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DELTAPLANE

ELVOL LIBRE

#
:S UNIVERSITAIRES DE FRANCE
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Kahle/Austin Foundation

https://archive.org/details/deltaplaneetvoll0O000hube
_ Deltaplane
Deltaplane
et vol libre

HUBERT AUPETIT
ISBN 2 13 037564 2
Dépôt légal — 1r° édition : 1983, octobre
© Presses Universitaires de France, 1983
108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris
INTRODUCTION

« I doit falloir être drôlement courageux tout de


même ! » C’est ainsi que le spectateur assistant au
décollage d’un « deltaplane » résume en général
l'effet produit; sous-entendu : « C’est bien beau à
voir mais c’est pour les casse-cou, pas pour les gens
raisonnables. »
Reconnaissons que les débuts n’ont pas été glo-
rieux. Des premiers accidents les media ont donné de
larges échos, souvent déformés et dramatisés; ce
nouveau sport a ainsi fait l’objet d’une macabre
campagne « contre-publicitaire » de lancement. Le
public en a retenu qu il est dangereux de confier sa vie
à 20 m° de tergal et quelques tubes d’aluminium, les
spécialistes de l’aéronautique ont été confortés dans
leurs jugements a priori défavorables, en oubliant que
toutes les branches de l’aviation ont en leur temps
contracté la maladie infantile de l'insécurité.
Grâce au ciel l'explosion a fait long feu. Les
apprentis-sorciers, ne comptant que sur eux-mêmes et
quelques aérodynamiciens « dévoyés », ont pu résou-
dre les problèmes à mesure qu’ils se présentaient. Il
était effectivement possible de trouver un compromis
entre les exigences draconiennes de l’aviation classi-
que et la stabilité précaire des premières ailes de Vol
Libre, satisfaisant pour la pratique d’un loisir soli-
taire où les vitesses atteintes ne sont jamais importan-
tes. Aujourd’hui, des milliers de pilotes à travers le
monde volent quotidiennement des heures durant
5
dans les atmosphères les plus agitées sans rencontrer
de problèmes de sécurité.
Et pourtant, malgré cela et malgré une expérience
de près de dix années et 1000 décollages, j’admets
que le Vol Libre est un sport dangereux.
Ce n’est plus la menace diffuse, aléatoire, l’éépée de
Damoclès de la rupture en vol ou du piqué sans
rémission, le danger réside dans la nature même de
l’activité, qui consiste à se déplacer dans l’espaceà
trois dimensions. L’accident ne tombe pas sur le
pilote comme la balle du barilletà la roulette russe, il
résulte de l’erreur humaine, qui a des conséquences
bien plus graves que celle du patineur à roulettes ou
du véliplanchiste.
Chaque pilote est confronté à un certain nombre
de limites, aérodynamiques, météorologiques, méca-
ie et physiologiques: il y a quantité de façons de
les franchir et se mettre en situation aléatoire. Utiliser
du matériel instable, effectuer des manœuvres de
voltige incompatibles avec les qualités de vol de l’aile
employée, décoller à l'approche d’un orage ou dans
des conditions incertaines, maltraiter au transport son
appareil, etc. C’est seulement alors qu’intervient le
hasard, la chance que le hasard veuille bien fermer les
yeux sur une inconséquence…
L’aile de Vol Libre est un peu le voilier du ciel,
produit d’une technologie sans cesse affinée pour
mieux utiliser l'énergie de l’atmosphère.
Son pilote, même s'il peut techniquement réaliser
toutes les manœuvres qui lui chantent, ne va pas
forcément où 1il le désire, car son autonomie est
limitée, mais là où sa science du vol lui permet d’ailer.
Il est en cela assez proche du pilote de planeur, avec
de la performance en moins mais de la facilité et de
l'autonomie d'utilisation en plus.
De même que certains marins aiment à rôder à
proximité des rivages, certains hommes volants pren-
nent leur plaisir à « caboter » le long des falaises, des
flancs de montagne, se balader sans bruit entre les
aiguilles enneigées, respirer l’haleine de la nature le
soir à quelques mètres des arbres.
D’autres recherchent l'émotion forte dans le gros
temps, le gain d’altitude de plusieurs milliers de
mètres, la distance de 200 km, le franchissement de
telle fameuse barrière montagneuse que personne n’a
encore réussi à vaincre.
D’autres recherchent la perfection du geste sportif,
ou la pratique collective d’une activité au sein d’un
club, ou même l’exercice de responsabilités dans une
organisation fédérale.
Il y a donc beaucoup d'ingrédients dans le Vol
Libre : promenade, aventure, technique, théorie,
volonté, sensualité, réflexion, dépassement de soi,
mesure, connaissance de la nature... C’est ce qui en
fait un loisir très exigeant, souffrant difficilement la
tiédeur ou l’à-peu-près.
CHAPITRE PREMIER

L'HISTOIRE DU VOL LIBRE... y

L — La préhistoire
Certains prétendent que le rêve du vol a toujours
appartenu à l’homme, imprégné dans ses cellules
comme l'instinct de manger, boire ou se reproduire.
Une chose est sûre : il a toujours cherché à dépasser
les limites que lui imposent a priori une frêle constitu-
tion physique et de faibles moyens énergétiques;
traverser des mers qui l’avalent, escalader des mon-
tagnes qui le rejettent, explorer des gouffres qui
l’étouffent…
Voler procède sans doute de ce besoin de conqué-
es; l’idée de « coloniser l’air » a d’ailleurs laissé
quelques traces dans nos livres d'Histoire : [care, de
Vinci, Cayley, Le Bris et, fin dix-neuvième début
vingtième, une Joyeuse bande d’excentriques ayant
pour noms Lilienthal, Chanute, Montgomery, Pilcher,
etc., que l’on peut considérer comme les précurseurs
du Vol Libre.
Otto Lilienthal a effectué plus de 2 000 vols planés
en Allemagne entre 1890 et 1895, décollant et
atterrissant à pied, atteignant des altitudes de
300 mètres.
Octave Chanute a conçu de superbes ailes multi-
planes qu’il expérimenta entre 1896 et 1900 près de
Chicago.
John Montgomery a réalisé en Californie le 29 avril
1905 l'exploit d’une descente planée parfaitement
contrôlée après largage depuis une montgolfière à
1 200 mètres d'altitude.
Il est étonnant de constater que ces pionmiers de
l'aviation générale ont d’abord cherché dans la voie
du vol plané, libre pourrait-on dire, avant d’utiliser le
moteur pour des raisons de commodité ;une poussée
mécanique pallie les médiocres performances d’une
aile construite avec des matériaux rustres et lourds,
conçue à tâtons.
Viennent le Première Guerre mondiale, l’utilisation
de l’aéroplane pour l’observation, la reconnaissance et
le combat aérien. On cherche, on travaille, on peau-
fine l’engin plus puissant, plus capable, plus utihtaire,
on quitte l’idée du vol de l'oiseau empreinte de grâce
et de silence.
Elle sommeillera jusqu'en 1921, date à laquelle les
Allemands, sevrés d'aviation par le traité de Ver-
sailles, s’intéresseront à nouveau au planeur en organi-
sant le concours de prototypes de la Rhôn ([1]). Ces
machines sont lourdes, volent donc vite, trop vite
pour être décollées à pied; il faut une assistance
mécanique, la traction d’un avion ou d’un treuil.
L'Histoire rate son second rendez-vous avec le Vol
Libre, c’est la naissance du Vol à Voile reconnu et
pratiqué aujourd’hui dans de nombreux pays.

IL — L'éclosion

Francis Rogallo est ingénieur à la NASA et présente


avec sa femme, dans les années quarante, un brevet
de parachute amélioré pour la récupération des
véhicules spatiaux. Une voile de toile flexible en forme
de delta soutenue par trois tubes d’égale longueur.
L'idée est approfondie à coups de millions de dollars,

10
mais abandonnée au profit de méthodes de repêchage
maritime. F
Pas pour tout le monde !
La simplicité de réalisation de l’aile Rogallo sollicite
de nombreux «< constructeurs du dimanche » qui
bricolent des cerfs-volants dans leur atelier.
L’armée américaine et quelques fabricants de para-
chutes mettent au point et utilisent pendant une brève
période le Delta Parawing.
En 1962 un skieur nautique australien, John Dic-
kenson, troque le cerf-volant classique avec lequel il
s’amuse à survoler l’eau contre une aile delta, suivi de
peu par ses compatriotes Bull Bennett et Bill Moyes.
Tout de suite apparaît le potentiel énorme de la
formule : meilleures performances, meilleure mania-

Fig. 1

bilité, possibilité de larguer le câble tracteur et de


planer. Pendant les années qui suivent, ils la perfec-
tionnent et la commercialisent, s’y suspendent au
moyen d’un siège mobile — la sellette — et se dirigent
au moyen d’un cadre triangulaire — le trapèze.
Parallèlement, quelques bricoleurs californiens réa-
lisent des sauts de puces, depuis les dunes des plages
11
du Pacifique, à bord de planeurs ultra-légers de toutes
formes construits en bambou et plastique. Ils utilisent
des cages « à la Chanute », faites de deux barres
parallèles qui les soutiennent aux aisselles, 1ls se
dirigent en effectuant des mouvements malaisés et
désordonnés.
En 1969 les expériences australiennes et améri-
caines se rencontrent et s’échangent. Le système
d’attache et de contrôle, les matériaux australiens se
marient avec les grandes voilures et la pratique de
décollage à pied américaines pour donner les pre-
mières ailes de Vol Libre réellement intéressantes.
Il est donc faux d’attribuer à tel ou tel |” « inven-
tion » de ce sport, plutôt résultat de l’accumulation
de diverses expériences isolées. L'adoption du trapèze
a permis à l’homme d’empoigner, de poser sur ses
épaules, de décoller, de diriger une aile « abstraite »,
conçue par un ingémieur polonais installé en Améri-
que aux débuts de la course à l’espace...

III. — Le développement
Le Vol Libre est né et se développe, aux Etats-Unis
d’abord, puis dans la majorité des pays développés.
L’aile est d’un maniement aisé, elle se transporte
facilement. Aérodynamiquement sûre : pas encore,
solide : pas encore, performante : pas encore.
Les constructeurs prolifèrent, toujours à petite
échelle, et travaillent sur des bases totalement
empiriques.
En 1973, Dave Killbourne réalise le premier « vol
de pente » : il parvient à s'élever par rapport à son
point de décollage et tenir l’air dans le courant
ascendant engendré par la déflexion de la brise de mer
sur une falaise. Peu de temps après, des pilotes
exploitent pour la première fois les ascendances
12
thermiques bien connues des habitués des planeurs.
Le Vol Libre devient une activité permettant de
passer des heures en l’air dans des paysages magni-
fiques, et de parcourir des dizaines de kilomètres en
_ utilisant la seule énergie de l’air. Il faudra cependant
encore un peu de temps pour qu'il puisse garantir un
niveau de sécurité satisfaisant.

IV. — Du Deltaplane au Vol Libre


En France, un champion de ski nautique dénommé
Bernard Danis découvre la nouveauté américaine lors
d’une de ses tournées internationales. Il fonde une des
premières manufactures d’ailes de Vol Libre. Un
certain Coulon (rien à voir avec celui qui fera Vol
Libre Magazine), de retour d’Outre-Atlantique avec
une aile Rogallo, décide de la copier et de l’appeler
« Deltaplane », faisant confiance à sa consonance
américaine pour séduire les foules. Il a raison ;malgré
l’existence éphémère du modèle Deltaplane, le mot
s’est répandu dans le grand public et identifié au sport
lui-même. On peut le regretter, d’autant que l’expres-
sion Vol Libre contient beaucoup plus de promesse et
de poésie que ce Deltaplane aussi froidement techni-
que qu’apatride.

1. Sans structures. — À cette époque des débuts,


les adeptes se recrutent dans un monde marginal de
casse-cou et d’origimaux à tout crin. Comme les
qualités de vol des machines dépassent à peine celles
des meilleurs parachutes, les pilotes recherchent le
dénivelé, pour rester plus longtemps en l'air, et la
possibilité de rotations rapides, d’où leur prédilection
pour les stations de sports d’hiver. On décolle à skis,
descend les 1 500 mètres séparant de l’atterrissage en
une petite dizaine de minutes, et on remet ça cinq à
13
six fois dans la journée. Chaque station a son
moniteur de ski excentrique fanatique de Delta, 1l la
survole chaque jour sous son oiseau bariolé au grand
plaisir des responsables locaux du tourisme et des
skieurs en villégiature. Excellente publicité, hélas
ternie par des accidents trop fréquents et surtout trop
semblables : « les chutes en drapeau » ; à la suite
d’un brusque cabré, d’un virage trop lent ou d’une
saute de vent, l’aile se met en piqué, voile faséyant
sans donner aucune portance, à la manière d’un
drapeau.
Et pourtant ce sport reste attrayant ; l'intéressé se
rend chez un marchand d’ailes, gourou d’une nouvelle
religion aéronautique qui, en l'échange de 2 à
5 000 F selon la « tête du chient », pose sur le toit de
sa voiture un paquet de 4 m de long et de 15 kg avec
lequel il part étonner les masses — et lui-même —
dans des paysages à couper le souffle. Les fabricants
sont des bricoleurs, les pilotes des autodidactes ; les
premiers expliquent les pourquoi de la conception à
grands renforts de gestes étayant des théories fumeu-
ses, avec des phrases toutes faites propres à scanda-
liser le plus obscur des aérodynamiciens. Les seconds
écoutent avec émerveillement ces propos et ne prêtent
finalement guère attention à ces soi-disant dangers
congénitaux de l’aile Rogallo. Le risque passe en
second derrière le plaisir neuf, la jouissance de la
troisième dimension sans aérodrome ni brevet ni
assurance, le vol vraiment « libre ».

2. La Fédération Française de Vol Libre. — A


mesure que le sport se répand, les besoins se déve-
loppent. Besoin de méthodes d’apprentissage pour
réduire les statistiques d’accidents, besoin d’entente
avec les Pouvoirs Publics pour réduire les querelles
avec les gendarmes.
14
Quelques pilotes décident de fonder la Fédération
Française de Vol Libre le 12 mai 1974 à Grenoble;
Philippe Galy, son premier président, se donne comme
mission d’autodiscipliner l’activité pour ne pas la
laisser interdire.
Le Vol Libre concerne trois ministères : les Trans-
ports, l'Intérieur, la Jeunesse et les Sports. La FFVL va
élaborer rapidement un modus vivendi avec chacun.
— Les ailes de Vol Libre, à titre dérogatoire, ne
sont pas considérées comme des aéronefs normaux et
sont dispensées de toute forme de certification par la
Direction Générale de l'Aviation Civile. Les pilotes
doivent observer les règles de l’air usuelles mais ne
sont tenus de passer aucune examen ou brevet.
— Une première négociation permet la pratique du
Vol Libre sur tous les sites préalablement déclarés;
cette clause étant par la suite supprimée, l’activité
devient autorisée partout où elle n’est pas interdite,
c’est-à-dire dans les limites imposées par les proprié-
taires privés et l’ « ordre public ».
— La FFVL se déclare association sportive suivant
la loi 1901. Elle sera agréée par le Secrétariat d'Etat à
_ la Jeunesse et aux Sports le 4 décembre 1974, qui
_ devient ainsi son ministère de tutelle et lui délègue
pouvoir d’ organiser ce sport dans notre pays.
= Depuis sa création, diverses équipes ont animé la
FFVL et se sont efforcé de résoudre les problèmes à
mesure qu'ils se présentaient : négociation d’un bon
contrat d'assurance, organisation d’un système cohé-
rent d'apprentissage du Vol Libre à travers la créa-
tion de brevets fédéraux de pilote et de moniteur,
organisation de championnats de France (et même
d’un championnat du monde en 1979), vigilance vis-
à-vis du matériel utilisé puis création d’un label de
qualité (1983), développement d’activités connexes
(vol biplace, vol tracté, etc.), mise en valeur et gestion
15
des sites, promotion du sport, etc. Elle laisse les
différentes commissions de spécialistes qui l’animent
travailler chacune de leur côté, ce qui contribue à des
progrès rapides.
Son action peut être considérée comme exemplaire
dans un domaine très difficile, au sein d’un milieu
réputé individualiste. Le fait d’ailleurs qu’une écra-
sante majorité de hibéristes pratiquent leur sport au
sein de la FFVL, alors qu'ils n’ont besoin vis-à-vis de
la loi de rien d’autre qu’une assurance responsabilité
civile, le prouve bien.
3. « Vol Libre Magazine ». — Le mensuel Vol
Libre Magazine a été créé par René et Martine
Coulon. La FFVL lui a dès le début loué une rubrique
mensuelle pour la diffusion de ses mformations.
Indépendamment de tout jugement de valeur, on
doit reconnaitre à VLM un rôle fondamental dans la
progression du Vol Libre dans notre pays. L’informa-
tion, en rapide et constante évolution, a pu ainsi être
diffusée pour le grand bien de la sécurité et des
performances générales. Ce fait est d’ailleurs attesté
par le succès de la revue qui parvient à « tenir »
depuis près de 10 ans malgré un public restreint.
V. — Aujourd'hui
Tous les pays où existe une pratique du Vol Libre
ont une association nationale régissant l’activité,
affiliée à la Commission Internationale de Vol Libre
de la Fédération Aéronautique Internationale. Ces
fédérations ont entre elles des rapports constants
sanctionnés par des rencontres fréquentes, des cham-
pionnats interfédéraux, des accords d'équivalence de
qualification ou de certification, etc.
Les Etats-Unis ont les premiers institué un proces-
sus de certification des ailes. Malgré les quelques
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réserves que l’on peut émettre quant à son fonctionne-
ment pratique, ce système a indéniablement fait un
bien énorme à la technologie du sport; il a mis la
sécurité au premier plan des préoccupations et permis
de déboucher sur l’apparition de matériel sain lorsque
utilisé sainement. Tous les autres pays se lançant dans
une démarche analogue choisissent du reste peu ou
prou les mêmes critères que ceux des Américains,
seuls les procédés de mesure changent.

1. Le « marché » du Vol Libre. — Il concerne en


1983 environ 40000 pratiquants dans le monde.
Quatre pays dominent la production d'ailes : Etats-
Unis, Australie, Grande-Bretagne, France.
Les Etats-Unis abritent,le plus grand nombre de
fabricants, près de 10 dont 3 gros, et les plus anciens.
Indiscutablement en avance les premières années, les
constructeurs américains, par excès d'isolement et de
confiance en eux, se sont peu à peu laissés rejoindre,
et parfois dépasser, par la production étrangère. Ceci
‘a mené à la situation actuelle, saine, dans laquelle
s'exerce une concurrence à armes égales.
Les Australiens ont un seul gros constructeur,
Moyes — le skieur nautique des débuts —, qui reste
l'un des premiers au monde grâce à son esprit
d'innovation, et au génie de pilotage de son fils.
En Europe, Britanniques et Français se défendent
extrêmement bien. Les principaux fabricants, après
des débuts dans le plagiat de modèles conçus Outre-
Atlantique, ont peu à peu acquis un savoir-faire
original et réalisé des modèles de grande valeur enviés
— et donc copiés — par beaucoup de pays.
Les caractéristiques mondiales de la production
d’ailes de Vol Libre sont l’empirisme et le mimétisme.
L’empirisme — Dans un domaine où la théorie est
encore mal dégrossie, l'intuition reste reine et moteur

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du progrès depuis les débuts. C’est regrettable quand
l'erreur se paie en vies humaines, mais bénéfique
quand l’absence de contraintes et de lois stimule le
génie créateur.
Le mimétisme — C’est la maladie mfantile de la
profession, difficile à guérir car contractée pour raison
économique. La recherche coûte cher, le marché est
restreint, un constructeur ne peut pas se permettre
deux échecs successifs, la copie est parfois le seul
remède contre la faillite. Si aucun constructeur
n'avait, à un moment ou à un autre, pratiqué la copie,
il n’en resterait plus. Bien sûr il y a des abus. les
dispositions législatives en matière de protection in-
dustrielle s’appliquent très mal au Vol Libre, un
certain nombre de fabricants vivent depuis les débuts
sur les idées des autres. Mais quand il s’agit d'utiliser
au mieux de nouvelles et bonnes idées, la démarche
profite aux lhibéristes et limite les dégâts que pourrait
causer la multiplication sur le marché de formules
« révolutionnaires » à petits tirages.
L’éclosion récente de l'Ultra-Léger Motorisé peut, à
terme, aider l’industrie du Vol Libre. Quand la
surenchère sur les motorisations aura cessé, les fabri-
cants d'ULM orienteront leurs recherches vers de
meilleures aérodynamiques. Le marché de l’aile pour-
rait être ainsi régénéré par de nouveaux capitaux, le
risque étant de le voir absorbé par le marché potentiel-
lement plus fort du motorisé. La seule arme du Vol
Libre, amateur ou professionnel, est la passion. C’est
elle qui lui a permis de tenir jusqu’à présent avec
un nombre d’adeptes limité, en dépit des crises de
jeunesse que le sport a déjà traversées.

