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Chapter 10

Rappels et compléments sur les suites


Vers les années 60 après J.C., le grecque Héron d'Alexandrie, inventeur génial d'instruments mé-
caniques divers : boîtes à théâtre miniatures, armes de guerre, instruments de mesure, etc...
√ mit
au point un algorithme qui dénit des termes successifs se rapprochant rapidement de 2. Ces
termes successifs, appelés suites sont donnés par la relation :
1 2
un+1 = .(un + ), n ≥ 0, u0 = 1.
2 un
A partir de cette ancienne période qu'a commencé l'étude des suites.
Dans ce chapitre, qui ne fait pas partie de ce module, on rappelle des résultats essentiels sur les
suites qui nous serons utiles pour aborder les chapitres suivants.

1.1 Suites réelles ou numériques


Dans cette section, on suppose que IK est le corps des nombres réels IR.
Dénition 1.

Une suite numérique (un )n∈IN ou (un ) est une application n → un de IN dans IK. un
s'appelle le terme général de la suite.

Dénition 2.

On dit qu'une suite numérique (un )n∈IN est :


• majorée s'il existe M ∈ IR tel que, pour tout n ∈ IN, un ≤ M ,
• minorée s'il existe m ∈ IR tel que, pour tout n ∈ IN, un ≥ m,
• bornée s'il existe A ∈ IR tel que, pour tout n ∈ IN, |un | ≤ A.

• Il est facile de voir qu'une suite est bornée si et seulement si elle est majorée et minorée.
• La notion mathématique la plus importante concernant les suites est celle de convergence. Nous
donnons d'abord la dénition de cette notion.

1
Dénition 3.

i) Une suite numérique (un ) est convergente si :


∃ l ∈ IK tel que ∀ ε > 0, ∃ N ∈ IN tel que pour n ≥ N ⇒ |un − l| ≤ ε.

ii) La valeur l est appelée limite de la suite (un ) et on note lim un = l.


n→∞
iii) Si une suite (un ) n'admet pas de limite nie ou admet une limite innie, on dit qu'elle
diverge.

• Si l = +∞, l = lim un signie :


n→∞

∀ A ∈ IK, ∃ NA ∈ IN tel que pour n ≥ NA ⇒ un ≥ A.

• En faisant la négation de la propritété i) ci dessus, une suite (un ) diverge si :

∀ l ∈ IK ∃ ε > 0, tel que ∀ N ∈ IN, ∃ n ≥ N tel que |un − l| > ε.

1.1.1 Propriétés des suites réelles


Dans ce §, nous décrivons les propriétés importantes des suites.

Proposition 4.

Soient (un ) et (vn ) deux suites de réels tels que pour tout n ∈ IN, un ≤ vn . Supposons
que lim un = l1 et que lim vn = l2 . Alors l1 ≤ l2 .
n→∞ n→∞

Remarque 5.

Même si on suppose que pour tout n ∈ IN, un < vn , on ne peut pas en déduire que l1 < l2
(on a normalement une inégalité large l1 ≤ l2 ).
Exemple : pour les deux suites , un = 0 et vn = 1/n, on a, ∀n ∈ IN∗ , un < vn mais
l1 = l2 = 0.

Proposition 6 (Théorème des Gendarmes).

Soient (un ), (vn ) et (wn ) trois suites de réels telles que pour tout n ∈ IN on a : un ≤
vn ≤ wn . On suppose que lim un = lim wn = l (l ni ou inni). Alors lim vn = l.
n→∞ n→∞ n→∞

• Il existe une notion proche de celle de suite convergente, mais ne nécessitant pas de préciser la
valeur de l.

2
Dénition 7 (Suite de Cauchy).

Soit (un ) une suite réelle. On dit que (un ) est une suite de Cauchy si et seulement si on
a:
pour tout ε > 0, il existe Nε tel que : ∀n ≥ Nε et ∀m ≥ Nε ⇒ |un − um | ≤ ε.

I Quelle relation entre une suite de Cauchy et une suite convergente ?

Propriété 8.

Si une suite est convergente, alors elle est de Cauchy.

Remarque 9.

ATTENTION : la réciproque de la propriété ci dessus n'est pas vraie en général. Par


contre, le fait de travailler sur un espace où la réciproque est vraie serait bien pratique.
En eet nous pourrions montrer la convergence d'une suite sans avoir à calculer la limite
de cette suite.

Dénition 10 (Ensemble complet).

Si dans un ensemble toute suite de Cauchy est convergente, on dit que cet ensemble est
complet.

I Exemple :
Q n'est pas complet. En eet, considérons la suite dénie par u0 = 2 et pour tout n ∈ IN,
un+1 = ( 12 )(un + u2n ). Tous les un sont bien dans Q et peut montrer facilement que cette suite est
de Cauchy. Or, si sa limite est l, alors l = ( 12 )(l + 2l ), c'est à dire l2 = 2 donc l n'existe pas dans Q!

