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Canadian Journal of Latin American and Caribbean

Studies / Revue canadienne des études latino-


américaines et caraïbes

ISSN: 0826-3663 (Print) 2333-1461 (Online) Journal homepage: http://www.tandfonline.com/loi/rclc20

La démocratisation subnationale en perspective


comparée: les cas de Bahia (Brésil) et Oaxaca
(Mexique)

Julián Durazo Herrmann

To cite this article: Julián Durazo Herrmann (2016) La démocratisation subnationale en


perspective comparée: les cas de Bahia (Brésil) et Oaxaca (Mexique), Canadian Journal of
Latin American and Caribbean Studies / Revue canadienne des études latino-américaines et
caraïbes, 41:3, 307-327, DOI: 10.1080/08263663.2016.1225680

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CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES, 2016
VOL. 41, NO. 3, 307–327
http://dx.doi.org/10.1080/08263663.2016.1225680

La démocratisation subnationale en perspective comparée:


les cas de Bahia (Brésil) et Oaxaca (Mexique)
Julián Durazo Herrmann
Département de science politique, Université du Québec à Montréal, Montréal, Canada

RÉSUMÉ HISTORIQUE DE L’ARTICLE


Pourquoi des enclaves autoritaires subnationales émergent-elles Reçu 16 décembre 2015
lors des transitions démocratiques fédérales, comme ce fut le cas à Accepté 31 juillet 2016
Bahia (Brésil) et à Oaxaca (Mexique)? Comment prennent-elles fin MOTS-CLÉS
bien des années plus tard? Dans cet article, j’avance l’hypothèse Démocratisation comparée;
que le cycle de vie de ces enclaves est relié à l’instabilité des politique subationale; Bahia;
processus d’hybridation qui accompagnent la transition Brésil; Oaxaca; Mexique
démocratique. Pour démontrer cette hypothèse, je réponds à
quatre sous-questions de façon comparative: Si les élections sont KEYWORDS
l’élément central de la transition démocratique, quel est leur rôle Comparative democratiza-
tion; subnational politics;
dans l’émergence et la transformation des enclaves autoritaires Bahia; Brazil; Oaxaca; Mexico
subnationales? Puisque les élections subnationales devinrent
compétitives avec le temps, qu’est-ce que permit à la coalition
autoritaire de gagner une élection après l’autre pendant plus
d’une décennie? A contrario, pourquoi la formation d’une coalition
d’opposition capable de gagner une élection a-t-elle pris si long-
temps? Finalement, quel est le rôle des dynamiques et des acteurs
fédéraux dans ces processus?

ABSTRACT
Why did subnational authoritarian enclaves emerge during federal
transitions to democracy, as was the case of Bahia (Brazil) and
Oaxaca (Mexico)? How did they come to an end, many years later?
In this article, I argue that these enclaves’ life cycles are related to
the instability of the hybridization processes that accompanied the
transition to democracy. To test this hypothesis, I address four sub-
questions in comparative perspective: If elections are the central
element of the transition to democracy, what is their role in the
emergence of subnational authoritarian enclaves? Once subna-
tional elections became competitive, how did authoritarian coali-
tions manage to win them over decades? A contrario, why did the
formation of a viable opposition coalition take so much time?
Finally, what role did federal actors and dynamics play in these
processes?

Malgré les transitions démocratiques dans les pays fédéraux latino-américains, d’im-
portantes pratiques autoritaires restèrent longtemps en vigueur au niveau subnational1
en Amérique latine (Gervasoni 2010; Giraudy 2010), créant des enclaves autoritaires
subnationales – des juridictions territoriales où la présence de pratiques autoritaires

CONTACT Julián Durazo Herrmann durazo.julian@uqam.ca


© 2016 CALACS
308 J. DURAZO HERRMANN

limite le pluralisme politique, la responsabilité gouvernementale et le débat sur les


enjeux publics et ce, en dépit de la transition démocratique fédérale (Garretón 1989;
Linz 2000). Néanmoins, les pressions émanant du changement politique national
forcèrent ces enclaves à adopter certaines pratiques démocratiques. L’une des plus
importantes fut la mise en place d’élections régulières, libres et concurrentielles, ouvrant
ainsi la porte à un changement politique important au niveau subnational.
Toutefois, les enclaves autoritaires survécurent au moins une décennie à la transition
démocratique fédérale. Les élections – même concurrentielles – ne furent donc pas
suffisantes pour mettre fin aux pratiques non-démocratiques. Je propose ainsi de
m’intéresser aux cycles de vie de ces enclaves autoritaires à partir de deux questions
fondamentales: Pourquoi ces enclaves émergent-elles lors de la transition démocratique
fédérale? Comment prennent-elles fin bien des années plus tard?
Mon argument est qu’un processus d’adaptation, appelé hybridation, permet, dans
certaines circonstances, la persistance de pratiques autoritaires en les légitimant par des
processus démocratiques. L’hybridation est un processus hétérogène qui introduit des
transformations importantes dans certains secteurs (notamment le droit électoral) tout
en confortant la stagnation dans d’autres (i.e. les abus des droits humains). Ce
processus est contingent et dépend de l’équilibre politique (Karl 1995; Diamond 2002;
Recondo 2007a). L’hybridation est aussi un processus instable qui ouvre la porte à des
formes de contestation qui peuvent à la longue renverser les enclaves autoritaires. Dans
la mesure où elle permet la reproduction de certaines pratiques non-démocratiques,
l’hybridation peut aussi donner lieu à une circulation des élites subnationales sans
nécessairement permettre la consolidation d’un régime démocratique.
Dans cet article, je m’intéresse à l’analyse comparative de l’évolution de deux états
subnationaux: Bahia (au Brésil) et Oaxaca (au Mexique). Dans ces deux états, malgré les
transitions démocratiques fédérales, des élites autoritaires subnationales restèrent fer-
mement installées au pouvoir jusqu’à récemment, incarnant ainsi l’autoritarisme sub-
national dans l’imaginaire politique de leurs pays respectifs. Cependant, ces élites
autoritaires furent délogées par de larges coalitions électorales entre 2006 et 2010,
remettant simultanément en question la continuité de l’enclave subnationale.
En termes théoriques, une comparaison systématique des enclaves autoritaires sub-
nationales nous permettra d’identifier les éléments communs du changement politique
subnational en Amérique latine et de mieux comprendre leur interaction avec des
conditions politiques spécifiques à chaque pays. Étudier comment et dans quelle mesure
le changement politique s’est produit au niveau subnational nous amènera à réfléchir à
l’étendue et à la qualité des processus de démocratisation, fréquemment perçus comme
étant assez homogènes (Aziz Nassif 2003; Kingstone and Power 2008; Dabène 2009).
Les enclaves autoritaires subnationales dépendent de deux conditions: la tolérance
fédérale et le contrôle local. Si l’influence nationale des élites locales et la tolérance
fédérale pour leurs pratiques autoritaires sont des conditions nécessaires pour le
développement des enclaves autoritaires subnationales (Hernández Rodríguez 2008;
Gibson 2013), elles ne sont pas suffisantes. Ces élites doivent aussi – et d’abord –
démontrer leur capacité à dominer le système politique subnational. Toute analyse de la
politique subnationale doit prendre en considération ces deux dimensions (Behrend
2012).
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Pour répondre aux deux questions fondamentales de recherche – pourquoi ces


