est ancienne dans l'histoire des relations


internationales. Elle apparaît en effet dans les Traités de Westphalie (1648), qui mettent fin à
la guerre de Trente Ans. Elle est de même évoquée dans les différents projets de paix
perpétuelle élaborés aux XVIIet XVIII°siècles (W. Penn, 1693; Abbé de Saint-Pierre,1713; E.
Kant, 1795; F. Gentz, 1800). Mais, surtout, cette idée est exprimée dans les Quatorze Points
que le président américain W. Wilson présente, en janvier 1918, à la communauté
internationale.

Ainsi qu'il le souligne, la sécurité collective implique que les États souscrivent « des
garanties réciproques d'indépendance politique et d'intégrité territoriale aux petits comme
aux grands États» (quatorzième point). Cette idée sera reprise par le Pacte de la Société
des Nations, dont l'article 16 dispose que dans l'hypothèse où un État commettrait un acte
d'agression armée contre un autre État, il devait être « ipso facto considéré comme ayant
commis un acte de guerre contre tous les autres ».
~ 54 ~

Toutefois, pour être efficient, le mécanisme de sécurité collective doit répondre à trois
conditions: 1) que les États aient la même conception, non seulement de ce qu'est une
agression, mais aussi de ce qu'est un ordre juridique international juste et équitable; 2) que
les États s'engagent à assurer, militairement et financièrement, les risques d'une action
commune 'contre tout État agresseur; 3) que soit instituée une organisation internationale
ayant compétence pour identifier une agression et mettre en œuvre toutes les actions
nécessaires.

Le système onusien complété par l'action des organisations régionales vise à répondre
à ces conditions.

A. Le système des Nations Unies

1. Le précédent de la Société des Nations

La SDN était envisagée par le président Wilson comme devant organiser une paix
juste et durable, la Grande Guerre étant censée être la « der des ders ». Aussi l'article 16
posait-il le principe selon lequel lorsqu'un membre de la SDN recourait à la guerre, en
violation de ses engagements, les autres États se trouvaient dans l'obligation de « rompre
immédiatement avec lui toutes relations commerciales ou financières, d'interdire tous
rapports entre leurs nationaux et ceux de l'État en rupture de Pacte », D'autre part, le
Conseil de la SDN devait faire des recommandations (devant être adoptées à l'unanimité,
mais sans que l'État auteur de l'agression ait le droit de vote) aux États afin qu'ils fournissent
des contingents militaires visant à assurer le respect des engagements de la Société.

Ce mécanisme ne fonctionna jamais pleinement. D'une part, le refus du Sénat


américain d'autoriser la ratification du Pacte de la Société des Nations a privé cette
institution de sa clef de voûte. En effet, sans l'engagement américain, la paix ne pouvait être
efficacement et durablement garantie: le vainqueurs européens (France et Royaume- Uni)
ne pouvaient, à eux seuls, assurer cette paix, face au grand vaincu allemand. Or, tout
mécanisme de sécurité collective doit être universel. Ou, à tout le moins, le plus étendu
possible, afin que ceux qui en sont exclus, volontairement ou non, ne puissent, à eux seuls,
déséquilibrer le système. Or, l'Allemagne, admise à la SDN en 1926, s'en retirera en 1935
lors de l'avènement d'A. Hitler au pouvoir; et l'URSS, admise en 1934, en sera exclue en
1939 à la suite de l'invasion de la Finlande. Autres retrait : Costa-Rica (1927), Brésil (1928),
Paraguay (1937), Guatemala (1938), Nicaragua – Hongrie et Autriche (1938), Salvator-Italie
et Ethiopie (1939), Cuba et Venezuela (1940).

En outre, une faiblesse normative affectait la SDN : le recours à la force n'était, en


effet, pas interdit de façon globale. En vertu du Pacte, les membres de la SDN s'engageaient
à ne pas recourir à la guerre dans les trois mois qui suivaient une décision arbitrale ou
judiciaire, à ne pas entrer en guerre avec un État, partie à un différend, qui se serait
conformé au jugement d'un arbitre ou au verdict d'un tribunal, à ne pas entrer en guerre
avec un État qui se serait conformé aux recommandations d'un rapport voté à l'unanimité
par le Conseil de la SDN. En conséquence, des hypothèses de recours à la force
licitedemeuraient, pour lesquelles la sécurité collective, par définition, ne joue pas. Donc la
sécurité collective n'était pas automatique.
~ 55 ~

D'autre part, la' sécurité collective implique que la règle du non-recours à la force
armée soit appliquée et sanctionnée uniformément. Ce qui ne fut pas le cas au cours des
années 1930. Ainsi, lorsqu'en septembre 1931, le Japon envahit la province chinoise de
Mandchourie, la Chine saisit le Conseil de la SDN, mais cela ne suscita toutefois pour ainsi
dire aucune réaction. De même, lorsqu'en octobre 1935, l'Italie envahit l'Ethiopie en violation
caractérisée du droit international. La France et le Royaume-Uni paralysèrent l'action de la
SDN, en excluant toute sanction militaire contre un État qu'ils considéraient comme un allié
face à l'Allemagne hitlérienne'; de même, le pétrole, matière première stratégique sur le
planmilitaire, fut clairement exclu de l'embargo contre l'Italie, laquelle, en outre, demeura
membre de la Société. Enfin, bien que l'invasion de la Finlande par l'URSS en novembre
1939 ait conduit à l'exclusion de celle-ci de la SDN, ce fut là une action dérisoire qui ne visait
qu'à masquer la faillite du système de sécurité collective, consacrée par l'éclatement de la
Seconde Guerre mondiale; la France et le Royaume- Uni se vengeaient ainsi de la trahison
que constituait la conclusion du pacte germano-soviétique du 23 août 1939.

De même, le maintien du colonialisme pendant cette période apparaît en totale


contradiction avec la notion même de « sécurité collective». En effet, ainsi qu'il a été
souligné, ce mécanisme ne se conçoit que dans un ordre juste et équitable, dans lequel
tous les acteurs disposent des mêmes droits et devoirs. Or, un ordre dans lequel l'Europe et
l'Amérique considèrent que le reste de la planète n'appartient pas au « monde civilisé» peut-
il réaliser l'idée de justice?

2. Le dispositif prévu par la Charte des Nations Unies

Les fondateurs des Nations Unies ont envisagé que celles-ci pourraient intervenir
selon deux modalités différentes, suivant la nature du danger qu'un différend ferait courir à la
paix et à la sécurité internationales: soit l'ONU mènerait une simple action d'interposition
entre les protagonistes, soit elle interviendrait directement auprès des parties.

• L'interposition des Nations Unies

Le chapitre VI de la Charte des Nations Unies, intitulé « Règlement pacifique des


différends », comporte un article 33 dont le premier paragraphe dispose que: « Les parties à
tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la
sécurité internationales doivent en rechercher la solution avant tout, par voie de négociation,
d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux
organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix. » Cet
article renvoie, implicitement, à l'article 2, § 3, lequel précise que « les membres de
l'Organisation règlent leurs différends par des moyens pacifiques, de telle manière que la
paix et la sécurité internationales ainsi que 'la justice ne soient pas mises en danger ». Aux
côtés des « différends », le chapitre VI évoque, dans les mêmes termes, les « situations»
(art. 34), qui ne traduisent pas une opposition d'intérêts entre États, mais présentent un
caractère plus objectif.

Face à un différend ou à une situation susceptibles d'avoir de graves répercussions


internationales, le Conseil de sécurité, selon les termes de la Charte, a le choix entre deux
options: 1) « recommander les procédures ou méthodes d'ajustement appro priées»(art. 36,
§1), hypothèse dans laquelle il ne prend pas position sur le fond de l'affaire; 2) à la demande
~ 56 ~

des parties « recommander tels termes de règlement qu'il juge approprié» (art. 37, § 2),
proposantainsi une solution sur le fond, solution nullement obligatoire cependant (en
revanche, aux termes de l'art. 37, § 1, la saisine du Conseil par les parties au différend est
obligatoire: «Si les parties à un différend de la nature mentionnée à l'Article 33 ne
réussissent pas à le régler par les moyens indiqués audit Article, elles le soumettent au
Conseil de sécurité. »). Le rôle du Conseil est donc, dans ces deux hypothèses, relativement
effacé, étant donné que la menace à la paix et à la sécurité internationales demeure encore
potentielle. Le mécanisme du chapitre VI est donc envisagé comme jouant de façon
préventive.

b) L'action directe des Nations Unies

Dans le cadre du chapitre VII de la Charte, le Conseil de sécurité est institué en


gendarme international, disposant de moyens militaires afin de mettre un terme à toute
situation dans laquelle la paix et la sécurité internationales sont menacées ou rom
pues.

L'article 39 envisage trois hypothèses dans/lesquelles le Conseil de sécurité peut


agir: « menace contre la paix», « rupture de la paix», « acte d'agression». Alors que la
première renvoie à un danger, non plus seulement potentiel (chapitre VI), mais imminent, les
deux autres impliquent que la force a déjà été employée. Toutefois, il appartient au Conseil
de « qualifier» la situation (contrairement au mécanisme du Pacte de la SDN, dans lequel la
situation était considérée comme évidente), et ce constat s'impose à tous les États membres
des Nations Unies. Étant donné les modalités de prise de décisions au sein du Conseil et le
droit de veto dont disposent les cinq membres permanents, ce constat est, bien
évidemment, un acte hautement politique et il demeure toujours possible à un des cinq
grands de s'opposer à cette constatation. C'est un risque qu'ont pris et mesuré les
rédacteurs de la Charte.

Une fois cette situation qualifiée, le Conseil de sécurité dispose de plusieurs


hypothèses d'action. D'une part, avant toute mise en œuvre de la sécurité collective, il « peut
inviter les parties à se conformer aux mesures provisoires qu'il juge nécessaires ou
souhaitables», et ce « afin d'empêcher la situation de s'aggraver» (art. 40). D'autre part, le
Conseil peut adopter des mesures coercitives, relevant donc du mécanisme de sécurité
collective (art. 39: «Le Conseil de sécurité [...] fait des recommandations ou décide quelles
mesures seront prises conformément aux Articles 41 et 42 pour maintenir ou rétablir la paix
et la sécurité internationales. »). Dans ce cadre, deux types de coercitionpeuvent être
envisagés. Dans un premier temps, le Conseil peut décider de l'adoption de mesures de
coercition non militaires (art. 41 : «Le Conseil de sécurité peut décider quelles mesures
n'impliquant pas l'emploi de la force armée doivent être prises pour donner effet à ses
décisions, et peut inviter les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures. »] ; il
peut alors s'agir de la rupture des relations diplomatiques, de l'interruption des relations
économiques, etc., avec le ou les États impliqués. Dans un deuxième temps, si ces mesures
non militaires ne paraissent pas suffisantes, le Conseil peut, en vertu de l'article 42, «
entreprendre, au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge
nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales».Il
s'agit là de la mise en œuvre de mesures de coercition militaires. Le mécanisme instauré ici
par la Charte des Nations Unies est très différent de celui du Pacte de la SDN. En effet,
~ 57 ~

alors que dans le cadre de la Société des Nations, les troupes étaient envoyées par les
États, dans le cadre de l'ONU, c'est ellequi envoie les contingents militaires. Il s'agit donc,
sur le plan organique, d'une opération des Nations Unies. Ces troupes doivent, aux termes
de l'article 43, être mises à la disposition du Conseil par les États, en application d'accords
spéciaux devant être conclus entre l'organisation et chaque État. Ces accords doivent fixer
le volume et la nature des forces; en outre, les contingents doivent être mobilisables en tout
tempspar le Conseil. Une fois affectés à une force des Nations Unies, les militaires passent
sous le contrôle de l'organisation et la direction d'un Comité d'état-major (composé des chefs
d'état-major des membres permanents du Conseil de sécurité).

Dans son art. 46 voir p. 67.

3. Le système né de la pratique de l'ONU

Pendant la période 1945-1990, le système de sécurité collective tel qu'institué par la


Charte n'a pour ainsi dire pas fonctionné. Le Conseil de sécurité s'est trouvé dans
l'incapacité de mener des actions coercitives, paralysé qu'il était par la rivalité Est-Ouest. La
chute du blocsoviétique entraînera un déblocage du Conseil de sécurité, déblocagequi ne se
traduira pas, à strictement parler, par une activation du système de sécurité collective tel que
prévu par la Charte, mais néanmoins, par la mise en œuvre de mesures de coercition
militaires.

 La paralysie du Conseil de sécurité pendant l'antagonisme Est-Ouest

L'affaiblissement du Conseil a conduit à une première tentative d'adaptation lors de


la guerre de Corée. Toutefois, ultérieurement, un biais à été trouvé, permettant à l'ONU
d'intervenir sur le terrain, mais dans un cadre préventifet non plus coercitif: les opérations de
maintien de la paix.

- Une tentative de contournement : la résolution « Union pour le maintien de la paix»

Lorsqu'en 1950, l'armée nord-coréenne franchit le 38' parallèle et envahit la Corée


du Sud, l'URSS pratique déjà depuis quelque temps, au Conseil de sécurité, la politique de
la « chaise vide». Partant du principe que l'absence d'un des membres permanent n'équivaut
pas à l'expression d'un veto, le Conseil adopte des résolutions constatant une « rupture de
la paix» (rés. CS, 82 (1950), 25 juin 1950), demandant aux États membres de soutenir la
Corée du Sud et de mettre des forces militaires à la disposition d'un commandement unifié
sous l'autorité des États-Unis (rés. CS, 84 (1950), 7 juil. 1950). Toutefois, l'URSS réagit en
réintégrant son siège au Conseil de sécurité, dont la prise de décision se trouve
immédiatement bloquée par le veto soviétique. En conséquence, les États-Unis' vont user de
leur influence à l'Assemblée générale pour faire adopter la résolution 377 (V) (3 nov. 1950),
autrement connue sous le nom d' « Union pour le maintien de la paix».

Cette résolution pose le principe selon lequel la responsabilité du maintien de la


paix pèse non seulement sur Conseil de sécurité, mais également sur l'ONU dans son
ensemble: « Dans tous les cas où paraît exister une menace contre la paix, une rupture de la
paix ou un acte d'agression et où, du fait que l'unanimité n'a pu se réaliser parmi ses
membres permanents, le Conseil de sécurité manque de s'acquitter de sa responsabilité
~ 58 ~

principale dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, l'Assemblée générale


examinera immédiatement la question afin de faire aux membres les recommandations
appropriées sur les mesures collectives à prendre, y compris, s'il s'agit d'une rupture de la
paix ou d'un acte d'agression, l'emploi de la force armée, en cas de besoin, pour rétablir la
paix ou la sécurité internationales ». Cette résolution appelle plusieurs observations.

Tout d'abord quant à sa légalité: en effet, il s'agit d'une modification de la Charte


- d'un transfert de compétences - sans recourir à la procédure légale des articles 108
et 109 (cfr. La théorie des pouvoirs implicites contredit ces allégations (cette critique) et
donne donc toute la force à cette résolution). À cet égard, certains États ont alors mis en
cause la régularité de la résolution en refusant d'en assumer les conséquences financières;
en d'autres termes, ils considéraient qu'ils n'avaient pas à contribuer aux dépenses qui
résultaient de l'application de cette résolution. La France et l'URSS ont ainsi réduit leurs
contributions à l'ONU. La CIJ, saisie par l'Assemblée générale, a rendu un avis consultatif
(20 juil. 62, Certaines dépenses des Nations Unies) dans lequel elle condamne ce
comportement. Cependant, les États ont maintenu leur position et il n'a pas été possible de
surmonter ce problème.

Ensuite, des observations quant aux pouvoirs de l'Assemblée générale: ils diffèrent
fortement de ceux du Conseil de sécurité; l'Assemblée ne peut en effet qu'émettre des «
recommandations », qui n'ont, on le sait, pas de caractère obligatoire.

Enfin, des observations quant à la nature même du système de sécurité collective :


le système instauré par la Charte rend indissociable la sécurité collective de la prise de
décision conjointe des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, garante de
l'impartialité de l'action menée. Contourner le blocage du Conseil de sécurité en usant de
l'Assemblée générale conduit ainsi à faire de l'emploi de la coercition militaire par
l'organisation un instrument aux seules mains de la majorité. (in fine, ceci veut dire en
substance que c'est étonnant car c'est dans cette majorité qu'il y a plus d'irresponsables).

La résolution, toujours en vigueur, a trouvé application dans plusieurs situations,


notamment en Corée en 1950, dans l'affaire de Suez en 1956, pendant la crise du Congo en
1960, lors du conflit indo-pakistanais en 1971, suite à l'intervention de l'Union soviétique en
Afghanistan en 1980, concernant la Namibie en 1981 et dans l'affaire du Golan (territoire
arabe occupé) en 1982.

- Des tentatives d'adaptation: les opérations de maintien de la paix

Le Conseil de sécurité n'étant pas parvenu à mettre en place des actions militaires
coercitives, une pratique a été instaurée, sur le fondement, non pas du chapitre VII
de la Charte, mais du chapitre VI: les opérations de maintien de la paix (les « casques
bleus »). Généralement, elles n'ont pas de caractère obligatoire et ne constituent pas
des mesures coercitives, seulement des mesures conservatoires; il s'agit néanmoins
de l'envoi de contingents militaires sur les lieux d'un conflit opposant plusieurs États.

Leur origine remonte aux suites de l'intervention franco-britannique à Suez en 1956.


Le Conseil de sécurité étant bloqué par les vetos français et britannique, il saisit l'Assemblée
générale qui demanda aux parties de se retirer; les deux États n'acceptèrent qu'à la
~ 59 ~

condition d'être remplacés par une force internationale. Cette proposition fut entérinée et
l'Assemblée créa la Force d'urgence des Nations Unies (FUNU), stationnée en Égypte et
chargée de surveiller le respect du cessez-le-feu (rés. AG, 1000 (ES-1), 5 nov. 1956).

Par la suite, d'autres opérations de maintien de la paix furent instituées, parmi


lesquelles on peut mentionner: l'Opération des Nations Unies au Congo (ONU, rés. 143
(1960), 17 juil. 1960); la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre
(UNFLCYP, rés. CS, 186 (1964), 4 mars 1964); le Groupe d'observateurs militaires des
Nations Unies pour l'Iran et l'Irak (GOMNUII, rés. CS, 619 (1988), 9 août 1988) ; la Force de
protection des Nations Unies en Ex-Yougoslavie (FORPRONU, rés. CS, 743 (1992),21 fév.
1992); la Mission d'appui des Nations Unies en Haïti (MANUH, rés. CS, 1063 (1996), 28 juin
1996) ; la Mission de l'organisation des Nations Unies en République démocratique du
Congo (MONUC, rés. CS, 1279 (1999), 30 nov. 1999) ; la Mission des Nations Unies au
Soudan (MINUS, rés. CS, 1590 (2005), 24 mars 2005).

Il ne s'agit pas d'une régression par rapport au système de sécurité collective


instauré par la Charte, mais d'une adaptation pragmatique du système face à la paralysie du
Conseil de sécurité. Toutefois, la formule n'est pas figée et peut évoluer ; le Conseil peut
ainsi mettre en place une mission sur le fondement du chapitre VI, puis, au vu des
événements, renforcer le mandat des « casques bleus », en application du chapitre VIT (tel
fut le cas, par exemple, dans l'affaire du Congo: afin de réduire la sécession katangaise,
l'opération est devenue coercitive: 20000 hommes sont déployés et emploient la force).

Ces opérations de maintien de la paix présentent un point commun avec les actions
de sécurité collective telles qu'envisagées par la Charte: ce sont des actions collectives des
Nations Unies et non des initiatives des États membres: elles sont décidées par l'ONU, les
contingents sont soumis à un état-major onusien et agissent sous le contrôle de
l'organisation. Ces opérations ont le statut juridique d'organe subsidiaire du Conseil.

Toutefois, en dépit de cette similitude, les opérations de maintien de la paix sont


radicalement différentes des actions de sécurité collective. Elles reposent en effet sur le
consentement des États intéressés. D'une part, il est indispensable que les parties au conflit
acceptent le cessez-le-feuet la présence d'une mission des Nations Unies (ainsi, par
exemple, l'Égypte a exigé et obtenu le départ de la FUNU en 1967, ce qui a constitué
l'origine immédiate de la « guerre des Six Jours »). D'autre part, il est nécessaire que les
États membres acceptent de fournir des contingents militaires. De cela, il ressort que,
contrairement au système de sécurité collective envisagé par la Charte qui prévoit le
monopole du Conseil de sécurité en ce domaine, les opérations de maintien de la paix
peuvent être établies aussi bien par le Conseil que par l'Assemblée générale, étant donné
qu'aucune mesure de contrainte n'est adoptée.

De cette absence de caractère obligatoire découle une autre conséquence: l'action


n'est pas coercitive; le contingent est faiblement armé et sans droit d'utiliser la force, sauf
légitime défense (mais dans des conditions très strictes). Il ne s'agit pas de faire pression sur
un État, mais seulement d'apaiser le conflit; de faire respecter un cessez-le-feu, pas de
régler le différend, au fond (ce qui devra être fait par voie politique, sur la base d'un accord
entre les parties). On parle à propos de ces opérations de maintien de la paix de
peacekeeping et non de peacemaking. De plus, aux côtés du personnel militaire, se trouve
~ 60 ~

généralement du personnel civil. Ces opérations sont, en principe, instituées à titre


provisoire, mais en pratique, elles sont périodiquement renouvelées faute de trouver un
terrain d'entente entre les belligérants (ainsi, l'Organisme des Nations Unies chargé de la
surveillance de la trêve en Palestine (ONUST), est déployé depuis 1948; de même,
l'UNFICYP est stationnée à Chypre depuis 1964; elle n'a, en outre, pas pu prévenir
l'intervention turque de 1974).

Cette pratique des opérations de maintien de la paix a constitué une innovation


originale et salutaire, permettant au Conseil de sécurité de fonctionner à minima pendant
l'affrontement Est-Ouest.

c) Le maintien de la paix dans un monde post-antagonisme Est-Ouest

La période de détente qui s'instaure au cours de la seconde moitié des années


1980 au sein de l'ordre Est-Ouest rend possible l'application du système de sécurité
collective, bien qu'elle soit toujours tributaire des préoccupations des cinq membres
permanents, notamment de celles des États-Unis. En outre, les Nations Unies vont
diversifier leurs modalités d'action.

c.1. Le système d'autorisation de la coercition militaire

Le tabou du chapitre VII est levé en 1990, lors de la première guerre du Golfe (donc
avant la chute du bloc soviétique). Après l'invasion du Koweït par l'Irak le 2 août 1990, le
Conseil de sécurité se réunit immédiatement et adopte le jour même, sur le fondement du
chapitre VII, la résolution 660 (1990) par laquelle il constate une rupture de la paix,
condamne l'invasion et exige le retrait des troupes irakiennes. L'Irak n'obtempérant pas, le
Conseil décide d'instaurer un embargosur les produits de base et les marchandises à
destination ou en provenance de cet État (rés. CS, 665 (1990), 25 août 1990). Faute de
résultat, le Conseil franchit une étape supplémentaire et adopte, le 29 novembre 1990, la
résolution 678 (1990), autorisant les États membres de l'ONU à « user de tous les moyens
nécessaires dans l'hypothèse où l'Irak ne se serait pas retirer du Koweït le 15 janvier 1991.
Ce qui est visé ici, par l'expression « tous les moyens nécessaires» est bien évidemment le
recours à la force armée. Celle-ci sera menée par une coalition dirigée par les États-Unis.

Cette intervention a suscité de vastes débats, car elle ne correspondait pas au


schéma de la Charte des Nations Unies pour la mise en œuvre de la coercition militaire.
Plusieurs thèses se sont alors affrontées:

Selon la première, majoritaire, l'article 42 [« Si le Conseil de sécurité estime que les


mesures prévues à l'Article 41 seraient inadéquates ou qu'elles se sont révélées telles, il
peut entreprendre, au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il
juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité
internationales. »] peut être utilisé indépendamment de l'article 43 aux termes duquel les
États et l'ONU doivent conclure des accords visantà la mise à disposition de l'organisation de
contingents militaires. Ainsi, la guerre du Golfe était une « opération de police internationale
», les États agissant en tant qu'agents de l'ONU.

Selon une seconde thèse, la guerre du Golfe aurait constitué un exemple de «


~ 61 ~

légitime défense collective », ayant été « couverte» par le feu vert donné par le Conseil de
sécurité. Le Secrétaire général de l'ONU, M. Javier Perez de Cuellar, a donné corps à cette
thèse en déclarant que la guerre du Golfe n'était certainement pas une « guerre des Nations
Unies »,mais plutôt une guerre faite « au nom»des Nations Unies.

Depuis ce conflit, cette technique d'autorisation par le Conseil de sécurité d'une


coalition ad hocd'États à recourir à la force est presque devenue banale. Ainsi, cette méthode
fut employée en Bosnie-Herzégovine(rés. CS, 770 (1992), 13 août 1992; 816 (1993), 31
mars 1993; 836 (1993), 4 juin 1993; 998 (1995),16 juin 1995; 1031 (1995), 15 déc. 1995;
1088 (1996), 12 déco 1996), en Somalie (rés. CS, 794 (1992), 3 déc, 1992), au Rwanda
(rés. CS, 29 (1994), 22 juin 1994), en Haïti(rés. CS, 940 (1994), 31 juil. 1994; rés. CS, 1529
(2004), 29 fév. 2004), dans la région des Grands Lacs(rés. CS, 1080 (1996), 15 nov. 1996),
en Albanie (rés. CS, 11 01 (1997), 28 mars 1997), en République centrafricaine(rés. CS,
1125 (1997), 6 août 1997), en Guinée-Bissau(rés. CS, 1216 (1998), 21 déc, 1998), au
Kosovo (rés. CS, 1244 (1999), 10 juin 1999), au Timor oriental (rés. CS, 1264 (1999), 15
sept. 1999), en Afghanistan(rés. CS, 1386 (2001), 20 déc. 2001), en Côte d'Ivoire (rés. CS,
1464 (2003), 4 fév. 2003; 1528 (2004), 27 fév. 2004), en République démocratique du
Congo(rés. CS, 1484 (2003),30 mai 2003).

- Une nouvelle génération d'opérations de maintien de la paix

Alors que les premières opérations de maintien de la paix supposaient l'accord de


l'État sur le territoire duquel elles se déroulaient, la pratique récente tend à très nettement
assouplir cette exigence. En effet, les différentes modifications des mandats d'opération en
cours ont été décidées par le Conseil de sécurité « en vertu du chapitre VlI », ce qui implique
que le gouvernement intéressé ne pouvait s'y opposer, si tant est qu'il ait été en mesure de
le faire. En règle générale, il s'agit de situations où les « casques bleus» n'interviennent plus
seulement pour « maintenir » la paix, mais pour la « rétablir ». Les forces des Nations Unies
doivent alors pouvoir se défendre lorsqu'elles sont attaquées par telle ou telle faction.

Cette tendance a été observée en Sierra Leone, où la MINUSIL - (créée par la


résolution 1270 (1999», dont les effectifs ont été fortement accrus, s'est vue confier la tâche
de circonscrire la rébellion et de soutenir le gouvernement « légal». Tel fut également le cas
pour la MONUC, mission des Nations Unies au Congo (instituée par la résolution 1279
(1999» à laquelle le Conseil de sécurité a reconnu, par la résolution 1291 (2000) et en vertu
du chapitre VII de la Charte, le droit d'userde la force armée en cas de légitime défense pour
protéger le personnel, les installations et le matériel de l'ONU, assurer la sécurité et la liberté
de circulation de son personnel, et protéger les civils se trouvant sous la menace imminente
de violences physiques.

- Développements normatifs et institutionnels du rôle du Conseil de sécurité

Depuis le début des années 1990, le Conseil de sécurité a étendu ses pouvoirs,
principalement dans trois directions: d'une part en élargissant la notion de « menace contre
la paix », d'autre part en créant des organes de suivi des sanctions qu'il imposait, enfin en
s'érigeant en «législateur international».

Dans la mise en œuvre de son pouvoir discrétionnaire de qualification, le Conseil


~ 62 ~

s'est très longtemps gardé d'utiliser les termes « agression» ou « rupture de la paix », même
lorsque les faits semblaient naturellement mériter cette qualification, par exemple dans la
guerre Iran-Irak. Au mieux, il a utilisé l'expression « actes agressifs» ; mais le plus souvent, il
employait l'euphémisme de «menace contre la paix». Un premier pas fut réalisé en 1990
lors de l'invasion du Koweït par l'Irak, le Conseil qualifiant explicitement cet acte de « rupture
de la paix ». Toutefois, le trait significatif de l'évolution du rôle du Conseil de sécurité est
moins l'emploi d'une terminologie précise que l'extension de la notion de « menace contre la
paix et la sécurité internationales» à des conflits internes.Tel a ainsi été, le cas avec la
résolution 688 (1991) condamnant la répression menée par l'Irakcontre les Kurdes après la
guerre du Golfe, ou encore dans les résolutions concernant la situation en Somalie. La
résolution 841 (1993) du 16 juin 1993, relative à Haïti, semble franchir un pas
supplémentaire: le Conseil qualifie en effet de menace contre la paix et la sécurité
internationales non plus une situation de conflit interne, mais un problème de légitimité
gouvernementale; ainsi le Conseil souligne-t-il que « ... malgré les efforts de la communauté
internationale, le gouvernement légitime du président Jean-Bertrand Aristide n'ait pas été
rétabli » et se dit « préoccupé par le fait que la persistance de cette situation contribue à
entretenir un climat de peur, de la persécution et de désorganisation économique, lequel
pourrait accroître le nombre de Haïtiens cherchant refuge dans des États membres voisins,
et convaincu que cette situation doit être inversée pour qu'elle n'ait pas d'effet nocif dans la
région ... ». De même, lors du coup d'État militaire en Sierra Leone en mai 1997, le Conseil
de sécurité a instauré, sur le fondement du chapitre VII, un embargo économique à
l'encontre du pays, après avoir constaté une menace contre la paix et la sécurité
internationales (rés. CS, 1132 (1997), 8 oct. 1997). L'adoption de telles résolutions semble
manifester l'existence d'un nouveau principe, celui de « légitimité démocratique », qui
conduirait les Nations Unies à intervenir, au nom du maintien de la paix et de la sécurité
internationales, dans les affaires intérieures des États pour soutenir les gouvernements
démocratiquement élus. Il est à noter toutefois que le Conseil de sécurité prend soin, dans
chaque hypothèse, de rattacher l'affaire à un élément d'internationalisation (problème des
réfugiés, risque de déstabilisation de la région ...). En outre, les nouvelles missions que
s'attribue le Conseil sont conformes à l'esprit de l'article 2, § 7 de la Charte des Nations
Unies; en effet, bien que cet article pose le principe de non-intervention de l'ONU dans les
affaires intérieures des États, il précise que « ce principe ne porte pas atteinte à l'application
des mesures de coercition prévues au chapitre VII ».Quoi qu'il en soit, il est incontestable
que, dans un monde de plus en plus interdépendant, la frontière entre les problèmes
purement internes et les problèmes internationaux s'estompe très fortement.

Le fait d'imposer des sanctions économiques a rendu nécessaire la création de


comités de suivi des sanctions, organes subsidiaires du Conseil de sécurité. Les comités
sont composés de représentants de tous les membres du Con seilet prennent leurs décisions
par consensus. Leur rôle principal est de superviser la mise en œuvre des sanctions, en
particulier la pratique des États à qui il revient de les appliquer, voire de réagir aux violations
des sanctions. Les comités de sanctions ont, en outre, bénéficié d'importantes délégations
de pouvoir de la part du Conseil, notamment pour ce qui concerne les dérogations pour
raisons humanitaires, accordées au cas par cas. Parmi les différents comités institués, on
peut mentionner les comités concernant la situation entre l'Irak et le Koweït (rés. CS, 661
(1990), 6 août 1990), la Somalie (rés. CS, 751 (1992), 24, avril 1992), l'Angola (Organe des
sanctions contre l'UNITA, rés. CS, 864 (1993), 15 sept. 1993), le Libéria (Comité d'examen
d'information sur violations d'embargo sur armes, rés. CS, 985 (1995),13 avr. 1995), Al-
~ 63 ~

Qaida, les Talibans et les individus associés (rés. CS, 1267 (1999), 15 oct. 1999), la
situation entre l'Éthiopieet l'Érythrée (rés. CS, 1298 (2000), 17 mai 2000), le Soudan (rés.
CS, 1591 (2005), 29 mars 2005). Certains de ces comités - dont la durée esten principe la
même que celle des sanctions dont ils assurent la mise en œuvre ont exercé une grande
influence sur la vie économique des États concernés.

Outre ces développements institutionnels, le Conseil de sécurité a également innové


sur le plan normatif, s'érigeant en « législateur international ». En effet, la résolution 1373
(2001) adoptée à la suite des attentats du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center,
qualifie, sur le fondement du chapitre VII, le terrorisme international de « menace à la paixet
à la sécurité internationales ». Cependant, l'élément le plus notable de cette résolution est sa
portée quasi législative: le Conseil de sécurité pose un nombre très important d'obligations et
d'interdictions aux États membres, obligations « générales et impersonnelles» qui laissent à
penser que le Conseil a véritablement légiféré en matière de terrorisme. Ainsi, la résolution
demande-t-elle, entre autres, aux États de prévenir et réprimer le financement des actes
terroristes, d'ériger en crime la fourniture d'aide et soutien aux terroristes, de ratifier les
conventions internationales relatives au terrorisme. À plusieurs reprises, ultérieurement, le
Conseil a agi de même : avec les résolutions 1540 (2004) du 28 avril 2004, relative à la «
Non-prolifération des armes de destruction massive», 1566 (2004) du 8 octobre 2004 et
1617 (2005) du 29 juillet 2005, relatives toutes deux aux « Menaces contre la paix et la
sécurité internationales résultant d'actes de terrorisme».

Dans un autre domaine, mais toujours en relation avec ce développement normatif


de la mission du Conseil de sécurité, les violations massives et systématiquesdu droit
humanitaire qui ont eu lieu en Yougoslavie et au Rwanda l'ont conduit à créer de nouveaux
instruments dans le cadre de sa mission de maintien de la paix: des juridictions pénales
internationales ad hoc. Ce qui démontre la large marge de manœuvre dont dispose le
Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix. Ainsi, la résolution 808 (1993) du 22
février 1993 a créé le Tribunal pénal international pour l'ex- Yougoslavie et la résolution 955
(1994) du 8 novembre 1994 a institué le Tribunal pénal international pour le Rwanda. Ces
innovations ont été perçues, par certains, notamment les personnes jugées et
condamnéespar ces tribunaux, comme traduisant un excès de pouvoirde la part du Conseil;
ainsi ces deux tribunaux ont-ils été amenés à analyser le fondement juridique de leur propre
existence et ont-ils conclu à la conformité des résolutions du Conseil à la Charte des Nations
Unies. La justice devient ainsi un des instruments de la recherche de la paix.