2. La pratique du Vol Libre. — On peut consa-


crer une heure de temps en temps au tennis ou au
football, en Vol Libre, ce n’est pas possible. D’abord
18
pour de simples raisons de sécurité : quand on est
mauvaisen tennis, on risque seulement de s’ennuyer,
quand on est mauvais en Vol Libre, on risque sa peau.
Mais le Vol Libre est aussi un loisir vorace. À moins
d’habiter au pied d’un site, le libériste doit se déplacer
pour exercer son activité, parfois très loin s’il habite
les plaines. Son choix se fait en fonction de la météo
du jour, ce qui suppose, en plus de l’écoute d’un
bulletin officiel, une certaine habitude de l’observa-
tion du ciel pour adapter les renseignements reçus à
ses besoins.
Une fois sur le terrain de décollage, en général un
bord de falaise ou un bout de pré en pente suffisante
sur le flanc d’une montagne, dont le propriétaire
autorise complaisamment l’accès, il doit apprécier,
jauger les conditions aérologiques. Le vent n’est-il pas
trop fort, quelle est l’intensité de la turbulence? Il
parle aux pilotes présents et prend conseil auprès des
habitués.
Il déplie l’aile avec som et réflexion; 1l enfile le
harnais, coiffe le casque. Il se prépare sur la piste
d’envol, choisit son moment.
Trois, cinq, quinze pas suivant le vent et l’inclinai-
son de la piste, 1l vole.
Y a-t-il un moyen de « tenir l’air » ? Ascendance
de pente ? ascendance thermique ? facile ou difficile à
localiser ? facile ou difficile à exploiter? tout est
question d'expérience, de flair et de technique.
Un bon jour, il se retrouve 1000 m au-dessus du
décollage, hésitant sur la direction à adopter pour
poursuivre le vol de crête en crête sur des dizaines de
kilomètres. À la première erreur, il sera contraint
d’atterrir dans un pré repéré à la hâte en pleine
campagne, et partira à pied à la recherche d’un
téléphone pour prévenir ses copains ou d’une voiture
pour revenir au départ. S'il ne fait pas de fautes et s’il
19
a bien maîtrisé ses choix, après une balade de
plusieurs heures au-dessus des cimes, il négociera sa
dernière ascendance à 7 heures du soir en vue du
décollage, et « brûlera » l’altitude ainsi obtenue pour
revenir se poser près de son véhicule.
Un mauvais jour, la turbulence est sèche, mais
stérile, il est posé 10 minutes après avoir décollé, 1l
replie l’aile maudite en maugréant contre la cruauté
du ciel.
Un bon jour, en bord de mer, se termine par un vol
au soleil couchant, après des heures de promenade le
long des falaises de Jobourg ou d’Etretat, entrecou-
pées d’atterrissages au lieu même du décollage pour
de courts instants de repos devant une tasse de café
dans un camping-car.
Un mauvais jour, furieux vent de travers au décol-
lage, approche d’un méchant nuage d'orage, excès de
vent, le libériste est cloué au sol et n’a plus que la
ressource d’en parler à défaut de le faire, en atten-
dant, la journée s’il le faut, que les cieux deviennent
plus cléments.
Le Vol Libre est un sport d'élite, au sens où il est
réservé à un petit nombre par la quantité d’efforts et
de renoncements qu’il impose. Il n’est pas besoin de
jouir d’une situation pécuniaire ou culturelle particu-
lière, 1l faut seulement être prêt à donner beaucoup
pour recevoir peu en quantité, mais beaucoup en
qualité. Bonnes ou mauvaises, les journées consa-
crées au Vol Libre sont riches d'enseignements : sur
soi-même — maîtrise de soi et confiance en so1 —, et
sur la nature — observation des oiseaux, des vents,
apprentissage de la « lecture » d’un paysage afin de
l’exploiter. C’est à force de se mesurer aux éléments,
terre, air, mer, que le pilote apprend à connaître un
peu mieux sa place dans le monde qui l’entoure.

20
CHAPITRE II

LE MATÉRIEL
Aïle, harnais, casque, parachute, instruments de
bord, le pilote porte tout son matériel pendant les
courses du décollage et de l’atterrissage. Ceci impose
des limites strictes au choix des matériaux utilisés.
Tout doit être portable, le maître-mot est légèreté ; les
choses se compliquent lorsqu'il s’agit de faire rimer
légèreté avec solidité, fiabilité et commodité.

VD liule
Pas de piste interminable, pas de moteur, pas de
treuil, pas d’avion tracteur : l’aile de Vol Libre a ceci
de supérieur à ses consœurs aéronautiques qu’elle ne
décolle qu’avec l’énergie des jambes de son pilote sur
une courte pente un tant soit peu dégagée. Le revers
de cet avantage étant bien sûr une limitation de
l'encombrement, une vitesse « humaine » donc fai-
ble, des performances modestes.
Si pour beaucoup le Vol Libre évoque l’aile de toile
en forme de delta, l’aile « souple », il ne faut pas
négliger le « planeurà bretelles » des débuts qui s’est
propulsé à travers le siècle pour se dénommer mainte-
nant « aile rigide »; comme son nom l'indique, il
s’agit d’un appareil dont la forme de la voilure est
parfaitement fixée en vol, soit au moyen d’une
puissante contrainte de structure lorsqu'elle est en
21
toile, soit au moyen d’une construction entièrement
rigide proche de celle du planeur ou de l’avion modèle
réduit.
L’aile souple est utilisée en grande majorité mais sa
consœur soulève l'intérêt du fait du supplément de
performances qu’elle propose.

1. L’aile souple. — Constituée d’une toile enfilée


sur une structure métallique triangulaire, l’aile souple
doit son nom à la mobilité de sa voilure sous l’effet
des variations des forces aérodynamiques qu’elle
subit. Perçue au début comme un handicap imhérentà
la formule, un tribut à payer pour posséder un
planeur repliable en quelques minutes, entreposable
dans un garage et transportable sur des porte-skis de
Bord de fuite
Lacet (axe)
Mât
Tangage (axe)
Poche de quille
Bord d'attaque Ficelles de rappel
Quille
Fourreau
de bord d'attaque Lattes

Roulis Baguette
(axe) de calage
Harnais (sangles)
Montants de trapèze
Intrados
Barre de contrôle Transversale
Cale-pieds

Fig. 2

voiture, les constructeurs ont su par la suite tirer parti


de cette mobilité pour faciliter la manœuvre en vol et
renforcer la stabilité.

A) La voile. — C’est l’outil essentiel du Vol Libre;


elle donne à l’aile son « caractère » : performance,
stabilité, agrément de pilotage; elle doit être solide
22
mais d’un poids raisonnable, peu poreuse, peu sensi-
ble aux agents atmosphériques, repliable et résistante
à l’usure.
a) Le tissu. — Tous ces impératifs ont fait choisir
une toile de synthèse, un genre de nylon dénommé
dacron : chaque fabricant de tissu a sa formule et sa
méthode de tissage, les différents modèles s’appellent
Windmaster, Bainbridge, Torey, etc.
Le dacron n’est cependant pas un tissu parfait. S'il
varie peu à la chaleur ou au froid, à l'humidité ou à la
sécheresse (en sens inverse de la plupart des maté-
riaux d’ailleurs), 1l ne vieillit pas toujours bien. Les
pliages et dépliages répétés, l’action du soleil, diffé-
rente selon les couleurs, altèrent la coupe d’une voile
et tendent à la faire faséver, perdre son rendement ;
d’autant plus tôt que mal conçue ou d’un tissu de
mauvaise qualité. C’est pourquoi la meilleure voile est
d’un blanc uni, ou juxtaposition de tons très clairs.
Les toiles choisies dans la production courante
pèsent de 150 à 250 g/m°, ce qui ‘lonne des voiles de
3 à 6 kg.
b) La conception et la fabrication. — Le concep-
teur procède généralement à tâtons ; ébauches, essais,
_ mises au point, etc., jusqu’à ce qu'il soit satisfait. Il
conçoit alors un patron qu’il confie au voilier.
Le voilier découpe des bandes de toile conformes au
patron, les laizes, qu’il réunit. Il rabat ou rapporte
divers éléments de tissu pour constituer les fourreaux
dans lesquels seront enfilés les différents éléments de
la structure et les lattes, ayant pour mission de
répartir les forces de pression sur la voile. Certaines
sont en plastique ou en fibre de verre souple, d’autres
en métal pratiquement rigide, suivant la forme que le
constructeur désire donner et la coupe qu’il adopte.
L'usage des lattes rigides se répand de plus en plus
car il permet de donner à la voile un profil rigoureux,
23
choisi pour optimiser les performances, souvent ren-
forcé par des épaisseurs de mousse, tissu ou rhodoïd.

B) La structure. — C’est un assemblage de tubes


maintenus par des boulons et haubanés avec des
câbles métalliques.
Là aussi légèreté, robustesse, flexibilité bien dosée,
résistance à l’utilisation et faible prise au vent sont les
impératifs principaux. L’aluminium a à peu près
réponse à tout, il est utilisé depuis les débuts.
Malgré quelques essais, les fibres légères (carbone
ou verre) n’ont pas été retenues pour le moment, car
trop chères et difficiles à travailler.
a) Architecture. — Deux types ont été adoptés
jusqu’à présent : structure avec, ou sans, barre
transversale. La première a l’aspect classique; pour la
seconde la rigidité est assurée par un haubanage
supplémentaire « par l'extérieur » du bord d’atta-
que, issu d’une po-tée prolongeant la quilleà l’avant.
Le gain de tr.inée consécutif à la suppression
de la barre transversale n’est qu ‘apparent car le tube
et les cäbles supplémentaires ie compensent, voire le
dépassent.
En fait, l'intérêt essentiel de la structure sans
transversale est sa bonne adaptation à certains des-
sins de voile avec la possibilité de cambrer très
précisément les bords d’attaque et la flexibilité de
l’ensemble. Son utilisation est très minoritaire.
b) Les tubes. — Généralement en dural, c’est-à-
dire un alliage d'aluminium, de zinc et de cuivre à
forte dominance d'aluminium (Au 4 g, Ag 4 5, etc.),
de diamètre compris entre 20 et 50 mm et d’épais-
seur de 1 à 2 mm.
Une mème structure utilise bien entendu différents
diamètres de tubes à différents emplacements suivant
l’importance des efforts.
24
L’aluminium est un métal commode, car il se
recouvre au contact de l’air d’une couche oxydée
d’alumine protectrice : la corrosion ne pénètre pas
l'épaisseur du tube.
Pour renforcer cette qualité, l’usage de l’anodisa-
tion se répand, consistant à remplacer par électrolyse
la couche extérieure par une couche protectrice plus
résistante. L’anodisation protège mieux le tube dans
les milieux fortement oxydants (bords de mer), embel-
hit lé fini, et permet de ne salir ni les mains ni la toile
à la manipulation.
c) L’accastillage. — 11 existe plusieurs types de
liaisons entre tubes : plaques métalliques plates ou en
formes, manchonnages, boulons simples et coupelles
plastiques, étriers, ergots, glissières de nylon, etc.
La visserie est inoxydable; les boulons ont des
diamètres de 5 à 10 mm, les écrous sont autoblo-
quants ; on utilise les vis < parkers » pour la fixation
des voiles sur les tubes.
En règle générale, ridoirs, étarqueurs, étriers, an-
neaux, toute la quincaillerie doit être inoxydable pour
éviter les échanges de matières entre parties métalli-
ques et mieux résister à des conditions d’utilisation
bien souvent « rustiques » (pluie, terre, sable, etc.).
d) Les haubans sont en acier inoxydable ou galva-
nisé, de diamètre 2 à 3 mm. Ils sont attachés à des
pattes à trous inox ou des étriers, au moyen de
cossecœurs maintenus par des manchons de cuivre ou
de laiton.
Leur nombre varie suivant le modèle d’aile et sa
technologie. Certaines par exemple sont équipées de
haubans raidisseurs de bords d’attaque (de moins en
moins) ; telle autre n'utilise pas moins de 120 m (!)
de câble pour assurer sa solidité.

25
C) L'utilisation. — L’aile libre souple pèse entre
20 et 40 kg et se vend (1983) de 7 à 15000 F. Elle
est présentée dans une housse de toile légère et se
replie entre 3 et 6 m. Outre les efforts pour assurer
une bonne qualité de vol et une solidité suffisante, le
constructeur doit lui donner un niveau de sécurité
acceptable et une finition < commerciale ».
a) Les accessoires importants.
a) Le point d’attache, où le pilote attache la sangle
de son harnais pour se suspendre, est généralement
constitué d’une boucle de corde ou de sangle solide; 1l
doit pouvoir se déplacer facilement pour permettre un
réglage facile du centrage (chap. I).
Beaucoup de libéristes utilisent une double-attache
de sécurité.
B) Calage des bouts d'ailes. I a paru souhaitable
pour des raisons aérodynamiques (chap. IT) de limi-
ter le débattement de la voile vers le bas. Les
Américains ont créé le floating tip à cet office.
Ce terme est malheureusement devenu floating
pour beaucoup de Français, d'autant plus impropre-
ment que ces baguettes de calage sont en général fixes.
y) Ficelles de rappel. Pour un motif analogue, les
constructeurs ont été amenés à limiter le débattement
de la partie centrale de la voile vers le bas au moyen
de cordes ou cäbles métalliques reliés au mât ou aux
haubans supérieurs.
b) La finition. — Le fabricant fait flèche de tout
bois pour parvenir à la meilleure finition possible.
a) Anodisation noir ou or, esthétique de l’accastil-
lage et des parties extérieures. Il est d’ailleurs fré-
quent que ce souci d'esthétique soit compatible avec
l’aérodynamique et réduise la prise au vent de cer-.
taines pièces.
B) On a vu toutes sortes de montages; les plus
rapides ne demandent pas plus de 5 minutes, les lents
26
un quart d'heure, voire vingt minutes. L’évolution va
vers la simplification.
y) Enormément de réglages sont possibles; au
constructeur d’en proposer de commodes et efficaces,
expliqués dans un manuel. Cette question est fonda-
mentale ; on passe d’une aile sûre à une aile dange-
reuse, d’une aile facile à manier à une aile épouvanta-
blement difficile, d’une aile rapide à une aile lente en
modifiant simplement une longueur de ridoir ou la
tension de la voile. Les réglages les plus courants
seront explicités dans le chapitre HI.

2. L’aile rigide. — Tout est permis dans la


conception de l’aile rigide ;la seule règle du jeu étant
la portabilité au décollage, d’où limite d’environ
40 kg.
Les modèles diffusés actuellement sont américains ;
la plupart sont livrés sous forme de kit ou, pire, de
plans, à réaliser par l’acheteur promu constructeur
amateur.
La frontière entre aile souple et rigide devient
floue, certaines ayant une voile souple mais rigidi-
fiée par des lattes et une structure extrêmement
contraignantes.
A) La voilure doit être bien lisse et tendue. Elle est
en général réalisée par entoilage d’un tissu synthéti-
que léger (rhodoïd, nylon, dacron) sur un squelette
hérissé de nervures qui lui donnent son profil.
Elle comprend des surfaces mobiles (gouvernes,
ailerons, etc.) reliées aux commandes : la rigidité
d’une aile interdit en effet le pilotage par déplacement
du poids du pilote, du moins latéralement (chap. IT).
B) La structure est soit haubanée, soit cantilevée.
Dans le premier cas elle tire sa solidité de haubans

27
Manta Fledge I

Empennage

Mitchell Wing
et cage de pilotage
Le pilote pose ses pieds sur la
barre frontale après le décollage

Fig. 3

limitant la flexion des ailes, dans le second de son


longeron même.
L'avantage du haubanage est la légèreté ; l’inconvé-
nient la prise au vent et la complication.
L'avantage du cantilevage est le peu de prise au
vent, l’inconvénient le poids, généralement important,
du longeron, et les difficultés de pliage.
Dans l’un et l’autre des cas tous les matériaux
usuels de la science du bricolage sont de mise : bois,
métal, fibre de verre, résine, stratifié, etc.

28
C) L'utilisation. — L'’aile rigide est peu repliable
lorsqu’elle n’utilise pas la technologie de l’aile souple.
Elle nécessite généralement l’usage d’une remorque
pour le transport.
Elle n’est souvent pas plus chère que sa consœur
car les heures de main-d'œuvre, offertes par l’ache-
teur lui-même, sont « gratuites ». Elle est cependant
_ moins robuste au sol : son revêtement est sensible
aux accrocs, et la rigidité impose des efforts plus
importants à la structure.
Le pilote est en général assis dans une « cage de
_ pilotage » de type Chanute, sur une sorte de hamac.
Il peut descendre ses deux jambes pour le décollage et
l'atterrissage, et les replier devant lui en vol (voir
fig. 3).
Sur certains modèles 1l déplace son poids d’avant en
arrière pour commander sa vitesse, mais sur tous il a
une manette, poignée ou manche pour commander les
virages.
Outre la différence de sensations offertes par cette
position qui le rapproche plus de celle du Vol à Voile,
le « rigidiste » apprécie avant tout l'efficacité de
. manœuvre et le supplément de vitesse qu'il a par
rapport au « soupliste ». Les commandes aérodyna-
miques, beaucoup plus efficaces, permettent l’utilisa-
tion de géométries plus ambitieuses et proches de
celles des planeurs.
L’aile rigide est un véritable « planeur à
bretelles »…

II — Le harnais

Un vol peut durer plusieurs heures et demander au


pilote énormément de mouvements. Il faut donc
l'installer dans un harnais d’un confort maximum et
d’une grande robustesse. Dans cette recherche on est

29
bien sûr limité par le sempiternel écueil du poids et de
l’encombrement.

A) Le harnais debout. — Très en faveur aux


débuts du Vol Libre, pratiquement abandonné sauf
pour l'apprentissage ou le vol avec décollage à skis.

B) Le harnais couché-ventre. — Le plus apprécié,


et de très loin, pour la sensation qu'il procure (+ le
pilote vole sans voir ses ailes »), la liberté de mouve-

Harnais couché :
Harnais cocon pattelettes et étrier
Parachute ventral

Harnais
couché-dos

ments, le champ de vision qu'il offre, et son relative-


ment bon comportement en cas de choc.
Comme il est le plus apprécié, c’est lui qui a fait
l’objet du plus de recherches. Il est constitué d’un
tablier de toile, généralement épaisse ou rembourrée,
auquel sont cousues les sangles réunies au mousque-
ton d’attache.
Tout le génie du fabricant consiste à utiliser
suffisamment de sangles et les placer en des endroits
judicieux pour que la force transmise par le mousque-
ton se répartisse de manière supportable sur tout le
corps du pilote. Le travers étant bien sûr l’excès qui

30
conduit à des emmêlages et des séances de réglages
inextricables.
De plus, le harnais couché doit autoriser la position
debout pour permettre la course du décollage et
l'atterrissage. Ce problème a été diversement résolu.
Plusieurs prototypes de harnais « bulles » ont vu le
jour, aucun n’ayant encore donné pleinement satisfac-
tion. Il s’agit d'inclure le pilote dans une coque à
faible traînée, donc de s’attaquer à l’une des princi-
pales sources de traînée; on en attend de gros
progrès.

C) Le harnais assis. — Très utilisé dans les débuts,


le harnais assis, ou sellette, connaît encore quelques
adeptes.
Inconvénients : résistance à l’air plus importante
d’un pilote assis (ou debout), débattement limité pour
le pilotage.
Gros avantage : le confort, les fesses ayant été
conçues par le Créateur pour supporter le poids de
son Image pendant des heures, sans fatigue.
La sellette procure des sensations de pilotage
différentes, du fait de la position du corps, mais aussi
du rabaissement du centre de gravité du pilote par
rapport au vol couché-ventre.

D) Le harnais couché-dos. — Amélioration natu-


relle du harnais assis, le harnais couché-dos est une
sellette munie d’un étrier permettant de supporter les
jambes du pilote.
Le confort est presque absolu mais le champ de
vision réduit, spécialement en approche d’atterris-
sage. Le décollage, comme pour le vol assis, est
également moins aisé car l'aile est plus difficile à
contrôler au sol en conditions un peu turbulentes.

31
IL — L'équipement de sécurité

Les premiers films de Vol Libre nous montrent des


Californiens pieds nus, en maillots de bains, bronzés,
cheveux au vent, accrochés par des bouts de ficellesà
des cerfs-volants bricolés, planant au-dessus des
dunes de la Plaja Del Rey. Le sable poudreux est
certes un excellent tapis en cas d'atterrissage un peu
brusque, mais les premiers accidents graves, et sur-
tout la pratique du sport dans des régions moins
hospitalières et indulgentes ont remis sérieusement en
question ces coutumes primitives.

1. Le mousqueton. — Pas de nœud hâtif pour


s'attacher à l’aile avant le décollage, on utilise un
mousqueton de montagne, dont l'ouverture intempes-
üve est rendue impossible par une mollette à vis.
Il convient d'utiliser du mousqueton de bonne
qualité, de résistance minimum garantie supérieure à
1 tonne dans tous les sens de travail.

2. Le casque. — Absolument indispensable, rares


sont les hbéristes en négligeant le port.
Choc violent, atterrissage un peu brusque, coup lors
du maniement au sol, le casque protège dans bien des
circonstances ; 1l est nécessaire comme il peut l’être en
skate-board ou en moto.
Les qualités à rechercher pour le Vol Libre sont:
— Légèreté :plus que dans tout autre sport, le cou
produit un effort important pour soutenir la tête
casquée en position couchée.
— Robustesse : les avis sont partagés sur le type
de coque souhaitable : molle ou dure suivant qu’on
considère le choc dit « mou » plus probable que le
choc « dur ». Quoi qu'il en soit, sa structure interne
doit être aussi amortissante que possible.
32
— Acoustique : le niveau de sifflement, la musique
de l’air dans la voile sont un repère important pour le
hbériste dans l’évaluation de sa vitesse. C’est en tout
cas le plus facile à assimiler. Il est donc conseillé que
le casque dégage les oreilles ou tout au moins ne les
masque pas.

3. Le parachute. — Les accidents des débuts se


déroulaient souvent selon le scénario du drapeau. On

NS
voyait des pilotes percuter le sol après plusieurs
centaines de mètres de chute quasi balistique, dans le
‘ bruit d’enfer d’une voile flottant comme un drapeau.
Il était bien entendu nécessaire de ‘s'attaquer aux
causes de tels phénomènes (brillamment expliqués
par les études en soufflerie de Claudius La Burthe à

Fig. 5. — Séquence de déploiement d’un parachute de secours

l'Office National d'Etudes et de Recherches Aérospa-


tiales [2]); le drapeau a maintenant disparu de la
liste des problèmes aérodynamiques (voir chap. II),
mais l’idée du parachute s’est imposé pour au moins
en constituer un remède. L’altitude moyenne d’évolu-
tion des ailes libres étant assez basse, 1l n’était pas
envisageable de concevoir un largage du pilote suivi
33
H. AUPETIT 2
d’une ouverture; on a donc décidé d’attacher le
parachute à l'aile, permettant d’utiliser comme frei-
nage supplémentaire la résistance qu’elle, ou son
épave, oppose à l’air.
Le parachute de secours est devenu un accessoire
« standard » de sécurité, comme il peut l’être en Vol
à Voile, destiné à donner au pilote une seconde
chance en cas de défaillance matérielle ou humaine.

A) Type de parachutes utilisés. — Toutes les


études s'accordent à n’autoriser des vitesses de plus
de 100 km/h à un pilote en chute même balistique
sous une aile, quel que soit son état.
Beaucoup de fabricants ont donc décidé d’utiliser
des voilures plus petites (dans les 40 m?) et moins
robustes que celles du parachutisme, d’où encombre-
ment et poids très réduits (3 kg, 20 X 20 cm). Ce
choix ne couvre cependant pas les risques de chute
hbre consécutifs à une rupture d’attache. Ce pro-
blème, comme la plupart de ceux concernant cet
accessoire de sécurité, est très controversé; aucune
solution n’est à ce jour plemement satisfaisante, le
choix se fait selon un compromis; ce système est
néanmoins très efficace.

