En la fête des apô tres Simon et Jude, l'Eglise nous offre le
texte de Luc dans lequel les apô tres sont appelés et nommés. Luc est considéré comme l'initiateur de la tradition des "douze" et des "soixante-douze". Pour Luc, "les douze" symbolisaient la continuité avec Israël et c'est pourquoi, dans les Actes des Apô tres, il est nécessaire de compléter le quorum des "douze" après la mort de Judas. Les chrétiens considéraient les "douze" comme le remplacement des tribus d'Israël, de sorte qu'ils étaient le nouvel Israël. Dans les Actes des Apô tres, l'apô tre est décrit comme celui qui a accompagné le groupe dans le ministère de Jésus, du baptême à l'ascension, et qui est devenu témoin de la résurrection. Dans le récit de la dernière Cène, Luc interchange les disciples avec les apô tres sans les différencier. Dans le récit de la résurrection, Luc parle des femmes comme de disciples témoins de la résurrection. Paul, l'apô tre des païens par excellence, ne remplit pas ces conditions et n'est jamais appelé apô tre par Luc. Pour Luc, "les douze" sont le lien qui assure la continuité entre la proclamation du règne de Dieu par Jésus et la prédication de l'É vangile par l'É glise. Les "Douze" peuvent être considérés comme un signe d'unité dans la diversité, car la liste comprend des pêcheurs, un zélote, des Galiléens, un Juif, un collecteur d'impô ts, quelqu'un qui porte un nom grec et Judas Iscariote. Il est utile de rappeler que l'on ne se souvient plus ce groupe qui, à première vue, semble si important. Dans les deux listes de Luc (É vangile et Actes), les noms ne coïncident pas. Curieusement, ce groupe de compagnons de Jésus, qui l'ont suivi si assidû ment, disparaît complètement du panorama de l'É glise naissante elle-même. Simon reçoit de Jésus le surnom de "Rock" (Pierre) et apparaît en premier dans toutes les listes. Le dernier nommé est Judas Iscariote. Judas signifie juif. Luc est l'évangéliste qui parle le plus de la prière et qui fait prier Jésus avant chaque décision importante. Depuis l'histoire de la rencontre de Moïse avec Yahvé sur le mont Sinaï, la montagne est un lieu de prière. Il est intéressant de noter que le sermon des Béatitudes se déroule sur une montagne dans Matthieu et dans une plaine dans Luc. Jésus passe la nuit en prière. Et, bien que l'on ait cru que la nuit était dominée par les mauvais esprits, l'homme pieux, même dans la nuit, rencontre Dieu. Luc présente "les douze" comme des envoyés qui ne sont pas envoyés pour leur propre mérite, mais à l'initiative de Jésus. Ce sont des personnes au service de la communauté et non pour occuper des positions de pouvoir ou d'honneur humain. Ils sont les représentants et les figures du peuple de Dieu. Dieu n'a pas un projet de salut individuel, mais un projet de salut collectif. Son amour pour les hommes se manifeste avant tout en groupe, au sein du peuple de Dieu et à son service. Le Concile Vatican II dira également que l'É glise est au service de l'humanité et non d'elle-même. Et c'est l'un des points sur lesquels François insiste pour que l'É glise évite l'autoréférentialité. Dans l'esprit de Luc, ce groupe spécial de disciples, les douze, était destiné à être avec Jésus et à être ses émissaires, ses témoins. Dans le texte de la lettre aux Ephésiens, Paul mentionne les apô tres et les prophètes comme les fondations de l'édifice dont nous faisons partie et dont Jésus-Christ est la pierre angulaire. Que la célébration de ces deux apô tres nous aide à ressentir le sens de l'appartenance à l'É glise apostolique et la responsabilité de la transmission du salut qu'elle assume.