Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
et Territoires
Le présent recueil regroupe les contributions individuelles aux travaux du groupe thématique « Cadre Natu-
rel, Environnement et Territoires », constitué dans le cadre du processus d’élaboration du Rapport « 50 ans
de développement humain au Maroc et perspectives pour 2025 ».
Ce groupe de travail a été animé par M. Abdeladim LHAFI, membre de la Commission Scientifique du Rap-
port, et composé de Mme Amina BENKHADRA et MM. Ali AGOUMI, Mohamed BADRAOUI, Faiçal BEN-
CHEKROUN, Abdellatif BERRAHO, Ahmed BIROUK, Abdelfatah Mounir DEBBARH, Abdelhafid DEBBARH,
Ahmed EL ABBAOUI, Mohamed KSIKES, Abdellah LAOUINA, Mohamed MENIOUI, Omar MHIRIT et Hamid
NARJISSE. Le groupe a élaboré ces contributions afin d’approfondir des aspects particuliers de la dimension
thématique couverte et dans l’objectif de réunir les matériaux analytiques pour l’élaboration de son Rapport
thématique de synthèse. Ces contributions ont ainsi constitué principalement un support pour les débats
organisés au sein du groupe de travail, plutôt que des études exhaustives abordant l’ensemble des aspects
scientifiques et pratiques relevant de la dimension thématique étudiée.
Les contributions qui sont publiées ici ont fait l’objet d’un examen au sein du groupe thématique, mais ne
reflètent que les points de vue de leurs auteurs.
Il a été jugé utile de publier fidèlement la totalité de ces contributions. Cependant, n’ayant pas fait l’objet
d’un travail systématique d’harmonisation, des différences peuvent alors y être décelées tant au niveau des
données utilisées qu’au niveau des argumentaires déployés, ainsi que de leur degré de finalisation. En parti-
culier, les données statistiques et les références utilisées sont celles du moment où les contributions ont été
remises par les auteurs.
L’objectif principal de la publication de ces documents est de restituer la richesse du travail de recherche,
de documentation et de débat qui a caractérisé le processus d’élaboration du Rapport sur « 50 ans de déve-
loppement humain au Maroc et perspectives pour 2025 ». Mettre cette richesse à la disposition du lecteur,
c’est aussi rendre hommage aux compétences nationales, issues de l’université, de l’administration et de la
société civile, qui y ont contribué avec beaucoup d’engagement et de patriotisme.
Nous tenons à les remercier, et à travers eux toutes les personnes et administrations qui n’ont pas hésité à
mettre à leur disposition données, documents et divers supports.
Présentation
La segmentation du sujet a été raisonnée, par rapport aux questions que le groupe thématique « Cadre
Naturel, Environnement et Territoires » (CNET) a estimé constituer les points fondamentaux autour desquels
se mesureront les réussites ou les échecs face aux défis actuels et à venir en relation avec le développement
humain.
Le séquençage des sujets traités par les différents contributeurs, et leur périodisation sur les cinquante
dernières années, apportent à l’analyse, la nécessaire contextualisation des politiques et décisions majeures,
pour tenir compte des nuances et rendre le jugement plus objectif et les enseignements plus fiables pour la
construction des correctifs et des réajustements nécessaires pour construire le Maroc de 2025.
Le périmètre de la contribution du groupe CNET couvre les cinq secteurs suivants : i) les écosystèmes
(forestiers, péri forestiers et agropastoraux), ii) les ressources en eau et les bassins versants, iii) la biodiversité
et les équilibres écologiques, iv) le littoral et écosystème marin et les ressources naturelles du sol et du sous-
sol.
• Dresser l’état des lieux à travers un examen de la situation actuelle, et procéder à une comparaison
de la situation au lendemain de l’indépendance ;
• Procéder à une analyse cinétique des ressources, et reconstitution de l’utilisation des espaces,
en localisant les points d’inflexion majeurs dans la courbe d’évolution couvrant les 50 dernières
années ;
• Analyser les effets et les liens de causalité, d’une part avec les inflexions et changements
majeurs dans les politiques de développement (phases des grands chantiers, état investisseur,
périodes de planification sectorielle et d’incitations, périodes d’ajustement et de déréglementation
démographique, l’urbanisation, les changements climatiques et les pressions sur les ressources. Ce
séquençage historique est à moduler en fonction du degré de sensibilité de chaque secteur ;
• Mesurer les zones de tensions, les conflits intersectoriels dans l’utilisation de l’espace et des
ressources et localiser les fragilités. Retracer en particulier les recompositions dans l’utilisation
des espaces, les flux migratoires (temporaires, transitoires ou définitifs) et dégager les zones de
rupture définitive d’équilibre.
• Tracer l’évolution tendancielle, situer les zones de fragilité prévisible et suggérer les perspectives
pour le Maroc 2025.
Cadre naturel, environnement
et territoires
L’énergie : développement
énergétique au Maroc depuis
1955, perspectives 2025
Introduction ...............................................................................................................61
Références ............................................................................................................108
Annexes ..................................................................................................................110
Ressources minérales
Introduction ............................................................................................................ 471
50 ans de développement
de l’industrie phosphatière
au Maroc et évolutions possibles
à l’horizon 2025
Introduction ..........................................................................................................511
1. Les exploitations minières .............................................................................512
2. Les industries de transformation du phosphate (valorisation) ................518
3. Le positionnement commercial et les partenariats ...................................523
4. Les ressources humaines et le développement social .............................528
5. L’apport au développement national ............................................................533
6. L’environnement et le développement durable ..........................................538
7. Les perspectives pour l’horizon 2025 ...........................................................544
L’économie marocaine est une économie en développement à forte composante agricole. Depuis l’indé-
pendance, cette économie a connu différentes réformes et orientations dont les plus importantes sont (3) :
– 1967-1979 avec le lancement d’une politique de développement économique et sociale basée sur la
modernisation de l’agriculture, d’une façon générale, et de l’agriculture irriguée, de façon particulière.
Cette période a été marquée par une politique interventionniste des pouvoirs publics visant à la fois à
développer les capacités de mobilisation des ressources en eau, notamment superficielles, et à aména-
ger les terres agricoles en infrastructures d’irrigation (politique du million d’hectares) ; une panoplie de
mesures techniques, juridiques et institutionnelles a été mise en place pour la mise en œuvre de cette
politique ;
– 1980-1990 avec des réformes visant à réduire les déséquilibres macro-économiques et à relancer la
croissance par les exportations. Cette période est aussi celle de la mise en œuvre du programme d’ajus-
tement structurel avec en particulier un désengagement progressif de l’État de secteurs de production ;
– 1990-2004 avec l’engagement de l’État dans un processus de privatisation et d’encouragement de
l’investissement privé.
L’évolution du PIB entre les années 70 et l’an 2000 montre un taux réel de croissance de 4.4 % en
moyenne annuelle. Ce rythme de croissance a été très irrégulier en relation avec les différents choix écono-
miques et orientations pris durant ces années mais aussi avec l’évolution du climat, des secteurs de l’eau et
de l’agriculture pendant cette période.
11
Figure 1 : Évolution du taux de croissance annuel du PIB par habitant 1957-2002
Ces données macro-économiques indiquent en partie le poids important que jouent le climat et les apports
pluviométriques annuels au niveau de l’économie du pays : un climat aride à semi aride, et un contexte
hydrologique marqué par une forte irrégularité annuelle et inter-annuelle des précipitations avec une distribu-
tion géographique irrégulière.
Dès l’indépendance, conscient de cet aspect, le Maroc s’est doté d’une politique forte et dynamique dans
le secteur de l’eau avec pour objectif de vaincre la vulnérabilité de la disponibilité en eau face aux aléas clima-
tiques, en maîtrisant et en stockant les eaux des années humides pour pouvoir faire face aux années de
sécheresse. L’objectif visé était de répondre à la demande croissante en eau potable des populations et de
donner à l’agriculture un essor important en vue de satisfaire les besoins alimentaires de ces populations et
d’encourager l’exportation des produits agricoles. Le défi lancé alors, pratiquement atteint dés 1998, visait à
irriguer un million d’hectares à la fin du siècle passé.
La politique des barrages lancée par Feu Sa Majesté le Roi Hassan II dès 1967 traduit la pertinence des
choix stratégiques opérés en matière de développement économique et social et de valorisation des poten-
tialités agricoles du pays à travers le développement de l’irrigation. Des résultats tangibles ont été enregis-
trés pour bon nombre de régions du royaume. En effet, si les cinquante dernières années ont été traversées
sans grandes crises de l’eau au Maroc, alors que la demande en eau pour répondre aux besoins des popula-
tions a plus que triplé et que les épisodes de sécheresse se sont faits de plus en plus nombreux et étalés au
niveau de leur durée c’est bien grâce à cette politique clairvoyante (Figure 2). Celle-ci a permis d’assurer au
pays la sécurité hydrique et alimentaire, d’améliorer les revenus des agriculteurs, d’intensifier et de diversi-
fier la production agricole, de développer les exportations agricoles, et de promouvoir l’emploi en milieu rural.
Notons toutefois, que si le pari du million d’hectares a été gagné, un décalage important reste à résorber
12
entre les superficies dominées par les barrages et celles équipées. Ce décalage se répercute et limite la ren-
tabilité des investissements hydrauliques et hydro-agricoles.
Outre cet aspect lié à la mobilisation des ressources en eau, considéré comme une véritable réussite du
royaume dans le domaine de l’eau, le devenir des eaux usées et la pollution des eaux ont connu durant cette
période nettement moins d’intérêt et de succès : à ce jour, quasiment toutes les grandes villes du pays et
grandes industries rejettent leurs eaux usées dans les systèmes naturels, rivières, mers, océan sans le
moindre traitement. Les retombées négatives ne se sont pas fait attendre. La qualité des eaux des rivières,
barrages et nappes phréatiques s’est dégradée à grande vitesse ces deux dernières décennies limitant ainsi
le potentiel réel en eau mobilisé à travers la qualité moindre de ces eaux. Plusieurs dégradations de la faune
et de la flore, notamment des écosystèmes aquatiques, en ont résulté. La dégradation de la ressource coûte
cher au pays, elle est estimée actuellement à plus de 15 milliards de Dhs par an, soit 6 % du PIB (27).
Un autre aspect a entravé en partie les succès de la politique nationale en matière d’eau : une séparation
nette dans l’approche menée entre les aménagements hydrauliques et hydro-agricoles à l’aval des bassins
versants et les aménagements requis à l’amont de ces bassins versants. On a ainsi peu préparé les bassins
versants à connaître des projets de mobilisation des ressources viables en mettant en œuvre des stratégies
intégrées des aménagements amont et aval des bassins versants permettant une bonne conservation des
sols contre les risques d’érosion et par conséquent la limitation de l’envasement des lacs et retenues de bar-
rages. D’importants phénomènes d’érosion ont été observés dans certains bassins non aménagés entraînant
l’envasement de bon nombre de barrages construits à des niveaux non négligeables ; en l’an 2000 cet enva-
sement correspondait à une perte en capacité équivalente à celle d’une retenue moyenne.
13
L’accès à l’eau potable des populations rurales a connu un retard important. Jusqu’en 1990, 70 % de la
population rurale consommait moins de 20 litres par habitant par jour (1/6e de la consommation en milieu
urbain). Grâce à un effort spécifique mené durant ces dernières années la situation est en cours de réta-
blissement. Quel impact négatif ce retard a-t-il engendré sur la politique rurale de notre pays ? Dans quelle
mesure a-t-il pu favoriser l’exode rural des années 80 ?
La distribution géographique des populations sur le territoire national durant ces 50 dernières années a été
certainement conditionnée par les réalisations et comportements du secteur de l’eau et par conséquent de
l’agriculture. Les sécheresses de plus en plus fréquentes, le manque d’accès à l’eau potable et aux infras-
tructures de base ont induit un exode rural assez important se traduisant par un développement des grandes
villes qui ont connu une multiplication des bidonvilles et zones d’habitat anarchiques et insalubres. Ainsi on
est passé d’un pays à population principalement rurale (70 %) vers l’indépendance à un pays actuellement
dominé, à près de 60 %, par une population urbaine. (Figure 3)
La politique de l’eau menée après l’indépendance s’est longtemps focalisée sur la mobilisation des res-
sources. La gestion de la demande n’a été un souci qu’une fois le bilan offre-demande devenait précaire avec
la croissance de la demande et la limitation de la ressource durant les sécheresses répétées des années 80.
C’est là qu’une politique de gestion planifiée de l’eau au Maroc par bassins versants intégrant la parti-
cipation des usagers a été initiée. Cela a abouti en 1995 à la promulgation de la loi sur l’eau qui a introduit
une série de principes fondamentaux dont l’unicité de la ressource en eau, sa gestion de façon intégrée et
décentralisée par bassin versant, une gestion participative des usagers, la maîtrise des gaspillages et l’écono-
mie de la ressource...
Depuis, des efforts notables ont été déployés, en matière de limitation de la demande, avec des résultats
tangibles au niveau de l’eau potable grâce à l’introduction de la tarification par seuils de consommation. Ces
14
efforts ont aussi été menés en agriculture irriguée, secteur le plus consommateur d’eau, les résultats obte-
nus jusqu’à maintenant restent mitigés. Plusieurs questions peuvent être soulevées : est-ce un problème
d’ordre technique et technologique ? Est-ce une question de niveau d’instruction et d’analphabétisme des
agriculteurs ? Quelles sont les contraintes réelles limitant une valorisation optimale des eaux d’irrigation ?
En 2002, suite aux orientations de Sa majesté le roi Mohammed VI données dans son discours
d’ouverture des travaux du Conseil Supérieur de l’Eau et du Climat tenu en 2001 à Agadir, une nouvelle poli-
tique de l’eau a été définie et une réforme du secteur de l’eau a été lancée (26). Cette reforme est axée
sur les points suivants :
– La gestion de la demande
– La participation des usagers
– La dépollution à l’échelle des basins versants
Ainsi, depuis l’indépendance, des choix socio-économiques ont été faits où l’eau joue un rôle essentiel.
Une priorité a été donnée à l’agriculture mais aussi au tourisme, à l’industrie agro-alimentaire, au textile... Ces
choix et les retombées économiques qu’ils ont engendrés ont ils été faits tenant compte du prix de revient
réel de l’eau utilisée ? Avec cette prise en compte, certains de ces choix auraient pu ne pas être aussi impor-
tants qu’on le croit !
La politique de l’eau a eu un coût fort que l’État a dû supporter. Les investissements budgétaires alloués
aux équipements hydrauliques représentaient plus de 50 % du budget global d’investissements entre 1968
et 1972 et plus de 35 % entre 1968 et 1990(21). En 2000 ils étaient de l’ordre de 20 % (17). Les années à
venir ; étant donnés les besoins prévus et la nécessité de recourir à des ressources en eau plus difficiles à
mobiliser et plus coûteuses ; ces investissements risquent de croître fortement ! l’État ne pourra alors sup-
porter ce fardeau. La participation des usagers et du secteur privé à cette gestion de l’eau est le seul recours.
Comment et dans quelle mesure cela est réalisable et comment le concrétiser pour une ressource vitale pour
l’économie nationale et pour le citoyen ?
Comment peut on envisager l’avenir de l’eau au Maroc et donc l’avenir de l’économie du royaume en
2025, tenant compte de ces différents aspects ? Quelles sont les perspectives du secteur irrigué au-delà du
million d’hectares irrigués et comment valoriser au mieux le potentiel irrigable marocain ?
C’est à cet ensemble de questions que nous chercherons à apporter des éléments de réponses dans la
présente communication, après avoir dressé un bilan des 50 dernières années du Maroc dans le domaine de
l’eau avec ses retombées socio-économiques.
De par sa position géographique, située en zone aride à semi-aride, le Maroc a depuis des millénaires eu
une évolution fortement liée au climat de la région et à sa variabilité (0). Ce climat se caractérise par des
contrastes importants avec des types de climats très différents et ce, en relation avec les particularités géo-
graphiques et écologiques de la région (1) (2), (3) :
– Le Maroc s’étend sur une superficie de 710.850 km2 dont une grande partie est située en zone déser-
tique ;
– La région est à dominance semi aride à aride, soumise à un climat résultant d’influences maritimes au
nord (Mer Méditerranée) et à l’ouest (Océan atlantique) et sahariennes au sud ;
15
– Une grande diversité de type de climat, associée à l’étendue du pays en latitude, à l’existence de
chaînes montagneuses dépassant les 3 000 m et à l’influence maritime au voisinage des côtes ;
– Une grande variabilité spatiale, et inter annuelle des précipitations avec des précipitations plus faibles
dans la partie sud, un nombre de jours de pluie très limité (moins de 50 jours sur une grande partie du
pays) et des épisodes de sécheresses périodiques et fréquents dont la durée peut dépasser trois
années successives ;
– Des températures moyennes annuelles élevées, dépassant les 20o C dans le sud et plus douces le long
du littoral. Ceci est lié au niveau élevé du rayonnement solaire parvenant aux différentes régions du
pays, et aux advections fréquentes de masses d’air chaudes. Ces éléments entraînent une forte évapo-
transpiration.
2.1.1. Températures
Les températures de la région sont :
– très élevées dans la partie sud, où elles peuvent atteindre jusqu’à 60o C dans le Sahara l’été. L’hiver ces
mêmes zones connaissent des températures très faibles ;
– tempérées dans les zones en bordure de la Méditerranée (10o C les mois les plus frais et 29o C les mois
les plus chauds) ;
– modérées sur la partie ouest atlantique résultant du courant froid des Canaries (14 à 20o C à Essaouira) ;
– Fortes durant l’été (des maximums absolus dépassant les 45o C) et froides durant l’hiver (des tempéra-
tures minimales bien au dessous de 0o C) dans les zones intérieures.
Une analyse de l’évolution de la température ces dernières décennies, dans plusieurs stations météorolo-
giques relevant de la Direction de la Météorologie Nationale, montre l’évolution suivante (13) :
– Les températures maximales d’hiver, et minimales et maximales d’été, montrent des tendances à la
hausse ;
– La température minimale d’hiver montre une tendance à la baisse.
Par ailleurs, une analyse des températures enregistrées à Casablanca depuis le début du siècle et à Marra-
kech depuis 1960 indique l’existence de deux périodes significatives du point de vue thermique entre 1955
et 2000 :
– La période 1955-1970 a connu un refroidissement progressif du climat de l’ordre de 1o C en moyenne
annuelle ;
– La période 1970-2000 a connu un réchauffement important, où des records absolus de température ont
été battus : la moyenne des températures annuelles à Marrakech était de l’ordre de 25 à 26 o C durant
les années 70 ; elle se situe actuellement autour de 27 à 28 o C.
16
Figure 4 : Températures moyennes à Casablanca 1910-1990 (1)
Ainsi et au delà du léger refroidissement des années 70 on peut dire que la température moyenne annuelle
a augmenté au Maroc de façon significative ces 50 dernières années : plus de 1 o C de réchauffement. Ce
réchauffement s’inscrit dans le contexte de réchauffement global enregistré durant le XXe siècle au Maroc et
qui est mis en évidence sur la figure 4 pour Casablanca (8).
17
1995, à plus de 100,9 millions de quintaux en 1996 pour redescendre à 40,8 millions de quintaux en 1997
(29).
La figure 5 indique l’évolution, durant la période 1960 et 2000, de l’écart à la moyenne des précipitations
annuelles sur l’ensemble du Royaume. On distingue une première période pluvieuse à normale de 1960 à
1972 puis une période sèche et très peu pluvieuse entre 1972 et l’an 2000, avec un épisode particulièrement
sec, long et critique 1972-1995 (3). Une étude réalisée par la direction de la météorologie nationale a permis
de quantifier la différence en précipitations entre ces deux périodes. Elle a estimé que le cumul des précipita-
tions était en baisse de plus de 30 % durant les années 1978-1996 par rapport à la période 1961-1977 (2).
Figure 5 : Ecart à la moyenne des précipitations annuelles sur l’ensemble du Maroc (3)
Les cinquante dernières années ont vu une augmentation nette de la fréquence des sécheresses et inonda-
tions :
– On est passé d’une sécheresse tous les dix ans les années 50-60 à deux à trois sécheresses par décen-
nie. Durant la période 1955-2004, 7 périodes de sécheresses généralisées ont été enregistrées au
Maroc dont 5 après 1975 : il s’agit des sécheresses des années 1957 ; 1966 ; 1974-1975 ; 1980-1985 ;
1986-1987 ; 1990-1995 et 1998-2000 (6), (17)(19). De plus, plusieurs années sèches ont été marquées
par de fortes intensités supérieures à 35 % (cas des campagnes 1980-81, 1991-92, 1994-95). La cam-
pagne agricole 1994-95 a connu une sécheresse record avec une intensité supérieure à 60 %.
– La période 1975-2004 s’est aussi distinguée par la nature excessive des rares années humides avec une
pluviométrie très forte et concentrée sur de très courtes périodes de l’année ; on a vu des centaines de
millimètres d’eau tomber dans des régions arides en quelques jours et rien pour le reste de l’année ! Un
sol aride, une érosion forte, un ruissellement excessif, sont des caractéristiques de ces régions qui favo-
risent des catastrophes naturelles en relation avec ces fortes précipitations et des inondations : la der-
18
nière en date est celle de 2002, après celle de 1996 (Encadré ci-dessous).Ces inondations ont eu des
effets néfastes sur les activités économiques, l’habitat et la production agricole dans différentes régions
du pays (Gharb, Loukkos, El Jadida,Tétouan,Tanger, Béni Mellal..)
Encadré
Inondations au Maroc (novembre 2002)
Lors de la semaine du 20 au 27 novembre 2002 le Maroc a connu l’une des plus importantes inondations de son his-
toire avec des dégâts matériels et humains considérables :
– Au moins 63 morts, 26 disparus, des dizaines de blessés;
– Des pertes importantes au niveau de l’habitat (24 habitations effrondrées; 373 inondés; ...);
– Des centaines d’hectares de terres agricoles endommagés; des centaines de têtes de bétail emportées.
– Des unités industrielles subissant de graves dégâts notamment à Berrechid et Mohammadia : Dans cette ville, la
plus importante raffinerie du royaume (La SAMIR) a pris feu ce qui représenterait plus de 300 millions USD en
pertes.
Il est à noter que cette année humide et pluvieuse succède à plusieurs années sèches ou partiellement sèches et
que la dernière année humide avant celle-ci était 1996 ou le Maroc avait connu aussi des inondations catastrophiques
pour le pays.
2.1.3. Bilan
Les trois dernières décennies ont connu une température plus élevée en moyenne annuelle, une évapora-
tion et une évapotranspiration plus fortes et donc des besoins en eau plus importants. Parallèlement les
apports pluviométriques ont chuté : d’où une situation critique du secteur eau dans le royaume.
Les apports pluviométriques sur l’ensemble du territoire sont évalués à 150 milliards de m3. Sur ces
apports pluviométriques, la pluie utile ne représente que 20 %, soit 29 milliards de m3. Si l’on déduit les
pertes par évaporation et les écoulements non maîtrisables vers la mer, le potentiel hydraulique mobilisable,
dans les conditions techniques et économiques actuelles, est estimé à 20 milliards de m3 dont 16 milliards à
partir des eaux superficielles et 4 milliards en provenance des eaux souterraines (4) (tableau 1).
19
Tableau 1 : Ressources en eau du Maroc et Possibilités de mobilisation (en milliards de m3)
Cette estimation reste tributaire du niveau d’évaporation des eaux qui dépend directement de la tempéra-
ture. Ainsi et devant le réchauffement significatif qu’a connu le royaume durant le XXe siècle (plus de 1o C) et
l’occurrence accentuée des sécheresses durant les trois dernières décennies, une validation des estimations
des différentes composantes de ce cycle de l’eau s’impose. Les 20 milliards de m3 économiquement et tech-
niquement mobilisables pourraient être facilement revues à la baisse.
Ces apports pluviométriques sont aussi caractérisés par une forte irrégularité de leur distribution dans
l’espace, diminuant fortement du nord au sud et de l’ouest à l’est. Ces apports sont inégalement répartis sur
les différentes régions du pays. Ainsi 15 % de la superficie totale reçoit plus de 50 % des apports pluviomé-
triques. Les régions du Nord et le bassin de Sebou, bien que n’occupant que 8,5 % de superficie totale,
reçoivent plus de 29,3 % des précipitations globales et participent pour 51,1 % des écoulements, alors que
le bassin de la Moulouya, situé à l’Est, et occupant 8,1 % de cette superficie ne reçoit que 9,4 % de pluvio-
mètre globale et ne participe que pour 8,7 % des écoulements moyens.
Le potentiel des eaux superficielles du pays s’élève à 22.5 milliards de m3 dont 16 milliards mobilisables.
Le potentiel des eaux superficielles se répartit selon les régions, comme suit :
– Bassins rifains du nord, l’ensemble des oueds de cette zone enregistre en moyenne un apport de
4.200 M m3/an soit 20 % environ des ressources superficielles du pays ;
– Bassins atlantiques du nord et du centre : ce sont les grands bénéficiaires des ressources en eau pro-
duites sur les chaînes montagneuses du Rif et de l’Atlas. Ces bassins renferment 56 % des ressources
en eau superficielles du Maroc soit 11.300 M m3/an.
– Bassins de l’Oriental, la région enregistre un apport moyen annuel estimé à 1.650 M m3/an ;
– Bassins du Sud Atlantique Ouest, ces bassins totalisent un apport moyen annuel de 780 millions de
m3/an ;
– Bassins pré-sahariens sud atlasiques et sahariens : Ils couvrent le sud de l’Atlas et sont caractérisés par
l’aridité de leur climat présaharien à saharien. La quasi totalité des apports, estimée à 240 millions de m3,
est due à des crues rapides et violentes en provenance de l’Atlas.
20
Réparties sur une dizaine de bassins versants, les ressources en eau de surface du royaume se caracté-
risent par l’irrégularité de leur répartition. Les seuls basins de Sebou, d’Oum Erbia et de la Moulouya ras-
semblent les 2/3 des ressources en eau de surface (Figure 6). Par ailleurs, les besoins en eau ne sont pas
dans les zones les plus riches en eau d’où la nécessité de transferts d’eaux coûteux et difficiles a réaliser : la
région Nord-Nord ouest avec 35 % de la population du pays détient 48 % des ressources en eau alors que la
région Centre-Ouest avec 46 % de la population ne contient que 34 % des ressources en eau. (7)
Figure 6 : Répartition des ressources en eau de surface au Maroc (7)
Le potentiel des eaux de surface est très vulnérable aux aléas climatiques. En effet, en années de séche-
resses sévères, celui-ci peut baisser de 30 à 90 % (18). L’importance en fréquence et en intensité des séche-
resses hydrologiques dans les différents bassins versants n’est pas uniforme : les régions de l’oriental, du
Tensift, du Souss-Massa et les zones sud-atlasiques sont généralement les plus touchées par les séche-
resses. Celles du nord le sont moins mais les répercussions sont toutefois importantes car les réserves
d’eaux souterraines des régions Nord sont très limitées (18).
21
Figure 7 : Répartition des ressources en eau souterraine au Maroc (7)
Globalement, les ressources en eau souterraines s’élèvent à près de 9 milliards de m3/an comme ressources
renouvelables dont 3 milliards de m3/an s’écoulent par l’intermédiaire des sources contribuant à la régularisa-
tion des débits des oueds (débits de base) et 2 milliards de m3/an s’écoulent directement vers les mers.
Ainsi, les ressources en eau souterraines mobilisables sont estimées à 4 milliards de m3/an.
Ces chiffres n’englobent pas les réserves qui constituent des ressources non renouvelables et qui peuvent
être exploitées en période de pénurie d’eau. D’ailleurs pour certaines nappes, une sur-exploitation s’est déjà
matérialisée par des baisses des niveaux piézométriques : c’est le cas du Souss, du Haouz, de Jbel Hamra,
de Saiss....
22
Figure 8 : Evolution de la concentration globale en DBO5
Dans les eaux de surface entre 1950 et 2002 (22)
Durant l’année 1998-1999 la qualité des eaux, observée par la Direction Générale de l’Hydraulique, a été
jugée dégradée dans 37 % des stations échantillonnées et bonnes dans 53 %. Cet état s’est encore dégradé
en 1999-2000 puisque la qualité des eaux a été jugée dégradée dans plus de 50 % des stations (17).
Les deux principaux fleuves du Royaume, oued Sebou et Oued Oum Er Rbia, connaissent des situations
critiques :
– l’été en période d’étiage où le pouvoir auto-épurateur et de dilution des polluants diminuent ;
– L’hiver lors des campagnes oléicoles caractérisées par le déversement des margines dans les cours
d’eau et l’augmentation en concentration des métaux lourds suite à leur entraînement par les crues (5).
Aussi, le traitement de l’eau de surface pour la rendre potable atteint des coûts élevés lors des épisodes
de sécheresse et devient parfois techniquement impossible. Plusieurs stations de traitement ne peuvent
plus fonctionner l’été en raison du niveau trop élevé de la pollution des eaux des rivières : Les stations d’eau
potable de Mkansa et de Karia Ba Mohamed sur l’oued Sebou ont été contraintes d’arrêter durant plus de
80 jours de 1993 à 1995 (6).
Les eaux souterraines restent de meilleure qualité. Mais certaines nappes importantes sur la côte atlan-
tique sont déjà polluées par l’utilisation importante et non rationnelle des engrais et des pesticides par le sec-
teur agricole et par l’intrusion des eaux marines et le pompage excessif. Des signes alarmants paraissent ici
et là :
– Le niveau d’azote dans certaines nappes est élevé (des concentrations dépassant de loin les 50mg/l),
c’est le cas de certaines zones de la nappe des Béni-Moussa (Tadla), de la zone des Mnasra au Gharb... ;
23
– la salinité des eaux est parfois bien au dessus des seuils des eaux douces (atteignant des valeurs de 10
à 12 g/l) (5).
Cette dégradation de la qualité des eaux, associée à la rareté de la ressource, a engendré des risques de
développement de maladies hydriques surtout en milieu rural. En 1995, année connue par sa sécheresse
très sévère, 1312 cas de maladies hydriques ont été enregistrés alors que durant l’année suivante parti-
culièrement humide aucun cas n’a été signalé (6).
24
Figure 9 : Évolution du nombre de stations d’épuration depuis 1950 (22)
25
ries. Le bassin du Tensift recueille les métaux lourds (présence de mines d’extraction de plomb, zinc et
cuivre). Les bassins du Loukkos, du Bouregreg, de Souss-Massa restent les moins atteints par les rejets
industriels (5).
26
Figure 10 : Envasement des retenues de barrages (20)
27
Eaux usées
Le potentiel d’eaux usées est évalué pour l’an 2000 à plus de 500 millions de m3. 50 % de ces eaux sont
rejetées dans les bassins versants intérieurs et 50 % sont supposées être rejetées en mers. En réalité une
bonne partie de ces eaux est réutilisée à l’état brut en agriculture (17).
La réutilisation des eaux usées brutes sans le moindre traitement est une pratique qui s’est répandue for-
tement au Maroc durant les années 80 ; période de grandes sécheresses. On estime que les eaux usées
brutes ont irrigué en 1994 plus de 7200 hectares de cultures maraîchères, céréalières et fruitières situées
prés des principaux centres urbains avec des conséquences néfastes pour la santé des populations ; soit
environ 70 M m3 d’eaux usées brutes utilisées.
Une valorisation saine et rentable du potentiel hydrique que représentent ces eaux usées, reste tributaire
aujourd’hui de la mise en place de systèmes fiables de traitement et d’épuration des eaux usées brutes (10).
Le seul volume d’eaux usées perdues en mer évalué autour de 200 M m3 permettrait une fois traité d’irriguer
plus de 25.000 ha (22).
28
Parmi ces projets, le plus important est celui de la station de dessalement d’Agadir prévue pour 2020. Elle
permettra de produire plus de 86.000 m3/j. À cette échéance, Agadir ne pourra avoir d’autres alternatives que
le recours au dessalement des eaux de mer pour répondre aux besoins en eau des différents secteurs
économiques.
La politique de mobilisation de l’eau fût assez timide durant la période coloniale et même jusqu’en 1966.
Le Maroc ne disposait alors que de 16 ouvrages hydrauliques d’une capacité totale de 2,2 milliards de m3. À
partir de 1967, une impulsion significative de cette politique par la construction de nombreux barrages a été
donnée par Feu Sa Majesté Hassan II. Celle-ci visait le développement de l’irrigation sur un million d’hec-
tares à l’horizon 2000 (cette politique était aussi appelée politique du million d’hectares) mais aussi la satis-
faction des besoins en eau potable et industrielle, notamment au niveau des grandes villes du pays.
Ainsi, le Maroc a mené un politique dynamique et forte en matière de mobilisation des ressources en eau
depuis son indépendance. Il a développé un patrimoine hydraulique de plus de 103 barrages, grands à
moyens, d’une capacité de stockage de 15,8 milliards de m3 permettant de fournir en année moyenne près
de 10 milliards de m3 d’eaux superficielles régularisées. Il a aussi développé une importante infrastructure de
mobilisation des ressources en eau souterraine (forages et puits) permettant d’exploiter annuellement près
de 2,7 milliards de m3. Sur les 20 milliards de m3 d’eaux mobilisables, 13,7 milliards de m3 le sont actuelle-
ment, soit un niveau de mobilisation de l’ordre de 68 %. (Tableau 3) (11).
Aussi, peut-on considérer que la mobilisation des ressources en eau au Maroc est à un stade avancé
même s’il reste beaucoup à faire car les sites de mobilisation les plus faciles ont déjà été exploités et ceux
qui restent sont certainement plus difficiles et les coûts inhérents à la mobilisation de ces eaux peuvent être
exorbitants.
Eaux de surface
La politique des barrages menée depuis l’indépendance visait les principaux objectifs suivants (7) :
– Satisfaire les besoins croissants en eau potable et industrielle des agglomérations ; avec l’augmentation
des besoins (3 % de plus par an) et la saturation progressive des ressources souterraines proches des
zones d’utilisation, le recours aux eaux de surface s’est imposé. En l’an 2000 les barrages participaient
pour 68 % à la satisfaction de la demande en eau potable et industrielle ;
29
– Irriguer un million d’hectares. En 1998 l’objectif du million d’hectares irrigués était déjà atteint ;
– Créer une solidarité inter-régionale avec des transferts d’eaux des zones excédentaires vers les zones
déficitaires ;
– Développer la production de l’énergie hydro-électrique, autant que faire se peut, afin de réduire la dépen-
dance du pays vis-à-vis de l’extérieur en produits énergétiques.
Cette politique de mobilisation des ressources en eau de surface a connu deux phases distinctes (7)
Tableau 4 :
30
Tableau 4 (suite)
31
Tableau 4 (suite)
– 1956-1966
C’était une période de transition juste après l’indépendance où une politique de mobilisation était en gesta-
tion ; durant cette décennie seulement trois barrages ont été construits mobilisant ainsi 0,4 milliards de m3 :
– Barrage Mohamed V
– Barrage Nakhla
– Digue de Safi
32
Ces barrages sont venus s’ajouter à ceux construits durant la période 1925-1955 au nombre de 13 permet-
tant de mobiliser 1,5 milliard de m3. Ainsi en 1967, la capacité totale de stockage d’eaux de surface était de
2.2 milliards de m3.
– 1967-2004
Le tournant de la politique du Maroc en matière d’eau a été donné par feu Sa Majesté le Roi Hassan II en
1967 avec le lancement de la construction de 6 grands barrages et d’un programme de barrages visant en
2000 l’irrigation d’un million d’hectares. Cette politique a été renforcée par la décision de Sa majesté le Roi
en 1986 de construire un barrage par an jusqu’à l’an 2000.
Aujourd’hui, avec 103 grands barrages, la capacité de mobilisation d’eaux des barrages est passée de
1,5 milliards de m3 en 1955 à plus de 15,8 milliards de m3 avec la possibilité de régulariser en année hydrau-
lique moyenne plus de 10 milliards de m3.
Eaux souterraines
Les eaux souterraines ont aussi connu un effort important avec la mobilisation actuelle de plus de 67 % du
potentiel en eaux souterraines mobilisables. L’exploitation d’une cinquantaine de nappes superficielles princi-
pales et près de la moitié des nappes profondes recensées, a permis de porter le volume d’eau souterraine
mobilisé à 2,7 milliards de m3.
Il est important de noter que la connaissance que l’on a des nappes souterraines reste limitée, en parti-
culier les nappes profondes. Les efforts menés ces dernières années dans le sens d’une meilleure connais-
sance de nappes profondes dans les zones sahariennes ont donné de très bons résultats. De nouvelles
recherches dans ce sens s’imposent pour d’autres nappes profondes du Royaume, actuellement mal
connues.
De nos jours, la presque totalité des eaux souterraines renouvelables connues sont exploitées avec un pré-
lèvement annuel de l’ordre de 2,7 milliards de m3. Un bon nombre de nappes commencent à connaître des
diminutions importantes de leurs niveaux piézométriques suite à une certaine sur-exploitation, c’est le cas
des nappes du Souss-Massa, de la zone côtière des Doukkala, du Saiss...
Eaux régularisées
Globalement, les volumes d’eaux régularisés sont prélevés à partir ;
33
– la production annuelle de l’hydro-électricité permettant d’économiser des produits énergétiques ; c’est
ainsi qu’en 1996-1997 l’électricité produite à partir des usines hydroélectriques a été estimée à
2000 GWh/an, soit un gain de 720.000 tonnes de fuel par an.
– l’atténuation des effets des sécheresses difficiles et aigues en réduisant leurs impacts aussi bien sur
l’agriculture irriguée que sur le secteur de l’eau potable.
– l’atténuation des effets de crues dévastatrices au niveau de grands bassins hydrauliques, à titre
d’exemple le barrage Al Wahda a permis d’éviter l’inondation de 150.000 ha en aval durant les inonda-
tions de 1996.
La partie la plus importante des eaux mobilisées est utilisée en agriculture. Toutefois cette dominance
tend à s’atténuer avec les années : En 1990 l’irrigation représentait 93 % des usages de l’eau (4). En 2000 le
poids de l’agriculture était moins important avec 86 % seulement. On estime aujourd’hui ce pourcentage à
moins de 85 %. En 2020 l’agriculture devrait représenter au niveau des usages aux environs de 76 %. Cette
tendance s’explique par la diversification de l’économie nationale et l’augmentation de la demande en eau
potable (Tableau 5).
34
3.2.1. Agriculture
Les conditions climatiques du Maroc font de l’irrigation un impératif technique incontournable dont les
retombées économiques et sociales sont indéniables. Au lendemain de l’indépendance, l’irrigation a consti-
tué une voie privilégiée du développement agricole et a bénéficié d’une attention particulière des pouvoirs
publics.
Les objectifs escomptés autour de l’irrigation ont été quasiment atteints ; aussi l’irrigation a-elle permis de
contribuer substantiellement à satisfaire les besoins alimentaires croissants de la population, d’une part, et
de promouvoir un développement économique et social autour des périmètres irrigués, d’autre part. En fait,
les zones irriguées ont joué un rôle déterminant, en tant que véritables pôles de développement agricole et
rural, tant au niveau local que régional. Globalement les retombées de l’irrigation sur l’économie du pays ont
été amplement démontrées.
Compte tenu du potentiel hydraulique mobilisable et de la part qui peut être réservée à l’agriculture, le
potentiel irrigable est estimé actuellement à 1,664 millions d’hectares (ha) : 1,364 millions d’ha en irrigation
pérenne dont 880.000 ha et en Grande Hydraulique (GH) et 484.000 ha en Petite et Moyenne Hydraulique
(PMH) et 300.000 ha en irrigation saisonnière (tableau 4) (32). Rapporté à l’effectif de la population, le poten-
tiel irrigable passera de 57,1 hectares pour 1000 habitants en l’an 2000 à 42,2 hectares pour 1000 habitants
en 2020 (29). Actuellement, la superficie irriguée est de 43,0 hectares pour 1000 habitants. Le potentiel irri-
gable reste relativement limité eu égard à l’étendue des zones arides et au rôle que doit jouer ce secteur
dans le développement socio-économique du pays.
Au lendemain de l’indépendance, le Maroc comptait 72.600 ha aménagés pour une superficie dominée par
les barrages en service de 229.000 ha. Cependant, la superficie effectivement irriguée et mise en valeur ne
dépassait guère les 38.100 ha. La période 1956-1960 a constitué une période de transition et ce fût le plan
1960-64 qui a constitué le point de départ d’une politique d’irrigation volontariste et intégrée (33). À fin 1966,
la superficie totale aménagée s’élevait à 218.264 hectares : 137.479 ha en GH et 80.785 ha en PMH.
Depuis 1967 à nos jours, d’importants efforts ont été consentis en aménagements hydro-agricoles aussi
bien dans les neuf grands périmètres irrigués (gérés par le Offices Régionaux de Mise en Valeur Agricole
ORMA) qu’en périmètres de petite en moyenne irrigation. Globalement, les superficies aménagées jusqu’à
fin 2002 ont été de 1.014.863 ha dont 682.563 ha en GH et 332.300 ha en PMH (Tableau 7). Le mode d’irriga-
tion prédominant est le gravitaire avec près de 83 % de la superficie sous irrigation pérenne au niveau natio-
nal (figure 11), (34).
35
Tableau 7 : Superficies aménagées à fin 2002
Périmètres S/Périmètres Superficie En cours Total Mode irrig. Mode irrig. Mode irrig.
Aménagée Équipement Gravitaire Aspesion Localisée
Grande
hydraulique 682 563 10 900 693 463 564 566 128 897
Moulouya 77 281 77 281 61 546 15 735
Triffa 44 125 43 290 835
Bouareg 10 322 10 322
Garet 14 900 14 900
Zebra 7 934 7 934
Gharb 106 843 7 000 113 843 95 111 18 732
Beht 28 750 28 750
PTI 38 078 35 520 2 558
STI 37 215 21 041 16 174
TTI 2 800 7 000 9 800
Doukkala 104 527 104 527 68 834 35 693
Faregh 10 691 10 691
Boulaouane 1 216 1 216
Sidi Smaïl 10 766 10 766
Sidi Bennour 10 935 10 935
Zemamra 16 078 16 078
Tnine Gharbia 14 200 14 200
Extension Sidi Smaïl 1 507 1 507
Extension Faregh 2 692 2 692
Cuvette sidi Smaïl 1 442 1 442
Haut Service Tr1 16 000 16 000
Haut Service Tr2* 19 000 19 000
153 056 153 056 153 056
Haouz Central* 43 374 43 374
Tessaout Amont 51 735 51 735
Tessaout Aval 57 947 57 947
Tadla 108 940 108 940 108 940
Béni Amir 30 101 30 101
Béni Moussa 78 839 78 839
Tafilalet 28 000 28 000 28 000
Recasement 1 000 1 000
Plaine de Tafilalet 22 400 22 400
Vallée de ziz 4 600 4 600
Ouarzazate 37 636 37 636 37 636
Idelsan 420 420 420
Vallée de Drâa 37 216 37 216 37 216
Souss-Massa 39 864 39 864 5 750 34 114
Issen 13 400 13 400 4 500 8 900
Massa 20 164 20 164 1 250 18 914
Souss Amont 6 300 6 300 6 300
Loukkos 26 416 3 900 30 316 5 693 24 623
Loukkos Sud* 1 614 3 900 5 514 3 900 1 614
R’mel 13 882 13 882 13 882
Thé 220 220 220
Plaine Bas.Collines 10 700 10 700 1 793 8 907
Petite et 332 300 332 300
moyenne
hydraulique
Total 1 014 863 10 900 1 025 763 564 566 128 897
36
Figure 11 : Répartition de la superficie totale irriguée par mode d’irrigation
Le rythme moyen d’équipement global enregistré de 1967 à 1998 se situe aux environs de 25.3222 ha/an
(Figure 12) ; pour la grande hydraulique ce rythme a été de 17.211 ha/an (Figure 13) alors qu’il n’a été que de
8011 ha/an pour le secteur de la PMH (Figure 14). Ces rythmes ont enregistré d’énormes variations ; ainsi le
rythme d’aménagement a été de près de 21.127/ha/an entre 1973 et 1977 avec un maximum de 35.000 ha
équipés en 1974. La décennie 1980, marquée par la mise en place du Plan d’Ajustement Structurel (PAS), a
connu un ralentissement des grands aménagements hydro-agricoles et les rythmes d’équipement ont baissé
de façon considérable atteignant des minima de près de 4000 ha/an. La décennie 1990 a connu une redyna-
misation de la politique des aménagements des grands périmètres irrigués et ce dans le cadre du Plan Natio-
nal de l’Irrigation (PNI), lancé en 1992, avec un rythme moyen de 18.624 ha/an. Les aménagements en PMH
ont été très timides durant la période 1967 à 1979 enregistrant une cadence moyenne d’équipement de près
de 4.549 ha/an ; à partir de 1980 ce secteur a connu un essor plus marqué avec un rythme moyen de
10.360 ha/an (des maxima de près de 20.000 ha/an ont été enregistrés au début des années 90).
37
Figure 12 : Évolution des superficies aménagées en irrigation au Maroc
38
Figure 14 : Évolution des superficies aménagées en petite et moyenne hydraulique
Cependant, le fait marquant reste le décalage structurel entre les superficies dominées par les barrages en
service et celles équipées en réseaux d’irrigation. La figure 25 montre qu’à l’exception de la période 1968-
1977 où ce décalage a été ramené à 65.327 ha, les autres périodes accusent un décalage important qui a
atteint les 180.852 ha en 1977 dont 112.470 ha en grande hydraulique et 68.382 ha en petite et moyenne
hydraulique (34).
Le secteur de l’irrigation consomme actuellement près de 85 % du volume total des ressources en eau
mobilisées ; ce chiffre a été de 92 % en 1992 et se situera autour de 80 % en 2020. Le potentiel d’économie
d’eau dans ce domaine est très important eu égard aux niveaux assez faibles des efficiences des systèmes
d’irrigation constatées dans les grands périmètres d’irrigation ; celles-ci se situent entre 35 à 45 % pour le
mode d’irrigation gravitaire, et entre 50 à 70 % pour l’aspersion.
39
3.2.2. Eau potable
Une enquête réalisée en 1990 a permis de montrer que 30,3 % seulement de la population rurale dispo-
saient alors de systèmes publics d’approvisionnement en eau dont :
– 14.3 % étaient desservis par des équipements publics,
– 16 % s’approvisionnaient à partir d’équipements collectifs (non mécanisés).
Pour palier à cette situation, un Programme d’Alimentation Groupée en Eau potable en milieu Rural
(PAGER) a été mis en place en 1995. Grâce aux réalisations faites en particulier dans le cadre de ce pro-
gramme, le taux d’accès à l’eau potable en milieu rural a rapidement évolué pour atteindre 43 % en 2000 (23)
et 50 % en 2002 (27). Le PAGER devrait permettra de porter le taux de desserte à 90 % vers l’année 2007.
En 2010, plus de 31.000 localités rurales regroupant 11 millions d’habitants sont prévues d’être desservies
en eau potable (Figure 15).
40
Figure 15 : Évolution du taux d’accès à l’eau potable
Dans le milieu Rural (22)
3.2.3. Industrie
Les activités industrielles sont concentrées principalement dans l’axe Kénitra-Casablanca qui abrite près de
50 % des établissements industriels. La consommation d’eau par ce secteur a été évaluée à 1 milliard de m3
en 1996 dont 81 % provient de la mer, 14 % des eaux superficielles et 1 % des eaux souterraines.
Pour une population totale, estimée à 28.7 millions en 2000, le capital en eau par habitant par an (ressource
/population) était de l’ordre de 1010 m3/hab/an : la région est alors passée à un état de stress hydrique après
avoir été depuis 1955 dans un contexte hydrique excédentaire (2870 m3/hab/an en 1955). Aujourd’hui, en
2004 on est dans cette situation de stress avec 960 m3/hab/an. Cette caractérisation de l’équilibre offre-
demande en eau est optimiste car elle tient compte du capital global en eau du pays qui est de 29 milliards
de m3 et non du potentiel mobilisable qui ne dépasse pas les 20 milliards (tableau 8).
41
Tableau 8 : Capital en eau du Maroc par habitant par an pour 1955-2025
Par ailleurs, cette analyse quantitative et globale, masque une variabilité inter-régionale entre les différents
bassins hydrauliques. En effet la situation en l’an 2000 indiquait que le capital en eau variait de 180 m3/hab/an
dans les zones sahariennes et la région du Souss-Massa à 1850 m3/hab/an dans le Loukkos et la région médi-
terranéenne.
L’analyse détaillée des bilans hydriques par bassin versant (tableau 13) faite pour 2000 et projetée pour
2020 (17) indique que (figures 16 et 17) :
42
Figure 16 : Bilan des ressources en eau par bassin en l’an 2000 (17)
43
Figure 17 : Bilan des ressources en eau par bassin à l’horizon 2020 (17)
44
– En 2000, des situations de déficit hydriques en eau sont rencontrées dans les bassins hydrauliques de la
Moulouya (10 %), de la zone du Bouregreg (8 %),du Souss-Massa (3 %) et de la zone sud de l’Atlas
(20 %) ;
– La situation pourrait être plus critique pour les bassins du Souss et du Tensift si le déficit enregistré au
niveau de ces bassins versants n’était pas atténué par une surexploitation des nappes du Souss-Massa
et du Haouz ;
– Le nombre de bassins versants déficitaires s’élargira à l’horizon 2020 pour atteindre six sur huit bassins,
seuls les bassins du Sebou et du Loukkos-Tangérois continueront à être excédentaires. Il est à noter que
durant les périodes de sécheresses généralisées, 1980-1985 et 1990-1995 le bilan hydrique était défici-
taire dans pratiquement tous les bassins versants du pays.
– Plusieurs nappes phréatiques ont été surexploitées durant ces deux dernières décennies en particulier
celles du Souss, du Haouz, de la zone littorale Rabat-Safi, de Saiss... La baisse du niveau d’eau dans ces
nappes a été continue depuis les années 70 et a atteint des niveaux critiques en 2001 (figure 18). Le pro-
blème de la salinisation des eaux souterraines, par intrusion marine, s’est déjà posé dans la zone côtière
d’El Oualidia.
Ainsi, l’évolution socio-économique rapide associée à la limitation des apports en eau par précipitation qu’a
connu le Maroc durant ces dernières décennies ont engendré (i) une forte pression sur les ressources en eau
liée à l’accroissement des besoins en eau des secteurs usagers, (ii) l’apparition de grandes disparités régio-
nales, et (iii) des problèmes aigus de pollution de l’eau (14). Il en a résulté une forte instabilité du bilan offre-
demande qui a déclenché une certaine compétition pour l’eau parmi les usagers en particulier entre l’eau
potable et l’agriculture.
Le cas extrême de distorsions entre les besoins des villes et les ressources disponibles a été enregistré à
Tanger durant la période 1991-1993 avec pour conséquences l’affectation de quartiers entiers et d’une bonne
partie de la population de la ville par cette insuffisance de la ressource (24).
45
4. Planification et gestion durable des ressources en eau
Depuis l’indépendance jusqu’aux années 70 la planification de l’eau a été faite au Maroc de façon secto-
rielle ou par projet (14). Durant les années 80, est apparu le besoin d’avoir une planification au niveau de la
gestion de l’eau. En effet la rareté de l’eau et l’apparition d’une compétition au niveau de son utilisation ont
rendu impératif la mise en place d’une planification intégrée prenant en compte les ressources et besoins en
eau, les relations entre le développement et la préservation du secteur eau et le développement socio-
économique (14).
Cette planification de la gestion de l’eau a permis au Maroc d’accomplir, durant ces dernières décennies,
les objectifs suivants (14) :
– Généralisation de l’accès à l’eau potable des populations urbaines en 2000 et rurales en 2010 ;
– Irrigation d’un million d’hectares en 2000 et de l’ensemble du potentiel des terres irrigables en 2020 ;
– Veiller à garder une adéquation entre les besoins et les ressources disponibles ;
– Permettre un accès équilibré à l’eau de toutes les régions du royaume ;
– Adoption de dispositions administratives, législatives et économiques permettant une gestion efficace
et durable des ressources en eau.
Ce processus de planification a été conduit avec l’établissement de plans directeurs à l’échelle d’un ou plu-
sieurs bassins versants avec pour horizon de planification 2020. Ces plans régionaux ont été élaborés et mis
en œuvre progressivement. Ce sont là des étapes importantes dans la perspective de l’établissement d’un
plan national de l’eau. Ce Plan a pour objet l’intégration des différents plans régionaux en vue de définir une
vision dynamique de la gestion intégrée des ressources en eau à long terme s’articulant autour des deux
axes suivants :
– l’élaboration d’une stratégie nationale basée sur la consolidation des processus mis en œuvre par la loi
10-95 sur l’eau (cf. chapitre 4.2.1 de la loi) ;
– la formulation et l’adoption de plans d’actions précis et des programmes d’investissement correspon-
dants.
La planification nationale de la gestion des ressources en eau vise à mettre en cohérence les options
majeurs de l’ensemble des secteurs connexes dont notamment l’eau potable, l’agriculture, l’assainissement
et l’épuration des eaux usées industrielles et domestiques.
46
4.2. Cadre législatif, juridique et institutionnel
Dans le cadre de la refonte de la législation nationale dans le domaine de l’eau et pour la compléter par des
dispositions relatives à des domaines qu’elle ne couvrait pas auparavant et à épurer le régime juridique des
ressources en eau, il a été procédé à son unification en une seule loi sur l’eau adoptée par la chambre des
représentants le 15 juillet 1995. La loi sur l’eau constitue aujourd’hui la base légale de la politique de l’eau au
Royaume. Elle repose sur un certain nombre de principes qui découlent de plusieurs objectifs à savoir :
– la mise au point d’une planification de l’aménagement et de la répartition des ressources en eau basée
sur une large concertation entre les usagers et les pouvoirs publics ;
– la protection de la santé de l’homme par la réglementation de l’exploitation, de la distribution et de la
vente des eaux à usage alimentaire ;
– la réglementation des activités susceptibles de polluer les ressources en eau : notamment, la prévision
des sanctions et la création d’une police des eaux pour réprimer toute exploitation illicite de l’eau ou tout
acte susceptible d’altérer sa qualité, l’introduction des principes « préleveur-payeur » et « pollueur-
payeur » ;
– la répartition rationnelle des ressources en eau en période de sécheresse pour atténuer les effets de la
pénurie ;
– la recherche d’une plus grande valorisation agricole de l’eau grâce à l’amélioration des conditions d’amé-
nagement et d’utilisation des eaux à usage agricole.
Cette loi a introduit la notion de gestion participative, concertée et décentralisée de l’eau à travers le
Conseil Supérieur de l’Eau et du Climat (CSEC), la création des agences de bassin et le développement de la
contractualisation.
Il faut toutefois reconnaître que l’application des termes de cette loi connaît encore des difficultés cer-
taines dues principalement :
– À la multiplicité des intervenants dans le domaine de l’eau et à la nouveauté du rôle attribué par la loi aux
agences de bassins au niveau local : Il y a encore un manque d’appropriation des éléments de base de
cette loi par les usagers et les acteurs locaux du secteur de l’eau ;
– Aux niveaux très limités à ce jour des budgets dont les agences de bassin disposent pour assumer leurs
missions, les redevances liées à la pollution de l’eau ne sont pas encore mises en application et celles
liées aux prélèvements d’eau sont limitées. Ainsi les agences restent très liées à l’administration cen-
trale et donc peu en mesure de jouer leur rôle régional de façon autonome et dans le cadre d’une
concertation locale tel que cela est prévu par la loi.
En réalité, l’impression qui se dégage est qu’au niveau de la mise en œuvre de cette loi, l’administration
rencontre des réticences et freins qui l’obligent – au moins dans cette phase initiale du processus – à en limi-
ter l’esprit de reforme. Un esprit basé sur de nouveaux modes de gestion des ressources, plus transparents,
plus performants autour des principes de proximité, d’intégration et d’implication des agents économiques et
usagers de l’eau. (21)
47
4.2.2. Instruments économiques et financiers
Les plans successifs de développement économique et social mis en œuvre au Maroc depuis l’indépen-
dance ont accordé une grande priorité au secteur de l’eau. Cela a donné des résultats significatifs. Toutefois,
les investissements mobilisés pour le secteur de l’hydraulique sont sans mesure avec les possibilités du bud-
get de l’État : 50 % les années 70, 30 % les années 80 et 20 % actuellement. La problématique du recouvre-
ment du coût de l’eau brute, de la tarification des services de l’eau (eau potable, irrigation, énergie) et la
contribution respective de l’État et des usagers se trouve alors posée avec grande acuité.
Eau potable
Dès les années 90, des actions tarifaires ont été menées dans l’ensemble du pays en matière d’eau
potable et ce avec pour objectifs de :
– Permettre l’accès à l’eau potable des populations des couches sociales à revenus limités ;
– Réaliser des économies d’eau en pénalisant les fortes consommations ;
– Permettre aux organismes en charge de l’eau potable de disposer des ressources pour investir et déve-
lopper le secteur.
Le système de tarification adopté est basé sur des tarifs de vente de l’eau progressifs (14) :
– La première tranche est facturée à un tarif correspondant à moins que le prix de revient ;
– La deuxième tranche est facturée au prix de revient ;
– La troisième tranche est surestimée. Elle permet de compenser les pertes liées à la première tranche.
Avec ce système de tarification par tranches on a vu la croissance de la demande en eau potable ralentir.
Ainsi le taux de croissance annuel de la demande en eau potable et industrielle a baissé de 7 % en 1983 à
prés de 5 % actuellement. La consommation par abonné qui était de 440 m3/an en 1982 a baissé vers 360
m3/an durant les années 90 (23).
Irrigation
Ces dernières années, une action au niveau de la tarification de l’eau d’irrigation a été lancée. Dans les 7
ORMVA pratiquant la tarification de l’eau d’irrigation (Moulouya, Loukkos, Gharb, Doukkala, Tadla, Haouz, et
Souss-Massa) un plan de réajustement des redevances d’eau a été adopté en 1997. Ce plan visait à promou-
voir un usage efficient, économe et productif de l’eau d’irrigation ; le réajustement tarifaire est basé sur les
principes suivants (35) :
– la couverture progressive des coûts récurrents du service de l’eau ;
– la prise en compte de la capacité de paiement des exploitations agricoles dans la fixation des tarifs
objectifs à appliquer ;
– le plafonnement de l’augmentation annuelle des tarifs de l’eau à des niveaux compatibles avec les possi-
bilités d’ajustement des exploitations agricoles, en terme de gain de productivité et d’économie d’eau.
La mise en œuvre de ce plan de rattrapage a été entamée en 1997 et devait se poursuivre jusqu’ en 2003
pour les périmètres d’irrigation fortement déficitaires. Trois tranches de rattrapage tarifaire ont été effective-
ment mises en œuvre depuis la campagne 1997-98 ; les augmentations de tarifs ainsi appliquées ont varié de
10 % à 37 % en fonction du contexte de chaque périmètre d’irrigation.
48
Des résultats encourageants commencent à être enregistrés dans ce domaine dans bon nombre de péri-
mètres irrigués.
La loi 10-95 sur l’eau, a déjà intégré en partie ces préoccupations et introduit la mise en place de rede-
vances liées aux principes « préleveur-payeur » et « pollueur-payeur » : Ces redevances seront utilisées pour
financer les actions d’inventaire, d’évaluation, de planification, de mobilisation, de gestion de l’eau, ainsi que
l’entretien courant des ouvrages hydrauliques. Cela tarde à être concrétisé et restera malgré tout insuffisant !
Globalement, le recouvrement du coût de l’eau reste faible par rapport à l’importance de développement
des ressources en eau et de leur protection
49
On voit ainsi la multitude d’intervenants dans le secteur de l’eau. Ceci donne à la gestion de ce domaine
une inertie et une complexité considérables. Deux composantes de cette organisation devraient logiquement
atténuer les difficultés inhérentes à cette diversité d’acteurs dont les missions parfois s’entremêlent :
– Le conseil supérieur de l’eau et du climat qui définit les éléments stratégiques de la politique nationale
en matière d’eau ;
– Les agences de bassin au niveau de la gestion concrète des ressources en eau : leur conseil d’adminis-
tration associe tous ces opérateurs ce qui devrait donner à leur action régionale une visibilité réelle.
Mais, cet aspect a du mal à s’imposer à ce jour.
Les analyses faites tant au niveau international que national indiquent que le climat planétaire est entré
dans une phase de son histoire liée aux gaz à effet de serre cumulés dans l’atmosphère et au réchauffement
planétaire qui en résulte. Les perspectives du climat de notre région pour les 25 prochaines années devraient
dépendre de cette évolution planétaire.
Les modèles climatiques globaux élaborés pour prédire l’avenir climatique de la planète lié aux change-
ments climatiques attendus ; même s’ils ne sont pas assez précis à l’échelle d’un pays ; convergent pour esti-
mer un réchauffement probable de notre région de l’ordre de 2o a 4o durant le XXIe siècle avec en particulier de
0.6o C à 1.1 o C de réchauffement entre 2000 et 2020 selon des études réalisées pour le Maroc en 2001 et
dont les résultats ont été présentés dans la communication nationale initiale du Maroc à la convention cadre
des nations unies sur les changements climatiques (2),(3).
Ces mêmes études ont donné des indications sur le devenir des précipitations au niveau du Royaume en
relation avec ces changements climatiques. La tendance serait à une réduction des précipitations estimée
autour de 4 % antre 2000 et 2020 (2),(3).
Ces changements climatiques auraient également un impact sur la fréquence et la distribution des phéno-
mènes climatiques extrêmes notamment ceux liés au cycle hydrologique :
– Une augmentation de la fréquence et de l’intensité des orages dans le nord ;
– Une augmentation de la fréquence et l’intensité des sécheresses dans le sud et à l’est du pays ;
– Un dérèglement du signal saisonnier des précipitations (moins de jours de pluies et une pluie moins per-
sistante l’hiver) ;
– Une diminution de l’enneigement.
Cette évolution probable du climat de la région avec 1o C de réchauffement et 4 % de réduction des préci-
pitations entre 2000 et 2020 aurait, si elle se produisait, un impact énorme et significatif sur le cycle de l’eau
et aussi sur la demande en eau dans notre pays.
– Le potentiel en eau du Maroc risque de diminuer en relation avec l’augmentation prévue des tempéra-
50
tures. On estime l’évaporation des eaux précipitées à plus de 80 % ce qui explique que sur les 150 mil-
liards de m3 précipitées par an, le potentiel restant est évalué à 29 milliards. Avec des températures plus
élevées on pourrait avoir une évaporation plus élevée et donc moins de potentiel en eau renouvelable.
– La demande en eau risque, avec des températures plus élevées, de croître notamment en agriculture
irriguée. En effet l’efficacité d’utilisation de l’eau en irrigation sera moindre par exemple. Cet aspect
serait d’autant plus important que plus de 80 % des ressources en eau mobilisées sont utilisées en agri-
culture irriguée.
Une étude, réalisée en 2001 (3), est venue confirmer une baisse moyenne à envisager au Maroc pour 2020
par rapport à 2000 des débits des eaux superficielles et souterraines. La baisse a été estimée de l’ordre de
10 à 15 %; ces chiffres sont du même ordre de grandeur que ceux avancés pour deux pays limitrophes,
l’Espagne et l’Algérie.Tenant compte de cette hypothèse, c’est tout le cycle de l’eau qui risque de changer
de façon significative. Le potentiel en eau renouvelable ne serait plus en 2020 de 29 milliards de m3 mais plu-
tôt de 25.5 milliards. Au niveau des eaux mobilisables on aurait plutôt 17 milliards de m3 au lieu des 20 mil-
liards considérés actuellement (13.6 pour les eaux de surface et 3.4 pour les eaux souterraines) (figure 19).
Par ailleurs, le dérèglement des précipitations saisonnières, prévu avec ces changements climatiques, pourrait
entraîner un dérèglement des apports par ruissellements et diminuer la capacité annuelle réelle de mobilisation
des ouvrages hydrauliques actuels. Si avec le même apport en précipitations, celles-ci surviennent comme le pré-
voient certains modèles durant une courte période de l’année (un à deux mois), la capacité actuelle des barrages
risque d’être insuffisante. Le potentiel pouvant être réellement mobilisé risque alors de chuter.
51
Au niveau de la qualité des eaux, les trois principaux problèmes posés liés à la pollution organique et par
métaux lourds des eaux, la salinisation des eaux et l’envasement des retenues risquent de prendre une
dimension plus importante dans notre pays en cas de changement climatique :
– Avec des températures de l’air plus élevées, les oueds premiers réceptacles de divers polluants dans la
région verraient la température de leurs eaux augmenter et ainsi leur potentiel en oxygène diminuer (16).
Ces oueds auraient ainsi une capacité d’auto-épuration affaiblie. Par ailleurs, la diminution attendue des
ruissellements rendra plus faible la dilution des polluants rejetés, l’impact sur la qualité de la ressource
en sera accentué ;
– Avec le réchauffement et l’augmentation de l’évaporation, la salinité des eaux des nappes superficielles
augmenterait. Cette salinisation des eaux serait favorisée, d’une part, par la pression forte sur les
nappes due à l’augmentation envisagée de la demande en eau, d’autre part, par l’augmentation prévue
du niveau des mers et l’intrusion des eaux marines pouvant en résulter ;
– L’assèchement des sols pouvant résulter d’un réchauffement climatique avec de longs épisodes de
sécheresses et de fortes inondations pourrait induire une plus grande exposition des sols de la région à
l’érosion. Il en résulterait une augmentation de la pollution solide et de l’envasement des retenues.
En 2020 le capital en eau serait de l’ordre de 720 m3/habitant /an et en cas de changement du climat de la
région conformément aux prévisions, il serait même plutôt de 680m3/hab/an : proche du seuil dit de pénurie
de l’eau (500 m3/habitant /an). (figure 15).
Les estimations faites par la direction générale de l’hydraulique concernant les besoins en eau en 2020
sont de 15.4 milliards de m3. Ces estimations ne prennent pas en compte les possibilités de réchauffement
de la région durant ces 20 années et l’accroissement des besoins en eau qui en résulterait surtout en agri-
culture. Une augmentation de ces besoins de 10 % (ce qui n’est pas énorme !) pour tenir compte de cet
aspect amènerait les besoins vers les 17 milliards de m3.
On serait ainsi en 2020 avec 17 milliards de m3 mobilisables – estimation faite tenant compte du change-
ment prévu du climat de la région – et 17 milliards de m3 de besoins en eau. Cette situation, déjà critique,
reste tributaire de la continuité de l’effort supplémentaire de mobilisation des 2.6 milliards de m3 d’eaux de
surface et des 0.9 milliards de m3 d’eaux souterraines qui restent et qui nécessitent la construction de plu-
sieurs grands barrages et petits barrages et le forage de milliers de puits entre 2000 et 2020.
Il y a donc une convergence entre l’approche capital en eau, et une estimation plus détaillée pour affirmer
que 2020, 2025 seraient des années où les besoins en eau au Maroc dépasseraient le potentiel en eaux
mobilisables : le Maroc entamerait alors une autre étape de son histoire dans un contexte de pénurie
d’eau.
Notons que les hypothèses considérées ici n’ont en rien exagéré la situation probable en 2025. En effet, et
à titre d’exemple, la dégradation de la qualité des ressources en eau et la diminution qui en résulterait au
niveau du potentiel réel en eau mobilisé pouvant être utilisé par les usagers n’ont pas été prises en considé-
ration.
De plus, il a été démontré qu’en 2020 six bassins hydrauliques sur les huit bassins existants seraient défi-
citaires. 35 % des populations du pays disposeraient de moins de 500 m3/hab/an et connaîtraient donc une
pénurie critique de l’eau (27).
Ainsi le secteur de l’eau, élément central de la politique du développement économique et social du
Royaume du Maroc, connaît différentes faiblesses, qui, même sans changement climatique handicaperaient
52
l’évolution socio-économique des décennies à venir : rareté et insuffisances de la ressource par rapport à la
demande ; mauvaise répartition spatio-temporelle de ces ressources ; dégradation de la qualité en relation
avec l’érosion ; la pollution et la salinisation. Le changement climatique prévu et ses conséquences pourrait
accentuer ces faiblesses et rendre le pays dans une situation critique si une stratégie d’adaptation au nou-
veau contexte climatique et socio-économique n’est pas tracée et mise en œuvre.
L’évolution probable du secteur de l’eau, à l’horizon 2025, évaluée ci-dessus, même si elle intègre de gran-
des incertitudes en particulier celles liées à l’évolution possible du climat, pose le problème de l’eau au
Maroc à cette échéance et le besoin de définir des choix stratégiques structurels pour y faire face.
Pour relever ce défi, une stratégie nationale de l’eau s’impose pour les années à venir et ce dans la conti-
nuité de la réforme du secteur de l’eau engagée en 2002 (26). Cette stratégie doit viser l’adaptation de la poli-
tique nationale de développement au nouveau contexte hydrique et socio-économique prévu. Elle pourrait
s’articuler autour des axes suivants :
53
des pertes dues à la dégradation de la santé des citoyens liée à l’utilisation des eaux usées sans traite-
ment, la différence entre ces deux coûts serait encore plus faible. La ressource en eau usée sera cer-
tainement largement compétitive les années à venir
Il faudra veiller à planifier et réaliser des transferts d’eau entre bassins (excédentaire vers déficitaire) pour
équilibrer la situation hydrique du pays.
– Arriver à épurer le plus tôt possible l’ensemble des rejets liquides et solides avant émission dans les
milieux récepteurs : faire appliquer les termes de la loi de l’eau concernant cet aspect ;
– Dépolluer les eaux de surface et souterraines, avec une priorité à donner aux bassins du Sebou et d’
Oum Er Rbia. Il s’agit là de la première priorité de la stratégie nationale de l’environnement. Faire appli-
quer les principes de base de la loi de l’eau « Pollueur-Payeur » et « Préleveur-Payeur » ;
– Instaurer et promouvoir des mécanismes permettant de développer la prévention de la pollution indus-
trielle et agricole en adoptant plus les technologies dites « propres » ;
– Renforcer l’intégration du développement des ressources en eau et de l’aménagement des bassins ver-
sants pour limiter la problématique de l’érosion et ses conséquences ;
– Développer un observatoire de suivi et contrôle des processus de salinisation des eaux sous irrigation et
définir une stratégie adaptée à chaque situation pour atténuer ces phénomènes.
– Renforcer et généraliser aux différents usagers les actions de sensibilisation et vulgarisation, de tarifica-
tion, déjà initiées, en vue de juguler la croissance de la demande en eau ;
– Développer des études économiques permettant de définir les choix prioritaires à faire dans le domaine
de l’agriculture prenant en compte la situation véritable des ressources hydriques du pays et leurs pers-
pectives à moyen terme. Les choix agricoles et les méthodes et techniques d’usage de l’eau dans ce
secteur doivent être appropriés :
R Développer davantage et généraliser les programmes visant à maîtriser la demande en eau agricole en
adoptant des techniques d’irrigation économes en eau (aspersion, irrigation localisée ...) ;
R Adapter les types de cultures au contexte climatique et hydrique tenant compte des vocations agri-
coles des sols et de la demande du marché.
– Développer des mécanismes d’incitations financières et douanières visant à promouvoir les tech-
nologies d’économies d’eau particulièrement celles faisant appel aux énergies renouvelables ;
– Appuyer et renforcer la mise en œuvre effective d’une gestion des eaux décentralisée au niveau des
bassins versants, participative, concertée, impliquant mieux les différents usagers dans les décisions
relatives à l’usage de l’eau ;
– Renforcer et développer les programmes d’amélioration de l’efficience des réseaux de distribution aussi
bien de l’eau potable que des systèmes d’irrigation.
54
5.3.6. Mise en place d’une organisation structurelle pour faire face aux événements
extrêmes liés à l’eau
– Renforcer les capacités techniques, technologiques et humaines dans le domaine de l’eau pour pouvoir
faire face aux défis plus durs pouvant résulter du manque d’eau dans certaines régions du pays ;
– Encourager des programmes de recherche appliquée dans tous les domaines d’usage de l’eau afin de
disposer des solutions prospectives aux problèmes actuels et futurs liés aux effets des changements cli-
matiques éventuels, la gestion de la demande en eau, l’économie d’usage de l’eau...
– Consolider, optimiser et intégrer les réseaux de mesures hydro climatiques du pays pour en faire un
observatoire continu de l’évolution du climat et de l’eau dans toutes les régions hydrauliques ;
– Élaborer un programme d’urgence contre les événements extrêmes du type inondations, sécheresses
extrêmes. Ce programme doit définir les différents volets et acteurs ainsi que les étapes de lancement
du programme.
6. Conclusion et perspectives
Une politique forte et soutenue a été menée dans le domaine de l’eau depuis l’indépendance. Cette poli-
tique a permis de réaliser des objectifs importants et stratégiques tant au niveau de l’eau potable que de
l’agriculture.
Cette politique a toutefois enregistré des retards au niveau de l’approvisionnement en eau potable en
milieu rural, de l’équipement de périmètres irrigués, de l’aménagement des bassins versants et de la protec-
tion et la préservation des ressources des différentes formes de pollution.
Ces retards associés à l’augmentation de plus en plus élevée de la demande en eau et à l’évolution clima-
tique que connaît la région méditerranéenne ces dernières décennies – avec des températures plus élevées,
moins de précipitations et des sécheresses plus fréquentes et plus étalées – risquent de compromettre le
développement socio-économique du Royaume à moyen et long termes si une nouvelle stratégie de l’eau
n’est pas tracée et traduite par des plans d’action précis, réalisables et dont les résultas seraient mesurables.
C’est dans ce sens qu’une première reforme au niveau des modes de gestion de l’eau optant pour une pla-
nification intégrée, décentralisée et participative a été lancée au courant des années 90 et confirmée en
2002. La mise en application de ces reformes se trouve confrontée à des difficultés qu’il est nécessaire de
vaincre.
Dans la perspective de préparer le Maroc de l’après 2025, période durant laquelle le pays sera en situation
de pénurie d’eau et l’ensemble des ressources en eaux conventionnelles mobilisables seraient déjà mobili-
sées, une nouvelle vision prospective du secteur de l’eau s’impose et devrait servir de base pour ali-
menter les reformes nécessaires de ce secteur.
Outre la poursuite des efforts entamés pour arriver à la mobilisation totale des ressources mobilisables et à
le généralisation de l’accès à l’eau potable vers 2020, la vision 2025 du secteur eau pourrait s’articuler
autour des axes suivants :
55
6.1. Limitation et optimisation de la demande en eau
– Orienter dés à présent les choix de développement économiques tant au niveau national qu’au niveau
des régions vers des secteurs peu consommateurs d’eau : Éviter toute agriculture dont le rendement
serait trop faible avec une eau dont le coût risque de croître fortement ; aller vers des activités agricoles
peu consommatrices d’eau, s’orienter vers le tourisme avec comme facteur limitant connu l’eau ... Il
sera utile de réaliser des études économiques permettant de prendre en compte le véritable coût de
l’eau en vue d’évaluer réellement les secteurs ou l’handicap eau n’est pas pénalisant ;
– Promouvoir les technologies permettant l’économie dans l’utilisation de l’eau en particulier en agri-
culture. Des incitations financières importantes et encourageantes s’imposent dans ce sens ;
– Aller de plus en plus vers un prix de l’eau réel et transparent que le citoyen, le secteur privé devra assu-
mer pour appuyer la politique de l’état en la matière ;
– Renforcer les capacités nationales en matière d’économie d’eaux : aux niveaux institutionnel, régle-
mentaire et humain (de l’expert à l’agriculteur et au citoyen consommateur de l’eau potable).
– Veiller à épurer toutes les eaux usées avant rejet dans le milieu récepteur : l’un des outils pour atteindre
cet objectif pourrait être la loi sur l’eau si elle est appliquée correctement avec son principe « pollueur-
payeur » ;
– Lancer des programmes intégrés de dépollution de certains bassins versants stratégiques comme le
Sebou et Oum Er Rbia.
– Définir des à présent une politique nationale intégrée eau-énergie pour pouvoir aller vers le dessalement
des eaux de mer de façon organisée et planifiée : les Énergies Renouvelables devraient trouver leur
place dans cette dynamique. L’expérience de la station de Tan Tan où l’éolien est utilisé comme source
d’énergie est à renforcer ;
– Réaliser et renforcer les projets actuels de dessalement et de déminéralisation des eaux de mer pour
permettre une acquisition progressive de la technologie et préparer les champs d’eaux des décennies
2030 et 2040.
– Disposer d’une meilleure et plus précise évaluation de notre potentiel en eaux de surface et souterraine
et de la partie mobilisable de ces ressources devient impératif (cycle de l’eau). Notre planification de la
politique de l’eau à moyen terme est conditionnée par cette connaissance ;
– Renforcer les réseaux météorologiques, hydrologiques, hydrogéologiques et du suivi de la qualité des
56
eaux pour consolider notre connaissance de ce potentiel eau, son évolution et en atténuer les impacts
négatifs ;
– Renforcer la capacité de l’expertise nationale dans le domaine de l’eau pour lui permettre d’accompa-
gner le Royaume dans les nouvelles étapes attendues avec un intérêt particulier pour l’optimisation de la
demande en eau, l’économie d’usage de l’eau et le dessalement des eaux de mer ;
– Mettre en place une banque de données relatives à l’eau, transparente et accessible pour permettre une
plus grande activité scientifique et technique et inciter des programmes finalisés de recherche autour de
l’eau.
Ainsi et pour aller dans le sens de cette vision eau 2025 la stratégie nationale de l’eau devrait, dés à
présent, intégrer le facteur Énergie parmi les autres éléments stratégiques de cette vision ; un rap-
prochement entre les politiques des deux secteurs eau-énergie s’impose pour réussir le pari de déve-
loppement durable du Maroc de 2025 !
Références
(0) « Climat-eau, le savoir et la technologie » Ambroggi, kabbaj (1993) Académie du Royaume du Maroc
1993.
(1) « L’eau et les Changements Climatiques au Maghreb » ouvrage réalisé dans le cadre du projet PNUD-
FEM RAB 94G31 : Ministère en charge de l’environnement-Maroc, 1998.
(2) « Vulnérabilité du Maroc face aux changements climatiques » Étude réalisée dans le cadre du projet
PNUD-FEM RAB94G31 : Ministère de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’habitat et de l’envi-
ronnement, 2001
(3) « Communication Nationale Initiale du Maroc à la Convention Cadre des Nations Unis sur les Change-
ments Climatiques », Ministère de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’habitat et de l’envi-
ronnement, 2001
(4) « État de l’environnement du Maroc » ; Ministère de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de
l’habitat et de l’environnement, 2001
(5) « Évaluation du coût de la dégradation de l’Environnement au Maroc », Document de la banque mondiale,
2003
(6) « Un siècle d’observations météorologiques : sécheresses et gestion des eaux au Maroc », Ministère de
l’agriculture, de l’équipement et de l’environnement, 1997.
(7) « Les grands barrages du Royaume » ; Ministère de l’Agriculture, de l’équipement et de l’environnement
– Département de l’équipement. 1998.
(8) « The regional impact of climat change : An assessment of vulnerability » rapport de l’IPCC groupe II,
1997.
(9) « Changements climatiques : Évolution régionale Maroc ». AGOUMI A., NAJI A., RAHIB H. Revue Maro-
caine de Génie Civil, no 33, Avril 1991.
(10) Conseil supérieur de l’eau et du climat, 1994.
(11) Conseil supérieur de l’eau et du climat, 2001
(12) Banque mondiale, World developement indicators, 2001
(13) « Changements climatiques et ressources en eau au Maroc » MOKSSIT A., BENBIBE A., OULDBBA A.,
BENABDELFADE A., BENSAID F. Rapport établi dans le cadre du projet PNUD/RAB 94G31, 1998
57
(14) « Développement des ressources en eau au Maroc » – JELLALI M. – Direction générale de l’hydraulique
– Ministère des travaux publics, 1995
(15) « Développement des ressources en eau au Maroc ». Documents du premier forum mondial de l’eau.
Direction générale de l’hydraulique – Ministère des travaux publics – MARRAKECH 1997
(16) « Variabilité climatique et ressources en eau au Maroc ». AGOUMI A – Présenté lors du colloque Inter-
national « Eau : Gestion de la rareté » organisé par l’Amicale des Ingénieurs Marocains des Ponts et Chaus-
sées, les 19 et 20 Octobre 1995.
(17) « Politique et stratégies de gestion des ressources en eau au Maroc » BZIOUI M – Académie du
Royaume du Maroc – session de novembre 2000.
(18) « Développement des ressources en eau au Maroc » JELLALI M. Options méditerranéennes, ser
A/No 31 1997 Séminaires Méditerranéens
(19) « Les changements climatiques et la gestion de la sécheresse au Maroc : un siècle d’observations
météorologiques » – DIOURI. A – Académie du Royaume du Maroc – session de novembre 2000.
(20) « Bienfaits des barrages et développement économique et social au Maroc » – ZITOUNI. B – Académie
du Royaume du Maroc – session de novembre 2000.
(21) « Une bonne lecture de la loi de l’eau pour une véritable gestion de la ressource » BALAFERJ. R – Aca-
démie du Royaume du Maroc – session de novembre 2000.
(22) (« Données relatives au secteur de l’eau » 2004) Communication de la part du secrétariat d’état chargé
de l’eau 2004.
(23) « le territoire marocain – état des lieux » Ministère de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de
l’habitat et de l’environnement, 2000
(24) « Plan d’action national pour l’environnement » Ministère de l’aménagement du territoire, l’urbanisme,
de l’habitat et de l’environnement, 2002.
(25) « Le dessalement au Maroc – Réalisations et Perspectives » Rapport établi par l’ONEP – 2004.
(26) « Maroc, une politique de l’eau en constante évolution » Ministère de l’aménagement du territoire, de
l’eau et de l’environnement, présentation faite lors du forum mondiale de l’eau Kyoto, 2003.
(27) « Secteur de l’eau au Maroc » Rapport de l’agence Française de Développement, 2003.
(28) « Drought in Morocco and its relation to El MOULARAK ». C.W. STOCKTON, A. DEBBARH, A. ALLALI.
Séminaire sue l’économie de l’eau et irrigation des Agrumes, ORMVA/SM – IAV Hassan II, SASMA-
ASPAM, Taroudant, 5 et 6 Juin 1992.
(29) « La valorisation de l’eau en agriculture : au-delà du million d’hectares irrigués ». M. Yacoubi, Académie
du Royaume du Maroc – session de novembre 2000.
(30) « Élaboration d’une base de données des pesticides à usage agricole utilisés au Maroc ». L. Erraki, B.
Ezzahiri, M. Bouhache & M. Mihi. Proceedings du 5e congrès de l’AMPP, Rabat, 30-31 mars 2004.
(31) « Programme d’Action National PAN de Lutte contre la Désertification ». Ministère de l’Agriculture, du
Développement Rural et des Eaux et Forêts, juin 2001.
(32) « L’Irrigation au Maroc » : un choix stratégique pour le développement agricole et la sécurité alimentaire,
Revue thématique sur « Irrigation et Développement », Agridoc-BDPA, numéro 4, octobre 2002.
(33) « Aménagement Hydro-agricole : situation actuelle et perspectives ». 7e session du Conseil Supérieur
de l’Eau, Rabat, avril 1993.
(34) « L’Économie d’Eau, une opportunité et un défi pour le secteur de l’irrigation », 9e session du Conseil
Supérieur de l’Eau et du Climat, Agadir, mars 2001.
58
L’ÉNERGIE : développement énergétique
au Maroc depuis 1955, perspectives 2025
Introduction .............................................................................................................. 61
59
A. MOUNIR DEBBARH
60
L’énergie est au cœur de tous les progrès et développements qu’a connus l’humanité depuis l’invention de
la roue, la navigation à voile et plus proche de nous, les révolutions industrielles du charbon puis du pétrole et
de l’électricité qui ont, sans conteste, modelé la civilisation du XXe siècle où l’urbanisation, les transports
rapides, les télécommunications audio-visuelles, les avancées scientifiques et technologiques, constituent
les piliers du formidable essor des échanges et de la richesse des nations.
Cependant, si le monde n’a jamais été globalement aussi opulent, il demeure marqué par des gaspillages
et des disparités qui consacrent sa division en deux blocs, composés, d’un côté, par des pays industrialisés,
démographiquement minoritaires, mais développés et riches, et de l’autre côté, par les pays du tiers-monde,
sous développés et pauvres. À partir des années 50, avec les luttes pour l’indépendance, et depuis les
années 70, avec les travaux du Club de Rome, une prise de conscience universelle s’est opérée sur la néces-
sité, d’une part, de réduire les inégalités entre le Nord et le Sud, et d’autre part, d’assurer un développement
durable centré sur l’homme et respectueux des équilibres écologiques et environnementaux de la planète
qui, autrement, courrait vers une impasse grave la conduisant à sa perte.
Cet exposé tente d’abord d’examiner les efforts déployés par le Maroc, depuis son indépendance, pour
satisfaire ses besoins en énergie afin d’assurer son développement économique et social avant d’analyser la
politique énergétique mise en place pour répondre à la demande énergétique présente et future d’ici l’hori-
zon 2025.
Dans ce but, Il a semblé judicieux de partir de la situation d’aujourd’hui, fruit de l’évolution passée et illus-
tration de la problématique énergétique du Maroc et de la prendre comme base de référence pour dégager
les perspectives énergétiques pour le premier quart du XXIe siècle.
61
1. Problématique énergétique du Maroc
Le Maroc doit relever de nombreux défis dont la forte contrainte énergétique à laquelle il est soumis et
qu’il est nécessaire desserrer pour dégager une meilleure perspective à son essor économique et social.
La problématique énergétique est illustrée par la situation énergétique marocaine, caractérisée actuelle-
ment par les traits suivants :
Les réserves prouvées restantes récupérables de 1550 Kilo Tonnes Équivalent Pétrole (KTep = 1000 Tep)
répartis en :
– Gaz naturel : 1250 KTEP ou 1,4 Milliards de m3
– Condensat : 300 KTEP
– Charbon : épuisé avec le gisement de Jerrada
62
1.2.2. La recomposition de sa structure
Avec :
63
1.3. Une balance énergétique structurellement déficitaire
Avec des ressources nationales réduites dont la production est très insuffisante pour couvrir sa consom-
mation croissante en diverses énergies, le Maroc importe aujourd’hui la quasi totalité de ses besoins en
pétrole brut et en charbon, la majeure partie des GPL, butane surtout, un appoint en quelques autres produits
pétroliers, comme le gas-oil, et une partie de son électricité qui peut se révéler importante dans les années
de mauvaise pluviométrie.
Cette dépendance de l’extérieur s’est aggravée au cours du temps, entraînée par une détérioration
constante du déficit énergétique qui d’environ 73 % en 1970 grimpe à 83 % en 1980 pour se situer actuel-
lement à 96-97 % en fonction de la pluviométrie. Ceci reflète la diminution de la contribution des res-
sources nationales à la satisfaction de la consommation croissante en énergie, qui passe de 30 % en 1970 à
17 % en 1980 pour chuter à moins de 5 % actuellement avec l’épuisement des gisements charbonnier et
pétrolier et la modestie relative de la production hydroélectrique.
64
Tableau 2 : Évolution de la production et de la consommation du charbon
Charbon local Consommation de charbon P/C en %
1955 467 000 500 000 93
1965 636 000 546 400 116
1970 657 000 537 000 122
1980 628 600 662 500 95
1990 518 000 1 987 500 26
2000 28 570 4 584 000 0.6
2003 0 6 141 000 0.0
Les interconnections avec les réseaux électriques de l’Algérie et, plus récemment, de l’Espagne per-
mettent au Maroc de compenser la variabilité incontrôlable de la production hydroélectrique et de réguler son
offre électrique pour mieux répondre à la demande tout en profitant des échanges avantageux que ces liai-
sons permettent.
Le creusement du déficit de la balance énergétique, faute de ressources nationales adéquates pour faire
face à la croissance de la demande, entraîne des importations de plus en plus importantes, notamment en
produits pétroliers et en charbon, alourdissant d’autant la facture énergétique..
65
en 1951 à 1500 KT aujourd’hui, et celle de la SAMIR à Mohammadia, en service depuis 1962, qui, conçue au
départ pour traiter annuellement 1250 KT de brut, en met en œuvre actuellement plus de 7000 KT.
En 1955, Le Maroc consommait 670000 T de produits pétroliers finis satisfaits à hauteur de 14 % par la raf-
finerie de Sidi Kacem (92000 T) à partir du brut national et à 86 % par des importations (578000 T). Dix ans
plus tard, en 1965, la tendance s’est inversée pour se perpétuer jusqu’à nos jours, les importations crois-
santes de brut se substituant à celles des produits finis importés en quantités réduites, sauf pour le butane,
pour compléter la production des deux raffineries qui, par ailleurs, exportent leurs excédents, notamment le
naphta. Ce que montre le tableau suivant qui décrit l’évolution des importations de pétrole brut, la production
des raffineries et la consommation en produits pétroliers (en 1000 TEP) :
66
1.4.4. facture énergétique alourdie
L’importance de la facture énergétique du Maroc non producteur de pétrole et où les produits pétroliers
sont dominants dans sa consommation énergétique, dépend essentiellement des cours du brut qu’il importe
en totalité.
Les bas prix du pétrole qui ont prévalu jusqu’en 1972 ont permis au Maroc de s’approvisionner en brut
sans grande pression sur ses finances extérieures. C’est ainsi que la facture pétrolière est passé de 64 à
114 millions de Dirhams (MM DH) entre 1963 et 1970 pour des volumes de brut importé respectivement de
865 KT et 1504 KT, le prix moyen pondéré sur la période s’établissant en Dirham courant à environ 75 DH/
tonne équivalent à 2 /baril. Les achats en produits énergétiques, rapportés aux importations et aux exporta-
tions totales du pays n’ont pas dépassé 7 % entre 1970 et 1973, et ont absorbé de 25 % à 33 % des
recettes d’exportations de phosphate.
Le premier choc pétrolier de 1973 se produit quand l’OPEP décide d’augmenter les prix du brut pour les
porter à 12 le baril, le quadruple du niveau moyen de 3 pratiqué jusqu’à lors. Le montant de la facture
pétrolière quadruple aussi en une année, passant de 257,5 MM DH en 1973 à 1067 MM DH en 1974, pour
désormais absorber une part croissante de nos exportations totales, bondissant de 6,8 % en 1973 à 14,3 %
en 1974 pour dépasser les 20 % en 1976 et se trouver à plus de 26 % en 1978. L’indexation éphémère des
prix à l’export des phosphates sur ceux du pétrole a permis entre 1974 et 1975 de couvrir la totalité de nos
achats en énergie avec un peu plus de 26 et 30 % de nos recettes de phosphates, mais cette tentative ayant
échoué, ce taux de couverture grimpe à 56 % dés 1976 pour atteindre 81,5 % en1978.
Le second choc pétrolier de 1979-1980 frappe de plein fouet le Maroc, quand les prix du brut flambent à
35-40 /baril au lendemain de la révolution iranienne et du déclenchement de la guerre Irak-Iran qui font
peser une menace de pénurie pétrolière. La facture énergétique va absorber 36,3 % de nos exportations
totales en 1979 équivalent à 112 % de nos recettes de phosphate exporté. Ces pourcentages montent à
41 % et 113 % respectivement en 1980 pour arriver à 50 % et 115 % en 1981 quand sa valeur va dépasser
les 6 Milliards de Dirhams et atteindre plus de 10 Md DH en 1985, soit respectivement 6 et 10 fois son mon-
tant de 1974 (1067 MM DH) qui avait déjà plus que doublé en 1979 (2770 MM DH). Entre 1980 et 1985 il a
fallu consacrer l’équivalent de 6 à 9 % de notre PIB à la facture pétrolière.
Le contre choc de 1986 dû à la pléthore d’offre pétrolière, suite principalement aux découvertes de la Mer
du Nord et à la politique de reconquête des parts de marché par les pays de l’OPEP. En février 1986, les
cours du brut chutent à 10 $/baril pour remonter et fluctuer entre 15 et 22 $ jusqu’au milieu de 1999, à
l’exception d’une flambée éphémère à 35 $ en août 1991, au moment de l’invasion du Koweit par l’Irak. Bien
que nos importations de pétrole et de charbon continuent à augmenter, cette détente durable du marché
pétrolier soulage considérablement notre facture énergétique qui va baisser à 4 % du PIB durant toute cette
période et absorber en moyenne 20 % de nos exportations totales, le prix CIF moyen étant de 17.75 $/baril.
La hausse des prix du brut reprend à la fin de1999 et semble inaugurer un cycle haussier durable des
cours du pétrole, si la reprise économique mondiale se confirme comme il est le cas aux USA et en Asie, et
surtout en Chine dont l’économie croît à plus de 7 % par an. Le prix CIF moyen du baril importé au Maroc
monte de 17 $ en 1999 à 27.25 en 2000, et nos importations énergétiques ont représenté 18 % des importa-
tions totales et ont été couverts par 28 % des exportations.
Les 2004-2005 connaissent une nouvelle flambée des prix du brut, dépassant le seuil historique de 70 $.
Des projections plus pessimistes envisagent le maintien de cette tendance haussière. La facture pétrolière
nationale a augmenté de ... % en 2004 et de ... % estimée pour 2005, soit ... MDhs
67
1.5. Poids du secteur énergétique dans l’économie nationale
Le Maroc conscient de l’importance cruciale de l’énergie pour son développement économique et social a
depuis toujours déployé de grands efforts pour développer son potentiel énergétique. Malheureusement, les
résultats n’ont pas été jusqu’à maintenant à la hauteur de ses espérances, du moins dans les domaines
pétrolier et charbonnier. Cette partie de l’exposé va passer en revue l’évolution des moyens et des politiques
mis en œuvre pour développer le secteur énergétique marocain.
68
de recherche pétrolière, le BRPM, entreprise publique créée en 1928 et la SCP à capitaux privés en 1929,
jusqu’à la relève du premier par l’ONAREP en 1981 et la fusion du second avec la SAMIR après leur privatisa-
tion en 1997 par cession au groupe saoudien, Coral.
Période 1957-1980
En 1958, avec la promulgation du premier code des hydrocarbures plus moderne, la relance de
l’exploration est immédiate aussi bien par les sociétés nationales que par la quinzaine de compagnies étran-
gères de différentes nationalités qui affluent au Maroc, parmi lesquelles on trouve Agip, Erap, Esso, Pétro-
fina-Apex, Preussag, Candel & Allen, SNPA, Tosco, Burmah et d’autres. La recherche s’élargit à de nouveaux
bassins terrestres, Tarfaya, Essaouira, Souss, Doukkala, Hauts Plateaux, et pour la première fois à l’offshore
au large de Tarfaya, Agadir, Essaouira, Larache.
Plus de 200 forages sont effectués dont 15 en offshore et le reste en onshore avec 110 dans le Gharb-
Prérif et 51 à Essaouira. En mer, seul Esso, après 8 forages au large de Tarfaya découvre au puits MO-2 une
petite accumulation de pétrole lourd inexploitable. À terre les découvertes sont mineures, les réserves
récupérables étant estimées pour le bassin d’Essaouira, à 910.000 tonnes d’huile à Sidi Ghalem et
800.000.000 m3 de gaz à Jeer et Kechoula pour la SCP, 200.000.000 m3 de gaz associé à 100.000 tonnes de
condensat à Toukimt pour le BRPM, et 700 millions de m3 de gaz notamment pour APEX dans le Gharb. Les
résultats demeurent très insuffisants comme au temps du protectorat.
Période 1981-2003
L’ONAREP est créé en novembre 1981 par transfert de l’activité pétrolière du BRPM pour redynamiser
la recherche pétrolière essoufflée par les déceptions passées. Cette décision intervient en plein deuxième
choc pétrolier dans un contexte favorable où les compagnies pétrolières internationales, devant des cours
pétroliers en hausse, entreprennent l’exploration pétrolière hors des pays OPEP et intensifient les
recherches sur la pyrolyse des schistes bitumineux de par le Monde.
De 1981 à 1985, l’ONAREP concentre ses efforts d’une part, sur l’appréciation et le développement rapide
de la découverte de Meskala faite par le BRPM en 1980 et dont les experts de la Banque Mondiale estiment
les réserves à des centaines de millions de TEP de gaz et de condensat, et d’autre part, sur l’accélération de
la mise en valeur des roches bitumineuses de Timahdite. Des moyens financiers importants sont engagés
dont deux prêts de 75 et 20 Millions US$ de la BIRD en plus des dotations budgétaires de l’État. Parallèle-
ment, il s’attèle à attirer les compagnies pétrolières internationales dans l’exploration au Maroc.
L’ONAREP réalise 10 forages à Meskala dont seulement 4 sont positifs avec des réserves récupérables
limitées à 1 Milliard de m3 de gaz associés à 200.000 Tonnes de condensat. Il continue par ses propres
moyens l’exploration dans d’autres bassins où 12770 Km de sismique sont acquis et 43 forages exécutés qui
aboutissent à des découvertes insignifiantes de moins de 50 millions m3 de gaz associé à 4500 de tonnes de
condensat dans la région d’Essaouira.
Plusieurs accords pétroliers sont signés avec des compagnies d’envergure mondiale, comme ARCO,
AMOCO, MOBIL, ESSO, ELF AQUITAINE, qui acquièrent 20 420 Km de lignes sismiques notamment dans
l’offshore (18010 Km) et forent sans résultat appréciable 20 puits dont 13 à terre et 7 en mer.
Au niveau des schistes bitumineux, l’usine pilote construite à Timahdite par ONAREP montre la non fiabi-
lité du procédé marocain de pyrolyseT3. Shell, après d’importants travaux et études technico-économiques
sur les schistes bitumineux de Tarfaya dont le potentiel est estimé à 4 milliards de tonnes de pétrole, conclut
à la non rentabilité du projet à moins de 40-50 $/baril et abandonne ses recherches après avoir dépensé quel-
que 20 Millions $.
De 1986 à 1996, les compagnies pétrolières durement affectées par la chute durable des prix du pétrole
69
quittent le Maroc où leurs travaux ont été vains. La promulgation en 1992 d’une nouvelle loi pétrolière plus
avantageuse produit très peu d’impact. L’ONAREP avec des ressources financières propres insignifiantes et
des dotations budgétaires très limitées consacrées au remboursement des prêts de la Banque Mondiale,
réduit drastiquement son activité d’exploration et procède à sa restructuration qui entraîne le départ volon-
taire indemnisé d’un millier de ses agents.
Peu de travaux sont entrepris, totalisant 23 forages dont 21 à terre et uniquement 2 en offshore. Quelques
petites découvertes sont cependant réalisées avec la SCP, 60 000 tonnes de pétrole à Sidi Ghalem et
400 Millions de m3 de gaz dans le Gharb qui en remédiant à la déplétion des gisements d’APEX permettent
de reprendre les livraisons à la CMCP arrêtées en 1991 faute de production suffisante. Malgré les espoirs
déçus, l’ONAREP maintient sa stratégie de promotion du potentiel pétrolier des bassins sédimentaires maro-
cains auprès de l’industrie pétrolière internationale.
À partir de 1997 avec une accélération depuis 2000, à la suite des amendements très incitatifs apportés
à la loi pétrolière d’avril 1992, les activités de recherche pétrolière au Maroc connaissent une relance sans
précédent, portée par une conjoncture internationale en général et pétrolière en particulier favorable, mar-
quée par le redressent des cours du brut et la reprise des investissements d’exploration des compagnies
pétrolières encouragées par leur succès en offshore et notamment en mer profonde où d’importantes
découvertes ont été réalisées dans les Golfes du Mexique et de Guinée, en Angola, au Brésil et en Nouvelle
Écosse. Le Maroc bénéficie de ce renouveau avec l’afflux de plusieurs sociétés pétrolières qui signent avec
L’ONAREP plusieurs accords portant notamment sur les zones maritimes profondes où les études prélimi-
naires montrent des similitudes et des analogies avec les régions précitées.
Actuellement, 17 sociétés pétrolières opèrent sur notre territoire aussi bien à terre qu’en mer, comprenant
des firmes de différentes tailles allant des majors comme Shell et Total, aux grands indépendants comme
Eni, Repsol, Kerr McGee, Maersk, les grandes sociétés nationales internationalisées comme Petronas et
Norsk Hydro jusqu’aux compagnies émergentes de moindre dimension mais très dynamiques comme
Vanco, Energy Africa, Maghreb Petroleum Exploration, Cabre et d’autres. Nos partenaires ont acquis plus de
60 000 Km de sismique 2D dont 95 % en mer où pour la première fois au Maroc de la sismique 3D a été tirée
couvrant plus de 11000 Km2.
Les résultats prometteurs de ces travaux qui ont permis d’identifier plusieurs prospects, ont encouragé
certains de nos associés à réaliser des forages offshore qui ont commencé en mai 2004. Le premier a été
achevé par Vanco en juin sur le permis Cap Draa Offshore et ses résultats vont être analysés et appréciés.
Deux autres sont en cours d’exécution par Shell sur les permis Rimella et Ras Tafelney. D’autres partenaires
s’apprêtent à effectuer ultérieurement d’autres forages dès qu’ils auront terminé l’interprétation de leurs tra-
vaux géologiques et géophysiques.
Auparavant, 7 forages terrestres ont été exécutés, aboutissant pour Cabre dans le Gharb à des décou-
vertes évaluées à environ 50 millions de m3 de gaz et pour l’ex Lone Star, devenu depuis MPE, à la mise à
jour d’accumulations de gaz et de pétrole à Talsinnt avec des réserves qui restent à prouver par des forages
d’appréciation pour en confirmer la consistance.
En résumé, les efforts déployés jusqu’à maintenant demeurent très insuffisants et les bassins sédi-
mentaires marocains sous explorés avec une densité de forage de moins de 4 forages par 1000 Km2 contre
une moyenne mondiale de 80 forages par 100 Km2. Ce qui explique les résultas modestes obtenus avec des
découvertes cumulées de moins de 3 Millions de tonnes d’huiles et 3,5 Milliards de m3 de gaz. De plus, les
recherches, concentrées sur des zones limitées et des objectifs géologiques superficiels, ont été menées
avec des moyens techniques inadéquats pour les approfondir et prospecter plus avant les formations plus
prometteuses du Trias, du Jurassique, du crétacé et du Paléozoïque. Dans l’offshore atlantique dont les bas-
sins sédimentaires couvrent plus de 350 000 km2, seulement 30 forages ont été exécutés en eau peu pro-
70
fonde et concentrés sur la zone Agadir-Tarfaya avec un certain nombre arrêté sur instrumentation. En
Méditerranée, seuls deux forages ont été effectués au large de Nador.
Il faut espérer que les hautes technologies utilisées actuellement, sismique 3D, modélisation des bassins,
observations et cartographies par satellites, vont permettre de mettre en valeur nos richesses réelles en
hydrocarbures.
2.1.2. Le charbon
Avec les mêmes motivations que pour le pétrole, le protectorat cherche à développer l’activité charbon-
nière au Maroc pour approvisionner, d’une part, la métropole qui ne dispose pas de grandes réserves houil-
lères comme l’Angleterre ou l’Allemagne, et d’autre part, le développement industriel impulsé par les
sociétés françaises installées au Maroc.
Le BRPM créé en décembre 1929, avait aussi pour objectif de développer le gisement d’anthracite décou-
vert en 1927 à Jerrada. En décembre 1946 il participe à la constitution de la société Charbonnages Nord-
Africains, dotée d’importants moyens financiers pour équiper et exploiter à grande échelle la mine.
Après l’indépendance, à part Jerrada, qui est d’ailleurs exploitée jusqu’en 1970 à moins de 500.000
tonnes, alors qu’équipée depuis 1953 pour une capacité de 700.000 tonnes, les efforts de recherche ne
donnent lieu à aucune nouvelle découverte. La concurrence de l’hydroélectricité en développement et du
fuel-oil, dont l’utilisation augmente dans les centrales thermiques, freine la production de Jerrada. Il faut
attendre la politique plus volontariste des années 70 et la mise en service de la centrale thermique de Jerrada
en 1971-1972 qui absorbe 95 % du charbon extrait, pour que la production de la mine dépasse les 700.000
tonnes et atteigne un maximum de 835.000 tonnes en 1984. Malgré les transformations et travaux d’appro-
fondissement réalisés, l’objectif du million de tonnes ne sera jamais réalisé. L’augmentation des coûts et des
difficultés d’exploitation, les réserves limitées en déclin et la vente du charbon sous le prix de revient,
mettent les CDM dans une situation financière intenable qui a entraîné sa fermeture en 2000.
2.1.3. L’hydroélectricité
En 1955, le Maroc dispose de 12 barrages construits sous le protectorat, dont l’important complexe de Bin
EL Ouidane-Afourer, qui produisent 770 GWH d’hydroélectricité, représentant plus de 85 % de l’énergie
électrique totale produite de 910 GWH, la part du thermique étant de15 %. En terme de puissance, les parts
sont respectivement de 76 % pour hydraulique (316,7 MW) et 24 % pour le thermique (98,5 MW).
Pendant la période 1960-1972, le rythme d’équipement en barrages est ralenti et seulement deux cen-
trales sont mises en service, Mohamed V et Bouareg, portant la puissance hydroélectrique globale à 362,5
MW. La part de l’hydroélectrique commence à diminuer par rapport celle du thermique (310,5 MW) avec res-
pectivement en 1972 54 % et 46 % de la puissance totale installée. Au plan de la production, la contribution
de l’hydroélectricité baisse de 92 % en 1960 à 69 % en 1972 pour une production totale d’électricité qui a
plus que doublée entre les deux dates en passant de 1012 GWH à 2311 GWH.
De 1972 à 2003, douze nouveaux ouvrages hydroélectriques ont été mis en production, totalisant une
puissance de 965 MW s’étalant de 6,4 à 247,5 MW et dont les plus importants sont les usines d’Al Massira
(128 MW), Allal El Fassi (240 MW), Al Wahda (247,5 MW) et Ahmed Al Hansali (92 MW). À l’achèvement des
travaux lancés en 2001 de la Station de Transfert d’Énergie par Pompage (STEP) d’Afourer de 450 MW, le
Maroc disposera d’une puissance totale installée en hydroélectricité de 1715 MW, soit 54 % de la puissance
thermique totale installée en 2003 (3189 MW).
Le renversement de la situation en faveur définitivement du thermique s’est accentué, la longueur du
71
temps de maturation des projets hydroélectriques ne permettant pas de suivre le rythme de progression éle-
vée de la demande électrique. À partir de 1973, la capacité des groupes thermiques dépasse celle de
l’hydraulique, d’abord par recours au fuel-oil et aux turbine à gaz pour assurer la pointe, puis avec les chocs
pétroliers et la hausse des prix du pétrole, par le basculement au charbon importé qui se substitue au fuel
comme combustible dans les deux dernières tranches de Mohammadia (300 MW) mis en service en 1984-
1985 et dans les quatre centrales de Jorf Lasfar (330 MW chacune) en production depuis 1994 pour les deux
premières et 2001 pour les deux autres.
Les réalisations les plus remarquées mais à une échelle encore limitée concernent :
– La mise en service du parc éolien de Abdekalek Torres de 53 MW.
– Les systèmes éoliens isolés de Moulay Bouzerktoune et Sidi Kaouki près d’Essaouira totalisant 65 KW.
– Le début d’électrification par kits solaires de 7000 foyers à Taroudant et par kits photovoltaïques de
32 000 foyers dans les régions du Centre et du Nord.
La puissance installée actuellement, estimée à 6 MW, sert aux besoins électriques de 2000 foyers, au
pompage d’eau potable et aux télécommunications des sites isolés.
Les projets planifiés produiront dans le moyen terme un plus grand apport avec l’implantation des parcs
éoliens de Tanger et Tarfaya totalisant 200 MW et la réalisation de la centrale thermo-solaire de 180 MW à
Ain Béni Mtar qui fonctionnera au gaz pour 2/3 et l’énergie solaire pour 1/3.
Les actions de promotion de la commercialisation du matériel par les micro entreprises dites Maisons-
Énergie et de l’utilisation des chauffe-eau solaires (PROMASOL) dans le secteur immobilier pourrait jouer un
rôle non négligeable dans le développement du solaire.
72
L’ONE contrôle toute la filière électrique, depuis la production, le transport et la distribution sauf pour la
basse tension qui est pour la plupart gérée par des régies municipales.
Dans le raffinage, la SAMIR, dont le capital est détenu à sa création en 1959 à 50 % par l’ENI à égalité
avec l’État, passe complètement sous le contrôle de ce dernier en 1973 avec la marocanisation.
La SCP considérée comme privée, malgré son caractère mixte, était de fait une filiale du BRPM puis de
l’ONAREP. À la veille de sa privatisation en1997, l’ONAREP et le Trésor détenaient 73,88 % de son capital,
Elf 20,48 % et le reste par le public.
Pour le charbon, les Charbonnages Nord-Africains (CNA) de société d’économie mixte dont les actions
sont détenues à sa création en 1946 à 33 % par le BRPM, l’État français et des intérêts privés, passe pro-
gressivement après l’indépendance sous le contrôle de l’État marocain qui en détiendra 98 % du capital en
1972 à travers le BRPM, après le rachat de la part des sociétés françaises et belges, le Trésor français lui
ayant cédé sa participation de 15 % dès 1957.
Dans les activités pétrolières amont, Le BRPM avec le code pétrolier de 1958 et après lui l’ONAREP, à
travers leurs participations obligatoires dans les permis de recherches et les concessions d’exploitation,
contrôlent l’exploration et la production des hydrocarbures, par ailleurs largement ouvertes à travers les asso-
ciations, aux tiers qui remplissent les conditions de capacités techniques et financières.
73
engagées par le Maroc dans le but de favoriser les investissements privés, ouvrir les marchés à la compéti-
tion, libéraliser progressivement les différents secteurs pour améliorer leur efficacité et leur compétitivité.
Ces options sont illustrées par le transfert de plusieurs services et sociétés publiques au capital privé et le
secteur de l’énergie a joué un rôle majeur dans ce processus de privatisation et de libéralisation. C’est ainsi
que sont intervenues :
– La privatisation des sociétés de distribution des produits pétroliers en 1994 avec la rétrocession par la
SNPP de ses parts aux sociétés de son groupe et celle des sociétés de raffinage SAMIR et SCP en 1997
au groupe saoudien Coral qui les a fusionnées en 1999.
– La perte du monopole de production électrique par l’ONE par le décret-loi du 23 septembre 1994 per-
mettant au secteur privé de devenir producteur sous un régime de concession à long terme imposant au
concessionnaire la capacité, le mode de fonctionnement et le combustible avec garantie de fourniture
exclusive à l’ONE de l’électricité produite pendant la durée du contrat. Cette réforme reste limitée,
l’ONE gardant la main mise sur la commercialisation et le transport de l’électricité. Les premières appli-
cations de cette politique ont commencé avec les concessions des centrales de Jorf Lasfar à ABB/CMS
(JLEC), du parc éolien de Abdelkalek Torres à la Compagnie Eolienne du Détroit. Il en est de même pour
la future centrale à cycle combiné de Tahaddart, première filiale de l’ONE en partenariat avec Endesa et
Siemens, et qui constitue le premier jalon du développement du gaz dans notre pays en utilisant en
nature la royaltie reçue par le Maroc sur le passage du gaz algérien livré à l’Espagne à travers le Gazoduc
Maghreb-Europe mis en service en 1996 et exploité aussi par une société concessionnaire, Metragas.
– Le système de concession est aussi appliqué par la délégation de la distribution de l’électricité et de
l’eau à des opérateurs privés. Les premières expériences ont démarré à Casablanca avec Lydec, à Rabat
avec Rédal ainsi qu’à Tanger et Tétouan avec Amendis.
– Et Tétouan avec Vivendi.
– Pour l’instant, l’amont pétrolier n’est pas touché explicitement. Mais les amendements de mars 2000
apportés à la loi sur la recherche pétrolière d’avril 1992, en stipulant que la participation de l’État est au
maximum de 25 %, n’exclue pas le principe que celle-ci soit nulle et que des entreprises puissent dans
ce cas agir seules, l’État ne remplissant alors, en tant que partenaire, qu’un simple rôle de contrôle.
Ces réformes n’ont concerné que les acteurs tout en introduisant des aménagements sur la fixation des
prix et les dispositions fiscales relatives aux produits pétroliers, étape de transition vers la libéralisation
complète de leur marché prévue en 2009. En fait, à partir de juillet 2002, la protection accordée au raffinage
depuis sa privatisation pour lui permettre de se mettre à niveau est en train de prendre fin progressivement
avec le début du démantèlement douanier dont les droits vont baisser de 2,5 % par an sur les sept pro-
chaines années quand les raffineries seront en concurrence directe avec les importations de produits pétro-
liers qui seront entièrement libérées.
74
– Les prix de reprise auxquels les raffineurs vendent leurs produits
– Les taxes et les montants de compensation prélevés par l’État
– La compensation
75
TIC qui est désormais calculée sur le pouvoir calorifique de chaque produit à raison de 0,04 Dh la thermie.
Sauf pour le propane et le butane qui restent à 46 DH/T, les quotités de la TIC subissent des augmentations
substantielles sur tous les autres produits en étant multipliées pratiquement par trois pour le Super (130,38 à
376,4 DH/HL), l’ordinaire (126,7 à 357,2 DH/HL) et le Gasoil (64,05 à 220DH/HL pour croître à 254,2 DH le 01/
07/96 et être ramené à 242,2 DH le31/O7/96 après les grèves des routiers). Quant au fuel sa quotité est mul-
tipliée par plus de 26 fois pour monter de 16,5 DH/T en 1994 à 435,9 DH/T en janvier 1995 pour plafonner
actuellement à 386,7 DH/T ; cependant sa fiscalité est harmonisée avec celle du charbon qui est désormais
soumis à la TIC dont il était exonéré (101,2 DH/T le 01/01/95 et 179,4 DH/T le 01/07/96) avec un alignement
de son PFI à 15 % au lieu de 12,5 % auparavant et une augmentation de sa TVA de 19 % à 20 % en juillet
1996. Comme antérieurement, les carburants subissent un prélèvement, selon un système de péréquation,
destiné à subventionner le butane.
La différenciation de taxation entre les produits pétroliers engendre une différence de prix allant du simple
au double. En 2001 les prélèvements fiscaux y compris pour la compensation ont représenté plus de 50 %
du prix de vente public des essences et du gasoil. Le Super et le gasoil destinés aux provinces sahariennes,
le gasoil pour la pêche et le transport maritime, ne subissant aucune taxation.
Le fuel destiné principalement aux industries et à la production électrique est taxé à hauteur de 27 %,
cette charge est tombée à 19 % depuis la décision de baisser la TIC sur ce produit pour la production de
l’électricité de puissance. Le lampant, destiné essentiellement au monde rural, n’est pas assujetti à la TIC
mais contribue au prélèvement pour subvention du butane. La fiscalité sur ce produit représente 43 % de
son prix de vente, alors que son prix de reprise est proche de ceux des essences et du gasoil.
Le butane en raison de son caractère social est moins taxé, la fiscalité ne représente que 7 % et 9 % du
prix de vente respectivement pour les bouteilles de 12 Kg et de 3 Kg. De plus, la part de compensation repré-
sente 50 % de son prix de vente au détail.
Les distorsions introduites au niveau de la fiscalité influencent largement la structure de consommation
des produits pétroliers, le gasoil 36 % moins cher que les essences est le carburant préféré du parc auto-
mobile, malgré un différentiel de seulement 7 % du prix sortie raffinerie. De même, elles encouragent des
fraudes et des détournements au niveau du marché national, comme le mélange du lampant au gasoil et la
réintroduction clandestine des produits exonérés dans les marchés taxés.
La compensation
Jusqu’en 1994, la Caisse de compensation intervenait par ses subventions ou prélèvements au niveau du
raffinage et de la distribution, les prix étant administrés à la production et à la consommation.
Suite à la réforme tarifaire de 1995, l’intervention de la Caisse s’est limitée à la distribution du butane, sauf
depuis le blocage de l’indexation des prix en juillet 2001. Les prélèvements sur les carburants pour sub-
ventionner le butane a mobilisé en 2000 près de 180 millions de dirhams par mois. À signaler que pendant la
période 1986-1994, la Caisse de Compensation réalisait des excédents financiers versés au Trésor qui,
depuis la flambée des prix mondiaux, a été sollicité pour un montant de plus de 4 milliards de dirhams entre
1999 et 2001.
Cette réforme tarifaire et fiscale prépare la libéralisation totale prévue en 2009 en visant les objectifs sui-
vants :
– assurer l’approvisionnement en produits pétroliers dans les meilleures conditions de prix et de sécurité ;
– améliorer les performances et la productivité des raffineries en leur permettant ainsi qu’aux importateurs
et distributeurs de saisir les opportunités du marché international pour importer les produits pétroliers
quand les prix le justifient ;
76
– stabiliser la charge fiscale sur les produits énergétiques et instaurer une équité entre différents combus-
tibles en harmonisant les taxes qu’ils supportent ;
– inciter la mise en place de l’environnement nécessaire pour encourager l’investissement privé dans le
secteur ;
– donner des signaux économiques tant aux producteurs qu’aux consommateurs pour orienter leurs choix
sur les produits ;
– automatiser le système de tarification sans procédures administratives compliquées permettant aux
opérateurs d’accélérer et d’adapter leur décision aux nouvelles tendances du marché pour choisir les
techniques et les investissements en conséquence.
B. La tarification de l’électricité
Les tarifs de l’électricité sont administrés et dépendent de la tension utilisée, de la quantité consommée et
de la période de consommation.
En janvier 1996, une réforme tarifaire a porté à la fois sur la structure et les niveaux des tarifs avec l’intro-
duction du barème tri-horaire pour inciter les industriels à consommer en heures creuses en contrepartie
d’une réduction des prix. Ces tarifs sont présentés comme suit (THT : Très Haute Tension, HT : Haute Ten-
sion, MT : Moyenne Tension) :
La tarification de la basse tension destinée au résidentiel et au tertiaire est basé sur les tranches de
consommations mensuelles pour inciter à l’économie d’énergie. Ainsi le tarif du KWH varie de 0,8420 DH,
0,9055 DH, 0,9851 DH respectivement pour les consommations mensuelles de 0-100 KWH, 101-200 KWH,
201-500 KWh et 1,3464 DH au delà de 500 KWH.