B) Le système Help à déploiement mécanique. —


La voile est placée dans une coupole en. forme de
« soucoupe volante » située au sommet du mât. Une
sangle la relie à sa base. Le pilote dispose d’une
poignée à portée de mains; l’actionner libère un
ressort projetant le parachute hors de son enveloppe
et provoque son déploiement.
Avantages : fiabilité d'ouverture lorsque la coupole
est dégagée.
Inconvénients : gène au pilotage du fait du poids
de l’ensemble, décentré par rapport au centre de
34
gravité de l’appareil; gêne au montage: ouverture
problématique en cas de rupture du mât.
Cette somme d’inconvénients entraîne une faible
utilisation du système sauf dans son pays d’origine,
VAllemagne.

C) Le système à déploiement manuel. — Le som-


met du trapèze est considéré comme le meilleur point
de liaison aile-parachute déployé; c’est celui qui
provoque le moins d’oscillations et permet le mieux au
pilote de « monter dans le trapèze » pour se protéger
à l’atterrissage (tout de même brusque puisqu’à des
vitesses de 4 à 6 m/s).
Le pilote a un sac cousu sur le ventre de son harnais
s’il vole couché-ventre, sur le dos s’il est assis ou
couché-dos, contenant la voilure de secours ; celle-ci
est reliée par sa sangle principale au mousqueton
d'attache du pilote.
En cas d'utilisation, le pilote ouvre le sac en tirant
une poignée, qui lui sert également à projeter le
parachute, encore plié dans une poche intermédiaire,
hors de l’épave pour une saine ouverture.
L'usage de la poche intermédiaire — ou sac de
déploiement — n’est pas universel mais s’est pratique-
ment imposé pour éviter les risques d’emmêlage des
suspentes dans les câbles ou d'ouverture avortée par
la rencontre de l’épave.

D) Le système idéal. — Les systèmes énumérés ont


des défauts, dont celui d’un déploiement non garanti
et peu probable en cas d’utilisation à moins de 100 m
d’altitude; ils ont cependant sauvé un grand nombre
de vies ce qui justifie leur emploi. Le système idéal
n’existe pas mais il est facile d’en constituer un cahier
des charges : léger, peu encombrant, ouverture garan-
35
4
tie en toute configuration de l'aile et du pilote,
fonctionnement à basse altitude.
Les spécialistes cherchent.

4. Equipements exceptionnels
A) Haute altitude. — Pour les vols en haute
altitude tels ceux pratiqués dans la «< vallée des
records » — Owens Valley — en Californie où la
croisière à 5 000 ou 6 000 m en ascendance thermi-
que n’est pas rare, il est fortement conseillé d’empor-
ter une réserve d'oxygène et de se munir de sous-
vêtements particulièrement chauds, même si la tempé-
rature au niveau du décollage dépasse 30 °C à |
4

l’ombre ! ;
Aux latitudes françaises ce type de vol est impossi-
ble; il est rare de rencontrer des conditions aérologi-
ques permettant de dépasser 4 000 m.

B) Montagne. — Les skis sont abandonnés pour


l’inconfort et la perte de performances qu'ils procu-
rent en vol. Ils sont cependant très commodes pour les
décollages et atterrissages en neige profonde. On.
préfère néanmoins à présent damer à l’aide de skis et
décoller à pied.

C) Les roulettes. — Elles sont placées sur la barre


de contrôle pendant les périodes d’apprentissage, où
décollages et atterrissages ne sont pas parfaits. Elles
évitent à l’aile de s’arrêter net en cas de choc au sol,
limitant les dégâts matériels et corporels. Pour les
mêmes raisons les écoles conseillent le port de gants et
de chaussures bien protecteurs.

D) Le parachute de freinage. — Soit mal conçu


dans son état actuel, soit décidément inutile, le

36
parachute de fremage, fait pour faciliter les atterris-
sages et les approches délicates, n’a guère emporté
adhésion des libéristes.

IV. — Les instruments du Vol Libre

Les premières ailes avaient de si piètres perfor-


mances que le besoin d’instrumentation ne se faisait
guère sentir. À quoi bon lire sur un cadran qu’on
descend comme une pierre alors qu’on le sait très
bien!
Petit à petit, performances et maniabilité se sont
améliorées, le domaine de vol s’est accru, les pilotes
ont commencé à fréquenter les différents types
d’ascendances disponibles dans l'air, la nécessité
d’une instrumentation pour mieux les exploiter s’est
imposée.

1. L’altimètre imdique l'altitude ; c’est un baromè-


_tre gradué en mètres.
La conversion pression atmosphérique — altitude
dépend de l’altitude, la température, l'humidité; ce
n’est donc pas un instrument très précis. Il l’est
cependant largement assez pour le Vol Libre.
Le pilote au décollage cale son altimètre à l'altitude
qu'il désire : O0 s’il veut situer commodément ses
gains et ses pertes par rapport au décollage ; l’altitude
réelle au-dessus de la mer sl compte faire du
chemin; l’altitude qui le sépare de l’atterrissage s’il
veut raisonner en terme d'autonomie par rapport à ce
terrain.
L’instrument lui sera extrêmement utile — sans
être indispensable — en vol; il pourra à tout instant
connaître son autonomie, le bilan de son travail pour
exploiter une ascendance, l’efficacité du choix d’une
vitesse pour traverser une vallée.
37
Les qualités essentielles d’un bon altimètre de Vol
Libre sont : facilité de lecture, robustesse, sensibilité.
Des graduations de 10 m sont souhaitables.

2. Le variomètre indique la composante verticale


de la vitesse; il évalue pour cela la différence de
pression entre l’air d’une capsule calorifugée et l'air
extérieur : la fuite donne la vitesse cherchée. D’autres
systèmes existent cependant.
Le variomètre est pratiquement indispensable si
l’on ne veut pas se contenter de « promenades de
santé ». On pourrait croire naturelle la notion de
montée ou de descente, il n’en est rien. La sensation
s’évapore dès qu’on s'éloigne du sol ou du relief. Il est,
de plus, utile de connaître l'importance de l’ascen-
dance ou de la descendance dans laquelle on se
trouve, afin d'adopter une tactique pour en profiter ou
s’en défiler.
Certains variomètres sont mécaniques, d’autres
électroniques ; parmi les seconds certains sont équipés
d’indicateur sonore de montée, de descente, ou des
deux.
Les qualités à rechercher sont : brièveté du temps
de réponse, faible sensibilité à l’altitude et à la
température, bonne autonomie. La robustesse est
également primordiale, comme pour tous les instru-
ments de Vol Libre toujours utilisés dans des condi-
tions extrêmement rustiques.

-3. L’indicateur de vitesse est rarement adopté


car une foule d'indices permettent de déterminer
celle-ci instantanément sans recourir à la fonction
oculaire : sifflement de l’air dans la voile, caresse du
vent sur le visage, écoulement sur la structure,
vibrations, etc. Cette détermination instantanée est
nécessaire pour permettre l'établissement de l'instinct

38
de la bonne vitesse, et des bons réflexes, au voisinage
du décrochage par exemple (chap. III); certaines
situations demandent des réactions si rapides qu’il
n’est pas envisageable de passer par l’intermédiaire
du cerveau conscient.
Par contre pour la détermination tactique de la
_ vitesse (optimiser un parcours, épreuve de compéti-
tion, mesure de performances, etc.) l'indicateur
devient utile. Il l’est de plus en plus car les plages de
vitesse disponibles augmentent.
Rappelons qu’à bord d’un aéronef on ne mesure
commodément que la vitesse par rapport à l’air.
Différents systèmes sont possibles : boules, hélices,
venturi, dépression, etc. Aucun n'indique de vitesse
absolue car les mesures sont obligatoirement affectées
par l’écoulement de l’air autour de l’aile ; ceci n’a pas
d'importance, seule comptant la fidélité de la méthode
de mesure.
Les qualités à rechercher pour un bon indicateur de
vitesse sont : fidélité, commodité, facilité de lecture,
avec graduations en km/h (ou quarts de m/s).

4. Tableau de bord. — Beaucoup de commer-


çants du Vol Libre proposent des « tableaux de
bord » aux formes élégantes, permettant de réunir et
de protéger les différents instruments évoqués ci-
dessus.

V. — L’entretien et le transport
1. Accessoires. — Tous doivent être rangés dans
un sac après chaque vol. C’est à la fois une mesure
contre l’oubli et les dommages divers aux transports.
Seul le parachute demande un soin spécial, avec
pliage et repliage tous les 3 mois environ, faute de
quoi l’ouverture éventuelle risque d’être moins rapide.

39
Il faut également inspecter périodiquement les cou-
tures du harnais et l’état de surface du casque. En
gros entretenir en écoutant son bon sens.

2. Aile. — Usage, entretien, transport demandent


une précaution extrême.
Les pliages et dépliages doivent être effectués avec
soin, sans jamais forcer aucune articulation mécani-
que. Il faut des protections en tissu ou mousse pour
éviter les frottements entre pièces métalliques pen-
dant le transport. La moindre faiblesse ramène bien
entendu la solidité de l’ensemble à celle de l’endroit
endommagé.
Pas d’entretien particulier sauf en cas d'immersion,
ou de fréquentation de milieu sablonneux ou boueux.
Il faut alors rincer à grande eau l’appareil le plus
rapidement possible ; sable, boue, eau de mer ont un
fort pouvoir corrosif même sur des surfaces traitées
anti-Corrosions.

40
Pour le transport, l’aile dans sa housse doit être
posée sur une galerie protégée de mousse, en évitant
les parties ballantes trop importantes.

VI. — L'équipement au sol


En dehors de la voiture, un petit outillage est
conseillé au hbériste. Jeu de clés, pinces, tourne-vis;
ventimètre pour indiquer la vitesse du vent au décol-
lage ; manche à air et plus généralement rubans pour
déterminer visuellement et rapidement direction et
force du vent sur les terrains de décollage ou
d'atterrissage.

Al
CHAPITRE III

LES IDÉES

L’aile (souple) de Vol Libre ne se serait jamais


développée si, en plus de sa facilité de mise en œuvre,
_le pilotage par déplacement du poids du pilote ne
s’était avéré extrêmement simple à pratiquer. Pour en
comprendre le principe, ainsi que la manière dont les
ailes ont évolué depuis les dangers rédhibitoires du
début jusqu’à l’aérodynamique saine d’aujourd’hu, il
est nécessaire de préciser quelques notions théoriques.

I. — Précis d’aérodynamique
et de mécanique du Vol Libre
1. Les forces aérodynamiques. — Un objet quel-
conque en mouvement perturbe l’équilibre de l’air; il
crée des « tourbillons », 1l agite les molécules d’air
qui exercent des forces tendant à perturber le mouve-
ment. Ces forces, réaction de l’air au mouvement,
sont par définition des forces aérodynamiques. On a
coutume de les additionner vectoriellement pour en
faciliter l’étude, la ramenant à celle d’une force
unique, la résultante aérodynamique s’exerçant en un
point nommé centre de poussée. On notera l’analogie
avec le poids et le centre de gravité.
Le travail du concepteur d’aéronef est de domesti-
quer et d'orienter la résultante aérodynamique dans
un sens qui lui convienne.
43
A) Profils — On appelle profil d’un objet en
mouvement dans l’air une coupe de cet objet dans un
plan vertical contenant la direction du mouvement.
Il va de soi que la notion n’a guère d'intérêt pour
l'étude d’un piano en chute libre, mais acquiert son
utilité lorsqu'on s’attaque à une aile d’oiseau ou un
carénage de voiture.

B) Traînée. — Taillons un bloc de mousse de façon


à ce qu'il offre un profil de goutte d’eau parfaitement
symétrique. Déplaçons-le dans le sens indiqué figure 7.
Le courant d’air frappant son bord d'attaque,
c’est-à-dire la portion du profil attaquée en premier
par les filets d’air, se sépare en deux parties de
manière symétrique.
Le courant inférieur passe sous la surface infé-

Extrados Portance

Intrados

rieure, par définition l’ëntrados du profil, le courant


supérieur sur la supérieure, l’extrados.
Les forces aérodynamiques se répartissent de façon
symétrique autour de l’intrados et l’extrados; la
résultante aérodynamique est donc sur l’axe de symé-
trie du profil ;on dit qu’on a une traînée pure.
Par définition, la traînée est la composante, dans la
direction de l'écoulement, de la résultante aérodyna-
mique. C’est sa partie « freinante ».
44
_ C}) Portance. — Cabrons la goutte de mousse
. comme dans la figure 7. L’écoulement de l’air change
d'aspect ; en suivant le trajet de deux molécules d’air
À et B de part et d’autre du profil, nous voyons que B
parcourt plus de chemin que A. Il y a donc raréfaction
de l’air au-dessus de l’extrados (puisque les molécules
y passent plus vite) par rapport à celui de dessous
l’intrados, d’où surpression en dessous et dépression
au-dessus. Cette différence de pression se manifeste
=

par une force verticale qui décale vers le haut la


résultante aérodynamique.
La composante de la résultante aérodynamique
perpendiculaire à l’écoulement s’appelle la portance.
portance
Le rapport s'appelle la finesse. C’est un
trainée
peu la note attribuée au travail du concepteur : plus
elle est élevée, plus l’aile porte et moins elle traîne,
plus elle va loin pour une perte d’altitude donnée.

D) Incidence. — La différence entre les deux cas


évoqués ci-dessus vient de l’inclinaison de la goutte
par rapport à l'écoulement. C’est donc une valeur
importante qu’il convient de mesurer.
L'incidence d’un profil dans un écoulement d’air
est l’angle entre la direction de l’écoulement et un axe

Axe quille —_. —


fAssieite --<A
HORIZON— 1 — Le — — Ee—
4 Angle D Dee tn 2
Incidence

45
de référence lié au profil, arbitraire mais choisi de
manière logique (axe de symétrie, quille d’une aile de
Vol Libre, etc.).
L’écoulement dépend bien sûr de la forme du profil,
définissant pour chaque portion une « incidence
locale >» ; on prend pour direction générale de l’écoule-
ment celle des filets d’air en dehors de l'influence du
profil.
L'’incidence ne se voit pas car l’air est incolore,
seule évalue-t-on à l’œ1il l'assiette, c’est-à-dire l’angle
entre l’horizon et l’axe de référence, qui n’est pas une
notion aérodynamique.

E) Variations de vitesse. — Partons de l'exemple


de la figure 7, c’est-à-dire d’un profil se déplaçant à
mcdence nulle. Nous n’avons pas précisé sa vitesse
dans l’air; on conçoit que plus elle est forte plus la
_ traînée est forte.
" Plus généralement, à une incidence quelconque
fixée, on admet que la résultante aérodynamique est
proportionnelle au carré de la vitesse-air.
Portance et traînée croissent, à une incidence fixée,
proportionnellement au carré de la vitesse-air.

F) Variations d'incidence, décrochage. — A vitesse


fixée la portance croît avec l'incidence. Mais si l’on
cabre fortement le profil, l'écoulement de l'air sur
l’extrados devient turbulent.

Zone
décrochée

46
En effet l’air n’est pas assez « fluide » pour
s'adapter à tout écoulement. Le phénomène de susten-
tation est alors fortement diminué: la portance aussi.
On dit que le profil est en décrochage.
Entre l’incidence nulle et les grandes incidences
existe une incidence dite de décrochage, correspon-
dant à une baisse brutale de portance due à un
écoulement soudain tourbillonnaire. À chaque vitesse
correspond une incidence de décrochage.

2. Mécanique du Vol. — Un aéronef est composé


d’une voilure — dont le profil fournit les forces
- aérodynamiques nécessaires au vol — à laquelle on
adjoint les éléments nécessaires au transport du pilote
et des passagers éventuels. L’aéronef est soumis à
deux forces : son poids et la résultante aérodynami-
que. Lorsqu’elles s’équilibrent, on dit... qu’il vole !
La mécanique du vol d’un aéronef est essentielle-
ment l’étude de deux forces — poids et résultante
aérodynamique — appliquées en deux points dis-
tincts : centre de gravité et centre de poussée.

A) Quelques définitions géométriques. — La voi-


lure est caractérisée par un petit nombre de paramè-
tres géométriques.
Petit allongement Grand allongement

2 Angle de nez
te
——————— ENVEIQUTE ————

Fait Envergure * Env.


Allongement =
Surface
Fig. 10
47
a) Sa surface. — C’est la surface de sa projection
plane la plus importante.
b) Son envergure. — C’est la plus grande distance
entre deux points de la voilure, perpendiculairement
au plan de symétrie.
c) Son allongement. — C'est le rapport :
envergure X envergure.
surface
d) Son angle de nez. — C’est l’angle que font ses
deux bords d'attaques.
e) Ses cordes. — Une corde est la longueur d’une
tranche de voilure coupée dans le sens du profil.

B) Traînées parasites, traînées induites. — Outre


sur la voilure, l’air agit bien entendu sur les autres
parties de l’aéronef. Les forces ainsi produites partici-
pent, en général sous forme de traînée, à la résultante
aérodynamique de l’ensemble. On distingue deux
types de traïînées, /a traînée induite et la traînée
parasite.
La première ne provient que de la voilure. Elle est
due à la viscosité de l’air et traduit l’énergie consom-
mée pour modifier son écoulement : plus le profil
perturbe l’air, plus la traînée induite est importante,
matérialisée en soufflerie par des tourbillons.
Ces tourbillons se produisent essentiellement aux
frontières extrados-intrados, et surtout en bouts d’ai-
les et au centre arrière. Sur une aile d’envergure
gigantesque, la traînée induite serait quasiment nulle.
On comprend qu’à incidence fixée la traînée induite
est inversement proportionnelle à la vitesse.
La seconde source de traînée, la traînée parasite,
provient de l’ensemble de l’aéronef ; elle regroupe les
forces de résistance qu’oppose l’air à son avance-
ment; elle croît donc avec la vitesse, on y retrouve
aussi bien les frottements superficiels que les « prises
48
au vent » des différentes pièces. Elle est proportion-
nelle au carré de la vitesse (air) à incidence fixée.
Autant la traînée induite doit être considérée com-
me un mal nécessaire, un tribut payé pour l’existence
de la portance, autant la réduction de la traînée
parasite fait l’objet d’efforts énormes de la part du
. constructeur.
Voici un bilan type de traînée d’une aile « Rogallo »,
élaboré à partir de mesures de soufflerie par l’ingé-
mieur Onera CI. La Burthe.

Bilan de traînée d’une aile « Rogallo »


élaboré par CL. La Burthe à partir de
mesures en soufflerie ([3])

Traînée en dAN % traînée totale

Pilote + harnais
(position couchée) 0;714 3,6
Câbles (40 m) 0,852 4,3 Traînée
Trapèze + mât 1,070 5,3 parasite
Barre transversale 1,510 US 20,7 %
Traînée propre de la voilure 2,410 12,0
Traînée mduite 13,400 67,3

Le pilote de Vol Libre paie cher le plaisir d’avoir visage et corps


à l’air libre.

C) Domaine de vol-vitesses-clés. — Une phase de


vol pendant laquelle la vitesse est constante est une
phase de vol équilibré ; poids et résultante aérodyna-
mique s’équilibrant, l'incidence est constante. L’étude
du domaine de vol équilibré d’un aéronef est la
recherche des incidences pour lesquelles il existe une
vitesse permettant le vol équilibré. Il dépend de la
charge emportée. Ainsi, pour un aéronef donné muni
d’une charge donnée, à chaque incidence du domaine
49
de vol correspond une vitesse de vol. Le domaine de
vol est généralement repéré par des vitesses-clés. Ce
sont :
a) La vitesse de décrochage.
b) La vitesse de taux de chute minimum, c’est celle
où la composante verticale de la vitesse, le taux de
chute, est minimum. Elle se situe au-dessus, mais
généralement très près de la vitesse de décrochage.

Va Vitesse horizontale
Angle de
finesse maxi
VW max
Vv mini
v

Dennl
Point de taux
de chute mini
Point de finesse
maxi
Vitesse
verticale

Fig. 11 Piqué

c) La vitesse de finesse maximum. — La finesse est


le rapport portance/traînée (voir C)). C’est aussi le
rapport :
composante horizontale de la vitesse;
composante verticale de la vitesse
En air calme c’est la distance horizontale couverte par
mètre de perte d'altitude.
Les études montrent que la finesse croît avec
l'incidence jusqu’à un maximum, puis décroît jusqu’à
la vitesse de décrochage. La vitesse de finesse maxi-
mum est supérieure à la vitesse de taux de chute
50
minimum, mais l’écart reste faible par rapport à
l'étendue du domaine de vol.
d) La vitesse maximum est difficile à définir prati-,
quement, car tout dépend des moyens dont on dispose
pour l'obtenir. Les constructeurs préfèrent donner
une vitesse à ne pas dépasser par sécurité.
e) Domaine de vol et charge alaire. — Pour des
raisons de commodité dans les calculs et les comparai-
sons, à la notion de charge emportée par un aéronef
on préfère celle de charge alaire : c’est le quotient de
sa masse totale en vol par la surface de sa voilure. Une
charge alaire donnée définit une correspondance vites-
se-mcidence de vol équilibré.
A incidence fixée, la vitesse est proportionnelle à la
racine carrée de la charge alaire; il en est donc de
même de ses composantes horizontales et verticales,
par suite :
Vitesses de décrochage, de taux de chute minimum,
de finesse maximum sont proportionnelles à la racine
carrée de la charge alaire. La finesse maximum n’en
dépend pas.
En fait cette loi n’est qu'approximativement véri-
fiée, des phénomènes de déformation mécanique appa-
raissant avec la surcharge modifient la géométrie de la
_voilure.
f) Détermination graphique du domaine de vol. —
Le moyen le plus simple est de tracer, à charge alaire
donnée, l’ensemble des vecteurs-vitesse possibles en
vol équilibré.
On trace pour cela deux axes perpendiculaires
portant en abscisse les composantes horizontales de
_ vitesse et en ordonnée les composantes verticales, et
on consigne les points correspondant au vol équilibré.
On lit alors les chiffres clés par des moyens
graphiques simples (Voir fig. 11).

51
II. — Application au pilotage d’une aile souple

On a utilisé trois axes classiques pour décrire les


mouvements d’une aile : tangage, roulis, lacet (voir
figure 2), matérialisés respectivement par : la trans-
versale, la quille et le mât.
Tout mouvement de l’aile peut se décomposer en
translations et rotations selon ces trois axes. Toutes
les ailes dites souples se contrôlent sur ces trois axes
par simple déplacement du corps du pilote.

