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Mémoire
2e cycle (Master)
Année universitaire 2023-2024
Antonin VINOUR
Introduction.....................................................................................................................5
Conclusion......................................................................................................................24
Bibliographie..................................................................................................................25
Annexe 1 [facultatif]......................................................................................................27
Titre de l’annexe 1.......................................................................................................27
Index [facultatif]............................................................................................................28
Abstract..........................................................................................................................30
Introduction
[Taper votre texte] Non ergo erunt homines deliciis diffluentes audiendi, si quando de
amicitia, quam nec usu nec ratione habent cognitam, disputabunt 1. Nam quis est, pro
deorum fidem atque hominum! qui velit, ut neque diligat quemquam nec ipse ab ullo
diligatur, circumfluere omnibus copiis atque in omnium rerum abundantia vivere ?
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Note de bas de page
Mais tout d'abord, il est impératif de reconnaître que le rôle de la Cobla au sein de la
culture catalane est d'une importance telle que tout compositeur souhaitant s’inspirer de
cette culture ne peut négliger ni son existence ni ses caractéristiques sonores et
musicales. La Cobla incarne une véritable pierre angulaire de l'expression musicale
catalane, et elle est fondamentalement liée à une forme de danse traditionnelle
particulièrement emblématique : la sardana. Cette danse, profondément ancrée dans
l'identité catalane, crée un lien indissoluble entre la musique et le mouvement. Oriol
Martorell le dit par ces mots : « La sardane, simple et austère, ne doit pas être
contemplée : la sardane doit être dansée » (Oriol Martorell, 1980)
Mais la sardana est bien plus qu'une simple danse ; elle est une célébration de la
culture, de l'histoire et de la communauté catalane : « La sardane a comme
caractéristique essentielle d'être une danse ouverte à laquelle tout le monde peut
participer » (Oriol Martorell, 1980)
Ainsi, pour tout compositeur cherchant à capturer l'essence de cette culture riche et
diversifiée, l'étude approfondie de la Cobla et de sa relation intime avec la sardana est
incontournable. Cette démarche permet non seulement de comprendre les nuances et les
subtilités de la musique catalane, mais également de partir à la rencontre d’une tradition
qui a perduré à travers les générations et qui continue d'inspirer des créations musicales
contemporaines imprégnées de l'âme catalane. Joan Maragall écrit ce poème la sardana,
qui reflète la place occupée par cette danse au sein de la culture traditionnelle :
[…]
[…]
Les deux œuvres abordées en détail dans la suite de ce mémoire faisant référence à la
sardana, nous allons observer précisément les caractéristiques formelles et rythmiques
de cette danse afin de mieux comprendre comment les compositeurs pourront se
l’approprier et la réinventer.
Les deux formes de sardanes citées sont donc différentiables par leur accompagnement
instrumental qui diffère, mais aussi par les pas de danse et la durée d’exécution de la
pièce : une sardana curta peut durer approximativement cinq ou six minutes, tandis que
la sardana moderne atteint facilement les quinze minutes. La sardana curta est
construite à partir d’une rythmique ternaire, laissant entendre le balancement
noire/croche/noire tout au long de la pièce (à l’aide du tamborí), et sur laquelle
viendront se poser deux mélodies, l’une au ton principal et l’autre à la dominante, et
dont l’alternance définira le changement de partie, et donc de la variation du pas de
danse.
À l’intérieur même de ces deux pas distincts, nous retrouvons des caractéristiques
rythmiques communes à la plupart des sardanas permettant de servir de repères aux
danseurs :
Dans les pas curts, qui comprennent très rarement plus de 40 mesures, on retrouve
souvent un enchaînement de phrases thématiques assez courtes, jouées au tible, tenora
ou trompette, ponctuées d’interventions rythmiques du flaviol. C’est aussi pendant les
curts que l’on trouve le plus souvent une rythmique ternaire rappelant la sardana curta
(donc sans le rythme typique de la sardana, qui ne peut être joué que sur une mesure
binaire)
Les pas llargs sont construits autour d’une partie fondamentale de la sardana : un long
solo, le plus souvent joué par la tenora. Les quelques mesures débutant les llargs ne
sont qu’une plus ou moins grande introduction à ce solo. Très expressif, ce grand thème
est dans la majeure partie des cas accompagné par la contrebasse et un fiscorn, jouant la
rythmique typique de la danse.
