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G. Lacombe
Sommaire
Sommaire. 3
Chapitre 2. Séries 23
I. Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
II. Séries à termes réels positifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
II.1. Comparaison avec des séries géométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
II.2. Règle de Cauchy . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
II.3. Règle de D’Alembert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
II.4. Comparaison séries-intégrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
III.Séries à termes quelconques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
III.1. Séries absolument convergentes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
III.2. Une application : un théorème du point fixe . . . . . . . . . . . . . . . . 29
III.3. Séries alternées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
III.4. Exercice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
IV. Produit de séries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
V. Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
Chapitre 6. Dérivation 72
I. Le théorème des accroissements finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
I.1. Recherche d’extrema locaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
I.2. Théorème de Rolle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
I.3. Théorème des accroissements finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
II. Premières applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
II.1. Sens de variations d’une fonction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
II.2. Prolongement de la dérivée en un point . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
II.3. La propriété des valeurs intermédiaires pour f 0 . . . . . . . . . . . . . . 76
III.Formules de Taylor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
III.1. Formule de Taylor-Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
III.2. Formule de Taylor avec reste intégral . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
III.3. Formule de Taylor-Young . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
IV. Développements limités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
IV.1. Premières propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
IV.2. Opérations sur les développements limités . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
IV.3. Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
V. Développements asymptotiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
VI. Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
Sommaire 5
Index 157
Avertissement Ce cours est destiné à des étudiants préparant le CAPES, et donc ayant
tous déjà rencontré dans leur scolarité la plupart des notions qui y sont présentées. C’est
pourquoi il peut arriver parfois que certaines définitions et certains théorèmes soient utilisés
avant d’avoir été introduites ou démontrés. L’important est qu’aucun théorème ne soit
utilisé de façon directe ou indirecte dans sa propre démonstration, et le lecteur pourra
vérifier qu’il en est bien ainsi.
Références bibliographiques :
J.-M. Arnaudiès, H. Fraysse, Cours de mathématiques, Dunod, 1988. Pour les
exemples traités dans le cours, et pour quelques exercices, malheureusement pas corrigés.
Le cours lui-même n’est sans doute pas le plus aisé à lire.
G. Auliac, J.-Y. Caby, Analyse pour le CAPES et l’Agrégation interne, Ellipses,
2002. A l’avantage d’être en parfaite symbiose avec le programme de l’écrit du CAPES.
J.-P. Demailly, Analyse numérique et équations différentielles, P.U.G., 1997.
J.-M. Monier, Cours de mathématiques, Dunod, 1970-2003. Pour les exercices cor-
rigés.
E. Ramis, C. Deschamps et J. Odoux, Cours de mathématiques spéciales, Dunod,
197 ?. Un grand classique à l’usage des classes préparatoires.
W. Rudin, Principles of Mathematical Analysis, McGraw-Hill, 1976. Existe aussi en
traduction française. Se lit comme un roman.
Chapitre 1
Suites de nombres réels ou complexes
I. Les nombres réels, notion de borne supérieure
Nous supposons déjà construit le corps des nombres réels. Nous en rappelons ici, de
manière très informelle, les propriétés caractéristiques :
L’ensemble R, muni de l’addition, de la multiplication et de la relation d’ordre usuelles,
est un corps totalement ordonné qui vérifie la propriété de la borne supérieure.
Précisons le sens des termes employés ici :
– un corps (K, +, ·) muni d’une relation d’ordre ≤ est dit ordonné si cette relation
d’ordre est compatible avec les lois de corps, à savoir si, pour tous λ ∈ K, x, y, z ∈ K,
x ≤ y ⇒ x + z ≤ y + z ; (λ ≥ 0 x ≤ y) ⇒ λx ≤ λy.
– La relation d’ordre est un ordre total si tous les éléments de K sont comparables,
c’est-à-dire si, pour tous x, y ∈ K, on a x ≤ y ou y ≤ x.
– La propriété de la borne supérieure s’énonce ainsi :
Proposition I.1 Toute partie non vide et majorée de R admet une borne supérieure.
Définition I.2 Une partie A de R est dite majorée s’il existe un réel M ∈ R tel que, pour
tout x ∈ A, x ≤ M . On dit alors que le réel M est un majorant de A.
Définition I.3 Le plus petit des majorants de la partie majorée A de R est appelé sa
borne supérieure. On le note sup A.
Le point crucial est l’existence de sup A, existence qui est garantie par la proposition I.1
si A n’est pas vide. Remarquons que si nous nous placions dans Q et non dans R, cette
proposition I.1 serait fausse : par exemple, l’ensemble A = {x ∈ Q ; x2 ≤ 2} est une partie
majorée de Q, mais elle n’admet pas de borne supérieure dans Q. En effet, l’ensemble de
ses majorants dans Q est :
{M ∈ Q , M 2 ≥ 2},
et cet ensemble n’a certainement pas de plus petit élément dans Q.
(Exercice 1 : préciser ce raisonnement.)
En termes imagés, l’on pourrait d’ailleurs dire que la construction de R due à Dedekind
(1872) consiste à “rajouter” à Q une borne supérieure à chacune de ses parties non vides
et majorées.
8 Analyse réelle pour le CAPES
Définition I.4 Le plus grand des minorants d’une partie minorée A de R s’appelle sa
borne inférieure.
inf A = sup(−A).
Proposition I.5 Soit A une partie non vide de R et soit M un majorant de A. Le réel
M est la borne supérieure de A si et seulement si, pour tout ε > 0, l’intervalle ]M − ε, M ]
rencontre A, c’est-à-dire si et seulement si :
Démonstration. C’est à peu près immédiat : si M = sup A, alors, pour tout ε > 0, le réel
M − ε n’est pas un majorant de A (par définition de la borne supérieure). Donc il existe
x ∈ A tel que x > M − ε. Comme M est un majorant de A, on a nécessairement x ≤ M .
Réciproquement, la propriété (∗) affirme en particulier que, pour tout ε > 0, le réel
M − ε n’est pas un majorant de A. Comme nous savons que M en est un, c’est donc lui
le plus petit. Donc M = sup A.
Démonstration. Supposons par l’absurde que ce n’est pas vrai, c’est-à-dire que l’ensemble
N est majoré par x. Alors, d’après la proposition I.1, il admet une borne supérieure, que
nous notons α. Par définition de la borne supérieure, nous pouvons dire que α − 1 n’est
pas un majorant de N. Donc il existe un entier n ∈ N tel que α − 1 > n. Mais alors l’entier
n + 1 est supérieur à α, ce qui est en contradiction avec le fait que α = sup N.
En prenant un peu d’avance sur le cours consacré aux suites, remarquons que cette
proposition est équivalente à la suivante :
∀x > 0 ∃n ∈ N∗ t.q. n ≥ x.
Suites de nombres réels ou complexes 9
On pourra vérifier à titre d’exercice que cet énoncé est bien équivalent à celui donné plus
haut.
Remarque 2 Puisque N n’est pas majoré dans R, on voit que l’ensemble −N n’est pas
minoré, et donc que l’ensemble Z n’est ni majoré, ni minoré dans R.
I.3. Partie entière d’un nombre réel C’est la propriété d’Archimède qui permet de
définir la partie entière d’un nombre réel x ∈ R.
Commençons par le cas où x ≥ 0. L’ensemble A = {n ∈ N, n > x} n’est pas vide
comme nous venons de le voir. Toute partie non vide de N admettant un plus petit élément,
il en suit que A admet un plus petit élément, que nous notons p. Ainsi, p − 1 6∈ A, et donc
p ≤ x. Nous avons donc :
p − 1 ≤ x < p.
L’entier p − 1 s’appelle la partie entière de x.
Si maintenant x < 0, nous raisonnons sur l’ensemble
B = {n ∈ N t.q.n ≥ −x} ⊂ N.
Comme ci-dessus, la propriété d’Archimède assure que B n’est pas vide et admet donc un
plus petit élément, que nous notons p. Ainsi, p − 1 6∈ B et donc p − 1 < −x. Finalement,
nous avons : p ≥ −x > p − 1, soit, après multiplication par −1 :
−p ≤ x < −p + 1.
(∗) p ≤ x < p + 1.
I.4. L’ensemble Q est dense dans R Nous pouvons déduire le la propriété d’Archimède
la propriété suivante :
Proposition I.9 Soient x et y deux réels tels que x < y. Alors l’intervalle ]x, y[ rencontre
Q.
Démonstration. Soit n ∈ N tel que n > 1/(y − x). Nous avons : ny − nx > 1. Il y a donc
un entier dans l’intervalle ]nx, ny[, à savoir m = E(nx) + 1. Ainsi : nx < m < ny et donc :
x < (m/n) < y.
Exercice. Démontrer que si x < y, alors l’ensemble ]x, y[∩Q est infini.
10 Analyse réelle pour le CAPES
I.5. Valeur absolue Nous finissons ce paragraphe par quelques rappels élémentaires sur
la valeur absolue d’un nombre réel.
Définition I.10 La valeur absolue du nombre réel x est le plus grand des deux nombres
x, −x. On le note |x|.
Définition II.1 Soit u une suite numérique et soit l ∈ K. On dit que l est limite de la
suite u si :
∀ε > 0 ∃N ∈ N ∀n ≥ N |un − l| ≤ ε.
Ajoutons qu’une suite est dite convergente si elle admet une limite. Une suite qui n’admet
pas de limite est dite divergente.
Proposition II.2 (Unicité de la limite) Une suite convergente admet exactement une
limite.
∀n ≥ N1 , |un − l1 | ≤ ε, et ∀n ≥ N2 , |un − l2 | ≤ ε.
2
|l1 − l2 | ≤ |l1 − un | + |un − l2 | ≤ 2ε = |l1 − l2 |
3
(inégalité triangulaire), ce qui est absurde.
Proposition II.3 Soit u une suite et soit l ∈ K. Il y a équivalence entre les trois pro-
priétés suivantes :
– limn→+∞ un = l ;
– limn→+∞ (un − l) = 0 ;
– limn→+∞ |un − l| = 0.
Proposition II.4 Soit u une suite de nombres complexes. La suite u converge vers l ∈ C
si et seulement si
lim <e un = <e l et lim =m un = =m l.
n→+∞ n→+∞
Proposition II.5 Soient u et v deux suites numériques et soit l ∈ K. On suppose que les
deux suites u et v sont égales à partir du rang N ∈ N, c’est-à-dire que, pour tout n ≥ N ,
un = vn . Alors
lim un = l ⇔ lim vn = l.
n→+∞ n→+∞
En d’autres termes, la limite d’une suite de dépend pas de ses premiers termes.
12 Analyse réelle pour le CAPES
Suites extraites Une suite extraite (ou sous-suite) d’une suite u est, par définition, une
suite dont le terme général est de la forme uφ(n) , où φ est une application strictement
croissante de N dans N. De façon plus concrète, une suite extraite de la suite u est obtenue
en supprimant des termes à cette suite. Le nombre φ(n) représente alors l’indice du n-ième
terme conservé.
Proposition II.6 Si la suite u converge vers l, alors toute suite extraite de u converge
aussi vers l.
Opérations sur les limites Nous laissons à nouveau le lecteur vérifier la proposition
qui suit :
Suites bornées
– Une suite u est dire bornée s’il existe un réel A > 0 tel que |un | ≤ A pour tout n ∈ N.
– Une suite réelle u est dite majorée s’il existe un réel A > 0 tel que un ≤ A pour tout
n ∈ N.
– Une suite réelle u est dite minorée s’il existe un réel A > 0 tel que un ≥ A pour tout
n ∈ N.
Ainsi, une suite réelle est bornée si et seulement si elle est majorée et minorée.
Proposition II.10 On suppose que la suite u tend vers a ∈ [−∞, +∞] et que la suite v
tend vers b ∈ [−∞, +∞]. Alors :
– La suite u + v tend vers a + b, dès que l’expression “a + b” a un sens ;
– La suite u · v tend vers ab dès que l’expression “ab” a un sens ;
– Si λ ∈ R∗ , alors la suite λu tend vers λa.
Proposition II.11 Soit un une suite réelle. La suite u tend vers 0 si et seulement si la
suite de terme général 1/|un | tend vers +∞.
Remarque importante. Le résultat est faux si l’on remplace les inégalités larges par des
inégalités strictes : si, par exemple, un = 1/(n + 1), on a : un > 0 pour tout n ∈ N mais
lim un = 0.
Proposition II.14 Soient u et v deux suites convergentes. On suppose que, pour tout
n ≥ N , un ≤ vn . Alors
lim un ≤ lim vn .
n→+∞ n→+∞
Encore une fois, cette propriété est fausse si l’on remplace les inégalités larges par des
inégalités strictes.
Théorème II.15 (dit “des gendarmes”) Soient a, b et u trois suites réelles. On sup-
pose que, pour tout n ≥ N ,
an ≤ un ≤ vn .
Si les deux suites a et b convergent vers la même limite, alors il en est de même de la suite
u.
Démonstration. Notons l la limite commune aux suites a et b. Soit ε > 0. Nous pouvons
choisir des entiers N1 et N2 tels que
∀n ≥ N1 l − ε ≤ an ≤ l + ε, ∀n ≥ N2 l − ε ≤ bn ≤ l + ε.
l − ε ≤ an ≤ un ≤ bn ≤ l + ε,
et donc |un − l| ≤ ε.
Suites de nombres réels ou complexes 15
A = {un , n ∈ N}.
Dire que la suite u est majorée revient à dire que cet ensemble A est majoré. Comme il
n’est pas vide, il admet une borne supérieure que nous notons α. Démontrons que la suite
u converge vers α. Soit ε > 0. Par définition de la borne supérieure, le réel α − ε n’est pas
un majorant de A. Nous pouvons donc choisir un entier N ∈ N tel que α − ε ≤ uN ≤ α.
Si la suite u est croissante, nous avons alors, pour tout n ≥ N ,
α − ε ≤ uN ≤ un ≤ α ≤ α + ε,
Si l’on note supn∈N un la borne supérieure de l’ensemble A défini ci-dessus, nous voyons
que, si u est une suite croissante et majorée,
lim un = sup un .
n→+∞ n∈N
Proposition III.3 (Suites adjacentes) Soient u et v deux suites réelles telles que :
– la suite u est croissante et la suite v est décroissante ;
– ∀n ≥ N , un ≤ vn ;
– limn→+∞ (vn − un ) = 0.
(Les deux suites u et v sont dites adjacentes.) Alors les deux suites sont convergentes, et
convergent vers la même limite.
Démonstration. La suite u est croissante et majorée à partir du rang N par vN . Donc elle
converge vers un réel l. La suite v est décroissante et minorée à partir du rang N par uN .
Donc elle converge vers une limite que nous notons l0 . Alors
Donc l = l0 .
Démonstration. Notons In = [un , vn ]. Les hypothèses assurent que les suites u et v sont
adjacentes. Ainsi, ces deux suites convergent vers un même réel α. Nous laissons au lecteur
le soin de vérifier que ∩n∈N In = {α}.
III.2. Théorème de Weierstrass Le théorème qui suit est une application fondamentale
du théorème des segments emboı̂tés.
Théorème III.5 (Weierstrass) Toute suite réelle bornée admet une sous-suite conver-
gente.
Démonstration. Considérons une suite u telle que, pour tout n ∈ N, un ∈ [−M, M ]. Notons
I0 = [−M, M ]. Partageons l’intervalle I0 en deux parties égales : I0 = [−M, 0] ∪ [0, M ].
Comme les termes de la suite u sont en nombre infini au moins un de ces deux sous-
intervalles contient une infinité de termes de la suite. Soit I1 ce sous-intervalle et uφ(1) le
premier terme de la suite contenu dans I1 . On a donc : I1 = [−M, 0] ou [0, M ]. I1 est donc
un intervalle de longueur M , c’est-à-dire : I1 = [x1 , y 1 ], avec y 1 − x1 = M . Recommençons
le procédé : nous partageons l’intervalle I1 en son milieu, ce qui nous donne deux sous-
intervalles, que nous choisissons fermés, de longueur M/2 et dont la réunion est I1 . Un de
ces deux sous-intervalles, que nous noterons : I2 = [x2 , y 2 ], contient une infinité de termes
de la suite u. Notons uφ(2) le premier terme de la suite contenu dans I2 qui soit différent
de uφ(1) . On construit ainsi par récurrence une suite d’intervalles
Ik = [xk , y k ],
telle que
I1 ⊃ I2 ⊃ I3 ⊃ . . . ⊃ Ik ⊃ . . . ,
et que chaque Ik soit un intervalle de longueur M 21−k et contienne une infinité de termes
de la suite u, ainsi qu’une suite extraite (uφ(k) ) telle que pour tout k ∈ N∗ , uφ(k) ∈ Ik . Nous
pouvons appliquer le théorème des segments emboı̂tés à la suite d’intervalles (Ik ), ou, ce
qui revient au même, appliquer le théorème des suites adjacentes aux deux suites x et y.
En tout état de cause, nous en déduisons que les deux suites x et y convergent vers une
même limite que nous notons α. Il suffit ensuite d’appliquer le théorème des gendarmes
aux trois suites de termes généraux xk , uφ(k) et y k pour en déduire que la suite (uφ(k) )
converge vers α.
Rappelons que théorème de Weierstrass peut aussi s’énoncer sous la forme suivante :
Définition III.7 Une suite numérique est dite de Cauchy si elle satisfait la propriété
qui suit :
∀ε > 0 ∃N ∈ N ∀p, q ∈ N, p, q ≥ N ⇒ |up − uq | ≤ ε.
Démonstration. Supposons que la suite u converge vers l et soit ε > 0. D’après la définition
de la limite, nous pouvons choisir N ∈ N tel que, pour tout n ≥ N , on ait :|un − l| ≤ ε/2.
Mais alors, si p, q ≥ N , on a :
ε ε
|up − uq | ≤ |up − l| + |l − uq | ≤ + = ε,
2 2
ce qui démontre la proposition.
Démonstration. Soit (un )n∈N une suite de Cauchy et soit N ∈ N tel que, pour tous
p, q ≥ N , on ait |up − uq | < 1. Alors, pour tout n ≥ N , on a |un | ≤ |uN | + 1. La suite est
donc bornée par
M = max |uN | + 1, max |uk | .
0≤k<N
Proposition III.10 Une suite de Cauchy qui admet une sous-suite convergente est con-
vergente.
Démonstration. Supposons que (un )n∈N est une suite de Cauchy et que la suite extraite
(unk )k∈N converge vers a ∈ E et soit ε > 0. Soient, d’une part, K ∈ N tel que, pour tout
k ≥ K, |unk −a| ≤ ε/2 et, d’autre part, N ≥ K tel que, pour tous p, q ≥ N , |up −uq | ≤ ε/2.
Alors, pour tout n ≥ N , on a
Ce résultat est aussi vrai pour les suites de Cauchy sur C, comme il est vu dans le cours
de topologie. Nous proposons deux démonstrations de ce théorème. La première utilise
le théorème de Weierstrass : puisque nous venons de voir que toute suite de Cauchy est
bornée, il vient que toute suite de Cauchy réelle admet une sous-suite convergente et donc,
par la proposition III.10, est elle-même convergente. Voici maintenant une démonstration
directe du théorème III.11, basée sur le théorème des suites adjacentes.
Suites de nombres réels ou complexes 19
βN − ε ≤ αN
(par définition du sup). Par conséquent, βN −αN ≤ ε. La suite (βn −αn ) étant décroissante
et à valeurs positives par construction, il vient que, pour tout n ≥ N ,
0 ≤ βn − αn ≤ ε,
et donc que βn − αn tend vers 0. Nous pouvons ainsi appliquer le théorème des suites
adjacentes pour en conclure que les deux suites (αn ) et (βn ) convergent toutes deux vers
la même limite. Enfin, puisque, par construction, nous avons :
αn ≤ un ≤ βn ,
pour tout n ∈ N, le théorème des gendarmes montre que la suite (un ) est elle aussi
convergente.
Une application pratique du théorème III.11 est le théorème du point fixe qui suit.
Nous anticipons ici sur le cours consacré aux fonctions continues sur R.
Théorème III.12 (du point fixe) Soit f une fonction définie sur un intervalle [a, b] et
à valeurs réelles, satisfaisant les hypothèses suivantes :
– f ([a, b]) ⊆ [a, b].
– Il existe un réel L ∈ [0, 1[ tel que pour tous points x et y dans [a, b] on ait :
Démonstration. Soit x0 ∈ [a, b] et soit (xn ) la suite définie par : xn+1 = f (xn ). Nous allons
démontrer que la suite (xn ) est de Cauchy. La remarque essentielle est que, si m ∈ N∗ :
Ainsi, pour tout p > n, nous avons |xp − xn | ≤ ALn , avec A = |x1 − x0 |/(1 − L). Comme
Ln tend vers 0, ceci montre que (xn ) est bien une suite de Cauchy. Elle converge donc vers
une limite que nous noterons α.
Vérifions que α est un point fixe pour f : en effet, on sait que pour tout entier n, on
a : xn+1 = f (xn ). Donc
α = lim xn+1 = lim f (xn ) = f (α).
n→∞ n→∞
Dans la ligne ci-dessus l’égalité de droite est justifiée par le fait que f est continue, comme
on s’en aperçoit immédiatement en constatant que si x est un point quelconque de [a, b],
|f (x + h) − f (x)| ≤ L|h| → 0 quand h → 0.
Nous avons donc démontré que f admet un point fixe.Il reste à démontrer que le point
fixe de f est unique. Supposons pour cela que β soit un autre point fixe de f . Alors
|α − β| = |f (α) − f (β)| ≤ L|α − β|.
Comme L < 1 ceci n’est possible que si α = β.
Remarquons que si f est dérivable, le théorème des accroissements finis (voir plus loin)
fournit immédiatement une condition suffisante simple pour que f soit contractante :
Proposition III.13 Si f est une fonction dérivable dans [a, b] et s’il existe un réel L ∈
[0, 1[ tel que pour tout x ∈ [a, b], |f 0 (x)| ≤ L, alors g est contractante sur [a, b].
Exercice Une fonction f telle que |f 0 (x)| < 1 pour tout x ∈ [a, b] est-elle contractante
sur [a, b] ?
Estimation de l’erreur Il est possible de connaitre la vitesse à laquelle la suite (xk )
converge vers sa limite α. Nous avons :
|α − xn | = lim |xp − xn |.
p→∞
Or si p > n,
|xp − xn | ≤ |xp − xp−1 | + . . . + |xn+1 − xn |
≤ (Lp−n−1 + . . . + L + 1)|xn+1 − xn |
1 − Lp−n
≤ |xn+1 − xn |.
1−L
Donc, en passant à la limite pour p → ∞ :
1
|α − xn | ≤ |xn+1 − xn |.
1−L
Si l’on utilise la suite (xk ) pour connaitre une valeur approchée de α et si l’on décide
d’arêter les calculs lorsque xn et xn+1 ne diffèrent que par un nombre ε, alors on sait que
ε
l’erreur commise en confondant xn et α est au plus .
1−L
n
De plus, puisque |xn+1 − xn | ≤ L |x1 − x0 |, on voit que :
Ln
|α − xn | ≤ |x1 − x0 |.
1−L
L’erreur est donc à chaque itération multipliée au plus par L (qui est strictement inférieur
à 1). Insistons sur le fait qu’il s’agit là seulement d’une majoration. Il se pourrait que la
convergence soit beaucoup plus rapide.
Nous verrons des applications du théorème du point fixe au chapitre suivant.
Suites de nombres réels ou complexes 21
IV. Exercices
1. Soient x et y deux nombres réels. Quelle relation existe-t-il entre E(x + y) et E(x),
E(y) ?
2. Soient A et B deux parties bornées et non vides de R. On note A+B = {a+b}a∈A,b∈B .
Démontrer que A + B est borné et exprimer inf(A + B) et sup(A + B) en fonction
des bornes inférieures et supérieures de A et de B.
3. Calculer les limites des suites définies par les termes généraux suivants :
4. Si n ∈ N∗ , on définit :
n
X 1
un = − ln n.
k
k=1
Démontrer que la suite (un ) est décroissante et minorée. En déduire qu’elle est conver-
gente.
5. Déterminer les bornes inférieure et supérieure de l’ensemble A = {(−1)n + n1 }n∈N∗ .
6. Soient u et v deux suites à valeurs dans [0, 1]. On suppose que uv converge vers 1.
Démontrer qu’il en est de même pour les suites u et v.
7. Soit u une suite croissante. On suppose que la suite extraite (u2n ) est convergente.
Que peut-on en déduire sur la convergence de la suite u ?
8. Soit α ∈ R \ πZ. On veut démontrer que la suite de terme général un = sin nα n’est
pas convergente. Pour cela, on raisonne par l’absurde et l’on suppose que u converge
vers une limite que l’on note l. On définit de plus vn = cos nα.
a. En établissant une relation entre un+1 et vn , démontrer que la suite v converge.
On note l0 sa limite. Déterminer une relation entre l et l0 .
b. En considérant cette fois-ci vn+1 , établir une autre relation entre l et l0 . Conclure.
9. On définit les deux suites suivantes :
n n
X 1 X 1 1
un = , vn = + .
k! k! n!n
k=0 k=0
a. Démontrer que ces deux suites convergent vers la même limite, notée e. (On
pourra démontrer que les deux suites sont adjacentes.)
b. On cherche à démontrer que e est irrationnel. Supposons par l’absurde que e =
p/q, avec p, q ∈ N∗ . Vérifier qu’alors uq < e < vq , puis en déduire une contradic-
tion.
10. Convergence en moyenne de Cesaro. On dit qu’une suite (un ) converge en moyenne
de Césaro si la suite (vn ) définie par :
n
1 X
vn = uk
n+1
k=0
est convergente.
a. Théorème de Cesaro. Démontrer que si (un ) converge vers l ∈ K, alors il en est
de même pour la suite (vn ). (On pourra commencer par le cas l = 0.)
b. On suppose de plus que (un ) est monotone. Démontrer que si la suite (un )
converge en moyenne, alors elle converge.
22 Séries
En déduire un équivalent de
m
X √
Tn = E( k).
k=1
S0 = u 0 ,
S1 = u 0 + u 1 ,
S2 = u 0 + u 1 + u 2 ,
...
n
X
Sn = u 0 + u 1 + . . . + u n = uk ,
k=0
...
P
Les nombres Sn sont appelés sommes partielles de la série uk . Lorsque la suite (Sn ) a
+∞
X
une limite (finie ou non), on la note uk (c’est la somme de la série). Si cette limite est
k=0
finie, la série est dite convergente. La différence entre Sn et cette limite est appelée reste
de rang n de la série :
+∞
X +∞
X
Rn = uk = u k − Sn .
k=n+1 k=0
Si la série est convergente, alors Rn tend vers 0 lorsque n tend vers l’infini.
Exemple : Séries géométriques Soit x ∈ C. On considère la suite de terme général
un = xn . On sait que si x 6= 1,
n
X 1 − xn+1
Sn = xn = .
1−x
k=0
1
On voit donc que si |x| < 1, la série converge et sa somme est . Sinon la série est
1−x
divergente (En particulier si x = 1, Sn = n + 1 → +∞). Si |x| < 1, le reste de la série est
aisé à connaitre :
+∞
X 1 1 − xn+1 xn+1
Rn = xk = − = .
1−x 1−x 1−x
k=n+1
Les restes Rn forment une série géométrique de raison x. Ils convergent donc très rapide-
ment vers 0.
P
Remarque Si la série uk est convergente alors la suite (un ) tend vers 0.
En effet,
un = Sn − Sn−1 .
Si la série converge alors les deux suites (Sn ) et (Sn−1 ) convergent vers la somme de la
série et donc leur différence (un ) tend vers 0.