1. Les contrôles.
A) Contrôle en tangage. — Il permet de faire
varier l'incidence, donc la vitesse, en cabrant ou en
piquant la voilure.
— Le pilote tire sur la barre de contrôle : il en
résulte une diminution d'incidence instantanée entrat-
nant une diminution de portance (1 1. F), d’où
accélération.
— Le pilote pousse sur la barre de contrôle :
augmentation d'incidence, augmentation de portance,
ralentissement.
Ce mécanisme reste applicable à la plupart des ailes
rigides, qui utilisent le déplacement du poids comme
contrôle en tangage.
En résumé, on tire pour accélérer, on pousse pour
ralentir.
C’est a priori l'inverse des commandes d’un avion
classique ; en fait, dans tous les cas la commande
accompagne le mouvement de l'avion.

B) Contrôles en roulis et en lacet. — Les deux sont


indissociables sous une aile souple; ils lui permettent
de changer de cap et de s’incliner. Définissons quel-
ques notions :

52
Commande
de tangage

Roulis créé
par le dérapage

Fig. 12
a) L’inclinaison n’est pas un paramètre aérodyna-
mique. C’est l’angle entre l'horizon et l’axe de réfé-
rence transversal de l’aile (axe de tangage), par
exemple la barre transversale.
C’est l’analogue, pour le roulis, de la notion d’as-
siette pour le tangage.
b) Le dérapage est une notion aérodynamique.
Pour une aile en mouvement c’est l’angle entre
l’écoulement de l’air et l’axe de référence longitudinal
(axe de roulis), par exemple la quille.
c) Effet girouette. — C’est la réaction, sur l’axe de
lacet, de l’aile au dérapage.
Il est positif s’il se traduit par un mouvement
autour de l’axe de lacet s’opposant au dérapage,
négatif dans le cas contraire. Il caractérise la < stabi-
lité de route ».
d) Effet dièdre. — C’est la réaction, sur l’axe de
roulis, de l’aile au dérapage.
Il est positif s’il tend à inchiner l’aile du côté opposé
à celui de l’attaque de l’air, négatif dans le cas
contraire.
e) Mise en virage (côté droit). — Le pilote déplace
son corps sur la droite en s’aidant de la barre de
contrôle. Il crée un couple tendant à incliner l’aile vers
la droite et faisant apparaître une attaque d’air
oblique.
Si l’appareil est bien conçu, il réagit en s’inclinant
vers la droite (effet dièdre négatif) et oriente le cap
vers la droite (effet girouette positif).
Les deux caractéristiques importantes pour une
telle manœuvre sont la rapidité et l’intensité de
réaction à la sollicitation du pilote : celui-ci veut
pouvoir changer de direction prestement et sans
efforts.
f) Virage stabilisé. — Si le pilote reste dans la
position qu'il a adoptée pour la mise en virage,

54
inclinaison et dérapage s’amplifient ; de plus le mouve-
ment a une « trace » sur l’axe de tangage, sous forme
d’un moment à piquer (le « nez de l’appareil pointe
vers le bas »). Il y a en effet un déficit de résultante
aérodynamique ; celle-ci ne compense plus le poids,
d’où perte supplémentaire d’altitude.
Le pilote doit pousser sur la barre de contrôle s’il
veut s’opposer à cette prise de vitesse en tangage, et
revenir vers la gauche pour limiter l’inclinaison.
_ L'apparition de la force centrifuge dès que la trajec-
toire s’incurve l’aide d’ailleurs à le faire.
L’inclinaison se stabilise, le dérapage diminue ou
s’annule, l’aile s’installe en virage équilibré; la force
centrifuge s’ajoute au poids pour donner un « poids
apparent » compensant la résultante aérodynamique,

R Ri

Ra

Force
centrifuge

Poids
: apparent

De l'utilité
de pousser pour
cadencer le virage

Fig. 13
55
devenue oblique et prenant une valeur plus impor-
tante qu’en vol rectiligne équilibré.
Si le phénomène peut être ainsi décrit de manière
assez précise qualitativement, il est difficile, parfois
impossible, d’en avoir une description quantitative :
vitesse de roulis, de lacet, etc. Le mélange effet-dièdre
effet-girouette détermine l’aptitude de l’aile au virage,
il doit être savamment dosé par le constructeur. Ce
dernier, par exemple, fait souvent en sorte que les
modifications d’inclinaison s’obtiennent aux seuls
mouvements de pousser ou de tirer du pilote. Ou bien
qu’un mouvement de «< guidonnage » des bras sur la
barre de contrôle crée un dérapage suffisant pour
exécuter de petits virages ou de petites corrections.
Les qualités à rechercher dans une aile pour le
virage équilibré sont encore une fois rapidité de
réaction et économie de gestes et d’efforts pour le
maintien ou la modification des trajectoires. Certains
modèles, « instables transversalement »., ont ten-
dance à augmenter l’inchinaison, d’autres « stables
transversalement » à la diminuer, les deux types
demandent donc des efforts pour respecter une incli-
naison donnée, ce qui est néfaste. La plupart cepen-
dant ont un comportement variable avec le régime de
vol, par exemple stables aux basses inclinaisons et
neutres au-delà, instables aux basses inclinaisons et
stables aux fortes.
g) Sortie de virage stabilisé à droite. — Elle
consiste à tirer modérément sur la barre de contrôle
tout en déplaçant le corps à gauche, puis à revenir
vers le centre en repoussant.

2. Décrochages. — Cette notion mérite une rubri-


que car longtemps elle fut considérée comme une des
tares du Vol Libre.

56
À) Analyse qualitative du décrochage symétrique.
— On a décrit le décrochage d’un profil comme une
perte brutale de portance, une chute de la résultante
aérodynamique due à une incidence trop forte d’où
discontinuité soudaine de l’écoulement de l’air. Mais
une voilure d’aile souple est constituée d’une infinité
de profils travaillant à une multitude d’incidences.
On définit le vrillage comme étant la variation
d'incidence dans un écoulement d’air donné, sur les
profils de toute l’envergure.
Les ailes de Vol Libre ont congénitalement un
vrillage positif, c’est-à-dire que l'incidence décroît à
mesure que l’on s'éloigne du profil central. Par suite
lorsqu'on ralentit progressivement, le profil central
décroche, alors que les profils en bouts d’ailes conti-
nuent de voler. Le phénomène de décrochage est donc
progressif, parfois difficile à définir exactement, et se
traduit par une perte de portance à l’avant d’où
moment piqueur tendant à réduire l’incidence. Cer-
taines ailes ne « décrochent » jamais vraiment à
l’occasion d’un pousser progressif et parviennent à
des phases de vol « parachutal » équilibrées. C’est
bien sûr une qualité de sécurité.
Par contre si l’on aborde le décrochage par une
rapide montée d'incidence (un pousser brusque par
exemple) on obtient un décrochage dit « dynami-
que », beaucoup plus radical puisque l’ensemble des
profils peuvent décrocher simultanément. Les réac-
tions peuvent alors être extrêmement mauvaises,
jusqu’à conduire à des passages dos par l’avant.

B) Analyse quantitative. — On a remarqué la


difficulté de définir précisément l'instant du décro-
chage. En pratique on cherche la vitesse où se produit
une abatée, c’est-à-dire une perte d’altitude brutale
(au moins 5 m en une seconde) avec moment piqueur.

57
Cette vitesse dépend de la charge sous l’aile. Elle
augmente avec la racine carrée du poids du pilote.

C) En virage. — La vitesse de décrochage est plus


élevée puisque le poids apparent est plus élevé; il y a
donc lieu de prendre des précautions.
La souplesse des voiles mène les différents modèles
à des comportements extrêmement variés une fois
décrochés en virage, depuis l’amorce de vrille jus-
qu’au retour au vol symétrique.

3. Stabilité. — La rubrique précédente montre


qu’une aile souple de Vol Libre tend à s’opposer aux
causes produisant son décrochage. C’est une qualité
de stabilité : le système a tendance à revenir à un état
d'équilibre lorsqu'on l’en a écarté.
La notion de stabilité est fondamentale dans ce
sport, car l'instabilité des premiers modèles « Rogal-
los » est responsable de sa souvent mauvaise image
de marque.

A) Le centrage et l’ancrage. — En aéronautique, le


centrage d’un aéronef désigne la position de son
centre de gravité. Un avion de ligne n’a pas le même
centrage suivant la quantité et la répartition du fret et
des passagers qu’il transporte.
En Vol Libre, le pilotage consistant dans la plupart
des cas pour le pilote à déplacer son centre de gravité
et donc celui de l’aéronef, il y a lieu de distinguer
centrage et ancrage.
L’ancrage du pilote est le point de l’aile où il se
suspend (en général dans les parages du sommet du
trapèze). Chaque ancrage définit un ensemble de
centrages pour l’aéronef, que le pilote utilise pour
décrire son domaine de vol.
On conçoit qu'un pilote ancré trop avant qualifie

58
son aile de « piqueuse » puisqu'il aura toujours un
effort à effectuer pour voler aux vitesses de croisière.
De même, ancré trop arrière, il qualifie son aile de
« cabreuse ».
Le premier besoin est donc de choisir un point
d'ancrage sur l’aile, qui donne la vitesse de croisière à
effort nul. Cette vitesse est en général choisie entre le
taux de chute minimum et la finesse maximum.
B) Rappel au neutre en tangage-stabilité. — Le
rappel au neutre en tangage à une certaine incidence
est la nature de l’effort que le pilote doit exercer sur la
barre de contrôle pour maintenir l’incidence, On
convient de le qualifier de positif lorsqu'il tend à faire
« cabrer » l’aile et négatif dans le cas contraire.
Une aile considérée comme stable en tangage a un
rappel au neutre positif et croissant à mesure qu’on
augmente la vitesse au-delà de la vitesse de croisière;
négatif en deçà de cette dernière.
C) Stabilité transversale. — La notion est beau-
coup plus difficile à cerner vu la difficulté de séparer
lacet et roulis. Une aile « considérée comme saine
transversalement » doit avoir un effet girouette posi-
tif empêchant les dérapages trop importants et une
forte stabilité de tangage en dérapage.
Nota : la compréhension des problèmes de stabilité
des ailes de Vol Libre est extrêmement ardue, les
spécialistes n’ont pas encore réussi à maîtriser tous
leurs aspects. Ce sport a toujours grand besoin d’un
solide appui théorique.
On se référera utilement à ([3]) pour les résultats
déjà obtenus.

4. Bêtisier de mécanique de vol. — « Un


décrochage vent arrière est plus dangereux qu’un
décrochage vent de face. »
59
« On perd de l'altitude en passant vent arrière, on
en gagne en passant vent de face. »
À elles deux, ces deux phrases sous-tendent les
incompréhensions les plus fréquentes en matière de
mécanique de vol. Il n’y a là rien d’anormal, le sujet
est délicat et mérite qu’on s’y attarde…

Ce A) Référence air, référence sol. — Une aile vole


dans l’atmosphère. La logique voudrait donc qu’on ne
décrive son mouvement qu'avec des paramètres mesu-
rés par rapport à un repère lié à l’air. Mais elle décolle
et atterrit sur terre, et se dirige grâce à l'intelligence
d’un terrien habitué à se repérer dans son environne-
ment terrestre. On ne peut donc faire abstraction du
sol, et lorsque l’air est en mouvement, c’est-à-dire
presque tout le temps, on doit prendre en compte et
différencier vitesse-air, vitesse-sol, finesse-air, finesse-
sol, etc. À partir de là, toutes les confusions sont
possibles puisqu'on s'attaque à un domaine extrême-
ment complexe de la Physique, qui laissa jusqu’au
grand Einstein perplexe de longues années, celui des
changements de repères.

B) Gradient de vent. — Un facteur de complication


supplémentaire vient de la fantaisie du vent. Il serait
relativement simple de faire la liaison entre les
mouvements-air et les mouvements-sol si l’atmos-
phère était en mouvement uniforme par rapport au
sol. Il n’en est rien, le vent varie avec la latitude, la
longitude, et l’altitude. La variation de la vitesse du
vent avec l’altitude s'appelle le gradient de vent. Par
exemple, il y a toujours « du gradient » à proximité du
sol car l’air en mouvement subit des forces de
frottement qui le ralentissent. On peut avoir ainsi un
vent de 40 km/h à 100 m d'altitude et de 20 km/h
au niveau du sol.

60
C) Décrochages vent arrière et vent de face. — Le
décrochage est une notion aérodynamique, puisque
définie comme discontinuité des forces aérodynami-
ques qui s’exercent sur un profil. Que le vent soit de
face ou arrière, il n’y a donc pas de différence de
vitesse de décrochage tant qu’on parle de vitesse-air.
Mais un pilote qui vient de décrocher se préoccupe
beaucoup de la référence-sol car s’il n’est pas suffisam-
ment haut, il risque un retour brutal sur le plancher
des vaches !
Comme on l’a vu en 2, un décrochage se traduit par
une perte d'altitude : sous l'effet de sa stabilité
naturelle, l’aile prend de la vitesse pour retrouver une
allure de vol normale. La trajectoire-air qu’elle suit
est bien sûr indépendante du vent, elle correspond à
une phase « critique » transitoire pendant laquelle
l'aile n’est pas manœuvrable. Le pilote a la seule
ressource d'accompagner plus ou moins la réaction de
l'aile, ce qui a pour effet de respectivement diminuer
ou augmenter l’amplitude de la phase critique. La
trajectoire-sol suivie, que nous appellerons la trajec-
toire critique, dépend, elle, fondamentalement du
vent : une aile décrochant à 30 km/h dans un vent de
face de 30 km/h suit une trajectoire critique quasi-
ment verticale ; vent arrière au contraire, cette trajec-
toire est beaucoup plus tendue, le pilote a le temps de
_voir défiler beaucoup de paysage avant de se retrou-
ver en allure de vol normale. C’est là que réside le
danger : en décrochant vent arrière, un pilote prend
plus de risques que par vent de face car il survole plus
de paysage en situation vulnérable, et donc plus
d'obstacles potentiellement dangereux.
Deux remarques supplémentaires :
— Par vent arrière, le pilote tire une fausse
sensation de sécurité du défilement rapide du pay-
sage. Il vole vite par rapport au sol, et croit donc voler
61
vite par rapport à l’air, il est la proie idéale d’un
décrochage intempestif.
— Un gradient de vent accentue la ressource par
vent de face et la raccourcit par vent arrière : dans le
premier cas, l’aile pénètre dans des couches où le vent
est de moins en moins fort, la vitesse-air diminue,
le pilote doit compenser en prenant davantage de
vitesse; dans le second, le vent arrière devient de
moins en moins fort à mesure que l’aile s'enfonce, la
vitesse-air augmente d’elle-même...

D) « On perd plus d’altitude en passant vent arrière


qu’en passant vent de face. » — Voici le raisonne-
ment le plus utilisé pour défendre cette assertion
fausse : « Un pilote volant à 30 km/h-air dans un vent
de 30 km/h a une vitesse-sol nulle. S'il se met vent
arrière, sa vitesse-sol sera de 30 + 30 = 60. Pour
passer ainsi de 0 à 60, il a forcément pris de l’énergie
quelque part, il a gagné de l’énergie cinétique, il a
donc perdu de l’énergie potentielle, il est descendu
plus vite qu’à son taux de chute normal. Inversement,
en repassant vent de face, son taux de chute va
diminuer, voire changer de signe et il va gagner de
l'altitude. » Si l’on accorde crédit à ce raisonnement,
un piéton marchant à 5 km/h vers l’est, donc dans le
sens de rotation de la Terre, sera freiné s’il fait demi-
tour pour marcher vers l’ouest « contre la Terre », il
devra accélérer s’il veut continuer de progresser à
o km/h... Manifestement, cette dernière conclusion est
erronée, 1l s’agit dans les deux cas d’une démonstra-
tion pseudo-scientifique utilisant une version mal
digérée du principe de conservation de l'énergie,
l'énergie potentielle ne peut seule être prise en compte
lorsque d’autres forces que celles de la pesanteur
entrent en jeu. Si l’on veut à tout prix utiliser un
résultat général sur l'énergie, il vaut mieux se référer

62
au théorème de l’énergie cinétique : lorsqu'un mobile
se déplace entre un temps À et un temps B, la
différence d'énergie cinétique entre A et B est égale au
travail des forces appliquées au mobile. Dans le cas
d’une aile effectuant des virages réguliers par vent
nul, la pesanteur est compensée par la résultante
aérodynamique et la composante horizontale de la
RFA par la force centrifuge. Le travail est constam-
ment nul.
En présence de vent, RFA et poids sont inchangés,
mais la trajectoire n’est plus circulaire. La force
« centrifuge » varie sans cesse, elle ne compense donc
pas la composante horizontale de la RFA, il y a travail,
fourni par la masse d’air, d’où variation d’énergie
cinétique. L’aile prend de la vitesse en passant vent
arrière, en perd vent de face. :
Plutôt que de s’égarer dans des explications théori-
ques nécessitant des bases approfondies, on peut
comprendre tout cela en raisonnant très simplement
en termes de trajectoires : indépendamment de consi-
dérations de gradient auxquelles on attribue d’ailleurs
toujours trop d'importance, la différence essentielle
entre le virage vent de face et le virage vent arrière est
dans la trajectoire-sol. Par vent nul, une aile en virage
décrit une branche d’hélice circulaire. Un vent éven-
tuel « resserre » l’hélice face au vent et « l’allonge »
vent arrière. En d’autres termes, l'effet de dérive
diminue le rayon de courbure de la trajectoire(-sol)
par vent de face, et l’augmente par vent de dos.
Autrement dit encore, à égalité d’inclinaison, une aile
vire plus serré par vent de face que par vent arrière.
De là découlent tous les problèmes et ambiguités en
la matière.
Le pilote en approche d’atterrissage a un chemine-
ment par rapport au sol quasiment imposé par la
sécurité (arbres, obstacles, cible, etc.). Il doit donc

63
choisir sa trajectoire-air en fonction de sa trajectoire-
sol. Il doit incliner davantage ses virages vent arrière,
qui lui demanderont plus d'efforts et lui feront perdre
davantage d’altitude. Il aura vraiment cette impres-
sion que « c’est plus dur de virer vent arrière que vent
de face ».
Le pilote exploitant une ascendance à 1000 m
d’altitude ne se préoccupe pas de sa trajectoire-sol; 1l
a suffisamment de réserves d'altitude pour aller où 1l
veut. Il ne se préoccupe que de sa trajectoire-air,
s’efforçant de l'adapter au mieux à la forme de
l’ascendance, il est « dans la masse d’air », le vent ne
compte plus...
Le pilote exploitant des thermiques au ras d’une
pente est sans cesse partagé entre l'optimisation de sa
trajectoire-air pour monter le plus possible, et l’opti-
misation de sa trajectoire-sol pour ne pas percuter la
planète ou se laisser dériver dangereusement. Plus il
va s'élever, plus ses virages vent arrière lui sembleront
semblables aux virages vent de face.

III. — Pilotage d’une aile rigide

1. Les contrôles.

A) Tangage. — Pour certaines ailes rigides, le


pilote est installé dans un harnais assis ou couché
comme sous une aile souple, et commande le tangage
par déplacement de son corps.
D’autres sont équipés d’une « cage » parallélépipè-
dique; le pilote est assis sur un siège souple et
commande le tangage en se déplaçant entre les deux
barres parallèles de la base de la cage.
D’autres sont équipées d’ailerons, élevons ou volets
sur le bord de fuite de l’aile, sur la queue ou sur le
64
plan canard suivant le cas. Le pilote a un manche à
portée de mains, qu’il utilise en dehors de la phase de
décollage généralement.

B) Latéral. — La rigidité (!) et le grand allonge-


ment des ailes rigides rendent difficile, voire impossi-
ble, l’utilisation du déplacement du corps pour le
pilotage latéral.
Les constructeurs ont donc recours aux commandes
aérodynamiques.
Sur le « Quicksilver », le harnais-pendulaire du
pilote est relié à un gouvernail faisant partie de
l’empennage, donc actionné par les déplacements de
son poids. Le mouvement de roulis est induit par le
moment de lacet donné par le gouvernail.
Sur le « Fledge », deux gouvernes sont placées en

Fig. 14

bouts d’ailes et actionnées au moyen de deux ma-


nettes par le pilote. La gouverne braquée crée un
moment de lacet, mêlé de roulis si son plan est
incliné; le roulis est alors induit par la géométrie de
l’aile (dièdre).
D’autres machines comme la « Mitchell Wing »,
championne du monde, sont équipées d’ailerons ou de
spoilers à la manière des avions classiques.
65
H. AUPETIT 3
2. Décrochage, stabilité. — La rigidité de la
voilure se sent dans le décrochage; l’abatée est
souvent plus sèche, spécialement en virage où, contrai-
rement à l’aile souple, la machine peut très bien partir
en vrille si le pilote n’y met bon ordre.
La stabilité est donnée par le profil et le vrillage
pour le tangage, par l’angle dièdre de la voilure et les
différentes surfaces verticales pour le roulis et le lacet
sur les rigides sans empennage.
L'utilisation d’un empennage permet d’y transférer
les problèmes de stabilité et de ne se préoccuper que
de performances dans la conception de la voilure
principale.

IV. — Application à la description


de l’évolution des ailes
Partis d’un outil peu performant et dangereux, les
constructeurs par leurs recherches, les pilotes
par leurs expériences, ont réussi à obtenir des ailes
stables, faciles à manœuvrer, dotées de performances
correctes.
En moins de 10 ans, on est passé de 3 à presque 10
de finesse pour les ailes souples, de 2,5 m/s à moins
d’1 m/s en taux de chute minimum, tout en conser-
vant décollage, atterrissage à pied et transport sur un
toit de voiture.

1. La première génération. — A) Le « Stan-


dard ». — C’est la première; à peu de choses près
l’aile « Rogallo », caractérisée par ses trois tubes
d’égale longueur — quille et bords d’attaque. Elle a
une voile très creuse, très lobée, faite de deux
triangles ; son angle de nez est compris entre 80 et
90°, son envergure entre 6 et 9 m, sa surface entre 15
et 20 m°.

66
Atlas Comet
Lattes rigides
Bord d'attaque he
raidi au mylar
. Moyes Maxi Lancer IV
| Poche de qu ille Lattes souples
_ Puis
Voile grand allongement

tre”

ms
21 Renan
cit i Êull 10m
Ladre
JA (71) y
Bouts M y Siroccolll conique
radiaux : Transversale interne ai
7 |cirres on de lobe PALIN
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nifun PARC
PARU |
surface
2 102° angle de IS
1e lobe 7
SN rofécte
Saumons 70° angle
tronqués : de nez Seagull III
1 lobe 1020 nez
Bord d'attaque
Quille Cylindre conique
réduite
Standard Rogallo
82° nez 6°lobe
25 allongement

Fig. 15

Maniement au sol extrêmement aisé, léger (quin-


zame de kilos), ses qualités de parachutage sont
spécialement bonnes ce qui le fait encore utiliser dans
quelques écoles. Mais il a une instabilité en tangage
rédhibitoire : en dessous d’une certaine incidence —
que l’on peut atteindre par exemple en sortie de
décrochage ou en virage dérapé — sa voile cesse de

67
porter ; elle se met à flotter à la manière d’un drapeau.
Des constructeurs lui adjoignent des lattes —
comme sur les voiles des bateaux — ou des haubans
de bords d’attaques (chap. Il), préforment les four-
reaux de bords d’attaque pour diminuer le faséyement
des voiles, ajoutent des « ficelles anti-drapeaux » ; le
« Standard » s'améliore mais reste dangereux; les
finesses sont de l’ordre de 3 vers 30 km/h.