enclaves autoritaires subnationales émergent-elles lors des transitions démocratiques
fédérales et comment prennent-elles fin bien des années plus tard – j’avance l’hypothèse
que l’instabilité des processus d’hybridation qui donnent naissance à ces enclaves crée
un cycle de vie qui va de l’adaptation initiale des élites autoritaires subnationales aux
nouvelles conditions politiques à la formation, longtemps après, de coalitions d’opposi-
tion capables de les déloger du pouvoir.
De cette hypothèse, je dégage quatre sous-questions pour l’analyse: Si les élections
sont l’élément central de la transition démocratique fédérale, quel est leur rôle dans
l’émergence et la transformation des enclaves autoritaires subnationales? Puisque même
les élections subnationales devinrent compétitives avec le temps, comment la coalition
autoritaire évolue-t-elle dans ce contexte et qu’est-ce qui lui permet de gagner une
élection après l’autre pendant plus d’une décennie? Dans cette même perspective,
pourquoi la formation d’une coalition d’opposition capable de gagner l’élection à
gouverneur a-t-elle pris si longtemps? Finalement, quel est le rôle des dynamiques et
des acteurs fédéraux dans ces processus?
En examinant les acteurs et dynamiques politiques en présence dans chaque état,
cette approche permet d’analyser le rôle de l’hybridation dans le cycle de vie des
enclaves autoritaires subnationales et de les comparer systématiquement. En
conséquence, après une discussion sur la logique de la comparaison et un survol des
deux états subnationaux étudiés, l’article se construit à partir de ces questions.

Comparer Bahia et Oaxaca


Bahia et Oaxaca sont deux cas intéressants pour l’analyse des cycles de vie des enclaves
autoritaires subnationales. Dans ces deux états, une élite autoritaire locale – liée à
l’ancien régime de son pays – s’accrocha au pouvoir subnational pendant au moins
une décennie après la transition démocratique fédérale. Dans les deux cas, l’opposition
échoua d’abord à déloger l’enclave autoritaire, pour ensuite réussir à s’imposer sur la
base de coalitions très larges, incluant aussi bien des mouvements sociaux que des partis
politiques (Dantas Neto 2009; Krauze 2010). Cependant, la démarche et la nature de
chacune de ces coalitions diffère suffisamment pour nous autoriser à penser qu’il existe
des chemins alternatifs lorsqu’il s’agit de renverser une enclave autoritaire subnationale.
Toutefois, les comparaisons sont rarement faciles. La comparaison de deux états
subnationaux provenant de deux fédérations différentes présente des défis
supplémentaires. En tant que membres de systèmes politiques plus larges, les états
subnationaux sont surdéterminés par de nombreuses contraintes formelles et infor-
melles d’origine fédérale et sur lesquelles ils n’ont pas de contrôle.
Pour mieux appréhender les acteurs et dynamiques en présence, j’utilise
simultanément deux stratégies de comparaison: la méthode de la concordance et la
méthode de la différence. À partir de cas d’études se ressemblant pour la plupart de
leurs éléments, la méthode de la concordance privilégie l’identification des éléments
communs au phénomène à l’étude – dans notre cas, les cycles de vie des enclaves
autoritaires subnationales en Amérique latine. Il devient ainsi possible de repérer et
définir leurs traits caractéristiques (Przeworski et Teune 1970; Skocpol 1978). La
méthode de la concordance permet ainsi d’identifier les éléments constitutifs d’un
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phénomène – i.e. pourquoi ces enclaves émergent-elles lors de la transition


démocratique fédérale?
Pour être comparables, les états subnationaux doivent appartenir à des fédérations
elles-mêmes comparables. Au-delà de nombreux points de ressemblance socio-
économiques, le Brésil et le Mexique participèrent tous deux à la double transition
vers la démocratie et le néolibéralisme commune à l’Amérique latine des années 1980 et
1990 et confrontèrent ainsi de nombreux enjeux politiques semblables, dont la crise
économique, la décentralisation et la fragmentation de l’espace politique suite à la
démocratisation (Alba et Bizberg 2004).
Le Brésil et le Mexique sont également les deux plus grandes fédérations de
l’Amérique latine. Ils suivent tous deux la doctrine étatsunienne du fédéralisme dual,2
quoique de façon pragmatique, en priorisant les considérations politiques avant les
contraintes institutionnelles, comme une façon de mettre fin aux tensions constantes
entre le centre et les régions. Finalement, ces deux fédérations acceptèrent le maintien
d’enclaves autoritaires subnationales – au moins dans leur version hybride – afin de
garantir leur stabilité politique (Durazo Herrmann 2009).
Pour leur part, Bahia et Oaxaca partagent de nombreuses caractéristiques sociales et
géographiques, incluant une hétérogénéité structurelle assez importante et une place
ambiguë à l’intérieur de leurs fédérations – elles n’y sont pas centrales, mais pas
entièrement marginales non plus. Ces deux états partagent aussi l’héritage d’avoir été
des enclaves autoritaires subnationales notoires. La méthode de la ressemblance
m’amène ainsi à m’interroger sur les effets politiques de structures sociales
subnationales.
Bahia et Oaxaca peuvent aussi être étudiées à partir de la méthode de la différence.
Cette approche permet de relever les effets de l’interaction entre un phénomène et une
conjoncture spécifique (Przeworski & Teune 1970; Skocpol 1978). On peut ainsi étudier
les conditions dans lesquelles les enclaves autoritaires subnationales prennent fin bien
des années après la transition démocratique fédérale.
Le niveau d’autonomie institutionnelle dont les états subnationaux jouissent au
Brésil et au Mexique est assez différent. Si les deux fédérations imposent un régime
présidentiel fort à leurs unités subnationales, ainsi qu’un haut degré d’autonomie
municipale (faisant ainsi des municipalités des structures politiques à part entière
avec lesquelles les gouverneurs subnationaux doivent nécessairement composer), au
Brésil, la taille et la composition des assemblées législatives subnationales, ainsi que le
système électoral, sont déterminés par la Constitution et la loi fédérales. Au Mexique,
par contre, les états subnationaux jouissent d’une grande autonomie à ce sujet (Durazo
Herrmann 2009).
En conséquence, les effets de la manipulation institutionnelle au niveau subnational
– ou de son absence – et des rapports fédération-états subnationaux peuvent être
facilement étudiés en comparant Bahia et Oaxaca. Plus largement, l’analyse de ces
différences nous informera sur la façon dont les enclaves autoritaires subnationales
interagissent avec des acteurs et dans des situations politiques différentes.
Ensemble, les méthodes de la concordance et de la différence nous permettent
d’explorer un phénomène politique en profondeur. Nous espérons ainsi atteindre une
compréhension théorique générale du cycle de vie de l’autoritarisme subnational.
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Un coup d’œil sur Bahia et Oaxaca