Attention : la réciproque est fausse : la série peut diverger même si un tend vers 0. Par
exemple la suite (un ) définie par
1
un = √ √
n+1+ n
24
P √
tend manifestement vers 0 mais la série uk diverge. En effet, on voit que un = n + 1 −
√
n et donc
√ √ √ √ √ √ √
Sn = u0 + u1 + . . . + un = ( 1 − 0) + ( 2 − 1) + . . . + ( n + 1 − n) = n + 1 → +∞.
Autre remarque Si l’on change un nombre fini de termes à une série, on ne modifie
pas sa convergence (ou sa divergence) . En effet, si l’on remplace ses N premiers termes
u0 , u1 . . . , uN −1 par v0 , v1 , . . . , vN −1 , alors ses sommes partielles à partir du rang N de-
viennent :
SN0 = v + v + ... + v 0
0 1 N −1 + uN = SN −1 + uN ,
0
SN +1 = v0 + v1 + . . . + vN −1 + uN + uN +1 0
= SN −1 + uN + uN +1 ,
...
Sn0 = v0 + v1 + . . . + vN −1 + uN + uN +1 + . . . + un = SN
0
−1 + uN + uN +1 + . . . + un ,
...
Ainsi, pour tout n ≥ N ,
S 0 n − Sn = T avec 0
T = SN −1 − SN −1 .
Les termes généraux des deux suites (Sn ) et (Sn0 ) ne diffèrent que par une constante. Si
l’une converge, alors l’autre aussi. (Mais bien sûr leurs sommes sont différentes). La nature
d’une série ne dépend donc pas de ses premiers termes.
Somme de deux séries Etant données deux séries de termes générauxPrespectifs P un et
vn , la série de terme général un + vn est
P appelée
P somme des deux séries u k et vk . Si
les sommes partielles des deux séries uk et vk sont
Sn = u 0 + . . . + u n et Tn = v0 + . . . + vn ,
P
alors celles de la série (uk + vk ) sont
Un = (u0 + v0 ) + . . . + (un + vn ) = Sn + Tn .
P P
Donc si les deux séries uk et vk convergent, Sn , Tn ont une P limitePfinie et donc leur
somme également. En conclusion : La somme de deux séries uk et vk convergentes
est une série convergente et de plus :
+∞
X +∞
X +∞
X
uk + vk = (uk + vk ).
k=0 k=0 k=0
3n − 16
un = .
4n + (−2)n
Pour n assez grand, (par exemple n ≥ 3), un ≥ 0. On peut donc utiliser les critères
ci-dessus. Comme n
3n 1 − 16.3−n 3
un = n ∼ ,
4 1 + (−2)−n 4
et que la série géométrique de raison 3/4 est conergente, on en déduit que notre série
converge.
P
II.2. Règle de Cauchy Soit un une série à termes positifs telle qu’il existe un réel
r ∈]0, 1[ tel que pour n assez grand, un ≤ rn . Son terme général est alors majoré à partir
d’un certain rang par celui de la série géométrique de raison r < 1, convergente. Donc elle
converge.
A l’inverse, une série à termes positifs telle que pour n assez grand, un ≥ rn , avec cette
fois r > 1, est divergente, puisque son terme général est supérieur à celui de la série
géométrique de raison r > 1, divergente.
Un cas particulier où l’une de ces deux situations se présente est le suivant :
un une série à termes positifs telle que (un )1/n admet une limite
P
Théorème II.1 Soit
finie l lorsque n tend vers l’infini. La série est convergente si l < 1 et divergente si l > 1.
Si l = 1, on ne peut a-priori rien dire.
Démonstration. Si l < 1 alors à partir d’un certain rang (un )1/n < r où r = (l + 1)/2 < 1.
Il suffit alors d’utiliser les considérations précédentes. Idem pour le cas où l > 1 : pour n
assez grand, un > rn avec r = (l + 1)/2 > 1.
n5
Exemple La série de terme général un = est convergente car
5n
5
1 nn 1 5 log n 1
(un ) =
n = e n −→ .
5 5 5
1
Autre exemple Pour la série de terme général un = α avec α > 0 (série de Riemann)
n
on ne peut pas conclure :
1 1 − α log n
(un ) n = α = e n −→ 1.
nn
II.3. Règle de D’Alembert Un autre cas particulier P où l’on peut utiliser des compa-
raisons avec des séries géométriques est celui d’une série un à termes positifs telle qu’il
existe un réel r ∈]0, 1[ tel que pour n assez grand, par exemple à partir du rang N ,
un+1
un ≤ r. En effet, pour n > N ,
un un−1 uN +1 uN
un = ··· uN ≤ rn−N uN = rn N .
un−1 un−2 uN r
P
Le terme général de la série un est donc majoré à partir d’un certain rang par celui
d’une série géométrique convergente. Donc elle converge.
A l’opposé, s’il existe un réel r > 1 tel que pour n assez grand, uun+1 n
≥ r, la série est
divergente puisqu’un raisonnement analogue montrerait qu’elle est minorée à partir d’un
certain rang par une série géométrique divergente. Les deux cas précédents se rencontrent
dans la situation suivante :
un+1
Démonstration. Si par exemple l < 1 alors à partir d’un certain rang un ≤ r, avec
r = (l + 1)/2.
(n!)2
Exemple Si un = alors
(2n)!
Théorème II.3 Soit f une fonction continue sur [0, +∞[, à valeurs positives et décrois-
sante pour x suffisament grand.
La suite (dn ) définie par :
n
X Z n+1
dn = f (k) − f (x)dx
k=0 0
Z +∞
est toujours convergente. En conséquence, l’intégrale f (x)dx converge si et seulement
0
si la série de terme général un = f (n) converge.
27
Ce théorème permet donc de passer de l’étude de la convergence d’une série à celle d’une
intégrale généralisée.
Démonstration.
Par hypothèse la fonction f est décroissante sur un certain intervalle [A, +∞[. La
convergence de l’intégrale, de la série et de la suite (dn ) ne seront pas modifiées si l’on
change les valeurs de f sur [1, A]. Ainsi on peut supposer que f est décroissante sur [1, +∞[.
Observons tout d’abord que
n
X n Z
X k+1 n Z
X k+1
dn = f (k) − f (x)dx = (f (k) − f (x))dx.
k=0 k=0 k k=0 k
La fonction f est décroissante et donc f (k) − f (x) ≥ 0 pour tout x ∈ [k, k + 1]. dn est
donc la somme partielle d’une série à termes positifs, de terme général=
Z k+1
δk = (f (k) − f (x))dx.
k
En particulier (dn ) est une suite croissante. Or elle est majorée par f (0) : en effet, comme
f est décroissante,
Z k+1 Z k+1
δk = f (k) − f (x)dx ≤ f (k) − f (k + 1)dx = f (k) − f (k + 1)
k k
et donc dn ≤ nk=0 (f (k) − f (k + 1)) = f (0) − f (n + 1) ≤ f (0). Ainsi, la suite (dn ) est
P
croissante et majorée ; donc elle converge.
Autre exemple De même on étudie sans peine la convergence Z ∞de la série de terme général
1 dt
un = n logα n : il suffit de se rappeler l’étude de l’intégrale α : la série converge
2 t log t
donc pour α > 1 et diverge dans le cas contraire.
n+1
Exercice Etudier la convergence de la série de terme général un = √ .
+ n2 + 1 n5
C’est tout aussi immédiat : il s’agit d’une série à termes positifs dont le terme général est
X 1
équivalent à la série de Riemann qui converge puisque 3/2 > 1. Donc cette série
n3/2
est convergente.
28
Proposition II.4 Soit f une fonction décroissante définie sur R+ et à valeurs positives.
∞
X
Si la série f (k) est divergente alors
k=0
n
X Z n
f (k) n→∞
∼ f (x)dx.
k=0 0
Démonstration. En effet,
n
Z n X
f (x)dx f (k) − f (n) − dn−1
0 k=0 f (n) + dn−1
n = Pn = 1 − Pn ,
k=0 f (k) k=0 f (k)
X
f (k)
k=0
où dn a le même sens que dans le théorème qui précède. Or l’on sait que la suite (dn )
n
X
converge, que 0 ≤ f (n) ≤ f (0) et que f (k) tend vers +∞. On en déduit que le terme
k=0
de droite de l’égalité ci-dessus tend vers 1, ce qui démontre la proposition.
Les théorèmes précédents ne sont valables que pour les séries à termes réels positifs.
Dans les autres cas, on peut à nouveau s’inspirer de l’étude des intégrales généralisées.
Théorème III.1 Si la série de terme général |un | est convergente, alors la série de terme
général un l’est aussi.
29
positifs dont les termes généraux sont majorés par |un |, termes général d’une série à termes
positifs convergente. Ces quatre séries sont convergentes et donc la série de terme général
un = vn+ − vn− + iwn+ − iwn− converge également.
P
Si la série de terme général |un | converge, la série un est dite absolument convergente.
Théorème III.2 Soit f une application définie sur un intervalle [a, b] ⊂ R satisfaisant
les deux conditions suivantes :
– Pour tout x ∈ [a, b] on a : f (x) ∈ [a, b] ;
– Il existe une constante L ∈]0, 1[ telle que pour tout couple (x, y) de points de [a, b]
on a :
|f (x) − f (y)| ≤ L|x − y|.
Alors f admet un point fixe unique dans l’intervalle [a, b], c’est à dire qu’il existe un réel
α ∈ [a, b] unique tel que f (α) = α.
De plus si x0 est un réel quelconque dans [a, b] alors la suite (xn ) définie par :
xn+1 = f (xn )
Démonstration. Soit x0 ∈ [a, b] et soit (xn ) la suite définie par : xn+1 = f (xn ). Com-
mençons par démontrer que cette suite converge. Notons un instant vn = xn+1 − xn . La
deuxième hypothèse effectuée sur la fonction f montre que
La série de terme général |vn | est donc une série à termes positifs dont le terme général
P
est majoré par celui d’uneP série géométrique convergente (car L < 1). Donc la série |vn |
est convergente. La série vn est donc absolument convergente et donc convergente. Or
pour tout entier n,
n−1
X
xn = (xn − xn−1 ) + (xn−1 − xn−2 ) + . . . (x1 − x0 ) + x0 = x0 + vk .
k=0
P
La suite (xn ) est donc la suite des sommes partielles de la série vn . Donc elle converge
+∞
X
et sa limite est x0 + vn . Notons α cette limite. Alors α est un point fixe pour f : en
n=0
effet, on sait que pour tout entier n, on a : xn+1 = f (xn ). Donc
Dans la ligne ci-dessus l’égalité de droite est justifiée par le fait que f est continue, comme
on s’en aperçoit immédiatement en constatant que si x est un point quelconque de [a, b],
Nous avons donc démontré que f admet un point fixe. D’autre part, pour tout n,
n−1 ∞ ∞ ∞ ∞
X X X X X b−a n
|xn − α| = vk − vk = vk ≤ |vk | ≤ (b − a) Lk = L .
1−L
k=0 k=0 k=n k=n k=n
Il reste à démontrer que le point fixe de f est unique. Supposons pour cela que β soit un
autre point fixe de f . Alors
cos x = x.
Cette équation admet une solution unique α dans l’intervalle [0, π/3]. En effet la fonction
g définie par : g(x) = x − cos x est strictement croissante et change de signe dans cet inter-
valle. Le théorème ci-dessus permet résoudre le problème suivant : déterminer une valeur
approchée de α avec une précision de 10−6 (par exemple). Il suffit pour cela d’appliquer ce
théorème à la fonction f définie par : f (x) = cos x. Cette fonction satisfait les hypothèses
nécessaires : tout d’abord il est clair que pour tout x ∈ [0, π/3] √on a f (x) ∈ [0, π/3] ;
de plus comme pour tout x ∈ [0, π/3] on a : |f 0 (x)| = | sin x| ≤ 3/2, le théorème des
accroissements finis appliqué à la fonction f nous dit que pour tout (x, y) ∈ [0, π/3]2 on
a: √
3
|f (x) − f (y)| ≤ |x − y|.
2
√
f satisfait donc les deux hypothèses de notre théorème avec L = 3/2. Posons alors par
exemple x0 = 0 et xn+1 = cos xn . On sait que cette suite converge vers le point fixe de f ,
c’est à dire α, et que pour tout n,
√ !n √ !n
b−a n π 1 3 2π √ 3
|xn − α| ≤ L = √ = (2 + 3) .
1−L 3 1 − 3/2 2 3 2
La valeur approchée de α désirée est alors obtenue en assimilant α et xn où n est un entier
suffisament grand pour que :
√ !n
2π √ 3
(2 + 3) ≤ 10−6 ,
3 2
c’est à dire, tous calculs faits : n ≥ 109. Calculer 109 termes de la suite (xn ) ne pose
ensuite aucune difficulté à la calculatrice programmable la plus poussive.
Exercice Calculer avec une précision de 10−4 la solution de l’équation :
e−x = x.
Exercice
1. Démontrer que l’équation :
x2 = ex−1
admet une solution √ unique α dans l’intervalle ]1, +∞[.
Vérifier que α ∈ [ 8, 4].
31
III.3. Séries alternées Soit (un ) une suite de nombres réels décroissante ayant pour
limite 0. On considère alors la série de terme général vn = (−1)n un . Si l’on note Sn =
X n Xn
vk = (−1)k uk , alors
k=0 k=0
S2n+1 = S2n−1 + u2n − u2n+1 ≥ S2n−1 et S2n+2 = S2n − u2n+1 + u2n+2 ≤ S2n .
Les deux suites (S2n ) et (S2n+1 ) sont l’une croissante et l’autre décroissante, et leur
différence S2n − S2n+1 = u2n+1 tend vers 0 par hypothèse. Donc P ces deux suites convergent
vers la meme limite S. Donc la suite (Sn ), et donc la série vk , est convergente (et sa
somme est S). On peut même donner une estimation très simple du reste de la série : la
limite des deux suites adjacentes (S2n ) et (S2n+1 ) est nécessairement comprise entre les
deux : S2n ≤ S ≤ S2n+1 ; donc la distance entre S et l’un des deux termes S2n et S2n+1
est au plus égale à leur différence, c’est à dire à u2n+1 . C’est à dire que
+∞
X +∞
X
(−1)k uk ≤ u2n+1 et (−1)k uk ≤ u2n+1 .
k=2n+1 k=2n+2
En bref :
Théorème III.3 Si X la suite (un ) est décroissante à partir d’un certain rang N et tend
vers 0, alors la série (−1)k uk est convergente. De plus, pour tout n ≥ N ,
+∞
X
(−1)k uk ≤ un .
k=n
(La convergence d’une série ne dépend pas de ces premiers termes. C’est pourquoi il suffit
de supposer la suite (un ) décroissante à partir d’un certain rang.)
X (−1)k
Exemple La série harmonique alternée est convergente puisque la suite (un )
k
où un = 1/n est décroissante et tend vers 0. Mais elle n’est pas absolument convergente
(voir plus haut). Une série peut donc converger sans être absolument convergente (de telles
séries sont parfois appelées semi-convergentes).
On vérifie facilement que la suite (un ) tend vers 0 mais sa monotonie ne semble pas
évidente. Le théorème qui précède n’est donc pas immédiat àPutiliser. Cette série est-elle
absolument convergente ? Il faudrait pour cela que la série uk soit convergente. Mais
32
1 1
un ∼ n− 2 et la série de terme général n− 2 est unePsérie de Riemann divergente. P Donc
(comparaison de séries à termes positifs ) la série uk diverge. Notre série (−1)k uk
n’est donc pas absolument convergente. Mais alors que faire ? Comme pour les intégrales
généralisées, un développement limité. Tous calculs faits, on trouve :
(−1)n (−1)n
1 1
(−1)n un = √ − 3 + +O 5 = an − bn + cn + dn .
n n4 n n4
P P P
Les séries an et cn sont des séries
P alternées convergentes ; bn est une série de
Riemann divergente puisque 3/4 < 1 et dn est une série absolument convergente puisque
M
(−1)n un est une série divergente (sinon, comme
P
|dn | ≤ 5 et que 5/4 > 1. Donc
n4
bn = an + cn + dn − (−1)n un ,
P
bn serait la somme de trois séries convergentes et donc
convergerait). Noter que ceci démontre au passage que la suite (un ) n’est pas décroissante.
Remarques Dans l’exercice précédent lenterme général de la série est équivalent à celui
d’une série convergente : (−1)n un ∼ (−1)√
n
; or la série diverge malgré tout. Deux séries
dont les termes généraux sont équivalents peuvent donc ne pas avoir la même nature. Le
théorème vu plus haut n’est valable que pour les séries à termes positifs. Pour pouvoir
conclure sur la nature de la série il faut effectuer un développement limité dont le com-
portement du reste est connu, c’est à dire dont le reste est le terme général d’une série
absolument convergente (généralement de la forme O(1/nα ) avec α > 1).
Notons An l’ensemble des couples d’entiers (k, k 0 ) intervenant dans cette somme :
An = {(k, k 0 )/ 0 ≤ k ≤ n, 0 ≤ k 0 ≤ n}.
On définit alors X
wn = u0 vn + u1 vn−1 + . . . + un v0 = uk vk0 .
k+k0 =n
Ainsi,
n
X n
X X X
Wn = wp = uk vk0 = uk vk0 .
p=0 p=0 k+k0 =p (k,k0 )∈B n
Bn = {(k, k 0 )/ 0 ≤ k ≤ n, 0 ≤ k 0 ≤ n; 0 ≤ k + k 0 ≤ n}.
Ainsi,
Bn ⊆ An ⊆ B2n ⊆ A2n .
33
P
La série wn est absolument convergente : en effet,
n
X X
|wp | ≤ |uk |.|vk0 |
p=0 (k,k0 )∈Bn
X n
X
≤ |uk |.|vk0 | = |uk |.|vk0 |
(k,k0 )∈An k,k0 =0
n n
! !
X X
= |uk | |vk | .
k=0 k=0
P P
Les deux séries uPn et vn étant supposées absolument convergentes, lePterme de droite
n
est majoré et donc p=0 |wp | l’est aussi et donc la série à termes positifs |wp | converge
(rappelons qu’une série à termes positifs a toujours une somme, finie ou infinie). Donc la
wn est convergente. Démontrons que sa somme est ss0 . Pour tout entier n,
P
série
X X X
|W2n − Un Vn | = uk vk0 ≤ |uk vk0 | ≤ |uk vk0 |.
(k,k0 )∈B2n \An (k,k0 )∈B2n \An (k,k0 )∈A2n \An
Or
X X X
|uk vk0 | = |uk |.|vk0 | − |uk |.|vk0 |
(k,k0 )∈A2n \An (k,k0 )∈A2n (k,k0 )∈An
2n 2n n n
! ! ! !
X X X X
= |uk | |vk | − |uk | |vk | .
k=0 k=0 k=0 k=0
Donc
2n 2n n n
! ! ! !
X X X X
|W2n − Un Vn | ≤ |uk | |vk | − |uk | |vk | .
k=0 k=0 k=0 k=0
P P
Les séries P |un | et P |vn | sont convergentes par hypothèse. Notons X et Y les sommes
des séries |un | et |vn | et passons à la limite dans la dernière inégalité :
+∞
X
wk − ss0 ≤ XY − XY = 0
k=0
Démontrer que cette expression a bien un sens pour chaque réel x et que pour tout couple
(x, y) de nombre réels on a : exp(x + y) = exp x. exp y.
34
V. Exercices
1. P
Soit (un )Pune suite à termes positifs et décroissante. Démontrer que les deux séries
un et 2n u2n sont de même nature.
2. Étudier la nature des séries dont les termes généraux sont les suivants :
√
3 √
a. un = e n− n ;
b. un = (ln n)− ln n ;
Z n+1
dx
c. un = √ ;
n x4 + 1
3. Après avoir vérifié leur convergence, calculer la somme des séries numériques sui-
vantes :
+∞ +∞ 2
X n(n + 1) X n
S= n
, T = .
2 2n
k=1 k=1
est divergente.
Soit K l’ensemble des nombres entiers non nuls qui ne sont divisibles par aucun carré
non nul, c’est-à-dire s’écrivant Πp∈P pαp , avec αp ∈ {0, 1}.
Soit n ∈ N. On note Pn et Kn les ensembles formés des éléments de P et K inférieurs
ou égaux à n.
a. Démontrer que
n n
! !
X 1 X 1 X 1
≤ .
k r2 m
k=1 r=1 m∈Kn
En déduire que
X 1
= +∞.
m
m∈K
Conclure.
Chapitre 3
Fonctions d’une variable réelle : limites,
continuité
Dans tout ce chapitre, nous considérons des fonctions définies sur une partie D de R
et à valeurs dans R. L’ensemble D sera toujours un intervalle de longueur non nulle, ou
une réunion de tels intervalles. Nous noterons D̄ l’adhérence de D.
Définition I.1 Soit x0 ∈ D̄. On dit que la fonction f a pour limite l ∈ K au point x0 si :
Proposition I.2 Si la fonction f admet une limite en x0 ∈ D̄, cette limite est unique.
lim f (xn ) = l.
n→+∞
Pour faire le lien avec la notion de limite vue plus haut, nous pouvons remarquer que :
1. Si, par exemple D =]x0 , b[ avec b > x0 , la notion de limite à droite en x0 est identique
à celle de limite en x0 .
2. Si, par exemple, D =]a, x0 [, avec a < x0 , les notions de limite à gauche en x0 et de
limite en ce point sont identiques.
3. Si x0 est un point intérieur à D, alors f admet une limite en x0 (et donc elle est
continue en x0 ) si et seulement si :
sans que f n’admette de limite en x0 . Considérer par exemple la fonction définie sur D = R
par f (0) = 1 et, pour tout x 6= 0, f (x) = 0.
Définition I.7 Un point x0 intérieur à D où la fonction f n’est pas continue mais admet
une limite à droite et une limite à gauche s’appelle un point de discontinuité de première
espèce pour la fonction f .
Par exemple, tout point de discontinuité d’une fonction en escalier est de première espèce.
L’exemple de la fonction f définie par :
1
f (0) = 0 et ∀x 6= 0 f (x) = sin ,
x
montre qu’un point de discontinuité n’est pas toujours de première espèce.
Une fonction dont tous les points de discontinuité sont de première espèce s’appelle
une fonction réglée. Par exemple, toutes les fonctions continues, toutes les fonctions en
escalier, sont réglées. Nous verrons à la page 41 que toute fonction monotone est réglée.
Fonctions d’une variable réelle : limites, continuité 37
Nous laissons au lecteur le soin de définir maintenant la notion de limite infinie à droite
et à gauche.
Nous laissons à nouveau au lecteur le soin de définir les notions semblables obtenues
en remplaçant +∞ par −∞.
La droite réelle achevée La notion de droite réelle achevée est en principe introduite
dans le cours de topologie. Nous rappelons simplement ici que l’on note R̄ = R∪{−∞, +∞}
et qu’il est possible de définir sur cet ensemble R une structure d’espace métrique pour
laquelle les voisinages de −∞ sont toutes les parties de R̄ qui contiennent un intervalle
de la forme [−∞, a[, avec a > −∞, et le voisinages +∞ sont celles qui contiennent un
intervalle de la forme ]a, +∞]. Ce formalisme présente l’avantage de permettre de présenter
toutes les notions de limites, finies ou infinies, en un point réel ou à l’infini, sous la même
forme, que voici. Ici, la notation D̄ représente l’adhérence de D dans R̄, c’est-à-dire que si
D contient par exemple un intervalle de la forme [a, +∞[, D̄ contient +∞.
Il est important de remarquer que la proposition I.3, p.35 reste valable dans ce cadre
élargi.
Nous renvoyons au cours de topologie pour des détails supplémentaires.
38 Analyse réelle pour le CAPES
I.4. Opérations sur les limites Rappelons les conventions fixées dans le chapitre sur
les suites : si a ∈ R, on convient que :
– Addition : a + (+∞) = +∞ ; a + (−∞) = −∞ ; (+∞) + (+∞) = +∞ ; (−∞) +
(−∞) = −∞.
– Produit : (+∞)(+∞) = +∞ ; (+∞)(−∞) = −∞ ; (−∞)(−∞) = +∞ ; si a > 0 :
a.(+∞) = +∞ et a.(−∞) = −∞ ; si a < 0 : a.(−∞) = +∞ et a.(+∞) = −∞.
– Quotient : 1/(+∞) = 1/(−∞) = 0.
L’addition et la multiplication étant toujours supposées commutatives, il n’est pas néces-
saire de définir, par exemple, (+∞) + a. Notons que nous n’avons pas donné de sens aux
expressions suivantes (dites formes indéterminées ) :
(+∞) + (−∞)
(+∞) · 0
(−∞) · 0.
Nous pouvons maintenant énoncer les règles générales qui suivent. Dans la suite de ce
paragraphe, la notation D̄ représente l’adhérence de D dans R̄.
Proposition I.11 Supposons que limx→a f (x) = l et limx→a g(x) = l0 , avec a ∈ D̄ et
l, l0 ∈ R̄. Les relations suivantes :
h i h i
lim f (x) + lim g(x) = l + l0 , lim f (x) · ( lim g(x) = ll0
x→a x→a x→a x→a
sont toujours vraies si l, l0 l0
∈ R ; si l ou est infini, ces relations sont vraies chaque fois
que les conventions ci-dessus leur donnent un sens.
Ces résultats se démontrent aisément en utilisant la caractérisation de la limite par les
suites (proposition I.3, p.35), puis les propriétés équivalentes pour les suites, vues dans le
chapitre précédent.
Ces propriétés restent bien sûr vraies pour les limites à droite et à gauche. Il en va de
même de la suivante.
Proposition I.12 Soit a ∈ D̄. On suppose que f ne s’annule pas dans un voisinage de a
et que limx→a f (x) = l. Alors :
– Si l 6= 0 :
1 1
lim = .
x→a f (x) l
– Si l = 0 et si, de plus, f reste de signe positif dans un voisinage de a :
1
lim = +∞.
x→a f (x)
Attention : ici, le résultat peut être faux si on remplace toutes le limites par des limites
à droite (ou à gauche). Pourquoi ?
Fonctions d’une variable réelle : limites, continuité 39
I.5. Limites et inégalités Dans ce qui suit, la notion de limite est à comprendre au sens
large, qui englobe les limites à droite, à gauche, finies ou infinies, en un point de R̄. À
nouveau, D̄ désigne l’adhérence de D dans R̄.
Proposition I.14 Soient f et g deux fonctions définies sur D et à valeurs dans R. Soit
x0 ∈ D̄. On suppose que f et g admettent comme limites l et l0 en x0 .
– S’il existe un voisinage U de x0 tel que, pour tout x ∈ U ∩ D, f (x) ≤ g(x), alors
l ≤ l0 .
– Soit h une fonction de D dans R pour laquelle il existe un voisinage V de x0 tel
que :
∀x ∈ V ∩ D f (x) ≤ h(x) ≤ g(x).
Si l = l0 , alors la fonction h admet pour limite l au point x0 .
Nous adaptons ici au cas des fonctions les notations , ∼ et les notations de Landau
o et O. La transposition est immédiate. La notation D̄ désigne à nouveau l’adhérence de
D dans R̄.
∀x ∈ U ∩ D f (x) = (1 + ε(x))g(x).
∀x ∈ U ∩ D |f (x)| ≤ A|g(x)|.
Notons que la relation ∼ ainsi définie est une relation d’équivalence sur l’ensemble des
fonctions définies sur D. La relation de dominance est un préordre (c’est une relation
réflexive et transitive, mais non antisymétrique) ; la relation n’est que transitive.
Ainsi, la notation f (x) = Oa (1) signifie que la fonction f est bornée au voisinage de a.
La notation f (x) = oa (1) signifie que la fonction f tend vers 0 en a. Lorsqu’il n’y a pas
d’ambiguı̈té, l’indice a est omis des expressions oa , Oa ou a .