B) L’ « Hirondelle ». — Pour réduire le vrillage


démesuré du « Standard » et supprimer la partie
centrale arrière de la voile jugée responsable principal
du phénomène de drapeau, le constructeur américain
Wills Wings échancre le bord de fuite, diminue le
creux de la voile, ouvre l’angle de nez. C’est la
première « Hirondelle » (« Swallowtail »), elle date
de 1974. On passe de 3 de finesse maximum et une
seule vitesse utilisable à 4 et une petite gamme de
vitesses, permettant la fréquentation de vents un peu
plus forts; le drapeau est presque en dehors du
domaine de vol.
Mais la tenue de vol à basse vitesse devient
mauvaise; par manque d'efficacité du vrillage —
surface concernée insuffisante — le décrochage est
souvent asymétrique et se solde volontiers par une
amorce de vrille.
La « Swallowtail » est néanmoins mondialement
copiée et devient la seconde aile importante de
l'histoire du Vol Libre.

2. La deuxième génération. — A) Le « Dra-


gonfly ». — Comment faire pour régler ces problèmes
de décrochage sur le côté sans devoir réduire l’allonge-
ment? Le concepteur américain Roy Haggard y
répond à sa manière avec « Dragonfly » pour la
marque Ultralite Products en 1975.
68
Le « Dragon » est muni de « saumons tronqués » :
ses bords d’attaque sont prolongés perpendiculaire-
ment par des tubes d’une cmquantaine de centimètres
permettant de rajouter de la voile vers l’arrière en
bouts d'ailes.
On gagne en tenue au décrochage et en perfor-
mance (— 5 de finesse maximum). Cette innovation
est en fait une révolution; les constructeurs oseront
désormais utiliser des voilures de plus de 5 d’allonge-
ment sans craindre de s’aventurer dans des parages
jusque-là considérés comme mystérieux et inquiétants.

B) Aussitôt mondialement copié, le « Dragon » est


amélioré. Les constructeurs partent de la technologie
du saumon tronqué et de la voile tendue ; ils rivalisent
d'innovations afin d’encore diminuer le taux de chute
à basse vitesse. Les vols consistant toujours à « des-
cendre les dénivelés », il est essentiel d’avoir l’appa-
reil qui chute le moins pour rester le plus longtemps
en l’air. On imagine alors la surprise causée par
l’arrivée des ailes australiennes aux championnats du
Monde de Kôssen (Autriche) en 1976, construites
selon une tout autre philosophie.

3. La troisième génération. — A) Les ailes aus-


traliennes et néo-zélandaises. — La géométrie est
beaucoup moins audacieuse, mais la voile est entière-
ment lattée, sans saumons tronqués.
La « Stingray » de Bill Moyes ou le « SK2 » du
Néo-Zélandais Cohen n’ont sans doute pas le plus
faible taux de chute minimum mais ils battent tout le
monde par leur façon de virer quasiment sur place et
d'exploiter les ascendances, même petites, qu'ils ren-
contrent sur leur passage.
Les Océaniens ont vu la brèche par où allait
s’engouffrer le sport dans les années à venir : plus de
69
Poche
de quille
te

Bout d'aile
= flexible

/ va Poche de quille
Voile Quille

Fig. 16

rêves de performances mirifiques, les compenser par


la maniabilité. Voici les astuces utilisées.
a) Le lattage des voiles. — Jusque-là périodique-
ment utilisées pour pallier les défauts de coupe des
voiles, un peu comme un remède local anti-faséye-
ment, les lattes — des baguettes en matière plastique
— sont maintenant disposées sur toute la voilure.
Bill Moyes a compris que c'était le moyen de mieux
répartir les forces aérodynamiques sur toute la toile,
qu'il permettait de « sortir du tissu du triangle de la
structure » sans utiliser de saumons tronqués, qu’il
autorisait des angles de nez plus ouverts.
Les avantages sont considérables :
— Sous l'effet de la charge en vol, les bouts d’ailes
se vrillent, ce qui donne un excellent comportement
de l’aile au décrochage (voir p. 57).
70

BIBLIOTHEQUE
Université du Québec à Rimouski
— Plus la charge est forte, plus ils se vrillent,
moins ils portent, moins ils imposent d’efforts à
la structure, par exemple en turbulence. On peut
dès lors se débarrasser des haubans de bords d’atta-
que, ils ne sont plus justifiés par des exigences de
résistance.
— Pour des raisons analogues les bouts d’ailes
obéissent mieux à la mise en virage, ils se comportent
à cette occasion un peu comme des girouettes.
— Là où la voile porte le plus, c’est-à-dire au
centre de l’envergure, la présence des lattes améliore
de façon significative le rendement aérodynamique.
b) La poche de quille. — C’est une pièce de tissu
rapportée sur la partie centrale de la voilure, rempla-
çant le fourreau de quille; une sorte de fourreau de
quille très lâche.
Il est difficile de déterminer le mobile exact de son
inventeur Bill Moyes, mais on peut être sûr qu’il ne se
doutait pas du bond en avant qu’elle allait provoquer.
La mise en virage d’une aile est la réponse au couple
causé par le déport du poids du pilote sur le côté (II 1.
A) c)). La poche de quille accélère et intensifie la
réponse, en donnant la possibilité à la voile de
« rendre du tissu », de se creuser côté virage.
Encore une fois la théorie du Vol Libre progresse
grâce à la pratique; la poche de quille permet de
comprendre les mécanismes exacts du virage, et de
réaliser des machines de plus en plus parfaites en
qualités de vol transversales. Au lieu de se lamenter
sur les inconvénients en performances dont est respon-
sable la souplesse des voiles, on sait désormais qu’on
peut en tirer parti et inventer une nouvelle aérodyna-
mique. Une voile n’est plus formée de deux poches de
part et d’autre de la quille constituant deux ailes
médiocres, c’est une seule aile, souple, capable de se
_ déformer à profit selon les efforts du pilote.
71
à LU

B) Les conséquences. — Une fois encore les cons-


tructeurs ne tardent pas à comprendre l'intérêt de ces
idées nouvelles venues du Pacifique. Outre ceux dont
la seule philosophie est la copie pure et simple,
nombreux sont ceux qui prennent leur tête à deux
mains pour les utiliser et faire encore progresser les
produits.
a) Corriger l'instabilité. — L'avantage des bouts
d’ailes souples, nous l’avons noté, est l'augmentation
du vrillage à basse vitesse, pour les qualités de
décrochage. Mais sa diminution à haute vitesse est
néfaste à la stabilité et, de fait, la plupart des
premières ailes australiennes ou néo-zélandaises de
cette époque sont instables longitudinalement.
Les deux réponses à ce défaut sont les baguettes de
calage. décrites page 26, et les cordes de rappel.
b) Le « Gryphon ». — Conçu dès 1976 par un
amateur anglais de génie, Miles Handley, vendu à la
firme britannique Wasp fin 1977, le < Gryphon » a
pris dans les idées australiennes le lattage intégral et
la poche de quille. C’est un dessin révolutionnaire, le
plus audacieux de tout ce qui avait été fait jus-
qu'alors : 140° d’angle de nez, 7 d’allongement, pas
de barre transversale. Le bond en performances est
phénoménal : 1 m/s de taux de chute minimum, 8 de
finesse, au moins 2 points de finesse supplémentaires
à vitesse intermédiaire; cinq années plus tard elles
seront encore « dans le coup ». Mais les qualités de
vol transversal sont loin d’être excellentes — efforts
au pilotage, instabilité — c’est sur ce point faible que
la concurrence va contre-attaquer, et gagner. La
poche de quille est inefficace car la voile est trop
rigide.
L'apport essentiel du « Gryphon » au Vol Libre
est l’utilisation de lattes rigides pour donner à la

72

cl Pates ta
voilure un profil rigoureux; c’est elle qui conditionne
la presque totalité des progrès ultérieurs.
c) Le « Super Scorpion Hiway ». — Réponse du
concepteur Steve Hunt de l’usine britannique Hiway
au « Gryphon », le « Super Scorpion » va jusqu’au
\
bout dans la logique Moyes, c’est-à-dire dans la
maniabilité.
18 m° de tissu pour le modèle le plus répandu, une
_ voile assez creusée très travaillée, des lattes souples, le
pari est gagné : nombreux sont les pilotes du « Super
Scorpion » battant leurs camarades pourtant dotés
d’ailes de meilleures performances, grâce à leur
facilité d'exploiter le moindre souffle d’air.
Le « Gryphon » est plein de possibilités, mais
difficile à exploiter, le « Super Scorpion » triomphe
par sa facilité d'utilisation ; la plupart des construc-
teurs réaliseront un modèle de la même veine.
d) Le « Jet » et l’ « Atlas » La Mouette. — Le
constructeur et champion français Gérard Thévenot a
lui aussi, en 77, réalisé son aile australienne. Il a vu
ensuite la réussite du « Gryphon », son expérience de
pilote de Vol à Voile lui a appris à connaître la forme
d’un profil porteur. Il sort au printemps 1978 le
« Jet », avec deux idées essentielles :
— un profil donné par des lattes rigides préformées,
dont la cambrure est très prononcée et placée vers
l'avant;
— un fourreau de. bord d’attaque très agrandi,
faisant une sorte de voile à double-surface don-
nant un profil épais.
Les performances à basse vitesse sont stupéfiantes,
à peine 1 m/s de taux de chute minimum vers
27 km/h, ainsi que la facilité d’utilisation ; mais le
« Jet » a un vice d’instabilité qui le fait passer sur le
dos dans certaines situations.
73
Il est retiré de la circulation et remplacé par
| « Atlas », fortement diminué en double-surface, au
printemps 1978. Immense succès mondial. L’ « At-
las » est sain, facile, sûr et performant. Il gagne toutes
les compétitions internationales pendant deux ans.

4. La quatrième génération.
À) Le « Phoenix Mariah ». — Le constructeur
américain Bill Bennett pour supprimer la traînée de la
barre transversale, l’intégre dans une voilure double
surface, c’est le « Phoenix Mariah » ; nous sommes en
1978. La transversale est alors devenue « flottante »,
elle n’est plus fixée de manière rigide à la quille ; c’est
une invention géniale, à la « monsieur Jourdain » car
on ne réalisera que deux ans plus tard que son rôle
essentiel est de permettre le déplacement de l’ancrage
du pilote, diminuant le travail qu'il doit fournir
latéralement pour la mise en virage ou la réponse aux
turbulences.
Mais le « Mariah » est un échec tant en perfor-
mance qu'en stabilité et en solidité, les idées qu'il
contient vont sommeiller pendant deux années.

B) Le « Comet UP ». — Après le « Dragonfly », le


concepteur américain Roy Haggard, d’Ultralite Pro-
ducts, continue dans la même lancée avec le « Spy-
der », puis fait son « aile australienne », le « Condor ».
En 1979 :l réalise un sans-transversale ambitieux,
le « Mosquito », à géométrie variable.
Belle réussite technique, mais dans l’impasse des
lattes souples : en quelques mois en 1980 il réalise le
« Comet » qui dépasse dès sa sortie tout ce qui existe.
Le « Comet » a la double surface et la transversale
flottante du < Mariah », le profil style « Jet », et la
qualité légendaire « UP ». Il est sûr, stable, solide,
chute à 0,9 m/s à 28 km/h, bat le « Gryphon » ou
74
V « Atlas » sur toute leur plage de vitesse. Il est
aussitôt repris, copié, amélioré par la plupart des
constructeurs mondiaux.
L’aile « DSTI » (double surface à transversale
interne) est un grand succès. Le point gagné en finesse
- maximum et les deux ou trois points gagnés en finesse
à 90 km/h font faire un net bond qualitatif aux
performances des pilotes. L'arrivée des DSTI permet
au Vol Libre de véritablement exorciser son passé de
« parachutisme amélioré » et de pénétrer résolument
dans la voie d’un nouveau Vol à Voile, avec des outils
spécifiques.
Philosophiquement, l’aile souple s’oriente vers un
aéronef à voilure rigidifiée au maximum, mobile sur
une structure à laquelle est ancré le pilote.

C) Les découvertes d’un Pyrénéen. — Le pas décisif


dans la compréhension de ces phénomènes est franchi
par le Français Jean-Louis Darlet en 1981 grâce à
l'invention d’un ingénieux système d’ancrage flottant.
Il s’agit d’un parallélogramme articulé auquel s’atta-
che le pilote et qui lui permet de déplacer, en même

75
si

temps que son poids, son point d'ancrage à l’aile (fig.


18). Le système augmente l'efficacité du pilotage
pendulaire, diminue les efforts, et rend l’aéronef plus
agréable en turbulence grâce à un effet de compensa-
tion automatique.
En plus de ses retombées pratiques, cette inven-
tion a d'importantes conséquences théoriques. Elle
montre que les quilles flottantes ont un fort effet
d’ancrage flottant qu'on ne soupçonnait pas aupa-
ravant.
En définitive, trois phénomènes de déformation
favorisent la mise en virage des machines modernes :
a) Flexibilité des bouts d'ailes. — Longtemps
contenue par l’usage des raidisseurs de bords d’atta-
que, la flexibilité des bouts d’ailes est un ingrédient
essentiel de la maniabilité. Lorsqu'un pilote déplace
son poids vers la droite, la demi-aile droite subit une
surcharge qu’elle traduit par une augmentation de
portance, d’où résistance à la mise en virage. Si le
bord d’attaque peut plier vers l’intérieur, la voile se
creuse, la portance diminue, la mise en virage devient
plus facile. Certains constructeurs, comme le Britanni-
que Southdown Sailwings, utilisent cette propriété de
façon essentielle pour rendre leurs ailes pilotables
(Lightning en 1981, Feather en 1983).
b) L'effet Darlet de la quille flottante. — Décrit ci-
dessus.
c) La compensation de lobe entre les deux demi-
ailes, de moins en moins efficace à mesure qu’on
augmente la tension des voiles. L'idée est simple : en
reprenant l’exemple cité en a), s’il y a possibilité pour
le tissu de se déplacer d’un côté à l’autre de la quille,
à la surcharge du lobe droit, la voile répond par un
déplacement de tissu vers la droite qui résulte en un
creusement du lobe droit donnant la perte de por-
tance cherchée. Une autre façon de réaliser cela est de

76
. rendre totalement indépendantes les deux demi-voiles
#,

en donnant à chacune la possibilité de se creuser à la


_ demande. C’est la voie adoptée en 1983 par Jean-
Louis Darlet dans ses recherches pour le constructeur
français La Mouette; l’aile Darlet 83 est complète-
ment fendue à l’arrière du mât, elle est composée d’un
profil double-surface de type DSTI, à l’arrière duquel
les deux demi-voiles jouent les rôles « d’ailerons de
gauchissement » comme sur les premiers Blériots au
début du siècle. Il est encore trop tôt pour tirer toutes
les conclusions de ces démarches.

E) Vers une cinquième génération. — En Vol Libre,


ceux qui croient, à chaque arrivée d’une nouvelle
génération d’ailes, que le point culminant des perfor-
mances des voilures souples est atteint, sont périodique-
ment détrompés. Le génie des concepteurs est tou-
jours plus fort que l’inertie des commentateurs. Après
de nombreuses difficultés financières de 1980 à 1982,
le constructeur gallois Hiway sort un nouveau type
d’aile en 1983, conçu par Miles Handley, auteur en
son temps du « Gryphon » pour Wasp. L’« Explorer »
est un peu un « Gryphon » dont on aurait caché la
structure dans la voile. Il est donc composé d’une
quille et d’un longeron cachés dans un profil double
surface, suffisamment haubanés pour donner sa résis-
tance à l’ensemble. On obtient ainsi une voile mieux
tendue, moins soumise aux phénomènes d’aéroélasti-
cité qui perturbent les qualités de vol des DSTI. Plus
question bien entendu dans ces conditions de déforma-
tions internes propices au virage, l’« Explorer » vire
grâce à des « spoilers », ou petites plaques destruc-
trices de portance, commandées soit directement par
des manettes, soit par l'intermédiaire d’un trapèze
mobile solidaire des mouvements du pilote. Le libé-
riste habitué au pilotage pendulaire se retouve ainsi
ht!
haubans
he + Mât
transversale
Barre
Transversale

quille Fonctionnement de l'ancrage flottant JLD


flottante {trapèze non représenté).

Déplacements verticaux du pilote normal (a)


et avec ancrage flottant (b).

Fig. 18

en terrain connu même si la mise en virage ne fait


plus suite au déport du poids.
L’« Explorer » n’a pas encore fait ses preuves en
performances, mais 1l y a fort à croire que les idées
qu'il amène vont faire progresser de façon radicale la
technologie du Vol Libre dans les années à venir.

78
5. Les ailes rigides. — L'évolution des ailes
rigides dans l’histoire du Vol Libre est beaucoup
moins linéaire : il existait depuis longtemps des
- modèles dotés de très bonnes performances, maïs si
peu praticables du fait de leur poids, leur vitesse ou
* leur encombrement par des pilotes désirant décoller et
atterrir à pied qu'ils ne se sont pratiquement pas
diffusés.

A) Les « Fledglings ». — Le premier rigide réelle-


ment commode est le « Fledgling », conçu par Klaus
Hill et fabriqué par la firme californienne Manta
Products en 1973 (figure 3).
Le « Fledgling » a une structure d’aile souple, avec
des tubes en dural et une voile en dacron rigidifiée par
des lattes en métal dur. Elle a environ 7 de finesse,
c’est-à-dire 3 points de plus que les ailes souples
d’alors, mais elle terrifie les pilotes de Vol Libre qui
ne sont pas « mûrs ».
En 1978 le constructeur gonfle son profil, le
complète par une double surface; c’est le « Fled-
ge IL », 8 de finesse et une meilleure pénétration que
celle de toutes les ailes souples. Le « Fledge IT »
connaît un bon succès, surtout aux Etats-Unis, mais
jamais comparable à celui des ailes de Vol Libre les
plus populaires ; plus cher, plus difficile à mettre en
œuvre, 1l demande en outre un nouvel apprentissage
et demeure moins rentable en conditions de vol
difficiles à exploiter.

B) Le « Quicksilver » a le même type de conception


que le « Fledge », avec un empennage en plus.

C) Les autres. — Les autres rigides sont toutes de.


construction plus classique, avec une voilure entoilée
19
non repliable et une cage de pilotage. Elles ne
correspondent pas suffisamment aux désirs des pilotes
de Vol Libre pour emporter leur adhésion, mais se
prêtent très bien à la motorisation, leur offrant un
nouveau débouché.

80
CHAPITRE IV

LES HOMMES
45 % de pratiquants d’âge compris entre 26 et
39 ans, 28 % en dessous de 25 ans, 26 % au-dessus
de 35 ans, c’est ce qui ressort d’une enquête sociologi-
que menée avec rigueur par Christian Pociello pour
l’Institut National des Sports.
On y découvre que la majorité des libéristes habite
en région de plaine (45 %), 32% en montagne et
18 % en pays vallonné.
Paris fournissait en 1978 20 % des effectifs fans
çais, les villes de plus de 100 000 habitants 27 %, de
plus de 20 000 16 %, le reste des pilotes étant réparti
en communes rurales ou en habitat dispersé.
Près de 40 % des hbéristes parcourent plus de
100 km pour se rendre à leur site habituel. Plus des
deux tiers ont le baccalauréat, 40 % ont un salaire
mensuel compris entre 4000 et 6000 F (1978),
36 % sont célibataires et 8 % sont des femmes, cette
proportion devant être réduite si l’on ne veut prendre
en compte que le nombre de brevetés.
Ce travail de romain dont nous ne présentons ici
que quelques aspects statistiques est une contribution
fondamentale à l’étude d’un si jeune sport, dont la
pratique, comme on le verra dans les paragraphes
suivants, est extrêmement diversifiée sur notre terri-
toire.

81
I. — Le pilotage de base

Nous décrirons d’abord les trois phases de base : le


décollage, l'atterrissage et le vol proprement dit.
Contrairement à une idée couramment répandue, la
plus délicate à assimiler n’est pas l’atterrissage mais
bien le décollage qui demande une succession de
gestes précis et rigoureux, avec malgré tout beaucoup
de « senti ».

1. Le décollage. — D'un côté une aile et un pilote,


de l’autre une pente, le jeu étant d’attemdre une
vitesse suffisante en courant pour que l’aile vole et
porte le pilote.
La vitesse de décrochage de la majorité des ma-
chines se situe autour de 30 km/h; la dépasser avec
30 kg sur les épaules, un casque, un harnais et
souvent des vêtements chauds gênant le mouvement
peut paraître réservé aux athlètes de profession; 1l
n’en est rien pour trois raisOns :
— La vitesse précisée est une vitesse-air ;cela veut
dire que si un vent de 10 km/h remonte la pente, il
suffira d’atteimdre 30 — 10 = 20 km/h. Par contre si
le vent est arrière, il faudra atteindre 30 + 10 =
40 km/h, ce qui est virtuellement impossible.
Un vent de face diminue d'autant la vitesse à
atteindre pour décoller.
— Une pente facilite la course ; en outre le pilote
peut se permettre de courir sans retenue : il n’est pas
mobilisé par la peur de tomber en avant, car l’aile l’en
empêche. Il peut donc s’aider de son propre déséquili-
bre pour accélérer. Un tel parti pris peut paraître peu
naturel mais l’association vitesse = sécurité se fait
vite dans les esprits.
— Le pilote dispose d’un « joker » sous la forme
de ce que les aérodynamiciens dénomment « l’effet de
82
ÿ Vent nul

Vitesse de course —
Vitesse de décollage

Vitesse de course =
Vitesse de décollage
— Vitesse vent

Vent arrière

2 “4 Vitesse de course =
Vitesse de décollage
+ Vitesse vent = crash!