Bahia est un état dans le Nord-est du Brésil qui compte 14 millions d’habitants, une
superficie de 565,000 km2 et 417 municipalités; 62% de la population totale est urbaine
(contre une moyenne de 83% au Brésil) et Salvador, la capitale subnationale, avec 2,7
millions d’habitants, est la troisième plus grande métropole du Brésil – après São Paulo
et Rio de Janeiro (IBGE 2013; Figure 1).
De son côté, Oaxaca est un état du sud du Mexique avec 3,8 millions d’habitants, une
superficie de 94,000 k m2 et 570 municipalités. En 2010, la population rurale d’Oaxaca
comptait pour 53% du total – contre une moyenne nationale de 23%. La ville la plus
importante est la capitale subnationale, Oaxaca, avec quelque 270,000 habitants. Par
ailleurs, 34% de la population totale (soit 1,3 million de personnes) parle l’une des 15
langues indigènes reconnues de l’état (INEGI 2013; Figure 2).
Au vingtième siècle, l’élite subnationale de Bahia mena activement un processus de
modernisation autoritaire qui transforma de fond en comble les rapports économiques
et sociaux de l’état par l’industrialisation et l’urbanisation, tout en maintenant un
contrôle sévère sur la mobilisation politique subnationale (Dantas Neto 2006; Souza
2016). Cependant, faute de capitaux internes suffisants, Bahia devint financièrement et
techniquement dépendante de l’extérieur (de Oliveira 1987).
À Oaxaca, par contre, les activités industrielles traditionnelles (textiles, cigarettes)
périclitèrent au long du vingtième siècle, incapables de concurrencer l’essor industriel
du centre et du nord du Mexique. Les marchands de la capitale subnationale
concentrèrent ainsi le pouvoir social et économique de l’état entre leurs mains

Figure 1. Bahia. Source: IBGE (2013).


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Figure 2. Oaxaca. Source: INEGI (2013).

(Martínez Vásquez 1990; Miguel 2004). En conséquence, la transformation


socioéconomique à Bahia fut bien plus profonde qu’à Oaxaca.
Dans les deux cas, un parti politique lié au régime autoritaire fédéral (le Partido da Frente
Liberal [PFL] à Bahia3 et le Partido Revolucionario Institucional [PRI] à Oaxaca) domina le
système politique subnational pendant et après la transition. On doit signaler que le PRI
oaxaquène est l’héritier direct de l’ancien régime autoritaire mexicain et de son corporatisme
d’État,4 qu’il conserva soigneusement (Yescas Martínez 2004). Pour sa part, le PFL
représente les anciens alliés régionaux du régime militaire brésilien qui ont fait défection
au moment de la transition fédérale, plutôt que l’ancien régime lui-même. Contrairement au
PRI et à sa structure de parti corporatiste et de masses, le PFL était un parti d’élites et, en
même temps, une machine politique5 (Hagopian 1996; Dantas Neto 2003).
Dans les deux cas, une personnalité politique forte servit de lien entre les structures
fédérales de son parti – où il exerçait une influence importante – et leur contrepartie
subnationale – qui leur était presque entièrement soumise – exerçant ainsi un rôle de
médiateur lui permettant d’en tirer des rentes politiques importantes (ce que Gibson
appelle boundary control [2005]). Sur la base de ce contrôle politique accru, ces
médiateurs politiques devinrent la clé de voûte d’une enclave autoritaire subnationale
notoire (Dantas Neto 2006; Recondo 2007b).
Il faut cependant remarquer que le médiateur oaxaquène fut toujours le gouverneur
en fonction, soumis à la sévère règle mexicaine sur la non-réélection. En conséquence,
quel que fût le pouvoir du gouverneur, son mandat était strictement limité dans le
temps (Tena Ramírez 1998). Par ailleurs, aucun gouverneur d’Oaxaca ne jouit du
charisme et de l’influence politique d’Antônio Carlos Magalhães (ACM, comme il
était connu populairement), gouverneur de Bahia à trois reprises et chef politique de
cet état entre 1970 et 2006.
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 313

Depuis longtemps, aussi bien Bahia qu’Oaxaca sont aux prises avec des problèmes
chroniques de criminalité et de violence sociale, ainsi que des cas ciblés de violence
politique (Martínez Vásquez 2007; Varjão 2008). Toutefois, ce n’est qu’à Oaxaca que
l’on vécut des expériences de violence politique massive. En juin 2006, le gouverneur
Ulises Ruiz réprima violemment une manifestation d’instituteurs, déclenchant ainsi un
fort mouvement de protestation dans la capitale subnationale et ses environs qui attira
l’attention médiatique nationale et internationale. Ce mouvement, mené par une orga-
nisation parapluie appelée Asociación popular de los pueblos de Oaxaca (APPO),
paralysa la vie politique subnationale avant de déclencher la répression directe des
forces policières fédérale et subnationale en novembre (Martínez Vásquez 2007; Yescas
Martínez 2007). Suite à ces évènements, Ruiz termina son mandat sans encombre en
2010.6
Les élites autoritaires de Bahia et Oaxaca subirent toutes deux une défaite électorale
qui, d’après la plupart des analystes, devrait les écarter plus ou moins définitivement du
pouvoir. Dans les deux cas, les coalitions électorales gagnantes réunirent un vaste
spectre de partis politiques et d’organisations sociales autour d’un candidat charisma-
tique. À Bahia, Jaques Wagner, membre fondateur du Partido dos Trabalhadores (PT) et
syndicaliste de longue date, gagna l’élection de gouverneur en 2006. À Oaxaca, Gabino
Cué, ancien maire de la capitale subnationale, remporta l’élection de 2010 (Galo 2007;
Krauze 2010).

Les élections et l’évolution des enclaves autoritaires subnationales


Suite à la démocratisation fédérale, les élections subnationales devinrent de plus en plus
importantes, car désormais elles seules pouvaient donner à l’élite autoritaire un mandat
formel de gouverner tout en donnant à l’opposition un puissant instrument pour
contester son exclusion politique. En conséquence, un système électoral assez libre et
compétitif émergea dans ces deux états subnationaux (Ochoa-Reza 2004; Erdman and
Engel 2007).
D’un point de vue formel, la manipulation institutionnelle était plus facile à Oaxaca,
où l’état subnational est responsable de ses propres règles électorales, qu’à Bahia, où
elles sont établies par la fédération. Un des exemples les plus spectaculaires de manip-
ulation fut la reconnaissance formelle en 1995 des us et coutumes traditionnels dans les
municipalités rurales et indigènes d’Oaxaca, une décision que permit à 418 des 570
municipalités de l’état d’élire leurs autorités en dehors du système électoral – les
élections fédérales et celles législatives et à gouverneur subnational ne furent pas
affectées (Recondo 2007b).
Par la suite, craignant de perdre cette mesure de reconnaissance et d’autonomie
politique, les communautés indigènes d’Oaxaca appuyèrent fortement (mais parfois
tacitement) l’élite autoritaire subnationale. Lors de la crise de 2006, l’Assemblé popu-
laire des peuples d’Oaxaca (APPO) resta confiné à la capitale subnationale et ses
alentours (Osorno 2007). Lors des élections législatives, le PRI gagna tous les districts
à majorité simple sauf celui de la ville d’Oaxaca entre 1995 et 2010. En 2013, après avoir
quitté le pouvoir subnational, le PRI réussit à gagner encore la majorité des sièges
(IEEPCO 2015).
314 J. DURAZO HERRMANN