40 Analyse réelle pour le CAPES
Comme dans le cas des suites, il faut avoir conscience de ce que l’équivalence ne se
conserve en général pas par addition, ni par “composition”. On a toutefois le résultat très
utile suivant :
Proposition II.3 Soit φ une fonction de R dans R. Soient u et v deux fonctions définies
sur D et soit a ∈ D̄. On suppose que
Proposition III.1 Soit f une fonction à valeurs réelles et croissante, définie sur l’inter-
valle [a, b[, avec a < b ≤ +∞. Si f est majorée sur [a, b[ alors f admet une limite à gauche
en b et :
lim f (x) = sup{f (x)}x∈[a,b[ .
x→b−
Démonstration. Rappelons que la fonction f est dite bornée sur [a, b[ si l’ensemble A =
{f (x)}x∈[a,b[ . est borné. Comme cet ensemble est manifestement non vide, il admet une
borne supérieure que nous notons α. Soit maintenant ε > 0. Le réel α − ε n’est pas un
majorant de A (par définition de la borne supérieure), et donc il existe c ∈ [a, b[ tel que
f (c) ∈]α − ε, α]. La fonction f étant croissante et majorée par α, nous en déduisons que
Exercice. On suppose que f est croissante et non bornée sur [a, b[. Démontrer que f
tend vers +∞ en b.
De façon tout à fait semblable, on démontre la propriété suivante :
Proposition III.2 Soit f une fonction à valeurs réelles et croissante, définie sur l’inter-
valle ]a, b], avec −∞ ≤ a < b. Si f est minorée sur ]a, b] alors f admet une limite à droite
en a et :
lim f (x) = inf{f (x)}x∈]a,b] .
x→a+
Le cas des fonctions décroissantes s’en déduit aisément. Nous n’en dirons pas plus.
Nous pouvons maintenant établir le résultat important qui suit.
Corollaire III.3 Soit f une fonction à valeurs réelles définie sur D. Si f est monotone,
alors f admet une limite à droite et à gauche en tout point intérieur à D. De plus, si x0
est un point intérieur à D, on a :
Ainsi, les points de discontinuité d’une fonction monotone sont tous de première espèce.
En d’autres termes, les fonctions monotones sont réglées.
Remarque. On constate aisément que la différence de deux fonctions monotones est
aussi réglée. Il est à remarquer que réciproquement, toute fonction réglée peut s’écrire
comme la différence de deux fonctions monotones. Mais ce résultat n’est pas simple à
établir.
IV. Exercices
1. Démontrer que la fonction racine carrée est continue en tout point de R+ (en parti-
culier, elle est continue à droite en 0).
2. En n’utilisant que les équivalents contenus dans le programme de terminale, détermi-
ner les limites suivantes.
x2 + 2x − 3
a. en 1 et en +∞ ;
x−1
√
x+ x
b. en 0 et en +∞ ;
x + sin x
ln x + x − 1
c. en 0 et +∞ ;
x + e−x
d. sin(πx)E(x) en tout point x ∈ N.
1
3. On définit l’application f sur R+ par : f (x) = 0 si x 6∈ Q∗ , et f (p/q) = si p et
p+q
q sont deux entiers premiers entre eux.
a. Démontrer que, pour tout ε > 0, l’ensemble {x ∈ Q+ t.q.f (x) ≥ ε} est fini.
42 Analyse réelle pour le CAPES
b. En déduire qu’en tout point de R+ , f a une limite à droite nulle et qu’en tout
point de ]0, +∞[, f a une limite à gauche nulle.
c. En quels points f est-elle continue ?
4. Soit f une fonction de R+ dans R, bornée sur tout intervalle de longueur 1.
a. On suppose d’abord que f (x + 1) − f (x) tend vers 0 en +∞. Démontrer que
f (x)/x tend vers 0 en +∞.
Indication. Soit ε > 0 et soit A ≥ 0 tel que, pour tous x ≥ A, |f (x+1)−f (x)| ≤ ε.
Soit, de plus, M un majorant de f sur l’intervalle [A, A + 1] et soit x ≥ A. On
note n = E(x − A). Démontrer que |f (x) − f (x − n)| ≤ nε. En déduire que
|f (x)/x| ≤ ε + M/x. Conclure.
b. On suppose que f (x + 1) − f (x) tend vers l en +∞, avec l ∈ R. Démontrer que
f (x)/x tend vers l en +∞.
5. Une fonction f d’un intervalle I de R à valeurs dans K est dite lipschitzienne de
rapport k > 0 si, pour tous x, y ∈ I, on a :
a. Démontrer que toute fonction lipschitzienne est continue en tout point de son
ensemble de définition.
b. Démontrer que la fonction racine carrée n’est pas lipschitzienne sur R+ .
c. Démontrer que la fonction valeur absolue est lipschitzienne de rapport 1 sur R.
d. Démontrer que si f et g sont lipschitziennes, alors f +g et f ◦g le sont (à condition,
pour f ◦g, que cette fonction soit bien définie), mais que f g ne l’est pas en général.
6. Soit f une fonction de R dans R, bornée dans un voisinage [−α, α] de 0, et telle que
Démonstration. Nous présentons la démonstration dite “par dichotomie”, qui fait usage du
théorème des suites adjacentes. Supposons pour fixer les idées que f (a) < 0 et f (b) > 0.
Le cas contraire s’en déduira en appliquant le raisonnement que nous allons faire à la
fonction −f . Notons (a0 , b0 ) = (a, b). Considérons maintenant le point milieu (a + b)/2.
Si f ((a + b)/2) < 0, on pose (a1 , b1 ) = ((a + b)/2, b) et si f ((a + b)/2) > 0, on pose
(a1 , b1 ) = (a, (a + b)/2). Nous avons ainsi un intervalle fermé [a1 , b1 ] de longueur (b − a)/2
à l’intérieur duquel f change de signe. En procédant par récurrence, on construit ainsi
deux suites (an ) et (bn ) telles que, pour chaque n ∈ N, on ait :
(b − a)
bn − an = , f (an ) < 0, f (bn ) < 0 [an+1 , bn+1 ] ⊂ [an , bn ].
2n
Il apparaı̂t tout d’abord que ces deux suites sont adjacentes, et convergentes donc vers
une même limite que nous notons c :
lim an = lim bn = c.
Étant donné les signes respectifs de f (an ) et f (bn ), nous en déduisons que f (c) ≤ 0 et
f (c) ≥ 0 et donc que f (c) = 0.
Théorème I.2 (des valeurs intermédiaires) Soit f une fonction continue et à valeurs
réelles sur l’intervalle I de R. Soient a et b deux points de I tels que a < b.
Pour tout ξ ∈ [f (a), f (b)], il existe au moins un point c ∈ [a, b] tel que f (c) = ξ.
Corollaire I.3 L’image par une fonction continue à valeurs réelles d’un intervalle est un
intervalle.
44 Analyse réelle pour le CAPES
Exercice 1. On suppose que −∞ ≤ a < b ≤ +∞. Soit f une fonction de ]a, b[ dans R
qui tend vers −∞ en a et vers +∞ en b. Démontrer que f est surjective.
Exercice 2. Démontrer que tout polynôme à coefficients réels et de degré impair admet
au moins une racine réelle.
Les fonctions continues ne sont pas les seules à vérifier la propriété des valeurs in-
termédiaires. Par exemple, nous savons, grâce au théorème des accroissements finis, que la
dérivée de toute fonction dérivable la satisfait aussi, bien qu’elle ne soit pas nécessairement
continue. En revanche, nous allons voir dans le paragraphe qui suit que les fonctions mo-
notones qui ont la propriété des valeurs intermédiaires sont nécessairement continues.
Proposition II.1 Une fonction f monotone définie sur l’intervalle I de R est continue
si et seulement si f (I) est un intervalle.
Démonstration. Supposons, pour fixer les idées, que f est croissante. Nous venons de voir
que la condition est nécessaire. Vérifions qu’elle est suffisante. Supposons pour cela que f
n’est pas continue. Elle admet donc au moins un point c ∈ I de discontinuité, qui est de
première espèce puisque f est monotone (voir page 41). Notons f (c+ ) et f (c− ) les limites
à droite et à gauche de f au point c. Nous avons f (c− ) < f (c+ ) et :
– Si c est un point intérieur à I, alors I contient deux points a, b tels que a < c et
b > c. Or f (a) ∈] − ∞, f (c− )] et f (b) ∈ [f (c+ ), +∞[. Donc, d’après l’inclusion (∗),
l’intervalle [f (a), f (b)] n’est pas contenu dans f (I)), qui n’est donc pas lui-même un
intervalle.
– Si c est la borne inférieure de I, alors f (c) < f (c+ ) (sinon f serait continue en c).
Mais alors, pour tout x ∈ I tel que x > c, on a : f (x) ∈ [f (c+ ), +∞[. Par conséquent,
à nouveau d’après l’inclusion (∗), l’intervalle [f (c), f (x)] n’est pas contenu dans f (I),
qui n’est donc pas un intervalle.
On démontre de même que si c est la borne supérieure de I, f (I) n’est pas non plus un
intervalle, ce qui achève la démonstration.
Corollaire II.2 Soit f une fonction continue et strictement monotone sur l’intervalle I.
Alors f : I 7→ f (I) est bijective et sa fonction réciproque f −1 est continue et strictement
monotone, de même sens de variation que f .
Ce corollaire est utilisé pour définir toutes les fonctions trigonométriques et hyperboliques
réciproques, ainsi que le logarithme, à partir de la construction de l’exponentielle puis des
fonctions sinus et cosinus présentée par exemple dans le dernier chapitre de ce cours. Nous
ne le ferons pas ici.
Fonctions continues sur un intervalle 45
Démonstration. La fonction f : I 7→ f (I) est surjective par construction et elle est injective
puisque strictement monotone. Vérifions tout d’abord que f −1 est strictement monotone.
Supposons par exemple que f est strictement croissante et soient t, s ∈ f (I) tels que t < s.
Notons x et y les antécédents de t et s par f . Si x > y, alors, puisque f est croissante,
s = f (x) > f (y) = t, ce qui est faux. Donc, nécessairement, x < y (le cas x = y est exclus
puisque s = f (x) 6= f (y) = t), c’est-à-dire f −1 (s) < f −1 (t). Donc f −1 est strictement
croissante. Comme l’image par f −1 de l’intervalle f (I) est l’intervalle I, nous en déduisons
enfin, grâce à la proposition II.1, que f −1 est continue.
Le résultat qui suit est une conséquence très importante du théorème III.5, p.17.
Théorème III.1 Soit f une fonction continue d’une segment [a, b] dans R. Alors f est
bornée et atteint ses bornes. En d’autres termes, il existe deux points c, d ∈ [a, b] tels que :
Ce théorème est présenté dans le cours de topologie, sous l’énoncé suivant : l’image
d’un compact par une application continue est un compact. Nous en donnons ici une
démonstration indépendante.
Démonstration. Montrons tout d’abord que f ([a, b]) est borné. Supposons qu’il ne le soit
pas : il existe alors une suite (xn ) de points de [a, b] tels que |f (xn )| tende vers l’infini.
Cette suite (xn ) étant bornée, nous savons qu’elle admet une sous-suite (xnk ) convergente,
dont nous notons l la limite. La fonction f étant par hypothèse continue, il en découle
que la suite (f (xnk )) converge vers f (l), ce qui est impossible puisque cette suite n’est pas
bornée.
Donc f ([a, b]) est borné. Soient α et β ses bornes inférieure et supérieure. Nous démon-
trons maintenant l’existence d’un point d ∈ [a, b] tel que f (d) = β. Pour tout entier n ∈ N∗ ,
le réel β − 1/n n’est pas un majorant de f ([a, b]), donc il existe un point de [a, b], que nous
noterons xn , tel que
(∗) β − 1/n ≤ f (xn ) ≤ β.
La suite (xn ) étant bornée, elle admet une sous-suite (xnk ) qui converge vers une limite
que nous notons l. Comme, pour tout k ∈ N, nous avons a ≤ xnk ≤ b, nous pouvons
en déduire, par passage à la limite, que a ≤ l ≤ b. D’autre part, la fonction f étant
continue, nous savons que la suite (f (xnk )) converge vers f (l). Un passage à la limite dans
les inégalités (∗) assure maintenant que f (l) = β.
Une démonstration semblable montrerait enfin l’existence d’un réel c ∈ [a, b] tel que
f (c) = α.
Remarque. Ce théorème est grossièrement faux pour les fonctions continues définies
sur un intervalle non fermé et borné. Considérer par exemple la fonction x 7→ 1/x dans
l’intervalle borné mais non fermé ]0, 1] ou la fonction x 7→ x dans l’intervalle fermé mais
non borné [0, +∞[.
46 Analyse réelle pour le CAPES
Soit f une fonction définie sur un intervalle I. Par définition, f est continue sur I si
elle est continue en tout point de I, c’est-à-dire si :
Définition IV.1 Une fonction f est dite uniformément continue sur l’intervalle I si elle
satisfait la propriété suivante :
Il faut bien se persuader qu’il n’y a pas équivalence entre continuité et uniforme conti-
nuité : par exemple, la fonction f : x 7→ x2 est certainement continue sur R mais elle n’y
est pas uniformément continue. Supposons en effet qu’elle le soit, et soit η > 0 la constante
qui correspond à la valeur ε = 1. Nous avons alors :
∀x, y ∈ R |x − y| ≤ η ⇒ |x2 − y 2 | ≤ 1.
Exemple. Toute fonction lipschitzienne est uniformément continue. En effet, si, pour
tous x, y ∈ I, on a :
|f (x) − f (y)| ≤ k|x − y|,
on voit que l’on peut choisir η = ε/k, et que cette valeur ne dépend pas de x. Il existe
toutefois des fonctions uniformément continues mais non lipschitziennes. Par exemple, la
fonction racine carrée est uniformément continue sur l’intervalle [0, 1] en vertu du théorème
de Heine (paragraphe suivant), mais elle n’est pas lipschitzienne (voir exercice du chapitre
précédent).
Le théorème de Heine
Théorème IV.2 (Heine) Toute application continue sur un intervalle fermé et borné de
R est uniformément continue sur cet intervalle.
Cet énoncé est un cas particulier du théorème général suivant, qui sera revu dans le
cours de topologie : Soit f une application définie sur une partie compacte K d’un espace
normé E et à valeurs dans un espace normé F . Si f est continue, alors f est uniformément
continue. La démonstration étant la même dans le cas particulier des fonctions numériques
et dans ce cas général, nous traitons ici le cas général.
Démonstration. Raisonnons par l’absurde. Supposons que f n’est pas uniformément conti-
nue sur K, c’est à dire qu’il existe un certain ε > 0 pour lequel pour tout α > 0 il existe
deux points x et y de K tels que d(x, y) ≤ α et d(f (x), f (y)) > ε. (La notation d désigne
Fonctions continues sur un intervalle 47
à la fois la distance dans E et celle dans F .) En particulier pour α = 1/n, il existe deux
points de K que nous noterons xn et yn tels que :
1
(∗) kxn − yn k ≤ et d(f (xn ), f (yn )) > ε.
n
La suite (xn ) étant une suite de points du compact K, on peut en extraire une sous-suite
convergente (xφ(n) ). De même on peut extraire de la suite (yφ(n) ) une sous-suite convergente
(yψ(φ(n)) ) dont nous noterons y la limite. La suite (xψ(φ(n)) ) est alors une sous-suite d’une
suite convergente, donc elle converge. Soit x sa limite. Si dans les inégalités (∗) l’on choisit
n = ψ(φ(m)) et si l’on fait tendre m vers l’infini on obtient :
(ce passage à la limite est justifié car f est continue). Cela signifie donc que x = y et que
f (x) 6= f (y), ce qui est absurde.
Remarque. Cette propriété est grossièrement fausse pour des fonctions continues sur
un intervalle non fermé borné. Nous avons déjà vu l’exemple de la fonction x 7→ x2
sur l’intervalle fermé mais non borné ] − ∞, +∞[ ; nous pouvons également considérer la
fonction x 7→ 1/x dans l’intervalle borné mais non fermé ]0, 1].
Exercice. Démontrer que la fonction x 7→ 1/x n’est pas uniformément continue sur
]0, 1].
Nous verrons dans le chapitre qui suit plusieurs applications importantes de ce théo-
rème.
f (x) = 0,
où f est une fonction définie d’une partie D de R à valeurs dans R, supposée au moins
continue. La première méthode que l’on est tenté d’utiliser consiste à donner une formule
exacte donnant la valeur des solutions de notre équation. Si par exemple il f (x) est de
la forme f (x) = ax2 + bx + c, on sait comment déterminer exactement les solutions de
l’équation en fonction de a, b et c. Mais dans la plupart des cas c’est impossible. Même
pour une équation aussi simple que
2 sin x − x = 0
il est impossible de donner une valeur exacte des solutions (autres bien sûr que la solution
évidente x = 0). C’est pourquoi on a recours à des méthodes permettant d’en déterminer
au moins des valeurs approchées.
La méthode peut-être la plus intuitive, mais aussi le plus souvent la plus mauvaise est
la méthode dite de dichotomie : supposons que l’on cherche la solution, que nous noterons
α, de l’équation f (x) = 2 sin x − x = 0 qui se trouve dans l’intervalle I1 = π2 , π . Noter
qu’il est certain que cette équation admet une solution x dans cet intervalle puisque f π2
et f (π) sont de signes contraires et que f est continue. Notre première valeur approchée
de α est le milieu de l’intervalle I1 , soit x1 = 3π π
4 . Comme f (x1 ) et f 2 sont de signes
π 3π
contraires, α se trouve dans l’intervalle I2 = 2 , 4 . La deuxième valeur approchée
48 Analyse réelle pour le CAPES
de α est alors le milieu de l’intervalle I1 et ainsi de suite. On construit donc une suite
de termes x1 , x2 , . . . , xk , . . ., chaque terme xk se trouvant au milieu d’un intervalle Ik de
π
longueur 2.2 k , dans lequel se trouve aussi α. On est donc certain que le k-ième terme xk
π
est une approximation de la solution x avec une précision d’au moins 4.2 k . On voit que
cette méthode peut se généraliser facilement à la résolution approchée de toute équation
f (x) = 0 (avec f continue) dans un intervalle [a, b] dans lequel on sait que f change de
signe. Avec ce procédé, k itérations permettent donc d’obtenir avec certitude une valeur
b−a
approchée de la solution de l’équation précise au moins à 2.2 k près. Par exemple si b−a = 1,
pour être sûr d’obtenir une précision de 10 −10 il faut que le nombre d’itérations k soit tel
que 2.21 k ≤ 10−10 et donc k + 1 ≥ 10 log 10
log 2 ∼ 33, 2, soit k ≥ 33. Noter que le nombre
d’itérations nécessaire ne dépend pas de la fonction f , mais seulement de la longueur de
l’intervalle de départ [a, b].
π
Revenons à l’équation 2 sin x = x, à résoudre dans 2 , π . Avec les même notations
π
que plus haut, f 2 ∼ 0, 43 et f (π) ∼ −3, 14. Si la fonction f a un comportement assez
régulier on a toutes les raisons de penser que la racine de l’équation f (x) = 0 se trouve πplus
π
près de 2 que de π. Choisir comme première approximation le milieu de l’intervalle 2 , π
ne semble donc pas très judicieux. Il faudrait plutôt choisir un point x1 plus rapproché
de π/2. Mais où précisément ? La méthode de Lagrange consiste à relier sur le graphe
π π
représentatif de la fonction f les points 2 , f 2 et (π, f (π)) par un segment de droite
et de choisir comme première approximation x1 l’abscisse du point où ce segment recontre
l’axe horizontal Ox, puis de recommencer le procédé autant qu’il le faut.
Une troisème méthode, celle de Newton, consiste à tracer la tangente à la courbe au
point d’abscisse π (ce qui suppose que f est dérivable) et de choisir comme point x1
l’abscisse de ce segment avec l’axe Ox et de recommencer. Il en existe bien sûr beaucoup
d’autres. Mais alors comment choisir ? La méthode choisie devra répondre tout d’abord à
un impératif : la suite (xk ) qu’elle permet de construire doit converger vers la solution α
de l’équation f (x) = 0. Il est évident que la méthode de dichotomie répond bien à cette
condition (la suite (xk ) est en effet une suite de Cauchy), beaucoup moins pour celle de
Newton (observer par exemple ce qui se passe si l’on cherche à résoudre 2 sin x − x = 0 sur
l’intervalle π2 , 2π ). D’autre part, la suite (xk ) doit converger le plus rapidement possible
vers α. C’est à l’étude de ces deux conditions que nous allons consacrer ce chapitre.
Hormis la méthode de dichotomie, toutes les méthodes que nous verrons ici entrent
dans le cadre suivant : on commence par écrire l’équation f (x) = 0, dont on cherche une
solution α dans un intervalle [a, b], sous une forme équivalente g(x) = x (avec par exemple
g(x) = x − f (x), ou g(x) = x − c.f (x)), on choisit un point x0 et on construit la suite (xk )
par récurrence :
xk = g(xk−1 ).
Ainsi, si cette suite converge et si g est continue, alors sa limite sera solution de
l’équation g(x) = x.
Méthode de Lagrange La droite passant par les points (a, f (a)). et (b, f (b)) a pour
équation :
x−a b−a
= .
y − f (a) f (b) − f (a)
Donc l’intersection de cette droite avec l’axe horizontal, d’équation y = 0, a pour abscisse
Le point x2 est obtenu en effectuant la même opération, par exemple sur le segment [a, x1 ] :
x1 − a (af (x1 ) − x1 f (b)
x2 = a + f (a). =
f (x1 ) − f (a) f (x1 ) − f (b)
et ainsi de suite. Ainsi :
af (x) − xf (a)
xk+1 = g(xk ) avec g(x) = .
f (x) − f (a)
Méthode de Newton La tangente à la courbe représentative de la fonction f au point
(a, f (a)) a pour équation :
y − f (a)
= f 0 (a).
x−a
Son intersection avec l’axe y = 0 a donc pour abscisse
f (a)
x1 = a − .
f 0 (a)
On prend ensuite la tangente au point (x1 , f (x1 )) et ainsi de suite, ce qui définit la suite
(xk ) suivante :
f (x)
xk+1 = g(xk ) avec g(x) = x − 0 .
f (x)
– Si |g 0 (α)| < 1 alors comme g 0 est continue il existe un intervalle [a, b] dans lequel
| g 0 | est toujours inférieure ou égale à L = (1 + |g 0 (α)|)/2 < 1 et donc dans lequel g
est contractante. Mais a-t-on toujours g([a, b]) ⊆ [a, b] ? Cela dépend du signe de g 0 :
– Si g 0 (α) > 0 alors on peut supposer que g 0 (x) ∈]0, 1[ pour tout x ∈ [a, b]. g
est croissante dans [a, b] donc g([a, b]) = [g(a), g(b)]. Nous allons voir que g(a)
et g(b) sont dans l’intervalle [a, b] et donc que g([a, b]) ⊆ [a, b]. Le théorème des
accroissements finis nous dit qu’il existe un ξ ∈ [a, α] tel que
Comme g 0 (ξ) ∈ [0, 1[, il vient que α − g(a) ≤ α − a et donc g(a) ≥ a. De même,
puisqu’il existe un η ∈ [α, b] tel que
a ≤ g(a) ≤ g(b) ≤ b
et donc g([a, b]) ⊆ [a, b]. Les hypothèses du théorème du point fixe sont satisfaites.
En conclusion il suffit de choisir x0 quelconque dans l’intervalle [a, b] pour que la
suite (xk ) converge vers α.
Exercice Démontrer que si x0 > l, la suite (xk ) est décroissante et minorée par
α et que si x0 < l la suite (xk ) est croissante et majorée par α.
– Si g 0 (α) < 0 alors on peut supposer que g 0 (x) ∈] − 1, 0[ pour tout x ∈ [a, b]. On
pose alors I = [a0 , b0 ] = [a, b] ∩ [g(a), g(b)]. Nous allons maintenant démontrer
que g([a0 , b0 ]) ⊆ [a0 , b0 ]. Puisque g est décroissante sur I, g ◦ g y est croissante.
Comme d’autre part g◦g est contractante un raisonnement semblable au précédent
démontre que
a ≤ g ◦ g(a) ≤ g ◦ g(b) ≤ b
donc g([g(a), g(b)]) ⊆ [a, b], et enfin
Donc la suite (xk ) converge vers α dès que x0 ∈ [a, b] ∩ [g(a), g(b)].
Exercice Démontrer que dans ce cas les deux suites x2k et x2k+1 sont l’une
croissante et l’autre décroissante.
Convergence de la méthode de Lagrange Pour la méthode de Lagrange, un calcul
élémentaire utilisant le fait que f (α) = 0 conduit à :
Mais
(a − α)2 00
f (a) = f (α) + (a − α)f 0 (α) + f (ξ)
2
avec ξ ∈: [a, α] (c’est la formule e Taylor à l’ordre 2). Donc
(a − α)2 f 00 (ξ)
g 0 (α) = .
2f (a)
Fonctions continues sur un intervalle 51
Théorème V.1 On suppose f de classe C 2 dans le segment [a, b] (c’est à dire deux fois
dérivable et de dérivée seconde continue). Si de plus f vérifie les trois hypothèses suivantes :
– f (a) et f (b) sont de signes contraires.
– f est strictement monotone sur [a, b].
– f 00 ne s’annule pas sur [a, b].
Alors l’équation f (x) = 0 admet une solution unique α dans [a, b] et si x0 ∈ [a, b] est choisi
tel que f (x0 ).f 00 (x0 ) > 0, la suite définie par
f (xk )
xk+1 = xk −
f 0 (xk )
converge vers α.
– Si f 00 > 0 et f 0 < 0 sur [a, b] alors la suite (xk ) est cette fois majorée par α ; comme
f est décroissante cela entraine que tous les f (xk ) sont positifs et donc que
f (xk )
xk+1 − xk = − ≥ 0.
f 0 (xk )
Notre suite est donc décroissante et majorée donc elle converge, elle aussi nécessai-
rement vers α.
– Les deux autres cas correspondants à f 00 < 0 se traitent de façon semblable. Nous
n’insisterons pas.
|xk+1 − α|
|xk − α|p
avec εk → 0 lorsque xk tend vers α, c’est à dire lorsque k tend vers l’infini. Donc si la
méthode converge, elle sera d’ordre p si et seulement si :
On en déduit que la méthode de Lagrange converge à l’ordre 1 (sauf pour le cas particulier
rarissime où f 00 (ξ) = 0). Quant à la méthode de Newton, on sait que g 0 (α) = 0 et l’on voit
rapidement que
f 00 (α)
g 00 (α) = 0 .
f (α)
Cette méthode est donc d’ordre 2 sauf si f 0 (α) = 0. La méthode de Newton est donc
beaucoup plus rapide que celle de Lagrange. Son inconvénient majeur est qu’elle nécessite
le calcul de la dérivée de f , chose qui n’est pas toujours aisée.
Fonctions continues sur un intervalle 53
VI. Exercices
1. Soit f une fonction continue sur R. Démontrer que :
a. si f est périodique, elle est bornée sur R ;
b. si f admet des limites finies en +∞ et −∞, elle est bornée.
c. si f admet la même limite finie en +∞ et −∞, alors au moins une de ses bornes
est atteinte.
2. Démontrer que toute application continue et injective de R dans R est strictement
monotone (on pourra raisonner par l’absurde).
3. Soit f une fonction continue de [0, 1] dans R telle que f (0) = f (1). Démontrer qu’il
existe t ∈ [0, 1/2], tel que
1
f (t) = f t + .
2
4. On définit la suite (un ) par : u0 = a > 0 et, pour tout n ∈ N,
1 a
un+1 = un + .
2 un
√
Démontrer que cette suite est décroissante et majorée, puis qu’elle converge vers a.