La production de l’électricité bénéficie depuis octobre 2000 d’une réduction de plus de 50 % sur la TIC des
combustibles utilisés. Cette mesure, conjuguée aux améliorations du marché électrique, notamment les
concessions et les interconnexions, a permis des baisses de tarifs en 2000 de 17 % et 10 % pour l’électricité
à usage industriel et agricole respectivement, le cumul des réductions depuis 1997 atteignant 28 %. Autant
de mesures qui renforcent la compétitivité de notre économie.
77
la rente pétrolière introduit par le Président Mattei de l’ENI italienne avec le paiement d’une royalty allant de
12,5 % à 20 % déductible ou non de la base de calcul de l’impôt sur le bénéfice. Les frais d’exploration sont
pris en charge par le partenaire. Le BRPM en rembourse la moitié s’il y a découvertes commerciales dans le
cadre des contrats d’association, ou pas du tout s’il s’agit d’accords de concession. Dans les deux cas, les
dépenses de développent et d’exploitation et les bénéfices nets sont partagés à 50/50. Il a permis de relan-
cer l’exploration pétrolière dans notre pays avant de s’essouffler au début des années 70 en raison des résul-
tats décevants des recherches. Une analyse sérieuse aurait montré qu’il fallait l’amender pour l’adapter aux
conditions difficiles du Maroc non producteur et où le risque géologique élevé demandait des avantages plus
substantiels pour le balancer. Des modifications dans ce sens auraient sans doute pu faire revenir les opéra-
teurs étrangers au moment des chocs pétroliers où les prix élevés du pétrole les auraient convaincus des
possibilités de haute rentabilité en cas de découverte.
Un projet de nouvelle loi avait été proposé effectivement au début des années 80, mais le manque de réac-
tivité diligente de l’administration avait retardé sa sortie jusqu’en 1992 dans la période où les prix du brut sont
restés bas après le contre choc pétrolier et décourageait l’exploration dans le monde entier. C’est ce qui
explique que la Loi 21-90 d’avril 1992, malgré les encouragements incitatifs qu’elle offrait mais qui restaient
somme toute limités à des exonérations de royalties sur les premières productions de pétrole et de gaz
extraites des découvertes réalisées dans les dix ans suivant sa promulgation, à l’exemption des équipements
et consommables des droits de douane et de la TVA, n’a pas eu les résultats escomptés en intervenant trop
tard et dans un Contexte moins favorable, d’autant que de plusieurs pays producteurs, comme l’ex URSS et
l’Algérie, jusque là fermés aux sollicitations des compagnies pétrolières, leur avaient ouvert leurs portes.
L’observation plus attentive de la scène pétrolière internationale a permis de saisir plus rapidement la
nécessité de réviser la loi pétrolière pour la rendre encore plus avantageuse pour les sociétés pétrolières qui
étaient assidûment contactées par les campagnes de promotion fréquentes que l’ONAREP organisait.
D’importantes modifications apportées au Codes des hydrocarbures d’avril 1992 sont promulguées en mars
2000. Tenant compte de la réalité du Maroc, non producteur de pétrole, les principaux amendements
concernent la baisse de la participation de l’État à 25 % maximum au lieu de 50 % maximum, l’exonération
du paiement de l’Impôt sur les Sociétés pendant les 10 années qui suivent la mise en production de toute
découverte, l’introduction d’une Provision de Reconstitution des Gisements (PRG) déductible de l’assiette de
l’IS avec obligation de la réinvestir, de la possibilité pour un concessionnaire de consolider ses comptes. Les
royalties sont devenues à taux fixes et tiennent compte des difficultés de recherches. Ainsi elles sont de
10 % pour le pétrole et 5 % pour le gaz pour les zones terrestres et maritimes à moins de 200 mètres de pro-
fondeur d’eau, abaissées respectivement à 7 et 3,5 % pour l’offshore au delà de 200 mètres de profondeur
d’eau. Du coup le Maroc est classé parmi les cinq meilleures lois pétrolières en remontant de la 156 ème
place que lui attribuait le ranking des experts pétroliers. Ce qui a permis la relance de l’exploration comme
mentionnée plus haut.
78
ché pétrolier ont permis de remédier à l’immobilisation de la raffinerie de Mohammedia suite à l’incendie qui
l’a ravagée en novembre 2002. Les importations de charbon permettent d’atténuer la dépendance du pétrole
plus soumis aux fluctuations géopolitiques et des prix et d’arbitrer entre ses utilisations et celles du fuel
selon les opportunités.
79
3. Perspectives énergétiques à l’horizon 2025
Cette partie de l’exposé sera construite sur des hypothèses les plus objectives possibles, tenant compte
du développement économique du Maroc qui appellera des besoins énergétiques croissants.
À l’instar de tous les pays, le progrès économique et social ainsi que l’augmentation de la population du
Maroc induiront inéluctablement la croissance de sa demande en énergie commerciale.
Il faut espérer et croire que les options adoptées par le Maroc dans le cadre de la mondialisation vont opé-
rer un véritable décollage économique avec une croissance annuelle moyenne de 6 % pendant le premier
quart de ce siècle entraînant une élévation substantielle et progressive du revenu moyen par habitant de
1200 aujourd’hui à 2500-3000 à l’horizon 2025. Ce qui impliquera une amélioration de la consommation
énergétique moyenne par individu qui sera prise comme base synthétique pour évaluer les besoins en éner-
gie à cet horizon.
En 2003, la consommation totale en énergie commerciale est proche de 11000 KTep pour une population
d’environ 30 Millions d’habitants, soit une moyenne par marocain de 0,37 Tep. En 2012 et 2025, le Maroc
compterait respectivement 38 et 47 millions Individus. Dans une première hypothèse (H1), qui suppose une
progression annuelle constante de 5 % de la consommation énergétique totale, la demande s’élèverait pour
ces deux années à 17000 et 32000 KTep soit 0,45 et 0,7 TEP/habitant. Malgré ces améliorations, la consom-
mation par tête n’est guère plus élevée en 2025 que celle enregistrée aujourd’hui pour les pays en déve-
loppement. Dans la seconde hypothèse (H2), on conçoit que la modernisation exigera un meilleur confort
énergétique portant ces taux à 0,7 et 1 Tep aux horizons considérés pour accroître la consommation totale à
27000 et 47000 Ktep. Ces niveaux peuvent constituer des fourchettes pour projeter la contribution des dif-
férentes énergies primaires commerciales dans la balance énergétique future.
Il est admis que le développement de l’industrialisation et des transports, notamment dans les PVD,
requerra encore une consommation importante de pétrole qui restera une énergie dominante d’ici le milieu
du siècle en l’absence d’énergies alternatives dans ses usages spécifiques. En raison du progrès technique
qui permet un meilleur rendement énergétique et les substitutions par d’autres énergies, on peut tabler sur
la baisse de la part des produits pétroliers dans la consommation énergétique totale du Maroc pour se situer
à 55 % en 2012 et 50 % en 2025, cas PTS, au lieu des 60 % actuellement. Au cas où une politique consé-
quente de maîtrise de l’énergie est appliquée pour économiser du pétrole, un gain de 5 points pourrait être
réalisé sur ces taux qui seraient alors de 50 % et 45 % respectivement, Cas ME.
80
produits pétroliers, cela signifie qu’elles devraient produire 4250 KTEP en 2012 et 7200 KTEP en 2025 KTEP
en prenant l’hypothèse la plus basse (H1+ME), ou 6750 et 10500 KTEP, avec l’hypothèse confort moyen
(H2+ME). C’est à dire que les importations seraient stabilisées à leurs niveaux d’évolution depuis les
années 80 à aujourd’hui. Il est évident, que l’allègement ou l’alourdissement plus ou moins important de la
facture pétrolière sera fonction de la dimension de ces découvertes, des cours du pétrole et du niveau de
consommation atteint.
La probabilité que de grandes quantités d’hydrocarbures soient mises à jour en onshore est très réduite
sur la foi des résultats obtenus jusqu’à maintenant et de la géologie très complexe de nos bassins.
De même, il n’est pas envisagé que du brut puisse être produit des schistes bitumineux d’ici 2025.
Si c’est du gaz naturel qui est rencontré, il faudra attendre 10 ans et davantage pour qu’il soit commer-
cialisé, c’est à dire pas avant 2015, ses projets ayant un délai de maturation plus long que ceux du pétrole.
D’ici là son utilisation dans la production électrique et d’autres industries n’est possible qu’à travers son
importation sous sa forme gazeuse ou liquéfiée (GNL). Les projets d’électricité en cours de réalisation dans le
cycle combiné de Tahaddart-1 et du thermo-solaire de Aïn Beni Mtar vont brûler du gaz provenant du Gazo-
duc Maghreb Europe (GME) et vont absorber 810 millions de m3 de gaz. Supposant que d’autres projets du
même ordre soient mis en service d’ici 2012, la contribution du gaz importé (1330 Ktep) à la consommation
énergétique totale serait alors de 8 % ou 5 % selon les hypothèses envisagées. Si tous les projets identifiés
actuellement sont réalisés vers 2015, hydrocracking et production d’ammoniac compris, le volume total de
gaz consommé atteindrait 3 milliards de m3 (2125 Ktep), ces taux resteraient du même ordre en 2025. À
moins que des découvertes majeures ou qu’une coopération régionale plus large puissent permettre un
emploi plus massif du gaz pour accroître ces proportions par exemple à 20 % ou 25 % et plus, comme dans
l’Union Européenne. Au quel cas, il remplacerait plus significativement le pétrole et/ou le charbon.
Pour le charbon, il ne semble pas y avoir de chance de voir ressurgir une production locale, tous les
besoins devant être couverts par des importations comme actuellement. Malgré les traitements pour le
rendre plus propre, le charbon, qui reste le combustible le plus polluant, verrait sa part diminuer à 25 % puis à
20 %.
81
Il apparaît ainsi que le développement prévu ici pour les énergies renouvelables, ne sera pas en mesure de
faire la soudure avec les énergies fossiles. L’écart atteindrait alors, dans l’hypothèse H2 et économie de
pétrole, 8 % en 2012 et 23 % en 2025. Sa couverture appellerait davantage le recours aux énergies fossiles,
vraisemblablement du gaz dont la part dans la consommation énergétique totale serait de 13 % et 28 % res-
pectivement à ces deux dates. Ce qui est plus en ligne avec le réalisme admis en général sur l’équilibrage du
rôle respectif des différentes énergies à ces horizons.
Dans sa stratégie de diversification énergétique, pour assurer une plus grande sécurité de son approvi-
sionnement et atténuer sa dépendance du pétrole, tout en diminuant la pollution atmosphérique que cause le
pétrole et le charbon, le Maroc préconise de développer l’utilisation du gaz, d’abord dans la production de
l’électricité, pour l’étendre, au fur à mesure, à des usages industriels, puis ultérieurement aux secteurs ter-
tiaire et résidentiel.
L’introduction du gaz, comme évoqué plus haut, se fera, dans une première phase, par des branchements
courts sur le Gazoduc Maghreb Europe pour produire de l’électricité dans le cycle combiné de Tahaddart-1,
dont la mise en service est prévue pour début 2005, et dans la centrale thermo-solaire de Aïn Beni Mathar, à
réaliser d’ici 2007. La royaltie de passage perçue en nature du GME avec une capacité portée à 12 milliards
m3 à fin 2004, suffira pour ces deux projets qui consommeront environ 800 millions m3. Un second Tahaddart
portera ce volume à près de 1,4 milliards m3, le payage ne suffirait plus pour le couvrir même avec le double-
ment de capacité du GME. Le Maroc devra acheter le complément à l’Algérie dans le cadre de son droit de
réservation de capacité de 14 % maximum, royaltie comprise. L’installation d’hydrocraking dans la raffinerie
de la SAMIR à Mohammedia demandera 800 millions m3 de gaz qui sera acheminé par une conduite de
50 Km jusqu’au pipeline existant Sidi Kacem-Mohammedia, saturant pratiquement le volume total de gaz
auquel le Maroc a accès à partir du GME doublé (16 milliards m3 ×14 % = 2,24 milliards m3).
Tout autre développement du gaz exige des découvertes majeures ou bien des importations. Dans la pre-
mière éventualité on peut imaginer, à partir de 2015, une utilisation très large du gaz dans les industries y
compris pétrochimiques à créer, dans le tertiaire et le résidentiel. Autrement, il n’est raisonnablement conce-
vable que dans les zones de concentration industrielle le long de la côte atlantique de Kénitra à Jorf Lasfar où
le volume critique de gaz nécessaire pour assurer la rentabilisation des installations coûteuses pourrait être
atteint. Ce qui implique, soit la pose de nouveaux gazoducs pour importer du gaz d’Algérie, soit l’édification
de stations de regazification de gaz naturel liquéfié (GNL) importé par méthaniers.
Quel que soit le cas, de tels projets requièrent d’importantes infrastructures exigeant des investissements
très lourds et une gestion efficace du marché du gaz au niveau aussi bien de son organisation que de la tarifi-
cation.
Dans ce but, il devient urgent que le gouvernement donne une plus grande visibilité aux acteurs gaziers
futurs en promulguant le projet de Code Gazier en préparation depuis longtemps en y associant au préalable
toutes les parties intéressées pour éventuellement y apporter les modifications pertinentes nécessaires. La
version actuelle, assez libérale dans sa conception, tente de répondre à certaines questions importantes,
comme l’octroi de concessions de longue durée aux investisseurs dans la construction des réseaux de trans-
port et de distribution, le principe de formation des prix incluant une marge pour rémunérer les concession-
naires, l’instauration d’une autorité indépendante de régulation qui veillera à la transparence des opérations, à
la bonne application des règles établies ainsi qu’à l’équité des prix facturés aux consommateurs.
Il faudra aussi trancher le problème de l’approvisionnement où il semble judicieux, du moins dans un pre-
82
mier temps, de créer une Centrale d’Achats sous forme de GIE réunissant les utilisateurs et qui, centralisant
leurs demandes, aura un meilleur pouvoir de négociation avec les fournisseurs. Il sera aussi impératif d’éta-
blir les règles et mesures de sécurité à respecter, d’intégrer la politique du gaz dans le plan d’aménagement
du territoire et les schémas directeurs d’urbanisme en prévision de l’arrivée du gaz de ville qui remplacera le
butane dans nombre de ses usages etc. La réflexion devra aussi porter sur la libéralisation plus large du mar-
ché du gaz, notamment si, à plus ou moins long terme, plusieurs opérateurs devaient s’y livrer concurrence à
la suite de plusieurs découvertes ou de provenance du gaz de sources différentes comme il se passe actuel-
lement dans l’UE.
La libéralisation de l’économie ne signifie pas absence de l’État et plus particulièrement dans le domaine
énergétique qui demeurera toujours un secteur stratégique vital pour tous les pays. Les évènements alar-
mants survenus aux USA, cœur du libéralisme, faillite frauduleuse d’Enron et ruptures de fourniture d’électri-
cité en Californie, ont montré que, comme pour la guerre, « l’énergie est assez sérieuse pour ne pas être
menée que par le privé ».
Le raffinage et la distribution des produits pétroliers, aujourd’hui totalement privatisés, seront complète-
ment libéralisés en 2010. La production et la distribution électriques sont ouverts au privé à travers le régime
des concessions et d’ici 2012, l’électricité sera commercialisée sur deux marchés parallèles, l’un libre, des-
tiné aux consommateurs industriels éligibles (THT, HT et MT) et l’autre réglementé, relevant du service
public pour les secteurs tertiaire et résidentiel. Les interconnections électriques renforcées avec l’Espagne
(doublement de la capacité de 700 à 1400 MW en 2005) et l’Algérie (mise en service d’une 3ème ligne de
400 KV en 2005), vont relier le Maroc à l’horizon 2010-2015 à la boucle méditerranéenne en cours d’édifica-
tion pour permettre un choix très large entre plusieurs sources d’approvisionnement. De même, le déve-
loppement du gaz va entraîner la multiplication de ses provenances, de ses infrastrutures et et de ses
opérateurs, gaz national en cas de découvertes majeures surtout en offshore, gaz importé sous ses formes
naturelle et liquéfiée.
Dans cette perspective, il faut s’attendre à l’émergence d’un marché énergétique de plus en plus concur-
rentiel où l’appareil national de production pourrait être déstabilisé (raffinage et production électrique notam-
ment) si dès maintenant il ne s’y prépare pas en gagnant en puissance et en compétitivité.
– Dans la phase actuelle de transition, il est nécessaire que l’État renforce les dispositions visant à :
R améliorer les mesures d’encouragement aux investisseurs nationaux en alignant les taux d’intérêt sur
le niveau moyen européen et en suscitant une plus grande implication du système bancaire dans la
prise de risque et de participation ;
R favoriser la création de grands groupes nationaux capables de se défendre sur le marché intérieur et
de se positionner à l’international ;
R doter la recherche pétrolière de moyens suffisants en ressources financières et humaines pour lui per-
mettre de mettre plus efficacement en valeur les potentialités peu explorées du pays ;
R mettre à niveau les capacités législative, réglementaire et gestionnaire de l’Administration en charge
de l’énergie ;
R consolider la visibilité des opérateurs : statut futur de l’ONE, avenir du raffinage, code gazier
– La libéralisation quasi totale de tout le secteur énergétique à l’horizon 2012 va amener l’État à jouer
83
plus un rôle de contrôle et de régulation que d’intervention directe. Dans ce contexte il aura pour mis-
sions de :
R Définir, en concertation avec les acteurs du secteur, les grandes orientations stratégiques et veiller à
leur application : sécurité d’approvisionnement, équilibre régional, protection de l’environnement, éta-
blissement des normes pour les produits et les installations, mesures fiscales et d’encouragement
pour orienter le choix des investisseurs et des consommateurs vers les énergies à promouvoir ;
R Assurer le bon fonctionnement des marchés : respect des règles de concurrence, absence de posi-
tions monopolistes ou d’ententes illicites pouvant affecter le niveau des prix au détriment des consom-
mateurs, conditions d’accès des tiers aux réseaux ;
R Arrêter les modalités de son intervention pour corriger les mécanismes de marché impropres : sub-
ventions des produits énergétiques de première nécessité en faveur des couches populaires les plus
vulnérables, distorsions préjudiciables à l’intérêt national (suspension du système de fixation des prix
comme actuellement avec le blocage de l’indexation) ;
R Établir les règles de contrôle et d’audit par les organismes indépendants de régulation ainsi que leur
composition (professionnels et administration) : observation de la tarification des produits énergé-
tiques, arbitrage des conflits, sanctions ;
R Intégrer dans sa vision les implications induites par les conventions internationales et régionales (UE,
accords de libre échange avec les USA) et notamment les engagements futurs dans l’UMA (principes
de subsidiarité, législations et réglementations supra nationales etc.).
L’énergie c’est la vie, sans elle pas de développement économique et a fortiori humain.
Il faut reconnaître que jusqu’à maintenant, malgré les efforts déployés depuis 50 ans d’indépendance, le
Maroc n’a pas encore réalisé son véritable décollage économique. Les réformes adoptées depuis les
années 90 vont certainement permettre d’ouvrir une ère nouvelle de développement économique et social
de notre pays dans le cadre de la démocratie et de l’économie libérale et sociale dans lesquelles il s’est défi-
nitivement engagé.
Le retard économique, l’analphabétisme, le système de santé, le bas niveau des revenus de la majorité de
la population, ont aujourd’hui plus d’impacts négatifs sur le développement humain qui souffre de ce fait de
l’accès encore très faible aux énergies commerciales dont la consommation est de moins de 0,4 Tep par
habitant et par an en 2003, en dessous de la moyenne de 0,6 Tep dans les pays en développement.
Plus gravement, l’isolement « énergétique » auquel le monde rural a été longtemps tenu est pour une
grande part responsable de son sous développement prononcé : très bas taux de scolarisation, manque
d’équipements sanitaires et d’eau potable, saccage des forêts, exode rural. Tous ces phénomènes s’y sont
traduits socialement par le travail épuisant surtout des femmes qui, en plus des travaux domestiques et des
champs, se chargent du ramassage du bois de chauffe et du puisement de l’eau potable de plus en plus loin-
tains en raison de la déforestation et du recul de la nappe phréatique. Ce qui explique les taux d’avortement
et de mortalité enfantine ainsi que d’emploi des enfants plus forts qu’en milieu urbain.
Le Programme d’Électrification Rurale Globale (PERG) lancé 1996 avec comme objectif de généraliser
l’accès à l’électricité à l’ensemble du territoire national en 2007 ainsi que la pénétration plus large du butane
et des énergies renouvelables permettent progressivement de remédier à cette situation en urbanisant le
monde rural qui, avec la modernisation de l’agriculture et d’autres secteurs économiques, jouira d’un mode
84
et d’un niveau de vie meilleurs. Ce qui fera reculer la part de déforestation imputable au ramassage inorga-
nisé du bois, combustible principal dans les campagnes.
Les industries et les transports terrestres ne sont pas très développés au Maroc pour que leurs émissions
en CO2 et autres gaz ou particules nocifs puissent entraîner une pollution atmosphérique et une dégradation
de l’environnement massives et généralisées comme dans les pays industrialisés. Ces manifestations sont
réelles mais limitées aux zones de concentration des activités économique et industrielle de la côte atlan-
tique de Kénitra à Jorf Lasfar et tout particulièrement à Casablanca-Mohammadia où se trouvent les installa-
tions les plus anciennes dont la conception ne souciait guère à l’époque de leur construction (années 60 et
70) d’impact environnemental. De même, rouler avec du gasoil à 10000 ppm combiné à la vétusté et au
manque d’entretien des véhicules ne favorisent pas tellement la pureté de l’air dans nos villes et nos routes.
La promulgation de la loi sur l’environnement prévoyant que tous les grands projets doivent inclure une
étude d’impacts sur le plan local, régional et national et recevoir au préalable l’aval d’une commission natio-
nale comprenant les représentants de l’Administration, des collectivités locales et de la société civile avant
d’être réalisés, doit être en mesure de réduire très sensiblement les préjudices environnementaux qui pour-
raient en découler.
La mise à niveau des raffineries pour aligner la qualité des carburants sur les normes européennes,
essence sans plomb, gasoil à 350 puis 50 ppm, parallèlement à l’introduction des pots d’échappement cata-
lytique et à la réduction de la consommation de carburants au fur et à mesure du renouvellement du parc des
véhicules apporteront une amélioration certaine pour limiter les émissions dues au secteur des transports en
expansion rapide. Il est nécessaire en attendant d’appliquer avec plus de rigueur les décisions prises contre
les rejets industriels en mer et dans les rivières et contre les pollueurs de la circulation, et en premier lieu les
transports publics.
Il faudra aussi mettre à profit tous les mécanismes de financement prévus par le protocole de Kyoto et les
institutions internationales (MDP, FFEM, GEF, FPC) et mobiliser toutes les opportunités de coopération inter-
nationale et régionale pour moderniser notre appareil de production par des outils plus propres et plus res-
pectueux de notre patrimoine naturel.
Conclusion et résumé
La problématique énergétique au Maroc n’a pas évolué depuis l’indépendance et demeure caractérisée
par : la faiblesse des ressources nationales en énergies fossiles, un bas niveau de la consommation par habi-
tant, des importations et une facture énergétique de plus en plus lourdes en raison d’une dépendance plus
marquée de ses approvisionnements extérieurs, notamment en produits pétroliers qui continuent de domi-
ner sa balance énergétique.
Dans le cadre de la mondialisation, le Maroc a opté pour une stratégie d’ouverture et de libéralisation
économique dans laquelle s’inscrit la politique énergétique adoptée depuis 1990 et qui englobe :
– La privatisation de l’aval pétrolier
– La libéralisation progressive puis totale en 2009 des produits pétroliers avec le démantèlement douanier
– La réforme tarifaire et fiscale des produits pétroliers par indexation sur leurs cotations à Rotterdam et
neutralisation fiscale entre les différents produits énergétiques
– La production et la distribution concessionnelles de l’électricité dont le marché grands consommateurs
industriels dits « éligibles » sera libéralisé d’ici 2012
85
– La diversification des ressources et sources d’énergies : importation de charbon et d’électricité à travers
les interconnexions avec l’Algérie et l’Espagne, afin de réduire la domination du pétrole
– La promotion des énergies renouvelables (hors hydraulique d’ailleurs en saturation) : éolien, solaire, bio-
masse et autres
– L’encouragement à la recherche pétrolière dont la relance depuis 2000, et notamment en offshore pro-
fond, porte tous les espoirs d’un éventuel changement du paysage énergétique marocain si des décou-
vertes majeures sont réalisées
– Le développement du gaz d’abord à travers le GME puis par utilisation du gaz national en cas d’éven-
tuelles découvertes importantes et/ou recours à son importation sous sa forme naturelle et/ou liquéfiée
– L’accès du monde rural à plus d’énergie commerciale à travers le PERG et le développement des éner-
gies renouvelables.
Dans la perspective du développement économique et énergétique du pays dans le contexte d’une plus
grande libéralisation, l’État est appelé à préparer l’appareil énergétique national pour faire face à la vague de
concurrence à laquelle il va s’affronter et à concevoir son rôle futur plus comme une autorité de contrôle et
de régulation que d’acteur direct du marché énergétique. À cet effet il sera nécessaire de renforcer la capa-
cité législative, réglementaire et gestionnaire de l’Administration en charge de l’énergie.
Le développement humain au Maroc souffre de son énergétisation limitée due à son retard économique et
au bas niveau des revenus des populations qui en découle. Le développement économique et social prévu,
en entraînant une élévation des niveaux de vie, va impliquer un accroissement de la consommation énergé-
tique notamment d’origine fossile. Il est, par conséquence, nécessaire de renforcer les législations et régle-
mentations en voie de formation pour édicter des normes et des comportements plus stricts pour réduire
son impact sur l’environnement qui actuellement n’est sensible que dans la zone de concentration écono-
mique et industrielle de l’axe Casablanca-Mohammedia.
86
Connaissance et utilisation des ressources
en sol au Maroc
1. Introduction ........................................................................................................89
2. Sol : une ressource naturelle indispensable pour
le développement durable ..............................................................................89
2.1. Cas général .................................................................................................. .89
2.2. Cas des pays méditerranéens ...................................................................92
2.3. Cas du Maroc ...............................................................................................93
3. Etat de connaissance sur les sols du Maroc ............................................... 94
3.1. Avant l’indépendance ................................................................................ 94
3.2. Après l’indépendance ................................................................................ 95
3.2.1. Inventaire et cartographie des sols .............................................. 95
3.2.2. Organismes intervenant .................................................................. 97
3.2.3. Les cadres opérationnels ............................................................... 98
4. Les efforts de formation et de recherche en Science du Sol ................... 98
4.1. Les potentiels et les difficultés de la recherche marocaine
en science du sol ....................................................................................... 98
4.2. Les principaux axes actuels de la recherche marocaine
en science du sol ....................................................................................... 99
4.3. Recommandations .....................................................................................100
5. Les principales formes de dégradation des sols au Maroc .....................101
5.1. L’extension de l’urbanisation ...................................................................101
5.2. L’érosion des sols........................................................................................104
5.3. La dégradation des sols et des eaux sous irrigation ...........................104
5.4. Désertification ............................................................................................105
6. Perspectives pour 2025 ...................................................................................107
87
MOHAMED BADRAOUI
88
Le sol est une ressource naturelle très peu renouvelable à l’échelle d’une génération humaine. C’est la par-
tie meuble de la lithosphère qui constitue une composante majeure de la biosphère continentale. Cette
couche superficielle, organisée et d’épaisseur variable, couvrant les substrats géologiques est essentielle
pour la vie. La connaissance des ressources en sol d’un pays et de leurs aptitudes à différentes utilisations
par les communautés humaines est un préalable pour l’aménagement du territoire et le développement
durable.
Le sol est actuellement considéré comme une interface dans l’environnement et une ressource pour le
développement (Robert, 1996).
Au Maroc, le sol est la ressource la moins connue par rapport aux autres ressources naturelles tels que
l’eau, l’air, les mines et les forêts. Et pourtant, il est reconnu par les pouvoirs publics comme une compo-
sante principale de la planification de l’aménagement du territoire à travers l’utilisation rationnelle des terres.
Ce rapport fera le point sur l’état des connaissances des sols au Maroc depuis l’indépendance. Les efforts
déployés par les pouvoirs publics en matière de développement des ressources humaines et de la recherche
dans le domaine des sols seront présentés et analysés dans la perspective d’en déduire les insuffisances et
de proposer les améliorations éventuelles. Les contraintes liées à l’utilisation rationnelle et durable des res-
sources en sol seront synthétisées avant de passer aux perspectives pour l’an 2025.
Le cadre général du développement durable plaçant le sol au centre des préoccupations à l’échelle globale
est esquissé avant de passer au cas spécifique des sols méditerranéens et du Maroc.
Le sol est ce milieu naturel terrestre où naît la vie, aussi bien animale que végétale, et c’est également le
milieu où se termine la vie. C’est une mince couche de « terre » d’épaisseur variable (quelques cm à quel-
ques m), située entre le substrat rocheux et l’atmosphère. Ce matériau meuble et organisé se forme de
manière très lente à partir des matériaux géologiques, sous l’action de l’air, de l’eau et de la vie. Les sols sont
donc très divers, distribués en fonction des reliefs, des roches, des végétations, des climats... et, en plus,
des activités humaines.
Naturellement, le sol est une ressource lentement renouvelable. Par contre, Il est très sensible aux activi-
tés humaines : il se transforme très vite, et en particulier se dégrade rapidement, dès que les sociétés
humaines interviennent sans précautions.
89
Par rapport au monde, par rapport à la vie en général et, plus particulièrement, par rapport aux besoins et à
la santé des sociétés humaines, le sol remplit un certain nombre de fonctions fondamentales (Ruellan,
2003) :
– La fonction alimentaire. Le sol nourrit le monde ; il produit, contient, accumule, tous les éléments
nécessaires à la vie (azote, phosphore, calcium, potassium, fer, oligoéléments...) y compris l’air et l’eau.
Le sol joue le rôle de réservoir, plus ou moins grand et plus ou moins rempli selon les cas. Les sociétés
humaines, qui se nourrissent des plantes et des animaux, sont donc bien totalement dépendantes des
sols (alimentation et santé). Cette fonction du sol, la plus apparente, est reconnue traditionnellement par
les populations et les décideurs.
– La fonction filtre. Le sol est un milieu poreux, en permanence traversé par des flux hydriques et gazeux.
De ce fait, le sol transforme, épure ou pollue, les eaux qui le traversent. Il régule le régime des cours
d’eau et la recharge des nappes souterraines et en influence la composition chimique et biologique.
Mais aussi, le sol influence la composition de l’atmosphère. En particulier, il stocke et relâche des gaz à
effet de serre (séquestration du carbone).
– La fonction biologique. Le sol est un milieu vivant. C’est le lieu de vie et de passage obligé pour de
nombreuses espèces animales et végétales. De nombreux cycles biologiques passent par le sol,
incluent le sol, qui est donc partie prenante de nombreux écosystèmes. Le sol est une vaste réserve
génétique : il abrite et influence une grande partie de la biodiversité terrestre. Par ailleurs, les activités
biologiques sont essentielles à la construction des sols, à leur fonctionnement et à leur fertilité. On lui
reconnaît le rôle d’habitat et de préservation de la biodiversité.
– La fonction matériau et support. Le sol fournit les matériaux que l’homme utilise pour construire et
pour ses activités industrielles et artisanales. Il contient également des ressources minérales et sup-
porte les habitats et les infrastructures liées aux activités des sociétés humaines.
– La fonction mémoire. Le sol conserve les traces de l’histoire, souvent très longue (plusieurs millions
d’années), de sa formation : en étudiant les sols on peut découvrir quelles furent certaines des condi-
tions climatiques et biologiques du passé. Mais aussi, le sol conserve les témoins de l’histoire de
l’humanité.
Au même titre que l’air et l’eau, le sol est une ressource naturelle essentielle à la vie et non renouvelable à
l’échelle d’une ou plusieurs générations humaines. Il n’y a pas de développement durable sans une bonne
gestion des ressources en sol. Or, du fait des activités humaines et des mauvaises relations actuelles entre
les sols et les sociétés humaines, les sols sont soumis à différentes formes de dégradation, le plus souvent
irréversibles.
90
2. Le plus souvent, les différentes activités humaines se développent et se concurrencent, sans tenir
compte de la diversité des sols, de leurs fonctions et de leurs aptitudes. Ces concurrences débouchent
alors sur des conflits :
– conflits d’usage, d’accès aux sols : par exemple, conflits dans la périphérie des grandes agglomérations
(conflits entre agriculteurs, industriels, urbaniste, voies de circulation...) ;
– conflits résultant de l’utilisation inadaptée des sols et conduisant à la dégradation des sols : les activités
humaines, en se développant, influencent, transforment le milieu sol et font pression sur lui. Les sols
sont modifiés, dans leurs propriétés, dans leurs potentiels, dans leurs fonctions, et, plus grave encore,
ces modifications affectent aussi les autres milieux qui sont en relation avec les sols : l’eau, l’air, les ani-
maux, les végétaux, les sociétés humaines.
3. En effet, partout dans le monde, les exemples de sols gravement modifiés, endommagés sont nombreux.
En particulier, suite à l’utilisation agricole inadaptée, les formes de dégradation les plus apparentes sont :
– des appauvrissements (biologiques, organiques, minéraux) ;
– des destructions de structures et des tassements qui affectent les porosités ;
– de l’érosion, de la sédimentation, des glissements de terrain ;
– de la salinisation et de l’alcalinisation ;
– de l’acidification ;
– des pollutions (minérales, organiques, radioactives).
Au total :
– les fertilités des sols baissent ;
– leurs fonctions fondamentales ne sont plus assurées ;
– la vitesse de fabrication des sols se ralentit ;
– les vitesses et les orientations des principaux processus de formation et de différenciation des sols sont
modifiées (altération des roches, arrangement et mouvements des constituants...).
Et il y a aussi :
– la croissance des villes, des complexes industriels et touristiques ;
– l’intensification des réseaux pour les transports ;
– la construction de barrages hydroélectriques ;
– le développement de l’exploitation de ressources minérales superficielles.
Tout ceci soustrait annuellement, sans espoir de retour, plusieurs dizaines de milliers d’hectares souvent
très fertiles et dont les fonctions ne sont plus assurées.
Il faut, cependant, souligner que les sociétés humaines ont aussi su améliorer, voire construire les sols
dont elles avaient besoin. On peut citer à titres d’exemples : la construction de terrasses dans les zones de
montagne, le défoncement des croûtes calcaires et l’épierrage, les apports et transferts de grandes quanti-
tés de matières organiques et d’amendements chimiques.
4 En conséquence aussi, les autres milieux sont touchés. En effet, l’évolution anthropique des sols porte
atteinte :
– à la biodiversité qui se transforme et s’appauvrit ;
– au cycle de l’eau qui devient plus violent (crues, inondations, sédimentations aval) et qui se raccourcit
(l’eau est moins disponible pour les besoins humains) ;
91
– à la qualité des eaux qui se polluent, chimiquement et biologiquement, localement et latéralement (l’eau
est encore moins disponible pour les besoins humains) ;
– à la qualité de l’air qui se pollue et, en particulier, qui s’enrichit en gaz à effet de serre (gaz carbonique,
méthane) ;
– à la fertilité des milieux par rapport aux activités humaines : beaucoup de milieux s’appauvrissent, voir
même abandonnés (désertification) ; mais il y a aussi des milieux qui s’enrichissent grâce aux activités
humaines ;
– à la santé et au comportement des sociétés humaines, au travers de ce qu’elles mangent, boivent, res-
pirent... et vivent au quotidien : il y a des relations entre l’évolution des systèmes de sols et celle des
systèmes sociaux.
5. Les sols, malgré leur rareté, sont donc aujourd’hui utilisés de manière non renouvelable par nombre de
sociétés humaines. La deuxième moitié du XXe siècle fut particulièrement désastreuse : un peu partout,
les développements agricoles, industriels et urbains sont très destructeurs des sols et de leurs fonctions.
Par ailleurs, dans les régions pauvres, c’est souvent la misère qui contraint les populations à la surexploita-
tion des sols et à la dégradation de leurs fonctions vitales.
La responsabil000ité de cette situation revient grandement aux choix économiques et techniques qui ne
tiennent pas suffisamment compte des diversités naturelles des sols et des besoins des sociétés humaines.
Cependant, s’il y a peu de choses faites concrètement pour atténuer les dégradations des sols et pour
améliorer la situation des sols déjà fortement dégradés, c’est en grande partie aussi par ignorance, dans
toutes les sphères de la société, de ce qu’est le sol et pourquoi il est nécessaire d’en préserver les fonctions.
Producteurs, techniciens, administrateurs et politiques participent à cette ignorance qui prend ses racines
dans l’absence de toute découverte des sols dans les systèmes éducationnels depuis l’école primaire
jusqu’à l’université.
Le sol fait peu partie des cultures populaires : il est peu ou mal connu. De ce fait, la ge
stion durable des sols ne fait que peu partie des préoccupations prioritaires de la population, des respon-
sables politiques, administratifs et techniques et des propriétaires des terres. Il faut en particulier souligner le
faible niveau de connaissances dans le domaine des sols de la plupart des agronomes et de la plupart des
environnementalistes : beaucoup d’ingénieurs raisonnent l’agriculture et l’aménagement du territoire en don-
nant la priorité aux techniques et aux conditions économiques et en oubliant les diversités concernant les
milieux naturels et les sociétés humaines.
Tout cela pose, en définitive, la question des priorités de la connaissance et de l’éducation concernant les
sols : quelles recherches et quels enseignements faut-il développer dans le but de mieux gérer, durable-
ment, les ressources en sol ?
Les sols des régions méditerranéennes sont originaux et le Maroc en est un exemple parfait. Du fait de
l’aridité estivale des régions méditerranéennes et du fait d’une forte présence de roches calcaires et cal-
ciques, la majorité des sols y sont dominés par la présence du calcium voire du calcaire. Par ailleurs, les sols
sont souvent argileux et naturellement riches en matières organiques et en calcium, donc bien structurés et
bien drainés. Les sols appauvris en argile (dit lessivés) y sont nettement plus rares que dans les régions tem-
pérées et tropicales.
Les principaux handicaps des sols méditerranéens sont liés aux excès de calcaire (croûtes calcaires des
92
régions semi-arides et arides) et aux excès localisés de sels solubles (régions arides et désertiques et péri-
mètres irrigués avec des eaux chargées en sels). Cependant, vu sous l’angle écologique et agricole, on peut
dire que la majorité des sols des régions méditerranéennes sont parmi les plus riches du monde. C’est le lieu
de formation et de préservation des argiles gonflantes qui règlent la fertilité physique et chimique des sols.
Le principal obstacle à la valorisation agricole de cette richesse « sol » est le manque d’eau. Les tendances
des 40 dernières années montrent une réduction moyenne des précipitations de l’ordre de 50 à 200 mm en
fonction des stations. Cependant, du fait de l’ancienneté de l’occupation humaine qui, souvent, n’a pas su les
gérer, les ressources en sol du monde méditerranéen sont le plus souvent fortement dégradées : appau-
vrissements organiques et minéraux, déstructurations, érosion hydrique et éolienne, salinisation...et plus
récemment pollution et urbanisation de sols agricoles de grande qualité. La désertification est un fléau dont
les causes sont certainement en partie climatiques, mais l’action humaine accélère fortement le processus
de dégradation des terres (Badraoui, 2004).
Mais c’est aussi dans le monde méditerranéen que l’on trouve quelques uns des plus beaux exemples de
gestion durable intensive des ressources en sols et en eau (aménagement des pentes dans les zones de
montagne, gestion des oasis et des khettaras au Sud des Atlas... etc).
Dans le monde méditerranéen, le Maroc est probablement le pays de la plus grande diversité : en par-
ticulier, tous les types de sols méditerranéens, tous les types de « pédopaysages » méditerranéens, y sont
présents. Ce fait est la conséquence de la grande diversité des facteurs de pédogenèse (roches, reliefs, cli-
mats, couverts végétaux, temps d’évolution et occupations humaines (Badraoui et Stitou, 2002 ; Badraoui et
al., 2002 ; Ruellan, 2003). En effet, le Maroc est riche de ses sols et de leur diversité ; il est riche de la diver-
sité des occupations humaines qui, traditionnellement, ont eu des impacts aussi bien positifs que négatifs
sur la qualité des sols. Ceci veut dire aussi que, pour la recherche scientifique concernant les sols méditerra-
néens et leur utilisation, le Maroc est un « laboratoire » idéal. C’est au Maroc en particulier, et dans les pays
de l’Afrique du Nord en général, que les grands naturalistes (pédologues, géologues, géomorphologues, éco-
logistes,...etc) européens ont été formés.
C’est dans les pays du Sud de la Méditerranée que les ressources en sol sont les plus menacées de dégra-
dations suite à leur surexploitation et à la réduction de la couverture forestière. C’est encore là où le dilemme
développement et protection de l’environnement prend sa vraie dimension.
Pour mieux utiliser les sols dans le contexte du développement durable, il faut les connaître. Connaissons
nous les sols au Maroc ?
Même si les travaux d’inventaire et de cartographie des sols au Maroc ne couvrent qu’environ 30 % du
territoire (MADRPM, 1993 ; MADRPM, 1996 ; Badraoui et Stitou, 2002), l’essentiel de ce que sont les sols du
Maroc est connu : ce qu’ils sont, les principales règles de leur répartition régionale, comment ils fonc-
tionnent, leurs principaux qualités et défauts et les agressions qu’ils subissent du fait de l’intensification de
l’occupation humaine.
93
– Malgré les recherches, les études, les campagnes d’information et de vulgarisation, les problèmes de
mise en valeur s’accumulent et s’amplifient :
R dégradation des sols irrigués qui constituent l’une des grandes richesses du Maroc (1 million d’ha) :
baisse de la teneur en matière organique, déstructuration de la structure, baisse de fertilité chimique,
salinisation des sols et des eaux, pollutions des sols et des eaux. En général, il y a une baisse progres-
sive de la productivité agricole ;
R dégradation des sols non irrigués (bour) qui couvrent l’essentiel de la SAU du pays (environ 7.7 millions
d’ha) : baisse des fertilités organiques et chimiques, développement de l’érosion hydrique et éolienne,
réduction de la capacité de rétention d’eau et de la réserve utile en eau des sols (aridification des
régimes hydriques) ;
– Dans les périphéries urbaines, développement anarchique des occupations urbaines et industrielles sur
de bons sols agricoles.
Les trois principales urgences en vue d’une meilleure connaissance des sols du Maroc ont été listées par
Ruellan (2003). Il s’agit de :
– La connaissance morphologique et géochimique des couvertures pédologiques de l’ensemble du
Maroc : inventaire et cartographie des systèmes pédologiques et de leur fonctionnement. C’est la base
pour toute politique, locale, régionale, nationale, de bonne gestion des ressources en sol et de ce qui est
associé aux sols (les eaux, les couverts végétaux, les sociétés humaines).
– La connaissance approfondie des dynamiques physiques, chimiques, biologiques, minéralogiques des
divers types de sols du Maroc. C’est la base d’une bonne évaluation et d’une bonne gestion de la fertilité
des sols et des phénomènes de pollution des sols et des eaux.
– La connaissance de l’évolution des sols (et des eaux) en fonction des occupations humaines : en milieu
« bour », en milieu irrigué, en milieu périurbain et urbain. Mais aussi, la connaissance des conséquences
des dégradations et des pollutions des sols (et des eaux) sur les développements humains.
En fait, il s’agit de chercher à mieux comprendre les interrelations entre les systèmes pédologiques et les
systèmes sociaux pour mieux les gérer. La durabilité des systèmes de production passe nécessairement par
la durabilité des ressources en sol et en eau (Badraoui et al., 2000).
Les travaux de pédologie au Maroc ont passé par plusieurs étapes tant sur le plan envergure que sur leur
pertinence. Sans avoir un programme national d’inventaire des sols au Maroc, les connaissances actuelles
sont le fruit d’une longue accumulation du savoir sur les milieux écologiques marocains. Cette partie présen-
tera succinctement l’évolution de l’acquisition des connaissances depuis la fin du dix-neuvième siècle.
Depuis la fin du XIXe siècle et jusqu’à la 4ème décennie du siècle dernier, les observations pédologiques au
Maroc étaient l’œuvre de pédologues, de forestiers ou de géographes étrangers. Des prospections étaient
réalisées à l’occasion des excursions scientifiques. Il a fallu attendre les années cinquante pour voir se déve-
94
lopper les toutes premières études pédologiques proprement dites. Celles-ci avaient été entreprises dans le
cadre des études monographiques d’avant-projets pour les aménagements hydroagricoles. Le protectorat
français au Maroc s’était attaché à mobiliser la maximum d’eau dans des barrages en vue de l’irrigation des
terres dans les zones jugées potentiellement prioritaires tels que les Béni Amir et les Béni Moussa (au Tadla),
Sidi Slimane (au Gharb), les Triffas (à la Moulouya), la plaine du Souss, le plateau de Fes-Meknes et dans le
Haouz de Marrakech (Prefol, 1986). D’autres études à petites et à moyennes échelles ont également été
publiés sur les Doukkala (Feodoroff, 1955).
La première étude sur l’évaluation de la fertilité des sols du Maroc a été réalisée par Ch. Thomann (1952).
Beaucoup d’autres travaux préliminaires sur les comportements physiques et chimiques des sols ont été réa-
lisés par George Bryssine qui peut, sans aucun doute, être considéré le père de la pédologie Marocaine.
95
L’étude d’inventaire des études pédologiques de 1993 avait mis le doigt sur le problème d’archivage des
études. En effet, une partie des rapports et cartes répertoriés n’ont pas pu être retrouvés. D’où la nécessité
de mise en place d’un système d’archivage numérique sous SIG. Cette option exige des changements
importants dans les CPS des études. Jusqu’à présent, cet objectif n’est que partiellement réalisé malgré
l’effort constaté au niveau de l’équipement des administrations en SIG.
Plusieurs programmes et projets de développement agricole et rural avaient souffert du manque de don-
nées sol. C’est le cas, par exemples, du programme d’élaboration des cartes de vocation agricole des terres
au Maroc qui est mis en œuvre par l’INRA, du plan national d’aménagement des bassins versants en cours
de réalisation par le HCEFLCD, le programme de développement rural intégré des périmètre de mise en
valeur en bour (PMVB) piloté par le MADRPM et le programme de cartographie des sols autour des agglomé-
rations en vue de l’orientation de l’urbanisation.
Du point de vue géographique, l’essentiel des études réalisées intéressent la partie Nord-ouest du pays.
Les provinces de l’Est et du Sud ne sont que très partiellement prospectées. Les études de cartographie
des sols réalisées entre 1993 et 2003 sont estimées à environ 2 millions d’ha, ce qui porte la superficie
totale prospectée à 22 millions d’ha, soit 31 % du territoire national.
Pour la valorisation des études pédologiques existantes le Maroc participe à deux initiatives régionales :
– L’élaboration de la base de données Euro-Méditerranéenne, géo-référencée à l’échelle du 1/1000 000e
des sols autour de la Méditerranée. L’équipe marocaine coordonne les travaux des pays de l’Afrique du
Nord en collaboration avec le Bureau Européen des sols à Ispra en Italie et l’INRA d’Orléans en France.
Un atelier de travail a été tenu en juin 2001 à Rabat.
– L’élaboration de la base de données SOTER (SOl et TERrain) pour les pays de l’UMA en collaboration
avec la FAO. Le Maroc a déjà réalisé sa carte SOTER au 1/5000 000e en collaboration entre le MADR et
l’Association Marocaine des Science du Sol (AMSSOL) (Carte 1 en annexe 1).
Les deux cartes susmentionnées n’ont pas d’intérêt pratique pour le développement agricole au niveau
opérationnel. Cependant, elles ont permis de mettre en ordre les connaissances et de mettre le Maroc en
position de négocier avec les pays de la région sur des questions plus globales tels que les changements cli-
matiques et la lutte contre la désertification. À ce titre, la base de données SOTER du Maroc a été utilisée
pour l’élaboration de la carte de sensibilité à la désertification des pays de l’UMA plus l’Égypte en collabora-
tion avec l’Observatoire du Sahara et du sahel (Carte 2 en annexe 2).
96
Encadré 1
97
3.2.3. Les cadres opérationnels
La gestion durable des ressources en sol exige la présence de spécialistes dans les services extérieurs de
développement rural. La situation actuelle montre que les ORMVA sont relativement bien dotés de cadres
pédologues par rapport aux DPA, DREF et SPEF. En effet, il y a au moins un spécialiste de science du sol par
ORMVA (20 cadres dans les ORMVA), par contre DPA disposant d’un pédologue sont rares (10 cadres seule-
ment). Il y a lieu de constater que les ingénieurs pédologues sont concentrés dans les services centraux où
ils font des activités administratives (suivi des projets) ayant peu de contact avec le terrain, au moment où les
services extérieurs souffrent d’un manque terrible de cadres.
Dans les services ne relevant pas du MADRPM et du HCEFLCD, il est rare de trouver des ingénieurs pédo-
logues. Le Maroc n’avait jamais formé de cadre moyens spécialisés en sciences du sol (techniciens) comme
c’est le cas pour les autres disciplines. Cet handicap se fait sentir sur le terrain lorsqu’il s’agit d’encadrer les
agriculteurs et diffuser l’information technique. Les quelques prospecteurs, spécialisés en cartographie des
sols se sont formés sur le tas et prennent tous de l’âge.
Certains bureaux d’études dispose de pédologues qui s’occupent entre autres des activités environnementales.
98
Bien que la recherche, et la formation à la recherche, soient clairement dans les missions des enseignants-
chercheurs, un budget recherche n’est que très rarement identifié au sein des Écoles Agronomiques et des
Universités. Les enseignants chercheurs qui souhaitent poursuivre une activité de recherche (et c’est la
majorité d’entre eux) doivent donc rechercher des financements contractuels : auprès des sociétés privées
(agricoles et industrielles), auprès des services de développement du des ministères (ORMVA, DPA, DREF,..
etc... mais aussi auprès de la coopération internationale. Il en résulte une programmation scientifique aléa-
toire et dispersée essentiellement pilotée par la demande des utilisateurs. Ce fait n’est en soit pas un mal, à
condition que ce pilotage par l’aval s’inscrive dans une programmation scientifique bien identifiée et à condi-
tion aussi que les enseignants-chercheurs puissent prendre le temps de la valorisation scientifique de leurs
travaux contractuels.
Des recherches complémentaires plus fondamentales, à partir des résultats obtenus dans le cadre des
études contractuelles, ont pu conduire à des publications scientifiques de haut niveau dans des revues inter-
nationales.
Toutes les équipes de recherche disposent de moyens de laboratoire. Cependant, ces moyens sont en
général plutôt modestes, avec de nombreuses difficultés de fonctionnement, d’entretien, de renouvelle-
ment. L’accès à une documentation scientifique régulière pose également de sérieux problèmes à beaucoup
de chercheurs. Ces handicaps poussent les universitaires et les chercheurs à partir vers des laboratoires
étrangers pour réaliser une partie des travaux et pour se remettre à jour au niveau des connaissances.
Enfin, toutes les équipes se plaignent des lourdeurs administratives et budgétaires, incompatibles, en
particulier, avec la nécessaire recherche sur le terrain qui exige, bien au contraire, beaucoup de souplesse et
de disponibilité : les faibles moyens de fonctionnement dont peuvent disposer les enseignants-chercheurs et
les chercheurs sont rendus partiellement indisponibles par la lourdeur des lignes budgétaires multiples et par
les nombreux contrôles a priori.
Il y a un potentiel humain important, compétent, reconnu, volontariste et dynamique. Ce potentiel est cependant, insuf-
fisamment organisé, appuyé, évalué pour qu’il puisse mieux valoriser scientifiquement son travail pédagogique et ses
études finalisées. Il y a en particulier urgence à ce que ce potentiel humain soit utilisé pour former les équipes du futur.
Eu égard aux urgences des connaissances à acquérir concernant les sols du Maroc, les constats sont les
suivants :
La connaissance morphologique et géochimique des couvertures pédologiques n’avance pratiquement
pas. Le programme national de cartographie des sols est en veilleuse. Les études de découverte des sys-
tèmes pédologiques sont rares. Un effort est cependant fait, dans le cadre de collaborations internationales,
pour valoriser les données existantes (participation à des banques de données et à des cartes de synthèse).
Par ailleurs quelques recherches méthodologiques sont en cours (SIG, télédétection...).
Les recherches sur la modélisation de l’érosion hydrique et éolienne se sont développées en utilisant des
nouvelles technologies de SIG et de télédétection. Cependant, l’évaluation scientifique de l’impact des tech-
niques de conservation des sols et des eaux dans les bassins versants demeure très timide.
Les recherches finalisées qui touchent à l’utilisation agricole des sols se sont beaucoup développées :
– fertilité et fertilisation, chimique et biologique, des sols, en agriculture pluviale (bour) et en milieu irrigué,
en fonction des divers types de climats et de sols ;
99
– travail du sol (en milieu bour) pour lutter contre les dégradations organiques et structurales et contre
l’érosion ; l’un des buts étant aussi une meilleure gestion de l’eau des sols pour lutter contre l’aridité ;
– suivi de l’évolution des sols irrigués, dans le but de lutter contre les dégradations structurales, physico-
chimiques, biologiques et ainsi de mieux valoriser les potentialités des sols irrigués. Une attention parti-
culière est apportée aux phénomènes de salinisation et alcalinisation des sols et des eaux ;
– cartographie des vocations agricoles des terres (principalement céréalières) en fonction des sols, des cli-
mats, des occupations humaines (programme d’élaboration des cartes d’aptitude des terres).
Cependant, les recherches plus fondamentales nécessaires à ces recherches finalisées, concernant par
exemple les dynamiques physiques, chimiques, biologiques des divers types de sols agricoles du Maroc,
sont insuffisamment développées.
Les recherches finalisées concernant les pollutions des sols et des eaux en fonction de l’intensification de
l’agriculture, de l’industrie, de l’urbanisation, se développent également :
– pollutions nitrique ;
– mais aussi utilisation raisonnée, en agriculture, des eaux usées et des déchets.
En résumé :
– la recherche marocaine est très axée sur l’utilisation des sols, ce qui est en soi une bonne chose;
– elle ne l’est cependant pas assez sur les connaissances des sols et de leur fonctionnement, connaissances pourtant
indispensables à leur bonne utilisation. L’appauvrissement scientifique de la recherche finalisée est, de ce fait, prévi-
sible;
– cette situation est la conséquence des conditions de travail obligeant les chercheurs au pilotage principal par la
demande des utilisateurs, le cadre de programmation scientifique et d’appui financier pour la recherche étant insuffi-
sant.
4.3. Recommandations
100
ii. Pour améliorer l’organisation et les moyens de la recherche
Identifier un Programme National de Recherche en Science du Sol, doté d’un budget significatif. Ce pro-
gramme, scientifiquement structuré, devrait donner la priorité à l’acquisition des connaissances fonda-
mentales nécessaires à la gestion durable des sols du Maroc.
Inciter à la création, au Maroc, d’équipes et de réseaux thématiques de recherche en science du sol, mais
aussi d’équipes interdisciplinaires et internationales plus larges. Dans le cadre du Programme National de
Recherche en Science du Sol, la priorité devrait être donnée aux équipes et aux réseaux pour le financement
de leurs travaux de recherche.
Inciter les équipes scientifiques à ne pas se laisser trop disperser par la multiplication des contrats. Il est
souhaitable que le nécessaire pilotage partiel par la demande des utilisateurs (publics et privés) soit mieux
cadré par une programmation scientifique clairement identifiée et affichée.
Instituer un système d’évaluation des travaux scientifiques, des enseignants-chercheurs et des équipes. Il
conviendrait que ce système valorise efficacement, en termes de carrière (et de budget pour les équipes),
les efforts de ceux qui contribuent à la recherche (et qui ne se satisfont pas seulement du bénéfice personnel
de consultances).
Reprendre, de toute urgence, le recrutement et la formation de jeunes chercheurs et enseignants-
chercheurs. Il en va de la continuité et du développement des équipes de recherches et de leurs pro-
grammes. Mettre à profit cette reprise du recrutement pour faire des choix scientifiques thématiques clairs,
en cohérence avec les priorités nationales du Maroc.
Développer les moyens de travail, sur le terrain, dans les laboratoires, dans les bibliothèques. Il faut relan-
cer la curiosité, la recherche bibliographique autonome, et la participation au mouvement international de la
recherche au plus haut niveau.
Instituer plus de souplesse administrative et budgétaire, indispensable au bon déroulement des activités
de la recherche scientifique.
Au Maroc, les terres agricoles sont menacées par l’urbanisation (betonisation). C’est l’une des formes de
perte totale des sols de bonne qualité pour la production agricole. L’orientation de l’urbanisation aux alen-
tours des villes, fait partie intégrante de la planification de l’utilisation des terres qui est un des principes de
l’aménagement du territoire.
L’aménagement du territoire consiste en l’évaluation systématique du potentiel qu’offrent les terres et les
eaux, des possibilités d’utilisation des terres et des conditions économiques et sociales afin de sélectionner
et d’adopter les modes d’utilisation des terres les mieux appropriés (FAO, 1993). L’aménagement harmo-
nieux et durable du territoire repose sur les principes de i) l’efficacité (productive et économiquement viable),
ii) l’acceptabilité et l’équité (utilisations socialement acceptables telles que la sécurité alimentaire, l’emploi et
la sécurité des revenus) et iii) la durabilité (satisfaire les besoins de la génération actuelle tout en conservant
les ressources dans l’intérêt des générations futures). Il s’agit de combiner la production et la conservation.
Le processus de planification de l’utilisation des terres se fait en 10 étapes (tableau 1).
101
Tableau 1 : Processus de planification de l’utilisation des terres
No Consistance de l’étape
1 Définition des objectifs et du champ d’application
2 Organisation des travaux
3 Analyse des problèmes
4 Identification des possibilités de changement
5 Évaluation de l’aptitude des terres
6 Évaluation des options
7 Choix de la meilleure option
8 Préparation du plan d’utilisation des terres
9 Exécution du plan
10 Suivi et révision
Le sol est une composante de la terre qui devrait être affectée à la meilleure utilisation possible dans les
conditions économiques, sociales et culturelles d’un territoire donné. C’est dans ce cadre que les pouvoirs
publics avaient délimité des zones favorables à la mise en valeur agricole intensive sous irrigation au Maroc.
D’autres terres de moindre qualité (manque d’eau ou d’autres contraintes physiques ou chimiques) avaient
été réservées à l’agriculture pluviale, à la foresterie ou au développement de l’élevage extensif. L’existence
des études de sol est une condition nécessaire pour la planification des terres.
Ayant connu une forte croissance démographique durant la fin du 20e siècle, la structure spatiale et l’arma-
ture urbaine du Maroc se sont profondément transformées. Plusieurs villes nouvelles sont apparues et beau-
coup de villages ruraux se sont transformés en véritables villes. Cependant, cette urbanisation galopante se
fait de manière anarchique. Malheureusement, l’extension des villes se fait au dépend des terres de bonne
qualité pour l’agriculture. Selon des données du MADRPM, sur 63 projets d’extension urbaine autour de dif-
férents centres urbains qui avaient prévu 65 518 ha, 36 264 ha de terres agricoles (dont une bonne partie est
équipée pour l’irrigation dans les zones d’action des ORMVA du Tadla, de la Moulouya et du Gharb) et de
forêts ont été incluses comme espace urbanisable. 45 % (16 567 ha) de la superficie incluse a été effective-
ment retenue pour l’urbanisation.
La superficie annuellement grignotée par les différentes formes d’urbanisation est estimée à 4 000 ha
(MADRPM, 2004). Les opérations immobilières représentent 45,75 %, les opérations industrielles et les
équipements 25 % et les opérations touristiques 12,5 % de la consommation totale des terres agricoles
À titre d’exemple, une étude récente réalisée dans la plaine du Tadla (ORMVAT, 2004) a révélé des chiffres
alarmants de consommation des terres irriguées et équipées à haut potentiel de production. Ainsi, le bâti dis-
persé est passé de 932 ha en 1986 à 2 284 ha en 2004, soit une extension moyenne de 79,5 ha/an. Parallèle-
ment, les agglomérations et villes du périmètre ont occupé en 2003 une superficie de 6 750 ha, soit une
extension moyenne annuelles de 83,5 ha/an (encadré 2).
La situation dans le Périmètre irrigué du Tadla n’est pas unique. Des cas similaires existent également
dans la Moulouya et le Gharb. C’est également le cas autour des principales villes du Maroc.
Malgré l’implication du MADRPM dans l’évaluation des documents de l’urbanisme en veillant à l’applica-
tion de la loi 12-90 sur l’urbanisme pour préserver les terres agricoles, les terres plantées et les forêts, le
poids de son avis ne pèse pas fortement sur la prise de décision. Il y a besoin urgent d’un accord qui précise
102
les responsabilités entre les départements concernés clés (Ministère de l’Intérieur, Ministère de l’Urbanisme
et le MADRPM).
Encadré 2
Problématique
Malgré les lois et les réglementations en vigueur au Maroc (loi 12-90 relative à l’urbanisme) l’urbanisation ne cesse de
s’étendre aux dépens des terres agricoles. La durabilité de l’agriculture périurbaine est remise en question. Les pertes
économiques en terme de productivité et en valeur foncière sont importantes.
Forte densité urbaine : 243 hab/km2 dans le Périmètre irrigué contre 50 hab/km2 dans le reste de la province de Béni
Mellal.
Objectifs
– Établissement de la situation actuelle de l’habitat groupé et dispersé dans la zone du périmètre irrigué du Tadla.
– Évaluation de l’ampleur de l’extension des agglomérations urbaines sur les terres agricoles, par rapport à la situation
de 1986.
Méthodologie
Utilisation des images satellitaires de haute résolution SPOT, 2,5 m, du 23/O6/2003), photo-interprétation et SIG.
Résultats
– La superficie du bâti à l’intérieur du périmètre en 2003 est évaluée à 6 750 ha, répartie comme suit : Bâti dispersé :
2 283 ha et Bâti groupé : 4 467 ha.
– L’extension de l’habitat sur les terres agricoles du périmètre depuis 1986 est estimée à 2 772 ha, répartie comme
suit : 1986 : 3 970 ha et 2003 : 6 750 ha, soit un taux d’accroissement de 163 ha/an.
– Perte en superficie équipée et aménagée évaluée à 16 millions de dh/an
Les cartes d’orientation de l’urbanisation préparées par le MADRPM ne sont considérées qu’à titre indica-
tif. En plus, le programme d’élaboration de ces cartes souffre de moyens financiers insuffisants.
Si rien n’est fait et si le taux moyen de consommation des terres agricoles par l’urbanisation se maintien à
3 500 ha/an, l’étendue des terres consommées arrivera à 70 000 ha à l’horizon 2025, soit 0,8 % de la SAU.
Cette réduction des terres agricoles pourrait présenter un enjeu alimentaire pour le pays, sachant que la
population nationale serait de 37 831 000 hab en 2020 (projection établie par le SNAT), soit 0,23 ha SAU/
personne alors qu’actuellement on l’estime à 0,34 ha SAU/personne (une diminution de 32 %).
Cette diminution représente une perte économique et financière pour le Maroc. Selon le scénario tendan-
ciel, la perte est évaluée à 1 750 millions de dh pour la valeur de la production endommagée et 2 240 millions
de dh pour la valeur des équipements endommagés (MADRPM, 2004).
L’urbanisation des terres agricoles au Maroc est un problème sérieux qui mérite une attention particulière
de la part des pouvoir publics. La spéculation foncière est un handicap majeur du développement durable et
de la sécurité alimentaire de notre pays.
103
5.2. L’érosion des sols
L’érosion hydrique est reconnue comme étant la forme de dégradation des sols la plus dangereuse au
Maroc. Elle se manifeste essentiellement dans les montagnes du Rif et du pré-Rif où la dégradation spéci-
fique dépasse souvent 3 000 tonnes/km2.an. Les précipitations fortement érosives, associées aux fortes
pentes et aux matériaux géologiques tendres explique les forts taux d’érosion enregistrés. En plus, les pra-
tiques agricoles non conservatoires des sols et des eaux accentuent l’érosion hydrique.
Les provinces du Sud et de l’Est du Maroc sont fortement touchées par l’érosion éolienne qui décape les
horizons superficiels des sols suite à leur mise en valeur sans mesures de protection permettant de réduire
la vitesse du vent. La mise en culture des terres de parcours dans l’Oriental constitue une menace réelle des
écosystèmes des hauts plateaux. Environ 300 000 ha sont menacés d’ensablement dans les régions de
Ouarzazate, Zagora et Errachidia. L’érosion éolienne dans ces régions fait perdre environ 500 ha/an. En plus,
l’érosion éolienne menace 25 % des canaux d’irrigation (65 km) dans la vallée du Draa.
En plus des pertes des couches arables et fertiles des sols à l’amont des bassins versants, l’érosion réduit
la capacité de mobilisation des ressources en eaux dans les barrages. Ainsi, la tranche d’eau perdue chaque
année suite à l’envasement des retenues de barrages est évaluée à 75 millions de m3. Ce volume constitue
un manque à gagner en irrigation équivalent à une superficie de 10 000 ha.
La salinisation secondaire est la forme de dégradation des sols la plus rapide dans les périmètres irrigués.
Elle affecte environ 160 000 ha (tableau 2), soit environ 16 % des terres irriguées (Badraoui et al., 2003).
104
Tableau 2 : Salinisation secondaire dans les périmètres irrigués au Maroc
Les principales causes de la salinisation secondaire sont l’aridité du climat, l’utilisation d’eau chargée en
sels solubles, la mauvais drainage associé à la remontée de la nappe phréatique, l’utilisation de techniques
d’irrigation peu économes en eau, et dans une moindre mesure l’utilisation abusive des engrais chimiques.
Dans les périmètres irrigués la réduction de la teneur en matière organique est une tendance lourde obser-
vée. Elle est causée par une mauvaise gestion des résidus de récoltes (pas d’enfouissement), à la faible utili-
sation des engrais verts (fumier et compost) et à la forte minéralisation des composés organiques. En effet,
la teneur en matière organique des sols est généralement inférieure à 1,5 %. Le taux de réduction observé
est de l’ordre de 6 à 10 %/an.
5.4. Désertification
Définie par les Nations Unies comme la dégradation des terres dans les zones arides, semi arides et sub-
humides sèches, la désertification touche 93 % du pays. Elle constitue une contrainte majeure au déve-
loppement économique et social. Le Maroc a ratifié la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la
désertification (CNULCD) en novembre 1996 et a validé son Plan d’Action National (PAN-LCD) en juin 2001.
Ce dernier fait partie intégrante du Programme d’Action National de l’Environnement (PANE).
Le PAN-LCD est vu par les pouvoirs publics comme un cadre de mise en œuvre de la stratégie de déve-
loppement rural 2020 et d’intégration des actions sectorielles.
Les causes de la désertification sont aussi bien climatiques (sécheresse) que humaines (utilisation non
rationnelle des espaces et ressources naturels. En effet, la Sécheresse est une cause majeure de la désertifi-
cation (voir schéma suivant) :
Changements climatiques
105
Dégradation des terres
La pauvreté induisant une pression très forte sur les ressources naturelles est une deuxième cause
majeure de la désertification.
L’évaluation de la mise en œuvre du PAN depuis 2001 a fait ressortir un certain nombre d’acquis et de
points de faiblesse. Les points forts concernent :
– Évolution progressive des projets sectoriels descendants vers des projets de développement rural inté-
gré basé sur l’approche ascendante participative (PMVB, DRI, ...).
– La plupart des projets de développement rural intégré contiennent des activités de lutte contre la déser-
tification et peuvent ainsi être inscrits dans le cadre stratégique du PAN.
– Implication effective et directe de certains partenaires dans la mise en œuvre du PAN (MADR,
HCEFLCD, SEE, ONG, PNUD, GTZ, MM, Coops. Française, Belge, Italienne ; Américaine, Japonaise, ...
etc).
– Société civile très active, spécialement dans les régions du Sud : RIOD-Maroc en activité.
– Cadre institutionnel en cours de consolidation à différents niveaux (Projet PAN-GTZ, voir cadre institu-
tionnel).
– Système de suivi-évaluation du PAN et de la désertification en cours d’élaboration (Projet SMAP-CE).
– Programme prioritaire et mécanisme de mobilisation des ressources en cours d’élaboration : table ronde
prévue en sept. 2004 (Appui du Mécanisme Mondial).
106
– L’intégration des actions au niveau central et au niveau local mérite d’être améliorée ;
– Les procédures budgétaires demeurent un handicap majeur qui pèse très fortement sur la mise en
œuvre des actions prévues ;
– Certains projets manquent d’études de base sur les ressources naturelles et humaines. La définition des
actions d’aménagement n’est pas toujours techniquement valable.
Malgré les insuffisances identifiées et qui méritent des efforts coordonnés de la part de tous les acteurs, le
Maroc est considéré par les Nations Unies comme l’un des pays touchés où un grand progrès est réalisé
dans la mise en œuvre de l’UNCCD.
Le retard cumulé par le Maroc en matière de connaissance des sols exige l’élaboration et la mise en œuvre
d’un programme national d’inventaire et de cartographie des sols. Ce vœux a été exprimé à maintes reprises
pour assurer la coordination des travaux entre les administrations concernées, suivre les réalisations et
compléter la connaissance dans les régions du Sud et du Sud-Est.
Actuellement les travaux de pédologie se font sans coordination, ni concertations entre les ministères et
même à l’intérieur du même ministère. Les travaux se font au coup par coup selon les besoins des projets.
Le PNICS a été inscrit comme priorité dans le Plan d’Action National de l’Environnement (PANE), mais
jusqu’à présent ne lui a été attribué. Les bailleurs de fonds considèrent que l’inventaire des ressources en sol
est une responsabilité de chaque état.
À l’horizon 2025, il serait très important que le Maroc complète l’inventaire des ses sols à l’échelle du
1/500 000, comme étape préalable pour des travaux plus détaillés selon les besoins. Le recours aux tech-
niques spatiales et aux SIG permettra d’aller plus vite, de réduire les coûts et d’archiver les données sous for-
mat numérique.
Les données recueillies à travers les travaux du PNICS doivent être mises à la disposition de tous les utili-
sateurs potentiels. Les bases de données sol devront être intégrées dans des systèmes de bases de don-
nées plus élargie concernant l’aménagement du territoire en général, le suivi de l’environnement et le
développement agricole et rural.
Une base de données « sol » centralisée doit être mise en place au niveau d’un département ministériel
choisi. Ce dernier suivra, évaluera et archivera les réalisations du programme national d’inventaire et de carto-
graphie des sols.
107
6.3. Accord multipartite pour la prise de décision concernant le
problème de l’urbanisation des terres agricoles.
L’urbanisation des terres agricole à haut potentiel de production, les terres plantées et de forêt est un
enjeu important pour le développement humain du Maroc. Le foncier est sous pression suite aux fortes
demandes par les différents opérateurs de développement. Les responsabilités des différents acteurs
concernés (ministère de l’Intérieur, MADRPM, HCEFLCD, Aménagement du territoire, Urbanisme ...) doivent
être clairement définies. La seule promulgation de la loi 12-90 stipulant la préservation des terres agricole
n’est pas suffisante.
Un accord multipartite définissant les responsabilités de chaque intervenant serait très utile pour que les
décisions soient au service du développement durable du pays.
Références
AMSSOL, 1993. Réflexions générales sur les apports de la recherche en science du sol au développement,
in Badraoui et Soudi Eds. Place de la pédologie au sein du Ministère de l’Agriculture et de la Réforme
Agraire : situation actuelle et perspectives. Journée-débat, Rabat 8 septembre 1993.
Badraoui M., Agbani M., Soudi B. 2000. Évolution de la qualité des sols sous mise en valeur intensive au
Maroc. In Soudi & al. Eds. Intensification agricole et qualité des sols et des eaux, Actes du séminaire orga-
nisé à Rabat les 2 et 3– Novembre 2000.
Badraoui M. et Stitou M. 2002. Status of soil survey and soil information system in Morocco. In Badraoui,
Bouabid & Pavlovic Eds. Proceedings de l’atelier sur les bases de données SOTER pour les pays de l’Union
du Maghreb Arabe. P. 21-28, 12-16 novembre 2001, Rabat, Maroc, FAP/SNEA, Tunis
Badraoui M., Bouabid R., Ljouad L., Rouchdi M., 2002. Base de données digitale SOTER pour le Maroc. In
Badraoui, Bouabid & Pavlovic Eds. Proceedings de l’atelier sur les bases de données SOTER pour les pays
de l’Union du Maghreb Arabe. P. 63-76, 12-16 novembre 2001, Rabat, Maroc, FAP/SNEA, Tunis
Badraoui M., Bouabid R., Rachidi F., Ljouad L. 2003. Land degradation and conservation in the agro-
écosystems of Morocco. P. Zdruli éd., Ecosystem-based assessment of soil degradation to facilitate land
users’ and land owners’ prompt actions, Medcoastland net project workshop, Adana, Turkey, 2-7 june
2003. p : 247-258
Badraoui M. 2004. Mise en œuvre du programme d’action national de lutte contre la désertification. Com-
munication au Colloque International sur la désertification, la sécheresse et la lutte contre la pauvreté,
Mardi 15 juin 2004, Bruxelles, Belgique,
Feodoroff A. 1955. Etude générale des sols du périmètre irrigable des Doukkala. Prospections Zone Nord de
Sidi Bennour. Service Rech. Agro. Exp. Agric. SOGETIM. Rapport + Cartes 1/50 000.
INRA. 1967. Congrès de Pédologie Méditerranéenne : excursion au Maroc, Les cahiers de la recherche agro-
nomique No 25.
MADRPM, 2004. Evaluation de l’utilisation des terres agricoles à des fins non agricoles. INAT/DAF, Rabat.
MADRPM, 1993. Inventaire des études pédologiques au Maroc. DCFCC/DC, Rabat
MADRPM, 1996. Carte des sols du Maroc au 1/2 000 000e. DCFCC/DC, Rabat
Robert M. 1996. Le sol : interface dans l’environnement, ressource pour le développement. Masson, 241p.
MARDPM, 2000. Actes des Assises Nationales sur la Recherche Agricole, Colloque National de l’Agriculture
et du Développement Rural, 19-20 juillet 2000.
108
Merzouk A., Badraoui M., Fassi D., Bonn F., Gwyn Q.H.J., Hinse M. 1990. Essai méthodologique pour le clas-
sement et la cartographie des Terres en vue de la conservation des sols et des eaux en zones arides.
Apport de la télédétection. In J.M. Dubois et P. La France eds. Apport de la télédétection à la lutte contre la
sécheresse : 163-171, AUPELF-UREF
ORMVAT, 2004. Evolution de l’urbanisation et de la déperdition des terres agricoles dans le périmètre du
Tadla. ORMVAT
Prefol P. 1986. Prodige de l’irrigation au Maroc : le développement exemplaire du Tadla 1936-1985. Nou-
velles Editions Latines, Paris, 266p.
Ruellan A. 2003. Évaluation du système de recherche scientifique et technique au Maroc : Sols et Environne-
ment. MESFCRS, SERS.
Thomann Ch. 1952. Contribution à l’étude de la fertilité chimique des sols du maroc. Trav. Section. Pédol. 13/
14 : 9-34
109
Annexes
110
Unités SOTER des zones pour lesquelles des études pédologiques
sont disponibles
Terrain Composant Ter- Composant Sol Code Attribut Forme du Relief Type de sol (1)
rain Unité SOTER
1 1 1 1/11 SM Calcimagnesique
1 1 2 1/12 LV Vertisol
1 1 3 1/13 LL Sesquioxyde
4 1 1 4 SH Calcimagnésique
7 1 1 7/11 LP Calcimagnésique
7 1 2 7/12 Sesquioxyde
7 1 3 7/13 LP Vertisol
7 4 4 7/14 LP Vertisol
7 1 5 7/15 LP Hydromorphe
10 1 1 10 LL Calcimagnésique
11 1 1 11 SH Complexe
18 1 1 18/11 LP Isohumique
18 1 2 18/12 LP Calcimagnésique
18 1 3 18/13 LP Vertisol
20 1 1 20/11 LP Isohumique
20 1 2 20/12 LP Peu évolué d’érosion
21 1 1 21/11 LV Isohumique
21 1 2 21/12 LV Peu évolué d’apport
111
Unités SOTER des zones n’ayant pas fait l’objet d’études pédologiques.
Terrain Composant Ter- Composant Sol Code Attribut Forme du Relief Type de sol (1)
rain Unité SOTER
12 1 1 12/11 LL Complexe
12 1 2 12/12 LL Complexe
13 1 1 13 SM Complexe
14 1 1 14 TM Complexe
15 1 1 15/11 SM Complexe
15 1 2 15/12 SM Calcimagnésique
16 1 1 16 TM Complexe
17 1 1 17 TM Complexe
22 1 1 22 SM Complexe
23 1 1 23/11 LV Complexe
23 1 2 23/11 LV Complexe
24 1 1 24 SM Complexe
25 1 1 25 SM Complexe
26 1 1 26 LL Complexe
27 1 1 27 LL Complexe
28 1 1 28 LL Complexe
29 1 1 29 LL Complexe
30 1 1 30 SM Complexe
31 1 1 31 LP Complexe
32 1 1 32 LL Complexe
33 1 1 33 LL Complexe
34 1 1 34 LL Complexe
35 1 1 35 LL Peu évolué d’érosion
36 1 1 36/11 LL Peu évolué d’érosion
36 1 2 36/12 LL Peu évolué d’érosion
37 1 1 37 LP Complexe
38 1 1 38 LV Calcimagnésique
39 1 1 39 SH Complexe
(1) : Type de sol dominant déduits par interprétation des facteurs de pédogenèse. La plupart des Unités complexes sont constituées des Sols Minéraux Bruts et Peu Evolués Xériques
112
Annexe 2 : Carte de sensibilité à la désertification des pays de l’UMA
113
Biodiversité et équilibres écologiques
115
116
ABDELLATIF BERRAHO
AHMED BIROUK
MOHAMED MENIOUI
117
Le concept de biodiversité (ou diversité biologique) fait référence à l’ensemble des variations qui existent
au sein du monde vivant, c’est-à-dire au nombre, à la variabilité des organismes et des éléments qu’ils consti-
tuent par association. La Convention Internationale sur la Diversité Biologique (Rio de Janeiro, 1992) en a clai-
rement défini le contenu comme étant :
« la variabilité des organismes vivants, de toute origine, y compris, entre autres, les écosystèmes ter-
restres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie. Cela
comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes ».
La biodiversité recouvre donc trois niveaux de variabilité du monde vivant : au sein des espèces vivantes
(ou diversité génétique), entre les espèces (diversité interspécifique) et entre les écosystèmes (diversité éco-
logique). Ainsi, à côté de l’inventaire des différents éléments constitutifs de la biodiversité, cette approche
met également l’accent sur la notion d’« interactivité » entre ces trois différents niveaux d’organisation.
On avance habituellement trois types de justifications (Barbault, 1993) pour expliquer la valeur de la bio-
diversité :
– des justifications biologiques ou écologiques,
– des justifications économiques,
– des justifications d’ordres éthique ou culturel.
La biodiversité est en effet importante à divers titres : éthique, scientifique (anthropocentrique), sociolo-
gique, utilitaire, écologique, économique et récréative. La classification souvent employée de la valorisation
des ressources biologiques fait la distinction entre les valeurs directes et les valeurs indirectes (Tableau 1).
Tableau 1 : Typologie des valeurs de la biodiversité proposée par les économistes (Heywood, 1997)
119
1.2. Une biodiversité riche mais très vulnérable
Situé à l’angle nord-ouest du continent Africain entre 21o et 36o de latitude nord et entre le 1er et le
17e degré de longitude ouest, le Maroc jouit d’une position géographique privilégiée, au carrefour entre
l’Afrique et l’Europe, avec deux façades maritimes de plus de 3000 km donnant sur la Méditerranée et
l’Océan Atlantique. Le territoire du Royaume du Maroc est situé à la rencontre de grands ensembles très dis-
tincts : la mer Méditerranée au nord, l’Océan Atlantique à l’ouest et au nord-ouest et le front désertique du
Sahara au sud-est.
Cette position géographique particulière confère au Maroc une gamme remarquable de bioclimats très
variés allant de l’humide et du sub-humide au saharien et désertique en passant par l’aride, le semi-aride et le
climat de haute montagne dans le Rif, le Moyen et le Haut Atlas, où les altitudes dépassent respectivement
2 500, 3 000 et 4 000 m.
À cette diversité du relief et du climat correspond une grande diversité bioécologique ainsi qu’une gamme
importante de milieux naturels : formations ligneuses forestières, formations prèsahariennes et sahariennes,
steppes, matorrals, littoral...
Grâce à la diversité de ses bioclimats, à la variété des écosystèmes naturels et aux cortèges floristiques et
faunistiques qui leur sont liés, le Maroc occupe une place privilégiée dans le Bassin Méditerranéen. Ceci peut
être mis en évidence par le nombre d’espèces qu’il abrite (richesse spécifique), par le taux d’endémisme
(proportion d’espèces et sous-espèces végétales ou animales qui existent uniquement au Maroc) et par la
diversité des écosystèmes identifiés.
La biodiversité nationale revêt une importance écologique particulière, avec plus de 24 000 espèces ani-
males et de 7 000 espèces végétales et un taux d’endémisme global de 11 % pour la faune, et de plus de
20 % pour les plantes vasculaires, taux presque sans égal par rapport à tout le bassin méditerranéen. La
diversité des écosystèmes est aussi remarquable ; en plus des écosystèmes côtiers et marins, méditerra-
néens ou atlantiques, une quarantaine de milieux continentaux ont été identifiés comme particulièrement
riches en biodiversité, dont près des 3/4 sont représentés par des écosystèmes forestiers stricts (forêts) et
des écosystèmes pré forestiers et pré steppiques.
La richesse biologique du Maroc présente aussi un intérêt socio-économique vital pour le pays. Les res-
sources biologiques exploitées contribuent à une part importante de la richesse nationale dans différents
secteurs de l’économie comme l’agriculture (8 456 000 ha cultivables, plus du tiers de la population active,
20 % des exportations totales du pays, 25 % de son P.I.B.), l’élevage (un tiers de la PIBA, 40 % de l’emploi
rural), la foresterie (8 969 600 ha, 114 000 emplois permanents ou temporaires, 1,5 Milliard d’unités fourra-
gères /an, bois, liège, chasse) et les pêcheries (production globale d’environ 750 000 tonnes par an, exporta-
tions d’une valeur de près de 5 milliards de DH, près de 80 000 emplois, d’après ENB, 1997).
Les écosystèmes terrestres et aquatiques recèlent bien d’autres potentialités occultes, dont la valeur de
consommation ou d’utilisation directe et les valeurs d’option ne sont pas toujours aisément estimées :
Potentialités végétales (plantes médicinales, lichens, plantes aromatiques, caroube, glands, champignons
comestibles, champignons ectomycorrhiziens, truffes, oignon sauvage, etc.), animales (apiculture, gibiers,
escargots, tortues, oiseaux, pêche continentale, fertilisants organiques du sol etc.), côtières et marines
(algues marines, corail), éco-touristiques (diversité écosystémique, paysagère) et génétiques (espèces endé-
miques, variétés et races locales, espèces spontanées apparentées aux plantes cultivées). Ces composantes
jouent un rôle non négligeable, pourvoyeur de recettes parfois difficiles à estimer en termes économiques,
mais dont le rôle social est très important.
Cependant, de sérieuses menaces, dérivant essentiellement des multiples activités de l’homme pèsent
sur la biodiversité au Maroc, comme dans de nombreux autres pays du monde. L’impact des différentes acti-
120
vités humaines va souvent à l’encontre de la préservation de cette biodiversité et d’une gestion rationnelle
de nos ressources naturelles. Les écosystèmes sont plus ou moins touchés par les activités directes ou indi-
rectes de l’homme liées au développement économique et à la croissance démographique qu’a connus le
pays (agriculture intensive, surpâturage, déforestation, pêche excessive, industrie et pollution, urbanisation).
Dans des cas extrêmes, l’impact négatif de ces activités aboutit à une disparition irrémédiable d’espèces ani-
males ou végétales et à des dégradations irréversibles de certains écosystèmes, comme dans le Rif Central,
où l’écosystème à chêne-liège a été pratiquement anéanti.
Le Maroc, comme tout autre pays, puise l’essentiel des éléments nécessaires pour son développement
dans ses ressources naturelles dont les principales, à part les phosphates, sont l’agriculture, les forêts, les
parcours d’élevage, les ressources halieutiques et la diversité de ses paysages (tourisme). Toutes ces res-
sources biologiques sont fondées sur la notion de race, de variété, d’essence, d’espèce et de milieu écolo-
gique. Notre développement se fait donc, en grande partie, aux dépens de ces composantes. Il en résulte
des pertes écologiques et socio-économiques incalculables dues à la perte de ce fonds biologique souvent
irremplaçable. Alors que les phosphates, comme les autres ressources minières, sont une ressource épui-
sable, et si ses stocks nécessiteraient, dans les meilleures conditions des millions d’années pour se reconsti-
tuer, les ressources biologiques, disponibles et renouvelables, constituent les seules ressources naturelles
pérennes, lorsqu’elles sont gérées de façon rationnelle.
Sur les 7000 espèces qui composent la flore marocaine, près de 1700 taxons sont actuellement considé-
rés comme rares et menacés de disparition, ce qui représenterait une perte potentielle de plus de 24 % de
notre richesse floristique ! La déforestation entraîne la disparition de 31000 ha de forêts par an, et par suite,
la dégradation des écosystèmes forestiers et péri-forestiers.
Du point de vue faunistique, la situation n’est guère plus brillante. Les animaux disparaissent également à
une vitesse alarmante. Bon nombre d’espèces sont aujourd’hui éteintes, et plus de 600 espèces sont mena-
cées.
L’ichtyofaune est fortement menacée, aussi bien en mer qu’en eau douce. La pêche maritime enregistre
une baisse continue des captures, due essentiellement à la surexploitation de nos ressources halieutiques,
notamment par les flottes étrangères. En eau douce, ce sont des espèces comme l’alose et l’anguille qui
sont menacées, notamment par la pollution des cours d’eau et surtout la construction de barrages (sans
échelles à poissons) qui empêchent leurs migrations vers les lieux de ponte. La grande Alose a ainsi pratique-
ment disparu de certains fleuves (Sebou, Bou Regreg).
Dans le cas des oiseaux, au moins une dizaine d’espèces nidificatrices ont disparu du Maroc depuis le
début de ce siècle, et une vingtaine d’autres sont aujourd’hui très sérieusement menacées d’extinction. Les
causes de disparition, par ordre d’importance décroissante sont : la prédation humaine (chasse et bra-
connage), les dérangements humains (nomadisme, pastoralisme, tourisme), les pesticides et la dégradation
forestière.
Pour ce qui est des Mammifères, 6 espèces ont disparu entre 1925 et 1956, dont 4 Ongulés (Oryx, Addax,
Gazelle leptocère, Bubale) et 2 carnivores (Lion de l’Atlas et Serval). Le dernier Lion de L’Atlas a été vu dans
le moyen Atlas en 1930.
Le Maroc a une longue tradition dans le domaine de la protection de la nature, tradition qui n’a peut être
pas toujours été appliquée dans les mêmes termes et selon la perception actuelle de la biodiversité. L’exis-
tence de pratiques communautaires séculaires, l’ancienneté de certains textes législatifs, datant déjà de
l’année 1917 sur la conservation et l’exploitation des forêts, ainsi que l’instauration de parcs nationaux depuis
les années 1940 (Par le Département des Eaux et Forêts et de la Conservation des Sols) témoignent qu’une
conscience de ce problème a toujours existé. Néanmoins, si des efforts de protection des ressources natu-
relles en général, et biologiques en particulier, ont été entrepris depuis le début du 20e siècle par les autorités
121
marocaines, ils n’ont malheureusement pas permis d’endiguer entièrement la pression croissante sur les
ressources biologiques.
Le « Sommet de la Terre », Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement
(CNUED, Rio de Janeiro, 1992) est venu rappeler aux pays du Nord, comme à ceux du Sud que le monde est
unique, que la planète Terre ignore les frontières politiques et administratives et que la protection de l’envi-
ronnement doit être érigée en priorité à tous les échelons. Cette prise de position n’est pas un choix ni un
luxe, mais plutôt une nécessité incontournable pour pouvoir protéger la planète et mieux la conserver pour
les générations futures. Ce sommet a adopté un plan d’action planétaire, « l’Agenda 21 », visant à instaurer
un développement durable, ainsi que deux conventions internationales dont la Convention sur la Diversité
Biologique. Ainsi, la notion de ressources inépuisables est désormais caduque. Notre patrimoine naturel et la
police d’assurance que constitue la biodiversité sont donc des ressources tarissables.
La Convention sur la Diversité Biologique a été signée lors de ce Sommet par un grand nombre de pays
dont le Maroc. Elle a été ratifiée par notre pays en Août 1995. Cette Convention a pour objectifs (1) la conser-
vation de la biodiversité, (2) l’utilisation durable de ses éléments constitutifs et (3) le partage juste et équi-
table des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques.
L’avènement de la Convention sur la Diversité Biologique a permis d’accélérer la coordination et la mise en
œuvre du processus de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité, dans un cadre national mais
aussi en concertation et en harmonie avec les préoccupations à l’échelle planétaire.
Dans les chapitres qui suivent, après une vue rapide de la composition de la biodiversité nationale, les fac-
teurs de pression seront détaillés, suivis de l’identification des composantes les plus menacées de la bio-
diversité. Les principales mesures et actions de protection entreprises sont précisées, ainsi que les
différents acteurs impliqués. Dans le cadre d’une vision prospective, les orientations stratégiques et des élé-
ments de réflexion pour une contribution optimale de la biodiversité au développement durable du Maroc
sont présentés.
122
Figure 1 : Structure de la forêt marocaine (d’après les données du HCEFLCD)
Les cortèges floristiques et faunistiques de ces milieux diffèrent parfois considérablement en fonction des
conditions édapho climatiques : température, précipitations, altitude, nature du sol, etc. Ces écosystèmes
abritent la quasi-totalité des phanérogames du pays (4500), près de 90 mammifères, plus de 320 oiseaux et
un grand nombre d’invertébrés. À l’exception de quelques unes de ces formations (subéraie, cédraie, etc.),
les cortèges floristiques et faunistiques n’y ont été que très peu étudiés.
Les cédraies, par exemple, abritent entre autres plus de 260 espèces d’oiseaux dont une trentaine sont
nicheurs, ce qui est également le cas de la pinède. Les oxycédraies offrent un habitat important pour cer-
taines espèces endémiques telle que la fauvette de l’Atlas ou le Merle de Plastron qui s’y nourrit de baies de
genévrier. La junipéraie abrite de nombreuses espèces gibier telles que les tourterelles ou les perdrix. L’arga-
neraie est surtout connue par sa faune reptilienne dont 8 taxa sont endémiques du Maroc.
La forêt marocaine se démarque également par certains écosystèmes d’intérêt international dont :
– l’arganeraie, presque unique dans le monde et qui joue au Maroc un rôle écologique et économique
d’une grande importance ;
– le cèdre de l’Atlas, espèce noble ;
– le sapin du Maroc, formation endémique du Maroc ;
– la thuriferaie, rare et très menacée ;
– la formation du pin noir très localisé au Maroc et rare ailleurs ;
– le thuya de berbérie dont la plus intéressante formation se situe au Maroc ;
– Le Cyprès de l’Atlas, spécifique au Maroc et y est, de plus, très localisé.
123
B. Les écosystèmes sahariens
De par leurs formations végétales, constitués principalement de regs et d’ergs, les écosystèmes sahariens
(environ 1.000.000 ha), sont très souvent rattachés aux écosystèmes forestiers et steppiques. Les forma-
tions végétales arborées y sont à base d’Acacia (A. radiana, A.ehrensbergiana, A. albida). Les regs, qui sont
des reliefs plats caillouteux, sont souvent occupés par des Chaméphytes très clairsemés et plus particulière-
ment des Chénopodiacées (Hamada, Anabis, Nucula, etc.). Les ergs, formés essentiellement de dunes de
sables sont plutôt pauvres, aussi bien en espèces végétales qu’animales.
Malgré que le développement de la végétation y soit limité à cause des faibles précipitations, on y
dénombre 730 formes végétales différentes, dont 60 endémiques, abritant plus de 650 invertébrés, plus de
la moitié des amphibiens et reptiles du Maroc (50) pour la plupart endémiques, au moins 40 mammifères des
plus menacés du pays, plus de 250 oiseaux, etc.
C. Les agro-écosystèmes
Les écosystèmes agricoles, ou agro-écosystèmes, sont des écosystèmes dans lesquels des plantes et
des animaux d’origine naturelle ont été remplacés par des plantes cultivées et des animaux délibérément
domestiqués et sélectionnés par l’homme. Les méthodes les plus intensives, dont la monoculture moderne,
les plantations et les fermes d’élevage à haute technicité, peuvent modifier un écosystème si radicalement
qu’il ne subsiste plus grand-chose du biotope ou des éléments topographiques qui le caractérisaient aupara-
vant » (Convention sur la Diversité Biologique, 1996).
Au Maroc s’individualisent nettement des régions d’agriculture paysanne ancienne, où la polyculture
s’appuie sur des techniques plus au moins intensives, et des régions où l’élevage pastoral a été l’activité
principale jusqu’au début du xxème siècle et où domine aujourd’hui la céréaliculture. Schématiquement, on
peut distinguer ces deux grands types de zones de part et d’autre de la ligne de crête des montagnes de
l’Atlas.
Dans les régions céréalières d’agriculture « moderne », l’adoption des systèmes de culture basés sur l’utili-
sation des variétés performantes et uniformes, l’épandage des engrais azotés et le développement de la
mécanisation ont entraîné la quasi disparition des systèmes traditionnels basés sur un matériel diversifié. À
l’inverse, on peut encore trouver des régions de vieille agriculture où la diversité phyto et zoo génétique est
encore maintenue. Les semences auto-reproduites sur les exploitations restent prédominantes dans ces
zones. (cultivars traditionnels de blé dur, seigle, épeautre, mil, sorgho, vesces, gesses, d’arbres fruitiers au
nord, d’orges dans les régions méridionales, de palmiers, de luzerne, de légumes, de safran et de blé tendre
appelé « blé des pharaons » dans les oasis...). Ces milieux constituent cependant des écosystèmes fragiles
où l’érosion génétique sévit rapidement sous l’effet de la sécheresse, la salinité et parfois la concurrence des
variétés améliorées.
124
Figure 2 : Zones humides du Maroc (d’après Dakki et hamzaoui, 1996)
A. Les lacs
Le Maroc se distingue des pays du Maghreb par l’existence de vrais lacs permanents, concentrés essen-
tiellement dans le Moyen Atlas et dont le plus grand est celui de l’Aguelmame Sidi Ali, atteignant 300 ha de
superficie et 40 m de profondeur. Certains lacs du Haut Atlas sont encore plus profonds, atteignant par
exemple 61 mètres au moins pour le lac d’Ifni et 92 m pour le lac d’Isly.
L’intérieur du pays comporte un grand nombre de zones humides temporaires localisées surtout en biocli-
mats aride, semi-aride et subhumide. La durée de mise en eau est comprise entre 4 et 11 mois, débutant en
général dans la seconde moitié de l’automne avec les premières pluies, parfois même plus tardivement.
Ces lacs naturels comportent une diversité biologique assez riche, mais essentiellement à base d’arthro-
podes. Les poissons y sont rares, mais intéressants. C’est ainsi qu’on trouve encore Salmo pallary à Aguel-
mane Sidi Ali et Salmo trutta au Lac d’Ifni etc., par contre les oiseaux sont très abondants (Grèbes, Anatidés,
Rallidés, Grands échassiers, limicoles, etc.).
Aux lacs naturels, on peut associer les milieux créés artificiellement que sont les retenues des barrages
avec plus de 100 grands barrages et 10 autres devraient être construits à court terme. La flore et faune y est
limitée, conditionnée dans leur développement par les variations brusques du régime hydraulique. La vie y
est principalement représentée par dy phytoplancton, des oiseaux et des poissons.
125
B. Les cours d’eau
Le Maroc est le pays qui possède les rivières et les fleuves permanents les plus importants du Maghreb.
Les chaînes de montagnes en constituent des châteaux dont le plus important reste le Moyen Atlas, qui
donne naissance aux trois principaux cours d’eau du pays (Oueds Moulouya, Oum-er-Rbiâ et Sebou).
Le Haut Atlas donne naissance aux Oueds Dadès, Ghériss, Guir, Souss, Tensift et Ziz, et en partie Draâ. Il
alimente également les grands affluents de l’Oum-er-Rbiâ (Oueds Abid, Lakhdar et Tassaout) ; et les affluents
du Souss (Aoulouz, Assif n’Aït Moussa, Assif n’Ait AI Haj) et du Tensift (Chichaoua, N’fis, Ourika), ainsi que
certains affluents de la Moulouya.
Le Rif alimente, entre autres, les Oueds Ghiss, Kert, Laou, Loukkos, Nkor et Oueea. Oued Beht, affluent
du Sebou, et Oued Bou Regreg et ses affluents prennent naissance dans le Plateau Central.
Dans ces milieux, les conditions sont très favorables à un développement de la biodiversité qui y est repré-
sentée par tous les maillons de la chaîne trophique. Toutes les espèces de poissons du Maroc s’y trouvent
pratiquement, dont 9 endémiques. Les oiseaux y sont également très richement diversifiés.
C. Les sources
Les sources, connues pour leur fraîcheur et la stabilité de leurs températures sont les plus abondantes au
Moyen Atlas, suivi par le Haut atlas et le Rif. Cantonnées généralement dans des hautes altitudes, chaque
source a pratiquement ses propres particularités physico-chimiques et biologique, ce qui explique les cortèges
d’espèces endémiques, inféodées à chacune d’elles. Les sources les plus importantes au point de vue faunis-
tique sont situées au Moyen Atlas (Aghbalou Abekhbakh, Aïn Soltane, Aïn Taoutaou, Sources de l’Oued lfrane,
Ras El Ma d’Azrou et Ras El Ma de Taza) et au Rif (Beni Snassen : Bou Abdel et leur émissaire; El Anacer).
D. Les grottes
Les Grottes constituent un autre type particulier d’écosystèmes humides qui enrichit le paysage écolo-
gique du pays. Plus de 60 grottes existent au Maroc. Plusieurs d’entre elles présentent un intérêt préhisto-
rique, en plus de leur intérêt bioécologique. Ces milieux, caractérisés par la stabilité de leurs paramètres
abiotiques (faibles températures, faibles quantités de lumière, etc.), comportent une faune particulière,
essentiellement à base d’invertébrés. Des poissons et des mammifères (chauves souris essentiellement)
peuvent y représenter des composantes stables et spécifiques.
La biodiversité des zones humides continentales marocaines est relativement bien étudiée, plus sur les
plans systématique et écologique que sur les plans conservation et restauration. Ce n’est que récemment (à
partir de 1980, date de l’inscription de 4 sites dans la liste Ramsar) qu’on a commencée à s’intéresser réelle-
ment à ces zones en tant qu’écosystèmes productifs, comportant des espèces particulières pouvant jouer
des rôles socio-économiques importants, surtout aux échelles locale et régionale.
A. Écosystèmes marins
Les études consacrées au domaine maritime marocain, et plus particulièrement à sa composante éco sys-
témique sont relativement peu nombreuses. Certes, un grand nombre de campagnes scientifiques y a été
126
organisé, et ce depuis le 18e siècle ; mais ce fut souvent des études ponctuelles systématiques ou hydro-
logiques. Ce n’est que récemment qu’on a commencé à s’intéresser au fonctionnement des eaux du large et
de leurs relations avec les richesses biologiques, en particulier les ressources halieutiques.
Selon ces études, toutes les composantes biotiques (pratiquement tous les groupes zoologiques, dif-
férents types d’algues, phanérogames marines, etc.) et pratiquement tous les habitats identifiées à l’échelle
internationale (fonds sableux, vaseux, rocheux, avec ou sans métaphytes, coralligènes, etc.) y sont présents
et, parfois même, très développés. L’Étude Nationale sur la Biodiversité a d’ailleurs montré que les côtes
marocaines seraient plus diversifiées et plus riches que la Méditerranée toute entière y compris la mer noire.
L’origine de ces richesses vivantes des eaux marocaines résiderait, entre autres, dans leur position biogéo-
graphique stratégique, mais aussi au phénomène de remontées d’eaux profondes riches en sels nutritifs
dites « Upwellings ». La région marocaine est d’ailleurs, l’une des cinq principales zones influencées par le
phénomène d’upwelling qui est produit, maintenu et entretenu par certaines particularités géomorpholo-
giques et climatiques.
Le domaine marin marocain a fait l’objet de nombreuses expéditions scientifiques internationales et ce
depuis plus de deux siècles. Ses particularités physico-chimiques et biogéographiques en ont fait l’un des
pays les plus riches à l’échelle planétaire. Ces richesses restent très peu connues, exceptées celles ayant un
intérêt commercial, faute de suffisamment de spécialistes nationaux et faute de moyens matériels.
a. Estuaires
Les principaux estuaires du Maroc sont ceux de l’Oued Moulouya, sur la côte méditerranéenne, et les
Oueds Sebou et Oum-Er-Rbiâ, sur la côte atlantique. Sur la façade méditerranéenne, d’autres oueds (Oueds
Martil, Laou, Ghis, Nkor et Kert) se comportent plutôt en torrents ; ils reçoivent peu d’affluents et drainent
des bassins versants de dimensions modestes. Sur la façade atlantique, les autres principaux cours d’eau
sont le Loukkos, le Bou Regreg, le Tensift et le Souss. D’autres cours d’eau (Massa, Draâ, etc.), beaucoup
moins importants, sont assez souvent fermés à leurs embouchures par des bouchons sablonneux, comme
beaucoup d’autres oueds sahariens.
Ce sont des milieux très peu étudiés, à l’exception de celui de l’Oued Bou Regreg. Ils sont généralement
peu profonds (une dizaine de mètres, environ) ; mais, qui s’avèrent d’une grande richesse floristique et fau-
nistique (plus de 400 espèces déterminées dans l’esuaire du Bou Regreg) et surtout d’un grand intérêt socio-
économique pour les populations locales (pêche, ramassage de coquillages, etc.).
b. Lagunes
La côte marocaine abrite également de nombreuses lagunes et merjas dont les plus importantes sont la
lagune de Nador (115 km2) prolongée vers l’Est par les salines de Qariat Arekmane, et la lagune de Restinga-
Smir. Sur le littoral atlantique, les plus importantes sont la lagune de Moulay Bousselham, la Merja de Sidi
Boughaba, le complexe lagunaire de Oualidia-Sidi Moussa, la lagune de Khnifiss et la baie de Dakhla. Cette
dernière, qui s’étire sur près de 37 km de long et 10 à 12 km de large dispose d’un potentiel extraordinaire de
production biologique non seulement pour le Maroc, mais pour la région toute entière.
127
De nombreuses études ont été consacrées aux milieux lagunaires, surtout pour en évaluer les potentialités
aquacoles. Les mieux connues de ces écosystèmes sont ceux de Oualidia, Nador, Merja Zerga et Khnifiss.
2.2.1. Flore
La richesse spécifique de la flore marocaine est estimée à près de 7 000 taxa, largement dominée par les
espèces terrestres (environ 4 500 espèces) qui par la même occasion sont les mieux connues et les mieux
étudiées.
128
A. Flore marine
L’un des groupes végétaux les mieux représentés du Maroc correspond aux algues pluricellulaires dont
plus de 610 espèces ont été recensées et qui sont très largement dominées par les Rhodophycées (algues
rouges) avec 379 formes différentes. Pour ce groupe végétal, de nombreuses régions restent encore à pros-
pecter et à étudier le long de la côte marocaine. Le phytoplancton, moins étudié que les macroalgues, ne
compte à l’état actuel des connaissances que quelques 200 espèces. L’endémisme est très faible chez ce
groupe ; une seule espèce (Gelidiocolax verruculata) est considérée actuellement comme endémique de la
côte marocaine ; cependant, d’autres prospections et analyses systématiques permettraient probablement
d’autres découvertes..
C. Flore terrestre
La biodiversité végétale terrestre marocaine est riche et diversifiée. Elle comporte, selon les derniers
recensements, quelques 6 500 espèces ; chiffre qui reste certainement en deçà de la richesse floristique
réelle du Royaume, dans la mesure où d’une part il n’existe aucun spécialiste national pour certains groupes
et, d’autres part, de nombreuses régions du pays restent à explorer. Cette flore terrestre reste dans tous les
cas largement dominée par les phanérogames avec près de 4 500 espèces ; suivis des champignons
(820 espèces), des lichens (700 espèces), des mousses (350 espèces) et des fougères (60 espèces). Le taux
d’endémisme parmi la végétation terrestre est exceptionnellement élevé (930 espèces), mais aussi celui des
menaces (près de 1 000 espèces menacées).
2.2.2. Faune
La faune marocaine, comparée à celles d’autres pays voisins, peut être considérée comme relativement
riche et diversifiée ; plus de 24 600 espèces ont été identifiées jusqu’à présent, mais, on pense que ce chiffre
demeure bien inférieur à ce qui s’y trouve réellement et ce pour les mêmes raisons que la flore : des études
ponctuelles et peu nombreuses, nombreuses régions non encore prospectées, insuffisance des moyens et
insuffisance de compétences nationales.
Le graphique de la figure 3 montre que la faune nationale est très largement dominée par les arthropodes,
essentiellement les insectes, puis la faune marine et la faune des eaux continentales.
129
Figure 4 : Structure par groupes systématiques de la faune marocaine (d’après Menioui, 2004)
A. Faune marine
La faune marine marocaine compte, selon le recensement de l’ENB plus de 7 130 espèces et dépasserait,
qualitativement, tout ce qui a été identifié en Méditerranée et dans la Mer noire. Cette faune est très large-
ment dominée par trois principaux groupes que sont les Arthropodes (près de 1 930 espèces) principalement
les crustacés, puis les mollusques (près de 1 600 espèces) et les vertébrés (près de 1 150 espèces), consti-
tués principalement de poissons. L’endémisme au niveau de la faune marine (près de 240 espèces) touche
principalement les mollusques (84 espèces) qui proviennent presque tous de la région saharienne, très pati-
culière de point de vue biogéographique.
C. Faune terrestre
C’est le groupe le mieux représenté de la diversité spécifique du Maroc. En effet, plus de 15 290 espèces
y ont été identifiées dont 14 495 arthropodes comportant eux même plus de 13460 insectes. L’endémisme
130
dans le milieu terrestre est très élevé puisque 2 280 taxa ne sont connus que du Maroc, dont 2 155 arthro-
podes comportant 1 950 insectes.
2.2.3. Microorganismes
C’est l’un des groupes qui restent très mal connus et très peu étudiés au Maroc, malgré son importance
capitale sur les plans écologique, scientifique et socio-économique. On en estime le nombre à près de
1.120.000 espèces dans le monde dont 143.000 espèces recensées. L’étude Nationale sur la Biodiversité a
révélé la présence de 226 espèces au Maroc ; mais avec des centaines d’isolats par espèce. C’est un chiffre
qui montre l’importance de la lacune des études microbiologiques dans notre pays. De cet inventaire, très
sommaire, il semble que les microorganismes sont étudiés dans notre pays essentiellement pour leur
usages agro indistriels (phytopathogènes, agro-alimentaires, agricoles, etc.).
131
ont élaboré une législation touchant l’accès aux ressources génétiques en général. Il est encore trop tôt pour
tenter d’évaluer quelle influence ces initiatives pourraient avoir sur la diversité biologique agricole.
Avant la Convention, les débats à la FAO sur les mêmes questions autour des ressources phytogénétiques
pour l’alimentation et l’agriculture (RPGAA) avaient abouti à la reconnaissance des Droits des Agriculteurs,
défendus par les pays du Sud, en contrepoids des Droits des obtenteurs. Un Plan d’Action Mondial pour la
conservation et l’utilisation durable des RPGAA a été élaboré par la FAO et adopté en 1996. Sa mise en appli-
cation se heurte encore à l’absence de fonds financiers. La Commission des Ressources Génétiques de la
FAO a pu aboutir en 2001 à l’adoption du Traité international sur les Ressources Phytogénétiques pour l’Ali-
mentation et l’Agriculture après des négociations ardues qui ont duré plusieurs années. Ce Traité est en har-
monie avec les dispositions de la Convention sur la Diversité Biologique.
A. Ressources phytogénétiques
À l’échelle nationale, les objectifs prioritaires des activités « ressources génétiques » s’articulent autour
des axes suivants :
– L’élargissement et l’enrichissement de la variabilité génétique au moyen des collectes et des introduc-
tions.
– La préservation de la diversité génétique à travers la conservation des populations et des écotypes
locaux.
– L’identification des sources de caractères désirables recherchés en caractérisant et en évaluant les res-
sources génétiques accumulées.
Le Maroc est considéré comme Centre de Diversité génétique pour plusieurs genres d’espèces cultivées
et d’espèces sauvages apparentées. Citons parmi lesquels les genres, Avena, Medicago, Lupinus,Trifolium,
Aegilops, Phalaris,Hordeum, Triticum, Lathyrus, Ononis, Vicia, Astragalus, Bituminaria, Lotus, Stipa, Eragros-
tis, Beta etc. Cependant, plusieurs espèces décrites dans le passé se sont raréfiées ou même disparu
(exemple : certaines espèces des genres Medicago, Lupinus, Cicer,...) ; d’autres ne sont que rarement ren-
contrées dans les zones montagneuses à fortes pentes et d’accès difficile. Parmi les arbres fruitiers, les
genres Olea, Pistacia, Ficus, Prunus et Amygdalus sont bien connus pour leur diversité variétale.
La qualité du patrimoine génétique marocain est reconnue à l’échelle internationale et de nombreuses mis-
sions ont été effectuées, par divers laboratoires européens, australiens, etc. pour faire profiter les cultures de
ces pays, des particularités écologiques et agromorphologiques des variétés marocaines.
Jusqu’à présent, les ressources génétiques des plantes cultivées ont été conservées ex situ, et les collec-
tions nationales sont préservées soit sous forme de collections aux champs (vergers, espèces fourragères
pérennes) soit sous forme de graines. La conservation dynamique in situ (à la ferme) est une approche
récente, encouragée avec l’avènement de la Convention Internationale sur la biodiversité. Des expériences
et des études sur ce mode de conservation nt été lancées un peu partout dans le monde depuis 1996. Au
Maroc, la conservation in situ des variétés de terroir n’a pas encore fait l’objet d’actions organisées par le
secteur public, mais elle se fait d’une façon indirecte dans les exploitations des régions où prédomine l’agri-
culture vivrière. Des expériences pilotes sont conduites dans plusieurs sites d’agriculture traditionnelle du
pays.
Chacune des institutions impliquées (principalement INRA, IAV Hassan II, ENA Meknès et Direction de
l’Élevage) détient des unités de conservation où les collections sont stockées pour une grande part dans des
conditions de conservation à court et à moyen terme. On dénombre actuellement plus de 20.000 accessions
132
sauvegardées. Ces collections sont constituées de cultivars, populations, clones appartenant aux espèces
économiquement et socialement importantes ; on y trouve des variétés autochtones et des variétés intro-
duites ainsi que des collections mondiales dans certains cas.
Les principaux éléments qui se dégagent des activités sur la valorisation des ressources phytogénétiques
peuvent être résumés comme suit :
Jusqu’à présent, de nombreuses démonstrations concernant la valeur potentielle du patrimoine local ont
été faites, surtout à l’étranger, par le passé, mais aussi au Maroc depuis moins de 20 ans.
Les réalisations concrètes de la dernière décennie ne doivent pas occulter les lacunes et faire oublier les
efforts continus qui restent à déployer en matière de sauvegarde et d’exploitation du matériel local.
Dans certains cas, la préservation du germoplasme introduit doit aussi constituer une préoccupation des
institutions de recherche puisque celui-ci représente une source alternative de caractères d’importance
économique comme les résistances aux principaux parasites.
En dehors des espèces de grande importance économique, un certain nombre d’espèces conservées dans
la banque de gènes des différentes institutions n’ont pas servi pour des programmes d’intérêt commercial
réel ou potentiel au cours des dernières années. Ces espèces n’ont pas été employées beaucoup plus fré-
quemment dans le passé, mais elles pourraient l’être au cours des quelques prochaines années, si on aug-
mente le nombre de personnel qualifié pour s’occuper de leur sélection. En effet, le nombre des
professionnels/scientifiques du pays qui emploient les ressources génétiques (y compris les programmes de
sélection végétale qui sont financés par le gouvernement et les applications à caractère commercial)
demeure encore faible, d’environ 150, toutes espèces cultivées confondues.
B. Ressources zoogénétiques
En ce qui concerne les ressources animales, le Maroc recèle un important patrimoine génétique, adapté à
des conditions environnementales particulières. C’est ainsi que, par exemple, le Maroc dispose de plus de 8
races ovines reconnues et cantonnées chacune dans une région plus ou moins restreinte, avec des condi-
tions souvent caractéristiques.
De plus, certaines de nos races disposent de traits presque uniques à l’échelle mondiale. C’est le cas, par
exemple de la race D’Man, parfaitement adaptée aux conditions particulières des oasis du sud marocain et
qui est l’une des races ovines les plus prolifiques dans le monde. La Sardi est répartie dans les plateaux du
Chaouia, Settat, Khouribga et El Kalâ ; celle de Timahdite dans les régions du Moyen Atlas, Meknès, Khenifra,
Ifrane et Khémisset, la race Beni Guil, celle de Beni Hsein, Boujaade, Oulad Jellal, l’Atlas, etc..
Deux races sont connues dans le cheptel bovin : la « la blonde d’Oulmès » et la « Brune de l’Atlas »
Pour le cheptel caprin, un effort d’identification précise des différentes races reste à faire, bien que l’on
parle de la race « Yahiaouia » et la race « Attaouia ».
Les camelins sont répartis entre les « Aît Khebbach », « Rguibi », « Rahali », « Mamya » et « Guerzini ».
Pour les équidés, il y a lieu de citer, entre autres, « le Pur-Sang Arabe » et « le Barbe » et parmi les races
canines « le Aidi » et le « Sloughi ».
La diversité des connaissances, pratiques et savoirs traditionnels se manifeste par la pluralité des dia-
lectes, pratiques de gestion des terres, arts, musiques, structures sociales, choix des plantes cultivées,
régimes alimentaires, pharmacopée traditionnelle, et un certain nombre d’autres attributs des sociétés
133
humaines. Certains attributs des cultures humaines représentent parfois des solutions aux problèmes de sur-
vie dans des environnements particuliers (adapté de IUCN, 1994).
Il existe une relation intrinsèque entre patrimoines naturels et patrimoines culturels. Si le patrimoine cultu-
rel s’est construit au fil du temps à partir du patrimoine naturel, c’est la culture qui permet de préserver les
connaissances au delà des générations. Les connaissances et pratiques traditionnelles doivent être préser-
vées car il existe une diversité de cultures qui constitue une richesse pour l’humanité et qu’aujourd’hui, un
nombre croissant de personnes souhaitent avoir accès à ces différentes cultures. En plus de leur valeur
intrinsèque, les connaissances et pratiques traditionnelles constituent une opportunité sociale, économique
et scientifique, avec un potentiel (économique) susceptible d’être utilisé pour le développement durable.
Les connaissances traditionnelles permettent, entre autres, de conserver les ressources biologiques, de
mieux connaître la diversité biologique et les relations au sein des différents niveaux de cette diversité,
d’envisager une nouvelle approche de la nature, d’accéder parfois à la santé et à la sécurité alimentaire à
moindre coût pour les populations.
Les pratiques correspondent à une mise en œuvre des connaissances et des innovations. Elles per-
mettent, entre autres, la transmission, la survie des connaissances traditionnelles, de prendre de nouvelles
mesures, d’instituer des modes de gestion mieux adaptés.
Chaque gène, chaque espèce, chaque écosystème qui disparaît réduit nos possibilités d’adaptation aux
changements. Cette perte est exacerbée par la disparition, plus rapide encore, des connaissances sur la bio-
diversité, notamment parmi les populations qui sont en étroite relation avec des écosystèmes complexes
puisque de nombreuses lois, usages et conventions sociales affectent de façon différente l’accès aux res-
sources biologiques.
Plusieurs menaces pèsent sur les connaissances traditionnelles, parmi lesquelles on peut citer (a) la perte
de diversité biologique (pressions anthropiques et catastrophes naturelles) ; (b) la pauvreté ; (c) l’évolution du
mode de transmission des savoirs ( la perte de la tradition orale qui ne trouve plus une écoute aussi impor-
tante auprès des nouvelles générations) ; (d) l’absence de transmission de ces connaissances à un succes-
seur ; (e) le « mépris » des connaissances traditionnelles, à travers leur mise en concurrence avec les
systèmes de connaissances moderne et les nouvelles technologies ; (f) l’uniformisation, la globalisation, la
marchandisation, etc.
Les détenteurs de connaissances et pratiques traditionnelles peuvent être définis, en vue de l’application
de la CDB, comme étant des personnes, communautés ou groupes d’individu ayant hérité par voix orale ou
écrite de connaissances transmises de générations en générations, utilisant et valorisant de façon durable la
diversité biologique (contribuant à travers leur valorisation à la conservation pour des objectifs de bienfaits
pour l’humanité).
