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La Cour du Prince

Cour de France, cours d’Europe,


XIIe-XVe siècle

Sous la direction de
Murielle Gaude-Ferragu, Bruno Laurioux et Jacques Paviot

HONORÉ CHAMPION
PARIS

© 2011. Éditions Champion, Paris.


Reproduction et traduction, même partielles, interdites.
Tous droits réservés pour tous les pays.
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ÉTUDES D’HISTOIRE MÉDIÉVALE
dirigées par Philippe Contamine et Jacques Verger
13

LA COUR DU PRINCE

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COMITÉ SCIENTIFIQUE

Colette BEAUNE, Professeur émérite, Université de Paris Ouest Nanterre La


Défense
Élisabeth BROWN, Professeur émérite, Université de la Ville de New-York
Philippe CONTAMINE, Membre de l’Institut
Claude GAUVARD, Professeur émérite, Université de Paris I – Panthéon-Sorbonne
Chantal GRELL, Professeur à l’Université de Versailles – Saint-Quentin-en-
Yvelines
Agostino PARAVICINI BAGLIANI, Professeur honoraire, Université de Lausanne,
président de la SISMEL
Béatrix SAULE, Conservateur en chef du patrimoine, directrice du Centre de
Recherches du Château de Versailles
Bertrand SCHNERB, Professeur à l’Université de Lille III – Charles de Gaulle
Malcom VALE, Professeur à l’Université d’Oxford

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LA COUR DU PRINCE
Cour de France, cours d’Europe,
XIIe-XVe siècle

Sous la direction de
Murielle GAUDE-FERRAGU, Bruno LAURIOUX et Jacques PAVIOT

PARIS
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Publié avec le soutien du Centre de recherche en histoire européenne comparée
(CRHEC), EA 4392 – Université Paris-Est Créteil, du Centre de recherche sur les
espaces, les sociétés et les cultures (CRESC), EA 2356 – Université Paris 13, de
l’Institut universitaire de France, et du Laboratoire États, société, religion (ESR),
EA 2449 – Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines.

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ISBN: 978-2-7453-2244-9 ISSN: 1278-3854

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LES « RECETTES MAGIQUES »
POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS
(XIIe-XVe SIÈCLE)

L’usage de la magie à la cour est un sujet difficile à aborder de front,


car les récits mettant en scène des magiciens agissant auprès des puis-
sants, rois, princes ou prélats, sont relativement rares, en particulier avant
le XIVe siècle, et par conséquent assez bien connus1. Si l’intérêt des élites
cléricales et laïques pour ce savoir en grande partie condamné n’est plus
à démontrer au vu des avancées récentes de la recherche2 et sans préjuger
de l’usage réel qui a pu en être fait dans ces milieux, quelques récits ou
documents judiciaires montrent que « l’utilisation des “forces occultes”
(c’est-à-dire des forces surnaturelles ou naturelles mais cachées) »3 a pu
être perçue comme l’un des moyens de garantir une haute position
sociale, voire comme un dernier recours pour se maintenir dans les
premiers cercles du pouvoir.
Dans le cadre politique ou curial, l’emploi de procédés magiques
visait souvent, tel qu’il nous est présenté, à se venger d’une disgrâce
considérée comme injuste, à retrouver un rang perdu ou à renforcer une
position menacée. On peut rappeler quelques cas célèbres issus de

1
William R. JONES, « Political Uses of Sorcery in Medieval Europe », dans The
Historian, t. 34, 1972, p. 670-687 ; Norman COHN, Europe’s Inner Demons. The
Demonization of Christians in Medieval Christendom, Chicago, University of Chicago
Press, 2000 (1e éd. 1975 ; éd. revue), p. 118-143 ; Edward PETERS, The Magician, the
Witch, and the Law, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 1992 (1e éd. 1978),
p. 112-137 (The Middle Ages Series) ; SIMON DE PHARES, Le Recueil des plus célèbres
astrologues, éd. Jean-Patrice Boudet, 2 vol., Paris, Librairie Honoré Champion, 1997-
1999 (Société de l’histoire de France), t. II, p. 255-270 ; Benedek LÁNG, Unlocked Books.
Manuscripts of Learned Magic in the Medieval Libraries of Central Europe, Philadelphie,
Pennsylvania State University Press, 2008 (Magic in History).
2
Cf. en dernier lieu Jean-Patrice BOUDET, Entre science et nigromance. Astrologie,
divination et magie dans l’Occident médiéval (XIIe-XVe siècle), Paris, Publications de la
Sorbonne, 2006, p. 157-204 et 351-423 (Histoire ancienne et médiévale, 83).
3
Bert HANSEN, « Science and Magic », dans Science in the Middle Ages, éd. David C.
Lindberg, Chicago-Londres, Chicago University Press, 1978, p. 484 (The Chicago
History of Science and Medicine).

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322 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

l’espace français. En 1305, l’évêque de Troyes Guichard aurait fait tuer


par envoûtement la reine Jeanne, après avoir perdu son rang de conseiller
et vu diligenter contre lui une enquête judiciaire4. En 1317, l’évêque de
Cahors Hugues Géraud aurait tenté, selon ses accusateurs, d’envoûter à
des fins mortelles le pape Jean XXII et deux de ses cardinaux, alors
même qu’une enquête pour simonie entreprise contre lui était en passe
d’aboutir5. Plus proche de notre sujet, le cas de l’archevêque d’Aix
Robert de Mauvoisin, protégé de Clément V et en difficulté sous
Jean XXII, qui aurait fait fabriquer des sceaux astrologiques montés sur
des anneaux par un astrologue juif nommé Mossé de Trets, afin, entre
autres, de se maintenir à la tête de son archevêché et d’obtenir la bien-
veillance du nouveau pape, ce en quoi il devait échouer6 ; ou encore celui
du maréchal de France Gilles de Rais, accusé à plusieurs reprises d’avoir
voulu « conclure un pacte avec [les démons] pour obtenir et récupérer
science, puissance et richesse », tandis que sa situation personnelle s’ag-
gravait à la fin de la décennie 14307. Au fondement de ces accusations
pointe le modèle « théophilien » du pacte démoniaque, capable de
garantir efficacement la réussite temporelle8, un modèle manié non
parfois sans une certaine ironie : Benedetto Caetani, futur Boniface VIII,

4
Abel RIGAULT, Le Procès de Guichard, évêque de Troyes (1308-1313), Paris,
A. Picard et fils, 1896 (Mémoires et documents publiés par la Société de l’École des
chartes, I) ; Gaston PARIS, « Un procès criminel sous Philippe le Bel », dans La Revue du
Palais, t. II, 1898, p. 241-261 ; N. COHN, Europe’s Inner Demons…, p. 123-130.
5
Edmond ALBE, Autour de Jean XXII. Hugues Géraud, évêque de Cahors. L’affaire
des poisons et des envoûtements en 1317, Cahors, J. Girma, 1904 (extrait du Bulletin de
la Société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, t. XXIX) ; Guillaume
MOLLAT, « Un évêque supplicié au temps de Jean XXII », dans Revue pratique d’apolo-
gétique, t. IV, 1907, p. 755-761 ; N. COHN, Europe’s Inner Demons…, p. 130.
6
Joseph SHATZMILLER, Justice et injustice au début du XIVe siècle. L’enquête sur l’ar-
chevêque d’Aix et sa renonciation en 1318, Rome, École française de Rome, 1999, p. 145-
149 et 177-179 (Sources et documents d’histoire du Moyen Âge, 2) ; Nicolas WEILL-PAROT,
Les « images astrologiques » au Moyen Âge et à la Renaissance. Spéculations intellec-
tuelles et pratiques magiques (XIIe-XVe siècle), Paris, H. Champion, 2002, p. 380-383
(Sciences, techniques et civilisations du Moyen Âge à l’aube des Lumières, 6).
7
Le Procès de Gilles de Rais, éd. Georges Bataille, Paris, 10/18, 1997 (1e éd. 1959),
p. 210 et suiv. (Bibliothèque 10/18).
8
Alain BOUREAU, Satan hérétique. Naissance de la démonologie dans l’Occident
médiéval (1280-1330), Paris, Odile Jacob, 2004, p. 94-100 ; Julien VÉRONÈSE, « Autour de
la légende de Théophile : le pacte avec les démons à la fin du Moyen Âge », article à
paraître tiré d’une communication présentée le 4 avril 2008 lors du séminaire Alliances,
pactes et serments au Moyen Âge organisé par l’Université d’Orléans (J.-P. Boudet) et
l’I.R.H.T. (Paul Bertrand).