5. Soit f une fonction continue de [a, +∞[ dans R. Démontrer que si f admet une limite
en +∞, elle est uniformément continue sur [a, +∞[.
6. Démontrer que toute fonction continue et périodique de R dans R est uniformément
continue sur R.
7. Soit I un intervalle de R et f une fonction continue de I dans R.
a. Si (xn ) est une suite de Cauchy de points de I, la suite (f (xn )) est-elle une suite
de Cauchy ?
b. Qu’en est-il si l’on suppose de plus que f est uniformément continue ?
8. Dans cet exercice, on note c = 71/3 . Si x > 0, on note :
1 35 49
g(x) = 5x + 2 − 5 .
9 x x
f. Combien de termes de la suite (yk ) faut-il calculer pour connaı̂tre c avec une
précision de 10−N ? Comparer avec la méthode de dichotomie.
9. a. Démontrer que l’équation :
e−x = x
admet une solution unique, que l’on notera ξ, dans l’intervalle [0, 1].
b. Soit (xn ) la suite définie par :
gα (x) = x − α x − e−x .
Si f et g sont toutes deux bornées, alors la fonction f − g l’est aussi et la quantité d(f, g)
est finie. On vérifie aisément que la fonction d ainsi définie sur l’ensemble F × F est bien
une distance au sens topologique du terme. Cette distance provient en fait de la norme
sur F définie par
kf k = sup |f (x)|, f ∈ F,
x∈I
appelée la norme uniforme sur F .
Ainsi, si d(f, g) = M on est assuré que pour tout x ∈ I, |f (x) − g(x)| ≤ M . Dans le
cas où f et g sont à valeurs réelles cela signifie que la courbe représentative de g est située
à l’intérieur de la bande délimitée par le courbes représentatives de f − M et de f + M .
Bien sûr, d(f, g) dépend certainement de l’ensemble I dans lequel on décide de comparer
f et g.
Définition II.1 On dit que la suite de fonctions (fn )n∈N converge uniformément sur l’in-
tervalle I vers la fonction f si
lim sup |fn (x) − f (x)| = 0.
n→+∞ x∈I
56 Analyse réelle pour le CAPES
On voit que, écrite comme ceci, cette définition a un sens même si les fonctions
considérées ne sont pas bornées.
Exemple Soit fn (x) = xn et I = 0, 21 . La suite (fn ) converge uniformément dans I
Le fait que la suite de fonctions converge uniformément dépend bien sûr de l’ensemble I
dans lequel on l’étudie.
Remarque 1 Si une suite de fonctions converge uniformément dans un ensemble I alors
elle converge uniformément dans tout ensemble J inclus dans I : en effet,
(C’est immédiat.) Il est aisé de vérifier que la réciproque de cette propriété est fausse :
revenons par exemple aux fonctions fn définies par fn (x) = xn dans l’intervalle [0, 1] : il
est bien clair que pour tout x ∈]0, 1[, fn (x) = xn −→ 0. Pourtant il n’y a pas convergence
uniforme : la distance uniforme entre fn et la fonction nulle est toujours 1. Intuitivement
ceci est dû à ce que les suites numériques fn (x) ne tendent pas toutes vers 0 à la même
vitesse : aussi grand que soit n, il y a toujours des points x ∈]0, 1[ pour lesquels xn est
voisin de 1.
fn (x) −→ f (x),
on dit que la suite de fonctions (fn ) converge simplement vers f dans l’ensemble I.
1 1 1
et fn affine sur chacun des intervalles [0, 2n ], [ 2n , n ]. Fixons x ∈ [0, 1]. Si x = 0, fn (x) = 0
pour tout n donc fn (x) −→ 0. Si x > 0 alors pour n assez grand on a x > n1 (plus
précisément pour n > x1 ) et donc fn (x) = 0. La suite numérique fn (x) est donc stationnaire
en 0 à partir du rang n = partie entière de x1 + 1. Donc fn (x) → 0 ; la suite (fn ) converge
donc simplement vers 0. Mais elle ne converge pas uniformément puisque pour tout entier
n,
sup |fn (x)| = 1.
x∈[0,1]
cos(πnx) nx
fn (x) = + .
n+x n+x
1
Le premier terme de cette somme est majoré en valeur absolue par , donc il tend
n+x
vers 0. Le second terme tend vers x. Donc la suite (fn ) converge simplement dans R+ vers
la fonction f définie par : f (x) = x.
Passons à la convergence uniforme. Si (fn ) converge uniformément, c’est nécessairement
vers la même fonction f d’après la remarque 2 ci-dessus. Étudions donc kfn − f k :
cos(πnx) − x2
fn (x) − f (x) = .
n+x
Donc pour tout x ∈ [0, A],
1 + A2
|fn (x) − f (x)| ≤ .
n
Donc
1 + A2
kfn − f k ≤ −→ 0.
n
Donc la convergence est uniforme dans l’intervalle [0, A]. Mais elle ne l’est pas dans
[0, +∞[ : en effet, on voit que dans cet intervalle,
cos(πnx) − x2
kfn − f k = sup = +∞ 6→ 0.
x∈[0,+∞[ n+x
III.1. Continuité
Proposition III.1 Soit (fn ) une suite de fonctions d’un intervalle I de R et à valeurs
dans E, convergeant uniformément sur I vers une fonction f . Si les fonctions fn sont
toutes continues en tout point de I alors il en est de même de la fonction f .
Démonstration. Soit x0 ∈ I. Pour prouver que f est continue en x0 il faut démontrer que
pour tout ε > 0 donné il existe un α > 0 tel que pour tout x ∈ I tel que |x0 − x| ≤ α on
58 Analyse réelle pour le CAPES
a : |f (x0 ) − f (x)| ≤ ε. Fixons donc ε > 0. Par hypothèse d(fn , f ) tend vers 0 donc il y a
un entier n0 tel que pour tout n ≥ n0 , on a : d(fn , f ) ≤ 3ε , c’est à dire :
ε
sup |fn (x) − f (x)| ≤ .
x∈I 3
Par hypothèse également la fonction fn0 est continue en x0 . Donc il existe un réel α > 0
tel que pour tout x ∈ I tel que tel que |x0 − x| ≤ α on a :
ε
|fn0 (x0 ) − fn0 (x)| ≤ .
3
Or pour tout x ∈ I,
|f (x0 ) − f (x)| ≤ |f (x0 ) − fn0 (x0 )| + |fn0 (x0 ) − fn0 (x)| + |fn0 (x) − f (x)|.
Donc si de plus |x0 − x| ≤ α, on peut majorer chacun des trois termes par ε/3 et donc
|f (x0 ) − f (x)| ≤ ε,
fonction qui n’est pas continue en 1, bien que toutes les fonctions fn soient continues sur
[0, 1]. La suite de fonctions (fn ) ne converge donc pas uniformément vers f sur l’intervalle
[0, 1].
Remarque 2 Il existe toutefois des suites de fonctions continues convergeant simplement
dans I et non uniformément et dont la limite est continue dans I : par exemple si fn (x) =
xn et pour I =]0, 1[, la convergence des fonctions fn vers la fonction nulle f = 0 est simple
mais pas uniforme ; pourtant la fonction limite f est manifestement continue dans I.
On peut d’ailleurs remarquer la propriété générale suivante :
Proposition III.2 Soit (fn ) une suite de fonctions continues sur l’intervalle ouvert I =
]a, b[⊆ R. Si la suite (fn ) converge vers une fonction f uniformément dans tout intervalle
fermé borné [α, β] ⊆]a, b[ alors f est continue dans ]a, b[.
Démonstration. Soit x ∈]a, b[. Il existe bien sûr un intervalle fermé borné [α, β] ⊆]a, b[ qui
contient x. Comme la convergence de la suite (fn ) est uniforme dans [α, β], la fonction f
est continue dans [α, β] et donc en particulier en x.
Proposition III.3 (Lemme de Dini) Soit (fn )n∈N une suite décroissante (i.e. fn ≥
fn+1 pour tout n) de fonctions continues d’un intervalle compact [a, b] dans R. Si la suite
de fonctions (fn ) converge simplement vers une fonction f continue sur [a, b], alors elle
converge uniformément vers f .
Approximation uniforme 59
On voit immédiatement que le résultat demeure si l’on suppose la suite croissante (car
alors, la suite (−fn ) satisfait les hypothèses du lemme).
Ainsi, la suite (fn (xn ))n∈N est une suite décroissante de nombres réels positifs ou nuls.
Elle converge donc vers un réel y ≥ 0. Par ailleurs, l’intervalle [a, b] étant compact, la suite
(xn )n∈N admet une sous-suite (xnk )k∈N qui converge vers un certain x ∈ [a, b].
Fixons un instant un entier p ∈ N. Nous avons, pour tout k ∈ N tel que nk ≥ p,
Faisant tendre k vers l’infini, nous obtenons, grâce à la continuité de la fonction f au point
x,
fp (x) ≥ y.
Puisque la suite de fonctions (fp )p∈N converge simplement vers 0, ceci entraı̂ne, en faisant
tendre cette fois p vers l’infini, que 0 ≥ y et donc, puisque y ≥ 0, que y = 0. Par conséquent,
Remarque 3 Bien sûr, il existe des suites de fonctions non continues qui convergent
uniformément vers une fonction continue. On sait par exemple que toute fonction continue
définie sur un intervalle compact [a, b] est la limite uniforme d’une suite de fonctions en
escalier. Nous reviendrons sur ce point dans la dernière partie de ce chapitre.
III.2. Intégration
Proposition III.4 (Passage à la limite sous l’intégrale) Soit (fn )n∈N une suite de
fonctions convergeant uniformément dans un intervalle borné I = [a, b] ⊆ R vers une
fonction f . Si les fonctions fn sont toutes continues en tout point de I alors la suite
Z b
numérique de terme général un = fn (x)dx est convergente et sa limite est :
a
Z b Z b
lim fn (x)dx = f (x)dx.
n→∞ a a
Autre remarque Il existe néanmoins des suites de fonctions non uniformément conver-
gentes pour lesquelles on peut passer à la limite sous l’intégrale : si fn (x) = xn et si
I = [0, 1], nous savons que la convergence de (fn ) vers sa limite f (qui, rappelons-le vaut
0 partout sauf en x = 1, pour laquelle f (x) = 1) n’est pas uniforme. Pourtant,
Z 1 Z 1
1
fn (x)dx = →0= f (x)dx.
0 n+1 0
III.3. Dérivation Soit (fn ) une suite de fonctions à valeurs réelles continument dérivables
convergeant uniformément dans un intervalle I ⊆ R vers une fonction f . Est-il vrai que la
sin nx
suite de fonctions fn0 converge vers f 0 ? En général non : par exemple si fn (x) = et
n
si I = [0, π], on voit que fn converge uniformément vers f = 0 puisque d(fn , 0) ≤ n1 −→ 0.
Mais fn0 (x) = cos nx et donc d(fn0 , f ) = 1. Donc la suite fn0 ne converge pas vers f 0 . Pour
répondre par l’affirmative à la question posée il faut ajouter une hypothèse supplémentaire :
Proposition III.5 Soit (fn ) une suite de fonctions continument dérivables convergeant
simplement dans un intervalle I ⊆ R vers une fonction f . Si la suite de fonctions (fn0 )
converge uniformément vers une fonction g dans I alors la fonction f est dérivable et
f 0 = g.
Pour se persuader encore d’avantage que la limite uniforme d’une suite de fonctions
dérivables n’est pas toujours dérivable si on ne fait aucune hypothèse supplémentaire
sur ces fonctions on pourra méditer le résultat suivant (que nous allons revoir dans le
paragraphe qui suit) :
Théorème III.6 (Weierstrass) Toute fonction continue sur un intervalle [a, b] est la
limite uniforme dans [a, b] d’une suite de fonctions polynômiales.
Approximation uniforme 61
IV.1. Approximation par des fonctions en escalier Le résultat qui suit est à la
base de la construction de l’intégrale de Riemann d’une fonction continue ou continue par
morceaux. Il est aussi utilisé dans la théorie des séries de Fourier, pour démontrer par
exemple le lemme de Riemann-Lebesgue pour des fonctions continues par morceaux.
Théorème IV.1 Toute fonction continue par morceaux d’un intervalle compact [a, b] de
R à valeurs dans un espace normé E est limite uniforme d’une suite de fonctions en
escalier de [a, b] dans E.
En d’autres termes, l’espace des fonctions en escalier de [a, b] dans E est dense dans celui
des fonctions continues par morceaux, muni de la norme uniforme.
On rappelle qu’une fonction en escalier de [a, b] dans E est une fonction constante par
morceaux, c’est-à-dire une fonction telle qu’il existe une subdivision x0 = a < x1 < · · · <
xn = b de l’intervalle [a, b] et des vecteurs v1 , . . . , vn−1 de E tels que, pour tout i ≤ n − 1
et tout x ∈]xi , xi+1 [, f (x) = vi . On rappelle également qu’une fonction f de [a, b] dans E
est dite continue par morceaux si elle admet une limite finie à droite en a, une limite finie
à gauche en b et si elle est continue en tout point de ]a, b[, sauf peut-être en un nombre
fini d’entre eux, où elle admet seulement des limites (finies) à droite et à gauche.
Démonstration. Commençons par le cas où f est une fonction continue de [a, b] dans
l’espace métrique (E, d). Soit p ∈ N∗ . D’après le théorème de Heine, f est uniformément
continue dans [a, b]. Il existe donc η > 0 tel que, pour tous x, y ∈ [a, b], |x − y| ≤ ηk ⇒
d(f(k) (x), f(k) (y)) ≤ 1/p. Définissons maintenant une fonction en escalier gp sur l’intervalle
[a, b] de la manière suivante. Soit N un entier non nul tel que (b − a)/N ≤ η. On partage
l’intervalle [a, b] en N sous-intervalles de longueur l = (b −a)/N et on considère la fonction
gp qui est constante sur chacun de ces sous-intervalles. Plus précisément, on pose, pour
chaque n < N et chaque x ∈ [a + ln, a + l(n + 1)[, gp (x) = f (a + ln). (Faire un dessin.)
On voit que, pour un tel x, |x − (a + ln)| ≤ η et donc
Ainsi, pour tout x ∈ [a, b], on a d(f (x), gp (x)) ≤ 1/p. La suite de fonctions (gp )p∈N répond
donc au problème posé.
Maintenant, si f est seulement continue par morceaux, il suffit de décomposer l’in-
tervalle [a, b] en sous-intervalles sur lesquels f est continue, approcher sur chacun de ses
sous-intervalles f par une fonction en escalier comme précédemment, puis recoller ces
fonctions en escalier.
Exercice : rédiger correctement ce raisonnement.
En d’autres termes, gp est la fonction affine sur chaque intervalle [a + ln, a + l(n + 1)] et qui
coı̈ncide avec la fonction f aux points ln, 0 ≤ n ≤ N . En particulier, gp est une fonction
continue.
Vérifions maintenant que la nouvelle suite (gp )p∈N converge uniformément vers f . Si
n < N et si x ∈∈ [a + ln, a + l(n + 1)[, nous avons, d’une part :
x − a − ln
|gp (x) − f (a + ln)| = |f (a + l(n + 1)) − f (a + ln)|
l
≤ |f (a + l(n + 1)) − f (a + ln)| ≤ 1/p;
Par conséquent,
|gp (x) − f (x)| ≤ 2/p,
et ceci quel que soit x ∈ [a, b].
Nous avons ainsi démontré la propriété qui suit :
Proposition IV.2 Toute fonction continue d’un intervalle [a, b] de R à valeurs dans K
est limite uniforme d’une suite de fonctions continues affines par morceaux.
Lemme IV.3 (Riemann-Lebesgue) Soit f une fonction continue par morceaux sur
l’intervalle fermé borné [a, b]. Si λ ∈ R, soit
Z b
F (λ) = f (t) sin(λt)dt.
a
Démonstration. Constatons tout d’abord que ce résultat est évident si la fonction f est
constante, puisque dans ce cas on a F (λ) = C(cos(aλ) − cos(bλ))/λ. Il est tout aussi clair
si f est une fonction en escalier (utiliser la relation de Chasles). Considérons maintenant le
cas général d’une fonction f continue par morceaux et soit ε > 0. On sait que f est la limite
uniforme sur [a, b] d’une suite de fonctions en escalier. En particulier, il existe au moins
une fonction en escalier g sur [a, b] telle que, pour tout x ∈ [a, b], |f (x)−g(x)| ≤ ε/2(b−a).
Comme on vient de le constater, on a
Z b
lim g(t) sin(λt)dt = 0.
λ→+∞ a
En d’autres termes, les fonctions polynomiales de [a, b] dans R sont denses dans l’espace
C([a, b], R) des fonctions continues de [a, b] dans R.
Il existe plusieurs démonstrations de ce théorème. Nous en proposons trois, dont une
en exercice, toutes fondées sur le théorème de Heine. Une autre démonstration consiste à
déduire ce théorème du théorème de Fejér, ce qui est assez rapide, si l’on suppose connu le
théorème de Fejér (qui sera vu au paragraphe suivant). Cette démonstration est présentée
en page 140 du cours de mathématiques spéciales, vol. 4, par E. Ramis, C. Deschamps
et J. Odoux.
Démonstration.
Lemme IV.5 On définit par récurrence sur n la suite de fonctions polynômiales (Pn ) sur
[−1, 1] par
1
P0 = 0 et ∀n ∈ N Pn+1 (x) = Pn (x) + (x2 − Pn2 (x)).
2
Cette suite de fonctions converge uniformément sur [−1, 1] vers la fonction x 7→ |x|.
Démonstration. Vérifions que pour tout entier n positif, 0 ≤ Pn (x) ≤ Pn+1 (x) ≤ |x| pour
tout x ∈ [−1, 1]. Pour n = 0 c’est clair : supposons que cette propriété est vérifiée pour
l’entier n ≥ 0. Alors pour tout x ∈ [−1, 1],
1
0 ≤ Pn+1 (x) ≤ Pn+2 (x) = |x| − (|x| − Pn+1 (x)) 1 − (|x| + Pn+1 (x)) ≤ |x|.
2
Ainsi la suite (Pn )n∈N est une suite croissante et bornée qui converge donc simplement vers
une fonction f telle que pour tout x ∈ [−1, 1], 0 ≤ f (x) ≤ |x| et f 2 (x) = x2 (par passage
à la limite dans la relation de récurrence qui définit les Pn ). Donc f (x) = |x| et le lemme
de Dini s’applique, prouvant que la suite de polynômes (Pn ) converge uniformément vers
la fonction x 7→ |x| sur [−1, 1].
Lemme IV.6 Pour chaque c ∈ R, il existe une suite de fonctions polynomiales qui
converge uniformément sur tout compact vers la fonction fc : x 7→ |x − c|.
Notons alors
x−c
Qn (x) = nPn .
n
On voit que
1
|Qn (x) − |x − c|| ≤
n
x−c
si ∈ [−1, 1], c’est-à-dire si |x − c| ≤ n. Si l’on considère maintenant un compact K
n
de R, il existe certainement un entier N ∈ N tel que K ⊂ [c − N, c + N ]. Alors, pour tout
n ≥ N et pour tout x ∈ K, nous aurons |x − c| ≤ n et donc
1
sup |Qn (x) − |x − c|| ≤ .
x∈K n
Nous généralisons ensuite ce résultat à toute fonction continue et affine par morceaux,
définie sur un intervalle compact [a, b] quelconque.
Lemme IV.7 Toute fonction continue et affine par morceaux sur un intervalle [a, b] est
limite uniforme sur [a, b] d’une suite de fonctions polynomiales.
Démonstration. Il suffit d’écrire une telle fonction comme une combinaison linéaire de
fonctions fc définies plus haut et de fonctions affines. Plus précisément, notons, pour
c ∈ R,
1 x − c si x≥c
gc (x) = (|x − c| + x − c) =
2 0 sinon.
La fonction x 7→ x − c étant elle-même polynomiale, le dernier lemme nous assure que la
fonction gc est limite uniforme, sur tout compact de R, d’une suite de fonctions polyno-
miales. Il nous suffit donc, pour achever la démonstration, de vérifier que toute fonction
continue et affine par morceaux peut s’écrire comme une combinaison linéaire de fonctions
gc .
Soit, pour cela une fonction f , définie sur l’intervalle [a, b], continue et affine sur les
intervalles définis par la subdivision a = x0 < x1 < · · · < xn−1 < xn = b. Nous cherchons
à déterminer des coefficients réels y0 , . . . yn−1 tels que
n−1
X
(∗) f = f (a) + yk gxk .
k=0
Les deux fonctions qui apparaissent dans les deux termes de cette égalité sont toutes
deux continues et affines sur les mêmes morceaux, à savoir les intervalles [xk , xk+1 ], pour
0 ≤ k ≤ n − 1. Pour qu’elles soient égales, il suffit qu’elles coı̈ncident au point a, ce qui est
le cas, et que leurs pentes sur chacun des intervalles [xk , xk+1 ] soient égales. Or la pente
de f sur [xk , xk+1 ] vaut
f (xk+1 ) − f (xk )
αk = ,
xk+1 − xk
et celle du terme de droite de l’égalité (∗) vaut :
k
X
yj .
j=0
Approximation uniforme 65
système triangulaire, dont tous les coefficients diagonaux valent 1, et qui est donc immé-
diatement résoluble.
Puisque toute fonction continue est limite uniforme d’une suite de fonctions continues
et affines par morceaux, (ainsi que nous l’avons vu dans le paragraphe précédent), ce
dernier lemme achève la démonstration du théorème de Weierstrass.
Ici les coefficients Cnk représentent comme d’habitude les coefficients binomiaux : Cnk =
n!
. Nous allons chercher à démontrer que ces polynômes répondent à notre pro-
k!(n − k)!
blème et plus précisément que
lorsque n tend vers l’infini. Constatons tout d’abord que si x ∈ [0, 1],
n n
! !
X
k k n−k
X
k k k n−k
|f (x) − Bn (f )(x)| = f (x) Cn x (1 − x) − Cn f x (1 − x)
n
k=0 k=0
(on a utilisé ici le fait que 1 = 1n = [ x + (1 − x)]n ainsi que la formule du binôme). On
déduit de ceci que
n
X k
(1) |f (x) − Bn (f )(x)| ≤ Cnk f (x) − f xk (1 − x)n−k .
n
k=0
k
Il nous faudrait maintenant donner une majoration utilisable de f (x) − f . Ouvrons
n
à cette fin une parenthèse pour définir le module de continuité uniforme d’une fonction
uniformément continue.
Définition IV.8 (Module de continuité uniforme) Soit f une fonction continue sur
un intervalle [a, b]. On appelle module de continuité uniforme de f sur l’intervalle [a, b] la
fonction ωf : R∗+ → R+ définie par :
Si f est continue sur l’intervalle [a, b] alors elle est uniformémént continue sur cet inter-
valle. On en déduit que ωf (η) tend vers 0 lorsque η tend vers 0† . Nous allons maintenant
utiliser le lemme suivant :
Lemme IV.9 Si f est une fonction continue sur l’intervalle [a, b] alors pour tout η > 0
et pour tout (x, y) ∈ [a, b]2 , on a :
(y − x)2
|f (x) − f (y)| ≤ ωf (η) +1 .
η2
x0 = x x1 = x + η x2 = x + 2η . . . xn = x + nη xn+1 = y,
|f (x) − f (y)| ≤ |f (x0 ) − f (x1 )| + |f (x1 ) − f (x2 )| + . . . + |f (xn ) − f (xn+1 )| ≤ (n + 1)ωf (η).
y−x
Comme n ≤ et que de plus n ≤ n2 cela démontre le lemme.
η
Lemme IV.10
X(1 − X) 0
Bn (f ) = XBn (f ) + Bn (f )
n
où Bn0 (f ) repésente le polynôme dérivé de Bn (f ).
D’autre part,
n
X k
Bn0 (f )(x) = Cnk f kxk−1 (1 − x)n−k − (n − k)xk (1 − x)n−k−1
n
k=0
†
il faut pour cela que pour tout ε il existe un α > 0 tel que pour tout η ∈ [0, α] on ait : ωf (η) ≤ ε, c’est
à dire que pour tout x et pour tout y dans [a, b] tels que |x − y| ≤ α, on ait |f (x) − f (y)| ≤ ε. Et ceci est
vrai puisque f est uniformément continue dans [a, b].
Approximation uniforme 67
et donc
n
X(1 − X) 0 X k n−k k k
Bn (f ) = Cnk f k
x (1 − x) (1 − x) − 1 − x ;
n n n n
k=0
on retrouve donc l’expression de (Bn (Xf ) − XBn (f )) (x) trouvée plus haut. Le lemme est
donc démontré.
Utilisons ce résultat pour calculer Bn (X) et Bn (X 2 ) : tout d’abord on voit que Bn (1) = 1
et donc
Bn (X) = XBn (1) = X,
d’où finalement :
X(1 − X) X(1 − X)
Bn (X 2 ) = XBn (X) + = X2 + .
n n
L’inégalité écrite en (2) devient donc :
x(1 − x) 1
|Bn (f )(x) − f (x)| ≤ ωf (η) + 1 ≤ ωf (η) +1
nη 2 4nη 2
et ceci pour tout η > 0. (On a utilisé ici le fait immédiat à vérifier que pour tout x ∈ [0, 1],
1
4x(1 − x) ≤ 1.) Le choix de η = √ conduit alors à la majoration suivante :
n
Proposition IV.11 Si f est une fonction continue sur l’intervalle [0, 1] alors pour tout
entier n ≥ 1 on a :
5 1
k Bn (f ) − f k ≤ ωf √ .
4 n
k Bn (f ) − f k −→ 0
Si la fonction f est un peu plus régulière on peut même donner une estimation de la
vitesse de convergence :
Corollaire IV.13 Si f est continue sur [0, 1], dérivable sur ]0, 1[ et de dérivée bornée par
M sur ]0, 1[ alors :
5M
k Bn (f ) − f k ≤ √ .
4 n
68 Analyse réelle pour le CAPES
Cas d’une fonction définie sur un intervalle [a, b] quelconque. Si f est une fonction
continue sur l’intervalle [a, b] alors la fonction g définie par :
g(x) = f (a + x(b − a))
est définie et continue sur [0, 1]. Les polynômes Bn (g) fournissent donc une approximation
de g sur [0, 1] : pour tout x ∈ [0, 1],
5 1
|Bn (g)(x) − g(x)| ≤ ωg √ .
4 n
Mais
x−a
f (x) = g
b−a
x−a
de sorte que Bn (g) approchent f sur l’intervalle [a, b] : si l’on note
b−a
n
x−a 1 X
k k
B̃n (f )(x) = Bn (g) = C n f a + (b − a) (x − a)k (b − x)n−k
b−a (b − a)n n
k=0
Z π
1
h ∗ g(x) = h(x − y)g(y)dy.
2π −π
Soit ε > 0. La fonction f étant continue et 2π-périodique sur R, elle est uniformément
continue sur R. Il existe donc η > 0 tel que, pour tous x, y ∈ R tels que |x − y| ≤ η, on a
|f (x) − f (y)| ≤ ε/2. Ainsi,
Z
|(Km ∗ f )(x) − f (x)| ≤ Km (y)|f (x − y) − f (x)|dy
{η≤|x|≤π}
Z
+ Km (y)|f (x − y) − f (x)|dy
{0≤|x|≤η}
Z
2π ε
≤ 2kf k + Km (y)dy
m(1 − cos η) 2 {0≤|x|≤η}
2π ε
≤ 2kf k + .
m(1 − cos η) 2
On voit donc que, pour tout m ≥ 8πkf k/(ε(1 − cos η),
kKm ∗ f − f k ≤ ε,
ce qui démontre le théorème.
70 Analyse réelle pour le CAPES
K muni
Corollaire IV.15 Les polynômes trigonométriques sont denses dans l’espace C2π
de la norme uniforme.