Le rôle positif des Nations – Unies lors de la guerre du Golfe p. 69 – 72.

B. L'action des organismes régionaux

La Charte de San Francisco organise les relations des Nations Unies avec les
organisations internationales, et plus précisément avec les organismes régionaux, dans le
cadre du chapitre VIII, à savoir les articles 52 à 54. L'article 52 dispose, en substance, qu'il
n'y a pas d'opposition de principe des Nations Unies à l'existence d'accords et d'organismes
régionaux, pour autant que leurs activités soient compatibles avec laCharte; il poursuit en
faisant obligation aux États membres de ces organismes de connaître en premier lieu des
différends d'ordre local et de les régler par des moyens pacifiques. L'article 53 quant à lui
dispose que le Conseil de sécurité peut utiliser ces organismes régionaux pour mener des
~ 64 ~

actions coercitives et que toute action coercitive envisagée par une organisation
internationale doit nécessairement obtenir l'autorisation du Conseil, lequel doit, en outre, en
vertu de l'article 54, être tenu informé de toute action entreprise ou envisagée par ces
organismes pour le maintien de la paix. Il ressort donc de ces dispositions que seules les
actions coercitives susceptibles d'être menées par les organisations régionales nécessitent
une autorisation préalable de la part du Conseil de sécurité. Toutefois, en matière de
délégation de pouvoirs du Conseil aux organisations internationales, un constat s'impose: le
système de délégation instauré par la pratique ne correspond pas ou très peu au schéma
constitutionnel du chapitre VIII. En effet, on constate de très fortes résistances de la part
des principaux acteurs à faire jouer le mécanisme de l'article 53.

1. L'action des organismes régionaux hors du cadre de la Charte des Nations Unies

Dans de nombreux exemples, en effet, les organisations régionales, ou sous-


régionales, ont mis en œuvre des opérations militaires hors du cadre du chapitre Vlll, de fait,
sans autorisation préalable du Conseil de sécurité. Toutefois, pour assurer la légalité de
l'intervention, les organisations ont invoqué différents fondements juridiques, que ce soit le
consentement de l'État sur le territoire duquel l'opération se déroulait, ou une autorisation
implicite du Conseil de sécurité.

Ainsi, les interventions de la CEDEAO au Libéria en 1992 et en Sierra Leone en


1997 (avant la résolution 1132) furent-elles qualifiées d'opérations de maintien de la paix,
mises en œuvre à la demande des États intéressés. Il en fut de même lors des interventions
de la CEl en Géorgie en 1993-1994 et au Tadjikistan en 1994-1995. Ces opérations
militaires, étant menées avec l'accord de l'État sur le territoire duquel elles se déroulaient ne
pouvaient être considérées comme des actions coercitives. Elles n'avaient, de fait pas à
s'inscrire dans le cadre du chapitre VIII. Cette qualification soulève néanmoins un certain
nombre de questions. En effet, tant pour ce qui est du Libéria que de la Sierra Leone, les
forces de la CEDEAO étaient sur place avant que les États ne les invitent à intervenir. On
peut également s'interroger sur le degré de liberté laissé aux États en cause et se demander
si leur consentement a été obtenu hors de toute contrainte. Enfin, il semble avéré que les
forces de maintien de la paix aientà plusieurs reprises, participé aux combats.

Bien évidemment, ces réflexions ne doivent pas laisser entendre que toutes les
interventions de maintien de la paix menées par des organisations régionales seraient en fait
des actions coercitives déguisées et mises en œuvre en violation de la Charte. L'intervention
de l'Union africaine au Dal-foJr ne semble pas pouvoir souffrir d'une telle critique, malgré les
fortes pressions diplomatiques exercées sur le gouvernement soudanais. L'Union africaine
a, dans un premier temps, envoyé des observateurs; de fait,l'opération n'entrait pas dans le
cadre du chapitre VITI, ni même du chapitre VII. Puis, avec l'accord du gouvernement
soudanais, et sur le fondement de la résolution 1564 (2004) du 18 septembre 2004, furent
envoyés des militaires.

Lors des bombardements du Kosovo par l'OTAN, en 1999, l'organisation a cherché


a établir le fondement juridique de son intervention militaire en invoquant une autorisation
implicite du Conseil de sécurité, résultant de la résolution 1199 (1998) du 23 septembre
1998, dans laquelle il souligne « la nécessité de veiller à ce que soient respectés les droits
de tous les habitants du Kosovo» et affirme que « la détérioration de la situation au Kosovo
~ 65 ~

constitue une menace pour la paix et la sécurité dans la région». Les paragraphes 16 et 17
de cette résolution sont les plus intéressants. Le Conseil y déclare, en effet,qu'en cas de
non-respect des mises en garde qui ont été adressées aux autorités de Belgrade, il
examinera la possibilité d'une action ultérieure. Là encore, le fondement juridique invoqué
est plus que contestable. En effet, cette résolution n'autorise pas explicitement le recours à
la force par les États. Elle constitue cependant la seule référence sur laquelle les États
membres de l'OTAN ont pu s'appuyer pour justifier leur action de coercition à l'égard de la
République fédérale de Yougoslavie, dans la mesure où aucune autre résolution n'a
examiné la possibilité de mesures additionnelles, et ce en raison de l'hostilité affichée de
certains membres du Conseil, la Chine et la Russie notamment.

Ces différentes opérations militaires menées hors du cadre de l'article 53, sur la
base de fondements juridiques plus que discutables, mettent le Conseil de sécurité devant le
fait accompli. Il ne semble donc avoir d'autre choix que soit régulariser l'intervention de
l'organisation, soit la condamner ouvertement, il est à noter toutefois que le Conseil n'a
jamais condamné, mais il n'a jamais régularisé pour autant, il a en effet opté pour un moyen
détourné, traduisant nettement la mise en œuvre de ses pouvoirs discrétionnaires. Et ce en
consacrant le caractère d'opération de maintien de la paix aux interventions de la CEDEAO
et la CEI ce qui permettait d'affirmer, même de façon fictive, leur caractère pacifique; et ainsi
de maintenir, artificiellement, l'action militaire hors du cadre du chapitre VIII. Ainsi a-t-il. à
dessein, adopté une version des faits qui ne remet pas en cause le droit existant.
Remarquons cependant que le Conseil de sécurité, dans ses résolutions ultérieures, tout en
« remerciant» les organisations régionales de leur participation au règlement pacifique des
différends, mentionne à plusieurs reprises, dans les visas de la résolution, le chapitre VIII (cf.
par ex. rés. CS, 788 (1992),19 nov. 1992 concernant la situation au Libéria) ; peut-être peut-
on voir dans cette référence un certain rappel à l'ordre adressé aux organisations? En ce qui
concerne la guerre du Kosovo, le Conseil n'a jamais validé rétroactivement l'intervention de
l'OTAN. Tout au plus a-t-il dû prendre acte du résultat de l'opération dans la résolution 1244
(1999) du 10 juin 1999. Quant à savoir si le rejet du projet de résolution déposé par la
Russie, la Biélorussie et l'Inde, visant à faire condamner cette intervention en tant qu'elle
constituait, selon les termes du projet de texte, une violation flagrante de la Charte, peut être
interprété comme une approbation implicite, cela serait aller trop loin et risquerait de
conduire à des dérives dangereuses, permettant d'interpréter la non-condamnation par le
Conseil de sécurité comme une validation rétroactive d'une intervention militaire conduite en
marge de la Charte.

De son côté, le Conseil de sécurité fait montre de certaines réticences à mettre en


œuvre le chapitre VIII. En effet, les habilitations données aux organisations internationales
ne s'inscrivent que très rarement dans le cadre du chapitre VIII. À ce jour le seul exemple
dans lequel le Conseil a, ouvertement et formellement, autorisé une organisation régionale,
en tant que telle, à mettre en œuvre une action coercitive en référence au chapitre VIII est
celui de l'intervention de la CEDEAO en Sierra Leone en 1997. La résolution 1132 (1997)
l'autorise, en effet, à faire respecter l'embargo imposé par le Conseil. Une autre résolution
fait mention d'une autorisation donnée par le Conseil sur le fondement du chapitre VIII. Il
s'agit de la résolution 1464 (2003) du 4 février 2003, concernant la situation en Côte d'Ivoire.
Toutefois, l'interprétation en est quelque peu obscurcie par le fait que le Conseil de sécurité
fait référence à la fois aux chapitres VII et VIII. La référence au chapitre VII se conçoit
aisément en ce que la résolution vise à la fois l'intervention des forces françaises et celles de
~ 66 ~

la CEDEAO, la seule mention du chapitre VIII ne pouvait donc suffire. Cependant, lorsque le
Conseil vise le chapitre VIII, il ne s'adresse pas directement et en tant qu'organisation
régionale à la CEDEAO, mais aux « États membres participant à la force de la CEDEAO ».
Quelle est la logique d'une telle rédaction? N'y a-t-il pas un paradoxe, si ce n'est une
incohérence, à allier le chapitre VIII à la référence aux États? Soit le Conseil, en vertu du
chapitre VIII, s'adresse directement à l'organisation, en tant que personne morale distincte
de ses États membres, soit, en vertu du chapitre VII cette fois, il s'adresse aux seuls États
membres de l'organisation. Dans les rares autres hypothèses dans lesquelles le chapitre VIII
est cité, il y est fait référence de façon générale sans que soit désigné une organisation en
particulier (rés. CS, 787 (1992),16 nov. 1992 concernant la Bosnie-Herzégovine; rés. CS,
794 (1992),3 déco 1992, concernant la Somalie) ; parfois, le chapitre VIII n'est évoqué que
dans les visas (rés. CS, 788 (1992),19 nov. 1992 et rés. CS, 813 (1993), 25 mars 1993,
relatives au Libéria; rés. CS, 816 (1993), 31 mars 1993 et rés. CS, 820 (1993),13 avr. 1993,
concernant la Bosnie-Herzégovine; rés. CS, 751 (1992) du 24 avr. 1992, relative à la
Somalie).

Dans toutes les autres circonstances dans lesquelles une organisation régionale est
intervenue militairement, les résolutions du Conseil de sécurité ne font référence qu'au seul
chapitre VII. L'habilitation est, de fait, conférée, non pas à l'organisation, mais aux États
agissant «à titre national ou dans le cadre d'organisations ou d'arrangements régionaux».
Quelques exemples, parmi les plus symptomatiques, peuvent toutefois être mentionnés.
Ainsi en fut-il de l'opération Artémis, menée en République démocratique du Congo en 2003,
par l'UEO, en vertu de la résolution 1484 (2003) du 30 mai 2003, aux termes de laquelle le
Conseil de sécurité, sur le fondement du chapitre VII, autorise, sans autre précision, le
déploiement d'une force multinationale intérimaire d'urgence. Néanmoins, l'exemple le plus
intéressant est probablement celui de la Bosnie-Herzégovine. En effet, dans les résolutions
1031 (1995) du 15 décembre 1995 et 1088 (1996) du 12 décembre 1996, le Conseil de
sécurité adopte une obscure périphrase au moyen de laquelle il tente de ne pas désigner
l'OTAN: «Le Conseil de sécurité [ ... ) agissant en vertu du chapitre VII [ ... ) autorise les
États Membres agissant par l'intermédiaire de l'organisation visée à l'annexe l-A de l'Accord
de paix [à savoir l'OTAN) ou en coopération avec elle à créer une Force multinationale de
mise en œuvre.de.la paix (IFOR).» Cet emploi du chapitre VII n'est, bien évidemment, en
aucun cas en contradiction avec la Charte; on peut en effet considérer qu'il ne s'agit là que
d'une interprétation de l'article 48, §1, aux termes duquel le Conseil peut faire appel à tous
les États membres des Nations Unies ou à certains d'entre eux seulement. Le fait que le
Conseil fasse appel aux États pris individuellement ou en tant qu'ils participent à une
organisation régionale s'inscrit dans la logique de ses pouvoirs discrétionnaires. Toutefois,
cette pratique est d'autant plus surprenante que la lettre du chapitre VII ne prévoit pas la
possibilité pour le Conseil d'habiliter les États à intervenir en son nom; alors que le chapitre
VIII envisage explicitement de telles habilitations à l'adresse des organisations régionales.
Ainsi, le Conseil va-t-il créer un outil dont il ne dispose pas dans le cadre du chapitre VII, et
ne pas utiliser un outil dont il dispose dans le cadre du chapitre VIII. Cela conduit à
s'interroger sur la logique de la procédure et sur l'intérêt que présente encore le chapitre VIII.
En réalité, cette référence prépondérante au chapitre VII permet au Conseil d'éviter de
soulever un certain nombre de questions dont la réponse n'est pas évidente, mais qui,
néanmoins, sur le strict plan juridique, ne présentent pas, ou plus, de véritables difficultés.
La première question esquivée est celle de la nature juridique de l'organisme intervenant. Le
problème posé fut de savoir s'il fallait que cela soit une organisation régionale, ce qui, au
~ 67 ~

regard de l'OTAN notamment, suscite quelque interrogation. En effet, cette organisation a


longtemps refusé d'être qualifiée d'organisation régionale, préférant l'expression «alliance
défensive ». Ainsi, en n'inscrivant pas l'action de l'OTAN dans le cadre du chapitre VIII, le
Conseil évite de la qualifier d'organisation régionale. Toutefois, s'agit-il d'une véritable
difficulté? On peut en douter d'autant que le Secrétaire général des Nations Unies, dans son
«Agenda pour la paix» de 1992, retenait une définition large et souple des «organismes et
arrangements régionaux ». renvoyant aussi bien aux organisations régionales de sécurité et
de défense mutuelle, aux organisations destinées à assurer le développement régional
qu'aux groupes ad hoc institués pour traiter d'une question particulière « Agenda pour la paix
»,rapport du Secrétaire général des Nations Unies, 17 juin 1992, N47/277-S/24111, § 61).
En définitive, l'élément géographique importe peu pour qualifier un organisme de régional au
titre du chapitre VIII; l'important est la capacité de l'institution à apporter une contribution
réelle à la paix et à la sécurité internationales. En outre, les. Nations Unies ont un besoin
désespéré d'entités qui «fassent la besogne» ; partant, le fondement juridique sur la base
duquel elles agissent n'est pas déterminant. La seconde difficulté éludée par la seule
référence au chapitre VII est celle de la participation d'États tiers à l'action coercitive
autorisée. La question est plus délicate. En effet, mentionner nommément une organisation
limite très fortement la possibilité pour d'autres États, non membres de l'organisation
régionale, d'intervenir. Or, pour ce qui est de la constitution de la KFOR par exemple, la
Russie n'avait donné son accord qu'à condition de pouvoir y participer. C'est la raison pour
laquelle la résolution 1244 (1999) ne mentionne ni le chapitre VIII ni directement l'OTAN,
mais dispose que le Conseil « autorise les États Membres et les organisations internationales
compétentes à établir la présence internationale de sécurité au Kosovo» (rés. CS, 1244
(1999), 10 juin 1999, §7).

2. Le développement de la coopération entre les Nations Unies et les organisations


régionales

Si le chapitre VIII, et plus particulièrement l'article 53, tel qu'inscrit dans la Charte, a
fait l'objet d'une telle défiance, cela tient au fait qu'il traduit une subordination des
organismes régionaux au Conseil de sécurité, semblant consacrer une hiérarchie entre
organisations. Cette idée de subordination, que traduit le terme « utilise» [« Le Conseil de
sécurité utilise, s'il y a lieu, les accords ou organismes régionaux ... ») est confirmée par
certaines prises de positions lors de la conférence de San Francisco. Ainsi, le gouvernement
néerlandais, semblant en cela exprimer une position majoritairement soutenue en Europe,
affirmait-il que « [r)ien ne semble plus dangereux pour la paix mondiale que des groupements
régionaux qui, si bonnes soient les intentions qui les ont suscités, pourraient à tout moment
se dresser l'un contre l'autre ou contre un État donné, faute d'une coordination appropriée»
(Conférence des Nations Unies sur les organisations internationales, avril-juin 1945, Doc. 2
(Fr) G/7 (j), p. 461). Or, une telle logique ne correspond plus ni à la structure actuelle de la
société internationale, ni à l'évolution qu'a connue la pratique dans le cadre du chapitre VII.
Néanmoins, le principe posé par ces dispositions, à savoir la nécessaire autorisation du
Conseil aux actions coercitives des organisations internationales, garde, quant à lui, tout son
intérêt. En effet, la logique de la subordination diffusée par les dispositions en cause doit
inévitablement, aujourd'hui, s'effacer devant la logique de coopération.
~ 68 ~

Cette idée est renforcée par les nouveaux instruments d'intervention instaurés par
certaines organisations régionales. Deux mécanismes peuvent être mentionnés et
rapidement présentés: le mécanisme pour la prévention des conflits de la CEDEAO
(Protocol relating to the mechanism for conflict prevention, management, resolution, peace-
keeping and security, 10 décembre 1999) et le Conseil de paix et de sécurité de l'Union
africaine (Protocole relatif à la création du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine,
9 juillet 2002). Ces deux instruments ont été élaborés en coopération avec le Secrétariat
général des Nations Unies, et ont pour objet, entre autres, d'assurer la gestion des conflits et
le maintien de la paix dans leurs zones d'intervention géographique respectives, qu'il
s'agisse de conflits d'ordre interne ou interétatique. À cet égard, il est à noter que les statuts
de ces deux instruments font explicitement référence au chapitre VIII de la Charte. Ainsi,
l'article 17 du statut du Conseil de paix dispose-t-il que « [d)ans l'exercice du mandat qui est
le sien dans la promotion et le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Afrique,
le Conseil de paix et de sécurité coopère et travaille en étroite collaboration avec le Conseil
de sécurité des Nations unies, qui assume la responsabilité principale du maintien de la paix
et de la sécurité internationales. À chaque fois que nécessaire, recours sera fait aux Nations
unies [...]conformément aux dispositions du chapitre VIII de la Charte des Nations unies
relatives au rôle des organisations régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité
internationales ». Le statut du mécanisme de la CEDEAO est plus intéressant en ce qu'il
prend clairement acte de l'évolution qu'a connu le pouvoir d'autorisation donné par le Conseil
de sécurité aux organisations régionales. En effet, l'article 52, § 3 dispose, en substance,
que la CEDEAO, conformément aux chapitres Vil et vm de la Charte, informera le Conseil de
toute intervention militaire entreprise. On note néanmoins une curieuse interprétation de la
Charte, en ce sens qu'en principe, l'organisation ne doit pas seulement informer le Conseil,
elle doit également, et principalement, obtenir son autorisation.

Il semble toutefois que l'on revienne à une interprétation plus stricte de la Charte et
de son chapitre Vlll. Cela ressort de la réflexion menée par le « groupe de personnalités de
haut niveau sur les menaces, les défis et le changement », groupe de seize personnalités
nommées par le Secrétaire général-des Nations Unies en novembre 2003 et dont la mission
était de réfléchir aux reformes possibles de l'ONU. Le rapport rendu le décembre 2004 est,
au regard des relations entre le Conseil et les organisations régionales, des plus
intéressants. En effet, le groupe de personnalités envisage que « l'autorisation de lancer une
opération régionale de maintien de la paix [soit] demandée au Conseil de sécurité dans tous
les cas» ; il poursuit en ajoutant que « les organisations régionales dotées de moyens de
prévention des conflits ou de maintien de la paix devraient les inscrire dans le cadre du
Système de personnels et moyens en attente des Nations Unies» [« Un monde plus sûr:
notre affaire à tous», rapport du «groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces,
les défis et le changement », A/59/565, § 86, p. 99). Cette idée d'un renforcement de la
coopération entre les Nations Unies et les différentes organisations régionales agissant dans
le domaine du maintien de la paix apparaît également dans le rapport du Secrétaire général
« Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l'homme
pour tous », du 24 mars 2005. Ainsi, cherche-t-on à dessiner un nouveau paysage -
correspondant, en quelque sorte, à la mise en œuvre du principe de subsidiarité -, les
principales organisations régionales se dotant d'une capacité d'intervention militaire rapide
en cas de conflit, la coopération avec les Nations Unies assurant la légitimité de ces
opérations.
~ 69 ~

Section 2. L'ONU et le développement économique et social p. 72 – 74

CHAPITRE III. LES DÉFIS DES RELATIONS INTERNATIONALES

L'objet de ce chapitre est de présenter et analyser différents défis qui se posent


aujourd'hui à la communauté internationale.

Nous nous interrogerons sur la prolifération des armes de destruction massive qui
apparaît comme un défi stratégique majeur. Nous évoquerons également le défi du
terrorisme. Nous analyserons l'action de l'Organisation des Nations unies en matière de
maintien de la paix et de développement.

Les grands enjeux planétaires que sont la protection de l'environnement et


l'augmentation de la population seront aussi abordés. Enfin, [a question d'une éventuelle
réforme de la Charte des Nations unies. qui fut conçue en fonction de la Seconde Guerre
mondiale, sera envisagée.

Section 2. Le défi du terrorisme

Le terrorisme constitue, comme le reconnaît la résolution 1368 du Conseil de


sécurité des Nations Unies, adoptée le 12 septembre 2001, « une menace pour la paix et la
sécurité internationales28 ».

L' « hyper-terrorisme » apparu le 11 septembre 2001, qui se caractérise par des


actes des violences à très grande échelle, a conduit à redéfinir les relations internationales.
François Heisbourg, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) en fait «
la nouvelle guerre »29. Pour cet auteur, l'hyper-terrorisme « est au terrorisme ce que la guerre
nucléaire était à la guerre conventionnelle» (entretien au Nouvel Observateur, 1824 mars
2004).

L'action internationale contre le terrorisme s'est manifestée par l'adoption d'un


certain nombre de conventions, Cette action est actuellement largement cordonnée par le
Conseil de sécurité des Nations unies. En préambule de sa résolution 1540 adoptée le 28
avril 2004, ce dernier s'est dit gravement préoccupé par la menace du terrorisme et p.ar le
risque de voir des acteurs non étatiques se procurer des ADM.

Dans une résolution adoptée, le 14 septembre 2005, le Conseil de sécurité a


condamné « avec la plus grande fermeté tous les actes de terrorisme, quels qu'en soient les
motifs, où qu'ils soient commis et quels qu'en soient les auteurs, en tant qu'ils constituent
l'une des plus graves menaces contre la paix et la sécurité », selon une formulation identique
à celle inscrite dans le document final du sommet mondial 2005, un document dans lequel

28

29
~ 70 ~

les États s'engageaient à conclure, au cours de la 60e session de l'Assemblée générale,


une Convention générale relative au terrorisme international.

Dans un document résumant la réflexion stratégique des États-Unis, le Pentagone


a estimé, en 2006, que, tout comme la guerre froide, la guerre antiterroriste va durer
longtemps. Le terme de «guerre longue» a été utilisé pour qualifier l'effort d'éradication du
terrorisme.

§1. Définitions du terrorisme

Le terrorisme, qui est une action politique violente d'individus ou de minorités


organisées contre des biens, des personnes ou des institutions, ·peut poursuivre des
objectifs très différents: renverser un régime politique en place, chercher à obtenir
l'indépendance d'un Etat, lutter contre certains aspects de la politique conduite par un État,
provoquer le durcissement d'un État afin de l'abattre plus facilement dans un deuxième
temps ... L'action terroriste se manifeste selon les cas par des prises d'otages, des attentats,
des détournements d'avions, des enlèvements, etc.

En dehors des actes concrets expressément visés par les différentes conventions
internationales, la Convention sur le financement du terrorisme du 10 janvier- 2000 -définit -
l'acte terroriste comme «tout autre acte destiné à causer la mort ou des dommages corporels
graves à toute personne civile, ou à toute autre personne qui ne participe pas directement
aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, 'par sa nature ou son contexte, cet
acte est destiné à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une
organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque, »

Le rapport annuel sur Je terrorisme dans le monde en 2002, un document du


Département d'État (équivalent américain du Quai d'Orsay) rendu public le 30 avril 2003,
qui reconnaît l'absence d'une définition du terrorisme faisant l'unanimité, retient la définition
suivante:

Le terme « terrorisme» désigne des actes de violence prémédités à motivations


politiques perpétrés contre des non-combattants par des groupes sous-nationaux ou des
agents clandestins, généralement dans le but d'influencer un public, Le terme « terrorisme
international» s'applique au terrorisme concernant des ressortissants ou le territoire de
plusieurs pays, Le terme « groupe terroriste» désigne un groupe qui pratique ou qui
possède des sous-groupes importants qui pratiquent le terrorisme international.

En mars 2005, le Secrétaire général de l'ONU a invité les dirigeants du monde


entier à se rallier à la définition du terrorisme proposée, dans leur rapport rendu public en
décembre 2004, par le Groupe des « 16 personnalités» chargé par Kofi Arman d'examiner
les menaces pesant aujourd'hui Sur la sécurité internationale et les moyens d'y faire face.
Les «16 sages» qualifient de terrorisme «tout acte commis dans l'intention de causer la mort
ou des blessures graves à des civils ou à des non-combattants, qui a pour objet d'intimider
une population ou de Contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à
accomplir un acte ou à s'abstenir de le faire », La notion de « terrorisme d'État» n'est pas
mentionnée.
~ 71 ~

En droit français, le concept de terrorisme a été introduit par la loi du 9 septembre


1986 qui a créé un fonds de solidarité chargé d'indemniser les victimes, quelles que soit leur
nationalité.

Avec les attentats meurtriers du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center
et le Pentagone qualifiés « d'actes de guerre » par le président G.W Bush30, le monde a
basculé dans « l'hyperterrorisme »31 qui, selon les experts, est un danger permanent au XXI°
siècle.

Depuis plusieurs décennies, de nombreux spécialistes redoutaient l'utilisation par


les terroristes d'armes de destruction massive contre des populations civiles32.

Depuis le 11 septembre 2001 dont on a pu écrire qu'il a marqué le véritable début


du XXI° siècle, on sait désormais que « des organisations non étatiques peuvent avoir la
volonté et la capacité de mener des opérations de destruction massive33 ».

Jusqu'à cette date, la capacité de « détruire en masse » était le monopole des


entités étatiques.

L'hyperterrorisme international vient bouleverser les conceptions militaires


traditionnelles. Il contraint les militaires à devoir repenser les systèmes de défense en
fonction de leur capacité à assurer la protection des populations civiles.

Ainsi, l'arme nucléaire, fort utile dans le cadre d'une politique de dissuasion Etat
contre Etat, est inopérante en cas d'opération de destruction de masse réalisée par une
organisation non étatique. La riposte conventionnelle est également inadaptée car par
définition le groupe terroriste ne dispose pas d'une assise territoriale.

« Le principal atout de ces organisations non étatiques est qu'elles n'ont pas de
revendications de territoire ni de pouvoirs »34.

§2. Les conventions antiterroristes

Un grand nombre de conventions destinées à lutter contre le terrorisme a été


adopté depuis le début des années 1960.

1. Les conventions régionales contre le terrorisme


− La convention de l'OEA pour la prévention et la répression des actes de terrorisme
qui prennent la forme de crimes contre des personnes ou d'actes d'extorsion
connexes qui ont une portée internationale, une convention conclue à Washington le
2 février 1971.
− La Convention européenne pour la répression du terrorisme adoptée par le Conseil
de l'Europe le 27 janvier 1977.

30

31

32

33

34
~ 72 ~

− La convention de l'Association Sud Asiatique de coopération régionale sur la


répression du terrorisme, signée à Katmandou le 4 novembre 1987.
− La Convention arabe sur la répression du terrorisme, signée au Caire le 22 avril
1998.
− La convention de l'Organisation de la Conférence Islamique sur la lutte contre le
terrorisme international, adoptée à Ouagadougou le 1er juillet 1999.
− La Convention de l'OUA sur la prévention et la répression du terrorisme adoptée à
Alger le 14 juillet 1999.
− La Convention sur la lutte contre le terrorisme adoptée par les États membres de la
Communauté des États indépendants, une convention conclue à Minsk le 4 juin
1999.

2. Les conventions des Nations unies contre le terrorisme


− La Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bordes
aéronefs signée à Tokyo le 14 septembre 1963.
− La convention de La Haye du 16 décembre 1970 pour la répression de la capture
illicite d'aéronefs.
− La convention de Montréal du 23 septembre 1971 pour la répression d'actes illicites
dirigés contre la sécurité de l'aviation civile.
− La convention de New York sur la prévention et la répression des infractions contre
les personnes jouissant d'une protection internationale, y compris les agents
diplomatiques, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre
1972.
− La Convention contre les prises d'otage adoptée le 17 décembre
− 1979 par l'Assemblée générale de l'ONU.
− La convention de Vienne sur la protection physique des matières nucléaires, adoptée
à Vienne le 26 octobre 1979.
− La Convention sur la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de la
navigation maritime, conclue à Rome le 10 mars 1988. Adoption en 1988 du
Protocole à la Convention du 10 mars 1988 pour la répression d'actes illicites contre
la sécurité des plates-formes fixes situées sur le plateau continental.
− Adoption en 1988 du Protocole à la convention de Montréal (23 septembre 1971)
visant la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à
l'aviation civile internationale.
− La Convention de l'OACl sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux
fins de détection conclue à Montréal le 1er mars 1991.
− La Convention internationale du 15 décembre 1997 pour la répression des attentats
terroristes à l'explosif. Adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en
décembre1997, elle contraint les États parties à sanctionner les individus
responsables de tels attentats ainsi que leurs complices, que ces attentats terroristes
aient été réalisés au· moyen d'explosifs ou d'autres engins meurtriers.
− La Convention internationale de décembre 1999 pour la répression du financement
du terrorisme. Adoptée à l'initiative de la France par l'Assemblée générale de l'ONU
en 1999, elle cherche à sanctionner les activités en amont des actes terroristes
proprement dits, dans le but de priver le terrorisme de toute base financière. Elle
a prévu des mesures préventives et répressives destinées à faire obstacle aux
transactions financières, lesquelles sont de nature à participer au succès d'opérations
terroristes. «Les États parties ne peuvent invoquer le secret bancaire pour refuser de
faire droit à une demande d'entraide judiciaire» (article 12 de la Convention). La
~ 73 ~

convention prévoit également que les États parties doivent envisager d'adopter des
mesures interdisant « l'ouverture de comptes dont le titulaire ou le 'bénéficiaire n'est
pas identifié ni identifiable (comptes à numéro) et des réglementations imposant aux
institutions financières « l'obligation de signaler promptement aux autorités
compétentes toutes les opérations complexes, inhabituelles, importantes [...]». Elle
prévoit aussi un contrôle plus strict de l'identité des personnes morales. Elle incite les
États parties à instituer des mécanismes en vue de l'affectation des sommes
provenant de la confiscation des fonds utilisés ou destinés à être utilisés pour la
commission des infractions à l'indemnisation des victimes d'attentats terroristes ou de
leur famille (article 8 de la Convention). Elle reprend des dispositions tirées des 40
recommandations du CAF! pour lutter contre le blanchiment d'argent qui s'appliquent
aussi à la lutte contre le financement du terrorisme. Le Croupe d'action financière
internationale sur le blanchiment des capitaux (CAF!) a été créé en juillet 1989 au
sommet de l'Arche à Paris. Il a pour objectif d'élaborer et de promouvoir des
stratégies de lutte contre le blanchiment des capitaux. Il établit régulièrement une
liste des Pays et territoires non coopératifs (PTNC) en matière de blanchiment. Les
40 recommandations du CAFI qui ont été conçues pour une application universelle,
constituent le fondement des efforts de lutte contre le blanchiment des capitaux. En
2003, le GAFI a publié une version révisée de ses 40 recommandations destinées à
lutter contre le blanchiment des capitaux et a décidé d'élargir aux professions non
financières (professions juridiques indépendantes, avocats, comptables, directeurs
de casinos) la liste des organismes qui ont l'obligation de déclarer tout mouvement de
fonds suspect.

§3. Renforcement de la stratégie relative à la lutte antiterroriste

Après le II septembre 2001, on a assisté à un renforcement de la lutte contre le


terrorisme.

Dans sa résolution 1373 du 28 septembre 2001, le Conseil de sécurité de l'ONU a


adopté toute une série de mesures destinées à lutter contre le terrorisme international sans
toutefois le définir.

La résolution 1373 du Conseil de sécurité des Nations unies reprend certaines


dispositions essentielles de la Convention internationale sur la répression du financement du
terrorisme et invite du reste tous les États à devenir rapidement parties à cette convention
internationale qui prévoit une surveillance renforcée des transactions douteuses.

Le Conseil appelle les États à prévenir et réprimer le financement du terrorisme. Le


Conseil de sécurité décide que tous les États doivent gelersans attendre les fondset autres
avoirsfinanciers ou ressources économiques des personnes qui commettent, ou tentent de
commettre, des actes de terrorisme [. . .].

Il décide également que les États doivent interdire à leurs nationaux où à toute
personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds, avoirs financiers ou
ressources économiques ou services financiers Du autres services connexes à la
disposition, directement ou indirectement, de personnes qui commettent ou tentent de
commettre des actes de terrorisme […].
~ 74 ~

Un Comité contre le terrorisme (CCT) a été créé en octobre 2001. Il est notamment
chargé de veiller au respect de la résolution 1373 du Conseil de sécurité qui a prévu que les
États membres de l'ONU fassent rapport au CCT sur les mesures qu'ils ont adopté pour
combattre à leur niveau le terrorisme

Dans son rapport de juillet 2003, le président du Comité contre le terrorisme' a


observé que le nombre d'Etats parties aux 12 conventions internationales relatives à la lutte
contre le terrorisme est passé de 12 en septembre 2001 à 37 en 2003. Il a également
signalé que le nombre d'États ayant signé la Convention internationale pour la répression
des attentats terroristes à l'explosif avait augmenté de 70 %.

En juin 2003, le premier sommet euro-américain après la guerre en Irak a permis la


signature d'un accord d'assistance judiciaire mutuelle et d'extradition entre les Etats-Unis et
l'Union européenne.

Cet accord cherche à accélérer les procédures d'extraditions transatlantiques et à


permettre un meilleur échange de renseignements dans le cadre de la lutte contre le
terrorisme.

La création d'un mandat d'arrêt européen a été présentée comme l'un des
instruments les plus efficaces de la coopération des 27 pays membres de l'Union
européenne dans la lutte contre le terrorisme.