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serait ainsi entré dans une colère noire après l’élection de Célestin V en
1294, car sa pratique de la « nigromancie » et ses démons familiers
auraient dû en principe lui garantir l’accès à la dignité pontificale9. Mais
n’est-il pas de bonne théologie que les démons se jouent de leur interlo-
cuteur ?
Au-delà de ces quelques exemples que la nature des sources rend très
tendancieux, l’utilité de la « magie » pour obtenir honneurs et dignités
dans la hiérarchie politique ou ecclésiastique est bien attestée dans la
tradition textuelle. Nombreux sont en effet les experimenta qui, dans les
textes de magie pour une large part introduits en Occident après un
processus de traduction, visent à être bien en cour, à faire bonne figure
face aux grands dans l’optique d’intégrer leur conseil ou leur suite et d’en
obtenir des bénéfices, à détourner de soi leur colère ou encore à disqua-
lifier un concurrent au sein de leur entourage. Qu’ils reposent sur la
conjuration des démons ou sur l’invocation des anges, qu’ils appartien-
nent à ce que l’on appelle la magie astrale ou la magie rituelle, voire à la
tradition des amulettes, ils relèvent d’une magie psychologique très bien
représentée en général dans cette littérature, fondée sur le principe que les
forces naturelles, mais plus encore les entités spirituelles, sont capables
de « lier » ou d’incliner la volonté humaine, dans le cas présent vers une
sous-catégorie de l’amour et de l’amitié. Nous nous proposons de dresser
un panorama de ces savoirs et pratiques d’une grande variété, dont
certains, y compris parmi les plus condamnables du point de vue de
l’Église, sont recensés dans des bibliothèques princières de la fin du
Moyen Âge10.

Des procédés étaient connus des Latins avant même le mouvement


des traductions arabo-latines. Les catalogues de pierres disponibles en
Occident avant le XIIe siècle offraient en effet un nombre non négligeable
de moyens d’obtenir l’amour d’un roi, la faveur d’un puissant ou d’im-
pressionner favorablement un seigneur de haut rang par un usage efficace
de la parole et une bonne tenue. Le Liber lapidum de Marbode de Rennes,

9
Boniface VIII en procès. Articles d’accusation et dépositions des témoins (1303-
1311), éd. Jean Coste, Rome, L’Erma di Bretschneider, 1995, p. 287 (Pubblicazioni della
Fondazione Camillo Caetani. Studi e documenti d’archivio, 5).
10
Pour ce qui concerne la Clavicula Salomonis, cf. Jean-Patrice BOUDET et Julien
VÉRONÈSE, « Le secret dans la magie rituelle », dans Il Segreto, Micrologus. Natura,
Scienze e Società Medievali, t. XIV, 2006, p. 101-150 ; nous préparons actuellement une
édition de ce texte.

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rédigé en vers aux alentours de 1090 et conservé dans près de deux cent
cinquante manuscrits11, présente ainsi quelques pierres très utiles au cour-
tisan, sans justifier le fondement du pouvoir reconnu à chacune d’entre
elles : l’agate, comme l’aimant, permet, entre autres effets, à celui qui la
porte de faire preuve d’une belle éloquence et d’obtenir des grâces sur
terre comme au ciel12 ; l’alectoire, que l’on trouve dans le gésier du coq,
octroie de nouveaux honneurs et restaure ceux qui ont été perdus, tandis
que le béryl garantit richesses et honneurs13 ; enfin, la chélidoine prove-
nant de l’estomac des hirondelles peut, lorsqu’elle est rouge, rendre
éloquent, gracieux et plaisant et, quand elle est noire et portée au creux
du bras gauche enveloppée dans un vêtement de lin, calmer la colère du
roi14.
La principale source de Marbode, le lapidaire grec de Damigéron-
Évax, dont la tradition latine pourrait remonter au VIe siècle mais dont
les manuscrits conservés datent au mieux de la fin du XIe siècle15, donne
une variété de cas encore plus étendue et exige parfois un rituel de consé-
cration des pierres appelé à les investir d’une vertu sacrée, d’une « vertu
extrinsèque » pour reprendre une formule utilisée par Gervais de Tilbury
dans un chapitre (XXVIII) de la troisième partie de ses Otia imperialia
consacré aux gemmes16. L’aétite, sorte de pierre ponce communément
appelée pierre d’aigle, répand ainsi une bonne opinion de celui qui la
porte et permet de s’introduire facilement auprès des puissants, dont elle

11
MARBODE DE RENNES, « De Lapidibus » Considered as a Medical Treatise, éd.
John M. Riddle, Wiesbaden, F. Steiner, 1977 (Sudhoffs Archiv, Beihefte 20) ; ID.,
Lapidario, éd. et trad. Maria Ester Herrera, Paris, Les Belles-Lettres, 2005 (Auteurs latins
du Moyen Âge, 15) ; trad. fr. par Pierre Monat, MARBODE, Poème des pierres précieuses,
Grenoble, J. Million, 1996 (Petite collection Atopia, 6) : cf. Maria Ester HERRERA, La
Tradition manuscrite du Liber lapidum de Marbode de Rennes d’après les manuscrits
conservés en France, thèse de 3e cycle, Université de Paris IV – Sorbonne, 1986.
12
MARBODE DE RENNES, « De Lapidibus », p. 37 (agate) et 57 (aimant).
13
Ibid., p. 39 (alectoire) et 50 (béryl).
14
Ibid., p. 54-55.
15
Robert HALLEUX, « Damigéron, Evax et Marbode. L’héritage alexandrin dans les
lapidaires médiévaux », dans Studi medievali, 3e série, t. XV, 1974, p. 327-347 ; Les
Lapidaires grecs. Lapidaire orphique, Kérygmes lapidaires d’Orphée, Socrate et Denys,
Lapidaire nautique, Damigéron-Évax éd. et trad. Robert Halleux et Jacques Schamp,
Paris, Les Belles-Lettres, 1985, p. 193-297 (Collection des universités de France).
16
GERVAIS DE TILBURY, Otia imperialia. Recreation for an Emperor, éd. et trad. S. E.
Banks et J. W. Binns, Oxford, Clarendon Press, 2002, p. 614-616 (Oxford Medieval
Texts) ; trad. fr. par Annie Duchesne à partir de l’édition Leibniz, Le Livre des merveilles.
Divertissement pour un empereur (troisième partie), Paris, Les Belles-Lettres, 1992, p. 46
(La Roue à livres, 15).

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atténue par ailleurs la colère17. Les pierres permettant d’être persuasif ou


de belle apparence, telles que le corail, la topaze, la capnite ou la magné-
tite, sont particulièrement nombreuses18 ; la collure, une pierre inconnue
« semblable au saphir », d’une « couleur marine tirant sur le blanc », est
particulièrement « bonne pour s’adresser aux rois et aux puissants », pour
peu qu’on la porte percée autour du cou19.
La tradition hermétique, introduite ultérieurement en Occident, a
approfondi cet inventaire des éléments naturels dont l’efficacité peut
potentiellement être décuplée par des rites. Les Kyranides, ouvrage
traduit du grec en latin en 1169 à Constantinople par Pascal le Romain et
conservé dans trente sept manuscrits20, propose ainsi des pierres, mais
aussi des fleurs et des animaux ayant de semblables vertus. Parmi les
premières, on peut citer, comme dans le lapidaire de Damigéron, l’aétite,
sur laquelle il convient de sculpter un aigle et de disposer des grains de
raisin, et qui donne force au discours et pouvoir de s’entretenir amicale-
ment avec les puissants21 ; ou encore la thyrsite, qui permet d’obtenir des
faveurs de n’importe quel individu22. Parmi les seconds, on peut isoler la
bergeronnette (avis kinedius ou junx) mentionnée par Pline, dont la
langue, portée dans un pétale doré, garantit grâce et amitié de la part d’un
puissant23. D’autres textes, comme le De quindecim stellis, quindecim
lapidibus, quindecim herbis et quindecim imaginibus attribué à Hermès
et traduit de l’arabe24 ou le Liber Ale attribué à Salomon mais d’inspira-
tion hermétique, qui fait office de second livre du Liber Razielis traduit
de l’hébreu à la demande d’Alphonse X de Castille25, proposent des

17
Les Lapidaires grecs…, p. 234-235.
18
Ibid., p. 242 (corail), 267-268 (topaze), 281 (capnite) et 270 (magnétite).
19
Ibid., p. 278.
20
Fernand de MÉLY, Histoire des sciences. Les Lapidaires de l’Antiquité et du Moyen
Âge, 3 vol., Paris, Ernest Leroux, 1896-1902, t. III, Les Lapidaires grecs (trad. fr.) ; Textes
latins et vieux français relatifs aux Cyranides. La traduction latine du XIIe siècle. Le
Compendium aureaum. Le De XV stellis d’Hermès. Le Livre des secrez de nature, éd.
Louis Delatte, Liège, Faculté de philosophie et lettres – Paris, E. Droz, 1942, p. 3-206
(texte lat.) (Bibliothèque de la Faculté de philosophie et lettres de l’Université de Liège,
93).
21
Textes latins et vieux français relatifs aux Cyranides, p. 30.
22
Ibid., p. 53.
23
Ibid., p. 57.
24
Ibid., p. 235-74 ; Paolo LUCENTINI et Vittoria PERRONE COMPAGNI, I testi e i codici di
Ermete nel Medioevo, Florence, Polistampa, 2001, p. 44-48 (Hermetica Mediaevalia, 1).
25
Biblioteca Apostolica Vaticana, ms. Vat. Reg. lat. 1300, fol. 21v°-37 ; Halle,
Universitäts- und Landesbibliothek Saschen-Anhalt, ms. 14. B. 36, fol. 12v°-22v°.

