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INTRODUCTION

Le Moyen Âge est généralement situé par les historiens entre le VI e et le XVe siècle.
C’est donc la période qui va de la chute de l’Empire romain d’occident en 476 jusqu’à la prise
de Constantinople par les Ottomans en 1453. Pendant cette période, si l’Occident latin ne
connaît qu’une très faible activité philosophique, la pensée grecque continue de se développer
du côté de Byzance, malgré la fermeture, en 529, des écoles philosophiques d’Athènes 1. Ce
n’est que vers le XIIe siècle que grâce aux travaux des philosophes arabe et juif Averroès et
Maïmonide que les occidentaux qui jusque là étaient lésés, découvriront l’œuvre d’Aristote.
La philosophie médiévale sera fortement marquée par l’élan vers le divin, la quête de Dieu.
Cela peut sembler assez normal puisque c’est également la période où en Occident, l’Eglise
supervise la pensée intellectuelle. Cependant, il ne faudrait pas croire que c’est une
philosophie exclusivement théologique, encore moins uniquement chrétienne. Non ! Il s’agit
en fait d’un moment important de l’histoire de la philosophie où la philosophie païenne de
l’Antiquité vient entrer en contact avec trois religions monothéiste que sont le judaïsme, le
christianisme et l’islam2. Au cours de cette période de l’histoire de la philosophie, il y’aura un
grand débat sur le rapport entre foi et raison. Le problème des universaux ne sera pas non plus
en reste. Par rapport à ces deux problèmes majeurs de la philosophie médiévale, plusieurs
auteurs ont déployé leurs pensées, et parmi eux, Guillaume d’Ockham. C’est sur philosophe,
logicien et théologien anglais, membre de l’ordre des franciscains, que sera basé notre travail.
Il s’agira pour nous de présenter sa biographie, sa pensée et quelques uns de ses adeptes. Nous
ne manquerons pas à coup sûr de porter un jugement sur sa pensée.

I- BIOGRAPHIE

1
ROUX-LANIER C., BESNIER J.-M., JOLLY J.-J., PIMBE D., TROUSSON A. (dir.), Le temps des
philosophes, Paris, Hatier, 1995, p 130.
2
Idem.
13
Guillaume d’Ockham ou Occam (les deux écritures sont correctes. Ockham est le
nom de sa ville d’origine au sud-ouest de Londres et est parfois francisé, ce qui donne Occam.
Toutefois la Bibliothèque Nationale de France préfère la forme Ockham) est né vers 1290
dans le comté de Surrey. Il est encore assez jeune lorsqu’il entre dans l’ordre des franciscains.
Il fera ses études à Oxford, et y devient en 1318-1319 bachelier sententiaire 3. Malgré ses
études, il n’aura jamais la possibilité d’enseigner la théologie en tant que maître : il va donc
rester candidat à la maîtrise pendant près de quatre ans, sans jamais l’obtenir. C’est à cause de
cela qu’on lui donnera le surnom de Venerabilis inceptor (vénérable initiateur)4. En 1324,
Ockham est convoqué à Avignon devant le pape Jean XXII à cause de certaines de ses
productions jugées dangereuses. Il est dès lors appelé à se rendre à Avignon pour se défendre.

S’étant rendu à Avignon, il sera confronté à deux principaux problèmes qui seront
d’une importance décisive pour son existence, et, naturellement, pour sa pensée. Le premier
problème concernait le conflit de pouvoir entre le pape Jean XXII et l’empereur Louis IV de
Bavière. Le second, qui avait proclamé la primauté du pouvoir temporel sur le pouvoir
spirituel, s’était vu excommunier par le souverain pontife qui lui était plutôt d’avis contraire.
Le second problème opposait encore le pape à l’ordre des franciscains cette fois-ci au sujet de
la pauvreté du Christ5. Guillaume d’Ockham va donc se joindre à la fraction des franciscains
qui, s’opposant au pape, luttaient en faveur de la pauvreté telle que l’avait voulue leur
fondateur. Il sera notamment associé au juriste Bonagrazia et à Michel de Césène (Michele Da
Cesena en italien), le Ministre Général de l’Ordre des Frères Mineurs. Dans ce combat, ils se
feront les alliés de l’empereur Louis IV de Bavière dont le pape Jean XXII contestait la
désignation comme empereur. Ockham trouvera donc refuge auprès de l’empereur à qui il se
serait adressé en ces termes : « O Imperator, defende me gladio et ego defendam te verbo »
(« défends moi par l’épée, et moi je te défendrai par la parole »)6. Ockham sera lui aussi
excommunié, après que Michel de Césène le soit, le 20 avril 1329 7. Après la mort de Michel
en 1342 Guillaume d’Ockham a été désigné pour lui succéder comme ministre général de
l’Ordre des Frères Mineurs. Après avoir tenté de se réconcilier avec la curie romaine