Vient ensuite le « petit sauté », toujours basé sur ce rythme, et c’est le tible qui prend
souvent la suite de la tenora dans un thème à caractère beaucoup plus dansant et
sautillant (on peut aussi observer chez les danseurs un pas plus rythmé). La sardana,
après le petit sauté, finit triomphalement, sur le thème de la tenora entendu plus tôt,
mais cette fois repris tutti fortissimo, et souvent accompagné d’un contrechant ou
d’interventions jouées par les trompettes et le premier fiscorn. C’est lors du grand sauté
que les danseurs donneront à leurs pas et leurs sauts la plus grande amplitude.
Les llargs étant entendus six fois lors de l’exécution complète de la sardana, qui dure
une quinzaine de minutes, il devient important, pour les musiciens, les danseurs et le
public, de conclure le dernier llarg de manière significative : c’est le rôle du cop final.
À la fin de la sardana, on rajoutera une mesure (qui ne rentre pas dans le compte
initial), dont le premier temps sera marqué d’un « coup » (une note très courte) joué par
toute la cobla, et qui reprend le dernier accord entendu.
Il faut préciser que jouée en situation de concert, une sardana sera donnée
exclusivement pour un public et sans danseurs, donc se fera dans sa forme raccourcie,
deux curts et deux llargs. Le cop final se fera à la fin du deuxième llarg, remplissant la
même fonction que lors d’une sardana entière.
L'enjeu majeur auquel sont confrontés les compositeurs modernes réside dans leur
capacité à se permettre une grande liberté d'écriture. Cette liberté s'étend à tous les
aspects de la composition musicale, que ce soit au niveau harmonique, mélodique ou
rythmique. Il subsiste malgré tout un défi fondamental qui se pose à eux : comment
maintenir la forme traditionnelle de la danse, en l'occurrence la sardana, tout en
explorant de nouvelles voies créatives et expressives ?
C'est un équilibre délicat à atteindre. D'un côté, les compositeurs modernes cherchent à
repousser les frontières de la musique en introduisant des harmonies audacieuses, des
mélodies inventives et des rythmes inhabituels. De l'autre côté, ils reconnaissent
l'importance de respecter la structure et la tradition qui caractérisent la danse catalane,
en particulier la sardana.
Ainsi, la véritable prouesse des compositeurs réside dans leur capacité à transcender ces
contraintes tout en préservant l'essence de la danse. Ils doivent trouver des moyens
ingénieux d'y incorporer des éléments contemporains sans en altérer la structure
fondamentale. Cela exige une compréhension profonde de la danse, de sa signification
culturelle et de son évolution, ainsi qu'une grande créativité pour repenser et réinventer
cette forme en lui insufflant une nouvelle vie.
En fin de compte, l'enjeu consiste à créer une harmonie entre l'innovation artistique et la
préservation de la tradition, permettant ainsi aux compositeurs modernes de contribuer
de manière significative à l'évolution continue de la musique catalane tout en respectant
ses racines profondes.
Nous verrons de quelle manière Federico Mompou et Déodat de Séverac, entre autres,
font face à ces différents paramètres dans leurs oeuvres canción i dansa n.3 et sous les
lauriers roses.
Il est important de souligner que la Cobla est une formation musicale incroyablement
polyvalente, capable de s'adapter à une grande variété de contextes musicaux. Elle peut
notamment se produire dans des conditions plus classiques, lors de concerts. Dans ces
situations, elle peut être dirigée par un chef d'orchestre et interpréter un répertoire
spécialement écrit pour ce genre d'occasion, ce qui peut inclure l'ajout de percussions ou
d'instruments issus de la musique classique, que ce soit un piano ou un ensemble à
cordes.