Il n’y a pas d’exemple comparable de manipulation à Bahia sauf l’influence infor-


melle qu’ACM exerça sur la formation de la cour électorale subnationale (formellement
nommée par le président de la République, mais dominé jusqu’en 2002 par les alliés
d’ACM). Par contre, ACM eut beaucoup plus de succès que ses contreparties
oaxaquènes dans l’identification de l’identité locale (baianidade) avec son régime, ce
qui lui permit d’accuser ses opposants d’être des étrangers ignorants de la réalité
subnationale (Pinho 1998). ACM tissa ainsi des liens étroits avec des syndicats, des
organisations culturelles et religieuses et même des troupes de carnaval (de Sousa Júnior
2007; Selka 2007).7
Par contre, si l’élection de 2010 marqua la toute première victoire de l’opposition à
Oaxaca, le premier succès électoral de l’opposition à Bahia eut en effet lieu en 1987,
lorsque Waldir Pires, du Partido do Movimento Democrático Brasileiro (PMDB)8 fut élu
gouverneur. Cependant, des difficultés politiques importantes, autant à Bahia qu’à
l’intérieur du PMDB fédéral, forcèrent la démission de Pires en 1989. Son successeur
se montra incapable d’empêcher le retour d’ACM au pouvoir subnational en 1991 ni la
consolidation de son pouvoir subnational dans la décennie qui suivit (Dantas Neto
2003; Galo 2007).
En conséquence, les défis posés aux élites autoritaires subnationales oaxaquène et
bahianaise par la transition démocratique fédérale – et notamment par l’avènement
d’élections libres et concurrentielles – ne furent pas insurmontables. Ces élites furent
longtemps capables de contrôler l’ouverture politique et de limiter la croissance de
l’opposition sur leur territoire. Dans les deux cas, le clientélisme – l’échange à long
terme de biens matériels et symboliques pour du soutien politique (Hilgers 2012) – fut
un instrument important. L’alliance stratégique des élites politiques et économiques, le
poids démographique réduit des capitales subnationales et la présence d’une importante
population rurale pauvre et dépendante contribuèrent au succès de ces pratiques
(Hernández Díaz 2004; Milani 2006).
Ni à Bahia ni à Oaxaca les élections législatives subnationales n’occupèrent une place
importante, en dépit du fait que, en principe, la législature peut faire contrepoids au
pouvoir exécutif et fournit un espace de grande visibilité politique à l’opposition. Lors
des élections législatives précédant leur défaite, les élites autoritaires bahianaise et
oaxaquène capturèrent presque les deux tiers des sièges, même si elles obtinrent
moins de 50% des voix (IEEPCO 2015; TRE-BA 2015).
Par contre, les élections municipales jouèrent un rôle crucial dans le processus. À
partir des mairies – surtout celles des grandes villes – l’opposition démontra sa
compétence administrative et sa capacité de modérer son discours et d’élargir sa base
électorale. Dans le cas d’Oaxaca, Cué fut explicite en liant son expérience de maire de la
capitale subnationale avec sa candidature au poste de gouverneur (Recondo 2007b).
En termes de participation, l’abstention est assez élevée dans les deux états –
davantage à Oaxaca, en l’absence de mécanismes pour rendre le vote obligatoire
(Power 2009). L’affluence aux urnes est cependant trompeuse. À Bahia, les campagnes
électorales semblent être le seul moment légitime pour que les organisations sociales
participent au débat public au sens large. En conséquence, les organisations sociales
occupent l’espace public de façon intermittente et ont tendance à subordonner leurs
demandes aux initiatives partisanes (Goldman 2006).
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 315

À Oaxaca, au contraire, la participation politique est traditionnellement allée au-delà


du vote. Le régime corporatiste du PRI fit en sorte que les organisations sociales se
mobilisèrent fréquemment en soutien du gouvernement (fût-il fédéral ou subnational).
Par ailleurs, les organisations protestèrent parfois de façon autonome, allant jusqu’à
demander – et même obtenir – la démission du gouverneur (Murphy & Stepick 1991;
Arellanes Meixueiro 2004). En conséquence, le rapport de forces entre organisations
sociales et partis politiques à Oaxaca est plus équilibré et peut devenir très conflictuel,
comme le montrent les rapports tendus entre l’APPO et les partis d’opposition en 2006
(Martínez Vásquez 2007).
À long terme, l’avènement d’élections libres et concurrentielles polarisa la scène
politique bahianaise et oaxaquène, mettant, d’un côté, les élites autoritaires et leurs alliés
et, de l’autre, les coalitions d’opposition. Je me penche sur leur composition et leur
évolution dans les deux sections suivantes.

La coalition autoritaire
La mise en place d’élections concurrentielles obligea les élites autoritaires à construire et
maintenir des coalitions électorales gagnantes comme condition essentielle à leur survie
politique. Elles durent mobiliser toutes leurs ressources politiques, révélant ainsi leurs
liens et leur pénétration du système politique subnational.
À Bahia, ACM déploya une combinaison de leadership charismatique et de machine
électorale appelée carlismo pour créer et soutenir une coalition large et incongrue, allant
des entrepreneurs industriels des centres urbains aux chefs politiques traditionnels de
l’intérieur, en passant par toutes sortes d’organisations populaires. La coalition parti-
sane centrée autour du PFL fonctionnait surtout comme une courroie de transmission
(de Oliveira 1987; Dantas Neto 2006). Jusqu’à sa mort en 1998, l’héritier naturel d’ACM
était son fils, Luís Eduardo Magalhães. Son petit-fils, ACM Neto, reprit le flambeau aux
années 2010 et réussit à se faire élire maire de Salvador en 2012. Cependant, le locus
central du parti (appelé désormais Democratas) se trouve présentement dans le Sud et le
Sud-Est du Brésil.
À Oaxaca, la présence du PRI et d’un réseau corporatiste dense, tous deux contrôlés
depuis Mexico, se combinèrent avec la stricte règle de non-réélection pour éviter
l’émergence d’un leadership charismatique subnational. À sa place apparut un
système vertical et très institutionnalisé de méditation politique. Comme résultat, le
gouverneur devint l’intermédiaire politique subnational par excellence, mais avec un
mandat très circonscrit dans le temps (Cosío Villegas 1974; Tena Ramíez 1998).
En ce qui a trait à leur vie associative, autant Bahia qu’Oaxaca développèrent des
organisations nombreuses et diversifiées. Toutefois, elles restèrent fragmentées et
orientées vers la procuration de services à leurs membres, plutôt que vers l’espace
public. En temps normal, elles confrontent le gouvernement directement, un-à-un, se
rendant ainsi vulnérables à ses pressions politiques et à ses pratiques clientélistes
(Snyder 2001; Goldman 2006).
Comme résultat du processus d’hybridation, le clientélisme évolua. Bahia vit
apparaître un certain nombre de comités participatifs, en santé et en éducation notam-
ment (certains mandatés par la Constitution de 1988). Toutefois, leurs décisions furent
simplement consultatives et ne transformèrent point la vie associative de l’état (Mota
316 J. DURAZO HERRMANN