Le 13 avril 2005, le Secrétaire général de l'ONU a félicité l'Assemblée générale de


l'adoption de la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme
nucléaire. Elle «renforcera le cadre juridique international de lutte contre le terrorisme » a
déclaré Kofi Annan, lequel a appelé tous les Etats à devenir partie à la Convention.

Section 3. L'ONU et le maintien de la paix


§1. Le système prévu par la Charte des Nations Unies

En vertu du chapitre VII de la Charte des Nations unies (« Action en cas de menace
contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression »), le Conseil de sécurité se voit
conférer une fonction de «police international~ ». Le Conseil de sécurité est compétent non
seulement pour adopter des recommandations, mais également pour prendre des mesures
coercitives. «L'interruption complète ou partielle des relations économiques et des
communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques,
radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations
diplomatiques» sont selon l'article 41 de la Charte, les mesures non militaires pouvant être
décidées par le Conseil de sécurité. Mais, si ce dernier juge que les sanctions économiques
ou politiques définies à l'article 41 de la Charte sont « inadéquates », il a alors la possibilité
d'entreprendre « au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge
nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationale »
conformément à l'article 42 de la Charte.

Dans son article 46, celle-ci charge le Conseil de sécurité d'élaborer les «plans pour
l'emploi de la force armée» avec l'aide du Comité d'état-major. L'utilisation des pouvoirs
dévolus au Conseil doit être rendue possible par la mise à sa disposition de contingents
~ 75 ~

nationaux fournis par tous les membres des Nations unies. Ces derniers peuvent accorder
un droit de passage aux forces terrestres, navales, ariennes constituées de contingents
nationaux.

Notons que les mesures coercinves n'impliquant pas l'envoi de la force armée,
instaurées par le chapitre VII· de la Charte de l'ONU, ont jusqu'à présent fait l'objet d'une
utilisation limitée.

Tout d'abord, plusieurs résolutions ont été votées par le Conseil de sécurité à partir
de décembre 1966 et jusqu'en 1979 en vue d'infliger à la Rhodésie une asphyxie
économique. Mais l'efficacité de ces sanctions est discutable. Ensuite, en 1977, le Conseil
de sécurité a adopté la résolution 418 imposant un embargo sur les livraisons d'armes et
de matériel miliaire à destination cette fois-ci d'un État membre de l'ONU, la République
Sud-Africaine. Ces sanctions n'ont disparu qu'en 1994 avec le démantèlement de
l'apartheid.

D'autre part, le Conseil de sécurité a institué, par la résolution 748 du 31 mars


1992, un embargo sur les fournitures d'armes, l'assistance technique et miliaire et les
relations aériennes en direction de la Libye'. Le 25 septembre 1991, le Conseil de sécurité
a voté la résolution 713 décrétant l'embargo sur les livraisons d'armes à l'ex-Yougoslavie et
le 30 mai 1992 le Conseil a adopté la résolution 757 instituant un triple embargo pétrolier,
commercial et aérien contre le Monténégro et la Serbie.

Un véritable blocus a été décrété en 1990 à l'encontre de l'Irak suite à son invasion
du Koweït. Cet embargo 'imposé par l'ONU devait à la fois sanctionner le régime de
Saddam Hussein et dissuader l'Irak de se lancer à nouveau dans une aventure militaire
contre son voisin du sud. Le 14 avril 1995, l'ONU adoptera la fameuse résolution 986, dite
«pétrole contre nourriture »,autorisant l'Irak à procéder à des ventes limitées de pétrole; les
sommes obtenues par Bagdad devant permettre de satisfaire les besoins essentiels de la
population irakienne en nourriture et médicaments'. En 1996, l'Irak signera avec l'ONU un
mémorandum d'accord définissant les modalités d'application de la résolution 986.

Ce programme humanitaire «pétrole contre nourriture» aux proportions énormes et


sans équivalent dans l'histoire de l'ONU, qui a été institué pour atténuer les effets de
l'embargo, a été suspendu par le Secrétaire général de l'Orzanisation des Nations unies le
17 mars 2003,en raison de la guerre en Irak.Le 28 mars 2003, le Conseil de sécurité a
adopté à l'unanimité la résolution 1472 Qui permet la reprise de ce programme « pétrole
contre nourriture » destiné à garantir la subsistance quotidienne de 60 de la population de
l'Irak par le biais des exportations de pétrole de Bagdad sous le contrôle des Nations unies.

Enfin le Conseil de sécurité de l'ONU a, le 22 mai 2003, levé les sanctions


internationales contre l'Irak en adoptant la résolution 1483. Ce texte, qui met fin à près de
treize ans de sanctions internationales contre Bagdad, a été voté à la quasi-unanimité des
quinze États membres du Conseil".

Le 23 décembre 2006, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1737 qui


impose à l'Iran des sanctions économiques et commerciales.
~ 76 ~

Cette résolution stipule notamment que tous les États doivent « empêcher la
livraison, la vente ou le transfert directs ou indirects à l'Iran de tout matériel, équipement,
bien et technologiequi puisse contribuer» aux activités de l'Iran dans les domaines
nucléaire et balistique sensibles. Le 24 mars 2007. le Conseil de sécurité a renforcé les
sanctions prises contre l'Iran (résolution 1747).

§2. Le système né de la pratique

Nous étudierons successivement la guerre de Corée, la résolution « Union pour le


maintien de la paix» et l'action des «casques bleus» qui ont été prix Nobel de la paix en
1988.

1. La guerre de Corée

L'invasion de la Corée du Sud par l'armée nord-coréenne, le 25 juin 1950, a


provoqué une action militaire de l'ONU; action qui se termina avec l'armistice du 27 juillet
1953 signée à Pan-Mun-Jom. Cette action coercitive conduite sous l'impulsion des États-
Unis n'est pas intervenue en application des dispositions du chapitre 7 de la Charte de
l'ONU. C'est la résolution votée par le Conseil de sécurité le 7 juillet 1950 qui a légitimé,
sous couvert des Nations unies, l'opération militaire des Américains et de leurs alliés.

Dans cette affaire de Corée, c'est par voie de recommandation que le Conseil de
sécurité est intervenu. Le système prévu par la Charte a été complètement occulté.
L'adoption de la résolution de 1950 a été possible grâce à l'absence de l'URSS, qui
pratiquait alors la politique de la « chaise vide» pour contester la non-représentation de la
Chine populaire à l'ONU. Ainsi, l'URSS n'était pas en mesure d'opposer son veto à cette
intervention armée de l'ONU dont la légalité fut contestée.

2. La résolution « Union pour le maintien de la paix»

Lorsque l'URSS retourna participer aux réunions du Conseil de sécurité, à partir du


1 er août 1962, elle opposa systématiquement SOD veto aux décisions intéressant le conflit
coréen. C'est la résolution 377 du 3 novembre 1950 qui allait permettre de débloquer cette
situation.

Cette résolution, également connue sous le titre de « Résolution Acheson », du nom


du secrétaire d'État américain (Dean Acheson) qui la fit voter par l'Assemblée générale des
Nations unies, permet à celle-ci d'être saisie des questions relatives au maintien de la paix
lorsque le Conseil de sécurité, paralysé par l'usage du droit de veto, s'avère incapable de
remplir sa « responsabilité principale ».

Dans l'hypothèse d'une paralysie du Conseil de sécurité imputable à l'exercice du


droit de veto, la résolution Acheson stipule que « l'Assemblée générale examinera
immédiatement la question afin de faire aux membres les recommandations appropriées sur
les mesures collectives à prendre, y compris, s'il s'agit d'une rupture de la paix ou d'un acte
d'agression,
l'emploi de la (force armée, en cas de besoin, pour rétablir la paix ou la sécurité
internationales ».
~ 77 ~

Cette résolution 377, dont la constitutionnalité par rapport à la Charte a été vivement
critiquée, permet à l'Assemblée de se substituer au Conseil de sécurité sur la demande de
la majorité de ses membres ou sur celle de 9 membres du Conseil. Mais, à l'inverse du
Conseil, l'Assemblée ne disposera que de son pouvoir de recommandation et ne pourra,' là
non plus, prendre des mesures coercitives.
Utilisations de la résolution 377
Affaire de Corée 1950
Affaires de Hongrie et de Suez 1956
Affaires du Liban 1958
Affaire du Congo 1960
Conflit Inde-Pakistan 1971
Affaires de la Namibie 1981
Affaire du plateau du Golan 1982

3. Les casques bleus

L'ONU a créé « les opérations de maintien de la paix» qui sont confiées à des
contingents militaires internationaux appelés « casques bleus ».

Placés sous l'autorité du Secrétaire général de l'ONU, les «casques bleus» ont pour
objectif d'intervenir sur les lieux des conflits armés afin de s'interposer entre les belligérants.
En vue de désamorcer les conflits, les forces d'urgence des Nations unies vont établir une «
zone tampon» ou encore un « cordon sanitaire» entre les parties. L'intervention des
casques bleus, dont la constitution dépend des États membres de l'ONU, extérieurs au
conflit est décidée soit à l'initiative du Conseil de sécurité, soit à l'initiative de l'Assemblée
générale.

Dans son avis consultatif de 1962 (« certaines dépenses des Nations unies »), la
Cour internationale de justice a reconnu de façon implicite, que l'Assemblée générale était
compétente pour mettre en œuvre des opérations de maintien de la paix. Celles-ci sont des
opérations pacifiques et non coercitives et doivent nécessairement reposer sur le
consentement permanent des Etats concernés dans la mesure où elles émanent d'une
simple recommandation, Ces opérations de police onusienne, nées de la défaillance du
pouvoir de coercition du Conseil de sécurité, sont temporaires35.

§3. Le rôle positif des Nations unies lors de la guerre du Golfe

La guerre du Golfe arabo-persique de 1990-1991 a été l'occasion de l'application


presque complète du chapitre 7 de la Charte des Nations. La fin .de l'antagonisme Est-
Ouest, qui avait pendant 40 années paralyse le fonctionnement normal du Conseil de
sécurité des Nations unies allait permettre à ce dernier de réagir de façon remarquable à la
crise consécutive à l'annexion du Koweït par l'Irak, en mettant en œuvre les dispositions du
chapitre 7 de la Charte de San Francisco.

Ainsi, le Conseil de sécurité a été en mesure de voter une douzaine de résolutions

35
Les forces d'urgence des Nations unies ne peuvent recourir à la force armée qu'en cas de légitime défense. Ces opérations
de maintien de la paix peuvent aussi consister en des missions d'observation confiées à un groupe d'observateurs militaires ou
civils. D'une manière générale, ces actions de maintien de la paix visent à affirmer la présence symbolique de l'ONU sur le
leu d'un conflit.
~ 78 ~

dont certaines furent adoptées à l'unanimité. Mais la majorité de ces résolutions a été prise
avec le vote négatif ou l'abstention de Cuba et du Yémen. Le 2 août 1990, le Conseil de
sécurité a obtenu l'accord des cinq grandes puissances (Etats-Unis, URSS, Chine, France
et Royaume-Uni) afin d'adopter la résolution 660 qui condamne l'agression de l'Irak contre
le Koweït, en se fondant sur les articles 39 et 40 de la Charte.

Par la résolution 678 du 29 novembre 1990, le Conseil de sécurité a autorisé le


recours à la guerre après le 15 janvier 1991 (« Autorisant les États membres qui coopèrent
avec le Koweït... d'user de tous les moyens nécessaires pour faire respecter [les
résolutions] si, au 15 janvier 1991, l'Irak n'a pas appliqué les résolutions»).

Force est de reconnaître que la réaction de l'ONU à la violation flagrante par l'Irak
de sa Charte constitutive a constitué, incontestablement, un moment historique dans
l'histoire de l'organisation mondiale et plus largement dans celle de la société internationale.
Cependant, tous les mécanismes prévus par le chapitre 7 de la Charte n'ont pas été utilisés.
Si les puissances alliées ont été habilitées par le Conseil à utiliser la force contre l'Irak, les
opérations militaires n'ont pas été conduites par le Comité d'état-major de l'article 47 de la
Charte; comité formé des chefs d'état-major des membres permanents du Conseil de
sécurité qui est, aux termes de la Charte, le «responsable de la direction stratégique de
toute force armée mise à la disposition du Conseil ». Ce comité, conçu pour coordonner les
actions armées internationales, n'a jamais fonctionné en raison notamment de la guerre
froide.

De plus, le drapeau de l'ONU n'a pas été attribué à la force multinationale qui fut
constituée. C'est la raison pour laquelle certains ont pu voir dans la guerre du Golfe une
intervention militaire des alliés conduite par les Etats-Unis au titre de la légitime défense
collective de l'article 51 de la Charte.

Le Secrétaire général de l'ONU de l'époque, Javier Perez de Cuellar, a estimé pour


sa part que la guerre du Golfe n'était pas « la guerre des nations unies» même si elle était «
légale dans le sens où elle a été autorisée par le Conseil de sécurité» (Le Monde, 9 février
1991). Cela étant admis, cette première véritable action de police internationale, sans
commune mesure avec l'opération coréenne, a contribué largement à restaurer l'autorité et
le prestige de l'organisation universelle, au point de donner à penser que celle-ci allait être
l'un des principaux agents d'un «nouvel ordre international. »

§4. L'incapacité de l'ONU face aux conflits intra étatiques

Au lendemain de la guerre du Golfe, les Nations unies ont été confrontées à une
sérieuse crise de crédibilité en raison de leur incapacité à régler des conflits comme ceux du
Rwanda ou de l'ex Yougoslavie.

L'ONU s'est révélée impuissante à assurer sa mission essentielle de sauvegarde de


la paix dans la mesure où les dangers qui menacent celle-ci ont considérablement changé
de nature : ce sont des conflits intraétatiques et non plus interétatiques qui sont venus
ensanglanter notre planète.

En effet, il faut noter que la grande majorité des conflits recensés par les Nations
~ 79 ~

unies sont intervenus à l'intérieur des frontières d'un seul Etat. Depuis le début des années
1990, la paix est beaucoup moins menacée par une guerre mondiale de type traditionnel
que par la multiplication des conflits interethniques, c'est-à-dire des guerres civiles que ce
soit par exemple dans les Balkans ou dans les républiques nées de l'ancienne URSS. Or,
l'ONU, dont la charte est fondée sur le principe du respect de la souveraineté des Etats
membres, n'a pas vocation à intervenir dans les affaires intérieures des Etats.

Comme l'a écrit son ancien Secrétaire général, Boutros Boutros Ghali, l'ONU doit
aujourd'hui faire face à des sécessions, à des partitions, à des affrontements ethniques, à
des rivalités tribales. Nous avons affaire non plus à des armées régulières mais, dans la
plupart des cas, à des milices, à des bandes armées, ou même à de simples individus en
armes. Dans ces nouveaux conflits, ce sont les civils qui sont les premières victimes et
parfois même la première cible des affrontements36.

Les déboires de l'ONU en Yougoslavie ou encore en Somalie ont bien montré que
l'Organisation était peu faite pour s'interposer dans des guerres essentiellement civiles. Le
Rwanda a illustré l'incapacité de l'Organisation à empêcher un véritable génocide. C'est la
raison pour laquelle certains ont suggéré de modifier la Charte des Nations unies afin d'y
introduire une sorte de droit d'ingérence humanitaire. Ainsi, une situation de génocide ou
d'atteinte aux droits des minorités pourrait légitimement justifier une ingérence humanitaire.
Il faut noter en ce sens que la Commission Carlsson a, en 1995, proposé que la charte
élaborée en 1945 soit modifiée pour autoriser le Conseil de sécurité à intervenir dans des
crises intergouvernementales en cas de « violation massive de la sécurité des gens ».

D'autres vont jusqu'à affirmer que l'ONU devrait abandonner son ambition initiale
d'imposer la paix à travers le monde pour se consacrer désormais exclusivement à des
opérations d'assistance humanitaire.

D'autre part, force est de constater, comme l'a lui-même reconnu Boutros Boutros
Ghali, que l'Organisation n'a plus les moyens à sa disposition pour entreprendre les
opérations de rétablissement de la paix prévues au chapitre 7 de sa Charte. C'est ce qui
explique que l'O’U ait été amenée à accepter la sous-traitance d'opérations importantes de
maintien de la paix par de grandes puissances régionales et leurs armées nationales : Les
Etats Unis sont intervenus en Haïti, la France au Rwanda ou encore la Russie en
Géorgie et cela avec la bénédiction de l'Organisation.

En Bosnie, les Nations unies ont sous-traité à l'OTAN. Boutros Boutros Ghali n'était
pas favorable à une politique de « sous−traitance » des opérations de maintien de la paix à
certains pays car, selon lui, « cela affaiblit l'image des Nations unies ». Mais le Secrétaire
général de l'Organisation faisait remarquer qu'il avait « une responsabilité morale » : « Si je
n'arrive pas à obtenir une intervention collective de la part des nations unies, je suis obligé
de penser à la sous−traitance »37.

Par ailleurs, si on veut que l'ONU joue le rôle de « gendarme » du monde de


l'après−guerre froide, il faut, comme cela a été proposé à plusieurs reprises, la doter de
moyens militaires spécifiques et permanents. Par le passé, l'idée de mettre en place un
36

37
~ 80 ~

corps de « légionnaires volontaires » au service des Nations unies avait pu être


préconisée.

Boutros Boutros Ghali, qui a jugé « peu réaliste »l'idée de doter l'Organisation
mondiale d'une armée internationale permanente, a affirmé qui'il s'était efforcé de
« convaincre les Etats de créer des stand by forces (forces en attente) spécialement
entraînées pour le maintien de la paix et disponibles dans un délai très fref »

Enfin, on doit souligner que les dépenses de l'ONU occasionnées par les opérations
de maintien de la paix qui se sont multipliées depuis la chute du mur de Berlin et la fin de la
guerre froide ont spectaculairement augmenté et cela alors que l'Organisation internationale
a connu une grave crise financière.

Au 31 octobre 2006, le budget du maintien de la paix était de 4,75 milliards de


dollars. En octobre 2006, les effectifs du Département des opérations de maintien de la paix
de l'ONU ont atteint un niveau record avec 80976 militaires et policiers ainsi que 15 000
civils déployés à travers le monde dans 18 missions.

§5. Le rapport Brahimi

Le 23 août 2000, un groupe d'experts, présidé par l'ancien ministre algérien des
Affaires étrangères Lakhdar Brahimi, a rendu un rapport sur les opérations de paix des
Nations unies.

Ce rapport est extrêmement critique sur les opérations de paix des nations unies. Il
recommande une série de réformes importantes pour un coût de 100 millions de dollars. Les
Etats Unis ont rendu hommage à ce rapport qui propose des réformes destinées à renforcer
les moyens et les missions de paix des « casques bleus ». Le rapport met l'accent sur la
nécessité de mandats « robustes » pour permettre aux soldats de la paix de se défendre et
de défendre leur mandat : « les règles d'engagement devraient non seulement permettre
aux soldats de riposter au coup par coup mais les autoriser à lancer des contrattaques
vigoureuses pour faire taire les tirs meurtriers contre des personnes qu'ils sont chargés de
protéger ». Le rapport préconise le maintien à la disposition des Nations unies de « forces
cohérentes et multinationales de la taille d'une brigade », mobilisables dans un délai de 30
jours.

Le Secrétaire général de l'ONU, Koffi Annan, qui a engagé la réforme du


Département des Opérations de maintien de la paix, a obtenu que les casques bleus soient
désormais armés de « mandats robustes » là où ils interviennent conformément aux
recommandations figurant dans le rapport Brahimi.

Le 29 mai 2007, à l'occasion de la journée internationale des casques bleus, le


secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix de l'ONU a réaffirmé les
exigences de probité et de neutralité qui incombent aux 100 000 soldats de la paix déployés
à travers le monde.

Section 4. L'ONU et le développement économique et social

L'Organisation universelle a notamment pour but de contribuer au développement


~ 81 ~

économique et social. En effet, dans son préambule, la Charte des Nations unies assigne à
l'Organisation aussi bien de maintenir la paix et la sécurité internationale que de « favoriser
le progrès économique et social de tous les peuples ». Boutros Boutros-Ghali a eu raison de
rappeler que « 70 % de l'activité des Nations unies sont consacrés aux questions de
développement 1 » : ce que l'opinion publique a tendance à ignorer.

De plus, le progrès social inscrit dans la Charte de 1945 n'est pas uniquement un
principe généreux. C'est un principe générateur de paix. Effectivement, il existe une
évidente complémentarité entre le maintien de la paix et la promotion du développement.
Les facteurs économiques et sociaux pèsent d'un poids important dans la plupart des
conflits actuels. De surcroît, les situations de guerre aggravent considérablement le sous-
développement des États: Il ne peut donc y avoir de paix efficace sans développement,' ni
de développement durable sans la paix

L'ONU a notamment pour mandat «le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi
et des conditions de progrès et de développement dans l'ordre économique et social»
(article 55 de la Charte des Nations unies).

§1. Les grandes conférences des Nations Unies consacrées au développement


 1961 : La conférence « Décennie pour le développement»

Cette première conférence des Nations unies consacrée au développement a


marqué l'engagement de la communauté internationale en faveur du développement des
pays du Sud et de la coopération internationale.

 1974 : La sixième session extraordinaire de l'Assemblée générale de l'ONU

En mai 1974, la sixième session extraordinaire des Nations unies demande


l'établissement d'« un nouvel ordre économique international» et reconnaît la nécessité
d'une aide en faveur des pays pauvres les plus durement affectés par la crise.

Ce « nouvel ordre économique» vise à corriger les inégalités entre les pays en voie
de développement et les pays développés.

Les résolutions 3201 et 3202 de l'Assemblée générale de l'ONU du 1er mai 1974
portant déclaration et programme d'action concernant l'établissement d'un Nouvel ordre
économique international (NOE!) ont défini ce NOEI comme devant être «fondé sur l'équité,
l'égalité souveraine, l'interdépendance, l'intérêt et la coopération entre tous les États,
indépendamment de leur système économique et social, (un NOEI) qui corrigera les
inégalités et rectifiera les injustices actuelles, permettra d'éliminer le fossé croissant avec les
pays développés. »

Les revendications des États du' Tiers-Monde seront complétées par la « Charte
des droits et des devoirs économiques des États» (résolution 3281 de l'Assemblée générale
des Nations unies, 12 décembre 1974).

Cette Charte reconnaît la souveraineté entière et permanente des États sur


toutes leurs richesses et ressources naturelles.
~ 82 ~

 1981 : le sommet Nord-Sud de Cancun (Mexique) et la conférence des Nations


unies sur les PMA

Lors du sommet de Cancun, qui a marqué l'histoire du dialogue Nord-Sud, Une plus
juste répartition des richesses a été réclamée par les pays du Sud. Mais ce sommet, qui
rassembla en octobre 1981 vingt-deux chefs d'État et de gouvernement, n'a eu aucune
suite.

C'est aussi en 1981 que les Nations unies ont lancé leur première conférence sur
les PMA (pays les moins avancés) 1 en se donnant rendez-vous tous les dix ans. La
deuxième conférence des Nations unies sur les PMA qui a eu lieu comme la première à
Paris, en 1990, a constaté que la situation des PMA s'était dégradée.

En vingt ans, le nombre des « pays les moins avancés» est passé de 31 à 49 États.
Ces pays, qui se situent notamment en Afrique subsaharienne (Rwanda, Éthiopie ...)et en
Asie (Bangladesh,' Afghanistan ...), ne disposent que de 1 % de la richesse mondiale. Ils
cumulent en fait tous les handicaps (explosion démographique, extrême pauvreté,
agriculture archaïque ...). La catégorie des « PMA2 » a été introduite à l'initiative du
Groupe des 77, lequel a été créé en 1963 et a pour ambition de défendre la conception que
peut avoir le Tiers-Monde des relations économiques à l'échelle mondiale. Dans son rapport
2006 sur les PMA, la CNUCED, qui doute de l'amélioration de la situation des pays les plus
pauvres, préconise le développement des capacités de production des PMA afin d'accroître
leur autonomie et de lutter de manière efficace contre la pauvreté.

 1995: Le sommet de Copenhague

Du 6 au 2 mars 1995, le premier sommet mondial pour le développement social,


organisé sous l'égide des Nations unies, s'est tenu à Copenhague. Ce sommet de
Copenhague, où se sont retrouvés les représentants de 184 nations, s'est inscrit dans la
perspective des conférences organisées par l'ONU sur les grands problèmes affectant le
développement économique: le sommet de Rio de 1992 où fut élaboré un plan de protection
de l'environnement, celui de Vienne en 1993 sur les droits de l'homme ou encore le sommet
du Caire en 1994 sur la population.

Les 184 États participant au Sommet mondial de Copenhague se sont engagés,


dans la Déclaration finale de la Conférence, à tenter d'atteindre dix objectifs: créer un
environnement favorable au développement social; « travailler à l'élimination de la
pauvreté» ; favoriser le plein emploi et le .respect des conventions de l'organisation
internationale du travail; « promouvoir l'intégration sociale en édifiant des sociétés stables,
sûres et justes»; «instaurer l'égalité et l'équité entre hommes et femmes»; « accélérer le
développement économique et social de l'Afrique et des pays les moins avancés» ; inclure
des objectifs de développement social dans les programmes d'ajustement structurel;
«accroître sensiblement les ressources consacrées au développement social », sur le plan
national et international; assurer la promotion de l'éducation ; renforcer la coopération
internationale pour le développement à travers l'ONU et les organismes internationaux.

Les 117 chefs d'État et de gouvernement présents à ce sommet, qui a marqué la


première manifestation de la communauté internationale devant les inégalités engendrées
~ 83 ~

par la mondialisation, ont pris l'engagement de traiter le développement social comme une
priorité essentielle des politiques nationales et internationales.

Ils ont promis « de placer l'homme au centre du développement et de faire en sorte


que l'économie réponde plus efficacement aux besoins humains ».

 2000 : le sommet de Genève

Cinq ans après le sommet social de Copenhague, l'Assemblée générale des


Nations unies s'est réunie à Genève du 26 au 30 juin 2000 pour dresser le bilan des
éventuels progrès accomplis et explorer denouvelle initiatives permettant le développement
social. Mais à cette occasion, les représentants des 160 États présents à Genève n'ont pu
qu'exprimer leur déception et ont réaffirmé les engagements pris à Copenhague.

Le sommet de Genève, qui a été précédé de manifestations des mouvements


antimondialisation critiquant l'échec des stratégies de développement, s'est terminé sans
aucun engagement concret des Nations unies.

 2000 : le sommet du Millénaire

Le sommet du Millénaire, qui a réuni du 6 au 8 septembre 2000 à New York 147


chefs d'État et de gouvernement, a adopté un projet visant en particulier à diminuer de
moitié la pauvreté d'ici à 2015 dans les pays en développement.

§2. Les objectifs de la déclaration du Millénaire adoptée par les Nations unies en septembre 2000

L'ambitieuse déclaration du Millénaire adoptée à l'issue du sommet de New York


aborde différents thèmes comme la protection de l'environnement, les droits de l'homme ou
encore la sécurité et le désarmement.

Dans son chapitre relatif au développement et à l'élimination de la pauvreté.)a


déclaration du Millénaire fixe quatre objectifs que la communauté internationale devra
s'efforcer d'atteindre d'ici à 2015 :

Réduire de moitié la proportion de la population mondiale dont le revenu est


inférieur à un dollar par jour et celles des personnes qui souffrent de la faim; diminuer
également de moitié la proportion des personnes n’ayant pas accès, à l'eau potable ou
n'ayant pas les moyens de s'en procurer.

Donner à tous les enfants, garçons et filles, les moyens d'achever un cycle complet
d'études primaires.

Réduire de trois quarts le taux de mortalité maternelle et réduire de deux tiers le


taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans. Stopper la propagation du Sida, du
paludisme comme des autres grandes maladies.

Toujours selon la déclaration du Millénaire, la communauté internationale s'engage,


d'ici 2020, à améliorer sensiblement la vie d'au moins cent millions d'habitants de taudis,
conformément à l'initiative «Villes sans taudis ni bidonvilles ».
~ 84 ~

Le rapport mondial sur le développement humain 2003, rendu public le 8 juillet


2003, a mis en évidence le chemin restant à parcourir pour diviser par deux la pauvreté d'ici
à 2015.

". Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) estime' que les
pays les plus pauvres ne seront pas en mesure d'atteindre les objectifs fixés par la
déclaration du Millénaire si les pays riches n'organisent pas un partenariat mondial pour le
développement.

« Le succès ou l'échec dépendra de la capacité à réaliser - ou non - le huitième


objectif (de la Déclaration du Millénaire) : l'engagement d'aider les pays pauvres qui se
lancent de bonne foi dans des réformes économiques, politiques et sociales»

Le 11 juin 2005, les ministres des Finances des pays riches du G8 ont décidé
l'effacement de 40 milliards de dollars de la dette multilatérale de 18 pays pauvres.

Dans le document final du sommet mondial 2005, les États membres ont réaffirmé
les «Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) », Dans un article paru en juin
2007, Ban Ki-Moon a évoqué le nouveau consensus concernant la réalisation des OMD («
Comment l'ONU aretrouvé le pouvoir de convaincre », Le Figaro, l" juin 2007).

Section 5. La croissance démographique

L'augmentation de la population mondiale est traditionnellement considérée comme


l'un des grands défis planétaires.

L'augmentation de la population se fait essentiellement dans les pays du Sud qui


regroupent aujourd'hui 80 % de la population mondiale. En revanche, la population des pays
du Nord (dits pays industrialisés), qui représente actuellement 20 % de l'humanité, ne
progresse plus que lentement et devrait continuer à diminuer au XXIe siècle.

Dans les pays du Sud, la croissance démographique est de nature à créer des
difficultés pour satisfaire notamment les besoins alimentaires. C'est la raison pour laquelle la
maîtrise démographique est souvent présentée comme un facteur conditionnant le
développement.

L'Organisation mondiale a mis en place en 1969 le Fonds des Nations unies pour la
population (FNUAP) qui est chargé d'aider les pays en développement à trouver des
solutions à leurs problèmes démographiques et a organisé plusieurs conférences sur la
population qui ont mis en évidence les relations existantes entre la démographie et les
questions sociales

§1. Une population mondiale très inégalement répartie

Dans les pays de l'hémisphère Nord, on constate un tassement général de la


croissance démographique. Une baisse préoccupante de la population est même observée
dans certains pays comme la Russie. Par contre, dans les pays de l'hémisphère Sud, la
fécondité reste forte et la croissance démographique se poursuit.
~ 85 ~

La population mondiale, qui a plus que doublé depuis 1950, a dépassé en octobre
1999 les six milliards d'habitants.

Les progrès de la médecine et de l'hygiène sont notamment à l'origine de cette


explosion démographique.

D'après les prévisions du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), qui
est chargé d'assister les pays du Tiers-Monde, la démographie de la planète sera
caractérisée au XXI° siècle par un ralentissement et un vieillissement prononcés.

Selon les prévisions de l'ONU, les États industrialisés compteront 15,4 % de la


population mondiale et les pays en développement 84,6 %.

L'humanité devrait atteindre les neuf milliards d'êtres humains en 2050. Les États de
l'Afrique subsaharienne seront les seuls à voir leur population doubler entre 2000 et 2050,
passant de 600 millions à 1,2 milliard d'habitants.

« Les trois milliards d'êtres humains supplémentaires prévus d'ici à 2050 iront, pour
une part, grossir la population des pays pauvres et fortement peuplés. Et d'abord leurs
villes, car la population du XXI" siècle sera, pour la première fois, majoritairement urbaine ».

Un rapport de l'ONU publié le 24 mars 2004 a effectivement révélé que, pour la


première fois dans l'histoire de l'humanité, plus de la moitié de la population mondiale vivra
dans les villes. D'après l'ONU, en 2015, sept des dix plus grandes villes du monde seront
asiatiques. Tokyo restera en 2015 la première mégapole du monde (36 millions d'habitants).

La population de l’Inde devrait, en 2050, dépasser la population de la Chine. A cette


date, l’Inde devrait compter 1 628 milliard habitants contre 1,437 milliard pour la Chine.

§2. Les conférences mondiales sur la population organisées par l’ONU

Les trois grandes conférences internationales consacrées aux problèmes de


population ont vu s'opposer «les partisans du contrôle des naissances (représentés par les
experts des pays du Nord) aux défenseurs du Tiers-Monde qui rejettent sur le "pillage" de
leurs pays par la colonisation et le "néocolonialisme" la responsabilité de leur pauvreté ».

La conférence de Bucarest de 1974 est à l'origine d'un plan mondial d'action destiné
à permettre une adéquation entre la croissance démographique et le développement
économique. Lors de cette première conférence des Nations unies sur la population, les
pays du Nord ont milité en faveur d'une démographie contrôlée. La conférence de Mexicode
1984 a vu les pays du Tiers-Monde admettre l'idée d'une régulation démographique.

Les conclusions de la conférence du Caire de 1994 organisée à l'initiative du


FNUAP ont mis en évidence la volonté d'un nombre important de pays de restreindre la
croissance démographique mondiale. Lors de cette conférence des Nations unies, plusieurs
États, dont le Vatican et neuf pays latino-américains se sont déclarés hostiles à la
contraception et à l'avortement comme moyens de freiner le nombre des naissances.

La conférence du Caire, qui a réuni 182 des 191 États invités par l'ONU, a réaffirmé
~ 86 ~

«la prérogative des nations d'agir individuellement dans le cadre de leur législation et de leur
culture ».

En 1994, 179 pays ont adopté un ambitieux programme d'action échelonné sur 20
ans qui a fixé des objectifs tels quel affranchissement de la femme Ou la réduction de la
pauvreté. Mais en septembre 2004, le FNUAP a constaté que l’insuffisance des fonds
provenant des pays donateurs vient menacer les efforts menés pour notamment réduire la
mortalité maternelle et prévenir le virus du sida.

Section 7. La reforme du système des Nations-Unies

Le système des Nations unies a été instauré dans un monde qui n'a guère de
rapports avec celui dans lequel nous vivons. Il n'a guère évolue depuis 1945.

Comme on l'a souligné, les structures des Nations unies ne sont pas adaptées aux
problèmes posés par la mondialisation ; elles doivent être profondément transformées, afin
de permettre à la communauté internationale d’affronter effectivement les défis de la
mondialisation'.

En septembre 2003, le Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a


considéré que le système de sécurité collective institue en 1945 était inadapté aux «
nouvelles menaces» du XXIe siècle et a invité, les Etats a réfléchir à une réforme de l'ONU.
Le 21 mars 2005, Il a présente un rapport ambitieux pour réformer l'Organisation.

La réforme du Conseil de sécurité et la création d'un Conseil de sécurité


économique figurent, entre autres, parmi les nombreuses propositions de réforme
existantes.

