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LA PHILOSOPHIE

ANGLAISE ET AMÉRICAINE
DU MÊME AUTEUR

L'alchimie, coll. « Que sais-je ? », n° 506.


Les sociétés secrètes, coll. « Que sais-je ? », n° 515.
Les gnostiques, coll. « Que sais-je ? », n° 808.
Adaptation française de : E. Royston PIKE, Dictionnaire des religions,
P.U.F.
Les alchimistes (en collaboration avec M. CARON), Editions du Seuil
(coll. « Le Temps qui court »).
Les Francs-Maçons (même collection).
Ars Magna : Marc Eemans, peintre et poète gnostique (en collabora-
tion avec F.-M. HUEBNER), Paris (Galerie «Le Soleil dans la tête »),
1959.
Les disciples anglais de Jacob Boehme au X V I I et au X V I I I siècle,
Editions Denoël, 1960.
Histoire mondiale des sociétés secrètes, Club des Amis du Livre, 1959.
Les civilisations inconnues, Arthème Fayard, 1961.
Histoire des Rose-Croix, Le Courrier du Livre, 1962.
Jos De Cock (en collaboration avec René HÉRON DE VILLEFOSSE),
Knokke le Zoute (Belgique), 1962.
Voyages vers ailleurs, Arthème Fayard, 1962.
Robert Fludd, alchimiste et philosophe rosicrucien, Omnium littéraire,
à paraître.
Henry More (1614-1687), Essai sur les doctrines théosophiques chez
les platoniciens de Cambridge, Georg Olms Verlag (Hildesheim),
1965.
Paracelse : l'homme, le médecin, l'alchimiste (en collaboration), « La
Table Ronde », 1966.
Commentaires sur le « Mutus Liber », Le Lien (Maizières-lès-Metz),
1966.
Les prophéties de Nostradamus, Pierre Belfond, 1966.
Anatomie d'un fabuleux espoir : l'immortalité physique dans les
traditions et devant la science, Le Lien (Maizières-lès-Metz), 1969.
Histoire de l'astrologie, Marabout-Université, 1970.
« QUE SAIS-JE? »
LE POINT DES CONNAISSANCES ACTUELLES
N° 796

LAPHILOSOPHIE
ANGLAS
IEETAMÉRC
IANIE
par
Serge HUTIN
Docteur ès Lettres
Diplômé de l'Ecole pratique des Hautes Etudes
Ancien attaché de recherches au C.N. R. S.