V. Exercices
1. Étudier la convergence simple et uniforme des suites de fonctions (fn ) et (gn ) définies
par :
nx nx3
fn (x) = , g n (x) = .
1 + n2 x2 1 + nx2
2. Soient a, b ∈ R tels que a < b. On considère une suite (fn )n∈N de fonctions de classe
C 1 de [a, b] dans R.. On suppose que la suite (fn ) converge simplement sur [a, b] vers
une fonction continue f , et qu’il existe M > 0 tel que :
converge uniformément sur l’intervalle [0, 1] vers une fonction que l’on déterminera.
Remarque. Cet exercice est corrigé dans J.M. Monier, mais de façon un peu trop
artificielle. Voici une solution plus naturelle :
a. Démontrer que la suite (fn )n∈N converge uniformément vers la fonction f : x 7→
xf (0) sur tout intervalle [0, c], avec 0 < c < 1.
b. Vérifier que :
Z 1 Z c
n
(f (t ) − f (0)) dt ≤ (f (tn ) − f (0)) dt + 2(1 − c)M,
0 0
a. On suppose que la suite (fn ) converge uniformément sur tout compact de I vers
une fonction continue f . Démontrer qu’alors la propriété (P ) suivante est vraie :
(P ) : pour toute suite (xn ) de points de I qui converge vers un x ∈ I,
la suite (fn (xn ))n∈N converge vers f (x).
b. Démontrer la réciproque.
c. La propriété (P ) entraı̂ne-t-elle que la suite (fn ) converge uniformément sur I ?
6. Une démonstration du lemme IV.5 n’utilisant pas le lemme de Dini. On considère la
suite de fonctions (Pn ) définie dans le lemme IV.5.
a. Démontrer par récurrence sur n ∈ N, que, pour tout n ∈ N et tout x ∈ [−1, 1],
2|x|
0 ≤ |x| − Pn (x) ≤ .
2 + n|x|
b. En déduire que la suite (Pn ) converge uniformément sur [−1, 1] vers x 7→ |x|.
7. Soit f une fonction de R dans R. On suppose que f est la limite uniforme sur R d’une
suite de fonctions polynomiales (Pn )n∈N .
a. Vérifier qu’il existe un entier N ∈ N tel que, pour tout n ≥ N , la fonction
Pn+1 − Pn est bornée sur R.
b. En déduire que la fonction f est polynomiale sur R.
8. Démontrer que toute fonction f d’un intervalle [a, b] dans R est la limite uniforme
sur [a, b] d’une suite croissante de fonctions polynomiales.
9. Soit f une fonction continue sur l’intervalle [a, b] telle que, pour tout entier n ∈ N,
Z b
xn f (x) dx = 0.
a
Dérivation
La notion de dérivée d’une fonction numérique est connue au moins depuis la classe de
première : dans cette classe, on en donne la définition usuelle, l’interprétation géométrique
(la dérivée en un point est égale à la pente de la tangente à la courbe en ce point), on fait
le lien, sans démonstration, entre le signe de la dérivée d’une fonction sur un intervalle et
son éventuelle monotonie, et l’on démontre la formule donnant la dérivée d’une fonction
composée. Tout ceci est ensuite utilisé pour mener à bien des études de fonctions. L’outil
essentiel qui manque pour démontrer les résultats admis à ce niveau, et pour aller plus loin
dans l’analyse, est le théorème des accroissements finis, connu dans les pays anglophones
sous le nom de théorème fondamental de l’analyse, ce qui dit assez son importance.
Dans ce chapitre, nous supposons connues la définition et les propriétés opératoires de
la dérivée : linéarité de la dérivation, dérivée d’un produit, d’un quotient, d’une fonction
composée, . . .
Nous ne considérons ici que des fonctions d’une variable réelle et à valeurs réelles. Des
généralisations seront vues dans le cours de calcul différentiel.
Lemme I.1 Soit f une fonction dérivable sur un intervalle I de R. Si f admet un extre-
mum local en un point c intérieur à I, alors f 0 (c) = 0.
Théorème I.2 (Rolle) Soit f une fonction continue d’un intervalle [a, b] dans R. On
suppose de plus que f est dérivable sur l’intervalle ouvert ]a, b[.
Si f (a) = f (b), alors il existe un point c ∈]a, b[ tel que f 0 (c) = 0.
Démonstration. La fonction f étant continue sur [a, b], elle y est bornée et atteint ses
bornes. Si elle est constante, sa dérivée est nulle partout et il n’y a rien à démontrer. Si
elle ne l’est pas, au moins une des deux bornes est atteinte en un point c différent de a et
de b ; ce point c est alors un extremum local pour f , et donc f 0 (c) = 0 d’après le lemme
ce-dessus.
Théorème I.3 (Égalité des accroissements finis) Soit f une fonction continue d’un
intervalle [a, b] dans R. On suppose de plus que f est dérivable sur l’intervalle ouvert ]a, b[.
Il existe un point c ∈]a, b[ tel que
f (b) − f (a)
f 0 (c) = .
b−a
f (b) − f (a)
g(x) = f (x) − f (a) − (x − a).
b−a
La fonction satisfait les hypothèses du théorème de Rolle. Tout point c ∈]a, b[ où la dérivée
de g s’annule satisfait la condition recherchée.
Théorème I.4 (Inégalité des accroissements finis) On suppose que f est dérivable
dans l’intervalle I et que
sup |f 0 (x)| ≤ M.
x∈I
Alors,
(∗) ∀x, y ∈ I |f (y) − f (x)| ≤ M |y − x|.
Une fonction qui satisfait la condition (∗) est dite lipschitzienne de rapport M . Ainsi,
toute fonction dérivable sur un intervalle I, et dont la dérivée est bornée, est lipschitzienne.
La réciproque est vraie aussi :
Corollaire I.5 Soit f une fonction dérivable sur un intervalle I et soit M > 0. Alors f
est lipschitzienne de rapport M si et seulement si sa dérivée est bornée par M .
Proposition II.1 Soit f une fonction dérivable d’un intervalle I de R et à valeurs réelles.
Alors :
– La fonction f est croissante sur I si et seulement si f 0 (x) ≥ 0 pour tout x ∈ I ;
– La fonction f est décroissante sur I si et seulement si f 0 (x) ≤ 0 pour tout x ∈ I ;
– La fonction f est constante sur I si et seulement si f 0 (x) = 0 pour tout x ∈ I ;
– Si f 0 s’annule en changeant de signe en un point c intérieur à I, alors f atteint un
extremum local en c.
Supposons réciproquement que f 0 est à valeurs positives. Si x et y sont deux points distincts
de I, le théorème I.3 nous assure de l’existence d’un c ∈ [x, y] tel que ∆(x, y) = f 0 (c). Par
conséquent, ∆(x, y) ≥ 0 est f est croissante.
En remplaçant les inégalités larges par des inégalités strictes dans la deuxième partie
de cette démonstration, nous voyons ceci.
Proposition II.2 Soit f une fonction dérivable d’un intervalle I de R et à valeurs réelles.
Alors :
– Si f 0 (x) > 0 pour tout x ∈ I, alors f est strictement croissante sur I ;
– Si f 0 (x) < 0 pour tout x ∈ I, alors f est strictement décroissante sur I.
et prolongée par 0 en x = 0 (cf. le livre de Auliac et Caby, p. 134). Cette fonction est
dérivable en tout point de R, admet un minimum global en x = 0, et cependant, dans tout
intervalle [−η, η], f 0 change de signe une infinité de fois.
Proposition II.3 Soit f une fonction continue sur un intervalle [a, b] et dérivable sur
l’intervalle ]a, b[. Si la dérivée f 0 admet une limite à droite α au point a, alors f est
dérivable en a et l’on a : f 0 (a) = α.
Un résultat semblable est vrai pour la limite à gauche de f 0 au point b.
Démonstration. Utilisons ici l’égalité des accroissements finis : si h ∈]0, b − a[, alors il
existe un point ch ∈ [a, a + h] tel que :
f (a + h) − f (a)
= f 0 (ch ).
h
Dans cette égalité, assons à la limite lorsque h tend vers 0 : le point ch tend vers a et donc
f 0 (ch ) tend vers α. Ainsi, nous obtenons : f 0 (a) = α.
Remarque. Cette proposition est fausse si l’on suppose seulement que f est continue
sur ]a, b[ : si par exemple f (a) = 1 et f (x) = 0 pour tout x > a, f 0 admet bien une limite
à droite en a (nulle), mais f n’est pas dérivable en a (puisqu’elle n’y est pas continue).
76 Analyse réelle pour le CAPES
Théorème II.4 (Darboux) Quelle que soit la fonction f dérivable sur l’intervalle ou-
vert I, l’ensemble f 0 (I) est un intervalle.
Démonstration. Il suffit de démontrer que pour tout [a, b] ⊂ I, la fonction f 0 prend toutes
les valeurs entre f 0 (a) et f 0 (b) (pourquoi ?). Introduisons pour cela la fonction φ définie
sur [a, b] par :
f (x) − f (a)
φ(x) = si x ∈]a, b], φ(a) = f 0 (a).
x−a
La fonction φ est continue sur [a, b], donc elle y satisfait le théorème des valeurs in-
termédiaires : pour tout y ∈ [φ(a), φ(b)], il existe α ∈ [a, b] tel que φ(α) = y.
0 f (a) − f (b)
En d’autres termes, pour tout y ∈ f (a), , il existe α ∈ [a, b] tel que
b−a
φ(α) = y. Si α = a, alors y = f 0 (a). Si α 6= a, alors le théorème des accroissements finis
appliqué à la fonction f sur l’intervalle [a, α] nous assure qu’il existe c ∈]a, α[⊂ [a, b] tel
que
f (α) − f (a)
f 0 (c) = = φ(α) = y.
α−a
0
Donc,
dans tous les cas, y = f (c), avec c ∈ [a, b]. Ceci étant vrai pour tout y ∈
f (a) − f (b)
f 0 (a), , ceci montre que f 0 prend entre a et b toutes les valeurs réelles com-
b−a
f (a) − f (b)
prises entre f 0 (a) et . On démontrerait de même que f 0 prend toutes les valeurs
b−a
f (a) − f (b)
réelles comprises entre et f 0 (b). Donc, finalement, f 0 ([a, b] ⊃ [f 0 (a), f 0 (b)].
b−a
Selon la tradition, on dit qu’une fonction est de classe C k dans l’intervalle I (avec
k ∈ N) si elle est k fois dérivable dans cet intervalle et si sa dérivée d’ordre k y est
continue. Elle est dite de classe C ∞ si elle admet des dérivées à tout ordre en tout point
de I ; toutes ses dérivées étant alors automatiquement continues (car dérivables).
Le réel A est choisi de sorte que φ(a) = 0. Moyennant ce choix de A, nous avons φ(a) =
φ(b) = 0 et l’on peut appliquer le théorème de Rolle à la fonction φ (qui en satisfait toutes
les hypothèses). Il existe donc c ∈]a, b[ tel que φ0 (c) = 0. Un calcul que nous omettons
montre que, pour tout x ∈ [a, b],
(b − x)n
φ0 (x) = (−f (n+1) (x) + A).
n!
Il en découle que f 0(n+1) (c) = A. Il suffit maintenant de récrire que φ(a) = 0 pour obtenir
la formule recherchée.
Remarquons qu’il n’est fait nulle part usage du fait que a < b dans cet argument. Le
résultat est encore valide dans le cas où I = [b, a]. Pour exprimer tout ceci dans le même
énoncé, on peut retranscrire la formule de Taylor-Lagrange sous la forme qui suit :
Ici, le point c ∈]a, a + h[ (ou ]a + h, a[ si h < 0) fourni par le théorème précédent est écrit
c = a + θh, avec θ ∈]0, 1[, mais cela revient au même.
Cas des fonctions polynomiales Supposons que P est une fonction polynomiale de
degré n. Alors sa dérivée d’ordre n + 1 est constamment nulle et la formule de Taylor en
un point a ∈ R se réduit à ceci :
n
X (b − a)k
∀b ∈ R f (b) = f (k) (a).
k!
k=0
Théorème III.3 (Formule de Taylor-MacLaurin) Soit f une fonction n+1 fois déri-
vable sur un intervalle qui contient 0. Pour tout point x ∈ I, il existe θ ∈]0, 1[ tel que
n
X f (k) (0) f (n+1) (θx) n+1
f (x) = xk + x .
k! (n + 1)!
k=0
78 Analyse réelle pour le CAPES
III.2. Formule de Taylor avec reste intégral Tout comme la formule de Taylor-La-
grange est un raffinement de l’égalité des accroissements finis, la formule de Taylor avec
reste intégral est un raffinement de la formule :
Z b
f (x) = f (a) + f 0 (t) dt.
a
Théorème III.4 (Formule de Taylor avec reste intégral) Soient f une fonction de
classe C n+1 sur l’intervalle [a, b] et x ∈ [a, b]. Alors :
n
f (k) (a) 1 x (n+1)
X Z
k
f (x) = (x − a) + f (t)(x − t)n dt.
k! n! a
k=0
Il suffit maintenant d’intégrer par parties l’intégrale qui apparaı̂t dans le terme de droite :
on pose u(x) = f (n) (x), v 0 (x) = (x − t)n−1 , et l’on obtient immédiatement la formule
recherchée pour l’entier n.
Théorème III.5 (Formule de Taylor-Young) On suppose que f est une fonction défi-
nie sur un intervalle I et qu’elle est n fois dérivable en un point a intérieur à I. Alors,
n
X f (k) (a)
f (x) = (x − a)k + ox→a ((x − a)n ).
k!
k=0
Remarque. Si f est n fois dérivable au point a, alors, nécessairement, elle est n − 1 fois
dérivable dans tout un voisinage de a.
Démonstration du théorème III.5
Dérivation 79
Supposons maintenant la propriété vraie à l’ordre n−1. Nous pouvons appliquer cette
hypothèse de récurrence à la fonction f 0 : ainsi, dans un voisinage V de a,
D’après l’égalité des accroissements finis, pour chaque x ∈ V , il existe θ x ∈ [0, 1] tel
que
f (x) − f (a) = (x − a)f 0 (a + θx (x − a)).
Puisque f (a) = 0, nous pouvons en déduire :
2. Passons maintenant au cas général, où l’on suppose simplement que f est n fois
dérivable en a. Posons alors
n
X f (k)
g(x) = f (x) − (x − a)k .
k!
k=0
La fonction g ainsi définie est n fois dérivable, et g(a) = g 0 (a) = . . . = g (n) (a) = 0. On
est donc ramené au cas précédent : g(x) = o((x−a)n ), ce qui achève la démonstration.
Remarque. Si, dans le théorème III.5, on suppose que f est n + 1 fois dérivable, alors
on peut faire un développement à l’ordre n + 1, ce qui permet d’écrire le reste d’ordre n
sous la forme :
f (n+1) (a)
Rn (f, a, x) = (x − a)n+1 + o((x − a)n+1 ).
(n + 1)!
Ainsi :
Rn (f, a, x) = O((x − a)n+1 ).
Remarquons tout de suite qu’un tel développement, s’il existe, est unique.
et donc
P (x) − Q(x)
→0
xn
quand x tend vers 0. Comme P et Q sont de degré au plus n, la différence R = P − Q
s’écrit :
n
X R(k) (0) k
R(x) = x
k!
k=0
n
1 X xn xn+1
= +
α−x αn+1 αn+1 (α − x)
k=0
n
X xn
= + o(xn ).
αn+1
k=0
Dérivation 81
Cet exemple a une valeur anecdotique. C’est à peu près le seul où un développement
limité se calcule directement (avec celui des fonctions polynomiales ...).
La première source de développements limités est bien entendu le théorème de Taylor-
Young, que nous rappelons à nouveau :
Théorème IV.3 Si f admet est n fois dérivable au point 0, alors elle admet un dévelop-
pement limité à l’ordre n en 0 :
n
X f (k) (0)
f (x) = xk + ox→0 (xn ).
k!
k=0
On déduit directement de ceci les développements limités en 0 des fonctions usuelles, dont
les dérivées successives se calculent facilement : sinus, cosinus, exponentielle, fonctions
hyperboliques, ainsi que la fonction fα définie sur ] − 1, 1[ au moins par fα (x) = (1 + x)α ,
avec α ∈ R. Nous voyons que :
exp(n) (x) = exp(x), cos(n) (x) = cos(x + nπ/2), sin(n) (x) = sin(x + nπ/2),
et
fα(n) (x) = α(α − 1) · · · (α − (n − 1))(1 + x)α−n .
Nous pouvons en déduire les développements limités en 0 suivants :
x2 x3 xn
exp x = 1 + x + + + ··· + + o(xn )
2! 3! n!
x2 x4 x2p
cos x = 1 − + − · · · + (−1)p + o(xn ) avec n = 2p ou 2p + 1
2! 4! (2p)!
x3 x5 x2p+1
sin x = x − + − · · · + (−1)p + o(xn ), n = 2p + 1 ou 2p + 2
3! 5! (2p + 1)!
α α(α − 1) 2 α(α − 1) · · · (α − (n − 1)) n
(1 + x)α = 1 + x + x + ··· + x + o(xn ).
1! 2! n!
Un calcul simple montre que f est continue et dérivable sur R, mais que sa dérivée n’est
pas continue en 0. Elle n’admet donc pas de dérivée d’ordre 2 en 0. Cependant, puisque
la fonction cosinus est bornée sur R, on voit que f (x) = o(x2 ). Notre fonction admet donc
bien un développement limité d’ordre 2 en 0, dont la partie principale est nulle.
Signalons quand même la propriété suivante :
IV.2. Opérations sur les développements limités (Ce paragraphe provient à peu
près intégralement du cours de DEUG de J.C. Ravel.)
Soit I un intervalle de R et soit a un point intérieur à I. On dit qu’une fonction f : I →
R admet un développement limité à l’ordre n au point a si la fonction g : x 7→ f (x + a)
admet un développement limité en 0. Dans ce cas, nous aurons :
n
X
f (x + a) = ck xk + ox→0 (xn ),
k=0
Dans ce qui suit, l’expression DLn (a) signifie : développement limité à l’ordre n
au point a . Par ailleurs, si P est un polynôme et n ∈ N, l’expression Tna (P ) désigne
le polynôme obtenu en tronquant à l’ordre n son développement de Taylor en a. Plus
précisément, si P s’écrit :
m
X
P (x) = ck (x − a)k ,
k=0
avec m ≥ n, alors
n
X
Tna (P ) = ck (x − a)k .
k=0
L’indice a sera la plupart du temps omis, et l’on note plutôt : Tn (P ) = Tna (P ), lors-
qu’aucune confusion n’est possible. (Précisons que cette notation n’est absolument pas
standard.)
(f g)(x) = (Pn (f )Pn (g))(x) + o((x − a)n ) = Tn (Pn (f ) Pn (g))(x) + o((x − a)n ),
car pour tout entier k > n et pour tout réel ak , on a ak (x − a)k = o((x − a)n ).
Il est clair de plus que pour tout réel λ, λf admet un DLn (a), et Pn (λf ) = λPn (f ).
ex
Exemple Calculons le DL2 (0) de f (x) = . Nous avons :
1+x
x2 1
ex = 1 + x + + o(x2 ), = 1 − x + x2 + o(x2 ).
2 1+x
D’où :
x2
+ o(x2 ).
f (x) = 1 +
2
On remarquera que le terme de degré 3 du produit des deux polynômes n’est pas égal au
terme de degré 3 du DL3 (0) de f .
Théorème IV.7 (composition) Si f (x) admet un DLn (a) de partie régulière P (x) et
g(y) un DLn (b), où b = f (a) ∈ I, de partie régulière Q(y), alors g◦f (x) admet un DLn (a),
et Pn (g ◦ f ) = Tn (Q ◦ P ).
On voit facilement que Q(f (x)) = T (x) + xn ε3 (x), où T = Tn (Q ◦ P ). Comme P (0) = 0,
il existe un polynôme P1 tel que P (x) = xP1 (x), et donc :
g(f (x)) = T (x) + xn ε3 (x) + (P1 (x) + xn−1 ε1 (x))n ε2 (f (x)) = T (x) + xn ε4 (x),
avec
1 g(x) − g(a)
h(y) = et f (x) = ,
1+y g(a)
1
et d’appliquer le théorème de composition, puisque h(y) = 1+y admet un DLn (0), et
f (a) = 0.
1 1 1
= n n
= .
g(x) a0 + a1 x + · · · + an x + o(x ) a0 (1 + b1 x + · · · + bn xn + o(xn ))
Il suffit alors de calculer 1 − y + y 2 − · · · + (−1)n y n , avec y = b1 x + · · · + bn xn , en tronquant
à l’ordre n.
Remarque. Si g(0) = 0, alors il existe p ∈ [1, n] tel que
g(x) = xp (ap + ap+1 x + · · · + an xn−p + o(xn−p ),
g(x)
et on peut appliquer ce qui précède à la fonction g̃ définie par g̃(x) = xp pour x 6= 0 et
g̃(0) = ap , qui admet un DLn−p (0).
Exemples
Dérivation 85
1
1. Calculons le DL5 (0) de la fonction :
cos
1 1 x2 x4 x4 x2 5x4
= x2 x4
=1+ − + 2 + o(x5 ) = 1 + + + o(x5 ).
cos x 1− + + o(x5 ) 2 24 2 2 24
2 24
f
2. On en déduit le DLn (a) d’un quotient lorsque g(a) 6= 0. Calculons le DL5 (0) de la
g
fonction tangente :
x3 x5 x2 5x4
5 5
tan x = x− + + o(x ) 1+ + + o(x )
6 120 2 24
x3 2x5
= x+ + + o(x5 ).
3 15
x
3. Donner le DL5 (0) de .
sin x
Donnons, maintenant un autre moyen d’obtenir le DLn (a) d’un quotient, pour a = 0.
Théorème IV.9 (quotient) Si f admet un DLn (0), g admet un DLn (0) et g(0) 6=
0, alors f /g admet un DLn (0), et Pn (f /g) est le quotient Q de la division suivant les
puissances croissantes à l’ordre n du polynôme A = Pn (f ) par le polynôme B = Pn (g).
Démonstration. Comme B(0) 6= 0, il existe un couple unique (Q, R) de polynômes tel que
deg(Q) ≤ n et A(x) = B(x)Q(x) + xn+1 R(x). On en déduit :
f (x)
= Q(x) + o(xn ).
g(x)
au voisinage de 0.
Exemple. On retrouve ainsi le DL5 (0) de la fonction tangente, puisque la division suivant
les puissances croissantes à l’ordre 5 de P5 (sin x) par P5 (cos x) donne :
x3 x5 x2 x4 x3 2x5
x− + = 1− + x+ + + x6 R(x).
3! 5! 2! 4! 3 15
Intégration et dérivation Par souci de simplicité, nous supposons ici que a = 0.
Théorème IV.10 Soit f une fonction de classeR C 1 sur I. Si f 0 admet un DLn (0), alors
x
f admet un DLn+1 (0), et Pn+1 (f )(x) = f (0) + 0 Pn (f 0 )(t) dt. Plus explicitement, si
f 0 (x) = a0 + · · · + an xn + o(xn ),
alors
xn+1
f (x) = f (0) + a0 x + · · · + an + o(xn+1 ).
n+1
86 Analyse réelle pour le CAPES
Démonstration. On sait que f 0 (t) = P (t) + tn e(t), avec lim e(t) = 0 ; on obtient en
Rx R x t→0
intégrant f (x) = f (0) + 0 P (t) dt + E(x), où E(x) = 0 tn e(t) dt, et il reste à montrer
que E(x) = o(xn+1 ).
Soit ε > 0 ; il existe δ > 0 tel que |e(t)| ≤ ε pour tout t ∈ I ∩ [−δ, δ]. Ainsi, pour
|x|n+1
tout x ∈ I ∩ [0, δ], |E(x)| ≤ ε ≤ ε|x|n+1 , cette majoration étant encore valable pour
n+1
E(x)
x ∈ I ∩ [−δ, 0]. On a donc prouvé que lim n+1 = 0, c’est-à-dire que E(x) = o(xn+1 ).
x→0 x
Proposition IV.11 Soit f une fonctionde classe C 1 sur I. Si f admet un DLn+1 (0), et
si f 0 admet un DLn (0), alors Pn (f 0 )(x) = (Pn+1 (f ))0 (x). Plus précisément, si
f (x) = a0 + a1 x + · · · + an+1 xn+1 + o(xn+1 ),
alors :
f 0 (x) = a1 + 2a2 x + · · · + (n + 1)an+1 xn + o(xn ).
Remarque. La condition “f 0 admet un DLn (0)”, réalisée par exemple lorsque f est de
classe C n+1 , est indispensable : si f est définie sur R par f (0) = 0 et f (x) = x3 sin(1/x2 )
pour x 6= 0, on a f (x) = o(x2 ) donc f admet un DL2 (0). D’autre part, f 0 (0) = 0, et pour
x 6= 0, f 0 (x) = 3x2 sin(1/x2 ) − 2 cos(1/x2 ). Ainsi, f 0 n’est pas continue en 0, et n’admet
donc pas de DL0 (0).
IV.3. Applications
Détermination de limites. Il est important à chaque fois de voir a priori à quel ordre
il faut effectuer les développements limités. Cet ordre doit être suffisamment grand pour
obtenir le résultat voulu, mais suffisamment petit pour éviter les calculs inutiles.
Exemples.
√
(sin x) 1 + x2 − x
1. Calculons lim f (x), où f (x) = .
x→0 x3
3
2
1 − x6 + o(x3 ) 1 + x2 + o(x3 ) − x
f (x) = 3
3
x
x + x3 + o(x3 ) − x
=
x3
1
= + o(1),
3
1
donc lim f (x) = .
x→0 3
Dérivation 87
exp x − cos x
2. Calculons lim f (x), où f (x) = √ .
x→0 1 − 1 − x2
(1 + x + o(x)) − (1 + o(x))
f (x) =
1 − 1 − 12 x2 + o(x2 )
x + o(x)
= 1 2 2
2 x + o(x )
2 1 + o(1)
=
x 1 + o(1)
2
= (1 + o(1)) ,
x
donc lim f (x) = +∞ et lim f (x) = −∞.
x→0 x→0
x>0 x<0
q
1
3. Calculons lim un , où un = n 1+ n −1 :
n→+∞
1 1 1
un = n 1 + +o − 1 = + o(1),
2n n 2
1
donc lim un = .
n→+∞ 2
n
4. Calculons lim un , où un = 1 + n1 :
n→+∞
1 1 1
un = exp n ln 1 + = exp n ( + o = exp(1 + o(1)),
n n n
donc lim un = e.
n→+∞
1 1
n
2 n +3 n
5. Calculons lim un , où un = 2 :
n→+∞
1 1
!
e n ln 2 + e n ln 3
un = exp n ln
2
!
1
1+ ln 2 + o( n1 ) + 1 +
n
1
n ln 3 + o( n1 )
= exp n ln
2
1 1
= exp n ln 1 + ln 6 + o
2n n
1 1
= exp n ln 6 + o
2n n
√
= exp ln 6 + o(1) ,
√
donc lim un = 6.
n→+∞
Position du graphe d’une fonction par rapport à une de ses tangentes. Soit f
une fonction définie sur un intervalle I et soit a un point de I distinct de ses extrémités.
On suppose que f admet un D.L(a) de la forme :
ap est donc le premier coefficient non nul d’indice strictement supérieur à 1 d’un
D.Ln (a) où n ≥ 2.
On en déduit que : f est dérivable en a et que l’équation de la tangente de Γf au point
d’abscisse a est y = a0 + a1 (x − a). Comme f (x) − a0 − a1 (x − a) ∼ ap (x − a)p , on peut
déterminer la position du graphe de f par rapport à sa tangente au point d’abscisse a : si
p est pair (respectivement impair) le graphe ne traverse pas (respectivement traverse) la
tangente.