La Cobla joue en outre un rôle indispensable lors des festivités traditionnelles au sein
des villages catalans, en accompagnant tout au long de la journée les messes, les défilés
(llevan de taula), les bals nocturnes, mais surtout en offrant un support indispensable
pour toutes les danses qui animent ces événements festifs.
Parmi les danses qui rythment ces célébrations, nous allons nous préoccuper de celles
dont Déodat de Séverac s’inspirera dans sa pièce « sous les lauriers roses » :
Le Paso doble, une danse d'origine espagnole. Basé sur une rythmique binaire à
mouvement rapide, très énergique (il représente souvent la course du torero devant le
taureau lors d’une corrida). C’est la danse de bal par excellence : traditionnellement
dans les fêtes de villages en catalogne, la Cobla commence sa série de morceaux par un
Paso doble et la termine de la même manière.
La valse, très représentée dans les fêtes de villages, se danse plus lentement que la valse
viennoise rapide. On y retrouve la rythmique à trois temps assez allante, sans toutefois
avoir un effet aussi virevoltant, que ce soit dans les pas de danse ou dans la musique.
Ces trois danses, qui nous intéressent particulièrement pour la suite de notre recherche,
ne sont qu’un petit échantillon de ce que l’on peut entendre lors d’une fête
traditionnelle. Il faut y ajouter entre autre la polka, le boléro, le tango, le fox, le
contrapàs…
Toutes ces danses, bien que moins typiquement catalanes que les sardanes, font partie
intégrante de l'expérience culturelle et festive de la région.
C'est ainsi que nous pouvons apprécier la profusion et la diversité des danses catalanes,
qui ne se limitent pas à la sardane, mais englobent une variété de styles et d'expressions
artistiques. Dans la suite de ce mémoire, nous explorerons la manière dont Déodat de
Séverac, dans son œuvre pour piano « sous les lauriers roses », parvient à fusionner la
sardana avec ces danses traditionnelles, témoignant ainsi de la façon dont la musique
évolue et se réinvente tout en honorant ses racines.
Découvrir l'univers des chansons populaires catalanes nous ouvre les portes d'une riche
tradition musicale ancrée dans l'âme de la Catalogne. Ces chansons sont plus que de
simples compositions ; elles sont le reflet d'une histoire, d'une culture et d'une identité
profondément enracinées dans cette région d'Espagne. Lors des fêtes de villages, qu'il
s'agisse de célébrer une récolte abondante, une fête religieuse ou tout simplement
partager un événement festif, les chansons et danses populaires catalanes sont le fil
conducteur qui unit les gens, les invitant à danser, à chanter et à tisser des vrais
moments de convivialité. Leur présence omniprésente dans ces fêtes de village en fait
une partie intégrante de la vie catalane.
Federico Mompou cite aussi des chansons ne se rattachant à aucune forme de danse,
traversant les fêtes traditionnelles et religieuses grâce à la beauté et la simplicité de leur
mélodie, telles que Muntanyes Regalades, jouée notamment par les cobles à l’occasion
des messes durant les fêtes de village, ou encore le célèbre Cant dels Ocells, ayant
connu une notoriété internationale grâce à des interprètes de renommée mondiale
comme le violoncelliste Pau Casals, qui l’a joué sur toutes les plus grandes scènes du
monde. El cant dels ocells est une chanson populaire de Noël, comme la pièce qui nous
intéresse dans la canción numéro trois de Mompou, et a notamment été arrangé sous
forme de sardana par le compositeur Pep Ventura (qui utilisera la tenora comme porte-
parole de la mélodie principale) avant d’être rendu universellement connu par Pau
Casals, puis arrangé par de nombreux interprètes tels que Lluis Llach ou Mireille
Mathieu.