2007). À Oaxaca, le retrait du PRI et de l’État fédéral découlant de la transition et des


réformes néolibérales amenèrent le gouvernement subnational à reprendre les rapports
de corporatisme d’État à son compte. Le gouvernement oaxaquène créa ainsi un réseau
bureaucratique propre comptant autant de nouvelles agences régulatrices (i.e. pour le
café, principale culture d’exportation de l’état) que de bureaux régionaux pour super-
viser directement la distribution de ressources clientélistes aux communautés rurales et
indigènes, que ce soit par la construction de routes, de cliniques ou d’écoles (Snyder
2001; Recondo 2007b). Toutefois, les tensions à l’intérieur du PRI menèrent à la
formation de factions inconciliables et produisirent plusieurs vagues de défection
(Alonso Criollo 2004).
Dans les deux cas, le boundary control permit aux élites autoritaires subnationales de
continuer à distribuer des ressources clientélistes et des postes de patronage.
Cependant, ces dynamiques furent très différentes. À Bahia, ACM chercha à obtenir
autant d’influence fédérale que possible pour garantir son accès aux ressources et aux
nominations fédérales à Bahia. ACM s’engagea donc très profondément en politique
fédérale – notamment comme ministre des Communications du Président José Sarney
(premier président civil du Brésil après le régime militaire, 1985–1990) et comme
président du Sénat fédéral sous le Président Fernando Henrique Cardoso (1995–
2002). Le présidentialisme de coalition brésilien, qui oblige les présidents à créer des
coalitions élargies pour pouvoir adopter leurs programmes législatifs, favorisa ce
phénomène (Santos 2002; Power 2010). De la même façon, la machine politique du
carlismo subit les contrecoups du déclin politique de son leader (Borges 2010).
À Oaxaca, les gouverneurs successifs cherchèrent à exercer une certaine influence
fédérale, surtout à travers le PRI, mais leur préoccupation première était de préserver et
élargir l’autonomie subnationale (Gibson 2013). Le retrait du PRI vers ses bastions
électoraux, spécialement après sa défaite électorale de 2000, renforça cette tendance
(Hernández Rodríguez 2008). Simultanément, le « nouveau fédéralisme » des années
1990 finança la création des nouvelles bureaucraties subnationales et donc le renforce-
ment de la capacité étatique subnationale (Sobarzo 2005).
En somme, dans les deux états, la défaite de la coalition autoritaire subnationale fut
précédée de tensions internes considérables. Toutefois, et malgré des nombreux scan-
dales et, dans le cas d’Oaxaca, d’une forte dose de répression, le déclin électoral de ces
coalitions fut très graduel, ce qui témoigne de leur solidité et implantation sociale. En
contrepartie, la construction de la coalition d’opposition fut lente et difficile.

La coalition d’opposition
En tant qu’enclaves autoritaires, Bahia et Oaxaca firent toujours face à une certaine
opposition, surtout en milieu urbain (Montero 2012). Toutefois, la faiblesse
démographique relative des villes et la marginalité politique de ces groupes permit la
consolidation des enclaves autoritaires subnationales, qui, dans un cercle vicieux,
entravèrent ensuite leur développement. Puisque les partis politiques étaient inefficaces
et concentrés dans les zones urbaines, certaines organisations sociales des leaders de
facto de l’opposition. Par ailleurs, la fragmentation idéologique de l’opposition nuisit
également à la formation d’un front commun (Dantas Neto 2003; Díaz Montes 2004).
L’opposition n’arriva finalement au pouvoir que grâce au déclin de la coalition
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 317

autoritaire, dont elle profita autant en termes de sources de leadership que d’espace
politique.
À son zénith en 1998, le carlismo n’incluait pas seulement le PFL et d’autres petits
partis de droite, mais aussi le PMDB et le Partido da Social-Democracia Brasileira
(PSDB, le parti du Président Cardoso). Cependant, l’implication d’ACM dans des
nombreux scandales politiques, incluant une affaire d’espionnage politique au Sénat
fédéral, mit fin à l’alliance PFL-PSDB en 2001. Voyant sa part du vote fondre
rapidement, le PMDB abandonna le PFL en 2002. Wagner fut alors capable d’inclure
le PMDB dans sa coalition d’opposition et ainsi profiter de sa meilleure implantation
dans les régions rurales de Bahia. Sous le leadership charismatique de Wagner, le
PSDB se joignit aussi à sa coalition pour les élections de 2006 (Galo 2007; Borges
2010).
À Oaxaca, l’échec de la tentative du gouverneur Diódoro Carrasco Altamirano
d’imposer son candidat préféré à sa succession en 1998 divisa profondément le PRI
oaxaquène. Carrasco Altamirano n’abandonna le PRI qu’en 2006, mais fit néanmoins
une opposition marquée à ses successeurs José Murat (1998–2004) et Ulises Ruiz (2004–
2010). Il fut également un acteur clé dans les négociations qui menèrent à la formation
de la coalition qui s’imposa au PRI en 2010. De son côté, Cué abandonna le PRI en 2001
pour devenir le maire issu de l’opposition de la ville d’Oaxaca (Yescas Martínez 2004;
Galo Samario 2010).
L’adoption de procédures démocratiques formelles dans un contexte hybride con-
tribua aussi à la croissance de l’opposition à Bahia et Oaxaca. L’ouverture permit aux
partis d’opposition de gagner un certain nombre de municipalités, dont les capitales
subnationales, obtenant ainsi accès à leurs propres ressources clientélistes. Sur cette
base, leur prestige politique et leur succès électoral augmentèrent également. Ainsi,
autant à Bahia qu’à Oaxaca, les partis d’opposition reproduisirent et renouvelèrent les
vielles pratiques clientélistes par l’instrumentalisation des canaux de participation
populaire (Hunter 2007; Montambeault 2013).
Cependant, en ouvrant la porte aux transferts de loyauté politique, cette dynamique
impliqua une détérioration des rapports clientélistes à long terme. Une course
clientéliste émergea, chaque parti cherchant à offrir davantage de ressources à ses clients
en échange d’un soutien politique immédiat. Dans un contexte d’élections de plus en
plus concurrentielles et de ressources publiques limitées, l’avenir du clientélisme semble
être en question (Barreira 2006; Hilgers 2012).
De leur côté, les organisations sociales jouèrent un rôle important dans la création de
coalitions d’opposition viables en mobilisant des électeurs dans les régions où les partis
politiques étaient peu présents. À Bahia, ce fut le cas des syndicats des travailleurs
pétrochimiques – où Jaques Wagner fit ses débuts en politiques – et des administrations
municipales (de Carvalho 2010). À Oaxaca, ce furent les coalitions d’ouvriers, étudiants
et paysans des villes de Oaxaca et Juchitán (Martínez Vásquez 1990; Rubin 1997).
Toutefois, les rapports entre organisations sociales et partis politiques divergèrent de
façon importante entre Bahia et Oaxaca.
À Bahia, la plupart des organisations sociales n’intervinrent pas en politique ouverte
et cherchèrent plutôt à établir des rapports privilégiés avec les partis politiques et le
gouvernement (Palmeira 2006). À Oaxaca, au contraire, les organisations sociales
s’avancèrent dans l’espace public de façon autonome aussi tôt que 1946 (Murphy &
318 J. DURAZO HERRMANN