Exemples
x
1. Étude locale au voisinage de 0 de x 7→ ln(1 + x) − + x2 .
3
x2
2. Étude locale au voisinage de 0 de x 7→ ln(1 + x) + .
2
x p 2
3. Étude locale au voisinage de 0 de x 7→ x + 1.
x−1
Étude des branches infinies. On présente ici des résultats au voisinage de +∞ qui
sont évidemment transposables au voisinage de −∞.
Soit f une fonction définie sur un intervalle I non majoré (c’est-à-dire contenant une
demi-droite [A, +∞[). On notera Γf son graphe.
On rappelle que la droite d’équation y = ax + b où (a, b) ∈ R2 est asymptote au
graphe de f en +∞ si et seulement si lim (f (x) − ax) = b.
x→+∞
Exemples
1. Étude au voisinage de +∞ de x 7→ x − ln(1 + x).
x3
2. Étude au voisinage de +∞ et −∞ de x 7→ .
(x − 1)2
x p 2
3. Étude au voisinage de +∞ et −∞ de x 7→ x + 1.
x−1
V. Développements asymptotiques
La notion de développement asymptotique est une généralisation de celle de dévelop-
pement limité. Observons par exemple la fonction f définie au voisinage de 0 par :
1 sin x
f (x) = 1 + √ .
x
Développons le produit des deux parenthèses et tronquons de façon que le reste soit de
l’ordre de O(x3 ) :
√
x3 √ x2 x2 x
1 3
f (x) = exp − x− ln x + x x − + + O(x ) .
2 6 2 3
Il est préférable de présenter ces termes de sorte que chacun soit négligeable devant celui
qui le précède :
√ √
x √ x2 2 x2 x2 x x2 x x3
f (x) = 1 − ln x + x x + ln x − − ln x + + ln x + O(x3 ).
2 8 2 2 3 12
Dans un développement limité, une fonction est comparée localement à un polynôme,
c’est-à-dire à une combinaison linéaire de fonctions de la forme x 7→ xn , avec n ∈ N ; ici,
la fonction f est développée en une somme de fonctions plus simples, dont on connaı̂t les
comportements relatifs en 0, mais qui ne sont pas nécessairement des monômes x 7→ xn .
90 Analyse réelle pour le CAPES
Dans l’exemple qui vient d’être traité, on dit que la fonction f est développée par
rapport à l’échelle de comparaison formée des fonctions de la forme x 7→ xα lnβ x, avec
α, β ∈ R. Ainsi, un développement limité est un développement asymptotique dans l’échelle
des fonctions x 7→ xn , n ∈ N.
À la différence des développements limités, des développements asymptotiques peuvent
être écrits au voisinage de l’infini. Par exemple, développons en x 7→ +∞ la fonction f
définie par :
2
f (x) = (x sin(1/x))x .
Il suffit ici de poser t = 1/x pour se ramener à un développement en 0, qui sera ici un
développement limité :
1 sin t
f (x) = exp 2 ln
t t
t2 t4
1 6
= exp 2 ln 1 − + + O(t )
t 3! 5!
2 t2 t2
1 t 4 1 4
= exp − + − + O(t ) = exp − − + O(t )
6 5! 72 6 180
t2 e−1/6
−1/6
= e 1− + O(t ) = e−1/6 −
4
+ O(1/x4 ).
180 180x2
VI. Exercices
1. Soit f une fonction continue sur un intervalle [a, +∞[ (a ∈ R) et dérivable sur ]a, +∞[.
On suppose que limx→+∞ f (x) = f (a). Démontrer qu’il existe c ∈]a, +∞[ tel que
f 0 (c) = 0.
2. Soit f une fonction de classe C 3 sur l’intervalle [a, b]. Démontrer qu’il existe c ∈]a, b[
tel que :
f 0 (a) + f 0 (b) (b − a)3 (3)
f (b) = f (a) + (b − a) − f (c).
2 12
3. Soit f une fonction de classe C 2 sur l’intervalle [a, b]. Démontrer que pour tout x ∈
[a, b], il existe c ∈ [a, b] tel que :
4. Cet exercice est une généralisation du précédent. Soit f une fonction de classe C n+1
dans l’intervalle [a, b] et soit P le polynôme d’interpolation de f aux points x0 < x1 <
· · · < xn de l’intervalle [a, b]. Démontrer que, pour tout x ∈ [a, b],
(b − a)n+1 (n+1)
|f (x) − P (x)| ≤ kf k∞ .
(n + 1)!
Indication. Considérer la fonction φ définie par :
(t − x0 ) . . . (t − xn )
φ(t) = f (t) − P (t) − (f (x) − P (x)) .
(x − x0 )(x − x1 ) . . . (x − xn )
Appliquer le théorème de Rolle à φ, puis, successivement, à toutes ses dérivées jusqu’à
l’ordre n. (NB : cet exercice est traité au théorème IV.3, p. 114.)
Dérivation 91
5. Soient f, g deux fonctions continues sur [a, b] et dérivables sur ]a, b[. On suppose que
g 0 (x) 6= 0 pour tout x 6= 0. Démontrer qu’il existe c ∈]a, b[ tel que :
8. Soit f une fonction dérivable sur l’intervalle ]a, b[, avec −∞ ≤ a < b ≤ +∞, telle que
avec l ∈ [−∞, +∞]. Démontrer qu’il existe c ∈]a, b[ tel que f 0 (c) = 0.
9. Démontrer que, pour tout x > 0,
1 x 1 1 1
− < − x < .
2 8 x e −1 2
10. Déterminer toutes les fonctions trois fois dérivables sur un intervalle I =]a, b[ de R
telles que, pour tous a, b ∈ I, on ait :
a+b
f (b) = f (a) + (b − a)f 0 .
2
f (x + h) = f (x − h) + 2hf 0 (y).
11. Fonctions convexes. Une fonction f : [a, b] 7→ R est dite convexe si, pour tous x, y ∈
[a, b] et tout t ∈]0, 1[,
c. Démontrer qu’une fonction convexe sur [a, b] admet une dérivée à droite et une
dérivée à gauche en tout point de ]a, b[, puis que, en tout point x ∈]a, b[,
d. Démontrer que toute fonction convexe est continue sur ]a, b[.
e. Soit f : [a, b] 7→ R, dérivable sur [a, b]. Démontrer que f est convexe si et seulement
si f 0 est croissante.
f. Soit f : [a, b] 7→ R, continue, telle que, pour tous x, y ∈ [a, b],
x+y f (x) + f (y)
f ≤ .
2 2
h. Soit f une fonction convexe de R dans R. Démontrer que si f est majorée, alors
f est constante.
12. a. Appliquer le théorème des accroissements finis sur l’intervalle [n, n + 1] (n ∈ N∗ )
1 1
à la fonction x 7→ . En déduire la nature de la série de terme général .
ln x n ln2 n
1
b. Raisonner de même pour obtenir la nature de la série de terme général .
n ln n
13. a. Démontrer que, pour tous x ≥ 0,
x2
x− ≤ ln(1 + x) ≤ x.
2
b. En déduire la limite de la suite (un )n∈N∗ définie par :
n
Y k
un = 1+ 2 .
n
k=1
15. Soit I un intervalle de R contenant 0 et soit f une fonction n fois dérivable sur I, et
admettant une dérivée n + 1-ième en 0. Démontrer que la fonction g définie sur I par
g(0) = f 0 (0) et, pour x 6= 0, g(x) = (f (x) − f (0))/x, est n fois dérivable sur I et que,
pour k ≤ n,
1
g (k) (0) = f (k+1) (0).
k+1
16. On suppose que 0 < a ≤ +∞. Soit f une fonction deux fois dérivable sur l’intervalle
I =] − a, a[ telle que f et f 00 soient bornées sur I. On note M0 = supx∈I |f (x)| et
M2 = supx∈I |f 00 (x)|.
a. On suppose que I = R. Soit α > 0. En utilisant la formule de Taylor-Lagrange
sur les intervalles [x − α, x] et [x, x + α], démontrer que, pour tout x ∈ I,
M0 α
|f 0 (x)| ≤ + M2 .
α 2
En déduire que f 0 est bornée sur I et que, pour tout x ∈ I, on a :
|f 0 (x)| ≤ 2M0 M2 .
p
x ∈ [t − α, t + α] ⊂ I.
en fonction de α, β ∈ R.
18. Soit f la fonction définie sur R∗ par :
ex − 1
f (x) = − 1,
x
et prolongée par continuité en 0.
a. Démontrer que f est injective, puis que f réalise une bijection de R sur un inter-
valle ouvert qui contient 0.
94 Analyse réelle pour le CAPES
Il ne reste plus qu’à passer à la limite et à utiliser le théorème des gendarmes dans la
double inégalité :
Z 1 Z 1 Z 1
2
gn (x)dx ≤ x dx ≤ hn (x)dx
0 0 0
pour obtenir :
Z 1
1
x2 dx = .
0 3
Bien sûr, cette méthode de calcul ne peut pas mener bien loin, aussi fait-on ensuite le
lien entre intégrales et primitives, ce qui permet de lancer toute la machinerie calculatoire
traditionnelle.
Au CAPES, il est attendu des candidats qu’ils connaissent une théorie de l’intégration
pour les fonctions continues par morceaux. Il suffit en fait d’étendre à ces fonctions la
méthode vue en terminale, à savoir, d’approcher les fonctions continues par morceaux par
des fonctions en escalier. C’est ce que nous allons voir maintenant. Dans ce qui suit, nous
considérons des fonctions définies sur un intervalle fermé et borné [a, b] d R et à valeurs
dans un espace vectoriel normé complet E sur le corps des scalaires K = R ou C. Dans la
plupart des applications, l’espace E sera le corps K lui-même.
96 Analyse réelle pour le CAPES
Proposition II.1 Soit f une fonction en escalier de [a, b] dans E et soit σ = (x0 , . . . , xn )
une subdivision adaptée à f . Notons, pour chaque entier naturel k ≤ n − 1, yk la valeur
constante prise par la fonction f sur l’intervalle ]xk , xk+1 [.
La quantité
n−1
X
I(f, σ) = (xk+1 − xk )yk
k=0
ne dépend pas de la subdivision σ mais seulement de f . On l’appelle l’intégrale de f sur
[a, b] et on la note
Z b
f (x) dx.
a
Il suffit de mettre yk0 en facteur dans les deux termes contenant z pour retrouver immédia-
tement I(f, σ) = I(f, σ 0 ).
Si maintenant σ 0 est une subdivision quelconque qui contient σ, on retrouve le même
résultat en raisonnant par récurrence sur le nombre de points de plus que contient σ 0 .
Plaçons nous maintenant dans le cas général de deux subdivisions σ et σ 0 adaptées à
f . Alors la réunion de ces deux subdivisions, que nous notons τ , est aussi adaptée à f et
elle contient σ et σ 0 . Par ce qui précède, nous avons alors :
I(f, σ) = I(f, τ ) = I(f, σ 0 ),
ce qui achève le raisonnement.
PS. Pour être formellement irréprochable, il ne faut pas dire que τ est la réunion des
deux subdivisions σ et σ 0 , car il ne s’agit pas d’une réunion de deux ensembles. Il faut dire
que τ est obtenue en prenant tous les points de σ et σ 0 et en les réordonnant.
Intégration sur un segment 97
Z b
4. Si f (x) ≥ 0 pour tout x ∈ [a, b], alors f (x) dx ≥ 0.
a
Démonstration.
1. Si σ et σ 0 sont deux subdivisions adaptées à f et g, alors la réunion, notée τ , de σ et
σ 0 est adaptée aux deux fonctions f et g. On vérifie alors aisément que
2. Il suffit, pour faire ce calcul, de choisir une subdivision de [a, b] adaptée à f qui
contienne le point c, ce qui est toujours possible.
3. Il faut d’abord constater que la fonction f˜ : x 7→ kf (x)k est bien une fonction en
escalier, de [a, b] dans R. Ensuite, si σ est adaptée à f , elle l’est aussi à f˜ et l’on a,
en utilisant les notations de la proposition II.1 :
n−1
X
kI(f, σ)k = yk (xk+1 − xk )
k=0
n−1
X
≤ (xk+1 − xk )kyk k
k=0
Z b
= I(f˜, σ) = kf (x)k dx ;
a
Proposition II.3 Supposons que f est une fonction en escalier à valeurs réelles sur [a, b].
1. Si g est une fonction réelle en escalier sur [a, b] et si f ≤ g, alors
Z b Z b
f (x) dx ≤ g(x) dx ;
a a
Proposition II.4 Soit f une fonction en escalier de [a, b] dans un espace normé E, muni
de la norme k k. Alors :
Z b
f (x) dx ≤ (b − a) max kf (x)k.
a x∈[a,b]
En d’autres termes, si l’on munit l’espace E([a, b], E) des fonctions en escalier de [a, b] dans
E de la norme uniforme, définie par :
kf k∞ = max kf (x)k,
x∈[a,b]
alors l’application
L : E([a, b], E) −→ E
Z b
f 7−→ f (x) dx
a
est une application linéaire continue, de norme inférieure ou égale à b − a. Elle est en fait
de norme égale à b − a, comme on le voit en calculant l’intégrale d’une fonction constante,
pour laquelle l’inégalité établie à la proposition II.4 est une égalité.
Dans le cas présent, E est l’espace des fonctions continues par morceaux de [a, b] dans
E, muni de la norme uniforme ; F est l’espace E (que l’on a pris soint de supposer complet
au début du chapitre), D est l’espace des fonctions en escalier de [a, b] dans E et l’appli-
cation L est celle introduite à la fin du paragraphe précédent (et qui est bien linéaire
d’après la proposition II.2). L’hypothèse notée (1) dans le théorème est satisfaite d’après
la proposition II.4 ci-dessus et le fait que D est dense dans E vient d’être rappelé. On peut
donc appliquer directement le théorème II.5. On obtient ainsi :
Théorème II.6 Soit f une fonction continue par morceaux de [a, b] dans E et soit (fn )n∈N
une suite de fonctions en escalier qui converge uniformément sur [a, b] vers f . Alors la
suite (In )n∈N , définie par :
Z b
In = fn (x) dx,
a
est convergente, et sa limite ne dépend que de f , et non de la suite (fn ) choisie. Cette
Z b
limite s’appelle l’intégrale de f sur [a, b], et se note f (x) dx. Par ailleurs, on a :
a
Z b
(2) f (x) dx ≤ (b − a)kf k∞ .
a
Démonstration. Tout d’abord, la suite (In ) est convergente car c’est une suite de Cauchy
dans l’espace complet E. En effet, d’après la proposition II.4,
kIn − Im k ≤ (b − a)kfn − fm k∞
et la suite (fn ), qui converge uniformément, satisfait le critère de Cauchy uniforme dans
[a, b]. Notons I la limite de la suite (In ). Considérons maintenant (gn ) une autre suite de
fonctions en escalier qui converge uniformément vers f et soit J la limite de la suite (Jn )
Rb
définie par Jn = a gn (x) dx. Nous avons, pour chaque entier n ∈ N,
Z b
kIn − Jn k = (fn (x) − gn (x)) dx ≤ (b − a)kfn − gn k∞ .
a
100 Analyse réelle pour le CAPES
Comme les deux suites (fn ) et (gn ) convergent uniformément vers la même fonction f ,
nous voyons que limn→∞ kfn − gn k∞ = 0. Par conséquent, In − Jn tend vers 0 et I = J.
L’inégalité (2) se démontre ensuite en passant à la limite dans :
Z b
fn (x) dx ≤ (b − a)kfn k∞ .
a
Remarque. Si f et g sont deux fonctions continues par morceaux qui ne diffèrent qu’en
un nombre fini de points, alors leurs intégrales sont égales. En effet, ce résultat est vrai
pour deux fonctions en escalier (voir la remarque de la page 97). Or, si (fn ) est une suite
de fonctions en escalier qui converge uniformément vers f , il suffit de modifier chacun de
ses termes en un nombre fini de points pour obtenir une suite (gn ) de fonctions en escalier
qui converge uniformément vers g. Mais alors les intégrales de fn et de gn sont égales pour
tout n. Il en est donc de même pour celles de f et de g.
II.3. Quelques propriétés élémentaires Des passages à la limites simples et que nous
laissons au lecteur permettent de vérifier aisément ce qui suit :
Proposition II.7 Toutes les propriétés établies dans les propositions II.2 et II.3 pour les
fonctions en escalier s’étendent sans changement aux fonctions continues par morceaux de
[a, b] dans E.
est valable pour tous a, b, c appartenant à un intervalle I dans lequel f est définie, et ceci,
quel que soit l’ordre relatif de ces trois points.
Une propriété que l’on vérifie immédiatement à l’aide de la relation de Chasles et la
propriété de positivité de l’intégrale est la suivante :
Si f est à valeurs positives et si I = [c, d] est un intervalle contenu dans [a, b], alors
Z d Z b
f (x) dx ≤ f (x) dx.
c a
Cette constatation simple nous conduit à la propriété importante qui suit, relative aux
fonctions continues.
Proposition II.8 Soit f une fonction continue à valeurs positives ou nulles telle que
Z b
f (x) dx = 0.
a
Démonstration. Supposons que f ne soit pas constamment nulle, et prenne une valeur
strictement positive en un point c ∈ [a, b]. Par continuité, il existe alors un intervalle centré
en c à l’intérieur duquel f est strictement positive. Mieux :
f (c)
∀x ∈ I = [c − η, c + η] ∩ [a, b] f (x) > ,
2
avec η > 0. Mais alors :
Z b Z
f (c)
f (x) dx ≥ f (x) dx ≥ η > 0.
a I 2
Par contraposition, on en déduit que f est constamment nulle si son intégrale est nulle.
Il faut constater que cette propriété n’est pas valable si f est seulement continue par
morceaux. Observer par exemple la fonction f qui est nulle partout sauf au point c =
(b + a)/2, où elle vaut 1.
Une application amusante de cette propriété est proposée à la page 104 (proposition
II.16).
Corollaire II.10 On suppose que f est une application continue de [a, b] dans R. Il existe
un réel c ∈ [a, b] tel que
Z b
1
f (c) = f (x) dx.
b−a a
En d’autres termes, f (c) est égal à la moyenne de la fonction f sur l’intervalle [a, b].
La seconde formule de la moyenne sera vue plus loin comme application de la formule
d’intégration par parties (proposition III.6, p. 110).
102 Analyse réelle pour le CAPES
Nous avons ainsi défini sur Cm une forme bilinéaire symétrique si K = R et une forme
sesquilinéaire alternée si K = C. De plus, nous voyons que, dans les deux cas,
∀f ∈ Cm , (f |f ) ≥ 0.
En d’autres termes, nous avons un semi-produit scalaire sur Cm . Mais ce n’est pas un
produit scalaire dans Cm : on peut avoir (f |f ) = 0 sans que f soit la fonction nulle
(reprendre l’exemple qui met en défaut la proposition II.8). La proposition II.8 nous assure
toutefois que notre application (.|.) est bien un produit scalaire dans l’espace C.
Remarque. Dans la théorie des séries de Fourier telle qu’elle doit être présentée au
CAPES, on introduit la notion de fonction continue par morceaux normalisée. Une telle
fonction est une fonction f continue par morceaux (en particulier, elle admet une limite
à droite f (x+ ) et une limite à gauche f (x− ) en tout point x), continue en a et b, et telle
que, pour tout x ∈]a, b[,
1
f (x) = (f (x+ ) + f (x− )).
2
L’intérêt de cette notion réside dans le fait que le produit (.|.) défini plus haut est un
produit scalaire dans l’espace vectoriel des fonctions continues par morceaux normalisées
(exercice : le vérifier) et que, d’autre part, toute fonction continue par morceaux ne diffère
d’une fonction normalisée qu’en un nombre fini de points (et donc leurs coefficients de
Fourier sont identiques).
La semi-norme de la convergence en moyenne quadratique On sait que l’inégalité
de Schwarz est valable pour tout semi-produit scalaire. Rappelons-en l’énoncé, ainsi qu’une
conséquence immédiate.
Proposition II.11 (Inégalité de Schwarz) Soit E un espace vectoriel muni d’un semi-
produit scalaire ( . | . ). Pour tous x, y ∈ E on a
|(x|y)|2 ≤ (x|x)(y|y).
Rappelons qu’une semi-norme sur un espace vectoriel E satisfait les mêmes propriétés
qu’une norme, à l’exception de la propriété de séparation : avec une semi-norme, on n’a
pas nécessairement la propriété kxk = 0 ⇒ x = 0.
Démonstration. Il suffit de vérifier l’inégalité triangulaire. Or
Appliquons ce qui précède à notre semi-produit scalaire défini plus haut. La semi-norme
qui lui correspond s’appelle la semi-norme de la convergence en moyenne quadratique. Elle
est définie par :
Z b 1/2
2
kf k2 = |f (x)| dx .
a
(Si K = R, les barres verticales autour de f (x) sont bien sûr inutiles.) Dans l’espace
C([a, b], K), cette semi-norme est en fait une norme. Il en est de même dans l’espace des
fonctions continues par morceaux normalisées.
Appliquées cette semi-norme, l’inégalité de Schwarz et l’inégalité triangulaire prennent
le nom de Cauchy-Schwarz et de Minkowski :
Proposition II.13 Soient f et g deux fonctions continues par morceaux de [a, b] dans K.
Alors :
1. Inégalité de Cauchy-Schwarz :
Z b Z b 1/2 Z b 1/2
2 2
f (x)g(x)dx ≤ |f (x)| dx |g(x)| dx
a a a
La propriété qui suit sera utilisée dans le cours sur les séries de Fourier.
Lemme II.14 Soit f une fonction continue par morceaux dans l’intervalle [0, 1]. Il existe
une suite de fonctions fn continues dans [0, 1] telles que
Z 1
lim |f (x) − fn (x)|2 dx = 0.
n→+∞ 0
et donc r
2p + 2
d2 (f, fn ) ≤ 2M → 0.
n
Corollaire II.15 Les fonctions continues sont denses dans l’espace des fonctions conti-
nues par morceaux normalisées de [a, b] dans R, muni de la norme de la convergence en
moyenne quadratique.
Noter que ce lemme est faux si l’on remplace la convergence en moyenne quadratique
par la convergence uniforme, puisque la limite uniforme d’une suite de fonctions continues
est une fonction continue.
Pour clore ce paragraphe, signalons à titre d’anecdote la propriété qui suit. L’ortho-
gonalité à laquelle il est fait allusion se rapporte au produit scalaire défini plus haut dans
l’espace C. Les fonctions considérées sont à valeurs réelles.
Proposition II.16 Soit (Pn )n∈N une suite de polynômes orthogonaux tels que, pour tout
n ∈ N, Pn est de degré n. Pour tout n ∈ N, Pn a n racines réelles et distinctes, qui
appartiennent toutes à l’intervalle [a, b].
Puisque la fonction Pn est continue sur [a, b], cela entraı̂ne que Pn change de signe et
s’annule en au moins un point de [a, b]. Soient x1 < · · · < xm les points de [a, b] où Pn
change de signe et soit
P (x) = (x − x1 ) · · · (x − xm ).
Si m < n, alors P est une combinaison linéaire des polynômes P0 , . . . , Pm , qui sont tous
orthogonaux à Pn . Donc Z
P (x)Pn (x)dx = 0.
[a,b]
Par conséquent, le polynôme Pn P s’annule et change de signe sur l’intervalle [a, b], ce qui
est certainement faux. Donc m = n.
Intégration sur un segment 105
où σ = (x0 , . . . xn ) est une subdivision de [a, b] et où θ = (θk )0≤k≤n−1 est une famille finie
de points de [a, b] telle que, pour chaque k, θk ∈ [xk , xk+1 ].
Remarquons que Rsi f est une fonction en escalier et si σ est une subdivision adaptée à
b
f , alors S(f, σ, θ) = a f (x) dx.
Par définition, le pas de la subdivision σ est la longueur du plus grand intervalle qu’elle
définit :
p(σ) = max |xk+1 − xk |.
0≤k≤n−1
Le théorème de Heine sur les fonctions continues peut alors s’interpréter de la façon sui-
vante :
Proposition II.17 Si f est continue sur [a, b], alors, pour tout ε > 0, il existe η > 0 tel
que, quelle que soit la somme de Riemann S(f, σ, θ), on ait :
Z b
p(σ) < η =⇒ S(f, σ, θ) − f (x) dx < ε.
a
Démonstration. D’après le théorème de Heine, f est uniformément continue sur [a, b]. On
peut donc choisir η > 0 tel que, pour tous x, y ∈ [a, b],
ε
|x − y| < η ⇒ |f (x) − f (y)| < .
b−a
Alors, par la relation de Chasles,
Z b n−1
X Z xk+1
S(f, σ, θ) − f (x) dx = (xk+1 − xk )f (θk ) − f (x) dx
a k=0 xk
n−1
X Z xk+1
= (f (θk ) − f (x)) dx
k=0 xk
n−1
X Z xk+1
≤ |f (θk ) − f (x)| dx
k=0 xk
n−1
X Z xk+1 ε
< dx = ε.
xk b−a
k=0
Une utilisation de la relation de Chasles montre que cette propriété est aussi vraie si f est
seulement continue par morceaux.
Comme application de cette proposition, signalons ce résultat.
Proposition III.1 On suppose que F : I 7→ R est une primitive de f . Alors les primitives
de f sont toutes les fonctions de la forme x 7→ F (x) + C, avec C ∈ R.
En particulier, pour tout x0 ∈ I et tout y0 ∈ R, il existe une unique primitive de f qui
vaut y0 au point x0 . Elle est donnée par : x 7→ F (x) − F (x0 ) + y0 .
Démonstration. Il est clair que les fonctions x 7→ F (x) + C ont toutes pour dérivée f . Ce
sont donc toutes des primitives de f . Il reste à voir qu’il n’y en a pas d’autre. Si G est
une primitive de f , alors la fonction F − G est constante puisque sa dérivée est la fonction
nulle : (F − G)0 = f 0 − f 0 = 0. Donc on a bien : G(x) = F (x) + C. La deuxième partie du
théorème se vérifie aisément.
Toutes les fonctions n’admettent pas de primitive. Pour qu’une fonction soit la dérivée
d’une autre, il faut qu’elle satisfasse la propriété des valeurs intermédiaires (théorème de
Darboux, p. 76). Par exemple, toute fonction continue admet une primitive, comme nous
allons le voir maintenant.
Théorème III.2 Soit f une fonction continue par morceaux sur l’intervalle [a, b]. Notons,
pour x ∈ [a, b], Z x
F (x) = f (t) dt.
a
Alors la fonction F est lipschitzienne et, en tout point x0 où f est continue, F est dérivable
et F 0 (x0 ) = f (x0 ).
Intégration sur un segment 107
Démonstration. Une fonction continue par morceaux étant bornée, on peut choisir M > 0
tel que, pour tout x ∈ [a, b], |f (x)| ≤ M . Alors, pour x, y ∈ [a, b],
Z x Z x
|F (x) − F (y)| = f (t) dt ≤ |f (t)| dt ≤ M |y − x|.
y y
F (x) − F (x0 )
Z
1
− f (x0 ) ≤ |f (t) − f (x0 )| dt ≤ ε.
x − x0 |x − x0 | [x,x0 ]
La situation la plus fréquente est celle où la fonction f est continue sur l’intervalle [a, b].
Dans ce cas, la fonction F définie dans le théorème est une primitive de f . Ce résultat est
admis dans toute sa généralité en classe de terminale, mais on peut toutefois y présenter
une démonstration dans le cas particulier où f est croissante. C’est ce que nous allons voir
maintenant.