Catalunya »
la Catalogne.
Ainsi, les chansons populaires catalanes continuent de jouer un rôle central dans la
préservation de l'identité culturelle de la région, tout en offrant au monde une visibilité
sur sa beauté musicale et sa profonde signification historique. Ces mélodies, chargées
d'émotion et d'histoire, font partie intégrante du patrimoine musical catalan, et, grâce à
des compositeurs et interprètes tels que Mompou ou Pau Casals, elles traversent les
frontières et continuent d'enrichir le patrimoine culturel mondial.
Isaac Albéniz nous offre lui un autre exemple dans la recherche d’une sonorité
typiquement catalane, dans el albaicín composé en 1907 (mesure 69) : « avec la petite
pédale, et bien uniforme de sonorité, en cherchant celle des instruments à anche »
Le timbre des instruments à anche que I.Albéniz cherche à explorer nous ramène vers
l'univers de la Cobla moderne, composée de onze ou douze musiciens. Notre objectif est
d’en analyser les instruments en comprenant le rôle de chacun au sein de l'orchestre
traditionnel, tout en précisant leurs caractéristiques sonores.
Delfín Colomé, musicien et compositeur catalan, nous donne un aperçu du rôle général
de chaque instrument :
La Cobla, telle qu'on peut l'entendre aujourd'hui dans toute la Catalogne et dans les
différents contextes que nous avons décrits, se compose de deux rangs distincts : le rang
arrière est constitué d'instruments à caractère plus classique, comprenant deux ou trois
trompettes, un trombone à coulisse, mais aussi deux fiscorns et une contrebasse à trois
cordes (en boyaux). Les fiscorns « […]sont similaires en forme à un cornet mais en
font deux fois la taille, ce qui leur donne une gamme similaire à celle du trombone. On
ne les trouve pas dans les orchestres ou les fanfares symphoniques en Europe
occidentale ou dans le Nouveau Monde, de nos jours la plupart d'entre eux sont
importés d'Europe centrale. Ils apportent leurs qualités douces et lyriques à la cobla,
tandis que le trombone et les trompettes jouent généralement des rôles rythmiques et se
distinguent par plus de brillance et de fanfare. » (Richard Scott Cohen, 1980)
Premièrement, le flaviol étant le seul instrument présent à la fois dans la cobla de tres
quartans et dans la cobla moderne, il est intéressant de noter l’évolution de son rôle au
sein de l’effectif instrumental : « La fonction du flaviol dans l'ancienne cobla était de
conduire la mélodie aux côtés de la cornemuse dans des airs traditionnels avec un
ambitus généralement pas plus large que la huitième ou la neuvième. Aujourd'hui, la
conduite de la mélodie est assurée par la tenora , et les mélodies présentent des ambitus
beaucoup plus étendus. Par ailleurs, la frappe rythmique et grave du tambour a été
presque entièrement remplacée par la nouvelle section d'instruments à vent et la
contrebasse, qui impulsent le moteur rythmique et couvrent les registres graves. Ainsi,
le flaviol et le tamborí sont devenus des éléments secondaires dans la cobla catalane
moderne. » (Gabriel Ferre i Puig, 1987-8)
distingue particulièrement lors de trilles dans les registres suraigus, ce qui lui permet de
se faire entendre parmi la diversité des autres instruments. « […] et au timbre strident du
fluviol » (V.Jankélévitch, 1983)
L'un des aspects les plus importants du flaviol est son rôle lors des ritournelles
caractéristiques de la sardana. Avant le début de la danse, le flaviol annonce avec
légèreté l'entrée en scène de la musique, ce qui a pour but de prévenir les danseurs mais
également les musiciens. De plus, il marque de manière significative les transitions
importantes au sein même de la pièce, en jouant d’autres ritournelles construites sur la
même base que l’intervention initiale mais qu’il faut adapter en fonction de la tonalité
du morceau.