Ces détenteurs peuvent être des individus (chefs traditionnels, herboristes..), des professionnels (tradipra-
ticiens, tisanneurs,...), des communautés locales traditionnelles ou des communautés locales institutionnali-
sées.
Une autre catégorie de détendeurs des connaissances traditionnelles est représentée par des personnes
physiques ou morales qui en font les inventaires et les transcrivent de manière statique. Il s’agit des associa-
tions professionnelles, des universités, des centres de recherche, des sociétés privées etc.
Au Maroc, très peu de cas ont été publiés jusqu’à présent sur les connaissances et pratiques tradi-
tionnelles en rapport avec la biodiversité, et il y a un besoin urgent en matière d’inventaires et de transcrip-
tion de ces connaissances. À titre d’exemple, chaque région du Maroc est connue pour sa richesse propre en
plantes aromatiques et médicinales. Cette richesse locale en espèces est liée à une diversité caractéristique
de savoirs et de pharmacopées traditionnelles qui sont susceptibles d’alimenter en idées nouvelles l’indus-
trie cosmétique et la pharmacie moderne. D’autre part, le savoir local des habitants sur les cultivars tradition-
nels et leur distribution dans les écosystèmes agricoles, leur gestion et leur utilisation, montre que la
134
conservation des ressources génétiques est étroitement liée à leur utilisation et aux bénéfices qui en sont
tirés. À titre d’exemples, l’art culinaire du Maroc, est bien développé à l’échelle nationale et possède plu-
sieurs variantes et recettes locales. Il fait appel à une multitude de combinaisons complexes d’épices, de
légumes et de fruits, dont certains sont autochtones et d’autres « exotiques ». L’inventaire des recettes
locales permettra de mettre en lumière les multiples usages des cultivars locaux de plantes cultivées, et peut
jouer en faveur de leur conservation et leur valorisation à l’échelle locale.
Bien que le Maroc soit un pays maritime par excellence, les marocains ont souvent tourné le dos à la mer,
ce qui se traduit, entre autres, par une faible consommation des produits de la pêche (environ 7 Kg./pers/an
contre plus de 20 pour l’Espagne et 60 pour le Japon). Il en résulte aussi que les savoir et pratiques tradition-
nels se limitent essentiellement à certaines approches de pêche qui contribuent à la conservation de la bio-
diversité marine dans certaines zones reculées. En effet, connaître la position de la lune, l’estimation de la
température de l’eau, la direction et l’intensité de vague, etc. permet souvent à des pêcheurs artisanaux de
prédire le niveau de la marée, l’état de la mer et parfois la nature des produits disponibles dans l’eau.
A. Flore réglementée
La flore marine du Maroc compte une seule espèce réglementée qui est l’algue rouge Gelidium sesquipe-
dale, et ce par des arrêtés du Département chargé des pêches maritimes qui imposent des restrictions dans
135
le temps de l’exploitation de cette espèce. Cependant lors de la période autorisée, cette algue est soumise à
une anarchie et une pression telles qu’on est en droit de s’inquiéter sur le devenir de ses stocks.
La flore des eaux continentale est très peu connue et pas du tout réglementée, malgré la grande pression
exercée sur elle. En effet, dans de nombreux sites humides, plusieurs espèces sont surexploitées soit dans
des activités artisanales (fabrication des nattes, entre autres), soit encore comme fourrage, surtout lors de la
période estivale. Quant à la flore terrestre, malgré le grand nombre d’espèces menacées et malgré le grand
nombre de formes à intérêt économique et dont certaines sont surexploitées, aucune espèce n’est protégée
par aucun texte national. Seuls certains textes internationaux (CITES entre autres) offriraient un cadre éven-
tuel pour leur protection.
B. Faune réglementée
Figure 5 : Structures par groupes systématiques de la faune réglementée (d’après Menioui, 2004)
La répartition par groupes systématiques de la faune réglementée du Maroc montre que cette dernière est
très largement dominée par les oiseaux (333 espèces, soit 52 % du total des espèces réglementées). La
législation nationale relative aux oiseaux est focalisée autour de quatre textes majeurs : – le dahir de 1923 sur
la police de chasse ; – le dahir de 1922 sur l’exportation des œufs de gibiers ; – l’arrêté de 1962 sur la régle-
mentation permanente de la chasse et ; – l’arrêté annuel sur l’ouverture et la clôture de la chasse.
Quant aux textes internationaux, il s’agit essentiellement des listes d’espèces à protéger proposées dans
136
certaines conventions (CITES, IUCN, Bonn) auxquelles adhère notre pays et qui concernent principalement
des espèces migratrices et faisant donc partie d’un patrimoine international.
Le deuxième groupe légiféré du patrimoine biologique est celui des coraux (106 espèces, 16 %) qui n’est
malheureusement régi par aucun texte national, sauf pour le corail rouge, dont la seule protection correspond
à une limitation du nombre de licences délivrées aux corailleurs. Pour cette dernière, ainsi que pour le reste
des coraux, la protection pourrait essentiellement se faire dans le cadre des conventions internationales
(CITES et IUCN).
Les poissons réglementés (85 espèces, soit 13 %) sont pour la plupart marins (seulement 3 amphihalines
et 1 d’eau douce), ils sont principalement régis par des textes nationaux dont les Arrêtés du département des
pêches de 1936, 1988, 1996, 1995 et le rapport annuel du département des Eaux et Forêts relatif aux aloses
et l’anguille. Il s’agit, soit d’une interdiction totale (grande alose), temporaire (anguille, mérou) ou de fixation
des tailles de capture et de commercialisation (espèces marines). Trois espèces figurent dans des régle-
mentations internationales auxquelles adhère le Maroc (liste de l’IUCN) : Acipenser sturio, Cethorinus maxi-
mus etCarcharodon carcharias.
Les mammifères (21 marins et 17 terrestres, soit 6 % au total) sont tous considérés comme menacés et
figurent dans des listes internationales de protection, en particulier la CITES pour les formes terrestres et
IUCN / CITES / Bonn, pour les espèces marines (à l’exception de Balaenoptera edeni qui ne fait partie que
des listes CITES et Bonn). La réglementation nationale relative à la protection des mammifères est extrême-
ment réduite, limitée à l’arrêté de 1993 pour la protection du phoque moine et les espèces de mammifères
marins dans la région du sud et, pour les espèces terrestres, à certains textes encourageant la production
animale (1975, 1991, 1992), la restriction de l’abattage de femelles camélines et bovines (1939, 1993,) ou la
création de zones dites « berceaux de races » (1984). Le phoque moine figure dans la liste de la Convention
d’Alger, en plus des conventions sus-citées.
Les reptiles comptent 28 espèces légiférées (22 terrestres et 6 tortues marines) et les amphibiens 8 (1 %).
Aucune de ces espèces n’est régie par un texte national. Toutes les tortues marines figurent dans les
conventions de Bonn, CITES, IUCN et d’Alger. Tous les amphibiens figurent dans les listes de l’IUCN, ce qui
est également le cas des 22 reptiles terrestres ; cependant, certains d’entre eux figurent également dans
celle de la CITES (Testudo graeca, Hemidactylus turcicus, Tarentola mauritanica, Eryx jaculus, Coluber hip-
pocrepis).
Les mollusques (tous marins) et les échinodermes, représentés respectivement par 17 et 1 espèces, ne
sont régis que par des textes nationaux limitant leurs tailles de capture ou réduisant la durée de leur pêche,
surtout au sud du Maroc.
C. Espaces protégés
La législation marocaine en matière de diversité biologique est abondante ; le nombre de textes en la
matière dépasse les 250. L’ancienneté de bon nombre d’entre eux, datant du début du siècle, témoigne de
l’intérêt porté très tôt à la protection des ressources naturelles du pays. Cette législation ancienne était peut-
être embryonnaire, mais elle avait le mérite d’exister à une période où le souci de l’environnement était loin
d’être la préoccupation majeure de la communauté internationale.
Les principaux textes relatifs à la biodiversité et ayant trait directement ou indirectement à la conservation
et à l’exploitation des ressources biologiques sont résumés au tableau 39. Des secteurs comme le domaine
forestier, l’eau, la pêche fluviale et maritime, la chasse et autres ont été très tôt dotés de textes législatifs
destinés à assurer une exploitation durable de ces ressources. Cet arsenal juridique environnemental, qui
date des années dix, vingt et trente, a cependant quelque peu vieilli, et devient parfois inadapté. Certains tex-
tes ont été révisés, d’autres, relatifs au réajustement des textes nationaux avec les Conventions Inter-
137
nationales récentes n’ont pas encore fait l’objet de ces révisions. Enfin, les conflits de compétences
qu’engendre la multitude de gestionnaires ne peuvent être bénéfiques pour la préservation de la diversité
biologique marocaine.
D’autres lois et textes ont été décrétés pour conserver les supports de ces ressources biologiques dans
leurs milieux naturels. Parmi ceux ci nous citons les textes relatifs à l’eau (une vingtaine de lois et décrets ont
été adoptés entre 1916 et 1925 pour gérer les ressources en eau dans le pays), au sol (Arrêté vizirièl du
20 Décembre 1951 relatif à la création de périmètres de défense et de restauration des sols, ainsi que les
arrêtés ultérieurs de 1960, 1980 et 1995), aux ressources minières (Dahir du 16 Avril 1951 relatif à la régle-
mentation minières au Maroc) et enfin les textes réglementant l’exploitation des carrières de sable et tous
autres matériaux du domaine public utilisés principalement dans le secteur du bâtiment. La législation maro-
caine avait, dès les années vingt, réglementé l’extraction de ces matériaux, notamment dans les sites
comme Essaouira (1924), Rabat – Salé (1930), Safi (1933) et dans l’ensemble des lits des cours d’eau (arrêté
du 6 Décembre 1924).
D’autres textes sont en relation indirecte avec la conservation de la biodiversité dans certains milieux parti-
culiers. Nous citons principalement le Dahir du 25 Juillet 1969 relatif aux périmètres irrigués, le Dahir du
17 Décembre 1977 relatif à l’application de la réglementation sur la Reforme Agraire ou encore le Dahir du
22 Février 1995 relatif aux périmètres de mise en valeur en bour.
138
La faune domestique – DAHIR du 1er Juillet 1914 sur la Police sanitaire à l’importation des produits animaux.
– DAHIR du 10 Septembre 1993 relatif aux mesures sanitaires vétérinaires à l’importation d’animaux, de
denrées animales, de production d’origine animale, de produits de multiplication animale et de produits
de la mer et d’eau douce.
Pêche continentale – DAHIR du 11 Avril 1922 relatif à l’exploitation des cours d’eau fluviaux et l’exercice de la pêche continentale (et le
Dahirs modificatif ultérieur).
R Arrêté du 3 Janvier 1994 sur les conditions d’introduction des poissons et de crustacés dans les eaux du
domaine public terrestre.
Pêche maritime – DAHIR du 31 Mars 1919 relatif à la réglementation de la pêche maritime
– Décret du 2 Février 1974 réglementant La pêche avec les filets forée.
R Arrêté du 9 Janvier 1997 relatif à l’institution temporaire de la pêche de certains espèces.
R Arrêté du 20 Janvier 1994 relatif à l’institution de la pêche aux coquillages dans certains zones du littoral médi-
terranéen
R Arrêté du 1er octobre 1993 relatif à l’interdiction d’exploitation des algues marines sur le littoral Atlantique.
R Arrêté du 26 octobre 1993 interdisant temporairement la pêche du Phoque Moine et autres mammifères
marins ainsi que certains autres espèces marines comme les céphalopodes etc...
139
– le Ministère de l’Education Nationale est incontournable dans les programmes de sensibilisation-
éducation, surtout avec sa dimension géographique (présent dans tout le territoire national) et struc-
turelle (enseignants et jeunes générations aptes à recevoir et à réagir) ;
– les Ministères de l’Industrie, du Commerce, des Télécommunications ainsi que ceux de l’Artisanat, de
l’Energie et des Mines et de l’Economie Sociale sont des départements chargés de gérer des secteurs
potentiellement pollueurs ;
– le Ministère des Finances et de la Privatisation qui a toutes les compétences pour développer des pro-
grammes d’incitation à la conservation de la nature et de l’environnement, et ce, par des facilités fiscales
au profit de personnes physiques ou morales contribuant d’une façon efficace à protéger l’environne-
ment en général et la biodiversité en particulier. C’est aussi de ce département que relève l’organe de
contrôle (Douanes), département et instrument vital dans le domaine de la biosécurité et du contrôle du
commerce international illicite des espèces menacées ;
– le Ministère du Tourisme appelé à jouer un rôle primordial dans la valorisation de la biodiversité natio-
nale, en particulier paysagère.
– le Ministère de la Culture qui est d’une grande importance pour la sauvegarde et la conservation du patri-
moine naturel, en particulier biodiversitaire. Il est chargé de préserver et mettre en valeur le patrimoine
culturel et, en liaison avec d’autres administrations, est appelé à contribuer à la préservation de l’envi-
ronnement et notamment au classement des sites naturels ;
– le Ministère de la Communication. Ce département gère également l’un des outils les plus répandus et
les plus efficace dans les opérations de sensibilisation/éducation qu’est le secteur audio-visuel ; secteur
qui pourrait être capitalisé pour des programmes visant l’information, la sensibilisation et l’éducation ;
– le Ministère de la Santé. C’est un Ministère qui, gérant les problèmes épidémiologiques et d’hygiène,
est appelé à contribuer, avec d’autres administrations, à assainir des écosystèmes ou à lutter contre cer-
taines formes de vie nuisibles pour la santé humaine. Il est également connu pour ses divers rejets,
réputés « très nocifs » pour l’environnement et la biodiversité (produits radio-actifs, substances haute-
ment toxiques, etc.) ;
– le Ministère de l’Intérieur qui joue, via les collectivités locales, un rôle déterminant dans la gestion des
ressources naturelles et aura un rôle certainement encore plus important dans les divers programmes
de régionalisation de la décision, en particulier environnementale ;
– le Secrétariat général du gouvernement. Même si son « intitulé » ne reflète aucun lien avec le domaine
de la biodiversité ni de l’environnement, c’est un département-clé jouant un rôle également déterminant
en assurant, d’une manière continue, un suivi de la législation nationale, de sa conformité avec les prin-
cipes généraux du droit interne marocain et du droit international, de l’harmonie entre ces deux niveaux
et de l’harmonie avec différents lois et règlements proposés par chaque département et par les
membres du parlement ;
– le Ministère de la Justice. où sont déposées les demandes de création d’associations y comprises celles
relatives à l’environnement, que sont jugés les braconniers, que sont jugés les différents de propriétés
de terrains forestiers, etc. En s’adaptant aux nouvelles donnes environnementales et en spécialisant cer-
taines de ses sections, ce Minitère pourrait jouer un rôle plus efficient dans la protection de notre envi-
ronnement et notre patrimoine naturel ;
– le Ministère des Habous et des Affaires islamiques. Son rôle est loin d’être négligeable dans la conserva-
tion du patrimoine naturel si, d’une part, on tient compte des terrains, donc des paysages/écosystèmes
(legs) qui sont sous sa responsabilité et dont la gestion nécessite son approbation et, d’autre part, du
rôle qu’il pourrait jouer en matière de sensibilisation ;
140
Civile, les Gardes Forestiers, les Douaniers, etc. jouent un rôle décisif dans la protection et la conservation du
patrimoine vivant national. La surveillance du littoral, les patrouilles, le contrôle routier, les contrôles doua-
niers, la maîtrise des incendies de forêts, le contrôle et la surveillance des braconnages, etc. sont des
mesures utiles et nécessaires pour sanctionner toute action qui porte préjudice à l’environnement, en géné-
rale, et sa diversité biologique, en particulier.
B. Organes de consultation
À côté des différents départements ministériels chargés de prendre des décisions fondées sur des avis
scientifiques de leurs organes de recherche, il existe de nombreux organes de consultation correspondant
aux conseils nationaux comportant des administrateurs, des scientifiques et, aussi, des professionnels – opé-
rateurs. Les résultats des assises de ces conseils constituent souvent des bases pour des stratégies ou des
actions relatives au domaine concerné et se transforment, par la même occasion, à de véritables décisions
politiques. Il s’agit de :
– le Conseil Supérieur de l’Eau ;
– le Conseil National des Forêts ;
– le Conseil National de l’Environnement ;
– le Conseil Supérieur de la Culture ;
– le Conseil Supérieur de la Chasse ;
– le Conseil Supérieur pour la Sauvegarde et l’Exploitation du Patrimoine Halieutique ;
– le Conseil National de la Sélection des Semences et des Plantes ;
– le Comité Consultatif des Parcs Nationaux ;
– la Commission de Distraction du Régime Forestier ;
– le Conseil National de la Chasse ;
– le Conseil National de l’Energie Nucléaire ;
– la Commission Interministérielle de Coordination des problèmes concernant les Eaux Alimentaires.
– le Comité Marocain de l’IUCN ;
– le Comité National de la biodiversité ;
– le Comité National des zones humides ;
– le Comité National de la pêche.
141
2.5.3. Engagement international du Maroc (Appréciation de l’état de cet engagement
dans le cadre des accords bilatéraux et multilatéraux)
Le dispositif juridique international en matière d’environnement est très riche et comporte pas moins de
160 traités, accords et protocoles. Selon l’ENB, 34 textes internationaux, 18 engagements régionaux et un
accord bilatéral ont été adoptés par le Royaume et font d’ores et déjà partie de la législation marocaine. De
par la qualité et la quantité de ces engagements, le Maroc dispose en principe d’instruments qui devraient lui
permettre amplement de protéger sa biodiversité de la manière la plus appropriée.
On dénombre au Maroc quelques 53 conventions qui sont directement ou indirectement en relation avec
la diversité biologique, parmi lesquelles on distingue 33 Convention Internationales, 19 Conventions Régio-
nales et une Convention bilatérale. Cette dernière a été établie entre le Maroc et l’Espagne le 06 Février
1996. Il s’agit de l’Accord de coopération technique en matière de lutte anti-pollution et de sauvetage en mer.
Les tableaux 3 et 4 indiquent les principales conventions internationales et régionales en la matière.
Parmi les conventions internationales qui sont en relation indirecte avec la conservation de la biodiversité
on peut citer la convention relative à la protection de la mer contre la pollution (produits chimiques, hydro-
carbures), la Convention sur les Changements Climatiques et celles relatives au domaine nucléaire.
142
Tableau 4 : Principales conventions régionales (d’après REEM, 1999)
143
E. D’importants progrès dans la mise en œuvre des conventions et traités, mais des
lacunes restent à combler
Si jusqu’à présent le Maroc a honoré ses engagements quant aux premières étapes des conventions rela-
tives à la biodiversité, notamment en matière d’élaboration des rapports et des stratégies nationales, force
est de constater que d’importantes lacunes restent à combler surtout en ce qui concerne le suivi de la mise
en œuvre de ces stratégies. De plus, il importe de préciser que l’élaboration de la stratégie et du plan d’action
nationaux dans le cadre de la Convention sur la Biodiversité a connu plusieurs années de retard (1997-2004),
ce qui a réduit considérablement les chances de bénéficier des supports financiers alloués par les bailleurs
des fonds internationaux pour la concrétisation des actions de conservation et de développement durable.
Par ailleurs, cette Convention aborde une multitude d’aspects complémentaires, représentés par des pro-
grammes thématiques (Biodiversité marine et côtière ; Biodiversité agricole ; Biodiversité des forêts ; Bio-
diversité des écosystèmes d’eaux intérieures ; Biodiversité des terres arides et sub-humides ; Biodiversité
des écosystèmes de montagnes) et des questions multisectorielles, abordant de manière horizontale tous
les secteurs thématiques (Biosécurité ; Accès aux ressources génétiques – partage des avantages – droits de
propriété intellectuelle ; Les connaissances, innovations et pratiques traditionnelles (article 8(j)) ; l’Identifica-
tion, surveillance, indicateurs et évaluations ; La taxonomie et l’Initiative Taxonomique mondiale ; l’Economie,
commerce et mesures d’incitation ; les Espèces exotiques ; la Diversité biologique et le tourisme, etc.). Le
suivi des multiples négociations et de la mise en œuvre nationale des décisions relatives aux différents
aspects thématiques et multisectoriels nécessitent la disponibilité d’équipes spécialisées et bien coordon-
nées, ce qui n’est pas toujours assuré à l’échelle nationale. À titre d’exemple, il n’existe pas encore de texte
de loi nationale ne matière de biosécurité, afin de réglementer l’utilisation transparente des organismes
génétiquement modifiés. Il en est de même pour la réglementation de l’accès aux ressources génétiques. En
effet, le Maroc a été parmi les premiers signataires de la Convention sur la Diversité Biologique et du Traité
International sur les Ressources Phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (FAO, 2001). Grâce à
son importante richesses en ressources génétiques, notre pays a toujours représenté une destination privilé-
giée des bio prospections en région méditerranéenne. Cependant, jusqu’à présent, aucune disposition de
nature juridique, administrative ou autre n’est mise en place pour réguler l’accès aux ressources génétiques
du pays, ni pour prévoir un cadre favorisant le partage équitable des avantages issus de leur exploitation par
des programmes étrangers. Cette situation devient complètement inadaptée compte tenu de l’évolution
internationale de la question d’accès aux ressources génétiques et du partage des avantages, aussi bien
dans le cadre de la CDB que dans celui, plus spécifique, du traité de la FAO.
À côté de la Convention sur la Diversité Biologique, plus d’une cinquantaine d’accords internationaux ont
été signés par le Maroc qui n’est pas allé jusqu’au bout de ses engagements. En effet :
– on ne dispose pas encore de listes rouges des espèces et des espaces menacés à protéger et à faire
protéger à l’échelle internationale ;
– rien n’est fait pour la protection du phoque moine, l’une des espèces les plus menacées à l’échelle mon-
diale et figurant dans les listes rouges des principales conventions nationales ; ;
– de nombreuses espèces, parfois très menacées, sont prélevées et vendues dans les marchés publiques
et parois aux touristes étrangers (tortues, caméléons, fouette-queues, œufs d’oiseaux migrateurs, etc.)
– un grand nombre d’espèces menacées à l’échelle internationale, dont des formes migratrices, ne bénéfi-
cient dans notre pays d’aucune mesure de protection (oiseaux, baleines, etc.) ;
– un grand nombre de plantes menacées ne bénéficient d’aucune conservation (aucune des espèces rares
ou menacées) ;
144
– des braconniers détruisent certaines ressources en toute impunité (mérous dans la Méditerranée,
Grande nacre, pollutions diverses, etc.) ;
Pourtant, tous ces problèmes correspondent à des priorités dans les conventions de Ramsar, d’Alger, de la
Convention pour la protection des oiseaux, de la convention de Bonn, de celle de la CITES, etc., signées et
ratifiées par le Maroc et qu’il est, en principe, censé respecter.
Les ressources naturelles biologiques jouent un rôle vital dans le développement socio-économique du
Maroc.
Selon les actes du colloque national sur les forêts (1996), l’Étude National sur la Biodiversité (1997), le Pro-
gramme Forestier national (1998), le grand livre de la forêt (1999), etc, bien que l’écosystème forestier
n’occupe que 12 % environ du territoire national, il est stratégique en raison de ses divers rôles économique
(recettes, matière première, ressources énergétiques, etc.), écologique (lutte contre l’érosion, l’envasement
des barrages, puit de carbone, etc.) et social (source de revenus pour plus de 114000 familles, etc.). Les don-
nées de 1996 montrent que la fonction productrice de la forêt se traduit par des quantités de bois d’œuvre et
d’industrie (645 000 m3), de bois de feu (917000 stères, soit 30 % du bilan énergétique national), de bois de
liège (43.000 stères) et d’unités fourragères (plus de 1.500.000.000 annuellement, soit 11 % du bilan fourra-
ger national). La production non marchande de bois ramassé est évaluée à quelques 4 415 000 Dh, alors que
celle du charbon de bois à 29.350.000 Dh. La forêt fournit également 15.000 emplois permanents (donc des
ressources financières pour autant de familles) et 40 millions de jours de travail ; ce qui peut se traduire par
quelques 114.000 personnes actives dans ce domaine. On estime que plus de 17 % de la population active
dans le domaine rural vit entièrement ou partiellement de la forêt et de ses produits. La forêt marocaine
contribue pour 2 % au PIB agricole et 0.4 % au PIB national ; mais, sa contribution réelle serait de près de
10 % du P.I.B. agricole, si on prend en considération le pâturage, l’exploitation de bois combustible et de
menus produits. La déforestation fait perdre annuellement au Maroc quelques 119 millions de Dirhams, soit
0,03 % du PIB, en plus de près de 380 millions de Dh pour les reboisements, la sauvegarde des écosys-
tèmes et les substitutions d’énergie. Il s’agit, en fait, d’une somme colossale qu’il serait possible d’investir,
au moins en partie pour la conservation et le développement de ce secteur. La valeur totale des biens et ser-
vices de la forêt serait de près de 5,5 milliards de Dh en moyenne.
Au milieu forestier proprement dit, on a souvent articulé les parcours qui couvrent quelques 53 millions
d’ha. Ces parcours assurent en moyenne 26 % des besoins fourragers (90 % dans certaines régions). En fait,
la couverture des besoins du cheptel national est passée de 60 % durant les années 70 à moins de 26 %
aujourd’hui. Les défrichements, l’augmentation du cheptel sur les parcours, l’extension de la durée de
pacage et l’arrachage délibéré des essences ligneuses ont fait, que tous nos parcours sont actuellement
dégradés : 12 % sont fortement dégradés, 81 % moyennement dégradés et seulement 6,6 %, faiblement
dégradés. Cette dégradation se traduit, entre autres, par : 1 – le remplacement de la végétation pérenne par
145
une autre annuelle peu appétable ; 2 – des sols dénudés ; 3 – l’apparition de sables et dunes et ; 4 – en terme
de biodiversité, la raréfaction/disparition d’espèces.
En dehors des extractions effectuées directement dans divers écosystèmes nationaux, la diversité de la
faune terrestre engendre une importante activité de chasse qui prélève chaque année près de 500 000 unités
de gibier constitué principalement du lièvre, du lapin, du sanglier, du renard, de la caille, de la bécasse, la
bécassine, la tourterelle, etc.. Cependant, l’évolution des ressources cynégétiques se caractérise par une
tendance inquiétante de régression due, au moins pour les espèces terrestres, à l’extension des terres
arables au détriment de la végétation arbustive servant d’abris au gibier ; mais, aussi, au braconnage (pié-
geage, ramassage des œufs, etc.), sans compter l’augmentation rapide du nombre de chasseurs. Une autre
nuisance générée par le secteur de la chasse est « la régulation des populations des espèces prédatrices des
espèces-gibiers ». C’est ainsi, par exemple, que lors de la saison 2000-2001, 889 renards, 259 chacals, 37
corbeaux et 36 pies ont été tués « officiellement » pour protéger le gibier (qui, dans tous les cas, serait tué).
L’agrosystème national est également un domaine prioritaire, non seulement en tant que principal pour-
voyeur de nourriture ; mais, aussi, en tant qu’élément stratégique de l’économie nationale. En effet, dès
l’indépendance, le Maroc a assigné à l’agriculture un rôle déterminant comme secteur d’ajustement et de
financement de la croissance économique nationale et, aujourd’hui encore, elle reste l’un des secteurs déter-
minants de cette économie. Cependant, il importe de préciser que la majorité des formes utilisées dans cette
agriculture n’est malheureusement pas autochtone et est constituée par des espèces, variétés et races intro-
duites pour leur intérêt lucratif. L’importance de l’agrosystème ne se limite pas seulement à ses rôles de
« grenier » (cultures) et d’« étable » (élevage), mais, aussi, à ses vocations d’employeur de la main d’œuvre,
de fournisseur de devises et d’important secteur productif, sachant que près de la moitié de la population
marocaine est rurale et que l’agriculture est son activité principale. Le Maroc est, en effet, un pays agricole
dont 11,8 % (8 456 000 ha) de sa superficie est cultivable. Plus du 1/3 de la population active du Maroc (4,8
millions) travaille dans le secteur agricole, 2,2 millions de ménages dépendent de l’agriculture et 50 %
d’entre eux vivent des cultures pluviales associées à l’élevage. La production agricole constituait au début
des années 60 près de 30 % du Produit Intérieur Brut et ne dépassait plus les 17 % en 1993. Les revenus de
cette production finançaient environ la moitié des importations totales jusque en 1973 ; mais, ce taux n’a
cessé de régresser, depuis, pour atteindre à peine les 11 % en 1990.
L’apport en devises des produits de l’écosystème agricole était, par exemple, de 8 milliards de Dirhams en
1994, correspondant à 20 % du total des exportations, soit le deuxième rang après les phosphates et avant
les pêches maritimes. Les surfaces irriguées contribuent à 90 % des exportations agricoles proviennent des
surfaces irriguées.
L’élevage compte pour près du 1/3 du PIB agricole, fait travailler quelques 40 % de la population active
rurale, pour un cheptel de plus de 22000000 têtes de bétail qui fournit 90 % des besoins en produits laitiers.
Il faut cependant préciser qu’une bonne part de la production agricole nationale provient d’espèces et de
variétés allochtones, importées pour leurs spécificités de rendement, de productivité ou de rentabilité, et uti-
lisées au détriment des formes locales utilisées depuis longtemps auparavant. Ceci met en évidence l’impor-
tance de la préservation des races et variétés locales pour les générations futures, car elles constituent un
potentiel d’amélioration génétique dont l’importance peut se révéler utile par la suite, en fonction des modifi-
cations des besoins de culture, d’élevage ou de consommation.
L’écosystème marin assure une grande partie des protéines d’origine animale ; il assure des emplois
directs et des revenus plus ou moins stables pour un grand pourcentage de la main d’œuvre nationale
146
(marins, ramasseurs, fonctionnaires, investisseurs, etc.). La mer fournit aussi une grande part de matière pre-
mière pour certaines industries (engrais, conserverie de poisson, farine de poisson, produits pharmaceu-
tiques, aliments pour bétail, etc..) ; malheureusement, elle sert aussi d’exutoire pour plus d’un milliard de
mètre cube d’eaux usées non traitées.
L’espace maritime national, plus vaste que l’espace terrestre, joue un rôle stratégique sur les plans écono-
mique et social. Sa façade atlantique joue aujourd’hui le rôle de pôle structurant de l’économie nationale,
compte tenu de son poids démographique, économique et de sa fonction dans l’organisation de l’espace
national (61 % de la population urbaine des grandes villes, 80 % des effectifs permanents des industries,
78 % de l’ensemble des investissements industriels du pays, 67 % de la valeur ajoutée, 53 % de la capacité
touristique, 92 % du trafic maritime, etc.). Elle concentre les principales agglomérations du pays (Casablanca,
Rabat, Kénitra, Agadir, Safi, Tanger, Tan Tan, Laâyoune, Dakhla, etc.), les densités démographiques urbaines
et rurales les plus élevées, les réseaux d’infrastructures et de communication les plus denses, ainsi que les
principales activités économiques. Cependant, la forte littoralisation que connaît le Maroc depuis ces der-
nières décades y a engendré un important dysfonctionnement et de profondes dégradations de l’environne-
ment marin. En effet, la population urbaine du littoral atlantique qui ne représentait que 19,4 % en 1936, est
passée à 29 % en 1960, 35 % en 1971 et 42,8 % en 1982 pour atteindre 49,8 % en 1998 et environ 54 % en
l’an 2000. La population marocaine atteindrait 60 à 80 millions en l’an 2025 et l’urbanisation serait de 75 à
77 %.
Dans ce grand espace maritime national, le potentiel biologique exploitable a été estimé à 500.000 tonnes
pour les espèces demersales et 1.500.000 tonnes pour les espèces pélagiques. La production halieutique du
Maroc a atteint en 1999 plus de 758000 tonnes ; correspondant à une valeur de 4.884 Milliards de Dirhams
dont 1.818 Milliards de Dirhams pour la pêche côtière et 2.888 Milliards de Dirhams pour la pêche hauturière.
Cette production a dépassé le million de tonnes en l’an 2000. La pêche côtière qui constitue la principale
composante de la production halieutique du Maroc (85 %) est essentiellement dirigée vers l’exploitation de la
sardine ; alors que la pêche hauturière est orientée principalement vers les prises céphalopodières. Pour
cette dernière, bien qu’elle ne représente que moins de 15 % de la production nationale, son importance
réside essentiellement dans le chiffre d’affaire qu’elle permet de réaliser et qui dépasse les 50 %. L’évolu-
tion de l’effort de pêche côtière par ports, depuis 1988 jusqu’en 1997, montre qu’il y a une migration des acti-
vités de pêche vers le sud du Royaume. C’est ainsi que, d’une part, le port d’Agadir a perdu de son intérêt
depuis l’année 1988 au profit des ports du sud en particulier Tan Tan, puis Laâyoune et, d’autre part, l’effort
de pêche durant cette décennie a augmenté de près de 50 %.
Il est extrêmement difficile de se prononcer sur l’impact du non renouvellement des accords de pêche
entre le Maroc et la communauté européenne. Déjà en 2001, date d’expiration de cet accord, les produits de
la pêche ont dépassé pour la première fois la barre d’un million de tonnes, avec une croissance de 22 %;
mais rien ne permet de confirmer, qu’en si peu de temps, la nature a repris ses droits.
147
– une consommation nationale de 12 kg de poissons/hab/an ;
– 7,7 milliards de dirhams d’investissements ;
– la création de 40 000 nouveaux emplois.
– la création de 5 villages de pêche (300 millions de dirhams) et 60 points de débarquement (600 millions
de dirhams).
L’aquaculture, bien qu’elle possède de réelles potentialités de développement, n’a actuellement qu’une
part infime dans le développement des ressources halieutiques nationales (0,1 % en tonnage et 1,6 % en
valeur). Cette activité a permis de produire quelques 1 200 tonnes en 1998 correspondant à près de 87 mil-
lions de Dirhams.
À côté des pêches côtière et hauturière et de l’aquaculture, il existe d’autres activités littorales telles que le
ramassage des algues, ou de certaines autres espèces animales telles que les moules, les palourdes, les
coques et les pieds de biches. L’exploitation de ces ressources reste souvent intensive et non contrôlée.
Pour les algues, par exemple, le ramassage a permis l’exploitation de 8 600 tonnes en 1998 ; alors que pour
le corail, la production était de 3 000 Kg. en 1998 pour une valeur de 80 Millions de Dirhams, contre 7 000 Kg.
en 1992 et 5 000 Kg actuellement. Quant aux autres espèces, il est quasiment impossible d’estimer la pro-
duction, et ce, à cause de l’insuffisance des données.
Un autre indice socio-économique est celui du niveau des exportations des ressources halieutiques à l’état
brut (poisson frais) ou transformées. Ces exportations ont, en effet, augmenté de façon notable pour consti-
tuer actuellement près de 15 % du total des exportations marocaines globales et environ la moitié des pro-
duits agro-alimentaires. Parmi ces exportations, les mollusques, très largement dominés par les
céphalopodes, constituent un peu plus de la moitié et sont destinés au marché japonais, essentiellement,
alors que les poissons, en partie sous forme de conserves prennent plutôt le chemin de l’Europe.
L’enseignement majeur pouvant être tiré de l’analyse, de l’évolution de la pêche et de la destinée de ses
produits, est que l’essentiel de cette pêche va aux sous produits, non valorisants, ce qui sous entend, donc,
qu’une valorisation de ces produits est plus que nécessaire. En effet, malgré l’importance stratégique de ce
secteur dans la vie socio-économique et culturelle du Maroc, le secteur maritime et ses ressources ne sont
malheureusement pas encore appréciés à leur juste valeur puisque :
– un important pourcentage (60 %) de la production côtière est voué à une transformation en sous pro-
duits destinés à nourrir d’autres animaux certainement de moindre valeur alimentaire et de moindre
importance économique ;
– la presque totalité de la pêche hauturière est « expédiée » sans aucune valeur ajoutée ;
– le faible taux de consommation nationale exprimant un certain désintéressement de la population dont
chaque membre ne consomme en moyenne que 7,4 kilogrammes de produits de la mer par an.
– Sur le plan social, le secteur des pêches maritimes génère un volume important d’emplois directs et indi-
rects de près de 400 000 personnes.
148
Figure 6 : Évolution des pêcheries de 1975 à 2003 (d’après les données du MPM)
Les zones humides n’ont pas de grandes superficies ni les productions des écosystèmes marin, forestier
ou agricole ; mais elles sont dotées d’autres richesses, visibles ou occultes, qui leur confèrent un rôle socio-
économique d’une importance majeure à l’échelle locale. Elles constituent une importante source de reve-
nus de subsistance pour un grand nombre de familles riveraines ; ainsi que des richesses non négligeables
pouvant contribuer au développement socio-économique des zones et des régions où elles sont situées. En
effet, les zones humides se prêtent parfaitement bien à l’écotourisme et à l’aquaculture du fait de leurs
accessibilités et de l’abondance de l’eau nécessaire pour le développement de l’une ou de l’autre de ces acti-
vités.
D’autres avantages socio-économiques sont offerts par les zones humides dont :
– Des avantages récréatifs (chasse, pêche, planche à voile, sports nautiques, randonnées, pique-niques et
promenades, baignade, etc. ; ) ;
– Des avantages agricoles du fait qu’elles constituent d’excellentes zones de pâturages et, aussi, d’agri-
culture surtout dans les sites déjà asséchés où les rendements sont importants. Ce sont des zones qui
fournissent également de nombreuses plantes utilisées à diverses fins ;
149
– Des avantages piscicoles et conchylicoles en fournissant, via les activités aquacoles, des poissons et
des coquillages ; donc des protéines d’origine animale ;
– Des avantages énergétiques par l’utilisation du bois ou la production de méthane (fermentation de végé-
taux) ;
– Des avantages éducatifs en fournissant d’excellents instruments d’illustration pédagogique pour les
enseignements primaires, secondaires et universitaires.
Chaque année, près de 25 000 tonnes de poissons sont prélevés des eaux douces nationales par le sec-
teur de la pêche dans les eaux intérieures. La pêche contrôlée devient de plus en plus régie par des accords
entre l’administration et le privé, soit sous forme d’amodiations visant une pêche sportive organisée, soit
encore pour la mise en place d’activités aquacoles de type industriel. C’est une activité qui se pratique aussi
bien dans les cours d’eau naturels que dans les retenues artificielles des barrages.
Comme partout dans le monde, et en particulier dans les pays en voie de développement, les besoins sans
cesse croissants en ressources biologiques, l’industrialisation, l’urbanisation, l’ancienneté et l’inefficacité du
système législatif, l’absence de surveillance et de contrôle, etc. ont indubitablement un impact sur la santé
de l’environnement, en général, et la viabilité de la diversité biologique, en particulier. Il en résulte que la
majorité de nos écosystèmes et de nos ressources biologiques se trouvent dégradées, à un degré ou à un
autre ; certaines de nos espèces et nos ressources génétiques se sont même éteintes. Satisfaire nos
besoins et ceux des générations futures exige la planification et l’utilisation durable de ces ressources pour
en assurer l’équilibre et la pérennité. Il importe, donc, d’adopter des approches et des mécanismes de pré-
vention, d’utilisation rationnelle et de promouvoir la restauration et la réhabilitation des ressources détruites,
leur valorisation ; – de mettre en œuvre des mesures incitatives et d’assurer la participation et l’engagement
de la population.
Les deux grandes approches de conservation peuvent être soit in-situ (prioritaire), soit ex-situ. Cependant,
l’une ou l’autre des approches ne peut se montrer efficiente que s’elle est accompagnée de mesures de sen-
sibilisation / éducation, de recherche / développement, de coopération, etc.
Les principaux efforts fournis par le Maroc en matière de conservation in situ peuvent être résumés dans
ce qui suit :
150
sitions, en particulier législatives, ont été mises en place dès le début du siècle dernier (1917, pour la conser-
vation des forêts, 1922 pour la pêche, 1923 pour la police de chasse, etc.). C’est à partir du 11 septembre
1934 que la création de ces espaces est devenue possible grâce aux procédures fixées par le Dahir portant la
même date et, dès les années 1942 et 1950, on a assisté déjà à la création de deux parcs nationaux : « Toub-
kal » et « Tazekka ».
Créés par décret dans des régions naturellement attrayantes sur les plans biologique, scientifique, touris-
tique ou social, les parcs nationaux « doivent être maintenus dans leur état initial et préservés contre toutes
les formes d’atteintes » (dahir de 1934 et textes d’application). Dans ces zones, sont donc interdites toutes
sortes d’opérations susceptibles de transformer ou de dégrader les lieux. La chasse et la pêche peuvent y
être prohibées, en vue de garantir la préservation et, si possible, la reconstitution de la faune. Il existe au
Maroc 8 Parcs Nationaux et 2 Parcs Naturels, dont certains déjà mis sur pied et d’autres en prévision
(Tableau 5).
151
152
Tableau 5 : Aires protégées du Maroc
(Situation en 1999, tiré du programme de Recherche du Centre National de la Recherche Forestière – CNRF)
Parc National du Massa 33.800 1991 Côte Atlantique Sud (Agadir-Tiznit) Protection des Euphorbes et des Ibis chauves et estuaires
des Oueds Souss et Massa
Parc National du Haut Atlas Orien- 49 400 en création Haut Atlas (Errachidia et Khénifra) Protection du mouflon à manchette, des lacs d’Isli et Tislit,
tal d’une cédraie relique et du patrimoine historique local.
4.1.2. Réserves biologiques
Le Maroc compte également un certain nombre de Réserves dont :
– Réserve Biologique de Takherkhort. Elle a été créée en 1967 sur 1 230 ha dans une forêt de Chêne vert
du Haut Atlas où sont protégés des Mouflons à manchettes ;
– Réserve Biologique de Sidi Chiker ou M’sabih Talaâ créée dès 1952 sur 1 237 ha pour préserver la der-
nière population de Gazelles dorcas des plaines du Haouz (quelques 200 têtes) ;
– Réserve Biologique de Bouârfa datant de 1967 sur 22 000 ha pour la protection de l’Outarde houbara et
la Gazelle dorcas des Hauts Plateaux de l’Oriental.
– Réserve Biologique de l’Archipel d’Essaouira Créée en 1962 autour de l’îlot du Pharaon sur 28 ha pour
conserver une importante colonie de Faucons d’éléonore.4.1.3 – Réserves Ramsar
– Quatre zones humides marocaines ont été classés sites RAMSAR en 1980. Il s’agit de :
– Réserve de Merja Zerga Créée en 1978 sur 3 500 ha, ;
– Réserve de Sidi Bou Ghaba instituée Réserve Permanente dès 1946 sur 150 ha ; mais dans une réserve
permanente de 5 600 ha ;
– Réserve de la lagune de Khnifiss : Créée en 1962 sur 6 500 ha ;
– Réserve du lac Aguelmame Afenourir « Réserve permanente » de 380 ha depuis 1948.
À ces quatre sites, il faut actuellement compter une vingtaine d’autres sites qui sont proposés dans
l’objectif de les inscrire sur la liste Ramsar.
Il s’agit des milieux identifiés par l’Étude Nationale sur les Aires Protégées pour leurs valeurs écologique,
scientifique, socio-économique ou patrimoniale. Ils sont au nombre de 160 SIBE’s d’une superficie totale de
1 080 000 ha, dont 48 considérés « de priorité 1 », 50 « de priorité 2 » et 62 « de priorité 3 ». Les sites ter-
restres (79 SIBE avec 840 000 ha) sont les plus représentés, suivi des SIBE’s littoraux (38 avec 205 000 ha)
puis des zones humides (43 SIBE’s et 35 000 ha).
153
4.1.4. Parcelles porte-graines
Près de 837 hectares sont couverts par des formations de ressources génétiques forestières autochtones
qui sont répartis sur 137 parcelles classées en guise de peuplements porte-graine in situ pour des espèces
dont le pin d’Alep, le pin maritime du Maghreb, le cèdre de l’Atlas, le Cyprès de l’Atlas et le sapin du Maroc.
Mais à côté de ces ressources génétiques autochtones, il y a, bien sûr, l’Arganeraie, le chêne liège et le
Thuya. Moins nombreux sont les cultivars où sont protégées les cultures des variétés locales.
4.2.1. Flore
Les premières collectes de germoplasme local ont débuté dès les années vingt. Les collectes sont restées
cependant sporadiques et ont été organisées essentiellement pour répondre aux besoins précis des pro-
grammes d’amélioration étrangers. Ce n’est qu’à partir des années quatre-vingt que des prospections systé-
matiques et planifiées sont organisées par les nationaux pour les espèces cultivées, en l’occurrence les
céréales, les cultures fourragères, les légumineuses alimentaires et les arbres fruitiers. Elles ont été effec-
tuées jusqu’à maintenant soit conjointement avec des Institutions étrangères et des Centres Internationaux,
soit à l’initiative des programmes nationaux.
Jusqu’à présent, les ressources génétiques des plantes cultivées ont été conservées ex situ, et les collec-
tions nationales sont préservées soit sous forme de collections aux champs (vergers, espèces fourragères
pérennes) soit sous forme de graines. La conservation in situ des variétés de terroir n’a pas encore fait l’objet
d’actions organisées par le secteur public, mais elle se fait d’une façon indirecte dans les exploitations des
régions où prédomine l’agriculture vivrière.
Jardins botaniques – pépinières : Ils concernent principalement les collections d’espèces exotiques et
ornementales. Les jardins exotique de Salé et d’essaie de Rabat peuvent être pris comme exemples. Cer-
tains autres jardins, plutôt pédagogiques tels que ceux de l’ENFI ou l’IAV Hassan II comportent également un
certain nombre d’espèces rares ou menacées du Maroc. Cependant les pépinières ont également largement
contribué aux actions de reboisement qui ont débuté dès les années 20 du siècle dernier et qui se sont pour-
suivies jusqu’à nos jours produisant chaque année de 30 à 40 millions de plants pour divers usages..
Arboreta : Un réseau national de 40 arboretas de test de comportement des espèces autochtones et exo-
tiques était installé depuis les années 40, d’autre part, les peuplements semenciers pour 11 espèces et
114 peuplements sont maintenus ex situ. Pour les jardins botaniques, à l’exception de quelques espèces
pastorales ou fourragères qui ont attiré l’attention de certains généticiens améliorateurs, la conservation ex
154
situ de la biodiversité des espèces sauvages reste très marginalisée. En plus du jardin des plantes maintenu
par l’INRA, seul un jardin botanique a été crée à l’IAV Hassan II en 1991. À côté de sa vocation pédagogique,
ce jardin constitue un conservatoire pour les espèces rares et menacées de la flore marocaine.
Installations de stockage
La majorité des institutions possède des collections actives ; certaines collections de base existent et
représentent essentiellement les espèces fourragères et pastorales, mais les conditions de stockage sont
difficilement maintenues au niveau standard (pannes de matériel et lenteur des réparations..). D’où la néces-
sité de créer une banque de gènes nationale pour la conservation à long terme. Dans certains cas, le matériel
génétique détenu en collection de base est conservé en double dans les banques de gènes de certains
Centres GCRAI (ICARDA, CIMMYT) qui assurent les tests de viabilité de ce matériel et sa régénération.
Les principaux problèmes que pose actuellement le stockage ex situ sont les suivants :
– La détérioration des installations, souvent construites dans des pays en développement par des pays
donateurs qui n’ont pas pris d’engagement à long terme pour assurer l’entretien des installations ;
– l’absence de recensements, d’inventaires et d’études taxonomiques, et aucune évaluation du matériel
présent dans les banques de gènes. Ce type de connaissances est nécessaire pour identifier les lacunes
des collections de manière que les obtenteurs sachent où trouver les qualités génétiques déterminées
qu’ils recherchent pour des fins de sélection. Même dans des conditions optimales de stockage ex situ,
la viabilité des semences diminue, ce qui nécessite une régénération pour reconstituer les stocks de
semences.
Malgré que les méthodes de conservation ex situ, telles les banques de gènes et les jardins botaniques,
ont contribué à l’amélioration d’un certain nombre de végétaux et de la majorité des plantes cultivées à tra-
vers l’utilisation du germplasm conservé, elles ne représentent pas la solution pour conserver des ressources
génétiques présentes naturellement ou protéger l’habitat des changements dans l’environnement.
– La conservation à moyen et à long terme, la sauvegarde et l’aide à l’utilisation rationnelle des ressources
génétiques des espèces végétales cultivées et pastorales et des espèces sauvages qui leur sont appa-
rentées.
– L’enrichissement de ce germoplasme par de nouvelles collectes.
155
– La création d’une base de données informatisée caractérisant le matériel stocké.
4.2.2. Faune
– Jardins zoologiques : La principale collection d’espèces marocaines conservées en captivité est mainte-
nue au Parc Zoologique National de Témara, les autres jardins zoologiques du Maroc n’hébergeant que
des collections fort modestes ; mais la contributions de ces parcs zoologiques dans la conservation des
espèces autochtones reste très limitée dans la mesure où le milieu naturel où ces espèces devraient
être introduites n’en profite que très peu.
– Banque de sperme : Ce sont des infrastructures principalement destinées à l’amélioration génétique des
animaux domestiques, en particulier le cheptel ovin, et bovin.
4.2.3. Collections
Pour la faune, il s’agit essentiellement de témoins appartenant au patrimoine marocain, stockés sous
forme de collections de recherche ou d’expositions. C’est un matériel qui ne peut certes être utilisé pour des
fins de repeuplement, mis à travers son rôle dans la sensibilisation, peut contribuer à la conservation de ce
qui reste des populations ou autres espèces.
Il s’agit, certes, d’un patrimoine biologique, mais qui ne peut être utilisé pour des opérations de reproduc-
tion, de repeuplement, de restauration et de réhabilitation. L’une des plus grandes collections du Maroc et de
l’Afrique est domiciliée actuellement à l’Institut Scientifique de Rabat ; elle comporte des milliers de spéci-
mens d’animaux de référence, 25 armoires de Spongiaires, de Coelentérés, Echinodermes,
156
4.3. Restauration – Réhabilitation (élevages et aquaculture de
repeuplements)
4.3.1. Réintroductions
Il est très difficile de pouvoir se prononcer avec précision sur la disparition d’un taxon, puisque pour s’en
rendre compte il faut plusieurs années voire même plusieurs dizaines d’années. Aussi il est difficile de confir-
mer la date exacte de la disparition d’un certain nombre de taxa du territoire national. Cependant, on peut dire
que c’est au courant du siècle dernier que, sous la pression humaine principalement, nombreuses espèces
appartenant au patrimoine biologique national se sont éteintes ou raréfiées. Les plus spectaculaires restent
les grands mammifères et les oiseaux ; lion de l’Atlas, Addax, Oryx, Baleine bleue, etc. sont certains de ces
taxa.
Des initiatives ont donc été entreprises pour tenter de restituer aux écosystèmes leurs composantes natu-
relles. Cependant, s’il est difficile, sinon impossible, de reconstituer des populations génétiquement viables
de certaines espèces déjà extrêmement rares au moment de leur disparition comme le lion de l’Atlas, des
reproductions assistées ont été tentées et réussies pour de nombreuses autres espèces. C’est ainsi que le
Cerf de Berbérie a été réintroduit dans la réserve de Kissarit en 1989 et dans le Tazekka en 1994, la gazelle
Dama Mhorr à Rmila à Marrakech en 1992, l’Addax, l’Oryx et l’Autruche à Souss Massa, le Mouflon à Man-
chette aux Beni Snassen, etc.
Dans le règne végétal, le reboisement constitue la principale mesure pour les opérations de restauration-
réhabilitation, les pins, le cèdre et le chêne sont certaines des essences concernées par ces actions de
repeuplement.
4.3.2. Aquaculture
Dans le milieu aquatique, certains projets clés visant le repeuplement, par des espèces autochtones de
certains écosystèmes dégradés ont été réalisés. Dans les eaux continentales, c’est essentiellement la truite
fario qui a été sujette à des projets aquacoles de repeuplement ; alors que dans le milieu marin, des expé-
riences ont été menées sur les palourdes, un important projet sur le thon rouge et, actuellement certaines
espèces sont soumises à des tentatives de reproduction assistée telle que le mérou.
Les principales perturbations auxquelles sont soumises les espèces marocaines peuvent être classées
parmi les catégories suivantes :
1. Fragmentation et Pertes d’habitats ;
2. Surexploitation des ressources naturelles ;
3. Pollutions ;
4. Introduction d’espèces exotiques.
157
5.1. Fragmentation et pertes d’habitats
5.1.1. Déforestation
L’un des facteurs majeurs contribuant à l’érosion de la biodiversité terrestre est la perte des formations
forestières. Les prélèvements du bois de feu et les défrichements sont des pratiques très courantes chez les
populations locales riveraines et, ce, au profit des extensions des cultures, en particulier dans les zones où
les terres de culture sont rares. Ce phénomène s’est particulièrement aggravé lors des dernières décennies,
surtout dans les régions isolées où la surveillance par les services forestiers est insuffisante. Il s’agit de
zones de développement d’une agro-culture traditionnelle au détriment de formations préforestières. Près de
31.000 ha disparaissent ainsi chaque année dont 22000 ha pour des besoins énergétiques, 4500 ha par les
défrichements et 4500 par des incendies. Ces défrichements délictueux n’affectent pas les seules écosys-
tèmes forestiers, mais bien d’autres milieux tels que ceux des dunes (régions d’Essaouira) ou des zones
humides (surexploitation de joncs, roseaux, etc. sur les bords des lacs, merjas, lagunes, rives des cours
d’eau de montagne, etc. ). En plus, la forêt doit satisfaire, au moins en partie, les besoins en énergie des
populations. Les prélèvements en bois de feu s’évaluent à 11.000.000 m3, soit 30 % des besoins énergé-
tiques du pays, ce qui dépasse largement les possibilités de régénération de la forêt marocaine.
Un autre facteur majeur de la dégradation de l’écosystème forestier est celui du pâturage avec une charge
animale 3 à 5 fois supérieure à la normale, correspondant à un déficit de 23 %.
Ces mises à nue des espaces forestiers et ces utilisations abusives des ressources forestières entraînent
souvent de graves perturbations du fonctionnement de cet écosystème (absence de régénération, fragilisa-
tion des espèces, etc.) ; mais, aussi, sur d’autres écosystèmes tels que l’agro-système (perturbation du cycle
de l’eau, érosion du sol, pollution des eaux souterraines, inondations et mort du cheptel, etc.). Cependant, ce
qui est encore plus grave dans ces pratiques de déforestations, c’est :
– la perte d’habitats pour les milliers d’espèces animales et végétales, parfois endémiques ou menacées,
qu’héberge la forêt, et par conséquent la perte « en bolc” de ces espèces ;
– la fragilisation écologique et physiologique des essences forestières qui, devenant vulnérables, peuvent
facilement être attaquées par des ravageurs, affectées par les conséquences de la sécheresse, etc.
aboutissant par la même occasion à la perte des espèces animales et végétales qu’elles hébergent.
Un exemple de destruction d’écosystème forestier entier peut être observé dans le Rif Central où l’éco-
système à Chêne-liège a été pratiquement anéanti, ce qui est également le cas de la suberaie de la plaine du
Ghrab, très gravement menacée par les activités humaines. Aussi C’est pas un hasard si près de 25 % de la
biodiversité végétale du Maroc est plus ou moins gravement menacée ; la cause principale reste la dégrada-
tion/disparition des forêts qui constituent pour la flore marocaine des espaces de développement, d’évolu-
tion et de spéciation.
158
En Méditerranée, la population littorale a également connu, ces dernières décennies, un rythme de crois-
sance assez rapide (2.3 %), surtout en milieux urbains (4.1 %) ; alors qu’à l’échelle nationale, ces pourcen-
tages ne sont respectivement que de 2.1 % et 3.6 %. Les quatre grandes villes de Tanger, Tétouan, Oujda et
Nador concentrent à elles seules les 2/3 de toute la population urbaine de la zone Nord.
Les conséquences de l’urbanisation sont de toute évidence des extensions des agglomérations urbaines
« dévorant” dans leur passage espaces forestiers et agricoles avec toutes leurs valeurs écologiques, biolo-
giques et paysagères, sans parler des déchets générés par ces extensions qui dégradent la qualité de l’air,
celles de l’eau et de la santé humaine. De nombreux exemples pourraient être cités dans ce sens, à com-
mencer par les villes Rabat-Salé et Kénitra avec les énormes dégâts causés dans la Maamora.
Quand cette urbanisation concerne des agglomérations côtières (littoralisation), c’est un autre écosystème
tout aussi fragile qui est soumis aux impacts de l’urbanisation. Il s’agit du littoral, de la mer, des zones
humides côtières etc. Les mêmes exemples de villes et d’impacts pourraient être repris (Rabat-Salé et Kéni-
tra), mais cette fois ci sur les estuaires des oueds Bou Regreg et Sebou qui ont perdu pratiquement toutes
leurs richesses biologiques (palourdes, alose, anguille, autres poissons, etc.), mais aussi leurs valeurs écolog-
qiues en tant que voies de migration pour des espèces telles que l’alose ou l’anguille.
Les effets de la littoralisation sur la biodiversité pourraient également être illustrés par l’exemple de la ville
d Safi qui a passé du premier port mondial de la sardine à un port presque quasiment inactif à cause de l’urba-
nisation et l’industrialisation qui en a découlé ; une région qui a perdu uniquement entre 1995 et 2000 plus de
6 % de ses richesses biologiques.
La ville de Nador a perdu, à cause de la littoralisation, l’une des plus importantes lagunes de toute la Mer
Méditerranée et ses valeurs vitales pour la région : stocks de crevettes, de palourdes et de poissons, nom-
breuses espèces menacées à l’échelle internationale telles que les posidonies ou les nacres, ses valeurs
écologiques et touristiques, etc.).
159
5.1.4. Infrastructures de développement (tourisme, transport, etc.)
A. Tourisme
Si le tourisme est une activité sociale relativement récente, il a pris très vite une dimension mondiale
créant des échanges culturels ; les recettes qu’il engendre en a fait un secteur stratégique pour le développe-
ment socio-économique de certains pays, dont le Maroc. Développer ce secteur, au moins dans sa philo-
sophie classique, suggère plus d’infrastructures d’accueil, dans des sites naturels et attrayants ; autrement
dit,au détriment de milieux naturels souvent riche en faune et flore indispensables pour l’équilibre écologique
local et régional.
Par l’ancienneté de son histoire et de ses traditions, la beauté et la diversité de sa nature, le Maroc, attire
de nombreux touristes en provenance du monde entier. Le balnéaire reste une des principales catégories du
tourisme national, cependant, les particularités historiques, culturelles et le potentiel paysager du Maroc
attirent d’autres catégories de touristes développant d’autres pôles touristiques en particulier culturel, sportif
et, plus récemment, naturel et écologique. C’est un secteur stratégique dans le développement socio-
économique du Maroc puisqu’il constitue de 3 à 4 % du P.I.B. et de 7 à 10 % des recettes en devises. Le
tourisme assure également plus de 260.000 emplois et, dans le mouvement de reprise de l’activité touris-
tique, on prévoit 6 millions de touristes en l’an 2005 et 10 millions en 2010, ce qui l’amène à jouer un rôle de
plus en plus important et, de toute évidence, générer de plus en plus de nuisances pour l’environnement et
la biodiversité. Cependant, si le tourisme, au moins dans sa philosophie actuelle, peut avoir des effets nui-
sibles (fragmentation et perte d’habitats, pollutions, etc.), il ne mérite pas pour autant d’être diabolisé car
c’est, en grande partie, la carence de gestion qui est la cause des dégâts découlant de la fréquentation touris-
tique. Le Maroc est doté d’importantes potentialités naturelles, susceptibles d’être mises à profit du tou-
risme écologique et qu’il faudrait, par conséquent, protéger.
B. Transport
Le secteur des transports constitue un maillon clé dans le développement socio-économique du Maroc. En
effet, en 1995 :
– le secteur des transports apporte environ 6 % de la valeur ajoutée du P.I.B. ;
– il participé à hauteur de 15 % aux recettes du budget de l’Etat. ;
– il absorbe 26 % de la consommation nationale d’énergie. ;
– il assure environ 9 % des emplois de la population active.
Le réseau routier était en 1995 de 60.449 km dont 30.374 km revêtus et le parc automobile global en cir-
culation comptait quelques 1.295.999 véhicules. Celui des autocars fait l’objet de 5.000 autorisations soit
300.000 places. Toutes ces nuisances ont des effets directs ou indirects sur la biodiversité, mais les plus
spectaculaires restent certainement les fragmentations et les disparitions d’habitats qu’occasionnent les
constructions de routes. Quant aux Chemins de Fer, ceux-ci comptent un réseau de 1.907 km de lignes, dont
1.003 km électrifiés et 271 km à double voie. Cependant, 98 % des échanges commerciaux du Maroc avec
l’étranger sont assurés par mer (27 ports), un chiffre qui montre l’importance du transport maritime pour le
pays. Enfin, le transport aérien possède actuellement 11 aéroports de dimension internationale et 8 aéro-
ports de dimension nationale.
Le secteur des transports, malgré ses nombreux avantages sur le plan économique et social, a trois princi-
pales incidences sur l’environnement de par ses émissions de composés actifs, celles qui appauvrissent la
couche d’ozone ainsi que la production de polluants organiques qui ont des effets nuisibles sur les systèmes
biologiques.
160
Tout un éventail d’activités qui exercent des pressions sur l’environnement dans diverses opérations de
construction d’infrastructures, d’exploitation et d’entretien.
161
sur l’une des routes traversant la forêt de la Maamora par exemple pour se rendre compte que pratiquement
tous les glands produits par cette forêts sont prélevés au point qu’il est raisonnablement permis de ce
demander « par quel moyen la subéraie de la Maamora » pourrait-elle régénérer ?.
5.2.2. Sur pêche (Efforts de pêches, Engins non adaptés, non respect des périodes
de reproduction et de recrutement)
Tous les spécialistes sont unanimes que les ressources marines naturelles, partout dans le monde, sont à
présent pleinement exploitées et que tout effort de pêche ne peut se faire qu’au dépend de la pérennité de
ces ressources. Au Maroc, pays maritime par excellence, même si ses eaux sont considérées parmi les plus
poissonneuses du monde, plusieurs indices montrent que ses ressources ne sont pas inépuisables et
qu’elles souffrent même, comme toute autre ressource biologique, des répercussions des activités anthro-
piques. L’un des indices le plus frappant est la translation de l’effort de pêche du nord vers le sud. En effet,
c’était tout d’abord la pêcherie du Nord (Tanger – El Jadida) qui a démarré au début du siècle et avait comme
principal port, celui de Casablanca. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, c’est la zone Safi – Sidi Ifni
qui a pris la relève, atteignant des prises de 300 000 tonnes en 1973 et seulement 50 000 tonnes en 1991-
1992. Ensuite, les pêcheries se sont déplacées vers la zone Sidi Ifni Laâyoune où elles ont débuté vers les
années 60 avec un maximum de 130 000 tonnes en 1977 et, seulement, 100 000 en 1990-1992 et puis on
est actuellement dans l’extrême sud où de nombreuses flottes (nationale, européenne, russe, asiatique, etc.)
opéraient.
Sur la côte méditerranéenne marocaines, les statistiques de pêche montrent qu’entre 1995 et 2000 les
prises ont diminué de 36994 tonnes à 31134 tonnes.
En dehors des espèces visées par la pêche, de nombreuses espèces marines sont au bord de l’extinction
ou complètement disparues de nos côtes. La baleine bleue ou la baleine franche, qui jadis se reproduisaient
sur nos côtes, y ont complètement disparu. Le phoque moine survit très difficilement au sud du Maroc et le
mérou constitue la cible de chasseurs sous marins qui s’en approvisionnent, à volonté et en toute impunité ;
les grandes nacres menacées dans toute la Méditerranée sont également la cible de ramasseurs armées de
scaphandres autonomes dans la lagune de Nador ; les algues, en particulier Gelidium sesquipedale, malgré la
réglementation qui régit son exploitation, est également récoltée en toute saison et en toute impunité. Et
pour ne donner qu’un chiffre, la palourde qui était, il y a quelques années, très abondante dans la baie de Dak-
hla (sud du Maroc), elle n’y est actuellement présente que dans quelques sites et avec quantités et des
tailles très réduites ; en trois années les prises en ont diminué de plus de 150 tonnes à moins de 30 tonnes.
5.2.3. Surpâturage
Les effectifs des troupeaux (bovins, ovins et caprins) au niveau national connaissent de très importantes
fluctuations qui sont dues principalement aux aléas climatiques. Mais, en règle générale, il y a unanimité sur
l’importance et la gravité des dégâts causés par le surpâturage aux niveaux des écosystèmes sylvo – pasto-
raux et de leur biodiversité, surtout dans les régions qui connaissent de longues périodes de sécheresse. Ses
prélèvements directs ou par émondage, les piétinements des semis, etc., réduisent considérablement le
taux de recouvrement du sol et empêchent la régénération naturelle de la végétation, ce qui contribue à la
dénudation des sols et entame les processus de désertification. Le problème du surpâturage est aggravé par
la réduction progressive des surfaces laissées en jachères et des terrains de parcours (collectifs et fores-
162
tiers), conséquence de besoins sans cesse croissants pour l’extension des terres cultivées. Le problème du
surpâturage est aggravé durant les années de sécheresse pendant lesquelles les ventes massives du cheptel
des zones touchées alourdir une charge déjà excessive pour les régions relativement arrosées. Le surpâtu-
rage engendré se traduit, ainsi, par la disparition ou la réduction considérable d’un grand nombre d’espèces
appétées et par les autres formes de vie qu’elles abritent. Il finit par déclencher les processus d’érosion qui
ont déjà atteint une surface importante des montagnes dénudées.
Pour le Maroc, le surpâturage, constitue actuellement l’une des préoccupations fondamentales des amé-
nagistes sylvo-pastoraux et des gestionnaires des aires protégées surtout qu’il est considéré comme l’une
des causes majeures de la dégradation de certains écosystèmes, en particulier forestier. En effet, près de
10 millions de têtes pâturent dans le domaine forestier qui, malgré son immensité (5 818 893 ha) accuse un
déficit des besoins dépassant les 30 % sous une pression de 200 à 300 fois ses possiblités herbagères. Et,
de toutes les espèces animales composant le cheptel, la chèvre, qui est la plus rustique, est la plus nuisible
puisqu’elle se nourrit du feuillage des arbres et arbustes qui constituent l’ossature des structures et archi-
tectures des écosystèmes sylvo-pastoraux. Le problème est encore plus grave quand l’espèce la plus nui-
sible (chèvre) est lâchée dans des milieux menacés telle que l’arganeraie.
Le surpâturage affecte également les zones humides, surtout lors de la période estivale ou des périodes
de sécheresse. 20 000 têtes de bétail pâture, par exemple, dans la lagune de Moulay Bousselham ; un chiffre
énorme qui, à terme, finirait par détruire la majorité des habitats de ce site, pourtant classé Ramsar. La gra-
vité du surpâturage s’amplifie dans les zones humides par la présence d’espèces parfois gravement mena-
cées dans le monde (plusieurs espèces migratrices d’oiseaux) et le piétinement des nids et des nichées ainsi
que des gisements coquilliers constitue un risque supplémentaire à celui du prélèvement du premier maillon
de la chaîne alimentaire qu’est la végétation.
À côté des prélèvements effectués au sein des populations végétales et animales, d’autres activités
d’extractions influent négativement et considérablement sur diverses formes de vie et leurs habitats. Il
s’agit, entre autres, de l’eau, du sable, du sel, etc. qui partout au Maroc font l’objet d’intenses prélèvements.
L’utilisation excessive des eaux superficielles et souterraines, aggravée par les longues périodes de séche-
resses et la « motorisation » des pompages ont fait que de nombreux écosystèmes, en particulier des zones
humides ont disparus ; leurs habitats, leurs faune et flore ainsi que leurs valeurs écologiques et écono-
miques. Le lac Iriqi, par exemple, n’assure plus ses fonctions de pourvoyeur d’eau et de niche écologique
pour des centaines d’oiseaux migrateurs. Dans le pourtour de l’estuaire de la Moulouya ou encore la lagune
de Nador, les pompages, excessives ont contribué à une réduction considérable du niveau de la nappe phréa-
tique et l’augmentation de la salinité ; eau qui n’est plus ni potable ni propre l’agriculture.
Il est évident que l’augmentation de la salinité entraîne des perturbations profondes de l’écosystème élimi-
nant toutes les espèces dulcicoles et sténohalines et leur remplacement par des formes euryhalines.
Les prélèvements de sables dans les lits d’oueds, sur le littoral, dans les estuaires, des lagunes ou au large
par dragage correspondent à des destructions des habitats de centaines d’espèces et par conséquent l’élimi-
nation de ces espèces. L’exemple est toujours celui de l’estuaire de la Moulouya où les prélèvements de
sable dans la tamariçaie a profondément « dévisagé » certaines zones de ce Site d’Intérêt Biologique et Éco-
logique. Les espèces ne trouvent plus un habitat stable pour s’y développer et évoluer. De nombreuses
espèces d’intérêt international s’y trouvent ainsi gravement menacées.
163
5.3. Pollutions
En ce qui concerne les déchets liquides, la nature et par conséquent, les écosystèmes et les espèces
reçoivent 964 millions de m3 :
– 24 millions de m3 en provenance de l’industrie agroalimentaire
– 10 millions de m3 en provenance de l’industrie du textile-cuir
– 920 millions de m3 de l’industrie chimique et parachimique en particulier la valorisation des phosphates ;
une eau principalement chargée de phosphogypse ;
– 2 millions de m3 de l’industrie mécanique, métallurgique et électrique puis ;
– 6,8 millions de m3 du secteur cimentier.
– Les déchets solides rejetés annuellement du secteur industriel sont estimés à près de 800 000 tonnes
dont seulement 23 % sont réutilisés.
Un autre aspect des déchets industriels correspond aux rejets gazeux dont le plus important reste le
dioxyde de carbone (77 %) et on compte, en effet, près de 4 millions de tonnes rejetés uniquement par les
cimenteries.
Les impacts de ces déchets sur la biodiversité aussi bien écosystémique que spécifique sont énormes à
commencer par la santé humaine, en tant que composante essentielle de l’environnement global. Les mala-
dies respiratoires, les épidémies de choléra ou de typhoide, par exemple, sont indéniables à ces rejets.
La disponibilité en eau et la détérioration de la qualité de cette eau. L’écosystème du Sebou par exemple
est « mort » sur 35 Km en aval de la ville de Fès à cause justement des rejets industriels qui y ont consommé
164
tout l’oxygène de l’eau et y supprimant de toute forme de vie. Ce n’est qu’après une relative dilution de ces
rejets par les effluents du Sebou, que ce dernier reprenne vie
La mer est également considérée comme un exutoire naturel et commode ; ainsi, la côte marocaine s’est
vue envahir par les projets industriels. Le littoral atlantique concentrait, en 1990, 77 % des unités d’industries
et 80 % des emplois, surtout dans l’axe Casablanca-Kénitra considéré comme l’espace structurant qui
façonne le tissu industriel national et qui a contribué, en 1990, pour plus de la moitié des l’investissement au
Maroc. De nombreux milieux marins et côtiers souffrent d’une pollution « chronique » qui les empêche de
jouer pleinement leur rôle économique, écologique et social. L’exemple le plus flagrant est celui de la Lagune
de Nador dont le taux de pollution est tellement important que tous les stocks de poissons, de crevettes, de
palourde, etc. qui y existaient (et qui constituaient la source de subsistance de milliers de familles) se sont
complètement effondrés à cause principalement de la pollution et, avec ces stocks, des intérêts et des
sources de revenus aussi bien pour les riverains que pour le pays. La lagune ne remplis également plus son
rôle écologique en tant qu’abris pour des espèces menacées aux échelles nationale et internationale.
L’effondrement des stocks de poissons, et plus particulièrement la sardine, dans la région de Safi est aussi
attribué, pour une grande part, à la pollution et aux activités humaines sur terre ; des milliers donc de sans tra-
vail de plus, moins de recettes, moins de devises, etc.
L’aspect paysager des écosystèmes souffre également de ces pollutions. En effet, les ordures nauséa-
bondes) à proximité des hôtels, des décharges non contrôlés dans des forêts, des plages souillées par des
emballages en plastic usagés freinent certainement cette activité et de façon considérable. Un indice est
celui de l’importante baisse de fréquentation des hôtels du nord du pays ; cependant s’il est difficile d’établir
un lien de cause à effet de l’impact de la pollution sur le secteur du tourisme, d’aucun de nous ne peut nier
« le dérangement » et l« écœurement » de se sentir touché par des sachets en plastic en pleine eau ou de
passer des vacances dans des zones où règnent des odeurs nauséabondes, faute de mieux ou faute de
moyens.
Sous l’angle de la diversité spécifique, l’impact de la pollution (domestique et industrielle) est encore plus
direct et plus néfaste. La posidonie a disparu de la lagune de Nador à cause de la pollution ; les nacres y sont
gravement menacées (pourtant c’est une espèce menacée et protégée à l’échelle internationale). Une bonne
partie des algues indicatrices des eaux pures (Cystoseires et laminaires, entre autres) ont disparu pour laisser
place à d’autres formes de vie (Moules) qui se sentent mieux dans les milieux riches en matière organique.
Dans la région d’El Jadida (Jorf Lasfar), l’impact de la pollution développé dans la zone est si importante
que pour retrouver des peuplement apparemment normaux, il faut parcourir près de 25 kilomètres au nord et
au sud du point de rejet.
165
nouvelles variétés, plus productives et généralement plus fragiles, a, en outre, entraîné une utilisation
souvent anarchique de produits phytosanitaires, ce qui a engendré un certain nombre de problèmes tels que
l’apparition de parasites résistants. L’application de doses de plus en plus fortes a engendré des effets
néfastes sur les ressources naturelles et spécialement les ressources biologiques et les ressources en eau.
Des mortalités de poissons dans le barrage d’Al Massira et la lagune de Oualidia ainsi que la destruction
des colonies d’abeilles ont été exliquées par l’utilisation excessive des produits phytosanitaires.s
L’usage d’engrais et de pesticides est appelé à augmenter durant les années à venir, ce qui ne manquera
pas d’augmenter le degré de pollution des sols et des eaux, et par conséquent, d’aggraver la détérioration
des ressources naturelles et d’une manière générale de la biodiversité..
Les impacts de ces changements climatiques sur la biodiversité nationale y compris l’Homme restent liés
à:
– à la nocivité de ces gaz ;
– l’augmentation de la température et ;
– la réduction des précipitations.
En ce qui concerne l’impact de ces gaz sur la santé humaine, bien qu’il soit difficile de donner des chiffres
sur les dégâts causés par ces gaz, il reste néanmoins très évident que les populations des grandes agglomé-
rations en subissent les conséquences. Quelques études préliminaires ont montré que des échantillons
d’écolier de Rabat présentaient des concentrations de plomb plus élevées que ceux de Témara. Des études
similaires dans la région de Safi ont également montré qu’il existe des correlation le taux de pollution et des
maladies respiratoires.
L’augmentation de la température et la réduction des précipitation entraîneraient certainement une plus
grande demande en eau, déjà déficitaire, et par conséquent des difficultés en matière de disponibilité en eau
dans certains écosystèmes clés tels que les zones humides, la forêt et l’agrosystème ainsi, de toute évi-
dence l’ensemble de leurs cortèges faunistiques et floristiques.
166
marins et côtiers et, par conséquent, la biodiversité marine, qu’ils abritent sont menacés par les pollutions
accidentelles.
En effet, en une douzaine d’années (1977-1990), les eaux méditerranéennes ont été le scène de 137 acci-
dents de pétroliers et qui, dans plus de 50 % ont entraîné des pollutions. La part du Maroc dans ces cata-
strophes était deux accidents l’un en Atlantique (Kharg V) et l’autre en Méditerranée (Sea Spirit).ayant largué
sur les côtes marocaines 70 000 et 20 000 tonnes respectivement souillant plus de 700 Km de côtes. Des
dégâts ont été observés aussi bien dans l’eau, les sédiments, les parcs aquacoles que dans le secteur touris-
tique de type balnéaire.
D’autres accidents sont également survenus en 1994 au large de Mohammadia ayant provoqué une marée
noire de 3 km3, en 1997 au port de Jorf Lasfar lorsque 550 tonnes d’acides ont été déversées dans ce port.
De nombreux végétaux et animaux ont été introduits au Maroc pour diverses raisons : rentabilité, lutte
contre des espèces ou des conditions nuisibles, ornementation, etc.
5.4.1. Flore
De nombreuses espèces végétales ont été importées et nombreuses sont encore à l’essai dans des arbo-
reta. Plus de 200 arbres, surtout des Eucalyptus, ont été introduites de l’Australie et utilisées soit comme
arbres d’alignement, soit des arbres d’ornement soit encore de reboisement. Parmi ces espèces les plus
importantes sont : Eucalyptus camaldulensis, E. gomphocephala, E. globulus, E. grandis, E. saligna, E. side-
roxylon, E. cladocalyx, E. occidentalis, E. astringens, E. sargenti, E. torquata, E. brockwayi, E. salmonophloia,
E. salubris, Acacia cyanophylla, A. cyclops, A. mollissima, Pinus pinaster maritima, P. canariensis, P. pinea,
etc.).
Dans le domaine agricole, un grand nombre d’espèces et variétés (céréales, légumes, fruits, etc.) a égale-
ment été introduit et produit au Maroc et ce essentiellement dans un but lucratif ; exemple : les bananes, les
Kiwis, les avocats, l’ananas, etc.
5.4.2. Faune
Parmi les espèces animales domestiques, les bovins sont les plus concernés, essentiellement pour assu-
rer une certaine sécurité alimentaire en lait et en viandes rouges.
Le milieu aquatique n’échappe pas à cet engouement « vers l’exotique ». Aussi, dans les eaux douces
continentales de nombreuses espèces sont introduites à des fins aquacoles soit de production, soit d’aqua-
riophilie, soit de lutte contre l’eutrophisation ou la prolifération d’espèces nuisibles. Il s’agit principalement de
la Carpe argentée (Hypophthal-michthys molitrix), la Carpe herbivore (Ctenophar-yngodon idella), la Carpe
commune (Cyprinus carpio), le Brochet (Esox lucinus), le Black-Bass (Micropterus salmoides), les Sandres
(Lucioperca lucioperca), la Truite Arc en Ciel (Salmo irideus), l’ Ecrevisse à pieds rouges Astacus astacus, etc.
vérifier poissons.
Dans le milieu marin, les introductions concernent quelques espèces dont les Huitres, principalement
l’huître creuse Crassostrea gigas, les coquilles Saint Jacques (Patinopecten yessoensis) et les crevettes telle
que la Crevette japonaise (Penaeus japonicus).
167
Si ces introductions peuvent, en effet, permettre des bénéfices financiers (de plus grandes productions et
de meilleurs revenus) ou écologiques (lutte contre l’eutrophisation) immédiats, elles peuvent, néanmoins,
causer deux grands types de menaces pour la biodiversité du pays :
– supplantation des espèces indigènes qui, à la longue, peuvent disparaître ou, du moins s’appauvrir géné-
tiquement par insuffisance de brassage, ce qui est observé pour de nombreuses variétés/ races dites
« beldi » (légumes, fruits, bovins, poulets, etc.) ;
– un risque de pollution génétique de cette biodiversité. L’érosion génétique pouvant être due à une
manque d’intérêt du produit national pourrait être aggravé par une pollution génétique due à des croise-
ments involontaires et incontrôlés des espèces autochtones avec des variétés introduites.
168
Tableau 6 : Évaluation du coût de la dégradation de l’environnement au Maroc
(Banque mondiale, 2003)
Il n’existe pas suffisamment de données statistiques régulières disponibles sur divers éléments de la bio-
diversité nationale pour la période 1955-2004. De plus, la notion de Biodiversité est un concept relativement
nouveau, n’ayant été le centre d’intérêt des départements concernés que pour certains de ses volets socio-
économiques. Il est cependant logique de penser que la pression sur l’environnement, sur le milieu physique
et sur les espèces et les écosystèmes qu’il renferme a une évolution et une tendance générale propor-
tionnelle à celle de la démographie, surtout que dans la majorité des pays en développement, cette crois-
sance démographique n’est pas toujours accompagnée de mesures permettant d’atténuer la pression sur les
ressources naturelles.
6.1.1. Déforestation
Si la tendance actuelle se poursuit en matière de prélèvements forestiers :
Les espèces végétales actuellement rares ou menacées disparaîtraient. L’un des facteurs majeurs contri-
buant à l’érosion de la biodiversité terrestre est la perte des formations forestières. Les prélèvements du bois
de feu et les défrichements sont des pratiques très courantes chez les populations locales riveraines et, ce,
au profit des extensions des cultures, en particulier dans les zones où les terres de culture sont rares. Ce
phénomène s’est particulièrement aggravé lors des dernières décennies, surtout dans les régions isolées où
la surveillance par les services forestiers est insuffisante. Il s’agit de zones de développement d’une agro-
culture traditionnelle au détriment de formations préforestières de près de 31 000 ha qui disparaissent
chaque année dont 22 000 ha pour des besoins énergétiques, 4 500 ha par les défrichements et 4 500 par
des incendies. Ces défrichements délictueux n’affectent pas les seules écosystèmes forestiers, mais bien
d’autres milieux tels que ceux des dunes (régions d’Essaouira) ou des zones humides (surexploitation de
joncs, roseaux, etc. sur les bords des lacs, merjas, lagunes, rives des cours d’eau de montagne, etc.). En
169
plus, la forêt doit satisfaire, au moins en partie, les besoins en énergie des populations. Les prélèvements en
bois de feu s’évaluent à 11 000 000 m3, soit 30 % des besoins énergétiques du pays, ce qui dépasse large-
ment les possibilités de régénération de la forêt marocaine.
Un autre facteur majeur de la dégradation de l’écosystème forestier est celui du pâturage avec une charge
animale 3 à 5 fois supérieure à la normale correspondant à un déficit de 23 %.
Ces mises à nue des espaces forestiers et ces utilisations abusives des ressources forestières entraînent
souvent de graves perturbations du fonctionnement de cet écosystème (absence de régénération, fragilisa-
tion des espèces, etc.) ; mais, aussi, sur d’autres écosystèmes tels que l’agro-système (perturbation du cycle
de l’eau, érosion du sol, pollution des eaux souterraines, inondations et mort du cheptel, etc.). Cependant, ce
qui est encore plus grave dans ces pratiques de déforestations, c’est :
– la perte d’habitats pour les milliers d’espèces au développement du tourisme. Les difficultés écono-
miques et institutionnelles ne permettent pas une amélioration de la gestion des écosystèmes forestiers
et de leurs ressources. Le rythme de 30 000 ha de déforestation pourra facilement doubler au bout de
20 ans, plus de 1 000 000 ha pourraient avoir disparu. Cette situation peut conduire à double impasse
stratégique à la fois patrimoniale et des outils de gestion.
– Le patrimoine, déjà faible en surface, serait sérieusement menacé dans sa pérennité compte tenu des
pressions croissantes qui s’exercent. La dégradation qualitative des écosystèmes, de leur potentiel et
de leurs fonctions environnementales est d’ailleurs beaucoup plus inquiétante que la diminution appa-
rente en surface. Les tendances au réchauffement des climats pourraient accentuer ces risques.
170
6.1.2. Démographie
D’un peu plus de 11,5 millions au début des années de l’indépendance (1960), la population marocaine
compte aujourd’hui près de 30 millions et atteindrait plus de 40 millions en 2025.
6.1.3. Urbanisation
Les faibles performances économiques, la sécheresse, la dégradation des ressources naturelles ont
entraîné un exode rural massif et par conséquent une urbanisation remarquable qui est passée de 29 % en
1960 à plus de 50 % actuellement. Certaines études prévoient une urbanisation de près de 75 % en 2025.
Il est donc logique de penser que cette tendance de la croissance démographique et de l’urbanisation soit
accompagnée de besoins et de demandes de même tendance en terrains habitables, en eau, en produits
agricoles, en produits maritimes, etc.
6.1.4. Déchets
Une augmentation de la population générerait certainement d’autres sources de pollution ou du moins aug-
menterait la quantité de déchets urbains et industriels. La pollution urbaine qui était évaluée par son DBO en
1992 à 59 000 tonnes par an serait de 99 000 tonnes en 2005 et près de 180 000 tonnes en 2025.
171
6.1.5. Pollution de l’air
Pour les gaz à effet de serre, les prévisions pour les annéesx2020-2025 relatives aux émissions nettes
vont plus que doubler principalement à cause de la consommation d’énergie. De 1982 à 1992, les quantités
de SO2, NOX et de la MES ont augmenté en moyenne de 50 % et ceux du Plomb de 15 %. Les prévisions
pour 2020-2025 montrent une nette augmentation encore des émissions de ces gaz surtout le SO2 qui
devrait plus que tripler ; la quantité de Plomb augmenterait d’un peu plus de 17 %.
Les effets sont tout d’abord directs sur le climat, dont la température qui se verrait augmenter de plus de
0,6oC. L’impact sur la biodiversité toucherait pratiquement tous les secteurs et serait en rapport avec la
réduction des ressources en eau et la santé humaine. Les besoins en eau auraient très certainement des
répercussions sur l’étendue et les peuplements des zones humides surtout naturelles. Il en découlerait des
réductions des habitats pour la flore, pour les invertébrés, pour les vertébrés également, en particulier les
poissons et les oiseaux principalement migrateurs.
172
Figure 10 : Rejets des gaz à effet de serre
(d’après la communication nationale initiale à la CCNUCC, 2001)
6.1.6. Climat
Les analyses de différents scénario prévisionnels des changements climatiques au Maroc semblent mon-
trer :
– une tendance à une augmentation des températures moyennes annuelles de plus de 0,6 à 1,1oC à l’hori-
zon 2025
– une tendance à une diminution du volume annuel moyen des précipitations de près de 4 %.
– un dérèglement de la saisonnalité des pluies et de leurs durées ainsi qu’une réduction de la couverture
neigeuse.
Les impacts de telles évolutions sur la biodiversité sont importants et peuvent être résumés en :
Des réductions des ressources en eau de 12 à 15 %, ce qui signifie automatiquement encore plus de pres-
sions sur les zones humides naturelles (et même les barrages) par les populations locales, donc plus d’assè-
chements, des durées de mise en eau plus courtes, moins d’oiseaux d’eau, moins de faune et flore et des
cycles de développement complètement perturbés. La pêche continentale de plus en plus déficitaire.
173
– Moins d’apports fluviaux vers la mer, donc moins de matériaux fertilisants et donc de plus faibles pro-
ductivités.
– D’importantes réductions (jusqu’à 50 %) de productions céréalières. et des demandes en céréales de
plus en plus grandes ;
– Un déplacement vers le nord du phénomène d’aridité.
– Un affaiblissement physiologique de certaines essences forestières et une plus grande prédisposition
aux maladies et aux parasites.
C’est ainsi qu’actuellement, il est établi que le domaine boisé régresse de 31 000 à 33 000 h/an à cause de
la pression de la croissance démographique et ses besoins socio-économiques sans cesse croissant, surtout
en milieu rural. Ceci se traduit par exemple par un nombre important de délit de coupes illicites (près de 4000
entre 1981 et 1986). On pense alors que si cette tendance n’est pas inversée, un seuil critique de désertifica-
tion irréversible serait atteint dans 30 à 50 ans, ce qui générerait des pertes économiques considérables sur
les ressources en eau, les productions forestières, pastorales et agricoles, estimés à plus de 710 millions de
dirhams/an.
Les régions du Rif sont les plus touchées par ce déboisement, mais d’autres régions sont également affec-
tées par ce phénomène dont le Haut Atlas. Dans ce dernier et plus particulièrement la région d’Azilal on
pense que si le rythme de défrichements se poursuit, d’ici une vingtaine d’années (2025-2030), la forêt dispa-
raîtrait de certaines régions.
Les changements auraient également d’importants impacts sur les milieux forestiers, en particulier par un
affaiblissement physiologique, une plus grande prédisposition aux maladies et la réduction ou la disparition
de certains espaces forestiers tels que l’arganeraie.
Les pertes en terres dépassent 20 t/ha/an dans le Rif et se situent entre 5 à 10 t/ha/an dans le Moyen et le
Haut Atlas. Si cette cadence se maintient, les pertes dépasseront le seuil des 100 millions de m3/an en
l’an 2020, et seraient un peu moins de 150 millions de m3/an en l’an 2030. L’envasement consécutif réduit la
capacité des retenues des barrages de 50 à 60 millions de m3/an, correspondant à une réduction des possibi-
lités d’irrigation de 5 000 à 6 000 ha/an. Les répercussions des pertes du sol sur la productivité agricole est
estimée à 5 % par an de l’élément fertilisant et de 5 000 tonnes de céréales par hectare et par bonne année
agricole.
Les changements climatiques prévues d’ici les années 2020-2025, en l’occurrence des augmentations des
températures et des réductions des précipitations entraîneraient des réductions des productions céréalières
d’au moins 10 % pour une année normale et 50 % pour une année sèche.
Dans un horizon de 30 à 50 ans, ce processus d’évolution régressive de la biodiversité pourrait être irréver-
sible, alors que la décrue démographique aurait été à peine inaugurée. Jusqu’à aujourd’hui, le Maroc a su pré-
174
server l’essentiel. L’avenir dépendra des politiques qui seront adoptées en matière de développement rural
et de gestion des ressources forestières qui sont deux volets indissociables.
En dehors des espèces visées par la pêche côtière ou hauturière, d’autres espèces appartenant à la bio-
diversité marine et côtière marocaines sont gravement menacées et d’ici 2025 disparaîtraient certainement
de toutes nos eaux. Il s’agit, entre autres de :
– le corail rouge, surexploité dans toute la Méditerranée marocaine et au large de Larache dont on ne peut
prélever actuellement que quelques tonnes ;
– la palourde qui, par exemple « a vu » ses stocks chuter de 150 tonnes à 30 tonnes en 3 ans seulement
dans la baie de Dakhla et qui s’est considérablement raréfiée dans tous ses habitats (lagunes et
estuaires) ;
– la grande nacre, espèce très menacée dans toute son aire de disparition. Il nous reste encore quelques
spécimens dans la lagunes de Nador qui ne tarderont pas à s’éteindre avec l’énorme pollution sévissant
dans ce milieu et la pêche illicite (pour en faire des boutons) ;
– le phoque moine, espèce gravement menacée à l’échelle planétaire et dont la population transfrontalière
du sud marocain (quelques centaines) souffre énormément de la fréquentation humaine, des pêcheries,
et d’autres causes naturelles telles que les algues toxiques ou les effondrements de leurs grottes ;
175
– la grande alose qui, en mer (pêcheries) comme en « terre » (barrage), trouve d’énormes difficultés à sur-
vivre. Ses habitats ont complètement été anéantis et on pense qu’elle a déjà disparu de nombreux sites
qu’elle fréquentait ces dernières décennies.
– l’anguille qui souffre également des même problèmes que l’alose et qui, de plus est soumise, dans ses
toutes premiers stades de la vie (civelles) à une intense prédation, éliminant toute chance de reconstitu-
tion de ses stocks ;
– les algues rouges, bien que la durée de leur exploitation soit très limitée, est soumise à l’assaut de mil-
liers de ramasseurs dès l’ouverture de la saison de ramassage, et le manque de qualification chez les
populations ainsi que l’absence de quota, font que l’espèce à du mal à suivre l’évolution des prélève-
ments ;
– etc.
La biodiversité comporte également de nombreux habitats tous aussi particuliers que vulnérables :
– les lagunes qui souffrent, pratiquement toutes, des activités anthropozoologiques (pollution, pâturage,
pêche, prélèvements de sable, etc.) et qui, en 2025 seraient des bras de mer morts. Celle de Nador, par
exemple, a perdu pratiquement toutes ces valeurs biologiques (stocks de crevettes, de poissons et de
coquillages), écologiques (en tant qu’abris pour de nombreuses espèces migratrices, pour l’engraisse-
ment et la reproduction de poissons de crustacés, etc.) et paysagères (tourisme et activités récréatives) ;
– les estuaires sont également soumis à des pressions si importantes qu’on craint pour eux de ne consti-
tuer en 2025 que de simples exutoires à ciel ouvert azoiques. L’estuaire de Sebou par exemple draine
les eaux usées non traitées de nombreuses grandes agglomérations (Fès, Kénitra, etc.) et nombreuses
de ses formes vivantes emblématiques telle que la grande alose, ont complètement disparues ; les
civelles s’y sont dramatiquement raréfiées et les poissons ou coquillages qui y survivent sont fortement
contaminés. L’estuaire de la Moulouya, du Sebou, du Bou Regreg, etc. ont chacun également ses pro-
blèmes spécifiques qui les asphyxient jour après jour.
La Biodiversité marine c’est aussi la variabilité génétique des espèces et si pour certaines formes telles
que la sardine, les individus sont assez abondants pour assurer un minimum de richesses en pools géné-
tiques, pour d’autres espèces tels que le mérou, le thon rouge ou le phoque, la pression est telle qu’on est
en droit de se demander si d’ici 2025, il y aurait suffisamment de géniteurs et de caractères sauvages pour
assurer à ces espèces leur pérennité.
Cependant, c’est relativement récemment que ces milieux ont commencé à représenter un centre d’inté-
rêt pour certains départements, et il faudrait certainement un peu plus de temps pour identifier avec préci-
sion l’importance des valeurs perdues et les répercussions à moyen long terme (2025). On peut d’ors et déjà
citer les exemples suivants :
– Au début des années 80 du siècle dernier, le plan d’eau de Khnifiss comportait en son milieu un impor-
tant site de nidification d’oiseaux migrateurs, en l’occurrence l’île aux huîtres jonchée de nids de
diverses espèces. En 2004, et à cause de la fréquentation de l’île par les pêcheurs locaux, toute l’île ne
176
comportait plus qu’un seul nid d’un couple de Goelands. En 2025, aucune des espèces qui nidifiait dans
cette zone ne pourrait le faire et choisiraient d’autres sites pour leur reproduction. Ceci est également le
cas des marécage de l’oued Moulouya, où en moins de 48 heures, des centaines de nids ont été pillés
et vidés de leurs œufs, faisant perdre à ce milieu sa valeur écologique de site de reproduction pour la
multiplication et la conservation des espèces d’oiseaux menacées.
– De nombreux cours d’eau dont la mise en eau était essentiellement assurée par des crues et des pluies
(Sebou, Moulouya, Dr’a, etc.) ne sont actuellement qu’à immersion très brève et d’ici l’an 2025, ces
oueds seraient complètement asséchés, faisant perdre toute une faune des rivières chaudes caractéri-
sée par sa grande diversité. Ces milieux perdraient par la même occasion l’une de leurs principales fonc-
tions écologiques qu’est l’épuration des eaux.
– De nombreuses autres valeurs biologique (nombreuses espèces endémiques) et socio-économique
(pêche et chasse) risquent de se perdre complètement d’ici l’an 2025.
Dans les cadre de la conservation des zones humides nationales, 20 autres sites sont proposés pour être
inscrits dans la liste des sites Ramsar, mais seraient ils suffisants pour conserver la biodiversité de ces
milieux fragiles d’ici 2025 ? De surcroît, 4 de nos sites sont déjà dans cette liste, ce qui n’a pas empêché la
continuation de leur dégradation. Même des parcs nationaux créés il y a des dizaines d’années n’ont pu
échapper à ce sort.
De nombreux éléments indispensables à une meilleure gestion et une meilleure intégration de la biodiver-
sité dans le développement du pays restent encore mal connus ou incompris. Les données systématiques,
écologiques, dynamiques, socio-économiques, de restauration etc. sont pour la plupart lacunaires. Certes, de
nombreuses études systématiques et écologiques ont été réalisées au Maroc ; mais, de nombreuses ques-
tions se rapportant à ces éléments et leurs fonctionnements restent sans réponse. En effet, que savons
nous sur l’écologie des quelques 30 000 espèces recensées jusqu’à présent ? Que savons nous des inter-
actions entre ces espèces et leurs habitats respectifs ? Que savons nous des fonctionnements des différents
écosystèmes terrestres ? Il faut reconnaître que notre savoir sur ces aspects est extrêmement limité. Pour-
tant, c’est dans les éléments de réponse à ce genre de questions que réside la clé du succès de toute
177
approche d’intégration de la biodiversité dans le développement socio-économique et humain durables, puis-
que, protéger et valoriser une espèce ou un écosystème suggère la connaissance de ses exigences écolo-
giques et, donc, de son autoécologie, sa synécologie et son fonctionnement. La stratégie nationale en
matière de biodiversité devrait donc avoir parmi ses priorités l’amélioration des connaissances sur ces res-
sources biologiques ; connaissances sans lesquelles aucune préservation ni aucune action ne seraient effi-
cientes.
L’amélioration des connaissances sur la biodiversité nécessite des compétences humaines susceptibles
de mener des programmes nationaux de recherche, à travers la coopération internationale pour mieux
connaître, mieux conserver, mieux conseiller les décideurs et mieux capitaliser les données disponibles pour
un développement socio-économique optimal. Or, pour un grand nombre de groupes végétaux et animaux, il
n’existe au Maroc aucun spécialiste, et même pas un « généraliste ». C’est le cas par exemple des lichens,
des fougères, des spongiaires, des coraux, etc. On n’a pas non plus de « restaurateurs » spécialisés des
milieux dégradés, ni de « réhabilitateurs » d’espèces et d’habitats en cours d’extinction. Même pour certains
groupes exploités, nos moyens humains demeurent trop limités pour une meilleure gestion de ces res-
sources.
Il en découle que hormis quelques spécialistes, on est à l’heure actuelle, presque complètement dépen-
dant de l’étranger pour nos études approfondies en matière de biodiversité et de son exploitation dans des
programmes de développement socio-économique du pays.
La conservation était souvent interprétée par les populations locales comme une « mise en conserve » et
non pas comme une « mise en réserve » des ressources visées par des programmes de protection. Les nou-
velles approches veulent que toute conservation intègre la prise en considération des besoins des popula-
tions locales et l’utilisation concertée et maîtrisée des ressources par ces populations. Cette approche est à
même d’éviter beaucoup d’actes dont les répercussions ne peuvent qu’avoir un impact négatif sur la conser-
vation.
Si le monde entier se donne tant « de peine » pour évaluer les ressources biologiques et établir des pro-
grammes souvent coûteux de conservation, de restauration et de réhabilitation d’espèces et d’écosystèmes,
c’est pour pouvoir continuer à tirer bénéfice des avantages de cette biodiversité dans des avenirs proches et
lointains.
Dans le cas de la biodiversité nationale, il s’agit principalement de l’utilisation des produits agricoles, sylvo-
pastoraux et halieutiques. À plus faible échelle, on peut citer certaines plantes des zones humides comme le
jonc et certaines espèces sauvages souvent menacées telles que les tortues, renards, varans, serpents,
papillons, etc. et qui ont leurs rôles à jouer dans l’équilibre de leurs écosystèmes respectifs. Il y a deux caté-
gories distinctes d’utilisateurs des ressources et qui en tirent avantage : soit de grands utilisateurs (grands
agriculteurs, industriels dans le secteur du bois, grands éleveurs, des mareyeurs, des sociétés d’exportation
178
des produits de la mer, etc.) soit des petits utilisateurs (populations locales), bien plus importants par leurs
effectifs et souvent par l’impact de leurs activités souvent anarchiques et non organisées.
Pour les grands utilisateurs, il est impératif que soit prise en considération, dans tout projet d’investisse-
ment et dans toute mise en place d’infrastructures socio-économique, l’intégration de la biodiversité, son uti-
lisation et son développement durable, autrement dit, que soit pris en compte l’impact desdits projets sur la
pérennité de la ressource et des écosystèmes voisins. Ceci implique le besoin de se doter des moyens légis-
latifs et institutionnels pour imposer à tout projet, public ou privé, une étude d’impact des répercussions sur
la diversité biologique..
Il est actuellement communément admis que rien ne peut se faire dans le domaine de la préservation des
ressources naturelles et dans l’exploitation durable de ces ressources sans la participation, la contribution,
l’intégration et l’appui des populations locales. En effet, comment persuader, par exemple, un paysan d’arrê-
ter des pratiques jugées illicites de défrichement, par exemple, si celui-ci n’a aucune idée, même simplifiée,
des répercussions de ses actes sur la qualité de sa propre vie future, celle de sa famille et de ses enfants, sur
l’environnement du pays et son avenir socio-économique, etc. Et ce qui est valable pour le défrichement l’est
aussi pour les autres nuisances et causes de dégradation de la biodiversité tels que la pollution, le déboise-
ment, la chasse, le braconnage, etc.
Il importe donc de mettre à la disposition de divers utilisateurs, toute l’information disponible, mais simpli-
fiée pour pouvoir les sensibiliser à ce problème crucial et pouvoir leur prodiguer une éducation environne-
mentale et en biodiversité efficiente.
La sensibilisation de la population et son information sur les répercussions néfastes de la perte de la bio-
diversité ne peuvent suffire pour la conservation de la biodiversité et son exploitation durable, surtout quand
les éléments de cette dernière, constituent des besoins vitaux pour cette population. En effet, comment per-
suader des ruraux, même avertis et sensibilisés, de se priver du ramassage du bois de feu, de se passer des
parcours pour les quelques têtes de bétail dont ils disposent, de s’abstenir de collecter et de vendre les
renards, les fouette-queues, les tortues grecques », etc., si on ne les met pas à l’abri de ces besoins, si on ne
leur offre rien en échange et si on ne leur propose pas de projets alternatifs incitatifs qui leur permettent de
subvenir à leurs besoins et ceux de leurs familles. Une stratégie, pour être efficiente, devrait donc tenir
compte des besoins des populations et des communautés locales en biodiversité et, en même temps, de la
nécessité de préservation, de conservation et d’utilisation durable de cette biodiversité.
En terme de biodiversité, chaque élément (espèce, espace, ressource génétique) est le centre d’intérêt
d’un certain nombre d’utilisateurs. Le littoral est un exemple très explicite de cette situation. Ses dunes se
trouvent par exemple sous la responsabilité des Eaux et Forêts, ses ressources sous la tutelle du départe-
ment des pêches maritimes, la protection de ses espèces menacées et de ses aires protégées sous la res-
ponsabilité encore une fois des Eaux et Forêts, le domaine public maritime est une affaire des travaux
179
publics, etc. Une multitude donc d’intervenants et une polycéphalie dans la gestion qui ne facilite guère la
tâche au décideur.
De même, pour la forêt, même si sa gestion relève du Département des Eaux et Forêts, elle a de nom-
breux et multiples acteurs, avec des intérêts convergents mais souvent antagonistes : les populations locales
ont un droit d’usage pour prélever ce dont ils ont besoin, les communes locales ont droit à une partie des
recettes conformément à la loi, les grands exploitants et entrepreneurs, les promoteurs touristiques ou
immobiliers payent des droits d’exploitation, etc. Il en découle que pour une seule ressource, voir une seule
essence, les intérêts et les intervenants sont multiples et, pour conserver cette ressource et l’utiliser de
façon durable, il s’impose une concertation, une coordination et le concours des différents intervenants
publics et privés. Et ce qui est valable pour la forêt l’est aussi pour l’agriculture, pour la pêche ou, à une plus
faible échelle, pour des espèces tels que des oiseaux, des serpents, etc.
Tous Les efforts devront être capitalisés et optimisés ; mais sans des cadres juridiques adéquats et dissua-
sifs, ils resteraient inefficaces. On n’irait pas jusqu’à dire que nous n’avons pas de lois régissant le domaine
des ressources naturelles ; bien au contraire, des lois existent, et depuis le début de ce siècle et touchent, en
plus, à divers domaines de la nature ; mais, pas en terme de biodiversité telle qu’elle est perçue actuelle-
ment. Cependant, usés par le temps et par l’évolution des approches, nombreux de ces textes ont perdu de
leur efficacité.
Un arsenal législatif actualisé et dissuasif devrait faire partie de la stratégie globale visant la conservation et
l’utilisation durable des ressources biologiques de notre pays ; des textes qui devraient être souples pour faci-
liter la mise en œuvre de cette stratégie de conservation ; mais, en même temps, agressifs et dissuasifs pour
en assurer l’efficience. Ces textes devraient également tenir compte des engagements internationaux du
Royaume.
Il importe également de cerner d’urgence certains problèmes qui s’imposent actuellement aussi bien à
l’échelle nationale qu’internationale et qui, laissés au temps, auraient des répercussions plus ou moins
néfastes sur ces ressources. Parmi ces problèmes, il y a lieu de citer la biosécurité, l’accès aux ressources
génétiques de notre pays par des pays tiers et aussi les listes rouges d’espèces et d’espaces menacés qu’il
importe de dresser et de connaître avec précision.
Le Maroc a besoin et devrait tirer profit des expériences des autres pays en matière d’identification des
composantes de la biodiversité, en matière d’approches de conservation et d’utilisation durable, en matière
de restauration et de réhabilitation, et ce pour améliorer et renforcer ses propres capacités financières et
scientifiques, profiter également des ressources génétiques des autres pays pour améliorer les siennes, etc.,
d’où la nécessité du développement de la coopération et de partenariat avec d’autres pays détenteurs de ce
savoir faire et, aussi, avec des organismes internationaux encadrant des problèmes d’envergure planétaire.
180
8. Plan d’action pour une contribution optimale de la biodiversité
au développement durable du Maroc
La stratégie et le plan d’action nationaux pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité ont
été publiés en 2004. Ils visent aussi l’intégration de la biodiversité dans les processus du développement
humain et socio-économique du pays. Des séries d’actions sont identifiées par type de milieu (biodiversité
terrestre, côtière et marine, zones humides etc.) avec leur niveau de priorité, leur échéancier, les institutions
responsables etc. Ils comprennent un certain nombre d’outils et mesures qui pourraient être considérés dans
le cadre du développement humain et socio-économique du pays, et qui sont :
– Mesures de gestion, qui visent la satisfaction des besoins en matière de biodiversité sans pour autant
mettre en péril sa pérennité. Ils visent également le développement de certaines potentialités offertes
par la biodiversité pour des fins socio-économiques ;
– Outils scientifiques, proposés pour disposer de plus de connaissances, et plus de compétences en
matière de biodiversité, mais aussi pour gérer de façon optimale l’information scientifique disponible ;
– Mesures de l’IEC correspondant à des dispositifs d’Information, d’Éducation et de Communication dont
l’objectif est de constituer des programmes pour une meilleure approche participative des populations ;
– Outils économiques et financiers qui sont destinés à développer certains secteurs de la biodiversité
pour répondre à des besoins particuliers, à favoriser le monde rural et à encourager l’intégration de la
biodiversité dans la stratégie globale de l’avancement du pays ;
– Instruments législatifs et institutionnels dont le but est, d’une part, actualiser l’arsenal national pour
mieux prendre en considération l’évolution de la biodiversité et son importance de plus en plus impor-
tante dans le développement du Maroc, mais aussi mettre en diapason la législation nationale avec les
engagements internationaux du pays ;
– Outils de coopération permettant de conforter le Maroc dans sa position internationale, pour mieux
mettre à profit ses particularités naturelles, et pour renforcer sa contribution dans l’effort mondial ;
– Instruments de surveillance qui englobent un grand nombre d’indicateurs permettant de suivre de très
près les évolutions des ressources naturelles du pays et de leurs impacts sur divers secteurs socio-
économiques et sociaux.
181
Introduction
Le système marin est en train de se modifier en profondeur, suite au Global change planétaire, avec
notamment le relèvement du niveau de la mer et des transformations biogéochimiques importantes ayant
des impacts multiples en termes de biodiversité du milieu et de productivité halieutique et donc de res-
sources. En même temps, l’occupation humaine du littoral tend à devenir un phénomène majeur, sur le plan
de l’économie et de l’emprise territoriale, mais aussi préoccupant du fait de sa concentration et de ses
impacts.
Le phénomène de littoralisation représente un facteur fondamental d’évolution. La population côtière (zone
côtière à moins de 60 km du littoral) représente plus de 60 % de la population mondiale et continue de croître
rapidement par immigration ; le taux sera de 75 % en 2020. L’urbanisation côtière s’accentue elle aussi avec
notamment la constitution de mégavilles littorales (Plan Bleu, 1998, 2004). Cela a pour conséquences l’exten-
sion de la pression sur le terrain littoral et de la pression sur les ressources marines. Des conflits entre
usages et une compétition entre types d’implantation représentent actuellement une donnée fondamentale
et une problématique sérieuse pour l’aménagement (Berriane et Laouina, 1993).
Cette concurrence sur l’espace met en position côtière des activités parfois antinomiques, l’industrie et le
tourisme par exemple, la première produisant les pollutions chimiques, sonores et paysagères que les loisirs
cherchent justement à éviter.
Divers impacts environnementaux littoraux et marins résultent de l’évolution économique. On peut citer
l’extension des transports de produits dangereux très polluants, pour lesquels le risque est fonction du déve-
loppement des garanties techniques de sécurité. On peut aussi citer la pollution d’origine continentale en
relation avec l’installation d’industries polluantes sur la côte ou du fait de la sur-urbanisation.
Au Maroc, la côte joue aujourd’hui le rôle de pôle structurant de l’économie nationale, du fait de la concen-
tration démographique, industrielle (80 % des effectifs permanents des industries), touristique (50 % de la
capacité d’accueil) et commerciale (92 % du commerce extérieur). Cette concentration est un atout pour le
développement du pays, mais la compétition entre secteurs peut jouer un rôle négatif tant économique
qu’écologique. Par ailleurs, le littoral représente une ressource précieuse, mais limitée parce qu’il correspond
à une étroite zone de contact entre le domaine continental et le monde sous-marin. Toute occupation abusive
185
aboutit à la consommation définitive de cette ressource, sans possibilité de reproduction. Par contre, l’exploi-
tation rationnelle et légère permet à cet espace de se perpétuer sans perdre de sa qualité.
Au Maroc, comme dans tous les pays méditerranéens, le littoral tend à devenir un espace suroccupé et
surutilisé par l’urbanisation, les activités industrielles, portuaires, halieutiques et de loisirs (Sakrouhi, 1990).
Souvent excessive, cette occupation aboutit à la dégradation du milieu physique et à hypothéquer toute pos-
sibilité de gestion meilleure de l’espace côtier et marin dans l’avenir.
Le processus de littoralisation de la population et des activités est déjà très avancé et aboutit aussi à un
déséquilibre flagrant en termes d’aménagement du territoire. Jusqu’à maintenant, l’approche n’a pas pu
générer un effet de durabilité. Les rejets urbains et industriels dans le milieu marin, la suroccupation du trait
de côte, l’épuisement de certaines ressources halieutiques et l’érosion des rivages sableux – ressource à la
base du développement touristique – tout cela conduit à poser la problématique du milieu marin en termes
de choix fondamentaux pour la mise en place d’une politique de gestion efficace de cet espace précieux.
La mer est par ailleurs le réceptacle final des nuisances développées en milieu continental lointain ; mais ce
sont les nuisances du domaine côtier proche qui concourent le plus à dégrader la mer. Cette dégradation a
des effets multiples sur la santé des habitants, sur les ressources marines, sur la qualité paysagère du litto-
ral ; mais il y a aussi des dégradations du trait de côte qui résultent soit de phénomènes purement naturels,
soit du prélèvement de matériaux ou d’installations ou d’équipements côtiers inadéquats.
La côte est un domaine d’implantations humaines et économiques variées, souvent fondamentales ; le pro-
jet du port de Tanger-Méditerranée constitue par exemple le projet majeur d’infrastructure que le Maroc met
en place actuellement, puisqu’il est censé transformer carrément les données économiques du Maroc nord
et avoir des impacts inégalés sur tout le territoire national.
Mais la côte ne peut être envisagée que dans sa fonction économique ; c’est aussi un patrimoine inéga-
lable, avec des paysages précieux, des sites d’intérêt biologique et des sites d’intérêt archéologique.
Plusieurs composantes principales constituent ce patrimoine. La mer est un patrimoine varié (Secrétariat
d’État à l’environnement, 1998) qui comporte une flore et une faune originales (le cortège floristique est
composé essentiellement d’algues et de formations à halophytes ; la faune marine, encore incomplètement
répertoriée, compte de nombreuses espèces connues), des sites naturels divers et un patrimoine édifié par
l’homme. Le phénomène d’upwelling – remontées d’eau froide riche en plancton, particulièrement intenses
en été – est à la base de la richesse biologique des côtes atlantiques qui comptent parmi les plus poisson-
neuses du monde. Ces remontées d’eau froide sont particulièrement intenses en été.
Le littoral est composé de plusieurs types d’habitats : frange côtière proprement dite, lagunes, estuaires,
îles, plages et falaises littorales. La frange intertidale héberge une faune extrêmement diversifiée. L’avifaune
côtière, particulièrement riche, englobe les oiseaux marins. Les lagunes et les milieux humides adjacents
sont également particulièrement intéressantes pour leur avifaune (Secrétariat d’État à l’environnement,
1998).
La bande côtière est de délimitation difficile ; la profondeur de 50-60 km à l’intérieur des terres est souvent
avancée ; mais d’autres auteurs limitent l’extension au rivage stricto sensu, c’est-à-dire à la zone de contact
186
terre-mer. Le littoral comprend, selon la définition extensive, environ 66000 km2 d’eaux territoriales et
1,1 Mkm2 de zone économique maritime exclusive. La partie continentale du littoral regroupe 187 com-
munes, au-dessus d’une superficie qui représente 1/7 du territoire (carte de l’extension et de la population
des communes littorales, 1994). Sa population atteint 8 Mh sur 26 en 1994 (soit près d’1/3). Du fait de
l’extension urbaine et des infrastructures, la surface agricole utile est peu étendue dans la frange littorale
(seulement 6 % de la superficie contre 12 % à l’échelle du pays). La population urbaine domine très large-
ment (près de 7 M d’urbains et 1 M de ruraux dans les communes littorales). Sur le littoral méditerranéen se
trouvent souvent plusieurs villes importantes : Sebta, Tétouan, Al Hoceima, Melilla et Nador auxquelles
s’ajoutent une dizaine de petites villes dont l’accroissement est rapide. Sur le littoral atlantique se situent les
deux capitales politique et économique du pays et toute une série de villes à fonctions commerciale, indus-
trielle, touristique et de services, de premier ordre. Le cœur névralgique du pays est localisé dans la partie
centrale de cette côte, d’El Jadida à Kénitra.
Au nord-ouest du continent africain, le Maroc présente une façade méditerranéenne de près de 550 km de
long et une façade atlantique qui s’étire sur près de 3000 km, du Cap Spartel au Cap Blanc, entre les 36e et
21e parallèles nord.
Il est de caractère méditerranéen, tempéré à chaud avec un été chaud et sec et un hiver relativement doux
et pluvieux, du moins, dans sa section non saharienne. L’upwelling atlantique et la brise marine ont une
influence notable sur la température de l’air : la température maximale se trouve abaissée et la température
minimale rehaussée ce qui se traduit par une faible valeur de l’amplitude thermique mensuelle qui dans cer-
tains cas ne dépasse pas 6o C (Essaouira).
Les températures minimales moyennes sur le littoral sont supérieures à 15o C sur le littoral méditerranéen
et du détroit et entre Sidi Ifni et Boujdour. Sur les autres portions de la côte, elles sont presque toujours com-
prises entre 10 et 15o C.
Les précipitations moyennes annuelles enregistrées dans les stations littorales montrent une décroissance
d’ouest en est sur la côte méditerranéenne au nord du Rif, puis une certaine augmentation à l’est de la Mou-
louya ; la décroissance du nord vers le sud sur la façade atlantique est systématique (800 mm au nord et
moins de 200 mm au sud d’Agadir).
187
1.2. Les différentes composantes du littoral
1.2.2. Le rivage
La côte marocaine est relativement rectiligne hormis quelques caps proéminents en Méditerranée. La lon-
gueur totale de la côte n’est d’ailleurs que de 3500 km, à peu près équivalente à l’extension linéaire du
rivage, du fait de la faiblesse des indentations, de la faible profondeur des golfes et de la rareté des îlots pré
littoraux. Elle présente quelques baies largement ouvertes (d’Al Hoceima, Tanger, Azemmour, Essaouira,
Agadir, Cintra) ; seule la baie de Dakhla est relativement fermée.
A. La côte méditerranéenne
Elle se présente sous la forme de quatre grandes concavités de dimensions variables. Après la plage de
Saïdia à l’est, la première concavité longue d’environ 80 km débute à partir de Ras et Ma et est séparée de la
suivante par le promontoire du Cap des Trois Fourches. Dans cette portion, un cordon littoral étendu sur
24 km sépare de la mer, la lagune de Nador. La 2e concavité de dimension comparable à la précédente,
s’étend à l’ouest jusqu’à Ras Tarf qui limite à l’est la baie d’Al Hoceima. De cette dernière jusqu’à Sebta, la
côte se dessine en une large concavité très ouverte où elle change progressivement d’une direction est-
ouest à une direction sud-nord entre Mdiq et Fnidek. L’ensemble de la côte est une succession de falaises
qui alternent avec des plages de petites dimensions.
188
La côte méditerranéenne correspond au rivage d’une montagne qui pratiquement domine la mer, sauf là
où s’intercalent de petites plaines littorales limitées par un cordon marin et dunaire. C’est ce qui explique la
différenciation entre les côtes découpées en falaises de la chaîne rifaine et les côtes basses et sableuses à
partir du Cap Mazari vers le nord. La mer ne connaît ni courants forts ni haute barre ; la marée semi diurne a
une faible amplitude (0,8 à 1 m) ; un courant fréquent de dérive littorale prend une direction sud-nord dans la
région de Tétouan. Dans le relief continental il faut différencier trois sections.