Les décisions du Conseil de sécurité sont perçues comme celles d'un nombre trop
limité d'États puisque finalement 15 pays sont censés représenter les 192 Etats membres
de l'organisation mondiale. C'est la raison pour laquelle le principal changement proposé est
l'élargissement du Conseil de sécurité.

L'autre changement régulièrement mis en avant est la création d'un Conseil de


sécurité économique qui remplacerait le Conseil économique et social de l'ONU ainsi que le
G8.

Les spécialistes soulignent à ce sujet que le Conseil économique et social des


Nations unies est devenu une «mini-assemblée générale» avec ses 54 membres et
remarquent que le G8 est aujourd'hui «en perte de vitesse? »,

Cela étant précisé, réformer l'Organisation des Nations unies n'est pas une tâche
aisée.

En effet, toute réforme exige notamment l'approbation d'une majorité qualifiée des
deux tiers des membres de l'Assemblée générale de l'ONU.
~ 87 ~

§1. La réforme du Conseil de sécurité

Depuis de très nombreuses années, la réforme du Conseil de sécurité est présentée


comme une nécessité.

Pour Kofi Annan, l'actuel Conseil ne reflète plus « les réalités géopolitiques du XXle
siècle ».

À l'automne 1992, à l'occasion de la 47ème session de l'Assemblée générale de


l'ONU, le Japon et l'Allemagne ont fait connaître leur souhait de devenir membres
permanents du Conseil de sécurité.

Les États-Unis se sont déclarés favorables à ce que ces deux États; qui sont
aujourd'hui les principaux contributeurs au budget des Nations unies, puisent obtenu: un
siège de membre permanent au Conseil.

L'ancien Secrétaire général de l'ONU, Boutros Boutros-Ghali, a reconnu le


bienfondé de cette démarche. L'admission au Conseil de l'Allemagne et du Japon, qui sont
devenus deux grandes puissances économiques, pourrait contribuer à accroître la légitimité
mais aussi l'efficacité du Conseil de sécurité.

Ces nouveaux membres permanents seraient appelés naturellement à jouer un rôle


actif dans le domaine du maintien et du rétablissement de la paix et de la sécurité, même si,
comme l'a rappelé le Secrétaire général de l'ONU en septembre 1994, la participation
militaire n'est pas, selon la Charte des Nations unies, une condition nécessaire pour accéder
au Conseil de sécurité.

Notons, à ce propos, que la Chine, qui est membre permanent du Conseil de


sécurité, n'a jamais jusqu'à présent participé aux opérations de maintien de la paix.

Cela étant admis, force est de reconnaître que l'entrée au Conseil de sécurité des
deux États (ex-)ennemis selon la Charte, permettrait d'adapter le Conseil aux nouvelles
réalités de la société internationale. Dans sa forme actuelle, ce dernier demeure pour tous
les États membres de l'organisation universelle un anachronisme. Le 10 décembre 1993, un
groupe de travail chargé d'examiner cette question de l'élargissement du Conseil de sécurité
a été constituée par l'Assemblée générale. Celui-ci a notamment suggéré d'instaurer des
membres dits « semi-permanents » qui seraient amenés à se succéder à la fin de leur
mandat de deux ans. Ainsi, des puissances d'audience régionale comme l'Inde, le Nigeria,
le Brésil ou encore l'Égypte, pourraient venir compenser l'entrée de l'Allemagne et du Japon
dans le « fameux club» des permanents. Mais l'idée de créer des membres dits « semi-
pennanents » a été critiquée.

D'autre part, il faut signaler que la Commission Carlsson a rendu public, en janvier
1995, son rapport sur la réforme des institutions mondiales et des Nations unies. Cette
commission internationale, crée à l’initiative de Willy Brandt, et coprésidée par le suédois
Ingvar Carlsson et le juriste Shridath Rarnphal, a proposé une réforme du Conseil de
sécurité en deux étapes (Our Global Neighbourhood ; Oxford University Press).
~ 88 ~

La première phase de la réforme consisterait à créer cinq nouveaux membres


permanents et à augmenter de dix à quinze le nombre des membres non permanents.
Toujours lors de cette première étape de la réforme, les cinq membres permanents actuels
du Conseil de sécurité s'engageraient à ne recourir à leur droit de veto qu'en cas de «
circonstances dérogatoires el exceptionnelles ».

Ensuite, lors de la seconde étape de la réforme, l'utilisation du veto serait prohibée


et il faudrait procéder à la modification de la composition du Conseil de sécurité.

Par ailleurs, dans leur rapport très attendu sur la réforme de l'Organisation
mondiale, le groupe des « 16 sages" nommé en 2003 par Kofi Annan propose que le
Conseil de sécurité passe de 15 à 24 membres, avec deux modèles possibles pour la
répartition des sièges.

Dans la première formule suggérée par ce groupe de 16 personnalités présidé par


l'ancien Premier ministre thaïlandais Anand Panyarachun et comprenant l'ancien ministre
français de la Justice Robert Badinter, il est prévu l'arrivée de 6 nouveaux membres
permanents qui ne seraient pas dotés du droit de veto et de 3 non permanents.

La deuxième formule propose l'ajout de 8 membres semi-permanents, élus pour


quatre ans renouvelables, et d'un membre non permanent. Selon le rapport du groupe de
réflexion, qui a été remis en décembre 2004 à Kofi Arman, la sélection des États candidats
devrait se faire en prenant en compte 3 critères: la contribution au budget de l'Organisation
universelle la contribution à la paix et à la sécurité internationale; la mise à la disposition de
l'Organisation de troupes pour les missions de maintien et de rétablissement de la paix

Enfin, pour terminer sut cette question' controversée de la réforme du Conseil de


sécurité, il faut signaler que le Japon, l'Allemagne, l'Inde et le Brésil ont déclaré, dans un
communiqué commun publié en septembre 2004, que «se fondant sur la conviction
partagée qu'ils constituent des candidats légitimes à un siège permanent au sein d'un
Conseil élargi, ils soutiennent leurs candidatures mutuelles », Les quatre pays, qui mettent
en avant leur puissance économique et démographique, leur poids régional et leur influence
mondiale, ont également ajouté qu'à leur avis, «l'Afrique devrait aussi être représentée
parmi les membres permanents» du Conseil. Le communiqué affirme que le Conseil «doit
refléter les réalités de la communauté internationale du XXIe siècle. Il doit être représentatif,
légitime et efficace »,

Mais le projet des «quatre» a suscité des oppositions. Certains pays redoutent une
modification des grands équilibres actuels. Ainsi, par exemple, l'Italie s'est déclarée
publiquement contre la candidature de l'Allemagne. La candidature de l'Inde, quant à elle,
inquiète son voisin, le Pakistan et celle de Tokyo n'est pas du goût de Pékin.

§2. La création d'un Conseil de sécurité économique

La Commission sur le Gouvernement global constituée sous l'égide du Secrétaire


général des Nations unies pour réfléchir à la forme que pourrait prendre une sorte de «
nouvel ordre politico-économique mondial ». a suggéré, dans un pré−rapport rendu public
au 25e Forum économique mondial de Davos, en janvier 1995, la création d'un «Conseil de
~ 89 ~

sécurité économique. » Ce dernier serait susceptible de se substituer à l'actuel G8, le


fameux groupe des huit principaux pays industrialisés. Ce Conseil de sécurité économique
aurait un rôle délibératif dans les secteurs de l'économie de la vie sociale et de
l'environnement. Le Conseil économique et social de l'ONU « qui ne se justifie plus» serait
alors supprimé.

L'idée de créer un Conseil de sécurité économique a été développée par de


nombreuses personnalités dont l'ancien président de la Commission européenne, Jacques
Delors.

Les spécialistes insistent sur le fait qu'un tel organisme pourrait prendre en compte
la dimension économique et sociale des conflits.

Il pourrait également jouer le rôle de garde-fou contre les excès de la


mondialisation.
~ 90 ~

CHAPITRE IV. LA GEOSTRATEGIE EST-ELLE APPLICABLE EN


AFRIQUE ?

Par : Aminata DIAW


~ 91 ~

CHAPITRE V. L’ECONOMIE DES CONFLITS EN AFRIQUE 38*

On observe, à l’échelle mondiale, une extension des zones en guerre39. Depuis la


fin de la guerre froide en 1989, plus de 60 conflits armés ont fait des centaines de milliers de
morts et 17 millions de réfugiés. En Afrique, on estime que sur 11 pays en conflit durant les
années 90 (Soudan, Éthiopie, Ouganda, Mozambique, Angola, Liberia, Sierra Leone,
Burundi, Rwanda, ex-Zaïre, Congo), le nombre de morts serait de 3,8 à 6,8 millions, soit 2,4
à 4,3 % de leur population totale (155 millions d’habitants). En 2000, 20 % de la population
africaine et 14 pays étaient concernés par la guerre. On estimait le nombre de réfugiés à 4
millions et celui des déplacés à 10 millions.

Face à la montée des conflits armés, les actions classiques de développement


économique ont, aujourd’hui, souvent perdu de leur signification. Dans de nombreux pays
africains, l’aide humanitaire et d’urgence a pris le pas sur l’aide au développement, et le très
court terme l’emporte désormais sur les projets de long terme.

Les conflits ouverts se caractérisent par des antagonismes et des oppositions entre
agents collectifs pouvant aller jusqu’à la lutte armée. Ils peuvent prendre une forme armée et
conduire à des violences militaires extrêmes (deadly conflict). Les conflits internes, entre les
citoyens d’une même nation (guerres civiles, rébellion), se distinguent traditionnellement des
conflits externes (guerres internationales). La guerre, selon Karl von Clausewitz 40, est « un
acte de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté » ; il s’agit d’un
conflit armé entre des nations, des États, des groupes humains. Les conflits infra-étatiques
actuels sont régionalisés ou mondialisés, avec une forte érosion de la distinction entre le
public et le privé, le militaire et le civil, l’interne et l’externe41.

Alors que les conflits armés ont pris le devant de la scène, ils sont relativement peu
étudiés par les économistes. Plusieurs questions préalables se posent, en effet, concernant
la légitimité pour un économiste d’aborder les conflits et la spécificité ou non des conflits
africains.

Les conflits et les guerres sont au cœur des sciences politiques, des
comportements de pouvoir et de volonté de puissance. Ils s’expliquent également par les
enjeux économiques, le sous-développement économique, par des économies de rentes et
de prédation et par la montée en puissance d’une économie mondiale criminelle et mafieuse.
Il y a toutefois risque à rationaliser l’irrationnel, et réduire l’homo bellicus à un homo
oeconomicus, ou l’explication des guerres au capitalisme mondialisé 42. La seconde question
concerne la spécificité africaine des conflits armés. Aux conflits de la période de la guerre

38
Philippe Hugon, « l’économie des conflits en Afrique », in Revue internationale et stratégique, 2001/3, n°43
ou http://www.cairn.info/article.php?ID_REVUE=RIS&ID_NUMPUBLIE=RIS_043&ID_ARTICLE=RIS_043_0152

39
Lire Pascal Boniface (sous la dir.), L’Année stratégique 2001, Paris, IRIS, Éditions Michalon, 2000. Voir également SIPRI
Yearbook 2000, « Armaments, Disarmament and International Security », Stockholm, 2000.

40
Karl von Clausewitz, De la guerre, Paris, Éditions de Minuit, 1955, p. 51.

41
Mary Kaldor, New and Old Wars, Oxford, Polity Press, 1999.
~ 92 ~

froide, caractérisés par des oppositions idéologiques et des soutiens des grands blocs, ont
fait place des guérillas multiformes, davantage intra-africaines, avec retrait des grandes
puissances43. Ces guerres mobilisent de petits effectifs ; elles utilisent des armes « labor
intensive ». Elles sont financées par des diasporas, la mobilisation forcée et par les grandes
entreprises. Elles sont également liées à la mondialisation en cours. Elles se rapprochent
enfin, selon certains symptômes, des guerres du Moyen Âge, même s’il y a danger à croire
que l’histoire se répète.

Nous rappellerons tout d’abord certains facteurs explicatifs des conflits, puis
traiterons des analyses économiques des conflits, avant d’étudier leurs conséquences
économiques et de proposer, enfin, certaines orientations permettant une meilleure
prévention des conflits.

Section 1. L’enchevêtrement des facteurs explicatifs

Il serait dangereux d’avoir une lecture matérialiste des guerres, et les expliquer
pardes jeux d’intérêts des oligopoles ou par des rationalités économiques des agents. Onne
peut, inversement, les réduire à l’expression de puissances étatiques cherchant àexercer
leur pouvoir et à étendre leur territoire. Le génocide ou l’extermination del’autre a pour
unique logique la destruction. Il y a enchevêtrement de facteurs qu’ilimporte de hiérarchiser.

Les facteurs explicatifs des guerres sont évidemment multiples et impliquent


desapproches pluridisciplinaires : psychologiques (théories du conflit frustration/agression) ;
sociologiques (action violente des masses, propagande) ; antagonismes politiques de
puissances rivales ; jeux des représentations et replis identitaires réifiés ; intérêts
économiques... Le développement des zones de conflits en Afrique résulte à lafois de la
résurgence des référents identitaires ethniques, religieux ou nationalistes, dela faillite des
États de droit et des souverainetés en déshérence, des immixtions despuissances
régionales et internationales et d’une mondialisation des organisations criminelles
internationales. Les guérillas vivent de soutiens extérieurs, de prédations surles productions
ou sur les aides extérieures, ou de captations des ressources naturelles. Il peut exister des
synergies entre les mouvements de guérillas. Ainsi en SierraLeone, le Front révolutionnaire
uni (le FRU, plus connu sous l’abréviation anglaiseRUF) payait à Charles Taylor une dîme
sur les diamants qui traversaient le Liberia pour être exportés en Europe44.

§1. Facteurs culturels et facteurs sociaux

Dans un monde multipolaire et multicivilisationnel, les identités culturelles


déterminent de nombreux conflits de l’après-guerre froide. Les États-nations
demeurent,certes, des acteurs majeurs des alliances et des conflits armés, mais ceux-ci
seraient,selon certains auteurs, de plus en plus influencés par des facteurs culturels et
civilisationnels45. L’Afrique est moins concernée par ces conflits inter-civilisations que par
42
Claude Serfati, La mondialisation armée. Le déséquilibre de la terreur, Paris, Textuel, 2001.
43
Christopher Clapham, African Guerrillas, James Currey, Oxford, 2000.

44
Jean-Christophe Ruffin, « L’économie des guérillas et les trafics », La revue internationale et stratégique, IRIS, décembre
1995.

45
Samuel P. Huntington, Le choc des civilisations, Paris, Odile Jacob, 2000.
~ 93 ~

desconflits tribaux ou ethniques, même si les conflits internes au Soudan ou entrel’Érythrée


et l’Éthiopie peuvent être analysés comme des conflits entre chrétiens etmusulmans.

Les sociétés africaines sont caractérisées par des ébauches d’États-nations et


pardes citoyennetés embryonnaires. Les référents identitaires, communautaires,
tribaux,ethniques ou claniques favorisent des logiques de fractionnement. Les liens
transnationaux, par les diasporas, les conglomérats ou les puissances régionales,
s’appuientsur des factions. Il y a moins reconfiguration territoriale par des conquêtes que
jeuxd’alliance entre groupes.

§2. Les facteurs militaires

On observe une prolifération des armements peu coûteux à diffusion rapide, allant
de la kalachnikov à la machette46. Les armées régulières et les forces de maintien del’ordre
sont souvent en déshérence ; ainsi se développe le mercenariat. On observedans un
contexte « moyenâgeux » une montée en puissance des allégeances auprèsdes seigneurs
de la guerre jouant un rôle de protecteur. Les guerres sont d’autantplus aisées que le trafic
des armes légères s’est développé : recyclage, vente des surplus des pays de l’Est. Le coût
des armes a fortement chuté ; dans certains pays africains un AK-47 coûte 6 livres sterling.

§3. Les facteurs politiques

La stabilité hégémonique assurée par les deux grands blocs conduisait à une
production de la sécurité, bien collectif pris en charge par un hégémon. La fin de laguerre
froide et de la bipolarité s’est traduite par un retrait des puissances hégémoniques, par une
apparition de conflits désinternationalisés et par des dynamiques defractionnement et de
fragmentation territoriale. La guerre peut avoir ainsi une finalité politique : accéder au pouvoir
par la force. Il existe de nouveaux enjeux hégémoniques. Le Zimbabwe est ainsi impliqué
dans la guerre de la RDC (République démocratique du Congo) pour s’opposer au
leadership de l’Afrique du Sud. Certainsconflits concernent le contrôle de territoires, comme
l’accès à la mer pour l’Éthiopieen Érythrée. On observe des liens entre la privatisation de la
société et de l’État, lamise en place d’organisations paramilitaires ou de juridictions privées
et la montée dela violence. On peut parler de faillite des organisations pyramidales
centralisées ayantpour objet le maintien de l’ordre dans un espace territorial47.

§4. Les facteurs économiques

Les causes économiques des conflits apparaissent à côté des facteurs


politiques,religieux et idéologiques à différents niveaux :

- local : concurrence pour les facteurs rares tels les terres (comme au Rwanda
et au Burundi) ou l’eau ;
- national : conflits pour le partage ou l’accaparement de rentes ;
- régional : accaparement de richesses par des pays limitrophes ou des
puissances régionales, reconfiguration des conglomérats ;
- international : liens avec les circuits internationaux plus ou moins mafieux.
46
Lora Lumpe, Running Guns, The Global Black Market in Small Arms, Londres, ZED books, 2000.

47
Achille Mbembe, De la postcolonie, Paris, Karthala, 2000
~ 94 ~

Les conflits trouvent leurs racines dans les défaillances économiques. Si toutes
lesguerres n’ont pas une explication économique, toutes ont besoin de financement.
Laquasi-totalité des guerres en Afrique est liée au contrôle des richesses (diamant,pétrole,
narcodollars), au pillage ou à la recherche de protection contre rémunération.Elles s’appuient
sur la pauvreté et le chômage pour le recrutement des milices. Le coûtd’opportunité de la
guerre est d’autant plus faible que les populations jeunes sont chômeuses et sans
ressources. Collier et Hoeffler48 estiment, à partir de tests économétriques, que quatre
déterminants majeurs accroissent les probabilités d’apparition et dedurée des conflits
africains : le bas niveau de revenu, qui peut être assimilé à un coûtd’opportunité moins élevé
de la rébellion ; les ressources naturelles, qui ne jouent pasde manière monotone et
accroissent les risques de conflits jusqu’à un certain seuil (enaugmentant les gains potentiels
des rebelles), puis les réduisent (peut-être parce qu’ellesaugmentent les capacités des États
d’assurer l’ordre) ; le volume de la population, quiaccroît les risques en rendant possibles les
sécessions ; et enfin, le fractionnementethnolinguistique, qui ne joue pas non plus de
manière monotone.

Plus récemment, Collier et Hoeffler49 ont différencié cinq principaux facteurs


explicatifs des conflits : la haute dépendance en produits primaires, qui offre des
opportunités aux rebelles de se financer par prédation ; les financements par les
diasporas ;les faibles ressources de l’État interdisant le financement de la défense ; les
faiblesopportunités d’emploi pour les jeunes non scolarisés, réduisant le coût d’opportunitéde
l’activité guerrière ; et la dispersion des populations dans des territoires noncontrôlés.

Les effets des différences ethniques ne sont pas sans incidences ; ils accroissent
lesrisques de conflits si le nombre d’ethnies est limité, et si les droits et la démocratiesont
faibles.

Section 2. Les théories économiques des conflits

Trois principales analyses économiques peuvent être différenciées : celle dite


utilitariste, qui raisonne en termes de rationalité économique d’agents représentatifs ;
cellequi se situe dans le paradigme de l’économie politique ; et celle qui traite de la
guerrecomme d’un risque systémique.

§1. La théorie utilitariste en termes d’équilibre et de théorie des contrats, ou la


rationalité économique des conflits

On peut supposer que les conflits résultent d’une rationalité économique de la


partd’agents représentatifs dans un contexte institutionnel déficient. On peut
mobiliser,notamment, la théorie de l’équilibre général et la théorie des contrats pour
formaliserles comportements des belligérants et des gouvernements. La guerre et la paix ont
descoûts et des avantages. On peut raisonner en information parfaite dans le cadre
del’équilibre général. Dans son article fondateur, Grossman50 étudie comment un
gouvernement choisit ses dépenses militaires pour réduire de manière optimale la probabilité

48
P. Collier, A. Hoeffer, « On Economic Causes of Civil Wars », Oxford Economic Papers, vol. 50, 2000, p. 563-573.
49
P. Collier, A. Hoeffer, ibid.

50
H. L. Grossman, « A General Equilibrium Model of Insurrections », American Economic Review, no 81, 1991, p. 912-929.
~ 95 ~

d’être renversé. Les gouvernements et les rebelles ont chacun leur fonctiond’utilité, des
coûts d’intervention, des probabilités de réussite.

On peut introduire des asymétries d’information, des questions de sélectionadverse


et de crédibilité. Plusieurs équilibres sont envisageables : la solution Paretooptimale, ou
coopération ; la solution de Cournot-Nash non coopérative ; oul’équilibre avec leader de
Stackelberg51. Dans le modèle Azam, Berthelemy, Calipel 52on suppose que l’activité de
l’opposition est une fonction croissante des activités deprédation et de répression du
gouvernement, et une fonction décroissante des activités de redistribution. Le test
économétrique portant sur la période 1975-1980 prendles dépenses militaires rapportées au
PIB (Produit intérieur brut) comme un indicateurde répression, et les dépenses de santé et
d’éducation comme des indicateurs de laredistribution. Dans un modèle probit, les troubles
sociopolitiques prennent lavaleur 1 s’ilyagrèves, manifestations, émeutes, attentats, coups
d’État. Les dépensesmilitaires ont le signe positif prévu ; les dépenses de santé et
d’éducation ont le signenégatif prévu. En revanche, le taux de scolarisation secondaire a un
signe positif.

L’appartenance à la zone franc a un effet négatif que l’on peut interpréter par
lesvariables macro-économiques (maîtrise de l’inflation, stabilité...) ou comme indiced’un
soutien français.

Ce modèle peut être perfectionné en supposant qu’il existe des


asymétriesd’information, et que la question de la crédibilité du gouvernement est centrale53.

Dès lors, la paix apparaît si : on baisse la prédation en améliorant la redistributionet


la crédibilité des processus redistributifs de l’État, par l’instauration de quotas
defonctionnaires, de contre-pouvoirs et en accroissant le rôle de la société civile ; onaméliore
l’information du gouvernement sur les actions des groupes exclus.

§2. L’économie politique des conflits ou le jeu des intérêts économiques et de pouvoir

Dans les modèles précédents, dont l’intérêt réside dans la grande cohérence,
lesconflits sont posés en termes statiques de deux agents représentatifs rationnels,
ensituation d’asymétrie d’information, dans un contexte institutionnel défaillant. Cesmodèles
éclairent certaines facettes d’une réalité complexe, mais ne peuvent interpréter le processus
de conflits armés résultant de l’enchevêtrement de plusieurs facteurset conduisant à des
effets plurivoques.

Les conflits africains sont liés à la fois à des histoires propres de constitutiond’États-
nations, au contexte de sous-développement, à une fragmentation de l’espacenational non
contrôlé par un État fort et à des modes spécifiques d’insertion despostcolonies dans

51
Addison, Le Billon, Mushed, « On the Economic Motivation Conflict in Africa », Conference ABCDE, World Bank/CAE,
Paris, 2000.

52
Jean-Paul Azam, Jean-Claude Berthelemy, S. Calipel, « Risques politiques et croissance en Afrique », Revue économique,
no 47, 1996, p. 819-829.

53
Jean-Paul Azam, « The Redistribution State and Conflicts in Africa », Journal of Peace Research, 2000.
~ 96 ~

l’économie mondiale, avec un poids particulier des mafias internationales, des diasporas,
des conglomérats et des puissances régionales, et des jeuxd’alliance ou d’allégeance.

1. Des conflits d’accaparement de rentes

Trois principaux traits peuvent être privilégiés pour spécifier les


économiesafricaines54:

- Les économies africaines peuvent être définies comme des économies de


rentes capables de se reproduire sans accumulation. Les rentes sont à la fois
externes et internes. Elles conduisent à des logiques de cueillette, de ponction
ou de rapines, l’emportant sur des logiques productives et accumulatrices de
biens. Elles se traduisent par des redistributions au sein de groupes
d’appartenance. L’accès au pouvoir politique ou militaire donne davantage
d’emprise sur les richesses économiques, que les positions économiques ne
conduisent à des pouvoirs politiques.
- Les économies africaines sous-développées sont caractérisées par une forte
désarticulation et par la faiblesse d’accumulation du capital, public et humain,
permettant de dépasser les trappes à pauvreté. Dans des sociétés à faible
détour productif et à tissu économique lâche, on observe une forte fluidité et
une grande mobilité des hommes.
- Les sociétés africaines sont en voie de peuplement et de changement
d’occupation de l’espace. Il en résulte des conséquences sur le poids de la
jeunesse, l’importance des flux migratoires, l’exacerbation de conflits vis-à-vis
des terres.

2. La faillite du contrat social

Certains analystes voient dans les conflits africains un retour à l’état de


naturehobbesien ou un modèle moyenâgeux avec pluralité d’acteurs, renforcement des
référents identitaires, concurrence des allégeances possibles et rôle des mercenaires.

Hobbes a établi l’autorité comme nécessité pour le maintien de la paix 55. On


suppose, dans un état de nature, que les hommes égaux sont rationnels, défendent
leursintérêts, préfèrent la paix à la guerre et ont des droits absolus sur les biens et sur
lespersonnes. Dans cette situation, la solution choisie sera la guerre. Certes, la paix
estprofitable à chacun, mais la paix a surtout un coût élevé si l’autre décide de faire laguerre.
Or, rien ne garantira que l’autre respectera son contrat de non-agression.Dans une situation
de type « dilemme du prisonnier », l’équilibre de Nash (la guerre)est sous-optimal.

Si une autorité intervient pour faire respecter le contrat et sanctionner celui qui nele
respecte pas, il y aura un coût réduisant les dividendes de la paix, mais les solutions de paix
seront préférables aux solutions de guerre.

Les conflits armés africains peuvent être lus comme des défaillances de contrat,de
serment ou de réputation permettant des jeux coopératifs. Plusieurs explicationspeuvent être
54
Philippe Hugon, L’économie de l’Afrique, Paris, La Découverte, coll. « Repères », 2001.

55
Pierre Dockes, Pouvoir et autorité en économie, Paris, Economica, 1999.
~ 97 ~

données de la rupture du contrat social. L’État ou l’autorité n’est nicrédible ni neutre vis-à-vis
des acteurs ; il est souvent opportuniste (Locke). Leséquilibres de pouvoir nécessaires pour
que l’autorité soit bienveillante (Montesquieu) sont limités. Dans un jeu à plus de deux, des
stratégies de « free rider »oude tricherie sont possibles. Il y a retrait des médiateurs
institutionnels extérieurs etabsence de médiateurs internes nécessaires pour assurer la
confiance. Les rétributions des joueurs pouvant les inciter à respecter les contrats sans
nécessitéd’autorités supérieures, disparaissent notamment du fait de la libéralisation et de
laprivatisation. En l’absence d’éducation civique, les joueurs ne peuvent intérioriserdes
normes morales (« tu ne tueras point ») ou des conventions « common know-ledge ». Dans
les sociétés africaines, la construction nationale demeure en cours, etla citoyenneté est
embryonnaire. L’État africain postcolonial se caractérise par safaiblesse menant au quasi-
effondrement d’institutions telles l’armée ; lui-même estfaiblement connecté à une société
civile apathique. La faillite du modèle étatiquepostcolonial, l’échec de l’État importé, auquel
s’est ajoutée la dévalorisation del’État par l’idéologie libérale, ont conduit à des
fractionnements territoriaux et àune montée en puissance de factions s’appuyant sur des
identités claniques, communautaires, ethniques ou religieuses.

La question doit être également posée en termes de transition d’États totalitairesou


autoritaires vers la démocratie et vers l’économie de marché. Les risques de guerrene sont
pas amoindris par des réformes libérales partielles dans un contexte déficient(optimum de
second rang). Les transformations en cours interdisent des jeux répétésgénérateurs d’effets
de réputation, rendant ainsi possible le respect des contrats parles joueurs (Kreps). A priori,
les risques de guerre devraient être atténués par la libéralisation du marché des idées. En
réalité, les pays en transition vers la liberté del’information n’ont pas de mécanismes
institutionnels garants de la démocratie56.Laliberté de la presse favorise les propagandes «
ethnicides ». Les télévisions montrentun monde de violence et créent un écart entre le vécu
et les aspirations. La circulation rapide des idées se fait à l’intérieur de réseaux en connexion
avec des appuisextérieurs.

3. Le « straddling » entre les pouvoirs économiques et les pouvoirs politiques

Il importe de prendre en compte les enchevêtrements entre les intérêts


économiques des firmes et des réseaux contrôlant les rentes, de manière officielle ou non,
etles forces politiques et militaires, officielles ou parallèles. Les liens entre la prédationdes
ressources minières, le blanchiment d’argent et le trafic d’armes conduisent à un« straddling
» entre les pouvoirs économiques et les pouvoirs politiques, et à uneinsertion de l’Afrique
dans une économie mondiale plus ou moins criminelle. Sil’Afrique s’est fortement
marginalisée au niveau mondial, elle s’est en revancheintégrée dans une économie «
informelle », et ceci d’autant plus que les États étaienten déshérence et que les enjeux
miniers et pétroliers étaient croissants. La part del’Afrique dans les exploitations minières
mondiales est passée de 6 % à 13,5 % entre 1980 et 199557.

On peut représenter les jeux stratégiques des firmes multinationales, pétrolières


ouminières, qui cherchent à maintenir des positions de rente face aux concurrents
enversant, en contrepartie de leurs positions, des financements aux pouvoirs en placeou aux

56
R. Snyder, Ballantyne, « Nationalism in the Market Place of Ideas », International Security, 1996.

57
Claude Serfati, op. cit.
~ 98 ~

rebelles susceptibles de prendre le pouvoir. La firme cherche à diversifier lesrisques, et


affecte une certaine probabilité subjective au maintien en place du gouvernement et des
rebelles. Cette probabilité dépend en partie du financement de la firmeau gouvernement et
aux rebelles. On suppose que le gain sera maximum si le gouvernement reste en place et si
la firme ne finance que le gouvernement. Il sera, enrevanche, nul si la firme n’a pas financé
les rebelles et que ceux-ci renversent le gouvernement. La solution de gains intermédiaire
consiste, pour la firme, à financer à lafois le gouvernement et les rebelles, maintenant ainsi
sa position dans les deux cas.

La firme peut maximiser son espérance mathématique de gains en finançant


lesrebelles. Bien entendu, tout dépend de la valeur retenue pour les probabilités subjectives
et pour la rente dont elle dispose dans les diverses configurations. Ce modèlepeut
s’appliquer au soutien par Elf de Dos Santos et de Savimbi en Angola ou deSassou Nguesso
et de Lissouba au Congo.

4. La recomposition des conglomérats

On voit se développer de nouvelles configurations « conglomérales »,


correspondant à des pratiques déloyales face aux règles anciennes mises en place par les
grandsoligopoles. Ainsi, les nouveaux conglomérats diamantaires réduisent la position
demonopole de la De Beers qui tend à jouer la transparence. Ces nouveaux conglomérats
résultent de joint ventures entre des sociétés liées aux armées ougandaises ou
zimbabwéennes et des intérêts israéliens. L’accès aux richesses minières ou
pétrolièresconduit à des « straddling » entre les positions de pouvoir et les positions
d’accumulation58.

5. Le cas de l’économie du diamant

Le diamant représente un enjeu majeur des guerres en Afrique, tout en


constituantl’une des principales sources de financement de ces conflits. Bien entendu,
certainspays producteurs tels le Botswana (1,6 milliard de livres sterlingen 1999), l’Afriquedu
Sud (983 millions dollars) et la Namibie (414 millions de livres sterling) bénéficient de
ressources diamantifères sans que celles-ci ne constituent la cause de nouveaux conflits. La
criminalisation du diamant a commencé en Angola, il y a vingtans, avec le soutien de
l’Afrique du Sud, du Zaïre et de la Côte-d’Ivoire à Savimbi.

Les filières du diamant et celles de l’armement sont étroitement liées. Les


grandsconglomérats, tels la De Beers, cherchent à changer d’image en préconisant une
plusgrande transparence ou traçabilité. De nouveaux réseaux apparaissent,
notammentisraélo-russe. La RDC devient l’enjeu de factions armées rivales se disputant des
zonesriches en gemmes. Le Liberia de Taylor exportait 40 fois plus de diamants qu’il
n’enproduisait. En Angola, Savimbi est financé par le diamant. Et la guerre en Guinée,au
Liberia ou en Sierra Leone est indissociable de la fameuse pierre. La « gemnocratie » est
liée à la foule de petits producteurs, au paiement en liquidités, à la porosité des frontières, à

58
Pour la criminalisation de l’État en Afrique, se reporter à Jean-François Bayart, Béatrice Hibou, Stephen Ellis, La
criminalisation des États en Afrique, Paris, Éditions Complexe, 1997. Pour le cas du diamant, lire François Misser, Olivier
Vallé, Gemnocratie, l’économie politique du diamant en Afrique, Bruxelles, Desclée de Brouwer, 1997.
~ 99 ~

la corruption endémique. L’embargo est violé par le BurkinaFaso, la RDC, le Rwanda, le


Togo et la Namibie59.

6. L’insertion dans une économie mafieuse internationale

Les puissances hégémoniques se sont désengagées, laissant le champ libre aux


puissances régionales, organisations criminelles et autres trafiquants d’armes. Les
sociétésafricaines sont intégrées dans une économie mondiale informelle ou un « monde
sansloi »60. L’Afrique s’est insérée dans cette économie parallèle internationale, à la
foissource d’accumulation et facteur de conflits et de décomposition/recompositiond’États.
Les conflits résultent d’une interdépendance entre le contrôle des produitsillicites, les achats
d’armes, la mobilisation des milices et des liens avec le mondeinternational des affaires.
L’Afrique de l’Ouest côtière et une partie de l’Afrique australe sont devenues des zones de
production de drogue, et plusieurs États mafieuxsont entrés dans le trafic des narcodollars.
En revanche, peu jouent le rôle de paradisfiscaux et de blanchiment d’argent (Gambie,
Liberia, Seychelles).