3
Alain De LIBERA, Philosophie médiévale, p. 429.
4
Jeannine QUILLET in Encyclopedia Universalis, corpus 16, p 761.
5
Alain De LIBERA, op. cit., p. 429.
6
fr.wikipedia.org /wiki/Guillaume_d’ Ockham.
7
Idem
13
(probablement sans succès), il mourut entre 1347 et 1349 lors de l’épidémie de peste noire qui
ravage Munich8.

Si l’enseignement de la doctrine d’Ockham a été interdit aussi bien en public qu’en


privé, tout comme son nom dans quelque cours ou conférence que ce soit, l’ockhamisme a
néanmoins connu un grand succès. Il a produit bon nombre d’ouvrages importants ; dont le
commentaire des sentences ; les traités sur la prédestination ; traité De l’interprétation
d’Aristote ; traité De Dogmatibus Johannis XXII papae, où il déclare le pape hérétique ; les
Allegationes de potestate imperiali où il prend la défense du décret impérial qui stipule que
l’élection suffit à faire l’empereur, sans la consécration du pape 9. Ces deux derniers ouvrages
reflètent parfaitement la pensée politique de Guillaume d’Ockham qui, durant sa vie, va
énormément se battre pour la séparation entre le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir d’Etat.
C’est notamment pourquoi il s’oppose en collaboration avec l’empereur au pouvoir suprême
du pape.

Ce bref aperçu de la vie du philosophe et moine anglais présenté, il nous importe


donc désormais d’entrer de plein fouet dans la pensée de Guillaume d’Ockham.

II- LA PENSEE DE GUILLAUME D’OCKHAM

Si Guillaume d’Ockham s’est beaucoup intéressé à la politique et à d’autres dont la


théologie, sa pensée s’est remarquablement déployée par rapport à la querelle des universaux.

A/ LA QUERELLE DES UNIVERSAUX

1- Présentation des universaux

La querelle des universaux constitue l’un des grands domaines sur lesquels se sont
penchés les philosophes du moyen âge. Le problème des universaux apparaît comme étant le
symbole même de la pensée du XIV e siècle10. Les universaux relèvent d’une certaine manière
8
Idem
9
Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Age, Paris, Editions Albin Michel, 1937 et 1971, p. 345.
10
Alain De LIBERA, op. cit., p. 435.
13
à la fois de la linguistique, mieux, la philosophie du langage, et de la métaphysique. Les
universaux sont des idées ou notions globales, de concepts généraux applicables à plusieurs
individus appartenant au même genre ou à une même espèce 11. Vu sous un angle
métaphysique, il s’agit de types de propriétés ayant un caractère universel, au sens où ils
peuvent selon Aristote être dit de « plusieurs », c'est-à-dire conçu comme propre à plusieurs
choses singulières différentes. Les universaux sont en ce sens ce qui est commun à plusieurs
choses. Nous avons par exemple l’humanité qui est l’universel en chaque homme particulier.
Ainsi plusieurs penseurs ne juraient que par les universaux et en faisaient même un moyen sûr
de connaissance.

2- Guillaume d’Ockham et les universaux

Guillaume d’Ockham apparaît comme étant un véritable adversaire des natures


communes12. Il nie catégoriquement l’existence des universaux. Nous nous proposons de
présenter sa pensée sous deux principaux volets : le premier est la doctrine du nominalisme et
le second se réfère au domaine cognitif.

a) LE NOMINALISME

Le terme « nominalisme » vient du latin nominalismus , dérivé de nomen  qui signifie