Le profil transversal de la montagne à la mer débute par des glacis de raccord au pied des versants mon-
tagneux ; ces glacis, découpés en collines, atteignent localement la mer et constituent avec leurs très beaux
points de vue, des sites intéressants pour l’urbanisation et l’implantation touristique ; mais les problèmes de
stabilité se posent souvent pour les constructions dans ces terrains de flysch à puissantes altérites, dans le
cadre climatique pluvieux de la chaîne rifaine. Le profil s’abaisse, au débouché des oueds, à travers de
petites plaines, parfois subsidentes et marécageuses, avec quelques milieux humides intéressants sur le
plan biologique, mais fortement menacés par la pollution. Ces plaines qui connaissent par ailleurs fréquem-
ment des inondations désastreuses, liées au régime torrentiel fortement chargé des cours d’eau, sont actuel-
lement en voie d’urbanisation dans la zone Tétouan-Martil. Enfin, le profil se termine par un cordon littoral et
dunaire rectiligne, limité à une centaine de mètres de largeur, lié à la régularisation opérée par le courant de
dérive. Ce milieu est le plus urbanisé et le plus convoité par l’expansion touristique ; c’est le milieu où
s’implantent les ports et marinas de plaisance. C’est un milieu fortement menacé, d’abord de suroccupation
de cet espace limité, ensuite de rupture dans l’équilibre de son bilan dynamique et sédimentaire.
Dans le Maroc oriental, la côte s’individualise. Depuis la frontière et jusqu’à Ras el Ma, il s’agit de larges
plages sableuses ininterrompues sur les deux rives du débouché de la Moulouya ; la côte est particulière-
ment alignée et rectiligne, bordée vers l’intérieur par d’importantes accumulations dunaires, actuellement
fixées par le couvert végétal, mais d’une grande fragilité, du fait de la forte pression sur ces milieux. À partir
du redan de Cap de l’Eau, la côte est plus variée ; elle s’organise en un grand arc de cercle à l’est du Cap des
Trois Fourches qui voit se succéder des falaises vives et découpées par de profondes vallées, taillées parfois
sur 70 m de hauteur dans un matériel terreux rouge, sur 30 km le long du piémont des Kebdana puis une
étroite flèche sableuse isolant la lagune de Bou Arg, entre Arkmane et Nador, dans un secteur nettement
subsident.
189
C. La côte atlantique
Elle est caractérisée par l’absence d’indentation importante ; les caps et les redans ne sont néanmoins pas
rares (Larache, Jorf Lasfar, Cap Beddouza, Cap Ghir, Tarfaya, Boujdour). Elle montre une large concavité de
Tanger à Rabat, une convexité qui s’étend de Rabat à cap Ghir suivie d’une concavité qui débute avec la baie
d’Agadir et se termine au sud par le cap Tarfaya. Elle est constituée de plages sableuses, de platiers rocheux,
de falaises mortes ou vives et de grandes dunes dominant immédiatement la côte. Ces structures sont inter-
rompues au niveau des embouchures d’oueds et de lagunes. Les plages de sable sont largement représen-
tées au nord de Tan Tan tandis que le secteur situé plus au sud est plutôt caractérisé par une falaise vive qui
tombe plus ou moins directement dans l’océan.
Le littoral atlantique correspond au rivage bordant de bas plateaux, sauf au droit du Haut et de l’Anti-Atlas ;
ceci se justifie même dans le Tangérois et la région du Loukkos où le plateau du Habt sert de transition, au
pied du Rif ; dans la région de Rabat, le bas plateau atlantique s’abaisse depuis les hauteurs des Zemmour-
Zaër ; la côte correspond à une plaine de niveau de base au droit de la région du Rharb et des plaines plus dif-
férenciées dans la Chaouïa et les Doukkala. Partout les reliefs élevés sont donc éloignés de la mer. Mais cela
n’empêche pas la présence de longues sections en falaises plus ou moins vives bordant des plateaux et
interrompues par des sections de plages.
Le milieu marin est caractérisé par un dynamisme important, avec une houle permanente, de forts cou-
rants de marée. La granulométrie des sables de plages montre l’importance du tri, le transport vers le large
des sables fins et des produits en suspension, l’importance de l’érosion des falaises et des plages. Les maté-
riaux sont constamment repris par un courant de dérive de direction nord-sud. Les vents sont forts, avec une
dominance des vents d’ouest ; ils expliquent l’importance des remaniements éoliens et le prélèvement de
sables sur les plages, l’édification de dunes vives à proximité du haut de plage ; ces dunes vives peuvent
recouvrir des dunes plus hautes et plus anciennes, parfois façonnées en falaises. Les cordons marins et
dunaires gênent le drainage d’un certain nombre de plaines de niveau de base, notamment la plaine du
Rharb, et expliquent la nature marécageuse de ces milieux.
La coupe idéale du rivage atlantique est la suivante, notamment dans la région de Rabat : Au-dessus d’un
estran rocheux à vasques, inscrit dans des calcarénites plus ou moins anciennes, s’étend une courte plage
sableuse, pouvant passer localement à des plages plus étendues dans des zones d’accumulation récente
comme la région de Tanger ou de Mehdia. Le haut de plage est façonné en dunes vives qui gravissent les
falaises proches. Parfois la falaise domine directement la mer ; ou du moins elle peut être atteinte lors des
tempêtes. Sa hauteur peut atteindre 30 à 50 mètres et est façonnée dans des grès dunaires plus ou moins
consolidés du Pleistocène récent. Derrière cette dune fixée s’étend l’oulja, une dépression longiligne plus ou
moins drainée et plus ou moins perchée, pouvant atteindre 2 à 3 km de large. Ce n’est qu’à l’arrière de cette
dépression que l’on trouve une seconde falaise, plus ancienne, recoupant des grès marins et dunaires qua-
ternaires ou le substratum géologique. Souvent, la dune littorale peut être interrompue par des passes
qu’emprunte la mer pour pénétrer l’oulja et y constituer des lagunes immergées à marée haute, maréca-
geuses à marée basse. Les implantations humaines se développent sur les plages littorales là où elles sont
assez étendues dans l’oulja et notamment sur les bords des plages développées derrières des îlots du cor-
don dunaire interrompu, c’est-à-dire dans des sites d’eau calme mais constamment renouvelée, ou même
sur les bords de lagunes. Le pied de la falaise morte constitue un autre site d’implantation, car suffisamment
bien drainé. Mais beaucoup de secteurs de ce littoral atlantique restent sous-utilisés et peu fréquentés pour
des raisons physiques (fréquence du vent, mer trop agitée, relief littoral trop raide) ou à cause de leur éloigne-
ment par rapport aux centres urbains et aux grands centres de loisirs.
190
1.2.3. Lagunes, estuaires et systèmes adjacents
Nombreux sont les cours d’eau qui se jettent en mer. Parmi eux trois grands fleuves sont permanents : la
Moulouya en Méditerranée, le Sebou et l’Oum-er-Rbiâ sur l’Atlantique. Les autres oueds méditerranéens se
comportent plutôt en torrents venus du Rif. Il s’agit des oueds Martil, Laou, Ghis, Nkor et Kert. Ils reçoivent
peu d’affluents et drainent des bassins versants de dimensions modestes ; mais leurs apports sont impor-
tants. Sur la façade atlantique, les autres principaux cours d’eau sont le Loukkos, le Bou Regreg, le Tensift et
le Souss. D’autres oueds atlantiques (Massa, Draa) beaucoup moins importants, sont assez souvent fermés
à leurs embouchures par des bouchons sableux, dus à l’action hydrodynamique de l’océan, comme beau-
coup d’autres oueds sahariens.
Le Maroc possède plusieurs lagunes littorales qui présentent un intérêt à la fois biologique, économique et
paysager. Il est possible de reconnaître, le long du littoral marocain, un certain nombre d’écosystèmes qui
détiennent une importance nationale, voire internationale. On retiendra sur le littoral méditerranéen l’embou-
chure de l’Oued Moulouya, l’imposante lagune de Nador, l’embouchure de l’oued Laou et la lagune de Res-
tinga-Smir. Sur le littoral atlantique il est faut signaler les marais de Larache avec l’embouchure de l’Oued
Loukkos, Merja Zerga qui présente une importance internationale pour l’hivernage de l’avifaune migratrice, le
lac d’eau douce de Sidi Boughaba, le complexe lagunaire Sidi Moussa-Oualidia, l’embouchure de l’oued
Massa, aménagée en parc national, Foum Assaka, les embouchures des oueds Draa, Chebeika, Amma
Fatma, El Ouar, la lagune de Khnifiss et la baie de Dakhla.
Le Maroc possède trois façades maritimes : la Méditerranée, le détroit de Gibraltar et l’océan Atlantique.
Chacune se caractérise par une morphologie et une dynamique particulières et offre des potentialités
d’occupation humaine qui lui sont propres et qui sont définies par la nature géomorphologique du rivage, son
tracé, son profil transversal, par le relief continental et sous-marin qui frangent ce rivage et par la dynamique
marine du secteur et notamment l’agitation de la mer, la force des courants et leur direction.
191
Le littoral marocain représente un environnement fragile en équilibre instable. Dans de nombreux sec-
teurs, il est constitué de falaises modelées dans des roches tendres (marnes et schistes du Rif) ou faible-
ment cimentées (calcarénites superficiellement encroûtées, mais restées friables en profondeur). Les
risques de rupture sont évidemment très grands.
Les secteurs de plage sont dominés par des falaises mortes, inaptes à fournir le stock nécessaire à
l’engraissement côtier. Dans les zones où le littoral est constitué de dunes vives, la recolonisation végétale
est souvent malaisée pour des raisons climatiques, alors que la constance et la vigueur de certains vents, de
secteur ouest ou de secteur nord-est réactivent rapidement les constructions dunaires en voie de fixation).
Cette fragilité du milieu littoral s’explique aussi par l’exploitation abusive et la suroccupation.
Le littoral représente en effet une ressource précieuse, mais limitée parce qu’il correspond à une étroite
zone de contact entre le domaine continental et le monde sous-marin. Toute occupation abusive aboutit à la
consommation définitive de cette ressource, sans possibilité de reproduction. Par contre l’exploitation ration-
nelle et légère permet à cet espace de se perpétuer sans perdre de sa qualité.
La menace d’une rupture de cet équilibre est permanente. C’est le cas des plages où d’importants inves-
tissements ont été consentis pour la promotion touristique et balnéaire. L’ablation du sable de la plage suivie
par l’affleurement d’écueils rocheux (exemple de la plage des sables d’or au sud-ouest de Rabat) ou l’attaque
directe des constructions édifiées sur le haut de plages (exemple de la baie de Tanger ou de Mohammédia)
constituent des cas de dégradation difficilement réversible.
Dans les ports, le risque d’ensablement est non moins dangereux parce qu’il entraîne la réduction de la
capacité d’accueil et à l’inverse l’augmentation des frais de maintien et d’exploitation.
La dynamique littorale est basée sur un système d’échange continu entre les terres émergées et le milieu
marin, cet échange se faisant dans les deux sens. Les continents fournissent à la mer des matériaux sous
différentes formes (solutions, et particules grossières ou en suspension). L’énergie des eaux marines pré-
lève, en plus de ces apports, des matériaux directement érodés sur la ligne côtière. Ces matériaux sont redis-
tribués vers la mer, ou repoussés sur le littoral, parfois repris par le vent et amenés plus ou moins loin à
l’intérieur. Deux types de tendances peuvent être distingués : une tendance à l’érosion littorale par recul du
trait de côte, ou au contraire une tendance à l’engraissement sous l’effet de l’accumulation de matériaux de
progradation sur le littoral. Le long du littoral marocain, les exemples relevés de recul de la côte et d’ablation
du sable des plages semblent être plus fréquents, même si les cas d’ensablement ne sont pas rares.
La ligne de rivage s’établit selon un tracé particulier en fonction de la dynamique en cours. Chaque portion
du littoral est dépendante des secteurs environnants parce que la côte est le lieu d’échanges latéraux impor-
tants de matériaux véhiculés par des courants côtiers et notamment la dérive littorale. La tendance générale
est souvent une tendance de régularisation par entraînement des matériaux issus d’un point donné fournis-
seur, vers des zones dont les fournitures sont moindres. Dans les situations stables, la redistribution est réa-
lisée selon un bilan conservant à chaque secteur un « budget » équilibré.
Deux séries de causes peuvent intervenir pour transformer la tendance globale d’évolution des côtes :
– des causes naturelles ou indirectement influencées par l’action humaine ; il s’agit de modifications à long
terme (relèvement général du niveau des mers) ou de la succession d’événements météorologiques
particuliers par leur violence ou au contraire leur faible ampleur (tempêtes par exemple) ;
– des causes en relation directe avec une explication anthropique, agissant soit sur les échanges trans-
versaux entre le continent et la mer, soit sur les échanges longitudinaux perturbant le transit latéral des
matériaux.
192
La succession d’évènements caractérisés par une violence particulière des tempêtes entraîne l’attaque
des littoraux et l’entraînement de matériaux vers le large. Les études semblent montrer une accentuation de
la fréquence et de la force des tempêtes dans les dernières décennies.
Le relèvement du niveau de la mer, d’ampleur non encore précisément fixée, agit sur la dynamique
côtière. La valeur moyenne avancée par certains auteurs (1,5 mm/an) est suffisante pour expliquer la ten-
dance générale à l’érosion des côtes, notamment les plages et les basses falaises en matériel non consolidé.
En plus du danger d’immersion des côtes très basses (deltas, basses vallées littorales, marais), le relève-
ment amène une exagération de l’attaque érosive des rivages et donc leur recul.
La mise en place de barrages-réservoirs sur les grands fleuves a favorisé la rétention d’une grosse partie
des sédiments qui normalement atteignaient la mer. Les barrages retiennent surtout la charge de fond des
rivières (matériaux transportés par saltation et charriage). La localisation des barrages joue un rôle fonda-
mental ; en effet plus la retenue est proche du trait de côte, plus le déficit côtier en matériaux de provenance
fluviale est accusé. Il se trouve qu’au Maroc la plupart des grands barrages, ont été implantés en montagne
ou au débouché de l’oued en plaine, ce qui a moins d’impact sur le bilan sédimentaire côtier.
L’homme transforme aussi cet échange transversal en agissant directement sur le milieu côtier, notam-
ment en consolidant les matériaux susceptibles de fournir à l’érosion marine les sédiments équilibrant le bud-
get littoral. La construction de routes en corniche et l’urbanisation de la dune bordière ou même de la plage
elle-même empêchent la mer de prélever sur ces milieux – en cas de tempête – les matériaux susceptibles
d’alimenter le bas de plage. L’action marine se concentre alors sur la plage elle-même, la fait reculer ou du
moins en transforme la composition granulométrique, par prélèvement des sables fins et concentration des
sables grossiers.
L’appauvrissement du bilan est exagéré par l’homme, partout où des sables sont prélevés dans les plages
ou les dunes bordières. En effet, les sables côtiers sont souvent bien triés et constituent pour cela d’excel-
lents matériaux de construction, fortement recherchés. La rareté de ce matériel et son prix élevé ont souvent
conduit à leur prélèvement illégal dans le domaine côtier, au détriment de la stabilité du rivage. Cela contri-
bue donc à exagérer l’action érosive de la houle et des courants côtiers à cause de la réduction du potentiel
sédimentaire capable de maintenir l’équilibre. L’exemple est rapporté des multiples noyades enregistrées à
Mehdia, du fait de la vente de sable prélevé sur le haut de plage en hiver, à laquelle a succédé la formation de
grosses cuvettes d’érosion, par érosion sur le bas de plage, très dangereuses pour les nageurs isolés.
L’homme agit aussi sur les transferts latéraux de matières en aménageant des obstacles perpendiculaires
au trait de côte. Des atterrissements ont lieu contre les jetées qui freinent le courant, alors qu’au-delà, les
portions du littoral privées des matériaux qui leur parvenaient, connaissent le démaigrissement et le recul.
La côte tétouanaise au nord des falaises de Koudiet Taïfor offre notamment l’exemple d’un littoral régula-
risé, mais où l’établissement des trois ports de M’diq, Kabila et Smir, a été à l’origine d’une transformation du
système de transfert des sables ; c’est pourquoi se succèdent des secteurs d’érosion et des milieux
d’accumulation.
Ces déséquilibres compromettent l’aménagement lui-même et menacent la ressource « littoral » dans son
fondement en gommant pratiquement des rivages équilibrés et d’une rare qualité sur le plan esthétique. Le
littoral devient alors une zone dangereuse, inexploitable pour les loisirs. Mais il existe des cas extrêmes où
l’érosion a gommé pratiquement des rivages équilibrés et d’une rare qualité sur le plan esthétique.
L’homme agit enfin en polluant les littoraux et les estuaires. La côte est le lieu où débouchent les eaux flu-
viales et les eaux de nappes phréatiques que l’homme a souvent fortement polluées. Les villes côtières et de
nombreuses industries déversent directement leurs eaux usées en mer, sans traitement. L’activité maritime,
notamment à proximité des ports contribue aussi à la pollution des eaux (déballastage des navires notam-
ment). Des nuisances dangereuses pour l’activité biologique végétale et animale et pour la santé de l’homme
affectent de plus en plus le milieu littoral et en rendent l’exploitation de plus en plus difficile, en réduisant
notamment les potentialités de loisirs. C’est avant tout à proximité des grandes villes de la côte atlantique
193
(Rabat-Mohammedia-Casablanca) que ces phénomènes s’exagèrent alors que la pollution est moins accusée
à l’intervalle de ces lieux de concentration humaine et industrielle. Le tourisme, notamment le tourisme
national, se développe surtout à proximité des agglomérations urbaines ; l’effet de la pollution n’en est donc
que plus dangereux. Là où de gros centres de loisirs s’implantent, loin des villes et des industries, l’absence
de précautions relatives aux rejets d’eaux usées et l’accumulation des déchets, constituent un risque de pol-
lution grave, notamment lors de la haute saison touristique.
Mais la pollution qui menace le littoral s’explique aussi par des raisons externes. Le cas du Maroc est pour
cela concluant du fait de sa proximité des grandes voies de passage des principales lignes maritimes de
transport des hydrocarbures (20 % environ du tonnage total mondial des cargaisons pétrolières transitent par
la Méditerranée venant des pays producteurs du Moyen Orient et se dirigeant vers les pays consommateurs
d’Europe et d’Amérique. L’accident survenu dernièrement au pétrolier Kharg 5 et la marée noire qui en a
résulté a bien mis en évidence cette vulnérabilité du littoral marocain.
L’importance du littoral, pôle d’attraction des activités et des installations (oulja agricole, urbanisation
côtière, activité portuaire, activité industrielle, tourisme), explique son poids dans l’économie nationale.
1. Analyse historique
Les littoraux marocains sont restés longtemps sous-occupés. Le basculement des forces vives vers la côte
a commencé il y a 50 ans et se poursuit depuis, à un rythme soutenu (Bennouna, 1992 ; Naciri, 1992 ; Zaïm,
1992).
Le retard dans l’acquisition de la côte d’un rôle central dans le développement du pays s’explique par l’his-
toire. Au Moyen Age, les populations côtières marocaines ont joué le rôle d’intermédiaires avec les ports
méditerranéens d’Europe et avec le commerce plus lointain longeant la côte atlantique. Les villes méditerra-
néennes du littoral jouaient le rôle d’étapes dans le cadre des échanges Afrique / Méditerranée. La côte
méditerranéenne représentait alors un milieu d’ouverture pour le Maroc et a connu le développement de
sites importants, notamment les villes de Sebta et de Tanger, en plus d’une multitude de petits ports (Naciri,
1992). La fortune maritime de Salé est célèbre, par ailleurs. Mais à partir du XVIe siècle, la côte est devenue
une zone répulsive, du fait des tentatives d’implantation des Portugais et Espagnols. Le littoral devient alors
une ligne de défense et un espace de confrontation, avec tout le long, des marabouts et des forts militaires.
Depuis l’occupation des présides et avec l’installation d’une situation de confrontation avec les pays de la
façade européenne, les villes se sont repliées sur elles-mêmes (Naciri, 1992). Avec le protectorat, cette situa-
tion de marginalisation s’est exagérée avec la nouvelle frontière longeant la crête rifaine (Zaïm, 1992). Le litto-
ral est devenu aussi enclavé, sinon plus que les vallées montagneuses, alors qu’en Europe il a attiré les
hommes et les activités.
En ce qui concerne l’Atlantique, avec la pénétration européenne, la côte redevient un attrait pour les
hommes et les activités économiques, plus particulièrement à partir des années 50. Les densités rurales les
plus fortes – le Tadla, les oasis et le Sebou mis à part – sont localisées dans les communes littorales (diurne
194
Atlas, Rif oriental, axe atlantique central Safi-Kénitra). Les valeurs les plus fortes sont enregistrées dans les
régions de Nador et de Rabat. La croissance et l’extension des villes sont les plus rapides sur le littoral, avec
notamment le développement de la conurbation Casablanca-Kénitra. Dans les centres méditerranéens, tous
développés originellement à l’écart de la côte, sur des promontoires défensifs, l’extension s’est orientée vers
le trait de côte et les zones de plage (Tanger, côte de Tétouan ; Rharbi, 1996 ; Taouil & Youbi, 1991).
L’industrie a elle aussi cherché la localisation côtière (Mohammédia, Safi, Jorf Lasfar, Nador). Mais c’est
sans doute le tourisme qui a le plus recherché l’implantation littorale. La majorité des investissements
s’oriente vers la zone côtière et cette tendance n’est pas démentie par les projets actuels d’équipement tou-
ristique, que ce soit pour le tourisme international ou national (Sakrouhi, 1990).
La population du littoral atlantique représentait 19,4 % en 1936 et 54 % en 2000. Son taux d’accroisse-
ment est estimé à 5 %. Les deux wilaya de Casablanca et Rabat concentrent à elles seules 62 % de cette
population littorale. La population littorale méditerranéenne a connu une augmentation moins forte (2,3 %
durant la dernière décennie et 3 % entre 1960 et 1990).
La côte joue le rôle de pôle structurant de l’économie nationale, du fait de la concentration démographique,
industrielle (80 % des effectifs permanents des industries), touristique (50 % de la capacité d’accueil) et
commerciale (92 % du commerce extérieur).
Le littoral atlantique concentre les principales activités : textile, chimie, industrie mécanique et électrique.
77 % des unités sont concentrées sur la côte atlantique, notamment dans les grandes villes. Cette même
zone accueille 78 % des investissements industriels du Maroc.
L’axe Safi-Kénitra est l’espace structurant majeur. L’essentiel des investissements s’y réalise, notamment
dans les villes portuaires. Sur la Méditerranée, Tanger et Nador représentent les deux pôles industriels, avec
la sidérurgie, le textile, la confection. Le redéploiement profite à la ville de Tanger qui occupe une position
devenue primordiale.
Mais, comparée aux littoraux des autres pays méditerranéens (Plan Bleu, 1988, 2004), la côte marocaine
peut paraître relativement sous-occupée, sauf dans certaines zones particulières, entre Rabat et Casablanca,
entre Sebta et Tétouan ou aux environs d’Agadir. Mais le rythme de littoralisation est rapide et seule une anti-
cipation pourrait permettre d’éviter les formes de dégradation déjà constatées.
La côte méditerranéenne du Maroc souffre de son faible développement, mises à part la région de
Tétouan et celle de Nador. Le retard dans l’implantation d’activités économiques est-il le résultat de la margi-
nalisation de cette côte au profit de l’Atlantique ? On peut aussi se demander pourquoi la dimension méditer-
ranéenne est-elle si peu présente sur ce littoral et pourquoi il y a si peu d’articulation avec la côte espagnole
qui lui fait face (Zaïm, 1992) ?
Est-ce dû aux difficultés d’accessibilité, enregistrées sur 80 % de cette côte qui reste pratiquement vierge
du fait du manque d’infrastructures de transport, du retard dans l’électrification et de l’exiguïté des res-
sources en eau aménagées et mises à la disposition du développement. D’ailleurs, la région ne vit pas de
ressources générées par son littoral, alors que les autres ressources continuent à représenter l’essentiel : la
contrebande avec les présides, les revenus des émigrés et la culture du cannabis. Le progrès ne peut se
concevoir que dans le développement de ressources propres à la région, sur la côte, tout en prenant en
considération les risques de l’occupation excessive du trait de côte et du développement du tourisme de
masse, responsable de la dégradation du rivage.
L’histoire est importante pour expliquer la situation du Maroc méditerranéen. La zone de Tanger, ouverte
sur le commerce international a connu une prospérité factice que l’on essaie de redynamiser aujourd’hui. La
côte rifaine (zone du protectorat espagnol) a vécu sur ses ressources propres et n’a pas connu de développe-
ment. La côte orientale a surtout connu un développement agricole.
Longtemps, le littoral méditerranéen n’a pas connu d’intégration du fait de sa subdivision en 3 régions,
avec des capitales éloignées de la côte (Rabat, Fès et Oujda). Il n’y a pas eu de création de structures
195
d’accueil pour l’investissement de l’argent disponible. Ce dernier s’est orienté vers la spéculation immobi-
lière.
Un autre problème réside dans la présence de frontières à proximité de chaque ville importante (frontières
de Sebta, de Melilla et de l’Algérie) ; d’où la difficulté de développer une industrie productrice (Zaïm, 1992).
L’urbanisation est déjà excessive (Rharbi, 1996 ; Snoussi & Bensari, 1996 ; Berriane, 1994). La forme clas-
sique est celle des agglomérations qui développent un front de mer. La deuxième forme est celle de l’urbani-
sation à relier aux loisirs balnéaires. Celle-ci peut souvent se réaliser de manière non totalement
réglementaire (Berriane, 1992).
L’urbanisation touristique planifiée est en pleine expansion, sur la côte tétouanaise (Chikhi & al., 1991 ;
Taouil & Youbi, 1991), dans la région de Rabat-Casablanca ou autour d’Agadir. L’urbanisation progresse aux
dépens des espaces vierges et ne laisse que de rares fenêtres, sans doute provisoires. La privatisation de
fait de cet espace littoral tend à devenir réelle, même si elle est souvent dénoncée.
Le cas de Martil est celui d’un petit centre côtier qui a connu le développement du tourisme national popu-
laire et qui a enregistré une forte extension urbaine. La population de la ville est multipliée par 4 en été, par
des touristes résidant dans les campings, dans les quelques hôtels de la ville, mais surtout et de plus en plus
dans les résidences secondaires, utilisées par voie de location (Berriane, 1994). Cabo Negro connaît par
contre une urbanisation haut de gamme pour répondre aux besoins des classes aisées. Le site collinaire de
Cabo Negro et son éloignement relatif par rapport à Tétouan et à la route principale expliquent cette spécifi-
cité. Le style méditerranéen de la station en est d’ailleurs le reflet.
La bande côtière entre Rabat et Casablanca connaît une urbanisation en extension rapide (Berriane &
Laouina, éds, 1993). Les plages et leurs environs proches sont les plus fortement occupés et de plus en plus
construits de manière définitive. La zone la plus proche de la mer, entre la route et le rivage est la plus forte-
ment sollicitée. De l’autre côté, la progression ne fait que commencer. La fenêtre de l’oued Yquen constitue
une exception de taille le long de la côte. Les anciens cabanons occupant le domaine public ont pourtant été
remplacés par des constructions souvent cossues ou par des résidences. Dans ces extensions, une bonne
partie répond de plus en plus à des besoins en logement permanent. La charge humaine est donc appelée à
ne plus être saisonnière.
L’occupation littorale revêt par ailleurs des formes non réglementaires, dans beaucoup de régions. C’est le
cas dans le nord marocain où la demande dépasse celle des seuls habitants de la région. Les versants domi-
nant les baies et criques de la côte rifaine et le rivage lui-même sont la proie d’une urbanisation de fait qui
dégrade fortement l’esthétique et la dynamique de ces rivages fragiles (Berriane, 1994). Les interdits n’ont
pas suffi à arrêter ce mouvement initié par la spéculation sur des terrains, autrefois délaissés. Certaines opé-
rations immobilières ont essayé d’acquérir un statut de légalité, tout en se développant de manière non
réglementaire sur le domaine public maritime. C’est le cas à Stiha. L’érosion côtière a d’ailleurs vite démon-
tré le caractère déséquilibré de cette opération, puisque des tempêtes hivernales ont fortement endommagé
les constructions de première ligne et grignoté la plage, base de cet aménagement.
Les ports de plaisance sont en pleine expansion. Ce développement s’explique par la position du Maroc au
point de rencontre de la plaisance méditerranéenne et des grands voiliers effectuant de grands voyages à
partir de l’Europe. De nombreux sites ont été sélectionnés (35 sites) pour une réalisation à plus ou moins
long terme (8 sur la Méditerranée et le reste sur l’Atlantique). La réalisation de ce programme va encore plus
accentuer la pression sur le littoral, notamment dans les sections de concentration des activités. Ces ports
196
peuvent, s’ils ne sont pas précédés d’une étude d’impact sérieux, occasionner le déséquilibre des transits
sédimentaires côtiers et causer des érosions accentuées ou des cas d’ensablement. L’urbanisation qui
accompagne ces ports crée par ailleurs, d’autres problèmes de pollution (Ramdani & al., 1997).
Le tourisme a été choisi comme moyen de développement de la région nord du Maroc, et de la côte
tétouanaise notamment, dès les années 60 (Berriane, 1992) :
A. De 1965 à 1973, on enregistre l’intervention continue de l’État avec des incitations au secteur privé et
un investissement direct ; c’est l’époque du développement du tourisme international dans des stations ins-
tallées ex-nihilo entre Tétouan et Sebta et à Tanger. Cet aménagement volontaire visait essentiellement à
offrir des moyens à une région en difficultés, liées au marasme économique. Les produits de la pêche prati-
quée en Méditerranée sont surtout dirigés vers Sebta et Melilla alors que les ports nationaux ont un trafic
pratiquement nul.
Or le littoral est très accueillant et le tourisme international est demandeur en loisirs balnéaires, d’autant
plus qu’il s’agit d’une zone proche de l’Espagne.
Dès le plan triennal 1965-67, le tourisme est érigé comme secteur prioritaire. L’État va s’investir à encoura-
ger cette activité par différents moyens (crédits, exonérations, investissements directs, infrastructures).
Trois stations voient le jour, Cabo Negro, Mdiq et Restinga. Ces stations devaient d’abord répondre aux
besoins du tourisme de groupe (villages de vacances, composés d’appartements, bungalows et chalets),
autour de plages privatisées. Les implantations prennent une allure linéaire sur le littoral, à l’écart des centres
préexistants, Martil notamment. Le fonctionnement des villages de vacances est celui de clubs privés fer-
més, organisant des excursions programmées peu ouvertes sur le pays et la société. Ils sont donc peu inté-
grés à la région et souvent sans réel impact direct sur elle (peu d’emplois locaux, peu d’achats dans la
région).
B. De 1973 à 1983, les investissements baissent et le tourisme étranger recule fortement. Le repli
s’explique par le détournement de la demande sur le sud du Maroc (littoral fonctionnel toute l’année). Les
investissements se réduisent et de plus en plus, les équipements réalisés sont vendus à des particuliers.
C. À partir de 1980, on enregistre une progression forte du tourisme national et la reprise des aménage-
ments, mais avec un caractère plus immobilier. Cette date correspond à la mise en vente d’appartements et
de chalets à des nationaux. Ce remplacement de clientèle amène des changements sur le plan des amé-
nagements (Berriane, 1994).
Le changement s’explique par le fait que le nord du Maroc, Tanger et la côte de Tétouan exercent une
séduction particulière pour les Marocains (proximité de l’Europe et possibilité d’achat multiples, en plus du
potentiel de cette côte en matière de tourisme balnéaire). Les équipements réalisés pour le tourisme inter-
national vont faciliter l’installation d’un tourisme national massif. Depuis, de nombreux établissements ont
été créés, avec de nouveaux modèles d’hébergement essentiellement résidentiel et privatif. La proportion
occupée par les villages de vacances va par contre baisser.
La Marina et les résidences allant avec deviennent le modèle le plus représentatif (Marina-Smir, Kabila). De
nouveaux promoteurs apparaissent sur le marché, avec en particulier, des sociétés anonymes. On assiste au
glissement progressif de projets à composante touristique de base à de simples opérations immobilières.
Tout le front de mer est ainsi en voie de durcification, accompagnée d’une sélection sociale, alors que
197
l’aménagement en deuxième ligne est rare. La suroccupation linéaire ne laisse que très peu d’espace aux
fenêtres inoccupées, capables de recevoir l’estivant de passage ou le campeur.
La concentration des humains et des activités dans le domaine littoral amène forcément des conflits entre
activités, portant parfois préjudice à certaines de ces activités. On note par ailleurs des impacts environne-
mentaux influençant le milieu littoral. Aussi bien la littoralisation et l’urbanisation excessives, l’activité indus-
trielle, la pêche et l’aquaculture, l’implantation portuaire (de commerce et de plaisance), la fréquentation des
plages, les loisirs côtiers et le tourisme balnéaire, mais aussi les transports maritimes face aux côtes maro-
caines, toutes ces activités produisent des nuisances plus ou moins importantes. Le problème vient de la
sur-occupation, de l’excès de densification de l’habitat et du trafic, de l’artificialisation, de la pollution de l’eau
marine, de l’air et de l’accumulation de déchets.
Plusieurs activités, dont des industries se développent sur le littoral avec des rejets présentent des dan-
gers multiples pour la biodiversité. Cependant la plus grande préoccupation réside dans l’augmentation très
rapide des réalisations et projets d’infrastructures immobilières. La « bétonisation » devient malheureuse-
ment une réalité et bien des sites de la côte sont aujourd’hui sérieusement menacés. L’extension des agglo-
mérations contribue par exemple à la réduction des espaces tampons tels que les schorres et les zones
humides.
Plusieurs exemples, le long de la côte méditerranéenne marocaine peuvent être relevés d’Est en Ouest
(Idrissi & al., 1994) :
– Les menaces sur les marais de Chararba sont l’assèchement et l’extension des cultures. D’autre part, la
faune y est constamment dérangée par les activités humaines et perturbée par le braconnage et la
chasse.
– Au sein de la lagune de Nador, plan d’eau de grande dimension, les risques d’une dégradation accentuée
sont élevés et s’expliquent par la réduction de la passe qui se trouve à l’origine du confinement croissant
(diminution de la circulation des eaux). Des arrivées d’eau douce par effluents issus de la plaine irriguée
provoquent une dessalure et une eutrophisation du milieu accentuées par l’adduction de polluants indus-
triels et des eaux usées des petits centres dominant la lagune.
198
199
– La faune du secteur compris entre le Cap des Trois Fourches et Oued Laou est menacée par des agisse-
ments directs des plongeurs sous marins qui font parfois un ravage irrémédiable comme celui de tirer
sur des phoques ou pêcher excessivement. Ici, l’effectif de phoques a diminué de telle sorte que la sur-
vie de l’espèce devient hypothétique dans ce secteur unique.
– L’évolution de la lagune de Smir illustre parfaitement les mécanismes responsables de l’altération puis
de la quasi-disparition d’un milieu qui était parmi les plus riches du pays. Avec la perte de ce patrimoine,
la région de Tétouan perd un espace écologique, récréatif, éducatif, social et touristique, d’une qualité
unique pour la production faunistique et d’un intérêt exceptionnel pour les oiseaux. Mais ce site d’impor-
tance internationale est très vulnérable. L’urbanisation détruit les habitats et les rejets polluent les
marais. La construction du port de Kabila et celle du barrage ont créé de fortes perturbations.
Sur le littoral atlantique, le niveau d’exploitation des terres étant très élevé, la frange côtière se trouve
soumise sur de vastes portions à des pressions croissantes. Heureusement, ce littoral recèle encore des
secteurs épargnés.
– Au nord, l’embouchure du Loukkos et les marais de Larache subissent actuellement des modifications
qui risquent de compromettre leur avenir : drainage, irrigation, exploitations agricoles et industrielles et
extension de la ville de Larache. Certains déchets liquides industriels sont rejetés directement dans les
marais. L’avenir de ces marais est fortement compromis.
– C’est incontestablement dans la lagune de Merja Zerga que l’impact est le plus menaçant. Plusieurs
douars dont 7 dans le périmètre de la réserve avec une population estimée à plus de 10 000 habitants,
exploitent la lagune (pêche de poissons et de coquillages, récolte de joncs) et provoquent un cortège de
nuisances qui accompagnent ces activités. La lagune de Merja Zerga a besoin d’un plan de gestion qui
soit à la hauteur de son importance internationale.
La lagune de Merja Zerga constitue justement un prototype d’un intérêt considérable parce qu’il
comprend une variété de milieux et notamment une zone fluviatile (deltas progradants à l’amont), une
zone lagunaire étendue et une zone littorale de communication avec l’Atlantique.
Ce système lagunaire est actuellement en voie de dégradation par le comblement progressif de la
dépression lié aux atterrissements bordiers en progradation ; l’aggravation de la pollution chimique, issue
du remaniement par les eaux des produits phytosanitaires utilisés par l’agriculture de la plaine du Rharb
s’explique par l’action marine sur la zone des passes, aboutissant à leur fréquente fermeture.
– Au niveau du complexe lagunaire Sidi Moussa-Oualidia se matérialise aussi l’action de la population sur
les espèces et les espaces protégés. On note une urbanisation croissante, l’implantation d’exploitation
maraîchères jusqu’au sein des zones sensibles, le prélèvement continu et commercialisé des pontes
d’oiseaux sauvages. La zone est fréquentée anarchiquement par la population résidente et les vacan-
ciers, ce qui provoque une altération du milieu et un dérangement nocif pour l’avifaune.
– L’archipel d’Essaouira bénéficie d’une protection naturelle du fait de son détachement du continent.
Mais son classement en tant que Réserve Biologique est loin d’être effectif sur le terrain et des actions
d’information et de valorisation seraient utiles pour consolider la position de ce site exceptionnel.
– La terminaison occidentale de l’Atlas domine l’océan avec des pentes couvertes de remarquables peu-
plements d’arganiers. L’urbanisation anarchique de cette côte devient une sérieuse menace, pour une
qualité biologique et paysagère tout à fait exceptionnelle.
– Le Parc National du Souss-Massa a été conçu pour protéger un milieu unique, comportant des espèces
rares ; il se trouve cependant de plus en plus confronté à des problématiques d’espace et à des antago-
nismes sociaux multiples. Une gestion au niveau de la distribution des ressources est indispensable
pour maintenir une certaine qualité « écologique » à l’ensemble.
– Les écosystèmes littoraux sahariens sont d’une manière générale très productifs mais fragiles. Ils
200
offrent des qualités paysagères des plus remarquables, accompagnées de cortèges biologiques souvent
originaux du fait de leur localisation biogéographique. Il est urgent de maîtriser le développement de ces
régions, afin d’éviter des altérations irréparables qui condamneraient la valorisation future d’une des
côtes les plus originales de l’ouest africain.
– Ainsi, la baie de Dakhla, milieu qui était connu pour sa richesse en espèces aquatiques et par l’abon-
dance des ressources halieutiques, connaît ses dernières années une diminution incontestable des cap-
tures. D’autres facteurs constituent une menace pour ce milieu, notamment l’extension de la ville de
Dakhla et l’ensemble des problèmes qui accompagnent un tel développement : pollution, déchets
solides, augmentation de la pression sur le milieu naturel.
– La baie de Cintra, renommée jadis par la présence de baleines qui venaient y passer la période hivernale,
connaît actuellement une occupation humaine anarchique et croissante qui pourrait rapidement porter
préjudice à la qualité esthétique de la baie et une altération de son milieu physique.
– La côte des phoques au nord de Lagwera héberge une population de phoque moine méditerranéen, rela-
tivement importante, mais fragile. La mise en place d’un parc est urgente, car d’une part, la régle-
mentation de la pêche dans la zone n’est pas respectée amenant une surexploitation et une diminution
de la ressource halieutique pour les phoques, et d’autre part, le dérangement par fréquentation accrue
des falaises surplombant les grottes des phoques et des eaux limitrophes aux grottes par les pirogues
de pêcheurs commencent à devenir préoccupants.
D’importantes charges polluantes sont déversées en milieu marin avec une plus forte concentration entre
Kénitra et Casablanca, ainsi qu’à proximité des centres d’industrie chimique de Jorf Lasfar et de Safi.
Les transports maritimes sont une source importante de pollution du littoral, du fait de l’importance du tra-
fic le long des côtes marocaines : 265 navires/jour sur l’axe atlantique dont un grand nombre de pétroliers
géants, 200 navires/jour à travers le détroit de Gibraltar, grand nombre de navires transportant des produits
chimiques et autres substances nocives. La pollution par les hydrocarbures se répercute immédiatement sur
les activités économiques de pêche et d’aquaculture, mais aussi sur la salubrité de la côte et sur son équi-
libre écologique.
201
2.1. La qualité chimique et organique des eaux marines
La dégradation de la qualité chimique des eaux marines est à rattacher au déversement de polluants
liquides et solides, domestiques et industriels. La mer reçoit plus de 90 % de rejets liquides industriels et
une bonne partie des rejets domestiques. Certains rejets sont localisés immédiatement à proximité des lieux
de baignade. Les ports de commerce et les ports de pêche sont particulièrement affectés par la pollution à
cause des produits pétroliers déversés et des substances dangereuses qui y transitent. Dans les régions
d’agriculture riche et dans les sites d’aquaculture, l’utilisation d’intrants contribue à la pollution du littoral, ces
composés étant soit amenés directement par le ruissellement soit à travers les nappes. C’est pourquoi sur
les stations balnéaires examinées, plusieurs présentent des conditions de qualité franchement mauvaises et
seules quatre ont été déclarées de bonne qualité. En plus des rejets terrestres, la mer reçoit les huiles et
hydrocarbures des bateaux de navigation, notamment des pétroliers.
Des zones maritimes à circulation fermée ou calme connaissent des problèmes d’eutrophisation et d’eaux
colorées parfois productrices de nuisances, en liaison avec l’accumulation de substances azotées et phos-
phorées (Idrissi & al., 1994). Cette eutrophisation peut contaminer des organismes marins qui deviennent de
véritables poisons à la consommation. En mer, dans les eaux internationales, le déversement des eaux hui-
leuses des navires contribue à dégrader la qualité biologique de l’eau de mer. Des risques élevés liés au trafic
international de produits pétroliers et de substances dangereuses (supertankers) résultent de la circulation
maritime intense de l’Atlantique et du détroit de Gibraltar.
À cause des rejets urbains et industriels en premier, de la pollution d’origine agricole ensuite et enfin des
rejets de produits, notamment des hydrocarbures en mer, certaines portions du littoral sont fortement pol-
luées et posent des problèmes de dégradation des ressources halieutiques et des problèmes sanitaires plus
ou moins graves. Les estuaires et les lagunes sont les milieux les plus menacés car ils sont abrités et ne
subissent pas l’effet de diffusion par les vagues et les courants que connaissent les littoraux ouverts. Mais la
situation est réellement préoccupante dans les littoraux les plus occupés où la proximité d’effluents domes-
tiques ou industriels explique la très forte pollution. Des cas accidentels d’eutrophisation, en raison d’une
situation climatique (grande chaleur) et océanographique (calme maritime) transforment totalement le milieu
marin sur une large étendue et peuvent avoir d’importantes répercussions, notamment en Méditerranée
(Sakrouhi, 1990 ; Tahiri & al., 1991 ; Laouina, 1999).
La tendance de cette pollution est néanmoins difficile à cerner. Bien sûr le facteur rejets est calculable en
se basant sur l’évolution de l’occupation démographique du rivage et sur les implantations industrielles. Mais
la qualité de l’eau de mer et des organismes vivants marins ne dépend pas linéairement de la quantité et de
la qualité des rejets. L’état physique de la mer au moment de la réception du rejet est fondamental pour
expliquer soit la concentration et l’exagération de l’état de pollution, soit la diffusion des polluants et l’auto-
épuration du milieu. Il faut juste rappeler que la catastrophe de Kharg 5 n’a été évitée que par un concours de
circonstances lié à la direction des courants de houle et au degré d’agitation des eaux. Par ailleurs, les ana-
lyses menées de manière répétitive donnent des résultats qui ne sont pas toujours simples à interpréter. Des
sites proches indiquent des variations de degré de pollution inexplicables. Les variations temporelles sont
aussi très élevées et parfois curieuses.
202
2.2. Physico-chimie des eaux
2.3. Micro-biologie
Les apports domestiques et agricoles sont des terrains fertiles pour le développement de micro-orga-
nismes pathogènes qui représentent un danger pour les baigneurs et pour la santé digestive à travers la
consommation de coquillages crus. Les zones les plus polluées se trouvent à proximité des secteurs forte-
ment urbanisés ou au niveau des estuaires. Dans les zones salubres d’habitude, des phénomènes de conta-
mination périodique sont observés, en particulier lors des périodes pluvieuses (rejets d’animaux emportés
par le ruissellement). Les campings jouent en été le même rôle. Des zones fortement insalubres ont été
détectées (Bas Bou Regreg, estuaire de l’Oum Rbia, débouché de l’oued Laou, la région de Casablanca).
203
3. La menace sur la stabilité des rivages
L’effet du changement global (relèvement du niveau marin) et des aménagements côtiers mal conçus
consiste dans les transformations de la dynamique littorale, avec notamment l’érosion des plages, l’ensable-
ment des ports et l’envasement des zones marécageuses.
La stabilité physique de la côte, base du développement des loisirs et la tendance soit à l’érosion soit à
l’ensablement – envasement représente une problématique majeure des littoraux marocains (MATUHE,
1996 ; SEE, 1998). C’est un indicateur difficile à spatialiser comme à chiffrer car les études disponibles sont
ponctuelles. De nombreuses plages s’appauvrissent en sable (baie de Tanger, Moulay Bousselham, Monica,
Kariat Arekmane). Sur 47 plages examinées par les services de l’Équipement, 7 ont carrément disparu par
érosion, 19 subissent une dégradation intense. La dune bordière est devenue un lieu privilégié d’installation
des résidences secondaires, ce qui réduit les possibilités d’échange sédimentaire entre la mer et le
continent. D’autres dunes ont été détruites par piétinement intense et surfréquentation. Le vent se charge
alors de remanier les sables, ce qui peut aboutir à la destruction de l’édifice éolien, soit à l’ensablement des
routes et des constructions.
La côte méditerranéenne entre Sebta et Cap Mazari est constituée par un cordon marin sableux fermant
des plaines mal drainées, de niveau de base, elles-mêmes comblées par des sédiments terrigènes plus ou
moins vaseux à l’aval, beaucoup plus grossiers vers l’amont. La dérive littorale a déposé le long du rivage un
cordon de sables mélangés quartzeux et bioclastiques, de taille moyenne et fine. Il y a donc naturellement un
équilibre réel entre les apports continentaux fluviatiles et la redistribution des sables par la dérive sud-nord, le
long du rivage (Berriane & Laouina, éds, 1993 ; Laouina, 1999).
Au nord de la Koudiat Taïfor, la construction des ports de pêche et de plaisance a permis de transformer le
système de transfert naturel des sables et à créer des sites d’érosion et des sites d’accumulation.
Le port de pêche de Mdiq, et notamment la jetée de direction nord-ouest – sud-est a contribué à réduire
les apports latéraux dans la partie de la plage qui jouxte immédiatement la zone portuaire. Soumise à une
active érosion, la plage connaît actuellement un recul important que n’arrêtent pas les murs de soutènement.
Cette érosion menace aujourd’hui les installations hôtelières et balnéaires de Mdiq. Les sables évacués de
cette partie de la plage sont remaniés vers la partie nord, quelques centaines de mètres au-delà ; cette partie
connaît au contraire un engraissement évident.
Baie de Mdiq
Le port de Mdiq fut construit en 1963 au pied du flanc nord de Koudiat Taïfor (Cabo Negro) et à l’extrémité
sud d’une longue plage. Avant la construction du port, la situation était stable. Depuis, la côte a subi d’impor-
tantes modifications, avec recul au sud et avancée du trait de côte au nord. La dérive sud-nord remobilise les
matériaux à proximité du port sur 800 m et les dépose plus au nord. Le port est ainsi à l’abri de l’ensable-
ment, mais la plage sud est fortement dégradée.
204
Plage et port de Restinga-Smir (port construit en 1986)
Les sables les plus fins viennent s’accumuler à proximité de la petite digue. Au nord du port, les sables
sont plus grossiers du fait de l’agitation et du vannage des particules fines. Au sud du port, la plage a aug-
menté en largeur. Le courant d’expansion latérale produit un piégeage de sédiments à l’intérieur du port
(Ramdani & al., 1997).
La baie de Tanger
Sur la côte du détroit, la baie de Tanger offre une belle concavité tournée vers le nord-nord-ouest, avec une
plage de sable qui s’adosse à un pays de collines drainées par de courts oueds (Moghagha, Melaleh et
Chatt). La prolongation de la grande jetée du port a favorisé l’accumulation des sables contre la jetée trans-
versale, dans la partie occidentale de la baie. Plus à l’est, le courant, privé d’une bonne partie de sa charge,
s’est mis à éroder la plage et à s’attaquer aux installations balnéaires et routières. De gros efforts ont été
fournis pour protéger le rivage sans gros résultats.
La baie a subi de nombreuses modifications depuis 1905 et l’aménagement du port. Naturellement un
équilibre s’établit entre les transferts depuis Marshan vers la baie et ceux engendrés de Malabata vers le
sud-ouest. Les aménagements successifs ont visé l’élongation de la jetée principale (1300 m) et ont modifié
la propagation de la houle. L’arrêt du transit vers l’est a induit une forte érosion dans la partie orientale et une
forte sédimentation à l’ouest. Avec l’installation d’épis et de brise-lames, la circulation est ralentie et des
sables sont piégés, mais l’érosion s’est accentuée dans la partie centrale de la baie.
À proximité de Rabat, le littoral est essentiellement rocheux. Un cordon dunaire hérité, constitué de calca-
rénites, limite une dépression longiligne appelée oulja. Localement, le bourrelet côtier a été rompu et la mer
a pu pénétrer des sites abrités dans l’oulja pour y construire de belles plages sableuses. Cette plage est en
voie de dégradation et d’érosion parce qu’on a choisi d’implanter un port de plaisance dans la partie sud-
ouest de cette plage, contre la colline de Sidi el Abed. Cette digue a transformé la dynamique côtière à l’inté-
rieur de cette baie et y a favorisé l’érosion des sables. L’infrastructure portuaire consiste dans une digue prin-
cipale positionnée justement sur la ligne de hauts-fonds qui représentent la continuité du bourrelet côtier,
localement démantelé. Une traverse est implantée perpendiculairement au rivage et est édifiée avec des
blocs de quartzite et de calcaire prélevés dans les carrières proches de l’oued Yquem. Le plan d’eau est ins-
tallé à proximité de la jetée dans la partie la plus profonde, alors que la plage a été érigée en terre-plein grâce
au déversement de matériaux terreux et de tout-venant.
La baie d’Agadir
La baie d’Agadir connaît à la fois des transports perpendiculaires à la côte liés aux courants de marée et
des transports longitudinaux liés à la dérive littorale, capable d’entraîner 450000 m3/an de sable sur le littoral
d’Agadir. La dynamique éolienne consiste à la fois dans des vents d’ouest et des vents d’est, selon les sai-
sons et les types de temps.
205
La situation montre naturellement un certain équilibre : la plage s’engraisse les années humides avec des
apports fluviatiles importants, des vents de terre violents et moins de houles de tempêtes d’hiver. Au
contraire, elle s’érode les années sèches avec plus de houles de tempêtes et de vents de mer violents.
Le port a provoqué une érosion forte d’une partie de la plage d’Agadir (Lahouar-Tildi). La jetée bloque la
dérive nord-sud et des accumulations ont lieu à l’ouest de cette jetée. L’extension du port (Anza) a provoqué
l’extension de l’érosion au sud de Lahouar. L’érosion menace la zone du Palais Royal. Le trait de côte a reculé
d’environ 100 m en 20 ans de 1968 à 1988. Or, c’est dans cette zone que s’implante un secteur touristique
et balnéaire entre la route et la mer. La dune bordière a été arasée et son sable utilisé pour la construction. Or
cette dune était à la fois un pare-choc et une réserve de sable. Un brise-lame a été construit en 1968 ; mais il
a déplacé le problème plus au sud. Des murs de gabion ont été implantés pour protéger le palais en 1989 ;
mais ils ont aggravé le problème. Pour réduire cette dynamique rapide, il faut protéger la dune bordière par la
reconstitution de sa végétation et en protégeant le font dunaire par des brise-vents. Il faut diminuer l’agitation
en créant des barrières submersibles allongées. Il faut aussi construire un môle rocheux au sud du Palais
pour constituer un point d’encrage.
Au-dessus du haut de plage, le matériel sableux est fréquemment remanié sous forme de dunes plus ou
moins vives, car plus ou moins couvertes de végétation.
Ces dunes constituent très souvent un domaine gagné par l’urbanisation puisqu’elles sont situées immé-
diatement au-dessus des plages ; c’est là que sont édifiées les stations balnéaires et notamment la partie en
dur de ces stations. Cette urbanisation prive la mer d’un stock que normalement elle utilise lors des tem-
pêtes et qui sert à atténuer la puissance nette des vagues et courants et à réduire leurs effets érosifs.
Là où l’urbanisation n’a pas encore gagné, le piétinement par les baigneurs a souvent contribué à dégrader
le couvert végétal et donc permis la remobilisation des sables par le vent.
Souvent ce stock de sable est considéré comme une ressource importante à exploiter ; et c’est pourquoi
des files de camions, avec ou sans autorisation, prélèvent des quantités importantes de sable pour la
construction.
Le cordon littoral méditerranéen est recouvert dans cette zone par un large cordon dunaire qui ferme la
plaine de Martil, le stock de sable redistribué par la dérive littorale est déposé par le vent à proximité du
rivage et constitue une large zone dunaire (plus de 300 m). Très tôt, ces dunes instables ont été fixées (plan-
tations d’eucalyptus).
La construction de la route en corniche de Martil vers Cabo Negro a constitué le premier pas dans la désta-
bilisation du cordon dunaire. Les bordures ont été défrichées sur une grande profondeur. Des carrières de
sables ont été ouvertes dans ce milieu sensible.
206
3.3. Les falaises en matériel non ou faiblement consolidé
Souvent les falaises ne sont pas concernées par les aménagements et ne sont donc pas affectées par
l’impact anthropique. Mais les constructions implantées trop près des falaises sont soumises à des risques
très grands que l’on aurait pu éviter en choisissant avec plus de précautions les sites d’implantation et
d’aménagement.
Des petites falaises se sont nouvellement constituées au nord de Mohammedia, au-dessus de la plage
Monica, à la suite du prolongement de la jetée du port. La plage qui était limitée par de basses collines mode-
lées dans du matériel terrigène a connu une recrudescence érosive. Or, la plage Monica avait été choisie
pour l’implantation d’un quartier de villas de standing élevé. Les maisons les plus proches de la mer sont
donc fortement menacées, ainsi que les rues qui les desservent.
IV. Perspectives
Dans une perspective d’aménagement équilibré du territoire, avec redistribution spatiale des hommes et
des activités, il va être nécessaire d’adopter des restrictions sérieuses dans l’urbanisation des côtes et dans
les rejets d’eaux usées et de déchets.
1. Cadre juridique
Il se caractérise par l’absence de principes et règlements applicables à l’utilisation des terres, appliqués au
domaine côtier de manière spécifique (Mekouar, 1986). Or la rationalisation de l’usage est nécessaire pour
éviter la dégradation du patrimoine. Il faudrait donc un code littoral spécifique et des instruments pour réguler
l’utilisation de l’espace et des ressources (par exemple, la création d’une agence du littoral).
Jusqu’à maintenant, le littoral, espace fragile, n’a pas fait l’objet d’une politique d’aménagement et de sau-
vegarde de ses ressources. La législation n’est pas spécifique pour orienter l’action sur cet espace parti-
culier, mise à part la circulaire de 1964, recommandée pour l’examen des projets de grande envergure.
Seules la réglementation concernant l’utilisation du Domaine public et celle de la protection des milieux natu-
207
rels sont agissantes. Mais, les dahirs du domaine public, des établissements classés de la pêche maritime,
des gisements d’hydrocarbures, des lotissements, et même la loi sur l’environnement ne sont pas spéci-
fiques du domaine littoral.
La nouvelle loi sur l’Environnement traite des espaces et des ressources marins. Cette loi prévoit « des
dispositions législatives et réglementaires ... pour prévenir et mettre fin aux activités susceptibles d’altérer la
qualité des eaux et des ressources marines, de porter atteinte à la santé de l’homme ou de nuire à la faune, à
la flore, aux intérêts connexes et à l’environnement marin et côtier en général ». Les mécanismes et les
moyens de protection sont entre autres des schémas et des plans d’aménagement et d’exploitation du litto-
ral. Mais, des textes sont attendus pour fixer « les conditions d’exploration, d’exploitation et de mise en
valeur des ressources marines » et « les mesures nécessaires pour la prévention et la lutte contre la pollution
marine, y compris celle résultant des accidents maritimes imprévisibles » ainsi que « les critères nécessaires
au classement des aires spécialement protégées ».
Pourtant, le Maroc a adhéré à plusieurs conventions et en a ratifié plusieurs. Mais l’effet tangible reste
limité du fait des contraintes, notamment financières.
Les planificateurs n’ont jamais considéré la côte comme un milieu à part à gérer en tant que milieu de vie
et d’activité. La planification est conçue pour les espaces urbains ou pour les territoires des régions, mais pas
à l’échelle de la zone côtière, c’est-à-dire, le domaine public maritime et les espaces limitrophes sensibles, à
protéger.
Le problème est que cette bande de contact est de délimitation difficile ; la profondeur de 50-60 km à l’inté-
rieur des terres est souvent avancée ; mais d’autres auteurs veulent limiter l’extension au rivage stricto
sensu, c’est-à-dire à la zone de contact terre-mer. Le littoral comprend en outre 66 000 km2 d’eaux territo-
riales et 1,1 M km2 de zone économique maritime exclusive.
La loi « littoral » devrait permettre de préserver les sites, de privilégier les activités spécifiques, favoriser
l’aménagement de cet espace et la valorisation de ses ressources, faciliter la gestion du domaine public et
clarifier les compétences des divers acteurs. Cette loi est supposée ajouter des contraintes supplémentaires
à celles régies par les autres lois.
Le principe retenu pourrait être celui de l’aménagement en profondeur, les normes devenant plus contrai-
gnantes à proximité du rivage. On proposerait une zone non constructible de 100 m et une deuxième bande,
avec plusieurs contraintes. On doit garantir par ailleurs le passage piétonnier dans le domaine public maritime
(passages transversaux obligatoires tous les 500 m). Les travaux pouvant porter atteinte à l’état naturel de la
côte seraient en principe interdits, sauf pour rendre un service public. Les ports de plaisance ne seraient édi-
fiables qu’après enquête publique et convention avec l’exploitant. Les rejets directs en mer seraient interdits
et les établissements tenus de traiter leurs eaux usées.
Si on se réfère au scénario tendanciel pour le futur de la Méditerranée (hypothèse de la poursuite des ten-
dances actuelles), les pays du nord continueront à développer, à cause des progrès dans les domaines de
l’éducation, de la sensibilisation, de l’information et du contrôle juridique, des techniques de dépollution qui
auront pour conséquence une légère amélioration d’ici 2025 de la situation de la Méditerranée (Plan Bleu,
2004). Au sud, par contre, en fonction de la croissance démographique et du retard dans les domaines édu-
catif et de la normalisation, la pollution continuera à augmenter.
Dans le cadre d’un scénario alternatif de développement durable, de coopération nord-sud et de transfert
technologique, l’extension des techniques de dépollution intéressera les pays du sud. Le fonctionnement
208
d’une politique d’aménagement du territoire équilibré et de développement des régions intérieures permet-
tra de meilleures conditions dans l’espace littoral et maritime.
Le problème crucial réside dans la vitesse d’application de cette politique rénovée avant que ne soient
enregistrées des catastrophes coûteuses, peut-être même irréparables.
2.1. Indicateurs
– Le processus de littoralisation :
D’ici 2025, les prévisions font état d’une augmentation importante de la population côtière. Selon le scéna-
rio tendanciel, cette augmentation aura des effets négatifs variés. L’accroissement pourrait être plus faible et
mieux réparti si un effort d’aménagement du territoire est conçu, avec développement des régions inté-
rieures et meilleure rétention de la population migrante ; cela entraînerait une moindre réduction de l’espace
littoral, utilisable pour des actions futures.
209
– Urbanisation du littoral :
Le taux actuel élevé de 60-65 % en moyenne atteindra, en 2025, entre 74 et 78 %. Cela pose des pro-
blèmes d’équipement, d’environnement côtier, notamment suite à la croissance incontrôlable des péri-
phéries des villes.
Cette évolution semble inéluctable, car même dans une perspective alternative de développement, avec
une croissance démographique plus faible, il faudra s’attendre à l’étalement des équipements touristiques.
Par ailleurs plus de croissance économique générera forcément plus de demande de loisirs et donc une
occupation plus dense. Seule une politique d’aménagement soucieuse de la rareté de la ressource littorale,
de l’équilibre entre activités productrices et de services, de l’équité entre les classes sociales, permettra
d’éviter que soient suroccupés des sites précieux par une minorité, telle que se conçoit actuellement la poli-
tique d’aménagement des côtes.
Le scénario tendanciel de dégradation du littoral et du domaine maritime laisse présager des situations irré-
versibles de désertion de la faune pélagique, de raréfaction des espèces littorales et benthiques et de dégra-
dation de la qualité esthétique et paysagère du rivage, à assez brève échéance. Cela s’expliquera par la
concentration d’activités industrielles sur la côte, notamment dans les régions fortement urbanisées comme
le secteur Kénitra-Casablanca et à cause du développement rapide du tourisme, de la réalisation de ports de
plaisance, etc.
Le scénario alternatif de développement durable doit envisager un aménagement du territoire plus équili-
bré, avec redistribution spatiale des hommes et des activités, des restrictions plus sérieuses dans les rejets
d’eaux usées, grâce au fonctionnement d’unités d’épuration.
210
Le littoral est un milieu convoité, devenu espace de compétition. Du fait de la pression et de l’artificialisa-
tion, il devient difficile d’envisager la restauration de l’intégrité des écosystèmes, surtout que les arrière-pays
sont souvent en crise. L’aménagement devient donc une urgence, d’autant plus que d’ici 2025, une bonne
partie du trait de côte sera construite et donc difficile à réaménager ou à réhabiliter ; l’anticipation est ainsi
d’autant plus importante qu’elle insiste sur les atouts de cet espace et tend à les développer.
211
développement durable et la mobilisation des acteurs locaux, trouver des financements, pour des pro-
jets de territoires spécifiques ; réunir les acteurs locaux autour de ces projets et monter ensemble une
vision de développement durable du territoire qui tienne compte de la diversité des intérêts et des
approches.
Pour cela, il faut maintenir autant que possible l’équilibre de la dynamique érosion/sédimentation sur le trait
de côte, pour éviter le recul sinon la disparition de plages sableuses ou l’envasement/ensablement des ports
et des endroits protégés. Cela signifie :
– Réguler l’exploitation sableuse sur les rivages,
– Veiller à la non durcification des hauts de plages et de dunes bordières,
– Mener des études d’impact sur l’hydrodynamique marine avant toute édification de jetées ou de disposi-
tifs sur le trait de côte,
– S’adapter vis-à-vis du relèvement du niveau marin, du fait du réchauffement planétaire, en construisant
au-delà de la dune bordière.
212
marocaine, notamment sur le détroit, mais représente aussi une menace permanente pour l’environnement
marin et littoral. Il faudrait donc appliquer au mieux les protocoles de sécurité, notamment le protocole « pré-
vention et situations critiques » pour la protection contre les hydrocarbures en cas d’accidents maritimes.
Conclusion
La charte de l’aménagement du territoire insiste sur la vision renouvelée du rôle des eaux territoriales et du
littoral dans le développement national. Il s’agit d’en faire des espaces privilégiés de développement dans le
nouveau contexte de mondialisation. Cela signifie d’abord la valorisation des ressources maritimes, ce qui
suppose leur évaluation (connaissance, estimation des équilibres écologiques et des risques). Cela signifie
aussi une définition claire des conditions d’exploitation de ces ressources, sauvegardant à la fois l’intérêt des
partenaires et la durabilité des ressources. Il faut par ailleurs activer la ratification des conventions et accords
ayant trait au domaine maritime, promulguer les textes et créer les institutions à même d’assurer l’applica-
tion des principes de développement durable du littoral.
Bibliographie
Bennouna M., 1992 : La dimension géo-politique du Maroc méditerranéen, Publ. GERM, Éd. le Fennec,
p. 103-115.
Berriane M. et Laouina A., éds., 1993 : Aménagement littoral et évolution des côtes, l’environnement des
côtes marocaines en péril, Publ. du Comité national de Géographie du Maroc, 120 p.
Berriane M., 1992 : Le tourisme sur la côte méditerranéenne, Publ. GERM, Éd. le Fennec, p. 121-162.
Berriane M., 1994 : Développement touristique, urbanisation du littoral méditerranéen et environnement, in
Le Maroc méditerranéen, quels enjeux écologiques ?, Publ. GERM, p. 89-116.
Chikhi N., Afkir E., Laouane M. et Chaara A., 1991 : Les problèmes du littoral tétouanais, in Le littoral tétoua-
nais, Publ. du Groupe de Recherches Géographiques sur le Rif, Univ. de Tétouan, p. 83-144 (en arabe).
Idrissi H. et al., 1994 : Évaluation de la salubrité du littoral méditerranéen et atlantique nord, ISPM, Trav. et
Doc. no 77.
Laouina A. 1999 : L’environnement marin et littoral au Maroc et en Méditerranée et les choix économiques et
politiques, Rev. Al Baht al Ilmi, IURS, no 46, p. 66-74.
Mekouar M. A., 1986 : Système foncier et écosystème côtier, entre terre et mer, le littoral balloté, Revue
marocaine de Droit et d’Économie du Développement, no 12.
213
Min. Aménagement du Territoire, 1996 : Programme d’Action intégré pour le développement et l’Aménage-
ment de la région méditerranéenne du Maroc ; Rapport de synthèse, multigr., 98 p.
Naciri M., 1992 : Le Maroc méditerranéen, l’envers du décor, Publ. GERM, Éd. le Fennec, p. 13-35.
Plan Bleu, 1988 : Avenirs du bassin méditerranéen, Economica, 442 p.
Plan Bleu, 2004 : Littoral, in Rapport Environnement et Développement en Méditerranée, partie 2, 82 p.
Ramdani M., Laouah A., Saoud Y., El Khiati N. et Idrissi H., 1997 : L’aménagement portuaire et les consé-
quences écologiques sur l’environnement, cas du complexe Restinga-Smir, espace Géographique et
Société marocaine, no 1, p. 70-80.
Rharbi L., 1996 : Urbanisation et instruments de planification spatiale du littoral méditerranéen, in Villes et
urbanisation en Méditerranée, Publ. GERM, p. 139-146.
Sakrouhi A., 1990 : L’aménagement et le développement du littoral au Maroc, Publ. Min. Environnement,
Proj. MOR/88/P09, 154 p.
Secrétariat d’État à l’environnement, 1998 : Étude nationale sur la biodivesité, rapport de synthèse, 216 p.
Snoussi M. et Bensari D., 1996 : Villes méditerranéennes et risques naturels, Publ. GERM, p. 157-170.
Tahiri L., Berraho A. et Chafik A., 1994 : Activités maritimes et pollution marine, Publ. GERM, p. 125-151.
Taouil A. et Youbi M., 1991 : Le littoral tétouanais, un système dynamique, in Le littoral téouanais, Publ. du
Groupe de Recherches Géographiques sur le Rif, Univ. de Tétouan, p. 53-76 (en arabe).
Zaïm F., 1992 : Les enclaves espagnoles et l’économie du Maroc, Publ. GERM, Éd. le Fennec, p. 37-85.
214
Évaluation du milieu marin
Introduction ............................................................................................................ 217
I. Milieu marin littoral ............................................................................................ 221
1. Présentation du littoral marocain ............................................................... 221
2. Activités littorales .......................................................................................... 222
3. Apports polluant le littoral ............................................................................ 222
3.1. Classification des polluants .................................................................. 223
3.2. Devenir des polluants dans le milieu marin ....................................... 223
3.3. Conséquences des apports polluants sur le milieu marin
et sur l’homme .......................................................................................... 224
3.3.1. Matière organique .................................................................... 224
3.3.2. Sels nutritifs ............................................................................... 224
3.3.3. Métaux lourds ............................................................................ 225
3.3.4. Les hydrocarbures .................................................................... 225
3.3.5. Contaminants bactériens ......................................................... 225
II. Qualité du milieu littoral marocain ................................................................. 229
1. Qualité physico-chimique et microbilogique .............................................. 229
1.1. Littoral méditerranéen ............................................................................ 229
1.1.1. Zones conchylicoles ................................................................. 229
1.1.2. Zones urbaines et industrielles de Tetouan .......................... 234
1.2. Littoral Atlantique .................................................................................... 235
1.2.1. Axe littoral Tanger-Casablanca ............................................... 235
1.2.2. Axe littoral Azemour-Safi .......................................................... 252
1.2.3. Axe littoral Agadir-Sidi Ifni ....................................................... 261
1.2.4. Axe littoral Tan Tan-Dakhla ...................................................... 265
2. Efflorescences phytoplanctoniques nuisibles et altération
du milieu ........................................................................................................... 269
2.1. La façade méditerranéenne ................................................................. 271
2.1.1. Région de Nador ........................................................................ 271
2.1.2. Région de Tetouan ..................................................................... 274
2.2. La façade atlantique .............................................................................. 276
2.2.1. Frange littorale Tanger-Casablanca ....................................... 276
2.2.2. Frange littorale Azemour-Essaouira ....................................... 277
2.2.3. Frange littorale Agadir-Tan Tan ............................................... 277
2.2.4. Région Dakhla ............................................................................ 280
2.3. Période d’apparition des efflorescences
phytoplanctoniques nuisibles ................................................................ 280
III. Surveillance de la qualité du milieu marin littoral et des plages .............287
1. Réseau de surveillance de la qualité du milieu marin littoral ................287
1.1. Stratégie de surveillance ......................................................................289
215
ABDELLATIF BERRAHO
216
Le développement durable, concept consacré depuis la conférence de RIO, est un choix de développe-
ment, auquel le Maroc a souscrit au même titre que la communauté internationale. Un choix dicté au niveau
national, non seulement par la rationalisation nécessaire de la gestion des ressources, gage du développe-
ment socio-économique futur du pays, mais également et surtout en raison d’un souci d’amélioration conti-
nue de la qualité de vie du citoyen marocain. Un environnement sain, est de ce fait, un droit fondamental.
Le chapitre 17 de l’agenda 21 concernant la protection du milieu marin, exige que les parties contractantes
prennent toutes les mesures possibles, afin de prévenir et d’atténuer les effets de la pollution, de protéger la
zone maritime contre les effets préjudiciables des activités humaines, de préserver la santé de l’homme et
des écosystèmes marins.
À cet égard, la connaissance de l’état de l’environnement et son corollaire l’information environnementale
sont d’une importance capitale.
Aussi, les parties contractantes sont tenues d’établir et de publier à intervalles réguliers des bilans de la
qualité du milieu marin ainsi que de son évolution, pour la zone marine les concernant.
Les évaluations de la qualité du milieu marin constituent donc une partie intégrante des programmes de
protection des zones marines et côtières. Elles donnent, en effet, la possibilité de réunir et d’évaluer les
résultats de la recherche scientifique et de la surveillance, ainsi que des informations sur les activités
humaines, aussi nombreuses que diverses, qui directement ou indirectement, sont susceptibles de modifier
ou de porter atteinte aux caractéristiques naturelles du milieu marin. Combinées, ces connaissances peuvent
être exploitées afin de pouvoir analyser et expliquer les changements, leurs causes et leurs conséquences,
et pour déterminer les impacts exigeant une intervention rapide des décideurs politiques et des gestion-
naires de l’environnement. Les évaluations permettent aussi de juger de l’efficacité des mesures prises
ayant pour but d’empêcher la dégradation du milieu marin, de protéger de précieuses espèces et commu-
nautés, et de restaurer des habitats et des écosystèmes marins dégradés.
Le présent rapport est établi à partir des données les plus récentes, tirées de l’activité de surveillance
menée par le Réseau de Surveillance de la Salubrité du Milieu Littoral (RSSL), ainsi que celles issues des tra-
vaux de recherche et des campagnes océanographiques réalisées, par l’INRH, le long des côtes marocaines.
Il est structuré en plusieurs chapitres. Après la présente introduction, le chapitre I énumère les caractéris-
tiques du milieu marin littoral, en mettant l’accent sur les activités humaines ayant une grande influence sur
ce milieu.
Les chapitres II et III traitent de la qualité du milieu marin littoral et résume les informations recueillies par
les réseaux de surveillance de la salubrité du littoral et de la qualité des plages, en se concentrant sur les
apports de contaminants et de nutriments, leurs teneurs dans les différents compartiments du milieu marin
et leurs éventuelles tendances de progression ou de régression.
Le chapitre IV relate les différents accidents ayant touché le littoral national, en précisant leurs natures, les
régions touchées ainsi que leurs effets.
Enfin, les chapitres V et VI sont consacrés aux conclusions permettant, d’aboutir aux mesures et actions
nécessaires à la préservation du milieu marin et ses ressources biologiques, notamment dans le cadre du
plan d’urgence national.
217
218
PRÉSENTATION DU MILIEU
MARIN LITTORAL
219
220
I. Milieu marin littoral
Le littoral constitue la ligne de rivage de la bande côtière terrestre immédiatement en contact avec la mer.
Il est le lieu d’interaction entre la mer et la terre, aussi bien dans le domaine physique que dans le domaine
socio-économique.
L’originalité du littoral résulte de la superposition de deux gradients antagonistes : un gradient de « conti-
nentalité » et un gradient d’océanité. Espace de transition entre le domaine terrestre et marin, la zone litto-
rale est un milieu spatialement limité, connaissant généralement une forte pression d’usages.
Le littoral marocain représente à l’évidence un patrimoine valeureux pour notre pays. Il présente une
façade méditerranéenne s’étendant sur environ 460 km de Tanger à Saidia et une façade atlantique de
2500 km, allant de Tanger à Lagouira.
Ce domaine marin, si riche en faune et en flore, joue un rôle socio-économique important pour notre pays
et impose par conséquent, un engagement pour sa protection et la préservation de sa ressource naturelle
inestimable pour les générations futures. En effet, le milieu littoral subit l’influence d’une pression démo-
graphique croissante, d’une concentration industrielle importante (industrie chimique, parachimie, textile,
tannerie, centrale thermique...) et d’une grande activité touristique et portuaire. À tout cela s’ajoute l’apport
des bassins versants des plus importants cours d’eau.
Le littoral marocain, à l’instar de tous les littoraux du monde, se caractérise par une morphologie côtière
qui diffère profondément d’une région à l’autre, selon le substrat géologique, la tectonique et les facteurs
dynamiques d’édification ou d’érosion des rivages.
La côte méditerranéenne est très irrégulière, accidentée et constituée de caps et de criques. La mer est
composée de trois masses d’eau, une eau atlantique entrante en surface et des eaux sortantes à des profon-
deurs intermédiaires et profondes. Les marées sont d’une manière générale de faible amplitude.
L’océan Atlantique représente une succession de côtes rocheuses et de côtes sableuses, interrompues
par des embouchures estuariennes et lagunaires. Il se caractérise par la présence, en permanence, d’une
houle assez forte et des effets des courants de marée.
La richesse biologique du littoral marocain est liée à la présence d’un grand nombre de zones paraliques
tels les lagunes et les estuaires, objets de convoitise malgré leur fragilité, nécessitant une gestion parti-
culière :
– Estuaires : les estuaires sont depuis très longtemps utilisés par l’homme pour développer des activités
commerciales et industrielles. Ils constituent aussi un lieu d’implantation de ports de commerce et de
pêche. Ces activités, se sont souvent accompagnées de modifications hydrauliques et écologiques, qui
221
ont plus au moins perturbé le fonctionnement de ces écosystèmes. On distingue les estuaires des
oueds de : Moulouya, Loukkos, Sebou, Bou Regreg, Mellah, Oum Er Rbia, Tensift et Souss,
– Lagunes et baies : les milieux lagunaires et les baies sont des écosystèmes paraliques, souvent appa-
rentés de modèles réduits d’océan, qui se développent à l’interface des systèmes hydrologiques conti-
nentaux et océaniques et où s’opèrent d’importants flux de matières et d’énergie. Elles jouent un rôle
socio-économique pour les populations autochtones, et un rôle écologique capital, en représentant le
lieu propice pour les espèces océaniques et continentales limitrophes et d’alimentation pour les espèces
migrantes. Il y a lieu de citer, les lagunes de Nador (Mar Chica) sur la Méditerranée et Moulay Boussel-
ham, Oualidia, Sidi Moussa et Khnifiss sur l’Atlantique ainsi que la baie de Dakhla.
2. Activités littorales
Les espaces littoraux constituent un pôle structurant la situation économique nationale, qui se traduit par
un développement notamment des tissus industriels et touristiques.
L’industrie occupe une place importante, par sa dynamique, et ses effets d’entraînement engendrant des
capacités de création d’emplois.
Les principales activités industrielles sont concentrées sur le littoral atlantique (agro-alimentaire, textile,
chimie, industrie mécanique...). Celles-ci génèrent le plus d’emplois, principalement dans les grandes agglo-
mérations, avec 77 % d’unités et 80 % d’emplois. Dans cette configuration, l’axe Casablanca – Kenitra
constitue l’espace structurant de l’industrie nationale qui a attiré les 2/3 des investissements et a contribué
pour 55 % d’emplois.
Sur le littoral méditerranéen, Les villes de Tanger et de Nador représentent les deux pôles industriels de la
région, dominés par l’industrie sidérurgique, le textile et la confection. La création du port de Bni Nssar à
Nador et la zone franche de Tanger ont stimulé les investissements dans la région.
En parallèle avec l’industrie, le tourisme représente une activité récemment importée, notamment le tou-
risme balnéaire, qui a fait basculer les centres d’intérêt économique de l’intérieur vers les côtes, entraînant la
multiplication de projets de promotion touristique. Les pôles les plus dynamiques sont Agadir et Casablanca
en Atlantique et Tanger, Tétouan et Al Hoceima en Méditerranée.
En matière de pêche maritime, bénéficiant de sa position géographique privilégiée, le Maroc possède des
côtes considérées parmi les plus poissonneuses au monde. Ceci a permis au secteur de la pêche maritime
de connaître un développement important se traduisant, par la modernisation de la flotte, le redéploiement
de la pêche hauturière et la création des complexes intégrés. Ceci a contribué à atteindre une production
halieutique de 755.450 tonnes en 1999.
Cependant, la surexploitation de ces ressources halieutiques, associée aux différentes agressions que
subit le milieu marin, notamment la pollution, le dragage, l’utilisation de méthodes de pêche illicite (utilisation
de la dynamite), la forte pression exercée sur les nurseries, se traduisent par une diminution des stocks et
une menace sur la viabilité de certaines espèces.
La pollution du milieu marin est définie par : « L’introduction directe ou indirecte, par l’homme, des subs-
tances ou d’énergie dans le milieu marin, y compris les estuaires, lorsqu’elles ont des effets nuisibles tels
222
que dommage aux ressources biologiques, risque pour la santé humaine, entrave aux activités maritimes y
compris la pêche, altération de la qualité de l’eau de mer du point de vue de son utilisation et dégradation des
valeurs d’agrément. »
Une grande partie des polluants rejetés dans l’environnement à travers des rejets urbains, industriels et
agricoles parviennent au milieu marin directement par émissaires, déballastages, forage Off-Shore ou indirec-
tement par ruissellement, par des apports fluviaux et par l’atmosphère.
Localement, ces apports peuvent modifier la qualité du milieu, empêcher ou freiner le développement de
certaines activités telles la conchyliculture, aquaculture, tourisme, etc.
On distingue :
Les polluants conservatifs : qui restent en permanence dans le milieu marin, soit dispersés dans l’eau soit
fixés sur du matériel particulaire composé généralement de matière organique contenue dans la vase.
Les polluants chimiques non conservatifs : tels que la matière organique, les sels nutritifs, les hydro-
carbures, les détergents et les produits sanitaires, qui disparaissent à terme. Ils ne présentent donc de dan-
ger que par leurs conséquences immédiates.
De même, certains polluants organiques réellement biodégradables, peuvent évoluer vers des sous pro-
duits plus au moins stables, qui peuvent être plus toxiques qu’à leur état initial. La biodégradabilité n’est donc
pas obligatoirement une indication de disparition des polluants et des effets toxiques.
Les polluants microbiens : qui sont véhiculés en quantités considérables au milieu marin par l’inter-
médiaire :
– Des rejets urbains : issus des eaux usées domestique et industrielle.
– Des effluents agricoles : les bactéries présentes dans les excréments des animaux survivent dans le
lisier et, après épandage, l’action conjuguée du ruissellement et de l’érosion leur fait tout naturellement
suivre la direction des cours d’eau.
Faisant partie de la flore intestinale des animaux à sang chaud (dont l’homme), ces bactéries sont en très
grande majorité inoffensives (germes témoins de la contamination fécale). Des individus malades contribuent
cependant à des apports de micro-organismes pathogènes.
Certains polluants, notamment chimiques, peuvent être véhiculés à l’état dissous dans la masse d’eau. Le
pouvoir de dilution, fait que les concentrations finissent par atteindre des valeurs très faibles et deviennent
moins dangereuses. D’autres se fixent sur le matériel particulaire et ont donc un comportement lié au sédi-
223
ment (transport en suspension ou en charriage près du fond). Ils se trouvent principalement adsorbés sur la
fraction organique liée à la vase. En général, un endroit vaseux aura plus de risque d’être pollué qu’un endroit
sableux.
S’agissant des bactéries, leur survie en mer dépend de nombreux facteurs : la température, l’éclairement,
la turbidité, et les taux de matière organique. Les T90 (le temps nécessaire à la disparition de 90 % des bac-
téries) peuvent varier de quelques heures (le jour, en été, en Méditerranée par beau temps) à quelques jours
(Atlantique par temps couvert). Les bactéries pénétrant dans le milieu marin sont également soumises à
divers prédateurs (d’autres bactéries, des bactériophages et autres petits organismes marins....), mais la dilu-
tion joue souvent un rôle plus important que la mortalité, dans la diminution de la concentration bactérienne.
La pollution microbienne est généralement une pollution de proximité. Les sources de contamination
doivent être recherchées localement.
La nocivité des polluants varie selon leur nature et les caractéristiques physique et biologique de l’envi-
ronnement dans lequel ils sont rejetés. Compte tenu de leurs faibles teneurs, leur toxicité reste difficile à éta-
blir.
224
3.3.3. Métaux lourds
Les métaux lourds sont des polluants non biodégradables, qui peuvent affecter la vie aquatique. Depuis les
producteurs primaires, le risque de contamination s’amplifie au fur et à mesure que l’on remonte à travers les
maillons de la chaîne trophique (phénomène de bioaccumulation ou de biomagnification). La contamination
métallique de l’environnement marin est le plus souvent d’origine humaine, plus rarement d’origine naturelle.
Parmi les sources naturelles, le drainage des eaux riches en minerais par lessivage des sols ainsi que le
dégazage de la croûte terrestre, qui rejoint l’hydrosphère par les retombées volcaniques.
Coquillages
Une grande partie des coquillages filtrent, pour se nourrir, des volumes d’eau très importants et
concentrent les éléments en suspension dans l’eau, supports de polluants microbiens. Ils deviennent, dans
certains milieux très pollués, de véritables réservoirs de germes dangereux.
Parmi les affections transmises par ces coquillages contaminés, les salmonelloses et les gastro-entérites
virales sont au premier plan.
La consommation de ces organismes marins peut ne provoquer chez le consommateur qu’une simple gas-
tro-entérite dans les cas les plus bénins. Mais d’autres toxi-infections de type typho-paratyphoïdiques ont des
conséquences plus sérieuses.
225
La figure suivante donne un aperçu sur les impacts possibles de divers apports en milieu littoral.
226
QUALITÉ DU MILIEU MARIN
LITTORAL
227
228
II. Qualité du milieu littoral marocain
Le littoral méditerranéen présente quelques points de forte densité de population, surtout entre Tanger et
Tetouan. Cette densité s’est accentuée durant la dernière décennie, l’évolution de la population urbaine a
connu un rythme relativement plus rapide que celui de l’ensemble du Maroc. Cette évolution s’est accompa-
gnée notamment du développement du tissu industriel dans la région, entraînant un impact négatif sur l’envi-
ronnement naturel et le milieu marin en particulier.
A. Région de Tetouan : La topographie côtière de cette région est caractérisée par une pente
généralement faible, une côte rocheuse et des fonds sédimentaires. Elle se présente également comme un
grand bassin versant, ce qui engendre, pendant la période des pluies, un grand écoulement et des ruisselle-
ments des eaux pluviales.
Cette région, présente en général, une bonne qualité physico-chimique des masses d’eau. Les teneurs en
produits azotés et phosphorés et les valeurs du pH et de l’oxygène dissous sont caractéristiques des eaux
non polluées. Cependant, des pics de concentrations en nitrates (400 et 500 Üg/l) ont été enregistrés au
niveau de Oued Laou et Martil pendant l’année 2000.
De même, le suivi chimique des coquillages dénote des teneurs caractéristiques des zones salubres.
Bien qu’inférieures aux normes admises, les concentrations en Pb enregistrées sont plus élevées que
celles du Cd et du Hg au niveau de l’ensemble des sites étudiés. Les résultats montrent également que les
variations annuelles sont irrégulières, ce qui rend difficile l’interprétation des tendances.
229
Figure 2 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle)
dans la chair des coquillages,en mg/Kg.ps
La présence des hydrocarbures aromatiques (HAP) dénote des concentrations faibles, avec un maximum
au niveau de M’diq. Ceci serait dû au port de pêche de cette ville.
Les eaux de la zone littorale méditerranéenne comprise entre Fnideq et Kaâ-srass, dénotent une bonne
qualité microbiologique, excepté pendant la période des pluies où de légers dépassements du seuil de la
salubrité sont observés au niveau de Kabila, Martil et Oued laou. Les pluies torrentielles que connaissent ces
sites, en période hivernale, drainent les polluants engendrés par l’activité terrestre vers la mer, par le biais
des bassins versants à savoir, Oued Martil, Oued Smir et Oued Laou.
230
Figure 4 : Évolution de la qualité bactériologique (C.Th./100g de chair et de liquide intervalvaire)
des coquillages dans la région Fnidek – Kaâ-Srass
B. Zone côtière de Nador (Saîdia – Cap de l’Eau) : c’est une zone marquée par la présence de plu-
sieurs espèces de coquillages, principalement la praire et l’haricot de mer. Les sites étudiés (Moulouya et
Cap de l’Eau) témoignent de l’absence de toute contamination chimique notable.
Les résultats du dénombrement des Coliformes fécaux thermotolérants (C.Th) montrent une faible conta-
mination bactérienne, qui reste toujours inférieure aux normes admises.
231
C. Lagune de Nador
Appelée aussi Marchica (11 500 ha), cette lagune est séparée de la mer par un cordon dunaire d’environ
24 km de longueur. Elle est le siège de pressions anthropiques importantes, vu sa position géographique et
son intérêt économique. Elle connaît une activité aquacole importante caractérisée par l’élevage de certaines
espèces de poissons et de mollusques bivalve (huître creuse).
La densité de la population humaine de la province de Nador avoisinant 120 habitants/km2, et les apports
continentaux acheminés vers la lagune par le biais de Oued Selouane, des canaux d’irrigation et des eaux de
ruissellement constituent des sources de pollution affectant cette lagune.
Les différentes études menées au niveau de la lagune ont permis de mettre en évidence son évolution
générale, et de cerner les vecteurs de cette évolution.
L’évolution sédimentaire et géochimique a été influencée par des facteurs naturels (fermeture de la
passe...), mais également par des actions anthropiques (ferme aquacole, eaux usées...). C’est ainsi que l’on
note un enrichissement de la lagune en éléments nutritifs et en matière organique, pouvant menacer son
équilibre écologique.
La zone d’Atalayoune est située loin des contaminations urbaines de la ville de Nador et Béni Nsar. Malgré
l’existence de bassins de prégrossissement de poissons, cette zone est de bonne qualité microbiologique et
chimique.
232
La zone de Chaâla est localisée entre deux sources de pollution, l’embouchure de Oued Kabayo et les bas-
sins de lagunage de la station d’épuration des eaux usées de la ville de Nador. Elle reçoit ainsi les rejets des
agglomérations d’une part, et ceux de la station d’épuration des eaux usées de la ville de Nador, d’autre part.
Ce qui explique les taux élevés notamment en Cu (les concentrations enregistrées oscillent autour d’une
moyenne de 200 ppm), observés chez les palourdes prélevées au niveau de ce site. De même, le suivi bacté-
riologique régulier montre des niveau élevés en coliformes fécaux dépassant 7000 CF/100 g de coquillage
(mai 2001).
Figure 7 : Concentrations des métaux lourds (moyenne nnuelle dans la chair des coquillages
prélevés au niveau des sites de la zone côtière et de lagune en mg/Kg.ps.
233
Figure 8 : Concentrations des hydrocarbures (HAP) dans la chair des coquillages
en mg/Kg.Equiv chrys
234
Les données disponibles montrent un impact certain de la charge polluante véhiculée par Oued Martil,
notamment le rejet industriel de l’unité électrochimique provoquant une dégradation du milieu par la pré-
sence d’un taux appréciable en Hg (allant de 17 à 25 Üg/l d’Hg dans le rejet).
La façade atlantique s’étendant de la ville de Tanger au nord à la ville de Dakhla au sud peut être divisée, en
cinq franges littorales regroupant 36 zones de production conchylicole importantes ainsi que des milieux
paraliques (lagunes estuaires et baies) déjà cités.
A. Zones conchylicoles
Cinq zones conchylicoles littorales sont concernées : Sidi Boughaba et Chlihat au niveau de la région de
Kenitra, Harhoura au niveau de Rabat, Mansouria et Dar Bouazza au niveau du grand Casablanca.
Les éléments nutritifs (nitrates, nitrites et orthophosphates) mesurés régulièrement dans l’eau de mer au
niveau de ces zones, présentent des taux relativement faibles, situés dans la gamme des concentrations
relevées dans les eaux non polluées. De même, les concentrations en métaux lourds surveillés ne révèlent
aucun dépassement des normes admises. La zone conchylicole de Chlihat, située au Nord de l’embouchure
de Sebou, se caractérise, par un enrichissement en éléments azotés et phosphorés légèrement supérieurs à
ceux relevés au niveau de Sidi Boughaba, située au sud de cette embouchure.
235
S’agissant des hydrocarbures, il y a lieu de signaler que les concentrations enregistrées, bien que faibles,
sont plus importantes (printemps 2000) au niveau de Mansouria et Dar Bouaazza, situées prés des agglomé-
rations urbaines de Casablanca et Mohammedia.
Du point de vue microbiologique, la frange littorale Chlihat – Ouled Sbih connaît des dépassements régu-
liers en contamination fécale par rapport aux normes admises. Ces dépassements s’expliquent par la proxi-
mité de cette zone de l’embouchure de Oued Sebou, connaissant une pollution importante.
La qualité microbiologique des zones conchylicoles de Mansouria et Dar Bouâazza, qui constituent les sites
de référence nord et sud de la wilaya du Grand Casablanca, est acceptable à l’exception de quelques pé-
riodes intermittentes de contamination.
236
Figure 12 : Évolution de la qualité bactériologique (C.Th./100 g de chair et de liquide intervalvaire)
des coquillages de Mansouria
237
– La Merja Zerga qui communique de façon permanente avec l’océan ;
– La Merja Kahla, peu profonde, située au nord de la lagune.
Le régime hydrologique de la lagune résulte de l’interaction entre les apports d’eau douce provenant des
oueds, et les apports océaniques dirigés par les marées. Son climat est de type méditerranéen à influence
océanique ; et est caractérisé par de longues saisons sèches, l’irrégularité des précipitations et l’étalement
de la saison humide.
Déclarée réserve biologique depuis 1978 (convention RAMSAR), cette lagune est située dans une région à
vocation agricole. Les aménagements à des fins d’agriculture, réalisées dans les bassins versants, consti-
tuent une source d’impact sur le système lagunaire. Ces activités ont des incidences directes sur la qualité
des eaux lagunaires. Le canal de Nador collecte les eaux de drainage des secteurs situés sur la frange côtière
au sud de la lagune. Une grande partie de ces secteurs est aménagée pour la pratique de la riziculture dont
les eaux de vidange sont, elles aussi, directement déversées dans le canal de Nador.
Un autre problème environnemental identifié au niveau de la lagune a trait à l’extension du village balnéaire
de Moulay Bousselham. Cette agglomération a certainement un impact sur la lagune par le biais des eaux
usées, et des déchets solides déposés dans des décharges sauvages éparpillées tout autour, en particulier
en été où la population augmente considérablement.
La faune marine de cette lagune est constituée de poissons (anguilles, mulets, soles) et de mollusques
bivalves avec une dominance de la palourde et de la coque.
Il ressort des données relatives à la qualité physico-chimique du milieu lagunaire ce qui suit :
– La salinité varie suivant le cycle des marées. La pénétration des eaux océanique, à marée haute, fait
remonter la salinité à des valeurs équivalentes à celles des eaux marines (environ 36 ‰). À marée basse,
les eaux lagunaires sont dessalées par rapport à la marée haute. Cette déssalure augmente au fur et à
mesure que l’on approche de l’amont où il y a l’apport en eau continentale.
– Les teneurs en sels nutritifs (nitrates et phosphates) connaissent une augmentation de l’aval vers
l’amont de la lagune et sont plus élevées à marée basse. La richesse en nutriments pourrait être liée aux
écoulements superficiels. En effet, l’Oued Drader draine un bassin d’une superficie de 150 Km2.
– Les teneurs en métaux lourds et en hydrocarbures de pétrole, évaluées dans la chair des organismes
(Palourde) ne dénotent aucun signe de contamination.
238
Figure 14 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle)
dans la chair des coquillages de My Bousselham en mg/Kg.ps
– Le suivi microbiologique réalisé au niveau de cette lagune, montre des dépassements des seuils en pé-
riode hivernale, dénotant une détérioration de la qualité de ce milieu lagunaire durant les dernières
années.
Il est nécessaire de poursuivre l’évolution trophique de cette lagune. En effet, l’obstruction progressive du
goulet, limitant la communication avec l’océan, contribuera à augmenter le volume des eaux usées pouvant
être transportées par les eaux continentales, ce qui risque de provoquer une dégradation plus rapide de la
lagune.
239
b. Estuaire de Loukkos
Cet estuaire a une superficie de 2250 km2, comprise entre 35o 9’ et 35o 14’ N 6o 5’ et 6o 30’ W. Il se trouve
au niveau de la ville de Larache entre les régions du Tangérois et du Gharb et présente les caractéristiques
d’un Oued Côtier. La zone d’embouchure, située en aval, est ouverte sur l’océan Atlantique.
Les eaux fluviales du Loukkos drainent les rejets d’eaux usées des villes de Ksar Lakbir et de Larache, en
plus des rejets résultant de l’activité du port de pêche de Larache, situé au niveau de l’embouchure.
La qualité physico-chimique des masses d’eaux présente des valeurs non régulières dans le temps.
Cependant, elles sont marquées par des concentrations plus importantes en nitrates (140 Üg/l valeur
moyenne enregistrée en 2000). Ces valeurs restent caractéristiques des eaux estuariennes.
S’agissant de la contamination par les métaux lourds évaluée dans la chair des moules, les concentrations
relevées restent faibles dénotant une bonne qualité du milieu.
240
Figure 16 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle)
dans la chair des coquillages provenant de l’estuaire du Loukkos en mg/Kg.ps
c. Estuaire de Sebou
L’estuaire de Sebou est situé à proximité des villes de Kénitra et de Mehdia. Ce bassin draine autres que
les rejets urbains de la ville de Kénitra, les rejets industriels de la cellulose du Maroc, de la Centrale Ther-
mique et de la Compagnie Marocaine du Carton et Papier de Kénitra. Il connaît aussi une forte activité por-
tuaire avec les ports de pêche à Mehdia et de commerce à Kénitra.
La partie amont, constitue le réceptacle de diverses activités urbaines, industrielles et agricoles. Ces dif-
férentes activités s’accompagnent de nombreux problèmes de pollution qui touchent l’environnement aqua-
tique, et par conséquent le milieu marin, récepteur des eaux continentales drainant des substances
polluantes dissoutes ou particulaires.
Le suivi des variations temporelles des paramètres physico-chimiques au niveau de l’embouchure, a per-
mis d’évaluer l’apport important de nutriments azotés et phosphorés ainsi que la matière en suspension,
entraînés par les eaux continentales.
L’évaluation des teneurs en métaux lourds dans le sédiment et dans la matière en suspension a montré,
qu’avec un maximum 780 ppm, le chrome est l’élément le plus abondant. La présence de cet élément en
quantité importante est due aux rejets provenant essentiellement des tanneries. Ceci montre la nécessité de
la multiplication des efforts, en vue de limiter la dégradation du milieu marin récepteur, bien que les teneurs
observées dans les organismes marins prélevés au niveau de l’embouchure (Mehdia) soient faibles, du fait
du pouvoir épurateur du milieu marin.
S’agissant des hydrocarbures, il y a lieu de signaler que ces derniers se maintiennent à des concentrations
fluctuantes non négligeables, parfois importantes, dénotant l’impact des apports estuariens ainsi que ceux
résultant de l’activité du port de Mehdia.
241
Figure 17 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle)
dans la chair de coquillage provenant de Sebou en mg/Kg.ps
La contamination du milieu récepteur, principalement à partir des effluents industriels est aggravée par le
rejet, à une température suffisamment élevée, des matières organiques contenues dans les eaux résiduaires.
Cette situation crée des conditions eugénésiques pour la survie voire la multiplication des micro-organismes.
Les eaux usées qui sont déversées sans traitement préalable constituent une menace aussi bien pour la santé
de la population qui puise son eau d’alimentation à partir de Sebou que pour la faune et la flore.
La charge bactérienne subit une augmentation en été, jusqu’à ce qu’elle atteigne un seuil alarmant. En effet,
les rejets des industries coïncident avec la période estivale, ce qui a des effets néfastes sur le milieu récepteur
du fait que les micro-organismes qui s’y développent, en dégradant les substances organiques rejetées,
242
amènent le milieu à un déficit en oxygène dissous. Une réduction de la charge bactérienne est constatée au
niveau de l’embouchure, qui peut être attribuée au phénomène de dispersion et de dilution déjà cité.
243
Figure 19 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées
dans la chair de coquillages provenant du Bouregreg en mg/Kg.ps
S’agissant de la pollution microbiologique de cet estuaire, il est à signaler que cette dernière enregistre des
concentrations alarmantes, pouvant atteindre plus de 106 C.Th/100 g de chair de coquillages, au niveau de
certains points de l’estuaire, ce qui confirme les résultats chimiques obtenus au niveau de ce site, et
dénonce l’impact de l’activité longeant l’estuaire.
La mauvaise qualité microbiologique de l’écosystème estuarien de Bou Regreg rend les plages de Rabat et
Salé impropres à la baignade ; ceci est d’autant plus alarmant que la colimétrie est très élevée, et l’isolement
des salmonelles est fréquent en période estivale où l’activité récréative bat son plein.
244
B. Zones urbaines et industrielles de la Wilaya du Grand Casablanca
a. Zone de Mohammedia
La ville de Mohammedia est un pôle économique qui reflète un développement industriel important.
Les entreprises dénombrées représentent 3.3 % du nombre total des unités de la région Casablanca-
Mohammedia. La répartition des activités par secteur, selon leur importance, fait ressortir la prédomi-
nance des secteurs de transformation des minéraux, du textile, du cuir et enfin de l’industrie chimique et
parachimique. La ville abrite également le grand complexe électrochimique du pays, une raffinerie et une
centrale électrique.
Cet axe littoral reçoit deux bassins versants à savoir ; Oued Mellah, dont la partie estuarienne est trans-
formée en émissaire des eaux usées à ciel ouvert, drainant les eaux urbaines et industrielles de la ville de
Mohammedia et Oued Nfifikh. À tout cela s’ajoute, les ports de pêche et de commerce de la ville.
Le suivi réalisé en matière d’évaluation de l’effet de ces activités sur le milieu marin fait ressortir les
niveaux de contamination chimique suivants :
La caractérisation physico-chimique (nitrates, nitrites, orthophosphates) des masses d’eau et le suivi
microbiologique, dénotent une contamination urbaine importante au niveau de l’estuaire de Oued Mellah, qui
reçoit la majorité des eaux usées de la ville, avec des taux élevés en orthophosphates, en azote ammoniacal
et en coliformes thermotolérants, atteignant des concentrations de l’ordre de 2,9.106 CF/100 g de chair de
coquillage.
Les résultats portant sur l’analyse des métaux lourds (Cd, Pb, Hg, Cu) révèlent une contamination impor-
tante au niveau des différents points de prélèvement, dépassant dans certains cas les valeurs tolérables. En
effet, au niveau de la plage d’Ouled Hmimoune recevant les rejets de la société d’électrolyse, les niveaux du
mercure dans les moules ont atteignent des concentrations importantes (7.7 Üg/g p.s. hiver 1999) avec un
pourcentage en méthyl mercure (forme la plus toxique) de 20 %. Cependant, il y a lieu de signaler que ces
concentrations ont connu une baisse, suite à la mise en place de nouveaux procédés, ce qui justifie la
diminution des teneurs, en mercure, au niveau de ce site et ce, à partir de l’année 2001.
245
L’évolution spatiale des hydrocarbures aromatiques révèle des concentrations élevées au niveau du site
situé à proximité de l’émissaire de la raffinerie. Ces concentrations ont atteint 150 ppm en hiver 1999. De
même, des teneurs non négligeables ont été enregistrées au niveau des stations éloignées, dénotant
l’impact de cette activité sur la frange littorale avoisinante.
b. Zone de Casablanca
Le littoral casablancais reste la région industrielle marocaine par excellence. En effet, elle assemble les 2/3
des unités de production et près de 70 % de l’emploi industriel. Elle est aussi, grâce à son port, le principal
centre commercial du royaume.
Plusieurs émissaires d’eaux usées sont rejetés au niveau de cette frange littorale, notamment ceux regrou-
pant les eaux usées des agglomérations et des unités industrielles de Aïn Sebâa-Zenata.
246
– l’effet de la prolongation de la conduite d’évacuation des rejets d’Al Hank sur les zones balnéaires
situées au sud. En effet, sous l’influence de la houle et de la dérive littorale, l’impact localisé autrefois au
niveau de la zone d’Al Hank s’est déplacé vers le site de Sidi Abderrahman ;
– des seuils alarmants de taux de coliformes fécaux thermotolérants, ainsi que la présence quasi-
permanente du germe pathogène Salmonella à proximité des émissaires, principalement en période
estivale où l’activité récréative est à son maximum.
Les eaux usées non traités des différents émissaires évacuées directement sur cette frange littorale, sont
en grande partie à l’origine de cette pollution microbiologique. Ainsi, les nuisances sont très marquées au
niveau des exutoires des eaux usées.
Par ailleurs, plusieurs études ont été menées en vue d’évaluer l’impact biologique de ces différents rejets.
Elles ont porté sur :
– L’évaluation de la toxicité aiguë vis-à-vis des bivalves marins (moule, palourde et huître) ;
– L’évaluation de la toxicité sublétale (comportementale) vis-à-vis des bivalves marins ;
– L’évaluation de la spermiotoxicité et de l’embryotoxicité chez l’oursin de mer (Paracentrotus lividus) ;
– L’évaluation de l’impact sur la distribution des peuplements benthiques.
247
Figure 23 : Comportement de filtration de l’huître creuse en fonction
des concentrations des rejets dans le milieu
– les rejets de la côte casablancaise exercent une toxicité létale, à des concentrations faibles dans le
milieu (allant de 20 à 50 % dans le milieu), vis à vis des trois espèces de bivalves marins (moule,
palourde et huître) utilisées comme modèle d’étude ;
248
– Un grand effet toxique chez les cellules spermatiques de l’oursin de mer, se traduisant par une inhibition
totale (100 %) du taux de fertilisation, et ceci pour une concentration de 1 % dans le milieu ;
Figure 24 : Effet des rejets liquides de la côte casablancaise sur la reproduction de l’oursin de mer
Effet du rejet d’une raffinerie de pétrole Effet des rejets d’une société de pétrochimie Effet d’un effluent industriel complexe
– Les eaux provenant de la zone de Mohammadia sont les plus toxiques, vis-à-vis du développement
embryonnaire de l’oursin Paracentrotus lividus, puisqu’on enregistre plus de 50 % de pathologie du
développement embryo-larvaire chez les organismes exposés à ces eaux.
249
Photo 4 : Prises de vues microscopiques de larves d’oursins
Larve Pluteus normale Larve Pluteus pathologique Larve Pluteus pathologique Développement bloqué
(spécules croisés) (spécules écartés) au stade embryon
– les observations bionomiques, faunistiques et floristiques font apparaître, en général, que la richesse
ainsi que la densité spécifiques du macrobenthos (mollusques, cnidaires, échinodermes,...) varient en
fonction de la distance par rapport aux foyers de pollution.
Figure 25 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de l’oursin P. lividus
250
Figure 26 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de la moule
M. galloprovincialis
Figure 27 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de l’anémone
Anemonia sulcata
251
La répartition, la densité et la richesse spécifiques chutent brutalement à proximité des rejets de Oued
Mellah, des rejets complexes de Oukacha et de Aîn Sebaâ, et se rétablissent progressivement de part et
d’autre, dés qu’on s’éloigne des points de rejets.
Les rejets les plus toxiques du littoral casablancais sont ainsi, ceux émanant de l’activité d’électrolyse et du
complexe industriel de Aïn Sbâa.
La toxicité du rejet de la raffinerie viendrait en troisième lieu de nocivité.
Les rejets et la charge toxique de Oued Mellah s’avèrent quant à eux, sans effet toxique létal.
Le profil d’impact qui se dégage est le suivant :
Ces résultats, complémentaires des analyses chimiques, confirment la nécessité d’un traitement préalable
des effluents et des rejets nocifs de la côte casablancaise avant leur déversement direct en mer, et montrent
l’importance de la prise en compte de la composante biologique, dans le cadre des études d’impact et de la
surveillance du milieu marin.
A. Zones conchylicoles
En plus des lagunes de Sidi Moussa et de Oualidia, Cinq zones conchylicoles littorales sont concernées :
Jmâa Ouled Rhanem-Lalla Fatna, Cap Beddouza, Essaouira Kedima, respectivement au niveau d’El jadida et Safi.
Les résultats d’analyses physico-chimiques et des métaux lourds ne montrent aucune contamination
notable. Cependant, il y a lieu de signaler, une accumulation des métaux atteignant les 6Üg/g p.s. en 2000
pour ce qui est du Cd ainsi qu’un enrichissement en Phosphates au niveau d’Essouira kedima. Ces concen-
trations sont à rapprocher de l’impact des unités de traitement et de transformation des phosphates basées
à Jorf Lasfar et à Safi.
252
Figure 28 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées
dans la chair de coquillages en mg/Kg.ps
Le suivi microbiologique régulier de cette zone confirme d’année en année, la quasi-absence de contami-
nation microbiologique au niveau des zones éloignées des agglomérations urbaines.
253
d’une part, aux apports supplémentaires de l’océan en ce qui concerne les phosphates et d’autre part, à
l’influence de l’agriculture développée sur la lagune et les phénomènes de ruissellement des eaux
douces ;
– Les teneurs en métaux lourds et en hydrocarbures, suivies dans la chair des organismes vivants
(palourdes), ne montrent aucun signe de contamination. Cependant, il y a lieu de signaler d’une part, que
le Cd présente des concentrations plus élevées que le Pb et le Hg, et un certain enrichissement des
sédiments en Cd, d’autre part. L’origine anthropique de ce métal pourrait être liée aux rejets du
complexe chimique de traitement des phosphates de Jorf Lasfar ;
– Le niveau de pollution fécale est élevé tout le long de l’année au niveau de cette lagune, avec un maxi-
mum de 46 000 Coliformes Thermotolérants / 100g de chair et de liquide intervalvaire (enregistré au
mois d’août 2001). Les activités régulières entreprises au niveau de ce site en sont à l’origine. De
même, il est à noter que les résultats du suivi microbiologique des dernières années montrent une
dégradation notable de cette lagune.
254
Figure 29 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de
coquillages provenant de la lagune de Sidi Moussa en mg/Kg.ps
C. Lagune de Oualidia
La lagune de Oualidia est située sur la façade atlantique du Maroc, à 75 km au sud d’El Jadida (32o 44’,42 N
– 9o 02’,50 W). Elle est caractérisée par un climat tempéré chaud et une pluviométrie moyenne, variant selon
les fluctuations naturelles du régime des pluies.
La communication de la lagune avec l’océan est assurée par deux passes situées à l’aval. Elle se prolonge
en amont sous forme de chenal long de 7 km jusqu’à la digue séparant la lagune des marées salants. Des
sources d’eau douce sont réparties le long de la lagune, ce qui entraîne une dilution des eaux de surface,
selon un gradient de dessalure de l’aval vers l’amont.
255
Photo 5 : Passes de communication de la lagune avec la mer
La lagune est bordée par des cultures maraîchères et céréalières, sur une superficie d’une cinquantaine
d’hectares. L’activité dominante demeure l’ostréiculture avec l’élevage sur tables de l’huître creuse (Crassos-
trea gigas) dans cinq parcs répartis le long de la lagune.
L’évolution du transit sédimentaire pendant une marée met en évidence, un transport résultant dirigé vers
l’aval. Le raisonnement basé sur ce transit mène à supposer que les sédiments qui transitent en provenance
de l’amont pourraient être, en partie, responsables de la présence d’un large banc sableux (sablière) en aval
de la lagune.
256
– L’apparition périodique de phénomène de contamination organique, aussi bien durant la période esti-
vale que pluvieuse. Cette contamination est attribuée aux eaux de ruissellement, dues aux
précipitations s’abattant sur la région, ainsi que celles résultants des infiltrations émanant des puits
perdus. Ces phénomènes peuvent contribuer à la dégradation de la qualité du milieu et empêcher,
voire freiner le développement de l’activité d’ostréiculture à Oualidia, si des mesures urgentes ne
sont pas prises ;
– Les concentrations métalliques et celles relatives aux hydrocarbures observées chez les huîtres de
Oualidia, ne paraissent pas très élevées, pour conduire à un risque certain de contamination. Le
zinc, métal essentiel paraît le plus concentré, tandis que le Cd, le Pb et le Hg montrent des taux plus
bas.
– Les niveaux de pollution fécale sont variables au niveau de cette lagune, avec des périodes inter-
mittentes de contamination. Les cultures maraîchères et céréalières le long du rivage de la lagune, uti-
lisent des engrais d’origine animale riches en micro-organismes. Ces champs sont en pente, ce qui
entraîne un drainage de ces contaminants vers le milieu lagunaire par les eaux de ruissellement en pé-
riode de pluie.
257
Figure 32 : Évolution de la qualité bactériologique
des coquillages de la lagune de Oualidia durant l’année 2000
258
montre des valeurs anormales au moins pour six paramètres (pH acide, taux élevés en phosphore et en
phosphates, ect...), témoignant d’un apport considérable, contribuant à l’enrichissement en phosphates, qui
pourrait conduire à l’eutrophisation du milieu.
Photo 7 : Émissaire des rejets liquides – solides du complexe phosphatier de Jorf Lasfar
259
La plupart des métaux analysés suivent le schéma d’évolution spatial. Ils présentent des teneurs métal-
liques moyennes, relativement faibles à l’extérieur des zones recevant directement les effluents industriels.
Cette tendance est marquée dans le cas du cadmium et du cuivre. Les teneurs de ces deux métaux sont net-
tement plus élevées chez la moule prélevée à proximité des foyers de pollution, par rapport aux stations suf-
fisamment éloignées.
La comparaison des concentrations en cuivre et en cadmium relevées régulièrement, avec celles établies
dans la moule dans d’autres régions du monde, montre l’importance de la pollution par ces deux métaux au
niveau de Jorf Lasfar et de Safi, et explique l’accumulation par les organismes de ces métaux au niveau des
sites relativement éloignés (Sidi Abed et Essaouira Kedima)
L’étude de l’effet de cette contamination sur la faune et la flore marines montre que les paramètres fonda-
mentaux des peuplements (richesse, densité) suivent le même schéma d’évolution par rapport au foyer de
pollution. Ils subissent une chute brutale à proximité des effluents et se rétablissent graduellement suivant
l’éloignement de ceux-ci.
Le rejet de Jorf lasfar semble être plus agressif que celui de Safi, en raison de son acidité et du volume des
eaux rejetées. Une manifestation spectaculaire de l’impact du rejet sur la faune est illustrée par l’état maladif
des moules, qui montrent plusieurs types de malformations (ou déformations) sur les coquilles.
260
Photo 8 : Déformations morphologiques des coquilles des moules provenant
des zones côtières de Jorf Lasfar
S’agissant des fluctuations temporaires, il est à signaler une tendance à la hausse pour le cuivre. En effet,
des teneurs dépassant les 40 mg/kg ont été enregistrées durant les années 1999 et 2000, au niveau des
points de suivi situés à Sidi Abed, éloignés d’une dizaine de kilomètres de Jorf Lasfar.
261
Photo 9 : Décorticage et séchage des moules (région d’Agadir)
Il ressort des données disponibles que les résultats des analyses physico-chimiques des eaux marines et
des métaux lourds, dans les organismes marins ne montrent aucune contamination notable.
262
Toutefois, il y a lieu de signaler, que les zones sud (Sidi Ifni et TanTan), ne connaissant pas de développe-
ment urbain et industriel exagérés, enregistrent une accumulation notamment en Cd (année 2000). Ces
concentrations (inférieures aux normes admises) peuvent être liées aux remontées d’eau profonde « Upwel-
ling » riche en Cu et en Cd, caractérisant la région.
Les résultats du dénombrement des Coliformes fécaux thermotolérants montrent une faible contamina-
tion bactérienne, qui reste toujours inférieure aux normes admises.
263
B. Zones industrielles et urbaines d’Agadir
Le littoral d’Agadir, malgré ses atouts touristiques, n’échappe pas aux risques de pollution. En effet, il subit
directement l’effet des rejets des agglomérations urbaines (zone industrielle d’Anza), ainsi que celui résultant
de l’activité du port.
Il ressort des données disponibles, ce qui suit :
– L’influence de la charge polluante véhiculée par le collecteur industriel d’Anza et le collecteur principal de
la ville d’Agadir. En effet, les paramètres physico- chimiques matérialisés, notamment par les nitrates,
accusent des teneurs importantes au niveau du site recevant les rejets d’Anza ;
– Le bassin portuaire présente plusieurs points de pollution par hydrocarbures de pétrole. Les concentra-
tions élevées ont été observées au niveau des zones abritant l’activité sardinière et la flotte hauturière.
Cette situation serait due aux activités de maintenance et de réparation accompagnant le replis et la
concentration des bateaux pendant la période du repos biologique.
264
1.2.4. Axe littoral Tan Tan – Dakhla
A. Zones conchylicoles
Plusieurs zones conchylicoles sont concernées. Il s’agit notamment d’Akhfennir, Tarouma, Aoufist en plus
de la lagune de Khnifiss et la baie de Dakhla.
D’une manière générale, le suivi réalisé récemment, au niveau du littoral ne montre aucune anomalie.
Cependant, il y a lieu de signaler une certaine accumulation des métaux lourds qui serait à rapprocher des
phénomènes d’upwelling connus dans la région.
B. Lagune de Khnifiss
Située à 120Km au Sud de Tan Tan et à 70 Km au Nord de Tarfaya, la lagune de Khnifiss est la plus grande
lagune de l’Atlantique marocain. Elle est la seule lagune située dans l’étage bioclimatique saharien. La passe
(Foum Agouitir) permet à la lagune de communiquer avec l’océan Atlantique. À cette passe, fait suite le che-
nal principal long de 20 Km. La profondeur atteint jusqu’à 10m au niveau de certains points de cette lagune.
La Sebkha Tarza, partie amont de cette lagune, longue de 9 Km et large de 5 Km, est une étendue de sable
sans aucune végétation. Elle est envahie, aux plus fortes marées de vives eaux, par une mince pellicule
d’eau de mer. L’intense évaporation au niveau de cette partie de la lagune, entraîne la cristallisation rapide
des sels à basse mer de vives eaux.
265
Figure 38 : Concentrations (moyenne annuelle)
en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en mg/Kg.ps
Ce site est en retrait de toute sorte d’agressions externes : rejets industriels, urbains et agricoles. Il ne
reçoit aucun apport d’eau douce, excepté les précipitations rarissimes.
Une importante activité aquacole caractérisée par l’élevage de la coquille Saint-Jacques a été développée
ces dernières années au niveau de cette lagune.
L’analyse des données disponibles montre que cette lagune est exempte de toute contamination chimique
ou microbiologique.
266
Figure 39 : Évolution de la qualité bactériologique des coquillages
de la lagune de Khnifiss durant les années 2000-2001
C. Baie de Dakhla
La baie de Dakhla est située sur le littoral saharien marocain. Longue de 37 Km et large de 10 à 12 Km, elle
est relativement étroite et ouverte au sud sur l’océan Atlantique. Orientée NE-SW, elle est limitée du côté de
l’océan atlantique par la péninsule de Oued Ad Dahab, formée de dunes sableuses. La bathymétrie de la baie
est faible variant de 0 à 20 mètres. Cette baie se compose schématiquement de deux grandes parties, qui se
partagent équitablement l’ensemble du bassin : une partie sud qui est caractérisée par une alternance de sil-
lons et de hauts fonds, et une partie nord représentée par un vaste bassin dont la profondeur moyenne avoi-
sine les 15 mètres.