Stepick 1991). À partir des années 1980, elles devinrent des compétiteurs parfois
acharnés des partis politiques, autant en termes de mobilisation que d’initiative. En
conséquence, elles furent aussi une cible importante de la répression politique, notam-
ment lors de la crise de 2006 (Durazo Herrmann 2010).
Dans les deux états, l’émergence d’une coalition viable d’opposition est en lien avec
l’apparition d’un leader charismatique, capable de surmonter les différences
idéologiques et autres des divers membres de la coalition et même de la porter à travers
une défaite électorale initiale. À Bahia, la coalition gagnante de Wagner inclut des partis
aussi éloignés idéologiquement que le PT, le PSDB, le PMDB et le Partido Comunista do
Brasil (PCdoB). Dans cet effort, Wagner mit à contribution la pratique brésilienne des
coalitions flexibles et non-idéologiques du présidentialisme de coalition.
Par ailleurs, un bon nombre de municipalités – traditionnellement la chasse gardée
du carlismo – appuyèrent Wagner et sa coalition sans s’affilier au PT (suivant la
tradition du governismo9). Ces maires restèrent au PMDB ou rejoignirent le nouveau
Partido Social Democrático (PSD), dirigé par Otto Alencar, un ancien carlista devenu
vice-governeur de Bahia entre 2010 et 2014 (Borges 2010; Alencar 2011; PSD-BA 2014).
À Oaxaca, des différences idéologiques inconciliables compliquèrent longtemps la
formation d’une coalition d’opposition viable. Cependant, les efforts de Cué et de
Carrasco Altamirano – tous deux des anciens príistas – permirent de réunir autant le
PAN (de droite) que le PRD (de centre-gauche) grâce à des connections personnelles
lors des élections de 2004 et 2010. La défection de nombreux príistas vers tous les partis
d’opposition facilita cette démarche. Ainsi, la dimension conjoncturelle est tout aussi
importante que les développements structuraux dans la formation des coalitions d’op-
position dans les enclaves autoritaires subnationales.

Le rôle de la fédération
Comme souligné plus haut, le cycle de vie des enclaves autoritaires est assujetti à une
double condition: le contrôle local et la tolérance fédérale. Dans les faits, la fédération
conditionne la politique subnationale de nombreuses manières, allant de l’intervention
directe du gouvernement ou d’autres acteurs fédéraux à des contraintes institutionnelles
et informelles. Le canal d’influence fédérale le plus important est la mise en place des
termes de référence politique: la transition fédérale rend obligatoires certaines réformes
démocratiques au niveau subnational, tandis que le nouveau discours politique – utilisé
aussi bien au niveau fédéral que subnational – intègre des attentes démocratiques
explicites. En conséquence, les élites autoritaires subnationales n’ont d’autre alternative
que de s’adapter aux nouvelles conditions politiques (Gibson 2013).
Les états mexicains jouissent d’une autonomie institutionnelle beaucoup plus impor-
tante que leurs contreparties brésiliennes. Au-delà du fait qu’au Brésil, la Constitution
fédérale et certaines lois règlementaires importantes (notamment le code électoral)
imposent un degré très important d’homogénéité institutionnelle, la Cour suprême
du Brésil a désavoué un bon nombre d’efforts d’innovation institutionnelle. Au
Mexique, par contre, selon la Constitution fédérale, les états sont « libres et souverains
» dans leur régime intérieur et la Cour suprême évite consciencieusement toute
apparence d’intervention dans l’autonomie subnationale (Durazo Herrmann 2009).
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 319

Du point de vue politique, l’autonomie des états subnationaux mexicains était


toujours en expansion à la fin des années 2000, soutenue par les ressources d’un
fédéralisme fiscal généreux sujet à relativement peu de conditions (Sobarzo 2005). Par
contraste, les crises politiques et économiques du Brésil réduisirent largement l’auto-
nomie subnationale dès la fin des années 1990 en légitimant la concentration du
pouvoir dans les mains de l’État fédéral (Samuels & Mainwaring 2004; Hernández
Rodríguez 2008). Le programme Bolsa Família du président Lula évite explicitement
les gouvernements subnationaux pour traiter directement avec les municipalités selon
des critères techniques stricts (Fenwick 2010).
La visibilité nationale d’ACM renforça sa capacité de médiation politique, mais aussi
sa vulnérabilité vis-à-vis la fédération: en rompant avec le Président Cardoso en 2001,
ACM perdit immédiatement tout contrôle sur les nominations fédérales à Bahia, une
source importante de patronage et de ressources clientélistes et, ainsi, de boundary
control. Au-delà des pertes matérielles, le coût politique de la rupture fut la perte du
monopole de l’intermédiation politique, autant au niveau subnational que fédéral.
L’arrivée au pouvoir de Lula en 2003 ne fit qu’accentuer cette rupture et accélérer la
fin du carlismo (Dantas Neto 2009).
À Oaxaca, la pénétration incomplète du territoire empêcha les partis politiques
fédéraux d’opposition d’intervenir efficacement au niveau subnational. La concurrence
entre partis et organisations sociales leur rendit la tâche encore plus ardue. Si bon
nombre d’observateurs espérèrent voir le nouveau gouvernement fédéral du PAN
intervenir contre l’enclave autoritaire subnationale après 2000 et surtout lors de la
crise de 2006, le manque d’alternative crédible sur le terrain obligea le gouvernement
fédéral à continuer de soutenir l’ancienne élite subnationale et même à contribuer à la
répression massive de l’APPO (Martínez Vásquez 2007). Suite aux élections
présidentielles très concurrentielles de 2006, où le candidat du PAN n’obtint qu’une
très faible majorité, par ailleurs très contestée, le PRI négocia le renouvellement de la
tolérance fédérale vis-à-vis les pratiques autoritaires oaxaquènes contre la reconnais-
sance de la légitimité de l’élection du candidat du PAN, Felipe Calderón. Ce ne fut
qu’en 2007, avec l’arrivée de Carrasco Altamirano, que le PAN devint un véritable
moteur de l’opposition à Oaxaca (Durazo Herrmann 2010).
Dans le cycle de vie des enclaves autoritaires bahianaise et oaxaquène, la fédération
joua donc un rôle contingent, déterminé par les logiques politiques fédérales et non
subnationales. Cependant, il est clair que la connexion fédérale est nécessaire pour la
reproduction de l’autoritarisme subnational – ou de sa version hybride. Faute de
soutien fédéral, les enclaves autoritaires subnationales ne peuvent espérer durer long-
temps. La double condition – soutien interne et tolérance fédérale – est donc un
élément central pour la compréhension autant de l’émergence que du déclin de ces
enclaves.