« […] s'il n'a pas été aboli ni exclu de la cobla actuelle, c'est en raison de sa fonction
spécifique consistant à interpréter l'Introduction - Introit, une brève mélodie indiquant le
début de chaque danse - et le Contrepoint de chaque danse ou sardane, qui lui sont
nécessairement confiés. De plus, il a la capacité de s'adapter techniquement aux
nouvelles exigences musicales, contrairement à son ancien compagnon le sac de
gemecs, considéré à l'époque comme un instrument trop rudimentaire et dépourvu de
possibilités d'actualisation et de perfectionnement technique. » (Gabriel Ferre i Puig,
1987-8)
En raison de ses caractéristiques uniques et de son rôle clé dans l'orchestre traditionnel,
le flaviol i tamborí a attiré l'attention de nombreux compositeurs, qui ont cherché, au
même titre que pour le sac de gemecs, à exploiter sa sonorité distinctive pour enrichir
leurs compositions.
Les deux tibles et les deux tenoras, cousines de la tarota dans la Cobla de tres
quartans, sont de la famille des hautbois. Le tible, avec un son plus nasillard et plus
aigu, occupe le rôle majeur dans les mélodies à caractère très sautillant et rythmique, ou
les passages transitoires.
En revanche, la tenora, qui a un son plus chaud, très expressif, est considérée comme
l’instrument roi de la Cobla. Andreu Toron, son inventeur, lui réservait à l’origine un
rôle dans les orchestres classiques ou militaires : « La puissante sonorité de cet
instrument, son accord parfait et constant lui assurent une position éminente dans
l'orchestre militaire et dans les orchestres. » (Anna Costal, 2018)
C’est l’instrument qui prendra la parole dans les mélodies les plus longues et les thèmes
les plus expressifs et chantants. « […] la position principalement horizontale pendant
l'interprétation permettait au musicien de projeter le son vers l'avant et, en même temps,
était suffisamment malléable pour jouer les mélodies romantiques avec toutes les
inflexions d'expressivité nécessaires. » (Anna Costal, 2018)
Souvent, les deux tibles ou les deux tenoras jouent des mélodies à la tierce, ce qui
ajoute à la richesse de la sonorité et du timbre : « Les timbres rustiques et mordants de
la Cobla catalane » (V.Jankélévitch, 1983)
Nous verrons comment toutes ces caractéristiques reprennent vie ou non dans l’œuvre
pour piano de Mompou et Déodat de Séverac.
« El Noi de la Mare » est aujourd'hui l'une des chansons les plus emblématiques de la
culture catalane, et est devenue une comptine pour enfants, ce qui montre comment ces
mélodies traditionnelles perdurent à travers les générations.
L’intérêt de notre travail sera de voir dans quel mesure Mompou compose sa version de
El noi de la mare à partir de la signification originale de la chanson ; tout d’abord en
abordant le sens du texte à travers son contexte historique et religieux, puis en
comparant les différentes versions instrumentales déjà existantes et en observant
comment l’univers musical de Mompou s’inscrit au milieu de celles-ci.
El noi de la mare :
D’origine inconnue et d’auteur anonyme, ce chant de Noël et comptine pour enfant est
estimée remonter entre les XVIIIe et XIXe siècles. On trouve plusieurs versions de ce
texte mais la plus fameuse nous est sans aucun doute donnée par le poète Jacint
Verdaguer.
« Il a maintenant composé une nouvelle chanson de Noël qui est si douce qu'on pourrait
s'en lécher les doigts et les lèvres […] un texte qui laisse transparaître son souci de
perfection. » (Jaume Collell, 1871 ; à propos de ce texte de Verdaguer)
Jacint Verdaguer i Santaló, figure littéraire éminente de la Catalogne au XIXe siècle, est
largement reconnu comme l'un des principaux écrivains et poètes catalans de son
époque. Son œuvre s'inscrit dans le mouvement romantique, et il a grandement
contribué à la revitalisation de la culture catalane, faisant de lui une figure clé de la
Renaixença, un mouvement culturel et artistique visant à réaffirmer l'identité catalane
après une période de déclin. « Chaque mot de la langue catalane aujourd’hui encore
résonne plein de toi » : C’est ce que dit le poète Ventura Gassol sur son ami et écrivain,
Jacint Verdaguer.