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procédés comparables, quoique davantage liés à des impératifs astrolo-


giques. Dans le premier, si l’on retrouve des pierres déjà mentionnées
comme la topaze ou le béryl, la pierre la plus efficace est le saphir, qui
augmente l’honneur et rend agréable face aux rois et aux nobles quand
la Lune est en conjonction avec l’étoile qui le gouverne26. Dans le second,
outre le saphir, on peut isoler la topaze, dont la figure à graver est le
faucon27, la cornéline, sur laquelle il faut sculpter un homme bien habillé
brandissant une verge28, mais aussi des herbes comme la majorane, la
valériane ou la gentiane29 ou des animaux symboles du pouvoir comme
l’aigle30 ou le lion, dont des parties peuvent servir à l’élaboration de
charmes efficaces. Voici l’exemple du lion dans une version française
de l’époque moderne du Liber Ale :

[De] tous les animmaux terrestres :


Le premier est le lyon. Et cette beste est grandement forte en corps et en
gorge, et elle est forte d’aspect ainsy que quand les autres bestes le
voyent, tremblent. Et sa peau est de telle vertu que misse aveque les peaux
des autres les destruit et en faict tomber les poils, et que celuy qui prent
la dant caninne et la mette en sa bouche, elle est bonne pour prendre et
desrober le bien d’autruy, et de mesme faict la dent de loup. Et sy vous
faictes du cœur de lyon une bourse pleine de sang, de meusc et de bois
d’aloès, de timiamate, et que le tout soit ensemble et eschauffé, jettez les
sur quelques personnes, laquelle que vous voudrez, et sachez que dans la
mesme heure il vous aymera beaucoup et que elle vous acomplira vostre
commandement. Et sy vous avez le sang de sont chef et que vous invo-
qués le prince des demons, d’abort il sera tout prest à faire vostre
commandement, et de cette maniere les grands du royaume, d’une mette-

26
Textes latins et vieux français relatifs aux Cyranides, p. 260 ; cf. GERVAIS DE
TILBURY, Otia imperialia, p. 614-616.
27
Biblioteca Apostolica Vaticana, ms. Vat. Reg. lat. 1300, fol. 22v° : Secundus lapis
dicitur thopazius. Et ejus color est ceruleus et citrinus sicut aurum, et sua potestas est
quod si ponatur in caldaria cum aqua ferventi detinet eam quod fervere non possit, et hoc
est propter maximam potenciam lapidis. Et sua virtus est quod facit hominem qui eum
secum portat esse castum et dat ei benivolenciam et amorem nobilium hominum. Et sua
figura est falco.
28
Ibid., fol. 24 : XIIIa lapis dicitur cornelina, et suis color est similis aque commixto
cum sanguinem sicut est aqua in qua lavantur carnes. Et ejus potestas est restringere
sanguinem narium. Et si in eo fuerit figura hominis bene inducti tenentis virgam in manu
sua, confert honorem portanti eum secum.
29
Ibid., fol. 28 : XVa herba dicitur majorana, et ista custodit domum per se et defen-
dit eam a malis infirmitatibus. Et dixit Hermes quod genciana et valeriana et majorana
valent multum super honorem principum et majorum hominum.
30
Ibid., fol. 32 (aigle).

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rie ou d’autres endroits pour lesquels vous ferez, et je dis de mesme des
femmes, tant grandes et que les pettites31.

Pierres, et dans une moindre mesure herbes et animaux, se voient


donc reconnaître des vertus potentiellement utiles en contexte curial, peu
exigeantes d’un point de vue technique, même si le passage à la pratique
paraît assez hypothétique32. L’ambiguïté sur les fondements de cette effi-
cacité bien souvent demeure, y compris dans le lapidaire de Marbode où
ils semblent toutefois plutôt naturels, ce qui peut expliquer le succès
remarquable de l’ouvrage33. Les magies astrale et rituelle qui ont renou-
velé en profondeur le fonds commun de la magie occidentale à compter
des premières décennies du XIIe siècle proposent de leur côté des procé-
dures plus complexes, soit que le fondement astrologique exige des
connaissances spécifiques, soit que les rites prescrits nécessitent une
longue préparation et une grande persévérance. Si le principe d’une effi-
cacité partiellement naturelle est constitutif de la magie taslimanique, la
magie rituelle ne doit, elle, sa vertu qu’aux anges, esprits ou démons que
le magister, l’artifex ou l’exorcisator parvient à amadouer ou à
contraindre, seul ou en présence de ses disciples.

Les experimenta de magie astrale ayant les objectifs préalablement


énoncés sont si nombreux qu’il ne saurait être question ici de les passer
tous en revue. On en rencontre tout d’abord dans l’un des textes les plus

31
Lyon, Bibliothèque municipale, ms. 970, fol. 96-97 ; Biblioteca Apostolica
Vaticana, ms. Vat. Reg. lat. 1300, fol. 34v°-35 : Primum animal est leo, et est bestia fortis-
sima in pectore et in faucibus, et habet fortem aspectum sic quod quando respicicit alias
bestias stant nimis suaves pro timore ejus. Et pellis ejus est talis virtutis quod si fuerit
inter alias pelles scindat et depillat et destruit eas. Et qui accipit dentem ejus caminum et
ponit ipsum in auro est valde bonus ad aufferendum et rapiendum aliena, et sic facit dens
lupi. Et si de corde leonis facta fuerit bursa et impleta sanguine musco et almea ligno
aloes et thimiama, et fuerit colectam super quecumque volueris et calefeceris ipsum, scias
quod in eadem hora qua calefaceris diliget te multum et faciet mandatum tuum. Et si invo-
caveris cum sanguine ejus principem demonum erit statim paratus ad faciendum manda-
tum tuum. Et sic de majoribus regni vel ville, vel de illo propter quem hoc feceris. Et idem
dico de mulieribus magnis.
32
Il faut noter en outre que la finalité qui me préoccupe dans cette contribution n’est
pas systématiquement au cœur de cette littérature « expérimentale » et encyclopédique :
en témoigne le Liber de virtutibus herbarum, lapidum et animalium qui, bien qu’inspiré
par des sources antiques et hermétiques, semble en retrait sur ce point ; cf. [ALBERT LE
GRAND] Le Liber de virtutibus herbarum, lapidum et animalium (Liber aggregationis). Un
texte à succès attribué à Albert le Grand, éd. Isabelle Draelants, Florence, SISMEL – Ed.
del Galluzzo, 2007 (Micrologus’ Library, 22).
33
J.-P. BOUDET, Entre science et nigromance…, p. 123-124.

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328 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

diffusés (trente-huit manuscrits), le De ymaginibus de Thâbit ibn Qurra,


traduit de l’arabe par Jean de Séville34 et utilisé au XIIIe siècle par l’auteur
du Speculum astronomie pour bâtir la notion purement spéculative
d’« image astrologique » – autrement dit de talisman à l’efficacité stric-
tement naturelle et donc licite en contexte chrétien35. Cet opuscule inven-
torie sept images, dont deux au moins – la cinquième et la sixième – sont
utiles au contact des princes et ont servi ultérieurement de modèles à
l’auteur d’une compilation astrologique (v. 1278) à succès, Léopold
d’Autriche36. Il s’agit respectivement d’obtenir du roi la domination sur
une cité, une province ou une seigneurie, et de le faire incliner vers un
homme – le client de l’astrologue – ou vers l’avis ou le conseil que l’on
entend qu’il suive37. Dans les deux cas, avant de fabriquer l’image
anthropomorphe, il convient d’en sculpter le moule dans deux pierres
bien ajustées l’une à l’autre ; puis, sous des configurations astrales très
précises, qui prennent en compte notamment l’ascendant de la nativité du
prince – c’est-à-dire le point du zodiaque qui se lève à l’horizon oriental
à la date de la naissance –, il faut fabriquer en une fois ou partie par partie
la statuette avec du plomb, du fer, de l’étain, de l’argent ou de l’or, attri-
buer à l’image-cible le nom ou le prénom du grand homme que l’on veut
lier (sans qu’il soit fait mention ici d’une inscription), puis, au moment de
l’audience, porter l’image sur soi, dans le second cas de telle sorte que
sa main touche le col du demandeur. Les effets ne se font dès lors pas
attendre :