« nom ». Le nominalisme est une doctrine selon laquelle les idées abstraites et générales n’ont
aucune réalité. Il ne s’agit que de noms, des mots inventés par les hommes13. Comme nous
l’avons précisé quelques lignes plus haut, les universaux, pour Guillaume d’Ockham, n’ont
aucune valeur réelle. Il emploiera d’ailleurs une thèse linguistique, plus précisément sous
l’angle de la sémantique. Cette thèse va allier sémiotique (théorie du signe) et théorie de la
référence. L’universel n’est pas une chose, mais un concept ; le concept lui-même étant un
acte référentiel renvoyant à une pluralité d’objets singuliers. Il n’a donc pas d’existence
objective en tant que pur et simple objet. Son existence est plutôt subjective en tant qu’il
s’agit de quelque chose d’inhérent à l’âme. Il entretient un certain rapport de ressemblance
entre toutes les choses qu’il désigne, présente ou décrit. Le concept universel peut dès lors
être défini comme étant un signe naturel, un terme mental renvoyant à plusieurs choses dans
le langage mental lui-même et auquel le langage parlé et écrit (tous deux conventionnels) se
réfèrent, mieux, sont subordonnés14. Toute cette sémiologie ockhamienne fournit à l’esprit des
11
Denis HUISMAN, Serge LE STRAT, Lexique de philosophie, Paris, Nathan, 2008, P. 176.
12
Alain De LIBERA, op. cit., p. 433.
13
Denis HUISMAN, Serge LE STRAT, op. cit., p. 118.
14
Alain De LIBERA, op. cit., pp. 431-432.
13
éléments, des instruments indispensables pour lui permettre de déclarer ou d’exprimer ce qu’il
sait. Le concept relève de l’intentionnalité et ne peut devenir matériellement signifiant que par
le biais d’un terme. C’est de là que vient le mot « terminisme » que l’on donne à cette
doctrine15. C’est bien plus tard, à la fin du XVe siècle qu’apparut le terme « nominalisme »
pour désigner cette même doctrine 16. Le terme ici n’est pas un simple ébranlement de l’air,
encore moins un langage inné. C’est un signe conventionnel qui peut varier en fonction du
temps et du lieu, et qui, en respectant certains codes linguistiques, peut se substituer à la
chose. La signification proprement dite s’opère lorsque le terme se substitue à une réalité
singulière effectivement existante. C’est ce que les médiévaux (la logique médiévale)
appellent la « supposition personnelle »17.

La pensée d’Ockham ne se limite pas au nominalisme ou au terminisme. Il s’y


prononce également en référence à la connaissance.

b) LES UNIVERSAUX SOUS L’ANGLE COGNITIF

Tout comme Durand de Saint-Pourçain et Pierre d’Auriole, Guillaume d’Ockham


s’oppose à la possibilité d’existence des universaux car pour lui toute existence est déjà
singulière par elle-même. Il nie également l’intellect agent, tout comme la nécessité d’un
principe d’individuation. En effet, étant donné que toute existence est par elle-même
singulière, l’on n’a pas besoin d’un principe d’individuation particulier, puisque toute forme
et toute matière existantes sont clairement et distinctement telles ou telles18.
L’universel est une indétermination. Une lacune dans la perception, dans la
connaissance d’une chose. Lorsqu’une réalité est perçue de façon déterminée telle qu’elle est,
elle est un singulier. Lorsque cette même réalité est perçue de façon indéterminée, elle est
alors un universel. Cependant, la conception universelle ne peut exister ni avant, ni
indépendamment de la conception individuelle. Elle y fait tout simplement suite 19. C’est parce
que j’ai pu saisir plusieurs choses distinctes de façon déterminée et individuelle que je peux
les saisir de façon universelles. Le singulier précède ainsi l’universel qui seul ne vaut rien du
tout.
15
Jeannine QUILLET, op. cit., p. 762.
16
fr.wikipedia.org /wiki/Guillaume_d’ Ockham.
17
Jeannine QUILLET, op. cit., p. 762.
18
Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Age, op. cit., p. 343.
19
Idem.
13
En démontrant que l’universel ne peut que faire suite à l’individuel, Guillaume
d’Ockham provoque en quelques sortes un autre problème : Comment passer de la
connaissance intuitive du singulier à la connaissance des universaux ? La solution qu’il
propose est très simple. Il s’agit de la saisie de la spécificité d’une chose en même temps que
la chose elle-même. La connaissance intuitive d’une chose nous ouvre à la fois au concept
propre de la chose saisie et au concept général lié à l’espèce à laquelle elle appartient. La
connaissance intuitive d’une chose est à la fois empirique et eidétique 20. En voyant la voiture
de monsieur X (la chose singulière), je vois en même temps une voiture (l’espèce).
Comme nous l’avons déjà signalé plus haut, la pensée de Guillaume d’Ockham s’est
déployée de façon très remarquable dans la querelle des universaux. Cependant, le philosophe
et théologien franciscain ne s’y est pas limité.