Verdaguer était non seulement un poète de renom mais aussi un prêtre catholique, ce
qui a influencé sa poésie imprégnée de spiritualité et de symbolisme religieux (il est
surtout connu pour ses poèmes épiques, dont « L'Atlàntida » est le plus célèbre).
Le premier titre donné à la chanson pour enfant découlant du poème est « Tam-
patantam » : extrait des dernières strophes de la poésie, ces onomatopées, qui une fois
transposées dans une cellule rythmique, laissent entendre ce rythme balancé (longue-
brève-brève-longue) ; donnent la rythmique et le caractère de toute la pièce, que le
poème soit parlé, ou chanté sur une composition originale. La régularité de cet ostinato
rythmique nous entraîne immédiatement dans une atmosphère dégageant une sensation
de calme et de tranquillité, et dans l’univers de la comptine pour enfant. Nous verrons
de quelle manière Mompou recrée cette atmosphère à travers son propre langage
musical.
Il paraît important de relever ces deux citations indiquants précisément les conditions de
composition de el noi de la mare, qui, à travers les propres mots de Verdaguer, nous
apprend quelle représentation se faisait le poète de sa propre composition.
« Un jour où je lui disais les délices que je trouvais dans le poème L'enfant de la Mère,
il m'a expliqué comment il l'avait composé. Il se rendait de Vic à son village. Le ciel
était nuageux, et en chemin, il s'est mis à pleuvoir. Il était à dos d’âne, il s'est bien
couvert et a ouvert son parapluie. Comme la pluie continuait à tomber, il a dû supporter
le balancement forcé que la bête lui causait. » (Valeri Serra i Boldú, 1915)
Ancré dans le patrimoine culturel traditionnel catalan, el noi de la mare a eu droit à une
multitude d’arrangements, orchestrations et revisites différentes. Pour mieux
comprendre les choix musicaux de Mompou dans sa propre version, il semble important
de connaître les versions les plus éminentes de cette chanson existant avant la
composition du compositeur catalan.
Les arrangements les plus connus de El noi de la mare sont ceux écrits pour guitare par
le compositeur et guitariste Miguel Llobet.
L'un des exemples les plus tangibles de ce mélange artistique se trouve dans l'opéra «
Héliogabale » de Déodat de Séverac, créé en 1910 dans les arènes de Béziers. Dans
cette œuvre audacieuse, Déodat de Séverac va bien au-delà de l'inspiration ou de la
simple reproduction de styles musicaux. Il innove en introduisant pour la première fois
une cobla catalane au sein même de son opéra, la fusionnant avec l'orchestre d'harmonie
classique, les chanteurs d'opéra, et des danseurs étoiles partageant la scène avec un
groupe de danse folklorique. Malgré son immense succès, en grande partie dû à son
effectif exceptionnellement imposant et peu conventionnel composé de près de quatre
cents professionnels, cet opéra n'a été que très rarement représenté. Une de ces rares
représentations a eu lieu en 1972 dans sa version en catalan. Pour de nombreux critiques
de l'époque, cette œuvre illustre de manière éclatante « l'existence d'une communauté
possible autour d'une écriture contemporaine » (Sabine Teulon Lardic, 2023), mettant
ainsi en avant la capacité et la volonté de Séverac à créer des connexions entre des
mondes artistiques en apparence disparates.