La région de Dakhla représente une des zones les plus poissonneuses du Maroc, et abrite une des plus
importantes colonies de phoques moines. La pêche de différentes espèces de poisson en général, le poulpe
en particulier constitue une activité vitale sur le plan socio-économique. Le développement de l’activité de la
pêche a nécessité la réalisation d’un nouveau port à 5 Km de la passe de la baie de Dakhla. Ceci fait de cette
dernière, un pôle attrayant pour la réalisation de différents types d’investissement ayant trait à la pêche, à
l’aquaculture, au tourisme et aux activités récréatives. Le développement et l’expansion des activités por-
tuaires programmées entraîneront certainement un développement accéléré. Ce dernier risque, s’il n’est pas
contrôlé, de perturber davantage l’environnement de ce site d’une valeur écologique inestimable
267
Photo 11 : Phoque moine de la région de Laguira
Les travaux réalisés au niveau de cette baie montrent qu’elle présente deux zones principales :
– Zone 1, située au sud de Hoja Llamera, englobant les chenaux centraux et la bordure de la baie, caracté-
risée essentiellement par des eaux océaniques ;
– Zone 2, correspondant à une zone fragile ou le confinement est important. Le comblement par les sables
éoliens de la partie amont et de la bordure ouest, rétrécie cette zone. À long terme, il ne peut subsister
de la baie que la zone à haute influence de la marée.
268
Figure 40 : Concentrations (moyenne annuelle)
en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en mg/Kg.ps
Le phytoplancton, élément fondamental de la chaîne alimentaire, est constitué par l’ensemble des orga-
nismes végétaux microscopiques transportés passivement dans l’eau. Parmi ces organismes, certaines
espèces produisent de s toxines appelées phycotoxines dont les effets peuvent être néfastes pour l’homme
269
ou les animaux : ce sont, par exemple, certaines espèces de Dinophysis qui produisent des toxines DSP
(Diarrheic Shellfish Poisoning), les espèces Alexandrium minutum et Alexandrium tamarense qui produisent
les toxines paralytiques PSP (Paralytic Shellfish Poisoning), et certaines espèces du genre Pseudonitzchia
produisant des toxines amnésiques ASP (Amnesic Shellfish Poisoning).
L’augmentation de la production de ces microalgues (appelée eutrophisation) est parfois importante en rai-
son de la présence des rejets anthropiques croissants d’azote et de phosphore dans certaines eaux côtières.
Ce phénomène a pour conséquence de déséquilibrer le fonctionnement normal des écosystèmes jusqu’à
provoquer, dans certains cas, des efflorescences phytoplanctoniques toxiques (phytoplancton de la famille
des dinoflagellés et des diatomés) productrices de toxines. Ces dernières, absorbées par les organismes fil-
treurs principalement les mollusques bivalves, s’y accumulent rendant certains organismes marins dange-
reux pour le consommateur.
La prolifération de ces micro-algues s’accompagne le plus souvent par l’apparition d’une coloration rouge,
d’où le nom de « eaux rouges » qui leur est attribué. Il est très important de rappeler que l’apparition des
« eaux rouges » n’est pas toujours synonyme de danger, du moment que le phénomène peut être provoqué
par la multiplication des micro-algues non toxiques. De même, dans certains cas beaucoup plus rares, la proli-
fération du phytoplancton toxique peut ne pas s’accompagner d’apparition des « eaux colorées ».
Le danger du à la prolifération incontrôlée du phytoplancton toxique réside dans son origine naturelle qui
rend son apparition imprévisible. De plus, la grande stabilité des toxines aux actions physiques et chimiques,
augmente le risque sanitaire dû à la consommation des organismes marins contaminés.
Au Maroc, les premiers cas d’intoxication ayant entraîné des décès, ont été enregistrés à Casablanca en
1994, suite à la consommation de moules provenant de zones renfermant les phycotoxines PSP.
Pour dresser le bilan des dernières années, il convient de distinguer le littoral méditerranéen de la façade
atlantique, qui manifestent des efflorescences phytoplanctoniques différentes, par leur nature et par la pro-
blématique qu’elles posent.
270
2.1. La façade méditerranéenne
Figure 42 (a) : Évolution des toxines PSP dans les praires de Cap de l’Eau
271
Figure 42 (b) : Évolution des toxines PSP dans les vernis de Cap de l’Eau
Notons que la coque rouge (Acanthocardia tuberculatum) provenant de cette zone, a présenté une conta-
mination intermittente par la PSP (maxima de l’ordre de 800 US/100g), durant ces deux années.
Par contre durant l’année 2001, il n’a été observé aucune efflorescence à caractère nuisible
Figure 43 (a) : Évolution des taux de toxines PSP dans les coque De Saïdia
272
Figure 43 (b) : Évolution des taux de toxines PSP dans les coques de Cap de l’Eau
B. Lagune de Nador
La lagune a connu durant l’année 1998 des cas d’efflorescences de dinoflagellés du genre Alexandrium
(A.minutum et A.tamarense) entraînant la contamination des huîtres et des palourdes par la PSP, à des taux
respectifs allant jusqu’à 900 et 1100 US/100g de chair de coquillages.
Durant l’année 1999, il a été mis en évidence la présence d’espèces toxiques du genre Dinophysis et
Alexandrium, à des concentrations variant entre 80 et 300 cellules par litre. Ces concentrations ne sont pas
assez élevées pour produire une contamination des organismes marins par la PSP en ce qui concerne le
genre Alexandrium. Par contre, pour les Dinophysis, il est possible d’avoir des contaminations en DSP à partir
de 100 cellules par litre dinophysis. Ceci, n’a pas été confirmé par les résultats de recherche de cette toxine
dans les coquillages de ce site. Par contre, la prolifération du dinoflagellé Alexandrium minutum, durant le
printemps 2000, a provoqué la contamination des couteaux de mer de Chaâla par la PSP, ce qui laisse suppo-
ser que l’ampleur du phénomène dépend de plusieurs facteurs écologiques.
D’autre part, on a noté dans le milieu lagunaire la présence de plus en plus fréquente du dinoflagellé Gymnodi-
nium sanguineum. Les analyses ont montré que les teneurs de cette dernière variaient entre 104 et 105 cellules
par litre durant les années 1999 et 2000. Cette espèce, non toxique, constitue normalement un bon aliment
273
pour le zooplancton et les larves de poissons. Elle est en même temps reconnue comme espèce d’eaux rouges
qui, à de fortes concentrations (> 106 cell /l), cause des pertes d’huîtres par colmatage des branchies.
D’autres espèces ont été observées au niveau de ce site, avec une présence massive à certaines pé-
riodes, ce qui est le cas de Lingulodinium polyedrum durant l’année 2000.
Figure 44 : Évolution des taux des toxines PSP dans les coques
de a) Kaâ Srass b) Oued Laou et c) Martil
274
Aussi, les espèces Alexandrium minutum et Dinophysis caudata sont souvent observées en période d’été
dans toute la région.
La prolifération de G. catenatum a été remarquée durant la période 1999-2001. Celle-ci a atteint des
concentrations de 21.103 cellules par litre en hiver 2000 et des apparitions régulières en 2001.
Photo 14 : Alexandrium minutum Martil-Oued Laou (Vue ventrale) Photo 15 : Gymnodinium catenatum (Oued Laou)
Les diatomées dominées par un genre potentiellement toxique pouvant engendrer des contaminations de
type ASP sont aussi présentes. Il y a lieu de signaler, la présence des Pseudo-nitzshia.sp sur l’axe Kabila-
Martil durant les saisons d’hiver et de printemps 2000 et 2001.
275
Photo 16 : Noctulica scintillans et une chaîne de Ceratium candelabrum (Oued Laou)
276
2.2.2. Frange littorale Azemmour-Essaouira
Le suivi du phytoplancton dans cette région révèle une dominance quasi-permanente des Diatomées tout
le long de l’année. Les pourcentages maximaux des diatomées étant enregistrés à la fin du printemps (entre
80 et 99 % de la microflore). Ces algues microscopiques sont représentées essentiellement par les genres
Chaetoceros, Anaulus, Navicula, Rhizosolenia, Cosinodiscus, Melosira, Thassiossira, Leptocylindrus, Pleuro-
sigma, lauderia et Nitzschia.
Les Dinoflagellés deviennent dominants après le déclin des Diatomées de petite taille. Ils atteignent des
maxima en juillet-août allant de 60 à 90 % de la microflore recensée. Les genres les plus fréquents et les plus
représentatifs sont Prorocentrum, Ceratium, Protoperidinium, Scrippsiella, Perridiniella, Pentapharsodinium,
Gonyaulax, Dinophysis et Gyrodinium
Les autres groupes phytoplanctoniques à savoir, les Scilicoflagellés, les Ccoccolithophorides, les Prym-
nesiophycées, les chlorophycées, les Euglénophycées et les Cyanophycées, restent peu représentés
dans les eaux. La quasi-absence, particulièrement au niveau des lagunes, de ces trois derniers, groupes
infondés plutôt à des eaux saumâtres confinées, indique une influence prépondérante des eaux océa-
niques.
Les espèces potentiellement nuisibles ou toxiques rencontrées sont surtout des dinoflagellés, appartenant
aux genres Alexandrium (représenté exclusivement par A. minutum), Gyrodinium (Gyrodinium spirale), Lingu-
lodinium (L. polyedra), Prorocentrum (représenté par P.micans, P. minium et P.lima) et Dinophysis( présen-
tant une grande diversité intra-spécifique, avec la détection de D. sacculus, complexe D. acuminata, D.
rotundata, D. caudata, D. acuta, D. fortii...).
Les concertations de ces espèces varient en fonction des sites et des saisons, mais c’est surtout en pé-
riode estivale et automnale qu’on détecte les concentrations maximales. Les Diatomées du genre Pseudo-
nitzschia, sont également détectées (P. seriata, P. multiseries, P.delicatissima, P. australis).
Durant la période 1999-2001, la région a connue deux phénomènes d’eaux colorées.
Le premier cas était dû à Lingulodinium polyedrum, détecté au début de juillet 1999. Lors de ce phéno-
mène, des phycotoxines diarrhéiques (DSP) ont été détectées chez les coquillages provenant de bande
côtière. Ceci, a nécessité l’interdiction de la collecte et de l’exploitation des coquillages
Plus récemment en septembre 2001, une autre eau colorée à Prorocentrum micans a touché uniquement
la zone Azemmour-Oualidia. En effet, cette espèce trouvée en abondance dans les eaux, à des concentra-
tions de l’ordre de 106 cell/L, provoque une coloration rouge brunâtre due à la pigmentation. Le phénomène a
été accompagné par des mortalités de poissons, de crustacés, de bivalves, de gastéropodes etc.... Cette
mortalité est la conséquence de l’anoxie du milieu suite à la dégradation du phytoplancton en fin de bloom.
L’espèce P.micans, non toxique, peut rendre les coquillages impropres à la consommation, suite à la colora-
tion de leurs glandes digestives. D’ailleurs, ceci a été confirmé par l’absence de phycotoxines chez les coquil-
lages prélevés à partir des sites touchés.
À part, ces deux incidents d’eaux colorées, les espèces potentiellement nuisibles ou toxiques étaient pré-
sentes dans les eaux à des concentrations souvent négligeables. Ainsi, tous les tests biologiques de
recherche de phycotoxines (PSP et DSP) dans les coquillages provenant de cette zone à savoir les moules,
les huîtres et les palourdes, ont toujours été négatifs durant cette période.
277
mène s’est accentué avec l’apparition de Alexandrium minutum au niveau de la Plage Blanche qui a entraîné
la contamination des coquillages à des taux atteignant 3600 US/100g.
Figure 45 : Taux de toxine PSP enregistrés dans les moules et haricots de mer de Plage Blanche
D’autres espèces à caractère toxique sont rencontrées le long de cet axe, il s’agit de Pseudo-nitzshia.sp et
Alexandrium.sp. Ces dernières ont provoqué, durant le printemps 1999, une forte contamination des moules
le long de la frange littorale Immessouane-Sidi R’bat.
Alexandrium.sp, a été observée pendant les mois de mars et Juin de l’année 1999, à des concentrations
maximales de 800 cellules par litre, pour atteindre des valeurs de 5700 cellules par litre. L’épuration totale du
milieu n’a eu lieu qu’au début du mois de juillet.
278
Figure 46 : Taux de toxines PSP enregistrés dans les moules de la région d’Agadir
279
Le genre Dinophysis est représenté fréquemment par D.acuminata et rarement D.rotundata, les Pseudo-
nitzshia essentiellement par trois espèces Pseudo-nitzshia.closterium, Pseudo-Nitzshia seriata et Pseudo-
nitzshia.pungens.
Le genre Gymnodinium sp a été aussi isolé des échantillons d’eaux colorées, qui avaient touché le sud
d’Agadir en septembre 2001.
Au niveau de cette région, la baie de Dakhla fait l’objet d’une surveillance particulière d’efflorescences nui-
sibles vu sa richesse en gisements coquilliers naturels, qui sont constitués essentiellement de palourde, de
moule et de couteau de mer. Durant toute la période de surveillance, aucune prolifération à caractère nuisible
n’a pu être observée. Cependant des blooms de diatomées dominés par les genres Chaetoceros.sp, Core-
thron criophilum et Leptocylindrus minimus ont été rencontrés.
Les périodes d’apparition des efflorescences phytoplanctoniques nuisibles ayant entraîné la contamination
des coquillages et la fermeture des zones de production conchylicole de 1998 à 2001, sont résumées dans le
tableau suivant :
280
Surveillance des phycotoxines DSP dans les zones conchylicoles du littoral marocain
Période Spetembre 2001 – Mars 2004
281
Surveillance des phycotoxines DSP dans les zones conchylicoles du littoral marocain
Période Spetembre 2001 – Mars 2004
282
Surveillance des phycotoxines DSP dans les zones conchylicoles du littoral marocain
Période Spetembre 2001 – Mars 2004
283
284
SURVEILLANCE
285
286
III. Surveillance de la qualité du milieu marin littoral et
des plages
Le Ministère de la Pêche Maritime et le Ministère de l’Agriculture ont élaboré conjointement en 1989, une
première circulaire fixant aussi bien les conditions de commercialisation et de mise sur le marché des mol-
lusques bivalves que la classification du littoral national en zones salubres et insalubres. La dite circulaire a
été utilisée comme base de travail par les deux départements.
En novembre 1994, les premiers cas d’intoxication ayant entraîné des décès, ont été enregistrés à Casa-
blanca suite à la consommation de moules provenant de zones interdites et renfermant des biotoxines
marines.
Dès lors, une commission interministérielle chargée du suivi de la salubrité du milieu marin a été instituée,
et un plan de surveillance a été mis en place par l’INRH.
À l’échelle nationale, l’INRH apparaît comme l’acteur principal de la surveillance continue de la qualité du
milieu marin littoral, en raison de ses missions, ses compétences, ses implantations au niveau de tout le litto-
ral ainsi que des moyens engagés tant matériel qu’humain. En effet, la surveillance de la salubrité et de la
qualité du milieu marin est une des missions principales de l’INRH. Elle est réalisée par le biais d’un Réseau
de Surveillance de la Salubrité du Littoral (RSSL), dont l’objectif principal est d’assurer la protection du milieu
marin et la préservation de la santé du consommateur. Il permet également, de servir de système d’alarme
en cas d’apparition de phénomène perturbant l’écosystème littoral, et de constituer une banque de données
et d’informations relatives à la santé de l’environnement. Ce réseau est composé de sept stations dont cinq
assurent la surveillance du littoral Atlantique (Dakhla, Laâyoune, Agadir, Oualidia et Casablanca), et deux celle
de la façade méditerranéenne (M’diq et Nador).
287
Figure 45 : Zones de compétences des différentes stations et centres
régionaux du Réseau de surveillance (R.S.S.L.) de l’INRH.
288
1.1. Strategie de surveillance
La stratégie adoptée par l’INRH en matière de surveillance est basée sur les procédés suivants :
Par contre, et afin d’augmenter la chance d’observer un épisode de pollution microbiologique et de mon-
trer plus facilement une éventuelle variabilité saisonnière, l’étude de zone est conduite de façon régulière
pendant une durée minimale d’une année, avec pour les contaminants microbiologiques, au moins
24 mesures et pour les contaminants chimiques, quatre mesures par point de prélèvement.
289
Tableau 4 : Critères d’évaluation de la qualité microbiologique et chimique (échelle arbitraire de
couleur)
Zone B : Zone insalubre exploitable, la pêche est autorisée mais avant leur commercialisation les coquillages
doivent subir une purification dans une station d’épuration des coquillages ou un reparcage.
Zone C : Zone insalubre exploitable, la pêche est autorisée mais avant leur commercialisation les coquillages
nécessitent une purification intensive ou un reparquage de longue durée.
En cas de prolifération anormale de microalgues toxiques, la zone contaminée est systématiquement fer-
mée et interdite à toute exploitation, quel que soit son statut, pendant la durée nécessaire à l’épuration totale
du milieu.
290
Le nombre et le positionnement des points de prélèvement sont déterminés à l’issue de l’étude sanitaire,
et ceci pour chaque domaine de salubrité. Le point de prélèvement est placé de telle sorte, qu’il permette la
mise en alerte sur la zone : il est donc situé dans un secteur exposé à un risque d’insalubrité dû à un éventuel
apport contaminant.
Dans le cas de zones étendues, un nombre minimal de points, tenant compte des principales sources de
contamination, est placé de telle sorte que ces points soient représentatifs de ces zones et permettent leur
mise en alerte.
L’espèce de coquillage échantillonnée est celle majoritairement exploitée dans la zone surveillée.
291
RÉGION ZONE DE PRODUCTION COORDONNÉES CLASSE
GÉOGRAPHIQUES
CASABLANCA Zone conchylicole Dar Bouazza 33o 32’,424 N – 07o 49’,435 W
33o 31’,566 N – 07o 50’,945 W B
292
RÉGION ZONE DE PRODUCTION COORDONNÉES CLASSE
GÉOGRAPHIQUES
Zone conchylicole Aoufist 25o 44’,274N – 14o 39’,000 W
25o 43’,740N – 14o 39’,324 W A
BOUJDOUR
Zone conchylicole Lakrâa 24o 43’,908 N – 14o 53’,520 W
24o 43’,038 N – 14o 52’,020 W A
N.B
293
dans la circulaire conjointe (no 1246/01 du 12/11/2001) relative à la surveillance du milieu marin et au contrôle
de la salubrité des coquillages. Élaborée par les Ministères de la Pêche Maritime et de l’Agriculture, du déve-
loppement rural et des Eaux et Forêts, cette circulaire a pour objectif de définir un ensemble de mesures,
permettant aux producteurs de s’assurer que les coquillages sont produits et commercialisés conformément
aux prescriptions sanitaires requises. Dans ce cadre, l’INRH est chargé de l’identification, de la délimitation
des zones, notamment de production conchylicole et de leur suivi en vue d’un classement selon leur degré
de salubrité, la surveillance des zones de production et des établissements de manipulation et de traitement
des coquillages, étant assurée par les services vétérinaires.
Les campagnes de prélèvements et d’analyses pour la saison 2003-2004, ont été effectuées entre les
mois de Mai 2003 et Février 2004, conformément aux :
– Norme marocaine de surveillance de la qualité des eaux de baignade NM 03.7.200 ;
– Normes internationales et les Directives de l’OMS-PNUE applicables à la surveillance sanitaire des eaux
de baignade.
Le choix des stations de surveillance ainsi que la fréquence d’échantillonnages ont été fixés conformé-
ment à la norme et à la lumière des résultats obtenus lors de la précédente campagne, dans l’objectif de
suivre les tendances temporelles de la qualité des plages surveillées.
L’évaluation des résultats relatifs à la qualité des eaux de baignade est basée sur un traitement statistique
des résultats issus des analyses microbiologiques. Cette évaluation conduit à une classification de la qualité
des eaux selon la grille de la norme marocaine.
Cette grille de qualité dresse les fourchettes de valeurs limites (guides et impératives) à prendre en consi-
dération (cf. tableau ci-dessous) :
294
Paramètres microbiologiques Valeurs guides (VG) par 1 000 ml Valeurs impératives (VI) par 100 ml
Coliformes fécaux 100 2 000
Streptocoques fécaux 100 400
En outre, pour le classement des eaux de baignade, quatre catégories (ou classes) sont distinguées, à
savoir :
A Les eaux de bonne qualité pour la baignade
295
Répartition des stations de prélèvements au niveau de chaque plage
296
Province de Benslimane Bouznika 3 3 33
Dahomey 3 3 33
Wilaya du Grand Casa-
blanca Grand Zenata 3 3 33
Aïn Sebaâ 3 3 33
Tamaris I 3 3 33
Tamaris II 3 3 33
Dar Bouaâza 3 3 33
Madame Choual 3 3 33
Oued Merzeg 3 3 33
David 3 3 33
Mohammedia 3 3 33
Aïn Diab 8 3 88
Oulad Hmimmoun 3 3 33
Manesmann - 3 33
Sablettes - 3 33
Wilaya de Settat Sidi Rahal 3 3 33
Province d’El Jadida Oualidia 2 3 23
Sidi Bouzid 1 3 13
Sidi Abed 1 3 13
Haouzia 4 4 44
El Jadida 1 3 13
Wilaya de Safi Safi 2 3 23
Souiria Kedima 1 3 13
El Beddouza 1 3 13
Lalla Fatna 1 3 13
Province d’Essaouira Essaouira 4 4 44
Sidi Kaouki 1 2 12
Moulay Bouzerktoun 1 3 13
Wilaya d’Agadir Taghazout 1 3 13
Agadir 30 20 320
Aghroud 1 3 12
Tiznit 1 2 13
Aourir Km 17 - 2 2
Province de Tznit Mir Left 1 2 12
Aglou 1 2 12
Sidi Ifni 13 5 135
Province de Tan Tan El Ouatia 1 1 11
Wilaya de Laâyoune Foum El Oued 1 1 11
Tarouma 1 1 11
Kasamar 1 1 11
Province de Boujdour Boujdour 1 2 12
Wilaya de Dakhla Dakhla 1 3 13
297
Distribution des plages et stations de prélèvements
Par zone de surveillance
Une carte représentant la qualité microbiologique des eaux de baignade au niveau des stations de surveil-
lance pour la période Mai 2003-Février 2004 a été dressée. Parmi les 325 stations de prélèvement, 270 ont
fait l’objet d’un nombre suffisant de prélèvement pour le classement et ont permis de déclarer 226 stations
(soit 83,71 %) de qualité microbiologique conforme aux exigences réglementaires pour la baignade.
La quasi-totalité des 44 stations déclarées non conformes pour la baignade lors de cette saison (soit
16,29 %), subissent l’influence des rejets d’eaux usées ou connaissent une forte concentration de baigneurs,
conjuguée avec l’insuffisance des infrastructures d’hygiène.
298
Forêt Diplomatique S1 : Entrée principale (en face café chez Abdou)
S2 : à 800 m au nord de S1
S3 : à 800 m au sud de S1
Wilaya Malabata S2 : à 70 m à l’Est de l’hôtel
de Tanger S3 : à 50 m à l’Ouest de l’hôtel
Oued Aliane
S1 : Milieu de la plage
S2 : à 80 m à l’Est de S1
S3 : à 50 m à l’Ouest de S1
Wilaya Sidi Rahal S1 : Au milieu de l plage, en face du parking
de Settat S2 : à 700 m au nord de S1
S3 : à 600 m au sud de S1
Tamaris I S1 : Au milieu de la plage, en face du parking principal
S2 : à 800 m au nord de S1
S3 : à 800 m au sud de S1
Tamaris II S1 : Au milieu de la plage entre le camping international
et les résidences
S2 : à 400 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Wilaya Dar Bouaâza S1 : Milieu de la plage non rocheuse en face du poste
des Forces Auxiliaires
du grand S2 : à 80 m au nord de S1
Casablanca S3 : à 80 m au sud de S1
Oued Merzeg S1 : Nord oued Merzeg milieu de la plage
S2 : à 400 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Madame Choual S1 : Entrée principale au sud du complexe Nozha
S2 : à 120 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Aïn Diab S1 : Devant Mc Donalds
S2 à S8 : Distants de 400 m
Aïn Sebaâ S1 : Milieu de la plage en face du parking
S3 : à 200 m au sud de S1
Grand Zenata S1 : En face du poste de gendarmerie
S2 : à 800 m au nord de S1
S3 : à 800 m au sud de S1
Oulad Hmimmoun S1 : Entrée principale, milieu de la plage
S2 : à 200 m au nord de S1
S3 : à 200 m au sud de S1
David S1 : Au nord de l’embouchure, milieu de la plage
S2 : à 200 m au nord de S1
S3 : à 200 m au sud de S1
Mohammedia S1 : Plage du centre, en face du poste de la Protection Civile
S2 : à 1000 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Bouznika S1 : En face du poste de la protection civile
S2 : à 600 m au nord de S1
Province de S3 : à 800 m au sud de S1
Benslimane Dahomey S1 : Milieu de la plage, parking principal
S2 : à 300 m au nord de S1
S3 : à 300 m au sud de S1
299
Skhirat S1 : Au sud du palais, milieu de la plage
S2 : à 400 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Val d’or S1 : Milieu de la plage (nord oued ikem)
S2 : à 120 m au nord de S1
S3 : à 120 m au sud de S1
Aïn Atiq S1 : Milieu de la plage
S2 : à 140 m au nord de S1
Province de Skhirat S3 : à 120 m au sud de S1
Témara
Sable d’or S1 : Milieu de la plage (entrée principale)
S2 : à 400 m au nord de S1
S3 : à 400 m au sud de S1
Témara S2 : à 120 m au nord de l’hôtel
Harhoura S1 : Entrée principale
S2 : à 50 m au nord de S1
S3 : à 60 m au sud de S1
Plage des Nations S1 : En face du parking (gendarmerie), milieu de la plage
Wilaya de Rabat S2 : à 400 m au nord de S1
S3 : à 500 m au nord de S2
S2o : 400 m au nord de S1
S3 : à 500 m au nord de S2
My Bousselham S1 : Avant dernier escalier (descente) à gauche de la plage
S2 : à 800 m au nord de S1
S3 : à 800 m au nord de S2
Wilaya de Kénitra
Mehdia S1 : Milieu de la plage (en face parking principal)
S2 : à 800 m au nord de S1
S3 : à 800 m au sud de S1
Al Quaouss S2 : à 70 m au nord du rejet
S3 : à 50 m au sud du rejet
Miami S1 : Rive droite du oued Loukkos, zone sableuse près des cafés
S2 : à 80 m au nord de S1
S3 : à 50 m au sud de S1
Province de Larache
Ras R’mel S1 : Milieu de la plage, nord de la digue
S2 : à 500 m au nord de S1
S3 : à 500 m au sud de S1
Sidi Abderrahim S1 : Entrée principale, milieu de la plage
S2 : à 100 m au nord de S1
S3 : à 100 m au sud de S1
Province de Asilah Briech S1 : Milieu de la plage (camping Tahadarte)
S2 : à 80 m au nord de S1
S3 : à 60 m au sud de S1
Haouzia Entrée principale, en face du café de l’hôtel et du complexe Sandos
Sidi Bouzid Au milieu de la plage
Province d’El Jadida Sidi Abed Au milieu de la plage
Oualidia Côte corniche, en face de l’hôtel Hippocampe
El Jadida ville Au milieu de la plage
Safi En face de l’école de voile, côté digue
Souiria K’dima Au milieu de la plage
Wilaya de Safi Beddouza Au milieu de la plage
Lalla Fatna Au milieu de la plage
300
Essaouira En face de l’hôtel des îles, de l’hôtel Mogador, de la province et l’extré-
mité de la corniche
Province d’Essaouira
Moulay Bouzerktoune Au milieu de la plage
Sidi Kaouki Entrée principale
Agadir Toutes les stations
Taghazout Au milieu de la plage
Wilaya d’Agadir Aghroud Au milieu de la plage
Tifnit Au milieu de la plage
Aglou Au milieu de la plage
Province de Tiznit Mirleft Au milieu de la plage
Sidi Ifni Près du port
Province de Tan Tan El Ouatia Au milieu de la plage
Foum El Oued En face du poste de la protection civile
Province de Laâyoune Tarouma Au milieu de la plage
Kasamar Au milieu de la plage
Province de Boujdour Boujdour Au milieu de la plage
Province de Dakhla Dakhla Au milieu de la plage
301
302
ACCIDENTS ECOLOGIQUES AYANT
TOUCHE LE LITTORAL
303
304
IV. Accidents écologiques
Par nature, un accident écologique est soudain, imprévu et brutal. Il peut hypothéquer pour plusieurs
années les efforts de préservation et de protection de l’environnement. Il entraîne en plus, un coût important
et des dommages, parfois, catastrophiques (cas des accidents pétroliers Kharq V et Sea spirit).
Mis à part, l’apparition naturelle des eaux rouges dans le milieu marin, un accident dans le domaine de
l’environnement n’est jamais le fruit du hasard seul.
Le littoral atlantique a connu, un certain nombre de pollutions accidentelles, ayant affecté aussi bien le
milieu que la ressource :
305
1. L’affaire kharq 5
Dans la nuit du 18 au 19 décembre 1989, pendant sa traversée dans les eaux maritimes marocaines, le
super tanker iranien « Kharg 5 », a eu une explosion au niveau des citernes centrales. Abandonné par les
35 membres de son équipage (grecs, philippins et pakistanais) qui ont été récupérés par le navire de com-
merce russe « SARN », le pétrolier présentait une brèche de plus de 20 mètres de long sur 10 mètres de
large, soit une ouverture de 200 mètres carrés. Selon les observations réalisées sur place, le débit de déver-
sement avait été estimé a, quelques 200 tonnes de pétrole brut par heure. À ce rythme, il aurait fallu
1420 heures, soit 59 jours, pour que les citernes soient totalement vidées de leurs 284 mille tonnes de char-
gement. D’une longueur, hors tout, de presque 340 mètres et de 53,57 mètres de large, le bâtiment avait 18
citernes qui enfermaient du brut de qualité « iranian heavy ».
Plusieurs remorqueurs ont été dépêchés sur place pour éteindre le feu et pour refroidir les citernes. Le
20 décembre 1989, vers la fin de I’après-midi (18 h 05 mn) I’incendie fût totalement maîtrisé.
Le déchaînement constant d’une houle, atteignant 6 a 8 mètres, a rendu difficiles toutes les opérations de
remorquage. Toute une armada d’unités de remorqueurs marocains, espagnols, anglais et hollandais, a effec-
tué un effort titanique pour éloigner le danger. Le « duel » allait durer jusqu’a la fin du mois décembre,
lorsqu’une courte accalmie climatique a permis de virer le navire dans la direction Ouest.
D’un tirant d’eau de 21,73 mètres, le super tanker ne pouvait être accueilli dans aucun port marocain.
Cette éventualité n’était même pas envisageable pour le port de Mohammedia, dont le tirant d’eau ne
dépasse guère les 18 mètres. Ce qui, techniquement, explique en partie le refus catégorique des autorités
marocaines de vouloir, coûte que coûte se débarrasser de cette indésirable nappe géante flottante.
Le 19 janvier 1990, soit un mois après I’accident, Kharg 5 était signalé a 210 milles nautiques des iles du
Cap Vert. Ce n’est que le 4 février, de la même année, que le transbordement des 200 000 tonnes de pétrole
restantes a été effectué a bord d’un autre navire iranien, le SHIR KHOOH, au large de Sierra Leone.
Environ 70.000 tonnes d’hydrocarbures ont été déversés dans les eaux marocaines, et ce juste après la
déflagration du 19 décembre, auxquelles il faudrait ajouter environ 10 000 tonnes, qui ont été déversés
durant la présence du navire en détresse dans le territoire marin national.
La nappe a été signalée de Moulay Bousselham jusqu’a Safi. Dans certaines de ses parties, notamment
celle qui s’était rapprochée le 5 janvier 1990 de la ville d’ Azemmour, elle atteignait une surface de 1 400 km.
Le travail de la houle, des vents et des vagues a disloqué la marée en plusieurs conglomérats de dimensions
différentes.
C’est durant la nuit du 6 au 7 août 1990 qu’une collision a eu lieu entre un pétrolier de nationalité pana-
mienne, le « SEA SPIRIT », et le méthanier norvégien le « HESPERUS ». Le premier transportant
55 000 tonnes de fuel, et faisait route vers le port de Mohammedia, alors que le second était chargé de
35 mille tonnes d’ammoniaque. L’accident s’est produit a environ 6 milles marins au Nord-Ouest de Cap
Sparte] (Tanger), ce qui a eu pour conséquence l’ouverture d’une brèche très importante au niveau du réser-
voir no 8 du premier navire.
Environ 12 mille tonnes de pétrole ont été déversées dans les eaux sous juridiction marocaine, soit
presque 22 % du total de la cargaison. Refusant de I’accepter dans ses ports, I’autorité marocaine a donné la
306
ferme instruction a I’équipage du SEA SPIRIT de s’éloigner le plus possible des cotes nationales. Cette opé-
ration avait été suivie par les unités de la Marine Royale.
Trois semaines après la collision, c’est-à-dire le 31 août, le transbordement du fuel restant a démarré pour
s’achever le 6 septembre. C’est le pétrolier chypriote, « KATINA », qui s’est chargé de cette opération et du
transport de la cargaison jusqu’au terminable de Mohammedia.
Sous l’effet des courants et des vents, la nappe de pétrole s’est déplacée lentement, mais sûrement, pour
atteindre le littoral méditerranéen marocain. Le 10 septembre 1990, la marée noire était déjà à quelques
mètres de la baie d’ Al Hoceima. Quatre provinces principales ont été touchées par cette catastrophe : il
s’agit de Tetouan, Chefchaouen, AI Hoceima et Nador, soit une bande côtière de 460 km.
Nature de l’accident
Déversement en mer de quantités importantes d’acide phosphorique émanant du complexe phosphatier
de Jorf Lasfar.
Région touchée
Frange littorale de Jorf Lasfar
Diagnostic
Les résultats des analyses effectuées après l’accident, ont dénoté une prédominance de l’acide phospho-
rique, au niveau du collecteur principal des rejets du complexe. Cependant, la dilution, le pouvoir épurateur
du milieu et le mouvement des vagues, ont certainement contribué à éviter à la zone de subir de nouvelles
contraintes environnementales.
Nature de l’accident
Mortalité massive de poisson survenue au niveau d’un lac situé à l’intérieur de l’enceinte portuaire de
Casablanca.
Zone touchée
Un lac qui s’étend sur environ 4 Hectares à quelques dizaines de mètres de la côte.
Diagnostic
Les résultats des analyses chimiques, microbiologiques et du phytoplancton toxique, réalisées n’ont donné
aucune explication certaine des causes de l’accident, mis à part l’enregistrement de faibles concentrations
en oxygène dissous. La forte mortalité de poisson pourrait être provoquée par une anoxie du milieu, ayant
provoquée la mort du poisson par asphyxie.
307
Photo 18 : Mortalité massive de poissons survenue au niveau du lac Du port de Casablanca
308
Recommandations
– Remettre du poisson vivant dans le lac et suivre son évolution, afin de vérifier la persistance ou non des
agents responsables de la mortalité ;
– Établir un plan d’urgence permettant de mobiliser les compétences et les moyens nécessaires en un
temps extrêmement court, et ce dans le cadre d’une commission similaire à celle constituée à l’occa-
sion de cet accident.
Nature de la pollution
Pollution organique émanant des rejets domestiques et industriels.
Zone touchée
Le bassin portuaire
Diagnostic
La pollution enregistrée au niveau du bassin portuaire de Larache était due au déversement direct et sans
aucun traitement préalable des eaux usées industrielles, émanant de l’unité industrielle de conservation de la
tomate « Loukkos », provoquant une coloration rouge des eaux du bassin portuaire.
309
Recommandations
– Arrêt immédiat des rejets directs des effluents de l’unité de transformation de la tomate « Loukkos »
dans le bassin portuaire ;
– Nécessité de la réalisation d’une étude d’impact des rejets sur la salubrité du bassin portuaire.
Nature de l’accident
Incendie survenu à la société CPCM, située au niveau de Oukacha.
Zone touchée
Zone littorale de Oukacha.
Diagnostic
Les résultats d’analyses physico-chimiques (nitrates et phosphates) ont enregistré des valeurs légèrement
supérieures à celles normalement mesurées dans la région, ce qui pourrait être dû au déversement de pro-
duits chimiques en mer suite à cet accident. Parallèlement, une mortalité de la moulière bordant la zone la
plus proche de l’usine incendiée a été observée.
Recommandations
Suivi des analyses et quantification des risques de dégradation que pourrait subir la zone, suite à cet
accident.
Nature de l’accident
Apparition massive de poisson, anchois et maquereau, à proximité de la côte.
Zone touchée
La côte casablancaise, située entre Dar Bouazza et Tamaris.
Diagnostic
Les résultats d’analyses n’ont révélé aucun phénomène de pollution côtière, naturel ou provoqué. Cepen-
dant la présence de petits pélagiques, vivants et en parfait état, au bord de la plage est inhabituelle. Ceci
pourrait être lié au phénomène des eaux rouges qui touchaient la frange côtière située entre Larache et Casa-
blanca pendant cette période. Le poisson, fuyant les nappes des eaux rouges, à la recherche des zones plus
oxygénées, s’est retrouvé au bord de la plage.
310
8. Accident de pollution par le charbon au niveau de la côte de
Mohammedia. (Août 1999)
Nature de l’accident
Déversement en mer de quantités importantes de charbon brûlé émanant de la centrale thermique de
Mohammedia.
Région touchée
Zone côtière de Ouled Hmimoune (située à environ 7 Km au sud de la plage de Mohammedia)
Diagnostic
Il ressort des résultats de la prospection faite sur place, que la nappe noirâtre observée par les pêcheurs et
les habitants de la localité était due au déversement direct en mer à travers les eaux de refroidissement de la
centrale thermique, de grandes quantités de charbon brûlé et donc moins dense pour flotter et constituer
une nappe qui a dérivé sur la plage.
Recommandations
Il a été recommandé :
– de procéder au nettoyage de la plage pour empêcher le relargage des gravats de cendres de charbon
vers le fond marin ;
– que cette opération de vidange, qui est pratiquée par la centrale thermique tous les trois ans, cesse et
ne se reproduise plus.
311
312
CONCLUSIONS ET
RECOMMANDATIONS
313
314
V. Conclusions et recommandations
Il ressort des différents chapitres traités dans ce document, que les études menées ne permettent pas de
dégager de tendances (progressives ou dégressives) significatives des différents paramètres renseignant sur
l’état de l’environnement du milieu marin (données disponibles sur des périodes courtes). Néanmoins, elles
permettent de montrer que le littoral connaît plusieurs points de contamination et de pollution, notamment
chimique et biologique d’origine tellurique et naturelle (efflorescences phytoplanctoniques). Cette pollution
reste localisée au niveau des points de rejet des émissaires urbains et industriels.
Faut-il conclure du caractère localisé de cette pollution que la situation est loin d’être dramatique ?. Plu-
sieurs questions peuvent nuancer cette hypothèse. En effet, les connaissances sur l’impact des différents
rejets sur les nurseries et les frayères, où viennent se regrouper les juvéniles pour profiter, notamment de
l’abondance de la nourriture sont insuffisantes.
Par ailleurs, le bilan dressé fait ressortir les faits marquants suivants :
– Les zones de production conchylicole littorales ne présentent aucune contamination notable ;
– La pollution chimique et bactériologique affecte plus particulièrement les zones urbaines et industrielles
(Tetouan, Kénitra, Casablanca, Mohammedia, Jorf Lasfar, Safi et Agadir,...), où des taux élevés notam-
ment en métaux lourds, en hydrocarbures de pétrole, et en coliformes fécaux ont été décelés dans les
différents compartiments du milieu marin : eau, sédiment et organismes marins essentiellement, coquil-
lages bivalves utilisés en tant que bioindicateurs de la pollution.
Les concentrations les plus importantes concernent le chrome au niveau de Kénitra, le mercure, le cuivre,
les PCB et les hydrocarbures au niveau de Casablanca– Mohammedia, le cadmium et le cuivre au niveau de
Jorf Lasfar et Safi et enfin les hydrocarbures au niveau d’Agadir. Ceci dénonce l’impact des rejets urbains et
industriels, évacués souvent sans aucun traitement préalable, sur le milieu marin ;
– Les zones protégées et à intérêt écologique, notamment les lagunes de : Nador, Moulay Bousselham,
Oualidia, Sidi Moussa et la baie de Dakhla, présentent :
R une certaine bioaccumulation des métaux lourds ainsi qu’un enrichissement en éléments nutritifs
(nitrates et phosphates), observé au niveau d’échantillons d’organismes marins et d’eau provenant de
ces milieux. Ceci peut contribuer à long terme, à modifier la qualité du milieu et à empêcher voire frei-
ner le développement de l’activité aquacole, si des mesures de préservation ne sont pas prises ;
R des concentrations importantes en coliformes fécaux par périodes intermittentes, dépassant les seuils
admissibles au niveau des zones recevant des rejets urbains ;
– Les estuaires, notamment Loukkos, Sebou, Bouregreg et Oum Erbia, véhiculant les eaux continentales
chargées en substances polluantes, contribuent à la dégradation de la qualité des eaux marines ;
– L’augmentation de la fréquence d’apparition des efflorescences phytoplanctoniques, et l’accroissement
de l’emprise géographique des apparitions ;
– Les efflorescences phytoplanctoniques nuisibles se produisent plus fréquemment en Méditerranée
qu’en Atlantique. En effet, le littoral méditerranéen, notamment sa partie occidentale (Oued Laou– Kaâ
315
Srass), se caractérise par la contamination permanente de la coque rouge par la toxine paralysante (PSP),
à des taux dépassant largement le seuil permis ;
– La surveillance a permis de mettre en évidence les espèces de phycotoxines responsables de la conta-
mination des mollusques bivalves sur les côtes marocaines. L’inventaire des espèces nuisibles doit être
tenu pour provisoire (ce n’est qu’un ” état de lieu ”). Il existe bien des espèces nuisibles de par le
monde, qui peuvent une année ou l’autre, coloniser les côtes marocaines suite aux différents change-
ments climatiques. Le cas de détection de phycotoxines PSP en 1994 et des phycotoxines DSP en
1999, révèlent bien l’existence de dangers potentiels.
Le passage en revue de ces différentes conclusions montre qu’il reste beaucoup à faire. La préservation
du patrimoine littoral et de son système écologique reste tributaire des mesures d’urgence à entreprendre
par les pouvoirs publics. Ce patrimoine côtier mérite, de la part des autorités concernées comme du grand
public qui en profite, une mobilisation des efforts, afin de le sauvegarder et de le préserver de toute détério-
ration.
Aussi et face à cette situation, les pouvoirs publics ont réagi par l’élaboration durant les années 1980 et
1990, de nombreux plans et programmes d’intervention visant la sauvegarde et le développement des res-
sources naturelles et à un degré moindre l’amélioration du cadre de vie des populations . La plupart de ces
initiatives n’ont cependant connu qu’un succès relatif. Elles ont été souvent conçues et mises en œuvre plus
ou moins isolément, sur la base de projets, sans cohérence entre elles, ni réelle approbation de la part des
acteurs et des population concernées.
C’est précisément cette situation que la programme d’action national pour l’environnement (PANE) a sou-
haité changer. Il se veut être la suite logique de la stratégie nationale de l’environnement et du développe-
ment durable mise en place par le département de l’environnement . À ce titre, il propose un ensemble
d’actions qui s’inscrivent dans les domaines prioritaires suivants :
– Protection et gestion durable des ressources en eau ;
– Protection et gestion durable des ressources en sols ;
– Protection de l’air et promotion des énergies renouvelables ;
– Protection et gestion durable du milieu naturel ;
– Prévention des catastrophes naturelles et des risques technologiques majeurs ;
– Amélioration de l’environnement urbain et péri-urbain ;
– Gestion et communication environnementale.
S’agissant du programme ”Protection et gestion durable du milieu naturel”, bien que les actions retenues
aient été identifiées en raison de la portée de leur impact environnemental et de leur cohérences vis-à-vis de
la stratégie nationale de l’environnement et du développement durable et les conventions internationales qui
engagent la Maroc, celles-ci ne concernent cependant, pas directement les mesures de préservation et de
limitation des différentes pollutions que connaît le milieu marin marocain, le littoral en particulier. En effet,
des actions spécifiques doivent être retenues portant principalement, conformément au plan d’action mon-
dial pour la protection du milieu marin, sur les sources d’eaux usées, des polluants organiques persistants,
316
des radionucléides, des métaux lourds, des hydrocarbures de pétrole, des nutriments, des sédiments conta-
minés et des déchets solides, les aspects réglementaires, les infrastructures, la surveillance et le contrôle.
1. Actions du PANE
317
mollusques bivalves ne cessent d’être rapportées à proximité des ports. La communauté internationale
s’inquiète de la toxicité de ce composé, et des mesures de contrôle nationales doivent être prises.
Radionucléides
En raison de l’absence de sources terrestres importantes (p. ex., centrales nucléaires). Il faut accorder une
faible priorité aux radionucléides.
Métaux lourds
La présence dans le milieu de métaux lourds et de composés métalliques peut poser un risque pour la
santé humaine, du fait de la consommation de produits de la mer dans les régions où les teneurs sont impor-
tantes. Parmi les sources de métaux lourds qui ont une priorité élevée, on compte les complexes industriels
concentrés au niveau de l’axe Kénitra-Safi.
Pétrole et hydrocarbures
La présence dans le milieu des hydrocarbures de pétrole peut poser un risque pour la santé humaine, du
fait de la consommation de produits de la mer dans les régions où les teneurs sont importantes. Parmi les
sources d’hydrocarbures qui ont priorité élevée, on compte les complexes industriels concentrés au niveau
de l’axe Mohammedia-Casablanca et l’activité portuaire.
Nutriments
Les nutriments ont une faible priorité dans les eaux marines. Il faut s’en préoccupe dans les baies et
lagunes en raison de leur fragilité.
Déchets solides
L’impact esthétique des déchets solides leur confère une faible priorité, mais leur impact biologique local
n’a pas été documenté.
Les actions suivantes visent à renforcer et étoffer les nombreux règlements, lois et programmes déjà en
place pour atteindre les buts et objectifs de protection et de lutte contre la pollution notamment celles rete-
nues dans le cadre du plan national (PANE).
318
Cependant, la non ratification ou la non adoption de certains instruments internationaux par le Maroc
démontre, soit sa réticence à l’égard de telle ou telle convention, soit un manque d’intérêt pur et simple.
Aussi, il est urgent de palier à ce déficit, dans l’engagement du Maroc à l’échelle internationale ou régio-
nale
– La mobilisation des compétences et moyens nécessaires à la prévention des accidents qui menacent
l’équilibre des écosystèmes et à la correction de leur impact sur ces derniers. À ce sujet, l’arrêté portant
sur l’application du décret No 2-95-717 du Rajab 1417 (22 Novembre 1996) relatif à la préparation et à la
lutte contre les pollutions marines accidentelles, a pour objectif de fixer les mesures d’application des
dispositions du décret mentionné ci dessus, notamment les conditions de déclenchement de l’alerte en
cas de pollution, de la mise en action du plan d’urgence national et à son exécution ainsi que les
mesures de préparation de lutte et les rôles des différents intervenants.
De ce fait et vu les taches et les responsabilités attribuées aux différents intervenants dans le cadre de cet
arrêté, il est nécessaire, voire obligatoire, de doter ces intervenants des moyens nécessaires à l’exécution de
leurs missions. Ces moyens sont les suivants :
319
A. Formation
Conformément au chapitre III de l’arrêté, il faut prendre les dispositions nécessaires pour que soit dis-
pensé aux scientifiques impliqués, des formations auprès des organismes internationaux reconnus dans ce
domaine (CEDRE, I.F.P...) et ceci en matière :
– de techniques d’échantillonnage et d’analyses d’hydrocarbures brutes,
– de connaissance des types d’hydrocarbures, ainsi que d’autres formations liées aux taches attribuées
aux intervenant.
B. Moyens
Afin de pouvoir réaliser les prélèvements et les analyses des échantillons et de mener l’étude d’impact au
niveau des zones touchées, il faut doter les institutions impliquées des équipements nécessaires et non exis-
tants dans leurs laboratoires.
A. Contaminants
– Dresser un inventaire des substances chimiques toxiques et fournir des informations et des conseils
techniques quant à leur utilisation et leur quantités ;
– Rationaliser l’utilisation des pesticides ;
– Interdire l’utilisation du TBT conformément aux recommandations internationales.
B. Eaux usées
– Formuler et adopter des objectifs de qualité du milieu et des valeurs limites de rejet ;
– Formuler et adopter des objectifs de qualité des zones conchylicoles ;
– Raccorder l’ensemble des villes et des agglomérations urbaines côtières à des réseaux d’assainisse-
ment
– Mettre à la disposition des industriels des structures de soutien et financières en vue de faire face aux
problèmes de dépollution, et ce, dans l’attente de la mise en place de stations d’épuration. En effet, Le
pays compte une soixantaine de stations d’épuration. dont seulement deux fonctionneraient conve-
nablement.
– Procéder à l’achèvement du plan d’assainissement du grand Casablanca, notamment au niveau central
et de la ville de Mohammedia.
320
– Compte tenu du risque environnemental que pose le problème de l’évacuation des phosphogyps en
mer, il est temps de penser aux procédés de stockage de ces phosphogyps en les mettant à terril au sol
par exemple, tel que s’est pratiqué largement à travers le monde, notamment un stockage dans les par-
ties abandonnées et épuisées des mines de phosphate. Ceci présente l’avantage de disposer du phos-
phogyps dans le cas de son éventuelle utilisation comme matière première dans plusieurs possibilités
de valorisation.
Aassiri A., 2001. Impact des eaux usées déversées par Oued Sebou sur le littoral de l’océan atlantique : Éva-
luation de la contamination par les métaux toxiques. Mémoire de DESA, INRH/Université Mohammed V,
faculté des sciences, Rabat.
Aaziz M., 1999. Salubrité d’un écosystème littoral. Cas particulier de la lagune de Oualidia au Maroc : Étude
des facteurs abiotiques chimiques et des facteurs biotiques bactériologiques et phytoplanctoniques.
Mémoire de fin d’étude DESS, (INRH) Université du Havre, Faculté des sciences et techniques, France.
Aminot A. et Chaussepied M., 1983. Manuel des analyses chimiques en milieu marin. CNEXO.
Azzimane L., Romli E., Hommani M et Bikour M. 1999. Détection des phycotoxines amnésiques dans les
mollusques bivalves récoltés sur le littoral marocain. XVIe Congrès Vétérinaire Maghrébin, 6-7 mai, Marra-
kech.
ASTM, 1989. Standard guide for conducting stati acute salt water bivalve molluscs. ASTM. E 724-89, Ameri-
can Society for Testing and Materials, Filadelfia, PA, pp. 334-351.
Azzaoui S., 1999. Les métaux lourds dans le bassin versant du Sebou. Géochimie, sources de pollution et
impact sur la qualité des eaux de surface. Thèse de doctorat National. Université Ibn Toufail, Faculté des
sciences – Kénitra, pp. 134.
Balech E., 1985. – The genus Alexandrium or Gonyaulax of the tamarensis group : 33-38. In Anderson D.M.,
Dinoflagellates, Elsevier, NY.
Benbrahim S., Chafik A, Dafir J., Zidane F., 1997. Contribution à l’étude d’impact des rejets liquides sur le
littoral casablancais. Les 2e Journées Maghrébines des sciences de la mer, 20-21 et 23 Décembre, Agadir.
Benbrahim S., Chafik A. et Sifeddine M., 2000. Suivi pluriannuel de la contamination de la moule Mytilus
Galoprovincialis sur le littoral atlantique. 5e Journées Vétérinaires Nationales, 27 et 28 Octobre – Tanger,
Maroc.
Benhra A., Chafik A. et El Ghazi I., 2001. Les métallothionéines : des outils évaluateurs de l’état de santé du
milieu marin. Travaux et Documents, INRH.
Benhra A., 2000. Utilisation des effets biologiques dans le cadre de la biosurveillance du milieu marin. 5e
Journées Vétérinaires Nationales, 27 et 28 Octobre – Tanger, Maroc.
Benhra A., 1999. Utilisation de l’huître creuse (Crassostréa gigas) comme bioindicateur des effets biolo-
giques de la pollution en milieu marin. First international conference on biodiversity and natural ressources
preservation, 13 – 15 Mai, Ifrane, Maroc.
Bernoussi A., 1996. Études de la qualité bactériologique des principales zones conchylicoles du littoral maro-
cain de 1993-1995.Travaux et Documents no 91 – INRH.
Bouthir F.Z., Chafik A., Benbrahim S., Souabi S., Benyoussef I. et Sifeddine M., 2001. Étude de la conta-
mination métallique au niveau du littoral de Mohammedia (Maroc). 7e Congrès International des Océano-
graphes de France. Lille – France.
Chafik A., Benbrahim S., Bouhallaoui A., Semlali A., Benhra A. et Cheggour M., 1999. Impact des rejets
321
urbains sur le littoral : cas d’El Jadida et de Casablanca. 1res journées nationales des sciences de la mer, 11
et 12 Février Mohammedia.
Chafik A., Cheggour M., Cossa D., Benbrahim S. et Sifeddine M., 2001. Quality of moroccan atlantic coas-
tal waters : water monitoring and mussel watching. Aquat. Living Resour., 14, pp. 239-249.
Chafik A., Cheggour M., Kaimoussi A., 1996. Étude préliminaire de l’impact des activités de traitement et
de transformation des phosphates sur le milieu marin : Cas de Jorf Lasfar. Travaux et Documents no 94,
INRH.
Cheggour M., 1999. Évaluation de la contamination métallique sut la côte atlantique marocaine et son envi-
ronnement paralique entre Larache et Safi. Étude de mollusques bivalves et leur biotope sédimentaire.
Thèse de doctorat d’état, Université Cadi Ayyad, Faculté des sciences Semlalia, Marrakech, pp. 314.
Cheggour M., Chafik A., 1999. Géochimie des sédiments superficiels de deux lagunes atlantiques maro-
caines : Merja Zerga et lagune de Sidi Moussa : Impact sur la contamination métallique de la coque comes-
tible Cerastoderma edule (Mollusque Bivalve). Les 1res Journées Maghrébines des Sciences de la Mer, 11
et 12 Février Mohammedia.
Cheggour M., Chafik A., Langston W.J., Burt G.R., Benbrahim S. et Texier H., 2001. Metals in sediments
and the edible cockle Cerastoderma edule from two moroccan atlantic lagoons : Moulay Bousselham and
Sidi Moussa. Environmental pollution, 115, pp. 149-160.
Cheggour M., Chafik A., Texier H., Bouhallaoui A., Charbi N., Boumezzough A. et Elattar J., 1999. Bioac-
cumulation de quelques éléments métalliques chez l’huître Crassostrea gigas (Thunberg) en élevage dans
la lagune de Oualidia (Maroc) : rôle des facteurs écologiques et biologiques. Haliotis 28, pp. 31-44.
Cheggour M., Langston W.J., Chafik A., Texier H., Idrissi H. et Boumezzough A., 1998. Phosphate indus-
try discharges and their impact on metal contamination and intertidal macrobenthos : Jorf Lasfar and Safi
coastlines (Morocco). Toxicological and environnemental chemistry, vol. 70, pp. 159-179.
Circulaire conjointe No 1246/01 du Ministère de l’Agriculture, du Développement Rural et des Forêts et le
Ministère de la Pêche Maritime relative à la surveillance du milieu et au contrôle de Salubrité des coquil-
lages. 12/11/2001
El Agbani M.A. and al., 1988. The Khnifiss lagoon and adjacent waters : hydrology and hydrodynamics.The
Khnifiss lagoon and its surrouding environment. Dakki, M. and Ligny, W. de (eds). Trav. Inst. Sci., Rabat,
mém. Hors série, pp. 17 à 26.
El Attar J., 1998. Contribution à la détermination de l’origine de la contamination fécale dans la lagune de
Oualidia et étude de la contamination bactériologique de l’huître en conditions naturelles et expéri-
mentales. Thèse de 3e cycle, Universitaire Chouaib Doukkali, El Jadida.
El Gharbaoui A, 1981. La terre et l’Homme dans la péninsule triangulaire, étudié sur l’Homme et le milieu
naturel dans le Rif occidental. Trav. Inst. Sci. Rabat, no 15
Fraga S, Anderson D.M, Bravo I, Reguera B, Steindenger K.A and Yentsch C.M.,1988. Influence of
Upwelling relaxation on dinoflagellates and shellfish toxicity in Ria de Vigo, Spain. Est, cost and Shelf sci
27 : pp. 349-361.
Gaujous D., 1993. La pollution des milieux aquatiques : Aide – Mémoire. Technique et documentation –
Lavoisier.
Gregory G and Taylor F.J.R., 1986. – A mariculturist’s guide to potentially harmful marine phytoplancton of
the pacific coast of north America. Information rep No 10. B.C. Ministry of environment, pp. 55.
Hallegraeff G.M, Sumner C.,1988. – Toxic Plankton Blooms affect shellfish farms. Austral Fish, 158, 4 p.
Hilmi K., Larissi J., Zizah S., Makaoui A., 1999. Les changements des conditions hydrologiques et meteo-
rologiques de la côte atlantique marocaine de 1994 à 1998. Synthèse océanographique de la côte atlan-
tique marocaine de 1994 à 1998. Travaux et Documents INRH.
His E., Heyvang I., Geffard P. & De Montaudouin X., 1999. A comparison between oyster (Crassostrea
322
gigas) and sea urchin (Paracentrotus lividus) larval bioessays for toxicological studies. Wat. Res. Vol. 33,
No 7, pp. 1706-1718.
Id Halla M., Touyer O., Texier H., Moukrim A., 1996. Study of the physico-chemistry waters in domestic
and industrial wastes (Agadir – Morocco) and their impact on the sea water quality. Troisième Congrès
International des Océanographes de France. Nantes – France.
Idrissi H, Tahri J.L, Bernoussi A, Chafik A et Taleb H, 1994. Évaluation de la salubrité du littoral méditerra-
néen et atlantique nord (Saïdia-Safi) durant la période 1992-1994. Travaux et Documents no 77.I.S.P.M.
Jaaidi B., Ahmamou et Zougary R., 1992. Impact des aménagements portuaires sur la dynamique côtière :
cas de M’diq, Restinga Smir, Tanger et Assilah. Aménagement littoral et évolution des cotes. Com. Océa-
nog. Paris, 13 no 5, p. 276-291
Jayed M., El attar J., Benbrahim S., Chafik A., 1999. Contribution à l’étude de la pollution organique dans la
lagune de Oualidia. 1res journées Maghrébines des Sciences de la Mer, 11 et 12 Février, Mohammedia.
Kaimoussi A., Chafik A., Mouzdahir A. et Bakkas S., 2001. The impact of industrial pollution on the Jorf
Lasfar coastal zone (Morocco, Atlantic océan) : the mussel as an indicator of metal contamination. Acad.
Sci. Paris, Sciences de la terre et des planètes, 333, p. 337-341.
Larissi J., Hilmi K., Zizah S. et Makaoui A., 1999. Variabilité des paramètres hydrologiques de la zone sud
atlantique marocaine (Cap Boujdor – Cap Blanc) durant les années 1994 et 1997 par l’analyse en compo-
santes principales (ACP). Synthèse océanographique de la côte atlantique marocaine de 1994 à 1998, Tra-
vaux et Documents INRH.
Lecoz J. 1964. Le Rharb : Fellahs et colons. Tome 1 : les cadres de la nature et de l’histoire, Thèse Doctorat.
Rabat : 481 p.
Makaoui A., Orbi A., Larissi J., Zizah S., Hilmi K., 2000. Principales caractéristiques océanographiques de
la cote atlantique marocaine de 1994 à 1998. Synthèse océanographique de la côte atlantique marocaine
de 1994 à 1998. Travaux et Documents INRH.
Massio J., 1993. Élaboration et validation d’un modèle simple de mélange des eaux en estuaire. Application
au Bou Regreg (côte Atlantique marocaine). Annls Limnol. 29 (2) : pp. 203-216.
Mauvais J.L., 1988. La qualité des eaux côtière, de quoi s’agit – il ? comment lutter contre la pollution. Equi-
noxe no 23, pp. 4-7.
Mauvais J.L., Goarnisson R., 1999. État de l’environnement sur la façade atlantique. Bilans et prospectives,
Ifremer, pp. 140.
Morel M., 1999. Surveillance de la qualité de l’environnement littoral : proposition pour une meilleure coordi-
nation des réseaux. Bilans et prospectives, Ifremer, pp. 36.
Mouabad A., 1991. Toxicité comportementale et physiologique chez la moule d’eau douce Dresseina poly-
morpha. Thèse de Doctorat Français. Université de Metz
Nafidi G., 2000. Évaluation de la contamination par les métaux lourds (Cd, Pb, Hg) du poisson débarqué au
port de Casablanca. Mémoire de DESA (1re partie). INRH/Université Chouaib Doukkali, Faculté des
sciences, El Jadida.
Nafidi G., 2000. Contribution à l’évaluation du niveau de contamination du littoral Casablanca – mohammedia
par les hydrocarbures. Mémoire de DESA (2e partie). INRH/Université Chouaib Doukkali, Faculté des
sciences, El Jadida.
Orbi A., 1998. Hydrologie et hydrodynamique des côtes marocaines : milieux paraliques et zones côtières.
Expo’98 – Lisbonne.
Pagano G. & Romana L. A., 1991. L’utilisation des oursins comme témoins de contamination : Tests biolo-
giques sur les embryons et le sperme des oursins pour la surveillance de la pollution marine. Océanis,
vol. 17, Fasc. 4, pp. 367-381.
323
Quiniou F., Judas A. et Le Squer-Andre E., 1997. Toxicité potentielle des eaux et des sédiments des princi-
paux estuaires de la rade de Brest évaluée par deux bioessais. Ann. Inst. Océanog. Paris, 73 (1) : 35-48.
Rapport interne, 1998. Résultats de surveillance de la salubrité du littoral marocain .INRH.
Rapport interne, 1999. Résultats de surveillance de la salubrité du littoral marocain. INRH.
Rapport interne, 2000. Résultats de surveillance de la salubrité du littoral marocain. INRH.
Rapport sur l’état de l’environnement du Maroc, Octobre 2001. Ministère de l’Aménagement du Terri-
toire, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Environnement.
Rapport sur le plan d’action national pour l’environnement. Ministère de l’Aménagement du Territoire,
de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Environnement.
Rapport sur le littoral Marocain, Octobre 2001. Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Urbanisme,
de l’Habitat et de l’Environnement.
Rapport sur la qualité des eaux de baignade, juin 2004. Ministère de l’Aménagement du Territoire, de
l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Environnement et Ministère de l’Équipement et du Transport...
Sarf F.,1999. Dynamique sédimentaire et état de pollution dans la lagune de Oualidia. Thèse de DES, Univer-
sité Mohammed V, Agdal, Faculté des sciences Rabat, pp. 120.
Snoussi M., 1998. Stratégie et méthodologie pour un aménagement intégré et une exploitation durable des
zones côtières marocaines. Expo’98 – Lisbonne.
Souabi S., Chahbane N., Benbrahim S., Chafik A. et Bakkas S., 1999. Impact de la pollution industrielle sur
le milieu marin : cas du littoral de la ville de Mohammedia. Les 1res Journées Maghrébines des Sciences de
la Mer, 11 et 12 Février Mohammedia.
Sournia A, Belin C, Berlan B, Erard-ledenn, Gentien P, Grzeby K D, Marcaillou-le-Baut, Lassus P. et Par-
tensky F.,1991.-Phytoplancton toxique des côtes de France : de la bilogie à la prévention. IFREMER Edts
ISBN-2-905434-309.
Tahri. Joutei. L. 1995a. Étude de Surveillance du phytoplancton toxique sur la Méditerranée marocaine dans
la région de Tetouan (Restinga-Kaâ Sras). Thèse de 3e cycle. I.A.V. Hassan II. Rabat.
Tahri Joutei, L. 1995b. First report of Gymnodinium catenatum from Atlantic Morocco. Harmful Algal News
12/13, 7.
Tahri joutei, L. 1996. Bilan des travaux de surveillance des efflorescences phytoplanctoniques nuisibles sur
les côtes marocaines. Travaux et Documents 96 INRH.
Tahri Joutei, L. 1996b. The toxic marine phytoplankton of the Moroccan mediterranean coast. International
Symposium on Environnemental Pollution and Impact Assessment, SECOTOX, Mohammadia 9-11 Octo-
ber, p. 8.
Tahri Joutei, L. 1998. « Gymnodinium catenatum Graham blooms on Moroccan waters ». In Harmful Algae,
Reguera B., Blanco J., Fernanadez, M.L. and Wyatt, T.Xunta de Galicia and IOC of UNESCO, p. 68-69.
Tahri Joutei, L. 1999. Premier rapport sur la prolifération du phytoplancton toxique dans la lagune de Nador.
Les 1res Journées Maghrébines des Sciences de la Mer. Mohammedia 11 et 12 février 1999.
Tahri joutei, L., Idrissi, H., Shafee, M.S and Berday. N. 1996a. Étude du phytoplancton toxique sur le litto-
ral méditerranéen de Restinga a Kaa Srass. Travaux et Documents no 100 INRH.
Tahri Joutei, L. Berraho, A et Orbi, A. 2000. Harmful Algal Blooms and up welling regim In the Atlantic
shores of Morocco . 9th International Conference on Harmful Algal Blooms. (Hobart, Australia).
Taleb. H, 1997 : Résultats de la surveillance des phycotoxines le long des côtes marocaines de janvier 1994
à mars 1997. Travaux et Documents no 102, INRH.
Taleb H., IDRISSI H., BLAGHEN M., 1998. Seasonnality of PSP in molluscs bivalves of Moroccan coast.
Harmful Algae, Reguera B., Blanco J., Fernanadez, M.L. and Wyatt, T. Xunta de Galicia and IOC of
UNESCO, pp. 68-69.
Taleb H., Tahri Joutei L. et Benhra A., 1995. Étude de la contamination des coquillages par la PSP engen-
324
drée par les efflorescences phytoplanctoniques le long des côtes marocaines de l’Atlantique Nord en
novembre 1994. Travaux et Documents de l’ISPM no 95.
Taleb H , Vale P, Jaime E and Blaghen M. 2001. Study of paralytic shellfish from the Mediterranean shore
of Morocco. Toxicon 39 : 1855-1861.
Uttermöhl H., 1958. – ZurVervollkommung der quantitativen phytoplancton. Methodik mitt. int. ver. theor.
angerrv. Limnol. (9) : 1-38
Zizah S., Hilmi K., Larissi J. et Makaoui A., 1999. Impact des conditions du milieu marin sur les variations
de l’abandonce de la sardine dans la zone centrale (Safi – Cap Boujdor) du Maroc. Synthèse océano-
graphique de la côte atlantique marocaine de 1994 à 1998, Travaux et Documents INRH.
325
326
DÉFINITIONS ET ABRÉVIATIONS
327
328
Définitions et abréviations
Accumulation : C’est la capacité qu’à une substance tels les métaux lourds, de se fixer dans un comparti-
ment donné (sédiment) à des concentrations supérieures aux valeurs naturelles.
Benthos : Toute forme de vie aquatique (animale ou végétale) trouvée sur le fond d’une rivière d’un lac ou
d’un océan.
Bioindicateur : Un organisme ou un ensemble d’organismes dont les réponses biologiques aux différents
facteurs du milieu permettent de caractériser l’état et/ou l’évolution d’un écosystème.
Biomarqueur : Un changement observable et :ou mesurable au niveau moléculaire, biochimique, cellulaire,
physiologique ou comportemental, qui révèle l’exposition présente ou passée d’un individu à au moins une
substance chimique à caractère polluant.
Biotope (habitat) : Tout espace physique solide liquide ou gazeux (air, eau, sol) occupé par un être vivant ou
une population (biocénose).
CE – 50 (concentration effective) : La concentration d’une substance chimique pure ou d’un effluent ou rejet
urbain ou industriel, ayant entraîné 50 % d’effet toxique (inhibition, modification physiologique, anomalie
de développement, mortalité...) chez un individu ou une population d’organismes, après un temps d’expo-
sition donné.
Cd : Cadmium, élément métallique
Coquillages : Toutes espèces de mollusques lamellibranches et gastéropodes marins ainsi que les échino-
dermes et les tuniciers, qui peuvent être consommés crus ou cuits et sont habituellement ingérés avec les
viscères compris.
Coliformes fécaux thermotolérants : Bactéries qui, à la température de 44 o C, fermentent le lactose avec
production de gaz et donnent de l’indole à partir du tryptophane, lorsque l’essai est effectué selon la
méthode spécifiée dans la Norme NF V 45-110.
Contamination : On parle de contamination lorsque les concentrations en une substance donnée (physique,
chimique et biologique) avoisinent ou dépassent les normes admises.
Cr : Chrome, élément métallique
C. Th : Coliformes fécaux thermotolérants
Cu : Cuivre, élément métallique
DCO (demande chimique en oxygène) : La mesure du taux d’oxygène nécessaire à l’oxydation de tous les
composés (organiques et inorganiques), dans l’eau.
DDT : Dichloro diphénil trichloréthane.
DSP : Diarrheic Shellfish Poisoning (la toxine diarrhéique)
Écosystème : Organisation biologique composée de tous les organismes présents dans une aire donnée, et
présentant les interactions entre eux (c’est l’ensemble Biotope c Biocénose c Interaction).
Effets biologiques : Le terme d’effets biologiques désigne toute perturbation, aussi bien au niveau cellulaire
(biomarqueurs), au niveau de l’individu qu’au niveau de la population, permettant à la fois le suivi dans
l’espace et dans le temps de la réponse des organismes à la pression toxique du milieu et à la mise en rela-
tion des sources polluantes et des effets enregistrés.
Eutrophisation : Phénomène caractérisé par un déséquilibre écologique avec, au départ, une fertilisation
329
excessive en éléments minéraux et ou organiques d’origine anthropique dans la couche superficielle ; sa
décomposition ultérieure dans la couche sous-jacente diminue, voire annule la teneur en oxygène gazeux
dissous. Cette anoxie provoque la mort de certains organismes ou le développement d’espèces opportu-
nistes.
HAP : Hydrocarbures aromatiques polycycliques
Hg : Mercure, élément métallique
Hydrocarbures : Au sens strict, sont des molécules renfermants des atomes de carbone et d’hydrogène.
Les produits pétroliers sont constitués par un mélange complexe d’hydrocarbures.
Hydrocarbures naphténiques : Hydrocarbures saturés avec une partie cyclique
Hydrocarbures paraffiniques : Hydrocarbures à chaîne droite ou ramifiée, saturée.
Hydrocarbures oléfiniques : Hydrocarbures à chaîne linéaire insaturée.
Lagune : Au sens large, ce terme désigne tout bassin naturel en relation avec la mer ouverte par plusieurs
passes au sens strict.
MES (matières en suspension) : Ensemble des particules solides de petite taille transportées au sein de la
masse d’eau.
Métaux lourds : Éléments métalliques dont le nombre atomique est généralement supérieur à 20 (mercure,
plomb, cadmium...). Ils peuvent induire des dommages à de faibles concentrations, et tendent à s’accumu-
ler dans la chaîne alimentaire.
mg/kg.ps : Concentration ou teneur des métaux lourds exprimée en mg/kg de poids sec de chair de coquil-
lage
mg/kg.equi.chrys. : Concentration ou teneur en hydrocarbures exprimée, par rapport à un étalon chrysène,
en mg/kg de poids sec de chair de coquillage
Sels nutritifs (p éléments nutritifs ou nutriments) : Éléments chimiques indispensables à la synthèse auto-
trophe de matière organique. Le terme est souvent réservé aux éléments dont la concentration constitue
parfois un facteur limitant (ce qui exclut le carbone organique toujours en excès dans la couche de surface
des océans). Le terme est donc synonyme de l’ensemble l’azote, phosphore et silicium inorganiques dis-
sous.
Off-Schore : Partie haute des faciès littoraux vaseux recouverts seulement au moment de très fortes
marées (terme d’origine flamande synonyme de prélassé).
Paralique : Bassin d’eau fermé ou semi-fermé : lacs, baies, lagunes, estuaires.
Pb : Plomb, élément métallique
PCB : Polychlorobiphényls
Pesticides : Produits chimiques utilisés en agriculture pour lutter contre les insectes, moisissures, mauvais
herbes, acariens, vers...
Phycotoxines : Les substances toxiques accumulées par les coquillages quand ils se nourrissent du plancton
contenant ces toxines
Polluants chimiques : Le terme de polluants chimiques désigne l’ensemble des composées toxiques
(métalliques et organiques) libérés dans le milieu ; mais aussi les substances qui sans être vraiment dange-
reuses pour les organismes, exercent une influence perturbatrice sur l’environnement.
Reparcage : L’opération consistant à transférer des coquillages vivants dans des zones maritimes ou lagu-
naires agrées ou des zones d’estuaires agrées, pendant le temps nécessaire à l’élimination des contami-
nants.
Surveillance : Test ou activité continue ou périodique visant à déterminer les niveaux et les effets des pol-
luants, dans différents milieux inertes ou vivants.
Toxicité : Capacité propre d’une substance ou d’un milieu complexe de provoquer des effets nocifs chez les
organismes vivants.
330
Toxicité sublétale : Ensembles des premiers effets (physiologiques, biochimiques, histopathologiques et
comportementaux) d’une substance ou d’un effluent sur différentes fonctions d’un organisme, ou d’un
ensemble d’organismes (population), se situant en dessous des effets létaux (mortels).
Zone conchylicole : Toute partie de territoire maritime, lagunaire, d’embouchure ou d’estuaire où se
trouvent soit des bancs naturels de mollusques bivalves, soit des sites employés pour la culture de mol-
lusques bivalves à partir desquels les coquillages sont récoltés.
Unité souris (US) : Correspond à la quantité minimale de phycotoxines PSP qui tue en 15 minutes une sou-
ris de 20 g après injection intrapéritonéale d’un ml de toxiones sous forme d’extrait.
331
332
LISTE DES FIGURES
333
334
Liste des figures
335
Figure 23 : Comportement de filtration de l’huître creuse en fonction des concentrations des rejets dans le
milieu
Figure 24 : Effet des rejets liquides de la côte casablancaise sur la reproduction de l’oursin de mer
Figure 25 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de l’oursin P. lividus
Figure 26 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de la moule M. galloprovincia-
lis
Figure 27 : Impact des rejets de la côte casablancaise sur la densité spécifique de l’anémone Anemonia sul-
cata
Figure 28 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en
mg/Kg.ps
Figure 29 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en
mg/Kg.ps
Figure 30 : Évolution de la qualité bactériologique (C.Th./100 g de chair et de liquide intervalvaire)des coquil-
lages de la lagune de Sidi Moussa
Figure 31 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages
(Oualidia) en mg/Kg.ps
Figure 32 : Évolution de la qualité bactériologique des coquillages de la lagune de Oualidia durant l’année
2000
Figure 33 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle) dans la chair des coquillages en mg/Kg.ps
Figure 34 : Concentrations des métaux lourds (moyenne annuelle) dans la chair des coquillages en mg/Kg.ps
Figure 35 : Évolution de la qualité bactériologique (C.Th./100 g de chair et de liquide intervalvaire) des coquil-
lages de Cap Ghir
Figure 36 : Évolution de la qualité bactériologique (C.Th./100 g de chair et de liquide intervalvaire) des coquil-
lages de Tamri
Figure 37 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en
mg/Kg.ps
Figure 38 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages
(Khnifiss) en mg/Kg.ps
Figure 39 : Évolution de la qualité bactériologique des coquillages de la lagune de Khnifiss durant les années
2000-2001
Figure 40 : Concentrations (moyenne annuelle) en métaux lourds enregistrées dans la chair de coquillages en
mg/Kg.ps
Figure 41 : Évolution de la qualité bactériologique des coquillages de la baie de Dakhla 2000-2001
Figure 42 : Évolution des toxines PSP dans a) les praires et b) les vernis de Cap de l’eau
Figure 43 : Évolution des taux de toxines PSP dans les coques de a) Saïdia et b) Cap de l’eau
Figure 44 : Évolution des taux des toxines PSP dans les coques de a) Kaâ Srass b) Oued Laou et c) Martil
Figure 45 : Taux de toxine PSP enregistrés dans les moules et haricots de mer de Plage Blanche
Figure 46 : Taux de toxines PSP enregistrés dans les moules de la région d’Agadir
Figure 46 : Taux de toxines PSP enregistrés dans les moules de la région d’Agadir
(suite)
336
LISTE DES TABLEAUX
337
338
Liste des tableaux
Tableau 1 : Teneurs moyennes en métaux lourds (mg/Kg p.s) enregistrées dans le muscle de différentes
espèces de poissons entre 1997 et 1999
Tableau 2 : Profil d’impact des rejets de la côte de la Wilaya du Grand Casablanca
Tableau 3 : Interdiction des régions de production conchylicole en raison de la présence des phycotoxines
Tableau 4 : Critères d’évaluation de la qualité microbiologique et chimique (échelle arbitraire de couleur)
339
340
LISTE DES PHOTOS
341
342
Liste des photos
343
Les écosystèmes agricoles et pastoraux
État des lieux et voies d’évolution
Introduction ........................................................................................................347
345
Conclusion......................................................................................................... 388
Références bibliographiques.................................................................... 388
HAMID NARJISSE
346
Les nations sont de temps en temps interpellées pour évaluer les étapes franchies pour leur développe-
ment, et faire le point sur leurs points de force et de faiblesse. Le cinquantenaire de l’accession du Royaume
du Maroc à son indépendance offre une opportunité toute indiquée pour procéder à un exercice de rétro-
spective et de prospective. Ce rendez vous a une forte charge symbolique. Il intervient à l’aube du troisième
millénaire qui représente pour le Maroc un tournant historique, marqué par l’avènement d’un nouveau règne
déterminé à instaurer un concept adapté de l’autorité, à promouvoir la modernité du pays et à renforcer la
libéralisation de son économie. Cet exercice de prospective est aussi d’une actualité brûlante, car il coïncide
avec le lancement du grand chantier du projet territorial national, matérialisé par la récente adoption du
Schéma National de l’Aménagement du Territoire (SNAT).
La présente note est une contribution à cet effort de veille stratégique. Elle porte sur le thème « cadre
naturel, environnement et territoires » et focalise sur le secteur agricole, qui demeure essentiel pour le déve-
loppement économique et social de notre pays. Ce secteur est confronté à une situation exceptionnelle dic-
tée par les échéances de l’intégration de notre agriculture au marché international, ce qui représente pour
notre pays à la fois un défi et une opportunité et qui réclame des remises en cause radicales. Le secteur agri-
cole a déjà connu, au cours des dernières cinquante années, des mutations consécutives :
– à l’évolution des politiques de développement économique et social mises en œuvre depuis l’indépen-
dance, et
– aux réformes induites (désengagement de l’État, libéralisation de l’économie, décentralisation) qui ont
profondément marqué le secteur et considérablement bouleversé les pratiques et les rôles des diffé-
rents acteurs.
Ces mutations sont appelées à se poursuivre comme le laissent supposer les engagements récents des
pouvoirs publics en faveur d’une libéralisation du secteur agricole, y compris ses composantes les plus sen-
sibles. Toutes ces considérations rendent impérative, pour le Maroc, la nécessité d’une veille stratégique et
de prospective en vue de :
– saisir l’importance du secteur agricole et appréhender les enjeux et les facteurs qui déterminent son
évolution, ainsi que l’impact des changements qu’il subit ;
– anticiper les changements, et produire des contenus pour construire des visions et éclairer les décisions
quant aux politiques futures de développement durable.
Ce rapport est organisé en trois parties. Nous dresserons d’abord un état des lieux, puis nous procéderons
à un exercice de prospective et dégagerons l’évolution tendancielle pour les 20 prochaines années. Enfin,
nous fournirons dans une troisième partie quelques éléments d’une vision pour une politique de développe-
ment rural durable.
347
I. Les écosystèmes aménagés : état des lieux
Le Maroc dispose de 9,2 millions hectares (ha) cultivables, dont 13 % seulement sont irrigués, 5.8 millions
ha de forêts, trois millions ha de nappes alfatières et 21 millions ha de terrains de parcours exploitables.
L’agriculture marocaine se déploie dans le cadre de deux sous secteurs très contrastés. Le premier, tradition-
nel, mobilise les 9/10e de la population rurale, et se caractérise par le recours à des techniques agricoles rudi-
mentaires et la prédominance des petites exploitations vivrières. Le second, moderne, concerne
1 500 000 ha environ. L’agriculture y est mécanisée, moyennement intensive et orientée vers le marché et
l’agro-industrie.
En dépit de la diversification de l’économie marocaine, l’agriculture demeure encore un secteur vital,
contribuant entre 13 % et 20 %, selon les campagnes agricoles, au PIB national et procurant 80 % de
l’emploi rural et plus de 40 % de l’emploi au niveau national. Le secteur agricole joue aussi un rôle important
dans le commerce extérieur national. Durant la décennie 1990, les importations agricoles ont représenté en
moyenne 19 % de la valeur des importations globales, alors que la part des exportations agricoles par rapport
aux exportations globales a été de 18 %.
348
Figure 1. Évolution du PIBA et du PIB, en termes constants, 1990-2001 (Akesbi. 2002)
Dès les premières années de l’indépendance, l’agriculture a été placée au cœur de la politique de déve-
loppement du Maroc. Durant une première phase, l’intervention de l’État poursuivait l’objectif de modernisa-
tion de l’agriculture marocaine, à travers le lancement des opérations engrais, semences et labour. Cette
dernière fut la plus spectaculaire par son envergure. Elle s’articulait autour de trois composantes : la mécani-
sation, le remembrement, et l’encadrement. Cette première phase a été suivie d’une seconde plus volonta-
riste, plus intense, mais sélective, menée jusqu’à la fin des années 1970. Celle-ci consistait à promouvoir une
politique de grande irrigation marquée par le développement des cultures d’exportation et de substitution
des produits alimentaires importés. Elle s’est déclinée en un ensemble de plans d’action sectoriels portant
notamment sur les produits alimentaires de base et mis en œuvre grâce au support budgétaire permis par le
Code des Investissements Agricoles.
Au cours des années 1980, la politique d’ajustement structurel (PAS), arrêtée avec le concours de la
Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International, fut élargie au secteur agricole (PASA) à partir de 1985.
Les orientations du PASA s’articulaient autour d’un axe principal constitué par le désengagement, l’instaura-
tion d’une politique de « vérité des prix » à la production et à la consommation, et l’abandon progressif de la
subvention aux intrants agricoles. Cette période fut aussi marquée par un regain d’intérêt pour les zones bour
favorables qui ont fait l’objet d’un ensemble de projets de développement intégré (PDI) destinés à corriger
les déséquilibres qui existaient entre les zones d’agriculture pluviale et les zones irriguées. Ces projets
visaient en général l’amélioration des revenus et des conditions de vie des populations des zones bénéfi-
ciaires.
À partir du début des années 90, la volonté de libéralisation de tous les secteurs de l’économie marocaine
rentre dans une phase décisive. Elle se manifeste par l’entrée en vigueur de l’accord du cycle d’Uruguay en
349
1994, l’institutionnalisation officielle de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995, et la signa-
ture de l’accord d’association avec l’Union Européenne en 1996, puis les accords de zones de libre-échange
avec l’Égypte, la Tunisie, la Jordanie, et la Turquie en 2004, et de libre-échange avec les États Unis d’Amé-
rique la même année.
Ces réformes et l’option retenue de libéralisation de l’économie n’ont pas manqué de susciter des inquié-
tudes, en ce qui concerne les menaces qui pèsent sur la viabilité et la pérennité du secteur agricole national.
Ce contexte a amené les autorités marocaines à élaborer, en 1999, une stratégie de développement rural, et
organiser l’année suivante un Colloque National sur l’Agriculture et le Développement Rural, au cours duquel
a été présentée et validée la Stratégie de Développement de l’Agriculture Marocaine à l’horizon 2020. Cette
stratégie exprime une volonté politique articulée autour du lancement progressif d’une nouvelle génération
de projets de développement rural intégré (DRI) et accorde une priorité aux espaces ruraux n’ayant pas fait
l’objet d’investissements publics significatifs par le passé.
La typologie des zones agro-écologiques du Maroc, établie sur la base des hauteurs de précipitation, per-
met de définir cinq espaces agro-climatiques principaux : le bour favorable, le bour intermédiaire, le bour
défavorable de l’Oriental et du Sud, la montagne et les oasis. Les caractéristiques pluviométriques de ces
espaces et leur étendue sont consignées dans le tableau 1.
L’examen du tableau 1 met en évidence le caractère pluriel de l’agriculture marocaine. Celle-ci comprend
quatre principales composantes, à savoir :
– l’agriculture irriguée
– l’agriculture pluviale
– l’agriculture de montagne
– l’agriculture oasienne
350
comptaient à peine 10 % de la SAU, se sont vues attribuer plus de 40 % de l’enveloppe budgétaire allouée
au secteur agricole durant la période 1968-1972. L’État ne s’est pas contenté de mobiliser l’eau et de réaliser
les équipements externes, il a également exécuté les travaux d’équipement interne, et imposé les assole-
ments et les techniques culturales. Le Code des Investissements Agricoles, promulgué en 1969, constituait
le support budgétaire de cette politique.
Actuellement, plus de 113 barrages sont réalisés et permettent d’irriguer neuf grands périmètres, dont la
superficie irrigable atteint 880 200 ha en l’an 2000, alors que celle effectivement équipée ne dépasse pas
671 700 ha à la même date (tableau 2).
Tableau 2. Répartition des Superficies irrigables et équipées dans la zone d’action des Offices
Régionaux de Mise en Valeur Agricole en l’an 2000
ORMVA Superficies irrigables (ha) Superficies équipées (ha)
Doukkala 133 600 104 600
Gharb 222 500 106 400
Haouz 189 900 142 600
Loukkos 33 700 26 400
Moulouya 77 300 77 300
Ouarzazate 37 600 37 600
Souss-Massa 39 900 39 900
Tadla 117 800 109 000
Tafilalet 27 900 27 900
TOTAL 880 200 671 700
Ces réussites ne doivent pas pour autant occulter certaines déficiences de la politique d’irrigation. En effet,
outre ses résultats relativement limités en matière de modernisation de l’appareil productif et d’amélioration
des performances de production, la politique des barrages fut largement critiquée pour les disparités qu’elle
générait. Ainsi, en marginalisant les zones d’agriculture pluviale et les périmètres de petite et moyenne
hydraulique (PMH), l’État avait contribué à accentuer la dualité du développement agricole et par voie de
351
conséquence à paupériser de larges segments de la population rurale. Devant ce constat, divers correctifs
ont été apportés. Ainsi, les zones d’agriculture pluviale ont bénéficié successivement des Projets de Déve-
loppement Intégré (PDI) et des Projets de Mise en Valeur en Bour (PMVB). Plus récemment, un vaste projet
de réhabilitation de la PMH (DRI-PMH) est en cours de mise en œuvre avec le concours de la Banque Mon-
diale.
La productivité agricole enregistrée dans les grands périmètres irrigués n’a pas connu à son tour d’amélio-
ration notable. Ainsi, une enquête menée dans le périmètre du Tadla, a permis de dégager trois modèles
d’exploitation dans cette zone, à savoir le Modèle 1 (exploitations intensives de grande taille avec une SAU
moyenne de 89 ha), le Modèle 2 (exploitations intensives de taille intermédiaire avec une SAU moyenne de
14 ha), et le Modèle 3 (exploitations de petite taille avec une SAU moyenne de 3 ha). Les résultats de cette
enquête consignés dans le tableau 3 mettent en évidence la faiblesse des performances observées, quel
que soit le modèle d’exploitation considéré. Il est toutefois intéressant de noter, que les exploitations de
petite taille dégagent des productivités en général supérieures pour la plupart des cultures, objet de
l’enquête.
352
les 30 dernières années. Ainsi, elle est passée de sept millions ha en 1970 à neuf millions ha en l’an 2000.
Cette extension intervient, sous l’effet conjugué de la pression démographique, de la mécanisation, et du
désir d’appropriation des terres collectives et domaniales. Elle s’est faite principalement aux dépens des
terres de parcours collectifs, et des forêts, ce qui pose de sérieux problèmes d’érosion et de dégradation des
sols.
La céréaliculture domine largement l’occupation du sol au Maroc, bien qu’elle connaisse une légère varia-
tion d’une campagne à l’autre. Elle couvre, à elle seule, près des 2/3 de la SAU. Pour la campagne 1995-96
qui a connu un taux d’emblavement record, l’occupation du sol au niveau national fait ressortir la répartition
suivante :
– Céréales : 67.7 % de la SAU
– Jachères : 12.7 %
– Arboriculture fruitière : 8 %
– 1 à 3 % pour les autres cultures, dont les cultures maraîchères.
L’extension de la SAU, qui a surtout bénéficié à la céréaliculture, passée en 30 ans de 4.5 à 5.3 millions ha,
a certes permis le doublement de la production céréalière augmentant de 25 millions quintaux durant le quin-
quennat 1961-65 à 53 millions q durant le quinquennat 1996-2000. Cette évolution est toutefois toute autre
lorsqu’elle est examinée sous l’angle des quantités de céréales disponibles par habitant qui n’a cessé de
diminuer pendant ces décennies, passant de 400 kilos environ au début des années 1950 à 190 kg actuelle-
ment. Ceci laisse supposer qu’à l’instar des périmètres irrigués, l’agriculture pluviale se caractérise à son tour
par sa faible productivité qui ne peut s’expliquer uniquement par les fluctuations climatiques.
Tableau 4. Les rendements (en qx/ha) des céréales principales et des légumineuses alimentaires
1960- 1965- 1970- 1975- 1980- 1985- 1990- 1995- 2000-
1964 1969 1974 1979 1984 1989 1994 1999 2003
Céréales 8.7 8.8 10.7 9.0 9.0 12.0 14.0 6.0 9.0
Légumineuses 6.0 7.0 7.5 6.0 5.0 7.0 6.0 5.0 5.0
La stagnation de la production agricole pluviale se répercute bien entendu sur le taux d’accroissement
annuel moyen du PIBA qui a chuté d’une moyenne de 4,5 % durant la période 1970-1980 à 0,8 % seulement
durant la période 1991-1998. De même, le déficit de la balance commerciale agricole s’est aggravé à son tour
durant la décennie 90, en raison principalement des importations croissantes des céréales.
Les faibles performances de l’agriculture pluviale sont bien entendu la conséquence des contraintes envi-
ronnementales, telle que la sécheresse, mais pas uniquement. D’autres facteurs interviennent et concernent
en particulier la maîtrise des itinéraires techniques et les circuits de commercialisation qui pénalisent les pro-
ducteurs. Ainsi, pour ce qui est de l’utilisation des intrants, le dernier recensement généra agricole, réalisé en
1994, avait établi que seules 16 % des exploitations agricoles ont recours aux semences sélectionnées,
353
33 % font appel aux produits phytosanitaires et 50 % utilisent les engrais. Quant au taux de mécanisation de
l’agriculture marocaine, il n’est que d’un tracteur pour 231 ha cultivés, contre un tracteur pour 95 ha en
moyenne dans les pays du Maghreb.
Contrairement à la production végétale, dont les résultats ont été fluctuants, les secteurs du lait et de la
viande ont enregistré tant pour la production que pour le rendement des augmentations régulières durant les
30 dernières années (tableau 5). Ainsi, la production laitière a presque doublé en 20 ans, alors que les produc-
tions de viandes blanches et d’œufs ont connu un développement spectaculaire durant les trois décennies,
pendant lesquelles elles ont enregistré des taux de croissance annuels de 8 % et 6 % respectivement.
Tableau 5. Évolution des productions animales durant les trois dernières décennies
Il convient de signaler que pour ce qui est de la production de lait et de viandes rouges, les données consi-
gnées dans le tableau 5 incluent aussi celle provenant des périmètres irrigués, estimée respectivement à
70 % et 17 % de la production totale.
La majorité des exploitations est par conséquent de taille trop réduite pour pouvoir mobiliser les moyens
techniques et financiers nécessaires à l’intensification de la production agricole. Pour juger de l’exiguïté des
exploitations, on peut se référer à la taille fixée pour les exploitations viables par le Code des Investisse-
ments Agricoles, et qui est de cinq ha en irrigué et 10 à 20 ha en bour.
Par ailleurs, et par comparaison aux résultats du RGA de 1974, on constate, après 22 ans, une réduction de
l’effectif des agriculteurs sans terre ($A85 %) et des exploitations agricoles disposant de moins d’un ha
(i28 %).
354
Une politique de développement focalisée de plus en plus sur la lutte contre la
sécheresse
Comme nous l’avions déjà souligné auparavant, au vu des résultats jugés limités des opérations labour,
engrais et semences, l’État a lancé les PDI qui ont concerné 23 % de la SAU et 22 % de la population rurale
et ont connu, à leur tour, un succès mitigé. En effet, ils ont souffert de leur trop grande taille, du manque de
coordination entre les départements ministériels concernés, de la faible implication des bénéficiaires et des
difficultés de gestion et de maintenance des équipements réalisés.
L’échec relatif des PDI a imposé un changement de stratégie d’intervention dans les zones bour qui s’est
matérialisé par la promulgation de la loi 33/94 définissant le cadre de mise en œuvre des Projets de Mise en
Valeur Bour (PMVB) initiés depuis 1994. Le contenu de la loi 33/94 est attrayant de par sa conception origi-
nale : échelle maîtrisable d’intervention, aménagement intégré, participatif et décentralisé. L’analyse de ce
contenu et des modalités de sa mise en œuvre sur le terrain soulève cependant une série d’interrogations
concernant le référent technique qui préside au choix des zones et aux modalités de leur aménagement, et le
décalage entre les principes qui sous-tendent la loi et les conditions effectives de sa mise en œuvre.
Ces échecs et l’urgence dictée par les sécheresses, devenues plus fréquentes, plus généralisées et plus
sévères à partir des années 1980, ont imposé la lutte contre les effets de la sécheresse comme une pré-
occupation centrale et prioritaire du gouvernement. Ainsi, l’attention des pouvoirs publics s’est petit à petit
focalisée sur les programmes de lutte contre les effets de la sécheresse, qui se sont progressivement substi-
tués à une politique plus globale visant à apporter des réponses durables à un problème reconnu structurel. À
la base de ces programmes, il y a un système d’information qui permet aux décideurs d’évaluer, à l’échelle
spatiale et temporelle, l’intensité de la sécheresse et de prendre les mesures adéquates. Celles-ci portent en
général sur :
– le soutien des activités agricoles et d’élevage touchées par la sécheresse,
– l’approvisionnement en eau des collectivités humaines et des troupeaux,
– l’ouverture de chantiers de travaux, créateurs d’emplois en milieu rural,
– le traitement de l’endettement des agriculteurs.
Ces programmes ont mobilisé au fil des ans des enveloppes budgétaires de plus en plus conséquentes. À
titre d’exemple, le programme de lutte contre les effets de la sécheresse proposé pour la campagne 2001 a
coûté 6.5 milliards de dirhams, dont les deux tiers étaient consacrés à la création d’emplois en milieu rural.
Vers la fin des années 1990, les pouvoirs publics ont tenté d’intégrer les programmes de lutte contre la
sécheresse dans une vision globale de développement rural. Les composantes essentielles de celle-ci sont :
– le programme de sécurisation de la production céréalière, qui supposait possible la réalisation d’une pro-
duction céréalière minimale de l’ordre de 60 millions de quintaux par le recours à l’irrigation d’appoint et
l’adoption d’itinéraires techniques appropriés.
– le système d’assurance contre les risques de sécheresse, lancé depuis 1994.
Concernant la sécurisation de la production céréalière, un programme a été engagé en 1999, pour per-
mettre l’extériorisation du potentiel de production, en agissant sur les principaux leviers d’amélioration de la
productivité. Faute d’une approche intégrée et volontariste, et des possibilités limitées d’irrigation d’appoint,
ce programme n’a pas été en mesure d’atteindre les objectifs qui lui ont été assignés.
Pour ce qui est du système d’assurance contre les risques de sécheresse, sa mise en place effective n’a
commencé réellement qu’à partir de la campagne 1999-2000, lorsque l’adhésion à ce programme a été éri-
gée en condition d’éligibilité aux prêts de campagne accordés par le Crédit Agricole. Durant cette campagne
355
la superficie céréalière assurée a été de 114 000 ha et a atteint 221 000 ha la campagne suivante. Par la
suite, les superficies assurées n’ont cessé de régresser pour se stabiliser autour de 120 000 ha pendant les
campagnes 2003-2004 et 2004-2005. Des interrogations se posent toutefois sur les règles de transparence
qui régissent la gestion de ce système, sur la pertinence du découpage géographique des zones couvertes
par ce programme, puis sur les chances de sa pérennité, une fois supprimée la subvention accordée par
l’État pour promouvoir sa mise en place.
En définitive, si les programmes de lutte contre les effets de la sécheresse ont permis à coup sûr d’atté-
nuer l’impact négatif de la sécheresse sur les populations rurales, leurs résultats en matière de gestion maî-
trisée de ce fléau sont plutôt décevants. Dans ces conditions, il est légitime de s’interroger sur la pertinence
de ces programmes extrêmement coûteux, mais sans effets structurants.
356
(!16 g/l). Une autre étude rapportée par Khardi (1998) indique que 7.6 % de ces terres sont maintenant aban-
données à cause de leur alcalinité ou salinité élevées.
La palmeraie marocaine subit aussi les effets de la dissémination du champignon le bayoud. Les variétés
de palmier dattier les plus nobles sont pratiquement déjà décimées par cette épidémie. Le rythme de des-
truction dans la zone du Tafilalt est de l’ordre de 36 000 pieds/an soit près de 3.5 % de l’ensemble de la pal-
meraie. L’impact de l’irrigation en tant que vecteur de cette maladie est mal connu, mais probable.
Le problème de l’ensablement est devenu menaçant à partir des années 1970. Celui-ci menace les habita-
tions, les terres de culture, les canaux d’irrigation et l’infrastructure routière dans les palmeraies. Le Maroc
est en effet exposé en permanence aux vents venant du Sud (Chergui et Sirocco). La protection de la basse
vallée de Draa, du Tafilalt et de la plaine irriguée du Massa sont des objectifs de première nécessité. Les
zones déjà touchées par ce fléau couvrent 30 000 ha dans la province de Ouarzazate et 250 000 ha dans la
province d’Errachidia (DDF. 1998).
L’expression finale de la salinisation des sols, de l’ensablement des oasis, et du dessèchement des pal-
miers dattiers est une chute des rendements des cultures et une régression de la SAU déjà très limitée.
Entre 1960 et 1986, la perte en terres de culture pour la seule palmeraie du Tafilalt est estimée à 208 ha (Nar-
jisse. 1997). Ces manifestations préoccupantes combinées avec la faible diversification économique des
oasis font peser de sérieuses menaces sur ces zones, menaces susceptibles de générer à terme des pro-
blèmes d’exclusion dans ces espaces d’une extrême importance identitaire et géostratégique pour le Maroc.
Le bilan de la première phase du PNRDP révèle que les distributions de vitroplants de palmier dattier n’ont
porté que sur 243 000 unités durant la période 1988-1998. Ce bilan est bien mince, eu égard aux prévisions
initiales du programme qui envisageaient la distribution de plus de deux millions vitroplants. Les raisons de
cette faible performance sont à rechercher dans les faibles disponibilités d’eau d’irrigation, l’insuffisance de
l’approvisionnement en vitroplants et la non maîtrise de l’itinéraire technique de la culture du palmier dattier.
La technique de multiplication in vitro de palmiers dattiers sélectionnés n’a en effet été maîtrisée par l’INRA
que récemment, et pour certains clones seulement. De plus, seule la pépinière des Domaines Agricoles est
agréée à ce jour pour la production de vitroplants de palmier dattier.
Paradoxalement, les difficultés relevées à l’intérieur des palmeraies n’ont pas empêché la prolifération
récente de nouveaux projets d’extension de l’agriculture oasienne sur des centaines d’hectares. De
sérieuses questions se posent toutefois sur la durabilité de ces projets qui mobilisent les eaux des nappes
dans des milieux extrêmement fragiles.
Ce diagnostic rapide révèle que les oasis sont de plus en plus fragilisées par l’intervention humaine qui n’a
357
pas cessé d’introduire des technologies incompatibles avec la vulnérabilité de ces écosystèmes. L’édification
de barrages et la prolifération de stations de pompage ont occasionné une surexploitation de l’écosystème
oasien et porté à des niveaux critiques les processus de dégradation ayant pour origine des facteurs phy-
siques. Les aménagements hydro-agricoles et l’extension des surfaces irriguées d’amont ont réduit la pro-
gression des crues vers l’aval, occasionnant une remobilisation des sels.
358
La politique de l’État dans les zones de montagne
À vrai dire, la montagne n’a pas fait l’objet d’une politique volontariste spécifique pour promouvoir son
développement durable. Ainsi, depuis l’indépendance l’intervention de l’État dans les zones de montagne
était pratiquement réduite à celle de l’Administration des Eaux et Forêts. Les activités de cette dernière,
souvent à caractère répressif, se sont focalisées surtout sur la sauvegarde du patrimoine forestier et la pré-
vention de l’érosion des terres soumises au régime forestier. Par la suite, les PDI avaient prévu dans leurs
programmes des composantes traitant de certains aspects isolés du développement de la montagne, mais
en retenant toujours la même approche dirigiste. Ce n’est qu’à partir du début des années 1990, et à l’occa-
sion de la préparation du Plan National d’Aménagement des Bassins Versants que l’on a senti le besoin
d’associer les communautés montagnardes dans l’identification des priorités, et d’adopter une approche par-
ticipative dans l’élaboration et la mise en œuvre des projets de développement en zone de montagne. La réa-
lisation de ce plan connaît toutefois un retard, faute d’une mobilisation de moyens humains, institutionnels et
financiers suffisants, susceptibles de traduire en actions concrètes et pérennes les objectifs de ce plan.
Face à ces déficits, l’ancien Ministère délégué chargé des Eaux et Forets avait engagé l’élaboration d’un
projet de loi sur la protection et le développement des zones de montagne, s’inspirant du modèle français.
Cette initiative nous semble toutefois prématurée. Les dispositions d’une pareille loi, pour être utiles,
devraient en principe être portées par les orientations, qui restent encore à définir, d’une politique inter-
sectorielle cohérente de développement rural intégré, qui engagent le gouvernement.
Les terres de pâturage exploitables couvrent au Maroc une superficie de 21 millions ha, et s’étendent sur
dix grands ensembles écologiques qui se distinguent les uns des autres par des attributs climatiques, physio-
graphiques, édaphiques et floristiques. Les pâturages ont pour la plupart un statut juridique collectif, et
contribuent pour près du tiers de l’ensemble des besoins alimentaires du cheptel national. Ce dernier joue un
rôle socio-économique de premier plan. Le secteur de l’élevage concerne en effet 1100 000 foyers ruraux
environ. Il représente 25 à 42 % de la production agricole brute. Ce secteur fournit aussi 20 % des emplois
agricoles, alors que 18 % des agriculteurs tirent leurs revenus exclusivement de l’élevage (Benlekhal 2004).
Les terres de pâturages sont dépositaires d’une importante biodiversité animale et végétale qu’il convient
de protéger. Les enjeux économiques de la richesse génétique de ce patrimoine pourraient s’avérer beau-
coup plus importants que l’activité correspondant à une simple transformation de l’herbe en viandes rouges.
Les expériences, de par le monde, de valorisation des plantes aromatiques et médicinales ou d’aménage-
ment des terres de pâturages comme un espace de chasse ont été concluantes et ont permis des avancées
significatives aussi bien sociale, économique qu’environnementale.
L’activité pastorale fut aussi et pendant longtemps régie par un cadre organisationnel piloté par la tribu,
avec ses dimensions culturelle et religieuse. Ce cadre a subi cependant d’importantes mutations, qui ont pro-
gressivement transformé une dynamique collective en une dynamique de plus en plus individualiste de rap-
port des usagers avec l’espace. Ce dernier a d’ailleurs connu à son tour des changements de vocation
profonds. Ainsi, d’une vocation exclusivement herbagère auparavant, une partie de l’espace pastoral a été
359
déjà défrichée et convertie en terrains agricoles, alors que les prémisses de développement d’activités
récréatives apparaissent dans certaines régions.
Ces différentes phases ont fait l’objet, en 1993, d’une évaluation qui a débouché sur l’élaboration d’une
Stratégie de Développement des Terres de Pâturage. Celle-ci représente une remise en cause radicale de
l’approche antérieure de l’aménagement pastoral dans toutes ses étapes de conception, d’exécution et de
suivi-évaluation. Elle aborde la question pastorale sous un angle privilégiant la participation effective des
ayants droit et l’intégration des terres de pâturage dans leur environnement socio-économique, représenté
par les terroirs agricole et forestier, et le marché. La stratégie de développement des terres de pâturage
prend en compte et complète la loi 33-94. Ensemble, elles constituent un des leviers par lesquels les pou-
voirs publics peuvent réduire les disparités entre zones favorables et défavorables générées par la politique
de la grande irrigation. Cette stratégie, validée en 1995, n’a toujours pas été sanctionnée par un plan d’action
permettant de décliner sur le terrain ses orientations et ses approches novatrices.
360
de ces expériences a constitué un tournant décisif en matière d’objectifs et d’approche. Les projets du
Moyens Atlas Central et du Développement des
Parcours et de l’Élevage dans l’Oriental témoignent de cette volonté de changement. Ainsi, les objectifs
assignés à ces projets leur donnent une dimension de projets de développement et non pas seulement des
projets d’aménagement. De même, la mise en œuvre de ces projets a privilégié les principes de dialogue et
de concertation et s’est appuyée sur des coopératives pastorales de gestion de l’espace et de services,
constituées soit sur une base territoriale (cas du Moyen Atlas) ou d’affinités ethniques (cas de l’Oriental). Les
terrains de parcours dans ces deux régions ont été réhabilités avec le consentement des populations concer-
nées. Les techniques utilisées comprennent entre autres, la mise en défens, l’organisation du pâturage par la
mise en place d’un système de rotations, et la plantation d’arbustes fourragers.
L’indication la plus significative du succès de ces projets est l’acceptation, pour la première fois, par les
populations usagères du paiement de redevances d’abreuvement (cas du Moyen Atlas) et de pâturage dans
les sites améliorés (cas de l’Oriental). Ces acquis, en dépit de leur forte charge symbolique et de leur impact
positif sur la ressource et la productivité des troupeaux, n’ont malheureusement pas été capitalisés. Leur
pérennité, en particulier dans le cas du Moyen Atlas, aurait nécessité en effet une continuité de l’engage-
ment des pouvoirs publics et du maintien, au moins à un certain niveau, des incitations consenties par ces
projets. Ceci n’a pas été le cas, l’intervention des structures de développement a pratiquement cessé avec la
fin du financement par les bailleurs de fonds (Banque Mondiale et FIDA). Il s’agit là d’une erreur stratégique,
car il serait illusoire de penser que ces milieux difficiles peuvent devenir entièrement autonomes. Le désen-
gagement de l’État ne peut concerner que les formes et les modalités de ses interventions et non leur volet
incitatif.
Ces défaillances ont favorisé des mutations profondes qu’a connues l’écosystème pastoral durant les der-
nières cinquante années. Les changements subis sont nombreux et concernent en particulier :
361
La première manifestation de l’affaiblissement de l’organisation communautaire est le renforcement de la
sédentarisation. Le nomadisme et le semi-nomadisme, encore présents dans le Sud et l’Oriental, ont ten-
dance à régresser sous l’effet de la sédentarisation. Des études récentes semblent indiquer que ce mode de
vie est en régression dans la région du Maroc Oriental et ne concerne que 56 à 80 % des éleveurs des Hauts
Plateaux, 22 à 47 % des éleveurs de Tafrata et 9 à 17 % des éleveurs de la Moyenne Moulouya. La dispari-
tion progressive de la transhumance va bien entendu affecter le mode d’utilisation de l’espace et surtout la
nature des rapports sociaux entre les groupes ethniques. Ces rapports sont de plus en plus déterminés par
des comportements individualistes, marqués par l’esprit d’exploitation individuelle des ressources collec-
tives.
362
croît un facteur favorisant l’érosion hydrique et éolienne et la salinisation de certains cours d’eau. Une étude
récente illustre parfaitement ce propos dans les parcours de l’Oriental. À cet effet, l’analyse de la dynamique
de la végétation telle qu’elle ressort de l’examen de deux images satellitaires couvrant 168 442 ha de la zone
de Ain Beni Mathar, prises respectivement aux mois de mars des années 1988 et 2000, met en évidence
une dégradation du couvert végétal préoccupante (Mayhou et al. 2001). Ainsi,
– la steppe d’alfa en bon état est passée de 22457 ha à 15929 ha, soit une diminution de 29 %
– la steppe d’alfa dégradée est passée de 54149 à 56188 ha, soit une augmentation de 4 %
– le faciès à armoise en bon état est passé de 5674 à 1354 ha, soit un déclin de 70 %
– l’espace de dégradation, constitué par le sol nu ou couvert par des espèces indicatrices de dégradation,
aaugmenté de 53541 à 72228 ha, soit une augmentation de 35 %.
En définitive, les parcours de l’Oriental sont soumis à une dégradation accélérée des steppes d’armoise et
d’alfa estimée à 1557 ha/an.
Le surpâturage, le défrichement, la récolte anarchique de certaines espèces pastorales pour l’extraction
des huiles essentielles et la déperdition des formes d’organisation traditionnelle sont à l’origine de cette
dégradation, amplifiée par les sécheresses récurrentes que connaît le pays. Ainsi, dans plusieurs cas, les
effectifs animaux qui fréquentent les terrains de parcours sont trois à cinq fois supérieurs à leur capacité de
pâturage. D’un autre coté, le défrichement touche chaque année près de 65 000 ha pris sur les meilleures
terres de pâturage (MAMVA, 1993).
En conclusion, si des efforts louables ont été consentis pour la conservation et la mise en valeur des terres
de pâturage, beaucoup reste à faire pour atteindre cet objectif. De plus, l’évaluation du bilan des projets de
développement pastoral révèle que peu de progrès ont été enregistrés quant à l’objectif de lutte contre la
pauvreté. À titre d’exemple, les améliorations pastorales réalisées dans le cadre du projet de développement
des parcours et de l’élevage dans l’Oriental, ont bénéficié surtout aux éleveurs les plus nantis, alors que les
services des coopératives ont profité en premier lieu à leurs adhérents les plus puissants. La composante
crédit prévue par le projet et destinée prioritairement aux petits éleveurs n’a finalement pas été mise en
œuvre, faute d’un régime de prêt adapté aux conditions de ces demandeurs de crédits. C’est là une illustra-
tion supplémentaire du manque de coordination et d’intégration des acteurs institutionnels intervenant dans
l’appui à la gestion des ressources naturelles. Par ailleurs, si l’association des élites rurales dans le processus
du développement local est nécessaire, car ces élites peuvent être les locomotives de ce développement,
des projets qui se bornent toutefois à ne soutenir que les acteurs les plus dynamiques ne sont pas viables
car ne pouvant atteindre l’objectif d’un développement équitable et par conséquent durable.
L’analyse de l’évolution de l’agriculture marocaine, pendant les cinquante dernières années, a surtout cher-
ché à privilégier ses points forts. Cette analyse met en évidence la pertinence de l’option retenue, dès le len-
demain de l’indépendance, de faire de l’agriculture le principal levier du développement économique et social
du pays. La politique poursuivie a en effet permis au pays d’assurer une relative sécurité alimentaire, l’essor
d’une industrie agro-alimentaire, la limitation de l’exode rural. D’autres acquis à mettre à l’actif de cette poli-
tique concernent les résultats de l’action conduite pour lutter contre les effets de la sécheresse. Si ces
actions n’ont malheureusement pas été intégrées dans le cadre d’une vision globale et structurante pour la
maîtrise de ce fléau, il n’en demeure pas moins que les programmes successifs déployés pour approvision-
363
ner la population en eau et le bétail en aliments, pour créer des emplois et générer des revenus, ont permis
de préserver le cheptel et limiter un exode rural qui aurait pu être massif.
Toutefois, force est de constater que les quelques réussites de l’agriculture sont nettement plus percep-
tibles dans les périmètres irrigués que dans les zones bour, les montagnes, les oasis et les zones step-
piques. La politique agricole de modernisation mise en œuvre a en effet opéré une disjonction entre
développement agricole et développement rural, en privilégiant une approche purement technicienne et en
hiérarchisant les actions en fonction de leur rentabilité économique. Cette politique, très sélective et peu
soucieuse de l’objectif de l’équité, a polarisé les moyens sur quelques régions et quelques groupes sociaux.
Elle a conduit à une agriculture très contrastée, enregistrant des réussites incontestables dans le cas des
périmètres irrigués, mais laissant de côté des problèmes récurrents, tels que les structures foncières, la
reforme agraire et le développement rural. Les changements ont été par conséquent plus importants sur le
plan technique (développement de l’irrigation, cultures sous serres) et économique (intégration au marché)
que sur le plan social.
En conséquence, l’avenir des campagnes marocaines passe par une nouvelle étape du développement
humain œuvrant pour la correction des déséquilibres territoriaux et la valorisation des potentiels. Pour la pré-
paration de cet avenir, il est important de saisir les enjeux de l’agriculture marocaine, de comprendre les défis
auxquels elle est confrontée, et de dégager les perspectives offertes.
L’orientation de la politique agricole, soutenue par le Code des Investissements Agricoles, était détermi-
née par le souci des pouvoirs publics de couvrir au maximum la demande intérieure en produits alimentaires
dits stratégiques, justifiant les mesures de protection, de subvention, d’incitation et de régulation des mar-
chés. Cette politique volontariste a largement façonné l’agriculture marocaine pour en faire :
– une agriculture étroitement dirigée : l’État décide, conçoit et réalise l’équipement et l’aménagement de
l’espace rural
– une agriculture fortement subventionnée : non seulement les agriculteurs, opérant dans les périmètres
irrigués, recevaient de nombreuses aides, mais en plus ils bénéficiaient de dérogations aux principes
même du code, notamment en matière de paiement des redevances de l’eau d’irrigation.
– une agriculture essentiellement productiviste : l’économie, la préservation et la valorisation optimale des
ressources sont des préoccupations plutôt récentes.
Il ne fait pas de doute qu’en l’absence de la notion d’État providence, désormais révolue, l’agriculture
marocaine se trouve aujourd’hui à un nouveau tournant de son histoire. Son environnement subit en effet de
profondes mutations structurelles. D’une part, l’économie se libéralise, les marchés deviennent de plus en
plus compétitifs, alors que les marchés à l’export sont de plus en plus exigeants en terme de qualité. D’autre
part, l’ouverture des marchés agricoles risque de mettre en difficulté une grande partie des exploitations agri-
coles, à dominante extensive, opérant notamment dans les zones bour défavorables.
Tels sont les traits essentiels de l’agriculture aujourd’hui. Tout en reconnaissant la justesse des choix rete-
nus au lendemain de l’indépendance, et sans nier les percées notables du secteur agricole, on ne peut
s’empêcher de mentionner certains effets pervers et quelques échecs de ces politiques. La problématique
actuelle du secteur agricole Présentent en effet plusieurs facettes qui se déclinent comme suit :
364
Des déséquilibres territoriaux
Les politiques publiques menées depuis l’indépendance ont généré des déséquilibres préoccupants,
d’abord entre agriculture irriguée et pluviale ensuite entre milieux rural et urbain. Sur le plan agricole, il existe
au Maroc une agriculture à deux vitesses. L’une moderne, compétitive et commerciale, l’autre familiale de
subsistance. L’impact social de cette dualité a été aggravé par l’absence de ciblage des mesures incitatives.
Ainsi, les politiques de crédit, de sauvegarde du cheptel et de soutien des prix aussi bien à la production qu’à
la consommation n’ont bénéficié qu’à une minorité des destinataires présumés. Dans ces conditions, il est
légitime de s’interroger sur l’opportunité d’une politique, qui au nom de l’aide au développement et de la jus-
tice sociale, ne fait qu’encourager un climat favorable à la rente, au détournement et à la spéculation et dans
les meilleurs des cas ne bénéficie qu’à une minorité.
La nécessité de procéder à des ajustements profonds se fait par conséquent pressante. Il y va de la durabi-
lité de la croissance et de la cohésion et la stabilité sociales du pays. Le dualisme de l’agriculture marocaine
et le souci de ne pas l’accentuer doivent être pris en considération dans tout effort visant sa mise à niveau.
Les fonctions sociale et stratégique de ce secteur sont suffisamment vitales pour être au centre de toute
réflexion sur son devenir. Cette dernière doit être guidée certes par les obligations de compétitivité que nous
dictent nos engagements internationaux et nos aspirations au progrès, sans toutefois perdre de vue la frange
vulnérable de notre agriculture de subsistance, pour laquelle des alternatives viables doivent être recher-
chées, et une assistance ciblée des pouvoirs publics doit être assurée.
365
alors que la production agricole représente 13 à 17 % du PIB, l’agro-industrie ne représente que 5 %, bien en
deçà des niveaux d’intégration relevés dans les pays avancés (plus de 15 %.). Le manque à gagner en
termes de plus value, de marchés, d’emplois et de technologie est immense. Le Maroc ne peut pas se per-
mettre de sacrifier cette branche dont le développement est tributaire de la levée de facteurs de blocages.
L’insuffisante intégration de l’agriculture à son environnement économique s’exprime aussi par les diffi-
cultés rencontrées par les agriculteurs pour l’écoulement de leurs récoltes. Il s’agit là, d’un frein significatif au
gain de productivité et à l’essor de l’investissement dans le secteur agricole. Le problème de la commer-
cialisation des produits agricoles a plusieurs facettes. Il a pour origine le faible développement des organisa-
tions professionnelles, favorisant la prolifération des intermédiaires, ce qui nuit à la transparence du marché
et aux petits producteurs. Il est aussi la conséquence de l’absence de circuits de distribution et de commer-
cialisation structurés et des normes de qualité, des défaillances des moyens de transport et du fret, du sous
équipement en infrastructures de stockage et de la chaîne de froid, et de la faiblesse du degré de trans-
formation des produits agricoles en produits à haute valeur ajoutée.