 Le conflit armé, risque ou incertitude systémique

Les analyses précédentes, en termes d’économie politique, cherchaient à


expliquerles comportements belligènes en termes de jeux d’intérêts économiques et de
puissance. Les conflits armés mettent en jeu une pluralité d’agents, d’alliances et demobiles.
Ils ne peuvent, inversement, être traités comme le suppose les théories réalistes, en termes
d’États-nations poursuivant des buts de puissance. Il importe de voirles limites de la
rationalisation des comportements complexes caractérisés par despassions ou par la folie
des hommes. Les calculs coûts/avantages et les jeux d’intérêtséconomiques trouvent leur
place à l’intérieur de systèmes et d’interdépendances defacteurs variés. On observe de
multiples réseaux de pouvoir et d’interactions qui sechevauchent et s’entrecroisent, et des
interrelations entre les quatre principalessources de pouvoir : idéologique, économique,
militaire et politique.

Les conflits armés sont des processus résultant d’interactions non linéaires
etconduisant à un chaos entropique. D’où la nécessité d’introduire de l’incertitude,
del’indéterminisme ou de l’aléatoire dans des systèmes non linéaires déterministes. Onpeut,
dans une vision systémique, considérer la guerre comme un chaos résultantd’un
enchevêtrement non maîtrisé de processus qui s’enchaînent, avec rupture desmodes de
régulation. L’incertitude systémique se définit comme une éventualité nonprobabilisable

59
Il existe des filières diamantifères allant des lieux de production, avec une multitude de petits producteurs, jusqu’aux
tailleurs d’Anvers, qui contrôlent 80 % des pierres brutes. On estime que les « diamants de guerre » correspondent à 4 % de
la production mondiale et de 10 à 15 % de la production de qualité. 60 % des diamants viennent d’Afrique. La De Beers a
longtemps exercé une position monopolistique. Elle représente les deux tiers du commerce pour un chiffre d’affaires de 5,2
milliards de dollars, possède 18 mines, notamment en Afrique australe, et emploie 20 000 mineurs. Elle a perdu une partie de
son rôle du fait de l’arrivée des sociétés russes et israéliennes (Lev Leviev). L’économie de pillage est assurée par un
consortium d’hommes d’affaires, de mercenaires, de vendeurs d’armes et d’entreprises de sécurité, face à la défaillance des
États. On note en RDC deux entreprises d’État sous la coupe zimbabwéenne. Le consortium diamantifère ORYX Natural
Resource (îles Caïmans) a signé un accord avec les entreprises zimbabwéennes, dont Operation Sovereign Legitimacy
(OSLEG), branche économique de l’armée zimbabwéenne. COSLEG est une joint venture entre le groupe OSLEG et la
COMEX, liée à Kabila. On note une fusion entre ORYX et la Petra Diamonds.

60
Jean de Maillard, Un monde sans loi, Paris, Stock, 1998.
~ 100 ~

d’apparition d’états dans lesquels les réponses des acteurs aux risquesperçus conduisent à
accroître le phénomène au niveau collectif.

Les conflits et la guerre, incertitudes systémiques, résultent de la combinaison


decinq facteurs :

- chocs exogènes : catastrophes naturelles, conflits politico-militaires conduisant


à une forte perturbation du système ;
- facteurs structurels de sous-développement des systèmes économiques et de
vulnérabilité des systèmes sociaux, caractérisés par la vulnérabilité et
l’exposition au risque alimentaire des populations, du fait d’une insuffisance de
disponibilité, de défaillance de marchés ou d’absence de droits ;
- facteurs institutionnels, caractérisés par des absences ou des défauts de
systèmes d’information, de prévention et de régulation, et se manifestant par
des effets de contagion non maîtrisés ;
- facteurs idéologiques et informationnels : systèmes de représentation, de
croyances liés à des propagandes, rumeurs, comportements mimétiques ;
- facteurs politiques, caractérisés par une absence ou par des défaillances
d’options stratégiques : attitude pro-crise de militaires, politiciens, spéculateurs
ou indifférence, incompétence et passivité de la part de dirigeants non
concernés.

1. Les pertes de confiance et les systèmes de représentation et de croyance

On peut mettre en relation le contexte économique de crise et les


représentations,en mobilisant notamment les concepts keynésiens, eux-mêmes influencés
par Freud.Les représentations dépressives liées à des pertes de confiance, résultent de
comportements mimétiques ou moutonniers et d’enchaînements régressifs. Les pertes
deconfiance traduisent, comme pour les marchés financiers, des comportements irrationnels
en incertitude radicale de type keynésien : « Lorsqu’on s’attend à des changements profonds
mais qu’ils sont très incertains quant à la forme qu’ils revêtiront,on n’a qu’un faible degré de
confiance » (Keynes). Le contexte de conflit peut apparaître comme une incertitude radicale.
On peut prendre pour hypothèse que le repliidentitaire, les comportements de haine, sont
des pertes de confiance à la fois dansles autres et dans l’avenir qui apparaît comme un
horizon bouché. La création, actede projection dans le futur, cède la place à la destruction.
La sympathie oul’empathie se transforme en haine de l’autre et de soi. Le futur devient
l’actualisation des ancêtres, la réinterprétation d’une histoire mythique, justifiant le retourà la
terre ancestrale, aux valeurs authentiques. Le contexte de destruction d’unordre ancien et
d’une représentation d’un futur meilleur est évidemment propice àces ruptures de confiance.
L’ethnicité se développe en période de baisse des coursdes matières premières et
d’aggravation des conflits pour l’accès à la terre ou auxemplois. La non-scolarisation ou la
formation idéologique sont des facteurs essentiels de remplacement des connaissances par
des croyances, état portant à donnerson assentiment à une certaine représentation, dont le
statut épistémologique estincertain ou douteux.

En jouant sur les croyances, les pouvoirs peuvent contribuer par des manipulationsà
renforcer ces représentations. Les conflits armés apparaissent lorsque les intérêts
setransforment en passions, et que la pluralité des référents des agents se transforme enune
~ 101 ~

identité réifiée et unidimensionnelle : son ethnie, sa religion, son appartenancenationale, sa


caste. Ces systèmes de représentation se développent d’autant plus queles agents sont en
situation de crise et de forte vulnérabilité. L’on rentre alors dans ladialectique du
persécuteur/persécuté, de la recherche du bouc émissaire.

2. La défaillance des systèmes de décision des autorités chargées de la sécurité

Les conflits surgissent quand il y a défaillance des systèmes de décision, c’est-à-


direde prise de risque (selon une probabilité subjective) dans un univers incertain
(nonprobabilisable) qui coordonne les informations (désinformations), des
représentations(fausses représentations) et des actions (défaillance de logistique ou de
volonté). Lesacteurs peuvent être négatifs (pro-crise), passifs (subir), réactifs, pré-actifs
(anticiper),pro-actifs (agir pour provoquer ce que l’on désire) ou interactifs (agir en
interrelationavec les événements par un pilotage).

3. La faiblesse de l’État et la fragmentation territoriale

Les comportements belligènes jouent dans des conditions politiques


données :absence d’État de droit, souveraineté des États en déshérence, absence de
jeudémocratique. Le plus souvent, les pouvoirs autoritaires peu légitimes contrôlent lesforces
de sécurité. Ils conduisent, à défaut de débat démocratique, à des luttesarmées de groupes
d’opposition, d’où un cycle de violence conduisant à une militarisation de la société. Ce
processus peut être plus ou moins alimenté par l’extérieur,par des financements de la part
d’États ou de firmes (notamment minières oupétrolières).

De nombreux conflits africains sont liés à la fois à une fragmentation de


l’espacenational non contrôlé par un État fort, et aux réseaux transnationaux
(diasporas,conglomérats, puissances régionales, etc.), avec des jeux d’alliances ou
d’allégeancequi interdisent d’opposer le territoire national contrôlé par l’État et le
systèmeinternational.

Section 3. Les effets économiques des guerres et des conflits


§1. Les effets macro-économiques

1. Le coût de la guerre

La guerre a un coût élevé en termes de dépenses militaires et d’endettement


extérieur (tableau 1). En 1999, l’Angola a consacré 900 millions de dollars de
revenuspétroliers pour l’achat d’équipements militaires. Le Zimbabwe et l’Ouganda
sontravagés par la guerre. La faillite économique du Zimbabwe se traduit par une inflation de
60 %, une rupture avec les institutions de Bretton Woods et une fuite enavant risquant de
conduire à un exode des fermiers blancs et des compétences. EnÉthiopie, on estime à 1
million de dollars par jour le coût de la guerre contrel’Érythrée.

Les guerres affectent directement les économies africaines. Elles conduisent à


unedestruction ou à une dévalorisation du capital physique (infrastructures, équipements),
humain et social reposant sur la confiance, les règles ou les réseaux de relations. Elles ont
également un coût élevé pour la communauté internationale. Lacommission Carnegie a
~ 102 ~

estimé à 200 milliards de dollars le coût pour la communauté internationale des sept
principales guerres menées dans les années 90, sanscompter le conflit du Kosovo. Ce qui
représente quatre fois le montant annuel del’aide au développement.

2. Le rôle des conflits dans la faible croissance africaine

Plusieurs facteurs explicatifs de la faible croissance africaine peuvent être


61
avancés :

- géographiques (éloignement des côtes, pauvreté des sols, maladies...)62


- historiques (mauvaise spécialisation, poids de la colonisation) ;
- défaillance des institutions et des politiques ;
- faiblesse des infrastructures (télécoms, électricité, transports...) et des
services publics ;
- défaillance des investissements privés ;
- faible efficience des investissements publics, plus haut ratio investissement
public/privé du monde.

Certains travaux économétriques, tels ceux de Easterly et Levine 63, ont introduitles
fractionnements et les conflits ethniques comme une variable déterminante dela faible
croissance africaine. Ils reposent toutefois sur des méthodes discutables,en faisant du
nombre d’ethnies un facteur de crise possible. Ainsi, le Burundi oule Rwanda, bi-ethniques,
sont traités comme homogènes et stables. Les travaux deCollier et Hoeffler 64 ont montré, au
contraire, que les conflits étaient d’autant plus probables que le nombre d’ethnies était limité
et interdisait des jeuxd’alliances.

L’interaction entre l’instabilité politique et la croissance économique a été analysée


par de nombreux auteurs65. Fosu a montré avec des données transversales portant sur31
pays africains, que l’instabilité politique avait un effet très négatif sur la croissance. Selon
Azam et al.66, l’équation économétrique de type probit montre que lesdépenses de santé et
les taux de scolarisation primaire réduisent significativement lerisque politique, alors que les
dépenses militaires l’accroissent. Le risque politiqueaffecte sensiblement et de manière
négative le taux de croissance des économiesappartenant à l’échantillon.

61
Philippe Hugon, op. cit.

62
D. Bloom, J. Sachs, « Geography, Demography and Economic Growth in Africa », Brookings Paperin
Economic Activity, September 1998.
63
W. Easterly, R. Levine, « Africa’s Growth Tragedy : Policies and Ethnic Divisions », Quarterly Jour-
nal of Economics, no114, 1997, p. 1203-1250.
64
P. Collier, A. Hoeffer, op. cit.

65
Alberto Alesina, R. Perotti, « The Political Economy of Growth : A Critical Survey of the
RecentLiterature », World Bank Economic Review,no8, 1994, p. 351-371.
66
Jean-Paul Azam, Jean-Claude Berthelemy, S. Calipel, « Risques politiques et croissance enAfrique
», Revue économique,no47, 1996, p. 819-829.
~ 103 ~

3. Il y a débat quant aux effets de long terme

La guerre serait, selon certains auteurs, un moyen de former les États, de


réaliserune accumulation primitive et de constituer les bases d’une accumulation
productiveultérieure67. L’histoire du Moyen Âge et de l’accumulation primitive se répéteraient.
Les États-nations européens se sont largement constitués grâce à la guerre(« l’État fait la
guerre, la guerre fait l’État »), et les sociétés africaines se trouveraient sur des trajectoires
longues traduisant un temps historique déconnecté dutemps mondial.

On peut, au contraire, considérer que les guerres africaines sont des facteurs
essentiels de décomposition des États et de sous-développement économique, non
seulement en raison des destructions des hommes et des biens qu’elles entraînent,
maisaussi du fait de l’insécurité dans laquelle se trouvent les agents économiques.
Ellesconduisent à généraliser les migrations et les réfugiés. Elles participent de la
prolifération des maladies telles le sida, et conduisent à une insécurité des droits de
propriétéou d’accès aux biens premiers. Les pillages se multiplient. Aujourd’hui, les guerres
sesont internationalisées par leur armement, dans leurs alliances et leurs enjeux. Dansun
univers mondialisé, on ne peut prendre pour hypothèse que le retrait desanciennes
puissances impériales laisse le champ libre à une histoire africaine hors dutemps mondial,
effaçant la parenthèse de la colonisation et l’artificialité des frontières. Les guerres sont aussi
un signe de l’affairisme, du clientélisme et du néopatrimonialisme liant les politiques internes
à l’Afrique avec des relations extérieures plus oumoins mafieuses.

§2. Les effets micro-économiques des conflits

Les travaux sur le risque pays introduisent les risques politiques comme
déterminant des exportateurs et des investisseurs et comme constituant du climat
desaffaires, à côté des risques financiers et de l’environnement des affaires (voir CreditRisk
International).

Les instabilités sont créatrices de risques probabilisables ou d’incertitudes pourles


acteurs. Il y a incertitude sur la durabilité des réformes. Les risques théoriquement
diversifiables le sont peu du fait des risques réels de contagion et de faussesreprésentations
assimilant des situations contrastées africaines (afro-pessimisme).

Les risques anticipés par les opérateurs sont ceux des coups d’États,
descatastrophes naturelles, des risques sanitaires. Les fausses représentations,
traduisantun afro-pessimisme, conduisent à des anticipations pessimistes sans rapport avec
lesrisques réels. Il en résulte des comportements « court termistes » qui sont desobstacles à
la croissance et au développement économique. Dans un contextede risque, les agents
préfèrent des solutions réversibles (valeur d’option), ont uneforte préférence pour la liquidité,
choisissent des solution d’ « exit » (des personnesou des capitaux) et recherchent un taux
de retour rapide du capital. L’incertitudeest source d’absence d’apprentissage et de
capitalisation. L’insécurité et les risquesde guerre sont une explication importante du faible
investissement étranger enAfrique (1 % des investissements directs mondiaux), alors que les
taux de retour ducapital y sont les plus élevés du monde (29 % pour les filiales des
firmesaméricaines).

67
Jean-François Bayart, Béatrice Hibou, Stephen Ellis, op. cit
~ 104 ~

Les liens avec l’insécurité alimentaire

L’absence de satisfaction des besoins fondamentaux ou d’accès aux « biens


premiers » (au sens de Sen ou de Rawls « biens que tout homme est supposé désirer
» :liberté, éducation, santé, alimentation) résulte, selon des degrés divers, des défaillances
institutionnelles. Nous prendrons à titre d’exemple le cas de l’insécuritéalimentaire.

Les famines sont nombreuses en Afrique, même s’il existe aujourd’hui des
surplusalimentaires mondiaux. Les famines antecoloniales (Empires du Ghana,
Mali,Songhaï) et coloniales ont existé (Éthiopie, 1888-1892, 2000). Les famines récentesont
concerné l’Éthiopie (1972-1974, 1984-1985), le Sahel (1973-1974), Madagascar(1986) le
Soudan (1998), le Lesotho (1983-1985), le Mozambique, le Nigeria, le Niger,l’Angola, le
Zaïre, l’Ouganda, la Somalie (1992) et le Liberia68.

Plusieurs facteurs s’enchaînent pour transformer des poches de malnutrition


encatastrophes nutritionnelles. Il peut y avoir insuffisance des disponibilités liées,notamment,
à des variables climatiques, ou insuffisance de la demande solvable faceà une baisse des
revenus ou à une hausse des prix alimentaires. Il y a, le plus souvent,perte des droits, que
ceux-ci résultent d’un pouvoir d’achat, de la redistributionpublique ou des appartenances à
des groupes sociaux conduisant à des droits et obligations. Les malnutritions ou les famines
résultent également d’une volonté politiquede la part de certains groupes. Ce sont les États
en guerre ou en guérilla qui connaissent des famines. Les seigneurs de la guerre sèment la
terreur et cherchent parfois àéliminer les groupes opposants en les affamant ; ainsi en
Somalie, après avoir affaméles populations en détruisant la production paysanne, ils ont pillé
ou bloqué les aidesalimentaires pour créer des famines.

Dans le cas de la famine éthiopienne de l’année 2000 et de la corne de l’Afrique, ily


a eu combinaison entre la sécheresse (trois ans sans pluie), le coût de la guerre
avecl’Érythrée, le rôle pro-crise, ou du moins attentiste, des autorités
gouvernementaleséthiopiennes contre l’ethnie marginalisée des nomades de l’Ogaden et les
difficultés delogistique liées aux conflits. Les blocus alimentaires ont toujours été utilisés
commeune arme contre les ennemis ou les minorités. Les famines africaines sont la
résultante principale de facteurs politiques et militaires. Les causes naturelles
jouentaujourd’hui un rôle limité face aux facteurs humains.

Mais il importe également de prendre en compte les stratégies des grandes


puissances internationales. Il est reconnu que les États-Unis ont joué un rôle dans
lesfamines éthiopiennes, en utilisant l’arme alimentaire comme un moyen de faire chuterle
gouvernement marxiste (Field). De même, ce gouvernement avait voulu des transformations
rapides des rapports sociaux de production qui avaient, comme dans denombreux régimes
communistes, créé des famines.

68
Philippe Hugon, « L’économie des famines : innefficience des marchés, inéquité des droits
ou risque systémique », Revue économique, no 58, 1996.
~ 105 ~

Face aux mêmes événements de sécheresse et de baisse de la production, on


peutdifférencier, dans les années 90, les stratégies pro-actives du Botswana, réactives
duKenya et inactives de l’Éthiopie, du Soudan, de Madagascar (1986), du Mali ou
duMozambique.

Section 4. Les orientations possibles : prévention des conflits et


développement économique

Les solutions de prévention et de réduction des risques de conflits sont évidemment


complexes et diverses. Les processus de décision peuvent chercher à circonscrirela
catastrophe, aider les victimes ou éviter de nouvelles crises.

La sécurité ne peut évidemment pas être le fruit des seules mesures de sécuritéqui
s’en prennent aux manifestations et non aux causes de la violence et des conflits. Les
solutions envisageables diffèrent selon le niveau auquel on se situe : conflits internationaux,
déficit des États de droit ou risque systémique dans un secteurdonné.

Nous différencierons plusieurs modalités d’interventions à différents niveaux.

§1. La mise en place de systèmes d’information, du jeu démocratique et d’une citoyenneté

Le rôle de l’information est essentiel pour prévenir ou circonscrire les crises et


lesconflits. Du fait de la dissémination des guerres, des conflits ou des lieux de crisedepuis la
fin de la guerre froide, les observatoires universels sont insuffisants. Leszones de « chaos
bornés » demeurent des « terrae incognitae ». Il faut décentraliser lesmoyens d’observation.
Il existe des observatoires, des signaux d’alarme ou des systèmes d’alerte qui annoncent
l’imminence de catastrophes. Il est relativement aiséaujourd’hui, par les systèmes
d’information existant, de prévoir la majorité des catastrophes. Les zones à risque sont
connues. En revanche, subsistent des chaînons manquants entre les cercles d’experts et les
décideurs politiques.

On peut considérer que la démocratie représentative et participative est la formede


gouvernement qui limite le plus les conflits, à condition de ne pas la réduire aumultipartisme
ou à la liberté de la presse. L’essentiel concerne les jeux de contrepouvoirs et la constitution
d’une société civile forte, complémentaire d’un État fort.Les droits politiques sont nécessaires
pour satisfaire les besoins et surtout pour lesexprimer. L’espace social doit être transparent
pour défendre les plus faibles. La« voice », au sens de Hirschman, est essentielle pour éviter
les conflits. Mais le jeudémocratique est souvent circonscrit aux seuls pays riches. La
démocratie résulte dedroits acquis par des luttes et de contrats acceptés par des acteurs.
Elle ne s’imposepas de l’extérieur des sociétés. Elle suppose, en Afrique, la constitution de
partispolitiques, d’associations et d’organisations de la société civile permettant
unecitoyenneté. La construction de la démocratie interdit la décalcomanie ; elle doit,
aucontraire, s’appuyer sur les institutions « traditionnelles » et les modes de résolutiondes
conflits.

§2. La question internationale de la régulation d’un « monde sans loi »

Le second niveau concerne la régulation d’un « monde sans loi ». Les mesures
supposent des négociations sur les biens publics internationaux et des systèmes de
~ 106 ~

respectdes normes et des règles. Les domaines vont du contrôle des places financières
offshore, aux trafics de produits illicites (drogues) ou de produits licites contrôlés pardes
mafias, en passant par le commerce des armes. Une coopération internationales’impose
notamment pour limiter le trafic des armes, réguler le commerce des produits finançant la
guerre (diamants, pétrole, drogues), et contrôler les centres offshore liés aux économies
mafieuses. Ces accords peuvent être conçus sur le modèle dumoratoire sur l’importation,
l’exportation et la fabrication des armes légères, signépar 8 pays du Sahel-Soudan, au mois
de mars 1997, sur celui des accords signés ausein de la SADC (Communauté de
développement de l’Afrique australe) ou sur le programme d’échange armes contre
développement, au sein de la CEDEAO (Communautééconomique des États de l’Afrique de
l’Ouest). Les pays exportateurs d’armes pourraient, par exemple, interdire la vente à des
pays endettés bénéficiant des mesuresPPTE (Pays pauvres très endettés).

Dans un monde où le poids des grands groupes privés l’emporte sur celui desÉtats,
les négociations doivent concerner également les codes de conduite des firmespétrolières,
diamantaires, financières ou productrices d’armes. Un avant-projet deconvention
internationale sur l’interdiction des « diamants de la guerre » est encours. Une conférence a
regroupé, au mois de mars 2001, 26 pays producteurs degemmes, des ONG (Organisation
non gouvernementales) et des pays occidentauxsous l’égide des Nations unies. Bien
entendu, la mise en œuvre de la transparenceest rendue particulièrement délicate du fait de
la collusion d’intérêts entre des Étatset des circuits mafieux et criminels, et du fait des
difficultés propres à la traçabilitédes diamants.

§3. La politique redistributive et les compromis sociopolitiques

Dans la mesure où la guerre renvoie en partie à des intérêts économiques,


desmécanismes compensatoires et des vigilances vis-à-vis des changements dans
lesmécanismes redistributifs s’imposent. Réduire le coût d’opportunité de la guerrepour les
jeunes suppose qu’ils reçoivent une formation scolaire qui les structure etdéveloppe leur
esprit critique, des activités qui les occupent et des symboles qui lesmotivent. Avoir des
actions préventives suppose que les mécanismes redistributifsaux minorités soient
respectés, sous forme de quotas, d’accès à l’éducation et à lasanté.

Les mesures, rationnelles économiquement, de libéralisation ou de


privatisationpeuvent remettre en question les compromis sociopolitiques et les équilibrages
régionaux (comme c’est le cas en Côte-d’Ivoire).

§4. La constitution d’interdépendances et d’intérêts régionaux croisés

Créer des projets communs, des institutions régionales, faciliter les flux régionauxde
commerce, de travail et de capitaux, et donc des interdépendances économiques,est une
manière de faciliter le dialogue et de contourner les antagonismes politiques.Les travaux de
Palachek69, repris par Winters et Schiff 70, ont montré que l’intégrationrégionale réduisait les
risques de conflits. Elle peut ainsi constituer un « first best »par rapport au libre échange en
créant une sécurité favorable à la croissance. Ainsi,en Asie de l’Est, le jeu des intérêts
69
S. W. Palachek, « Conflict and Trade : An Economic Approach to Political Interactions », in W. Isard, Ch. H. Anderson
(ed.), Economic of Arms Reduction and the Peace Process, Amsterdam, North Holland, 1992.
70
M. Shiff, L. A. Winters, « Dynamic and Politics in Regional Integration Arrangements : An Intro- duction », The World
Bank Economic Review, no 12, 1998, p. 177-195.
~ 107 ~

croisés autour du régionalisme réticulaire, peu institutionnalisé et ouvert, est une manière de
dépasser les conflits latents, très élevésdans une zone en voie de surarmement. Les
puissances régionales exercent des effetsde polarisation, constituent des puissances
hégémoniques et sont devenues les principales bénéficiaires de ces intégrations régionales.
Elles ont, en contrepartie, des obligations à l’égard des nations périphériques. Et si ces
puissances (Côte-d’Ivoire au seinde l’UEMOA ou Afrique du Sud au sein de la SADC)
exercent bien leurs obligationsvis-à-vis des pays membres des unions régionales, encore
faut-il rappeler qu’il y a desprivilégiés et des laissés-pour-compte, qu’il est nécessaire de
mettre en place desmécanismes de compensation, et qu’en cas de non-intégration nationale,
la contrepartie est rendue très difficile.

§5. Le partage de responsabilité entre l’État et la société civile

Le débat entre les théories constructivistes, mettant en avant les normes, et


lesthéories réalistes doit être dépassé dans une perspective dynamique procédurale
entermes d’agendas et de processus.

C’est en priorité aux États et à leurs organisations mondiales et


régionalesqu’incombe la responsabilité de prévenir et de faire cesser les affrontements
armés, etde rechercher les solutions pacifiques. La mise en place de conditionnalités à
l’aide,favorisant les jeux démocratiques et l’émergence d’États de droit, est évidemment
unedes réponses aux préventions des conflits armés. Il importe qu’un médiateur
institutionnel joue son rôle pour transformer les conflits en jeux coopératifs. Ceci peut sefaire,
à défaut d’un contrat social respecté par les acteurs, par un tiers garant national, régional ou
international.

La prise en charge du collectif peut être également assurée moyennant contrat,


parles acteurs de la société civile, voire par le secteur privé avec cahier des charges.
LesONG sont souvent plus à même de s’adapter aux situations complexes des conflitsarmés
décentralisés. Ilyaégalement obligation pour les autorités gouvernementalesd’autoriser les
organisations humanitaires à répondre aux catastrophes si ces autoritésn’en ont pas les
moyens. Le droit d’ingérence est devenu une nécessité face aux carencesdes États de droit.
Il y a, depuis peu, création de réseaux, nationaux et internationaux,d’associations privées de
solidarité internationale et de secours aux victimes. Selon Jacques Forster : « L’action
humanitaire ne peut pas être la poursuite de l’action politiquepar d’autres moyens. Elle ne
doit ni se substituer ni être intégrée au politique. La responsabilité de l’État dans le domaine
humanitaire est de promouvoir, de soutenir etdonner les moyens d’agir aux institutions
humanitaires impartiales et indépendantes ».

La question est ainsi de favoriser la démocratie représentative et participative parla


multiplication des instances de décision et de contre-pouvoir, et par des acceptations de la
différence et de la gestion de communautés participant au même contratsocial. Bien
entendu, à terme, la réduction des risques de guerre passe par la constitution d’économies
productives, diversifiées et interdépendantes.
~ 108 ~

Section 5. Tests économétriques : portée, limites

La mise en évidence des facteurs explicatifs des conflits peut reposer sur destests
économétriques de type analyse des composantes principales, modèles derégression
logistique ou modèles non linéaires estimés selon la méthode du maximum de
vraisemblance. Les tests montrent que les possibilités de conflits armésafricains sont liés à :

- des ressources pétrolières : Angola (43 % des exportations), Congo (42 %) ;


- des ressources diamantaires : Sierra Leone, Guinée, Liberia, RDC ;
- la faible densité agricole par habitant : Burundi (0,12 ha), Érythrée (0,11 ha),
Rwanda (0,14 ha) ;
- des circuits de production et de recyclage des narcodollars : Liberia, guerres
mafieuses paradis fiscaux.

Ces tests présentent toutefois plusieurs limites :

- les pays en guerre sont caractérisés par des défaillances des systèmes
d’information et par un poids élevé des flux non enregistrés ;
- les conflits sont décentralisés et transnationaux, alors que les statistiques
sontnationales (voir les conflits localisés : Touareg au Sahel, Casamance
auSénégal, etc.) ;
- on observe une forte fluidité des situations, et la guerre comme
processuspeut difficilement être appréhendée par des comparaisons de
statistiquesannuelles ;
- il y a souvent ambivalence des indicateurs retenus. Les dépenses
militairespeuvent être interprétées comme un facteur répressif dissuadant les
conflits oucomme un indice de militarisation conduisant à la guerre. Les taux
de scolarisation a priori réducteurs de conflits peuvent également les
expliquer si lesgroupes s’opposent aux élites, comme c’est le cas au
Rwanda et au Burundi ;
- les liens constatés sont souvent tautologiques. Ainsi, les indicateurs de
crédibilité peuvent être des facteurs explicatifs des conflits ou des
résultantes deceux-ci.
~ 109 ~

CHAPITRE VI. RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE

In http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9chauffement_climatique

Courbes des températures des deux derniers millénaires, selon diverses études

Le réchauffement climatique, également appelé réchauffement planétaire, ou


réchauffement global[1], est un phénomène d'augmentation de la température moyenne
des océans et de l'atmosphère, à l'échelle mondiale et sur plusieurs années. Dans son
acception commune, ce terme est appliqué au changement climatique observé depuis
environ 25 ans, c'est-à-dire depuis la fin du XXe siècle.

Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) est chargé


d'établir un consensus scientifique sur cette question. Son dernier et quatrième rapport,
auquel ont participé plus de 2 500 scientifiques de 130 pays[2], affirme que la probabilité
que le réchauffement climatique depuis 1950 soit d'origine humaine est de plus de
90 %[3]. Ces conclusions ont été approuvées par plus de 40 sociétés scientifiques et
académies des sciences, y compris l'ensemble des académies nationales des sciences
des grands pays industrialisés [4],[5].

Évolution passée des températures et conséquences

Cycles climatiques

Le climat global de la Terre connaît des modifications plus ou moins cycliques de


réchauffements alternant avec des refroidissements qui diffèrent par leur durée (de
quelques milliers à plusieurs millions d'années) et par leur amplitude. Depuis 800 000
ans, le climat terrestre a connu plusieurs de ces cycles. Plusieurs cycles de 100 000 ans
environ se sont répétés au cours de cette période. Chaque cycle commence par un
réchauffement brutal suivi d’une période chaude de 10 000 à 20 000 ans environ,
appelée période interglaciaire. Cette période est suivie par un refroidissement progressif
et l'installation d’une ère glaciaire. À la fin de la glaciation, un réchauffement brutal
amorce un nouveau cycle. Nous vivons actuellement depuis plus de 10 000 ans dans
une période interglaciaire (voir figure).

Grâce à l'étude des carottages de glace et plus précisément de l'analyse de la


composition isotopique de l'oxygène piégé dans la glace, les températures
atmosphériques des cycles glaciaires de l’ère quaternaire ont pu être reconstituées[6]. La
carotte glaciaire la plus profonde a été forée dans le cadre du projet Epica, en
Antarctique, à plus de 3 500 mètres de profondeur et permettant de remonter l'histoire du
climat en Antarctique jusqu'à 800 000 ans [7]. Les carottes de glace contiennent des
bulles d'air et des indications sur la teneur en gaz de l'atmosphère d'autrefois, ce qui
montre que les températures globales sont liées à la quantité de gaz à effet de serre
dans l'atmosphère[réf. nécessaire].

Les variations du climat sont corrélées avec celles de l'insolation, des paramètres de
Milanković, de l'albédo, des cycles solaires et des concentrations dans l'atmosphère des
gaz à effet de serre comme le dioxyde de carbone et des aérosols.

Amplitudes des variations climatiques


~ 110 ~

Variations du climat global depuis 540 millions d'années.

Au cours du quaternaire, l'amplitude thermique a été de l'ordre de 10 °C, mais avec des
hausses de température n'ayant jamais dépassé de plus de 4 °C la température
moyenne annuelle de la fin du XXe siècle.
En revanche pour les cycles plus anciens, comme durant le Permien, la température
moyenne globale a atteint 22 °C soit 8 °C de plus par rapport à la moyenne actuelle,
comme on peut le voir sur le graphique ci-contre. Durant ces périodes chaudes qui ont
duré plusieurs dizaines de millions d'années, la Terre était dépourvue de calottes
polaires.

Temps historiques

Explication détaillée du graphique (en). Les reconstitutions sont faites à partir de la


dendrochronologie, des mesures dans les glaciers entre autres.

À l'intérieur des grandes fluctuations climatiques terrestres, se trouvent des variations


plus brèves et plus limitées en intensité. Ainsi, au cours du dernier millénaire, est apparu
une période chaude aux Xe et XIe siècles appelée « optimum climatique médiéval » :
c'est l'époque où les navigateurs vikings découvrent et baptisent le Groenland
(littéralement « Pays vert ») et fondent des colonies à l'extrême sud de l'île. De même,
l'époque des Temps Modernes (1550-1850) connut une période de refroidissement que
les historiens appellent le « petit âge glaciaire » caractérisé par des hivers très rigoureux,
dont le terrible hiver 1708-1709. Cette année là, les céréales manquèrent dans la plus
grande partie de la France, et seuls la Normandie, le Perche et les côtes de Bretagne
ont pu produire assez de grain pour assurer les semences. Dans la région parisienne le
prix du pain atteignit, en juin 1709, 35 sous les neuf livres au lieu de 7 sous
ordinairement. De nombreux arbres gelèrent jusqu'à l'aubier, et la vigne disparut de
plusieurs régions de la France. Du 10 au 21 janvier, la température sous-abri se maintint
à Paris aux environs de -20 °C, avec des minima absolus de -23 °C les 13 et 14 janvier ;
le 11, le thermomètre s'abaissa jusqu'à -16 °C à Montpellier et -17 °C à Marseille[8].

Selon les reconstitutions[9] de températures réalisées par les climatologues, la dernière


décennie du XXe siècle et le début du XXIe siècle constituent la période la plus chaude
des deux derniers millénaires (voir graphique). Notre époque serait même un peu plus
chaude (de quelques dixièmes de degrés) que ne le fut l'optimum climatique médiéval.

Température moyenne de surface entre 1856 et 2005[10]


Les 10 années les plus chaudes entre 1880 et 2008[11]
Écarts par rapport
Années à la moyenne de
1961–1990
1 1998 +0,55 °C
2 2005 +0,48 °C
3 2003 +0,47 °C
4 2002 +0,46 °C
5 2004 +0,45 °C
~ 111 ~

6 2006 +0,42 °C
7 2001 +0,41 °C
8 2007 +0,40 °C
9 1997 +0,35 °C
10 2008 +0,32 °C

Les mesures terrestres de température réalisées au cours du XXe siècle montrent une
élévation de la température moyenne. Ce réchauffement se serait déroulé en deux
phases, la première de 1910 à 1945, la seconde de 1976 à aujourd'hui. Ces deux
phases sont séparées par une période de léger refroidissement. Ce réchauffement
planétaire semble de plus corrélé avec une forte augmentation dans l'atmosphère de la
concentration de plusieurs gaz à effet de serre, dont le dioxyde de carbone, le méthane
et le protoxyde d'azote.