[Image n° 5] Et quand tu auras fait cela et achevé l’image selon ce mode,


elle apportera ce que celui-ci aura demandé à son roi, il aura et obtiendra
le principat qu’il aura demandé38.
[Image n° 6] Et quand, de cette manière, tu auras achevé l’image en tout
point, son roi inclinera totalement vers lui son amour et (…) elle lui
donnera tout ce qu’il voudra et le fera craindre et le glorifiera, [et] (…) de
cela resteront visibles une trace et une œuvre très grande et durable aussi

34
THÂBIT IBN QURRA, The Astronomical Works of Thâbit b. Qurra, éd. (textes latins)
Francis J. Carmody, Berkeley – Los Angeles, University of California Press, 1960, p. 179-
197 ; David PINGREE, « The Diffusion of Arabic Magical Texts in Western Europe », dans
La Diffusione delle scienze islamiche nel medio evo europeo. Convegno internazionale
(Roma, 2-4 ottobre 1984), Rome, Accademia dei Lincei, 1987, p. 57-102, n. 74
(Accademia nazionale dei Lincei. Fondazione Luigi Caetani).
35
N. WEILL-PAROT, Les « images astrologiques »…, p. 63-77.
36
Ibid., p. 410-413 ; J.-P. BOUDET, Entre science et nigromance…, p. 85-86.
37
THÂBIT IBN QURRA, The Astronomical Works…, p. 186-90.
38
Ibid., p. 188.

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JULIEN VÉRONÈSE 329

longtemps que durera l’image façonnée, jusqu’à ce que la mort les


sépare39.

Des textes liés à l’hermétisme « harranien », conservés dans le manus-


crit de Florence II.iii.214 (XVe siècle), proposent des experimenta du
même type, quoique plus simples d’un point de vue astrologique. C’est le
cas notamment du Liber ymaginum Lune, qui, outre les heures favorables
pour confectionner des talismans destinés à exercer une contrainte sur les
rois, expose le cas d’une image permettant d’être introduit devant les
souverains et de susciter chez eux une dilectio maxima. Il convient de
faire une image en argent à la septième heure de jour, en écrivant sur la
tête le nom du roi, sur la poitrine le nom du seigneur de l’heure (c’est-à-
dire de la planète qui domine ici la septième heure) et sur les pieds les
noms de la deuxième heure, puis de porter la statuette sur soi, qui agira
efficacement « par la vertu et l’aide de Dieu »40. On peut encore citer la
partie du Liber septem planetarum ex scientia Abel intitulée Liber Lune,
qui, outre des talismans capables de faire perdre ou gagner au roi un
royaume, propose des chapitres intitulés De petitione a regibus41 ou Pro
amore regis vel potentis obtinenda42. En plus de l’inscription des noms,
il est cette fois question de suffumigations accompagnées d’une prière. Si

39
Ibid., p. 189-190.
40
Florence, Biblioteca Nazionale Centrale, ms. II.iii.214, fol. 13 : Septima ymago in
septima hora diei cum qua utile est ad reges ingredi, ut per illam dilectio maxima ac
veneratio adipiscatur. Fiat ergo ymago argentea optime composita et super caput ejus
nomen regis scribatur, in pectore quoque nomen domini hore et in ventre similiter nomina
secunde hore. Qua sic facta cum aliquis ad regem ingredi voluerit, ymaginem secum
teneat, quia hec est ymago operis et perfectus virtute Dei et ejus auxilio.
41
Ibid., fol. 17v° : Capitulum tertium de petitione a regibus. Cum igitur amoris regii
ymago facienda est : aptitudo thematis primum consideranda est, scilicet an Luna cum
Jove in aliquo signorum conjungatur ; quod si fuerit fiat ymago hominis evea in cujus
summo vertice nomen regis vel potentis scribatur, in ventre vero nomen signi in quo Luna
cum Jove conjungitur ; deinde precipua ei suffumigatio exhibeatur et eam suffumigando
in oratione, hoc nomen non taceatur, scilicet Abron. Postea vero ymago lateri coaptetur
et ante regem vel potentem quemlibet confiagatur causa confidenter.
42
Ibid., fol. 18 : Capitulum sextum de amore inter quoslibet ponendo. Pro amore
autem regis vel potentis vel alterius cujuslibet hominis obtinenda, securitate etiam inten-
dentis in desiderio habita, ymago sic facienda est. Sit igitur Luna in aliquo signo cum
Venere juncta, que si sic sit fiat ymago hominis in longum evea et aurea ; hiis tamen
proportionaliter appositis in medietate vero aurea in summo ymaginis vertice nomen
unius, in medietate altera evea nomen alterius quibus scilicet amor dari intenditur, inscri-
batur in ventre nomen signi conjunctionis inponatur ; postea vero suffumigetur cum
oratione ; precipua hoc tamen nomine non excluso cabrinos ; deinde in domo unius eorum
sub ejus thore in loco capitis subhumetur et sic auxilio Dei complebitur.

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330 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

pour faire sa demande au souverain il était, comme dans les cas précé-
dents, nécessaire de porter l’image sur soi, pour gagner son amour il
conviendrait de se livrer à une opération risquée, qui consiste à enterrer
ou à disposer la statuette sous son lit, à hauteur de la tête, lieu où doit
s’exercer la contrainte psychologique.
Pour trouver davantage de « recettes » concernant rois et puissants, il
faut se reporter à l’important corpus de magie astrale qu’a fait traduire de
l’arabe ou de l’hébreu le roi de Castille Alphonse X. Qu’il s’agisse du
Picatrix latin, traduction de la Ghâyât al-Hakîm (1256-1258)43, de la
compilation en castillan appelée Libro de astromagia (1279-1284)44, ou
du septième livre du Liber Razielis intitulé Liber ymaginum45, on ne
compte plus les experimenta dédiés au sujet. Un certain nombre fonc-
tionne en lien avec les mansions lunaires, au nombre de vingt-huit, qui
sont autant de divisions du parcours de la Lune dans le zodiaque46. Dans
le livre I du Picatrix47 comme dans le Zodiologion de los Indios consti-
tutif de l’Astromagia48, la septième mansion, Aldirah, située dans les
Gémeaux, est favorable « pour aller devant un roi ou quelqu’autre grand
personnage, pour faire incliner où l’on veut la bienveillance royale ou de
quelqu’autre maître », quand, dans le livre IV, dans un système attribué
à un certain Plinion que l’on retrouve aussi dans l’Astromagia49, c’est la
cinquième mansion, Almizen, qui est bénéfique, dès lors que l’on suit le
rituel suivant :

Quand la Lune parcourt cette mansion, fais un sceau en argent où on


sculpte une tête d’homme sans corps ; au-dessus de cette tête, écris le nom
du maître de cette mansion [c’est-à-dire Cabil], et écris sur ledit sceau ta

43
Picatrix. The Latin Version of the Ghâyât al-Hakîm, éd. David Pingree, Londres,
Warburg Institute, 1986 (Studies of the Warburg Institute, 39) ; Picatrix. Un traité de
magie médiéval, trad. Béatrice Bakhouche, Frédéric Fauquier et Béatrice Pérez-Jean,
Turnhout, Brepols, 2003 (Miroir du Moyen Âge).
44
ALPHONSE X LE SAGE, Astromagia (Ms. Reg. lat. 1283a), éd. Alfonso D’Agostino,
Naples, Liguori, 1992 (Barataria, 6).
45
Halle, Universitäts- und Landesbibliothek Saschen-Anhalt, ms. 14. B. 36., fol. 96-
130v°.
46
Hors contexte alphonsin, on peut se reporter en outre au Liber Lune secundum
Aristotelem, traduction-adaptation du Kitâb al-makhzûn ; cf. Charles BURNETT, « Nîranj :
A Category of Magic (almost) forgotten in the Latin West », dans Natura, scienze e
società medievali. Studi in onore di Agostino Paravicini Bagliani, éd. Claudio Leonardi
et Francesco Santi, Florence, SISMEL – Ed. del Galluzzo, 2008, p. 37-65 (Micrologus’
Library, 28).
47
Picatrix, lib. I, cap. IV, § 8, p. 10.
48
Astromagia, p. 206-209.
49
Ibid., p. 188-189.

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JULIEN VÉRONÈSE 331

demande, quelle qu’elle soit. Quand tu feras pour lui une fumigation avec
du santal, dis : « Toi, Cabil, fais pour moi telle chose et accomplis ma
demande – c’est-à-dire que les rois et les chefs me reçoivent parfaitement
bien. » Quand tu auras fait cela, emporte ce sceau avec toi et ta demande
se réalisera50.