B/ LES AUTRES DOMAINES DE LA PENSEE D’OCKHAM

1- La politique

La vie de Guillaume d’Ockham va de paire avec sa pensée politique. Comme nous


l’avons dit plus haut, il s’est rangé du coté de l’empereur Louis IV de Bavière pour s’opposer
au pape Jean XXII qu’il qualifiait d’hérétique. Il s’est toujours efforcé de séparer la juridiction
du pape de celle de l’empereur. De même que pour Saint Augustin la cité terrestre doit être
séparée de la cité céleste, pour Ockham le pouvoir religieux et le pouvoir d’Etat ne doivent
pas s’entremêler. Il sera d’ailleurs un précurseur de la sécularisation 21. Le pape voulait, en
plus du pouvoir ecclésiastique, avoir main mise sur le pouvoir temporel. Il fallait par exemple
une consécration de la part du souverain pontife pour que l’empereur soit reconnu comme tel.
Il n’y a pas mélange à faire entre les deux selon le franciscain. Bien plus encore, si le pape est
souverain dans l’Eglise, son autorité ne doit pas se prolonger en dehors d’elle. Elle ne s’étend
pas aux droits des citoyens, encore moins à ceux des empereurs. Guillaume s’oppose à la
toute puissance du pape. Le pape ne peut priver aucun homme de ses libertés, car en matière
de droit, l’homme entretient une relation directe avec Dieu ; et cette relation ne passe pas par
l’intermédiaire de l’Eglise. Cette Eglise dont l’autorité n’est pas le pape mais le concile, doit
seulement s’occuper du volet spirituel, de la destinée surnaturelle de l’homme22.

20
Alain De LIBERA, op. cit., p. 432.
21
fr.wikipedia.org /wiki/Guillaume_d’ Ockham.
22
Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Age, op. cit., p. 346.
13
2- Foi et raison

La séparation faite par Guillaume d’Ockham entre le pouvoir de l’Eglise et celui de


l’Etat se prolongera dans le rapport entre la foi et la raison. En effet, il sépare également et de
façon radicale la foi et la raison. Les deux réalités ne peuvent se rencontrer. Contrairement à
Saint Thomas, il refuse toute hiérarchisation entre philosophie et théologie. La première ne
saurait être la « servante » de la seconde. La raison ne peut pas réellement prouver les vérités
de foi, telles que l’unicité et la toute puissance de Dieu. Les vérités de foi sont inaccessibles à
la raison. Tout comme il est impossible à un aveugle-né de connaître les couleurs, il est
également impossible à la raison d connaître Dieu23. Egalement, la foi et la raison
n’empruntent pas les mêmes voies, et par conséquent, ne peuvent parvenir aux vérités. Entre
les deux il n’y a donc pas « pénétration » comme l’aurait voulu Saint Anselme, encore moins
hiérarchisation comme le pensait Saint Thomas24.

3- Nature et grâce

Dans l’aristotélisme chrétien, il y’avait la prédominance de l’idée d’une certaine


fixité dans les formes des êtres. Cela conférait à chaque être une nature fixe qui lui assurait
une pace dans la hiérarchie. Ockham balaye cette conception du revers. Il n’y a rien dans
l’univers qui n’aurait pu être ce qu’il est. En d’autres termes il n’y a pas de nature fixe qui
confère un privilège particulier25.

Guillaume d’Ockham s’oppose également à Pélage pour qui la justification était liée
à des actes dont l’homme était naturellement capable. Le philosophe anglais pense plutôt que
l’on ne saurait rendre intelligible l’économie de la grâce ; c’est un don gratuit de Dieu 26, et
cela relève de sa libre volonté27.

4- La métaphysique

23
Ibid., p. 358.
24
Ibid., p.347.
25
Ibid., pp. 359-360.
26
Ibid., p. 361.
27
Ibid., p. 345.
13
Guillaume d’Ockham s’attaque principalement à la métaphysique d’Aristote. Il
conteste notamment le concept de puissance active qui désigne une chose se référant en elle-
même à une chose une autre. Bien qu’il reconnaisse la valeur du principe de causalité, il nie
qu’on puisse connaître en un être quelque chose en lui qui se réfère à un être autre que ce qu’il
est. La connaissance d’un être se termine en lui-même 28. Partant de ce principe, Ockham va
transformer la notion de matière d’Aristote. En effet, pour Guillaume d’Ockham, l’être en
puissance, ou être indéterminé n’existe pas. Ainsi, la matière qui était en puissance chez
Aristote, est en acte chez Ockham29.