L’analyse comparative de l’autoritarisme subnational


À partir de la comparaison entre Bahia et Oaxaca, nous pouvons dégager plusieurs
éléments pour une meilleure compréhension de l’évolution des enclaves autoritaires
subnationales. En suivant la méthode de la concordance, cette recherche nous permet
d’étudier comment les rapports entre partis politiques et organisations sociales –
320 J. DURAZO HERRMANN

indispensables dans la formation de coalitions d’opposition efficaces – influencent le


changement de régime subnational. On peut aussi analyser le rôle persistant de la
médiation politique au niveau subnational.
En premier lieu, suite à la mise en place d’élections relativement libres et concur-
rentielles – le résultat de l’hybridation – les élections au poste de gouverneur fournirent,
en principe, une opportunité à l’opposition de contester l’enclave autoritaire en remet-
tant en cause sa reproduction politique. Néanmoins, les élites autoritaires subnationales
démontrèrent leur capacité de gagner des élections concurrentielles sans complètement
abandonner leurs pratiques autoritaires pour autant (Giraudy 2010). Bahia et Oaxaca
nous montrent que les coalitions politiques autoritaires capables de se reproduire dans
des environnements électoraux concurrentiels peuvent être de nature très différente,
allant de la machine politique bien huilée du PFL bahianais aux stratégies corporatistes
du PRI oaxaquène. Dans les deux cas, l’hybridation permit l’émergence et la consolida-
tion d’enclaves autoritaires subnationales.
Par ailleurs, l’importance critique des élections au poste de gouverneur, comparée à
la portée limitée des élections législatives, suggère que si la capacité de médiation de
l’ancien régime s’est épuisée, ce besoin politique n’a pas disparu pour autant. La nature
très vaste des coalitions d’opposition à Bahia et Oaxaca, soutenues par un leader
charismatique qui effaça les différences idéologiques, renforce cet argument.
L’hybridation rendit possible l’alternance au pouvoir, mais aussi la reproduction de
pratiques clientélistes, de la médiation politique et même du boundary control (Gibson
2013).
Dans un contexte électoral, autant les élites autoritaires que l’opposition cherchèrent
à mobiliser un électorat aussi large que possible afin de gagner les élections. La
mobilisation politique en contexte d’hybridation subnationale ouvre ainsi une
deuxième avenue de recherche. Les traditions d’organisation et de mobilisation sociale
constituent des éléments centraux de la compréhension des dynamiques politiques
subnationales. Le renouveau subnational du corporatisme d’État à Oaxaca – et,
simultanément, la persistance d’une tradition de méfiance et de conflit entre organisa-
tions sociales indépendantes et partis politiques – contraste avec la dépendance affichée
de nombreuses organisations sociales bahianaises vis-à-vis les partis politiques, qu’il
s’agisse du PFL ou, plus récemment, du PT (Durazo Herrmann 2012).
Un autre élément clé de l’analyse est le rôle du clientélisme dans l’évolution des
enclaves autoritaires subnationales. La distribution de biens symboliques et matériels en
échange d’appui politique à long terme fut toujours un instrument important de
mobilisation pour les élites autoritaires, qui réussissaient ainsi à gagner des élections.
À travers l’hybridation, le clientélisme put se renouveler sous la transition fédérale grâce
à l’instrumentalisation par les élites subnationales des nouveaux mécanismes de parti-
cipation populaire (Montambeault 2013).
L’opposition profita aussi des ressources clientélistes lorsque l’accès à des positions
de pouvoir lui fournit les moyens de faire des promesses crédibles à ses commettants
grâce aux ressources publiques, lui permettant ainsi de former un électorat captif. Ce
processus fit des élections municipales un élément clé du changement politique subna-
tional. Il est cependant moins clair si la multiplication des patrons et le partage toujours
plus important d’un ensemble somme tout limité de ressources permettront à ces
nouvelles pratiques clientélistes de se reproduire à long terme (Hilgers 2012).
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 321

Avec l’hybridation, la possibilité de faire tomber l’enclave autoritaire d’un seul coup
électoral devient un stimulant puissant pour la formation de coalitions larges autour
d’un seul candidat. La présence d’un leader charismatique facilite la mise en place d’une
coalition sans avoir à se consumer dans des discussions sur le programme électoral et
les priorités politiques, tout en offrant à la population une alternative crédible. Autant à
Bahia qu’à Oaxaca, les résultats se sont traduits par des coalitions très larges, avec des
membres sans trop d’affinités idéologiques, tenues ensemble par des négociations très
ponctuelles entre individus (Galo 2007; Galo Samario 2010).
Toutefois, les possibilités de rompre définitivement avec le passé furent réduites
d’autant, car peu d’emphase fut accordée à la création de liens horizontaux ou de
procédures politiques universelles, rationnelles et abstraites – c’est-à-dire, purement
démocratiques (Eisenstadt 1973; Bach 2011). En conséquence, le remplacement de
l’ancienne élite subnationale par une coalition d’opposition pose la question de la fin
définitive de l’enclave autoritaire. Quoi qu’il en soit, il y eut une importante circulation
d’élites et ce, aussi bien à Bahia qu’à Oaxaca. Le triomphe sans conteste du PT lors des
élections à gouverneur à Bahia de 2014 et le passage de Wagner au gouvernement
fédéral en tant que ministre de la Défense, puis de la Casa Civil (devenant ainsi le
principal articulateur politique de la présidente Dilma; Portal Brasil 2015) renforcent
cette impression. À Oaxaca, lors des élections législatives de mi-mandat de 2013, la
coalition de Cué avança de façon notable, capturant pour la première fois la moitié des
sièges de l’assemblée législative (IEEPCO 2015).
Pour sa part, la méthode de la différence nous permet d’évaluer le rôle paradoxal de
la violence politique dans ce processus. Relativement absente à Bahia, très présente à
Oaxaca encore aujourd’hui, la violence politique ne semble pas avoir exercé d’effets
importants qui différencieraient un état de l’autre, ni dans un sens ni dans l’autre. Il y a
donc lieu de questionner le rôle de la répression comme étant soit un inhibiteur (à court
terme), soit un détonant (à long terme) du changement politique. D’autres formes de
rapport État-société, nommément le clientélisme, ressortent comme ayant un plus
grand potentiel d’explication.
Finalement, des nombreux analystes (Gibson 2005, 2013; Hernández Rodríguez
2008; Borges 2010) signalent l’importance des acteurs politiques fédéraux – gouverne-
ment, partis politiques, organisations sociales, etc. – dans le changement politique
subnational. Cependant, l’influence de ces acteurs est limitée par son caractère con-
tingent (ils n’interviennent que si leurs intérêts directs sont en jeu) et par sa fragmenta-
tion (puisque les acteurs fédéraux sont loin d’être homogènes ou d’agir de concert).
Toutefois, des facteurs fédéraux plus indirects, formels ou informels – tels que la
législation ou même les attentes politiques – jouent un rôle important dans l’encadre-
ment des dynamiques politiques subnationales et ne doivent pas être négligés.
Les rapports entre chaque état subnational et sa fédération sont très différents. À
Bahia, ACM chercha à déployer un poids politique important au niveau fédéral –
notamment comme membre clé des coalitions fédérales. Ce faisant, ACM obtint un
accès significatif aux ressources de l’État fédéral qu’il utilisa pour consolider son
emprise sur le système politique subnational. Le présidentialisme de coalition
brésilien, dans lequel le président doit créer des coalitions législatives aussi vastes que
possible pour faire passer son programme, favorisa ce résultat (Dantas Neto 2009;
Power 2010). Toutefois, la machine politique subnationale resta très vulnérable aux
322 J. DURAZO HERRMANN