Le système des mansions le plus riche en experimenta se trouve dans


une partie de l’Astromagia intitulée El Zodiologion de Kancaf el Indio,
très largement centrée sur la personne royale. Les sixième, septième,
dixième, onzième, treizième, quinzième et vingt-quatrième mansions
sont propices à la construction de talismans – des lámina – visant à
obtenir audience d’un roi ou d’un prince, ou de susciter leur bien-
veillance51. À l’inverse, nombreux sont les procédés pour déclencher l’ir-
ritation, la colère, voire la haine des puissants52.
Planètes et esprits planétaires jouaient aussi un rôle de premier plan.
Parmi les planètes dont la vertu coïncide avec les objectifs recherchés, il
faut mettre en avant la Lune, Jupiter, mais plus encore le Soleil53, pour
lequel, outre des talismans relativement classiques54, un magnifique rituel
astrolâtrique d’origine sabéenne55 est préconisé dans le troisième livre du
Picatrix :

Quand tu veux prier le Soleil et lui demander quelque chose, par exemple
demander la grâce du roi, l’amour des seigneurs, les dominations et les
acquisitions de ce genre, tu rendras le Soleil favorable en le plaçant à l’as-

50
Picatrix, lib. IV, cap. IX, § 33, p. 229 ; trad. fr. p. 372.
51
Astromagia, p. 164 (6e mansion : Farás en ella las obras de bienquerencia e de
amor, e entrarás a rey e piedrás peticiones), 164-167 (7e : Es buena pora (…) entrar a
reyes e a altos omnes), 168-169 (10e : Esta es buena pora (…) entrar e rey), 170-171 (11e :
E convenie pora (…) entrar a reyes e a príncipes), 170-173 (13e : Es buena pora (…)
entrar a reyes), 172-175 (15e : E viene d’ela al mundo espírito que da amor e bienque-
rentia e piedad e misericordia de reyes e de principes), 180-181 (24e : Es buena pora (…)
vistas de reyes) ; cf. aussi le Libro de la Luna, p. 137, où se trouve un talisman visant à
obtenir la faveur et l’amour d’un serviteur du roi.
52
Cf. notamment 8e, 12e, 19e et 22e mansions.
53
Picatrix, lib. III, cap. VII, § 3, p. 113 : Petas a Jove ea que in ejus divisione consis-
tunt, ut sunt peticiones sublimium virorum, potestatum, prelatorum (…), regum, eorun-
dem filiorum et puerorum filiorum, militum, consobrinorum… ; § 8 : Petas a Luna omnia
eidem pertinencia ipsiusque nature attributa, ut sunt erga reges peticiones… ; § 5 : Petas
a Sole peticiones eidem congruas, ut sunt peticiones versus reges, filios militum et
regum…
54
Ibid., lib. II, cap. xii, § 3 et 28, p. 80 et 82.
55
David PINGREE, « Al-Tabari on the Prayers to the Planets », dans Sciences occultes
et Islam, Bulletin d’Études orientales, t. 44, 1992, p. 105-117 ; les Sabéens sont mention-
nés dans la version arabe.

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332 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

cendant, et à son jour et à son heure. Revêts-toi de vêtements de roi,


soyeux, jaunes et mêlés d’or ; pose sur ta tête une couronne d’or et passe
à ton doigt un anneau d’or. (…) Pénètre dans une maison éloignée et
réservée à l’opération ; pose ta main droite sur la gauche, et regarde le
Soleil avec réserve et humilité (…). Ensuite, prends un encensoir d’or, et
un beau coq avec un beau cou ; au-dessous de son cou, pose une petite
chandelle de cire allumée qui soit située à l’extrémité d’un bâton d’une
palme de longueur ; dans le feu de l’encensoir, place la fumigation décrite
plus bas. Tandis que le Soleil se lève, tourne le coq vers lui ; pendant que
la fumée de l’encensoir s’élève continûment, dis : « Toi qui es la racine du
ciel, (…) je te demande d’exaucer ma prière, de m’accorder la grâce et
l’amour de tel roi et de tous les autres rois. Je t’en conjure, par celui qui
te donne lumière et vie. (…) Je t’invoque par tous tes noms : Yazemiz en
arabe, Sol en latin, Maher en chaldéen, Lehuz en roman, Araz en indien
(…). Je te demande, toi qui es la racine de tout le firmament, d’avoir pitié
de moi et d’être attentif aux prières et demandes que j’ai faites56. »

Les principes de sympathie et similitude jouent ici à plein, puisque le


demandeur est contraint de se déguiser en roi et de se couvrir d’or pour
prier le souverain du ciel, qui, à son tour, sans doute par l’entremise d’un
esprit, doit influer sur la cible véritable, le souverain temporel.
Cette prédominance des rites nous rapproche ostensiblement de la
magie rituelle, qui, d’un certain point de vue, est plus orthodoxe que cette
cérémonie solaire héritée du paganisme oriental. Soulignons toutefois
que le mirage d’« images astrologiques » opérant par les seules forces de
la nature et donc licites n’a pas complètement disparu durant les derniers
siècles du Moyen Âge : ainsi voit-on, à la croisée des XIVe et XVe siècles,
l’astrologue et magicien Antonio da Montolmo développer dans son De
occultis et manifestis l’exemple à la fois pratique et théorique d’un
talisman purement naturel permettant selon lui d’obtenir d’un prélat une
meilleure place57.

56
Picatrix, lib. III, cap. VII, § 27, p. 128-129 ; trad. fr. p. 229-231. On peut aussi
mentionner le rituel de fabrication de « l’onguent du Soleil », lib. IV, cap. VI, § 13, p. 203-
204, où il faut prier le Soleil et des anges des 4e, 5e, 6e et 7e cieux ; il convient de s’en
enduire le visage avant de faire face à un roi ou un seigneur.
57
N. WEILL-PAROT, « Antonio da Montolmo’s De occultis et manifestis or Liber
Intelligentiarum. An Annotated Critical Edition with English Translation and
Presentation », dans Invoking Angels. Theurgic Ideas and Practices from the Thirteenth
to the Sixteenth Century, éd. Claire Fanger, University Park, Pennsylvania State
University Press, sous presse (Magic in History) ; BnF, ms. lat. 7337 (XVe s.), p. 5b, De
occultis, cap. 4, § 2 : Notabis quod triplex est ymago sive anulus vel breve vel aliquid aliud
ad hoc opus, quia quoddam est astronomicum, quoddam magicum, quoddam astro-
nomicum et magicum simul. Astronomicum opus est id quod fit in astronomica, materia

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JULIEN VÉRONÈSE 333

En matière de magie rituelle, l’éventail des pratiques possibles est,


comme précédemment, relativement large. Ni la magie angélique ou
théurgie, ni la nigromancie (du latin nigromantia) n’excluent en effet de
leurs objectifs d’impressionner favorablement quelque illustre person-
nage. Dans le premier cas, on peut citer des textes tels que la version
glosée de l’Ars notoria, où la récitation d’une liste de noms mystérieux
permet de plaider sa cause avec efficacité auprès d’un grand58, le Liber
juratus sive sacratus d’Honorius de Thèbes (XIVe siècle)59 ou encore le
compendium de magie rituelle et astrale qu’est le Liber de angelis,
annulis, karacteribus et ymaginibus planetarum faussement attribué au
traducteur du XVe siècle Osbern Bokenham60. Mais l’ouvrage le plus inté-
ressant est sans nul doute le sixième livre du Liber Razielis alphonsin, le
Liber Samayn, qui est en fait l’adaptation d’un antique livre de magie
juive, le Sefer ha-Razim (ou Livre des mystères)61. Pas moins de cinq
experimenta, consistant à invoquer les armées angéliques gardiennes des
six premiers firmaments de la cosmologie juive, concernent les rois ou

bene disposita ad effectum quem queris sub certis constellationibus. Gratia exempli : Fit
ymago ad <majora> acquirendum ab aliquo prelato, ita quod ponitur dominus ascen-
dentis nativitatis prelati vel significator in questione proposita coniunctus corporaliter
vel ex trino aspectu vel sextili domino nativitatis servitoris vel <significatori> complex-
ionis ipsius, et significator prelati perfecta commissione coniuncta eis. Significationem
<significatoris> servitoris in bono loco figure et alias conditiones requisitas hic non
pono, sed pono pro exemplo ; est nunc : sub tali influxu, hora et tempore subiectis signi-
ficatis servitoris vel saltem hora eius, remotis aliis impedimentis, fit ymago cerea munda,
virginea vel argentea pura vel anulus argenteus ; tunc talis influxus talium stellarum sic
situatus recipiatur a tali materia liquefacta, inclinat subiecta sua ad amorem et benivo-
lentiam.
58
L’Ars notoria au Moyen Âge. Introduction et édition critique, éd. Julien Véronèse,
Florence, SISMEL – Ed. del Galluzzo, 2007 (Micrologus’ Library. Salomon Latinus, 21-
1), § 62, p. 181-182 ; glose : BnF, ms. lat. 9336 (2e quart XIVe s.), fol. 8a.
59
“Liber Iuratus Honorii”. À Critical Edition of the Latin Version of the Sworn Book
of Honorius, éd. Gösta Hedegård, Stockholm, Almqvist & Wiksell, 2002, lib. II, cap. CVI
et CVIII, et lib. III, cap. CXIX, p. 117, 118 et 126 (Studia Latina Stockholmiensia, 48).
60
Juris G. LIDAKA, « The Book of Angels, Rings, Characters and Images of the
Planets attributed to Osbern Bokenham », dans Conjuring Spirits. Texts and Traditions of
Medieval Ritual Magic, éd. Claire Fanger, Stroud, Sutton et University Park,
Pennsylvania State Univerity Press, 1998, p. 32-75, n. 58 [§ 21], 64 [§ 26 et 27] et 66 [§ 28
et 29] (Magic in History).
61
Sepher ha-Razim. À Newly Recovered Book of Magic from the Talmudic Period,
Collected from Genizah Fragments and Other Sources, éd. Mordecai Margalioth,
Jérusalem, 1966 (en hébreu) ; Sepher ha-Razim. The Book of the Mysteries, trad.
Michael A. Morgan, Chico, Scholars Press, 1983 (Texts and Translations, 25 ;
Pseudepigrapha Series, 11).