TROISIÈME ÉDITION MISE A JOUR

PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE


108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, PARIS
1971
VINGT-DEUXIÈME MILLE
Dépôt légal. — 1 édition : 4e trimestre 1958
3 édition : 1 trimestre 1971
Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation
réservés pour tous pays
© 1958, Presses Universitaires de France
INTRODUCTION
Ce petit livre n'a d'autre prétention que de
permettre au grand public de prendre un premier
contact avec les principaux représentants de la
pensée anglo-saxonne.
Nous avons voulu avant tout être aussi clair et
aussi objectif que possible.
Ceux qui désireraient entreprendre des recherches
plus approfondies trouveront, outre une biblio-
graphie générale, l'indication (en note) de quelques
monographies importantes.
La première partie est consacrée à l'histoire des
idées dans les Iles britanniques (Angleterre, Ecosse
et Irlande), la seconde à la pensée américaine —qui
est loin d'être une simple ramification de la philo-
sophie anglaise.
Nous avons, autant que possible, suivi l'ordre
chronologique, et réparti les philosophes à l'intérieur
de « grandes périodes ». Le lecteur ne doit pour-
tant pas prendre ces divisions à la lettre : elles
sont uniquement un moyen commode d'exposition
logique, et ne correspondent pas à des « ères »
rigoureusement séparées. Il ne faut jamais oublier
qu'un courant philosophique ne « disparaît » pas
brusquement pour laisser la place à un autre : c'est
du vivant même d'un philosophe que ses idées
commencentàfaire l'objet d'attaques et de critiques.
PREMIÈRE PARTIE
LA PHILOSOPHIE BRITANNIQUE
CHAPITRE PREMIER
LES ORIGINES
I. —Le haut Moyen Age
Le premier penseur britannique dont l'histoire
a gardé le souvenir n'est autre que le fameux
moine Pélage (début du V siècle) : contre saint
Augustin, il défend la liberté humaine, capable
—selon l'hérésiarque —de parvenir au salut sans
l'intervention de la grâce divine.
Nous trouvons ensuite deux noms illustres :
Alcuin (735-804), dont la renommée érudite lui
vaudra d'être appelé sur le Continent par l'empereur
Charlemagne ; Alfred le Grand, auteur d'une
traduction anglo-saxonne de la Consolation de
Boëce.
L'Irlande donnera, au IV siècle, le mystérieux
Jean Scot Erigène (vers 813-880), auteur du De
divisione Naturae et d'autres traités.
Sous l'influence des traités du pseudo-Denys
l'Aréopagite, Erigène interprète les dogmes chré-
tiens à l'aide d'une exégèse symbolique de type
néo-platonicien, ce qui lui permet d'exposer une
grandiose métaphysique émanatiste : tout est sorti
de Dieu ; et, par un processus inverse, tout ira se
perdre dans la Divinité.
II. — La scolastique
La scolastique, c'est-à-dire la philosophie latine
enseignée dans les grandes Universités européennes
du Moyen Age, n'est pas spécifiquement italienne,
française, allemande ou anglaise ; c'est vraiment
l'époque de la «Chrétienté »supérieure aux cultures
nationales et répandue par une langue véhiculaire
savante : le latin (cen'est qu'au XVIsiècle,d'ailleurs,
qu'apparaîtra une philosophie de langue anglaise).
Les penseurs de cette longue période sont tous —à
quelques exceptions près (1) — des théologiens
professeurs.
Saint Anselme de Cantorbéry (1033-1109) est le
premier des grands docteurs scolastiques, mais ce
n'est pas — notons-le pour réfuter une erreur
souvent commise par les étudiants — un Anglais
d'origine : natif d'Aoste, en Italie, il ne devient
primat d'Angleterre qu'en 1093.
Sur le problème des universaux, il adopte le
«réalisme »platonicien : les idées générales ont une
existence indépendante des choses et des individus
particuliers ; elles sont les véritables «exemplaires »
des choses. A ce réalisme décidé se rattache l'argu-
ment dit ontologique, qui fait découler l'existence
de Dieu de la définition même de la Divinité : l'être
tel qu'on n'en peut concevoir de plus grand. « Ce
bien tel qu'on ne peut en concevoir de plus grand
ne peut exister seulement dans l'intellect : car alors,
nous fait remarquer saint Anselme, on en pourrait
concevoir un autre plus grand que celui-là, à savoir
celui qui ne serait pas seulement dans l'intelligence,
mais en réalité. »
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Au début du XII siècle, l'Anglais Adélhard de
Bath donne une solution «conceptualiste »au pro-
blème des universaux : l'universel est créé par
abstraction, car l'homme ne peut apercevoir, ici-
bas, l'intelligible que dans l'individuel ; mais l'in-
telligible existe dans l'esprit divin.
Le XIII siècle voit, chez les scolastiques anglais,
le développement et la systématisation des dispu-
tationes logiques et théologiques (chez Alexandre
de Halès, qui occupera de 1232 à 1238 ou 1239 la
première chaire parisienne de théologie accordée
aux Frères gris ; chez William Shyreswood, mort
en 1249) ; on assiste même à des essais de vulgari-
sation scientifique et technique (encyclopédie de
Barthélemy l'Anglais).
Mais on constate, à l'Université d'Oxford, le
développement d'un courant d'idées tout différent
de l'aristotélisme systématisé vers la même époque
par saint Thomas d'Aquin : chez les penseurs de
cette tendance, le goût des sciences de la Nature
s'allie étroitement à une tradition théologique
plus ou moins platonicienne et augustinienne de
tendance. C'est ainsi que Robert Grosseteste,
chancelier de l'Université d'Oxford puis évêque de
Lincoln, professe une aventureuse métaphysique de
la lumière, qui fait étrangement songer l'historien