Parmi ses compositions, l'une des plus célèbres, intitulée « Ferreol », a été initialement
écrite pour un ensemble de flûtes. Dans cette pièce, on retrouve bien sûr le rythme
caractéristique de la sardana, mais aussi sa structure formelle typique, caractérisée
notamment par la combinaison des pas courts et des pas longs, les solos de tenora, et les
enchaînements entre le petit et le grand sauté. Lors de ma rencontre avec Claude Henry
Joubert lors du festival de sardanes de Céret, j'ai justement eu l'occasion de jouer sa
pièce Ferreol avec la cobla Mil-lenaria fidellissima villa de Perpinya formation qu’il
dirigeait le temps des répétitions. Au cours de notre échange, il a exprimé sa profonde
admiration pour la musique traditionnelle catalane, qu'il percevait comme étant marquée
par une simplicité touchante et une vraie authenticité. Cette influence se reflétant dans
ses compositions, traditionnelles ou classiques.
Nous avons déjà discuté de la brillante carrière de Pau Casals en tant que violoncelliste
et de son rôle d'ambassadeur de la musique traditionnelle catalane à travers le monde,
notamment grâce à son interprétation remarquable de « El Cant dels Ocells ».
Cependant, il est tout aussi important de souligner son talent de compositeur. En effet,
Pau Casals a laissé sa marque en composant une sardane spécialement conçue pour un
ensemble de violoncelles. Cette composition a été notamment interprétée par quarante
violoncellistes issus des prestigieux orchestres que sont le London Philharmonic, le
Philharmonia Orchestra, le BBC Symphony Orchestra et le Royal Philharmonic
Orchestra. L'ampleur de cet effectif nous suggère que le compositeur cherchait à recréer
le volume sonore très puissant de la cobla, destinée à jouer en plein air. Une partie de
cette sonorité distinctive est capturée par l'utilisation de plusieurs violoncelles jouant à
l'unisson dans les registres aigus, créant ainsi un timbre presque métallique. Même si
Casals ne reprend pas le prélude caractéristique du flaviol, l'essence rythmique et
dansante de la sardane est présente tout au long de l'œuvre, ancrant solidement sa
composition dans la tradition musicale catalane.
sardana », et l' « intermezzo et danse finale ». C'est dans les deux derniers mouvements
que l'influence de la musique traditionnelle catalane est la plus tangible. On y trouve des
rythmes enjoués propres à la sardana, ainsi que des sonorités et des motifs qui évoquent
les modes de jeu typiques des instruments traditionnels.
À travers cette œuvre, Cassadó nous montre de façon impressionnante par quels moyens
musicaux et techniques le violoncelle peut incarner les techniques de jeu, les rythmes et
les sonorités d’instruments en apparence totalement opposés.
Le dernier mouvement, et plus précisément la « danse finale », est une jota, à travers
laquelle Cassadó nous fait voir toute une troupe de danse folklorique, dans une pièce
enjouée, rythmique, pleine de couleurs et de caractères différents, représentant tout à
fait la multitude des danseurs et danseuses au sein de leur troupe, vêtus d’habits
traditionnels colorés. Cassadó multiplie les brusques changements de nuances, de modes
de jeu (staccato, legato, espressivo, harmoniques…), d’accentuations, tout ce qui permet
de rendre cette pièce la plus vivante possible. Mais il ajoute aussi une touche de
modernité par l’utilisation de rythmes atypiques (sept croches dans une mesure à 6/8) ou
de séquences entrecoupant la jota, à cinq temps, qui enrichissent son discours musical
en le rendant très personnel et teinté de modernité.