Fig. 19. — Le décollage

sol ». Inutile de rentrer dans le détail d’un phéno-


mène sur lequel d’ailleurs bien peu s’entendent;
mentionnons simplement que la proximité du sol
améliore l'écoulement de l’air autour de la voilure,
réduit les toubillons margmaux et par conséquent la
traînée induite; la vitesse nécessaire au vol est ainsi
plus faible.
Dans la pratique le pilote choisit une pente supé-
rieure à celle de la trajectoire de l’appareil; plus elle
est importante plus la manœuvre sera facile. Il installe
des petits fanions à différents endroits et s’assure au
moyen de ceux-ci que le vent est bien de face.
Il commence la course au pas puis au trot. Si
l'assiette de l’aile est bien contrôlée, elle se met à voler
et supporter son propre poids dès la phase du trot. Il
ne reste plus au pilote qu’à accélérer progressivement
jusqu'à ce que l’appareil ait acquis une vitesse
suffisante pour le porter lui.
Un décollage moyen demande une dizaine de pas.
83
Trop cabrer ou trop piquer avant, pendant, après la
course sont les pièges qu'il convient d’éviter.

2. L’atterrissage. — Un bel atterrissage de Vol


Libre s’effectue sur les deux pieds, à vitesse nulle, ce
qui constitue du reste un point d'interrogation pour
les aérodynamiciens.
Pour bien le réaliser le pilote repère d’abord un
indice trahissant la direction du vent : manche à air,
fumée, feuillages, herbes, ou à défaut évalue sa propre
dérive par rapport au sol. Il se présente ensuite vent
de face — même calcul arithmétique que pour le
décollage — en légère survitesse pour éviter un
décrochage intempestif dû aux variations de vitesse
du vent, en vol parfaitement symétrique. À un mètre
du sol environ, 1l repousse — « il arrondit » — pour
réduire sa vitesse, et rase le sol pendant quelques
mètres ; enfin à un moment « senti » il cabre franche-
ment, brutalement pour arrêter l’appareil pratique-
ment sur place. Au pire par vent nul ou légèrement
arrière, Ou si son aile est d’un atterrissage délicat, il
doit faire quelques pas. Par vent nettement arrière,
toutes les hypothèses sont permises…

3. Le vol. — Avant de rechercher la performance


le pilote doit maîtriser parfaitement les quelques
notions qui sauront le sortir de toutes les situations
délicates.
A) Le décrochage. — Le décrochage ne présente
pas en lui-même de caractère de danger sur les ailes
modernes, sauf :
— près du sol, bien évidemment puisqu'il se traduit
par une perte d’altitude;
— après un brusque cabré ou une très puissante
turbulence (décrochage dynamique), l'aile pou-
84
vant reculer puis sancir, c’est-à-dire passer sur le
dos par l’avant. Peu d’ appareils résistent à un tel
traitement, le seul salut est le parachute... ou la
prudence consistant à éviter ce genre d’acroba-
ties; c’est très facile!

_B) La vitesse. — L’appréciation de la vitesse doit


devenir instinctive ; le pilote est si souvent sollicité sur
ce plan, et de manière instantanée, qu'il perdrait du
temps et de l'efficacité à s’en remettre entièrement à
un instrument. À chaque vitesse sa machine a un
_ comportement particulier : sifflement de l’air dans la
voile, dureté de la commande; avec l’habitude il la
détermine « au jugé ». Nous évoquons bien entendu
la vitesse-air, mais la vitesse-sol a également son
importance, par exemple lorsqu'il s’agit d’aller d’un
point à un autre selon certaines conditions (perte
_ d’altitude ou de temps minimale). La notion essen-
tielle est ici celle de repère : savoir observer le
paysage et choisir l’indice permettant de déterminer
sa trajectoire et sa vitesse de manière précise et
rapide. C’est facile en vol à50 mètres du sol, mais de
moins en moins à mesure que l'altitude augmente ;on
peut par exemple s’imaginer en croisière à 30 km/h
3 000 m au-dessus d’un désert.
Il ne faut cependant pas se laisser abuser par la
vitesse-s0l pour choisir sa vitesse de vol, pour preuve
le très classique accident de décrochage vent arrière
près du sol, le pilote croyant voler à une vitesse
suffisante au vu du défilement du sol.

C) Le virage. — Il existe une infinité de types de


virage : « à plat », c’est-à-dire dérapé et peu incliné,
pour perdre le moins possible d’altitude, serré pour
éviter un obstacle ou utiliser une date glissé
pour perdre de l'altitude, etc. Toute une gamme

85
qu’un pilote doit connaître et travailler fréquem-
ment.

D) L'approche. — C’est la phase précédant l’atter-


rissage ; elle doit se terminer par une présentation de
laile en vol symétrique, en légère survitesse, une
dizaine de mètres au-dessus du terrain, sans obstacle
sur sa route.
On utilise différents types d’approche suivant la
présence éventuelle et la répartition d’obstacles. L’es-
sentiel est de s’imposer une règle logique, fonction du
terrain, sans perdre de vue le point où l’on désire
atterrir et en surveillant les manifestations du vent.
Meilleures sont ses approches, plus les décisions du
pilote en vol peuvent être audacieuses en vol.

IL — Le pilote et les éléments


Chacun a sa pratique du Vol Libre : 1l en extrait ce
qu’il veut en extraire, suivant ses goûts, ses possibi-
lités physiques, professionnelles, sociales, économi-
ques et géographiques. Il dispose pour cela de toute
une palette de « spécialisations ».

1. Le vol de pente. — Il consiste à utiliser


l’ascendance engendrée par un vent frappant une
paroi (falaise, montagne, etc.).

A) Aérologie du vol de pente.


a) Ascendance dynamique. — Lorsqu'un vent
frappe un obstacle, l’ascendance dynamique est le
courant ascendant observé devant l'obstacle. L’inten-
sité du courant dépend de la force du vent et la forme
de l’obstacle ;plus le premier est fort, le second large
et élevé, plus l’ascendance est puissante. Un vent de
o m/s frappant une falaise côtière de 30 m de haut et
86
900 m de large engendre des courants pouvant
_ dépasser les 3 m/s.
b) Qualité de l’ascendance. — Outre la densité de
Vair et la force du vent, l’ascendance dépend de la
topographie du terrain; le paysage idéal est une
plaine bien dégagée au pied d’une pente assez raide,
_ cas des falaises de bord de la mer.
Si le terrain au pied de la pente est irrégulier,
on observe des turbulences qui réduisent la vitesse
du vent dans les basses couches et diminuent
l’ascendance.
Certaines vallées trop encaissées interdisent la
naissance d’ascendances dynamiques exploitables sur
leurs versants.
_ c) Turbulences associées. — Un flux d’air ne peut
suivre parfaitement les contours d’un paysage. Par-

87
venu à l’arête de la pente, le courant est soumis à la
pesanteur qui tend à faire redescendre les molécules
d’air, mais aussi aux forces d'inertie et de viscosité qui
s’y opposent ; il en résulte des turbulences en aval de
l'obstacle, parfois d’une violence extrême, au point de
rendre impilotable un aéronef.

B) La pratique du vol de pente.


a) Le décollage s’effectue par vent généralement
supérieur à 20 km/h. La difficulté n’est donc pas dans
la vitesse à atteindre — 1l suffit d’un pas pour décoller
— mais dans les turbulences dynamiques, qui rendent
difficile et parfois dangereux le départ du fait des
déséquilibres qu’elles provoquent.
L’ascendance étant généralement régulière, il est
fortement conseillé de décoller le plus possible en son
sein, c’est-à-dire de la pente même ou du bord de la
falaise; certains pilotes aménagent des tremplins
pour permettre à un assistant de venir les aider à
équilibrer leur machine dans le vent avant le départ.
b) Le vol de pente consiste à évoluer dans une
ascendance dynamique de manière à compenser Île
taux de chute propre de l’aile. L’ascendance étant
répartie sur une bande longeant la pente, le pilote n’a
qu'à décrire de longs huit pour s’y tenir. Il effectue la
plupart du temps ses virages vers l’amont du vent, par
sécurité, et croise les autres aéronefs qu'il rencontre
par la droite, conformément aux règles générales de la
circulation aérienne.
Cette technique ne présente pas de difficultés, sauf
si l’ascendance est très faible ou localisée. Le pilote de
vol de pente doit cependant prendre garde aux
turbulences dynamiques ; savoir les situer, les éviter
ou le cas échéant les traverser.
c) L’atterrissage au sommet. — Le sites de vol de
pente ont bien souvent un sommet dégagé ;plutôt que
88
d’atterrir au pied et remonter en voiture, les pilotes
préfèrent en général se reposer à proximité du
décollage.
Il faut, là encore, pendant l’approche se méfier des
éventuelles turbulences dynamiques, des « rouleaux »
engendrés par l’ascendance, dont l’existence dépend
de la topographie du terrain et de la force du vent.
« Sans rouleaux » on atterrit le plus près possible du
terrain de décollage pour être prêt à repartir. « Avec
rouleaux » on franchit la zone, vent arrière le plus
rapidement possible, pour se poser en aval; cette
technique est réservée aux pilotes confirmés; elle est
parfois déconseillée à tous, en certains endroits, par
certains vents.
d) Les possibilités du vol de pente. — Certains lui
reprochent sa monotonie ; il n’exige aucune habileté
particulière, l’adepte est cantonné dans les parages
immédiats de la pente génératrice.
C’est oublier la sensation d’indépendance qu'il
offre : pratique autonome, atterrissage au décollage,
choix du temps de vol.
C’est négliger le formidable potentiel qu'il repré-
sente pour le perfectionnement ;pouvoir faire, refaire
et parfaire telle figure de pilotage, la travailler jusqu’à
son exécution impeccable.
C’est refuser un nouveau type de promenade; la
découverte aérienne d’un paysage souvent beau, à
base de vagues et de falaises sauvages, de vacarme de
vent et de cris d’oiseaux, sans troubler l’écologie.
C’est aussi oublier que la plupart des longs vols en
montagne comprennent à un moment ou à un autre
un épisode de vol de pente.
Les records actuels de vol de pente sont :

— 24 heures en l’air (!) à Hawan en 1980;


— 160 km en ligne droite en Australie en 1981.
89
2. Le vol thermique. — Il consiste à utiliser les
ascendances qu’engendrent les différences de tempéra-
tures de l’air.

A) Aérologie du vol thermique.


a) Ascendance de convection. — L'effet du rayon-
nement solaire sur le paysage terrestre est inégal;
certaines surfaces l’absorbent plus que d’autres, il en
résulte un inégal échauffement des couches d’air au
voisinage du sol. L’air chaud est moins dense que l'air
froid; au sein d’une masse d’air, une «< bulle »

Fig. 21

90
relativement plus chaude s’élève ; en s’élevant elle se
refroidit, elle continue à s'élever jusqu’à ce que sa
température s’équilibre avec celle de l’atmosphère
environnante. C’est ainsi qu’en été sous nos latitudes,
on observe couramment l’apparition de colonnes de
plusieurs dizaines de mètres de diamètre, sièges de
courants ascendants de quelques mètres par seconde
actifs sur plusieurs centaines de mètres d’altitude.
b) Nuages de convection. — La vapeur d’eau est
un gaz invisible toujours présent dans l’atmosphère,
dans des proportions variables. Moins l’atmosphère
est chaude, moins la quantité de vapeur admissible
est importante. Par suite lorsqu'on refroidit une
masse d'air humide, il est possible que la quantité de
vapeur d’eau qu’elle contient devienne excessive. Il y
a alors condensation d’une partie de celle-ci, c’est-à-
dire passage de l’état gazeux à l’état liquide; l’air se
trouble d’un brouillard de minuscules gouttelettes
d’eau.
À partir d’une certaine altitude correspondant à ce
seuil de condensation, un nuage se forme. Un tel
nuage est en général isolé, a une base plate, la forme
d’un chou-fleur, une couleur blanche lorsque suffisam-
ment éclairé par le soleil, grisâtre autrement; on
l'appelle cumulus. Ce terme est générique; il existe
bien des formes de cumulus, que l’on qualifie d’épi-
thètes comme humulis, mediocris, congestus, nimbus.…
Dans une masse d’air donnée les cumulus se
forment tous à peu près à la même altitude; c’est le
« plafond » dans les conditions du moment.
L’ascendance continue au sem des cumulus, elle
peut même s’amplifier et acquérir une intensité
énorme (jusqu’à 60 m/s dans les gigantesques cumulo-
nimbus de plusieurs milliers de mètres d'épaisseur).
c) Turbulences thermiques. — Il ne peut y avoir
ascendance sans descendance, faute de quoi l’air que

91
nous respirons se raréfierait sans cesse! De fait,
chaque ascendance thermique est associée une mr
de descendance, formant en général une couronne
périphérique. Il y a donc d’ importantes surfaces de
friction entre masses d’air animées de mouvements
différents, d’où tourbillons et turbulences. Lorsque les
ascendances se multiplient au voisinage les unes des
autres, lorsque le vent se lève, on imagine l'ampleur
du « fouillis aérologique ». Le désordre peut s’inten-
sifier au point de devenir dangereux pour les aéronefs
pris en son sein, on ne compte plus dans l’histoire de
l'aviation le nombre des planeurs ou avions légers
brisés à l’intérieur de cumulo-nimbus.
d) Qualité de l’ascendance. — Pour que le proces-
sus d’ascendance se poursuive une fois amorcé, il doit
se produire au sein d’une masse d’air suffisamment
« instable », c’est-à-dire dont la température décroît
assez rapidement avec l'altitude.
Certaines masses d’air trop stables ne sont siège
d'aucune ascendance thermique consistante, même
par journée ensoleillée.
Les plus fortes ascendances thermiques sont obser-
vées sous les climats chauds et secs, dans les pays
montagneux. La présence de montagnes renforce
toujours le potentiel < thermique » par la grande
variété d’orientations des surfaces qu’elles présentent
à l’ensoleillement.

B) La pratique du vol thermique. — a) Détec-


ter. — En l’absence d’ascendance de pente, le pilote
décollant d’un site de 700 m de dénivelé n’a guère
plus de dix minutes devant lui pour détecter un
thermique exploitable. Il doit être rapide et efficace,
faire appel à l'intuition, au raisonnement et à l’obser-
vation.
D’abord regarder le ciel. S'il y a des cumulus, c’est
92
qu'il y a des thermiques, mais il faut bien distinguer
les « morts » des vivants. Les cumulus morts sont
ceux qui ont passé le stade de la formation. Ils
prennent un aspect « mou », leurs contours devien-
nent moins nets, parfois ils se fractionnent ou s’éten-
dent en strates en se soudant les uns aux autres. C’est
à l’expérience qu’on les détecte, rien ne sert de s’en
approcher, sauf si l’on est à une altitude proche de
leur base, auquel cas on peut encore profiter des
reliefs d'ascendance qu’ils produisent pour descendre
le moins possible. Les cumulus vivants sont en pleine
formation. S'ils sont très actifs, leur ombre au sol
s'étend à vue d’œil. Il faut tout de même se garder
d'approcher des nuages trop développés, de type
congestus ou nimbus, générateurs de courants ascen-
dants extrêmement dangereux pour les ailes de Vol
Libre. L'idéal est de repérer un embryon de nuage en
formation et de se diriger vers lui. Quand on arrive
dessous, 1l a déjà grandi s’il avait quelque intérêt, ou
bien s’est estompé. Le travail commence, car il reste à
localiser l’ascendance.
Il faut se la représenter mentalement comme une
colonne descendant du nuage, de plus en plus inclinée
à mesure qu’on s’approche du sol et qu’il y a du vent.
On la recherche généralement en amont du nuage par
rapport au vent, et sous le côté exposé au soleil. Mais
ce ne sont là que règles écrites, la réalité est plus
complexe, les colonnes sont souvent moins inclinées
qu’on ne le pense, d’autant moins que la base du
nuage est loin du sol. Elles sont parfois hachées. Avec
l'habitude, c’est un sixième sens qui renseigne de
l’imminence de la rencontre avec l’ascendance, une
certaine agitation de l’air que l’on ressent subitement,
une impression d’aspiration. Un thermique sé com-
porte comme une petite dépression atmosphérique,
une sorte de tourbillon de lavabo orienté vers le ciel.
93
Quand on s’en approche, on pénètre dans une circula-
tion d’air en rotation accélérée, d’où l’impression de
vitesse lorsqu'on garde une référence sol dans sa
vision périphérique. Il se peut aussi qu’on arrive trop
bas pour rencontrer une ascendance exploitable, soit
que la vitesse verticale soit trop faible, soit que la
colonne ait « rompu ses amarres » avec le sol (en se
développant, le nuage acquiert une énergie thermody-
namique qui lui est propre grâce à l'énergie de
condensation libérée par la vapeur d’eau, le courant
vertical s’entretient de lui-même sans plus aucun
apport de chaleur venant du sol, la colonne dérive
avec le vent jusqu’à ce qu’un équilibre thermodynami-
que s’établisse). Dans ce cas, il ne faut pas insister.
Après quelques passages fructueux là où devait être
l’ascendance, 1l vaut mieux chercher ailleurs. S'il y a
du soleil, on se dirigera vers les pentes ou les surfaces
les mieux exposées. On rôdera au-dessus des sources
potentielles, taches claires dans des surfaces sombres,
reliefs accidentés. À force d’habitude, on pourra
même s’obstiner sur des endroits que l’on « sent », au
propre comme au figuré : c’est parfois une odeur qui
monte, une tiédeur qui s'élève, un type de secousse
qu'il connaît qui fera attendre le bon pilote là où un
hbériste non aguerri passera sans broncher. Sans
soleil ou au couchant, les réflexes s’inversent. Ce sont
les surfaces sombres ou les parois boisées qui libèrent
les calories emmagasinées au cours des dernières
heures. Cela s'appelle la « restitution », il n’est pas
rare qu'après une Journée stable on puisse voler de
longs moments dans ces thermiques du soir.
b) Exploiter. — A un niveau de vol donné, le
thermique se présente généralement comme un disque
d’air ascendant ceint d’une couronne d’air descen-
dant. Selon que le pilote entre dans le disque radiale-
ment ou tangentiellement, son aile se cabre ou
94
s'incline brusquement. Son premier réflexe est donc
de s’opposer à ce mouvement, soit en tirant légère-
ment la barre de contrôle pour s’opposer à un risque
de décrochage, soit en déplaçant son poids vers
l’intérieur du disque pour éviter de se faire éjecter de
Pascendance, soit même, pour certains, en acceptant
ce virage provoqué pour faire trois quarts de tour et
pénétrer radialement. Une fois dans le disque, s’il
continue de voler droit, il n’y restera pas longtemps. Il
sentira l’ascendance croître pendant quelques secon-
des jusqu’à un maximum, appelé « noyau », puis
décroître et devenir négative. Pour se maintenir de
façon efficace, il doit s'installer en virage dans le
noyau et décrire ainsi une spirale jusqu’au « toit » du
thermique.
En vérité, une ascendance thermique est nettement
moins organisée que ces lignes le laissent croire. Elle
renferine généralement plusieurs noyaux séparés par
des zones turbulentes parfois descendantes. On doit
constamment se plier au désordre interne de la masse
d’air, parfois très désagréable, corriger sans cesse le
cap, l’inclinaison et la vitesse, surveiller son taux de
montée. Certains thermiques ont une base turbulente
et étroite et s’évasent en montant. Il faut les négocier
serrés au départ, même si le taux de montée est faible,
l'important étant de ne pas perdre le noyau, puis
élargir par essais successifs. Le meilleur conseil est
peut-être de s’efforcer à tout instant de se dessiner
mentalement l’ascendance, en fonction des indices
multiples que l’air donne, quitte à corriger l’ébauche
au moindre démenti.
d) Les possibilités du vol thermique. — Le vol
thermique est véritablement la quintessence du Vol
Libre; très rares en bord de mer, les ascendances
thermiques existent sur terre dès qu’il y a du soleil.
Elles permettent de réaliser des gains d’altitude de
95
plusieurs centaines, voire milliers de mètres (record
de gain d’altitude 4300 m, en 1981). Le pilote est
seul; il a dans son jeu l’aile, les muscles et l’intuition.
Il se mesure à des forces naturelles phénoménales, qui
le dépassent infiniment, mais parvient pourtant à
exploiter en restant suffisamment sensible, obstiné et
prudent. Il s’agit parfois de spiraler < sur place » de
longues minutes, à quelque 10 mètres d’un bouquet
d'arbres, sans parvenir à monter, seulement à se
maintenir en attendant le déclenchement ; ou bien de
se laisser emporter dans une sorte de tourbillon à plus
de 20 km/h de vitesse verticale, en cherchant seule-
ment à conserver l'assiette et l’inclinaison de l’aile
dans des limites raisonnables. Sensibilité et pru-
dence…

3. Le vol d’onde. — La perturbation que repré-


sente une montagne dans l'écoulement du vent peut
créer un phénomène ondulatoire, une sorte de houle
d’air, observable plusieurs dizaines, voir plusieurs
centaines de kilomètres en aval.
Les conditions nécessaires à l’apparition d’ondes
sont :
— une masse d’air stable;
— un vent fort (plus de 40 km/h);
— une chaîne de collines ou de montagnes suffisam-
ment dégagées et orientées face au vent.

Les ondes sont souvent matérialisées par des nua-


ges « lenticulaires ». Elles séparent l’atmosphère en
trois parties : la zone ascendante, siège d’un courant
assez rapide et régulier, la descendante, et la zone
turbulente, située sous la bande d’onde, siège de
désordres et de tourbillons parfois très violents.

96
B) La pratique du vol d’onde. — Elle consiste à
croiser au sein de la zone ascendante, en effectuant
des aller et retour comme en vol de pente. Cette
pratique est extrêmement répandue en Vol à Voile,
_ grâce à elle de nombreux records ont été battus ([1)),
- mais bien peu en Vol Libre pour deux raisons
essentielles :
— Les vitesses de vent nécessaires sont à la limite
de ce qu’un planeur ultra-léger peut pénétrer.
— Les turbulences sous-ondulatoires sont parfois
d’une violence telle que beaucoup hésitent à les
braver.
Il existe par contre des phénomènes ondulatoires
locaux exploitables en Vol Libre se produisant par de
moindres vitesses de vent; leur existence n’est à vrai
dire attestée que par les libéristes, aucune autre
branche de l’aéronautique n’ayant eu jusqu’à présent
_ à s’en soucier.