variations dans la conjoncture politique fédérale, subissant rapidement les contrecoups


de l’expulsion de son chef de la coalition fédérale en 2001–2002 (Borges 2010).
À Oaxaca, les gouverneurs successifs cherchèrent aussi à exercer un certain
degré d’influence fédérale, notamment à travers les structures du PRI, mais l’auto-
nomie subnationale et le monopole de la médiation politique locale restèrent
prioritaires et concentrèrent leurs énergies (Gibson 2005). Le retrait du PRI vers
ses bastions subnationaux, surtout à partir de sa défaite fédérale de 2000, renforça
cette tendance (Hernández Rodríguez 2008). Le « nouveau fédéralisme » fiscal
mexicain des années 1990 finança ce repli politique (Alonso Criollo 2004;
Sobarzo 2005).
Ces tendances se maintinrent après l’alternance subnationale. À Bahia, le gouverneur
cherche toujours à jouer un rôle de premier plan au sein de la coalition fédérale dirigée
par le PT, tandis que sa contrepartie à Oaxaca se préoccupe surtout du respect de la
juridiction subnationale dans ses rapports avec la fédération.

Quelles sont les contributions de l’analyse comparative?


En étudiant la continuité et le renouvellement de pratiques telles que le clientélisme ou
la médiation politique dans un contexte de changement politique, notre article con-
tribue à une meilleure compréhension du rôle des acteurs et des structures sociaux dans
l’évolution des systèmes politiques subnationaux. À partir de cet examen des ruptures et
continuités subnationales, nous pouvons entreprendre une réflexion sociopolitique plus
large.
Il n’y a pas que les structures sociales qui sont en jeu dans l’évolution des enclaves
autoritaires subnationales. Les institutions politiques ont aussi un rôle à jouer. Si
certaines d’entre elles, notamment celles qui sont liées au système électoral, font l’objet
de réformes profondes et complètes dans la foulée de la démocratisation, d’autres,
notamment l’équilibre des pouvoirs – que ce soit entre l’exécutif, le législatif et le
judiciaire ou entre la fédération et les états subnationaux – et les procédures
législatives, changent beaucoup moins rapidement. Cette continuité peut produire des
effets pervers, dans la mesure où elle permet le développement et la consolidation de
régimes hybrides. Une recherche plus poussée sur le rôle de l’état de droit dans ce
processus permettra d’approfondir davantage notre réflexion sur la pénétration des
nouvelles pratiques politiques (O’Donnell 2001).
Notre étude sur l’évolution des enclaves autoritaires subnationales à Bahia et Oaxaca
nous permet aussi d’explorer le fonctionnement des systèmes politiques fédéraux. Au-
delà des enjeux constitutionnels et des conflits de juridiction, cette approche identifie le
rôle et le poids important, mais ponctuel des acteurs et des pratiques politiques
fédéraux – de quelque nature qu’ils soient – lorsque vient le moment de déterminer
la direction que prend un système politique subnational.
La comparaison entre ces deux états subnationaux nous éclaire aussi sur les circon-
stances dans lesquelles les acteurs politiques subnationaux – notamment les élites au
pouvoir – décident ou non de s’engager activement dans les dynamiques politiques
fédérales. La présence au Brésil du présidentialisme de coalition fait de l’arène fédérale
un scénario clé du boundary control bahianais.
CANADIAN JOURNAL OF LATIN AMERICAN AND CARIBBEAN STUDIES 323

Finalement, l’analyse comparée de Bahia et Oaxaca nous apprend davantage sur la


nature des processus de démocratisation latino-américains. Au-delà de la question
évidente de la pénétration de la démocratie au niveau subnational, nous pourrons
examiner l’évolution des rapports État-société dans un contexte d’hybridation, notam-
ment celle du clientélisme et du leadership charismatique, et leurs effets sur la coex-
istence de pratiques autoritaires et de procédures démocratiques.
Les contributions de l’étude de ces deux enclaves autoritaires brésilienne et mex-
icaine sont donc très riches en potentiel scientifique. L’analyse comparative se présente
comme l’outil idoine pour nous pencher systématiquement et en profondeur autant sur
les enjeux empiriques que sur les questions théoriques que soulève notre recherche.

Notes
1. Le niveau subnational est celui inférieur à l’État national, mais supérieur aux municipalités.
Dans les pays fédéraux, il s’agit des états fédérés (états ou provinces, selon la terminologie
utilisée; Durazo Herrmann 2009).
2. Dans le fédéralisme dual, chaque ordre de gouvernement dispose d’au moins une juridic-
tion qui lui est exclusive, créant ainsi deux niveaux visiblement distincts (Wheare 1963).
3. En 2007, le PFL s’est renommé Democratas (DEM), dans un effort de se dissocier
publiquement de son passé autoritaire (Democratas 25, 2011).
4. Le corporatisme d’État est une variante du corporatisme dans laquelle l’État est fortement
impliqué dans la création et le contrôle des organisations sectorielles (Schmitter 1974).
5. Une machine politique est une organisation politique qui se maintient au pouvoir en
adaptant la mise en place des politiques publiques aux demandes particulières de groupes
sociaux hétérogènes (Scott 1969).
6. En juin 2016, la violence politique refit surface à Oaxaca, mais engageant cette fois-ci l’État
fédéral et le syndicat des instituteurs (Méndez 2016).
7. L’exemple le plus emblématique est celui du groupe de carnaval « Filhos de Gandhy », lié
au syndicat de dockers du port de Salvador, et dont ACM était le parrain officiel.
8. Le PMDB fut longtemps le seul parti légal d’opposition au Brésil sous le régime militaire
(Mainwaring 1997).
9. Le governismo, au niveau subnational, est la tendance des députés et des maires à s’allier au
gouverneur de l’état pour profiter de davantage de ressources publiques. Il s’agit d’une façon
non-idéologique et extra-patisane de construire des alliances politiques (Abrucio 1998).

Remerciements
L’auteur souhaite remercier Micheline de Sève, Celina Souza, Edward Gibson, Fábio Henrique
Pereira et les évaluateurs anonymes pour leurs commentaires à des versions antérieures de cet article.

Déclaration
No potential conflict of interest was reported by the author.

Financement
Le Fonds québécois de recherche sur la société et la culture finança généreusement cette
recherche.
324 J. DURAZO HERRMANN

Notes sur les collaborateurs


Julián Durazo Herrmann is a professor of comparative politics at Université du Québec à
Montréal, and works on the problems of democratic consolidation at the subnational level in
Brazil and Mexico.

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