Remarque 11 (Ce qu'est IR).

IR est le complété de Q: c'est Q "au quel on rajoute toutes les limites des suites de
Cauchy". (Cette phrase ne constitue bien sûr pas une construction rigoureuse de IR).
Mais ce n'est pas la seule façon de construire IR. Il en existe deux autres équivalentes.
L'une d'elle permet de dénir IR à partir de Q par la notion de borne sup qui est l'objet
du § suivant.

3
1.1.2 Bornes supérieures, inférieures. Maximum, minimum
Dénition 12.

a) On dit que M est la borne supérieure d'une partie A ⊂ IR si et seulement si :


• M majore A, i.e. ∀x ∈ A : x ≤ M,
• Si M 0 est un majorant de A, alors M ≤ M 0 .
b) On dit que m est la borne inférieure d'une partie A ⊂ IR si et seulement si :
• m minore A, i.e. ∀x ∈ A : m ≤ x
• Si m0 est un minorant de A, alors m0 ≤ m.

• Sous réserve d'existence, la borne supérieure et la borne inférieure sont uniques. On notera :
M = sup(A), m = inf(A).

Propriété 13 (Majorant et suites).

  M est un majorant de A,

M = sup(A) si et seulement si  il existe une suite (un ) d'éléments de A


 telle que lim u = M.
n
n→∞

• Une propriété analogue à celle ci dessus est aussi vraie pour la borne inférieure.

Dénition 14.

On dit que M est le maximum de A ⊂ IR (M = max(A)) si M = sup(A) et M ∈ A.


On dit que m est le minimum de A ⊂ IR (m = min(A)) si m = inf(A) et m ∈ A.

• On peut maintenant décrire la deuxième façon de construire IR : IR correspond à Q auquel on


rajoute "toutes les bornes sup et inf de sous-ensembles de Q". On a alors le résulat suivant.
Proposition 15.

1. Toute partie A de IR non vide et majorée (resp. minorée) admet une borne
supérieure (resp. une borne inférieure).
2. Tout réel est la borne supérieure (resp. inférieure) d'un ensemble de Q. On dit que
Q est dense dans IR.

• De l'assertion 2 ci dessus on peut en déduire que " Tout nombre irrationnel est limite d'une suite
de nombres rationnels ".

4
Remarque 16.

La version légère de l'assertion 1 ci dessus peut se traduire par " Toute suite de nombres
réels croissante (resp. décroissante) et majorée (resp. minorée) est convergente ". √
Cependant Q n'a pas la propriété de la borne sup : {x ∈ Q tel que x2 < 2} admet √ 2
comme borne sup dans IR et n'admet pas de borne sup dans Q. Par ailleurs, 2 peut
être approché par une suite de nombres rationnels, par exemple la suite de Héron √ (voir
début de ce chapitre)
√ qu'on peut montrer qu'elle est croissante et majorée par 2, donc
elle converge vers 2.

• Enn, la troisième façon de construire IR utilise les suites croissantes (resp. décroissantes) et
majorées (resp. minorées) : IR sera alors Q auquel on rajoute "toutes les limites de suites croissantes
(resp. décroissantes) et majorées (resp. minorées) de Q". On a alors le résultat suivant.
Proposition 17.

Toute suite réelle (un ) croissante et majorée (resp. décroissante et minorée) converge et
on a lim un = sup un (resp. lim un = inf un ).
n→∞ n∈IN n→∞ n∈IN

• Le résultat ci dessus n'est pas vrai dans Q (comme contre exemple, la suite de Héron).

1.1.3 Suites adjacentes


Dénition 18.

On dit que deux suites de réels (un ) et (vn ) sont adjacentes si et seulement si :
a- l'une des deux suites est décroissante,
b- l'autre suite est croissante,
c- lim (un − vn ) = 0.
n→∞

Proposition 19.

Soient (un ) et (vn ) deux suites réelles adjacentes telles que (un ) soit décroissante et (vn )
soit croissante. Alors :
1. ∀ (n, m) ∈ IN2 on a vn ≤ um ,
2. lim un et lim vn existent, sont nies et sont égales.
n→∞ n→∞

1.1.4 Comparaison des suites


Dans ce § nous dénissons la notion de suite négligeable devant une suite et suite équivalente à
une autre suite lorsque n tend vers +∞.

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Dénition 20.

On dit qu'une suite (un ) est négligeable devant une autre suite (vn ) si et seulement si il
existe une suite (εn ) qui converge vers 0 et un entier N tel que :
∀ n ≥ N, un = vn εn .

On notera un = o(vn ) (lire "petit o").