contemporain à certaines théories cosmologiques
récentes sur l' «expansion de l'univers »; il combine
des préoccupations déjà scientifiques à des envolées
grandioses rappelant celles de Jean Scot Erigène.
John Peckham, qui sera archevêque de Canter-
bury de 1279 à 1292, est connu par ses travaux
d'optique et par sa lutte contre le thomisme. Mais
le plus illustre Oxfordien de cette tendance «expé-
rimentale »est le célèbre Franciscain Roger Bacon
(1214-1294).
Comme son futur homonyme, le moine Bacon
critique le règne du principe d'autorité et de la
syllogistique : « Le raisonnement, nous dit-il, ne
peut distinguer le sophisme de la démonstration à
moins d'être vérifié dans ses conclusions par les
œuvres certificatrices de l'expérience. »
Son souci de l'observation, de l'expérience déjà,
du concret va jusqu'à en faire, contre les autres
théologiens, l'intrépide champion de l'alchimie et
de l'astrologie. Roger Bacon n'est pourtant pas,
bien au contraire, un adversaire de la tradition
augustinienne (il considère d'ailleurs la philosophie
commele résultat d'une sorte d'illumination divine) ;
on peut, sans trop de paradoxe, le rapprocher d'un
autre Franciscain de formation oxfordienne :
l'Ecossais Jean Duns Scot (vers 1265-1304).
Pour Duns Scot, la volonté est supérieure à l'in-
telligence ( Voluntas est superior intellectu) : les vé-
rités de la foi ne peuvent être démontrées avec
certitude ; c'est par libre adhésion que l'esprit les
accepte. La liberté divine, elle, est absolue : Dieu
aurait pu créer le monde tout autre qu'il n'est ; il
aurait pu ne pas le créer ; il aurait même pu créer
d'autres règles du vrai et du bien, car la Divinité
est supérieure aux vérités éternelles qu'elle crée.
Dieu peut tout faire, sauf, évidemment, ce qui
impliquerait contradiction.
Autre théorie scotiste : il ne faut pas admettre
de différence réelle entre l'existence et l'essence ; il
n'y a pas de moyen terme entre l'existence et le
néant. Duns Scot propose aussi une solution ori-
ginale au problème de la connaissance : ce qui est
premier, c'est la perception immédiate des individus
singuliers ; l'haeccéité est une détermination posi-
tive, intelligible et irréductible.
Parmi les disciples de Duns Scot, nous ne citerons
que Thomas Bradwardine, maître à l'Université
d'Oxford, mort en 1349. Ce théologien en arrivera
àposerla volonté divine comme cause non seulement
suffisante, mais en quelque manière nécessitante,
des actes volontaires humains : ce « déterminisme
théologique » sera fait sien par le réformateur
Wycliffe (mort en 1384).
Guillaume d'Ockham (vers 1270-1349) est, lui
aussi, un Franciscain formé à Oxford.
Ce docteur scolastique a développé une théorie
nominaliste de la connaissance : il n'y a pas d'autre
réalité, pas d'autre unité que l'individu concret ;
l' « universel », l'idée générale n'est qu'un signe
naturel des choses, un symbole qui remplace dans
l'esprit la multiplicité des êtres singuliers auxquels
il peut être attribué. Chez Ockham, la philosophie
tend à se réduire purement et simplement à la
logique formelle : les idées générales (universaux)
sont de pures abstractions fixées dans les mots ;
il s'agira uniquement d'unir de manière correcte
les termes du langage (1).
III. — L'humanisme
Dès la fin du XV siècle, l'humanisme pénètre en
Grande-Bretagne, où il trouve un terrain favorable
dans une partie de l'élite intellectuelle (2).
Le chancelier Thomas More (en latin Morus),
amiintime d'Erasme —lequel donnera, ne l'oublions
pas, une série de cours àl'Université deCambridge —
publie en 1516 son Utopia (la traduction anglaise,
posthume, paraîtra en 1551).
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L'Utopie décrit une société idéale inspirée de la
République platonicienne, mais où se retrouve aussi
l'écho des merveilleux récits des grands navigateurs.
Pourtant, il ne s'agit plus, comme c'était le cas
chez Platon, de faire le bonheur d'une élite de
philosophes, de dirigeants, mais celui de la masse :
Th. More est déjà un théoricien collectiviste. Karl
Marx admirait d'ailleurs Morus comme un précur-
seur, et son enthousiasme est passé à ses disciples :
l' Utopie est l'un des « classiques » philosophiques
les plus souvent réédités en U.R.S.S.
Morus réhabilite, contre l'ascétisme chrétien, les
sens, qui révèlent à l'homme les merveilles de la
Nature. Apôtre de la tolérance, il croit en la bonté
naturelle de l'homme. Parmi les humanistes anglais
contemporains de Sir Thomas More, nous ne cite-
rons que deux autres amis d'Erasme : Warham
et Colet.
La fin du XVI siècle sera marquée par le déve-
loppement croissant des influences étrangères : à
Cambridge, Temple s'efforce de substituer la logique
de Ramus à celle d'Aristote ; Giordano Bruno,
venu en Angleterre en 1583, pourra même enseigner
pendant un certain temps ses doctrines panthéistes
à l'Université d'Oxford.
En même temps, on voit se développer la philo-
sophie politique : George Buchanan —précepteur
de Jacques VI d'Ecosse (le futur Jacques I d'An-
gleterre) —publie un traité (De jure Regni apud
Scotos, 1579), où il pose des limites au principe de
l'autorité royale.
Parmi les nombreux livres suscités par l'inter-
minable controverse entre Puritains et Anglicans
sur l'organisation ecclésiastique, nous citerons les
Laws of Ecclesiastical Polity (1594 et 1600), où
Richard Hooker fait appel à la tradition aristo-
1971. —Imprimerie des Presses Universitaires de France. —Vendôme(France)
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