Démonstration pour la classe de terminale (prise dans le livre de Terracher). Nous sup-
posons ici que la fonction f est continue et croissante sur l’intervalle [a, b]. Nous choisissons
x0 ∈ [a, b] et nous cherchons à démontrer que la fonction F est dérivable en x0 . Soit pour
cela x ∈ [x0 , b]. Pour tout t ∈ [x0 , x], on a :
L’intégrale du milieu est égale à F (x) − F (x0 ) d’après la relation de Chasles, d’où, en
divisant le tout par la quantité positive x − x0 ,
F (x) − F (x0 )
f (x0 ) ≤ ≤ f (x).
x − x0
On fait tendre ensuite x vers x0 à droite. Alors f (x) tend vers f (x0 ) puisque f est continue
en x0 , et l’on voit que :
F (x) − F (x0 )
lim = f (x0 ).
x→x0 + x − x0
Un même raisonnement avec x < x0 conduit au résultat identique pour la limite à gauche
en x0 . Par conséquent, F 0 (x0 ) = f (x0 ).
La proposition qui suit met en évidence une propriété simple que nous avons déjà
observée :
108 Analyse réelle pour le CAPES
Proposition III.3 Si f est continue sur [a, b] et si F est une primitive de f sur [a, b],
alors Z b
f (x) dx = F (b) − F (a).
a
Rx
Démonstration. La chose est vraie si F est la primitive définie par : F (x) = a f (x) dx,
cela découle immédiatement de la relation de Chasles. Si G est une autre primitive de f ,
alors elle est de la forme G(x) = F (x) + C, et donc
Z b
G(b) − G(a) = F (b) − F (a) = f (x) dx.
a
Corollaire III.4 Soit g une fonction de classe C 1 sur l’intervalle [a, b]. Alors :
Z b
g(a) = g(b) + g 0 (x) dx.
a
f (x) F (x) I
1 1
, a 6= 0 arctan(x/a) + C R
a2 + x2 a
1
√ , a>0 arcsin(x/a) + C ] − a, a[
a2 − x2
1 √
√ , a ∈ R∗ ln x + x2 + a2 + C R
x2 + a2
1 √
√ , a>0 ln x + x2 − a2 + C ] − ∞, −a[ ou ]a, +∞[
x2 − a2
1
ln | tan(x/2)| + C ]kπ, (k + 1)π[, k ∈ Z
sin x
1 x π
ln tan + +C ]kπ − (π/2), kπ + (π/2)[, k ∈ Z
cos x 2 4
III.2. Intégration par parties Soient u, v deux fonctions de classe C 1 définies sur un
intervalle I = [a, b]. En intégrant sur [a, b] la formule (uv)0 = u0 v + uv 0 , on obtient :
Z b Z b Z b
0 0
(uv) (x) dx = u (x)v(x) dx + u(x)v 0 (x) dx.
a a a
Intégration sur un segment 109
La fonction uv étant une primitive de (uv)0 , il suffit d’utiliser la proposition III.3 pour
obtenir :
Z b Z b
0
(∗) u (x)v(x) dx = u(b)v(b) − u(a)v(a) − u(x)v 0 (x)dx.
a a
Nous faisons ensuite la somme de toutes ces égalités, pour 0 ≤ k ≤ p, ce qui fournit, en
utilisant la relation de Chasles :
Z cp+1 Z cp+1
u0 (x)v(x) dx = u(cp+1 )v(cp+1 ) − u(c0 )v(c0 ) − u(x)v 0 (x)dx,
c0 c0
c’est-à-dire que la formule (∗) est encore valable. Un raisonnement semblable, en rajoutant
à notre subdivision (c0 , . . . , cp+1 ) les points où v n’est pas dérivable conduit finalement à
la propriété suivante :
t
v(t) = t, u0 (t) = .
(1 + t2 )2
Nous laissons au lecteur le soin de finir les calculs. Nous reviendrons à des calculs de ce type
de façon plus systématique dans le paragraphe consacré à la primitivation des fractions
rationnelles.
Parmi les multiples applications de la formule d’intégration par parties, signalons ici
la formule de Taylor avec reste intégral, présentée dans le chapitre “Dérivation” (page
78), et la seconde formule de la moyenne pour des fonctions régulières, que nous voyons
maintenant.
110 Analyse réelle pour le CAPES
Cette propriété s’étend à des fonctions f et g continues par morceaux, mais nous ne le
démontrerons pas.
puisque f (b) ≥ 0 ; d’autre part, puisque f est décroissante, nous avons −f 0 ≥ 0, d’où, pour
tout x ∈ [a, b],
(5) −mf 0 (x) ≤ −f 0 (x)G(x) ≤ M f 0 (x),
En injectant les inégalités (4) et (5) dans l’égalité (2-3), nous obtenons :
Z b
mf (a) ≤ f (x)g(x) dx ≤ M f (a),
a
Z b
ou encore : f (x)g(x) dx/f (a) ∈ [m, M ]. Il suffit maintenant d’appliquer le théorème
a
des valeurs intermédiaires à la fonction G.
La première est, on le sait, une primitive de t 7→ f (u(t))u0 (t) ; sa dérivée est donc t 7→
f (u(t))u0 (t). La seconde est la composée de la primitive F de la fonction f et de la fonction
u ; sa dérivée est donc t 7→ (F ◦ u)0 (t) = f (u(t))u0 (t). Ainsi, les deux fonctions φ et ψ ont
mêmes dérivées. Comme elles s’annulent toutes deux au même point s = a, elles sont
égales.
Attention : l’intervalle u([a, b]) n’est en général ni [u(a), u(b)], ni [u(b), u(a)]. C’est
toutefois le cas si la fonction u est strictement monotone. Dans ce cas, elle est bijective :
u([a, b]) = [α, β], avec α = u(a), β = u(b) si u est croissante, et α = u(b), β = u(a) si
elle est décroissante. Nous pouvons alors énoncer la proposition III.7 sous la forme utile
suivante :
Exemple. Si p ∈ N, l’intégrale
Z b
I= sin2p+1 t dt
a
On est ramené au calcul d’une primitive d’une fonction polynomiale, ce qui n’est pas
difficile (il suffit de développer la puissance p-ième en utilisant la formule du binôme).
Le problème que l’on étudie dans ce chapitre est le suivant : comment donner une valeur
approchée de l’intégrale d’une fonction f sur un intervalle [a, b] à partir de la donnée des
valeurs prises par f en un nombre fini de points x1 , . . . , xn de [a, b] ? Une réponse semble
naturelle : approcher f par une fonction polynômiale P comme on vient de le voir et, au
lieu de calculer l’intégrale de f , calculer l’intégrale de P , ce qui est toujours élémentaire.
C’est ce que nous allons faire ici.
112 Analyse réelle pour le CAPES
R est une application linéaire. L’ensemble des polynômes pour lesquels R est nul, c’est à
dire pour lesquels la formule de quadrature est exacte, est le noyau de cette application
linéaire. C’est donc un espace vectoriel. La proposition qui suit affirme qu’il contient au
moins Rn [X] :
Proposition IV.1 Une formule de quadrature à n + 1 points est exacte pour les po-
lynômes de degré au plus n.
Cette proposition permet de calculer les coefficients Ak sans avoir à calculer les intégrales
des polynômes Lk , comme nous allons le voir dans l’exemple qui suit.
Premier Rexemple Écrivons la formule de quadrature à trois points 0, 1 et 2 pour le
2
calcul de 0 f (x)dx. Elle est de la forme :
Z 2
f (x)dx ' A0 f (0) + A1 f (1) + A2 f (2).
0
Cette formule doit être égale pour les polynômes de degré au plus 2 et donc en particulier
pour les polynômes 1, X et X 2 ; d’où :
Z 2
A0 .1 + A1 .1 + A2 .1 = 1.dx = 2 ;
Z 02
A0 .0 + A1 .1 + A2 .2 = x.dx = 2 ; .
Z 02
8
A0 .0 + A1 .1 + A2 .4 = x2 .dx = .
0 3
Intégration sur un segment 113
On obtient ainsi un système de trois équations pour les trois inconnues A0 , A1 , A2 . Noter
que le choix des polynômes “tests” est arbitraire : on pourrait ici choisir les polynômes 1,
X et X(X − 1), ce qui conduit à un système triangulaire :
A0 + A1 + A2 = 2 ;
A1 + 2A2 = 2 ;
Z 2 .
2
2A2 = x(x − 1).dx =
0 3
1 4 1
A2 = ; A1 = ; A0 = .
3 3 3
d’autre part,
b−a a+b
P (a) + 4P + P (b)
6 2
3 !
b−a a+b 3
= 4 − a + (b − a)
6 2
(b − a)4
= ··· = .
4
Théorème IV.3 Soit f une fonction de classe C n+1 dans un intervalle [a, b] et soient
x0 , x1 , . . . , xn des points de cet intervalle classés par ordre croissant et P le polynôme
d’interpolation de f en ces points. Pour tout point x ∈ [a, b] distinct des xk il existe un
point ξ ∈ [a, b] tel que
(x − x0 )(x − x1 ) . . . (x − xn ) (n+1)
f (x) − P (x) = f (ξ).
(n + 1)!
(t − x0 ) . . . (t − xn )
φ(t) = f (t) − P (t) − (f (x) − P (x)) .
(x − x0 )(x − x1 ) . . . (x − xn )
Formule du trapèze On suppose ici que la fonction f est de classe C 2 sur l’intervalle
[a, b].
Soit Pf le polynôme d’interpolation de Lagrange de la fonction f aux deux points a et
b. D’après le théorème IV.3, pour tout point x ∈]a, b[ il existe un point ξx ∈ [a, b] tel que
(x − a)(x − b) 00
f (x) − Pf (x) = f (ξx ).
2
Intégration sur un segment 115
Formule de Simpson Nous supposons que f est de classe C 4 sur l’intervalle [a, b] et
a+b
notons Pf le polynôme d’interpolation de f aux points x0 = a, x1 = et x2 = b. Soit
2
x un point quelconque de [a, b] différent de x0 , x1 et x2 et soit φx la fonction définie par :
f 0 (x1 ) − Pf0 (x1 )
φx (t) = f (t) − Pf (t) − (t − x0 )(t − x1 )(t − x2 )
(x1 − x0 )(x1 − x2 )
− k(t − x0 )(t − x2 )(t − x1 )2 ,
k étant choisi de sorte que φx (x) = 0. La fonction φx s’annule aux quatre points x0 , x1 ,
x2 et x et donc sa dérivée s’annule au moins en trois points différents de x0 , x1 et x2
(d’après le théorème de Rolle). Mais φ0x (x1 ) = 0 comme on peut le voir aisément. Donc φ0x
s’annule en quatre points ; sa dérivée s’annule donc au moins en trois points, sa dérivée
seconde en deux et sa dérivée troisième en un. Il existe donc un point ξx dans [a, b] tel que
(4)
φx (ξx ) = 0, c’est à dire tel que f (4) (ξx ) − 24k = 0. On en déduit que
f 0 (x1 ) − Pf0 (x1 )
f (x) − Pf (x) − (x − x0 )(x − x1 )(x − x2 )
(x1 − x0 )(x1 − x2 )
f (4) (ξx )
− (x − x0 )(x − x2 )(x − x1 )2 = φx (x) = 0.
24
Cette égalité est démontrée pour tout x ∈ [a, b] différent de x0 , x1 , x2 ; elle est aussi
manifestement vraie en ces trois points (en choisissant ξ quelconque). Intégrons la entre
Z b
a et b. Comme (x − x0 )(x − x1 )(x − x2 )dx = 0 (on peut par exemple calculer cette
a
intégrale en utilisant la formule de Simpson, exacte pour les polynômes de degré 3), on
obtient :
Z b
b−a a+b
f (x)dx − f (a) + 4f + f (b)
a 6 2
a+b 2
Z b
1 (4)
≤ sup |f (ξ)| (x − a)(b − x) x − dx,
24 ξ∈[a,b] a 2
116 Analyse réelle pour le CAPES
soit, après un dernier calcul d’intégrale (dans lequel il est judicieux d’utiliser le changement
a+b b−a
de variable x = +t ),
2 2
Z b
(b − a)5
b−a a+b
f (x)dx − f (a) + 4f + f (b) ≤ sup |f (4) (ξ)|.
a 6 2 2880 ξ∈[a,b]
1
Ici aussi la constante est la meilleure possible (car cette inégalité devient une égalité
2880
par exemple pour la fonction f telle que f (x) = x4 dans l’intervalle [0, 1]).
b−a
où comme d’habitude xk = a + k ; si p = 2 on obtient la méthode de Simpson,
n
dans laquelle la fonction f est assimilée à la fonction polynômiale de degré 2 sur chaque
intervalle [x2k , x2k+2 ] et qui coincide avec f en tous les points xi :
m−1 m−1
Z b !
b−a X X
f (x)dx ∼ Sn (f ) = f (x0 ) + 2 f (x2k ) + 4 f (x2k+1 ) + f (xn ) .
a 3n
k=1 k=0
Sous les hypothèses de régularité précisés dans cette proposition on est donc assuré que
l’erreur commise en utilisant l’une de ces deux méthodes tend vers 0 lorsque le nombre de
points de la subdivision tend vers l’infini. Nous allons démontrer qu’en fait cela est vrai
dès que f est continue sur [a, b] (mais alors la convergence risque d’être beaucoup moins
rapide).
b n−1
X Z xk+1
b−a
Z
f (x)dx − Tn (f ) = f (x)dx − (f (xk ) + f (xk+1 ))
a xk 2n
k=0
n−1
X Z xk+1(f (x) − f (xk )) + (f (x) − f (xk+1 ))
= dx
2
k=0 xk
n−1
X Z xk+1
b−a
≤ ωf dx
n
k=0 xk
Z b
b−a
= ωf dx
a n
b−a
= (b − a)ωf .
n
De même,
Z b
f (x)dx − Sn (f )
a
m−1
X Z x2k+2
b−a
= f (x)dx − (f (x2k ) + 4f (x2k+1 ) + f (x2k+2 ))
x2k 3n
k=0
n−1
X x2k+2
(f (x) − f (x2k )) + 4(f (x) − f (x2k+1 )) + (f (x) − f (x2k+2 ))
Z
= dx
6
k=0 x2k
n−1
X Z x2k+2
b−a
≤ ωf 2 dx
x 2k
n
k=0
Z b
b−a b−a
= ωf 2 dx = (b − a)ωf 2 .
a n n
Il n’y a pas de méthode générale pour déterminer la primitive d’une fonction donnée.
Le seul cas particulier simple et très important dans lequel on peut indiquer une méthode
est celui des fractions rationnelles, et de quelques autres fonctions qui s’y ramènent par
changement de variable.
V.1. Fractions rationnelles On sait en effet que toute fraction rationnelle à coefficients
réels ou complexes peut s’écrire comme somme d’éléments dits simples. Par la propriété de
linéarité de l’intégrale, il nous suffit de connaı̂tre les primitives de tous les types d’éléments
simples pour connaı̂tre celles de toutes les fractions rationnelles.
Les dits éléments simples sont de trois catégories :
– les polynômes, dont la primitivation est aisée ;
118 Analyse réelle pour le CAPES
1
x 7→ , n ∈ N∗ , a ∈ R,
(x − a)n
1
x 7→ si n 6= 1 et x 7→ ln |x − a| si n = 1 ;
(1 − n)(x − a)n−1
Ax + B
x 7→ .
((x − a)2 + b2 )n
y 1
y 7→ , y 7→ .
(1 + y 2 )n (1 + y 2 )n
I1 (t) = arctan t.
V.2. Fractions rationnelles en sinus et cosinus Soit F (X, Y ) une fraction rationnelle
de deux variables réelles. Alors, grâce à un changement de variables convenable, on peut
toujours calculer l’intégrale :
Z x
I(x) = F (cos t, sin t) dt.
a
Cas d’un polynôme Si F est un polynôme, alors, par linéarité, on est ramené au calcul
de Z x
Ip,q (x) = cosp t sinq t dt,
a
avec p, q ∈ N.
Intégration sur un segment 119
– Si l’un des deux entiers p ou q est impair, le calcul est aisé : si, par exemple, p = 2k+1,
alors on écrit : Z x
Ip,q (x) = cos2k t sinq t d(sin t),
a
puisque d(sin t) = cos t dt. On pose u = sin t :
Z sin x
Ip,q (x) = (1 − u2 )k uq du.
sin a
ce qui, une fois développée la puissance n-ième, s’écrit comme une combinaison
linéaire de termes de la forme :
Z x
Jr (x) = sin2r t dt,
a
ainsi,
Z x
Jr (x) = − sin2r−1 x cos x + C + (2r − 1) sin2r−2 t cos2 t dt
a
= − sin2r−1 x cos x + C + (2r − 1)(Jr−1 (x) − Jr (x)),
1 − u2 2u
cos t = , sin t =
1 + u2 1 + u2
(Exercice : établir ces deux formules). Ainsi,
x tan(x/2)
1 − u2
Z Z
2u 2du
F (cos t, sin t) dt = F , ,
a α 1 + u2 1 + u2 1 + u2
et nous voilà ramenés à une fraction rationnelle.
120 Analyse réelle pour le CAPES
– La deuxième méthode consiste, lorsque c’est possible, à utiliser les célèbres règles de
Bioche, que nous énonçons ci-dessous sans démonstration.
Proposition V.1 (Règles de Bioche) Supposons que F est une fraction ration-
nelle de deux variables et soit f (t) = F (cos t, sin t). Pour calculer une primitive de
la fonction f , les changements de variable suivants ramènent à la détermination de
la primitive d’une fraction rationnelle de la variable u :
– si f est impaire : u = cos t ;
– si f (π − t) = −f (t), u = sin t ;
– si f est π-périodique, u = tan t.
V.3. Fractions rationnelles hyperboliques Pour calculer les primitives d’une fonction
de la forme f (t) = R(cosh t, sinh t), où R est une fraction rationnelle, la méthode est très
semblable :
– Première méthode : utiliser le changement de variables u = et , qui ramène toujours
à une fraction rationnelle.
– Deuxième méthode : utiliser les règles de Bioche de la manière suivante : si les
primitives de R(cos t, sin t) peuvent se calculer par l’un des changements de variables
u = cos t, u = sin t ou u = tan t, alors celles de R(cosh t, sinh t) se calculent de la
même manière par le changement de variable équivalent : u = cosh t, u = sinh t ou
u = tanh t. Z
2 sin 4t cos t
Exemple. Le calcul de dt peut s’effectuer en posant u = cos t ; donc
Z 4 + cos 8t
2 sinh 4t cosh t
la primitive dt se calcule en choisissant u cosh t.
4 + cosh 8t
Intégration sur un segment 121
V.4. Intégrales abéliennes Nous nous contenterons ici des fonctions de la forme :
!
at + b 1/n
f (t) = R t, ,
ct + d
Définir une fonction à partir d’une intégrale est un procédé très fréquent. L’exemple le
plus simple en est le logarithme, que l’on peut définir par
Z x
ln x = f (t) dt.
1
VI.1. Intégrales à bornes fixes Nous considérons tout d’abord les fonctions F définies
par une expression de la forme :
Z b
(∗) F (x) = f (x, t) dt.
a
La fonction f de deux variables qui apparaı̂t sous l’intégrale est supposée définie sur
un ensemble de la forme I × [a, b], où I est un intervalle de R. Pour que cette intégrale ait
un sens pour tout x ∈ I, nous supposons que, pour tout x ∈ I, la fonction d’une variable
t 7→ f (x, t)
est continue par morceaux sur [a, b]. Ainsi, l’expression (∗) définit la fonction F sur tout
l’intervalle I. Nous étudions maintenant la régularité de cette fonction F .
Continuité
Proposition VI.1 Si la fonction f est continue sur le produit I × [a, b], alors la fonction
F est continue sur I.
Démonstration. Soit x ∈ I. Il nous faut montrer que F est continue en x. Soit pour cela
ε > 0. Nous choisissons un segment [α, β] contenu dans I tel que x ∈ [a, b]. La fonction f
est continue, et donc uniformément continue, sur le compact K = [α, β] × [a, b] (théorème
de Heine). On peut donc choisir η > 0 tel que, pour tous (x, t), (x0 , t0 ) ∈ K,
où la double barre k k désigne une norme sur R2 , par exemple la norme euclidienne ou la
norme produit. Que ce soit l’une ou l’autre, on a, si t = t0 , k(x, t) − (x0 , t)k = |x − x0 |. Par
conséquent,
Deux contre-exemples.
1. Si x, t ∈]0, 1], on pose :
1 x
f (x, t) = √ sin ,
t x t
et, pour t, x ∈ [0, 1] : f (0, t) = f (x, 0) = 0. Vérifier que, pour chaque t ∈ [0, 1], la
fonction x →7 f (x, t) est continue sur [0, 1] et que, pour chaque x ∈ [0, 1], l’intégrale :
Z 1
F (x) = f (x, t) dt
0
est bien définie. Vérifier ensuite que F (0) = 0, mais que, quand x tend vers 0 à droite,
π
F (x) ∼ √ .
2 x
La fonction F n’est donc pas continue en 0.
2. Si x ∈]0, π/2] et t ∈ [0, π/2], on pose :
1
f (x, t) = 1 + cos1/x t sin t.
x
On pose également, pour t ∈ [0, π/2], f (0, t) = 0. Vérifier que f est continue en sa
variable x sur l’intervalle [0, 1], puis que la fonction F définie par :
Z π/2
F (x) = f (x, t) dt
0
n’est pas continue en 0. Plus précisément, on verra que F (x) = 1]0,1] (x).
Dérivabilité
Proposition VI.2 Si la fonction f est continue sur I×[a, b] et admet une dérivée partielle
∂f /∂x continue sur I ×[a, b], alors la fonction F est de classe C 1 sur I et, pour tout x ∈ I,
on a : Z b
∂f
F 0 (x) = (x, t) dt.
a ∂x
Intégration sur un segment 123
∂f
f (x0 , t) − f (x, t) = (x0 − x) (ct,x0 , t).
∂x
Par conséquent,
F (x0 ) − F (x) b
f (x0 , t) − f (x, t) ∂f
Z Z b
∂f
− (x, t) dt = − (x, t) dt
x0 − x a ∂x a x0 − x ∂x
Z b
∂f ∂f
≤ (ct,x0 , t) − (x, t) dt.
a ∂x ∂x
≤ ε(b − a).
VI.2. Intégrales à bornes variables Le cas le plus élémentaire est celui où une borne
dépend de la variable x :
Z b(x)
(6) G(x) = f (t) dt,
a
où b est, par exemple, continu sur un intervalle I de R et f est continue sur R. Si F est
une primitive de la fonction f , alors, simplement, G(x) = F (b(x)). Par conséquent, la
fonction G est continue sur I. Si, de plus, b est dérivable, G l’est aussi comme composée
de fonctions dérivables et l’on a :
où b est une fonction définie sur un intervalle I et f telle que, pour tout x ∈ I, la fonction
t 7→ f (x, t) soit continue par morceaux sur l’intervalle [a, b(x)].
Remarquons avant de poursuivre que si les deux bornes de l’intégrale sont variables,
on se ramène au cas présent en utilisant la relation de Chasles.
Continuité de la fonction G
Proposition VI.3 Si b est continue sur I et f est continue sur R × I, alors la fonction
G est continue sur I.
D’après la proposition VI.1, le premier terme de cette somme tend vers 0 si x0 tend vers
x. (Ici, x ne varie pas : les deux variables sont x0 et t.) Soit, par ailleurs, η > 0 tel
que [x − η, x + η] ⊂ I. (Cela suppose que x est un point intérieur à I. Nous laissons le
lecteur adapter la démonstration aux autres situations) . La fonctionf est continue, et donc
bornée, sur le compact K = b([x − η, x + η]) × [x − η, x + η]. Soit M = sup(u,t)∈K |f (u, t)|.
Alors, pour tout x0 ∈ [x − η, x + η], on a :
Z b(x0 )
f (x0 , t) dt ≤ M |b(x0 ) − b(x)|.
b(x)
Ainsi, la deuxième intégrale de la formule 7 tend vers 0 quand x tend vers x0 (car b est
continue en x), ce qui prouve la continuité de G au point x.
Dérivabilité de G
Proposition VI.4 On suppose que b est dérivable sur I et que f admet une dérivée
partielle ∂f /∂x continue sur I × R. Alors la fonction G est dérivable et, pour tout x ∈ I,
Z b(x)
∂f
(8) G0 (x) = f (x, b(x))b0 (x) + (x, t) dt.
a ∂x
d’après la proposition VI.2 (les variables étant x0 et t). D’autre part, notons K1 = b([x −
η, x + η]). Le théorème des accroissements finis assure que l’on peut, pour chaque, t ∈ K1 ,
choisir cx0 ,t ∈ [x, x0 ] tel que :
∂f
f (x0 , t) = f (x, t) + (x0 − x) (cx0 ,t , t).
∂x
Ainsi :
Z b(x0 ) Z b(x0 ) Z b(x0 )
1 0 1 ∂f
(10) 0
f (x , t) dt = 0 f (x, t) dt + (cx0 ,t , t) dt.
x −x b(x) x −x b(x) b(x) ∂x
Le premier terme du membre de droite converge, quand x0 tend vers x, vers la dérivée au
point x de la fonction :
Z b(u)
u 7→ f (x, t) dt,
a
que nous avons rencontrée, à un changement de notations près, à l’équation (6). Nous
savons que sa dérivée en x vaut : f (x, b(x))b0 (x). Par ailleurs, la fonction continue |∂f /∂x|
Intégration sur un segment 125
Puisque b est continue en x, nous en déduisons que le dernier terme à droite de l’égalité
(10) tend vers 0 quand x0 tend vers x.
Nous pouvons maintenant faire tendre x0 vers x dans l’égalité (9), et ceci fournit le
résultat désiré.
Remarque. Sous les hypothèses de la proposition VI.4, on peut démontrer que la fonc-
tion de deux variables H, définie par :
Z u
H(u, x) = f (x, t) dt
a
est différentiable en tout point de R × I. Comme G(x) = H(b(x), x), on en déduit direc-
tement que G est dérivable sur I et que :
∂H ∂H
G0 (x) = b0 (x) (b(x), x) + (b(x), x)
∂u ∂x
(formule de composition des dérivées partielles). Ceci permet de retrouver immédiatement
la formule (8).
VII. Exercices
1. Cas d’égalité dans l’inégalité de Cauchy-Schwarz. Quelles conditions doivent satisfaire
deux fonctions continues sur [a, b] pour que l’on ait :
Z b 2 Z b Z b
2 2
f (x)g(x) dx = f (x) dx g (x) dx ?
a a a
2. Soit E l’espace vectoriel formé des fonctions continues par morceaux normalisées
2π-périodiques, de R dans C. Si f, g ∈ E, on note :
Z 2π
1
(f |g) = f (x)g(x) dx.
2π 0
Démontrer que cette relation définit un produit scalaire sur E. Démontrer que les
polynômes trigonométriques sont denses dans l’espace E muni de la norme ainsi
définie.
3. a. Soit f une fonction continue sur [a, b] telle que, pour toute fonction en escalier g
Rb
sur [a, b], on ait : a f (x)g(x) dx. Démontrer que f = 0.
b. Démontrer que toute fonction en escalier est la différence de deux fonctions en
escalier croissantes.
c. Soit f une fonction continue sur [a, b] telle que, pour toute fonction en escalier
Rb
croissante g sur [a, b], on ait : a f (x)g(x) dx. Démontrer que f = 0.
4. On suppose que f est de classe C 1 sur l’intervalle [0, 1]. Soit F une primitive de f sur
[0, 1].
126 Analyse réelle pour le CAPES
a. Soient
n deux entiers tels que 0 ≤ k < n. Démontrer qu’il existe ck,n ∈
k et
k k+1
, tel que :
n n
k+1 k 1 k 1
F −F = f + 2 f 0 (ck,n ).
n n n n 2n
En déduire un équivalent de
Z 1 n−1
1X k
un = f (x) dx − f .