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334 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

les puissants : si l’un visait à les réduire au silence62, les autres seraient
utiles au courtisan ambitieux pour gagner la faveur d’un roi63, connaître
la volonté d’un grand ou interpréter, à la manière de Daniel, l’un de ses
songes64, annuler une décision le concernant65 et élever quelqu’un dans la
hiérarchie ou le restaurer dans son office, y compris le roi lui-même.
Dans ce dernier cas, l’opération à mener est la suivante :

Prends de l’huile, du miel et de la farine de froment et dispose le tout dans


un vase en verre neuf, et auparavant purifie-toi de toute pollution, et ne
mange ni d’une chose morte, ni d’une chose immonde ou vénéneuse, et ne
copule pas avec une femme, et reste ainsi pendant sept jours. Et au
septième jour, place-toi à la perpendiculaire de la Lune, et tu nommeras les
noms des anges [du onzième camp du second firmament] à sept reprises
sur cette huile, ce miel et cette farine, et dis ainsi : « Affermis ma prière et
ma demande et mon oraison devant toi, Lune, qui avance le jour et la nuit,
et ta milice est de lumière, et devant toi et après toi sont les anges bienfai-
sants, je te conjure par le roi qui te meut, te fait te retourner et te conduit,
de faire en sorte que, de même que tu faiblis, augmentes et retournes pleine
à ta place, de même tel homme fils d’un tel retourne et reste à sa place, et
dispose-le en grand honneur, et rend-le puissant et de bon conseil, et
octroie-lui grâce aux yeux de tous ceux qui le voient, et de même que tu as
honneur dans le monde, dépose l’honneur de ton honneur sur lui (…). » Et
fais ainsi pendant trois jours, et ensuite fais une tourte de cette farine mélan-
gée au miel et à l’huile, sèche-la dans un lieu que n’atteint pas le Soleil, et
le troisième jour il [c’est-à-dire le commanditaire] la mange avant que le
Soleil ne se lève, et tu enterres le verre dans sa maison66.

62
Biblioteca Apostolica Vaticana, ms. Vat. Reg. lat. 1300, fol. 111v°-112, 2e ciel, 1er
camp, publié désormais dans Sefer ha-Razim I und II. Das Buch der Geheimnisse I und
II, éd. Bill Rebiger et Peter Schäfer, Tübingen, Mohr Siebeck, 2009, § 122-123, t. I, p. 40-
41 (Texte und Studien zum antiken Judentum, 125).
63
Ibid., fol. 105v°-106, 1er ciel, 4e camp; Sefer ha-Razim I und II…, § 64-76, p. 36-37.
64
Ibid., fol. 109v°-110v°, 1er ciel, 7e camp ; Sefer ha-Razim I und II…, § 108-114,
p. 39-40.
65
Ibid., fol. 113-114v°, 2e ciel, 3e camp; Sefer ha-Razim I und II…, § 132-134, p. 41-42.
66
Ibid., fol. 119v°-120v°, 2e ciel, 11e camp ; Sefer ha-Razim I und II…, § 171-173,
p. 44-45 : Ad elevandum hominem in magnam altitudinem et honorem vel ad ponendum
vel convertendum ipsum in quodcunque bonum et honorem volueris. Si volueris elevare
hominem in magnam altitudinem et magnum honorem super vassalos regis vel super
domum regis vel facere ipsum majorem vel potestatem vel alcalem vel judicem vel conver-
tere hominem qui descendit de suo honore in prestinum statum et honorem, accipe oleum
et mel et farinam siliginis, et pone omnia in uno vase vitreo novo et munda te ante ab omni
pollutione. Et non comedas rem mortuam nec immundam nec venenosam et non coeas
mulieri et sis sic per septem dies. Et in septimo die pone te in rectitudine Lune, et nomi-
nabis nomina predictorum angelorum super illud oleum et mel et farinam septem vicibus.
Et dicas sic : Fundo precem meam et petitionem meam et orationem meam coram te,

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JULIEN VÉRONÈSE 335

Dans le second cas, c’est-à-dire du côté de la nigromancie, les sources


possibles ne sont pas moins variées. Un chapitre de la Clavicula
Salomonis s’intitule Experimentum gratie et impetracionis67 ; il exige du
demandeur qu’il prépare un « brevet » couvert de noms divins et de carac-
tères magiques, qu’il le consacre à l’aide d’une prière68 et en le laissant
un jour et une nuit sous le corporal d’un autel, puis qu’il le porte à la main
devant le puissant, qui n’aura dès lors pas la force (potestas) de résister à
la virtus du document sacré. Le manuel de magie noire du XVe siècle édité
par Richard Kieckhefer propose de son côté deux experimenta pour
gagner dignité et honneur69. Acquérir l’amitié des puissants fait encore
partie des buts principaux des anneaux consacrés que permet de
construire le De quattuor annulis de Salomon70. Il n’y a pas jusqu’aux

Luna, qui ambulas de die et de nocte. Et tua milicia est de luce, et coram te et post te sunt
angeli benefaciendi. Conjuro te per regem, qui te extrahit et convertit et dicit, quod sicut
tu es deficiens et adimplens et revertens completa ad locum tuum, sic convertas et facias
stare talem hominem N., filium talis N., in locum suum. Et ponas eum in maximo honore
et convertas eum potentem et consiliarium, et da ei gratiam in oculis omnium videntium
eum. Et sicut tu habes honorem in mundo, sic ponas honorem de tuo honore super ipsum,
et honorent ipsum omnis filii Ade et Eve, et facias eum potentem, sicut fuit primo, et
melius, et non descendat de suo pretio unquam. Et sic facias per tres dies et postea facies
unam tortam de illa farina cum illo melle et oleo, et desicca eam in loco quem non tangat
Sol. Et in tertio die comedat ipsam antequam ascendat Sol, et sepelias vitrum in domo
sua.
67
Sur ce texte, cf. J.-P. BOUDET et J. VÉRONÈSE, « Le secret… » ; Amsterdam,
Bibliotheca Philosophica Hermetica, ms. 114 (XVe s.), p. 106-107 : Capitulum septimum
quomodo et qualiter operentur experimenta gratie et impetracionis facere proposueris…
68
Amsterdam, Bibliotheca Philosophica Hermetica, ms. 114, p. 107 : Adonay, sanc-
tissime Deus omnipotens piissime, qui es Alpha et O, per tuam misericordiam et pietatem
qui plenus es misericordie et pietatis, qui dixisti « Petite et dabitur vobis », Domine,
virtu<tem> tua<m> da, ut hoc experimentum consecratum inveniatur veniat de sancti
sede tua, Adonay, qui in isto breve virtutem ponat.
69
Forbidden Rites. À Necromancer’s Manual of the Fifteenth Century, éd. Richard
Kieckhefer, Stroud, Sutton, 1997, et University Park, Pennsylvania State University Press,
1998, p. 198 [n° 2] et surtout 203-206 [n° 4] (Magic in History) ; Munich, Bayerische
Staatsbibliothek, ms. Clm 849, fol. 11v°-13. Il s’agit de construire deux images, celle du
demandeur et celle de la cible (le roi par exemple), de les exorciser et de les lier l’une à
l’autre ; est exigée également une prière adressée à des spiritus benignissimi.
70
Sur ce texte, cf. Jean-Patrice BOUDET, Entre science et nigromance…, p. 145-148 ;
cf. Florence, Biblioteca Medicea Laurenziana, ms. Plut. 89 sup. 38 (fin XVe s.), fol. 211-
231v°, not. fol. 213v° : Notum sit omnibus presentem anulum habentibus quod cum omni
dilligentia, munditia, reverentia ac veneratione custodire debet (…). Si vero deferens
regalem vel imperialem curiam frequentaverit vel cujuslibet maxime auctoritatis et de
primis erit et sepissime probavimus quod gratiam preamittis obtinebit in oculis suis et
verbum suum prevalebit in omni judicio, et ministrat facundiam et dulce eloquium recor-
dationem commemorat.