L'élévation de la température moyenne du globe entre 1906 et 2005 est estimée à


0,74 °C (à plus ou moins 0,18 °C près), dont une élévation de 0,65 °C durant la seule
période 1956-2006[12].

La température moyenne planétaire de 2001 à 2007 est de 14,44°C soit 0,21°C de plus
de 1991 à 2000[13]. À ce rythme l'augmentation est de 2,5°C en 100 ans.

L'article controverses sur le réchauffement climatique détaille une polémique à propos de


la validité de ces mesures.

Observations liées au réchauffement climatique actuel

Plusieurs changements ont été observés dans le monde qui semblent cohérents avec
l'existence d'un réchauffement climatique planétaire. Cependant, le lien entre ce
réchauffement et les observations faites n’est pas toujours établi de façon sûre. En
France c'est l'ONERC qui coordonne les observations.

En 2005 et 2007 ont été atteints les records de minimum de l'étendue de la banquise
arctique.

Le climat

Selon le troisième rapport du GIEC, la répartition des précipitations s'est modifiée au


cours du XXe siècle. En particulier, les précipitations seraient devenues plus importantes
aux latitudes moyennes et hautes de l'hémisphère Nord, et moins importantes dans les
zones subtropicales de ce même hémisphère. D'autres experts estiment toutefois les
données actuelles trop rares et incomplètes pour qu'une tendance à la hausse ou à la
baisse des précipitations puisse se dégager sur des zones de cette ampleur [14]. On
observe également depuis 1988 une diminution notable de la couverture neigeuse
printanière aux latitudes moyennes de l'hémisphère nord. Cette diminution est
préoccupante car cette couverture neigeuse contribue à l'humidité des sols et aux
ressources en eau[12].

La fonte de la banquise
~ 112 ~

Plusieurs études indiquent que les banquises sont en train de se réduire. Le satellite
spécialisé CryoSat-2[15], qui sera mis en orbite en 2009 après l'échec du premier satellite
CryoSat en 2005, fournira des informations plus précises sur les quantités de glace
polaire.

En Arctique

Des observations par satellite montrent que ces banquises perdent de la superficie dans
l'océan Arctique[16]. Par ailleurs, un amincissement de ces banquises, en particulier
autour du pôle nord, a été observé[17]. L'âge moyen des glaces sur la période 1988-2005,
est passé de plus de six ans à moins de trois ans [18]. La réduction de l'étendue moyenne
de la banquise arctique depuis 1978 est de l'ordre de 2,7 % par décennie (plus ou moins
0,6 %), son étendue minimale en fin d'été diminuant de 7,4 % par décennie (plus ou
moins 2,4 %)[12]. Le réchauffement dans cette région est de l'ordre de 2,5 °C[19] (au lieu
de 0,7 °C en moyenne sur la planète), et l'épaisseur moyenne des glaces a perdu 40 %
de sa valeur entre les périodes 1958-1976 et 1993-1997[20]. 2007 marque un minimum de
la banquise en été[21]. Cette année-là, les observations satellitaires constatent une
accélération de la fonte de la banquise arctique, avec une perte de 20 % de la surface
de la banquise d'été en un an [22]. Les observations menées pendant l'expédition Tara
dirigée sous l'égide du programme européen Damoclès (Developping Arctic Modelling
and Observing Capabillities for Long-term Environmental Studies)[23] de septembre 2006
à décembre 2007 indiquent que les modifications entamées dans l'océan Arctique sont
profondes et irréversibles[24]. Par ailleurs, le Groenland a vu ses glaciers se réduire de
230 à 80 milliards de tonnes par an de 2003 à 2005, ce qui contribuerait à 10 % de
l'élévation du niveau des mers[25].

En Antarctique

En Antarctique, les mesures par satellites, faites depuis 1979 ne montrent pas
actuellement de diminution de surface, contrairement à la banquise Arctique [26].
Cependant, on observe un certain nombre de phénomènes exceptionnels. Ainsi,
3 500 km2 de la banquise Larsen B, (l'équivalent en surface des deux tiers d'un
département français), se sont fragmentés en mars 2002, les premières crevasses étant
apparues en 1987. Cette banquise était considérée comme stable depuis 10 000 ans[27].
Au mois d'avril 2009, la plaque Wilkins, dont la superficie était naguère de 16 000 km2
s'est également détachée[28].

Le recul des glaciers de montagnes

À quelques exceptions près[29], la plupart des glaciers montagnards étudiés sont en


phase de recul.

Les glaciers de l'Himalaya reculent rapidement et pourraient disparaître dans les


cinquante prochaines années, selon des experts réunis à Katmandou pour une
conférence sur le réchauffement climatique le 4 juin 2007[réf. nécessaire]. Les températures
dans cette région ont crû de 0,15 °C à 0,6 °C tous les 10 ans au cours des 30 dernières
années. De nombreux travaux[30] documentent ce recul et cherchent à l'expliquer. Un tel
recul semble tout à fait cohérent avec un réchauffement du climat. Cependant, cette
hypothèse n'est pas certaine, certains glaciers ayant commencé à reculer au milieu du
XIXe siècle[31], après la fin du petit âge glaciaire. L'avancée ou le recul des glaciers sont
récurrents et liés à de nombreux facteurs, parmi lesquels les précipitations ou le
phénomène El Niño jouent un rôle important. Par exemple le recul actuel de la mer de
~ 113 ~

Glace à Chamonix découvre des vestiges humains du Moyen Âge[32], preuve que le
glacier a déjà reculé davantage que de nos jours à une période historiquement proche.

Il faut également souligner la quasi-absence de données sur les glaciers himalayens.


Par exemple, des données fiables n'existent que pour 50 glaciers indiens, sur plus de
9 500.[33]

Il faut bien être conscient que l'affirmation selon laquelle les glaciers disparaissent
à cause d'un hypothétique réchauffement global occulte dans certains cas les
véritables processus qui en sont responsables. Ainsi, le réchauffement climatique
explique fort mal le retrait des glaciers du massif africain du Kilimandjaro, et celui
d'autres glaciers tropicaux.[34] En effet, la dynamique des glaciers est autrement plus
complexe que celle qui régit la fonte d'un simple glaçon au fond d'un verre d'eau, par
exemple. De nombreux paramêtres plus influents que la température moyenne globale
ont été récemment mis en évidence. D'autre part, on sait qu'il existe aussi un
mouvement inverse de progression de certains glaciers dans le monde, tels le
Vatnajökull, le plus grand glacier d’Europe situé en Islande, dont la surface a été
multipliée par 10 depuis le 11ème siècle.

Les pratiques agricoles

Le climat, et en particulier les températures, ont un effet sur la date des récoltes
agricoles. Dans de nombreux cas, les dates de vendanges sont régulièrement avancées,
comme en Bourgogne[35],[36],[37]. De plus ces phénomènes peuvent être décrits sur
plusieurs décennies car ces dates de vendanges ont été consignées dans le passé et
archivées. De tels documents sont utilisés pour déterminer les températures à des
périodes où les thermomètres n'existaient pas ou manquaient de précision. Un
réchauffement climatique depuis le XXe siècle est clairement établi par l'étude de ces
archives (ainsi, la date de début des vendanges à Châteauneuf-du-Pape a avancé d'un
mois en cinquante ans[38]).

Faune et flore

Chorologie

Plusieurs équipes de chercheurs ont observé une modification de l'aire de répartition de


différentes espèces animales et végétales. Dans certains cas, en particulier lorsque cette
aire se déplace vers le nord ou vers de plus hautes altitudes, le réchauffement climatique
planétaire est parfois proposé comme cause de ces modifications. Par exemple,
l'extension actuelle de l'aire de répartition de la chenille processionnaire du pin, qui a
atteint Orléans en 1992 et Fontainebleau en 2005, pourrait être due au réchauffement
climatique[39].

Le réchauffement des eaux et la masse corporelle des poissons

Une étude menée conjointement par le Centre français de recherche pour l'ingénierie de
l'agriculture et de l'environnement (Cemagref) et par l'Institut Leibniz pour les sciences
marines de Kiel, rendue publique le 20 juillet 2009 dans les Comptes-rendus de
l'Académie américaine des Sciences, a conclu que la masse corporelle de certains
poissons d'eau douce des fleuves et rivières européens (truites, barbeaux...), ainsi que
certaines populations de la mer Baltique et de la mer du Nord, a diminué en moyenne de
~ 114 ~

moitié en un quart de siècle, et ce en raison de l'élévation, due au phénomène de


réchauffement climatique, de la température des eaux[40].

Cyclones tropicaux

Le cyclone Catarina fut le premier à apparaître dans l'Atlantique Sud.

Le consensus scientifique dans le dernier rapport AR4 du GIEC est que l'intensité des
cyclones tropicaux va probablement augmenter (avec une probabilité supérieure à 66%).

Une étude publiée en 2005, remise en question depuis par une seconde étude, indique
une augmentation globale de l'intensité des cyclones entre 1970 et 2004, le nombre total
de cyclones étant en diminution pendant la même période[41],[42],[43]. Selon cette étude, il
est possible que cette augmentation d'intensité soit liée au réchauffement climatique,
mais la période d'observation est trop courte et le rôle des cyclones dans les flux
atmosphériques et océaniques n'est pas suffisamment connu pour que cette relation
puisse être établie avec certitude. La seconde étude publiée un an plus tard ne montre
pas d'augmentation significative de l'intensité des cyclones depuis 1986 [44],[45]. Ryan
Maue, de l'université de Floride, dans un article intitulé "Northern Hemisphere tropical
cyclone activity", observe pour sa part une baisse marquée de l'activité cyclonique
depuis 2006 dans l'hémisphère nord par rapport aux trente dernières années [46]. Il ajoute
que la baisse est probablement plus marquée, les mesures datant de trente ans ne
détectant pas les activités les plus faibles, ce que permettent les mesures d'aujourd'hui.
Pour Maue, c'est possiblement un plus bas depuis cinquante ans que l'on observe en
termes d'activité cyclonique.

Par ailleurs, les simulations informatiques ne permettent pas dans l'état actuel des
connaissances de prévoir d'évolution significative du nombre de cyclones lié à un
réchauffement climatique[47].

Le réchauffement des océans et l'élévation du niveau de la mer

Élévation du niveau de la mer[48].

On observe un réchauffement des océans, qui diminue avec la profondeur. On estime


que les océans ont absorbé à ce jour plus de 80 % de la chaleur ajoutée au système
climatique[12]. Ce réchauffement entraîne une montée du niveau de la mer par dilatation
thermique des océans. Différentes données obtenues à l'aide de marégraphes et de
satellites ont été étudiées. Leur analyse suggère que le niveau de la mer s'est élevé au
cours du XXe siècle de quelques dizaines de centimètres, et qu'il continue à s'élever
régulièrement. Le GIEC estime que le niveau de la mer s'est élevé de 1,8 mm par an
entre 1961 et 2003[49],[50]. Cette élévation du niveau de la mer peut aussi être observée
indirectement par ses conséquences sur l'environnement, comme c'est le cas au
Nouveau-Brunswick[51].

Dans le cadre du "système ARGO", 3000 balises automatiques ont été réparties dans
tous les océans en 2007 et permettront de suivre la température et la salinité des océans
jusqu'à 2000 mètres de profondeur. En Atlantique Nord, des chercheurs de l'Ifremer
Brest ont confirmé les tendances au réchauffement dans les couches de surface[52].

Causes
~ 115 ~

Origine humaine

Selon le GIEC, le réchauffement climatique est largement attribué à un effet de serre


additionnel dû aux rejets de gaz à effet de serre produits par les activités humaines, et
principalement les émissions de CO2[53],[54]. L’origine humaine des gaz à effet de serre est
confirmée entre autres par l'évolution des composantes isotopiques du carbone dans
l'atmosphère[12],[55]. Les concentrations actuelles de CO2 dépassent de 35 % celles de
l’ère préindustrielle, surpassant de loin les taux des 600 000 dernières années. Elles
sont passées de 280 ppm à l'époque pré-industrielle à 379 ppm en 2005, et celles de
méthane ont augmenté de 150 %[56].

On assiste à une augmentation de 40 % de la vitesse de croissance du CO2 dans


l'atmosphère, augmentant de +1,5 ppm par an de 1970 à 2000, et de +2,1 ppm par an
entre 2000 et 2007[57].

Des experts du GIEC ont confirmé le 2 février 2007 que la probabilité que le
réchauffement climatique soit dû à l’activité humaine est supérieure à 90 %[3]. Leurs
conclusions sont tirées des résultats d’expériences avec des modèles numériques. En
particulier, l’augmentation de la température moyenne mondiale depuis 2001 est en
accord avec les prévisions faites par le GIEC depuis 1990 sur le réchauffement induit par
les gaz à effets de serre. Enfin, un réchauffement uniquement dû à l’activité solaire
n’expliquerait pas pourquoi la troposphère verrait sa température augmenter et pas celle
de la stratosphère[12].

L’hypothèse d’un lien entre la température moyenne du globe et le taux de dioxyde de


carbone dans l’atmosphère a été formulée pour la première fois en 1894 par Svante
Arrhenius. Mais c’est en 1979, lors de la première conférence mondiale sur le climat, à
Genève, qu’est avancée pour la première fois sur la scène internationale l’éventualité
d’un impact de l’activité humaine sur le climat[58].

GIEC 2007

 49 milliards de tonnes équivalent CO2 sont émises annuellement par les activités
humaines
 La part due au secteur énergétique est de 25.9%
 suivie par l'industrie à 19.4%
 le secteur forestier à 17.4%
 La part due à l'agriculture est de 13.5%
 et les transports 13.1%

Effet de serre additionnel

L’effet de serre est un phénomène naturel : une partie du rayonnement infrarouge émis
par la Terre vers l’atmosphère terrestre reste piégée par les gaz dits « à effet de serre »,
qui augmentent ainsi la température de la basse atmosphère (troposphère). Ces gaz
sont essentiellement de la vapeur d'eau, et une infime partie est d’origine humaine. Sans
cet effet, la température de surface de la Terre serait en moyenne de -18 °C !
Actuellement ce phénomène naturel se renforce car la quantité de gaz à effet de serre a
augmenté ces dernières années, en particulier le CO2, naturellement en très faible
concentration dans l’atmosphère par rapport à la vapeur d’eau ou au diazote (N2), ce qui
~ 116 ~

déséquilibre le bilan radiatif de la Terre. Il a été prouvé par l’étude isotopique du carbone
dans l’air que cette augmentation des quantités de gaz à effet de serre est due à la
combustion de matière carbonée fossile.

Selon les conclusions du rapport de 2001 des scientifiques du GIEC, la cause la plus
probable de ce réchauffement dans la seconde moitié du XXe siècle serait le « forçage
anthropique », c’est-à-dire l’augmentation dans l’atmosphère des gaz à effet de serre
résultant de l’activité humaine[59]. Selon les prévisions actuelles, le réchauffement
planétaire se poursuivrait au cours du XXIe siècle mais son amplitude est débattue :
selon les hypothèses retenues et les modèles employés, les prévisions pour les 50
années à venir vont de 1,8 à 3,4 °C.

Confrontations des modèles et des observations

Comparaison des variations de température, observées et simulées, avec et sans


facteurs anthropiques (par rapport à la moyenne de la période 1901-1950).

Hypothèses

Les modèles numériques ont été utilisés pour estimer l’importance relative des divers
facteurs naturels et humains au travers de simulations menées sur des
supercalculateurs, pour identifier le ou les facteurs à l’origine de la brutale hausse de
température. Plusieurs hypothèses ont été testées :

1. les fluctuations cycliques de l’activité solaire ;


2. la rétention de la chaleur par l’atmosphère, amplifiée par les gaz à effet de serre ;
3. la modification de la réflectivité de la surface terrestre — l'albédo — par la
déforestation, l’avancée des déserts, l’agriculture, le recul des glaces, neiges et
glaciers, mais aussi par les cirrus artificiels créés par les traînées des avions et
l’étalement urbain ;
4. les émissions volcaniques.

Certaines de ces causes sont d’origine humaine, comme la déforestation et la production


de dioxyde de carbone par combustion de matière fossile. D’autres sont naturelles,
comme l’activité solaire ou les émissions volcaniques.

Résultats

Les simulations climatiques montrent que le réchauffement observé de 1910 à 1945 peut
être expliqué par les seules variations du rayonnement solaire (voir changement
climatique)[réf. nécessaire]. En revanche pour obtenir le réchauffement observé de 1976 à
2006 (voir graphique), on constate qu’il faut prendre en compte les émissions de gaz à
effet de serre d’origine humaine. Les modélisations effectuées depuis 2001 estiment que
le forçage radiatif anthropique est dix fois supérieur au forçage radiatif dû à des
variations de l’activité solaire, bien que le forçage dû aux aérosols soit négatif. Le point
essentiel est que le forçage radiatif net est positif[12].

Consensus scientifique
~ 117 ~

Un forçage radiatif positif est un renforcement de l’effet de serre et un réchauffement ; un


forçage radiatif négatif entraine un refroidissement (augmentation de l’albédo). Ceci
correspond à des calculs en tenant compte des concentrations dans l’atmosphère[60].

 Dans son rapport de 2001, le GIEC conclut que les gaz à effet de serre
anthropogéniques « jouent un rôle important dans le réchauffement global »[61].
 En 2003, l'American Geophysical Union affirme que « les influences naturelles ne
permettent pas d’expliquer la hausse rapide des températures à la surface du
globe »[62].
 Le 7 juin 2005, les académies des sciences des pays du G8[63] et celles des trois
plus gros pays en voie de développement consommateurs de pétrole [64] ont signé
une déclaration commune à Londres, affirmant que le doute entretenu par
certains à l'endroit des changements climatiques ne justifie plus l'inaction et qu'au
contraire, il faut « enclencher immédiatement » un plan d'action planétaire pour
contrecarrer cette menace globale[65].
 Enfin, en 2007, le 4e rapport du GIEC, annonce que la probabilité que le
réchauffement climatique soit dû aux activités humaines est supérieure à 90 %[3].

De nombreux scientifiques estiment même que ce rapport n'est pas assez clair et qu'il
faudrait dès maintenant un programme international pour réduire drastiquement les deux
sources principales de gaz à effet de serre, le transport routier et les centrales à
charbon[66].

Critiques de l'hypothèse d'une origine humaine

Article détaillé : Controverses sur le réchauffement climatique.

Bien qu'il existe un fort consensus dans la communauté scientifique sur le rôle
prédominant des activités humaines dans le réchauffement climatique du dernier demi-
siècle, sa probabilité étant estimée à plus de 90 %[3] par le dernier rapport du GIEC en
2007, des personnalités contestent tout ou partie de cette thèse et attribuent le
réchauffement à des causes naturelles[67], liées à l'activité du Soleil. Par ailleurs, des
critiques et controverses portent également sur les conséquences du réchauffement (voir
le paragraphe Poursuite du réchauffement climatique plus bas) et les actions à mener
pour lutter contre (voir la section Réponse des États plus bas).

Prévisions

Modèles climatiques

La prévision par les scientifiques de l’évolution future du climat est possible par
l'utilisation de modèles mathématiques traités informatiquement sur des
superordinateurs[68]. Ces modèles, dits de circulation générale, reposent sur les lois
générales de la thermodynamique et simulent les déplacements et les températures des
masses atmosphériques et océaniques. Les plus récents prennent aussi en
considération d'autres phénomènes, comme le cycle du carbone.

Ces modèles sont considérés comme valides par la communauté scientifique lorsqu'ils
sont capables de simuler des variations connues du climat, comme les variations
saisonnières, le phénomène El Niño, ou l'oscillation nord-atlantique. Les modèles les
~ 118 ~

plus récents simulent de façon satisfaisante les variations de température au cours du


XXe siècle. En particulier, les simulations menées sur le climat du XX e siècle sans
intégrer l'influence humaine ne rend pas compte du réchauffement climatique, tandis que
celles incluant cette influence sont en accord avec les observations[12].

Les modèles informatiques simulant le climat sont alors utilisés par les scientifiques pour
prévoir l'évolution future du climat, mais aussi pour cerner les causes du réchauffement
climatique actuel, en comparant les changements climatiques observés avec les
changements induits dans ces modèles par différentes causes, naturelles ou humaines.

Ces modèles sont l'objet d'incertitudes de nature mathématique, informatique, physique,


etc. Les trois principales sources d'incertitude mentionnées par les climatologues sont :

 La modélisation des nuages ;


 La simulation de phénomènes de petite échelle, comme les cellules orageuses,
ou l'effet du relief sur la circulation atmosphérique ;
 La modélisation de l'interface entre les océans et l'atmosphère.

De façon plus générale, ces modèles sont limités d'une part par les capacités de calcul
des ordinateurs actuels, et le savoir de leurs concepteurs d'autre part, la climatologie et
les phénomènes à modéliser étant d’une grande complexité. L'importance des
investissements budgétaires nécessaires sont aussi un aspect non négligeable de la
recherche dans le domaine du réchauffement climatique. Malgré ces limitations, le GIEC
considère les modèles climatiques comme des outils pertinents pour fournir des
prévisions utiles du climat.

Poursuite du réchauffement climatique

Pour les climatologues regroupés au sein du GIEC[69],[70] (IPCC en anglais),


l'augmentation des températures va se poursuivre au cours du XXIe siècle. L'ampleur du
réchauffement attendu le plus probable est de à 1,8 à 3,4 °C.

L'ampleur du réchauffement prévu est incertaine ; les simulations tiennent compte :

 des incertitudes liées aux modèles (voir plus haut) ;


 des incertitudes sur le comportement de l'humanité au cours du XXIe siècle.

Afin de prendre en compte ce dernier paramètre dans leurs prévisions, les climatologues
du GIEC ont utilisé une famille de 40 scénarios d'émission de gaz à effet de serre
détaillés dans le rapport SRES[71]. Dans certains scénarios, la croissance de la
population humaine et le développement économique sont forts, tandis que les sources
d’énergie utilisées sont principalement fossiles. Dans d’autres scénarios, un ou plusieurs
de ces paramètres sont modifiés, entrainant une consommation des énergies fossiles et
une production de gaz à effet de serre moindres. Les scénarios utilisés comme
hypothèse de travail pour l’élaboration du troisième rapport du GIEC (2001) ne prennent
pas en compte l’éventualité d’une modification intentionnelle des émissions de gaz à
effet de serre à l’échelle mondiale.
~ 119 ~

Les incertitudes liées au fonctionnement des modèles sont mesurées en comparant les
résultats de plusieurs modèles pour un même scénario, et en comparant les effets de
petites modifications des scénarios d’émission dans chaque modèle.

Les variations observées dans les simulations climatiques sont à l'origine d'un
éparpillement des prévisions de l'ordre de 1,3 à 2,4 °C, pour un scénario
(démographique, de croissance, de « mix énergétique mondial », etc.) donné. Le type de
scénario envisagé a un effet de l’ordre de 2,6 °C sur le réchauffement climatique simulé
par ces modèles et explique une bonne partie de la marge d’incertitude existant quant à
l’ampleur du réchauffement à venir.

Les prévisions d'augmentation de température pour l'horizon 2100 données par le GIEC
(SPM du AR4 2007) s'échelonnent de 1,1 à 6,3 °C. Les experts du GIEC affinent leurs
prévisions en donnant des valeurs considérées comme « les meilleures estimations », ce
qui permet de réduire la fourchette de 1,8 à 4,0 °C. Et en éliminant le scénario A1F1,
considéré comme irréaliste, l'augmentation de température serait comprise entre 1,8 et
3,4 °C.
Les quatre familles de
scénario[72],[73],[74] du
quatrième rapport et les
prévisions des hausses
de températures globales
moyennes en 2 100
Sourc Objectifs Objectifs
e: plus éco plus envir
GIEC[ nomique onnemen
70]
s taux
A1
Croissan
Globa B1
ce écono
lisatio Durabilité
mique ra
n environn
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de ho globale
: A1T/A1
mogè 1,1 —
B/A1Fl)
ne) 2,9 °C
1,4 —
6,4 °C
A2
Dévelop
Régio pement B2
nalisa économi Durabilité
tion que environn
(Mon avec une ementale
de hé orientatio locale
térog n région 1,4 —
ène) ale 3,8 °C
2,0 —
5,4 °C
~ 120 ~

Les scientifiques du GIEC considèrent que ces prédictions sont les meilleures
prédictions actuellement possibles, mais qu'elles sont toujours sujettes à des
réajustements ou à des remises en cause au fur et à mesure des avancées scientifiques.
Ils considèrent qu'il est nécessaire d'obtenir des modèles plus réalistes et une meilleure
compréhension des phénomènes climatiques, ainsi que des incertitudes associées.

Cependant, de nombreux climatologues pensent que les améliorations à court terme


apportées aux modèles climatiques ne modifieront pas fondamentalement leurs
résultats, à savoir que le réchauffement planétaire va continuer et que son ampleur sera
plus ou moins importante en fonction de la quantité de gaz à effet de serre émis par les
activités humaines au cours du XXIe siècle, et ce en raison de l'inertie des systèmes
climatiques à l'échelle planétaire.

Les derniers articles scientifiques montrent que l'année 1998 [75] a été la plus chaude de
toute l'histoire de la météorologie, que le réchauffement s'accélère — 0,8 °C en un
siècle, dont 0,6 °C sur les trente dernières années —, mais aussi d'après l'analyse de
sédiments marins, que la chaleur actuelle se situe dans le haut de l'échelle des
températures depuis le début de l'holocène, c’est-à-dire 12 000 ans[76].

Conséquences environnementales prévues

Les modèles utilisés pour prédire le réchauffement planétaire futur peuvent aussi être
utilisés pour simuler les conséquences de ce réchauffement sur les autres paramètres
physiques de la Terre, comme les calottes de glace, les précipitations ou le niveau des
mers. Dans ce domaine, un certain nombre de conséquences du réchauffement
climatique sont l'objet d'un consensus parmi les climatologues.

La montée des eaux

Une des conséquences du réchauffement planétaire sur lesquelles s'accordent les


scientifiques est une montée du niveau des océans. Deux phénomènes engendrent cette
élévation :

 l'augmentation du volume de l'eau due à son réchauffement (dilatation


thermique) ;
 l'apport d'eau supplémentaire provenant de la fonte des calottes glaciaires
continentales.

Selon le troisième rapport du GIEC, le niveau de la mer s'est élevé de 0,1 à 0,2 m au
XXe siècle. La montée du niveau des eaux est due principalement au réchauffement des
eaux océaniques et à leur dilatation thermique. L'effet de la fonte des glaciers ne se
ferait sentir qu'à beaucoup plus long terme, et celle des calottes polaires à l'échelle de
plusieurs siècles ou millénaires[77]. De même que pour les températures, les incertitudes
concernant le niveau de la mer sont liées aux modèles, d'une part, et aux émissions
futures de gaz à effet de serre, d'autre part.

L'élévation entre 1993 et 2003 est estimée à 3,1 mm par an (plus ou moins 0,7 mm)[12].
L’élévation prévue du niveau de la mer en 2100 est de 18 à 59 cm, selon le 4e rapport du
GIEC[78]. Elle pourrait être de 2 mètres en 2300.
~ 121 ~

Une montée des eaux de quelques centimètres n'a pas d'impact très visible sur les côtes
rocheuses, mais peut avoir des effets très importants sur la dynamique sédimentaire des
côtes plates : dans ces régions, qui sont en équilibre dynamique, la montée des eaux
renforce les capacités érosives de la mer, et déplace donc globalement l'équilibre vers
une reprise de l'érosion qui fait reculer les côtes. La montée du niveau moyen de la mer
a ainsi des effets beaucoup plus importants que la simple translation de la ligne de côte
jusqu'aux courbes de niveau correspondantes.

Les précipitations

Selon le dernier rapport du GIEC, une augmentation des précipitations aux latitudes
élevées est très probable tandis que dans les régions subtropicales on s'attend à une
diminution, poursuivant une tendance déjà constatée[79], de sorte qu'à l'horizon 2025, un
tiers de la population mondiale pourrait se trouver en état de stress hydrique[80].

La circulation thermohaline

La circulation thermohaline désigne les mouvements d'eau froide et salée vers les fonds
océaniques qui prennent place aux hautes latitudes de l’hémisphère nord. Ce
phénomène serait, avec d'autres, responsable du renouvellement des eaux profondes
océaniques et de la relative douceur du climat européen.

En cas de réchauffement climatique, le moteur qui anime les courants marins serait
menacé. En effet, les courants acquièrent leur énergie cinétique lors de la plongée des
eaux froides et salées, et donc denses, dans les profondeurs de l'océan Arctique. Or,
l'augmentation de la température devrait accroître l'évaporation dans les régions
tropicales et les précipitations dans les régions de plus haute latitude. L'océan
Atlantique, en se réchauffant, recevrait alors plus de pluies, et en parallèle la calotte
glaciaire pourrait partiellement fondre (voir Événement de Heinrich)[81]. Dans de telles
circonstances, une des conséquences directes serait un apport massif d’eau douce aux
abords des pôles, entraînant une diminution de la salinité marine et donc de la densité
des eaux de surface. Cela peut empêcher leur plongée dans les abysses océaniques.
Ainsi, les courants tels que le Gulf Stream pourraient ralentir ou s'arrêter, et ne plus
assurer les échanges thermiques actuels entre l'équateur et zones tempérées. Pour le
XXIe siècle, le GIEC considérait dans son rapport 2007 comme très probable un
ralentissement de la circulation thermohaline dans l'Atlantique, mais comme très
improbable un changement brusque de cette circulation[82].

Selon certaines thèses[réf. nécessaire], un phénomène d'arrêt du Gulf Stream, dû au


réchauffement climatique, pourrait engendrer un effet paradoxal : par son inégale
distribution de la chaleur, une ère glaciaire en Europe et dans les régions à hautes
latitudes. En effet, l'Europe se situe à la même latitude que le Québec, et la seule
différence de climat semble résider dans le fait que l'Europe profite de l'apport thermique
du Gulf Stream[réf. nécessaire]. L’équateur, à l'inverse, accumulerait alors de la chaleur
stimulant de ce fait la formation continuelle d'ouragans amenant des précipitations de
grande ampleur.

Cette hypothèse d'un refroidissement de l'Europe qui suivrait le réchauffement global


n'est cependant pas validée. En effet, il n'est nullement établi que le Gulf Stream soit la
seule cause des hivers doux en Europe. Ainsi, Richard Seager a publié en 2002 une
étude scientifique sur l'influence du Gulf Stream sur le climat[83]. Ses conclusions sont
sans appel : l'effet du Gulf Stream est, selon lui, un mythe et a un effet mineur sur le
~ 122 ~

climat en Europe. La différence entre les températures hivernales entre l'Amérique du


Nord et l'Europe est due au sens des vents dominants (vent continental glacial du nord
sur la côte Est de l'Amérique du Nord et vent océanique de l'ouest en Europe) et à la
configuration des Montagnes Rocheuses. Même en cas d'arrêt du Gulf Stream, le climat
de l'Europe occidentale serait comparable à celui de la côte Ouest des États-Unis plutôt
qu'à celui de la côte Est[84].

Glaces et couverture neigeuse

Changement de l'accumulation des neiges au sommet du Kilimandjaro : première photo


prise le 17 février 1993, seconde le 21 février 2000. Le Kilimandjaro a perdu 82 % de
son glacier durant le XXe siècle et celui-ci devrait disparaitre en 2020[85]. Le recul des
glaciers de montagne, notamment à l'Ouest de l'Amérique du Nord, en Asie, dans les
Alpes, en Indonésie, en Afrique (dont le Kilimandjaro), et dans des régions tropicales et
subtropicales d'Amérique du Sud, a été utilisé comme preuve qualitative de l'élévation
des températures globales depuis la fin du XIX e siècle par le GIEC dans son rapport de
2001.[86],[87]. Le cas particulier des glaces du Kilimandjaro, qui a été controversé [88],[89], a
été remis en question dans le rapport du GIEC de 2007 et est un bon exemple de la
complexité du réchauffement climatique et de la circonspection nécessaire dans
l'analyse des données.

Les scientifiques du GIEC prévoient, pour le XXIe siècle une diminution de la couverture
neigeuse, et un retrait des banquises. Les glaciers et calottes glaciaires de l'hémisphère
nord devraient aussi continuer à reculer, les glaciers situés à moins de 3 400 m d'altitude
pouvant être amenés à disparaître[90].

En revanche, l'évolution de la calotte glaciaire antarctique au cours du XXI e siècle est


plus difficile à prévoir.

Une équipe de chercheurs a récemment mis en évidence un lien entre l'activité humaine
et l'effondrement de plates-formes de glace dans l'Antarctique [91]. Les réchauffements
locaux seraient dus à un changement de direction des vents dominants, cette
modification étant elle-même due à l'augmentation de la concentration de l'air en gaz à
effet de serre et la dégradation de la couche d'ozone en Antarctique à cause des CFC
d'origine humaine[92].

Toutefois, selon une lettre envoyée au journal Nature, ces réchauffements ne


s'observent que localement. En effet, l'Antarctique connait globalement un climat de plus
en plus froid et sa couverture glacée est en expansion, les élévations de la température
dans ces secteurs très froids se révélant favorables à une augmentation des
précipitations neigeuses donc à terme, à une augmentation des volumes de glace[93].

Cependant, la quantité de glace de l'Antarctique déversée dans les mers a augmenté de


75 % durant les dix années précèdant 2008[93]. Ce phénomène risque de s'amplifier en
raison de la disparition de la banquise qui cesse alors d'opposer un obstacle au
déversement des glaciers dans l'océan[27].

Conséquences brusques ou irréversibles, et prospectives

Le quatrième rapport d'évaluation du GIEC énonce que « le réchauffement anthropique


de la planète pourrait entraîner certains effets qui sont brusques ou irréversibles, selon le
rythme et l'ampleur des changements climatiques »[94].
~ 123 ~

 La perte partielle des glaciers polaires pourrait impliquer plusieurs mètres


d'élévation du niveau des mers, des changements majeurs dans les côtes et des
inondations dans les zones basses, avec des effets plus grands dans les deltas et
les îles de faible altitude. Ces phénomènes s'étendraient sur plusieurs millénaires
mais il n'est pas exclu que le niveau de la mer s'élève plus rapidement que prévu,
en quelques siècles[94].