La problématique actuelle du développement intégré du secteur agricole, réside dans le souci de concilier
trois enjeux capitaux, à savoir la réalisation de l’objectif de compétitivité, tout en répondant à l’impératif de
l’équité sociale, et en préservant les ressources naturelles de plus en plus rares. Toute stratégie publique
dans ce sens doit par conséquent prendre en compte les principaux défis auxquels le secteur agricole se
trouve confronté. La liste de ceux que nous allons rappeler ici n’est pas exhaustive. Nous nous contentons
de développer ceux qui nous paraissent les plus déterminants.
366
La libéralisation du commerce extérieur du Maroc, résultant des accords d’association et de libre échange
et des dispositions de l’Organisation Mondiale du Commerce ne manquerait pas d’avoir des effets positifs
sur la croissance, mais potentiellement préjudiciables sur l’environnement. Ces effets se feront particulière-
ment sentir sur les secteurs d’exportation de pointe telle que l’agriculture intensive connue pour être parti-
culièrement polluante. Cette augmentation prévisible de la pollution pose un nouveau défi pour les pouvoirs
publics. Il s’agit de promouvoir une politique équilibrée du développement qui concilie les intérêts écono-
miques à court terme et les soucis de protection de l’environnement et des ressources dans une perspective
de développement durable.
La seconde catégorie d’enjeux concerne la pérennité du capital ressources. L’état de dégradation avancée
dans lequel se trouvent certaines ressources naturelles, combiné à l’assèchement du climat, entraîne la
réduction de l’espace vital. Dans ces conditions, où la population ne dispose que de moyens limités pour
modifier ses stratégies individuelles et collectives de survie, la pression devient forcément excessive sur les
ressources résiduelles encore exploitables. En reconnaissant la pérennité du capital ressources comme
enjeu principal, la discussion s’oriente donc maintenant sur les actions à mettre en place pour transformer les
stratégies de gestion de ce capital, et revoir la relation entre l’homme et son milieu. Un élément essentiel de
cette stratégie est l’impératif d’une revitalisation de la participation des acteurs locaux à la gestion de ces res-
sources.
Que ce soit au niveau des espaces naturels ou aménagés, les systèmes d’exploitation en vigueur ont
conduit à une dégradation assez avancée des ressources en eau, en sols, et en biodiversité. L’accentuation,
ou même le maintien de cet état de dégradation à son niveau actuel, présente de graves dangers, non seule-
ment pour le secteur agricole et sa pérennité (Doukkala, Haouz, Souss), mais aussi pour le tourisme (oasis,
littoral, montagnes), considéré comme l’un des principaux leviers de croissance à l’avenir.
367
Tableau 6. Principales productions agricoles par habitant (Kg/hab, moyennes des
périodes 1993-1997 et 1998-2001. Akesbi. 2002).
Ce tableau montre l’ampleur de la régression enregistrée au niveau des céréales et des légumineuses, et à
moindre degré pour la betterave sucrière, les cultures maraîchères et les agrumes. En revanche, les produc-
tions animales, notamment le lait, les viandes blanches et rouges, et les œufs ont connu une légère progres-
sion durant cette période.
Sur une plus longue période, l’examen de l’évolution des disponibilités de certains produits alimentaires
par habitant met en évidence un déclin encore plus important. À titre d’exemple, les 149 kilos de céréales
produits par tête entre 1998 et 2001 sont très inférieurs aux 276 kilos produits au début des années 1970. Il
en est de même des cinq kilos actuels de légumineuses à comparer avec les 22 kilos de la période 1971-
1975, ou encore les 11.5 Kg de vaindes rouges de ces dernières années qu’il faudrait rapporter aux 15 Kg
déjà réalisés il y a plus de 30 ans (Akesbi. 2002).
La faible productivité de l’agriculture marocaine se fait sentir aussi bien en bour qu’en irrigué. Dans ce der-
nier cas, la valorisation de l’eau d’irrigation est extrêmement faible et se situe à peine entre 0.5 à 1.5 DH/m3
d’eau consommée pour la majorité des cultures, à l’exception des cultures maraîchères pour lesquelles elle
atteint 4 DH/m3.
De plus, la productivité de nos filières agricoles destinées à l’export est en général faible, lorsque nous la
comparons à celle des pays concurrents. Ainsi, les rendements des agrumes par exemple sont en moyenne
de 17 tonnes à l’hectare, bien plus bas que ceux enregistrés chez nos voisins espagnols qui obtiennent 22
T/ha. Il en est de même de l’olivier, pour lequel les rendements enregistrés durant la période 1991-2000
atteignent en moyenne à peine 0.86 T/ha contre 1.58 et 2.18 T/ha respectivement en Espagne et en Italie.
368
– une tendance nette à l’augmentation de la température moyenne annuelle, comprise entre 0.6 oC et
1.1 oC, à l’horizon 2020 ;
– une tendance à la réduction du volume annuel des précipitations de l’ordre 4 % en 2020, par rapport à
l’année 2000 ;
– une augmentation de la fréquence et de l’intensité des orages frontaux et convectifs dans le Nord et à
l’0uest de la chaîne de l’Atlas ;
– une augmentation de la fréquence et de l’intensité des sécheresses dans le Sud et à l’Est du pays ;
– un dérèglement des précipitations saisonnières (pluies d’hiver concentrées sur une courte période) ;
– une réduction de la durée d’enneigement et un retrait du manteau neigeux.
Ces changements ne manqueront pas d’affecter les disponibilités des ressources en eau, qui subiraient à
l’horizon 2020 une baisse moyenne de l’ordre de 15 %. La satisfaction des besoins en eau du Maroc à cet
horizon, estimés à 16.2 milliards de m3, nécessiterait des investissements lourds pour mobiliser les res-
sources en eau encore disponibles.
Quant à l’impact des changements climatiques sur l’agriculture à l’horizon 2020, les résultats rapportés
dans le rapport mentionné précédemment suggèrent les conclusions suivantes :
– une réduction des rendements des céréales de 50 % en année sèche et de 10 % en année normale ;
pareille réduction accentuerait davantage le déficit céréalier du pays,
– un accroissement des besoins en eau des cultures irriguées compris entre 7 et 12 %.
La production animale, étant indissociable au Maroc du système de production végétale, sera bien entendu
à son tour affectée négativement par ces changements.
Compte tenu du fait que 33 % de la population et 70 % des pauvres vivront encore en milieu rural en 2020,
la performance de l’agriculture sera déterminante pour les conditions de vie des couches sociales les plus
défavorisées. Ces prévisions suggèrent la mise en œuvre d’urgence de programmes d’adaptation pour atté-
nuer les impacts prévisibles des changements climatiques.
369
Cette accélération des flux migratoires est aggravée par l’affaiblissement de l’intensité des liens entre les
émigrants d’origine rurale et leur zone d’origine. Ainsi, la contribution du migrant dans la dépense de sa
famille qui continue de résider dans la zone d’origine, a tendance à diminuer. À cet effet, les résultats d’une
enquête menée par le Ministère de l’intérieur révèlent que la proportion des migrants ruraux qui dépensent la
totalité de leur revenu dans les zones d’accueil atteint 76 %. Cette rupture des liens avec le lieu d’origine
pose le problème de la viabilité sociale des zones rurales, ce qui est d’autant plus critique, qu’à partir de
2007, le monde rural va entamer une phase de décroissance démographique.
Toutefois, certaines indications semblent, aujourd’hui, tempérer cette tendance à la déliquescence du
tissu rural. Il s’agit du regain d’intérêt pour les politiques de développement rural équitable et inclusif, notam-
ment à travers le renforcement des services de base dans les zones rurales, et la multiplication des initiatives
de programmes de développement rural intégré et participatif. Il est permis d’espérer que la continuation de
pareilles actions contribuera à éliminer les principales causes qui motivent l’exode rural et par voie de consé-
quence favorisera son ralentissement.
Pour le lait et ses dérivés, des progrès significatifs ont été enregistrés, puisque le taux en question est en
moyenne passé de 55 à 95 % sur une dizaine d’années. De tels chiffres doivent être cependant appréciés
avec prudence, dans la mesure où ils reflètent plus une faiblesse de la demande solvable qu’un auto-
approvisionnement adéquat.
Le cas de la viande rouge, dont le taux de couverture atteint 124 %, est à cet égard encore plus trompeur.
Ainsi, en atteignant 275 000 tonnes en 2001, la production des viandes rouges représente encore à peine
370
une offre de moins de 10 kilos par tête. Ce niveau pourrait être comparé aux 15 kilos que le marocain
consommait en moyenne durant les années 70 (Akesbi. 2002).
L’enjeu de la sécurité alimentaire se posera avec plus d’acuité une fois que les dispositions du volet agri-
cole des accords d’association et de libre échange entreront en vigueur. Cet enjeu nous renvoie alors à celui
plus global de la croissance économique du Maroc et de sa capacité de dégager des revenus en devises suf-
fisants pour financer, et ses dépenses de développement et celles nécessaires pour combler son déficit ali-
mentaire. À cet effet, il est utile de souligner que la satisfaction de la demande alimentaire à partir des
approvisionnements extérieurs se fera vraisemblablement à un coût de plus en plus élevé. Tout semble indi-
quer en effet une tendance au renchérissement des prix des produits alimentaires de base sur le marché
mondial. Cette hypothèse est confortée par la réduction programmée des subventions à l’exportation, une
demande en augmentation, conséquence de la croissance démographique et de l’amélioration des revenus
chez les pays importateurs notamment asiatiques et, une offre en recul, d’autant plus que le potentiel de
terres cultivables est déjà mobilisé. Cela signifie que la libéralisation des échanges agricoles est porteuse de
sérieux risques, dont l’impact se fera sentir aussi bien sur les producteurs dans un avenir proche que sur les
consommateurs à plus long terme. Il est donc vital qu’elle soit assortie de mesures de soutien de la produc-
tion locale ne serait-ce que durant une phase de transition. En d’autres termes, l’enjeu ici est de taille et
consiste à rechercher comment l’on peut concilier une logique purement économique avec des pré-
occupations stratégiques. La réponse est forcément d’ordre politique. Elle consiste à développer une vision
claire des enjeux à venir, et arrêter des choix et les assumer.
371
collectivités locales, pour pouvoir décider et agir rapidement et en fonction des situations concrètes aux-
quelles elles sont confrontées, ont besoin d’avoir dans les services de l’État des interlocuteurs à leur niveau
qui soient en mesure de prendre des décisions sans en référer au niveau central et sans être prisonnier de
directives paralysantes.
Le transfert de technologie souffre aussi d’un décalage entre les programmes de recherche et les pré-
occupations des agriculteurs en raison notamment d’une organisation professionnelle déficiente. En effet, à
l’exception de quelques associations de fruits et de primeurs relativement bien structurées, les autres,
notamment les chambres d’agriculture, ne sont pas toujours représentatives et sont trop dépendantes des
pouvoirs publics pour leur financement et leur encadrement. De ce fait, elles constituent plus un rouage de
l’État qu’un relais pour la mise en œuvre d’une politique participative du développement.
Ces défaillances du capital humain sont amplifiées par une tendance à l’individualisation de l’exploitation
des ressources collectives qui, par la multiplication du nombre des ayants droits, complique le processus de
concertation, central pour une exploitation durable des ressources collectives. Cette individualisation est la
conséquence du déclin de l’organisation communautaire et de la déperdition des formes traditionnelles de
gestion de ces ressources. Ses effets sont particulièrement préjudiciables à une exploitation organisée des
ressources pastorales et en eau. Ainsi, l’éclatement de la structure de production traditionnelle a entraîné
dans les zones pastorales un morcellement du pouvoir de décision qui reflète une fragmentation du tissu
social et l’émergence de stratégies individuelles antagoniques des pratiques lignagères antérieures qui
compromettent la pérennité des ressources collectives et favorisent leur dégradation. Pour ce qui est des
ressources en eau, le démantèlement de l’organisation communautaire observé, notamment dans les zones
des oasis, a favorisé le pompage anarchique et la baisse dangereuse du niveau de la nappe qui en a résulté.
La manifestation la plus spectaculaire de relâchement des liens sociaux dans ces régions est le tarissement
des Khettaras et l’arrêt de leur entretien.
Si l’agriculture marocaine doit faire face à un certain nombre de défis, elle dispose aussi de nombreuses
potentialités, dont la mobilisation et la valorisation pourraient contribuer de manière significative à sa mise à
niveau. De ces atouts, trois nous paraissent particulièrement édifiants. Il s’agit tout d’abord du réservoir de
nos ressources humaines non mobilisé, de notre potentiel de production agricole non atteint, et de la diver-
sité et la richesse de nos ressources naturelles non valorisées.
Le potentiel et la richesse des ressources humaines du monde rural marocain sont considérables. Ce
potentiel, que les politiques antérieures n’ont malheureusement pu ni valoriser ni développer, s’exprime de
plusieurs manières. La paysannerie marocaine est en effet connue pour son ardeur au travail, sa versatilité,
son savoir faire et sa capacité d’adaptation à l’adversité du milieu. Les pratiques de terrasse dans les zones
de montagne, d’irrigation dans les oasis et les différentes stratégies d’adaptation au risque et à l’aléa sont
toutes d’une ingéniosité incontestable. Ce savoir local a montré aussi des aptitudes extraordinaires à intégrer
les nouvelles technologies, lorsque les conditions s’y prêtent. Les cas des producteurs des primeurs dans le
Souss ou d’agrumes à Berkane sont très révélateurs à cet égard.
372
Une autre expression de la vitalité des ressources humaines rurales réside dans leur formidable capacité
associative. Celle-ci prend des formes diverses allant de l’association polyvalente : la Jmaa, à l’association
spécialisée s’occupant de la gestion de l’irrigation. Cette capacité associative s’est révélée être un précieux
auxiliaire du développement, lorsque ces associations bénéficient d’une réelle autonomie et qu’elles ne se
contentent pas d’être un relais téléguidé par l’administration. L’intérêt de ce type d’association a été d’ail-
leurs largement démontré dans les projets d’aménagement des bassins versants (Projet de Tassaout) ou
PMVB (Projet de Tiznit) ou encore de conservation de l’arganier, qui se sont appuyés sur des associations vil-
lageoises pour mettre en œuvre, avec beaucoup de succès, les actions prévues par ces projets.
En dépit de son caractère aride, le Maroc est doté d’importantes ressources naturelles. En matière de res-
sources en eau, le potentiel hydraulique mobilisable au Maroc est évalué à 21 milliards de m3 (16 milliards à
partir des eaux superficielles et cinq milliards en provenance des eaux souterraines). Les quantités effective-
ment mobilisées en l’an 2000, ne représentent toutefois que 14.5 milliards de m3, et sont appelées à croître
pour atteindre 17 milliards de m3 en l’an 2020. Les bassins de Sebou, du Bouregreg et de l’Oum Rbia
détiennent à eux seuls plus des 2/3 du potentiel hydraulique du pays. En 1960, chaque marocain disposait de
2 560 m3 d’eau, se situant ainsi dans une zone d’abondance. Cette part n’était plus que de 1 185 m3 en 1990
et on s’attend à ce qu’elle se rétrécisse davantage dans les années à venir pour atteindre 651 m3 en 2025.
Les terres aptes à la culture sont relativement rares au Maroc. Elles représentent 13 % de la surface totale
du pays, soit près de 9.2 millions ha. La surface irriguée de manière pérenne couvre 13 % de la SAU, et pour-
rait atteindre 18 %. Le reste constitue le bour, tributaire des variations et de l’irrégularité des précipitations.
Le bour dit favorable (recevant plus de 400 mm de pluie par an) couvre à peine 2.5 millions ha.
Le Maroc est considéré parmi les pays les plus riches en diversité biologique en Méditerranée. La variété
bioclimatique et la large gamme de milieux naturels rencontrés au Maroc favorisent le développement d’une
flore riche estimée à 4 700 espèces, dont 537 endémiques. D’un autre côté, la faune marocaine est très
diversifiée et comprend 106 espèces de mammifères, et 326 espèces d’oiseaux et plus de 15 300 espèces
d’invertébrés terrestres. La faune marine est à son tour très diversifiée et compte plus de 7 100 espèces. Ce
patrimoine naturel qui joue un rôle écologique de premier plan constitue aussi l’une des principales bases du
développement socio-économique du pays.
La biodiversité marocaine traduit aussi une diversité d’écosystèmes, d’habitats et de paysages. Ainsi, le
Plan National des Aires Protégées a recensé 168 sites d’intérêt biologique et écologique, répartis sur huit
parcs nationaux et 146 réserves naturelles. Cette richesse génétique et paysagère se rencontre dans une
variété d’écosystèmes dont les plus importants sont les forêts, les zones humides, les terres de pâturage, et
la mer.
373
Tableau 8. Indicateurs du potentiel de productivité agricole dans les systèmes de production
existants
Paramètre Actuel 1995-99
Potentiel Potentiel/actuel
Intensité culturale ( %)
Grande Hydraulique 102 130 1.3
Petite et Moyenne Hydraulique 100 110 1.1
Agriculture pluviale 80 90 1.1
Rendements zootechniques
Lait (Kg/lactation)
Race locale 460 800 1.7
Race pure 1 850 5 500 3.0
Race croisée 1 100 3 500 3.2
Viande (Kg carcasse/an)
Race locale 100 150 1.5
Race pure 195 270 1.4
Race croisée 155 200 1.3
Ces données mettent en évidence l’importante marge de manœuvre, dont dispose l’agriculture marocaine
pour sa mise à niveau. Des perspectives d’intensification aussi bien des cultures pluviales qu’irriguées sont
réelles, pourvu que des politiques appropriées soient mises en œuvre pour lever les obstacles au transfert de
technologies, à l’intensification, et au financement.
La réduction des fonds publics alloués à l’agriculture n’a pas aidé à atténuer le poids de nombreux facteurs
dont la persistance continue à pénaliser la productivité. Au compte de ces derniers, on peut citer les struc-
tures foncières, la technicité des hommes, l’accès aux techniques modernes de production, les circuits de
commercialisation, le financement, le renchérissement des coûts de production, et les prix. De ce fait, les
rendements réalisés ne représentent que 30 à 70 % des rendements potentiels réalisables pour la plupart
des cultures, y compris en zones irriguées. Ainsi, l’agriculture marocaine dispose encore de larges marges de
manœuvre pour accroître davantage sa productivité.
L’élaboration d’une politique de développement doit être précédée par la formulation d’une vision claire,
réaliste et cohérente sur les objectifs à atteindre. Pour cela, il est impératif d’engager une réflexion de pros-
pective, permettant d’appréhender l’évolution tendancielle de nos territoires et nos ressources naturelles, et
d’anticiper les changements susceptibles de les affecter.
Les vingt prochaines années seront décisives pour l’avenir du Maroc. Si ces années sont porteuses
d’opportunités offertes par des atouts réels qui ont trait au processus de démocratisation en cours dans le
pays, à la jeunesse de sa population et à l’essor d’une société civile dynamique, elles coïncident aussi avec
certaines échéances qui ne manqueront pas d’exercer de fortes tensions aussi bien sur la société que sur
l’intégrité des ressources naturelles. Parmi celles-ci, trois échéances sont essentielles. Elles sont d’ordre
démographique, économique et écologique :
– L’échéance démographique consiste en l’arrivée au marché du travail des générations les plus nom-
374
breuses, nées au cours des décennies soixante-dix et quatre-vingt, quand la fécondité était à son maxi-
mum. Selon le SNAT, les demandeurs d’emploi (entre 15 et 20 ans) compteront chaque année près de
650.000 individus, alors que ceux qui partent à la retraite (entre 60 et 65 ans) ne seraient que 150.000.
L’écart illustre bien la complexité de la tâche à accomplir.
– L’échéance économique coïncide avec l’entrée en vigueur des accords d’association et de libre
échange, notamment avec l’Union européenne, les États-Unis d’Amérique, l’Égypte, la Jordanie, la Tuni-
sie et la Turquie. Cette échéance pose un problème de mise à niveau d’une ampleur considérable, qui
passe justement par des mesures d’amélioration de la compétitivité et vraisemblablement de licencie-
ments, et de fermeture d’unités de production.
– Enfin, l’échéance écologique concerne le secteur vital de l’eau. D’ici une vingtaine d’années, alors que
nous aurons pratiquement mobilisé tout le potentiel hydraulique mobilisable du pays, des arbitrages dou-
loureux devront être rendus en matière d’allocation des ressources en eau. L’eau n’est pas la seule res-
source concernée. La raréfaction concerne aussi les ressources en sol et en biodiversité, à leur tour de
plus en plus dégradées. Ces risques de dégradation seront davantage exacerbés par l’exploitation minière
des ressources naturelles qui résultera de la course à la productivité et à la compétitivité, elle-même
imposée par la libéralisation des échanges.
Il est clair que l’avènement de ces échéances créera une situation de forte tension socio-territoriale, dont la
gestion doit prendre en compte l’évolution tendancielle telle qu’elle ressort de l’analyse de la situation
actuelle et des perspectives qu’elle dégage. Celles-ci, soumises certes, aux incertitudes de tout exercice de
prospective, seront examinées par référence aux fonctions économique, sociale, stratégique et environne-
mentale du secteur agricole.
D’une manière générale, les politiques de développement suivies jusqu’à présent n’ont pas pris suffisam-
ment en compte la fragilité des milieux et la conservation des ressources en eau, en sol et en biodiversité.
Ces mêmes politiques, marquées par le souci des pouvoirs publics de fixer les populations rurales, ont de fait
favorisé une augmentation de la pression sur ces ressources et par voie de conséquence leur vulnérabilité.
Les effets pervers de ces politiques, et la croissance démographique aidant, expliquent l’état actuel de sur-
peuplement des campagnes marocaines. Le déséquilibre population/ressources ne peut que générer des
réflexes de survie, responsables à leur tour de l’exploitation minière des ressources naturelles. Si une poli-
tique de modernisation et de développement du secteur agricole, et partant du monde rural, est impérative,
375
elle ne peut toutefois se déployer convenablement, quelle que soit l’ampleur des interventions envisagées,
que si les autres secteurs de l’économie absorbent une partie du surplus de populations affluant des cam-
pagnes. Face à la surcharge démographique, la dynamique de la mobilité constitue en effet une perspective
inéluctable, il vaut mieux s’y inscrire et s’y préparer pour mieux la maîtriser.
En liaison avec les besoins du pays, les projections confirment que le Maroc fera partie des pays à stress
hydrique à l’horizon 2025. À cet effet, les prévisions établies par le Ministère des Travaux Publics indiquent
qu’à l’horizon 2025, près de la moitié de la population du pays disposerait d’une dotation de l’ordre de 500
m3/hab/an, ce qui correspond à un seuil de pénurie absolue. Dans ces conditions, la promotion des tech-
niques d’économie de l’eau et le recours à des transferts inter bassins, voire à la mobilisation des ressources
en eau non conventionnelles deviennent impératifs. Les techniques les plus vraisemblables dans ce cas
seraient le traitement et la réutilisation des eaux usées et accessoirement le dessalement de l’eau de mer.
Les disponibilités de la SAU par habitant connaissent à leur tour une tendance à la baisse. Elles sont pas-
sées de 0.32 ha/habitant en 1960 à 0.35 en 1990, à la faveur du défrichement et de l’extension des zones de
culture, mais ne seront plus que de 0.22 ha en l’an 2025.
Ce déséquilibre population/ressources sera encore plus prononcé dans les zones de montagnes et les
oasis, où les tensions sur la terre et l’eau n’autoriseraient plus la pratique d’une agriculture conventionnelle,
incapable de rentabiliser ces ressources rares. Dans ces conditions, on peut s’attendre à la coexistence à
l’avenir de deux types d’activités, un premier centré sur une agriculture à forte valeur ajoutée (produits de ter-
roir, produits biologiques, produits « exotiques »), et un second, complémentaire au premier, axé sur le tou-
risme culturel et écologique soutenu par des activités de service.
La pauvreté au Maroc demeure un phénomène essentiellement rural, puisque 72 % des pauvres vivent en
milieu rural. Visiblement, l’évolution des performances de la production agricole n’a pas permis une améliora-
tion des revenus, ni des niveaux de consommation et, partant, de l’atténuation globale de la pauvreté rurale.
Celle-ci s’est même accentuée durant la dernière décennie. Ainsi, la productivité apparente nationale par actif
agricole et par an n’a cessé de se dégrader, chutant de 10652 DH par actif et par an durant la période 1993-
1997 à seulement 6740 DH par actif et par an durant la période suivante s’étalant de 1998 à 2001. Les résul-
tats de la dernière enquête nationale sur la consommation et la dépense des ménages effectuée en 2000/
2001 ont permis d’actualiser les données sur le taux de pauvreté. Si globalement ce dernier a reculé de
25,5 % en 1985 à 17,7 % en 2001 à l’échelle nationale, les zones rurales abritent toujours près des 3/4 des
pauvres du Maroc.
Ces données illustrent le déséquilibre social qui affecte le pays, et la nécessité d’œuvrer pour la réduction
des disparités, non seulement par souci d’équité et de cohésion sociale, mais aussi d’efficacité économique,
en liaison avec les exigences de la mise à niveau globale du pays et les défis inhérents à la mondialisation de
l’économie. Il est toutefois permis d’espérer que ces perspectives du monde rural marocain, apparemment
sombres, pourraient s’améliorer suite aux retombées positives potentielles de deux types d’initiatives lan-
cées au milieu des années 1990. En effet, à l’horizon 2010, le déficit en matière de services sociaux dans les
zones rurales serait pratiquement résorbé. D’un autre côté, cette échéance coïncidera aussi avec l’achève-
ment de la nouvelle génération des projets de développement rural, privilégiant les approches de proximité,
de subsidiarité et de participation effective des acteurs locaux. Il n’est pas irréaliste de s’attendre à ce que les
acquis de ces projets contribuent à créer les conditions favorables pour une dynamique de développement
économique, basée sur l’émergence et la prolifération de nouvelles activités productives et de services, orga-
nisées autour de nouveaux pôles de développement.
376
1.3. Une dynamique d’occupation des sols et des systèmes de
production
La libéralisation des assolements et celle du commerce de nombreuses denrées agricoles ont crée une
nouvelle dynamique d’occupation des sols. Celle-ci évoluera dans le sens de la disparition des cultures de
faible rentabilité, l’introduction et l’extension de nouvelles cultures destinées à l’export, et la stagnation tem-
poraire des surfaces emblavées par d’autres cultures en attendant la levée du dispositif de protection à la
frontière.
Les cultures qui ont connu une nette diminution sont les légumineuses alimentaires, le coton, le tournesol
et le raisin de cuve. Ainsi, la superficie cumulée de pois chiche, pois sec, lentille et fève a chuté de
432 000 ha en 1961 à 359 000 ha actuellement, alors que celle réservée au coton ne compte guère que près
de 200 ha, contre 13 000 ha au cours de la période 1988-92. La même tendance est constatée pour les
superficies emblavées par le tournesol qui ont également chuté de 123 876 ha par an en moyenne durant la
période 1988-1998 à moins de la moitié de cette surface, soit 57 125 ha, durant la période 1999-2002.
Ces baisses de superficies se confirmeront à l’avenir, à un rythme même plus accéléré, notamment pour
les cultures de printemps, telles que le mais et le tournesol. Pour ce qui est des céréales, nous assisterons
vraisemblablement à une inversion de la tendance observée jusqu’à présent. Le recul de la céréaliculture est
inéluctable. Il sera d’abord perceptible dans les zones bour défavorables. Il est plausible, dans un souci d’une
meilleure valorisation de l’eau d’irrigation, que cette dynamique soit aussi étendue aux périmètres irrigués,
plus particulièrement aux exploitations de taille réduite.
D’un autre côté, les perspectives offertes à l’export feront que le secteur des primeurs continuera sur sa
lancée, déjà entamée durant la dernière décennie, d’accroissement des superficies et des productions. La
superficie sous serre, qui a été multipliée par 3.6 entre 1988 et 1998, passant de 1900 ha à 6900 ha conti-
nuera de s’étendre, alors que la superficie réservée aux primeurs en plein champ sera augmentée de quel-
ques 50 000 ha supplémentaires pour satisfaire une demande intérieure et extérieure estimée à près de
1,8 millions de tonnes à l’horizon 2020. Il en est de même du vignoble de table qui a connu une extension
spectaculaire récemment, progressant de 15 000 ha en 1971 à 39 600 ha en 2003, essentiellement sous
l’impulsion d’investisseurs étrangers.
Enfin, depuis 1995, date à laquelle l’interdiction d’importer les bananes a été levée, les superficies embla-
vées par cette spéculation ont stagné autour de 3000 hectares. Il est très probable, qu’en cas d’annulation de
la licence d’importation imposée par les producteurs de banane, cette culture, dont l’adaptation aux condi-
tions agro-écologiques marocaines est discutable, résisterait difficilement à la concurrence extérieure. Elle
est donc condamnée à disparaître à terme.
Les changements anticipés en matière de systèmes de culture ne manqueront pas d’affecter le secteur de
l’élevage. Plus particulièrement, le démantèlement de la protection tarifaire entraînera une diminution du prix
des intrants et par conséquent du prix de revient des produits de l’élevage. Elle aura aussi un impact positif
sur la conservation des ressources pastorales et forestières qui seront soumises à une moindre pression de
pâturage, conséquence de la diminution des prix des aliments. Toutefois, la baisse du coût des intrants ne
sera pas suffisante pour compenser les généreuses subventions dont bénéficient les éleveurs européens et
américains, et il faut s’attendre à ce que l’extension du démantèlement aux produits animaux affecte néga-
tivement l’ensemble des filières animales, incapables de concurrencer des produits animaux étrangers, forte-
ment subventionnés.
Nous assistons par conséquent à une recomposition du paysage agricole marocain, marqué par la progres-
sion des spéculations pour lesquelles le Maroc possède un avantage comparatif et compétitif. Cette évolu-
tion, qui sera accélérée par l’entrée en vigueur du volet agricole des accords de libre échange conclus avec
377
des partenaires étrangers, entraînera fatalement un recul de la superficie emblavée en grandes cultures et
une extension des surfaces réservées aux cultures maraîchères, à l’arboriculture fruitière et à certaines pro-
ductions de haute valeur ajoutée.
Sachant que l’État, faute de moyens, ne pourrait pas maintenir longtemps une politique de soutien aux
ruraux en difficultés, il est permis de penser que de sérieuses menaces pèsent sur la production céréalière
qui offre à elle seule près de 80 millions journées de travail chaque année, et se pratique dans près des deux
tiers de la SAU. Ces menaces et les possibilités de conversion réduites des superficies emblavées en
céréales favoriseront l’exode, si des activités alternatives ne sont pas identifiées. Elles deviendraient pres-
santes à partir de 2010, et exécutoires à l’horizon 2020. À cette échéance, on peut imaginer que le secteur
agricole se déploie dans moins de la moitié du nombre actuel d’exploitations agricoles. Tout le problème
devient de mobiliser des niches d’emploi susceptibles d’absorber ces sureffectifs de plusieurs millions de
ruraux que la transformation du paysage agricole dégagera.
Le secteur maraîcher recèle encore d’importantes possibilités de développement et donc d’emplois qu’il
convient de mobiliser. Ce secteur procure déjà chaque année 40 millions journées de travail, soit l’équivalent
de 200 000 emplois permanents. Son extension, requise pour satisfaire les besoins des marchés intérieurs
et extérieurs, nécessiterait la mobilisation de plus de 10 millions de journées de travail annuellement.
La dynamique de la migration peut s’avérer salutaire si elle est correctement gérée. Le dépeuplement du
monde rural pourrait en effet ouvrir la voie à une réduction de la pression exercée actuellement sur les res-
sources naturelles. Elle peut aussi, en favorisant la concentration de la propriété foncière, contribuer à solu-
tionner la problématique du sous financement de l’agriculture, à travers la création d’unités de production
viables susceptibles d’amortir les lourds investissements que requiert la mise à niveau du secteur agricole.
Ce processus est d’ailleurs déjà entamé, et la libéralisation des échanges ne fera que l’accélérer. Ainsi, les
résultats du RGA de 1994 révèlent que plus de 400 000 exploitations avaient déjà disparu entre 1974 et
1994, dont 120 000 disposent de moins d’un hectare. Pendant cette même période la catégorie des exploita-
tions agricoles de « 100 ha et plus » a augmenté de 2500 à 3200 unités.
En définitive, tout semble indiquer que la déprise agricole et son corollaire la migration rurale-urbaine est
inéluctable et s’inscrit dans une dynamique sociétale. Cette déprise est déterminée par la faiblesse de la pro-
ductivité du travail agricole qui renvoie à son tour à l’étroitesse du support de production et à la faiblesse de la
production agricole sur des zones marginales de faible potentiel écologique. Ces transformations auront
comme conséquence prévisible la mise de près d’un million de foyers ruraux en dehors de l’économie du
marché. À terme, la déprise rurale accentuera l’inversion des proportions entre les populations rurales et
urbaines qui seront désormais dans un rapport de 15 % à 85 % à l’horizon 2025.
Le Maroc a fait de l’autosuffisance alimentaire un objectif fondamental de sa politique agricole après l’indé-
pendance. Cet objectif n’a été que partiellement atteint en raison de l’accroissement continu de la demande
du marché intérieur et des progrès limités enregistrés en matière de gain de productivité. Ainsi, pour les pro-
duits d’origine animale, les évolutions ont été positives avec des taux de couverture allant de 87 % pour le
378
lait à 100 % respectivement pour les viandes rouges et blanches. Par contre, pour les huiles et le sucre, et
les céréales, les taux de couverture se sont largement dégradés comme le montre le tableau ci-après :
Les projections de la demande alimentaire à l’horizon 2020, seraient de 130 millions de quintaux, un million
de tonnes et 600 000 tonnes, respectivement pour les céréales, le sucre et les huiles. Il s’en suit que l’écart
entre l’offre intérieure et les besoins en aliments risque de s’aggraver davantage au vu des tendances démo-
graphiques indiquant, en dépit d’un taux de croissance moyen annuel en diminution, que la population totale
du pays serait de l’ordre de 40 millions d’habitants à l’horizon 2020, accusant ainsi une augmentation de plus
de 30 % par rapport à la population actuelle. Dans cette perspective et pour ne considérer que le cas des
céréales, il est attendu que la demande prévisionnelle en ce produit, ne soit satisfaite par la production natio-
nale qu’à concurrence de 40 % environ à l’horizon 2020 (MADRPM, 2000). Si nous intégrons l’impact des
accords d’association et de libre échange conclus récemment, ce taux se situerait plutôt autour de 30 %.
Pour ce qui est des produits animaux, la satisfaction des besoins à l’horizon 2020 nécessiterait une aug-
mentation annuelle du niveau actuel de la production de 2,5, 4,3, 5,8, et 3,6 % respectivement pour les
viandes rouges, les viandes blanches, le lait et les œufs. Avec les engagements en matière de déprotection
partielle de ces produits, il est peu probable que cette auto-suffisance soit atteinte, si les niveaux de sub-
ventions accordés aux producteurs américains et européens subsistent.
379
2. Place du secteur agricole dans l’économie du pays :
la question controversée de « la vocation agricole du Maroc »
La vocation agricole du Maroc a donné lieu récemment à un débat controversé. Ainsi, si par le passé, la
vocation agricole du Maroc faisait l’objet d’un consensus, les récentes positions exprimées à ce sujet vont
d’une attitude prudente mais ambiguë à une autre qui qualifie carrément le Maroc de pays plutôt pastoral.
Pareilles hésitations sont préjudiciables au secteur agricole et au pays en général quelque soit l’option rete-
nue. Il est en effet essentiel d’avoir des idées claires sur les fonctions de l’agriculture et la place qu’elle doit
occuper dans le développement économique et social du pays. À défaut, la persistance de ce genre d’hésita-
tions ne peut être que néfaste pour l’avenir de la moitié de la population du pays. D’ailleurs, nous avons déjà
relevé que ces hésitations se sont répercutées sur le montant de l’enveloppe du budget d’investissement du
Ministère de l’agriculture qui a stagné, voire régressé durant les dernières années.
Les données objectives, dont nous disposons aujourd’hui, font état d’une pauvreté rurale préoccupante,
que la récente ouverture ne fera qu’aggraver, du moins pour le court à moyen terme. Le rapport 2004 de la
CNUCED confirme d’ailleurs cette allégation, et conclut que commerce et pauvreté entretiennent une rela-
tion asymétrique. Selon ce rapport, l’augmentation des exportations ne se traduit pas nécessairement par le
recul du fléau de la pauvreté. Une autre donnée fondamentale à prendre en considération est que la majorité
(75 %) des pauvres marocains sont des ruraux, et qu’il y a un consensus sur le rôle vital de la croissance agri-
cole qui, adossée à un développement rural adéquat, demeure un préalable incontournable à l’atténuation de
la pauvreté. Enfin, des considérations d’ordre stratégique et de souveraineté nous imposent l’impératif d’un
taux de couverture minimal de nos besoins alimentaires, au prix bien entendu d’un soutien conséquent, mais
ciblé et équitable de nos agriculteurs.
Le débat sur la vocation agricole du Maroc est par conséquent sans intérêt, et ne fait que reporter des
échéances décisives. Le vrai débat est celui qui nous amène à nous prononcer sur le type d’agriculture, dont
le Maroc de demain a besoin, et qui sert le mieux les intérêts suprêmes de la nation. Il se situe aussi autour
de la formulation d’une politique volontariste qui apporte de vraies solutions aux nombreux problèmes que
nous avons traînés tout au long de ces cinquante dernières années.
Conclusion
Le problème essentiel de l’intégration de l’agriculture marocaine à l’économie mondiale est que si dans le
long terme la réduction de la protection agricole conduira à une plus grande efficacité, dans le court terme,
elle menacera l’emploi d’un grand nombre de petits agriculteurs. C’est le dilemme central, dont la résolution
exige à la fois une assistance à court terme aux perdants pendant la période de transition et une recherche à
long terme d’alternatives rémunératrices pour les pauvres ruraux.
Le Maroc réalise de plus en plus que la protection douanière élevée profite davantage aux gros exploitants.
Les petits exploitants en bour n’en profitent pas, car ils produisent essentiellement pour leur subsistance et
dégagent peu d’excédents commercialisables. Par ailleurs, cette protection favorise principalement les
plaines riches le long de la côte atlantique, où l’incidence de la pauvreté (5 %) est largement inférieure aux
25 % du Centre Nord, de l’Est et du Centre Sud. Une révision radicale de notre politique agricole est par
conséquent nécessaire. Sa mise en œuvre ne sera pas de tout repos. La présence d’un groupe efficace de
pression au parlement, favorable aux vues des grands exploitants, constitue un puissant facteur de blocage
institutionnel à des changements significatifs dans ce domaine.
380
Face à cette situation, l’État se mobilise pour apporter des solutions. Celles-ci consistent d’une part, à lan-
cer une nouvelle génération de projets de développement rural intégré (DRI) et de proximité (DRI-PMH, DRI-
Mise en Valeur en Bour, et DRI-forêts). D’autre part, une politique de soutien aux agriculteurs visant carré-
ment la compensation d’une partie du manque à gagner résultant du démantèlement tarifaire, s’inspirant des
modèles européens et Turc, et financée en partie par la décompensation du sucre et la farine nationale de blé
tendre est en cours de discussion.
La mise en œuvre de ces politiques contribuera à atténuer la bipolarité qui est apparue dans le monde rural
entre les grands périmètres irrigués et les zones bour. Combinées à une politique plus volontariste en
matière de recherche et de conseil, elles conduiront probablement sinon à une plus grande efficience du sec-
teur agricole, du moins à une configuration de l’espace dont les principaux résultats auraient été une maîtrise
de la déliquescence du tissu social dans le monde rural, une plus grande équité, conséquence d’une alloca-
tion plus juste des ressources publiques.
Une série de questions préjudicielles interpellent les pouvoirs publics marocains depuis de longues
années. Ces questions ont trait à la nature du rapport des usagers à la ressource (foncière, hydrique, fores-
tière et pastorale), à la place de l’agriculture dans l’économie du pays, au niveau de sécurité alimentaire
recherché, aux modalités d’intégration du développement agricole dans le développement rural, à l’allocation
des ressources budgétaires entre les différents types d’agriculture rencontrés dans le pays, aux moyens à
mettre en œuvre pour accroître la compétitivité de notre secteur agricole, aux actions d’accompagnement
favorisant l’intégration de notre agriculture au marché international sans courir le risque de ruiner des pans
entiers de notre tissu productif, et à l’équilibre à établir entre nos villes et nos campagnes.
Toutes ces questions ont fait l’objet de nombreux ateliers, réflexions et colloques qui ont donné lieu à l’éla-
boration de stratégies, de plate-formes et de plans d’action, restés pour la plupart sans suite. Nous pouvons
donc légitimement déplorer le manque de visibilité, l’attentisme, l’hésitation dans le comportement des pou-
voirs publics, et une certaine difficulté à mettre en œuvre les plans d’action et à faire aboutir les réformes. Le
défi pour le Maroc devient alors de savoir dans quelle mesure il peut concilier entre le désir d’un changement
endogène consensuel et soutenu par l’adhésion et la participation de tous les acteurs concernés, et l’impéra-
tif d’efficience selon lequel il doit plutôt induire et diriger le changement à partir d’une compréhension cen-
trale de l’intérêt général, des besoins nationaux et des mesures à entreprendre pour les satisfaire.
Les choix de base, étant connus et admis, seule reste la mise en œuvre d’une politique volontariste et
cohérente pour les concrétiser. Ainsi, toutes les stratégies de production agricole soutiennent que celle-ci
doit être modulée selon les potentialités locales en prenant en compte les impératifs de sécurité alimentaire,
de croissance des exportations, d’amélioration des revenus et de protection du patrimoine naturel. Il est par
381
conséquent impératif d’agir vite, car l’énorme passif en matière de développement et le facteur temps
accentuent davantage les disparités et les dysfonctionnements.
1.2. Une politique agricole plus centrée sur l’agriculture que sur
l’agriculteur
Alors que l’agriculture et le monde rural ont été érigés en priorité depuis l’indépendance, il a fallu attendre
la publication des rapports annuels du PNUD sur le développement humain et la position embarrassante
qu’occupait notre pays parmi les nations, pour se rendre compte de l’énorme déficit accumulé par le monde
rural en matière de services de base, d’infrastructures, d’éducation et de marge d’autonomie.
C’est aussi pratiquement à la même époque que les pouvoirs publics ont commencé à prendre conscience
de l’inadéquation des approches de développement agricole, trop dirigistes, trop centralisées et trop disper-
sées entre des acteurs de développement, qui communiquent très peu entre eux et encore moins avec les
populations cibles. Ces dernières sont, dans les meilleurs des cas, tout juste informées des intentions des
pouvoirs publics.
C’est dire à quel point le processus du développement agricole et rural était en décalage avec les attentes
et les aspirations des populations. Les résultats de cette approche sont une discutable allocation des res-
sources financières, un impact limité aussi bien sur l’éradication de la pauvreté, que sur la productivité et la
compétitivité de notre agriculture ainsi que sur l’intégrité de nos ressources naturelles et la durabilité des
acquis en matière de développement agricole et rural.
Ces dysfonctionnements ont été relevés à plusieurs reprises et dans de multiples occasions. Des initia-
tives ont été lancées pour ajuster les approches et combler les lacunes. Parmi celles-ci, nous pouvons citer la
création de plusieurs agences dont celles du Développement du Nord et du Développement Social, la mise
en place de la Fondation Mohamed V, la promulgation de la Loi sur le micro-crédit et de la Loi 33/94, et enfin
le lancement d’une nouvelle génération de projets qui s’inspire des principes d’intégration, de participation et
de subsidiarité. Une autre expression de l’attention dont bénéficie désormais le monde rural est la finalisation
d’un projet de circulaire relative aux procédures de préparation, de financement et d’exécution des projets de
développement rural intégré. Ce projet souligne que, désormais, le déploiement de toute initiative de déve-
loppement rural doit se faire dans un cadre cohérent et solidaire de l’ensemble des acteurs concernés par cet
espace. Ce principe est sous tendu par une organisation institutionnelle appropriée qui se décline au niveau
central, provincial et communal.
Toujours est-il qu’en attendant l’application des dispositions de cette circulaire, l’action des pouvoirs
publics demeure dispersée, centralisée et manque d’un cadre cohérent pour s’y déployer de manière concer-
tée et en parfaite synergie entre les intervenants. À ce jour, nous manquons toujours de relais appropriés aux
niveaux local et infra local, indispensables pour la mise en œuvre d’une véritable politique de proximité. Le
projet national territorial constitue une opportunité unique de s’engager sur cette voie, pourvu que les auto-
rités en charge de ce projet arrivent à mobiliser tous les acteurs concernés, et que ces derniers aient la
volonté de s’inscrire dans une démarche collégiale du développement, dans laquelle chacun apporte sa
contribution, en parfaite harmonie avec les autres.
382
2. Les lignes directrices d’une nouvelle approche au
développement
Le développement rural est devenu une priorité nationale depuis 1993, en réponse à la crise du monde
rural, amplifiée par les sécheresses de plus en plus fréquentes et l’impact de la politique d’ajustement struc-
turel. C’est dans ce contexte préoccupant, qu’a été élaborée la nouvelle stratégie de développement rural à
l’horizon 2020. Celle-ci retient trois principes directeurs essentiels, à savoir : la participation des acteurs,
l’intégration des actions et une approche territorialisée du développement qui tient compte de la diversité
des espaces ruraux marocains.
Le souci de faire en sorte que la stratégie de développement rural à l’horizon 2020, déjà vieille d’une
dizaine d’années, ne connaisse pas le même sort que celles qui l’ont précédée, nous impose la satisfaction
de certains préalables. Parmi ceux-ci, les plus déterminants sont les suivants :
383
entre les autorités locales, les élus, les services déconcentrés de l’État, la société civile, l’université, et le
secteur privé.
384
se traduire par une réduction du nombre d’acteurs gouvernementaux impliqués dans l’encadrement de ce
secteur, et le renforcement de ses capacités humaines et financières.
Les principaux handicaps qui s’opposent à la participation des femmes au développement résultent de leur
isolement par rapport aux différents vecteurs du développement, et la méconnaissance par les structures de
développement de leurs besoins, aspirations, et capacités réelles.
385
2.2. La nécessaire adéquation entre « les vocations agricoles » des terres
et les productions qui y sont réalisées
L’application uniforme des incitations prévues dans le cadre du Code des Investissements Agricoles, et
des dispositions du régime des prêts du Crédit Agricole, sans tenir compte des spécificités agro-écologiques
des régions, s’est traduite par une allocation inadéquate des ressources. Elle a été aussi à l’origine de cer-
taines distorsions dans les systèmes de production, favorisant par exemple l’extension des cultures dans les
zones forestières et pastorales, et conduisant à leur désertification à long terme.
En agriculture pluviale, l’incohérence des politiques sous sectorielles et les discriminations de soutiens
entre produits, tout en réalisant les objectifs visés pour les produits privilégiés, ont été à l’origine de l’exten-
sion de pratiques de production néfastes à la préservation des ressources naturelles dans les zones fragiles.
Ainsi, la politique de discrimination au bénéfice du blé tendre, et les programmes de sauvegarde du cheptel
ovin, appuyés par des tarifs de protection élevés à la frontière, ont largement contribué à faire évoluer la
structure de production de l’agriculture pluviale vers des systèmes de production de moins en moins adaptés
aux conditions d’aridité, avec des conséquences négatives en matière de productivité et de vulnérabilité des
ressources en terre arable. À titre d’exemple, on peut citer :
– L’augmentation des superficies emblavées en céréales au dépens des terres de parcours et de forêts ;
– L’extension du blé tendre par substitution, en partie, au blé dur en dépit de l’intérêt de ce dernier (durant
les trente dernières années, la superficie du blé tendre a pratiquement quadruplé, alors que celle du blé
dur a régressé) ;
– Le déplacement de l’orge, culture la mieux adaptée aux conditions d’aridité et de variabilité intra annuelle
de la pluviométrie, vers des terres de plus en plus marginales et donc à très faible productivité.
Les atouts de diversité de notre milieu naturel, de richesse de notre biodiversité, du savoir faire de nos
agriculteurs et de notre proximité du marché européen confèrent au Maroc de grandes opportunités de diver-
sification de sa production agricole. Celle-ci doit favoriser une évolution progressive des systèmes de culture
vivriers et conventionnels, dominés par la céréaliculture, vers des systèmes plus rémunérateurs, plus orien-
tés vers le marché et qui valorisent au mieux les vocations et les aptitudes de nos ressources naturelles et
de nos terroirs.
Cette reconversion constituerait un saut qualitatif important en matière de lutte contre la pauvreté et de
protection de l’environnement, et une adaptation appropriée de notre agriculture aux exigences de la libérali-
sation. Elle doit viser la production de denrées alimentaires pour lesquelles la demande est en pleine expan-
sion. Parmi celles-ci, nous pouvons citer les produits labellisés de terroirs, les produits « bio », et toute une
série de produits de haute valeur ajoutée.
Cette dynamique ne peut, toutefois, voir le jour sans un accompagnement soutenu de la part de l’État et
des collectivités territoriales. Des efforts de recherche doivent en effet être consentis pour identifier de nou-
velles niches de production et leurs itinéraires techniques. Ces efforts doivent aussi se situer au niveau de
l’encadrement des producteurs pour l’adoption des innovations, le conditionnement des produits cibles et
leur organisation et assistance pour accéder aux marchés.
386
2.4. Appui au développement de la recherche agronomique
La mise à niveau du monde rural passe nécessairement par le développement agricole, et agroindustriel.
L’État se doit en effet d’encourager la mise en place d’un tissu de petites et moyennes entreprises agro-
alimentaires locales pour promouvoir la création de richesses, de valeur ajoutée et d’emplois. Une telle dyna-
mique favorisera l’émergence de nouveaux pôles de développement rural et renforcera l’urbanisation rurale.
Celle-ci peut s’envisager d’abord dans les zones irriguées, aussi bien en grande hydraulique qu’en petite et
moyenne hydrauliques, et accessoirement dans les zones bour favorable, lorsque la régularité de l’approvi-
sionnement en matières premières peut être garantie.
L’objectif de la croissance économique des zones rurales est tributaire aussi d’une diversification des acti-
vités économiques. Parmi ces activités, Il est à mentionner, en tout premier lieu, les industries et services
para-agricoles à l’amont et à l’aval de la production agricole qui, à l’exception des grands périmètres irrigués,
sont très peu développés. Cela prive le monde rural d’une valeur ajoutée qui peut être réinvestie localement
pour générer des emplois et des revenus stables pour les populations rurales. Pour atteindre cet objectif, il
est nécessaire de réduire le déficit en infrastructures physique et sociale, et de promouvoir un cadre incita-
teur à l’investissement dans ces zones.
Un autre gisement d’emplois correspond au créneau du tourisme rural. Les zones rurales sont en effet
387
dépositaires d’un patrimoine naturel et culturel riche, diversifié, mais peu valorisé, faute de services dans ce
domaine et de possibilités d’accueil. Les mesures prises récemment par le ministère du tourisme en faveur
de ce secteur vont dans la bonne direction. Là encore, la mise en place d’un cadre incitatif attrayant est
nécessaire pour mobiliser des promoteurs potentiels. Elle doit être précédée toutefois par une vaste cam-
pagne de sensibilisation destinée aux Conseils Communaux et aux Commissions de Développement
Locales.
Un autre secteur porteur est celui de l’artisanat rural qui a bénéficié récemment d’un regain d’intérêt de la
part surtout des ONG opérant aussi bien en milieu urbain que rural dans le cadre de l’opération de micro-
crédit et de formation professionnelle. Les actions entreprises ont pour objectif, en particulier, de valoriser le
savoir-faire endogène des populations rurales en parfaite symbiose avec l’agriculture (valorisation des laines,
cuirs et autres produits, création de labels de terroirs...) et le tourisme, en réponse à la demande des tou-
ristes de produits artisanaux locaux. Enfin, il convient de signaler que dans les zones marginales, principale-
ment de montagne, les populations tirent des revenus importants d’une activité artisanale qui reste peu
valorisée.
Conclusion
L’expérience accumulée par le Maroc en matière de politique agricole, durant les cinquante dernières
années, est très riche. Le bilan qu’on en tire aujourd’hui met en évidence l’extrême pertinence de certains
choix stratégiques, mais aussi quelques dysfonctionnements et contre performances qui traduisent le retard
constaté du monde rural en matière de développement humain. La mise à niveau du monde rural, la lutte
contre la pauvreté, et la maîtrise du chômage et des inégalités sociales sont parmi les défis les plus urgents
auxquels le Maroc est confronté aujourd’hui.
Le Maroc actuel, en pleine transition politique, économique et sociale, est tout à fait capable de relever ces
défis. Les événements politiques et le chantier de réformes institutionnelles qu’a connus le pays durant les
six dernières années sont en train de façonner durablement son développement économique et social. Cette
dynamique, marquée aussi par une volonté de moralisation de la vie publique et d’association de la société
civile, crée effectivement un contexte favorable à la promotion d’une politique active de lutte contre la pau-
vreté et à l’émergence d’un nouveau concept de l’autorité.
Pour que cette dynamique aboutisse aux résultats escomptés, la mobilisation de toutes les énergies dispo-
nibles est toutefois nécessaire. De plus, la satisfaction de certains préalables et la levée de certaines
contraintes requièrent un changement d’attitudes, notamment des structures de l’État, indispensable pour
l’opérationnalisation des principes d’intégration, de participation, et de décentralisation, qui nécessitent plus
qu’un engagement au niveau du discours, mais une véritable intégration dans les comportements quotidiens
de ces opérateurs. C’est l’immense chantier qui attend le nouveau Secrétariat d’État au Développement
Rural.
Références bibliographiques
388
génétique et reproduction. Séminaire de l’ANPA organisé les 24 et 25 Décembre 2004 à Rabat sur le
thème : Les systèmes de productions ruminants face aux mutations de l’environnement naturel, écono-
mique et social.
Direction du Développement forestier. 1998. Pour la Conservation et la Gestion Durable de la Forêt Maro-
caine. Rabat.
DPV. 1998. Plan National de Restructuration et de Développement de la Palmeraie : État d’avancement et
actions futures
El Koudrim M., Thomas N., Gintzburger G., Bentaleb M., Rahmi M., et Bounejmate M. 2001. Étude du phé-
nomène de mise en cultures sur parcours. Cas de la Commune Rurale des Béni Mathar. Workshop « ges-
tion durable des ressources agro-pastorale dans l’Oriental du Maroc ». Oujda, Maroc du 20-22 fevrier.
p 73-84.
Khardi A. 1998. La salinité des eaux et des sols. Cas de Tafilalt. ORMVAT. Errachidia
Mahyou H, Tahri M., Thomas N., Bounejmate M., 2001. Étude de la dégradation des parcours de la com-
mune rurale de Béni Mathar à l’aide du SIG et de la télédétection. Workshop « gestion durable des res-
sources agro-pastorale dans l’Oriental du Maroc ». Oujda, Maroc du 20-22 fevrier. p 63-72
MAMVA. 1993. Stratégie de développement des terres de pâturage au Maroc. Étude réalisée par M. Amane,
O. Berkat, H. Narjisse et M. Tozy.
Ministère de l’Agriculture et de la Réforme Agraire (MARA). Direction de la mise en Valeur. 1970-71. Étude
pour l’aménagement des terrains de Parcours du Maroc Oriental. Convention MARA-SCET COOP-ERES.
Narjisse, H. 1997. Plan d’Action National pour l’Environnment. Atelier Sol et Environnement. Marrakech 7 et
8 Janvier 1997. Ministères de l’Environnment et de l’Agriculture.
ORMVAT. 1996. Plan stratégique de développement. Diagnostic de la situation actuelle. ORMVAT. Errachidia
389
3. Conservation et développement : 50 années d’efforts en faveur
des écosystèmes forestiers .........................................................................421
3.1. Cadre juridique et réglementaire ...........................................................421
3.2. Délimitation et mobilisation du domaine forestier ..............................422
3.3. Inventaire et connaissance des ressources forestières ...................423
3.4. Équipement et protection des forêts .....................................................424
3.4.1. Infrastructure et équipement .........................................................424
3.4.2. Défense contre l’incendie ..............................................................426
3.4.3. Gestion de la santé des forêts .......................................................426
3.5. Aménagement et exploitation des forêts .............................................428
3.5.1. Aménagements forestiers ..............................................................428
3.5.2. Aménagements sylvo-pastoraux ..................................................429
3.6. Reboisement et reconstitution dés écosystèmes forestiers ............430
3.6.1. Genèse et évolution .........................................................................430
3.6.2. Semences et pépinières forestières ............................................431
3.7. Conservation des sols et aménagement des bassins
versants ......................................................................................................433
3.7.1. Lutte contre l’érosion hydrique .....................................................433
3.7.2. Lutte contre l’ensablement ............................................................435
3.8. Lutte contre la désertification ................................................................437
3.8.1. Ampleur du phénomène .................................................................437
3.8.2. Des efforts déployés en matière de lutte contre
la désertification ..............................................................................438
3.8.3. Le PAN-LCD : une nouvelle orientation de la lutte
contre la désertification ................................................................438
3.9. Gestion et valorisation de la biodiversité .............................................439
3.9.1. Chasse et développement cynégétique .......................................439
3.9.2. Pêche et aquaculture .....................................................................441
3.9.3. Protection de la nature et aires protégées .................................442
3.10. Institutions et encadrement de la forêt ..............................................443
3.10.1. Évolution des institutions d’encadrement .................................443
3.10.2. Recherche forestière ....................................................................446
3.10.3. Financement du secteur forestier ...............................................448
4. Éléments de réflexion prospective...............................................................449
4.1. Tendances actuelles de l’utilisation de l’espace
et des ressources .....................................................................................449
4.2. Les écosystèmes forestiers et périforestiers face
aux enjeux de la gestion durable ...........................................................453
4.2.1. La maîtrise de l’eau : contrôle de l’eau et
de la désertification ........................................................................453
4.2.2. Rétablissement de l’équilibre sylvo-pastorale.............................453
4.2.3. Gestion de la demande énergétique du monde rural .................453
4.2.4. Accroissement de l’offre du bois et développement
des filières forestières ....................................................................453
392
Les steppes sont remplacées par le chêne vert et les pins dans des stations supérieures à 2.000 m dans
les Atlas. Dans le Haut Rif occidental siliceux le cèdre est remplacé par le chêne zeen (REILLES, 1976).
L’abondance du chêne zeen et l’absence du cèdre démontrent que le climat était plus chaud et plus humide
qu’actuellement. Ce regain d’humidité et de chaleur ne semble avoir duré que 2.000 ans environ. En effet
dans le Moyen Atlas (Tiguelmamine) vers 7.000 ans B.P le chêne vert se dissocie du chêne zeen avec l’appa-
rition de frênes et de pins. Un événement climatique majeur marque la fin de l’Atlantique et le début du Sub-
boréal (4.000 ans B.P). C’est le retour du froid se traduisant par l’apparition du cèdre, la quasi disparition des
pins et d’une recrudescence du chêne vert.
D’une manière générale, il apparaît que le climat du Maroc, après s’être fortement réchauffé, après la pé-
riode froide du Tardiglaciaire, (13.000-10.000 ans B.P.), avec une pluviosité nettement majorée que la période
actuelle au Boréal (9.000-7.500 ans B.P.), s’est surtout asséché vers 7.000 ans B.P. Un épisode pluvial à
l’Atlantique de 6.000 à 7.000 ans B.P a été suivi au Subboréal vers 5.000 à 4.000 ans B.P., d’un refroidisse-
ment aboutissant pratiquement à la mise en place du climat actuel.
Les débuts du processus néolithique : action de l’homme par la culture et l’élevage, qui a affecté la forêt
méditerranéenne par le défrichement, remontent à 10.000 ans dans le Proche Orient. Ces activités se sont
étendues en Grèce et en Crète vers 6.000 ans B.P et à l’Afrique du Nord vers 5.500 à 4.500 ans B.P. Cette
période est marquée dans tout le Maghreb par l’anthropisation des milieux due à la succession des civilisa-
tions phénicienne, romaine, carthaginoise et arabe.
Les analyses pollenalytiques effectuées au Maroc ces dernières années ont montré (LAMB et al. 1989) les
faits observables suivants dans le Moyen Atlas :
– une première déforestation vers 2.250 ans B.P. de faible envergure qui correspondrait à l’époque
395
romaine. Elle est surtout marquée par la disparition du frêne, (espèce utilisée pour la fabrication du char-
bon de bois). Une recrudescence des crucifères pourrait, également correspondre au développement
des cultures ;
– une seconde déforestation vers 1.600 B.P. très marquée par une forte baisse du chêne vert associée à
une semblable recrudescence des graminées. Le chêne zeen déjà amoindri par les variations clima-
tiques de l’Atlantique (7.500- 4.500 B.P.) sécheresse puis refroidissement, disparaît une première fois
peu après. Le cèdre régresse également ;
– vers 440 B.P., la forte recrudescence du cèdre est un indice d’un refroidissement du climat.
Dans le Pré-Rif (REILLE, 1977) les déforestations commencent au début du Subatlantique (2.800 B.P.) aux
époques phéniciennes et romaines comme en témoigne la forte régression des cédraies. Vers 1.000 ans B.P
l’arrivée des Arabes serait responsable de l’extension de l’olivier et de la bruyère arborée témoin de la défo-
restation des subéraies.
Dans les Atlas à haute altitude, on retrouve les effets des déforestations, dues successivement aux Phéni-
ciens, aux Romains, aux Arabes. Le genévrier thurifère aurait ainsi disparu des plus hauts sommets de
l’Atlas, comme aux sources de la Tessaoute (2.900 m d’altitude), laissant le terrain aux seuls xérophytes épi-
neux. Par ailleurs, l’hypothèse d’un assèchement climatique dans la seconde moitié du Subatlantique pour-
rait être à l’origine de la disparition du chêne zeen vers 1.150 ans B.P. dans le Moyen-Atlas aux altitudes
2.100 m et après 2.860 ans B.P dans le Haut Atlas (Oukaimeden).
Il apparaît que le fait marquant de cette période est avant tout la forte anthropisation (feux, pâturages,
cultures, etc.) des milieux qui a entraîné de grandes et durables ouvertures dans les massifs forestiers,
accompagnées par endroits de possibles disparitions d’espèces (chêne zeen, frêne dimorphe, genévrier thu-
rifère, etc.). Les changements climatiques, s’ils existent, restent hypothétiques. La disparition du chêne zeen
dans de nombreux massifs au cours du Subatlantique peut en effet aussi bien être due à un assèchement du
climat qu’à l’érosion des sols après déforestation. Il convient d’ailleurs de souligner que ces deux processus
sont interactifs, de fortes déforestations et ablations de sols pouvant contribuer à l’assèchement du climat.
396
Après les grandes migrations du Xe siècle, le déboisement continu dans les plaines et les vallées mais à un
rythme beaucoup plus modéré ; de belles forêts se maintiennent dans l’intérieur, naturellement protégées
par l’insécurité et la crainte des fauves qui interdisent aux pasteurs d’y conduire leurs troupeaux. Les effec-
tifs encore réduits de la population et du cheptel n’exercent d’ailleurs, à cette époque, qu’une légère pres-
sion beaucoup plus acceptable que celle d’aujourd’hui.
La forêt était considérée comme un bien collectif, bien qu’il s’agisse en pareil cas très vraisemblablement
de droits d’usage très étendus, plutôt que de droits de propriété proprement dits. Les membres des tribus
vivant dans ou près des massifs forestiers se sont considérés comme propriétaires, ils prélevaient sans
contrôle les produits nécessaires à leurs besoins. Cependant, toute appropriation de terres non conforme aux
règles coutumières est immédiatement combattue.
C’est cet héritage – constitué par un domaine forestier de près de cinq millions d’hectares (après en avoir
perdu environ 4,8 millions d’après les estimations les plus prudentes) – que le Maroc devait recueillir au
début de XXe siècle. La population, qui s’élevait à 5 millions d’habitants, chiffre considérable à l’époque (1910),
représentait une pression constante sur cet héritage, par elle-même et par ses troupeaux.
« Il est d’autres biens qui ne peuvent être en aucune façon aliénés qu’avec l’autorisation du Makhzen, parce
qu’il a sur ces biens des droits de propriété ou de contrôle » ce sont :
« ...............................................................................................
« 3o Les forêts qui, dans toute l’étendue de l’Empire appartiennent au Makhzen, sous réserve des droits
d’usage (pâturage de troupeaux, ramassage du bois) que pourraient avoir les tribus voisines ;
« ...............................................................................................
« 5o Les terres désertes et incultes, les biens vacants et sans maître et, d’une façon générale, tous les
immeubles que la loi musulmane comprend sous la dénomination de “terres mortes”, lesquelles reviennent
de droit au Makhzen et ne peuvent, d’après les règles du Chrâa, être occupées ou vivifiées sans autorisation
préalable ».
Le Dahir du 7 juillet 1914 portant réglementation de la justice civile indigène et la transmission de la pro-
priété immobilière, reprenant les propres termes de la circulaire vizirielle, sanctionnait définitivement la
domanialité des forêts. Ce texte a permis d’incorporer également au domaine privé de l’État les peuplements
d’alfa et les dunes maritimes et terrestres. Ce principe admis, il convient d’asseoir le domaine forestier sur le
terrain d’une manière irrévocable. Ce fut l’objet du Dahir du 3 janvier 1916 portant règlement spécial sur la
délimitation du domaine de l’État modifié par le Dahir du 17 août 1949. Cette loi, applicable au domaine privé
non boisé comme au domaine forestier, fixe une procédure simple de délimitation administrative avec possi-
bilité pour les opposants d’un recours contentieux devant les tribunaux.
Le régime forestier, en tant qu’ensemble de règles régissant la constitution juridique du domaine forestier,
sa délimitation, sa protection et les différentes atteintes à la propriété forestière est mise en place à travers
le Dahir du 10 octobre 1917 sur la conservation et l’exploitation des forêts; il envisage le principe de la doma-
nialité des forêts en s’appuyant sur celui de la présomption domaniale. Celle-ci repose sur la « possession qui
est une apparence de propriété » (Art. 1er du dahir du 10 octobre 1917). Ce même article stipule qu’il y a trois
formes principales de propriété forestière à savoir : la propriété publique, collective et privée.
397
À côté des forêts domaniales proprement dites, le domaine forestier englobe aussi les terrains couverts
d’alfa, les dunes terrestres et maritimes, les maisons forestières, les plantations, les pépinières dans les
forêts domaniales et les terrains reboisés ou à reboiser (Art.1er (a) du Dahir du 10 octobre 1917). Cependant,
le régime de la conservation de la forêt domaniale admet des exceptions faites sous le critère de l’utilité
publique, autorisant la distraction, et le remembrement par voie d’échange immobilier ou même l’expropria-
tion.
Les biens du domaine forestier, les terrains boisés ou à reboiser appartenant à des particuliers ou à des
collectivités soumis au régime par décret, sont exploités selon les prescriptions du Dahir précité, notamment
en ce qui concerne les occupations temporaires, les coupes de bois, les amodiations, les parcours, les défri-
chements, les extractions de matériaux, etc.
Les infractions aux dispositions de la loi forestière, à savoir la violation des conditions d’exploitation de la
forêt, la destruction de limites, les vols de bois, les défrichements, et labours, les mises à feu et incendies, la
contrefaçon des marteaux servant aux marques forestières, l’usage frauduleux de vrais marteaux, sont
constatés par les ingénieurs et préposés forestiers par procès-verbaux qu’ils transmettent aux juridictions
compétentes pour jugement.
Le Dahir du 10 octobre 1917 a confié la gestion du domaine forestier ainsi que celle des autres biens sou-
mis au régime forestier au Département chargé des Eaux et Forêts, qui a seul qualité pour intervenir au nom
des intérêts du domaine forestier, dans les procédures de délimitation et d’immatriculation ainsi que pour
ester en justice.
Une des préoccupations majeures de l’Administration forestière après la promulgation de la loi forestière, à
cette époque, fut le sauvetage de la Mamora, mutilée et dévastée par les charbonniers et les tanneurs de
Rabat et de Salé. Un vaste programme de régénération par recépage devait en faire en une trentaine
d’années une des plus belles forêts de chêne liège d’Afrique du Nord et l’une des plus étendues. Dans le
même temps, les exploitations désordonnées de la cédraie étaient réglementées et fournissaient, dès la fin
de la première guerre mondiale, un appoint non négligeable à l’économie du pays.
Parallèlement, fut entreprise la délimitation du domaine boisé qui, seule, pouvait permettre de limiter les
défrichements et les revendications de propriétés ; en même temps, une législation bien adaptée aux usages
locaux donnait au service forestier l’instrument juridique d’une gestion plus rationnelle ; cette législation fut
complétée ultérieurement par tout un arsenal de textes réglementaires concernant les exploitations, les
défrichements, les incendies, l’usage du parcours et l’aménagement sylvo-pastoral, les nappes alfatières,
l’arganier, le noyer, les parcs nationaux, le reboisement, la défense et restauration des sols...
Successivement, les autorités responsables de la mise en œuvre de la politique forestière se penchèrent
dès 1918 sur les problèmes les plus urgents : fixation des dunes à Essaouira, Agadir... ; équipement de la
forêt ; organisation des exploitations de bois et de liège pour l’économie ; organisation et réglementation du
pâturage en forêt ; reboisement de protection ou de production ; défense et restauration des sols, des pâtu-
rages dégradés et, à un moment donné, du vignoble traditionnel.
La consolidation du régime forestier marocain, à travers la conservation, le développement et la gestion
rationnelle des écosystèmes s’est développée durant les plans de développement économique et social qu’a
connu le pays depuis 1956 à nos jours et dont le bilan est présenté dans les développements qui suivent.
398
1.2. État actuel des écosystèmes forestiers et leur dynamique
399
Figure 1 : Distribution bioclimatique des écosystèmes terrestres
(Climagramme d’Emberger)
Ces écoystèmes individualient des communautés végétales qui se relayent depuis l’étage thérmo-
méditerranéen entre le niveau de la mer et 900 m jusqu’à l’étage oro-méditerranéen entre 1.800 m et
2.700 m, suivant une succession tout à fait originale dans le bassin Figure 1 : Distribution bioclméditerranéen.
Si l’on envisage les communautés végétales forestières, on dénombre plus de 60 espèces arborescentes,
dont 30 espèces majeures et 30 autres espèces secondaires.
400
Tableau 1 : Types de forêts marocaines en fonction du bioclimat, étages de végétation et sol
(MHIRIT, 1999)
401
1.2.2. La forêt dans l’utilisation de l’espace : importance et diversité
Le premier inventaire forestier national (IFN) réalisé entre 1990 et 1995 a permis de mieux appréhender
l’état du patrimoine forestier et de disposer d’une base de données cartographiques et numériques impor-
tante et fiable sur le répartition, la consistance et l’état général des ressources forestières.
(1) et (3) source : Ministère de l’agriculture, données générales sur l’agriculture Marocaine, février 1996; (2) la surface forêts comprend 490.518 ha de plantations artificielles (bilan 1994).
Sur le plan de l’occupation et du statut foncier des terres, les écosystèmes forestiers, para-forestiers et
alfatiers sont domaniaux (domaine privé de l’État) et s’étendent sur 9.037.714 ha soit l’équivalent de 12,7 %
du territoire national.
Les formations forestières, situées en majeure partie, dans les climats semi-aride, subhumide et humide,
couvrent une surface de 5.719.000 ha. Elles sont constituées de 66 % d’essences feuillues (chêne vert,
chêne liège, arganier, acacias sahariens), de 18 % d’essences résineuses (cèdre de l’Atlas, Thuya, pin d’Alep
et pin maritime, genévriers, cyprès de l’Atlas et sapin du Maroc), de 9 % de plantations artificielles et 7 % est
occupé par des formations basses, plus ou moins ouvertes, de type matorral et essences secondaires résul-
tant souvent de la dégradation des forêts. Le taux moyen de boisement du pays, de l’ordre de 8 %, est en
deçà du taux optimal (15 à 20 %) nécessaire à l’équilibre socio-écologique et environnemental du pays.
402
Encadré 1 : Répartition des superficies principales essences
403
La répartition spatiale des écosystèmes forestiers à l’échelle du pays est conditionnée, au premier niveau
de perception écologique, par les facteurs du climat, en particulier, les précipitations et leur variabilité, les
températures maximales et minimales. D’une façon générale, ce sont les régions les plus septentrionales, en
particulier les massifs montagneux du Rif, des Atlas et les plaines littorales qui sont globalement les plus
riches en espèces. La grande diversité des habitats qui y sont représentés (forêts, steppes, zones
humides...) en fait de véritables « réservoirs génétiques ».
Pour l’essentiel, les forêts sont liées au relief. En allant du sud-ouest au nord-est, elles se localisent sur le
Haut Atlas et l’Anti-Atlas, puis sur le Moyen Atlas et la chaîne de Debdou vers l’est. Elles couvrent aussi la
chaîne du Rif d’ouest en est, et le Plateau Central. En zones de plaines, on distingue trois ensembles : un
bloc nord autour de Larache et Souk-El-Arba, un bloc constitué par la forêt de la Maâmora et celles de l’arrière
pays de Rabat et de Benslimane, et un bloc sud groupant les forêts des régions d’Essaouira, Agadir et Tiznit.
Dans les provinces sahariennes, essentiellement à ED-DAKHLA, les acacias sahariens et les tamarix à faible
densité, présentent un cachet particulier. L’annexe 1, présente la répartition des surfaces forestières par
région administrative. Annexe 1 : La répartition des surfaces forestières par région administrative.
Le stock de bois sur pied à l’hectare est faible. Il est de l’ordre de 200 m3/ha pour le cèdre et ne dépasse
guère 50 m3/ha pour les autres essences. Selon les catégories de produits et types d’utilisations, le bois de
404
feu représente l’équivalent de 74 % du stock alors que le bois d’œuvre, essentiellement de cèdre et de pin,
est de l’ordre de 24 % et le bois destiné à la fabrication de pâte à papier, d’eucalyptus principalement, repré-
sente 2 %.
Les capacités de production ligneuse des écosystèmes forestiers, à l’image de la forêt méditerranéenne sont
relativement limitées comparativement aux forêts tropicales ou tempérées. Il est certain que la contribution
la plus importante des écosystèmes forestiers marocains à l’économie nationale réside plus dans ses fonc-
tions de protection, de récréation et bio-patrimoniales que dans sa fonction de production de bois. Cette
contribution s’exprime à travers la protection de l’environnement, en particulier, les arbres et les forêts repré-
sentent des éléments essentiels de fonctionnement des écosystèmes contribuant aux cycles de renouvelle-
ment et à la conservation des ressources aussi primordiales que l’eau (aménagement des bassins versants,
les sols, (protection contre l’érosion, lutte contre la désertification), la biodiversité biologique, les paysages et
les produits non ligneux.
L’analyse d’images satellitaires Landsat captées en 1982 et 1992 a révélé l’expansion du processus dans
d’autres régions (voir tableau ci-après)
L’Inventaire Forestier National (1996) permet ainsi des comparaisons, qui à l’échelle du pays, font état
d’une tendance forte à la réduction des surfaces forestières sous les pressions simultanées de plusieurs fac-
teurs : défrichement au profit de l’agriculture, prélèvement de produits ligneux en quantité supérieure à la
405
possibilité biologique, surconsommation de la strate herbacée des feuilles et des fruits par les animaux,
extension des surfaces urbanisées et des équipements. La surface totale forestière a régressée selon l’IFN
de 245.350 ha en dix ans, soit de l’ordre de 25.000 ha par an.
L’écosystème « forêt » est un système spatial ouvert qui inclut une communauté d’êtres vivants végétaux
et animaux et leur environnement donnant lieu à des processus biologiques complexes. Les caractères fon-
damentaux de ce système sont déterminés pour l’arbre qui, par sa masse, son couvert, son mode de crois-
sance, sa longévité et sa pérennité, exerce une action puissante capable de modifier le microclimat et de
former à partir du substrat géologique un sol, une flore et une faune spécifiques.
Par ailleurs, l’écosystème forestier remplit des rôles socio-économiques résultant de ses relations avec les
différents acteurs sociaux. En effet, la forêt est une source de produits dont l’homme a besoin pour son exis-
tence et son épanouissement (nourriture, énergie, oxygène, bois, médicaments...). Elle contribue à la produc-
tion des installations humaines et améliore le microclimat ; elle agit sur la régularisation des régimes des eaux
et assure le maintien de la fertilité des terres agricoles ; elle constitue un lieu de repos, d’inspiration, de
détente et de loisirs. De ce fait, les acteurs ont chacun, vis-à-vis de cet espace des attitudes, des comporte-
ments, des attentes et des modes d’action spécifiques.
D’une manière générale, les processus écologiques de l’écosystème forestier et ses rôles socio-écono-
miques sont regroupés sous le terme de « fonctions ». Si les processus biologiques se déroulent dans toute
forêt, il n’en reste pas moins vrai que les fonctions n’apparaissent qu’avec les hommes qui utilisent ces pro-
cessus dans un but déterminé. Ainsi, la fonction de production de bois est liée à la productivité des arbres et
à l’exploitation du bois dans un but économique. De même la fonction de protection n’a d’intérêt qui si des
enjeux à protéger sont définis par des acteurs sociaux. De même encore, les usages sociaux de la forêt
n’existent que par rapport aux usagers.
La figure 2 ci-après montre les relations au sein de l’écosystème forestier en tant que système écologique
et système économique. La production de biens et de ressources indispensable à la satisfaction des besoins
de l’homme dégage la notion de rareté de la ressource et d’équilibre du système et celle de l’utilité, c’est-à-
dire du comportement des acteurs vis-à-vis de cette ressource. Les formes d’exploitation sont en général à
l’origine de l’émergence de conflit entre activités humaines et contraintes imposées par l’environnement.
406
Figure 2 : Fonctions des écosystèmes forestiers et acteurs
Relation « écologie-économie » en forêt
407
En effet, la complexité des questions forestières vient précisément de ce que la forêt présente un double
caractère, d’écosystème où les processus éco-biologiques « naturels » tiennent une grande place et,
d’espace aménagé permettant la satisfaction des besoins d’acteurs et d’usagers. Dans une démarche pros-
pective, il importe d’analyser les modes d’utilisation des écosystèmes forestiers du pays face à une régle-
mentation qui en définit les règles scientifiques et les techniques de gestion, ainsi que les règles de conduite
et du comportement humain vis-à-vis des ressources, pour concevoir des modèles de gestion selon les prin-
cipes d’une économie écologique réconciliant « conservation et développement ».
Les utilisations du bois sont multiples et peuvent être classées en plusieurs catégories : le bois source de
carbone ou bois combustible, le bois ensemble de molécules organiques par pyrolyse, distillation pour
l’industrie (goudrons, résines, écorce à tan, gomme arabique), le bois matière fibreuse pour la pâte à papier
et cartons, le bois produit massif pour la menuiserie, l’ébénisterie ... (Tableau 6)
Le Bois d’énergie : Le bois participe pour 30 % à la consommation nationale d’énergie. Il est essentielle-
ment utilisé en milieu rural (89 %) par les ménages (92 %) pour la cuisson des aliments et le chauffage. Plus
de la moitié de cette matière première proviennent de la forêt (53 %). Globalement, le bilan est négatif ; la
consommation nationale en bois de feu est de l’ordre de 10 millions m3 an alors que la possibilité de produc-
tion des forêts n’est que de 3 à 4 millions m3 an. Ce déficit est virtuel car il est comblé par des prélèvements
supplémentaires, souvent délictueux ou incontrôlés, sur la forêt.
Les essences utilisées pour le bois de feu se répartissent comme suit : 10 % d’eucalyptus, 32 % de chêne
(vert, liège et zeen), 6 % d’arganier, 4 % de cèdre, et 48 % d’essences secondaires diverses. Il faut noter
également que le déficit en bois énergie est aggravé par les médiocres rendements de la carbonisation qui
sont, dans les meilleurs des cas, proches de 18 %.
Le bois d’industrie : L’essence concernée est l’Eucalyptus qui est utilisée pour la pâte à papier et pour les
panneaux de particules. Les besoins de la seule unité industrielle « la Cellulose du Maroc » s’élèvent à envi-
ron 400.000 m3 /an alors que les ventes annuelles ne représentent que 322.000 m3, dont une partie seule-
ment est destinée à l’usine. Les surcoûts de fabrication obligent l’entreprise à payer la matière première à la
moitié de son prix sur le marché libre, ce qui n’encourage donc pas les exploitants à l’approvisionner. Il y a
donc nécessité pour elle d’importer du bois de trituration afin d’assurer une meilleure sécurité d’approvi-
sionnement ; des « concessions » lui ont été également accordées sur des terrains domaniaux mis en loca-
tion dans un cadre contractuel avec l’administration.
Le bois d’œuvre : Le cèdre est traditionnellement l’essence « noble » du Maroc ; au-delà de sa fonction
économique, le bois de cèdre remplit une véritable fonction patrimoniale, en tant qu’élément constitutif de
l’identité collective. Cet aspect des choses a aussi des conséquences économiques dans la mesure où il
intervient dans les choix par les particuliers de bois de haute qualité pour l’aménagement intérieur, au détri-
ment des essences concurrentes même si ces dernières sont parfois moins onéreuses. La productivité du
cèdre est faible de l’ordre d’un m3/ha/an. La production annuelle est estimée en moyenne à 83.500 m3 alors
que la moyenne des ventes s’élève à 101.000 m3/an. Il aurait donc un prélèvement excessif sur le capital
cèdre mettant celui-ci en danger pour l’avenir. Le pin, dont les ventes moyennes annuelles s’élèvent à
130.000 m3, provient surtout des reboisements. L’insuffisance de traitements sylvicoles valorisants ne per-
met de mettre sur le marché que des diamètres relativement faibles (30-35 cm), peu propices à une mise en
valeur industrielle. Une part importante de la production est donc orientée vers le bois énergie et la caisserie.
Le bois d’artisanat : Le thuya est considéré comme une essence précieuse au Maroc. Il fournit du bois
408
d’œuvre, du bois de service, du bois énergie, de la gomme sandaraque, du goudron et des fleurs à nectar
précieux. Il s’agit surtout d’une essence principalement concernée par l’artisanat. Depuis quelques années,
son exploitation s’est intensifiée pour répondre à une demande de produits artisanaux très forte. L’exploita-
tion des souches mortes qui fournissent la « loupe de thuya » est une pratique qui met en danger la survie de
cette essence dont la régénération est difficile et la croissance lente. Ces forêts ne sont pas aménagées ; la
planification et le contrôle de l’exploitation de la ressource sont donc complexes.
La production du bois évolue de façon irrégulière avec une certaine stabilisation durant les vingt dernières
années. Face à une demande en croissance, il faut s’attendre dans les prochaines années à des taux de cou-
verture de plus de plus faibles.
Le liège : Avec une superficie de près de 350.000 ha, la subéraie marocaine représente environ 15 % des
forêts de chêne liège au niveau mondial. Cependant, la production totale (récolte du liège) n’atteint que 5 %
environ de l’ensemble de la production mondiale. Sur l’ensemble des subéraies, seuls 188.000 hectares sont
effectivement aménagés, soit 68 % environ. Dans ces zones aménagées, le potentiel de réalisation par rap-
port aux possibilités de récolte estimé à 178.000 stères/an, n’est que 73 % en moyenne sur les douze der-
nières années (129.500 stères) (Tableau 7).
409
Tableau 7 : Production de liège au Maroc (en 1000 stères)
Produit/Année 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
Liège de
reproduction 130 118 86 90 67 32 106 116 109 98 100 91 99
Liège mâle 58 26 40 35 59 12 53 32 33 25 19 29 30
Total 188 144 126 125 126 44 159 148 142 123 119 120 129
La majorité de la production est exploitée, sous forme brute (liège mâle, liège de reproduction en planche)
et transformée (bouchons, panneaux). C’est la seule filière de produits forestiers exportatrice nette. Une
dizaine d’entreprises locales de transformation contribuent à cette filière, auxquelles sont venues s’ajouter
récemment des sociétés étrangères habilitées à participer aux adjudications. Des efforts de transformation
sur place et de formation professionnelle sont encouragés par l’administration forestière.
L’alfa : La production de l’alfa au Maroc a toujours été conditionnée par les exploitations. Elle a connu un
essor considérable de 1925 à 1975, par la création des débouchés nouveaux en Europe : les industries pape-
tières. La superficie exploitée ne concernait cependant que le tiers de la superficie totale par manque
d’infrastructure et de moyens de transport.
De 1925 à 1950, le tonnage était en moyenne de 35.000 tonnes par an. Il a été limité par le manque de
main d’œuvre locale et l’absence du réseau du transport (chemin de fer) dans les régions productives et les
plus éloignées.
Entre 1950 et 1973, la production a connu une augmentation importante dépassant parfois les 100.000
tonnes, due d’une part à l’installation de la voie ferrée, particulièrement dans la région Orientale riche en
nappes alfatières productives. Elle est due aussi à la demande accrue formulée par les industries papetières
nouvellement crées en Allemagne, au Portugal et en Italie. Mais après cette période, la production a connu
une chute progressive due à l’augmentation du prix de transport vers l’extérieur, surtout après les deux
chocs pétroliers : 1973 et 1979.
C’est à partir de 1976 que le tonnage a régressé sérieusement pour s’annuler vers 1989 par manque de
débouchés extérieurs et l’arrêt des usines nationales qui utilisaient l’alfa telles que PANALFA, usine de fabri-
cation des panneaux, SECOPRA, société de production d’aliment de bétail à base d’alfa et enfin la sucrerie
de ZAIO (SUCRAFOR) qui utilise l’alfa dans ses chaudières pour produire de l’énergie.
Actuellement, l’alfa est utilisé par la population locale pour la confection d’articles d’artisanats diversifiés,
en mélange avec le Doum (vannerie). Cet artisanat rural engendre des revenus complémentaires non négli-
geables dans ces différentes régions.
Les autres produits non ligneux : La diversité des milieux marocains permet aux espaces forestiers de
dégager une production assez variée de produits non ligneux. Ces produits ont une grande valeur écono-
mique et surtout socio-économique dans l’environnement rural avoisinant les forêts.
La production est très variable d’une année à l’autre et reste tributaire des conditions climatiques d’un côté
et du caractère artisanal de la filière de l’autre. Cette production annuelle en tonnes est estimée à : Caroube
(900) ; Glands de chêne liège (500) ; Lichen (245) ; Romarin (7) ; Miel (400) ; Champignons (770) ; Ecorce à tanin
(3000) ; Myrtes (30).
Cette filière montre une importance capitale pour le développement socio-économique et la valorisation
des produits forestiers non ligneux ; elle mérite une attention particulière d’autant plus qu’une marge impor-
tante du manque à gagner revient aux modes de commercialisation. En effet, la récolte de ces produits
constitue une importante activité pour les différents opérateurs. L’exportation se fait essentiellement à l’état
410
brut ou après une première transformation assez sommaire de ces produits, d’où une perte sur la valeur ajou-
tée.
La valeur des exportations de produits forestiers non ligneux est de l’ordre de 250 à 300 millions DH, mais,
la plupart ont une place fondamentale dans les économies locales et sont souvent un élément de la survie
des populations usagères. Une amélioration des circuits de collecte, de la commercialisation et de la trans-
formation, au bénéfice de ces populations, devrait engendrer une meilleure valorisation de ces activités.
La chasse : La chasse est un des modes les plus anciens et les plus répandus d’exploitation des res-
sources naturelles. Il répond simultanément à des besoins alimentaires et à des possibilités de revenus du
monde rural. Le premier n’est généralement pas ou peu dangereux pour la durabilité de la ressource ; par
contre, le second devient rapidement un fléau là où la pression démographique est forte.
Pratiquée longtemps sous forme de cueillette, la chasse a peu fait l’objet d’une tentative d’organisation.
Celle-ci vise à impliquer les chasseurs à la gestion directe des territoires amodiés et de leurs ressources. Les
amodiataires sont astreints de réaliser un certain nombre d’interventions cynégétiques inscrites dans des
programmes annuels élaborés en accord avec l’administration. Pour sa part, le tourisme cynégétique consti-
tue l’une des motivations d’amodiation et reste une source de revenus non négligeable.
La pêche continentale : Si elle ne concerne pas directement les forêts au sens classique du terme, elle
est un facteur d’influence sur la diversité biologique et sur la gestion des ressources naturelles pour que
l’Administration forestière en ait toujours eu la tutelle. Elle joue un rôle social important à travers les divers
modes de pêche pratiqués : pêche sportive dans les rivières, pêche dans les lacs à permis spéciaux, pêche
dans les lacs de retenue des barrages, pêche industrielle et commerciale.
Les populations halieutiques continentales ont, depuis fort longtemps, fait l’objet d’une attention parti-
culière. Les recherches et les actions de repeuplement, grâce à l’élevage, sont restées actives, avec des suc-
cès divers. Des relais sont pris actuellement par le secteur privé. Dans les rivières, des déversements de
truites, soit à l’état d’alevins, soit à l’état pêchable, sont réalisés. Les lacs naturels sont souvent enrichis avec
des black-bass, des brochets et des carpes. Les retenues de barrages font également l’objet d’amélioration
du même type.
L’aquaculture de repeuplement répond très bien, tant aux besoins locaux que pour stimuler la pêche tou-
ristique. Les truites, fario et arc-en-ciel font l’objet d’une activité particulière avec la production respective de
100.000 et 410.000 alevins annuellement. Parallèlement, l’aquaculture commerciale, dévolue au privé, pré-
sente de bons résultats. Les recettes générées en 1997 par ces deux activités s’élèvent à 1.184.846 DH,
dont 48 % pour la pêche commerciale, 40 % pour la pêche sportive et 12 % pour la commercialisation des
produits.
Les recettes du secteur de la chasse, comme celles de la pêche continentale, sont versées au fonds de la
chasse et de la pêche continentale. Ces sommes, qui sont en moyenne de l’ordre de 12 millions de DH par
an, sont réinvesties dans les travaux d’aménagement et de gestion de la ressource.
Production fourragère : Les ressources fourragères potentielles dans les écosystèmes forestiers sont
estimées à 1,5 milliards d’unités fourragères/an (UF/an) comme le montre le tableau 8 ci-après. Dans l’état
avancé de dégradation des formations forestières dont elles dépendent, leur productivité dépasse probable-
ment à peine 600 millions d’unités fourragères/an.
411
Tableau 8 : Production fourragère des principaux écosystèmes forestiers (UF)
Ces ressources représentent encore, après les chaumes et les pailles, le poste le plus élevé des disponibi-
lités fourragères nationales. La mise en culture des terrains traditionnellement réservés au parcours, la dispa-
rition presque complète de la pratique de la jachère agricole, combinées à l’augmentation des effectifs de
troupeaux, ont renforcé la dépendance de l’élevage des ressources fourragères d’origine forestière. Avec
14 % seulement de la superficie des terrains de parcours, les forêts couvrent 17 % du bilan fourrager des
troupeaux, soit 1,5 milliards d’unités fourragères par an ou l’équivalent de 3 milliards de dirhams par an.
Le poids relatif des zones pâturées en forêts est éminemment variable selon les zones écologiques ; il tend
cependant à s’homogénéiser vers le bas par suite de l’épuisement continu des capacités. Pendant les pé-
riodes de soudure et les années de sécheresse, les parcours forestiers et les branchages des essences
forestières constituent la principale source de fourrage pour l’élevage.
Les espaces boisés marocains, à l’instar des espaces boisés méditerranéens tiennent une place majeure
dans le fonctionnement des écosystèmes et la préservation de l’environnement naturel en contribuant forte-
ment à la conservation des sols, des eaux et de la diversité biologique.
412
que : Les régions montagneuses du Rif à l’Anti-Atlas, où les espaces forestiers sont massivement représen-
tés, hébergent 25 à 40 % des endémiques végétales du pays et 2/3 des plantes vasculaires marocaines pros-
pèrent en forêt.
Au niveau forestier, le Maroc abrite deux essences endémiques de renom : le sapin du Maroc (Abies
maroccana) circonscrit au massif rifain de Talassemtane et l’arganier (Argania spinosa) qui s’étend sur plus de
800.000 hectares, dans le Sud Ouest du territoire.
Pour la faune, les secteurs les plus importants en matière d’endémisme sont le littoral macaronésien et le
Sahara occidental pour les mammifères et les hautes montagnes et les plaines océaniques pour les reptiles.
On dénombre 106 espèces de mammifères, 206 espèces d’oiseaux.
413
2.5. Usages sociaux des écosystèmes forestiers et développement local
414
tibles ligneux pour les besoins domestiques, la nourriture pour le bétail et la stabilité de l’environnement et sa
protection contre l’érosion pour permettre une agriculture continue. L’utilisation de la terre se fait le plus
souvent de trois façons : agriculture, pâturage et forêt qui déterminent des pratiques traditionnelles de ces
espaces, basées sur un mode de vie donné de chaque société. Le milieu boisé se trouve ainsi intégré au
fonctionnement des sociétés rurales et ne peut être de ce fait dissocié des autres modes d’utilisation de
l’espace par la population.
En effet, le rôle que peut jouer un espace boisé dans le développement rural est exprimé essentiellement
par ses différentes fonctions, ses biens et services qui présentent beaucoup d’intérêt pour les populations
environnantes. Reconnaître les nombreux rôles des espaces boisés et admettre la notion d’utilisation multi-
ple ne signifie pas qu’il doit y avoir un partage égal des milieux boisés entre les utilisations possibles dans
une même parcelle.
Il ne peut y avoir donc une production maximale pour chaque type de bien ou service dans un même
milieu, mais plutôt la combinaison de l’ensemble des dits biens et services peut présenter un bénéfice total
beaucoup plus important que celui qui découlerait d’une seule utilisation spécifique. C’est dire par là que
chaque espace boisé assure en même temps plusieurs utilisations et fonctions avec parfois individualisation
d’un objectif primordial. Ainsi, la foresterie contribue au développement rural de plusieurs façons selon la
manière de regrouper et de répartir les différents biens et services auxquels elle donnera lieu.
Les profits tirés des espaces boisés peuvent être, soit doubles, d’une part le bois ou les produits ligneux et
d’autre part les divers aspects physiques et sociaux connus le plus souvent sous le nom d’influences de la
forêt dépassant souvent l’importance représentée par le premier, soit triples, en permettant le maintien de
l’équilibre écologique, l’accroissement de l’offre des produits destinés à la consommation locale et l’accrois-
sement des profits tirés de l’utilisation industrielle du bois.
415
Il est certain que le mode d’exploitation ne permet pas de répondre aux besoins locaux des populations
rurales. Localement, dégager un surplus de production agricole passe par l’extension des superficies embla-
vées plutôt que par l’intensification des modes et techniques de production. L’indicateur déterminant de
cette pratique est celui des délits de labour en domaine forestier. Ces délits sont peu nombreux relativement
aux autres délits de coupe de bois et de parcours. De façon générale, les délits de défrichement et de labour
en domaine forestier représentent 3 % des délits annuels, soit environ 350 délits de défrichement et de
labour en domaine forestier par an.
En effet, la dégradation de la forêt, support de l’économie rurale dont l’essentiel est basé sur l’élevage,
pourrait pousser les gens à muter leurs activités en développant l’agriculture. À ce moment là, une course à
la recherche de terrains de culture démarrerait et donc la pratique délictueuse connaîtrait certainement un
élan si le péri-forestier ne bénéficie pas de programmes de développement. Cette problématique est consta-
tée essentiellement en zones de montagne, où l’espace est exigu.
416
de 6.426.000 HJ/an. Si on se réfère au SMIG, ou encore on se limite au prix payé sur place (55 Dh/HJ), le
revenu annuel moyen est de l’ordre de 353,4 Millions de Dh/an.
Avant 1976, l’État attribuait aux communes rurales une ristourne sur les produits de la forêt : (5 % pour le
liège et autres produits, 10 % pour le bois, l’écorce et l’alfa et 20 % pour l’arganeraie). Cette ristourne repré-
sente pour 85 % des communes un montant annuel inférieur à 20.000,00 Dh. Le tableau qui suit permet de
mettre en évidence le grand changement survenu à ce niveau et le rôle moteur de la forêt dans le développe-
ment local.
Mais, depuis la loi d’octobre 1976, les communes rurales connaissent un essor de développement grâce
au patrimoine forestier ; elles perçoivent l’intégralité du montant des ventes par adjudication des produits
forestiers issus de leur territoire, de l’ordre de 250 millions de Dh/an, ce qui permet d’alimenter le budget de
la commune en recettes importantes pour réaliser divers projets locaux.
Par ailleurs, le développement rapide des centres urbains nécessite davantage d’espaces récréatifs pour
accueillir un public de plus en plus nombreux. Le niveau de 2,5 m2 par habitant est rarement atteint dans les
grandes agglomérations alors qu’une moyenne de 10 m2/habitant est jugée nécessaire. En dehors des
centres urbains, c’est le loisir non-organisé qui prédomine vu le manque d’infrastructures d’accueil. Le dépla-
417
cement en forêt devient de plus en plus fréquent et met en évidence la nécessité d’intervention dans ce
domaine.
418
Figure 3 : Utilisation des espaces boisés : valeur économique des forêts
Une étude menée dans le cadre du projet régional Euro-méditerranéen MEDFOREX, a conclu que la valeur
économique totale des écosystèmes forestiers marocains est formée par des usages aussi divers que la
récolte du bois de feu (30 %), le pâturage des animaux (23 %) et la protection du cycle de l’eau (18 %). Cette
valeur est, en revanche, négativement influencée par l’érosion (i 11 %) et la déforestation (i 7 %). Le
tableau 9 présente une tentative d’évaluation des biens et services des écosystèmes forestiers marocains.
419
Tableau 9 : Valeur moyenne annuelle des biens et services (millions de dh)
4. Valeur de patrimoine et de legs (valeur intrinsèque des forêts sans référence à leur utilisation) NE
Total partiel 5.447
La spécificité des écosystèmes forestiers dégage deux difficultés majeures pour approcher la valeur
économique totale des productions forestières marocaines : insuffisance des données fiables sur certains
produits et services et choix des techniques et des indicateurs d’évaluation pertinents et appropriés au
contexte socio-économique marocain.
Il n’en reste pas moins vrai que le déficit de connaissances et la sous-estimation des écosystèmes fores-
tiers et de leurs ressources a des conséquences directes, en particulier :
– la pénalisation des ressources forestières dans la stratégie d’affectation des terres par rapport aux
autres formes d’utilisation du territoire, au niveau local, régional et national ;
– l’insuffisance des allocations de ressources financières au secteur forestier de rendement différé, au
profit de besoins plus pressants et à rentabilité immédiate ;
– le transfert de valeur ajoutée importante, non compensée, des forêts aux autres secteurs de l’économie,
qui se traduit par un désinvestissement et une dégradation inquiétante ;
– une faible incitation à l’investissement privé dans le secteur forestier.
420
3. Conservation et developpement : 50 années d’efforts en faveur
des écosystèmes forestiers
La forêt marocaine relève du domaine privé de l’état dans presque sa totalité. La forêt privée est représen-
tée par quelques lambeaux de peuplements de surface réduite laissés aux riverains lors des délimitations
des massifs boisés, sinon, par des boisements artificiels réalisés dans le cadre de contrats du Fonds National
Forestier (FNF). La gestion de la forêt est régie par un ensemble de 24 textes législatifs et réglementaires
ordonnés autour d’une loi principale : le Dahir du 10 octobre 1917 sur la conservation et l’exploitation des
forêts qui consacre la domanialité et l’inaliénabilité du domaine forestier.
Les autres lois ont pour objet de compléter ou de modifier les institutions qu’elles créent (Dahir de 1949
créant un fonds forestier, Dahir de 1976 organisant la participation des populations au développement de
l’économie forestière); ou de prévoir des régimes juridiques particuliers pour les parcs nationaux (Dahir de
1925), l’alfa (Dahir de 1928 et de 1930) ou le noyer (Dahir de 1928). Quant aux décrets intervenus, ce sont le
plus souvent des règlements d’application dont la portée est limitée à la mise en œuvre des Dahirs pré-
cédents.
Les mesures d’incitation prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur ; concernent (i) la
promotion des reboisements par l’intensification de la production ligneuse et l’atténuation du déficit national
en bois et (ii) la conservation des sols dans le double objectif du maintien de la productivité des terres en
421
amont et la protection des infrastructures en aval. Les incitations prévues au titre de la défense et la restaura-
tion des sols ont été incorporées dans le Code des Investissements Agricoles de 1969 en cours de révision.
La principale innovation en matière législative a été la promulgation du Dahir portant loi du 20/09/1976 rela-
tif à l’organisation de la participation des populations au développement de l’économie forestière ayant coïn-
cidé avec la promulgation de la Charte Communale du 30/09/1976, qui a consacré l’institutionnalisation des
bases de la décentralisation. Le Dahir du 20/09/1976 a fait des collectivités locales un partenaire privilégié et
lancé les bases pour la coordination et le renforcement de l’action de l’État et des usagers dans le développe-
ment du patrimoine forestier de l’État, sa conservation et son extension. Il a, aussi, institutionnalisé
l’approche participative à travers des organes consultatifs (Conseil National des Forêts, (CNF) conseils provin-
ciaux des forêts), l’octroi de pouvoirs de délibération aux conseils communaux en matière forestière et le ver-
sement au budget de la commune concernée des ressources provenant du domaine forestier.
Le texte du Dahir de 1917 n’est pas resté figé dans sa version originelle, mais un bon nombre de ses dis-
positions ont été révisées entre 1918 et 1962. La législation forestière marocaine n’est donc pas, d’un point
de vue chronologique, aussi ancienne qu’elle paraît à première vue.
La loi forestière a été élaborée dans un souci de conservation et de développement des ressources fores-
tières nationales, en tenant compte des structures et fonctionnement des écosystèmes et des besoins des
populations. Ainsi, la fonction de développement domine dans cette loi (mise en valeur des ressources fores-
tières, délimitation du domaine forestier, reboisement, défense et restauration des sols, exploitation, législa-
tions spéciales, parcours, etc.) Mais cette fonction est complétée par une fonction de contrôle qui asseoit
l’exercice du pouvoir de l’État sur le patrimoine forestier. C’est cette complémentarité entre les deux fonc-
tions de développement et de contrôle qui a permis la sauvegarde de beaucoup de forêts nationales jusqu’à
présent, et notamment les cédraies et les subéraies.
Les évolutions et les orientations socio-économiques du pays, les changements intervenus au cours des
dernières décennies relatifs aux processus de développement durable ont conduit à l’actualisation progres-
sive de la législation forestière. De nouvelles lois visant l’établissement de nouvelles règles d’utilisation des
ressources forestières dans une perspective de gestion durable d’élaboration (projet de code forestier, projet
de loi sur les aires protégées, projet de loi sur la chasse).
La délimitation du domaine forestier est l’ensemble des opérations qui permettent d’en fixer les limites
d’une manière irrévocable. Elle constitue de ce fait un préalable à toute action de conservation et de déve-
loppement du patrimoine forestier. De ce fait, elle constituait la priorité de la politique forestière dès la pro-
mulgation des textes régissant cette opération. Depuis 1956, un effort considérable a été consenti d’une
manière soutenue ; ainsi, 4.506.800 ha ont été touchés par les travaux de délimitation, dont 463.800 ha ont
été homologués, 2.505.200 ha en phase de dépôt et 849.700 ha en phase de délimitation définitive.
Il en résulte que, sur les neuf millions d’hectares inventoriés comme faisant partie du domaine forestier,
3,7 millions d’hectares sont homologués, 4 millions d’hectares sont délimités et non encore homologués et
1,3 millions d’hectares non encore touchés par la délimitation administrative.
Cependant, la conservation et le développement des espaces forestiers restent tributaires, entre autres,
de la sécurisation du domaine forestier qui doit permettre de fixer de manière irrévocable les limites aussi
bien du domaine forestier que celles des terrains qui lui sont contigus, d’apurer les litiges entre l’État et les
particuliers, et de sécuriser l’investissement d’une manière générale. À cet effet, le Haut Commissariat aux
Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification (HCEFLCD) vient d’élaborer une stratégie et un pro-
422
gramme d’action tendant, à achever la délimitation du domaine forestier au cours de cette décennie et à
immatriculer l’ensemble de terrains relevant du domaine forestier à l’horizon 2015. Le tableau 10 présente
les superficies mobilisées pour les projets de développement économiques et sociaux.
Le domaine forestier, outre les fonctions environnementales et écologiques qu’il assure, est mis à contri-
bution pour la réalisation de grands projets d’investissement, participant ainsi au développement socio-
économique du pays. Depuis l’indépendance, une superficie d’environ 70.000 ha du domaine forestier a été
mobilisée pour des projets concernant des domaines d’activités divers.
Pour une meilleure connaissance et une planification efficace de la gestion des ressources forestières à
l’échelle d’un pays, l’Inventaire Forestier National (IFN) constitue l’outil de base à l’élaboration des pro-
grammes de gestion durable des écosystèmes forestiers. Le premier (IFN) réalisé au Maroc (1990-1996),
fournit, par entité administrative et région économique, une cartographie forestière et des statistiques de
base qui caractérisent les ressources disponibles du point de vue surfaces et volumes de bois sur pied sui-
vant les principales essences forestières.
Les travaux réalisés à ce jour par l’IFN ont touché une surface totale de 44.125.000 ha et s’étendent sur les
régions situées au Nord et à partir du 29e parallèle (au-dessus de la province de Guelmim). Une dernière
tranche de cartographie forestière, à partir d’images satellitaires, est en cours de réalisation sur une surface
totale de 26.960.000 ha couvrant toutes les provinces sahariennes en vue de compléter les résultats au
niveau national.
L’IFN doit être un outil de planification permanent, continu et révisé tous les dix ans. À cette fin, les pre-
miers travaux du deuxième cycle de l’IFN sont lancés dans la région du Rif (Tanger, Tétouan et Larache) sur
une surface de 743.300 ha. Au cours de 2003 et de l’exercice 2004, il est programmé de poursuivre les tra-
vaux de cartographie sur une surface totale de 574.300 ha couvrant la province de chefchaouen (243.300 ha)
et celle d’Ifrane (331.000 ha) ; deux provinces pilotes pour le développement intégré des zones forestières et
péri-forestières Ultérieurement, les travaux seront réalisés de proche en proche par circonscription forestière
(DREF) de manière à couvrir l’ensemble du territoire national à la fin de la période.
423
dans les régions de Tanger, Tétouan, Taza, Hoceima, Taounate, Gharb, Chrarda, Beni Hssen, Fès Boul-
mane, Meknès, Tafilalt, Rabat, Salé, Zemour, Zaër, Chaouia, Ouardigha, Tadla, Azilal, Casablanca, Dou-
kala, Abda, Marrakech, Tensift, Alhaouz, Sous-Massa-Draa ;
(ii) la structuration de la base des données des 68 cartes forestières dans un système d’information géo-
graphique (SIG PAMAP) ;
(iii) l’exécution d’une couverture aérienne panchromatique noir et blanc à l’échelle du 1/20.000ème pour la
révision des cartes forestières dans la région de Tanger-Tétouan sur une surface de 500.000 ha cou-
vrant les feuilles des cartes au 1/100.000 de : Tanger, Tétouan, Larache et Ksar el Kébir.
424
Tableau 11 : Évolution des infrastructures et de l’encadrement des forêts
À cet effet, un effort important a été consenti, durant la période 1991-2004, dont les orientations politico-
économiques favorisent l’adoption de nouvelles formes d’organisation en harmonie avec une vision globale
du développement humain. Cet effort s’est traduit par la construction de 370 maisons forestières, l’équipe-
ment des unités forestières par les moyens modernes de communications (477 postes fixes, 176 mobiles et
927 portatifs et 94 relais) et la réhabilitation chaque année de 200 maisons forestières.
Le réseau de pistes forestières s’étend sur près de 17.200 km. À la veille de l’indépendance, il était d’envi-
ron 9.000 Km pour atteindre en 1980 11.460 Km et 13.500 Km pendant la période 1981-1990. Les grandes
réalisations dans ce secteur ont été faites pendant la période 1991-2003 avec l’ouverture de 4.620 Km de
pistes. Si le taux actuel en matière de pistes est de l’ordre de 3 mètres linéaires par hectare de forêts, il n’en
reste pas moins que le réseau est très éloigné des normes de gestion optimale avec 10 mètres linéaires/ha.
L’objectif visé dans la prochaine décennie, est de 5 mètres linéaires/ha soit une longueur totale du réseau de
29.000 km.
425
3.4.2. Défense contre l’incendie
La fragilité face au feu est une caractéristique fondamentale des écosystèmes forestiers méditerranéens
qui enregistrent chaque année prés de 50.000 feux détruisant entre 700.000 ha à un million d’hectares ; le
Maroc reste l’un des pays les moins touchés. Les dégradations occasionnées par les incendies sont extrê-
mement variables dans le temps et dans l’espace en fonction du rythme des sécheresses, de la conduite des
populations et du pouvoir de résilience des espèces forestières.
De façon générale, le feu menace de plus en plus les forêts marocaines même si la superficie forestière
brûlée annuellement, reste relativement faible par rapport aux pays nord-méditerranéens. Au cours de la pé-
riode 1960-1969, la superficie moyenne parcourue par le feu n’était que de 1.883 ha/an ; elle est passée à
2.960 ha/an entre 1970 et 1979, ce qui correspond à une augmentation de 57 %. Durant la période 1980-
1990, la superficie brûlée moyenne était de 3.138 ha/an soit une augmentation de 6 % par rapport à la pé-
riode 1970-1979. Ces dernières années, elle atteint 4.503 ha, soit une augmentation de 43 % par rapport à la
période 1980-1990 et 140 % par rapport à 1960-1969. Ainsi, la moyenne annuelle des surfaces incendiées
est de l’ordre de 2.700 ha pour toute la période allant de 1960 à 1995 (PDPLCT 2001).
La gravité des incendies de forêts varie selon les régions. Elle est directement liée au type de végétation et
notamment du sous-bois. La région Nord-Ouest est la plus touchée. Elle perd environ 1.185 ha/an, soit 43 %
de la superficie globale incendiée au niveau national. La région orientale vient en deuxième position avec
500 ha (soit 18 % du total général).
Les efforts déployés pour lutter contre ce sinistre, ont permis de mettre en place les équipements de pré-
vention, d’alerte et de lutte ci-après : 14.250 Km de pistes forestières, 1.704 Km de tranchées pare-feu, 118
postes vigie et plus de 1.000 radios émetteurs-récepteurs. Ces équipements demeurent insuffisants en
comparaison avec les normes de gestion rationnelle. Les besoins supplémentaires sont évalués à 800 radios,
100 postes vigie, 3.800 Km de tranchées pare-feu et 5.300 de pistes.
En matière de lutte, les partenaires impliqués, notamment la Protection Civile et les collectivités ne dis-
posent pas de moyens nécessaires adaptés au feu de forêt. En outre, les difficultés liées au relief et l’insuffi-
sance des voies d’accès (surtout dans le Nord) imposent le recours à des moyens de déplacement et de
luttes aériens dont on ne dispose pas actuellement.
Un plan directeur de prévention contre les incendies vient d’être élaboré en 2001 avec la collaboration du
Gouvernement Autonome de la Province d’Andalousie, en Espagne. Ce projet devrait analyser et évaluer les
besoins en équipements de base, orienter les choix avec les partenaires potentiels de lutte, et établir des
priorités d’action par massif pour les 20 prochaines années.
426
Une première campagne de lutte démarra en 1980 sur une superficie de près de 31.000 ha contre la proces-
sionnaire du pin et 8.000 ha contre Lymantria dispar. Entre la période de 1980 et 1985. Les services provin-
ciaux des eaux et forêts étaient chargés de définir les zones à traiter et la date du lancement des opérations
de traitement phytosanitaire contre les défoliateurs. Depuis 1985, les traitements phytosanitaires ont été
confiés à la Direction des Eaux et Forêts et la Direction de la Protection des Végétaux, des Contrôles Tech-
niques et de la Répression des Fraudes (DPCTRF).
Les traitements phytosanitaires s’effectuent par des épandages aériens à base de produits biologiques
(Bacillus thuringiensis) et chimiques qui sont des insecticides inhibiteurs de la croissance (Diflubenzuron).
Ces produits répondent aux normes internationales (innocuité pour l’environnement). Les principaux insectes
défoliateurs qui font l’objet d’intervention par le biais des traitements aériens sont :
– la processionnaire des pins (Thaumetopoea pityocampa) qui attaque les peuplements de cèdre et de
pins ;
– le bombyx disparate (Lymantria dispar) qui attaque les peuplements de chêne-liège et occasionnelle-
ment le chêne-vert ;
– les catocalas qui attaquent les peuplements de chêne-vert.
Au cours de la période de 1980 à 1990, le cumul des superficies traitées était de 198.951 ha (116.671 ha
de cèdre, 60.090 ha de pin, 19.660 ha de chêne-liège et 2530 ha de chêne vert) situés principalement dans le
Moyen-Atlas (cèdre et pin), le Nord-Ouest (pin et chêne-liège), le Nord-Est (pin, cèdre) et le Rif (chêne-liège,
pin). Par ailleurs, pour la période de 1991 à 2003, ces superficies ont presque doublé enregistrant 383.481 ha
(133.781 ha de cèdre, 234661 ha de pin, 9.905 ha de chêne-liège et 5134 ha de chêne vert). Cette aug-
mentation a été due principalement aux attaques importantes des pinèdes par la processionnaire du pin (voir
annexe...).
Le premier bilan de santé des forêts à l’échelle nationale a été établi en 2000 et documente l’ensemble
des dysfonctionnements phytosanitaires. En effet, durant ces quatre dernières années (2000-2003), une
superficie totale de 25.884 ha a subi des dépérissements importants (voir tableau 11). Les plus grandes
superficies forestières touchées par les dépérissements ont été enregistrés dans le Moyen-Atlas (8284 ha de
chêne-vert et cèdre), et le Haut-Atlas (7673 ha de genévrier rouge, pins et 5155 ha de chêne-vert, cèdre,
reboisements...).
427
DREF du Rif 127 - - - 127 Eucalyptus, Pins
Total 2687 6456 1442 15299
Total général 25884
Les problèmes sanitaires qui ont touché les peuplements forestiers et qui continuent toujours de l’être
comme ceux des peupliers en 1978, le Phoracantha des eucalyptus en 1980, le chêne-liège (Maâmora) en
1983, le thuya en 1993 et dernièrement les dépérissements à causes multiples des cédraies du Moyen-Atlas
et autres problèmes, ont fait émerger chez les gestionnaires une prise de conscience de la nécessité d’un
suivi régulier de la santé des forêts.
C’est dans ce contexte que le Département des Eaux et Forêts, au cours de la réorganisation de 1999, a
jugé utile de créer un Service de la Protection des Forêts qui s’occupe de tous les types de dys-
fonctionnements touchant la vitalité et l’équilibre écologique des écosystèmes forestiers (dépérissements
du cèdre, du chêne-liège, du thuya, du sapin, des pins...). Le domaine de compétence de cette unité devra
être élargi à : (i) la surveillance de la qualité phytosanitaire des plants des pépinières forestières (reboise-
ment) ; (ii) la réglementation sanitaire concernant les importations et les exportations de bois ; (iii) la régle-
mentation des procédés d’homologation des produits phytosanitaires destinés à être utilisés en milieu
forestier ; (iv) suivi des dossiers relatifs à l’impact des changements globaux tels que l’effet de serre et la pol-
lution atmosphérique.
Le volet de la santé des forêts est devenu actuellement à l’échelle internationale (l’Europe et le Canada
notamment) l’une des composantes essentielles de la gestion durable des écosystèmes forestiers. En
effet,les questions de fond qui se posent sont : est-ce que la forêt marocaine se porte-t-elle bien ? Est-t-elle
suffisamment surveillée dans son évolution phytosanitaire spatio-temporelle ? Comment assurer la santé et
le bon fonctionnement des écosystèmes forestiers ?
428
développement, de conservation ou de restauration des forêts dans le cadre d’un développement local des
populations usagères.
Sur ces nouvelles bases un vaste programme d’aménagement forestier, privilégiant la gestion multi-
fonctionnelle, l’implication des populations usagères et intégrant la dimension socio-environnementale a été
lancé au début des années 1990. Les surfaces aménagées, qui ne dépassaient guère 9 % de la surface totale
des forêts, ont atteint durant la période 1990-2004 2.045.000 ha soit environ 50 % des forêts naturelles. Ces
aménagements ont concerné principalement les forêts de cèdre, de chêne-liège, de chêne vert, de thuya,
d’arganier et de pins. Parallèlement, environ 350.000 ha de forêts artificielles ont été aménagés et
100.000 ha de forêt ont connu des actions sylvicoles permettant d’améliorer le cadre général de la production
forestière des différents peuplements.
Dans le cadre de ces aménagements un programme de régénération et de reconstitution a démarré dès
les années 90, pour atteindre une surface régénérée de l’ordre de 41.000 ha. La priorité a été donnée au
cèdre (73.000 ha), au chêne-liège (9.000 ha), les pins (5.000 ha), l’arganier et le thuya (1.700 ha) et le cyprès
(300 ha).
Dans le cadre des nouvelles orientations relatives au développement intégré des zones forestières et péri-
forestières, les tendances s’orientent vers des plans d’aménagement de massifs forestiers concertés avec
les usagers et l’ensemble des acteurs. Dans ce sens des expériences pilotes sont lancées dans les massifs
forestiers de Chefchaouen (Tanghaya-Kourt et Bab Berred), d’Ifrane et Khénifra. De même, la tendance à
l’informatisation de la gestion des massifs forestiers se confirme à travers des actions pilotes entreprises
dans les forêts de cèdre, de chêne liège et d’arganier.
L’aménagement de l’ensemble des forêts devrait constituer un programme prioritaire pour les 20 pro-
chaines années, encore, faut-il pouvoir en assurer le financement.