I Exemples :
1
1. 1
n2 est négligeable devant 1
n lorsque n → +∞. En eet n2
1 = 1
n → 0. On notera 1
n2 = o( n1 ).
n

2. log(n) est négligeable devant nα , α > 0, lorsque n → +∞. En eet, d'après les croissances
comparées classiques log(n)
nα → 0. On écrira log(n) = o(n ).
α

• Interprétation :
Si vn 6= 0, à partir d'un certain rang, dire que (un ) est négligeable devant (vn ) équivaut à dire que
: un
= εn → 0 lorsque n → +∞.
vn

Proposition 21.

i)- Si un = o(vn ) et vn = o(wn ) alors un = o(wn ).


ii)- Si un = o(vn ) et u0n = o(vn0 ) alors un .u0n = o(vn .vn0 ).
iii)- Pour tout k 6= 0, o(un ) = o(k.un ).
iv)- Si un = o(vn ) et u0n = o(vn ) alors un + u0n = o(vn ).

Dénition 22.

On dit que deux suites (un ) et (vn ) sont équivalentes si et seulement si il existe une suite
(εn ) qui tend vers 0 et un entier N tel que :

∀ n ≥ N, un = vn (1 + εn ).

On notera un ≈ vn .

• Interprétation :

• Si vn 6= 0, à partir d'un certain rang, dire que (un ) est équivalente devant (vn ) équivaut à
dire que :
un
= 1 + εn → 1 lorsque n → +∞.
vn
C'est ce qui est demandé à faire dans la pratique. Quand une fraction tend vers 1, le
numérateur et le dénoménateur sont presque égaux.

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• La dénition de suites équivalentes fait jouer un rôle symétrique aux deux suites (ce qui
justie le mot équivalent car si ∀n > N, un ≈ vn on obtient aussi :
   
1 −εn
vn = u n = un 1 + = un (1 + αn ), avec αn → 0. D'ou vn ≈ un .
1 + εn 1 + εn

En pratique, pour obtenir un équivalent de un on utilise souvent les développements limités.

Propriété 23.

1. Si un ≈ vn alors vn ≈ un (symétrie)
2. Si un ≈ vn et vn ≈ wn alors un ≈ wn (transitivité).
3. Si un ≈ vn et u0n ≈ vn0 alors un .u0n ≈ vn .vn0 (compatibilité avec le produit).
4. Si un ≈ vn et u0n ≈ vn0 alors un
u0n ≈ vn
0
vn (compatibilité avec le quotient).
5. Si un ≈ vn alors uαn ≈ vnα (compatibilité avec l'élévation à la puissance).
6. Si un ≈ vn et si un →n→∞ l (resp. ∞) alors vn →n→∞ l (resp. ∞)
7. Si un →n→∞ l 6= 0 alors un ≈ l.
8. Si un ≈ vn et si lim un = lim vn = 0+ (resp. +∞) alors log(un ) ≈ log(vn ).
n→∞ n→∞

9. Si un = o(vn ) alors un +vn ≈ vn . (Dans une somme on peut négliger, à un équivalent


près, les termes négligeables).

Remarque 24.

En général, un ≈ vn n'implique pas que f (un ) ≈ f (vn ). En eet, voici un contre exemple
simple qui montre ceci.
Soient un = n+n2 et vn = n2 . Montrons que un ≈ vn mais eun n'est pas uéquivalent à evn .
Puisque le rapport uvnn = n1 + 1 → 1, on en déduit que un ≈ vn , mais eevn = en → +∞,
n

et donc les suites (e ) et (e ) ne sont pas équivalentes.


un vn

• Voici une liste d'équivalents classiques à connaître. Si (εn ) est une suite convergeant vers 0, alors
on a :
1. log(1 + εn ) ≈ εn .
2. eεn − 1 ≈ εn .
3. (1 + εn )α − 1 ≈ α.εn , α ∈ IR.
4. sin(εn ) ≈ εn .
5. tan(εn ) ≈ εn .
ε2n
6. 1 − cos(εn ) ≈ 2 .

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1.2 Suites complexes
1.2.1 Introduction
Dans IR, il n'existe pas de x solution de l'équation algébrique x2 + 1 = 0. Pour avoir une solution
de telle équation, il faut introduire le nombre imaginaire i qui vérie i2 = −1. On dénit alors les
nombres complexes comme la somme d'une partie réelle et d'une partie imaginaire :

C = {z = a + ib, a ∈ IR, b ∈ IR}

Un des intérêts principaux des nombres complexes est leur formulation module-argument.

Propriété 25.

Soit z = a + ib ∈ C. Il existe un unique √


couple (ρ, θ) ∈ IR∗ × [0, 2π[ tel que z = ρeiθ . On
a alors a = ρ cos(θ), b = ρ sin(θ) et ρ = a2 + b2 .