5- La théorie de la connaissance

La connaissance intuitive du singulier est pour Guillaume d’Ockham le meilleur


moyen de connaître un objet. Elle s’oppose à la connaissance abstraite ou abstractive 30. La
connaissance intuitive est incomplexe et elle nous donne de connaître avec évidence une
vérité contingente. La connaissance abstraite ne correspond pas à ces conditions. Elle est plus
complexes et repose sur les jugements et l’acte par lequel on leu donne son assentiment. La
connaissance intuitive est supérieure car elle une connaissance évidente. Cependant, elle n’est
pas toujours certaine. Dieu peut, par miracle, faire disparaître l’objet dont nous avons eu une
vision, sans faire disparaître la vision que l’esprit humain a de cet objet. Nous aurions ainsi la
connaissance intuitive d’une chose qui n’existe pas, et nous en connaîtrions l’existence avec
évidence. Malgré tout, bien qu’elle ne soit pas toujours certaine, la connaissance intuitive est
immédiate et porte sur l’objet lui-même31.

Après avoir présenté l’essentiel de la pensée de Guillaume d’Ockham, nous pouvons


faire allusion à certains penseurs se réclamant de son école.

III- LES OCKHAMISTES

28
Ibid., p. 354.
29
Idem.
30
Alain De LIBERA, op. cit., pp. 432-433.
31
Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Age, op. cit., p. 348.
13
Guillaume d’Ockham a eu plusieurs partisans dont des franciscains à l’instar d’Adam
Wodham ; des dominicains comme Robert Holkot ; l’ermite augustinien Grégoire de Rimini ;
le cistercien Jean de Mirecourt ; Nicolas d’Autrecourt et bien d’autres 32. Nous ferons allusions
ici aux deux derniers.

1- Nicolas d’Autrecourt

Il s’est intéressé au scepticisme, mouvement qui avait pour idée centrale la séparation
radicale entre philosophie et théologie. Cette séparation implique aussi celle de Dieu et la
nature33. En effet, pour lui, si philosophie et théologie sont séparées, cela revient à dire que la
nature, telle que nous la concevons n’est donc pas ce qui peut nous aider à nous orienter vers
Dieu de la théologie. D’autre part, toujours par cette séparation, on considère en Dieu une
certaine puissance qui ne permet aucunement à notre raison de saisir quoique ce soit sur
l’essence divine. L’image de la nature, tout comme celle de la théologie sont donc
transformées par ce divorce34.

2- Jean de Mirecourt

En 1347, la faculté parisienne de théologie condamne quarante de ses thèses. Le


moine cistercien y nie en Dieu toute justice semblable à celle que l’homme peut concevoir.
D’après lui, le péché, tel que vu par les hommes, est causé par Dieu. « Dieu est cause du
péché comme péché ; le péché est plutôt un bien qu’un mal 35». C’est parce que Dieu a décidé
qu’un acte est un péché que cet acte est considéré ainsi comme tel : « La haine du prochain
n’est déméritoire que parce qu’elle est défendue par Dieu 36 ». Ainsi, d’après lui, Dieu peut
permettre à l’âme de haïr son prochain et de haïr Dieu lui-même sans que cela ne soit
déméritoire.

IV- EVALUATION DE L’ŒUVRE


32
Ibid., p.363.
33
Idem.
34
Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Age, op. cit., p. 364.
35
Idem.
36
Emile BREHIER, Histoire de la philosophie, Paris, PUF, 2004, p.653.
13
1- Intérêt

La pensée de Guillaume d’Ockham est assez riche et nous la trouvons dotée d’une
très grande portée. Tout d’abord, il met en exergue l’importance de l’individu. En stipulant
que seules sont connaissables les choses singulières, il montre par là que l’individu n’a pas
besoin d’une réalité qui lui est supérieure (l’universel) pour que l’on puisse l’appréhender.

Egalement, la position politique d’Ockham revêt une importance assez actuelle. Il est
justement nécessaire que les hommes d’Eglise apprennent à ne pas toujours vouloir se mêler
des affaires d’Etat. Ceci leur permettrait de mieux se concentrer sur le volet spirituel. Ça leur
éviterait également, pour reprendre les propos du jésuite Ludovic Lado, de « naviguer entre
Dieu et César37 ».