429
– Réalisation d’actions d’amélioration pastorale (plantation d’arbustes fourragers, ensemencement, clô-
ture et mise en défens rotative, points d’eau...) sur 70.000 ha ;
– Organisation des usagers en coopératives sylvo-pastorales : constitution d’une dizaine de coopératives
sylvo-pastorales à Bouhsoussen (Khénifra), ait M’Hamed (Azilal) et Béni Zemmour (Khouribga) ;
– Instauration du principe de la compensation des mises en défens forestières.
S’agissant du bilan qualitatif, il faut remarquer que malgré les réussites techniques incontestables, les
contraintes liées au contexte socio-économique ont constitué autant d’entraves à la gestion rationnelle de
ces réalisations et conduit l’administration soit à leur abandon, soit à un gel des projets d’investissement en
attendant une hypothétique organisation des éleveurs.
En outre, un manque de coordination entre les Administrations forestière et de l’élevage n’a pas permis
une utilisation rationnelle des parcours améliorés et la cohérence des interventions de l’état.
Il n’en reste pas moins que des efforts sont déployés, au cours de ces dernières années, pour pallier ces
difficultés et ont abouti à l’organisation des usagers en coopératives pastorales et sylvo-pastorales : constitu-
tion d’une dizaine de coopératives a Bouhoussen (Khénifra), Ait Mhamed (Azilal) et Beni Zemmour (Khou-
ribga) et à l’instauration du principe de compensation des mises en défens forestiers au profit d’usagers
organisés (Arrêté no 1855.01 du 21 mars 2002).
L’organisation des usagers en coopératives sylvo-pastorales, comme le principe de compensation des
mises en défens forestières, démarrent à peine pour que leurs résultats et leurs impacts puissent être éva-
lués.
430
écosystèmes naturels et de protection environnementale nécessitent un mécanisme de financement appro-
prié. À cet effet, le Fonds National Forestier (FNF) mécanisme extra-budgétaire flexible et continu reçoit en
1949 la forme qui devait permettre l’essor du reboisement au Maroc.
Dès les années 50 le rythme annuel de reboisements atteint 5.000 ha, puis passe à 10.000 ha en 1967 et
25.000 ha en 1969. Cette période d’orientation a été marquée par trois types d’opérations répondant à des
objectifs précis : « l’opération eucalyptus » lancée dans le zone Gharb Mâmora pour assurer l’approvisionne-
ment de l’usine de pâte à papier crée à Sidi Yahya du Gharb en 1956 ; l’opération « résineux », en vue
d’accroître les ressources en bois de conifères dans les zones de montagnes plus favorable et l’opération
« défense et restauration des sols » (DRS) qui conduit à la création de 21 périmètre de DRS forestière à tra-
vers le Royaume d’une superficie de 40.000 ha.
Depuis 1970, les reboisements ont été intégrés dans un programme économique et social « Plan national
de reboisement (PNR) ». L’objectif principal est de contribuer à la satisfaction des besoins du pays en
matière de production de bois, de protection des terres agricoles et des barrages et en matière de recréation,
par le reboisement de 660.000 ha, à l’horizon 2000 selon un rythme annuel de 22 000 ha, et des niveaux de
production de 4 m3/ha/an pour les conifères et 6 m3/ha/an pour les eucalyptus.
Cependant, l’objectif de production ou de protection escompté, comme le rythme annuel des reboise-
ments n’ont pas été pleinement atteints durant cette période. Au plan opérationnel l’application de PNR a dû
faire face à quatre types de contraintes :
(i) la limitation des moyens budgétaires face aux coûts de réalisation croissants, en l’absence du soutien
réel de la part des collectivités bénéficiaires des revenus de la forêt ;
(ii) la concentration dans le temps d’aléas climatiques pénalisants ;
(iii) la réticence accrue des populations et des usagers devant les projets de reboisement et les obstacles
rencontrés par les techniciens forestiers mal préparés à ce type de contexte ;
(iv) le faible engagement du secteur privé dans les actions de reboisement.
Pour assurer la continuité des efforts de reboisement, dans les perspectives de la politique de développe-
ment rural, dont les gestions durables des ressources naturelles constitue la trame de fond, il était néces-
saire d’anticiper l’avenir. De ce point de vue, le Plan Directeur de Reboisement (PDR) élaboré en 1996 dans
une perspective de 30 années, se doit d’assurer la continuité de cet effort dans le cadre d’une nouvelle dyna-
mique basée sur des approches nouvelles et mobilisatrices visant l’implication des populations, des com-
munes rurales, des collectivités, du secteur privé et de la société civile, mais aussi des autres départements
ministériels concernés.
Le PDR définit un programme de reboisement de 1,5 millions d’ha à l’horizon 2030 et identifie un pro-
gramme prioritaire de 10 ans de 500.000 ha avec un rythme annuel de 50.000 ha. Ce programme recouvre,
dans l’ensemble des provinces, les espaces où le reboisement et la reconstitution des écosystèmes naturels
sont plus urgents et plus faciles à réaliser en fonction des contraintes sociales, économiques et financières.
L’encadré 4 donne le bilan des 50 dernières années de reboisement au Maroc
431
La production des plants forestiers a évolué depuis les années 50 en rapport avec la progression des pro-
grammes de reboisement pour atteindre, dans la décennie 1990-2000, prés de 60 millions de plants produits
dans 87 pépinières au niveau national. Les plants sont généralement des semis ou des boutures ; élevés,
directement en sachets de polyéthylène ou en motte de terre pressée de manière rustique dans des pépi-
nières peu évoluées.
La mise en place d’une politique ambitieuse et orientée, dès les années 80 de production des plants a per-
mis de repenser entièrement le système de production et de proposer des solutions innovantes. C’est le tra-
vail conduit, depuis prés de deux décennies, par le Centre d’Amélioration des Plants Forestiers de Sidi Amira.
Le bilan des réalisations durant cette période concerne l’amélioration de la filière semences forestières et
l’amélioration de la qualité des plants.
432
L’amélioration de la filière « semences » concerne :
(i) Délimitation des régions de provenance : le territoire national a été découpé en 19 régions de prove-
nance, écologiquement homogènes, valables pour toutes les espèces forestières, permettant de ratio-
naliser et de contrôler le flux des matériels forestiers de reproduction, et d’éviter éventuellement les
problèmes d’inadaptation. La publication de 1997, intitulée « les ressources génétiques forestières au
Maroc », en donne un descriptif.
(ii) Sélection des peuplements à graines : la sélection des peuplements porte-graines, comportant des
individus à phénotypes remarquables, permet de déboucher sur un gain génétique immédiatement
mobilisable et rapidement applicable aux programmes de reboisements. Pour ce faire, 104 peuple-
ments à graines d’espèces autochtones (Cèdre, Pins maritimes, Pin d’Alep, Cyprès de l’Atlas, thuya,
Chêne-liège), couvrant une superficie globale de 13.828 ha, ont été sélectionnés et classés.
(iii) Mobilisation des semences : La sélection d’individus remarquables « arbres plus » dans ces peuple-
ments a permis l’installation de « vergers à graines » pour la production de semences améliorées. Ces
graines sont récoltées, conditionnées et mises a disposition des services forestiers en fonctions des
besoins du programme de reboisement.
(iv) élaboration et mise en œuvre d’une réglementation sur la circulation des matériels forestiers de
reproduction pour un meilleur contrôle du flux des semences au niveau national.
433
législatif spécifique a été promulgué (Dahir du 21 mars 1951) comme base juridique d’intervention en
matière de défense et restauration des sols, notamment dans les terrains collectifs.
Ce texte réadapté dans le Dahir du 25 juillet 1969 et incorporé dans le Code des Investissements Agri-
coles, définit le cadre légal de l’intervention de l’administration forestière et précise sa mission autour des
axes suivants : (i) protection des sols contre l’érosion ; (ii) conservation des eaux et amélioration de la produc-
tivité des terres en pente ; protection des infrastructures socio-économiques et (iii) développement local et
amélioration des revenus des agriculteurs.
Diverses approches d’interventions se sont succédées, depuis les plus organisées aux actions unilatérales,
comme le projet DERRO (Développement Économique et Rural du Rif Occidental) jusqu’aux interventions
localisées de reboisements, de corrections de ravines, de plantations fruitières, etc. Progressivement, grâce
à la prise de conscience de l’ampleur des dommages dus à l’érosion, avec en parallèle, une politique dyna-
mique de construction de barrages, des actions se sont organisées au sein d’aménagements globaux au
niveau des bassins versants.
Deux modalités d’intervention ont été prévues par ces dispositions légales :
– Les périmètres de DRS d’intérêt National (PIN) dans le cas où l’érosion présente une menace pour les
collectivités. L’intervention peut alors être déclarée obligatoire et les coûts des infrastructures anti-
érosives supportés par l’État ; des indemnités sont allouées aux propriétaires
– Les contrats de DRS ; l’Administration réalise les travaux qui sont subventionnés, mais le rembourse-
ment de la dette, à la charge des propriétaires, est recouvrée par prélèvements de 50 % sur le produit
des récoltes successives provenant des terrains traités.
Des prêts ont aussi été prévus pour la compensation des mises en défens éventuellement engendrées par
les traitements de lutte contre l’érosion.
Pendant la période 1980-1996, les plantations fruitières à objectif de protection, notamment en zones de
montagnes, ont connu un élan particulier à travers la distribution de près de 15 millions d’arbres fruitiers dont
8 millions d’oliviers, 5,4 millions d’amandiers, 514.700 noyers, 442.300 pommiers, 348.200 figuiers, 158.500
pruniers et 15.000 vignes.
Le bilan des actions de DRS réalisées est mitigé malgré la réussite technique incontestable d’un grand
nombre de périmètres. Les principales lacunes relevées peuvent être résumées comme suit :
– Un contexte socio-économique défavorable ;
– Une approche de planification impérative qui aboutit à la banalisation des choix techniques ;
– Un manque de cohérence au niveau des interventions des différents services de l’État ;
– L’incidence des politiques agricoles sur la valeur relative des terres en montagne ne favorisant pas
l’adoption des pratiques de conservation.
Au début des années 80, l’approche par bassin versant fut adoptée en vue d’appréhender simultanément
les deux objectifs de conservation de la productivité des sols à l’amont et de protection des infrastructures
hydro-agricoles à l’aval. À cet effet, l’Administration a mis en place des projets permettant de définir la
méthodologie d’élaboration de ces schémas directeurs ainsi que la formation des équipes d’ingénieurs et de
techniciens à l’échelon régional pour la mise en œuvre et le suivi de leur réalisation. Dans ce cadre, plusieurs
bassins versants, couvrant une superficie de 3,3 millions d’ha, ont fait l’objet de schéma directeurs d’amé-
nagements anti-érosifs dans les principales régions du pays ; leur exécution dépend cependant de l’intérêt
que leur accorderont les bailleurs de fonds internationaux et ce, en l’absence d’un plan de financement volon-
tariste des pouvoirs publics.
434
La superficie globale traitée en matière de conservation des sols et de lutte contre l’érosion hydrique
durant les cinquante dernières années est près de 520.850 ha dont 100.000 ha dans le cadre de 1.600
conventions, elle comprend :
– Reboisement de protection 121 520 ha
– Plantations fruitières 261 440 ha
– Améliorations pastorales et sylvo-pastorales 79 450 ha
– Traitement mécanique et biologique du réseau hydrographique 58 440 ha + 79 440 m3
La stratégie d’intervention a trouvé rapidement ses limites face à la complexité des problèmes et des sys-
tèmes de production de la petite et moyenne exploitation, dominante dans les communautés de montagne.
Tenir compte, des besoins pratiques et des opinions de ces communautés, devient un impératif. La faisabi-
lité, mais surtout la pérennité des actions entreprises en dépendent.
L’importance accordée par le Maroc à la mobilisation des ressources en eau est reflétée par l’ambitieux
programme en matière de construction de barrages. Il existe à ce jour, 103 barrages (dont 8 en cours de
construction) d’une capacité totale d’environ 16 milliards de m3. Les eaux superficielles régularisées par ces
ouvrages permettent de fournir 1,12 milliard de m3 d’eau potable, de produire 2.400 GWH et de porter la
superficie irriguée à plus d’un million d’hectares. Les bassins versants en amont des barrages existants, ou
prévus dans le futur proche, couvent une superficie totale de plus de 20 millions d’ha dont plus de 50 % pré-
sentent des risques importants d’érosion et nécessitent des aménagements.
La conséquence la plus néfaste des phénomènes d’érosion réside dans le transport vers l’aval d’alluvions
qui, en s’accumulant dans les retenues des barrages, réduisent leur capacité de régularisation. Ainsi, la capa-
cité des barrages perdue chaque année par envasement est estimée à 75 millions de m3, soit 0,4 % par an.
L’érosion des sols constitue par ailleurs un grave problème écologique au niveau des zones amont et se tra-
duit par des pertes économiques considérables.
Devant l’ampleur des problèmes d’érosion hydrique, l’État a pris, depuis plus d’un demi siècle, des disposi-
tions juridiques, administratives et techniques pour la promotion des interventions de conservation des sols
dans le cadre d’une approche visant l’intégration et la complémentarité entre les interventions de protection
des sols à l’amont et la préservation des infrastructures hydro-agricoles à l’aval. Malgré les efforts déployés,
les réalisations sont restées en deçà des besoins et la pression anthropique sur les ressources naturelles n’a
fait qu’accentuer la dégradation des sols et donc accélérer les phénomènes d’érosion (voir encadré 5).
Aussi et pour donner une nouvelle dynamique à l’action de lutte contre l’érosion, un Plan National d’Amé-
nagement des Bassins Versants (PNABV) fut adopté en 1996, comme cadre stratégique fixant les priorités
d’interventions et proposant les approches ainsi que les mécanismes financiers et institutionnels de mise en
œuvre. Ce plan est l’aboutissement d’une réflexion profonde basée sur de nombreuses études réalisées
depuis 1970 en coopération avec les organismes internationaux et d’un débat national marqué par le Sémi-
naire National sur l’Aménagement des bassins Versants de 1988 et le Colloque National sur la forêt de 1996.
435
Au niveau des zones maritimes, le problème de l’ensablement a été posé depuis très longtemps, suite à la
dégradation de la végétation naturelle sur le littoral, notamment près des grands centres urbains où les
besoins en bois ont atteint des proportions importantes déjà au début du XXe siècle (cas d’Essaouira et d’Aga-
dir). Pour ces zones, les premiers travaux de lutte contre l’ensablement ont été lancés au début du siècle der-
nier à Essaouira puis à Agadir.
Pour les dunes continentales, les travaux de lutte contre l’ensablement avec les moyens de l’État n’ont
pris une importance appréciable que depuis 1979 à Zagora et à Errachidia.
Les efforts en matière de lutte contre l’ensablement se sont traduit par des réalisations ayant permis la
stabilisation de près de 31.000 ha en milieu littoral et plus de 2.000 ha en milieu continental. Les réalisations
en matière de stabilisation des dunes ont permis en zones littorales la protection de certaines villes côtières
(Essaouira, Agadir...). En milieu terrestre, les superficies fixées bien que limitées à cause du coût élevé (5 fois
plus cher qu’en milieu littoral), revêtent une importance capitale quant à leur impact.
DES EFFETS LOURDS DE CONSÉQUENCES SUR LE CAPITAL EAU ET SOL À L’AMONT ET À L’AVAL
Conséquences de l’érosion au niveau du bassin versant
– Les pertes en capital sol traduites par les dégradations spécifiques :
R Plus de 2000 t/km2/an dans les régions du Rif central et occidental
R Entre 1000 et 2000 t/ km2 /an dans les régions pré-rifaines et de la bordure méditerranéenne
R Entre 500 et 1000 t/ km2 /an dans les régions du Moyen et Haut Atlas
– La perte d’éléments fertilisants qui représentent une perte invisible de productivité. D’après les résultats d’une
étude de reconnaissance de l’érosion menée sur 22,7 millions d’ha, 13,4 millions d’ha ne devraient être exploités
que par le parcours et les forêts et 4,1 millions d’ha de terres cultivées doivent faire l’objet de mesures sévères de
conservation des sols
– L’altération des conditions écologiques des milieux par suite du décapage des sols, qui compromet la dynamique
de régénération naturelle du couvert forestier et appauvrit la biodiversité
– La dégradation de ressources naturelles et de l’environnement en général.
436
Impacts sur les infrastructures hydro-agricoles :
Sur une capacité totale de stockage de 16 milliards de m3 la capacité perdue chaque année par envasement est évaluée
à 75 millions de m3 soit une diminution de l’ordre de 0,50 % par an. Les conséquences de ces problèmes d’envase-
ment se traduisent par :
– La perte d’un volume de stockage d’eau correspondant à une possibilité d’irrigation de 5000 à 6000 ha /an;
– La réduction des quantités d’eau mobilisées pour l’approvisionnement en eau potable et industrielle et l’altération
de leur qualité, due au phénomène d’eutrophisation
– La régression de la faune aquatique par suite de la réduction des zones frayères dues au colmatage des fonds de
rivière, de l’asphyxie des œufs et des organismes biotiques, par limitation des possibilités d’alimentation ou par
eutrophisation.
– Le surdimensionnement des barrages par la réservation d’une tranche morte à l’accumulation des apports solides;
– La réduction de la tranche réservée au laminage des crues et donc l’augmentation du risque de déversement et
d’inondation à d’aval :
– L’affectation de la sécurité des ouvrages par l’augmentation des pressions sur le corps des barrages, et des
risques de blocage des prises d’eau et de vidanges de fond :
– La réduction des débits des canaux par suite du développement des plantes aquatiques favorisé par les transports
solides;
– L’augmentation des frais de fonctionnement et de gestion des barrages, des usines hydroélectriques, des unités
de traitement des eaux et des systèmes d’irrigation.
En effet, en plus des acquis techniques et de la contribution au développement des réflexions sur l’amé-
nagement et la gestion des zones arides et désertiques, les réalisations dans les provinces continentales ont
permis la protection de près de 33 agglomérations, 8.500 ha de palmeraies, 25 Km de route, 20 khettaras et
26 Km de canaux et saguias.
Pour augmenter la cadence en matière de réalisations, des initiatives de partenariat et d’approche partici-
pative sont lancées avec des ONG au niveau de la région de Sous-Massa-Draa où ce phénomène prend de
plus en plus d’ampleur.
437
– Une pauvreté et fragilité des sols dues, essentiellement, à leur faible teneur en matière organique et à
des utilisations incompatibles avec le principe de leur conservation ; prés de 68 % des terres agricoles se
situent en milieu aride et semi-aride ;
– Une dégradation continue du couvert végétal constamment sollicité pour la satisfaction des besoins des
populations en terrains de culture, en bois de feu et en ressources fourragères pour le cheptel ;
– Une érosion hydrique intense notamment dans les zones à pluviosité élevée ; il en résulte tout parti-
culièrement une perte de capacité de stockage des retenues de barrage supérieures à 60 millions de m3
par an ;
– Des phénomènes d’ensablement menaçant notamment les provinces continentales et côtières du pays ;
les palmeraies menacées sont estimées à 30.000 ha pour 80.000 habitants dans la Province de Ouar-
zazate et à 250.000 ha pour 2000.000 habitants dans la Province d’Errachidia.
Les principales réalisations en relation avec la lutte contre la désertification et les effets de la sécheresse,
concernent diverses activités, en particulier :
– la mobilisation des ressources en eau pour près de 14,3 milliards de m3 avec irrigation d’un million d’hec-
tares de terres agricoles sur un potentiel irrigable de l’ordre de 1,36 millions d’ha ;
– L’aménagement et l’amélioration des parcours à travers la création de périmètres d’amélioration pasto-
rales et plantation d’espèces pastorales ;
– Les actions de conservation de la nature à travers la création de parcs nationaux et l’établissement des
plans d’aménagement pour plus de 2,3 millions d’ha de forêts et de nappes alfatières ;
– L’implantation des reboisements sur plus de 530.000 ha et exécution des activités de lutte contre l’éro-
sion sur plus de 500.000 ha dont 31.000 ha de stabilisation des dunes pour la lutte contre l’ensablement.
La lutte contre la désertification doit être approchée de manière holistique et intégrée avec le souci de
contribuer à la lutte contre la pauvreté et au développement humain. À cet effet, les initiatives prises à cet
égard pourront faciliter la convergence des efforts vis à vis des objectifs recherchés, en particulier les pro-
grammes : Routes Rurales ; Approvisionnement groupé en Eau Potable ; Electrification Rurale Globale ; scola-
risation ; Priorités Sociales.
438
constitue le cadre stratégique national de programmation des actions et de mobilisation des acteurs et des
ressources. Il s’inscrit dans la politique générale de développement durable du pays en général, et dans le
cadre de l’opéralisation de la stratégie de développement rural 2020 en particulier.
Aussi, le pilotage du PAN-LCD par le Haut Commissariat aux Eaux et Forêt et à la Lutte Contre la Désertifi-
cation devra-t-il dynamiser la traduction de ce programme en projets d’exécution axés sur (i) la connaissance
des ressources naturelles et la typologie de la désertification ; (ii) le développement local à travers l’intégra-
tion des actions devant favoriser la diversification des revenus dans un cadre participatif et partenarial ; (iii) le
développement des capacités des différents acteurs à travers la formation, la vulgarisation au profit des com-
munes, des ONG et des populations de manière générale... et (iv) la mise en place d’un système de suivi-
évalution de la désertification et de la sécheresse ainsi que l’impact des programmes s’appuyant sur un
réseau d’observations intéressant les différents écosystèmes naturels et aménagés. Les projets de coopéra-
tion en cours devraient faciliter la mise en œuvre du PAN-LCD.
439
D’autre part, l’Administration a incité le secteur privé à investir dans le domaine de la production des
espèces de gibier. Une dizaine de stations d’élevage de gibier ont été installées à travers le Royaume. La pro-
duction annuelle, estimée à 100.000 perdreaux, faisans et cailles, elle est destinée au repeuplement des ter-
ritoires de chasse amodiés.
La période 1991-2004 s’est traduite par la mise en œuvre d’une stratégie basée sur les orientations sui-
vantes :
(i) La protection, le développement des populations gibier existant et la réintroduction d’espèces disparues
afin d’augmenter la diversité du potentiel cynégétique à travers l’institution de Parcs Nationaux et
Réserves de chasse, La création d’enclos d’élevage, d’acclimatation et de reproduction et la création de
Chasse Pilote pour une population de grand gibier (chasse pilote du Mouflon à Oulmès).
(ii) L’amodiation du droit de chasse aux associations de chasseurs afin de les faire participer aux efforts de
protection et de développement durable de la faune sauvage cynégétique à travers la substitution de
« la chasse organisée » à « la chasse banale » pour une gestion directe de la faune gibier par les chas-
seurs. Une superficie de 2.200.000 ha a été amodiée aux associations et sociétés de chasse touristique
(1.200.000 ha au profit de 290 associations et 1.000.000 ha au bénéfice de 25 sociétés), 27 lots sont
amodiés à l’intérieur des immeubles ruraux et 40 lots mis à la disposition des Provinces dans le cadre
d’une convention entre le départements des Eaux et Forêts et celui de l’Intérieur.
(iii) La promotion du tourisme cynégétique, par l’incitation du secteur privé à l’investissement dans le
domaine de la chasse. Ce tourisme est un créneau porteur et un moyen de promotion de l’image de
marque du pays à l’étranger. Cette branche est génératrice d’emplois et de revenus en milieu rural et
créatrice de prestations de services connexes (hébergement, restauration...). Le bilan exhaustif de
cette activité peut être présenté à travers les données suivantes : 25 sociétés de chasse touristique
amodiataires du droit de chasse, 1.000.000 ha amodiés répartis entre gibier sédentaire et gibier migra-
teur, Environ 5.000 touristes cynégétes reçus annuellement, apport en devises estimé à 60 millions de
dirhams, création de 400.000 journées de travail par an.
(iv) La réalisation des études sur les principales espèces de gibier, en vue d’élaborer des méthodes de
gestion des populations sur la base de connaissances scientifiques : la réalisation d’un plan directeur
de la chasse est en cours.
(v) La concrétisation d’actions partenariales avec la société civile ; une convention de coopération entre ce
département et la Fédération Royale Marocaine de Chasse a été signée en 2002.
Cette situation, marquée par l’évolution progressive de la chasse organisée devrait conduire à la spécialisa-
tion spatiale avec la définition d’une réglementation appropriée ainsi que sur la promotion de la chasse touris-
tique. Les actions projetées dans la prochaine décennie concernent.
i) L’adoption systématique de plans de chasse qui consistent à mettre en place un système de prélève-
ment contrôlé, basé sur les critères de reproduction ;
ii) La création de régions cynégétiques présentant une homogénéité sur le plan écologique et permettant
d’une part, d’y appliquer une même réglementation en matière d’exploitation et de gestion des popula-
tions gibier, et d’autre part, d’y réaliser des techniques d’aménagement appropriées ;
iii) Le développement de la chasse au grand gibier : le HCEFLCD entend donner plus d’éclat à cette acti-
vité qui constitue, parmi la gamme des produits touristiques du pays, une niche à forte valeur ajoutée et
offre aux chasseurs la possibilité d’exercer le tir de trophées qui constitue une source de devises non
négligeable ;
iv) Révision de la loi sur la chasse et rationalisation l’exercice de la chasse dans le pays ;
v) L’intensification de la lutte contre le braconnage à travers la répression mais aussi la sensibilisation des
populations et l’information et la formation des chasseurs, etc.).
440
3.9.2. Pêche aquaculture
La période 1956-1980 est considérée comme l’ère de la pêche sportive au cours de laquelle les associa-
tions de pêcheurs ont été à l’origine de plusieurs introductions de poissons exotiques ayant permis l’enri-
chissement de la faune piscicole, d’une part, et le développement de la pêche sportive, d’autre part.
En effet, le peuplement piscicole autochtone marocain n’était représenté que par une dizaine d’espèces
dont une seulement se prête à la pêche sportive (truite fario). Eu égard à la diversité du climat et du relief du
pays, une trentaine des plus importantes espèces de poissons d’Europe et d’Amérique du Nord ont été intro-
duites. Une quinzaine d’entre elles se sont bien acclimatées dans nos milieux aquatiques. Ces espèces
peuvent être classées en deux catégories. D’une part, les poissons réputés pour leur intérêt dans la pêche
sportive et la qualité exceptionnelle de leur chair (la truite arc-en-ciel, le brochet, le black-bass à grande
bouche, le sandre et la perche fluviale), d’autre part, ceux dits de consommation courante (les carpes, le gar-
don, le rotengle et la tanche) qui sont de qualité inférieure mais sont plus prolifiques que les précédentes.
Une autre forme de peuplement aquatique introduit est constituée de deux espèces d’écrevisses. Il s’agit
de l’écrevisse américaine, qui est très répandue dans divers lacs naturels du Moyen Atlas, et de l’écrevisse à
pieds rouge qui est plus appréciée, mais bien plus exigeante que la précédente quant à la pureté et la tempé-
rature des eaux. À ce tableau, s’ajoutent les gambusies utilisées dans la lutte contre le paludisme par le biais
d’élimination des moustiques, vecteurs de transmission de cette maladie.
Le développement de ces espèces est réalisé grâce aux opérations de reproduction artificielle effectuée
au sein de la station piscicole, créée depuis 1924 à Azrou. Cette infrastructure a été élargie, par la suite, par la
construction, dans la province d’Ifrane, de la station piscicole de Ras El Ma et d’une dizaine de plans d’eau
artificiels de superficie variant de 2 à 14 ha et qui sont destinés exclusivement à l’exercice de la pêche de la
truite arc-en-ciel. En plus des rivières à vocation salmonicole, ces dernières réalisations ont augmenté consi-
dérablement les possibilités de pêche.
L’importance de cette activité a conduit, au début des années 80 à la création du Centre National d’Hydro-
biologie et de Pisciculture pour l’étude hydrobiologique de tous les milieux aquatiques concernés par la
pêche et la pisciculture (qualité physico-chimique des eaux, végétation et invertébrés aquatiques, pathologie
des poissons...). Cette période a connu également le lancement de la station de carpiculture de la Deroua
(Béni Mellal) qui s’est spécialisée, compte tenu des conditions du milieu, dans les carpes chinoises à voca-
tion de lutte biologique contre le phénomène d’eutrophisation dans les canaux d’irrigation et les retenues de
barrages. Cependant, le développement spectaculaire de ces poissons, sous les conditions de nos milieux, a
permis de développer davantage le secteur de la pêche commerciale à base de cette espèce.
La faisabilité de projets de pisciculture et de gestion piscicole des milieux aquatiques, qui a permis le déve-
loppement des amodiations de droit de pêche ou d’installation d’unités aquacoles et l’essor de l’investisse-
ment privé dans ce secteur d’élevage des poissons et coquillages, a connu un grand essor après les années
90. Les unités privées actives dans ce domaine pratiquent l’élevage de la truite arc-en-ciel, des carpes
chinoises, de l’anguille et de la coquille Saint-Jacques. Cette période a connu le désengagement du Départe-
ment des Eaux et Forêts de la vente des alevins utilisés dans la lutte biologique contre l’eutrophisation, au
profit des sociétés qui pratiquent ce même type d’élevage et la promotion du secteur privé pour la produc-
tion piscicole.
Le secteur de la pêche dans les eaux continentales pourrait jouer un rôle économique et social plus impor-
tant en focalisant les efforts sur les actions qui revêtent un intérêt économique. Dans ce but, la stratégie
retenue s’appuie sur le développement de la pêche commerciale et de la pêche de sportive. À cet effet, de
nouvelles écloseries ont été édifiées pour améliorer les résultats de la multiplication artificielle.
La pêche commerciale, constitue une activité vivrière pour quelques 2.000 familles de pêcheurs qui uti-
lisent des méthodes d’exploitation artisanales devant être améliorées pour répondre à leurs besoins. Mais
441
l’exploitation rationnelle des milieux aquatiques reste tributaire d’une participation plus accrue du secteur
privé et d’une intégration des pêcheurs qui opèrent dans ces milieux. Il est donc évident que le développe-
ment de ce secteur ne peut être le seul fait de l’Administration qui toutefois, continuera à identifier les
milieux pilotes accessibles, restaurés et riches en poissons, et à les céder à des promoteurs privés, seuls
capables de promouvoir une pêche de qualité.
À ce titre, une évaluation objective des possibilités et de l’opportunité de développement de ce secteur est
en cours de réalisation dans le cadre de l’élaboration d’un plan national de développement de la Pêche et de
l’Aquaculture Continentales.
Néanmoins, certaines actions en matière de préservation ont été menées aussi bien sur le plan technique
qu’institutionnel, en particulier :
(i) Création de quatre importantes réserves dont trois de faune (i) la réserve de M’sabih Talâa à Sidi-Chiker
(Province de Safi) pour la conservation de la gazelle dorcas du Haouz, (ii) la réserve de Takherkhort au
Parc National de Toubkal (Province de Marrakech) pour la préservation du Mouflon à manchettes et (iii)
la réserve biologique de Merja Zerga pour la conservation d’un milieu lagunaire de grand intérêt pour les
oiseaux migrateurs et une de flore à savoir la réserve de la sapinière de Tassemtane à Chefchaouen
pour la conservation du Sapin ;
(ii) Promulgation de l’arrêté du 3 novembre 1962 portant réglementation permanente de la chasse qui a
dressé la liste des espèces de faune sauvage protégées ;
(iii) Signature et ratification en juin 1976 de la Convention sur le commerce international de la faune et la
flore sauvages menacées d’extinction et la désignation de l’Administration forestière comme point
focal de ce traité intergouvernemental qui réglemente le commerce, l’exportation, l’importation et la
réexportation des espèces sauvages ;
(iv) Adhésion à la convention RAMSAR sur les zones humides en 1980 dont l’Administration forestière est
le point focal avec en parallèle l’inscription de quatre réserves sur la liste RAMSAR en l’occurrence la
réserve biologique de Sidi Boughaba, la réserve biologique de Merja Zerga, le Lac d’Affenourir et la
Lagune de Khnifiss ;
(v) Financement d’actions relatives à la surveillance et à l’aménagement des aires protégées déjà créées ;
La période (1981-1990) a été marquée par les résultats et les effets de la Conférence de Stockholm, sur
l’environnement et les différentes conventions en matière d’environnement (CITES, RAMSAR, etc.) qui ont
vu le jour après cette conférence, ainsi que par l’engagement des pays à inscrire dans tout programme de
développement la composante relative à l’environnement, en général, et aux aspects faunistiques et floris-
tiques, en particulier. Dans ce contexte, l’Administration forestière a connu une activité traduite par la prépa-
ration de dossiers et de requêtes relatifs à la mise en place d’une stratégie de conservation de la biodiversité,
de réhabilitation des milieux et des espèces de la faune sauvage disparues ou menacées d’extinction et le
développement de projets de coopération internationale.
442
Durant la période 1991-2004 les activités en matière de conservation de la biodiversité ont été intenses ;
elles concernent notamment :
(i) la réalisation en 1996 d’une étude nationale ayant permis l’identification d’un réseau national de 154
sites d’intérêt biologique et écologique (SIBE) devant faire l’objet de mesures de conservation et de
valorisation (6 parcs nationaux et 2 parcs naturels, 146 réserves naturelles, dont 108 réserves en
domaine continental) ;
(ii) la création de douze réserves de faune pour la réhabilitation des espèces disparues ou en voie d’extinc-
tion en l’occurrence : la gazelle dorcas, la gazelle de cuvier, la gazelle dama mhor, le mouflon à man-
chettes, le cerf de berbérie, l’Addax, l’Oryx et l’autruche à cou rouge. Ces réserves ont été créées au
niveau des provinces de Chtouka Ait Baha, Errachidia, Ouarzazate, El Kalaa Essraghna, Marrakech,
Khouribga, Boulemane et Berkane ;
(iii) la création en 1991 du parc national de Souss-Massa sur une superficie de 33.800 ha ;
(iv) le lancement de la procédure de création des parcs nationaux d’Al Hoceima (Province d’Al Hoceima),
Talassemtane (Province de Chefchaouen), d’Ifrane (Province d’Ifrane), du Haut Atlas Oriental (Pro-
vinces de Khénifra et Errachidia), du Bas Draa (Provinces de Tan Tan et Assa Zag) et l’extension du parc
national de Tazekka ; la préparation de dossiers de création de quatre parcs nationaux de la Moulouya
(Province de Oujda), de Khnifiss (Province de Laayoune), du Plateau Central (Provinces de Khemisset
et Khénifra), du Moyen Atlas (Provinces d’Ifrane et Khénifra) ;
(v) la réintroduction de certaines espèces de faune sauvage ayant disparu du milieu naturel, notamment :
l’Oryx, l’Addax, la gazelle dama, le cerf de berbérie et l’autruche à cou rouge ;
(vi) la mise en œuvre du projet GEF de gestion des aires protégées. Ce projet intervient sur 13 des SIBE
identifiés par le plan directeur les aires protégées dont trois parcs nationaux. Les actions envisagées
visent l’élaboration des plans d’aménagement de 10 d’entre eux ;
(vii) la préparation d’un projet de loi sur les aires protégées définissant les différentes catégories et le
mode de gestion de ces espaces ;
(viii) la conclusion de plusieurs conventions de partenariat avec les régions administratives, et la société
civile pour la mise en place d’actions de conservation de la biodiversité.
La stratégie d’intervention en matière de protection de la nature et des aires protégées a développé pro-
gressivement de nouvelles démarches qui visent l’implication des populations locales dans le processus de
gestion, d’exploitation et de conservation des ressources naturelles et de la biodiversité. En effet, les aires
protégées ne sont plus des territoires clôturés et fermés à toute exploitation et toute activité. Mais ce sont
des espaces qui disposent de diverses potentialités naturelles, culturelles, scientifiques, touristiques, archéo-
logiques etc. qu’il faut valoriser dans le cadre d’une vision globale de développement humain.
443
De l’indépendance à 1975, l’Administration forestière était représentée au niveau régional par sept cir-
conscriptions dont le territoire s’appliquait au découpage territorial en sept régions économiques. Chaque
circonscription gérait plusieurs arrondissements, ou subdivisions, situés au niveau des provinces.
De 1975 à 1994, la Direction des Eaux et Forêts et de la Conservation des Sols (DEFCS) est représentée
sur le terrain par des services forestiers qui relèvent des Directions Provinciales de l’Agriculture (DPA). La
Direction Centrale est composée de plusieurs divisions et services : aménagements, contentieux, équipe-
ment, chasse, pêche, reboisement et conservation des sols. Le service administratif et la station de
recherche forestière sont rattachés au Directeur des Eaux et Forêts.
En 1994, et dans le cadre de la régionalisation de la gestion forestière, la direction Centrale a, de nouveau
recouvré son ancien statut d’Administration des Eaux et Forêts et de la Conservation des Sols (AEFCS) avec
deux Directions : Direction du Développement Forestier (DDF) et Direction de la Conservation des Res-
sources Forestières (DCRF).
Neuf Directions Régionales représentent l’Administration Centrale ; ces Directions sont spécialement
réparties sur la base des régions écologiques et forestières, tout en respectant les limites administratives.
Elles sont organisées au niveau provincial et local en services forestiers et en Centres de Développement
Forestier (CDF). Cette nouvelle organisation devrait permettre de :
(i) mettre l’administration forestière au diapason des évolutions intervenues en matière de décentralisa-
tion, de déconcentration et de régionalisation ;
(ii) renforcer la présence sur le terrain – en forêt – non pas seulement à des fins de contrôle mais surtout
pour améliorer la qualité technique des interventions et promouvoir un dialogue permanent avec les
populations riveraines et les communes rurales ;
(iii) simplifier et alléger le fonctionnement de l’administration en rapprochant la gestion de l’exécution ;
Les récentes modifications Gouvernementales (avril 1998) ont fait naître, pour la première fois dans l’his-
toire de la forêt marocaine, un Ministère délégué chargé des Eaux et Forêts, (MCEF) attaché auprès du
Ministère de l’Agriculture, du Développement Rural et de la Pêche Maritime (MADRPM), ce qui montre bien
le niveau élevé de préoccupation que représente la gestion des écosystèmes forestiers et de leurs res-
sources.
La nécessité de coller l’organisation administrative régionale, qui bénéficie désormais d’un cadre juridique
nouveau (Loi 47-96 sur la région) a conduit à réviser la structure et la composition des DREF. Cette révision
prend en considération la nécessité d’opérer un transfert de pouvoirs au profit des niveaux déconcentrés, un
réajustement des territoires en fonction du potentiel de chaque région pour les besoins d’une planification
intégrée, le besoin d’une administration de proximité qui garantit le rapprochement de l’administration des
usagers, et une meilleure allocation des ressources nationales en vue de réduire les disparités régionales.
Le HCEFLCD est composé de dix directions régionales. Au niveau local, cinquante services et cinquante
deux centres de développement forestier (CDF) assurent la gestion des espaces forestiers qui relèvent des
territoires de chaque province.
Si cette structure vise le renforcement de la gestion sur le terrain et la réponse d’une manière efficace à
tout problème spécifique, la mise en place de moyens humains et financiers n’a pas suivi le même rythme,
ce qui dégage un déséquilibre réel au niveau de l’encadrement.
La situation générale de l’effectif, technique et administratif, met en évidence un effectif de 5.145, dont
seulement 48 % représentent le cadre technique.
444
Tableau 13 : Ressources humaines du HCEFLCD
Catégorie Effectifs
Le tableau 13 met en évidence un faible taux d’encadrement moyen de la forêt, particulièrement sur le ter-
rain, en rapport avec les exigences d’une gestion rationnelle. Ce taux est de 31.890 hectares pour un seul
ingénieur ; 7.340 hectares pour un technicien et 10.643 hectares pour un cavalier.
La décision, en septembre 2003, de créer le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la
Désertification (HCEFLCD), concrétise la sollicitude dont SA MAJESTE le ROI entoure ce secteur vital. Cette
nouvelle institution a été chargée dans le cadre du programme gouvernemental, de mettre en œuvre et
d’exécuter un programme ambitieux de redressement, qui vise principalement à assurer la conservation des
ressources forestières, améliorer la gestion de ce secteur et sa promotion, et à œuvrer spécialement à la
limitation du processus de désertification. Cette approche se caractérise par l’importance accordée à la per-
manence et à la continuité d’une politique visant un développement durable.
La création du HCEFLCD s’inscrit en outre, dans le cadre de la concrétisation et de l’accélération de la
cadence de réalisation des plans stratégiques élaborés durant les dernières années, afin de les mettre en
cohérence avec le calendrier arrêté (Programme Forestier National – Plan d’action national de lutte contre la
désertification...). Elle conforte aussi les enseignements tirés d’une série d’expériences innovantes dans la
préparation, les montages institutionnels et financiers, les approches de mise en œuvre et de partenariat
dans le cadre de l’exécution de certains projets d’aménagements de bassins versants et d’aires protégées,
d’aménagements sylvo-pastoraux et de développement intégré des zones forestières et péri-forestières.
Dans les domaines d’intervention du HCEFLCD, la mise en œuvre des ces options stratégiques requiert
une nouvelle gouvernance. Il s’agit de promouvoir des processus innovants de prise de décision qui per-
mettent une gestion patrimoniale des ressources naturelles, la territorialisation et l’intégration des pro-
grammes et actions sectorielles, la participation des populations et des collectivités locales, du secteur privé
et des organisations non gouvernementales.
Les domaines d’intervention de cette nouvelle institution sont structurés en blocs de missions cohérents,
puis déclinés en schéma d’organisation des services centraux qui comprend, outre le Secrétariat général et
L’Inspection Générale, cinq Directions : la direction du domaine forestier et du contentieux, la direction de la
lutte contre la désertification et la protection de la nature, la direction de développement forestier, la direction
de la planification de la programmation et de la coopération et la direction des ressources humaines.
445
Ainsi, le HCEFLCD est chargé des missions principales suivantes :
– Assurer l’administration du domaine forestier de l’État et les autres biens soumis au régime forestier
ainsi que la police et le contrôle de l’application des textes législatifs et réglementaires y afférents.
– Élaborer et mettre en œuvre la politique de Gouvernement dans les domaines de la Conservation et du
développement durable des ressources forestières, alfatières, sylvo-pastorales, cynégétiques, piscicoles
et des aires protégées.
– Coordonner la mise en place des mécanismes institutionnels pour la préparation, l’exécution, le suivi et
l’évaluation de la politique du gouvernement en matière de lutte contre la désertification.
– Participer à l’élaboration et à la mise en œuvre de la politique du Gouvernement en matière de déve-
loppement rural.
446
services à caractère administratif et l’annulation des 10 % du FNF qui étaient destinés auparavant à son
financement, constituent un obstacle institutionnel et psychologique pour le développement de la recherche
et pour l’innovation (M’HIRIT, 1995).
447
Valorisation des produits de la Le déficit en bois et dérivés est de R Promotion de l’utilisation des bois ronds d’eucalyptus et de pins
forêt l’ordre de 60 %. Nécessité de comme bois de mines
valoriser les essences locales et R Promotion de l’utilisation du bois de certains eucalyptus comme
introduites pour des utilisations poteaux de ligne et dans les serres agricoles
adaptées. R Définition des propriétés technologiques des différents bois maro-
cains
R Promotion de l’utilisation du bois de pin en menuiserie
R Détermination des qualités des eucalyptus hybrides à propager par la
production de bois de qualité
R Optimisation du sciage du bois de cèdre
448
4. Éléments de reflexion prospective
Le contexte environnemental marocain allie une grande hétérogénéité et des fragilités spécifiques du
milieu naturel. Malgré la tendance à l’urbanisation enregistrée à l’échelle nationale, il n’en reste pas que les
provinces forestières demeurent majoritairement rurales. En effet, les proportions de la population rurale
dans les provinces de Chefchaouen, Azilal, Essaouira, Al Hoceima, Kénitra et Khénifra sont respectivement
de 88 %, 72 %, 54 % et 53 %.
Dans l’espace marocain l’utilisation séculaire des terres a donné lieu à travers les âges à plusieurs types de
conflits aux frontières de l’agriculture et de la foresterie : défrichement des terres boisées, surpâturage,
désertification des zones sèches et érosion des bassins versants dans les secteurs de la montagne. Il faut
désormais y ajouter la fréquentation touristique des espaces naturels. Les facteurs humains à l’origine des
dégradations et du déboisement sont nombreux et peuvent paraître contradictoires : expansion des super-
ficies cultivés, pressions grandissantes sur les forêts pour le bois de feu et pâturage.
Aussi la problématique de gestion des ressources naturelles se présente-t-elle, de manière plus aigue, en
terme de déséquilibre entre les ressources naturelles d’une part, (sols cultivables, eau de qualité, végétation
ligneuse etc.) et, d’autre part, entre les besoins accrus des populations en croissance rapide à la recherche
d’une amélioration générale de leurs conditions de vie (MHIRIT. 1996, 1999). Dès lors les populations se
rabattent sur les ressources forestières, disponibles et gratuites, pour y tirer les moyens de leur subsistance.
La situation sociale précaire des populations riveraines des forêts se traduit par les tendances actuelles de
l’utilisation des espaces forestiers et périforestiers :
(i) Le défrichement et la mise en culture de l’espace forestier pour l’extension des exploitations ou la
compensation de la perte productivité de leurs terres ruinées par l’érosion. 5.000 à 6.000 ha sont défri-
chés annuellement. Il y a lieu de signaler à ce propos que la superficie agricole utile est passée de 7,2 à
9,2 millions d’hectares entre 1974 et 1994, enregistrant une augmentation moyenne annuelle de près
de 100.000 ha, gagnés sur les terres de parcours, les forêts et les merjas asséchées.
(ii) La surexploitation des parcours forestiers et steppiques : L’appropriation progressive et la mise en
culture des terres traditionnellement réservées au parcours, le faible recours à la jachère agricole ou la
disparition de cette pratique, ont engendré une très forte dépendance du bilan fourrager annuel des
ressources forestières qui y contribuent à hauteur de 17 % en moyenne. Si, dans certaines zones, la
charge permanente en animaux de parcours représente 3 à 5 fois les possibilités fourragères des
forêts, en période de sécheresse ou de soudure, les forêts deviennent le recours fourrager exclusif des
élevages extensifs.
(iii) L’approvisionnement en bois-énergie : Le bilan énergétique national demeure très dépendant des
énergies de biomasse qui y contribuent à hauteur de 30 %; la quantité de bois-énergie consommée
annuellement est de 11,3 millions de tonnes dont 53 % d’origine forestière. La consommation du bois-
énergie en milieu rural représente 89 % de la consommation totale avec 49,52 quintaux par ménage.
La pression réelle ainsi exercée annuellement sur la forêt présente l’équivalent de 160.000 ha d’Euca-
lyptus exploités à l’âge de 10 ans. La pression potentielle, compte tenu de la consommation de bio-
masse totale, représente l’équivalent de 202.000 ha d’Eucalyptus exploités par an.
449
La consommation de combustibles ligneux s’insère dans une problématique assez vaste ; soit en relation
avec la crise énergétique que connaît actuellement le monde entier et en particulier les pays en voie de déve-
loppement, soit en relation avec les contraintes socio-économiques et la protection de l’environnement.
Négliger ce problème en milieu rural et particulièrement en zone de montagne, reviendrait à prendre le risque
de voir se développer des déséquilibres de plus en plus importants entre récolte de bois-énergie et possibi-
lité de la ressource forestière, induisant ainsi des processus locaux de dégradations irréversibles sur des
zones plus ou moins étendues. La forte consommation de bois-énergie, particulièrement au niveau du
monde rural, ne peut être donc soutenue durablement par les espaces forestiers marocains. Un choc bois de
feu se projette dans un avenir plus ou moins court.
Cependant, si on tient compte de l’évolution de la population, et donc de la demande annuelle en bois-
énergie, on constate qu’effectivement l’offre a beaucoup diminué et donc la pression sur la forêt sera plus
grande qu’actuellement. L’offre potentielle est passée de 0,07 m3 équivalent bois rond /hab/an en 1960 à
0,03 m3 équivalent bois rond /hab/an à l’an 2002, comme le montre la figure 4 :
(iv) Les incendies de forêt : Durant la période 1963-1997, les incendies provoqués par diverses causes,
d’origine essentiellement anthropique, ont endommagé une superficie moyenne de 3000 ha/an. Les
superficies moyennes incendiées présentent une nette tendance à la hausse : (1 883 ha/an durant la
décennie 1960-1969, 2.960 ha/an durant la décennie 1970-1979, 3 247 ha/an durant la décennie 1980-
1989 et 3.732 h/an pour la période 1990-1997), en particulier, dans la région rifaine.
(v) Urbanisation et infrastructures : Le patrimoine forestier est de plus en plus sollicité par les pouvoirs
publics, les collectivités et le secteur privé pour les divers aménagements, engendrant un changement
d’affectation non compensé des terres forestières.
450
Les difficultés de régénération naturelles des forêts, leur disparition progressive et l’impossibilité de prati-
quer une sylviculture rationnelle sous l’effet de la pression anthropique sont des processus très actuels. Les
facteurs en cause sont le surpâturage, la surexploitation du bois, (surtout bois de feu) et l’utilisation des
forêts comme réserve de terres de culture. En effet, la forêt n’est pas suffisamment intégrée dans l’amé-
nagement du territoire et les populations locales ne sont pas suffisamment incitées par les régimes de pro-
priété et les modes de gestion à contribuer à une gestion plus durable de leurs forêts.
La valeur économique des forêts évaluée selon les seuls critères de production ligneuse (dans laquelle on
peut inclure le liège) est généralement faible compte tenu de la productivité assez basse de ces écosys-
tèmes. Les autres productions marchandes de la forêt (chasse, plantes aromatiques ou médicinales,
gemme, ressources fourragères, miel etc.) ne font pas toujours l’objet de transactions rémunératrices. De
faibles revenus n’incitent pas le propriétaire, qu’il soit public ou privé, à investir dans une sylviculture raison-
née. Les fonctions non marchandes des forêts présentent une grande importance : réservoir de biodiversité,
régulation du régime des eaux et conservation des sols, valeur paysagère et récréative, écotourisme etc.,
mais la quantification de ces externalités reste problématique à l’état actuel des connaissances.
Ainsi, le domaine boisé régresse de 25.000 h/an en raison, principalement, de la pression de la croissance
démographique et des conditions socio-économiques précaires en milieu rural. Si cette tendance n’est pas
inversée, un seuil critique de désertification irréversible serait atteint dans 30 à 50 ans. Les pertes écono-
miques dues à cette dégradation, estimées à travers les impacts de celles-ci sur les ressources en eau, les
productions forestières, pastorales et agricoles, sont évaluées à 710 millions de dirhams/an d’après le Plan
National d’Action Environnementale (PNAE-1995).
Les projections établies estiment la population marocaine, vers l’année 2025, à près de 50 millions d’habi-
tants dont la moitié en milieu rural, dont le nombre continuera de s’accroître en valeur absolue en dépit de la
tendance à l’urbanisation. L’emprise de la pression sur les ressources forestières risque d’aggraver les
enjeux déjà lourds, si des programmes d’action significatifs, destinés au monde rural, ne sont pas mis en
œuvre. La figure 5 schématise la problématique de la forêt marocaine. Il est certain que cette problématique
se pose aux pouvoirs publics en termes d’enjeux et de défis à relever pour les prochaines décennies
451
Figure : Problématique de la forêt marocaine
452
4.2. Les écosystèmes forestiers et périforestiers face aux enjeux de la
gestion durable
453
cielles sont susceptibles d’améliorer la contribution locale à la couverture des besoins croissants en bois. Par
ailleurs, les projections permettent d’établir un doublement des besoins en bois d’œuvre et de service dans
les 25 prochaines années.
Le plan directeur de reboisement récemment élaboré estime que 70 % des importations de bois de sciage
résineux et 100 % du bois de trituration d’Eucalyptus pourraient être substituées par la production locale. Cet
objectif suppose la mise en œuvre d’un programme d’action intégrant les aspects suivants : un accroisse-
ment des ressources forestières par l’extension importante des plantations artificielles, l’intensification de
l’utilisation des intrants et de la sylviculture, le développement des filières et des marchés de bois locaux, en
vue de valoriser au mieux les ressources disponibles.
L’urbanisation rapide des populations marocaines, la vocation touristique du pays, l’insuffisance des
espaces verts urbains (2,5 m2/habitation), sont autant de raisons qui plaident pour un Maroc plus « vert »,
pour une extension des forêts récréatives et périurbaines, et pour la multiplication des parcs nationaux et des
réserves biologiques naturelles, en vue de contribuer au bien être social et indirectement au développement
humain
Le Maroc est le seul pays africain à disposer de deux façades, atlantique et méditerranéenne, à receler une
très grande variabilité orographique, lithologique et climatique (du désert aux montagnes perhumides et
enneigées). Cependant, la diversité biologique et écologique de ses écosystèmes est très menacée par la
dynamique régressive de ses ressources forestières, pastorales et faunistiques. (MHIRIT, 1993).
Dans un horizon de 30 à 50 ans, ce processus d’évolution régressive pourrait être irréversible, alors que la
décrue démographique aurait été à peine inaugurée. Jusqu’à aujourd’hui, le Maroc a su préserver l’essentiel.
L’avenir dépendra des politiques qui seront adoptées en matière de développement rural et de gestion des
ressources forestières qui sont deux volets indissociables.
Le Dahir de 1976 a, par ailleurs institutionnalisé l’approche participative à travers d’autres prérogatives
dévolues aux conseils communaux, notamment en matière d’organisation des usagers pour une meilleure
utilisation des ressources forestières d’une part, et de coopération avec les services forestiers locaux pour
faciliter la gestion du domaine forestier, d’autre part.
Cependant, si administrativement cette coopération est globalement acquise, et plus particulièrement,
dans la programmation des exploitations forestières et des différentes opérations dégageant des recettes
forestières pour les communes, des difficultés persistent quant à l’association des populations à la protection
et au développement du patrimoine forestier qui subit de fortes pressions (prélèvements illicites de bois de
feu, surpâturage, défrichement,...) induisant une dégradation continuelle du couvert végétal, un accentuation
de l’érosion et une perte de la productivité et de la production dont l’impact négatif est incontestable sur le
plan environnemental.
454
La réponse à ces enjeux réside dans :
(i) La préservation du patrimoine forestier en conciliant les usages et les droits foncier, les besoins des
acteurs et les capacités des écosystèmes au moyen d’un contrôle permanent et d’une concertation effi-
cace ;
(ii) la valorisation optionnelle des produits et services de la forêt à travers l’optimisation de l’action et des
impacts des filières des produits ligneux et non ligneux la protection et la valorisation de la diversité bio-
logique dans le cadre d’un réseau de sites protégés et la promotion de la fonction tourisme et loisirs
des forêts ;
(iii) l’équilibre du bilan production consommation par l’organisation rationnelle de la récolte et du com-
merce du bois énergie, la création de zones de production spécifiques et l’amélioration des rende-
ments à la transformation et l’incitation aux énergies de substitution ;
(iv) la promotion de l’utilisation des écosystèmes forestiers et péri-forestiers dans le cadre d’une gestion
global locale.
La réponse de taille, qui croise les réponses développées ci-dessus résidera dans le choix des mesures et
moyens qui impliquent l’intégration, au niveau national, des objectifs de la politique forestière, la mise en
place de législation adaptée aux stratégies, la structuration adéquate de la tutelle chargée d’appliquer ces
stratégies et la mise à disposition des ressources humaines et financières optimales.
Cette tendance peut être attribuée, en particulier, à la croissance de la pression démographique. En effet,
entre 1925 et 1994 la population a quadruplé. Elle devrait atteindre, selon les projections les plus récentes 50
millions d’habitations, à l’horizon 2025, dont la moitié, environ en milieu rural, se trouve intimement liée aux
espaces forestiers. Cependant les problèmes ne sont pas générés par le seul accroissement démographique
de la population, si brutal soit-il, ils découlent également de la pauvreté des populations rurales, et plus parti-
455
culièrement, celles riveraines des massifs forestiers, et à une insuffisante adaptation des modes de gestion
et d’exploitation des ressources naturelles.
Certes, les facteurs qui conditionnent les évolutions potentielles et les usages prévisibles des espaces
forestiers et périforestiers conduisent à préciser que l’avenir des écosystèmes forestiers dépend largement
de « moteurs » qui leur sont extérieurs. Certains de ces facteurs moteurs extérieurs ; comme les évolutions
du climat global, de la démographie, des modes de vie ou du développement économique général sont diffi-
cilement pilotables ; d’autres, par contre, comme les politiques de mise en œuvre dans les domaines tels que
l’agriculture, le développement rural, le droit foncier, l’urbanisme, l’énergie, la fiscalité... sont maîtrisables.
C’est pourquoi la gestion durable des écosystèmes forestiers et périforestiers doit non seulement intégrer la
transformation de la société et s’y adapter mais aussi promouvoir la sylviculture afin de produire plus de
biens et de services.
Dans le cas du prolongement des tendances actuelles, la pression de la population rurale continuera à aug-
menter entraînant une réduction des surfaces forestières par des prélèvements excessifs. La désertification
et les problèmes liés au cycle de l’eau et à la conservation des sols s’aggraveront ; en outre les espaces litto-
raux pâtisseront du développement du tourisme. Les difficultés économiques et institutionnelles ne per-
mettent pas une amélioration de la gestion des écosystèmes forestiers et de leurs ressources. Le rythme de
30.000 ha de déforestation pourra facilement doubler au bout de 20 ans, et ainsi plus de 1.000.000 ha pour-
ront disparaître. Cette situation peut conduire à double impasse stratégique à la fois patrimoniale et des outils
de gestion.
Le patrimoine, déjà faible en surface, serait sérieusement menacé dans sa pérennité compte tenu des
pressions croissantes subies. La dégradation qualitative des écosystèmes, de leur potentiel et de leurs fonc-
tions environnementales est d’ailleurs beaucoup plus inquiétante que la diminution apparente en surface.
Les tendances au réchauffement des climats pourraient accentuer ces risques.
Le Maroc peut importer des matières premières en bois de nombreux pays dont la production de bois est
plus forte que celle des forêts méditerranéennes. En revanche, la maîtrise de l’eau, des sols et de la biodiver-
sité restent des contraintes nationales incontournables et des enjeux majeurs pour le long terme.
L’organisation technique, réglementaire, administrative et financière ne parvient pas à faire face aux
diverses pressions et menaces externes et internes qui pèsent sur les écosystèmes forestiers et de surcroît
sur la protection des forêts et le développement du secteur au service de la société.
Partout dans le monde l’expérience a montré que l’avenir du secteur forestier est plus influencé par des
éléments macro-économiques externes que par la pertinence des politiques forestières. Mais le volonta-
risme de l’État et l’efficacité des gestionnaires sont déterminants dans l’anticipation et l’accompagnement
des évolutions.
Si l’environnement macro-économique externe changeait fortement et que le Maroc entrait dans une
phase de développement économique accéléré, la création d’emplois et l’augmentation du niveau de vie qui
en résulterait provoquerait une forte décrue démographique et un fort exode rural et donc une diminution
significative de la pression des populations rurales dans les zones forestières à l’horizon 2025. Cette période
sera cruciale pour les écosystèmes forestiers et péri-forestiers. Elle nécessitera la mise en place d’une poli-
tique locale de développement innovante.
Néanmoins, dans les perspectives d’une évolution macro-économique positive, le Maroc peut mieux valo-
riser les forces et les atouts dont dispose le secteur forestier et mieux lutter contre la désertification. Ces
atouts sont en rapport particulièrement avec :
(i) Des espaces forestiers exceptionnels à intérêts multiples : La capacité des forêts marocaines à
résister au climat et à la pression humaine a été démontrée par les faits. Des mesures d’accompagne-
ment appropriées peuvent donc leur permettre de continuer à assurer les fonctions économiques,
456
sociales et écologiques dont la société a besoin. Une approche diversifiée privilégiant, selon les mas-
sifs, des objectifs dominants de production, de protection ou de développement local devront toutefois
être mis en place afin d’optimiser ces efforts.
Au niveau économique, les forêts marocaines génèrent de multiples activités en milieu rural. Le cèdre, le
thuya, le chêne-liège et l’eucalyptus ont une valeur économique réelle qu’il est possible de mieux valoriser
notamment en milieu rural. Cependant, la diversité des produits mobilisables par les populations locales, joue
un rôle très important : les fourrages, le bois de feu, le bois pour les usages locaux et le tannin constituent
des apports économiques substantiels. D’autres produits tels que les plantes aromatiques et médicinales
représentent un potentiel de développement significatif.
Enfin, le potentiel touristique des espaces forestiers est un gisement important de nouvelles activités
économiques et d’emplois en milieu rural.
(ii) Un contexte institutionnel favorable : Le contexte institutionnel actuel du secteur forestier est favo-
rable aux innovations. Il est caractérisé par :
– Une prise de conscience nationale et une démarche approfondie de réflexion quant au devenir de
l’espace forestier national.
– Des services forestiers répartis sur le terrain, dotés d’une bonne connaissance du secteur et de
moyens significatifs.
– Des communes rurales et des acteurs locaux mobilisables.
– Des opérateurs économiques disponibles et disposés à investir dans le domaine forestier.
457
des investissements agricoles, Loi de la Décentralisation, Charte Nationale de l’Aménagement du Ter-
ritoire etc.... qui sont autant de leviers et de facteurs de succès pour la politique de développement
durable.
L’originalité des processus de développement durable ainsi construits, dont la gestion des ressources
naturelles constitue la trame de fond, réside dans les approches, les méthodes d’action et les instruments de
mise en œuvre tels qu’ils s’expriment à travers la Stratégie Nationale pour la Protection de l’Environnement
et la Stratégie 2020 de Développement Rural.
Ces approches, qui s’inscrivent dans une perspective de durabilité et de vision à long terme, reposent sur
de nouveaux paradigmes qui en garantissent la faisabilité et le succès, en particulier (i) intégration et
approche holistique, décentralisation et territorialisation, responsabilisation – participation, partenariat et
contractualisation,, (ii) une mise en cohérence horizontale des actions sectorielles concourant au développe-
ment et, enfin, (iii) un cadre opérationnel de l’action gouvernementale : le comité interministériel permanent
de développement rural, la commission Nationale de l’eau et de climat, etc...
Le Maroc, soucieux de préserver et de développer de façon durable son patrimoine et ses richesses fores-
tières, n’a cessé d’œuvrer pour la mise en place d’une politique forestière capable d’infléchir voire de rever-
ser les processus de dégradation des forêts qui prend en considération la diversité des intérêts liés à la
conservation et à l’exploitation des forêts et la nécessité d’impliquer les principaux groupes d’intérêt dans
leur gestion.
À cet effet, une série de réflexions et d’études d’appui à la planification stratégique pour un développe-
ment durable du secteur forestier ont été conduites au lendemain de la CNUED (RIO ; 1992), en particulier :
– L’inventaire forestier national (1994),
– Plan national d’aménagement des bassins versants (1995),
– Étude nationale sur les aires protégées (1995),
– Plan directeur de reboisement (1996),
– Actes du Colloque national sur les forêts (1996),
– Plan national de la biomasse-énergie (1998),
– Plan directeur pour la prévention et la lutte contre les incendies de forêts (2001).
De même une série d’expériences innovantes dans la préparation, les montages institutionnels et finan-
ciers, les approches de mise en œuvre et de partenariat avec les populations et les ONG ; ont été lancées
dans le cadre de projets d’aménagement de bassin versants (Sidi Driss, O. Lakhdar, O. Msoun), d’aires proté-
gées (Sous-Massa, Toubkal, Tazzeka, Sidi Boughaba) et de développement intégré des zones forestières et
périforestières (Chefchaouen, Ifrane).
Les réflexions, les études et les expériences menées constituent les fondements de la politique forestière.
Elles ont permis de définir un ensemble d’objectifs opérationnels à moyen terme et à long terme en mettant
en relief les éléments suivants :
(i) l’importance de l’espace forestier et l’ampleur des moyens à mettre en œuvre pour sa sauvegarde et la
valorisation de son potentiel environnemental, économique et social ;
(ii) la multiplicité, des acteurs et des décideurs et la diversité de leurs besoins et de leurs intérêts ;
(iii) la similitude, à travers la planète, des contraintes qui pèsent sur la forêt et la diversité biologique et qui
mobilisent la communauté internationale depuis la CNUED (Rio-1992).
458
L’ensemble de ces études a été mis en cohérence et synthétisé pour l’élaboration du Programme Fores-
tier National (PFN) en conformité avec l’Agenda 21 de la CNUED et des processus internationaux sur les
forêts qui en sont issus, et avec l’esprit de la Déclaration de politique générale du Gouvernement (1998). Le
cadre stratégique dans lequel s’inscrit le PFN trouve ses fondements dans les approches suivantes :
(i) Une approche patrimoniale qui vise l’implication et la responsabilisation de tous les acteurs intervenant
dans l’aménagement du territoire et la continuité dans la gestion des écosystèmes forestiers.
(ii) Une approche territoriale qui vise à intégrer les actions dans le cadre d’une dynamique de développe-
ment local.
(iii) Une approche participative et partenariale favorisant l’adhésion des populations usagères, des collecti-
vités locales, de la société civile et du secteur privé au processus d’aménagement et de gestion
durable des espaces forestiers.
Le PFN constitue un outil stratégique de développement durable du secteur forestier à l’horizon 2020. Il
définit les objectifs globaux et détaillés de la stratégie, les programmes prioritaires opérationnels et les
actions prioritaires pour conduire le changement ; il précise aussi les principales conséquences micro-
économiques, juridiques, constitutionnelles financières et organisationnelles des choix proposés ainsi que
les résultats attendus.
À long terme les écosystèmes forestiers devront conserver leur vocation multifonctionnelle en atteignent
les objectifs suivants :
(i) Protection des eaux et des sols : Le taux d’érosion et d’envasement des barrages sera réduit de moi-
tié et les risques de catastrophes naturelles strictement limités.
(ii) Développement socio-économique des populations : Le niveau de vie des populations rurales des
zones périforestières, notamment en montagne, aura cessé de se dégrader et aura comblé sans retard
par rapport au niveau de vie moyen des populations. Les espaces boisés naturels contribueront au
développement économique et social de ces populations dans le cadre d’une gestion locale durable.
(iii) Protection de la biodiversité et de l’environnement : La dégradation de la diversité biologique sera
stoppée. De même, la réintroduction des espèces sera en cours dans les espaces spécialisés gérés à
cet effet. Le potentiel économique de cette richesse écobiologique sera valorisé.
(iv) Production de bois par l’industrie et l’artisanat : La production soutenue de bois d’œuvre et de pro-
duits de qualité (cèdre, thuya, liège) et celle du bois à pâte et panneaux sera intensifiée dans les
espaces spécialisés gérés a cet effet. Les produits seront valorisés par des filières économiques
modernisées et mises à niveau. La valeur ajoutée de ces produits bruts et transformés sera doublée.
(v) Production de services : les principales agglomérations urbaines disposeront d’espaces gérés pour
l’accueil, la détente et les loisirs. Les espaces naturels et forestiers remarquables seront préservés à
des fins éco-touristiques.
459
redécouverte du pluralisme des acteurs et de la multifonctionnalité des écosystèmes est au centre des
enjeux de développement rural.
Cependant, face à la croissance démographique, aux changements économiques nationaux et locaux de la
dernière décennie, la question de durabilité et de développement se pose en terme d’évolution au moment
où les travaux sur la dynamique des systèmes rejettent les mythe de l’équilibre et font place à la variabilité, à
l’incertitude, à la précaution et l’irréversibilité (Babin et al 1977). En effet, l’utilisation des forêts évolue au
rythme des sociétés humaines. Suivant l’époque et la nature de la demande sociale, la même surface fores-
tière peut développer des fonctionnalités différentes.
Aussi la gestion multifonctionnelle viable doit être fondée sur (i) la co-viabilité possible entre les écosys-
tèmes forestiers, les usagers et les modes de vie dont ils sont le support ; (ii) les conditions d’efficiences qui
visent plus à contrôler et piloter, à travers une responsabilisation contractualisée, qu’à interdire et (iii) sur les
enjeux d’une certaine équité entre les acteurs au niveau économique, social et politique.
Le PFN entre dans le cadre des processus de développement durable décrit précédemment. Cadre straté-
gique de planification de la gestion durable des écosystèmes forestiers et périforestiers, il intègre la multi-
fonctionnalité des espaces boisés et constitue un cadre approprié pour la participation de tous les groupes
d’intérêt à la prise de décision et de mise en œuvre. Mais, le PFN, quelle que soit la pertinence de ses
concepts et de ses programmes, ne saurait être une fin en soi, ni être efficace si ses instruments de mise en
œuvre ne le sont pas.
(i) Une politique rurale et de montagne capable de réduire les écarts de niveau de vie et de services col-
lectifs qui pénalisent les populations rurales et de montagne et de mieux valoriser les ressources natu-
relles au profit des populations locales. La mise en œuvre de projets de développement de zones
forestières et péri-forestières devrait conduire à des synergies entre diverses activités agricoles, fores-
tières, touristiques et artisanales appuyées par des infrastructures et des actions de développement
social.
(ii) Une stratégie nationale d’approvisionnement énergétique durable qui garantisse la satisfaction des
besoins des populations dans de bonnes conditions sociales et économiques, notamment dans le
monde rural et réduire, de surcroît, la surexploitation des écosystèmes forestiers et péri-forestiers. Des
actions en faveur de la substitution du bois par d’autres sources d’énergie seront nécessaires ; elles
doivent combiner les incitations fiscales avec des opérations de formation, d’équipement et de vulgari-
sation, ainsi que la réalisation de projets d’aménagements contractuels des ressources forestières.
(iii) Une politique des espaces pastoraux à travers une démarche globale de partenariat volontaire impli-
quant tous les éleveurs usagers. La constitution de groupements d’interlocuteurs fiables est primor-
diale pour l’élaboration et la mise en œuvre de projets de gestion conservatoire et d’exploitation
soutenue des ressources. Ces groupements peuvent évoluer en organismes de gestion de leurs
propres redevances et des investissements de l’État.
460
(iv) Une politique nationale de l’eau qui doit répartir la responsabilité afin de prévenir les risques de
pénuries et garantir à long terme, les besoins en eau du pays. L’aménagement anti-érosif des bassins
versants du Rif et du Moyen Atlas, en particulier, constitue un des objectifs de l’action forestière et de
lutte contre la désertification au profit de la préservation des capacités hydrauliques du Maroc. L’orga-
nisation de multiples actions dans le cadre des agences de bassins versants est suggérée pour pro-
gresser dans la démarche partenariale et focaliser les moyens d’intervention.
(i) Une hiérarchisation des fonctions de la forêt en fonction de l’utilité collective et de la faisabilité tech-
nique et socio-économique. Les fonctions suivantes peuvent être retenues :
– Protection des sols et régularisations des eaux.
– Préservation de la biodiversité et de l’environnement.
– Développement socio-économique des populations rurales.
– Production de bois pour l’industrie et l’artisanat.
– Production de services pour les populations urbaines.
(ii) Une spécialisation des espaces forestiers pour tenir compte localement de leur utilité dominante en
fonction de leur capacité et des besoins ci-dessus hiérarchisés. Il en résulte la concentration et l’optimi-
sation des efforts, la maîtrise des coûts d’investissement et de gestion et la mesure des résultats.
(iii) Des mécanismes de financements flexibles permettant l’optimisation de l’emploi des moyens en
fonction des priorités, la mobilisation de nouveaux moyens dans le cadre de la politique rurale, énergé-
tique et de l’eau, la participation accrue des collectivités locales, du secteur privé et l’appui inter-
national.
(iv) Des innovations institutionnelles favorisant le transfert des responsabilités à travers :
– le transfert de pouvoirs et de moyens au niveau local et la décentralisation accrue pour certaines
actions forestières au niveau régional et local ;
– une démarche participative impliquant la définition de nouvelles relations avec les différents acteurs et
des pratiques de concertation et de contractualisation ;
– le partenariat, en particulier pour les forêts de production ;
– des projets autonomes par les forêts de protection, l’aménagement de bassins versants et la lutte
contre la désertification ;
– la contractualisation pour les forêts péri-urbaines ou vocation touristique.
(v) Le développement de mécanismes économiques permettant une meilleure valorisation des biens et
services marchands et non marchands produits par les écosystèmes forestiers et péri-forestiers à tra-
vers :
– l’amélioration des marchés de bois et des produits autres que le bois (liège, alfa, plantes aromatiques
461
et médicinales, huiles,...) ainsi que de services marchands (droits de chasse, droits de pâturage, éco-
tourisme,...) ;
– la mise en œuvre de procédures permettant une certaine rémunération des « externalités positives »
c’est-à-dire des services rendus à la collectivité par ceux qui gèrent leurs espaces boisés de manière
durable (subventions, allègements fiscaux, contrat gestionnaire-collectivité ou acteurs-bénéficiaires
des avantages non marchands procurés par cette gestion).
(vi) Le développement de méthodes modernes de gestion de l’administration et des organismes pro-
fessionnels notamment ceux qui concernent l’évaluation à priori des aménagements forestiers, des
projets de lutte contre la désertification, leur contrôle et leur suivi ainsi que leur évaluation à posteriori.
Ceci nécessite des outils adéquats (indicateurs de gestion durable, système d’information, etc.,...et la
promotion d’une culture de contractualisation et d’évaluation.
(vii) La refonte progressive de l’ensemble de la législation forestière et de la fiscalité sont nécessaires
afin de substituer au régime patrimonial répressif un corps législatif et réglementaire privilégiant la
dynamique contractuelle avec les populations locales, le développement économique et social, la plu-
ralité des acteurs de gestion, la décentralisation, et la spécialisation. Les textes relatifs à la protection
des écosystèmes et à la diversité biologique devront être réadaptés. Pour améliorer l’efficacité de la
législation forestière, il serait nécessaire de la compléter par une législation spécifique pour le déve-
loppement et la protection des zones de montagne qui sont les premières concernées par les enjeux
forestiers.
462
contre la désertification, mais aussi à l’extérieur, des politiques et des programmes de communication seront
conçus et mises en œuvre.
Dans tous ces domaines de connaissance, la finalité est de mobiliser la recherche pour améliorer
l’approche des plans et programmes d’actions forestières et de lutte contre la désertification. Il n’en reste
pas moins que la coopération internationale est d’un intérêt capital pour mettre en commun le potentiel de
recherche et pallier la relative faiblesse des moyens.
463
Cette création s’inscrit dans le sens des évènements à longue portée (régionalisation, décentralisation,
modernisation des secteurs, lutte contre la pauvreté, aménagement du territoire, charte de l’éducation et de
la formation etc.) qui favorisent l’adoption de nouvelles formes d’organisation en harmonie avec une vision
globale du développement humain et, de surcroît avec le redéploiement du rôle de l’état, l’adaptation et
l’organisation de l’administration.
En matière de structures, l’action principale concerne le recentrage du HCEFLCD sur des missions essen-
tielles qui sont les missions régaliennes. Il s’agit de mission d’autorité : élaboration et contrôle de l’applica-
tion des règles du secteur, et police forestière et de missions de pilotage stratégique du secteur dans son
ensemble : orientations nationales, normatif, innovations et progrès, veille stratégique nationale et inter-
nationale, coopération...
Les missions de gestion opérationnelle ressortent d’une autre catégorie de missions qui ne sont pas fon-
damentales pour le HCEFLCD. Il s’agit, en général de projets et programmes de développement, d’aménage-
ment des ressources et de leur valorisation, de conservation de la biodiversité et de lutte contre la
désertification. Ces missions peuvent le cas échéant, être partagées et sous-traitées à des prestataires pri-
vés et des ONG ou transférables.
Conclusion
La gestion durable des ressources naturelles, en général, et des ressources forestières en particulier, est
la conjonction, dans la mesure du possible de l’optimum écologique, l’optimum économique et l’optimum
social, c’est-à-dire, concilier la croissance et les conditions qui en assurent la pérennité : utilisation rationnelle
des ressources, équité sociale dans la répartition des richesses, respect des équilibres macro-économiques
etc. Ceci implique non seulement la gestion des ressources mais aussi la gestion de la qualité de la vie.
La population maintient une relation étroite avec le milieu naturel environnant. Sa dépendance vis à vis des
espaces boisés est très forte, et l’intérêt présenté par les forêts, d’une manière générale, ou leurs biens et
services, en particulier, pour les populations rurales est très diversifié : le bois de construction et les combus-
tibles ligneux pour les besoins domestiques, la nourriture pour le bétail et la stabilité de l’environnement et sa
protection contre l’érosion pour permettre une agriculture continue. Le milieu boisé se trouve ainsi intégré au
fonctionnement des sociétés rurales et ne peut être, de ce fait, dissocié des autres modes d’utilisation de
l’espace par la population.
Cependant, face à la croissance démographique, aux changements économiques nationaux et locaux de la
dernière décennie, la question de durabilité et de développement se pose en terme d’évolution au moment
où les travaux sur la dynamique des systèmes rejettent les mythe de l’équilibre et font place à la variabilité, à
l’incertitude, à la précaution et l’irréversibilité (BABIN et al. 1977). En effet, l’utilisation des forêts évolue au
rythme des sociétés humaines. Suivant l’époque et la nature de la demande sociale, la même surface fores-
tière détenant des potentialités multiples peut développer des fonctionnalités différentes.
Aussi la gestion multifonctionnelle viable doit être fondée sur :
(i) la co-viabilité possible entre les écosystèmes forestiers, les usagers et les modes de vie dont ils sont le
support ;
(ii) les conditions d’efficiences qui visent plus à contrôler et piloter, à travers une responsabilisation
contractualisée, qu’à interdire, et
(iii) sur les enjeux d’une certaine équité entre les acteurs au niveau économique, social et politique.
464
Les processus de développement durable décrits précédemment, les orientations pour l’action relatives
aux écosystèmes forestiers périforestiers formulées intègrent pluralisme,durabilité et développement et
constituent un cadre approprié pour la participation de tous les groupes d’intérêt à la prise de décision et de
mise en œuvre. Mais, quelle que soit la pertinence de ces concepts et de ces programmes, ils ne sauraient
être une fin en soi, ni être efficace si les instruments de mise en œuvre ne le sont pas. La nécessité d’une
dynamique et d’itinéraires nouveaux de développement s’impose à l’évidence.
465
Références bibliographiques
Anon, 1993. Programme d’action Forestier Méditerranéen : Commission des questions Forestières méditer-
ranéennes « Sylva mediterranea » FAO. Rome ; 82 p.
Anon, 1995 (a). Étude sur les Aires Protégées. Rapport synthèse et définition d’une stratégie pour la mise
en œuvre. Administration des Eaux et Forets et de la Conservation des Sols. Rabat (Maroc) ; 110 p.
Anon, 1995 (b). Plan National d’Aménagement des Bassins Versants. Rapport de synthèse : Administration
des Eaux et Forêts et de la Conservation des Sols. Rabat (Maroc) ; 58 p.
Anon, 1995 (c). Stratégie National pour la Protection de l’Environnement et le Développement Durable. Pro-
jet PNUD/UNESCO : MOR/90/001. Ministère de l’Environnement. Rabat; (Maroc) ; 128 b.
Anon, 1996. Actes du Colloque National sur les forêts. Ifrane 21-23 mars 1995.
Administration des Eaux et forêt et de la conservation des Sols. Rabat (Maroc)
Anon, 1997 (a). le Code des Investissements Agricoles. Bilan et propositions pour le secteur forestier. Admi-
nistration des Eaux et forêts et de la Conservation des Sols. Rabat (Maroc) ; 54 p.
Anon, 1997 (b). Plan directeur de Reboisement. Administration des Eaux et forets et de la Conservation des
Sols. Rabat (Maroc), 118 p.
Anon, 1998. Plan National de la Biomasse-Énergie. Centre de Développement des Énergie Renouvelables
(CDER). Marrakech, (Maroc), 98 p.
Anon, 1999 (a). Inventaire forestier National. Rapport de synthèse. Ministère Chargé des Eaux et Forêts.
Rabat (Maroc). 37 p.
Anon, 1999 (b). Programme Forestier National. (Vol. I à IV). Ministère Chargé des Eaux et forêt Rabat
(Maroc).
Anon, 1999 (c). Stratégie 2020 de Développement Rural. Ministre de l’Agriculture, du Développement Rural
et des Pêches maritimes Rabat, (Maroc).
Anon, 2000. Définition d’une politique de montagne au Maroc. Atelier relatif à la préservation et la gestion
durable des ressources naturelles. Rapport de synthèse. Ministère Chargé des Eaux et Forêts-Rabat
(Maroc) ; 80 p.
Anon, 2001 (a). Programme d’Action National de Lutte Contre la Désertification. Ministère de l’Agriculture,
de Développement rural et des Eaux et Forets. Rabat (Maroc). 136 p.
Anon, 2001 (b). Plan Directeur pour la Prévention et la Lutte Contre les Incendies de forêts au Maroc. Minis-
tère Chargé des Eaux et Forêts. Rabat (Maroc), 87 p.
Anon, 2002 (a). L’aménagement des bassins versants, une composante incontournable de la gestion
durable des ressources en eau. Département des Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification.
Rabat (Maroc) ; 23 p + annexes.
Anon, 2002 (b). Plan d’action Environnemental. Ministère de l’Aménagement du territoire, de l’urbanisme de
l’Habitat et de l’Environnement. Rabat Maroc ; 102 p.
Babin D. et al., 1997. Médiation patrimoniale et gestion subsidiaire. Document de travail par l’atelier :
« Managing Pluralism for sustainable forestry and rural développement » CIRAD, Montpellier (France) ;
32 p.
Benzyane M., Naggar M. et Lahlou B., 2002. L’aménagement des forêts sud méditerranéennes : quelle
approche ? Forêt medit. T. XXIII, no 3 ; pp. 201-210.
De Montgolfier J. et al., 2002. Les espaces boises méditerranéens. Les Fascicules du Plan Bleu. Edit
Economica. Paris; 192 p.
Dubois J.J. et al., 1999. Les milieux forestiers. Aspects géographiques. Edit SEDES; 336 p.
466
Hmamouchi M., 2000. La filière plantes médicinales et aromatiques : étude de l’opportunité d’investisse-
ment dans le sectiv PMA. Faculté de Médecine et de Pharmacie. Rabat. (Maroc) 53 p + annexes.
Lamb H.F. et al., 1989. An 18000 years record of végétation, lake-level and climatic change from Tignelma-
mine, Middle Atlas, Marocco. Journal of Biogeog, 16 : 65-74.
Marchand H. et al., 1990. les forêts méditerranéennes. Sujeux et perspectives. Les Fascicules du Plan Bleu.
Edit Economica. Paris, 108 p.
Mhirit O., 1993. Biodiversité et conservation in situ au Maroc. Réunion du Groupe « Conservation in situ et
Biodiversité » Réseau des ressources phylogénétiques pour le zone de l’Asie de l’Ouest et de l’Afrique du
Nord. 4-8 oct. 1993. Izmir (Turquie) ; 25 p.
Mhirit O., 1995. Étude de cas sur les tendances en recherche forestière en Afrique. Nouveaux partenariats.
(Cas du Royaume du Maroc.) FAO. Rome; p. 31 + 8 annexes.
Mhirit O., 1996. La conservation et la gestion durables des forêts marocaines. Le chemin parcouru depuis
Rio. Réunion du Groupe Intergouvernemental spécial sur les forêts. Commission de Développement
Durable. Genève 9. 20 sept 1996, 29 p.
Mhirit O., 1999. Les forêts méditerranéennes : espace écologique, richesse économique et bien social Una-
sylva. FAO no 197; pp. 3-16.
Mhrit O., 2000. Développement durable. Quelle stratégie pour le gestion les ressources naturelles au Maroc.
Colloque international des chaires maghrébines UNESCO-Gas-Natural « Le Développement durable du
Maghreb, L’ouverture sur la Méditerranée et la valorisation du patrimoine écologique, humain et culturel.
Rabat 27-29-01-2001
Mhirit O., 2002. La gestion durable des écosystèmes forestiers marocains. Quelles implications pour le
recherche forestière ? Rev. Geo. Maroc (Numéro spécial) Vol. 20; p. 47-61.
Mhirit O., 2003. Tendances Actuelles de l’enseignement et de la recherche en matière forestière au Mag-
hreb. XIIe Congres Forestier Mondial, Quebec (Canada), 21-23 Sept. 2003.
Mhirit O., 2004. Typologie des écosystèmes forestiers méditerranéens et leur dynamique. Cours approfondi
« Critères pour la gestion multifonctinonelle de la forêt méditerranéenne. Solona Lleida (Espagne),
29 mars-2 avril 2004. Institut Agronomique méditerranéen de Zaragoza.
Mhirit O. et Yassin M., 1993. À propos de l’utilisation des données climatiques en matière de gestion et de
conservations des forêts. Hommes, Te+rres et Eaux. Rev. Maroc. Scien. Agro. et Veter. Vol. 23, no 93;
p. 59-71.
Mhirit O. et Maghnouj M., 1997. Stratégie de conservation des ressources génétiques forestiers au Maroc.
« Ressources phytogénétiques et développement durable. Ouvrage edit. par A. Birouk et Moh. Rejdali
« actes Éditions-Rabat ; p. 123-138.
Mhirit O. et al., 1999. Le Grand Livre de la forêt marocaine. Edit. MARDAGA. (Belgique) ; 280. p.
Poupon J.E., Mhirit O. et Aichouni M., 1986. Plan national de Lutte Contre la Désertification. Projet FAO/
TCP/MOR/4506 (A). Élaboration d’un plan national de Lutte Contre la Désertification. Ministère de l’Agri-
culture et de la Reforme Agraire Rabat. (Maroc) ; 150 p.
Reille M., 1976. Analyse pollinique de sédiments postglaciaires dans le Moyen atlas et le Haut atlas maro-
cains ; premiers résultats. Écol. Medit., Marseille, 2 : 153-170.
Reille M., 1977. Contribution polllénalytique à l’histoire holocène de la végétation des montagnes du Rif
(Maroc septentrional). La recherches Française sur le Quaternaire », Suppl Bull. A.F.E.Q, 50 : 53-76.
Zagdouni L. et al., 2004. Plate-forme pour l’élaboration d’un projet d’organisation des service centraux du
Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la Désertification. HCEFLCD. Rabat (Maroc).
467
468
Ressources minérales
Introduction ............................................................................................................ 471
469
AMINA BENKHADRA
AHMED EL ABBAOUI
470
Le secteur minier constitue une composante essentielle dans le développement économique et social du
Royaume et joue un rôle important dans l’économie nationale. Cette importance est perceptible à travers sa
part dans le Produit Intérieur Brut, dans les exportations du pays (près de 80 % en volume et 20 % en valeur)
et ses retombées bénéfiques sur le développement régional et rural à travers le nombre d’emplois directs et
indirects créés, la construction d’infrastructures économiques et socio-éducatives et le désenclavement des
régions souvent difficilement accessibles par la construction de pistes et de routes sans oublier ses effets
d’entraînement au niveau d’autres secteurs tels que le secteur des transports (routier, ferroviaire et mari-
time) et celui de l’énergie électrique.
La place que le secteur minier a toujours occupée, s’explique d’abord par l’existence d’un contexte géolo-
gique extrêmement varié dans la mesure où il recèle des terrains appartenant à tous les âges et à toutes les
séries géologiques, un contexte qui a été marqué par une succession de cycles orogéniques allant du Pré-
cambrien au Tertiaire, ce qui a favorisé la genèse de plusieurs types de gisements :
– Phosphates (Ouled Abdoun, Gandour, Meskala, Oued Dahab)
– Plomb/Zinc (Pays des Horsts – région de Marrakech – Haute Moulouya et Haut Atlas),
– Cuivre (Anti-Atlas, Haut Atlas, les Jebilets),
– Argent (Imiter, Zgounder, Igoudrane et dans certains gisements de plomb/zinc),
– Or (,Akka Tiouit, Boumadine ...)
– Autres substances minérales : Manganèse, antimoine, cobalt, fer, tungstène, molybdène, étain, stron-
tium...,
– Roches et minéraux industriels : fluorine, barytine, sel gemme, bentonite, gypse, perlite, kaolin, feld-
spath, argiles réfractaires, diatomite, sables siliceux, andalousite,
– Combustibles solides : Anthracite (Jerada), Schistes bitumineux (près de 6 milliards de TEP entre Timah-
dit et Tarfaya).
Ce contexte géologique favorable a permis depuis plusieurs siècles le développement d’une activité
minière à l’échelle artisanale dans de nombreuses régions du Royaume comme l’attestent les nombreux
restes de travaux des anciens.
Le rôle que le secteur minier joue dans l’économie nationale s’explique ensuite par la politique minière sui-
vie par notre pays et le début de l’exploitation moderne au début du siècle dernier. En effet, notre pays a été
un des premiers pays dans le monde à avoir réglementé l’activité minière. Dès 1914, un Dahir minier était
promulgué, cette promulgation sera suivie quelques années plus tard par celle relative à la création d’un
Service Géologique et de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) dès 1920 ainsi que la création en
décembre 1928 du Bureau de Recherches et de Participations Minières (BRPM).
Conscients de l’importance du secteur minier tant sur le plan économique que sur le plan social, les Pou-
voirs Publics ont depuis l’indépendance du pays en 1955 entrepris une série d’actions qui visent à promou-
voir davantage ce secteur vital et à lui assurer les conditions adéquates pour qu’il joue pleinement son rôle
dans un environnement international caractérisé par une vive concurrence à tous les niveaux : attrait des
471
investissements dans l’exploration, transformation et valorisation des substances minérales, recherche de
débouchés.
Le présent document se fixe comme objectif de dresser un bilan du développement minier de notre pays,
il passera en revue dans une première partie les étapes historiques de ce développement, les différentes
actions entreprises depuis l’indépendance du pays par les Pouvoirs Publics sur le plan réglementaire ainsi
qu’au niveau des mesures incitatives pour encourager les investissements dans le secteur minier. Dans une
seconde partie, le document traitera de la contribution de l’industrie minière nationale dans la protection de
l’environnement.
Le Maroc, pays de longue tradition minière connaît une activité intense dans ce domaine depuis plusieurs
siècles. Cette activité s’explique par la richesse et la diversité de ses ressources minérales. Ainsi, le sous sol
national renferme les 3/4 des réserves mondiales de phosphates, le Maroc est également le 3e produc-
teur et 1er exportateur de cette substance dans le monde, il est également le 1er exportateur mondial
d’acide phosphorique avec une part de 50 % du marché international.
Le Maroc figure également parmi les grands producteurs mondiaux pour certaines substances minérales,
c’est ainsi qu’il occupe le rang de 1er producteur d’Afrique et 14e dans le monde pour l’argent, il est égale-
ment 1er producteur de plomb en Afrique et 11e dans le monde, 2e producteur d’Afrique et 16e dans le monde
pour le zinc et 4e producteur mondial de barytine.
L’importance de l’activité minière pour notre pays est perceptible à travers plusieurs indicateurs :
– Tout d’abord, la part du secteur dans le PIB : elle est en moyenne de 3 % si on prend en considération
les produits miniers uniquement et de 6 % si on inclut également les produits transformés.
– La contribution du secteur dans les exportations nationales a été de 16,5 % en valeur et 75 % en volume
(chiffres de l’année 2003).
– Le secteur contribue à hauteur de 1,5 milliards de dirhams dans les recettes du Trésor public sous
forme d’impôts et de taxes.
– Le secteur minier est également un grand utilisateur des infrastructures de base du pays, il assure en
effet :
R 70 % du trafic ferroviaire et routier ;
R 75 % du trafic portuaire ;
R 20 % de la consommation d’énergie.
– Le secteur a employé en 2003 près de 35.500 personnes. La masse salariale, y compris les charges
sociales, distribuée par les sociétés minières est estimée à 5 milliards de dirhams. Au total, on peut
estimer à plus de 1,5 millions de personnes concentrées autour des centres d’exploitation minière
(Khouribga, Youssoufia, Ben Guerir, M’Rirt, Jerada, Tinghir, Touissit, Boubker, etc ....).
– Les investissements réalisés en 2003 se sont élevés à 1,917 milliards de dirhams dont 222 millions de
dirhams (11,6 %) pour la recherche et l’exploration.
– Durant le même année, l’activité minière qui a une vocation essentiellement exportatrice, a réalisé un
chiffre d’affaires à l’exportation de 14 milliards de dirhams dont la majeure partie revient aux phos-
phates et ses dérivés.
472
– Enfin, le secteur minier joue un rôle capital dans le désenclavement des zones reculées du pays et parti-
cipe au développement du monde rural qui dépend presque entièrement de l’agriculture qui est elle-
même très dépendante des aléas climatiques.
Le contexte géologique du Maroc a favorisé depuis plusieurs siècles le développement d’une activité
minière à l’échelle artisanale dans de nombreuses régions du Royaume comme l’attestent les nombreux
restes de travaux des anciens.
La production les métaux précieux et du plomb a connu un essor remarquable tout au long du Moyen Age
et notamment durant la période allant du XIe au XIVe siècles. Les principaux métaux produits à cette époque
sont :
– L’argent extrait des mines d’Imiter et de Zgounder,
– Le plomb argentifère de Jbel. Aouam.
– Le cuivre de l’Anti-Atlas (Tazalaght)
– Le fer du Moyen Atlas et du Rif (Nador).
– L’or exploité dans la région de Taza (Tazekka).
– Le sel gemme exploité dans les environs de Fès et qui s’échangeait à poids égal avec l’or du « Soudan »
(Ghana).
– L’étain dans la région centrale du Moyen Atlas (Oulmès)
473
Il semble bien que dès le XVIe siècle, le Maroc n’était plus le grand pays minier qu’il était même si les Saâ-
diens ont encore exploité quelques mines de cuivre dans l’Anti-Atlas et d’étain dans la région d’Oulmès (Al
Karit).
L’activité minière s’est poursuivie avec la production de cuivre jusqu’en 1920 à travers des exploitations
artisanales dans l’Anti Atlas et le Haut Atlas.
Le Maroc médiéval qui a contrôlé le reste de l’Afrique du nord, la péninsule ibérique et la route de
l’or vers le Ghana a fait figure de grand pays minier pendant plusieurs siècles.
La totalité de la production minière de l’époque a fait l’objet de transformation sur les sites miniers :
– Jbel Aouam (Pb, Ag, et Fer) Khénifra
– Imiter (Ag) et Boumaadine (Pb, Ag, Au) J. SAGHO
– Zgounder (Ag) J. Siroua
– Tazalaght (Cu) Anti-Atlas
– Plomb argentifère de la région orientale du Royaume (Sidi Lahcen, Touissit, et Sidi Boubker).
Les mines d’argent ont été ainsi littéralement « vidées » pendant le Moyen Age où la demande en métaux
précieux était forte (frappe de monnaies autour de la méditerranée et fabrication de bijoux).
Les travaux ont dû être abandonnés lorsque les moyens ont fait défaut pour les poursuivre.
L’environnement des mines médiévales a été marqué par :
– Une intense déforestation autour des sites miniers comme :
R Jbel Aouam (Khénifra)
R Imiter (SAGHO)
R Les mines de cuivre de l’Anti Atlas (TAZALAGHT, OUANSIMI).
R Sidi Lahcen (TAOURIT)
– Une pollution des cours d’eau et des sols par l’extraction du minerai brut et la métallurgie. (On estime à
plus de 250 000 t de Plomb et 280 000 kg d’argent la production tirée des filons de l’Aouam par les
« Anciens » entre le IXe et le XVIe siècles).
– Des relations très tendues entre les populations environnantes et les opérateurs miniers qui ont
construit de véritables forteresses pour mieux protéger leur production de métaux précieux et de cuivre
(exemple d’Ighrem Aoussar à J. Aouam, Tazalaght, ...).
Bien avant l’instauration officielle du protectorat français sur le Maroc en 1912, des géologues européens
avaient déjà repéré certains indices notamment la présence de phosphates en 1905 dans la région de Moga-
dor et aux environs d’Imintanoute. La présence d’importantes richesses minières non seulement de phos-
phates mais également de nombreuses autres substances minérales expliquent le développement et l’essor
qu’a connus l’activité minière au Maroc dès le début du XXe siècle.
474
2.2.1. Cadre institutionnel
L’activité minière sous le protectorat a été marquée par les faits majeurs suivants :
– Publication du Dahir minier de 1914
– Création de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) en 1920 avec le monopole de l’exploration, l’exploi-
tation et la commercialisation des phosphates.
– Création du Service des Mines et de la Carte Géologique en 1921.
– Création du Bureau de Recherches et de Participations Minières (BRPM) en 1928 pour développer les
autres substances minières et énergétiques en partenariat avec les opérateurs privés. À la fin du protec-
torat cet organisme avait des participations dans plus de 30 sociétés.
– Promulgation du dahir du 16 avril 1951 portant règlement minier au Maroc.
2.2.2. Investissements
Les investissements réalisés dans le secteur minier pendant la période du protectorat sont estimés à
116 milliards de Francs, soit 7,5 % de l’ensemble des investissements publics et privés réalisés durant la
période allant de 1920 à 1955.
2.2.3. Infrastructures
L’administration du protectorat ayant opté pour l’exportation de la quasi-totalité de la production minière
vers la métropole, a pris en charge la réalisation des infrastructures nécessaires à l’exploitation et à l’écoule-
ment de ces ressources :
– Construction d’un réseau électrique ;
– Construction d’un réseau ferroviaire (ligne Casa-Khouribga et Casa-Youssoufia-Safi pour les phosphates,
Oujda-Jerada-Bou Arfa pour le Charbon et le Manganèse).
– Construction d’infrastructures portuaires (Casablanca, Safi, Mehdia, Kénitra).
2.2.4. Production
L’exploitation des richesses minières nationales sous le protectorat a été orientée uniquement en
fonction des besoins de la France (Phosphates, manganèse, plomb, cobalt, etc.)
Les différentes substances exploitées durant cette période sont données dans le tableau ci-après :
475
Tableau 2 : Évolution de la production des principaux minerais (1920-1955)
En tonnes
Années
Phosphates Charbon Fer Manganèse Plomb Zinc Cobalt
1920 – – – 4 375 – – –
1925 715 000 – – 340 – 1 000 –
1930 1 828 000 980 45 15 800 7 400 – –
1935 1 358 000 52 600 – 24 800 193 5 300 4 200
1939 1 500 000 115 000 320 000 75 000 35 400 15 400 5 200
1945 1 600 000 178 000 100 45 000 15 400 22 700 895
1950 3 870 000 368 000 319 000 287 000 65 800 78 000 3 510
1955 5 328 000 467 000 490 000 411 000 122 000 6 440
La production minière (hors phosphates) était assurée par une dizaine de sociétés privées (Plomb,
Manganèse, Fer, Charbon, Cobalt, etc) qui avaient obtenu des concessions dans des régions à fort
potentiel minier avec des minéralisations affleurantes, donc faciles à exploiter :
– Zellidja à Sidi Boubker : Plomb-Zn
– CRAM à Touissit : Plomb-Zn
– Penarroya à Aouli-Mibladen : Plomb
– MOKTA à Imini : Manganèse
– ONA à Bouazzer : Cobalt
– MINAS DEL RIF à Nador : Fer
Ces grandes sociétés privées sont restées dans leur domaine minier traditionnel, sans entamer de
recherches sérieuses dans d’autres régions métallogéniques du Royaume. Elles étaient contrôlées par
des groupes bancaires très puissants :
– Banque de Paris et des Pays Bas,
– Banque de l’Union Parisienne,
– Banque J. WALTER
– Groupe Edmond de Rothschild (Penarroya, Mokta)
Les minerais extraits des gisements marocains étaient destinés essentiellement à la couverture des
besoins de l’industrie française. De ce fait, la valorisation au niveau local n’a porté que sur quelques unités de
tailles très modestes :
– Fonderie de Plomb de l’Oued El Heimer (capacité : 15000 t de Pb) ;
– Unité de Super Phosphates de Casablanca (2 % de la production de 1955).
On peut distinguer deux grandes périodes après l’indépendance, la première qui va de 1956 jusqu’au
milieu des années 80 a été caractérisée par une forte implication de l’État dans tous les secteurs de l’écono-
476
mie nationale et tout particulièrement le secteur minier ; la seconde période va grosso modo de 1985 à nos
jours et qui marque une redéfinition du rôle de l’État.
2.3.1. De 1956 à 1985 : Une forte implication de l’État et une croissance du secteur
Dès le recouvrement de l’indépendance, l’État s’est attelé à promouvoir le secteur minier national à travers
une série de mesures d’ordre institutionnel, réglementaire et incitatif (codes des investissements miniers).
Le secteur minier a été très tôt réglementé.
Les principaux objectifs retenus par les Pouvoirs Publics dans les différents plans pour le développement
de l’industrie minière ont été :
– La mise en place d’un programme de recherche et d’exploration avec un double objectif :
R Accroître les réserves des mines existantes pour la reconnaissance des extensions des gisements
connus ;
R Découvrir et mettre en production de nouveaux gisements.
– La valorisation des minerais ;
– La recherche de débouchés stables et rémunérateurs aux produits miniers exportés
Mesures d’accompagnement
Pour la réalisation de ces objectifs, l’État a mis en place des mesures d’accompagnement dans les
domaines législatif, fiscal (code de 1973) et financier prévoyant un certain nombre d’avantages et d’incita-
tions. Les principales actions de l’État au cours de cette période sont :
Il y a lieu de signaler que le secteur minier national s’était doté dès 1940 d’une association professionnelle
qui a connu les appellations successives suivantes : « Groupement des Industries Minières du Maroc »,
« Chambre Syndicale des Industries Minières du Maroc », « Association des Industries Minières du Maroc »
en 1957, et « Fédération de l’Industrie Minérale » depuis 1998.
477
Sur le plan des mesures incitatives
– Il s’agit des codes des investissements miniers du 13 Août 1977 et du 29 Décembre 1986 prévoyant
une série de mesures incitatives en faveur des investissements dans le secteur minier ;
Investissements
Parallèlement à ces mesures, l’État a du consentir d’importants efforts sur le plan financier pour mener les
recherches de nouvelles substances minérales. Cette mission qui est assurée par le BRPM depuis sa créa-
tion en 1928 a abouti à la découverte de la presque totalité des gisements métalliques de notre pays. Plu-
sieurs de ces gisements ont pu être découverts grâce aux vestiges des anciens et d’autres étaient des
gisements en sub-surface.
Pour pallier à la faiblesse des investissements privés dans l’activité minière, l’État à travers le BRPM a dû
également s’investir dans l’exploitation et la valorisation minières. Les missions du BRPM ont ainsi été élar-
gies par le Dahir de 1976 à l’exploitation et la valorisation des gîtes minéraux autres que les phosphates en
plus des substances énergétiques (charbon, pétrole, uranium, schistes bitumineux, ...).
Ceci s’est traduit pour le BRPM par un portefeuille de participations comprenant en 1976 près d’une tren-
taine de filiales et sociétés en participation.
478
COMABAR JBEL IGHOUD BARYTINE 50 %
ADRAR – PLOMB ET ZINC 50 %
BRPM-APEX GHARB GAZ 50 %
SOMIMA OUANSIMI & TALAAT CUIVRE 50 %
SOMETNA NAOUR CUIVRE 50 %
SEPYK KETTARA PYRRHOTINE 47,3 %
SACEM IMINI MANGANESE 47,14 %
S.M.B.S BOUSKOUR CUIVRE 41 %
SOMIFER BLEIDA CUIVRE 40 %
SAMINE EL HAMMAM FLUORINE 40 %
C.T.T BOU AZZER COBALT 35 %
SOMAS MOHAMMEDIA STOCKAGE GPL 30 %
P.Z OUED HEIMER PLOMB 26 %
S.M.A M’RIRT PLOMB ET ZINC 24,29 %
SATAS AGADIR TRANSPORT 22,74 %
SNEP MOHAMMEDIA CHLORE-SOUDE 15 %
SONASID NADOR ACIER 10 %
479
Production
Le tableau ci-dessus montre que la forte implication de l’État dans le développement des phosphates et du
charbon a donné de bons résultats durant la période allant de 1960 à 1985 :
– Triplement de la production des phosphates ;
– Doublement de la production du charbon ;
– Net accroissement des investissements dans l’exploitation et la valorisation du plomb ;
– Doublement de la production de l’argent.
La forte baisse de la production de manganèse s’explique par la chute des cours du manganèse métallur-
gique et par l’épuisement des réserves de certains gisements (Bouarfa, Tiouine).
Depuis l’Indépendance en 1956 jusqu’en 1985, 25 mines ont été ouvertes pour l’exploitation de produits
miniers autres que les phosphates.
L’exploitation des mines a été assurée en grande majorité par des sociétés à forte participation étatique
(filiales du BRPM).
Durant la même période, 23 mines ont été fermées pour des raisons économiques ou pour épuisement
des réserves.
480
Actions et réformes
L’engagement de l’État sur la période précédente avait non seulement donné lieu à la découverte de nou-
velles mines mais également contribué à l’émergence de projets dont la rentabilité n’avait pas été suffisam-
ment évaluée. Ainsi certains projets donneront lieu à des développements difficiles, cas SEFERIF (Fer
Nador), CdM (Charbon de Jérada), SSM (Sel de Mohammedia), SEPYK (Pyrrothine Kettara) et un endette-
ment de l’État.
Pour ces projets où la responsabilité est partagée entre différents intervenants, il a fallu trouver les solu-
tions appropriées avec accords spécifiques de règlements des dettes, désengagement de l’État, assainisse-
ment et restructuration.
Pour le secteur minier, l’État a entrepris un certain nombre d’actions pour donner une nouvelle impul-
sion à ce secteur. Parmi ces actions, on peut citer :
– L’assainissement des entreprises publiques relevant du secteur,
– La privatisation à partir de l’année 1993 de certaines sociétés minières et métallurgiques dans les-
quelles l’État avait des participations par le biais du BRPM, il s’agit des entités figurant au tableau 6.
Cette opération qui a permis au Trésor Public d’engranger environ un milliard de dirhams a réduit de moi-
tié les produits du portefeuille du BRPM.
– La réalisation durant la période 1995-1997 de l’étude du Plan de Développement Minier (PDM).
Cette étude financée par un don du Fonds Africain de Développement (FAD) de la Banque Africaine de
Développement (BAD) a permis de tracer une nouvelle stratégie de la politique de développement
minier au Maroc et de définir les mesures de réaménagement institutionnel pour donner plus d’efficacité
au secteur tout en allégeant les charges supportées par le budget de l’État et à rendre le secteur minier
plus attractif pour les investisseurs privés et étrangers.
– Le lancement du Plan National de Cartographie Géologique (PNCG) visant une couverture totale du
pays à l’horizon 2010. Le lancement de ce plan ambitieux en 1996 s’explique par la nécessite d’une cou-
verture intégrale du pays en cartes géoscientifiques. Les effets attendus du PNCG sont les suivants :
R L’accélération du rythme de production de cartes de différentes catégories,
R La modernisation du stockage, de la gestion et de l’exploitation des données géoscientifiques ;
R L’orientation de la recherche minière et pétrolière et l’incitation des investissements dans ce domaine.
R La protection de l’environnement et à l aménagement du territoire.
Les objectifs globaux du PNCG peuvent se résumer ainsi :
481
R Cartographie géologique à l’échelle 1 / 50 000 (zones à potentialités minières) et 1 / 100 000 (zones
des bassins sédimentaires) ;
R Cartographie géochimique des zones à potentialités minières (échelle 1/100 000.)
R Couverture géophysique à méthodes combinées : zones minières en héliporté et zones des bassins en
aéroporté ;
R Cartographie et études thématiques : gîtes minéraux, roches industrielles, aménagement du terri-
toire... (selon les besoins) ;
R Introduction des nouvelles technologies en matière de cartographie (SIG, Télédétection...).
– La promulgation de la loi-cadre No 18-95 du 8 novembre 1995 formant charte de l’investissement ;
– L’instauration de la Provision pour la Reconstitution de Gisement (PRG) qui donne à toute entre-
prise minière la possibilité de constituer une provision en franchise de l’impôt sur les sociétés, et dans la
limite de 50 % de son bénéfice fiscal ou 30 % de son chiffre d’affaires.
– Le lancement de la refonte du règlement minier : le nouveau texte prévoit notamment l’introduction
d’autorisations d’exploration sur des périmètres plus grands, l’institution d’un contrôle à posteriori,
l’extension du règlement minier à certaines substances aujourd’hui sous le régime des carrières telles
que la calcite, le marbre et la perlite. Ce nouveau code est toujours en discussion.
– Le développement des actions de partenariat avec le secteur privé. Des actions de promotion sont
menées tant par le Ministère de l’Énergie et des Mines et par le BRPM en vue d’attirer les opérateurs
privés à investir dans le développement des sites miniers existants mais également en amont, au niveau
de la recherche minière.
Production
Années
Produits miniers 1987 1989 1992 1995 1998 2001 2003
Phosphates 21 270 18 067 19 146 20 314 22 644 21 983 22 877
Charbon 634 504 576 649 269 2 –
Plomb 104 93 105 102 115 111 55
Zinc 19 34 42 153 216 174 136
Cuivre 45 44 38 40 32 19 17
Fer 279 176 85 47 9 8 6
Cobalt 2 1 4 5 3 15 16
Manganèse chimique 42 33 49 31 28 14 –
Sel 130 140 164 173 126 234 237
Fluorine 78 105 85 16 105 96 81
Barytine 127 403 401 289 353 467 358
Autres 62 69 50 75 105 171 120
Total produits miniers 22 792 19 669 20 745 21 894 240 014 23 279 23 903
482
– La forte augmentation de la production de zinc entre 1993 et 2003 grâce à la mise en production de la
mine de Hajar (CMG), ce qui a permis de doubler nos exportations de métaux de base (Pb, Zn, et Cu).
– La multiplication par trois de l’extraction de la barytine entre 1987 et 2003 grâce à la mise en production
du gisement de Zelmou par la COMABAR, filiale du BRPM.
Produits Miniers Transformés 1987 1989 1992 1995 1998 2000 2003
Dérivés Phosphatés 2 992 2 739 3 839 4 704 3 915 4 370 4 601
– Acide Phosphorique 1 888 675 1 658 2 624 1 783 1 832 1 962
Engrais solides 1 064 2 064 2181 2 080 2 132 2 441 2 542
Autres Produits Dérives 66 66 71 65 66 68 73
– Plomb 62 63 68 62 62 67 61
– Mattes de Cuivre 2 2 2 2 3 1,5 3
– Autres 1,838 0,78 0,85 0,80 0,70 6,7 8,8
– Argent (t) 162 220 151 204 306 280 200
Total Produits Transformés 3 058 2 805 3 910 4 769 3 981 3 042 4 674
Tableau 9 : Investissements miniers de 1987 à 2003 (hors produits transformés) (en milliers de DH)
Années Recherche (a) Exploitation Valorisation Infrastructures Total. (b) a/b × 100
et social
1987 147 582 465 917 733 000 97 872 1 444 641 9,7 %
1988 201 092 619 552 751 098 44 557 1 616 299 12,4 %
1989 253 891 367 309 27 600 279 221 948 021 26,8 %
1990 254 458 499 788 235 627 90 179 1 080 062 23,5 %
1991 166 885 418 565 – 152 119 737 569 22,6 %
1992 295 000 467 000 51 000 135 000 948 000 31,1 %
1993 265 000 1 275 000 81 000 25 700 1 646 700 16,0 %
1994 263 298 1 193 647 6 412 121 323 1 584 680 16,6 %
1995 266 423 402 120 117 099 77 309 862 951 30,8 %
1996 310 182 337 128 156 574 117 428 921 312 33,3 %
1997 215 442 530 872 265 150 211 544 1 223 008 17,6 %
1998 212 028 487 467 1 523 484 65 688 2 288 667 9,6 %
1999 321 461 701 237 1 572 254 94 305 2 689 257 11,9 %
2000 263 781 665 472 731 225 184 177 1 864 655 14,1 %
2001 317 536 511 480 438 301 207 680 1 474 997 21,5 %
2002 231 434 809 665 425 648 195 074 1 661 750 13,9 %
2003 221 875 777 741 581 742 306 033 1 917 391 11,5 %
483
Il ressort de ce tableau ce qui suit :
– La part de la recherche minière dans les investissements totaux fluctue entre 10 et 33 %.
– Les montants consacrés à la recherche/exploration sont insuffisants comparés aux besoins pour un
développement continu des richesses du sous-sol national.
Malgré toutes ces contraintes, les résultats obtenus par la recherche minière financée par l’État à travers le
BRPM pour la période 1981-2003 ont été satisfaisants comme en témoigne la découverte de grands gise-
ments de métaux précieux (Au, Ag), de métaux de base (Pb, Zn, et Cu), et de baryte (Ba SO4) :
– Les gisements d’argent d’Imiter et d’Igoudrane dans le Saghro oriental ;
– Le gisement polymétallique de Hajar (Zn, Pb, Cu) à Guemmassa dans la région de Marrakech ;
– Le gisement d’or de Akka dans l’Anti Atlas occidental ;
– Le gisement de barytine de Zelmou à Bouarfa.
Mais dès la fin des années 80 et le début de la décennie 90, le secteur minier sera conforte à de nouveaux
défis, et notamment la découverte de gîtes cachés, les gisements en sub-surface facilement mis en évi-
dence étant épuisés.
À cet effet, une nouvelle dynamique sera impulsée à la recherche minière au milieu des années 90 avec
l’utilisation de moyens et techniques sophistiqués.
484
Figure 1 : Carte localisation des sits et gisements connus au Maroc depuis l’indépendance
485
Figure 2 : Carte de localisation des mines exploitées au Maroc
486
Figure 3 : Carte de localisation des mines en cours d’exploitation au Maroc
487
Figure 4 : Carte de localisation des sites de prospection minière au Maroc
488
3. L’apport du secteur minier dans le développement économique
et social
L’apport du secteur minier à l’économie nationale est considérable à tous les niveaux (part dans le PIB, part
dans les exportations, recettes fiscales, etc). Mais c’est surtout au niveau du développement régional que la
contribution du secteur est importante car chaque centre d’exploitation minière entraîne le développement
d’autres secteurs à travers les composantes suivantes :
– la masse salariale versée au personnel profite également à de multiples secteurs de prestations com-
merciales ou de services,
– les infrastructures, qui sont souvent réalisées par les sociétés minières profitent aux populations locales
et permettent la création ou le développement, dans la région, d’autres activités génératrices d’emplois
et de revenus,
– les emplois induits, qui sont ainsi créés dans des activités en relation avec celles des exploitations
minières
L’impact de ces éléments sur le développement régional au cours des cinquante dernières années a été
significatif à tel point que des villes entières ont vu le jour grâce à la découverte, l’exploitation, et la valorisa-
tion des produits miniers :
– Khouribga et Youssoufia, qui ont été à l’origine créées et développées autour de l’exploitation du phos-
phate, ont connu des évolutions importantes et notamment Khouribga, où d’autres secteurs, en relation
avec les activités du Groupe ou avec d’autres activités, contribuent à l’essor économique de cette ville.
– La ville de Jerada qui s’est développée autour de la mine d’anthracite du même nom.
– Benguérir, est devenu un centre urbain où se développent diverses activités économiques alors que la
filiale Phosboucraâ est parmi les plus importantes sociétés opérant à Laâyoune.
– La ville de Nador dont l’essor a été longtemps lié à la mine de fer de Ouixane et plus tard au laminoir de
la SONASID.
– Safi, avec la création et les différentes expansions de la plate-forme des industries de transformation du
phosphate, est devenu un pôle industriel parmi les plus importants du pays.
– Jorf Lasfar, qui a permis, entre autres, de relier la région d’El Jadida au réseau ferroviaire national, est
devenue une zone industrielle qui se développe autour de l’un des plus importants ports africains.
Par ailleurs, le secteur minier contribue considérablement au désenclavement du monde rural. Le déve-
loppement rural constitue en effet un des principaux objectifs retenus par les Pouvoirs Publics pour réduire
les disparités régionales. Dans ce cadre, les infrastructures de base, notamment celles relatives aux routes
de désenclavement, jouent un rôle essentiel dans la stratégie de développement économique et social de
régions souvent défavorisées. Les routes rurales facilitent l’accès des populations rurales au réseau routier
national, au réseau ferroviaire et au réseau électrique. Ces routes et pistes facilitent l’accès aux soins, les
échanges de marchandises et intègrent les économies locales dans l’économie nationale.
Qu’il s’agisse des soins de santé, de scolarisation ou d’activités socio-culturelles, le secteur minier joue un
rôle de premier ordre et peut être considéré comme le véritable pôle de développement régional.
489
Cependant l’après mine reste encore problématique. En effet, la fermeture des grands sites miniers tels
Jérada (Charbon), Aouli Mibladen (Plomb) n’a pas donné lieu à une possibilité de reconversion ou de création
d’activité nouvelle. C’est là un des défis à relever à l’avenir par le secteur minier.
3.1.1. Historique
Le Bureau de Recherches et de Participations Minières, Établissement public à caractère industriel et com-
mercial, a été créé par dahir le 15 décembre 1928. À l’origine, sa mission consistait à étudier, rechercher et
mettre en valeur les hydrocarbures et toutes substances minérales à l’exclusion des phosphates. Ce dahir a
été modifié à plusieurs reprises et a été complété par d’autres dahirs, en particulier celui du 10 novembre
1981 qui a consacré la partition du Bureau avec la création de l’ONAREP et a limité son activité aux seules
substances minérales.
La mission du BRPM est double : une mission d’études, de recherches, d’exploitation des gisements et de
commercialisation des produits miniers extraits d’une part, et une mission d’apport de savoir faire aux tiers :
sociétés, organismes nationaux et privés d’autre part.
Depuis sa création, l’activité de recherches du Bureau sur l’ensemble du territoire national n’a cessé de se
diversifier en matière de substances recherchées. Elle s’est particulièrement développée à un rythme plus
accéléré à partir du plan quinquennal 1973-1977.
Le BRPM en tant qu’organisme public, joue un rôle de pionnier dans le domaine de la recherche minière en
prenant les risques inhérents à ce genre d’activité, en innovant et en introduisant de nouvelles méthodes à
tous les stades de la recherche, de la valorisation, et de l’exploitation.