 Environ 20 à 30 % des espèces évaluées à ce jour sont susceptibles d'être


exposées à un risque accru d'extinction si l'augmentation du réchauffement
mondial moyen dépasse 1,5 à 2,5 °C (par rapport à 1980 - 1999). Avec une
augmentation de la température mondiale moyenne supérieure d'environ 3,5 °C,
les projections des modèles indiquent des extinctions (de 40 à 70 % des espèces
évaluées) dans le monde entier[94]. En juin 2008, les États-Unis ont inscrit l'ours
blanc d'Alaska sur la liste des espèces menacées[95].

 Certains, comme le climatologue James Hansen, estiment que « la Terre pourrait


avoir dépassé le seuil dangereux de CO2, et la sensibilité de la planète au
dioxyde de carbone est bien plus importante que celle retenue dans les
modèles[96] ».

Des visions prospectives optimistes et moins optimistes cohabitent en 2009 : certains


insistent sur le fait que les solutions techniques existent, et qu'il ne reste qu'à les
appliquer (les maisons pourraient être isolées, et produire plus d'électricité qu'elles n'en
consomment, les transports maîtrisés, les villes pourraient être plus autonomes et
dépolluer l'air[97]). Au contraire, d'autres — tout en invitant à appliquer au plus vite ces
solutions voire une décroissance soutenable et conviviale — réalertent, constatent que
de 1990 à 2009, la tendance a été la réalisation des fourchettes hautes d'émission de
gaz à effet de serre, conduisant aux scénarios-catastrophe du GIEC [98], et estiment qu' il
est temps de cesser de parler de « changement » pour décrire une catastrophe[99].

Des phénomènes à très long terme

La majorité des climatologues pensent que les phénomènes induits par l'émission des
gaz à effet de serre vont se poursuivre et s'amplifier. Le troisième rapport du GIEC
insiste en particulier sur les points suivants :

 certains gaz à effet de serre, ont une espérance de vie longue, et influent donc
sur l'effet de serre longtemps après leur émission (durée supérieure à 1 000 ans
pour le CO2 selon le quatrième rapport) ;
 de par l'inertie du système climatique, le réchauffement planétaire se poursuivra
après la stabilisation de la concentration des gaz à effet de serre. Ce
réchauffement devrait cependant être plus lent ;
 l'inertie, plus grande encore, de la masse océanique fait que l'élévation du niveau
des mers se poursuivra même après la stabilisation de la température moyenne
du globe. La fonte de calottes glaciaires, comme celle du Groenland, sont des
phénomènes se déroulant sur des centaines voire des milliers d'années[77].

Les récentes observations dans la zone arctique menées sous l'égide du programme
européen Damoclès (Developping Arctic Modelling and Observing Capabillities for Long-
term Environmental Studies) ont créé une véritable surprise dans le monde scientifique.
En effet, celles-ci montrent une différence importante avec les prévisions issues des
~ 124 ~

différents modèles et sur lesquelles sont basées les conclusions du GIEC : ceci se
traduit par une nette accélération des effets dus à l'augmentation des gaz à effet de
serre en Arctique (fonte totale de la banquise en été d'ici 2020) [100],[101].

Rétroactions

Les scientifiques nomment ainsi des emballements du système climatique lorsqu'un seuil
est dépassé. On parle aussi de bombe à carbone. De telles rétroactions ont déjà été
observées lors de précédents réchauffements climatiques, à la fin d'une ère glaciaire ; le
climat peut ainsi, en quelques années, se réchauffer de plusieurs degrés. Un exemple
concerne les hydrates de méthane. Le méthane (CH4, qui n'est autre que le gaz naturel,
à quelques « impuretés » près), est un gaz à effet de serre 23 fois plus réchauffant que
le CO2. Il se forme lorsque la décomposition de la matière organique s'effectue avec un
manque d'oxygène, et sous l'action de bactéries, un processus nommé méthanisation.
Les sols humides (marais) sont très propices à cette création de méthane, qui est alors
libéré dans l'atmosphère (cela peut donner lieu à des inflammations spontanées et l'on
peut observer des feux follets). Si le sol est gelé, le méthane reste piégé dans la glace
sous la forme d'hydrates de méthane. Le sol de Sibérie est ainsi un immense réservoir
de méthane (sans doute trop diffus pour être exploité industriellement) : le département
des études géologiques des États-Unis a évalué que ce réservoir pouvait être de la
même ampleur que tout le gaz, le pétrole et le charbon réunis. Cependant, le magazine
Science & Vie d'avril 2006 donnait plutôt comme valeur 1 400 Gt, comparativement à
5 000 Gt pour l'ensemble des combustibles fossiles. Si le sol se réchauffe, la glace fond
et libère le méthane déjà présent initialement, ce qui a pour conséquence un effet de
serre plus marqué, et par suite un emballement du réchauffement climatique, qui fait
fondre la glace encore plus vite… D'où le nom de rétroaction.

Une autre rétroaction serait le ralentissement et la modification des courants océaniques.


L'océan capte aujourd'hui le tiers du CO2 émis par les activités humaines. Mais si les
courants océaniques ralentissent, les couches d'eau superficielles peuvent se saturer en
CO2 et ne pourraient plus en capter comme aujourd'hui. La quantité de CO2 que peut
absorber un litre d'eau diminue à mesure que l'eau se réchauffe. Ainsi, de grandes
quantités de CO2 peuvent être relarguées si les courants océaniques sont modifiés. En
outre, l'accumulation de CO2 dans les océans conduit à l'acidification de ces derniers, ce
qui affecte l'écosystème marin et peut induire à long terme un relargage de CO2.

Les moteurs de la circulation océanique sont de deux types : l'eau en se rapprochant des
pôles se refroidit et devient donc plus dense. De plus, l'eau de mer qui gèle rejette son
sel dans l'eau liquide (la glace est constituée d'eau douce), devenant au voisinage des
calottes glaciaires encore plus dense. Cette eau plonge donc et alimente la pompe :
l'eau plus chaude de la surface est aspirée. L'eau du fond (froide) remonte dans les
zones des tropiques et / ou équatoriales et se réchauffe, ceci en un cycle de plus de
1 000 ans.

Si les calottes de glace fondent, la pompe se bloque : en effet, l'eau qui plonge provient
de la calotte et non plus de l'eau refroidie en provenance des tropiques. Un effet similaire
est observé si les précipitations augmentent aux hautes latitudes (ce qui est prévu par
les modèles) : l'eau qui plongera sera l'eau douce de pluie. À terme, une forte
perturbation du Gulf Stream est envisageable.

Conséquences du réchauffement climatique sur l'homme et la biosphère


~ 125 ~

Au-delà des conséquences directes, physiques et climatiques, du réchauffement


planétaire, celui-ci influera sur les écosystèmes, en particulier en modifiant la
biodiversité. D'après le GIEC, la capacité de nombreux écosystèmes à s'adapter
naturellement sera probablement dépassée par la combinaison[102] sans précédent des :

 bouleversements climatiques : inondations, incendies de forêts, sècheresses,


insectes, acidification des océans ;
 changements mondiaux : changements d'affectation des sols (déboisement,
barrages, etc.), pollution, surexploitation des ressources.

Le déséquilibre naturel qui s'en suivra pourrait entraîner la disparition de plusieurs


espèces animales et végétales. C'est une préoccupation dont les États, comme la
France[103], commencent à tenir compte. Pour l'ensemble des populations humaines, ces
effets « physiques » et « écologiques » auront de fortes répercussions. La très grande
complexité des systèmes écologiques, économiques et sociaux affectés par le
réchauffement climatique ne permet pas de faire des prévisions chiffrées comme pour la
modélisation physique de la Terre.

Au niveau biologique et écologique, un consensus scientifique a été atteint sur les points
suivants :

 certaines espèces biologiques verront peut-être leur aire de répartition


augmenter, mais le bilan du réchauffement climatique en termes de biodiversité
sera négatif selon un certain nombre d'études[104],[105],[106] et selon le consensus du
4e rapport du GIEC qui envisage la disparition de 40 à 70 % des espèces
évaluées[94] ;
 certains systèmes naturels seront plus affectés que d'autres par le réchauffement
planétaire. Les systèmes les plus sensibles seraient : les glaciers, les récifs
coralliens, les mangroves, les forêts boréales et tropicales, les écosystèmes
polaires et alpins, les prairies humides. Le blanchissement des récifs coralliens a
été observé pour la première fois dès 1979 dans les Antilles [107]. Ce phénomène
s'est développé régulièrement dans l'espace et le temps à des échelles toujours
plus grandes, par exemple à l'échelle de l'océan Indien en 1998[réf. nécessaire]. Si le
réchauffement continue au rythme actuel, on craint une extinction de masse des
récifs coralliens à l'échelle planétaire à partir de 2015 / 2020 ;
 les dommages causés aux systèmes naturels, que ce soit par leur ampleur
géographique ou leur intensité, seront proportionnels à l’intensité et à la rapidité
du réchauffement planétaire.

Conséquences négatives pour l'humanité

Le GIEC prévoit des conséquences négatives majeures pour l'humanité au XXIe siècle :

 une baisse des rendements agricoles potentiels dans la plupart des zones
tropicales et subtropicales ;
 une diminution des ressources en eau dans la plupart des régions sèches
tropicales et subtropicales ;
 une diminution du débit des sources d'eau issues de la fonte des glaces et des
neiges, suite à la disparition de ces glaces et de ces neiges.
~ 126 ~

 une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes comme les pluies


torrentielles, les tempêtes et les sécheresses, ainsi qu'une augmentation de
l'impact de ces phénomènes sur l'agriculture ;
 une augmentation des feux de forêt durant des étés plus chauds ;
 l'extension des zones infestées par des maladies comme le choléra ou le
paludisme. Ce risque est fortement minimisé par le professeur spécialiste Paul
Reiter[108] mais le gouvernement du Royaume-Uni fait remarquer que ce
professeur a choisi d'ignorer tous les rapports récents qui le contredisent[109] ;
 des risques d'inondation accrus, à la fois à cause de l'élévation du niveau de la
mer et de modifications du climat ;
 une plus forte consommation d’énergie à des fins de climatisation ;
 une baisse des rendements agricoles potentiels aux latitudes moyennes et
élevées (dans l'hypothèse d'un réchauffement fort).

Conséquences positives pour l'humanité

Elles sont aussi associées au réchauffement prévu au XXIe siècle :

 une plus faible mortalité hivernale aux moyennes et hautes latitudes (par
opposition à une mortalité estivale plus élevée, comme par exemple la canicule
de 2003) ;
 une augmentation éventuelle des ressources en eau dans certaines régions
sèches tropicales et subtropicales mais une diminution des ressources dans les
régions tempérées (notamment dans les régions de climat méditerranéen) ;
 une hausse des rendements agricoles potentiels dans certaines régions aux
latitudes moyennes (dans l'hypothèse d'un réchauffement faible) ;
 l'ouverture de nouvelles voies maritimes dans l’arctique canadien suite à la fonte
des glaces dans le passage du Nord-Ouest[110].

Les conséquences en France

En ce qui concerne la France, l'élévation de température risque d'augmenter le nombre


de canicules en 2100[111]. Alors que le nombre de jours de canicule est actuellement de 3
à 10 par an, il pourrait s'élever à une moyenne de 20 à 40 en 2100, rendant banale la
canicule exceptionnelle de 2003[112],[113].

Les précipitations seraient plus importantes en hiver, mais moindres en été. Les régions
connaissant des durées de plus de 25 jours consécutifs sans pluie, actuellement limitées
au sud-est de la France, s'étendraient à la moitié ouest du territoire[114].

La végétation connaitrait une remontée vers le nord. L'épicéa risquerait de disparaitre du


Massif Central et des Pyrénées. Le chêne, très répandu dans l'Est de la France, verrait
son domaine réduit au Jura et aux Vosges, mais le pin maritime, actuellement implanté
sur la façade Ouest, s'étendrait sur la moitié ouest de la France et le chêne vert
s'étendrait dans le tiers sud, marquant une étendue du climat méditerranéen[115],[116].

Les cultures du midi méditerranéen, telles que celle de l'olivier, pourraient s'implanter
dans la vallée du Rhône. On peut désormais trouver des oliviers en tant qu'arbres
~ 127 ~

d'ornement sur toute la façade sud-ouest de l'océan Atlantique, et ce jusqu'en Vendée.


Par contre, faute d'eau suffisante, la culture du maïs serait limitée à la partie nord et
nord-est du territoire. Les céréales verraient leur rendement augmenter si l'élévation de
température ne dépasse pas 2 °C. Par contre, si elle était supérieure, les plantes
cultivées auraient du mal à s'adapter et on pourrait craindre des difficultés agricoles [117],
[118]
.

Les chutes de neige seront moins abondantes, entraînant un moindre


approvisionnement en eau des fleuves, mais également des difficultés d'ordre
économique pour l'économie de montagne. Par exemple, les stations de ski situées à
moins de 1 500 m d'altitude seraient amenées à fermer leurs pistes et à se
reconvertir[119].

Conséquences humaines du réchauffement climatique

Face au réchauffement climatique, l'Académie des Sciences américaine note, dans un


rapport de 2002[120] : « il est important de ne pas adopter d'attitude fataliste en face des
menaces posées par le changement de climat. (…) Les sociétés ont dû faire face à des
changements du climat graduels ou abrupts durant des millénaires et ont su s'adapter
grâce à des réactions diverses, telles que s'abriter, développer l'irrigation ou migrer vers
des régions plus hospitalières. Néanmoins, parce que le changement du climat est
destiné à continuer dans les prochaines décennies, dénier la possibilité d'événements
climatiques abrupts ou minimiser leur impact dans le passé pourrait s'avérer coûteux. ».

Nombre de chercheurs prédisent des conséquences désastreuses en cas d'un


réchauffement de 1,5 à 7 °C, mais la plupart estiment qu'en limitant le réchauffement
global à 1 °C, les conséquences seraient de grande ampleur mais resteraient
acceptables.

Submersion

La montée du niveau de la mer, due essentiellement à la dilatation thermique des


océans, est évaluée entre 18 et 59 cm d'ici 2100 par le 4e rapport du GIEC[78]. Elle
inquiète les populations de certaines îles de l'océan Pacifique ou de l'océan Indien qui
pourraient se voir complètement submergées. À ce phénomène de montée des eaux
s'ajoute un phénomène encore plus important de subduction (enfoncement des terres
dans l'Océan) (voir notamment l'article sur l'archipel des Tuvalu et les écoréfugiés).

Mais cette montée des eaux apparemment minime menace également les 20 % de la
population mondiale vivant sur les littoraux.

Agriculture et pêcheries

L'accroissement de l'évaporation devrait augmenter localement la pluviosité, sauf dans


les pays méditerranéens qui verraient la sècheresse s'accentuer[121], dans un contexte où
la violence et / ou la fréquence et gravité des aléas climatiques pourraient croître.

En zone tempérée (hors des zones arides qui pourraient le devenir encore plus) et
circumpolaire, dans un premier temps, la conjonction du réchauffement et de
l'augmentation du taux de CO2 dans l'air et les pluies pourrait accroître la productivité
des écosystèmes. L'agriculture du Nord des États-Unis, du Canada, de la Russie et des
~ 128 ~

pays nordiques pourraient peut-être en profiter[122], mais des signes de dépérissement


forestier semblent déjà visible dans ces zones.

Les satellites montrent que la productivité de l'hémisphère Nord a augmenté depuis


1982, du fait de ce réchauffement et de l'enrichissement de l'atmosphère en CO2, mais
aussi en partie à cause de l'eutrophisation des écosystèmes, les engrais d'origine
humaine (phosphates et nitrates notamment) étant entrainés là où ces substances
étaient beaucoup plus rares autrefois. L'augmentation de la biomasse n'est par ailleurs
pas nécessairement bénéfique et comporte le risque de s'accompagner d'une régression
de la biodiversité. Enfin, au-delà d'un certain seuil, les modèles du GIEC calés sur des
tests en laboratoire et en extérieur, prédisent qu'un taux de CO2 ne bénéficierait plus aux
plantes, les effets négatifs pouvant alors l'emporter.

Dans le sud de l'Amérique du Nord, de la Chine, du Japon et de l'Europe, de longues


sécheresses, avec des épisodes répétés de canicules pourraient induire des
phénomènes d'aridification puis de désertification et salinisation empêchant l'agriculture,
détruisant les récoltes ou les rendant très coûteuses.

De graves incendies pourraient massivement détruire les cultures (en 2007, le feu a
détruit en Grèce de vastes zones agricoles dont des oliveraies). Même sans incendies,
l'augmentation de l'évapotranspiration en été, liée à une productivité dopée par le CO2,
pourrait augmenter la sensibilité d'un milieu aux sécheresses et aggraver de ce fait le
risque d'incendies de forêts et de stress et maladies des arbres et des plantes cultivées.

Une augmentation de la biomasse totale ne compenserait probablement pas un recul


d'espèces cultivées, pêchées et chassées. Le bilan global ne peut à ce jour être estimé,
mais il pourrait être désavantageux, même dans les zones où les effets positifs se
feraient le plus sentir. Pour le GIEC, mis en balance avec les effets négatifs, ces
quelques aspects positifs ne permettent pas de considérer le réchauffement climatique
comme globalement bénéfique.

On ignore aussi à partir de quand les écosystèmes (marins notamment) réagiront


négativement à l'acidification des eaux qu'entraîne la dissolution de quantités
croissantes d'acide carbonique.

Le Comité économique et social européen dans son avis[123] du 3 février 2009 note que
des études comparatives concluent à un bilan de l'agriculture bio en moyenne meilleur
(au regard de la consommation de matières premières et d'énergie et au regard du
carbone stocké ou des émissions de gaz à effet de serre) que celui de l'agriculture dite
conventionnelle[124], même si l'on tient compte des rendements moindres de l'agriculture
bio, ce qui a justifié que le gouvernement allemand, l'intègre parmi les moyens de lutter
contre le changement climatique[125]). LE CESRE rappelle aussi qu'une agriculture
réorientée et adaptée pourrait selon divers spécialistes et ONG aussi contribuer à
tamponner ou freiner les effets du réchauffement (Cool farming)[126]). Le comité ne cite
pas les agrocarburants comme une solution, citant le climatologue Paul Crutzen selon
qui les émissions de protoxyde d'azote induites par la culture et production de biodiesel,
suffisent, dans certaines conditions à faire que le méthylester de colza puisse avoir des
effets climatiques pires que ceux du diesel fait avec du pétrole fossile[127]. Le comité[128],
pose aussi la question des fumures traditionnelles et se demande « si l'utilisation
intégrale des plantes, telle qu'elle est prévue dans le cadre des biocarburants de la
deuxième génération, ne risque pas de porter atteinte aux objectifs fixés en matière de
développement de la couche d'humus », c'est-à-dire de contribuer à encore épuiser la
~ 129 ~

matière organique des sols. Le comité repose la question de l'écobilan des biocarburants
en citant une étude comparative, de l'Empa[129] qui a conclu qu'une Volkswagen Golf
nécessitait 5 265 m2 de colza pour parcourir 10 000 km avec du biodiesel, alors que
37 m2 de panneaux solaires (1/140ème de la parcelle de colza précédente) suffirait à
produire assez d'électricité pour parcourir la même distance.

Forêt et sylviculture

Selon une étude récente[130], en 30 ans, un réchauffement moyen de 0,5 °C a déjà


doublé le taux de mortalité des arbres des grandes forêts de l'ouest américain, en
favorisant les sècheresses et pullulations de ravageurs (dont scolytes qui ont par
exemple détruit environ 1,4 million d'hectares de pins dans le nord-ouest du Colorado).
Le manque de neige induit un déficit hydrique et un allongement des sècheresses
estivales, avec multiplication des incendies, alertent les auteurs qui craignent des
impacts en cascade sur la faune et les écosystèmes. L'augmentation de la mortalité
touche des arbres (feuillus et conifères) de toutes les tailles et différentes essences et à
toutes les altitudes. Dans le nord-ouest américain et le sud de la Colombie britannique
(Canada), le taux de mortalité dans les vieilles forêts de conifères a même doublé en 17
ans (c'est une fois et demie plus rapide que la progression du taux de mortalité des
arbres des futaies californiennes où ce taux a été multiplié par deux en 25 ans).
L'accélération de la mortalité a été moindre dans les forêts de l'ouest ne bordant pas le
Pacifique (dans le Colorado et l'Arizona), mais « un doublement de ce taux de mortalité
finira par réduire de moitié l'âge moyen des arbres des futaies, entraînant une diminution
de leur taille moyenne », estime T Veblen qui craint aussi une moindre fixation du CO2
de l'atmosphère et qui appelle à « envisager de nouvelles politiques permettant de
réduire la vulnérabilité des forêts et des populations », notamment en limitant
l'urbanisation résidentielles dans les zones vulnérables.

En France, selon les prévision de l'INRA, plusieurs essences ne survivront pas dans la
moitié sud de la France et plusieurs ravageurs des arbres pourraient continuer remonter
vers le nord.

L'accès à l'océan Arctique

Une diminution des glaces polaires arctiques a ouvert de nouvelles routes commerciales
pour les navires[131], et rendrait accessibles des ressources sous-marines de pétrole ou
de matières premières, mais avec des conséquences néfastes sur nombre d'espèces,
comme le plancton ou les poissons à haute valeur commerciale.

L'accès à ces matières premières en des zones désormais accessibles risque d'être
source de conflit entre pays côtiers de l'océan Arctique [132]. Ainsi, les États-Unis et le
Canada ont-ils protesté lorsque, le 2 août 2007, la Russie planta son drapeau au fond de
l'océan sous le pôle Nord.

Économie

Un rapport de 700 pages de sir Nicholas Stern, économiste anglais, estime que le
réchauffement climatique entrainerait un coût économique de 5 500 milliards d'euros[133]
en tenant compte de l'ensemble des générations (présente et futures) ayant à en subir
les conséquences.
~ 130 ~

En 2007, pour la première fois, le World monuments fund (WMF, Fonds mondial pour les
monuments) a introduit les modifications climatiques dans la liste des menaces pour 100
sites, monuments et chefs-d’œuvre de l’architecture menacés, les autres menaces
principales étant les guerres et conflits politiques, et le développement industriel et
urbain anarchique.

Santé

Des conséquences des phénomènes climatiques sont redoutées, non seulement sur
l'économie, mais également sur la santé publique : le quatrième rapport du GIEC met en
avant certains effets sur la santé humaine, tels que « la mortalité associée à la chaleur
en Europe, les vecteurs de maladies infectieuses dans diverses régions et les allergies
aux pollens aux latitudes moyennes et élevées de l’hémisphère Nord »[134].

Les changements climatiques pourront modifier la distribution géographique de certaines


maladies infectieuses[135]. Des températures élevées dans les régions chaudes
pourraient réduire l'extension du parasite responsable de la bilharziose. Mais le
paludisme fait sa réapparition au nord et au sud des tropiques. Aux États-Unis, cette
maladie était en général limitée à la Californie, mais depuis 1990, des épidémies sont
apparues dans d'autres États, tels le Texas, la Floride, mais aussi New York. Il est
également réapparu dans des zones où il était peu fréquent, telles le sud de l'Europe et
de la Russie ou le long de l'océan Indien. On constate également que les moustiques et
les maladies qu'ils transmettent ont gagné en altitude[136].

Sous les climats tempérés, le réchauffement climatique réduirait le nombre de décès


induit par le froid ou les maladies respiratoires. Cependant, l'augmentation de la
fréquence des canicules estivales augmenterait le nombre de décès en été. Il est difficile
de savoir quel sera le bilan global, et si une diminution de l'espérance de vie en
découlera[137].

Une déstabilisation géopolitique mondiale

Selon un rapport de 2003 commandé par le Pentagone et selon un rapport de 2007 de


l'UNEP, le réchauffement climatique pourrait entraîner des phénomènes de
déstabilisation mondiale, avec des risques de guerre civile[138].

Réponses des États, collectivités, entreprises, citoyens face à la menace


climatique

La réalité du risque et du phénomène fait maintenant presque consensus. Nicholas


Stern, en 2006, reconnaissait lui-même avoir sous-estimé l’ampleur du problème[139],[140] :
« La croissance des émissions de CO2 est beaucoup plus forte que prévue, les
capacités d’absorption de la Planète se réduisent et la vitesse des changements
climatiques est plus rapide qu’envisagée. »

Face au problème, trois approches se complètent : lutte contre les émissions de GES,
puits de carbone, et adaptation.

L'effort international a d'abord visé à réduire le CO2 (gaz à longue durée de vie), alors
qu'une action urgente sur les polluants à courte durée (dont le méthane, l'ozone
troposphérique et le « carbone noir ») pourrait mieux réduire le réchauffement de
~ 131 ~

l'Arctique[141]. La réduction du CO2 est aussi importante, mais ses effets se feront sentir à
plus long terme (après 2100).

 La prospective éclaire les gouvernements, entreprises et individus, qui grâce à la


connaissance des tendances générales peuvent prendre des décisions politiques
et stratégiques plus pertinentes pour limiter les impacts du changement
climatique.

Les rapports du GIEC sont la principale base d'information et discussions, dont dans le
cadre du protocole de Kyoto et de ses suites (Bali, décembre 2007, etc.). L'augmentation
prévue de 1,5 à 7 °C pour le siècle à venir, pourrait être moindre si des mesures
environnementales sévères étaient prises ou qu'un réel compétiteur aux énergies
fossiles émergeait. En dépit des succès dans le secteur des énergies renouvelables, du
nucléaire et surtout d'un changement de mode de vie et de consommation, la recherche
n'a pas encore offert d'alternative à court terme aux carburants fossiles. Énergie
éolienne, énergie hydroélectrique, énergie géothermique, énergie solaire, méthanisation,
énergie hydrolienne, pile à combustible, énergie nucléaire, stockage géologique du
dioxyde de carbone sont néanmoins en rapide développement. Le gisement
d'économies d'énergie — les négawatts — est encore considérable.

 La société civile propose aussi des réponses, notamment via les campagnes et
actions de lobbying des ONG et associations locales.

En France, les ONG de protection de l’environnement et les associations concernées se


sont regroupées au sein du Réseau Action Climat (RAC).

Le réchauffement climatique devrait se traduire par un temps plus instable (vagues de


chaleur ou de froid, inondations ou sécheresse, tempêtes et cyclones)[142]. De plus,
d'après le GIEC, la capacité à s'adapter naturellement de nombreux écosystèmes sera
probablement dépassée, causant massivement l' extinction des espèces, par la
combinaison[143] sans précédent de :

 changements climatiques provoquant : incendies de forêts, augmentation


probable de l'intensité des cyclones, acidification des océans, déplacement des
espèces, fonte des glaciers et calottes polaires, impacts économiques et
géopolitiques majeurs.
 la pression humaine amplifiée par la surpopulation : régression et dégradation
des sols (déforestation, barrages, nouvelles cultures et organismes
génétiquement modifiés), pollution, surexploitation des ressources.

Par conséquent, afin de contrer les effets et les menaces du réchauffement climatique
les mesures à prendre devront concerner :

 la réduction des gaz à effets de serre par les gouvernements, les industriels, et
les citoyens (réduction ou substitution de l'emploi des sources de carbone) ;
 la réduction de la pression sur les écosystèmes dont la survie de l'homme dépend
car il se trouve au sommet de la chaîne alimentaire (pression due aux impacts
spectaculaires & aux actions plus discrètes mais multipliées par un très grand
nombre d'individus). Des mesures peuvent être prises en vertu du principe de
précaution mais sont rendues difficiles à cause de l'action des groupes de
pression et des différentes controverses sur le réchauffement climatique. On peut
~ 132 ~

en outre se poser la question de l'avenir du capitalisme, de sa course au profits


continuelle, et de notre insatiable appétit de consommation[144].

Le Protocole de Kyoto

Article détaillé : Protocole de Kyoto.

La Convention Cadre des Nations unies sur les changements climatiques a été signée
en 1992 lors du sommet de la terre à Rio de Janeiro. Elle est entrée en vigueur le 21
mars 1994. Elle a été ratifiée à ce jour par 192 États. Les parties à la convention cadre
sur les changements climatiques se sont fixés comme objectif de stabiliser la
concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère à « un niveau qui empêche
toute perturbation anthropique dangereuse du climat ». Les pays développés ont comme
objectif de ramener leurs émissions de gaz à effet de serre en 2010 au niveau de 1990,
cet objectif n'est pas légalement contraignant.

En 1997, les parties à la Convention cadre sur les changements climatiques des Nations
unies (UNFCCC) ont adopté le protocole de Kyoto, dont la nouveauté consiste à établir
des engagements de réduction contraignants pour les pays dits de l'annexe B (pays
industrialisés et en transition) et à mettre en place des mécanismes dit « de flexibilité »
(marché de permis, mise en œuvre conjointe et mécanisme de développement propre)
pour remplir cet engagement. Le protocole de Kyoto est entré en vigueur le 16 février
2005 suite à sa ratification par la Fédération de Russie.

En juillet 2006[145], le protocole de Kyoto a été ratifié par 156 États. Les États-Unis et
l'Australie (voir infra) ne sont pas signataires. Les États-Unis sont pourtant le deuxième
émetteur[146] (20 % des émissions de gaz à effet de serre). Les pays de l'annexe B se
sont engagés à réduire leurs émissions de six gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O, SF6,
HFC, PFC) de 5,2 % en 2008-2012 par rapport au niveau de 1990. Cet objectif
représente en réalité une diminution d'environ 20 % par rapport au niveau d'émissions
anticipé pour 2010 si aucune mesure de contrôle n'avait été adoptée. Les objectifs de
réduction par pays vont d'une réduction de 8 % pour l'Union européenne à une
possibilité d'augmentation de 10 % pour l'Islande.

Après la victoire des travaillistes aux élections législatives australiennes du 24 novembre


2007, le nouveau premier ministre Kevin Rudd a annoncé avoir ratifié le protocole de
Kyoto[147].

Des pays en voie de développement fortement contributeurs aux émissions comme


l'Inde, 5e émetteur mondial, et la Chine, 1re émettrice[148], n'ont pas d'objectifs de
réduction car ils étaient considérés comme insuffisamment industrialisés et parce que
leurs niveaux d'émissions ramenés au nombre d'habitants sont extrêmement faibles. Le
mécanisme dit « de développement propre » (MDP), instauré par le protocole de Kyoto,
permet aux investisseurs, en contrepartie d'un investissement propre dans un pays en
développement, de gagner des « crédits carbone ». Ce mécanisme permet aux pays
développés d’avoir accès aux réductions à bas coûts des pays en développement et
donc de diminuer le coût de leur engagement. Il permet aux pays en développement de
bénéficier d’investissements propres. Il encourage les transferts de technologie. Le MDP
apparait cependant insuffisant pour infléchir profondément les trajectoires d’émissions de
ces pays. L’absence d’engagement de réduction des pays en développement est une
des raisons avancées par les États-Unis pour justifier leur refus de ratifier le protocole.
~ 133 ~

C'est pourquoi un des enjeux majeurs pour la période après Kyōto est de définir des
modalités d'association de ces pays à l’effort commun de réduction.

L’UE, pionnière dans la lutte contre les émissions de CO2

L'Union européenne reste le 3e pollueur mondial après la Chine et les États-Unis, mais
dispose d'atouts pour lutter contre le réchauffement.

L'UE a lancé en 2005 le système communautaire d'échange de quotas d'émission (1er


marché de permis contraignant au niveau mondial). La Commission européenne va en
2007-2008 activer son observatoire de l'énergie, restée embryonnaire, et publier (prévu
en 2007) un « Livre vert » sur l'adaptation de l'UE au changement climatique, support de
débat avant une prise de décision en 2008. La Directive sur le système européen
d'échange de droits d'émission sera modifiée en 2008, pour inclure notamment les
émissions de l'aviation. La proposition sur les limites d'émission des voitures (120 g de
CO2 par km, soit 12 kg de CO2 pour 100 km[149]; rappelons que chaque automobile
parcourt en moyenne 15 000 km par an) devrait être publiée au second semestre de
2007. La DG Recherche doit proposer en novembre un plan européen, et des
propositions de législation sur les piles à combustibles et les avions « propres ». Des
appels d'offre sur l'énergie et le climat devraient être publiés avant mi 2007. Le 29 juin
2007, la commission publie et met en consultation un Livre vert sur la question et sur les
possibilités d'action de l'UECOM (2007) 354 final) [150]. Il prône à la fois l'adaptation et
l'atténuation, l'amélioration des connaissances (y compris sur les besoins et coûts
d’adaptation - Cf. 7e programme-cadre de recherche de l’UE (2007-2013)), l’élaboration
de stratégies et d’échanges de bonnes pratiques entre pays, de nouveaux produits
assurantiels (« dérivés climatiques », « obligations catastrophe », l’adaptation des
marchés européens des assurances (cf. directive « Solvabilité II ») et des fonds
« catastrophes naturelles » ainsi que des politiques agriculture et pêche, avec le
développement d’une solidarité interne à l’UE et avec les pays extérieurs touchés. 50
millions d'euros sont réservés par la Commission pour 2007-2010 pour favoriser le
dialogue et l’aide à des mesures d’atténuation et d’adaptation ciblées, dans les pays
pauvres.

La France a également (juillet 2007) publié une Stratégie nationale d’adaptation au


changement climatique[151] et envisagerait une gouvernance adaptée[152], notamment
dans le cadre du Grenelle de l'Environnement.

L'UE dispose de ressources en éolien terrestre et offshore (déjà 66 % de la puissance


éolienne installée dans le monde en 2006, essentiellement au Danemark qui produit
ainsi près de 40 % de sa puissance électrique) devant les États-Unis (16 %), l’Inde (8 %)
et le Japon (2 %), en technologies solaires et d'un tiers [153] du parc nucléaire mondial.
Cela la rend moins dépendante des énergies fossiles que la Chine et les États-Unis. La
France, pays le plus nucléarisé, reste cependant loin du record de 1961 quand 51 % de
son énergie électrique venait du renouvelable (hydroélectrique)[154].

L'UE encourage aussi tous les acteurs à préparer leur adaptation au changement
climatique[155].

Les États-Unis, pour ou contre Kyoto

Article détaillé : Protocole de Kyoto#Refus de l’administration Bush.


~ 134 ~

Deuxième pays pollueur derrière la Chine[156], les États-Unisvia l’administration de


George W. Bush refusent de présenter de nouveau en juillet 2005 le traité pour
ratification considèrant celui-ci comme un frein pour l’économie nationale et que le
combat contre le réchauffement climatique doit se faire non pas avec une simple
réduction des gaz à effet de serre, mais par une meilleure gestion de leur émission.