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336 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

catalogues de démons qui ne proposent des esprits malins spécialisés


dans cette fonction71.
Cependant, s’il est un texte pour lequel l’amour, la faveur et l’honneur
sont importants, c’est bien la Necromantia conservée dans le manuscrit
italien 1524 de la Bibliothèque nationale de France, daté de 1446, en
laquelle Jean-Patrice Boudet et Florence Gal voient la commande d’un
aristocrate milanais72. Dans un texte où la quête de l’amour prédomine,
on recense pas loin d’une vingtaine d’experimenta, en général assez
courts, permettant de favoriser la vie sociale. Les objectifs sont parfois
assez généraux et peuvent convenir à diverses situations : il s’agit de
gagner la bienveillance, d’être honoré de tous, ou encore d’apparaître
beau parleur ou bon rhéteur, mais ils peuvent être davantage centrés sur
la vie de cour ou la relation avec un seigneur, comme lorsqu’il s’agit de
faire qu’un grand dignitaire rêve de vous ou d’un tiers73, d’être loué ou
honoré par un puissant74, de préparer son entrée chez un prince75 ou d’ob-

71
J.-P. BOUDET, « Les who’s who démonologiques de la Renaissance et leurs ancêtres
médiévaux », dans Médiévales, n° 44, 2003, p. 117-140. Le Livre des esperitz attribue cet
office aux démons Abugor [18] et Samon [42]. Ajoutons que l’un des démons familiers
(Belsebuth) du juif converti Jean de Bari, médecin de profession, condamné au feu le
30 mars 1443, à Briançon, par le juge-mage du Briançonnais Claude Tholosan, avait pour
fonction d’attirer la faveur des princes sur son maître ; cf. Jean MARX, L’Inquisition en
Dauphiné. Étude sur le développement et la répression de l’hérésie et de la sorcellerie du
XIV s. au début du règne de François I , Paris, É. Champion, 1914 (Bibliothèque de
e er

l’École des hautes études. Sciences philologiques et historiques, 206) [réimpr. anast.,
Marseille, Laffitte, 1978], p. 45-47 et (p. j.) 218-228.
72
Ce manuscrit, découvert par Jean-Patrice Boudet en 1999, a été transcrit et étudié
par Florence Gal en vue d’une future édition critique à paraître chez La Finestra Editrice
(en collab. avec V. Perrone Compagni) ; cf. Florence GAL, La Magie dans un manuel
italien du milieu du XVe siècle, mémoire de D.E.A., Université de Paris X – Nanterre, 2002
[désormais GAL].
73
GAL, t. II, p. 27; BnF, ms. ital. 1524, fol. 77v°, § 22: Volendo fare ch’alchun prencipe
s’insonnii d’alchuna persona, ne l’hora dil Sole, in la prima faccia di Leone, sendo la Luna
in Aquario, fia l’imagine di cera virgine in nome di quel prencipe che tu vuoi, et scriveli sopra
il nome di quella persona di cui si debba insogniarsi quel prencipe, o vero in buona on in
mala parte, et fagli li caratteri di Mercurio et metteli sotto il letto a quel gran maestro, o capi-
taneo, o prencipe, o prelato, o come si vuoglia di gran dignitate; la qual imagine finché gli
starà sotto il letto a cquel signore sempre insonniarassi di quella persona. Ma mentre si fa
l’imagine, i nomi dilla Luna e di Mercurio non taciere con sufficiente conjuratione.
74
GAL, t. II, p. 40 ; BnF, ms. ital. 1524, fol. 87, § 64 : Volendo esser ben receuto et
honorato maximamente da prencipe, scrive questo psalmo Quarum dilecta [Ps 83], et
ligalo al braccio dritto, e porta teco quando vai al prencipe.
75
GAL, t. II, p. 37 ; BnF, ms. ital. 1524, fol. 85v°, § 48 : Volendo intrar in qualche
citta, o ver ad alchun prencepe, legge questo psalmo entrando Domine quis habitabit [Ps
14], et scrive l’infraposte carrateri et porta teco, e sarai ben receputo [suivent les carac-
tères magiques].

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JULIEN VÉRONÈSE 337

tenir des faveurs76. Loin d’être démoniaques, ces opérations consistent en


général à utiliser les vertus conjuguées de psaumes et de petits signes
magiques. Ainsi faut-il pour être bien reçu d’un grand seigneur ou d’un
prince, écrire sur une lame de verre ou de fer le psaume 111 Confiteor tibi
Domine accompagné d’une série de petits caractères magiques, frotter la
surface avec de l’huile, puis s’enduire le visage de la mixture avant de se
présenter77. Dans un cas78, porter sur soi un psaume inscrit sur un support
quelconque suffit, ce qui rejoint les prescriptions d’un opuscule présent
dans le même manuscrit, intitulé Virtuti di psalmi, medicine, necroman-
tia, et molt’altre cose79. En revanche, pour qu’un prince, un capitaine ou
un prélat rêve de vous ou d’un tiers en bien, il faut fabriquer sous le signe
du Lion une image de cire à son nom, écrire sur la statuette le nom de la
personne à laquelle on veut que la cible songe, la disposer sous son lit et
favoriser ainsi un véritable processus d’incubation, ce qui est proche dans
son principe des prescriptions du Liber Lune80.

La gamme des artifices offerts par la tradition magique (au sens large)
pour être bien en cour et gagner les faveurs d’un roi ou d’un puissant est
donc, comme on le voit, très étendue, et la distinction entre magie astrale
et magie rituelle tendit à s’estomper de plus en plus au fil du temps, en
particulier au XVe siècle. Il faut toutefois, en guise de conclusion, replacer
ces experimenta dans leur contexte : la recherche du pouvoir ou de

76
GAL, t. II, p. 41 ; BnF, ms. ital. 1524, fol. 88, § 72 : Volendo da ciaschuna persona,
o maschio o femina, la gratia che tu domandi impetrar, scrive queste carratti in carta
virgine et porta la teco. L.h.con g h q g C q q h p. ; GAL, t. II, p. 163 ; BnF, ms. ital. 1524,
fol. 112v°, § 163 : Ad impetrar gratia. Scrive queste carratteri in la man sinestra e teco
porta [suivent les caractères].
77
GAL, t. II, p. 37 ; BnF, ms. ital. 1524, fol. 85, § 44 : Volendo andar avanti a qualche
gran signore o prencipe, scrive tutto questo psalmo Confiteor tibi Domine in lammia di
vitro o di ferro con le caratteri infrascritte, et poi guastale con olio rosato, et di quello
olio la tua faccia unge, et serai ben receputo [suivent les caractères]. L’onction du visage
n’est pas sans rappeler la recette du Picatrix évoquée n. 56.
78
Cf. n. 74 supra.
79
GAL, t. II, p. 98-136 ; BnF, ms. ital. 1524, fol. 138-161v°, notamment les experi-
menti § 6, 32, 33, 36, 82, 85, 109 (2), 116, 159, 172, 192 et 201. Sur l’emploi de psaumes
en contexte magique, cf. Martin MORARD, « Le Psautier enchanté. Fonctions magiques et
thérapeutiques de la psalmodie médiévale », dans Le Pouvoir des mots au Moyen Âge.
Actes du colloque international, Lyon, 22-24 juin 2009, à paraître.
80
Cf. n. 73 et 42 (Liber Lune) supra. Pour des experimenta visant à solliciter un rêve
« efficace », cf. J. VÉRONÈSE, « Le rêve sollicité. Un thème de la magie rituelle médié-
vale », dans Sociétés & Représentations, n° 23, 2007, p. 83-103.

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338 LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER LES FAVEURS DES GRANDS

l’amour d’un grand est loin d’être, sur le plan quantitatif, le premier
mobile de ces sources81. Autrement dit, si la magie savante tendait à
gagner au fil du temps les élites laïques, il n’y avait pas, au-delà d’entre-
prises de traduction en langues vulgaires et hormis peut-être dans le cas
de la necromantia italienne, de véritable signe d’une adaptation de ses
finalités à un public strictement curial ou aristocratique.