• Si z = ρeiθ et z 0 = ρeiθ , on a zz 0 = ρei(θ+θ ) . Ce qui signie qu' une multiplication par un


0 0

nombre complexe de module 1 correspond à une rotation. C'est pour cette raison qu'on utilise les
nombres complexes pour modéliser les phénomènes oscillants.

1.2.2 Suites complexes : Dénition et convergence


Dans cette section, on suppose que IK est le corps des nombres complexes C.

Dénition 26.

Une suite complexe (zn )n∈IN ou (zn ) est une application n → un de IN dans IK. zn
s'appelle le terme général de la suite.

• La notion de convergence pour les suites complexes est décrite par la dénition suivante.

Dénition 27.

i) Une suite complexe (zn ) est convergente si :


∃ l ∈ IK tel que ∀ ε > 0, ∃ N ∈ IN tel que pour n ≥ N ⇒ |zn − l| ≤ ε

ii) La valeur l est appelée limite de la suite (zn ) et on note lim zn = l.


n→∞
iii) Si une suite (zn ) n'admet pas de limite nie, on dit qu'elle diverge.

• Dans IR on dénit des voisinages de +∞ et de −∞, ce qui permet de dénir des limites innies.
Dans C on ne le fait pas : une limite innie dans C n'a aucun sens !

8
Dénition 28.

Soit (zn ) une suite complexe. On dit que (zn ) est une suite de Cauchy si et seulement si
on a : pour tout ε > 0, il existe Nε ∈ IN tel que
(n ≥ Nε et m ≥ Nε )) ⇒ |zn − zm | ≤ ε.

• Comme dans IR, toute suite complexe de Cauchy est convergente. Autrement dit, C est complet.
La preuve de cette propriété passe par le résultat suivant.
Proposition 29.

Soit (zn ) une suite complexe. Alors les propositions suivantes sont équivalentes :
1. (zn ) est une suite de Cauchy dans C.
2. Les parties réelles et imaginaires de (zn ) sont des suites de Cauchy dans IR.
3. Les suites parties réelles et imaginaires de (zn ) convergent dans IR.
4. (zn ) est une suite convergente dans C.

• Une autre propriété des suites complexes.


Propriété 30.

Soit (zn ) une suite complexe et l ∈ C. On a


lim zn = l (limite dans C) ⇒ lim |zn | = |l| (limite dans IR)
n→∞ n→∞

Remarque 31.

ATTENTION : La réciproque du résultat ci dessus n'est pas vraie. Il n'y a que deux
cas où l'étude de la suite module permet de conclure sur la convergence de la suite :
• Si lim |zn | = 0 alors lim zn = 0.
n→∞ n→∞

• Si lim |zn | = +∞ alors (zn ) diverge.


n→∞

♣ DIFFERENCE FONDAMENTALE ENTRE IR ET C : il n'y a pas de relation d'ordre


(similaire à ≤) dans C. Donc pas de notion de suite croissante, de majoration, de théorème des
gendarmes, etc...

1.3 Limites sup et inf


Dans cette section, nous ne considèrerons que les suites réelles. La relation d'ordre ≤ de IR permet
de dénir la lim sup et la lim inf d'une suite réelle. L'intérêt est que la lim sup et la lim inf existent

9
toujours, dans IR ∪ {−∞, +∞} contrairement à la limite.
Dénition 32.

Soit (un ) une suite réelle. Par dénition, lim sup un = lim sup uk , et lim inf un =
n→+∞ n→+∞n≥k n→+∞
lim inf uk
n→+∞n≥k

Remarque 33.

1. Cette dénition s'étend aux suites non nécessairement bornées, en posant :


lim sup un = +∞, si la suite n'est pas majorée
n→+∞

et
lim inf un = −∞, si la suite n'est pas minorée
n→+∞

2. La suite (sup)n∈IN étant décroissante, elle admet toujours une limite dans IR ∪
n≥k
{−∞, +∞}. De même, la suite ( inf )n∈IN étant croissante, elle admet toujours une
n≥k
limite dans IR ∪ {−∞, +∞}.

• Il est commode de relier la lim sup et la lim inf d'une suite à ses valeurs d'adhérence.

Dénition 34 (Valeur d'adhérence).

Soit (un ) une suite réelle et a ∈ IR ∪ {−∞, +∞}. On dit que a est une valeur d'adhérence
de (un ) si et seulement si il existe une sous-suite de (un ) qui tend vers a.

On a alors les deux propriétés suivantes :


Propriété 35.

Soit (un ) une suite réelle. Sa limite supérieure est la plus grande de ses valeurs
d'adhérence, et sa limite inférieure est la plus petite.

Propriété 36.

Une suite réelle (un ) tend vers l ∈ IR ∪ {−∞, +∞} si et seulement si lim sup un =
n→+∞
lim inf un = l.
n→+∞

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