4. Ascendances de confluence.
A) Aérologie.
a) L’atmosphère terrestre est composée de masses
d’air juxtaposées; chacune a des caractéristiques
physiques propres, pression, température, humidité,
stabilité.
Ces masses d’air se déplacent, mais s’interpénètrent
peu, leurs surfaces de séparation s’appelle des fronts;
elles évoluent surtout grâce à la nature des terrains
qu’elles recouvrent.
Lorsque deux masses d’air adjacentes sont animées
d’un mouvement mutuel, comme il n’y a pratique-
ment pas de mélange, la moins dense s'élève contre le
front de séparation, exactement comme un vent
contre une pente.
Ce type d'ascendance est une confluence, on le
rencontre à toute échelle, de locale à climatologique.
97
H. AUPETIT 4
b) Les pilotes de Vol Libre utilisent fréquemment
des confluences de brise de mer.
En bord de mer l'été, la chaleur relative du littoral
crée un phénomène de brise. À mesure que la journée
avance l’atmosphère maritime aspirée progresse vers
l’intérieur des terres; ce « front de brise de mer »
peut ainsi parcourir de 100 à 150 km. Il repousse et
soulève sur son passage l’atmosphère terrestre relative-
ment chaude; la ligne de confluence est souvent
matérialisée par une rangée de cumulus.

B) Exploitation de la confluence de brise de mer.


— Pour exploiter les ascendances, on doit se trouver
du bon côté de front, c’est-à-dire côté terre. Ce n’est
donc pas la peine d'attendre sur un site l’arrivée de la
brise de mer pour décoller, 1l sera sans doute trop tard.
Pratiquement on décolle avant, tâchant de se
maintenir en l’air au moyen d’ascendances diverses,
jusqu’au passage du front. Le type d’ascendances que
l’on rencontre alors dépend de beaucoup de facteurs.
Elles s’apparentent en général à de forts thermiques,
souvent entourés de zones de tourbillons et de cisaille-
ments importants.
La topographie du terrain influe sur la géométrie
du front, la masse d’air maritime « préférant »
contourner certains obstacles plutôt que les franchir.
Un pilote de Vol Libre « bien installé » dans une
ascendance de confluence peut ainsi parcourir de
bonnes distances (100 km en 1980 dans le nord de
l’Angleterre).

9. Pot--Pourri. — L’atmosphère est siège d’une


intense activité interne. On peut pour la décrire se
placer à différents niveaux.
Ce que l’homme considère comme une simple
turbulence peut contenir une ascendance propice au

98
vol de la mouche; ce qu'il considère comme une
variation de climat peut être tenu pour un petit
tourbillonà l’échelle cosmique.
Le domaine du vol du planeur de Vol Libre fait
prendre en compte l’activité atmosphérique dès
qu’elle concerne un volume de quelques mètres cubes
d’air; le libériste se préoccupe de ce qu’on pourrait
appeler une « micro-météorologie », négligée dans la
plupart des autres branches de l'aéronautique. Dans
une masse d’air donnée siègent des turbulences, des
ascendances des quatre types sus-mentionnés, des
descendances, des courants de toutes échelles, de
toutes dimensions; le libériste analyse, distingue,
classe, authentifie l’origine et la nature des phéno-
_ mènes en cours. Ses armes sont l'intuition, l’énergie
physique et les performances de la machine. Celles-ci
ont fait de grands progrès en dix ans, des progrès qui
peuvent sembler minces si l’on s’en tient aux chiffres,
mais qui sont considérables par les possibilités qu “ils
ouvrent. Le vol plané]; jusqu’ au terrain d'atterrissage
n’est pratiquement plus qu’un mauvais souvenir ou
une consolation pour l’hiver. Il est bien rare désor-
mais qu’on ne découvre pas un « petit quelque
chose » pour monter lors d’une journée d'été. Le
libériste observe le paysage, traque les manifestations
naturelles de tous ordres, du bruissement des feuil-
lages prévenant de la naissance d’une bulle thermique
à la formation des nuages, 1l analyse la topographie,
la nature des terrains, des cultures, ou même la
texture des masses d'air. Il exploite ainsi, inconsciem-
ment bien souvent au moyen de ce qui est devenu un
instinct, un nouveau sens, les ressources cachées de
l'atmosphère. Son vaisseau est capable d’encaisser
pratiquement toutes les turbulences, il peut donc
s “attaquer en paix à la guerre du ciel. Il se bat pour
pénétrer dans une forte ascendance, spirale pour
99
gagner des centaines, des milliers de mètres qu'il
« brûle » pour atteindre la prochaine source de
pompes. Son vol continue ainsi, de pente en pente, de
pompe en pompe, de nuage en nuage ; il sait profiter
du vent en se laissant dériver, pour pallier les
médiocres performances de sa machine à haute
vitesse qui lui rendent difficiles les traversées. Il met à
profit ses précédentes expériences, ses erreurs, ses
succès, ceux de ses camarades, pour toujours aller
plus loin. Ainsi se fixent des objectifs; pour le
Genevois d'atteindre Montélimar, pour le Niçois de
rejoindre Grenoble, pour le Clermontois de se baigner
dans le golfe du Lion. Des miettes de savoir se
recollent pour donner ce que la presse appellera des
records : 270 km au Nouveau-Mexique en 1981,
230 km en Autriche, 180 km en Grande-Bretagne ou
120 km en France.
Pour expliquer ce que peut être un beau vol en
1983, laissons la parole à l’auteur de ce record
français de 110 km, Mike de Glanville, champion de
France et d'Europe 1980.
« La récupération a peut-être été le plus mcroyable ! Nous avons
décollé à cinq de Saint-André-les-Alpes, près de Castellane, vers
14 h. Le premier n’a pas réussi à «< accrocher » et s’est posé au
pied de la montagne. Le second, M., a choisi un chemin stérile et a
échoué à Tartonne, à quelques kilomètres de là; le troisième, B.,
s’est fait coincer dans le canyon au pied du sommet des Trois-
Evêchés, ma femme a réussi à atteindre Seynes-les-Alpes à 40 km.
Elle était restée sans cesse en contact avec le camion suiveur, elle a
donc été ramassée tout de suite. Après quelques problèmes de
téléphone j'ai été récupéré trois heures après mon atterrissage au
nord de Briançon, vers vingt-trois heures. À trois heures du matin,
nous avons trouvé B. couché sur son harnais, enveloppé dans son
parachute de secours à cause du froid ;nous avons dû marcher une
heure et demie pour ramener son aile;à 6 h 30, un sac de vol sur
la route à Tartonne, nous klaxonnons, M. sort, les cheveux
parsemés de brins de paille, d’un grenier complaisamment offert
par un fermier ; petit déjeuner à Castellane et retour au bercail à
9 heures du matin. Tout cela pour le plus beau vol de ma carrière.

100
« Au départ, j'ai fait le plafond de 3 000 m, puis j’ai remonté les
deux massifs bien connus des pilotes de planeur, Cheval-Blanc et
Trois-Evêchés. Là, le plafond était plus élevé et je suis monté à
3 600 m, dans un bon débit de thermiques. À partir des Trois-
Evêchés, le paysage était incroyable ;éboulis, névés, sommets pelés,
aucune végétation, sauvagerie complète, lacs de haute altitude aux
bleus fantastiques. J'ai rejoint le barrage de Serre-Ponçon sans
pratiquement un virage, en accélérant et ralentissant seulement
suivant l’ascendance sous une rue de nuages. À Saint-Vincent-les-
Forts, 1500 m en dessous, une petite tache blanche : c’est une
aile, effectuant des aller et retour au-dessus d’une pente. Mon
vieux, si tu te retournais et me voyais, tu serais drôlement surpris !
J'ai rejoint le plafond de 3 600 m au-dessus des Orres, terrain des
championnats de France 1979; j'ai revu ces petits parcours dont
nous nous satisfaisions, et apprécié l’ampleur des progrès effec-
tués.
« Puis j'ai réemprunté le chemin que nous avions découvert avec
le champion de France de l’époque, Gérard Thévenot, vers le nord
au-dessus de la vallée de la Durance. Elle se sépare en deux à Mont-
Dauphin et on débouche sur un massif culminant à 3 000 m; il y
avait une ascendance dynamique terrible qui m’a remonté à
3 300 m.
« Vers 19 h 30, il n’était plus question de trouver d’ascendance
thermique suffisante pour refaire le plafond. J’ai donc continué en
dynamique tant que j’ai pu et dépassé Briançon. Après, le vent est
devenu de face pour monter vers Mont-Genèvre; j'avais froid,
j'étais fatigué après 5 h 30 de vol, je n’avais plus la forme mentale
pour poursuivre. En fait, j'avais déjà eu envie de me poser à
Briançon où j'ai un ami, et avais dû lutter contre moi-même pour
ne pas céder; mais dès qu’on a ce genre d'idées, qu’on faiblit un
petit peu, on a perdu. J'ai choisi un pré accueillant et me suis posé
à 20 heures, 10 km au nord de Briançon... »

Certes tous les vols en aile delta n’ont pas cette


envergure; les pilotes ne vivent pas toujours de telles
aventures ;mais les chemins ouverts par les pionniers
et les champions tombent rapidement dans le « do-
maine public » et deviennent les promenades domini-
cales des amateurs tant qu’elles ne sont pas trop
longues. Le problème des récupérations est en effet
très aigu, et il devient de plus en plus difficile de faire
payer à un accompagnateur son intérêt, voire sa

101
bienveillance, à l’égard de ce sport, de 300 km
nocturnes sur des routes de montagne. Ne négligeons
pas non plus l’aspect économique de la question au
prix où est le carburant. De sorte que de plus en plus
les libéristes entreprennent des circuits en aller et
retour et en triangles, souvent plus ardus à réaliser
que des parcours en ligne droite, mais plus avanta-
geux en temps et en argent.

III. — L'enseignement
Extrêmement rustiques au début, les méthodes
d’enseignement ont heureusement progressé. Chaque
pays observe désormais un cursus d’écolage, élaboré
par sa Fédération Nationale, fruit de maintes années
d'expérience.

1. L’initiation. — Deux méthodes se dessinent


actuellement :

A) La méthode de la pente école où l'élève est


placé sur une pente dépassant rarement une cinquan-
taine de mètres et permettant une montée progressive.
On lui fournit une aile avec laquelle il se familiarise en
la maniant au sol, en courant avec, en sentant les
forces aérodynamiques qu’elle est capable d’engen-
drer. Il gravit petit à petit les marches du talus,
apprenant à décoller et atterrir, puis à virer. Quelques .
vols biplaces pédagogiques lui feront découvrir la
sensation du vide et les mouvements réels du pilotage.
Il sera ensuite « lâché » d’un dénivelé de plusieurs
centaines de mètres, grise par une liaison radio avec
son moniteur.
Avantages : caractère progressif, permettant l’ac-
quisition de réflexes en profondeur, possibilité de
cours collectifs réduisant les frais.
102
_ Inconvénients : Contraignant physiquement (obli- -
no de remonter l’aile à pied), risques d'incidents
énins (foulures, claquages) ou d’accidents par excès
de fatigue, apprentissage du vol quasiment solitaire.

Il faut compter deux semaines de stage pour le


premier lâcher.

B) La méthode biplace est basée sur la double


commande. L'élève apprend à voler, avant de décoller
et d’atterrir, sous une aile biplace avec son moniteur.
Lorsqu'il donne satisfaction, quelques heures de pen-
te-école suffisent à compléter sa formation en vue du
premier lâcher.
Avantages : Plus logique, plus rapide.
Inconvénients : Coût en temps et en argent (cours
individuels), nécessité de bonnes conditions météo.
C’est pourquoi quelques écoles s’équipent désormais
de biplaces motorisés supprimant les longues rota-
tions en voiture entre décollages et atterrissages. Cette
dernière solution, en apparence idéale, présente cepen-
dant le danger d'inciter davantage les novices au vol
motorisé en leur montrant une pratique beaucoup
plus facile que celle du Vol Libre, sans les plaisirs
intenses qu'il procure. Il faut compter 5 heures de vol
biplace et une journée de pente-école pour le premier
« lâcher ».

Une fois effectués les premiers grands vols, l’élève


progresse sous l’autorité de son moniteur, jusqu’au
brevet, qu'il obtient après 40 vols environ. Il peut
alors voler de façon autonome, c’est là que commen-
cent les difficultés.

2. Perfectionnement. — C’est sans doute la. phase


la plus critique dans le cursus d’apprentissage du Vol
103
Libre. Si le moniteur n’a pas réussi à inculquer
suffisamment à son élève les principes de base de la
sécurité, ce dernier volera bien vite au-dessus de ses
moyens ; si, par contre, l'élève a appris à se dominer,
s’il est conscient de ses limites, s’il sait observer les
autres, demander conseil, il deviendra rapidement un
bon pilote. Les qualités essentielles pendant cette
période où sont enregistrés la majorité des accidents
graves sont sans doute la curiosité, le sens de l’obser-
vation et le souci de perfection.

IV. — Les accidents

Le Vol Libre est défini par le ministère de la


Jeunesse et des Sports comme un sport « à risque »,
au même titre que les sports automobile ou motocy-
cliste, la boxe, le parachutisme ou la plongée sous-
marine.
Pour les années 1978 et 1979 où une bonne étude
d’accidentologie a été réalisée par le D” François
Coudert, de la Fédération Française de Vol Libre, le
nombre des tués dépasse largement celui de ces autres
disciplines : 0,36 % en 1978, 0,30 % en 1979 (par
rapport au nombre de pratiquants bien entendu).
Il ressort de cette étude nombre d’autres points
intéressants :
— Le taux d'accidents (graves ou bénins) est deux
fois supérieur chez les brevetés (7,11 %) à celui des
élèves (3,49 %).
— 63 % des accidentés ont entre 17 et 30 ans,
87,5 % moins de 40 ans; ce chiffre doit correspondre
à la pyramide des âges des pratiquants.
— Les accidents se produisent en majorité (55 %)
à l’atterrissage ou en approche.

104
— 50 % des traumatisrhes observés sont mineurs à
modérés (jusqu’à, par exemple, fracture du nez ou
d’une côte) ; 9 % sont graves.
— Les lésions les plus fréquentes sont celles des
membres supérieurs, résultant directement de la trans-
mission des forces au moment de l'impact due à la
position du pilote.
Toutes les études réalisées montrent d’autre part
l’importance primordiale du port du casque, et d’un
casque à infrastructure suffisamment amortissante;
les casques classiques dits de montagne sont à
proscrire.
Le port du parachute a également grandement
contribué à réduire le nombre d’accidents graves qui
se soldaient en général par des décès; 1l ne viendrait
d’ailleurs plus à l’idée à un pilote raisonnable de voler
sans son parachute. Mais, comme on le voit dans
l’étude mentionnée ci-dessus concernant une époque
où il n’était pas encore très répandu, 50% des
accidents se produisent à l’atterrissage ou en appro-
che, c’est-à-dire près du sol à une altitude où il est
inutilisable.
L'augmentation de la sécurité ne passe donc pas
seulement par la multiplication des garde-fous, 1l faut
une politique active de sécurisation.
Les pilotes et les constructeurs ont réussi en peu de
temps à résoudre les problèmes techniques, il est
dommage que ces progrès soient occultés par les
nombreuses défaillances humaines. Une insouciante
préparation du matériel avant le vol, un oubli d’accro-
cher la sangle du harnais à l'appareil, un décollage
dans des conditions trop violentes ou au-dessus des
compétences du pilote, une trop grande audace dans
le choix d’un terrain d'atterrissage, une distraction ou
le non-respect des règles de l’air lors d’un vol de
groupe, voilà de trop fréquentes causes d’accidents
105
La

auxquelles on pourrait opposer une rigueur accrue et


des choix plus réfléchis.
Le Vol Libre n’est plus dangereux en lui-même,
mais il suscite parfois chez l’homme des attitudes
dangereuses. Des attitudes qui se dénomment excès
de confiance en soi-même, paresse physique ou intel-
lectuelle, impatience, etc.

V. — La compétition

La compétition représente un important facteur de


progrès technique et humain au sein d’une si jeune
activité. Le sport avait besoin de pilotes solides et de
machines stables, elle a poussé les individus à se
dépasser, et à se mesurer à des conditions aérologi-
ques dans lesquelles il était nécessaire que les ailes
fussent parfaitement saines.

1. Les épreuves. — Elles ont longtemps porté sur


la précision d’atterrissage et la durée de vol; ces
critères sont progressivement abandonnés.
Il y a maintenant deux types d’épreuves :

A) Le « Mickey Mouse » désigne le type d'épreuves


comprenant un parcours imposé à réaliser en temps
minimal, suivi parfois d’un atterrissage dans une
cible ;le parcours est en général une figure géométri-
que ayant pour sommets des balises espacées de
quelques centaines de mètres.
Le « Mickey Mouse » a deux avantages :
— large tolérance en ce qui concerne les conditions
atmosphériques ;
— aspect spectaculaire pour un public placé dans les
parages du terrain d'atterrissage.
106
Ce type d’épreuve a peu d'intérêt technique, il n’est
choisi que pour une des deux raisons évoquées
quand le temps est mauvais ou pour les compétitions
à vocation de spectacle.

B) Le « cross-country » désigne le type d’épreuves


basées sur la réalisation de distances importantes, ou
tout au moins difficiles à réaliser. C’est un peu du
« Mickey Mouse » où les balises ne seraient plus
disposées pour l'intérêt du public, mais des pilotes.
On peut énormément broder sur le thème « dis-
tance ». Il peut s’agir d’aller le plus loin possible,
d'atteindre un but fixé ou effectuer un aller et retour
en temps minimal ; les possibilités varient à l'infini.
Ce choix d’épreuves demande une météo propice, des
conditions aérologiques fertiles en ascendances; il
exige également une programmation judicieuse de la
part des organisateurs. Mais c’est de loin le plus
intéressant, 1l a l’avenir pour lui.

2. Le jugement. — Une épreuve de Vol Libre


dépend par essence des conditions météorologiques
dans lesquelles elle se déroule. Lorsque 50 pilotes
décollent successivement à intervalle de 3 minutes, le
dernier concurrent parti 2 h 30 après le premier a fort
peu de chance de rencontrer la même aérologie. C’est
pourquoi l’on adopte deux types de procédures de
‘ départ :
— Par poules, les pilotes sont répartis en groupes
de 2, 3, 4 et décollent simultanément ou à peu
d'intervalle. Les résultats de chacun sont appréciés
uniquement en fonction de ceux des membres de la
même poule;
— En départ libre, chacun décolle quand il veut.
Cette méthode, de plus en plus utilisée pour les
longues épreuves de distance, rajoute une indéter-
107
minée supplémentaire dans le jeu et rapproche encore
plus du « vrai Vol Libre ».

3. Les compétitions existantes.


A) Circuit officiel. — Ce sont les compétitions
mises en place par les fédérations nationales.
La Commission Internationale de Vol Libre de la
Fédération Aéronautique Internationale organise un
championnat du monde biennal.
Chaque pays sélectionne une équipe au moyen de
championnats nationaux, organisés par sa fédération
nationale de Vol Libre, dont la nature varie selon les
décisions locales.
En France, par exemple, les pilotes sont sélec-
tionnés en championnats régionaux pour la participa-
tion au championnat de France annuel qui les dépar-
tage. Depuis 1980, les épreuves sont fortement orien-
tées vers le vol de distance.
En Grande-Bretagne le championnat national est
une sorte de concours permanent. 40 pilotes sont
choisis en début d’année selon les résultats de l’année
précédente, et se rencontrent chaque mois en épreu-
ves régionales. Depuis 1983, le système français
s'inspire du système anglais.
Les systèmes allemands et américains sont analo-
gues au français. Îl existe également des champion-
nats d'Europe ou « du monde open », plus ou moins
officiels, tenus en alternance avec les championnats
du monde ainsi qu'un tournoi franco-britannique
annuel par équipe, la coupe Blériot, organisé alternati-
vement par les fédérations françaises et britanniques.

B) Le circuit officieux. — Parmi le grand nombre


des compétitions organisées par des personnages ou
organismes privés, quelques-unes sont d’un grand
intérêt.

108
— Le « cross-country classic » d’Owens Valley. —
C’est un peu la Transat ou le Paris-Dakar du Vol
Libre. Sur un site où les conditions thermiques
violentes permettent l’été des gains d’altitude jusqu’à
6 000 m, des distances de plus de 200 km, un pilote
local, Don Partridge, a mis sur pied en 1978 la plus
importante compétition annuelle du Vol Libre. Les
pilotes les plus endurcis de tous les pays se retrouvent
début juillet sur la chaîne de montagnes des Whites, à
la frontière Californie-Névada et s’affrontent sur des
parcours imposés de 50 à 150 km en temps minimum
pendant une semaine.
— L’« American Cup ». — Beaucoup plus orientée
vers le « Mickey Mouse », cette compétition annuelle
par équipes organisée dans un but essentiellement
commercial est parfois le théâtre de beaux affronte-
ments. Elle a démarré en 1978 dans le Tennessee, y
est restée trois ans, puis s’est déroulée en 1982 dans le
nord de l’Angleterre avant de repartir pour la Califor-
mie en 1983.
— En France. — Il y a plusieurs compétitions
annuelles dans notre pays, comme la coupe de finesse
de Normandie où 80 pilotes se retrouvent à 150 km
de Paris près du Tréport chaque hiver, un dimanche
de février, sur une butte d’une soixantaine de mètres,
et « jouent » à celui qui ira le plus loin, montrant
ainsi la meilleure finesse-sol dans les conditions du
Jour.
Il y a aussi les /nternationaux du La Chens,
épreuve de distance organisée sur un des meilleurs et
plus techniques sites français entre Grasse et Castel-
lane, le cross-country par équipes de Séderon dans la
Drôme, la Coupe Icare de Saint-Hilaire-du-Touvet,
Grenoble, basée sur le « Mickey Mouse ».

109
VI. — D’autres possibilités
1. Le vol biplace. — Pour porter deux pilotes au
lieu d’un, les exigences de solidité et de performances
sont plus fortes. C’est pourquoi les constructeurs
conçoivent à cette fin des ailes de plus grande surface
et renforcées. La plupart des ailes monoplaces actuel-
les conviennent cependant. Cette pratique se répand
car elle est extrêmement plaisante. Beaucoup de
pilotes rêvent de faire partager leur bonheur de voler
à leurs amis, c’est sans doute le meilleur moyen, s’il
est utilisé avec prudence et responsabilité. On a de
plus en plus recours au biplace pour l'apprentissage.

2. Le vol tracté. — Le Vol Libre a commencé


tracté; on se souvient des décollages sur l’eau des
premiers pilotes australiens, tirés par un câble der-
rière un bateau. Sans moyen de relâcher la tension
instantanément, cette pratique s’est avérée dange-
reuse. C’est pourquoi est apparu en 1978 le premier
dévidoir : un tambour d’une cinquantaine de centimè-
tres de diamètre, autour duquel est embobinée une
grande longueur de câble (fibre synthétique légère
comme le kevlar). Un système de fremage à disque,
ruban ou hélice, permet de moduler le déroulement,
qui ne s'effectue que lorsque la traction dépasse un
certain seuil (réglable).
Le dévidoir (appelé aussi treuil, à tort) est placé à
l'arrière d’une voiture ou d’un bateau, le câble est
relié à l’aile; dès que le système se met en mouve-
ment, l’aile s’élève selon une pente assez forte (taux
de montée 3-4 m/s) en dévidant le câble. Le record de
gain d'altitude ainsi obtenu est de 1 600 m par les
Suisses Thierry Guignard et Philippe Briod. Un
treuilliste surveille l’opération, prêt à débrayer le frein
en cas d’embardée ; c’est indispensable.