À l'instar des valses de Frédéric Chopin, la Sardana de Granados n'est pas conçue pour
être dansée. Elle est présentée comme une Sardana de concert, mettant ainsi en avant la
richesse mélodique et rythmique plutôt que la structure formelle de la danse. Tout
comme dans l'approche de Pau Casals, il n'y a pas de contrapunt annonçant le
commencement de la danse. Cependant, on peut noter de petites interventions
rythmiques qui évoquent des mordants, notamment des triolets de doubles. Ces
éléments subtils semblent faire écho au flaviol, un instrument particulièrement connu
pour sa vivacité et ses nombreux ornements.
gènere més enllà de la cobla. Ell mateix havia exposat públicament la il·lusió i
l’esperança de poder «universalitzar la sardana» i l’havia comparat amb altres danses
Les deux sardanes originales de Juli Garreta, « Nydia » et « Maria », représentent une
avancée significative dans l'histoire de la musique catalane. Composées pour orchestre
symphonique, elles témoignent de la créativité et de l'audace de Garreta pour marier
deux univers musicaux distincts. Garreta a pris le parti d'enrichir l'orchestre
symphonique traditionnel en y intégrant trois instruments caractéristiques de la cobla
traditionnelle, à savoir deux tenores et un flaviol.
Un critique musical influent de l'époque, Jaume Pahissa, a exprimé son admiration pour
cette première sardana en ces termes dans le journal La Publicitat : « Una delicadeza
extremada y de un gusto exquisito. Usa toda la orquesta, más las «tenoras» y «fluviol»,
de la típica «cobla»; pero los numerosos recursos instrumentales son empleados con tan
justa medida y en tan apropiado momento, que no parece excesiva una grande orquesta
para interpretar una danza popular. Pero es que, además, está tratada toda la obra, a
pesar de que marca siempre el ritmo característico
de la sardana el ligero y duro tamboril, con tan artística maestría y tan colorida y
va¬riada, a la vez que sobria orquestación, que toda la obra, el conjunto, es dulce, intere
¬sante e inspirada [...]. Hagamos constar lo bien que se fundió en la orquesta el timbre
Enfin, le pianiste espagnol de renom, Joaquim Turina, qui avait une profonde
compréhension de la sardana et des liens étroits avec la communauté des musiciens de
cobla, a apporté sa propre contribution à la fusion entre la musique classique et la
tradition catalane. Sa composition personnelle pour piano, une sardana, incarne
parfaitement cette rencontre se voulant rassembler ces deux mondes musicaux.
Dans cette composition, l'un des éléments les évidents est le balancement ternaire
caractéristique de la sardana curta, avec son motif rythmique distinct de noire - croche -
noire. Ce motif évolue progressivement pour retrouver le rythme binaire plus courant de
la sardana moderne. Turina a fait preuve d’originalité en introduisant le flaviol au cœur
même de sa composition et non en prélude à la danse, faisant entendre un contrapunt
dans le registre suraigu du piano.
Turina use également à plusieurs reprises du triolet de noires dans sa composition, une
figure rythmique emblématique de la sardana. Cependant, malgré ces repères faisant
référence aux sardanes traditionnelles, il ose explorer des enchaînements harmoniques
et mélodiques modernes, témoignant de sa capacité à marier la tradition avec une
sensibilité contemporaine et personnelle. Dans les sections plus longues de la pièce, qui
évoquent sans doute les instruments à anches de la cobla, Turina essaye de recréer avec
succès les couleurs et les sonorités traditionnelles par le biais de longues mélodies à
deux voix : cette approche rappelle le dialogue entre le tible et la tenora que l'on trouve
dans les sardanes les plus célèbres de compositeurs catalan les plus joués tels que
Conrad Saló.
Conclusion
[Taper votre texte] Non ergo erunt homines deliciis diffluentes audiendi, si quando de
amicitia, quam nec usu nec ratione habent cognitam, disputabunt. Nam quis est, pro
deorum fidem atque hominum! qui velit, ut neque diligat quemquam nec ipse ab ullo
diligatur, circumfluere omnibus copiis atque in omnium rerum abundantia vivere ?
Bibliographie
Kaufman G. (2015) Gaspar Cassadó: A study of Catalan Cello Arrangements and Cello
Performance Style. (Thèse de Doctorat) Birmingham City University Faculty of
Performance, Media and English, Birmingham Conservatoire.
Annexe 1 [facultatif]
Titre de l’annexe 1
Index [facultatif]
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Titre
Abstract
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