Il se préoccupe également des questions touchant à la préservation de la qualité de vie du milieu ambiant
et participe au développement du tissu industriel.
490
R Zgounder : Jbel Siroua
– Or :
R Iourirn : Anti Atlas occidental
R Tiouit : Anti Atlas occidental
– Polymetallique (Plomb, Zinc, Cuivre) :
R Hajar-Guemmassa : Haouz
R Draa Sfar-Jebilet : Marrakech
R Zaida : Khénifra
R Sidi Lahcen : Taourirt
R Sidi Bouatthmane-Jebilet : Kelaa Sraghna
– Pyrrotine :
R Kettara-Jebilet : Marrakech
– Fluorine :
R El Hammam : Khémisset
– Manganèse :
R Imini : Ouarzazate
– Barytine :
R Jbel Ighoud-Chemaîâ : Safi
R Zelmou-Bouanane : Bouârfa
– Sel gemme de Berrechid Mediouna : Mohammedia
– Bentonite : Nador
– Perlite : Nador.
491
R Zrahina-(Khénifra)
R Jbel Tirremi-(au Nord de la ville de Taourirt)
– Potasse :
R Bassin salifère triasique de Khémisset
– Autres substances :
R Calcite de Jbel Mahdi (Boulmane)
R Sables siliceux de Dar Chaoui
R Zircon de Bou Issafen
– Substances énergétiques solides :
D’importants gisements de substances énergétiques solides ont été également mis à jour sur le territoire
national.
R Schistes bitumineux de Timahdit, et Tarfaya
R Lignite de Oued N’ja – plaine du Saiss
R Antracite de Jerada
À la Recherche appliquée
– La mise à disposition de son savoir faire en matière d’analyses et d’essais de valorisation des minerais
grâce à ses laboratoires dont la qualité de prestation est reconnue mondialement.
– La mise à disposition de son savoir faire technique en matière d’exploration : géologie, géophysique,
géochimie, travaux et forages miniers.
Il a également contribué à la mise en évidence de nouvelles nappes aquifères, ce qui a permis de mettre à
la disposition des populations de nouvelles ressources en eau, comme à Tadenst (Ighrem), Imintanout, eau
thermale de Kariat Akerman (Nador), Imiter (Tinghir), etc. Il a aussi contribué à la réalisation de vastes pro-
grammes de recherche de l’eau initiés par les organismes publics (la D.H, la D.R.E, et l’ONEP) dans les gran-
des régions agricoles du Royaume :
– La plaine du Saiss
492
– La plaine de Beni Amir Béni Moussa (Kasba Tadla)
– La plaine du Haouz
– La plaine du Souss
Outre ces actions, il y a lieu de souligner que la découverte de l’immense nappe aquifère du Saiss a permis
d’alimenter en eau potable la ville de Fès.
Le BRPM a également accompagné la Direction de l’Hydraulique dans ses travaux de recherche de l’eau
dans les provinces du Sud (Smara, Boujdour, Ouarkziz, etc).
493
Elle a permis au Groupe OCP d’entrer et d’évoluer dans le marché fermé et relativement spécialisé du
transport maritime des produits chimiques liquides, tout en contribuant au développement du pavillon natio-
nal et à la formation de nouvelles compétences liées à ce secteur.
Le Groupe ONA est présent dans les mines depuis 1929. Conscient du potentiel de ce secteur, il a rassem-
blé ses participations minières au sein de MANAGEM, de façon à optimiser l’ensemble des compétences et
des savoir-faire. Créé en 1996, ce holding minier regroupe cinq sociétés d’exploitation : CMG, CTT Bou
Azzer, SMI, SAMINE, AGM, une société d’hydrométallurgie (CTT-Guemassa) et deux sociétés de services
(REMINEX et TECHSUB).
En septembre 1999, dans le cadre de ses activités à l’international, MANAGEM a signé un accord de parte-
nariat avec la société canadienne de ressources minières SEMAFO. Cette alliance a permis à MANAGEM de
devenir un producteur significatif d’or en Afrique de l’ouest, notamment en Guinée et au Niger.
En juin 2000, le groupe ONA a introduit MANAGEM en bourse en cédant 25 % de son capital, offrant ainsi
au grand public l’opportunité de participer à son développement.
Les sociétés d’exploitation minière appartenant à MANAGEM sont présentes dans plusieurs régions du
Royaume où elles participent activement au développement économique et social de ces régions à travers la
construction de pistes et de routes, l’adduction de l’électricité et de l’eau potable, la construction d’écoles et
de dispensaires ainsi que d’autres infrastructures socio-culturelles. Certaines régions étaient ainsi complète-
494
ment enclavées avant le démarrage de certaines mines comme cela fut le cas pour Akka avec l’ouverture de
la mine d’or d’Iourirn.
De par la qualité de ses ingénieurs et ses cadres, MANAGEM constitue également un vivier de compé-
tences et un pôle d’excellence dans certains métiers tels que l’exploration minière, l’hydrométallurgie et la
Recherche – Développement d’une manière générale.
Si ces 50 dernières années ont vu les techniques de recherche et d’exploitation évoluer, se développer,
des avancées techniques importantes enregistrées, il y a eu également la problématique de l’environnement
avec ses retombées tant négatives que positives. En effet, le secteur minier avec ses rejets solides, liquides
et gazeux peut affecter lés équilibres environnementaux. Beaucoup d’efforts ont été cependant consentis en
matière de protection de l’environnement qui constitue une préoccupation constante.
À tous les stades de l’activité minière, les questions environnementales sont mises en avant. Les impacts
de l’activité minière sur l’environnement sont identifiés, analysés, les solutions sont étudiées en fonction des
exigences réglementaires en vigueur depuis les stades de la reconnaissance géologique jusqu’à la fermeture
de la mine.
Depuis 1993, de nouvelles lois sont venues renforcer les dispositions existantes du code minier, toutes
ayant pour objectif la protection de l’environnement : (loi no 11-03 relative à la protection et à la mise en
valeur de l’environnement, loi no 12-03 relative aux études d’impact sur l’environnement, loi no 13-03 relative
à la lutte contre la pollution de l’air, loi sur l’eau, créations d’Agences de bassins, etc.).
Ces lois imposent en particulier une étude d’impact pour tout projet minier ou autre. Les standards retenus
sont conformes aux normes internationales. Une fois les nuisances et les impacts identifiés, ils sont analysés
et les effets négatifs sont corrigés et atténués.
Parmi les réalisations pour l’amélioration de la qualité de l’environnement humain et naturel on peut citer :
Le dédommagement par achat, location des terrains occupés pendant toute l’activité minière. À cet effet,
le BRPM a par exemple toujours traité directement avec les propriétaires du sol, que ce soit des particuliers
ou des organismes étatiques (Administration des Eaux et Forets, Domaines de l’État, etc.).
Le domaine forestier est dans la mesure du possible épargné, les tracés des routes et pistes adaptés de
manière à épargner le plus possible la flore locale.
Dans le cas très exceptionnel de déplacement de populations, les habitants sont indemnisés et bénéficient
d’une assistance pour retrouver un autre lieu de résidence convenable.
Les impacts visuels. Ils sont atténués par des écrans physiques et naturels (murs, massifs boisés). La
gestion paysagère intégrant les éléments topographiques et naturels existants est réalisée dans certains cas.
Les bruits produits par des tirs, le démarrage d’engins, le trafic, les concasseurs sont limités par la
construction d’écrans anti bruit, l’installation de silencieux sur les engins, et des techniques de mise à feu
mieux adaptées : tir avec détonateur à microretard par exemple.
Les poussières émises dans les installations sont généralement collectées par des dépoussiéreurs munis
de filtres à manches récupérateurs de particules. L’humidification, l’aspersion, la brumisation sont également
495
employées pour abattre les poussières. Les écrans végétaux, le bardage des concasseurs atténuent les nui-
sances. Les poussières de plein air sont dispersées par les vents. Il est généralement admis que l’impact sur
la qualité de l’air n’est appréciable que pour des valeurs variant entre 20 et 150 mg/m3.jour.
Les gaz toxiques de fonderie sont neutralisés. À Imiter par exemple, les arséniures transformés en arsé-
niates de chaux ; les vapeurs de mercure sont récupérées sous forme de mercure liquide
Les problèmes de ressources en eau, élément important dans l’activité minière sont traités tant au
niveau quantitatif qu’au niveau qualitatif. De plus en plus, un intérêt particulier est porté à cette ressource
pour la préserver en quantité et en qualité.
Dans la grande majorité des cas, les mines baignent dans l’eau qui doit être évacuée pour maintenir à sec
l’exploitation et rendre possible l’extraction du minerai. L’eau pompée (exhaure) est généralement utilisée
pour couvrir les besoins industriels de la mine et de la population locale.
Les volumes ainsi prélevés par l’exhaure ou le pompage des eaux de surface sont strictement limités aux
besoins de l’exploitation et de son environnement, si nécessaire.
L’alimentation en eau domestique, potable et industrielle des mines par prélèvement de quantités limitées
d’eau ont peu d’impact sur les ressources locales en eau même dans les régions arides, pré sahariennes à
faibles précipitations.
Pour une bonne gestion de ces ressources, une étude d’impact est réalisée. Des autorisations sont
demandées aux centres régionaux de l’Hydraulique (Agences de Bassin) pour l’implantation des ouvrages de
captages et de prélèvement.
Au plan de la qualité, les rejets dans la nature d’eaux en provenance du drainage de la mine, et du traite-
ment du minerai (usine de traitement), sont des sources de contamination éventuelle des eaux de surface et
souterraines peu profondes. Cette pollution transmise par l’eau peut se déplacer sur de longues distances et
affecter de façon négative l’homme, la faune terrestre et aquatique, la flore.
La contamination est d’autant plus redoutable que ces eaux peuvent être chargées en produits toxiques,
en particulier les produits à base de cyanure utilisés pour le traitement de certains minerais. Ces eaux
peuvent véhiculer également des substances indésirables contenues dans les minerais traités et libérés lors
de la mise en solution. Dans les digues à stériles toujours installées dans les réseaux de drainage des eaux
de surface à base non imperméabilisée, l’eau décantée de la pulpe peut s’infiltrer à la base de l’ouvrage,
déborder, se répandre dans les nappes sous jacentes ou circuler dans le réseau hydrographique pour aller
contaminer d’autres nappes à distance.
Impact sur la flore et la faune : La construction de routes et de pistes peut nécessiter parfois l’abattage
d’arbres sur le tracé choisi. D’une manière générale, les projets miniers empiètent souvent sur les environne-
ments naturels. La faune est touchée dans son habitat par la modification du biotope. Beaucoup d’espèces
émigrent et sont remplacées par d’autres qui trouvent dans le nouveau biotope un habitat original.
496
barrage également construit en béton. L’introduction de la flottation a remplacé pour 75 % la cyanuration,
réduisant les risques dans les mêmes proportions.
Le mercure (vapeur) a d’abord été récupéré sous forme liquide et stocké. Depuis 2000, il est précipité sous
forme de sulfures et stocké dans une digue aménagée spécialement à cet effet.
En matière d’économie et de gestion de l’eau, les besoins en eau sont ramenés à 1,5 m3 pour 1 tonne trai-
tée au lieu de 3 m3 d’eau pour 1 tonne de tout venant traité.
Dans le cas d’Imiter, les besoins ont évolué à plusieurs reprises en fonction de production journalière trai-
tée qui est passée de 200 tonnes/ jour en 1980, à 600 tonnes en 1987 et 1200 depuis 1999. Les besoins en
eau ont augmenté dans le même rapport. Les études hydrogéologiques menées ont montré que les grès
cénomaniens et les calcaires éocènes sont susceptibles d’alimenter la mine. Cependant la décision de réali-
sation de forages a toujours suscité une forte opposition de la part des populations des communes environ-
nantes. Cependant, un climat de confiance semble s’instaurer depuis quelques années grâce à des efforts
faits de part et d’autre entre la mine, la commune rurale d’Imider et les populations directement concernées.
L’étude d’impact réalisée en 2004 ayant montré l’absence d’influence des forages réalisés au Nord du village
d’Imider, rien ne s’oppose plus à ce que la société minière exploite la quantité d’eau dont elle a besoin.
497
Au niveau de MANAGEM, un responsable de la coordination environnement est désigné pour veiller à
l’application de la politique du PDG et l’échange des expériences entre les filiales.
498
La Compagnie Minière de Guemassa traite la totalité de ses eaux résiduaires et les recycle. Un système de
pulvérisation de l’eau a permis de diminuer considérablement les poussières générées par les stations de
concassage.
Cent vingt hectares ont été entièrement plantés permettant au site de réduire considérablement les éma-
nations de poussière. Dans un souci de préservation des ressources naturelles, un système d’arrosage au
goutte à goutte a été introduit sur le site.
Aujourd’hui, l’unité de grillage du concentré de cobalt dispose d’un électro-filtre couplé à un filtre à manche
pour garantir un maximum de rétention de poussières. En aval des filtres, une colonne de lavage des gaz per-
met de réduire l’émission de gaz SO2. Un dispositif d’aspiration installé sur toute l’usine permet d’éliminer
toute fuite de poussières.
La digue des arséniates a été entièrement imperméabilisée par du plastique selon un brevet marocain
appartenant à un professeur universitaire. Un système de drainage permet de récupérer l’ensemble des eaux
et de les recycler.
Quatre bassins, d’une capacité totale de quatre hectares, permettent d’évaporer la totalité des effluents
non recyclables profitant ainsi du soleil présent dans la région au cours de toute l’année.
Un projet de traitement de la digue de Guemassa est en cours d’étude au niveau du centre de recherche.
Ce projet qui est un partenariat entre MANAGEM, l’OCP et la SONASID vise à valoriser les déchets de la
mine. Ces déchets qui sont sous forme de sulfures de fer seront transformés via une Bio-lixiviation en deux
produits distincts : le souffre et l’oxyde de fer. Le souffre sera utilisé par l’OCP et l’oxyde de fer par la SONA-
SID.
Enfin, le Centre de Recherche a été accrédité par le COFRAC selon la norme EN 45001 pour l’analyse de
l’eau (programme 101). C’est le premier laboratoire accrédité pour ce programme au Maroc. Ceci permet à
MANAGEM d’effectuer des contrôles des eaux de toutes ses exploitations avec un outil d’analyse fiable et
reconnu.
En maîtrisant ses rejets solides, liquides et gazeux au moyen de technologies propres, CTT produit des
cathodes de cobalt de haute pureté tout en préservant l’environnement et en réduisant les risques envi-
ronnementaux. CTT assure ainsi la pérennité de ses activités présentes et le développement des projets
futurs.
Site d’Imiter
Sur le site d’Imiter, MANAGEM a introduit la technique de flottation, ce qui a permis de soustraire à la cya-
nuration 75 % du poids du tout venant. La totalité de l’eau de la digue est recyclée. Des réductions impor-
tantes de consommation de réactifs ont été constatées.
Une attention particulière a été portée au mercure contenu dans le minerai. C’est ainsi que le centre de
recherche a mis au point un procédé hydrométallurgique sur les concentrés gravimétriques pour dissoudre le
mercure et le précipiter sous forme de sulfures qui est sa forme la plus stable pour le stocker dans une
digue. Cette unité est opérationnelle depuis l’année 2000.
Pour l’alimentation du site en eau, il a été prévu au départ de procéder à un forage non loin de la ville de
Tinghir. Cette décision a suscité une forte opposition de la part des villageois. MANAGEM a donc mené une
étude hydro-géologique qui lui a permis de mettre évidence de nouvelles ressources d’eaux souterraines à
10 Km au nord de la mine.
MANAGEM a aussi procédé à une campagne de reboisement du site, ce qui prouve sa volonté de change-
ment et d’amélioration de l’environnement.
499
Site de Bou-Azzer
Cas de la production propre : valorisation du cobalt
L’histoire de la valorisation du cobalt a débuté en 1929 avec le démarrage de la mine de Bou-Azzer, la pre-
mière mine de l’ONA. Le minerai de cobalt était alors extrait et concentré par gravimétrie avant d’être
exporté. Les rejets de cette première valorisation étaient stockés dans plusieurs digues, qui deviendront plu-
sieurs années plus tard des haldes à l’origine d’un projet de valorisation ambitieux.
Ces haldes, contenant près de 0.4 % de cobalt, ont fait l’objet de plusieurs années de recherche au niveau
des laboratoires de REMINEX qui ont abouti à un procédé de valorisation. Ce procédé a été industrialisé en
1996 au niveau d’une unité hydrométallurgique CTT-Guemassa, ex CMBA) qui produit des cathodes de
cobalt de haute pureté (99,9 % cobalt). Les recherches se sont poursuivies et un nouveau pas a été franchi
avec la valorisation en 1999 du concentré de cobalt par un procédé pyrrométallurgique, le grillage.
La valorisation des haldes de Bou-Azzer constitue un modèle sur le plan de la Production Propre. Un certain
nombre de dispositions ont été prises pour éviter la contamination des sols et des eaux souterraines avec,
l’imperméabilisation des digues à stérile et l’installation d’une station de traitement et de recyclage des eaux
industrielles.
MANAGEM mène aussi des essais de boisement malgré l’infertilité des sols due au contexte géolo-
gique de la région.
Site de AKKA
Akka représente le premier projet à être conçu et construit selon les règles de l’art concernant les aspects
environnementaux.
Une étude d’impact a été menée et a porté entre autres sur la faune et la flore avant l’installation de l’acti-
vité industrielle. De même, le centre de recherche a mis au point un procédé qui ne cyanure qu’une propor-
tion très faible de produits solides. Les eaux cyanurées sont traitées et recyclées.
MANAGEM a aussi procédé à un boisement du site.
Site de Bleïda
Cette usine qui a été malheureusement fermée après épuisement du gisement fait l’objet d’études détail-
lées sur l’état environnemental des lieux.
À la suite de la fermeture de la mine de Bleïda, une ONG de la région a fait pression sur MANAGEM pour
une participation financière dans un projet d’adduction d’eau au profit des villages de la région. MANAGEM y
a répondu favorablement.
500
En effet, il ressort de cette étude que le seul emplacement possible pour la digue coïncide avec une zone
de projet d’extension de la ville de Marrakech (zone industrielle +habitat).
Autres
En plus de ces actions environnementales relatives aux sites, il est à noter que MANAGEM vient de signer
en janvier 2004 une convention avec le Secrétariat d’État à l’Environnement.
Cette convention met l’accent sur la nécessité de collaboration et de transparence entre les deux parties.
Ceci inclut l’échange d’informations, la communication de MANAGEM de ses actions environnementales, le
traitement des plaintes environnementales contre MANAGEM en commun avec le Ministère ainsi que la
constitution de groupes pour travailler sur des projets pilotes tels que la fermeture de sites miniers.
Toutes ces actions démontrent la ferme volonté de MANAGEM de poursuivre l’élaboration et l’exécution
des plans d’action pour faire face à toute source de nuisance et d’appliquer sa politique environnementale
afin de préserver l’écosystème de ses exploitations et de servir de modèle de mines modernes et inno-
vantes.
Tous les efforts d’exploration, de Recherche-développement, d’ingénierie et d’exploitation de MANAGEM
convergent vers le développement économique du pays et la préservation de ses atouts naturels.
L’arrêt de l’exploitation d’une mine pose souvent des problèmes délicats techniques, juridiques et finan-
ciers. Mais c’est surtout sur le plan humain que les problèmes se posent avec le plus d’acuité. En effet, des
villages et villes moyennes se sont créés et développés autour des centres d’exploitation, les populations
bénéficient en général de la masse salariale distribuée mais également des infrastructures socioculturelles
fournis par l’exploitation minière (écoles, dispensaires, économats, installations sportives, etc).
À l’exception des phosphates dans les réserves permettent d’envisager une exploitation sur plusieurs
décennies, les autres minerais n’offrent malheureusement pas de telles perspectives car les sociétés
minières sont obligées d’arrêter leur activité dans au moins deux cas :
– Épuisement des réserves : Celles-ci sont dès le départ limitées, elles peuvent être augmentées grâce
aux travaux de recherche qui peuvent être menés par la société d’exploitation mais elles ne sont pas iné-
puisables ;
– Conditions économiques défavorables (chute des prix des produits miniers exploités, perte de débou-
chés, etc.).
La mine a donc une durée de vie limitée, elle « naît », se développe et meurt. Par, conséquent, la gestion
de l’après-mine doit commencer dès le début de l’exploitation. Cette gestion doit se faire dans un cadre
réglementaire prévoyant des mécanismes adéquats en matière d’indemnisation de l’entreprise, de gestion
des risques suite à l’arrêt de l’exploitation et de suivi des dossiers de la retraite et des maladies profes-
sionnelles des salariés de l’entreprise concertation. Cependant, l’après mine ne touche pas uniquement
l’entreprise minière et ses salariés, elle concerne aussi toutes les populations qui vivent indirectement de la
mine et qui voient du jour au lendemain leur activité s’arrêter. Aussi, nous pensons que la gestion de l’après
mine nécessite obligatoirement une concertation et une coordination permanentes entre la mine d’une part,
et les autorités locales, les élus qu’il soient locaux, régionaux ou à l’échelle nationale d’autre part.
La période qui s’ouvre devant nous devra prendre en considération la problématique de la fermeture des
501
mines pur éviter à l’avenir des situations dramatiques vécues au quotidien par certaines populations comme
celles de Jerada ou Midelt par exemple. La gestion de l’après mine ne pourra se faire que dans le cadre d’un
développement durable au niveau de toutes les régions du Royaume, un développement basé sur l’externali-
sation de certaines activités de la société minière et un partenariat durable avec le tissu des PME.
4.3. Conclusion
Depuis la plus haute antiquité, l’extraction des matières premières minérales a été et restera une des acti-
vités les plus vitales pour l’homme. Cependant, comme toute activité, elle est susceptible de générer un cer-
tain nombre d’impacts environnementaux dont il faut de plus en plus tenir compte pour préserver notre
qualité de vie. C’est la raison pour laquelle des réglementations ont été élaborées à travers tous les pays du
monde. Les diverses actions tendant à l’amélioration de la qualité de l’environnement et à la préservation des
ressources sont maintenant regroupées au sein du Ministère de l’Aménagement du Territoire, de l’Eau et de
l’Environnement. Ce regroupement dans un cadre institutionnel unique témoigne du souci d’efficacité, de
coordination des actions, de contrôle des décisions et de sanction. Il reste néanmoins que la mise en œuvre
d’une multitude de réglementations peut présenter quelques problèmes.
L’industrie minière doit donc s’adapter à ces nouvelles exigences environnementales. Elle doit plus parti-
culièrement observer :
– la concertation et le dialogue constants et réguliers entre les principaux acteurs : Administration, élus
et sociétés minières pour la recherche permanente de solutions et la prévention des conflits. Cette exi-
gence va au delà de ce qui est préconisé dans la loi qui ne prévoit que la simple information de la popula-
tion concernée sur les impacts négatifs du projet sur l’environnement ; la périodicité de telles actions
étant définies d’un commun accord entre les différents acteurs.
– La remise en l’état des lieux. Elle est imposée par la loi lorsque cela est possible. Dans tous les cas de
figures, le réaménagement du site est obligatoire. Selon le type d’exploitation, la réhabilitation peut ou
ne pas être facile. Dans les mines souterraines, la remise en état consiste essentiellement au rem-
blayage des cavités souterraines par les produits des stériles terrains, à la neutralisation des digues. Les
terrils et digues peuvent être plantés en espèces végétales ou forestières adaptées. Pour ce qui est des
carrières, plusieurs formules peuvent être envisagées : transformation en parcs aquatiques pour
réserves naturelles, création de lacs servant de centres de loisirs, aménagements d’installations pour les
collectivités locales (terrains de sport par exemple), activités agricoles, etc.
– Une bonne gestion des problèmes de l’eau, denrée rare dans les régions souvent pauvres en res-
sources hydriques comme le sont la plupart de celles situées dans l’Anti Atlas. Pour cela, on veillera plus
particulièrement aux quantités prélevées et à la qualité des rejets de traitement ; ceux ci ne devant être
effectués qu’après épuration comme l’exige la loi.
L’industrie minière nationale doit aujourd’hui faire face à de nouveaux défis dans un environnement inter-
national caractérisé par une concurrence de plus en plus accrue, par la mondialisation des marchés des
502
matières premières et des capitaux et par une ouverture et une intégration de l’économie nationale dans
l’économie mondiale.
Compte tenu du rôle du secteur minier dans l’économie nationale et dans le développement régional en
particulier, une nouvelle politique minière dans le cadre d’une vision stratégique globale à moyen et long
terme est plus que jamais nécessaire. Cette nouvelle politique devra s’articuler autour des axes principaux
suivants :
– L’amélioration de l’infrastructure géologique. À cet effet, le lancement en 1997 du Plan National de la
Cartographie Géologique (PNCG) constitue une pièce maîtresse du développement de la recherche
minière. Il a pour objectif à moyen terme, une couverture géologique complète du pays à 1/100 000 et
1/50 000 et à plus court terme, l’établissement de l’infrastructure géologique des régions à fort potentiel
métallogénique.
– La révision du cadre législatif et réglementaire : La révision, en cours, du règlement minier et ses
textes d’application est devenue aujourd’hui indispensable. Il s’agit d’adapter ces textes aux exigences
de développement en vue de donner un nouvel élan au secteur minier. Dans ce cadre, le projet de la
nouvelle loi sur les mines qui est actuellement à sa phase finale repose sur les principes suivants :
R l’inclusion dans la catégorie des mines de certaines substances minérales dites à usage industriel à
l’exception des matériaux de construction ;
R l’allégement des procédures administratives ;
R la garantie des investissements miniers ;
R l’élimination des risques d’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’administration par un contrôle à pos-
teriori et non a priori ;
R l’autorisation de prospection qui offre aux entreprises minières la possibilité d’opérer sur des zones de
grandes superficies avant l’institution du permis de recherche ;
R l’octroi aux opérateurs miniers d’autant de permis qu’ils désirent, et ce, sans limitation de superficie
sous réserve de la justification par eux de capacités techniques et financières suffisantes ;
R la protection de l’environnement pour assurer un développement durable.
Il sera également procédé à la refonte des autres textes régissant l’activité du secteur notamment le statut
du mineur, les explosifs à usage civil et les appareils à pression.
L’ensemble de ces réformes devrait avoir un impact positif, en particulier au niveau de la recherche
minière à travers une plus grande implication des opérateurs nationaux et étrangers à côté de l’ONHYM. La
promulgation du nouveau code minier contribuera ainsi à valoriser notre géologie variée et nos richesses
minières encore sous explorées.
– La réforme du cadre institutionnel. Il s’agit d’une redéfinition des missions aussi bien de l’Administra-
tion chargée des mines que des entreprises publiques relevant du secteur. À cet effet, il y a lieu de noter
que cette réforme est aujourd’hui achevée avec la promulgation de la loi No portant création de l’Office
National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) et le nouveau décret de réorganisation du Minis-
tère de l’Énergie et des Mines adopté en janvier 2005. La création de l’ONHYM répond à un souci de
synergie entre la recherche minière et l’exploration pétrolière, elle a aussi pour but de doter ce nouvel
503
office de moyens humains et financiers suffisants en vue de lui permettre de mieux remplir sa mission
d’exploration et de promotion du sous sol national.
– La mise à disposition de moyens financiers suffisants pour mener à bien une politique de recherche
et de mise en évidence de ressources minières et énergétiques du pays, qui reste, largement sous
exploré.
– La promotion du potentiel minier national à travers le renforcement d’actions conjointes menées par
l’Administration, les Entreprises Publiques et la Fédération de l’Industrie Minérale telles que l’organisa-
tion de forums miniers nationaux et la participation aux manifestations internationales ; la médiatisation
des potentialités minières et des opportunités d’investissement du Maroc notamment à travers le
réseau Internet, la conception et la diffusion de CD-ROM et les publications d’articles dans des revues
spécialisées, la consolidation du Système d’Information Géoscientifique (SIG) pour mettre à la disposi-
tion de tous les opérateurs miniers une information fiable et de qualité ;
– Le développent d’un partenariat durable, démarche qui constitue déjà un choix stratégique tant pour
l’OCP que pour l’ONHYM ou MANAGEM et qui devra s’intensifier dans l’avenir si on veut assurer au
secteur minier un développement durable. L’OCP poursuit en effet une stratégie de diversification de
ses marchés et de partenariat avec des opérateurs internationaux dans les différentes parties du monde.
L’ONHYM mène aussi une politique de partenariat dans le domaine de la recherche minière et pétro-
lière, cette politique a déjà commencé à donner ses fruits avec la conclusion d’une série d’accords dans
le domaine de la recherche pétrolières ; plusieurs conventions d’explorations minières ont également été
conclues avec des opérateurs nationaux tel que le groupe MANAGEM ou étrangers, notamment cana-
diens. La politique de partenariat menée par l’ONHYM à tous les stades de son intervention (exploration
en amont, développement, cession de gisements, etc) va s’intensifier avec l’entrée en vigueur de la nou-
velle loi sur les mines MANAGEM a, pour sa part, signé en 1999 un accord de partenariat stratégique
avec SEMAFO Inc, une société canadienne cotée à la bourse de Toronto qui conduit des travaux d’explo-
ration en Afrique de l’Ouest et en a pris le contrôle à partir de l’année 2000. Cette collaboration s’est tra-
duite par la mise en production d’une mine d’or en Guinée en Avril 2002 (environ 50 koz / an), la mise en
production d’une mine d’or au Niger en Septembre 2004 (environ 100 koz/an) et la conduite d’une étude
de faisabilité pour un projet au Burkina Faso (mise en production prévue en 2006). De toute évidence, il
faut s’attendre à une multiplication de partenariats au cours des prochaines années.
– L’instauration de mesures incitatives sur le plan de la fiscalité. Ce volet revêt une grande importance
pour l’industrie minière nationale. Il constitue un moyen et un encouragement pour la recherche minière,
condition indispensable pour pérenniser cette industrie. Autre volet important, l’activité d’exploration
devrait bénéficier de l’exonération de la TVA à l’instar de ce qui se fait dans les grands pays miniers.
À l’horizon 2025, les actions devront être orientées vers une pérennisation du secteur minier. Cela passe
certes par une modernisation du cadre législatif et réglementaire, condition indispensable pour attirer les
investissements étrangers car, nous allons assister au cours des années à venir à une accélération de la
course à l’attractivité de ces investissements, ce que les anglo-saxons appellent « Race to the bottom ».
Mais il ne sert à rien de moderniser le cadre réglementaire si on ne dispose pas d’un potentiel gitologique
important, d’où l’importance de l’exploration, mission de base de l’ONHYM pour mettre en évidence le maxi-
mum de gisements, tâche d’autant plus ardue que les gisements métalliques deviennent de plus en plus pro-
fonds nécessitant l’utilisation de techniques et procédés performants.
504
Les réserves minières étant par leur nature épuisables, la recherche-exploration a pour objectif de renouve-
ler ces réserves pour pérenniser l’activité minière.
– Au niveau des phosphates, notre pays possède des atouts importants qui lui permettent d’envisager
un développement à long terme grâce :
R Aux très importantes réserves exploitables en découverte.
R À la politique de valorisation menée depuis plus de deux décennies, ce qui fait de l’OCP le premier
exportateur mondial de phosphate brut, d’acide phosphorique, et d’engrais.
Depuis plusieurs années, L’OCP a mis en en place une politique active de reconnaissance de ses gise-
ments pour offrir à sa clientèle les qualités des phosphates demandées et des produits dérivés conformes
aux normes internationales.
L’OCP a également entamé des recherches importantes en matière de valorisation du souffre, du phos-
phogypse et d’autres éléments contenus dans les phosphates.
L’intérêt des substances utiles réside dans la création de milliers d’emplois avec des investissements
modestes dans des régions souvent excentrées. Leur valorisation permettra de générer des valeurs ajoutées
importantes et des économies en devises en remplacement des importations par des matières premières
extraites du sous sol national (sables siliceux, perlite, roches ornementales).
L’exploitation et la valorisation de certaines substances peuvent constituer un vrai pôle de développement
régional, c’est le cas des bentonites et de la perlite de la région de Nador, de la barytine extraite du gisement
de Zelmou et qui est exportée par le port de Nador.
505
2.5.4. Augmentation du potentiel de production d’acide
phosphorique ...................................................................................523
3. Le positionnement commercial et les partenariats ..................................523
3.1. Les évolutions sur le plan interne ..........................................................524
3.1.1. La création et la marocanisation de la direction
commerciale ....................................................................................524
3.1.2. Les mutations de la Direction commerciale ................................524
3.2. Les évolutions sur le plan externe .........................................................524
3.2.1. L’évolution de la structure du marché ..........................................525
3.2.2. L’évolution des contraintes écologiques .....................................525
3.2.3. L’évolution des prix ..........................................................................525
3.2.4. L’évolution de la concurrence .......................................................526
3.2.5. L’évolution des tonnages ................................................................526
3.3. Les enjeux et les objectifs ......................................................................527
3.4. Les actions menées .................................................................................527
3.5. Les résultats ..............................................................................................528
4. Les ressources humaines et le développement social ............................528
4.1. L’évolution des effectifs et de leur structure .......................................528
4.2. La gestion des ressources humaines et le développement
des compétences .....................................................................................529
4.2.1. Le mode de gestion .........................................................................529
4.2.2. La formation et le développement des compétences ...............530
4.2.3. Le dialogue social ............................................................................531
4.3. L’accompagnement social ......................................................................531
4.3.1. Les prestations sociales et médicales .........................................531
4.3.2. La prévoyance sociale à long terme ...........................................532
4.3.3. L’aide à l’accession à la propriété ................................................532
5. L’apport au développement national ...........................................................533
5.1. L’apport à l’économie nationale .............................................................533
5.2. L’apport au développement régional .....................................................534
5.3. Des contributions à travers différents secteurs
au développementdu pays ......................................................................535
5.3.1. L’apport à l’agriculture nationale ..................................................535
5.3.2. L’apport au transport maritime ......................................................536
5.3.3. L’apport à l’ingénierie et à la construction
industrielles .....................................................................................536
5.3.4. L’apport à la recherche appliquée ................................................537
5.3.5. L’apport aux industries mécaniques, métallurgiques
et électriques ....................................................................................538
6. L’environnement et le développement durable .........................................538
6.1. L’environnement .......................................................................................538
508
Le Groupe Office Chérifien des Phosphates opère dans le domaine de l’industrie des phosphates et de ses
produits dérivés.
Matière naturelle, le phosphate est utilisé principalement dans la fabrication des engrais : 85 % du phos-
phate extrait dans le monde sont destinés à la production des fertilisants, les autres 15 % sont dirigés vers
les usages techniques (alimentation animale, détergence, traitement de surface, conservation des aliments,
industrie pharmaceutique, etc.).
En 1920, le 7 août exactement, l’État marocain crée l’Office Chérifien des Phosphates, établissement
public doté de l’autonomie financière, et lui confie le monopole de l’exploitation des phosphates au Maroc.
Le Directeur Général de l’Office est nommé par Dahir Royal et dirige l’entreprise sous le contrôle d’un
Conseil d’Administration. Bien qu’établissement public, l’OCP est géré comme une société de droit privé. Il
tient sa comptabilité selon les règles assignées aux sociétés et est assujetti aux impôts et taxes en vigueur.
Quelques mois seulement après sa création, les travaux d’exploitation ont démarré le 1er mars 1921 à
Boujniba, dans la région de Khouribga. Le premier bateau de phosphate marocain a quitté Casablanca le
23 juillet 1921.
Grâce aux efforts menés par le personnel et l’encadrement de l’Office, la production a augmenté progres-
sivement pour atteindre 5 millions de tonnes en 1954, à la veille de l’Indépendance du pays.
Depuis, la production a continué à se développer à un rythme plus accéléré, dépassant pour la 1re fois, les
seuils de 10 millions en 1964 et de 20 millions de tonnes en 1979.
Les techniques d’exploitation mises en œuvre ont évolué avec le temps, capitalisant le savoir-faire interne
et intégrant les améliorations et innovations développées par ailleurs.
Ainsi, les cinquante dernières années, depuis l’Indépendance du pays, ont enregistré des avancées tech-
niques importantes en matière de méthodes d’extraction et de traitement du minerai de phosphate : les opé-
rations de lavage, de flottation, de séchage, de calcination, d’enrichissement à sec.... De même, une maîtrise
approfondie des procédés de transformation chimique du phosphate a été acquise progressivement.
L’investissement le plus important pendant cette période a été double. En effet, il a concerné à la fois
l’équipement des gisements et le développement des compétences techniques et managériales du person-
nel et de l’encadrement.
Au début des années 1970, l’OCP connut un tournant dans son histoire avec le lancement des pro-
grammes de développement de la valorisation locale des phosphates, dans le cadre d’un plan d’expansion
qui allait permettre de faire passer le potentiel de transformation de phosphate de quelques centaines de mil-
liers de tonnes en 1965, au démarrage du complexe de Maroc Chimie à Safi, à cinq millions de tonnes en
1981, puis à dix millions de tonnes en 1986 avec le début de l’exploitation du Complexe de Jorf Lasfar.
Au niveau organisationnel, l’Office et les entités filiales s’organisent, en 1975, en une structure de groupe :
le Groupe OCP. Ainsi, l’OCP a pu consolider et valoriser l’apport d’une intégration industrielle verticale : de
l’extraction minière jusqu’à la commercialisation du phosphate brut et des produits dérivés, en passant par la
transformation chimique.
À partir des années 1990, des partenariats industriels à l’International avec d’autres opérateurs du secteur,
ont ouvert au Groupe la voie à d’autres développements à l’étranger et au Maroc, ce qui lui a permis de
511
sécuriser des débouchés et de consolider, naturellement, la place de leader qui lui est dévolue, eu égard à
l’importance des réserves phosphatières du pays et au rôle qu’il joue dans la promotion et le développement
de l’industrie des phosphates.
Sur le plan du fonctionnement interne, le Groupe OCP a accompagné l’évolution de la pratique managériale
dans le monde des entreprises industrielles et commerciales, en adoptant des modes et des moyens de ges-
tion parmi les plus avancés de chaque époque, notamment dans les domaines du développement des res-
sources humaines, des méthodes de gestion et de l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et
de la communication.
Enfin, le Groupe OCP, traduit, à travers une mise en œuvre évolutive, sa responsabilité sociale d’entreprise
ouverte sur son environnement.
Ainsi, d’une part, il agit pour la protection du milieu naturel, dans le cadre d’une politique volontariste de la
préservation de l’environnement, et d’autre part, il encourage ou anime plusieurs actions citoyennes, soit
directement, soit à travers des organisations spécialisées, œuvrant pour la promotion de plusieurs domaines
tels que le développement du tissu industriel environnant, l’aide à la création d’entreprise, l’ouverture de
l’école et de l’université sur leur environnement socio-économique.
La présentation qui suit développera davantage mais de manière non exhaustive, les réalisations majeures
qui ont marqué l’action du Groupe OCP durant les cinquante dernières années et donnera des indications sur
les perspectives d’évolution à l’horizon 2025.
Elle est articulée autour de sept parties couvrant les principaux domaines d’action du Groupe ainsi que les
perspectives pour l’horizon 2025 :
1. les exploitations minières,
2. les industries de transformation du phosphate (valorisation),
3. le positionnement commercial et les partenariats,
4. les ressources humaines et le développement social,
5. l’apport au développement national,
6. l’environnent et le développement durable.
7. les perspectives pour l’horizon 2025.
À l’Indépendance du Maroc, l’OCP existait depuis pratiquement 35 ans et avait extrait du sous sol maro-
cain, dans les zones de Khouribga et Youssoufia, environ 60 millions de tonnes de phosphate. 50 ans après,
la production cumulée de 1956 à ce jour, avoisine 800 millions de tonnes.
Le niveau de production en 1956 était de 5,8 millions de tonnes et les exportations marocaines avaient
atteint 5,5 millions de tonnes, ce qui plaçait l’OCP au rang de l’entreprise qui assurait 16,3 % de la production
mondiale et de premier exportateur de phosphate brut dans le monde.
Cinquante ans plus tard, en dépit de l’émergence de nouveaux producteurs dans le monde, le Groupe
OCP, qui produit actuellement 23 millions de tonnes par an, a consolidé sa part dans la production mondiale
avec 16,4 % environ. Cette consolidation traduit également le développement réalisé par le Groupe OCP
dans la valorisation du phosphate et ce, dans un contexte différent, à tous les niveaux.
Il est par conséquent naturel que, durant ces 50 ans, l’OCP ait opéré des mutations profondes et mis en
œuvre d’importants programmes de développement qui lui ont permis d’anticiper et d’accompagner la
demande du marché, consolidant ainsi la place du Maroc dans l’industrie phosphatière mondiale.
512
Sur le plan des exploitations minières, les principales étapes de ces mutations sont résumées ci après.
– En 1956, l’exploitation des phosphates marocains était répartie entre deux centres miniers :
R Khouribga qui fut le premier centre ouvert par l’OCP et où l’exploitation avait commencé en 1921.
L’extraction du phosphate y était encore presque totalement souterraine, réalisée dans cinq mines
appelées « Recettes ». De faibles quantités d’appoint étaient extraites à ciel ouvert, car ce mode
d’exploitation, n’a été introduit par l’OCP, qu’au début des années 1950.
R Youssoufia, où l’exploitation avait démarré en 1931 et dont la production était assurée, dans sa quas-
totalité, par deux mines souterraines.
– La production était de 4,6 millions de tonnes à Khouribga et de 1,2 million de tonnes à Youssoufia.
Aujourd’hui, elle est respectivement de l’ordre de 15,5 et 3 millions de tonnes.
– Pendant près de 20 ans après l’Indépendance, la production de phosphate a continué à être assurée par
ces deux centres « historiques » qui ont fait l’objet de programmes de développement importants avec
des investissements conséquents dans les modes d’extraction et de traitement du minerai.
– À la fin des années 1960, pour renforcer le potentiel de production minière de l’OCP et faire ainsi face,
aussi bien à l’évolution des exportations du phosphate brut qu’aux besoins de l’industrie de trans-
formation qui allait connaître un grand développement à partir du début des années 1970, il a été décidé
d’ouvrir un nouveau centre minier à BENGUERIR, dans le bassin phosphatier de Gantour.
– En 1973, l’OCP a commencé la mise en œuvre de ce projet qui constituait un défi majeur, dans la
mesure où il s’agissait de réaliser, avec des compétences et des moyens exclusivement nationaux, un
nouveau centre minier, dans une zone isolée, avec tout ce que cela nécessitait comme infrastructures
d’équipement et installations, aussi bien industrielles que sociales.
Le centre de BENGUERIR qui, à ce jour, reste l’un des plus grands projets miniers des trente dernières
années, a été ouvert en 1980 et produit aujourd’hui environ 2,5 millions de tonnes par an.
– Après la récupération des provinces sahariennes en 1976, l’OCP, qui a pris une participation de 65 %
dans le capital de la société PHOSBOUCRAA, a dû relever un autre défi majeur, celui d’intégrer la mine
de phosphate de BOUCRAA et de développer sa production. Celle-ci a régulièrement progressé pour se
stabiliser actuellement au niveau de 2 millions de tonnes par an. D’ailleurs, l’OCP en est devenu l’action-
naire unique en 2002.
– Au milieu des années 1980, le Groupe OCP a programmé l’ouverture d’une importante mine à Khou-
ribga. Il s’agissait de la mine de Sidi Chennane, destinée à prendre la relève de celle de Sidi Daoui, qui
était entrée en phase d’épuisement. La réalisation du projet a commencé en 1991 et l’exploitation de la
nouvelle mine a débuté en 1995.
Actuellement, avec une production annuelle de l’ordre de 7 millions de tonnes, Sidi Chennane est la plus
importante mine du Groupe.
513
1.2. Les modes d’exploitation
De l’extraction souterraine, basée essentiellement sur l’élément humain au fond des mines, aux
grands chantiers à ciel ouvert utilisant des équipements parmi les plus importants du monde, les
rendements par m2 de terrain exploité ont été multipliés par 4.
En 1956, l’extraction à ciel ouvert, introduite quatre ans auparavant, ne concernait encore que quelques
chantiers d’appoint.
Aujourd’hui, plus de 96 % de la production du phosphate du Groupe OCP est assurée par l’extraction à ciel
ouvert et seule une mine souterraine continue à être exploitée à Youssoufia.
Cette prédominance quasi absolue de l’extraction à ciel ouvert permet de récupérer la plupart des 5 à 6
couches de la série phosphatée à faible recouvrement, avec toutes les conséquences positives sur l’optimi-
sation de l’exploitation du gisement et la préservation de l’environnement, dans la mesure où le rendement
est aujourd’hui de l’ordre de 8 tonnes de phosphate par m2 de terrain exploité, contre 2 tonnes au m2 à la fin
des années 1950.
La substitution progressive de l’exploitation souterraine par l’exploitation en découverte a été rendue pos-
sible grâce, notamment, au développement et à la disponibilité sur le marché d’équipements miniers de
grandes capacités et de plus en plus performants.
Cette mutation, qui répondait par ailleurs à l’objectif majeur d’exploiter du minerai de teneur inférieure à
celle de la couche 1, seule couche exploitée en souterrain, a permis à l’OCP de réaliser en particulier :
– une amélioration des coûts de production,
– des développements importants au niveau de la productivité,
– des sauts considérables dans l’amélioration des conditions de travail et de la sécurité du personnel et
des installations.
De par sa nature, cette évolution avait un caractère continu. Cependant, quelques unes de ses étapes mar-
quantes méritent d’être rappelées :
Extension géographique
– L’exploitation à ciel ouvert a commencé en 1952 à la mine de Sidi Daoui et en 1956, elle a été étendue à
la mine de Meraa El harech, également à Khouribga. Les deux mines ont connu une importante exten-
sion de ce mode d’exploitation en 1971.
– En 1976, la mine de Boucraâ, exploitée entièrement à ciel ouvert fut intégrée au potentiel de production
de l’OCP et en 1980, la production a démarré au centre de BENGUERIR, exclusivement avec l’extraction
à ciel ouvert.
– En 1998, la première exploitation en découverte a démarré à Youssoufia.
Équipements d’exploitation
Les premières opérations ont été réalisées par une seule machine de décapage (dragline) acquise par
l’OCP en 1949 et ce n’est qu’au milieu des années 1960 que le parc des draglines a été renforcé par plu-
sieurs unités, avant que l’OCP ne mette en service, en 1970, la Marion 8400 d’une capacité de godet de 48
m3 qui, depuis, constitue une composante caractéristique et familière du paysage minier de Khouribga.
À la fin des années 1970, l’introduction des camions diesel/électriques de 150 tonnes et des pelles hydrau-
514
liques/électriques pour leur chargement, contribua, de manière substantielle, à l’amélioration des perfor-
mances d’exploitation. De même, l’emploi, à partir du milieu des années 1980, des sondeuses diesel a
contribué au développement de l’extraction sélective, notamment au niveau des couches minces des sillons.
Des simples opérations pour la couche 1 à haute teneur aux procédés élaborés pour traiter la pro-
duction des 5/6 couches exploitées, un développement important pour, à la fois, optimiser les coûts
et accompagner la récupération du minerai à faible teneur et l’évolution de la demande.
Le rôle de l’opération « traitement » est de permettre l’obtention d’un produit marchand d’une teneur en
P2O5 1 supérieure à celle du minerai extrait et d’un profil de qualité prédéfini. Par conséquent, il était naturel
que les procédés de traitement aient évolué en fonction de la teneur du minerai extrait et des exigences
commerciales, en matière de qualité des produits.
Ainsi, en 1956, seulement deux usines, une à Khouribga et l’autre à Youssoufia, assuraient le traitement du
phosphate de haute teneur, provenant de la couche 1, seule exploitée à l’époque.
Le traitement consistait essentiellement en un séchage qui concernait plus de 95 % de la production, alors
que les 5 % restants faisaient l’objet d’opérations de calcination.
1. Le P2O5 (pentoxyde de phosphore ou plus couramment anhydride phosphorique) est utilisé conventionnellement pour exprimer la teneur
en phosphore dans les phosphates et leurs dérivés.
515
Actuellement, l’opération « traitement » qui concerne pratiquement toutes les quantités extraites, consti-
tuées à hauteur de 50 % de minerai à faible teneur, est réalisée au niveau d’une dizaine d’unités, réparties
sur les quatre centres miniers du Groupe et utilisant plusieurs procédés : le séchage, la calcination, le lavage,
la flottation et l’enrichissement à sec.
Parallèlement, l’utilisation à Gantour du gaz naturel produit à Essaouira et la substitution partielle à Khou-
ribga du fuel par le coke de pétrole ont permis d’atténuer l’impact de l’énergie dans le coût des opérations de
séchage.
Cet important développement du potentiel de traitement a permis à l’OCP, tout en optimisant les coûts,
d’accompagner et même d’anticiper l’évolution de la demande du marché en termes de qualités et de profils
de phosphate marchand et d’être, ainsi, en mesure d’offrir une gamme de produits plus développée et mieux
adaptée aux besoins de ses clients.
Aujourd’hui, la gamme des phosphates marchands du Groupe OCP est composée de plus de 25 qualités,
élaborées au niveau des quatre centres miniers, au lieu de trois qui étaient produites en 1956 : deux à Khou-
ribga et un à Youssoufia.
Cet aspect du métier d’exploitation des phosphates est assez vaste pour se prêter à une description résu-
mée de son évolution. Néanmoins, quelques indications permettent d’apprécier les réalisations de l’OCP en
la matière depuis l’Indépendance.
Jusqu’en 1956, la reconnaissance géologique, qui était focalisée sur le seul niveau de phosphate exploité
(couche 1), ne concernait que la teneur en P2O5. Basée sur quelques centaines de puits de reconnaissance,
elle était relativement grossière et ses résultats s’étaient traduits par un total de ressources reconnues et
étudiées, inférieur à un milliard de m3.
Actuellement, plus de 24000 ouvrages de reconnaissance ont été réalisés dans les quatre principaux bas-
sins de phosphate (Ouled Abdoun, Gantour, Meskala, Oued Eddahab) et les ressources reconnues et étu-
diées sont de l’ordre de 88 milliards de m3.
De plus, la reconnaissance est devenue plus précise pour pouvoir accompagner une exploitation plus
sélective en raison, notamment, des exigences commerciales qui ne se limitent plus à la teneur en P2O5 mais
concernent d’autres constituants tels que la silice, le magnésium, le cadmium, les éléments radioactifs, etc.
Enfin, il est important de rappeler que le transfert du Centre d’Études et de Recherches des Phosphates
minéraux (CERPHOS) au Maroc, en 1975, et son intégration au Groupe OCP, a permis à l’Office de disposer
d’un outil performant, pour développer et maîtriser davantage la reconnaissance et la caractérisation des
gisements de phosphates marocains.
516
1.5. La capitalisation technique et le développement métiers
Jusqu’aux années 1950, l’OCP était encore une entreprise minière qui exploitait des mines souterraines
classiques et utilisait des procédés de traitement simples.
Il était donc normal que le patrimoine technologique de l’Office ait été relativement limité et ait concerné
essentiellement les méthodes et les équipements d’exploitation utilisés, eux-mêmes conditionnés par l’état
d’avancement des technologies à l’époque.
L’évolution considérable qu’ont connue les modes d’exploitation et de traitement depuis 1956 a, naturelle-
ment, permis à l’OCP de capitaliser un développement technologique et une expertise métier en relation
avec cette évolution. Nous pouvons en citer quelques aspects marquants :
– L’extension de l’exploitation à ciel ouvert a conduit l’OCP à intégrer, en plus des techniques spécifique-
ment minières, des métiers associés qui sont liés principalement à l’exploitation et à la maintenance de
gros équipements de chantier. De plus, l’étendue des mines à ciel ouvert a également conduit l’Office à
développer progressivement, par ses propres compétences, des approches et des méthodes d’exploita-
tion spécifiques, adaptées aux caractéristiques de ses mines.
– La mécanisation des mines souterraines a permis à l’OCP de maîtriser les technologies correspondantes
et d’aller, au-delà, en apportant des perfectionnements significatifs, notamment au niveau des perfor-
mances d’exploitation.
– La diversification des méthodes de traitement a nécessité la maîtrise des procédés et des technologies
ainsi que des efforts consistants pour les optimiser et les développer, en fonction des minerais extraits
et des conditions d’exploitation.
– L’ouverture du centre minier de BENGUERIR a été en elle-même une capitalisation majeure dans le
domaine de la conduite de projets miniers de grande envergure.
517
2. Les industries de transformation du phosphate (valorisation)
2.1.1. Genèse
En 1956, l’OCP assurait plus de 16,3 % de la production mondiale du phosphate et toutes ses exportations
se faisaient sous forme de minerai.
En effet, depuis le démarrage de l’exploitation des phosphates marocains en 1921, les efforts de l’OCP ont
été axés sur l’augmentation des capacités de production et, ultérieurement, sur quelques opérations de trai-
tement du minerai en vue d’améliorer la teneur et la qualité du phosphate marchand.
Quelques années après l’Indépendance, le gouvernement marocain avait chargé le Bureau d’Études et de
Participations Industrielles (BEPI), d’élaborer un plan de valorisation des ressources naturelles du Maroc.
Parmi les recommandations dégagées par ce dernier, figurait le projet de réaliser, sur le site de Safi, un
complexe chimique pour la valorisation des phosphates et ce, dans le triple objectif de :
– promouvoir l’industrialisation du pays, à travers un grand projet qui valorise deux produits de mines
nationales : le phosphate de Youssoufia et la pyrrothine de Kettara,
– contribuer à l’approvisionnement de l’agriculture nationale en engrais,
– renforcer Safi comme centre de développement régional, dont le port était déjà utilisé pour les exporta-
tions de phosphate de Youssoufia.
Le complexe, appelé Maroc Chimie, a été mis en service en juin 1965 pour produire deux engrais phospha-
tés : le TSP et le DAP.
Ce fut le début de la mise en œuvre d’une politique de valorisation des phosphates marocains qui, en capi-
talisant l’expérience de Maroc Chimie et en anticipant de manière sereine l’évolution des échanges mon-
diaux des dérivés du phosphate, allait connaître, plus tard, un développement remarquable qui a permis au
Maroc de devenir, à partir de 1997, le premier exportateur mondial du phosphate sous toutes formes, cou-
vrant le minerai et les produits dérivés. Actuellement, sa part de marché est supérieure à 27 %.
Durant ses premières années d’exploitation, Maroc Chimie livrait au marché local entre 30.000 et
45.000 tonnes d’engrais par an, composées essentiellement de TSP.
518
Par la suite, les programmes de développement de l’agriculture marocaine initiés à l’époque, ont préconisé
l’utilisation d’autres types d’engrais, notamment des NPK plus adaptés aux besoins du pays.
Pour répondre à ces besoins, Maroc Chimie a dû réaménager ses unités de production, tout en construi-
sant un atelier d’engrais ternaires (NPK) dont l’exploitation a démarré en 1974.
Depuis, Maroc Chimie a satisfait les besoins du marché local en engrais phosphatés, ce que continue à
faire actuellement Maroc Phosphore, qui a absorbé Maroc Chimie en 1996, et qui livre aujourd’hui à l’agri-
culture nationale plus de 400.000 tonnes d’engrais phosphatés par an.
En toute logique, dès la fin des années 1960 et le début des années 1970, la question de la valorisation des
phosphates pour l’exportation commençait à se poser de manière de plus en plus aiguë, dans la mesure où il
était devenu nécessaire pour l’OCP d’accompagner les mutations profondes qui s’opéraient dans la structure
du commerce mondial des produits phosphatés, qui s’orientaient vers les produits dérivés.
En effet, des dispositions environnementales plus contraignantes, notamment en Europe occidentale,
ainsi que l’effet de la politique agricole commune, se traduisaient par des fermetures d’unités de production
basées sur le phosphate et provoquaient des restructurations industrielles.
C’est ainsi que l’OCP entreprit l’élaboration d’un vaste programme de valorisation dont la réalisation allait
commencer au début des années 1970 et durer pratiquement une quinzaine d’années, selon les principales
étapes suivantes :
L’année 1976 a marqué le début d’un grand développement qui va permettre au Groupe OCP, dix ans plus
tard, de disposer d’une capacité de valorisation plus de 20 fois supérieure à celle installée initialement à
Maroc Chimie.
Par ailleurs, le démarrage de Maroc Phosphore I a marqué l’entrée dans le marché international de l’acide
phosphorique de l’OCP, devenu, en janvier 1975, après l’intégration des industries de transformation et
d’autres métiers de support ou d’accompagnement, le Groupe Office Chérifien des Phosphates (Groupe
OCP).
Par la suite, l’année 1981 a vu l’entrée en exploitation, également à Safi, de Maroc Phosphore II construite
pour transformer le phosphate de Benguérir, ce qui a permis au Maroc de disposer, sur ce site, de l’une des
519
plus grandes plates-formes de fabrication d’acide phosphorique au monde pouvant valoriser plus de 5 mil-
lions de tonnes de phosphate et produire environ 1.400.000 tonnes d’acide phosphorique.
Ce potentiel de production a permis au Groupe OCP d’accompagner l’évolution du marché de l’acide phos-
phorique durant la première moitié des années 1980 et par la suite, de devenir, dès 1987, le premier exporta-
teur mondial de ce produit.
Le projet de création du complexe de Jorf Lasfar avait été initié par l’OCP dès le début des années 1970 et
le choix du site, en accord avec les Pouvoirs Publics, a été fait pour, notamment :
– valoriser les phosphates de la zone de Khouribga, ce qui permet de développer la production de ce
centre et de profiter de sa proximité de Jorf Lasfar,
– décongestionner le port de Casablanca en effectuant à partir de Jorf Lasfar une partie des exportations
de phosphate de Khouribga,
– créer un nouveau pôle de développement régional avec l’un des plus grands ports du continent africain,
– disposer d’une plate-forme pour les développements futurs de l’industrie de transformation du phos-
phate en profitant des infrastructures et des équipements réalisés : port, chemin de fer, alimentation en
eau, électricité,...
Le projet a été concrétisé et l’ensemble industriel de Jorf Lasfar, composé des unités Maroc Phosphore III
et IV, a été mis en service en deux étapes :
– 1986 : démarrage de la production d’acide phosphorique,
– 1988 : démarrage de la production d’engrais, en particulier du DAP.
L’entrée en exploitation, dès 1986, de ce deuxième complexe a eu plusieurs conséquences positives sur
le Groupe OCP, dont on peut citer à titre d’illustration :
– les capacités installées ont permis au Groupe OCP de pratiquement doubler son potentiel de valorisation
qui est passé à 2,8 millions de tonnes P2O5 par an, correspondant à la transformation d’environ 10 mil-
lions de tonnes de phosphate,
– la mise en service des lignes de fabrication de l’engrais DAP marqua l’entrée du Maroc, à une grande
échelle industrielle, dans le marché de ce produit qui est l’engrais phosphaté le plus vendu dans le
monde,
– les unités de Maroc Phosphore III et IV ont constitué la composante principale de l’un des projets
majeurs de développement régional intégré, incluant la construction d’un grand port commercial, l’exten-
sion du réseau ferroviaire, ainsi que le développement d’infrastructures d’équipements.
520
2.3. La stratégie de consolidation et les projets en partenariat
Après la réalisation des grands projets miniers et industriels des années 1970 et 1980, le Groupe OCP dis-
posait, au début des années 90, d’un potentiel de production et de valorisation lui permettant de jouer pleine-
ment un rôle de leader dans le marché mondial des phosphates sous toutes formes.
Cependant, pour mettre à profit l’évolution sectorielle de la demande mondiale en vue de consolider et
sécuriser ses positions sur le marché mondial des produits dérivés, le Groupe OCP a réadapté sa stratégie de
valorisation, en visant, en particulier :
– la consolidation du potentiel des unités installées à Jorf Lasfar et à Safi, et l’amélioration du rendement
des investissements antérieurs,
– la réalisation, sur le site de Jorf Lasfar, de nouvelles unités de production de taille adaptée à l’évolution
du marché, soit par le Groupe seul, soit en association avec des partenaires, chaque fois que cela pré-
sente un intérêt pour les différentes parties,
– la diversification en dehors des engrais, à travers la fabrication de l’acide phosphorique purifié, produit à
haute valeur ajoutée, en association avec d’autres partenaires qui, tout en disposant de la technologie,
ont une forte présence sur le marché, dont ils maîtrisent les données,
– la participation à des projets communs, réalisés en dehors du Maroc, avec des partenaires étrangers.
Dans le cadre de la mise en œuvre de cette stratégie, trois investissements importants ont été réalisés,
dont deux au Maroc, sur le site de Jorf Lasfar, et un en Inde :
– L’usine d’EMAPHOS : construite en partenariat avec la société belge PRAYON dont l’OCP possède
50 %, et la société Chemische Fabrik Budenheim (CFB-Allemagne), l’usine EMAPHOS a une capacité de
production de 120.000 tonnes P2O5 d’acide phosphorique purifié par an.
La mise en service de cette usine, en Janvier 1998, représente un grand pas qualitatif dans la valorisation
des phosphates marocains, par l’introduction du Groupe OCP dans le marché des utilisations techniques
des dérivés du phosphate.
De plus, la quasi-totalité de la production est destinée aux deux partenaires du Groupe, ce qui sécurise,
sur le long terme, la commercialisation du produit d’EMAPHOS tout en lui permettant d’avoir un accès
direct sur ce marché spécialisé.
– L’usine d’IMACID : il s’agit d’une usine de fabrication d’acide phosphorique d’une capacité de
330.000 tonnes P2O5 par an, construite en association avec la Société indienne Chambal Fertilizers and
Chemical (groupe BIRLA) qui utilise, en Inde, plus des deux tiers de la production de l’usine.
Cette usine a démarré en 1999.
– Le complexe Paradeep Phosphate Limited (PPL) : en février 2002, le Groupe OCP et le Groupe BIRLA,
son partenaire dans IMACID, ont acquis, ensemble, 74 % de la société étatique PPL qui produit et com-
mercialise des engrais en Inde.
Les besoins de cette société permettent au Groupe OCP d’écouler environ 700.000 tonnes de phos-
phate et 200.000 tonnes P2O5 d’acide phosphorique par an.
521
2.4. Le potentiel actuel
Avec la réalisation, depuis 1997, de différents projets visant l’amélioration de la productivité des installa-
tions existantes, aussi bien à Safi qu’à Jorf Lasfar, le potentiel annuel de valorisation locale du Groupe OCP
est aujourd’hui de l’ordre de 3,4 millions de tonnes P2O5, ce qui correspond à une capacité de transformation
de phosphate d’environ 12 millions de tonnes par an.
Ce potentiel permet au Maroc de valoriser plus de 95 % du phosphate de Gantour (Youssoufia + Bengué-
rir), transformés à Safi, et 45 % du phosphate de Khouribga, valorisés à Jorf Lasfar, ce qui correspond à un
taux de valorisation global d’environ 54 % de la production annuelle du Groupe OCP.
Cela assure à ces deux zones minières une pérennité de l’activité et des perspectives de progrès socio-
économiques sur le long terme, avec toutes les conséquences sur le développement humain de ces régions.
Poursuivant la mise en œuvre de cette stratégie visant le développement de la valorisation, le Groupe OCP
réalise actuellement un programme d’investissement comprenant les projets suivants :
522
2.5.3. Unité de production du Superphosphate Simple (SSP)
Le Groupe OCP vise également la réalisation d’une unité de fabrication de l’engrais Superphosphate
Simple, d’une capacité de l’ordre de 150.000 tonnes par an, destinée aussi bien au marché local qu’à l’export.
523
que sur le plan externe, propre au marché international, sachant que les unes provoquaient ou accompa-
gnaient les autres, et réciproquement.
Des évolutions majeures ont caractérisé le marché au cours des 50 dernières années. On peut les regrou-
per en cinq rubriques :
524
3.2.1. L’évolution de la structure du marché
– À partir de la fin des années 70, déclin progressif de la consommation du phosphate brut puis des
engrais en Europe Occidentale, grand débouché traditionnel du phosphate marocain. Ainsi, cette
consommation est passée de l’équivalent de 25 millions de tonnes de phosphate en 1974/75 à l’équi-
valent de 11 millions de tonnes actuellement pour de multiples raisons dont la surproduction agricole et
la politique agricole commune.
– Émergence des pays de l’Europe de l’Est, en dehors de l’URSS, comme grands consommateurs de
phosphate et d’engrais avec une évolution ascendante entre 1965 et 1983/1984, faisant passer leur
consommation de l’équivalent de 4 millions de tonnes de phosphate à l’équivalent de 12 millions de
tonnes sur cette période, avant de décliner pour retomber subitement en 1991/1992 à l’équivalent de
2 millions de tonnes de phosphate, suite aux profonds changements politiques intervenus dans cette
zone et leurs conséquences.
– Émergence rapide et conséquente de l’Ex-URSS comme grand ensemble producteur, importateur et
consommateur de phosphate et dérivés entre 1965 et 1988/1989, avec une consommation passant de
l’équivalent de 6 millions de tonnes de phosphate à l’équivalent de 30 millions de phosphate sur cette
période, avant de décliner à partir de 1989/1990 pour se stabiliser depuis, entre l’équivalent de 2,5 à
3,5 millions de tonnes de phosphate. Cela s’explique essentiellement par les conséquences des change-
ments politiques intervenus dans ce pays.
– Émergence de l’Amérique Latine comme débouché de plus en plus important de phosphate et dérivés,
à la fois pour couvrir ses besoins en produits agricoles et soutenir l’orientation de certains pays comme
le Brésil et l’Argentine vers l’exportation massive des produits agricoles.
– Confirmation de la Chine et de l’Inde comme grands consommateurs de phosphate et dérivés, le pre-
mier devenant exportateur tout en restant importateur d’engrais alors que le second, demeurant impor-
tateur, en particulier de l’acide phosphorique avec plus de 56 % du commerce mondial actuellement.
Cela s’explique par la stratégie de l’autosuffisance alimentaire en un moment où le niveau de vie conti-
nue à s’améliorer pour une population en croissance.
– Augmentation de la part des dérivés, au détriment du phosphate, dans le commerce mondial du phos-
phate et dérivés, passant de moins de 4 % en 1956 à 8,66 % en 1968, 27 % en 1980, 50 % en 1991 et à
près de 60 % actuellement.
– Augmentation du nombre de producteurs exportateurs de phosphate et dérivés (une trentaine actuelle-
ment contre moins de 20 en 1956).
525
producteurs américains et au moment de forte hausse, à l’augmentation des capacités de production et
l’émergence de nouveaux producteurs, dont les plus récents sont le Canada, la Chine, l’Australie.
Cependant, après avoir varié entre 8 et 12 $ la tonne pendant les trois décennies qui ont précédé l’Indé-
pendance, le prix du phosphate brut, à titre d’exemple, a fait un saut important au milieu des années 70,
concomitamment avec le 1er choc pétrolier, passant ainsi à plus de 55 $ la tonne, avant de se stabiliser à un
niveau qui représente 3 à 4 fois celui connu avant l’Indépendance, ce qui correspond à 32/45 $ par tonne,
selon la qualité.
La concurrence a changé de nature et elle est devenue plus dure pour les principales raisons qui suivent :
– l’émergence de nouveaux producteurs en Asie et en Océanie, comme la Chine et l’Australie,
– l’avantage de fret dont bénéficient ces nouveaux producteurs exportateurs ainsi que ceux du Moyen-
Orient par rapport au Maroc, quand il s’agit des marchés d’Asie, grands consommateurs de phosphate
et d’engrais,
– la baisse, depuis les événements politiques de 1990, de la consommation des engrais dans les pays de
l’Ex-URSS, ce qui s’est traduit, à partir du début des années 90, par l’orientation vers l’exportation de la
majeure partie de leur production,
– le regroupement de certaines sociétés nord américaines, à différentes périodes, soit dans l’objectif
d’améliorer leurs coûts de production et d’avoir une taille plus grande, avec une gamme de produits plus
complète, couvrant non seulement le phosphate et ses dérivés mais également l’azote et la potasse,
soit comme conséquence des difficultés rencontrées par certains producteurs et leur rachat par
d’autres.
Le contexte dans lequel a évolué l’activité du phosphate et de ses dérivés n’a pas toujours été favorable et
ce, pour différentes raisons. Il a été caractérisé principalement par :
– de fortes variations de la production du phosphate dans le monde qui a atteint un maximum de 165 mil-
lions en 1988, avant de baisser à 118 millions en 1993. En 2001, elle a atteint 125 millions de tonnes.
Depuis, un regain d’activité a été enregistré, la faisant passer actuellement à 140 millions de tonnes
environ.
– de fortes variations des exportations mondiales de phosphate sous toutes ses formes qui ont atteint leur
maximum en 1988 avec l’équivalent de 80 millions de tonnes avant de baisser à l’équivalent de 56 mil-
lions de tonnes en 1993 et de remonter à l’équivalent de 75 millions de tonnes actuellement,
– après une augmentation naturelle de 16 millions de tonnes en 1956 à 55 millions de tonnes en 1974, les
exportations mondiales de phosphate brut ont baissé de façon importante depuis, avec de faibles signes
de reprise : 46,5 millions de tonnes en 1988 puis 26,7 millions en 1993 et 29 millions actuellement.
Parallèlement, une évolution inverse a caractérisé les exportations de produits dérivés, sans que, toutefois,
cette évolution favorable ne compense la baisse des exportations de phosphate brut : ainsi, elles sont pas-
sées de l’équivalent de 33,5 millions de tonnes de phosphate brut en 1988 à l’équivalent de 29,3 millions en
1993 et 46 millions en ce moment.
526
3.3. Les enjeux et les objectifs
Pour consolider sa position, le Groupe OCP devait anticiper les évolutions et agir pour :
– se maintenir, en renouvelant et fidélisant sa clientèle,
– pérenniser ses positions sur le marché,
– continuer à être leader du marché et développer le rayonnement du Maroc sur les pays avec lesquels il
traite,
– accroître sa compétitivité et optimiser ses résultats.
Pour se maintenir, dans un marché où les baisses de la production mondiale et des exportations ont
dépassé, à différentes périodes, sa production totale, le Groupe OCP s’est adapté au marché, à son évolution
et à ses exigences par :
– la qualité et les variétés des produits offerts : 40 actuellement au lieu de 12 en 1980 et 3 en 1956,
– la flexibilité de l’outil de production pour suivre la demande,
– l’assistance technique apportée aux clients,
– la compensation de ses marchés traditionnels en déclin (Europe) par de nouveaux marchés en Amé-
rique, en Asie et en Océanie,
– des projets de valorisation pour être en phase avec la forme vers laquelle évolue le commerce mondial.
Pour pérenniser ses positions, le Groupe OCP a initié une approche du marché qui s’est fixée comme
objectif principal de sécuriser les débouchés sur le long terme, pour pouvoir appréhender l’avenir avec séré-
nité et rentabiliser ses investissements.
Ainsi, en plus de l’approche commerciale classique, de nouveaux concepts ont été développés dont on
peut citer :
– les partenariats (Prayon en Belgique, Emaphos au Maroc avec des Belges et des Allemands, Imacid au
Maroc avec des Indiens, PPL en Inde, et Pakistan Maroc Phosphore au Maroc avec des Pakistanais),
– les travaux à façon (France, Espagne),
– la création de nouveaux débouchés pour les produits dérivés, en lieu et place du phosphate brut
concurrent (Turquie, France, Hollande),
– le développement d’une production locale dans les pays consommateurs (Pakistan, États-Unis d’Amé-
rique).
Il résulte de cette approche qu’actuellement, plus de 70 % des exportations du Groupe OCP sont sécuri-
sées par des contrats commerciaux ou de partenariats, sur le long terme, avec l’objectif d’arriver, très bien-
tôt, à 75/80 %.
De plus, ces approches innovantes, parallèlement aux approches habituelles, ont permis de toucher plus
de pays dans le monde, tout en véhiculant une image positive du Maroc, avec un rayonnement plus large sur
le plan international.
527
Pour accroître sa compétitivité et optimiser ses résultats, dans un marché où seuls les plus perfor-
mants techniquement, économiquement et commercialement peuvent se maintenir, le Groupe OCP a agi
pour :
– motiver le personnel (organisation, développement social, etc...),
– augmenter la production en réhabilitant l’outil industriel au moindre coût,
– améliorer les consommations spécifiques des matières premières pour optimiser le prix de revient,
– engager de nouveaux investissements dans la production de l’acide phosphorique et des engrais et ce,
pour équilibrer ses exportations entre phosphate brut et produits dérivés, satisfaire ses engagements
sur le long terme et défendre certains de ses marchés de phosphate et d’acide phosphorique, en ayant
plus de capacités d’engrais et en disposant d’un outil de production, suffisamment flexible pour pro-
duire, indifféremment, l’acide phosphorique ou les engrais. En plus, cela le protège contre le bas-
culement de certains débouchés d’un produit vers l’autre (Inde, Chine, Iran, Pakistan),
– engager des investissements chez des clients pour optimiser leurs capacités de stockage ou de déchar-
gement, donc pour améliorer sa compétitivité et ses résultats, en réduisant le fret maritime.
C’est ainsi qu’actuellement, le Groupe OCP exporte du phosphate brut et des dérivés alors qu’en 1956,
ses exportations se limitaient au phosphate brut.
Sa position de leader en phosphate brut été consolidée au cours des 50 dernières années, en un moment
où ses exportations de produits dérivés se sont développées de telle manière qu’il a pu occuper et confirmer
la position de 1er exportateur d’acide phosphorique avec plus de 45 % du marché et que, globalement, ses
exportations de phosphate brut, d’acide phosphorique, d’acide phosphorique purifié et d’engrais, repré-
sentent plus de 27 % du marché mondial, faisant de lui le 1er exportateur mondial devant les États-Unis qui
détiennent 20 % environ du marché.
Il traite avec plus de 80 clients répartis sur une quarantaine de pays, contre 25 en 1956.
528
Actuellement, l’effectif du Groupe OCP est de 19.676 agents dont 839 ingénieurs et équivalents. Compa-
rativement au lendemain de l’Indépendance, la répartition de cet effectif se présente comme suit :
Entre 1956 et aujourd’hui, l’effectif employé par le Groupe OCP et sa structure ont naturellement évolué
en fonction, d’une part, des dimensions minières et industrielles que prenait l’entreprise à chaque étape de
son expansion et d’autre part, des méthodes d’exploitation et des technologies utilisées.
Par ailleurs, du fait que le Groupe OCP soit, à la base, une entreprise minière, la situation géographique de
ses lieux d’activité lui a imposé, en plus des activités normales d’exploitation, d’initier et d’assurer des pres-
tations de maintenance pour les installations techniques et des prestations sociales et médicales pour son
personnel, notamment l’habitat, l’infrastructure sociale des villages d’habitation, l’hôpital, etc.... Ainsi, le per-
sonnel appartient à diverses spécialités : à côté des exploitants, il y a du personnel pour la maintenance
industrielle (mécaniciens, électriciens, génie civil, ...), des animateurs culturels et sportifs, des médecins, des
infirmières, des assistantes sociales.
La gestion des ressources humaines, au sein du Groupe OCP, a toujours été en adaptation permanente
avec les changements sociaux, technologiques et organisationnels, qui ont marqué l’entreprise et l’envi-
ronnement dans lequel elle évolue.
529
– Le développement du management participatif, qui, depuis 1982, se consolide progressivement au
sein de l’entreprise, à travers diverses approches nouvelles : consolidation de la DPO, promotion des
démarches participatives d’amélioration (qualité, sécurité, environnement), développement et enri-
chissement des programmes de formation continue, « reingineering » global des processus de la GRH,
etc.
Ainsi, le Groupe OCP s’est inscrit dans un système d’adaptation et de régulation des ressources
humaines, s’articulant autour de six principaux éléments : le plan de développement du Groupe OCP, la stra-
tégie de changement interne, la définition des emplois, l’historique des informations sur les mouvements du
personnel, les modèles de simulations et le plan d’action pour satisfaire les besoins dégagés.
L’analyse des écarts entre les ressources humaines disponibles et les besoins exprimés permet de déga-
ger les objectifs en matière de recrutement et les possibilités offertes par la promotion interne du personnel.
Dans ce cadre, la promotion interne du personnel ouvrier et technicien du Groupe est réalisée à travers trois
systèmes d’avancement : la promotion par voie de formation, la promotion par voie de concours et l’avance-
ment au mérite. Ce dernier système est conçu pour permettre aux agents compétents, n’ayant pas les apti-
tudes à réussir les concours, de bénéficier eux aussi d’un avancement.
La formation joue un rôle central dans ces différents domaines et ces diverses actions. Le système de for-
mation, au sein du Groupe OCP comporte deux volets importants : la formation initiale et la formation conti-
nue.
La première composante vise à doter les entités du Groupe en ouvriers professionnels et agents de maî-
trise pour répondre aux besoins exprimés par les exploitations minières et industrielles de l’entreprise. Les
cycles ouverts sont redéfinis périodiquement, en fonction des besoins arrêtés avec les services utilisateurs
et les possibilités de recrutement direct auprès des lauréats des écoles et des institutions de formation
externes.
Quant à la formation continue, elle œuvre essentiellement dans le sens du développement des compé-
tences et des connaissances générales de toutes les catégories du personnel en activité. En général, le sys-
tème de formation continue est conçu selon un processus interactif à trois niveaux :
– un premier niveau constitué de séminaires d’information, de sensibilisation et de première assimilation
visant la présentation des techniques nouvelles ou éprouvées, l’échange sur les problèmes majeurs ou
nouveaux et l’entraînement à l’utilisation des techniques nouvelles,
– un deuxième niveau constitué de séminaires d’application ou d’approches de formation-action, pour la
mise en pratique des techniques présentées lors des sessions de 1er niveau ou connues par ailleurs,
– un troisième niveau constitué de groupes de travail pour la recherche et la mise en œuvre de solutions à
des problèmes complexes, associant des experts internes et externes.
Les domaines traités par la formation continue sont diversifiés ; ils abordent les relations humaines, la ges-
tion d’entreprise, les techniques minières et industrielles.
530
Ainsi, la formation continue contribue fortement à l’élévation des qualifications et du niveau de connais-
sances générales du personnel et à l’accompagnement des changements au sein de l’entreprise.
Ces dernières décennies, les programmes de formation du Groupe OCP accueillent plus de 10.000 agents
par année. Ainsi, sur les 30 dernières années, les entités de formation du Groupe ont enregistré plus de
320.000 participations au titre de la formation continue et accueilli ou accompagné plus de 19.000 stagiaires
dans le cadre des programmes de formation-embauche.
Dans cette dynamique, plus de 82.000 agents, soit en moyenne annuelle 2.700 agents par an, sur une
trentaine d’années, ont bénéficié de promotions internes.
Jusqu’au début des années 1960, la représentation du personnel et le dialogue social au sein de l’OCP,
entreprise minière, étaient régis par des textes internes élaborés vers la fin des années 1940.
Avec la promulgation, en décembre 1960, du Dahir portant statut du personnel des entreprises minières,
l’OCP a adopté de nouveaux statuts du personnel. La représentation du personnel repose sur une institution-
clé : les Commissions de Statuts et du Personnel (CSP). Ce sont des commissions paritaires constituées de
représentants élus par le personnel et de représentants de la Direction. Ces commissions, qui ont été mises
en place dans les différentes entités du Groupe, ont constitué un outil important pour la gestion et la résolu-
tion des problèmes individuels et collectifs de travail.
Parallèlement, et dans le souci d’organiser le dialogue avec les organisations syndicales représentatives au
sein de l’entreprise, le Groupe OCP a créé, en 1995, une commission interne du dialogue social. Cette
commission, où siègent les responsables de la Direction et ceux des syndicats, constitue un espace privilé-
gié d’échange et de concertation.
De même, avec les représentants élus du personnel, les partenaires syndicaux et les responsables de la
Direction, une autre Commission, dénommée « Commission Logement » se réunit deux fois par an pour exa-
miner et développer les possibilités d’aide à l’accession à la propriété.
À l’instar des entreprises minières, et du fait de la situation géographique des lieux où il exerce ses activi-
tés, le Groupe a été appelé naturellement à assurer des prestations sociales et médicales à l’ensemble de
ses agents.
Ainsi, le Groupe OCP a progressivement édifié une infrastructure sociale, médicale et culturelle qui tend à
assurer une vie familiale et communautaire harmonieuse au personnel du Groupe et qui, souvent, profite
également aux populations locales.
Parmi les composantes de cette infrastructure, on peut citer, notamment, les formations hospitalières, les
structures d’animation culturelles et sportives, les centres d’estivage, les économats, etc..., ainsi qu’une
531
structure associative pour l’enseignement préscolaire et primaire des enfants des agents du Groupe, dans
les centres miniers et industriels.
Par ailleurs, un système de couverture médicale, pour l’ensemble du personnel du Groupe, complète les
prestations assurées directement par l’entreprise en matière de soins médicaux et de médecine de travail et
préventive.
Enfin, et dans le cadre de la maîtrise du transport du personnel, en particulier dans ses aspects sécurité et
adaptation aux contraintes de l’exploitation, la Société de Transports Régionaux (SOTREG), filiale du Groupe
OCP, a été créée, en 1973, pour assurer le transport des agents du Groupe dans tous les centres miniers et
sites industriels ainsi que ceux travaillant à la Direction Générale. Depuis quelques années, cette activité est
progressivement confiée à des sociétés spécialisées chaque fois que cela est possible. Cette orientation
s’inscrit dans le cadre de la politique d’externalisation des activités périphériques menée par le Groupe.
Une autre particularité sociale se retrouve dans la prévoyance à long terme et notamment la retraite. En
effet, l’OCP, qui offrait déjà, depuis 1947, un régime de retraite spécifique à certaines catégories du person-
nel, a mis en place, en 1951, un régime spécial de retraite dédié à l’ensemble du personnel journalier per-
manent. Les pensions versées, au titre des différents régimes de pension internes, s’élevaient, en 1956, à
l’équivalent de 2,7 millions de dirhams et la réserve constituée atteignait l’équivalent de 16 millions de dir-
hams. Ces régimes de pension sont à capitalisation collective avec contributions du salarié et de l’employeur.
En 1964, l’Office a unifié, pour l’ensemble des agents, le régime interne de retraite et, depuis, ce régime,
qui a été étendu à l’ensemble du personnel du Groupe OCP en 1978 a continué à faire l’objet d’un suivi parti-
culier, visant à offrir les meilleures prestations possibles aux pensionnés, tout en préservant, autant que pos-
sible, les équilibres financiers.
Depuis 1996, la gestion du régime est inscrite dans une démarche actuarielle, conformément aux normes
internationales en la matière. Par ailleurs, dans une démarche de modernisation de la gestion et d’anti-
cipation de toute entrave que pourrait constituer le régime interne de retraite pour l’évolution du Groupe, il a
été décidé d’inscrire les nouvelles recrues, depuis janvier 2001, dans un régime externe, en l’occurrence le
RCAR et son régime complémentaire géré par la CDG.
À fin 2003, le régime interne de retraite du Groupe OCP compte 27.000 pensionnés et 19.000 cotisants
avec une masse de pension de l’ordre de 880 millions de dirhams. Les prestations à payer dépasseront les
2 milliards de dirhams en 2012 et les 3 milliards de dirhams en 2025. L’engagement retraite actuel est de
plus de 22 milliards de dirhams.
À partir de 1971, le Groupe OCP a fourni un effort particulier en lançant, à différentes dates, différentes
actions en matière d’aide du personnel à l’accession à la propriété, soit à travers la cession au personnel des
logements de fonction, soit à travers l’accompagnement au niveau de prêts pour l’acquisition ou la construc-
tion de logements personnels. À ce titre, près de 12.000 agents ont déjà bénéficié de ces dispositions.
532
En résumé
Durant les cinquante dernières années, la gestion des ressources humaines a été impulsée par le souci de
développement des compétences au sein de l’entreprise pour pouvoir répondre aux exigences de rentabilité
et de compétitivité, parallèlement à la motivation et à l’épanouissement social du personnel. Les politiques
de formation et de développement social ont été parmi les composantes centrales du système mis en œuvre
pour y parvenir.
À l’Indépendance du Maroc, l’Office Chérifien des Phosphates, première entreprise du pays, réalisait un
chiffre d’affaires à l’export de l’ordre de 70 millions USD et ses exportations, composées exclusivement de
phosphate brut, représentaient, en valeur, environ le quart de l’ensemble des exportations nationales.
Depuis, en opérant progressivement diverses évolutions, sur les plans miniers et industriels, l’OCP a régu-
lièrement apporté sa contribution directe et indirecte à l’économie marocaine qui a connu, par ailleurs, des
développements remarquables dans d’autres domaines.
Son chiffre d’affaires actuel est de l’ordre de 1,65 milliard USD et ses exportations, en phosphate et en
produits dérivés, représentent encore, sur les mêmes bases de comptabilisation, environ le quart de la valeur
des exportations nationales, bien que ces dernières se soient développées en couvrant d’autres secteurs.
En considérant les nouvelles bases de comptabilisation retenues depuis 1998 sur le plan national, cette
part devient 14 % environ.
De plus, en dehors de sa contribution au budget de l’État, qui a totalisé, entre 1957 et 2003, un montant
cumulé de plus de 52,8 milliards DH, le Groupe OCP procure chaque année aux chemins de fers marocains
plus de 60 % de leur trafic marchandise et environ la moitié de leurs recettes globales, avec un étalement
régulier sur toute l’année. De même, les besoins du Groupe OCP en énergie électrique et en eau repré-
sentent une part relativement importante de la production de l’Office National de l’Électricité et de l’Office
National de l’Eau Potable.
Par ailleurs, en volume, le tonnage exporté par le Groupe OCP, ramené aux exportations totales du pays,
continue de représenter plus de 70 % de celles-ci. En ajoutant ses importations en matières premières, les
volumes manipulés par le Groupe entretiennent le niveau et la régularité de l’activité des ports de Casa-
blanca, Jorf Lasfar, Safi et Laâyoune et contribuent de façon conséquente aux recettes d’exploitation de ces
ports.
Ces indicateurs ainsi que d’autres, tout en traduisant le développement qu’a connu l’économie marocaine
dans sa globalité, continuent à faire ressortir la place significative qu’occupent les phosphates dans l’activité
économique du pays.
Enfin, le Groupe OCP est toujours un grand donneur d’ordre qui, par ses achats de différents biens et ser-
vices, réalisés dans toute la mesure du possible auprès d’entreprises marocaines, contribue utilement à la
dynamique de développement de plusieurs secteurs de l’économie nationale.
533
Ceci étant, l’apport du Groupe OCP au développement national ne se limite pas aux contributions, directes
et indirectes, rappelées ci-dessus. En effet, de par la nature et l’importance de son activité minière et indus-
trielle et la répartition des ses lieux d’exploitation, le Groupe OCP créé naturellement des effets d’entraîne-
ment importants, d’une part pour le développement régional, et d’autre part, pour la promotion des secteurs
industriels et prestataires de services, en relation avec les activités minières et industrielles du Groupe.
Des pôles de développement et une contribution importante au développement humain dans les
régions d’exploitation minière et industrielle.
Sur le plan du développement régional, les activités du Groupe OCP, dans chacune de ses zones d’exploi-
tation, entraînent naturellement le développement d’autres secteurs, en raison notamment de quatre élé-
ments principaux :
– la masse salariale versée au personnel qui, associée à une politique de promotion sociale appropriée,
profite également à de multiples secteurs de prestations commerciales ou de services,
– les infrastructures, qui sont souvent réalisées ou renforcées dans le cadre des plans de développement
du Groupe, en même temps qu’elles profitent aux populations locales, permettent la création ou le déve-
loppement, dans la région, d’autres activités génératrices d’emplois et de revenus,
– les emplois induits, qui sont ainsi créés dans des activités en relation avec celles du Groupe, en parti-
culier au niveau des ports,
– les besoins du Groupe en matière de maintenance de ses installations et équipements industriels et
sociaux, contribuent au développement des PME industrielles ou prestataires de services, dans la
région.
Dans ce cadre, il est important de signaler que depuis quelques années, le Groupe OCP met en œuvre
une politique de promotion structurée pour les PME régionales, à travers des programmes adaptés, tels
que l’externalisation des activités périphériques et l’encouragement à la création d’entreprises.
L’impact de ces éléments sur le développement régional au cours des cinquante dernières années a cer-
tainement été significatif mais il ne peut pas être détaillé ou évalué de manière exhaustive. Néanmoins, quel-
ques indications permettent d’en apprécier l’apport dans les zones actuelles d’exploitation minière et
industrielle :
– Khouribga et Youssoufia, qui ont été à l’origine créées et développées autour de l’exploitation du phos-
phate, ont connu des évolutions importantes et notamment Khouribga, où d’autres secteurs, en relation
avec les activités du Groupe ou avec d’autres activités, contribuent à l’essor économique de cette ville.
– Benguérir, est devenu un centre urbain où se développent diverses activités économiques alors que la
filiale Phosboucraâ est parmi les plus importantes sociétés opérant à Laâyoune.
– Safi, avec la création et les différentes expansions de la plate-forme des industries de transformation du
phosphate, est devenu un pôle industriel parmi les plus importants du pays.
– Jorf Lasfar, qui a permis, entre autres, de relier la région d’El Jadida au réseau ferroviaire national, est
devenue une zone industrielle qui se développe autour de l’un des plus importants ports africains.
534
5.3. Des contributions à travers différents secteurs au développement du
pays
En plus de la prise en charge de quelques métiers liés directement à ses activités minières et industrielles,
le Groupe OCP a contribué de manière significative au développement de certains secteurs et à l’émergence
de compétences nationales dans plusieurs domaines.
Dans ce cadre, quelques réalisations majeures du Groupe durant les 50 dernières années méritent d’être
indiquées.
L’apport du Groupe OCP au développement et à la vulgarisation de l’utilisation des engrais au Maroc a été
déterminant dans la réussite de la politique agricole du pays.
Il a concerné aussi bien l’approvisionnement, le stockage, l’ensachage que la distribution et la régulation
des prix.
Ainsi, la création du complexe de Safi dans les années 1960 répondait également au souci de fabriquer des
engrais pour le marché local. Cette fabrication a commencé en 1965 et depuis, le Groupe OCP satisfait tous
les besoins du pays en engrais phosphatés.
Cependant, en plus de la disponibilité de ces engrais, le développement de l’agriculture marocaine nécessi-
tait un approvisionnement régulier en engrais azotés et potassiques, non produits localement, et un système
de distribution performant à l’échelle du pays.
C’est dans ce cadre, en un moment où la problématique de la disponibilité et de la distribution des engrais
a été posée de manière plus aiguë, que les Pouvoirs Publics ont demandé à l’OCP de s’impliquer davantage
dans le secteur, en se dotant d’une structure appropriée pour assurer cette double mission.
Les démarches entreprises par l’OCP dans ce sens, parallèlement aux mesures prises par les Pouvoirs
Publics en la matière, ont abouti, à partir de 1974, à la prise de contrôle, par l’Office, de la société marocaine
des fertilisants (FERTIMA).
À partir de cette date et jusqu’à sa privatisation, FERTIMA a réalisé d’importants investissements en
construisant de nouvelles unités de stockage et d’ensachage dans différentes régions du pays, à Tléta Bou-
guedra (Safi), Oued Zem, Aït Melloul (Agadir), Nador et Tanger.
Parallèlement, une douzaine de dépôts ont été ouverts dans plusieurs régions et plus de 200 Centres de
Travaux et Centres de Mise en Valeur Agricole ont été mis à sa disposition par le Ministère de l’Agriculture et
de la Réforme Agraire, dans l’objectif de rapprocher l’engrais de l’agriculteur et d’assurer sa disponibilité.
De cette façon, ses capacités de stockage ont été multipliées par 12, passant de 15.000 tonnes en 1974 à
plus de 180.000 dès 1992 et son action de vulgarisation a été une réussite.
En effet, lorsque, en 1990, le secteur des engrais a été libéralisé, la consommation nationale des engrais
avait atteint 800.000 tonnes par an contre 200.000 tonnes environ au début, et la suppression de la sub-
vention des engrais, décidée en ce moment par les Pouvoirs Publics, n’a pas eu d’effet négatif sur la
consommation.
De plus, FERTIMA s’était confirmée comme la première société du secteur, qui distribuait plus de 60 %
des besoins du Maroc en engrais et disposait d’atouts indéniables qui ont contribué à la réussite de sa privati-
sation entre 1996 et 1999.
535
5.3.2. L’apport au transport maritime
Avec le lancement des projets de construction des usines de production d’acide phosphorique au début
des années 1970, et devant à la fois l’insuffisance de la flotte internationale, en mesure de transporter ce pro-
duit et la concentration de celle-ci entre les mains d’un nombre limité d’armateurs, l’OCP a préféré promou-
voir un projet de développement d’une flotte nationale spécialisée dans ce transport.
Ainsi, fut créée la société MARPHOCEAN en 1973, par l’OCP, principal utilisateur, en association avec la
COMANAV, première compagnie maritime nationale et GAZOCEAN, comme partenaire étranger ayant
l’expérience du transport des produits chimiques.
Ce projet avait une portée stratégique, dans la mesure où son objectif principal était de permettre au
Groupe OCP de maîtriser le transport de l’acide phosphorique, sécurisant ainsi les livraisons à ses clients et
pouvant jouer un rôle régulateur sur le marché du fret de ce produit.
MARPHOCEAN a commencé son activité en 1976 et a fait évoluer sa flotte en fonction des besoins du
Groupe et de l’état du marché du fret. Elle est devenue filiale à 100 % du Groupe OCP en 1999.
Relation avec le développement du littoral ?
Aujourd’hui, cette société, qui continue à assurer le transport d’une partie significative des exportations
d’acide phosphorique du Groupe OCP, est en train de repenser sa stratégie de développement, en fonction
de la stratégie globale du Groupe et à la lumière des évolutions prévisibles, à moyen et long terme, du mar-
ché du fret.
Cependant, il est utile de dresser un premier bilan de l’apport de MARPHOCEAN au profit du Groupe OCP,
en particulier, et de l’économie nationale en général.
En effet, de 200.000 tonnes transportées en 1976, la société, après plusieurs évolutions, assure actuelle-
ment le transport de 900.000 tonnes environ par an.
Elle a permis au Groupe OCP d’entrer et d’évoluer dans le marché fermé et relativement spécialisé du
transport maritime des produits chimiques liquides, tout en contribuant au développement du pavillon natio-
nal et à la formation de nouvelles compétences liées à ce secteur.
Enfin, au titre des frets de retour, elle assure le transporte d’autres produits chimiques à partir de l’Asie, à
destination notamment de l’Europe, contribuant ainsi à l’amélioration de la balance commerciale du pays en
matière de prestations de transport maritime.
Par ailleurs, il y a lieu de signaler que, pour l’exploitation commerciale de sa flotte, Marphocéan est assis-
tée par la Société de Transports et d’Affrètements Réunis (STAR), filiale à 100 % de l’OCP depuis 1961,
basée à Paris et dont la mission principale consiste à affréter les navires nécessaires aussi bien à l’exporta-
tion des phosphates et dérivés destinés aux clients du Groupe OCP, qu’à l’importation des matières pre-
mières utilisées par les usines de transformation du Groupe et ce, dans les cas de ventes ou d’achats en
coût et fret.
536
capacité de mobiliser rapidement des ressources opérationnelles et des compétences techniques, soit direc-
tement soit au moyen d’alliances avec d’autres sociétés d’ingénierie étrangères.
Ses interventions ne se sont pas limitées aux unités minières et industrielles du Groupe OCP. Elles ont
concerné plusieurs domaines, aussi bien au Maroc qu’à l’étranger, comme les cimenteries, les équipements
de manutention portuaire, l’industrie sucrière, l’exploitation des mines autres que le phosphate, etc.
Enfin, la SMESI constitue pour le Groupe OCP un des vecteurs d’intégration de l’industrie nationale dans
les réalisations minières et industrielles du Groupe, mission qu’elle remplit avec succès.
En 1975, le Centre d’Études et de Recherches des Phosphates minéraux (CERPHOS), qui a été initiale-
ment créé en France en 1961 avec d’autres producteurs, a été transféré, sous une forme adaptée, au Maroc
et ce, pour permettre au Groupe OCP :
– de développer une maîtrise avancée de l’ensemble des techniques et technologies liées à l’extraction, à
l’enrichissement et à la valorisation chimique des minerais de phosphate,
– de s’assurer une indépendance en matière de recherche et de disposer d’un outil performant en matière
de contrôle de qualité produits.
Dans ce cadre, le CERPHOS a mis au point plusieurs procédés qui ont été exploités industriellement. On
peut en citer, en particulier, ceux relatifs aux domaines suivants :
– le lavage-flottation de minerai de phosphate,
– l’élimination des sulfures et de certains éléments en trace du minerai de phosphate,
– la récupération et l’utilisation des boues de lavage de phosphate,
– l’amélioration de la qualité d’acide phosphorique et des engrais.
Par ailleurs, les laboratoires du CERPHOS, en liaison avec ceux des unités opérationnelles, permettent au
Groupe OCP de développer des systèmes de contrôle qualité des produits conformes aux exigences com-
merciales et réglementaires.
Enfin, le CERPHOS contribue aux actions menées par le Groupe OCP dans le cadre des efforts visant
l’intégration de l’Université dans son environnement socio-économique et la promotion de la recherche et
développement, notamment à travers :
– l’élaboration et la mise en œuvre de conventions de recherche avec des Universités,
– la contribution à la formation des cadres supérieurs et à l’encadrement des stagiaires de différentes Uni-
versités et Écoles d’ingénieurs,
– la participation au réseau associatif qui agit pour promouvoir la recherche et le développement scienti-
fiques et industriels au Maroc.
537
5.3.5. L’apport aux industries mécaniques, métallurgiques et électriques
Dans le cadre de la réalisation de ses projets miniers et industriels et de la maintenance de son outil de
production, le Groupe OCP a développé les formules de « réalisation par lot » pour les projets et de « fabrica-
tion sur plan » pour les ensembles et composants métalliques, mécaniques ou électriques.
Les cahiers des charges et caractéristiques techniques des ces lots ou ensembles et composants sont
définis par les responsables des projets et les services techniques des unités opérationnelles du Groupe,
assistées, le cas échéant, par la SMESI ou le CERPHOS. Leur réalisation est confiée, le plus souvent, à des
entreprises nationales.
Ces formules, en plus de leur intérêt économique aussi bien pour le Groupe OCP que pour les entreprises
concernées, permettent à ces dernières de développer des compétences nationales et des expériences
dans différents domaines : traitement des métaux, usinage, confection et montage d’installations élec-
triques, etc.
Ainsi, le Groupe OCP a favorisé l’émergence, à l’échelle nationale, de débouchés pour des industries qui
s’investissent dans de nouveaux métiers tels que les revêtements spéciaux dans le domaine de l’antiacide,
les équipements en thermodurcissables (SVR) et les systèmes de supervision (DSC).
De par son activité, sa taille et son positionnement sur le plan national et international, le Groupe OCP s’est
toujours investi, de manière naturelle, de responsabilités envers les populations avoisinantes et le milieu
environnant. De manière aussi naturelle, il a intégré dans sa façon de faire, la prise en compte des besoins et
des exigences de ses différents partenaires. De ce fait, les questions liées à l’environnement et au déve-
loppement durable ont constamment été pour l’entreprise, des préoccupations prioritaires dont la prise en
charge a évolué normalement, en fonction des moyens et des contraintes de chaque époque.
Ainsi, lorsque, au cours des dernières décennies, ces problématiques sont devenues des préoccupations
majeures, à l’échelle planétaire, le Groupe OCP a pu intégrer, directement et de manière appropriée, les nou-
velles approches mises en œuvre dans le domaine et contribué, de manière significative, à la progression de
la question environnementale au niveau national.
Passant à un stade plus avancé, le Groupe OCP, au sein duquel les aspects environnement et développe-
ment durable ont connu, depuis une dizaine d’années, un véritable ancrage culturel, intègre désormais ces
aspects, en tant que composante essentielle dans ses programmes de développement, qui est gérée dans le
cadre d’une politique volontariste de recherche permanente d’amélioration et de progrès.
Dans les parties qui suivent, sont indiquées sommairement les principales réalisations relatives aux ques-
tions majeures qui se posent au Groupe OCP en matière d’environnement et de développement durable,
ainsi que les approches mises en œuvre dans le domaine.
6.1. L’environnement
L’industrie phosphatière met en œuvre des processus de transformation qui, par nature, génèrent des
538
effluents liquides et solides, ainsi que des émissions atmosphériques qu’il importe de gérer de la meilleure
manière possible pour atténuer, voire éliminer, leurs effets potentiels sur l’environnement.
Tous ces effluents et émissions, tant aux niveaux des sites miniers qu’industriels, sont connus et caractéri-
sés dans le détail. Ils sont pris en charge aussi bien en amont, au moment de la définition des projets de
développement, qu’en aval. Ainsi s’est imposée pour le Groupe OCP, une quête permanente de l’améliora-
tion des performances environnementales des unités de production, sur la base de suivis systématiques et
de revues périodiques. De plus, les effets de ces effluents et émissions sur le système écologique sont
régulièrement évalués à travers des études appropriées.
Dans ce cadre, la recherche permanente d’amélioration et de progrès dans le domaine, s’est traduite, à dif-
férentes époques, par des réalisations majeures, dans les exploitations minières et les industries chimiques
ainsi qu’au niveau des structures en charge de l’environnement au sein du Groupe. On peut rappeler, ci-
après, les principales réalisations dans ces domaines.
539
vaux de dépoussiérage, les installations elles-mêmes seront conformes aux normes retenues en la
matière.
– La résolution du problème des boues de lavage à Khouribga avec l’adoption de la technique de stoc-
kage en couches minces sur digue, comme solution, pour le conditionnement des boues, dans le cadre
d’un projet initié en 1989 et achevé en 2002. Recyclage de l’eau de traitement
– La mise en œuvre, pour la restitution des terrains exploités, de la solution consistant à intégrer dans le
processus d’exploitation, l’aménagement des terrains remués, suivi de la plantation d’arbres appropriés.
Cette solution a été retenue, pour le moment, sur la base de plusieurs études et réflexions qui ont abouti
à la conclusion que la restitution totale des terrains reste une solution coûteuse et d’intérêt limité,
compte tenu de la nature des terres où se trouvent généralement les exploitations minières du Groupe.
Dans ce cadre, il y a lieu de signaler que la plantation d’arbres a connu un grand développement à partir de
1999, année à partir de laquelle un programme annuel de plantation de 400 à 500 mille arbres a été entrepris.
Actuellement environ un million sept cent mille arbres ont été plantés sur une superficie de 2.340 hectares et
l’opération se poursuit, dans le cadre d’un partenariat avec le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts.
L’évacuation du phosphogypse
Le phosphogypse est un sous produit de l’industrie phosphatière. Il est généré au stade de la fabrication
de l’acide phosphorique. Ainsi, les unités de fabrication d’acide phosphorique, de par le monde, produisent
annuellement environ 150 millions de tonnes de phosphogypse, produit dont la solubilité dans l’eau peut
dépasser 97 %. Une partie seulement de cette quantité trouve une utilisation industrielle ou commerciale, le
reste, estimé à 130 millions de tonnes, constitue un apport à l’environnement, qui se traduit, essentielle-
ment, par un stockage au sol ou une décharge dans les eaux de surface.
Pour le Groupe OCP, qui en produit environ 15 millions de tonnes par an, la solution d’évacuation du phos-
phogypse retenue, est le rejet en mer, car elle présente le minimum d’impact sur l’environnement, compa-
rée à d’autres options comme, par exemple, le stockage au sol.
L’option de rejet en mer a été intégrée dans le choix des sites d’implantation des complexes chimiques de
Safi et de Jorf Lasfar qui ont été retenus après des études océanographiques et sédimentologiques du litto-
ral, effectuées par des bureaux d’études spécialisés et de renommée internationale. Dans ce cadre, les
points de rejets ont été fixés à des endroits caractérisés par de fortes houles à même de dissoudre et de dis-
perser rapidement les quantités de phosphogypse évacuées.
Les études réalisées durant les années 1990 ont confirmé le caractère judicieux de ces choix et les études
effectuées périodiquement, permettent à la fois d’évaluer, sur le plan environnemental, cette façon de gérer
le phosphogypse et de définir, quand cela est nécessaire, des axes d’amélioration. Par ailleurs, le Groupe
examine, régulièrement, la faisabilité d’autres modes de gestion de ce produit, comme par exemple, le stoc-
kage à terre, prévu faire l’objet d’études spécifiques en 2005/2006.
Sur un autre plan, le Groupe OCP assure une veille permanente portant sur l’évolution des paramètres
économiques et techniques, relatives à la valorisation industrielle ou commerciale du phosphogypse, en vue
d’examiner les possibilités qui pourraient se présenter dans ce sens.
De plus, en dehors des recherches effectuées par le CERPHOS dans le but de dégager des pistes d’amé-
540
liorations possibles dans la gestion du phosphogypse, une collaboration a été établie avec la Faculté des
Sciences d’El Jadida pour œuvrer dans le même sens.
Les émissions du SO2 et du NH3, ainsi que des poussières de phosphate, ont un effet direct sur la producti-
vité des usines concernées. Plus faibles sont ces émissions, meilleurs sont les rendements industriels cor-
respondants. De ce fait, les choix du Groupe OCP ont toujours porté sur les procédés et les technologies les
plus à même de ne permettre que de faibles émissions de ces éléments.
Concernant le fluor, les usines d’acide phosphorique sont dotées, depuis le milieu des années 1990, de
systèmes de double lavage performants. La récupération totale de cet élément se heurte actuellement à
l’absence d’un marché porteur pour les dérivés fluorés. Néanmoins, des études sont menées par le CER-
PHOS dans le but de dégager des possibilités d’utilisation de cet élément, dans certains procédés de trans-
formation du phosphate.
Pour ce qui est du dégagement des poussières de phosphate, des améliorations sont opérées régulière-
ment pour améliorer l’étanchéité au niveau des hangars de stockage et des équipements de manutention.
541
6.1.3. Au niveau des structures en charge de l’environnement
La question de l’environnement est présente à tous les stades de la chaîne managériale du Groupe OCP,
de l’unité opérationnelle de base à la Direction Générale du Groupe.
En effet, chaque unité de production, dans les sites miniers et industriels, intègre les aspects liés à l’envi-
ronnement dans l’exercice de ses activités et responsabilités quotidiennes. Ainsi, chaque site dispose de
structures appropriées aussi bien pour la coordination et la conduite des actions globales du site que pour la
gestion des relations avec les différents intervenants en la matière, qu’ils soient internes ou externes au
Groupe.
Au niveau de la Direction Générale du Groupe, une Direction prend en charge les aspects environnement,
qualité et sécurité et des instances transverses contribuent à la définition et au suivi de la mise en œuvre des
politiques du Groupe, dans les différents domaines liés à l’environnement.
Ainsi la question de l’environnement est aujourd’hui une préoccupation partagée de manière structurée, à
tous les niveaux de l’entreprise. Elle fait l’objet d’approches et de méthodes de management avancées tel le
système de management environnemental selon la norme ISO 14001 et elle est intégrée, dans le cadre du
projet Système de Management Global Intégré (SMGI), à d’autres aspects aussi importants pour l’entre-
prise : la santé et la sécurité.
Par ailleurs, le Groupe OCP a souscrit à différents engagements dans le domaine de l’environnement,
parmi lesquels on peut citer :
– l’engagement au protocole « Responsible Care » de l’industrie chimique,
– la mise en place d’une convention avec le Département gouvernemental chargé de l’Environnement,
– la mise en place d’une convention avec le Haut Commissariat aux Eaux et Forêts.
Les principales ressources concernées par les activités du Groupe OCP sont l’eau et l’énergie.
L’économie dans l’utilisation de ces deux ressources relève aussi bien de l’amélioration de la compétitivité
du Groupe, à travers la réduction des coûts, que de la contribution à l’effort national en matière de gestion de
l’eau et d’économie d’énergie.
Dans une dynamique de recherche permanente de solutions appropriées pour réaliser ses objectifs en la
matière, le Groupe OCP a mis en œuvre plusieurs réalisations et actions majeures dont on citera les princi-
pales ci après.
542
Par ailleurs, le projet de réalisation d’une unité de dessalement d’eau de mer à Jorf Lasfar, d’une capacité
de 10.000 m3/jour, est en cours d’évaluation.
– Le stockage en couches minces sur digue des boues de lavage à Khouribga, tout en ayant résolu le pro-
blème posé auparavant par ces boues, a permis, à travers la récupération des eaux filtrées au niveau des
digues, de satisfaire une partie appréciable des besoins en eau pour le lavage du phosphate.
– La récupération des eaux de lavage au niveau des unités industrielles de Jorf Lasfar et de Safi permet
également de réaliser des économies substantielles d’eau douce.
– L’utilisation, à Youssoufia, d’une partie de l’eau d’exhaure provenant des mines souterraines pour l’agri-
culture et les espaces verts. À partir de 2005, le restant sera utilisé pour le lavage des phosphates.
– Le traitement des eaux usées de la cité de Benguérir et son utilisation pour irriguer les plantations.
Une composante de la mise en œuvre d’un concept élargi de la responsabilité sociale de l’entreprise
Le Groupe OCP, de par son statut d’entreprise publique et ses dimensions industrielles et économiques, a
de tout temps, apporté une contribution citoyenne aussi bien à l’échelle régionale que nationale.
Cette contribution se manifeste à travers deux aspects, le premier est le résultat direct des activités du
Groupe, le second étant le fruit d’initiatives citoyennes menées à l’échelle locale ou nationale.
Ainsi, grâce au poids économique du Groupe OCP dans les régions où sont implantés ses sites miniers et
industriels, les villes de Khouribga, Youssoufia, Laâyoune, Safi et El Jadida profitent de divers apports du
Groupe OCP à leur essor économique et au développement humain de leur population.
Sur le volet de la citoyenneté, l’apport du Groupe a évolué en fonction des besoins de la société et du
niveau de développement du tissu économique et industriel national.
C’est ainsi que jusqu’aux années 1980, l’action citoyenne du Groupe était directe et portait notamment sur
les domaines du social, du médical, de l’éducation, du sport et de la culture.
Depuis, avec l’évolution qu’a connue le tissu économique national, le développement des infrastructures
publiques et l’émergence de la société civile, des actions d’autres natures, dont certaines sont encadrées au
niveau de l’Institut OCP, sont venues renforcer et enrichir celles menées auparavant.
543
Dans ce cadre, le Groupe OCP a commencé à :
– initier des actions d’accompagnements sociaux, culturels et sportifs, à travers des structures associa-
tives ou des fondations,
– participer au développement de la PME marocaine, notamment par la mise en œuvre d’actions et de par-
tenariats avec ses fournisseurs et sous-traitants, à travers des initiatives volontaristes d’externalisation
et d’essaimage, contribuant ainsi au maintien et à la création d’emplois,
– mettre en œuvre, dans le cadre d’une politique d’aide à la création d’entreprises et de promotion de
l’emploi, des mesures d’accompagnement et de soutien aux jeunes entrepreneurs et aux entreprises
débutantes.
Toujours dans le domaine du soutien et de l’accompagnement, on peut citer également, parmi les actions
entreprises par le Groupe :
– la mise en place d’un large programme d’accompagnement des PME, fournisseurs du Groupe, dans l’ini-
tiation ou le développement de leur démarche qualité,
– la création, avec d’autres partenaires, d’un incubateur d’entreprises au niveau de la région d’El Jadida.
La stratégie du Groupe OCP à long terme est de continuer à consolider sa position de leader sur le marché
mondial du phosphate brut et de ses dérivés, tout en optimisant ses résultats.
La mise en œuvre de cette stratégie sera, naturellement, conditionnée par les évolutions du contexte et de
l’environnement dans lesquels opère le Groupe et dépendra, dans une grande mesure, des solutions et des
réponses qui seront apportées aux problèmes en perspective.
À cet égard, il est utile de rappeler ci après certains aspects majeurs de ces évolutions et de ces probléma-
tiques.
544
7.1. L’évolution du contexte et de l’environnement
7.1.1. Le marché
La demande
Bien que cyclique, la demande de phosphate brut et de dérivés phosphatés, selon les prévisions de diffé-
rents organismes internationaux, continuera à augmenter, sur le long terme, de 1 à 2 % par an, avec la confir-
mation des nouveaux pays émergents, grands consommateurs, comme le Brésil, l’Argentine, le Pakistan et
le Vietnam, sans parler de l’Inde et de la Chine, qui continueront leur développement agricole, impliquant
l’augmentation de leurs besoins en engrais.
Cependant, cette demande exigera des qualités de phosphate et de dérivés de plus en plus exemptes
d’éléments en traces et s’exprimera davantage sous forme de produits dérivés que de phosphate brut. À cet
égard, il convient de citer l’exemple de l’Union Européenne qui envisage, depuis quelques années, l’adoption
d’une norme limitant la teneur en cadmium dans les engrais.
Enfin, en ce qui concerne le Groupe OCP, certains de ses clients exclusifs de phosphate et ou d’acide
phosphorique, pourraient arrêter leur activité définitivement ou s’orienter vers l’acide et ou les engrais.
De nouveaux producteurs arriveront sur le marché avec des atouts que n’a pas le Groupe OCP. C’est le cas
en particulier de l’Arabie Saoudite, avec son projet d’Al Jalamid. Ce projet consiste à produire et transformer
en acide phosphorique et en engrais quatre millions de tonnes de phosphate, soit l’équivalent de 8,7 % du
commerce mondial actuel des dérivés.
Le coût du projet est de l’ordre de 2,4 milliards de $ dont une partie importante pour la construction d’une
voie ferrée ou d’un pipe de plus de 1000 km pour le transport du phosphate sous forme solide ou liquide d’Al
Jalamid au Nord, à des sites situés au Sud Est du pays, près de la mer et des autres matières premières dis-
ponibles sur place et qui sont nécessaires à la fabrication de l’acide et des engrais (soufre et ammoniac).
Un délai de 4/5 ans est prévu pour la concrétisation du projet.
Parmi les avantages majeurs dont bénéficiera ce projet, nous pouvons citer :
– la disponibilité du soufre et de l’ammoniac qui proviennent du gaz, à des conditions très compétitives,
– le support de l’État,
– la proximité des marchés de l’Asie avec un avantage de fret par rapport au Maroc.
545
Aussi, est-il vital que le Groupe OCP continue à agir, sur toutes les composantes des coûts, pour optimiser
ses prix de revient et être en meilleure position concurrentielle.
L’exploitation minière
L’évolution des exploitations minières devra s’inscrire dans une logique d’ensemble qui intègre des
contraintes techniques, économiques et environnementales, en vue, notamment, d’optimiser la récupération
du gisement et l’utilisation des ressources.
La valorisation
Le développement de la valorisation devra intégrer également plusieurs contraintes et difficultés dont la
résolution conditionnera sa réalisation. On peut en citer notamment :
– la satisfaction des besoins en matières premières, en particulier le soufre et l’ammoniac,
– le renouvellement de l’outil de production actuel,
– la mise au point de procédés propres pour fabriquer d’autres produits, notamment les dérivés à usage
technique,
– la problématique que posera le rapprochement des agglomérations voisines des plates-formes indus-
trielles,
– la nécessité de réaliser des économies substantielles d’eau et d’énergie.
– la nécessité d’étendre le périmètre de la valorisation à d’autres domaines comme la récupération et la
valorisation rentable de produits en traces dans le phosphate.
546
De par leur nature, ces infrastructures relèvent d’autres organismes et par conséquent, le Groupe OCP
continuera à travailler avec les organismes concernés, qui devront accompagner ses plans de développe-
ment par des programmes de réalisation des infrastructures nécessaires.
À la lumière de ce qui précède, le Groupe OCP devra développer, encore plus, des actions et des projets à
même d’apporter des réponses aux questions posées.
Il s’agit notamment de :
– continuer à sécuriser et pérenniser les positions du Groupe sur le marché, à travers des contrats à long
terme et des partenariats,
– continuer la politique de partenariats, en en explorant d’autres formes, comme l’implication dans les res-
tructurations que connaîtra le secteur et en l’élargissant, le cas échéant, au secteur minier,
– considérer l’implication du Groupe OCP, de façon ciblée, à la fois dans le processus de production de
dérivés de phosphate, dans des pays étrangers et dans celui de la distribution, également dans ces pays,
pour une plus grande maîtrise du marché et une meilleure rentabilité.
547
– avoir les capacités appropriées de fabrication des produits dérivés, y compris les dérivés autres que
l’acide phosphorique et les engrais,
– agir, à tous les niveaux, allant de l’extraction minière à la livraison du produit fini, pour optimiser les coûts
et être en meilleure position concurrentielle,
– programmer le devenir des plates-formes industrielles actuelles,
– envisager la possibilité d’ouvrir de nouveaux centres miniers ou de construire de nouvelles plates-
formes industrielles.
Il s’agit de sécuriser l’approvisionnement en matières premières, dans le cadre de contrats à long terme ou
d’investissements conjoints, à réaliser en partenariat avec des producteurs de ces matières.
Il s’agit en particulier de :
– programmer, en liaison avec les intervenants concernés :
R le développement des infrastructures portuaires dans le site de Safi,
R l’évolution des infrastructures dans le site de Jorf Lasfar, en fonction des plans de développement de
ce site,
– planifier l’évolution du centre minier de Youssoufia,
– définir les besoins en infrastructures pour l’ouverture éventuelle de nouveaux centres miniers ou sites
industriels,
– sécuriser la satisfaction des besoins du Groupe en eau et en énergie.
En plus des évolutions naturelles qui doivent être opérées dans le développement des ressources
humaines du Groupe OCP, en fonction notamment des évolutions des métiers du Groupe, la politique de
valorisation et de partenariats, au Maroc et à l’Étranger, requiert, en particulier, des compétences ouvertes à
l’international et sensibilisées davantage aux problèmes de l’environnement.
Aussi, le Groupe OCP devra-t-il tenir compte de ces nouvelles exigences en les intégrant dans des pro-
grammes de développement des compétences appropriées.
548