Enfin, à travers les thèses sémantiques et sémiotiques, les travaux de Guillaume


d’Ockham ont été d’un apport considérable pour la linguistique.

2- Critique

Notre critique est basée sur deux principaux aspects de la pensée ockhamiste.
Ockham fait une distinction un peu trop radicale entre foi et raison. Pour lui la raison n’a rien
à voir avec les vérités de foi. Certes, on ne peut pas rationaliser la foi, l’expliquer parfaitement
par le biais de la raison ; mais la raison peut intervenir dans la foi non plus pour justifier ce en
quoi on croit, mais pour montrer qu’il est raisonnable, et donc pas absurde d’y croire. Dès lors
on a non pas une foi rationnelle, mais une foi raisonnable.

S’agissant de la grâce divine, il est bien vrai qu’elle résulte de la libre volonté de
Dieu, mais nous devons tout de même reconnaître que chacun doit faire des efforts pour
pouvoir en bénéficier, tout homme doit se préparer à l’accueillir.

CONCLUSION

37
Ludovic LADO, Lettre ouverte aux évêques du Cameroun, 10 Novembre 2011
13
Parvenus au terme de notre exposé où il était question de présenter la pensée de
Guillaume d’Occam et ses disciples encore appelés occamistes, nous pouvons noter de prime
abord que le dernier message philosophique du moyen âge est celui du nominaliste de
Guillaume d’Occam qui bouleversa tant de notions et de distinctions traditionnelles. L’un de
ses disciples en occurrence Buridan compara son action à celle d’un rasoir : « le rasoir
d’Occam ». Sa doctrine philosophique, le nominalisme est « … toute autre chose qu’une
solution particulière du problème des universaux : c’est un esprit nouveaux qui se méfie des
réalités métaphysiques que croyait avoir découvertes les péripatéticiens et platoniciens, qui
se tient aussi près que possible de l’expérience et qui, sans rejeter les vérités de la foi, les
considèrent en générales comme hétérogènes et inaccessibles à la raison. »38 On peut trouver
dans l’influence de l’occamisme la source de bons nombres d’erreurs et de tendances
modernes. Cependant chez Occam, ces conséquences restaient voilées par le souci de
conforme à la foi dans ses conclusions ; et au point de vues intellectuels, il avait gardé à son
système la même valeur de synthèse qu’au scotisme, en conservant la thèse fondamentale
d’une volonté libre et de l’univocité de l’être en science ; et il lui avait ajouté l’attrait de la
simplicité. C’est ce qui explique son succès prodigieux au 14 et 15ème siècle où il conquiert la
plupart d’universités, et l’école occamiste s’oppose en rival du thomisme et du scotisme. Par
l’étude de la vie d’Occam, et surtout de la profondeur de sa pensée, nous comprenons
clairement que les critiques, remettant en cause l’authenticité de la philosophie au moyen âge,
ne relève que d’une mauvaise foi.

BIBLIOGRAPHIE

38
BREHIER E., Histoire de la philosophie, paris, PUF, 2004, p.649.
13
 Emile BREHIER, La philosophie du Moyen Âge, éditions Albin Michel, 1937 et
1971, 435 p.
 Emile BREHIER, Histoire de la philosophie, paris, PUF, 2004, 1790p.
 Alain DE LIBERA, Philosophie médiévale, 1ère édition, Paris, Presses de France,
1993, 535p.
 Jeannine QUILLET in Encyclopedia Universalis, corpus 16, p 760-764

 ROUX-LANIER C., BESNIER J.-M., JOLLY J.-J., PIMBE D., TROUSSON A. (dir.), Le
temps des philosophes, Paris, Hatier, 1995, 640 p.
 Denis HUISMAN, Serge LE STRAT, Lexique de philosophie, Paris, Nathan, 2008, 222 p.

fr.wikipedia.org /wiki/Guillaume_d’ Ockham.

TABLE DES MATIERES


13
INTRODUCTION

I- BIOGRAPHIE
II- LA PENSEE D’OCKHAM
A- LES UNIVERSAUX
1- Le nominalisme
2- Sous l’angle cognitive
B- LES AUTRES POINTS DE SA PENSEE
1- Politique
2- Foi et raison
3- Nature et grâce
4- Métaphysique
5- Théorie de la connaissance
III- LES OCKHAMISTES
1- Nicolas d4autrecourt
2- Jean de Mirecourt
IV- EVALUATION
1- Intérêt
2- Critique

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

TABLE DES MATIERES


13

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