Julien VÉRONÈSE

81
Pour ce qui concerne la « nigromancie », cf. J.-P. BOUDET, Entre science et nigro-
mance…, p. 359-375.

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TABLE DES MATIÈRES

Philippe CONTAMINE (Institut de France)


PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

Murielle GAUDE-FERRAGU (Université Paris-Nord 13), Bruno


LAURIOUX (Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines)
et Jacques PAVIOT (Université Paris-Est Créteil)
INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

PREMIÈRE PARTIE
L’ORGANISME CURIAL :
RÉGULATION, CIRCULATION DES MODÈLES, LOCALISATION

Élisabeth LALOU (Université de Rouen – Haute-Normandie)


LES ORDONNANCES DE L’HÔTEL
(DÉBUT DU XIVe SIÈCLE) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Xavier HÉLARY (Université Paris – Sorbonne)


LA COUR DE PHILIPPE III (1270-1285) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

Armand JAMME (CNRS)


LE MAÎTRE DE L’HÔTEL DU PAPE. ENTRE IMITATIONS FRANÇAISES,
NÉCESSITÉS CURIALES ET FANTAISIES PONTIFICALES
(XIVe-XVe SIÈCLE) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

Eva PIBIRI (Université de Lausanne)


LE PERSONNEL DIPLOMATIQUE D’AMÉDÉE VIII DE SAVOIE
ENTRE FRANCE ET BOURGOGNE AU TEMPS DE LA GUERRE
DE CENT ANS (1410-1440) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81

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656 TABLE DES MATIÈRES

Luisa Clotilde GENTILE (Turin)


D’UN VERSANT À L’AUTRE DES ALPES. LES COURS PRINCIÈRES
D’ITALIE NORD-OCCIDENTALE ET LA COUR DE FRANCE . . . . . . . . . . . 95

Pierre SAVY (Université Paris-Est – Marne-la-Vallée)


LA COUR DE MILAN DANS LA SOCIÉTÉ POLITIQUE ET LE SYSTÈME
DES COURS DE L’ITALIE DU QUATTROCENTO . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

Philippe PLAGNIEUX (Université de Franche-Comté)


LA RÉSIDENCE PARISIENNE DE JEAN SANS PEUR.
UN PALAIS POUR LA RÉFORME DU ROYAUME . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

Jean CHAPELOT (CNRS)


L’HÔTEL DU ROI À VINCENNES : CHARLES V DANS SON LOGIS . . . . . 145

Boris BOVE (Université Paris 8 – Vincennes – Saint-Denis)


À LA RECHERCHE DES HÔTELS PRINCIERS DE PARIS :
UN INVENTAIRE IMPOSSIBLE ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

DEUXIÈME PARTIE
LA SOCIÉTÉ DE COUR : VIE, ORDRE ET CRITIQUE

Thalia BRERO (Université de Lausanne)


LE MYSTÈRE DE LA CHAMBRE VERTE.
LES INFLUENCES FRANÇAISES DANS LE CÉRÉMONIAL BAPTISMAL
DES COURS DE SAVOIE ET DE BOURGOGNE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195

Sarah FOURCADE (Université Paris – Sorbonne)


LA COUR, ESPACE DE L’ÉDUCATION PRINCIÈRE ET NOBILIAIRE
À LA FIN DU MOYEN ÂGE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

Anne-Hélène ALLIROT (Université Paris-Ouest – Nanterre – La Défense)


LES MARIAGES ROYAUX À LA COUR DE FRANCE, ENTRE FASTE ET
DISCRÉTION (DU RÈGNE DE SAINT LOUIS À CELUI DE CHARLES V) . . 231

Pauline MOIREZ (Archives nationales)


COMMENT EXPLIQUER L’ATTRAIT DES OFFICES DE BOUCHE
À LA COUR DE FRANCE AU XIV SIÈCLE ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243
e

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TABLE DES MATIÈRES 657

Yann MOREL (Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines)


L’OFFICE DE BOUCHE À LA COUR DE BOURGOGNE
DE LA FIN DU XIV À LA FIN DU XV SIÈCLE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
e e

Jacques PAVIOT (Université Paris-Est Créteil)


ORDRES, DEVISES, SOCIÉTÉS CHEVALERESQUES ET LA COUR,
VERS 1400 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271

Laurent HABLOT (Université de Poitiers)


LE DOUBLE DU PRINCE. EMBLÈMES ET DEVISES À LA COUR :
UN OUTIL POLITIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281

Frédérique LACHAUD (Université Paul Verlaine – Metz)


LA FIGURE DU CLERC CURIAL DANS L’ŒUVRE
DE JEAN DE SALISBURY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 301

Julien VÉRONÈSE (Université d’Orléans)


LES « RECETTES MAGIQUES » POUR S’ATTIRER
LES FAVEURS DES GRANDS (XII -XV SIÈCLE) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 321
e e

Mireille VINCENT-CASSY (Université Paris 7 – Denis Diderot)


LES PÉCHÉS DE LA COUR DE CHARLES VI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 339

Laura KENDRICK (Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines)


TROMPES ET TROMPERIE À LA COUR
D’APRÈS EUSTACHE DESCHAMPS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 359

TROISIÈME PARTIE
LA COUR, MODÈLE CULTUREL : PIÉTÉ, ARTS ET LITTÉRATURE

Murielle GAUDE-FERRAGU (Université Paris-Nord 13 – Institut universi-


taire de France)
LE PRINCE ET LES RESTES SAINTS :
LE CULTE DES RELIQUES À LA COUR (1369-1416) . . . . . . . . . . . . . . . 377

Étienne ANHEIM (Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines)


LA CHAPELLE DU ROI DE FRANCE DU MILIEU
DU XIII À LA FIN DU XIV SIÈCLE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 399
e e

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658 TABLE DES MATIÈRES

Rose-Marie FERRÉ (Université Paris – Sorbonne)


LES RELATIONS ARTISTIQUES ENTRE LA COUR DE RENÉ D’ANJOU
ET LA COUR DE FRANCE (CHARLES VII – LOUIS XI).
JALONS ET PERSPECTIVES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 417

Ludovic NYS (Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis)


« ALANT DE VALENCIENNES … A PARIS AS JUIAULZ ».
LE HAINAUT ET LA FRANCE SOUS LES DERNIERS CAPÉTIENS ET
PHILIPPE VI DE VALOIS. CADEAUX, TROUSSEAUX ET CASSETTES . . . 433

Isabelle GUYOT-BACHY (Université Paris-Est Créteil)


LES COURS PRINCIÈRES ET LA PROMOTION DE L’ÉCRITURE
DE L’HISTOIRE DANS LE ROYAUME DE FRANCE (XII -XV SIÈCLE) . . . . 451
e e

Guido CASTELNUOVO (Université de Savoie – Chambéry)


LA COUR ET SES MISES EN SCÈNES DANS
LES CHRONIQUES SAVOYARDES DU XV SIÈCLE . . . . . . . . . . . . . . . . . 469
e

Francine MORA (Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines)


LA MISE EN SCÈNE DE LA CULTURE DE COUR DANS
LE ROMAN DE LA VIOLETTE DE GERBERT DE MONTREUIL . . . . . . . . . 483

Jean-Patrice BOUDET (Université d’Orléans)


LA BIBLIOTHÈQUE DE CLÉMENCE DE HONGRIE :
UN REFLET DE LA CULTURE D’UNE REINE DE FRANCE ? . . . . . . . . . . . 499

Isabelle HEULLANT-DONAT (Université de Reims – Champagne-Ardenne)


LA COUR DES ANGEVINS DE NAPLES
SOUS LA PREMIÈRE MAISON D’ANJOU (1268-1382) . . . . . . . . . . . . . 515

Agostino PARAVICINI BAGLIANI (Universitéde Lausanne)


CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 533

OUVRAGES DE RÉFÉRENCE ET SOURCES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 545

BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 569

INDEX DES NOMS DE PERSONNE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 635


INDEX DES NOMS DE LIEU . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 649

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La cour princière est un thème privilégié par les historiens
depuis quelques années car il fait se rencontrer histoire politique,
histoire sociale et histoire culturelle. Dans ce renouvellement des
recherches et des approches, la cour de France au Moyen Âge est
restée le parent pauvre. Or, à partir du XIIIe siècle, s’y sont mises en
place des structures, comme celle de l’hôtel avec ses offices, mais
aussi un cérémonial et des rituels concernant aussi bien le
baptême et les noces que les funérailles.
Dans quelle mesure les solutions qui ont alors été adoptées ont-
elles rencontré des échos dans les autres cours européennes ?
Quelles ont été les adaptations que le modèle français a connues à
mesure qu’il se diffusait, dans un jeu constant et complexe
d’interactions ? Telles sont les principales questions auxquelles ce
volume entend répondre.
L’approche est globale, puisqu’elle envisage la cour
successivement comme un organisme, comme une société et
comme une référence culturelle. Sont ainsi examinés aussi bien les
ordonnances de l’hôtel que les traités dénonçant la vie de cour, les
rites de passage que les pratiques alimentaires, la mise en ordre par
des cérémonials que les bâtiments et la vie artistique. Et ceci sur une
longue durée, du XIIe siècle au premier Âge moderne, et dans une
démarche résolument pluridisciplinaire, associant historiens,
spécialistes de la littérature, archéologues et historiens d’art.

ISBN 978-2-7453-2244-9

Études d’Histoire médiévale N o 13


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