De nombreux États des États-Unis ont néanmoins pris des mesures de restriction sur les
gaz à effet de serre.

Lutte contre le réchauffement climatique aux États-Unis

Depuis 2001, les États du Texas, de la Californie, du New Hampshire, ont instauré un
dispositif de contrôle des émissions de gaz pour différents secteurs industriels et
énergétiques. Le dispositif adopté par la Californie, qui s'appliquera à partir de 2009,
prévoit réduire les émissions de gaz polluants de 22 % en moyenne d'ici 2012 et de
30 % d'ici 2016.

En outre, le principe des marchés des permis d’émission consiste à accorder aux
industriels « pollueurs » gratuitement, à prix fixe ou aux enchères, des quotas
d'émissions de CO2, que ceux-ci peuvent ensuite s'échanger. Chaque émetteur de CO2
doit alors vérifier qu’il détient autant de permis d'émission que ce qu'il va émettre. Dans
le cas contraire, il se trouve contraint ou bien de diminuer ses émissions, ou bien
d’acheter des permis. Inversement, si ses efforts de maitrise des émissions lui
permettent de posséder un excédent de permis, il peut les vendre.

De tels procédés ont été réalisés pour réduire les pluies acides aux États-Unis et ont
connu des succès (programme « Acid rain »). Ce système des marchés de permis
d’émission fait partie du dispositif du Protocole de Kyoto qui à la date de juillet 2006[13]
n'est toujours pas ratifié par les États-Unis.

En 2004, le sénateur républicain John McCain et le démocrate Joseph Lieberman


déposent un projet de loi visant à limiter les rejets dans l’atmosphère ; soutenu par les
grandes entreprises Alcoa, DuPont de Nemours et American Electric Power, il n’est
pourtant pas adopté.

Les États-Unis financent avec la Chine, le Japon, la Russie et l'UE, le projet ITER
(International Thermonuclear Experimental Reactor), projet de recherche sur la fusion
nucléaire contrôlée, mené à Cadarache (Sud de la France). Toutefois la production nette
d'énergie par fusion nucléaire chaude reste à l'état d'espoir lointain : les prévisions les
plus optimistes des partisans du projet parlent de plusieurs dizaines d'années. Certains
voient plus d'espoir dans la production d'énergie par réactions nucléaires en matière
condensée.

Le 8 juillet 2008, George Bush signe un texte engageant les États-Unis à réduire de
moitié des émissions des GES d'ici à 2050, à Toyako (Japon), dans le cadre d'une
réunion du G8.

Exemples à l’échelle des États et de villes américains

Éoliennes en Californie.
~ 135 ~

Les décisions pour réduire les émissions de CO2 sont prises par les états fédérés : en
2005, 18 de ces états obligeaient les producteurs d’électricité à utiliser en partie des
sources d’énergie renouvelables[157].

En 2005, les maires de 136 villes américaines, ont pris l'engagement d'appliquer les
normes du protocole de Kyoto et à réduire d'ici 2012 leurs émissions de gaz à effet de
serre de 7 % par rapport à 1990[158].

L'état du Nevada a pour objectif d'atteindre le seuil de 20 % de sa consommation en


énergie renouvelable, d'ici 2015, notamment grâce aux centrales solaires installées dans
le désert[159].

En outre, à l'initiative du maire de Seattle, 166 grandes villes américaines, dont New-
York et Boston, se sont engagées solennellement à respecter le protocole de Kyoto en
mars 2005.

Californie

Alors que la population californienne représente 12 % de la population américaine, elle


ne consomme que 7 % de l’électricité produite dans le pays ; ainsi, la Californie se
trouve à la première place pour la rentabilité énergétique par personne. L'État s'est
engagé à limiter les émissions de gaz à effet de serre : les objectifs annoncés sont une
diminution de 11 % avant 2010 et de 87 % avant 2050[157]. Le 30 août 2006, le
gouvernement et le Parlement de Californie signent un accord pour diminuer la
production de gaz à effet de serre, mettant l’État en conformité avec le protocole de
Kyoto[160]. La décision AB32 (Global Warming Solutions Act) a été prise de réduire d’un
quart les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 [161]. Des sanctions financières
seront prises contre les industries qui ne respectent pas cet engagement. Un marché de
permis d’émissions sera créé et contrôlé par l’Air Resources Board[162].

La Californie s'est aussi engagée à respecter des règles plus strictes sur la
consommation et les pots d'échappement de véhicules neufs ; cette politique est imitée
par deux autres États de l'Ouest : Washington et Oregon[163]. Le 20 septembre 2006, Bill
Lockyer le ministre de la Justice de Californie, lance des poursuites judiciaires contre
trois constructeurs automobiles américains et trois japonais, et leur demande des
dommages et intérêts pour la pollution qu'ils engendrent [164]. Selon lui, les véhicules
automobiles représentent 30 % des émissions de dioxyde de carbone de l'État.

En 2005, le gouverneur républicain Arnold Schwarzenegger proposait que le budget de


l'État de Californie finance à hauteur de 6,5 millions de dollars la construction de stations
pour les véhicules roulant à l’hydrogène.

Le code d'éducation de la Californie (chapitre IV, sections 8700 à 8784) insiste pour que
les élèves soient sensibilisés aux problèmes de l'environnement[165].

Énergies renouvelables en Californie

Grâce à son bon ensoleillement, la Californie développe l’énergie solaire : l’État abrite
des collecteurs cylindro-paraboliques dont la puissance atteint 80 MW, la plus grande
centrale à tour comme Solar one puis Solar 2 ne dépasse pas 10 MW.
~ 136 ~

Un projet de loi oblige les promoteurs immobiliers à installer un système d’énergie


solaire sur 15 % des nouvelles maisons construites en Californie à partir de 2006. Le
projet de loi prévoit que, d’ici 2010, 55 % des maisons seront équipées en panneaux
solaires. Le gouverneur Arnold Schwarzenegger avait fait campagne pour inciter à
installer des systèmes solaires dans la moitié des maisons de l’État à partir de 2005.

La centrale thermo-solaire Nevada Solar One est en construction depuis le 11 février


2006 à Boulder City. À terme, elle développera une puissance de 64 MW et sera la
troisième du monde[159]. Selon ses concepteurs, la centrale devrait permettre d'éliminer
un volume de pollution équivalent à la suppression d'un million de voitures en circulation
sur le territoire des États-Unis.

La Californie a adopté une loi qui contraint les grands groupes automobiles à vendre des
véhicules respectant des normes strictes de rejets de CO2.

La Californie est l’État où l’énergie éolienne est la plus développée avec une capacité de
production de plus de 2 040 MW installés en 2004, loin devant le Texas (1 293 MW)[166].
La principale région de production se trouve au nord de l'État, à l'est de San Francisco.

À 150 km au nord de San Francisco, 19 centrales géothermiques (350 puits) sont


contrôlées par la société Calpine dans les comtés de Lake et de Sonoma. Elles
produisent environ 850 mégawatts, presqu'autant qu'une petite centrale nucléaire.

Nouveaux pays industrialisés contre États-Unis

Les dix premiers pays émetteurs de CO2 dans le monde en 2006

Un point de débat est à quel degré les nouveaux pays industrialisés tel que l'Inde et la
Chine devraient restreindre leurs émissions de CO2. Les émissions de CO2 de la Chine
ont dépassé celles des États-Unis en 2007[167],[168] alors qu'elle ne produit que 5,4 fois
moins de richesses que l'UE ou les États-Unis [169], et elle n'aurait dû, en théorie, atteindre
ce niveau qu'aux alentours de 2020. En 2007, la Chine est le premier producteur et
consommateur de charbon, sa première source d'énergie, qui est extrêmement
polluante. De plus, l'augmentation du niveau de vie accroît la demande de produits
« énergivores » tels que les automobiles ou les climatisations.

La Chine a répondu qu'elle avait moins d'obligations à réduire [[Liste des pays par
émissions de dioxyde de carbone par habitant|ses émissions de CO2 par habitant]]
puisqu'elles représentent un sixième de celle des États-Unis [170]. L'Inde, également l'un
des plus gros pollueur de la planète a présenté les mêmes affirmations, ses émissions
de CO2 par habitants étant près de vingt fois inférieures à celle des États-Unis [171].
Cependant les États-Unis ont répliqués que s'ils devaient supporter le coût des
réductions de CO2, la Chine devrait faire de même[172]

Mesures individuelles de lutte contre le réchauffement climatique

L'humanité rejette actuellement 6 Gt (gigatonne = milliard de tonnes) d'équivalent


carbone par an dans l'atmosphère, soit environ une tonne par habitant. On estime que
les océans en absorbent 3 Gt et qu'il faudrait donc abaisser les émissions de gaz à effet
de serre de moitié pour arrêter d'enrichir l'atmosphère, ce qui représente une émission
moyenne de 500 kg d'équivalent carbone par habitant. Chaque Français en émet environ
deux tonnes, soit quatre fois plus qu'il ne faudrait[173]. En dehors de mesures collectives,
~ 137 ~

des personnalités ont esquissé les gestes quotidiens à mettre en œuvre, dès aujourd'hui,
pour limiter le réchauffement climatique comme Jean-Marc Jancovici[174] ou Al Gore[175].

Quelques mesures relèvent des économies d'énergie, en particulier des énergies


fossiles :

 éviter de prendre l'avion[176]. Un kilomètre en avion long courrier émet 60 g


d'équivalent carbone par personne[177] ; un voyage intercontinental représente
près des 500 kg d'équivalent carbone. A fortiori, pour les voyages court-courrier
(100 g d'équivalent carbone par kilomètre et par personne), préférer le train ;
 utiliser le moins possible les véhicules automobiles (préférer la bicyclette ou les
transports en commun chaque fois que possible). Une voiture émet entre 100 et
250 g d'équivalent CO2 par km parcouru, soit entre 30 et 70 g d'équivalent
carbone. 20 000 km par an représentent entre 600 et 1 400 kg d'équivalent
carbone. Si une automobile est nécessaire, choisir le modèle le moins polluant et
le plus efficace possible (par exemple, certains constructeurs ont annoncé des
véhicules consommant moins de 1,5 l pour 100 km[178],[179]) ;
 atteindre une isolation optimale des bâtiments, au mieux par le recours à
l'architecture bioclimatique qui réduit au maximum les besoins de chauffage
(15 kWh⋅m-2 par an, les anciennes maisons étant à 450 kWh⋅m-2 par an) et
supprime le besoin de climatisation active, tout en améliorant le confort de vie.

Voir aussi

Articles connexes  ONERC

 Effets du réchauffement climatique, Liens externes


aspects géopolitique et
économique Institutions ou organisations
 Adaptation aux changements internationales
climatiques
 Bilan Carbone Personnel  (fr) Le site du GIEC (IPCC en
 Changement climatique anglais).
 Gaz à effet de serre  (en)L'impact du changement
 Climat climatique en Europe, par l'Agence
 Controverses sur le réchauffement européenne de l'environnement.
climatique
 Crise écologique Institutions ou organisations
 Cycle du carbone françaises
 Énergie et effet de serre
 Énergie renouvelable  Le rapport du Sénat sur L'ampleur
 Environnement des changements climatiques, de
 Horloge de la fin du monde leurs causes et de leur impact
 Insolation possible sur la géographie de la
 Niveau de la mer (accompagné France à l'horizon 2005, 2050 et
d'une frise chronologique) 2100.
 Protocole de Kyoto  Le site du CNRS sur le climat.
 Risque naturel  Le site de la Mission
 Taxe carbone interministérielle sur l'effet de
 Traînée de condensation serre.
 Transgression marine
~ 138 ~

Groupes et associations  Jean Jouzel, Claude Lorius,


Dominique Reynaud : "Planète
 (fr)Dossier Greenpeace pour les blanche. Les glaces, le climat et
non-spécialistes l'environnement"(O. Jacob,
 (fr)Médiaterre Climat, portail 2008,ISBN 978-2-7381-1400-6)
d'actualité francophone sur le  Frédéric Durand : Le
climat réchauffement climatique en
débats (Ellipses, 2007, ISBN 978-
Bibliographie 2-7298-3153-0)
 Caroline De Malet : Climat en
 (fr) Frédéric Denhez, (2007), Atlas débats, pour en finir avec les
du réchauffement climatique, idées reçues (Lignes de repères,
Autrement, ISBN 978-2-7467- 2008, ISBN 978-2-915752-35-9)
0997-3  Bernard Francou et Christian
 (fr) W. Collins, R. Colman, J. Vincent : Les glaciers à l'épreuve
Haywood, M. Manning et Ph. Mote, du climat (IRD / Belin, 2007,
Réchauffement climatique, le ISBN 978-2-7011-4641-6)
temps des certitudes, (octobre  Frédérique Rémy : Histoire de la
2007), Pour la Science, n°360, Glaciologie (Vuibert, 2007, ISBN
p.68-75 978-2-7117-4016-1)
 (fr) Dossier Pour la Science,  Jean-François Deconinck :
(janvier-mars 2007), Climat, Paléoclimats (SGF / Vuibert,
comment éviter la surchauffe. 2007, ISBN 2 7117 5395 6)
 (fr)Václav Klaus, (2007), Une  Pascal Acot : Histoire du climat
planète bleue, pas verte, (ouvrage ( Perrin, 2009, ISBN 978 2262
remettant en cause l'origine 0302 85)
humaine du réchauffement  Edouard Bard ( sous la direction d') :
climatique) L'Homme face au climat ( O. Jacob,
 (fr) Mark Lynas (2005) Marée 2006, ISBN 2-7381-1660-4)
montante. Enquête sur le  Jean-Louis Fellous et Catherine
réchauffement de la planète - éd. Gautier : Comprendre le
Au diable vauvert (traduit de changement climatique ( O. Jacob,
l'anglais : High tide, news from a 2007, ISBN 978-2-7381-1845-5)
warming world).
 (fr) Hervé Le Treut, (2004), Jean- Filmographie
Marc Jancovici, L'effet de serre,
allons-nous changer le climat ?,  Une vérité qui dérange,
Flammarion, ISBN 2-08-080081-7 documentaire de Davis
 (fr)Les recherches françaises sur Guggenheim, commenté par Al
le changement climatique (2007, Gore sur le réchauffement
INSU / CNRS, 20 pages) climatique. Ce film a valu à Al Gore
 (fr)Jean-Marc Jancovici (2002) (et au GIEC qui lui a fourni les
L’Avenir climatique. Quel temps données scientifiques) le prix Nobel
ferons-nous ?, Science ouverte, de la Paix le 12 octobre 2007.
Seuil, ISBN 2-02-051235-1 Cependant, un juge de la haute cour
 (en) Spencer R. Weart, The de Londres a jugé que le film
Discovery of the Risk of Global comporte « 9 erreurs »[180] qui
Warming, Physics Today 50 (1): participent à un « climat d'alarmisme
34-40 (janvier 1997). À propos de et d'exagération » et que « la
l'histoire de la prise de science est utilisée par un homme
conscience du réchauffement politique et un orateur de talent pour
faire une déclaration politique et
~ 139 ~

soutenir un programme vivement contre la façon dont ses


politique »[181], tout en reconnaissant propos étaient utilisés.
la validité des arguments rendant les  Le Museum de paris et le GIS
gaz à effet de serre d'origine Climat-Environnement-Société
humaine responsable du ont produit de courtes vidéo
réchauffement climatique. Il l'a pédagoqiques sur le thème
autorisé à être diffusé dans les « Changement climatique et
écoles britanniques à la condition biodiversité »
d'être accompagné d'un document
évoquant les différentes thèses en
débat sur les neuf erreurs pointées.
 Climat en crise[182], documentaire
diffusé sur France5, libre de tous
droits. Ce reportage présente des
prédictions climatiques faites par un
super-calculateur (Japon) pour les
années à venir (année 2100 max).
Durée 50min.
 La 11ème Heure, le dernier
virage (The 11th hour) produit par
Leonardo DiCaprio et réalisé par
Nadia Conners et Leila Conners
Petersen[183]. Ce documentaire
jette un regard sur l'état de
l'environnement et donne des
solutions pour tenter de restaurer
l'écosystème planétaire, à travers
des rencontres avec une
cinquantaine de scientifiques,
intellectuels et leaders politiques.
Initialement prévu pour une
diffusion en salles, le
documentaire de Nadia Conners
et Leila Conners Petersen avait
en effet été rayé du planning des
sorties de la Warner, au profit
d'une exploitation en VOD (Video
On Demand), jugée plus en
adéquation avec les aspirations
écologiques du film. Sortie en
VOD, le 1er avril.
 Enfin, une vingtaine de
scientifiques de haut niveau
contestent les principaux
résultats du GIEC dans le film
The Great Global Warming
Swindle (La Grande Arnaque du
réchauffement climatique). Ce
film entraîna une vive réaction de
la Royal Society et du Met Office,
et l'un des scientifiques cités par
le film, C. Wunsch, protesta
140

Notes et références
1. ↑ Calque de l'anglais global warming, littéralement « réchauffement du globe »
2. ↑(en)The IPCC 4th Assessment Report is coming out A picture of climate change the
current state of understanding [archive], 2007, GIEC (IPCC en anglais). Consulté le
2008-07-30[pdf]
3. ↑ a , b , c et d Le rapport 2007 du GIEC [archive] utilise le terme « très probable ». cf
p.49 : « L’essentiel de l’élévation de la température moyenne du globe observée
depuis le milieu du XXe siècle est très probablement attribuable à la hausse des
concentrations de GES anthropiques. Cette constatation marque un progrès par
rapport à la conclusion du troisième Rapport d’évaluation, selon laquelle
l’essentiel du réchauffement observé au cours des 50 dernières années est
probablement dû à l’accroissement de la concentration de GES ». Le même texte,
p.37, précise les termes utilisés pour indiquer la probabilité estimée, selon les
experts, d’une donnée ou d’un résultat : « pratiquement certain (probabilité
supérieure à 99 %) ; extrêmement probable (probabilité supérieure à 95 %) ; très
probable (probabilité supérieure à 90 %) ; probable (probabilité supérieure à
66 %) ; plus probable qu’improbable (probabilité supérieure à 50 %) ; à peu près
aussi probable qu’improbable (probabilité de 33 % à 66 %) ; improbable
(probabilité inférieure à 33 %) ; très improbable (probabilité inférieure à 10 %) ;
extrêmement improbable (probabilité inférieure à 5 %) ; exceptionnellement
improbable (probabilité inférieure à 1 %). ». Ainsi, l’estimation du rôle probable de
l’homme dans le changement climatique a augmenté entre 2001 et 2007, puisque
dans le rapport de 2001, ce rôle n’était qualifié que de probable (likely). cf
[1] [archive]
4. ↑The Science Of Climate Change [archive]
5. ↑Joint science academies' statement: Global response to climate change [archive]
6. ↑(en)Holli Riebeek et Robert Simmon, « Paléoclimatologie : enregistrement des
données provenant de l'étude des carottes glaciaires. [archive] », 19 décembre
2005, Observatoire de la Terre, NASA. Consulté le 30 juillet 2008
7. ↑EPICA fait parler les carottes glaciaires de l'Antarctique [archive], 13/03/2008
8. ↑ M. Garnier, « Les hivers de 1400 -> 1800 [archive] », 1967, Mémorial de la
météorologie nationale, AlerteMétéo.com. Consulté le 2008-07-30. « Le lundi
7 janvier 1709, lit-on dans une chronique de l'époque, commença une gelée qui
fut ce jour-là la plus rude et la plus difficile à souffrir : elle dura jusqu'au 3 ou 4
février. Pendant ce temps là, il vint de la neige d'environ un demi-pied de haut :
cette neige était fort fine et se fondait difficilement. Quelques jours après qu'elle
fut tombée, il fit un vent fort froid d'entre bise et galerne (c'est-à-dire d'entre N et
NW) qui la ramassa sur les lieux bas, ils découvrirent les blés qui gelèrent
presque tous. »
9. ↑Constraints on the magnitude and patterns of ocean cooling at the Last Glacial
Maximum [archive] ; MARGO Project Members ; Nature Geosciences ; Février
2009
10. ↑(en)Welcome to Global Warming Art [archive], 18 juillet 2007, globalwarmingart.
Consulté le 2008-07-30
11. ↑(en)metoffice [archive]. Consulté le 2009-01-20
12. ↑ a , b , c , d , e , f , g , h et i W. Collins, R. Colman, J. Haywood, M. Manning et Ph. Mote,
« Réchauffement climatique, le temps des certitudes », dans Pour la Science,
no 360, octobre 2007, p. 68-75 [texte intégral [archive] (page consultée le 30 juillet
2008)].
141

13. ↑http://dieuetcreation.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/01/06/l-annee-2009-
pourrait-etre-une-des-plus-chaudes-de-notre-his.html [archive]
14. ↑(en)Joseph D’Aleo, M.Sc., Madhav Khandekar, Ph.D., William Kininmonth,
M.Sc., M.Admin., Christopher Essex, Ph.D., Wibjörn Karlén, Ph.D., Olavi Kärner,
Ph.D., Ian Clark, Ph.D., Tad Murty, Ph.D. et James J. O’Brien, Ph.D.,
« Independent Summary for Policymakers, IPCC Fourth Assessment
Report [archive] », 2007, Institut Fraser. Consulté le 2008-07-30. « There is no
globally-consistent pattern in long-term precipitation trends, snow-covered area,
or snow depth. Many places have observed a slight increase in rain and/or snow
cover. There is insufficient data to draw conclusions about increases in extreme
temperature and precipitation. », p. 7
15. ↑(en)Cryosat-2 [archive], 6, ESA. Consulté le 2008-07-30
16. ↑(en)Goddard Space Flight Center, « Arctic Sea Ice Continues to Decline, Arctic
Temperatures Continue to Rise In 2005 [archive] », 28, NASA. Consulté le 2008-
0730
17. ↑(en) D.A. Rothrock, Y. Yu et G.A. Maykut, « Thinning of the Arctic Sea-Ice
Cover », dans Geophysical Research Letters, vol. 26, no 23, 1er décembre 1999.
18. ↑(en)GRID-Arendal, « Change in the age of ice on the Arctic Ocean, comparing
September ice ages in 1988, 1990, 2001 and 2005 (évolution de l'âge moyen des
glaces polaires) [archive] », 2008, Maps and Graphics library, Programme des
Nations unies pour l'environnement. Consulté le 2008-07-30
19. ↑(en)GRID-Arendal, « Arctic temperature anomaly patterns (Anomalie de
température en Arctique) [archive] », 2008, Maps and Graphics library,
Programme des Nations unies pour l'environnement. Consulté le 2008-07-30
20. ↑(en)GRID-Arendal, « Thinning of the Arctic sea-ice (Diminution de l'épaisseur de
la banquise arctique) [archive] », 2008, Maps and Graphics library, Programme
des Nations unies pour l'environnement. Consulté le 2008-07-30
21. ↑ Voir [2] [archive], site de l'équipe de recherche sur l'arctique de l'université de
l'Illinois, et en particulier [3] [archive]
22. ↑(en)National Snow and Ice Data Center, « Vidéo en QuickTime de la fonte de la
banquise d'été, 2007 [archive] », NASA et NOAA. Consulté le 2008-07-30
23. ↑ [[4] [archive] Damocles], 01, Damocles. Consulté le 2009-01-04
24. ↑ Selon Tara, la fonte totale de la banquise en été interviendrait entre 2015 et
2020. Voir CONFERENCE DE PRESSE TARA DAMOCLES 30 OCTOBRE
2007 [archive], 30, Tara expéditions. Consulté le 2009-01-04 . Certains
observateurs, compte tenu de ces nouveaux résultats, envisagent une disparition
totale de la banquise d'été aux alentours de 2013. Voir (en)The big melt: lessons
from the Arctic summer of 2007 (Accélération de la fonte de la banquise en
2007) [archive], 8, CarbonEquity.info. Consulté le 2008-07-30
25. ↑ « Le Groenland perd 100 milliards de tonnes de glace par an », Le Monde
édition du 21 octobre 2006.
26. ↑ voir [5] [archive], site de l'équipe de recherche sur l'arctique de l'université de
l'Illinois, et en particulier [6] [archive]
27. ↑ a et b Robin Bell, « L'eau, une menace pour les calottes polaires », dans Pour la
Science, no 367, mai 2008, p. 60-66.
28. ↑http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/oceanographie-1/d/en-images-la-
plaque-wilkins-sest-separee-de-la-peninsule-antarctique_18859/ [archive]
29. ↑ Le « Perito Moreno » en Argentine, par exemple, est un des rares glaciers en
avancée. Les glaciers de Scandinavie et de Nouvelle-Zélande, soumis à
d'importantes précipitations neigeuses hivernales, sont également en expansion.
cf. Christian Vincent et Delphine Six, Les glaciers de montagne sont-ils menacés,
Dossier Pour la Science, Climat, comment arrêter la surchauffe ?, 2007, p.28-29
142

30. ↑ par exemple dans les Alpes [7] [archive] ou dans les Pyrénées [8] [archive]
31. ↑ Frédéric Denhez, Atlas du réchauffement climatique, Autrement, 40-41 p.
32. ↑ Louis Reynaud et Christian Vincent, « Histoire des fluctuations des glaciers en
remontant le Petit Age de Glace [archive] », Variations climatiques et hydrologie,
Laboratoire de Glaciologie et Géophysique de l'Environnement (Grenoble).
Consulté le 2008-07-30[pdf]
33. ↑article HindustanTimes.com [archive]
34. ↑(fr) Philip Mote - Georg Kasser - "Pour la Science n°362", décembre 2007, "Les
glaces du Kilimandjaro : Pourquoi elles ont régressé"
35. ↑Le réchauffement climatique récent en France : impact et conséquence sur la
culture des arbres fruitiers et de la vigne [archive], La recherche française sur le
climat, CNRS. Consulté le 2008-07-30
36. ↑Les dates de vendanges : un indicateur du climat du passé [archive], 18
novembre 2004, Communiqué de presse, CNRS. Consulté le 2008-07-30
37. ↑(en)CNRS, « Grape ripening as a past climate indicator », dans Nature, Brief
communicationsre série, vol. 432, 18 novembre 2004 [[pdf]texte intégral [archive]
(page consultée le 30 juillet 2008)].
38. ↑ Service technique Inter Rhône, « Évolution de la date de vendange à
Châteauneuf-du-Pape de 1945 à 2003. [archive] », Climat, CNRS. Consulté le
2008-07-30
39. ↑ Service Presse, « La chenille processionnaire du pin remonte vers le nord à la
vitesse moyenne de 55,6 km par décade [archive] », 2005, INRA. Consulté le
20080-07-30
40. ↑Le Monde, daté du mardi 28 juillet 2009, page 4
41. ↑(en) P.J. Webster, G.J. Holland, J.A. Curry et H.R. Chang, « Changes in Tropical
Cyclone Number, Duration, and Intensity in a Warming Environment », dans
Science, vol. 309, no 5742, septembre 2005 [texte intégral [archive] (page
consultée le 30 juillet 2008)]
42. ↑(en)Helen Briggs, « 'Warming link' to big hurricanes [archive] », 15, BBC News,
BBC. Consulté le 2008-07-30. « The debate is likely to continue, however, as
some scientists argue that the present hurricane surge is part of a 60 to 70-year
cycle linked to natural effects. They believe climate change due to human activity
will not significantly affect hurricanes and that damage caused by increased
development along coastlines is a bigger factor. »
43. ↑(en)Joseph D’Aleo, M.Sc., Madhav Khandekar, Ph.D., William Kininmonth,
M.Sc., M.Admin., Christopher Essex, Ph.D., Wibjörn Karlén, Ph.D., Olavi Kärner,
Ph.D., Ian Clark, Ph.D., Tad Murty, Ph.D. et James J. O’Brien, Ph.D.,
« Independent Summary for Policymakers, IPCC Fourth Assessment
Report [archive] », 2007, Institut Fraser. Consulté le 2008-07-30. « In the tropics,
there is evidence of increased cyclone intensity but a decrease in total tropical
storms, and no clear global pattern since 1970 », p. 7
44. ↑(en) Philip Klotzbach et Département des sciences de l'atmosphère, « Trends in
global tropical cyclone activity over the past twenty years (1986–2005) », dans
Geophysical Research Letters, Université d'État du Colorado, vol. 33, 20 mai
2006 [texte intégral [archive] lien DOI [archive] (pages consultées le 30 juillet
2008)][pdf]
45. ↑(fr)Orwell au pays des cyclones [archive], climat-sceptique.com. Consulté le
2008-07-30.
46. ↑(en)Global and Northern Hemisphere Tropical Cyclone Activity [still [archive]
lowest in 30-years], université de Floride. Consulté le 2009-03-29
143

47. ↑ Fabrice Chauvin et Jean-François Royer, L'intensité des cyclones augmente-t-


elle ?, Dossier Pour la Science, Climat, comment éviter la surchauffe ?, janvier-
mars 2007, p.35-38
48. ↑Global Warming Art [archive]
49. ↑(en)Climate Change 2007: Synthesis Report (Rapport 2007 du GIEC) [archive],
2007, GIEC, p. 8. Consulté le 2008-07-30
50. ↑L’élévation du niveau de la mer [archive], La recherche française sur le climat :
variabilité climatique, CNRS. Consulté le 2008-07-30
51. ↑Service météorologique du Canada, « Élévation du niveau de la mer au
Nouveau-Brunswick [archive] », Environnement Canada. Consulté le 2008-07-30
52. ↑ Voir [9] [archive]
53. ↑ Voir Evolution temporelle du dioxyde de carbone [archive] par le Laboratoire de
Glaciologie et Géophysique de l'Environnement (LGGE)
54. ↑ ar4, chapitre 7: Frequently Asked Question 7.1 page 512Are the Increases in
Atmospheric Carbon Dioxide and Other Greenhouse Gases During the Industrial
Era Caused by Human Activities? Yes, the increases in atmospheric carbon
dioxide (CO2) and other greenhouse gases during the industrial era are caused
by human activities.[10] [archive]
55. ↑ ar4, chapitre 2, page 139 : Thus, as shown in Prentice et al. (2001), when CO2
from fossil fuel combustion enters the atmosphere, the 13C/12C isotopic ratio in
atmospheric CO2 decreases at a predictable rate consistent with emissions of
CO2 from fossil origin. Note that changes in the 13C/12C ratio of atmospheric
CO2 are also caused by other sources and sinks, but the changing isotopic signal
due to CO2 from fossil fuel combustion can be resolved from the other
components (Francey et al., 1995). These changes can easily be measured using
modern isotope ratio mass spectrometry, which has the capability of measuring
13C/12C in atmospheric CO2 to better than 1 part in 105 (Ferretti et al., 2000).
Data presented in Figure 2.3 for the 13C/12C ratio of atmospheric CO2 at Mauna
Loa show a decreasing ratio, consistent with trends in both fossil fuel CO2
emissions and atmospheric CO2 mixing ratios (Andres et al.,2000; Keeling et al.,
2005).[11] [archive]
56. ↑(en)Climate Change 2007: Synthesis Report (Rapport 2007 du GIEC) [archive],
2007, GIEC, p. 15. Consulté le 2008-07-30[pdf]
57. ↑http://contreinfo.info/article.php3?id_article=1970 [archive]
58. ↑Événements marquants [archive], 2007, OMM. Consulté le 2008-07-30 entrée
pour l'année 1979
59. ↑(en)Climate Change 2001: Working Group I: The Scientific Basis (chapitre 12 :
les bases scientifiques) [archive], 2001, GIEC. Consulté le 2008-07-30. « Most of
the discussion in this section has been concerned with evidence relating to a
human effect on late 20th century climate. The observed global mean surface
temperature record shows two main periods of warming. Some studies detect a
solar influence on surface temperature over the first five decades of the century,
with perhaps a small additional warming due to increases in greenhouse gases.
One study suggests that the early warming could be due to a combination of
anthropogenic effects and a highly unusual internal variation. Thus the early
century warming could be due to some combination of natural internal variability,
changes in solar irradiance and some anthropogenic influence. The additional
warming in the second half-century is most likely to be due to a substantial
warming due to increases in greenhouse gases, partially offset by cooling due to
aerosols, and perhaps by cooling due to natural factors towards the end of the
period. »
144

60. ↑(en)Climate Change 2007: Synthesis Report (Rapport 2007 du GIEC) [archive],
2007, GIEC, p. 17. Consulté le 2008-07-30[pdf]
61. ↑rapport de 2001 [archive]
62. ↑ Elizabeth Kolbert, « L’Arctique en plein dégel », dans Courrier international,
no 766, 7 juillet 2005 [résumé [archive] (page consultée le 31 juillet 2008)].
63. ↑ l'Allemagne - Deutsche Akademie der Naturforscher Leopoldina, le Canada -
Société royale du Canada, les États-Unis d'Amérique - National Academy of
Sciences, la France - Académie des sciences, l'Italie - Accademia dei Lincei, le
Japon - Science Council of Japan, le Royaume-Uni - Royal Society, la Russie -
Académie des sciences de Russie
64. ↑ la Chine - Chinese Academy of Sciences, l'Inde - Indian National Science
Academy, le Brésil - Academia Brasileira de Ciencias
65. ↑ Académies des sciences de plusieurs pays, « Déclaration commune des
Académies des sciences sur la réponse globale au changement
climatique [archive] », 7 juin 2005, Institut de France, Académie des sciences.
Consulté le 2008-07-31[pdf]
66. ↑Science, « Urgence climatique », dans Nouvel Observateur, no 2247, 23
novembre 2007, p. 119.
67. ↑Report of the nongovernmental international panel on climate change [archive]
68. ↑ Hervé Le Treut, « La modélisation numérique du climat : un outil en pleine
évolution [archive] », 1er septembre 1998, École polytechnique fédérale de
Lausanne. Consulté le 2008-07-31
69. ↑ Le GIEC, (pour Groupement intergouvernemental sur l'évolution du climat), a
été créé en 1988 par le G7. Il est désormais un organisme de l'ONU et rassemble
plus de 3000 chercheurs agréés par plus de 140 États. Ce n'est pas un
laboratoire de recherche. Il réalise à intervalle régulier des rapports synthétisant
toutes les données sur le réchauffement planétaire. L'avant-dernier rapport
complet publié par le GIEC est paru en 2001. Un nouveau rapport, le quatrième,
est sorti en 2007. Son résumé destiné aux décideurs est disponible sur le site du
GIEC : Changements Climatiques 2007 Rapport de synthèse [archive]
70. ↑ a et b Site du GIEC [archive], GIEC. Consulté le 2008-08-01
71. ↑(en)Nebojsa Nakicenovic, et al., « Special report on Emission
Scenarios [archive] », Programme des Nations unies pour l'environnement.
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in most subtropical land regions (by as much as about 20% in the A1B scenario in
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