110
Autre progrès, réalisé grâce aux idées de l’Austra-
lien Bill Moyes (toujours lui) et d’une équipe greno-
bloise dirigée par Nicolas Brenneur, l’adoption du
« tracté par le harnais ». Au lieu de fixer la ligne
d'attache àà l’aile, on la fixe au harnais du pilote. Au
heu de s’opposer avec son seul poidsà des forces qui
le dépassaient parfois, il peut maintenant s’aider de la
force de traction pour diriger sa machine, tout se
passe comme si il était simplement plus lourd. Ce
système, en apparence très simple, révolutionne vérita-
blement l’activité, jusqu’alors considérée à juste titre
comme dangereuse. Il ouvre les cieux aux habitants
des pays plats qui peuvent enfin pratiquer le Vol
Libre sans courir plus de risques que leurs collègues
des montagnes.
Mais le tracté est aussi une activité contraignante :
nécessité d’un matériel parfaitement au point et bien
réglé ;d’une équipe bien entraînée (chauffeur, treuil-
liste, pilote), d’une route bien dégagée. Si l’organisa-
tion pêche par un de ces trois points, l’activité devient
dangereuse, c’est pourquoi elle se diffuse assez lente-
ment, quoique séduisante au prime abord.

3. Le vol motorisé. — Pour s’affranchir des


problèmes de terrain et de vent, exactement comme
aux débuts de l’Aviation, les chercheurs du Vol Libre
ont dès l’origine pensé à la voie du motorisé.
Les premiers résultats ne furent guère satisfai-
sants ; il y avait déjà bien assez de questions non
résolues sur les planeurs ultra-légers pour ne pas s’en
poser d’autres avec les motorisations. Le sujet est
donc resté entre parenthèses pendant de longues
années. Seuls ceux qui travaillaient avec des ailes
rigides avaient quelques résultats, mais ils ne for-
maient pas légions. C’étaient surtout des Américains,
chez qui ces machines avaient toujours eu du succès,
111
et qui, partant d’engins tels que le « Quicksilver » ou
l_« Easy Riser », obtenaient des avions légers en
utilisant des moteurs deux temps de tronçonneuses
d’une dizaine de chevaux.
Ces premiers « ULM >» (Ultra-Légers Motorisés)
avaient les inconvénients d’emploi des ailes rigides,
transport et mise en œuvre, mais volaient néanmoins.
Voir ces individus décoller en quelques dizames de
mètres depuis un petit champ ou un bout de chemm
et s'élever doucement au-dessus de la plaine avait de
quoi exciter, à la fois le public séduit par ce nouveau
« loisir de déplacement » à l’époque de la planche à
voile ou du cyclotourisme, et les pilotes de tous bords
attirés par le côté économique de cette nouvelle
aéronautique.
L'architecte français Jean-Marc Geiser, confiant en
les vertus de l’aile « souple », avait fait voler dès
1976 son prototype « Motodelta », constitué d’une
voilure de type « Dragon » enfilée sur une structure
sans haubans audacieuse, et d’un cockpit portant le
groupe moto-propulseur, à train tricycle; la haison
est mobile, de sorte que le pilotage s’effectue par
déplacement du poids pilote-cockpit. Notons que
l’idée remontait aux années soixante. Non commer-
cialisée par Geiser, elle fut reprise et simplifiée,
dépouillée même en 1979 par Gérald Lancien et
Roland Magallon pour la manufacture de Vol Libre
Véliplane. On prend une aile souple, on lui adjoint un
chariot tricycle à armature en tubes de dural et
portant un moteur à hélice, le tout se monte en un
quart d'heure, se transporte sans peine sur un toit de
voiture, et décolle d’un quelconque terrain plat dégagé
sur une centaine de mètres. Pour un prix raisonnable,
le double de celui d’une aile seule, on acquiert ainsi
un avion léger et économique, pas très efficace
puisqu'il ne croise qu’à une cinquantaine de kilomè-
112
tres/heure et dispose d’une faible autonomie, mais
facile d'emploi.
C’est le « boum » ! L'invention est aussitôt reprise
et améliorée par d’autres constructeurs, c’est la
naissance d’une nouvelle activité à croissance rapide.
Une Fédération Française de Planeur Ultra-Léger
Motorisé est créée en janvier 1980, qui s’occupe

Fig. 22

aussitôt de régulariser la pratique auprès des Pouvoirs


publics ; il faut d’ailleurs saluer le bienveillance de
l'Administration Française à l’égard de cette nouvelle
aviation, qui, contrairement à beaucoup de ses homo-
logues dans le monde, adopte une position très souple
(voir annexe Î).
L’ULM a fait de gros progrès en peu d’années ; sa
technologie est séparée en deux domaines : le rigide
et le souple.
L’ULM rigide, surtout fabriqué aux Etats-Unis,
s’est principalement tourné vers la clientèle de l’avia-
tion classique recherchant l’économie ; les machines
ont un pilotage traditionnel « trois axes », c’est-à-

113
dire des commandes aérodynamiques officiant pour
toutes les manœuvres. Un effort est fait vers la
performance, chiffrable aussi bien en taux de montée
qu’en vitesse de croisière et en autonomie. Regrettons
cependant que les concepteurs aient parfois tendance
à s'éloigner de la moderne philosophie d'économie
d’énergie en remplaçant la réflexion sur l'amélioration
des rendements aérodynamiques par une surenchère
sur la cylindrée et la puissance des moteurs.
L’ULM souple est resté tricycle pendulaire avec de
grosses améliorations en pliabilité, confort, silence,
performances ; le tribut payé est bien souvent l’aug-
mentation du poids et la nécessité d'utiliser de plus
puissants moteurs. L’usage du tricycle motorisé en
« moto-planeur », c’est-à-dire en coupant le moteur
dès qu’on rencontre une ascendance pour l’exploiter
comme en Vol Libre ou en Vol à Voile, reste difficile
et le restera tant qu'on n'aura pas réussi à améhorer
le rendement aérodynamique de la machine et réduit
significativement son poids. De nombreuses vers'ons
biplaces ont été réalisées à partir d’ailes biplaces de
Vol Libre, de sorte que l'apprentissage en double
commande est possible et pratiqué dans les écoles
d’'ULM. L’ULM souple s'adresse bien entendu au pilote
de Vol Libre qui en connaît déjà le maniement, mais
aussi, ses constructeurs l’espèrent, au grand public
car son pilotage est simple et finalement assez naturel.
Il connaît une grand vogue en France et en Grande-
Bretagne et se développe rapidement dans les pays
européens. Sa commodité d'usage fait qu’il s'adapte
bien à la topographie de nos contrées, contrairement
aux rigides américains qu’on entrepose dans les
grands garages de maisons modernes.

4. Le vol remorqué. — Le Vol Libre va-t-il suivre


les traces du Vol à Voile ? Nul ne peut le dire, mais

114
après la mise au point du treuillage, il était naturel
que nos chercheurs s’employassent à tirer parti de la
naissance de l’ultra-léger motorisé pour tenter de
remorquer les ailes comme les planeurs le font avec
les avions. Plusieurs expériences ont eu lieu à ce jour,
avec succès, et les possibilités semblent bien supé-
rieures à celles du tracté. Plus besoin de piste de deux
kilomètres, d'équipe de deux personnes réalisant un
travail fastidieux, possibilité de chasser l’ascendance
en remorqué, les avantages sont multiples et, contrai-
rement au cas du Vol à Voile, pas en contradiction
avec le souci d'économie. Les quelques problèmes de
vitesse et de pilotage seront certainement résolus dans
un avenir proche.

115

BIBLIOTHEQUE
Université du Québec à Rimouski
ANNEXES
I. — La réglementation française du Vol Libre

La situation légale

Le Vol Libre est une activité sportive et son exercice concerne, à


ce titre, le ministère des Sports. Le Vol Libre est une activité
aérienne et son exercice concerne, à ce titre, le ministère des
Transports, direction générale de l’Aviation civile.
La Fédération Française de Vol Libre est agréée par le ministère
des Sports qui lui délègue ses pouvoirs en ce qui concerne
l’organisation de l’activité et l’habilite seule à délivrer des titres de
compétence (brevets, monitorats, etc.).
La FFVL est également l’interlocuteur privilégié de la DGAC pour
tout ce qui concerne le Vol Libre en tant qu’activité aéronautique.
La FFVL est membre de l’Aéro-Club de France, lui-même
membre de la Fédération Aéronautique Internationale autorisée à
homologuer les records et les compétitions de Vol Libre au niveau
international.

La réglementation du matériel et de la circulation

Les appareils de Vol Libre dits également planeurs ultra-légers


ou PUL sont définis comme des aéronefs :

— capables de décoller et atterrir sur les jambes du pilote;


— ne faisant appel à aucune autre source d’énergie interne à
l’aéronef que l’énergie musculaire de son ou ses occupants.

Cette définition est en accord avec celle de la Fédération


Aéronautique Internationale.
L’aéronautique ultra-légère étant actuellement en pleine évolu-
tion, la réglementation qui la concerne l’est également.
Ainsi, la direction générale de l’Aviation civile considère actuelle-
ment les PUL comme des aéronefs :

1) admis à circuler sans être immatriculés et sans recevoir de


certificat de navigabilité;

117
2) pour le pilotage desquels aucun titre particulier n’est légalement
exigible;
3) soumis aux règles générales de l’air et du vol à vue moyennant
certaines adaptations;
4) ne pouvant atterrir ou décoller (sauf autorisation) sur les
aérodromes régulièrement établis ;
5) ne pouvant circuler, sauf autorisation :

— dans les zones interdites,


— dans les zones réglementées,
— dans l’espace aérien contrôlé,
— de nuit.

Une nouvelle réglementation est d’autre part en cours d’élabora-


tion en ce qui concerne les planeurs ultra-légers motorisés (ULM).
Un ULM est un aéronef motorisé de masse à vide imférieure à
100 kg et capable d’atterrir à une vitesse inférieure à 50 km/h. Il
doit faire l’objet d’une déclaration à la DGAC qui lui délivre une
immatriculation. Il est soumis aux règles générales de l’air et du vol
à vue, le seul titre de pilotage exigé est un brevet théorique de vol à
voile ou d'aviation de tourisme.

Le point de vue du ministère de l'Intérieur

Une assurance < responsabilité civile » est exigée, pour des


raisons évidentes, de l’utilisateur de planeur ultra-léger.
Un site de Vol Libre doit être situé :

— au-delà d’un rayon de 8 km d’un aérodrome de catégorie A ou


B;
— au-delà d’un rayon de 6 km d’un aérodrome de catégorie C;
— au-delà d’un rayon de 2,5 km d’un aérodrome de catégorie D
ou E.
Il doit, par ailleurs, faire l’objet d’une autorisation :

— du ou des propriétaires des terrains concernés (respect de la


propriété privée) ;
— du ou des maires des communes concernées par les terrains
utilisés (respect de l’ordre public).

118
+ — Le palmarès mondial du Vol Libre jusqu’en 1983
1° Championnats du monde
1976 : Kôssen (Autriche).
Classe I (Rogallos standards) :
1% Christian Steimbach (Autriche) ;
2° J. Stembach (Autriche) ;
3° R. Duncan (Australie).
Classe IL (« Grands allongements ») :
1® Tery Delore (Nouvelle-Zélande) sous « Cohen Floa-
ter »;
2° Dean Kuchpanko (Canada), « Eagle Cloud » ;
3° Steve Moyes (Australie), « Moyes Stinger ».
Classe IL (Open) :
1% K. Battle (Australie), « Moyes Dragon » ;
2°S$. Price (Etats-Unis), « Quicksilver » ;
3° GC. Hoffsteter (Suisse), « Ikarus 500 ».
1978 : Afrique du Sud : championnats annulés.
1979): Grenoble (France).
Classe I (ailes sans commandes aérodynamiques) :
1% Josef Guggenmos (RFA), « Wings »;
2° Johnny Carr (Grande-Bretagne), « Cyclone »;
3° Gérard Thevenot (France), « Atlas ».
Classe II (Open) :
1% Rex Miller (Etats-Unis), « Fledge II » ;
2° Wolfgang Hartl (Autriche), « Fledge II » ;
3° Hans Olchewski (RFA), « Fledge IT ».
1981 : Beppu (Japon).
Ciasse T (ailes sans commandes aérodynamiques) :
1% Pedro Lopez (Brésil), « Azur La Mouette » ;
2° Rich Pfeiffer (Etats-Unis), « Duck Wills Wings »;
3° Graham Slater (Grande-Bretagne), « Comet ».
1983: Tegelberg (RFA).
Classe 1:
1% Steve Moyes (Australie), « Missile GT » ;
2° Stew Smith (Etats-Unis), « Sensor SIO » ;
3° Graham Hobson (Grande-Bretagne), « Magic III ».

2° Records
1970: Pas de record officiel.
Meilleure distance : 77 km, par Trip Mellinger et Gene
Blythe réalisée depuis le site californien de Cerro Gordo.
1977: Records homologués par la Fédération Aéronautique Inter-
nationale :

119
Distance libre, 157 km, réalisés par l’Américam George
Worthington, sous < Mitchell Wing », sur le site de Cerro
Gordo.
Distance à but fixé, 157 km, George Worthington, « ASG
21 », Cerro Gordo.
Aller et retour, 76 km, G. W., « ASG 21 >», Cerro Gordo.
Gain d’altitude, 2 850 m, Jerry Katz, sous « Alpine Pacific
Gull », sur le site de Gunter (Californie).
Record de distance officieux : 165 km, par Jerry Katz,
sous « AGP » à Cerro Gordo.
1978 : Records officiels FAI
Gain d'altitude, 3566 m, G. W.. sous < Seagull Ten
Meter >, à Cerro Gordo.
1979 : Records officiels FAI : institution de deux classes de
records, la classe flexible comprenant les ailes pilotées sans
commandes aérodynamiques, et la classe rigide pour les
autres.
Aller et retour ailes flexibles, 79 km, G. W., sous < Ten
Meter ».
But fixé ailes rigides, 53 km, G. W., «< Mitchell Wing », à
Gunter.
Gain d'altitude ailes ngides, 2 235 m, G. W.. « M. W. », à
Cerro Gordo.
Record de distance officieux pour l’année : 128 km, Joe
Greblo, « Ten Meter ». Cerro Gordo.
1980 : Records officiels FAI :
Distance libre classe rigide, 168 km, George Worthington,
< Mitchell Wing », Cerro Gordo.
Distance libre classe flexible, 178 km, George Worthington,
« Moyes Mega II », Cerro Gordo.
Gain d'altitude classe rigide, 2550 m, G. W., « M. W. »,
Cerro Gordo.
Record du monde de distance officieux : 194 km, Eric
Raymond (Californie), sous < Voyager » (rigide), à
Cerro Gordo.
1981 : Meilleures distances :
269 km, Jim Lee (Etats-Unis), sous « Comet », à Albuker-
que (Nouveau-Mexique) ;
266 km, Larry Tudor (Etats-Unis), « Comet », Gunter.
Meilleure distance européenne : 192 km, Helmut Denz
(RFA), < Comet », Allemagne.
1983 : Meilleure distance européenne : 230 km, Helmut Denz (RFA),
« Magic », Autriche.

120
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

AÉRODYNAMIQUE

[1] Za technique de vol, par A. HÉMOND, Editions du Cosmos.

[21 Etude de sécurité sur les planeurs ultra-légers Rogallos, par S. WALDEN
et CI. LA BURTHE. Rapport technique 8/5134 SY ONERA, 29, av. de la
Division-Leclerc, 92320 Châtillon-sous-Bagneux.

AÉROLOGIE-MÉTÉOROLOGIE

Le temps en dix leçons, Livre de Poche, 1981.

Météorologie générale, par J.-P. TRIPLET et G. ROCHE, Editions de


l’Ecole Nationale de la Météorologie.

Micrométéorologie pour pilotes de Vol Libre, par D. PAGEN, Editions


Ph. Guédé.

VOL LIBRE

Apprendre à voler, par Ph. MERMOUX, Presses Universitaires de Greno-


ble, 1980.
Catalogue des sites français de Vol Libre, Editions Graffet-Huguenin,
1980.
Cent questions sur le Vol Libre, par J.-M. BOURGUEIL, Editions Rétine,
1981.

L'essentiel sur le Vol Libre, par G. GOURION et P. BAËRT, Editions


Rétine, 1977.

Pratique du Vol Libre, par Ph. GALY et CI. LA BURTHE, Editions


Arthaud, 1978.

Vol Libre, par R. BOURGES, Editions Amphora, 1982.

121
VOL À VOILE

(3] Le Vol à Voile, par M. VERMOT-CAUCHY, PUF, coll. < Que sais-je? »,
n° 547.

REVUES

Finesse 10, 24, rue Moreau, 75011 Paris, mensuel.

Vol Libre Magazine, 6, rue Ampère, 94200 Ivry, tél. 672.74.60, mensuel.

ADRESSOGRAPHIE

Fédération Française de Vol Libre : 54 bis, rue de la Buffa, 06000 Nice.


Tél. : (93) 886289.
Fédération Française de Planeur Ultra-Léger Motorisé : Chemin de la
Sacnistie, 84140, Montfavet.
Constructeurs français :
Danis, 71, rue Roger-François, 94700 Maisons-Alfort.
Eole 2000, 55, rue de Charenton, 75011 Paris.
La Mouette, 1, rue de la Petite-Fin, 21121 Fontaines-lès-Dijon.
MB, 12, rue du Chant-des-Oiseaux, 76340 Blangy-sur-Bresle.
Noin Aéronautique, Châteauvieux, 05130 Tallard.
Pacific Wings, BP 24, 68550 Saint-Amarin.
Véliplane, 14-16, rue du Ratrait, 92150 Suresnes.
Voileries du Vent, 52, rue Himmerich, 67000 Strasbourg.

122
TABLE DES MATIÈRES

ENERODUCTION TA RE NC M AR M ads dns

CHAPITRE PREMIER. — L'histoire du Voi Libre .........


I. La préhistoire, 9. — II. L’éclosion, 10. — III. Le dévelop-
pement, 12. — IV. Du Deltaplane au Vol Libre, 13. — V. Au-
jourd’hui, 16.

CHAPITRE IÏ. — Le matériel ...................... 21


I. L’aile, 21. — II. Le harnais, 29. — III. L'équipement
de sécurité, 32. — IV. Les instruments du Vol Libre, 37. —
V. L'entretien et le transport, 39. — VI. L'équipement au
sol, 41.

CHAPITRE III. — Les idées ........................ 43


I. Précis d’aérodynamique et de mécanique du Vol Libre, 43.
— II. Application au pilotage d’une aile souple, 52. — III. Pi-
lotage d’une aile rigide, 64. — IV. Application à la description
de l’évolution des ailes, 66.

CHAPITRE IV. — Les hommes ..................... 81


I. Le pilotage de base, 82. — II. Le pilote et les élé-
ments, 86. — III. L'enseignement, 102. — IV. Les acci-
dents, 104. — V. La compétition, 106. — VI. D’autres pos-
sibilités, 110.

ANNEERS etat al reie Mie ete das eue me lereee ss lee es Die etes e Lee

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE .......cosoossseesssssese

123
Imprimé en France
Imprimerie des Presses Universitaires de Rap
73, avenue Ronsard, 41100 Vendôme
Octobre 1983 — N° 28 364
TU)
X01000
6002203000

DATE DE RETOUR
COLLECTION ENCYCLOPÉDIQUE
fondée par Paul Angoulvent

Derniers titres parus


2098 Les jeux de rôles 2120 La psy: hologie scolaire n
(A. MuccxtELLi) (H C: ‘LAR) :
2099 La Géorgie Freud (R. JACcCARD) M:
(S. et N. GouGoucHvILI, La tradition orale 1
D. et O. ZoURABICHVILI) (L.-J. CALVET)
2100 Le Zimbabwe Les économies socialistes Du,
(D. JoUANNEAU) (Fr. SEUROT) BL
2101 L’Internationale socialiste Histoire de la Roumanie
(A. DoNNEUR) (G. CASTELLAN)
2102 La Cour de Justice des La chanson française
Communautés européennes de la Renaissance
(Ch. Pxizre) (G. DorTrix)
2103 Les systèmes juridiques africains 2126 La crise de 1929 (B. GAZIER)
(J. VANDERLINDEN)
2127 Les biotechnologies
2104 Les arômes alimentaires (P. Douzou, G. DURAND,
(J.-N. JAUBERT) P. Kourizsxy et G. SICLET)
2105 Le Kenya (D. et M.-C. MARTIN) 2128 La participation
2106 La génétique du développement dans l’entreprise
(J.-CI. BEETSCHEN) (J.-P. CLÉMENT)
2107 Le légitimisme (St. RrALs) 2129 Apprentissage et formation
(J. BERBAUM)
2108 La France de la Libération 2130 Le droit de l’urbanisme
(1944-1946) (J. DALLOZ) (J. CHAPUISAT)
2109 Les élections 2131 L'économie sociale
sous la V° République (A. NEUKRISSE)
(A. LANCELOT)
2110 Psychologie du sport
2152 Le droit des biens
(J.-L. BERGEL)
(R. THomas)
2133 La rhétorique (0. REBOUL)
2111 La francophonie (X. DENrAU)
2134 La country-musie
2112 Le décryptement (A. MULLER) (G. HERZHAFT)
2113 L'’organologie

[LL
(C. MrcHAUD-PRADEILLES) 2135 La divination dans |’
(R. BLocx)
2114 La mutualité |
(J. BENHAMOU et A. LEVECQUE) 2136 La ceriminologie (G.
2115 La conjoncture économique 2137 Histoire de l’adminis
(J.-P. BETBEZE) française (G. THUILLIE

TITN
2116 Le commerce des armes 2138 La Hongrie (H. SMOTKI
de guerre (J.-C. MARTINEZ)
2139 La physique nucléaire
2117 L'hôtellerie (D. PERRIN) (D. BLanc)
2118 L'’extrème droite en France 2140 La politique extérieure
(J.-C. PETITFILS)
de la Chine populaire
2119 L'oratorio (N. LABELLE) (F. Joyaux)

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