0 n n
k=0
6. Soit f une fonction T -périodique et continue par morceaux sur R. Démontrer que,
pour tout a ∈ R,
Z a+T Z T
f (x) dx = f (x) dx.
a 0
7. Soit f une fonction 2π-périodique et continue sur R. Soit α ∈ R tel que α/π 6∈ Q.
Démontrer que :
n Z π
1X 1
lim f (x + kα) = f (t) dt.
n→+∞ n 2π −π
k=1
1 1
+ = 1.
p q
up v q
uv ≤ + .
p q
Intégration sur un segment 127
a. Démontrer que la fonction z est donnée sur [a, b] par l’expression suivante :
Z x
z(x) = |y(a)|eA1 (x) + eA1 (x)−A1 (t) B(t) dt.
a
b. Soit ε > 0. On note zε (x) = z(x) + εeA1 (x) . Vérifier que zε est aussi solution de
l’équation (E).
c. On cherche à démontrer que, pour tout x ∈ [a, b], |y(x)| ≤ zε (x)|. Pour cela, on
suppose que ce n’est pas le cas, c’est-à-dire qu’il existe X ∈]a, b[ tel que |y(X)| −
zε (X) > 0. Vérifier que le réel
d. Conclure.
11. En utilisant une intégration par parties, donner une démonstration simple du lemme
de Riemann-Lebesgue (lemme IV.3, p. 62) dans le cas d’une fonction f de classe C 1
sur [a, b].
128 Analyse réelle pour le CAPES
d. Soit ρn = un /vn . Démontrer que la suite (ρn ) est décroissante et converge vers
une limite W ≥ 1/2.
e. Démontrer que, à l’infini,
r
W 1
un ∼ , vn ∼ √ .
2n 2W n
√
h. Démontrer que, pour tout n ∈ N et tout x ∈ [0, n],
n −n
x2 x2
−x2
1− ≤e ≤ 1+ .
n n
√
i. En intégrant les deux inégalités ci-dessus sur l’intervalle [0, π], puis en effectuant
des changements de variables judicieux, démontrer que
√
Z +∞ Z n
−x2 2 π
e dx = lim e−x dx = .
0 n→+∞ 0 2
a. Démontrer que f est dérivable sur son ensemble de définition et calculer sa dérivée
en tout point x ∈] − 1, +∞[.
b. En déduire une expression simple de f (x).
15. Intégrale de Poisson. Par une méthode semblable à celle de l’exercice précédent,
calculer, pour chaque x ∈ R tel que |x| =
6 1, la valeur de l’intégrale suivante :
Z π
I(x) = ln(1 − 2x cos t + x2 ) dt.
0
16. Intégrale de Gauss. On définit sur [0, +∞[ les fonctions f et g par :
2 2)
1
e−x (1+t x
Z Z
2
f (x) = dt, g(x) = e−t dt.
0 1 + t2 0
a. Démontrer que les fonctions f et g sont dérivables sur [0, +∞[ et que, pour tout
2
x ≥ 0, f 0 (x) = −2e−x g(x) = −2g(x)g 0 (x).
b. Démontrer qu’il existe une constante C ∈ R telle que, pour tout x ≥ 0,
f (x) + g 2 (x) = C.
c. Calculer la valeur de C.
d. En déduire la valeur de l’intégrale de Gauss :
Z +∞
2
I= e−x dx.
0
I. Définitions, exemples
Soit I un intervalle de R. Une fonction f définie sur I est dite continue par morceaux
sur I si elle est continue par morceaux sur tout intervalle de la forme [α, β], avec α, β ∈ I.
Rappelons que si f est continue par morceaux sur un intervalle compact, [a, b], alors
f admet un nombre fini de points de discontinuité sur cet intervalle. En revanche, avec la
définition que nous venons de donner, une fonction continue par morceaux sur un intervalle
non compact peut avoir une infinité de points de discontinuité : par exemple, la fonction
partie entière E est continue par morceaux sur [0, +∞[. De même, la fonction x 7→ E(1/x)
est continue par morceaux sur l’intervalle ]0, 1].
Définition I.1
– On suppose que a ∈ R etR que b ∈]a, +∞]. Soit f une fonction continue par morceaux
t
sur l’intervalle [a, b[ Si a f (x)dx a une limite, finie ou non, lorsque t tend vers b,
Rb
cette limite se note a f (x)dx.
– On suppose que b ∈ R et que a ∈ [−∞, b[. Soit f une fonction continue par morceaux
Rb
sur l’intervalle ]a, b] Si t f (x)dx a une limite, finie ou non, lorsque t tend vers a,
Rb
cette limite se note a f (x)dx.
Rb
Dans les deux cas, si la limite existe et est finie, on dit que l’intégrale a f (x) dx est
convergente. Si la limite existe et est infinie, l’intégrale est dite divergente.
Proposition I.2 On suppose que −∞ ≤ a < b ≤ +∞. Soit f une fonction continue par
morceaux sur l’intervalle ]a, b[. Les deux affirmations suivantes sont équivalentes :
Rc Rb
1. Il existe c ∈]a, b[ tel que les intégrales a f (x) dx et c f (x) dx sont convergentes ;
Rc Rb
2. Pour tout c ∈]a, b[, les intégrales a f (x) dx et c f (x) dx sont convergentes.
Rc Rb
De plus, lorsque ces deux conditions sont satisfaites, la quantité : a f (x) dx + c f (x) dx
Rb
est indépendante du point c ∈]a, b[. On la note : a f (x) dx.
Démonstration. Il est clair que 2 ⇒ 1. La réciproque est une conséquence simple de la rela-
tion de Chasles pour les intégrales sur desR c intervalles Rcompacts, vue au chapitre prédécent :
b
supposons, en effet, que les intégrales a f (x) dx et c f (x) dx soient convergentes et soit
d ∈]a, b[. Alors, si t ∈]a, d[, et s ∈]d, b[,
Z d Z c Z d Z s Z Z s
c
f (x) dx = f (x) dx + f (x) dx, f (x) dx = d f (x) dx + f (x) dx.
t t c d c
En particulier, la fonction f est continue par morceaux sur l’intervalle compact [c, d], et
donc son intégrale sur cet intervalle a une valeur finie. Il suffit maintenant de faire tendre
t vers a et s vers b dans ces deux égalités pour obtenir :
Z d Z c Z d Z b Z Z b
c
f (x) dx = f (x) dx + f (x) dx, f (x) dx = d f (x) dx + f (x) dx,
a a c d c
Intégrales impropres 131
ce qui prouve le point 2. De plus, en sommant ces deux égalités, nous voyons que :
Z d Z b Z d Z b
f (x) dx + f (x) dx = f (x) dx + f (x) dx,
a d a d
puisque
Z d Z c
f (x) dx + f (x) dx = 0.
c d
Nous avons ainsi démontré la dernière partie de la proposition.
Conventions Lorsque la notation [a, b[ sera employée, il sera toujours sous-entendu que
a ∈ R et b ∈]a, +∞]. De même, lorsqu’il sera question de l’intervalle ]a, b], on supposera
toujours que b ∈ R et a ∈ [−∞, b[. Enfin, dans la notation ]a, b[, on supposera que −∞ ≤
a < b ≤ +∞.
Par ailleurs, la notation I = (a, b) signifiera que I est l’un des trois intervalles suivants :
]a, b], [a, b[ ou ]a, b[.
Corollaire I.3 (Relation de Chasles) Soit f une fonction continue R c par morceaux sur
l’intervalle I = (a, b) et soit c ∈]a, b[. Si les deux intégrales I(a, c) = a f (x) dx et I(c, b) =
Rb Rb
c f (x) dx sont convergentes, alors il en est de même de l’intégrale I(a, b) = a f (x) dx,
et l’on a : Z c Z Z b b
f (x) dx + f (x) dx = f (x) dx.
a c a
Exemples
1. Étudions la nature éventuelle de l’intégrale suivante :
Z +∞
dx
I= α
, α ∈ R.
1 x
Soit t ≥ 1. R
t
– Si α = 1, 1 xdxα = log t → +∞ donc I = +∞ et l’intégrale est divergente.
– Si α 6= 1, on a : Z t
dx t1−α − 1
α
= .
1 x 1−α
– Si α < 1, t1−α → ∞ donc I = +∞.
1
– Si α > 1, t1−α → 0 donc I = α−1 .
2. Considérons maintenant l’intégrale suivante :
Z 1
dx
J= α
, α ∈ R.
0 x
1
– Si α < 1, t1−α → 0 lorsque t tend vers 0 donc J = 1−α .
– Si α > 1, t1−α → +∞ donc J = +∞.
En conclusion :
Il faut remarquer que les deux iintégrales I et J ont un sens pour toute valeur de
α, ce qui est dû à ce que les fonctions à intégrer sont de signe constant sur l’intervalle
d’intégration :
Proposition I.5 Si f est continue parR morceaux, à valeurs réelles et de signe constant sur
b
l’intervalle I = (a, b), alors l’intégrale a f (x) dx a bien un sens : elle est soit convergente,
soit divergente.
Démonstration. Il suffit de vérifier la chose dans le cas où f ≥ 0 sur l’intervalle [a, b[.
Notons alors : Z t
F (t) = f (x) dx.
a
R t0
Si f ≥ 0, alors la fonction F est croissante : si t < t0 , F (t0 ) − F (t) = t f (x) dx ≥ 0
d’après la relation de Chasles. La proposition découle simplement de ce que toute fonction
croissante de [a, b[ dans R admet une limite, finie ou infinie, en b.
Rb
Lorsque la fonction f n’est pas de signe constant, l’intégrale a f (x)dx n’existe pas
R +∞
toujours. (Étudier par exemple 0 sin x dx).
Remarque. Si f est une fonction continue par morceaux sur [a, b[, la nature de l’intégrale
Rb
a f (x)dx ne dépend que des valeurs de f (x) pour les valeurs de x voisines de b : si
a < a0 < t < b, Z t Z a Z t
f (x)dx = f (x)dx + f (x)dx.
a0 a0 a
Ra
La fonction f étant par hypothèse intégrable sur [a, a0 ], l’intégrale a0 f (x)dx est un nombre
Rt Rt
réel (fini). Donc les intégrales a0 f (x)dx et a f (x)dx ont le même comportement lorsque
t tend vers b.
Théorème I.8 (Critère de Cauchy) On suppose que la fonction f est continue par
Rb
morceaux sur l’intervalle I = [a, b[. L’intégrale a f (x) dx est convergente si et seulement
si elle satisfait la condition suivante :
Z y
∀ε > 0 ∃c ∈ [a, b[ ∀x, y ∈ [c, b[ f (x) dx < ε.
x
Ce théorème peut sans doute être omis d’une présentation orale sur les intégrales
impropres car il n’est d’aucune utilité dans un cours de DEUG.
134 Analyse réelle pour le CAPES
Proposition II.1 Soit f une fonction continue par morceaux et à valeurs positives sur
l’intervalle I = (a, b). L’intégrale sur I de la fonction f est toujours définie, et, de plus :
Z b Z d
f (x) dx = sup f (x) dx.
a J=[c,d]⊂I c
Que l’intégrale J(a, b) soit toujours définie est connu depuis la proposition I.5. Par
ailleurs, la positivité de f et la relation de Chasles (proposition I.3) entraı̂nent clairement
que, si [c, d] ⊂]a, b[, alors J(c, d) ≤ J(a, b). Par conséquent,
sup J(c, d) ≤ J(a, b).
J=[c,d]⊂I
Soit maintenant η < J(a, b). Le théorème sera démontré quand nous aurons trouvé
[c, d] ⊂]a, b[ tel que J(c, d) > η. Fixons pour cela un point α ∈]a, b[. La fonction F :
t 7→ J(α, t) est croissante sur l’intervalle [α, b] et tend vers J(α, b) au point b. Donc nous
pouvons choisir un point d > α tel que J(α, d) > J(α, b) − (η/2). De même, nous pouvons
choisir c ∈]a, α] tel que J(c, α) > J(a, α) − (η/2). L’intervalle [c, d] satisfait à la condition
recherchée.
et de passer à la limite pour t → b (Les deux limites existent puisque les deux fonctions
sont à valeurs positives). Si I =]a, b] le raisonnement est le même.
Le lecteur adaptera sans peine cette proposition au cas d’un intervalle I =]a, b].
Rb
Démonstration. Supposons par exemple que a g(x)dx converge. Si f (x) ∼ g(x) pour
x → b alors f (x) ≤ 2g(x) pour x assez proche de b, c’est-à-dire pour tous les x supérieurs
Rb Rb
à une certaine valeur x0 . Mais comme a 2g(x)dx converge (vers 2 a g(x)dx), et donc
Rb Rb
x0 2g(x)dx converge, on déduit de la proposition précédente que x0 f (x)dx converge et
Rb
donc que a f (x)dx est convergente.
√
3
Exemple. Soit f (x) = 5xx3 +2x+7
+x+1
. Cette fonction est à valeurs positives et continue sur
R +∞
[0, +∞[ et pour x → ∞, f (x) ∼ x−3/2 /5. Comme 3/2 > 1, l’intégrale 1 x−3/2 dx est
R +∞ R +∞
convergente (déjà vu) donc 1 f (x)dx converge et donc a f (x)dx est convergente
pour tout a ≥ 0.
Théorème II.4 (Intégration des équivalents, II) Soient f et g deux fonctions conti-
Rb
nues par morceaux sur l’intervalle I = [a, b[ ou ]a, b]. Si les intégrales a f (x)dx et
Rb
a g(x)dx sont divergentes, alors :
1. Si f (x) x→b
∼ g(x) alors
Z c Z c
f (x)dx c→b
∼ g(x)dx;
a a
Comme G(x) tend vers l’infini lorsque x tend vers b, on voit que les deux termes extrèmes
de cette double inégalité tendent vers 1 − ε et 1 + ε lorsque x tend vers b. Donc pour tout
x suffisamment proche de b, on a bien :
F (x)
1 − 2ε ≤ ≤ 1 + 2ε.
G(x)
Remarquer que l’on utilise de façon cruciale dans la démonstration le fait que les intégrales
divergent. Le théorème est d’ailleurs grossièrement faux si elles sont convergentes (pour-
quoi ?).
Application Déterminons un développement asymptotique au point x = 1 de la fonction
F définie sur ]0, 1[ par : Z x
dt
F (x) = .
0 log t
R1
Puisque l’intégrale 0 dt log t est divergente, nous savons que :
Z x Z x
dt dt
F (x) = ∼ = log(1 − x).
0 log t x→1
0 t−1
Un développement limité montre que f (t) → 12 lorsque t tend vers 1 ; d’autre part on voit
que f (t) → 1 lorsque t tend vers 0. RLa fonction f peut donc se prolonger en une fonction
1
continue sur [0, 1]. Donc l’intégrale 0 f (t)dt est convergente. Notons
Z 1 Z 1
1 1
γ= f (t)dt = + dt.
0 0 log t 1 − t
(La constante γ est la constante d’Euler.) Alors F (x) − log(1 − x) → γ et donc finalement :
Le cas des fonctions à valeurs quelconques dans un espace vectoriel normé complet
E n’est pas aussi simple que celui de fonctions à valeurs positives. D’une part, si f n’est
pas à valeurs positives ou nulles, on n’est pas sûr que son intégrale ait un sens, ce qui
complique d’autant l’étude de ladite intégrale. De plus, aucune des propriétés vues dans
la paragraphe précédent pour les fonctions à valeurs positives ne peut se généraliser. Par
exemple on peut trouver deux fonctions f et g continues sur [a, +∞[ et équivalentes en
Intégrales impropres 137
R +∞ R +∞
+∞ mais telles que a f (x)dx soit convergente et pas a g(x)dx. Nous reviendrons
sur ce point plus loin, dans le dernier paragraphe du chapitre.
Commençons par étudier l’éventuelle convergence de l’intégrale d’une fonction à va-
leurs quelconque. La situation la plus simple est celle où l’on peut appliquer le théorème
important que voici. Rappelons que toutes les fonctions considérées sont à valeurs dans
un espace vectoriel normé E sur le corps K, dont nous notons | | la norme.
Théorème III.1 Soit f une fonction continue par morceaux sur l’intervalle I = (a, b).
Rb Rb
Si l’intégrale a |f (x)|dx converge, alors il en est de même pour l’intégrale a f (x)dx.
Démonstration. Remarquons tout d’abord qu’il suffit de traiter le cas où I = [a, b[, ce que
nous faisons maintenant.
Nous présentons deux démonstrations.
– Démonstration élémentaire, valable quand la fonction f est à valeurs réelles ou com-
plexes. Tout d’abord, si f est à valeurs réelles, on décompose f en ses parties positive
et négative : f = f + − f − , avec f + (x) = max(f (x), 0) et f − (x) = − min(f (x), 0).
Il est clair que f + et f − sont Rà valeurs positives et majorées
R + R par |f |. Donc si f est
absolumentRconvergente, alors |f | converge et donc f et f − sont convergentes.
Attention
R +∞ sin x: la réciproque du théorème III.1 est fausse. Considérons par exemple l’inté-
grale π x dx. On voit par une intégration par parties que si C ≥ 1,
Z C Z C
sin x h cos x iC cos x
dx = − − dx.
π x x π π x2
Lorsque C tend vers l’infini, le crochet a Rune limite finie (égale à 1/π) et l’intégrale du
+∞
membre de droite aussi puisque l’intégrale π cos x2
x
dx est convergente comme on vient de
R +∞ sin x
le voir. Donc l’intégrale π x dx converge. Mais elle n’est pas absolument convergente.
En effet, pour tout x ≥ 0, on a | sin x| ≥ sin2 x, et donc, par comparaison d’intégrales de
fonctions à valeurs positives,
Z +∞ Z +∞
| sin x| sin2 x
dx ≥ dx.
π x π x
+∞
| sin x|
Z
dx = +∞.
π x
Proposition III.2 Soit I = (a, b) un intervalle réel. L’ensemble L1 (a, b) des fonctions
continues par morceaux normalisées f dont l’intégrale sur I est absolument convergente
est un espace vectoriel. La relation :
Z b
kf k1 = |f (x)| dx
a
sin x 2
2
(1 − ε(x)) ≤ 2 .
x x
R +∞ R +∞ sin x
Comme l’intégrale A dx x 2 converge, il en est de même pour A x2
(1 − ε(x)) dx et
R +∞ sin x R +∞ sin x
donc pour A x2
(1 − ε(x))dx et pour 0 x2
(1 − ε(x))dx. Finalement, l’intégrale
R +∞ (x+1) sin x
0 x2 +1
dx est convergente.
Attention ! Dans l’exemple précédent la fonction à intégrer est visiblement équivalente
au voisinage de +∞ à sinx x dont l’intégrale est convergente. Mais ceci ne suffit pas pour
conclure à la convergence de l’intégrale I (la fonction à intégrer n’est pas de signe constant)
comme on peut le voir dans l’exemple qui suit : soit
Z +∞
1 √
J= ( x sin x + | sin x|)dx.
1 x
sin
√x
La fonction à intégrer est ici équivalente en +∞ à dont l’intégrale est convergente
x R∞
(pour le démontrer, intégrer par parties comme dans l’étude de π sinx x dx). Mais J n’est
pas une intégrale convergente : en effet,
Z C Z C Z C
1 √ sin x | sin x|
( x sin x + | sin x|)dx = √ dx + dx.
1 x 1 x 1 x
Le premier terme du membre de droite admet une limite finie lorsque C tend vers l’infini
et le deuxième terme tend vers +∞ comme on vient de le démontrer. Donc J = +∞ :
l’intégrale diverge.
V. Exercices
1. Étudier la convergence des intégrales suivantes :
Z +∞ Z 1
dx dt
I= √ , J= t
.
0 x3 − x 0 e − cos t
140 Analyse réelle pour le CAPES
g(t) = eit ; g(t) = | sin t|; g(t) = | cos t|; g(t) = sin2 t; g(t) = cos2 t.
R1
9. En considérant la série de terme général un = 0 xn ln x dx, démontrer, après avoir
vérifié la nature de l’intégrale, que
Z 1 +∞
ln x X 1
dx = .
0 x−1 n2
n=1
10. Soit p ∈ {1, 2}. On note Lp (I) l’ensemble des fonctions f continues par morceaux
Rb
normalisées (voir p. 102) sur l’intervalle I = (a, b) telles que l’intégrale a |f (x)|p dx
soit convergente.
a. Démontrer Lp (I) est un espace vectoriel et que la relation :
Z b 1/p
p
kf kp = |f (x)| dx
a
Par une méthode semblable à celle de l’exercice précédent, démontrer que, pour tout
x ≥ 0, π √
f (x) = − 2g(+∞)g( x) ex ,
2
R x −t2
avec g(x) = 0 e dt. En déduire la valeur de
Z +∞
2
e−t dt.
0
14. Soit g une fonction continue par morceaux sur [0, +∞[ et soit (fn )n∈N une suite de
fonctions continues par morceaux sur ]0, +∞[ qui converge uniformément sur tout
compact vers la fonction f . On suppose que, pour tout x ≥ 0 et tout n ∈ N, on
a : |fn (x)| ≤ g(x) et que l’intégrale de g sur [0, +∞[ est absolument convergente.
Démontrer que
Z +∞ Z +∞
lim fn (x) dx = f (x) dx.
n→+∞ 0 0
15. Fonction Gamma, formule de Stirling. On définit, pour chaque x ∈]0, +∞[,
Z +∞
Γ(x) = tx−1 e−t dt.
0
a. Démontrer que l’intégrale qui définit Γ(x) est bien convergente pour tout x > 0.
b. Démontrer que, pour tout x > 0, Γ(x + 1) = xΓ(x).
En particulier, si n ∈ N∗ , Γ(n + 1) = n!.
c. Démontrer que la fonction Γ est convexe.
Indication. Il suffit pour cela de démontrer que, si (1/p) + (1/q) = 1, alors :
x y
Γ + ≤ Γ(x)1/p Γ(y)1/q .
p q
e. On note :
2
h(u) = (u − ln(1 + u)).
u2
Vérifier que h, prolongée convenablement en 0, est une fonction continue et
décroissante sur l’intervalle ] − 1, +∞[ et que, si x > 0,
Z +∞
x+1 −x 2 h(u)/2
Γ(x + 1) = x e e−xu du.
−1
Intégrales impropres 143
avec Z +∞
Jx = ψx (s) ds,
−∞
où l’on a noté :
(
2 h(s
√
e−s 2/x)
p
ψx (s) = si s > − x/2
0 sinon.
g. Démontrer que la suite de fonctions (ψn )n∈N converge uniformément sur tout
2
intervalle [−A, A] vers la fonction f : s 7→ e−s .
h. On définit : 2
e−s
si s ≤ 0
g(s) =
ψ1 (s) si s > 0.
Démontrer que, pour tout n > 1 et tout s ∈ R, ψn (s) ≤ g(s).
i. En utilisant le résultat des exercices 16d, p. 129 et 14 ci-dessus, démontrer que
√
limn→+∞ Jn = π.
j. Établir la formule de Stirling :
n n √
n! ∼ 2πn.
e
Chapitre 9
(C) y 0 = y, y(0) = 1.
valable pour tout n ∈ N et tout x > −1. Cette propriété se vérifie aisément par récurrence,
ou en étudiant les variations de la fonction x 7→ (1 + x)n − nx.
On fixe dorénavant un réel x ∈ R et l’on démontre que les deux suites (un (x)) et
(vn (x)) sont adjacentes. La limite commune à ces deux suites est appelée exponentielle
de x, et se note exp x. Il faut voir ensuite que la fonction exponentielle ainsi construite
satisfait le problème de Cauchy (C) et qu’elle est la seule.
Lemme I.1 Les deux suites (un (x))n>|x| et (vn (x))n>|x| sont adjacentes.
Par conséquent,
n+1
x x n+1 1
un+1 (x) = 1+ ≥ 1+ = un (x).
n+1 n 1 + x/n
Ainsi, la suite (un (x))n>|x| est croissante. La suite (un (−x))n>|x| l’est donc aussi. Puisque
vn (x) = 1/un (−x), cela entraı̂ne que la suite (vn (x))n>|x| est décroissante.
Construction des fonctions usuelles 145
Proposition I.2 La fonction exponentielle x 7→ exp x définie ci-dessus est dérivable sur
R et est égale à sa dérivée. Elle satisfait de plus les propriétés suivantes :
– exp(0) = 1, ;
– ∀x ∈ R 1/ exp(x) = exp(−x) ;
– ∀x ∈ R, exp x > 0 ;
exp(x) − 1
– lim = 1.
x→0 x
Démonstration. Fixons à nouveau x ∈ R et soit h ∈]0, 1[. Nous avons, pour n > 1,
x+h x h
1+ = 1+ 1+ .
n h n(1 + x/n)
x+h n
x n h
un (x + h) = 1 + ≥ 1+ 1+ .
n n 1 + x/n
Ceci montre que la fonction exponentielle n’est jamais nulle. Comme elle est dérivable et
donc continue sur R, et que exp(0) = 1, il en découle que exp(x) > 0 pour tout réel x. Enfin,
la dernière propriété à démontrer provient immédiatement de ce que exp0 (0) = exp(0) = 1.
f 0 = λf, f (0) = a
Lemme I.4 Soit f une fonction dérivable sur R telle que f (0) = 1. Les deux propriétés
suivantes sont équivalentes :
1. il existe λ ∈ R tel que f 0 = λf ;
2. pour tous réels a et b, f (a + b) = f (a)f (b).
En particulier, pour tous a, b ∈ R, exp(a + b) = (exp a)(exp b).
y 0 = λy, y(0) = a,
Il suffit de prendre la racine p-ième de cette égalité pour obtenir exp(an) = (exp a)n .
On convient de noter :
e = exp(1).
Par ce qui précède, nous voyons que, pour tout x ∈ Q, exp x = exp(1x) = (exp 1)x , et
donc :
exp x = ex .
Par analogie, on définiera les puissances irrationnelles du nombre e par la même formule :
si x ∈ R \ Q, on définit ex par : ex = exp x.
Construction des fonctions usuelles 147
Proposition I.6 La fonction exponentielle tend vers l’infini à l’infini. De plus, pour tout
n ∈ N, on a :
ex
lim n = +∞.
x→+∞ x
Cette série entière a un rayon de convergence infini (utiliser la règle an+1 /an ), donc la
fonction exponentielle est définie sur le plan complexe C tout entier.
La théorie des séries entières nous assure aussi que la restriction de cette fonction à R
est de classe C ∞ et que ses dérivées successives s’obtiennent en dérivant terme à terme la
série entière qui définit exp. On voit alors immédiatement que exp0 = exp. Comme, par
ailleurs, il est clair que exp(0) = 1, nous voyons que l’exponentielle est solution sur R du
problème de Cauchy (C). Nous pouvons alors réutiliser les arguments de terminale pour
obtenir les propriétés élémentaires de cette fonction sur R.
Signalons que la proposition I.6 peut, dans notre nouveau cadre, se démontrer en une
ligne : si x > 0, alors, pour tout n ∈ N, nous avons :
+∞ k
−n −n
X x xn+1 x
x exp(x) = x ≥ x−n = → +∞.
k! (n + 1)! (n + 1)!
k=0
P P
Théorème I.7 (Produit de Cauchy de deux séries) Soient un et vn des séries
absolument convergentes, à termes réels ou complexes, de sommes respectives s et s0 . La
série de terme général
X
wn = u0 vn + u1 vn−1 + . . . + un v0 = uk vk0
k+k0 =n
0
P
est absolument convergente et sa somme
P est
Pégale à ss . La série n∈N est appelée le
produit de Cauchy des deux séries un et vn .
Notons An l’ensemble des couples d’entiers (k, k 0 ) intervenant dans cette somme : An =
{(k, k 0 )/ 0 ≤ k ≤ n, 0 ≤ k 0 ≤ n}. On définit alors
X
wn = u0 vn + u1 vn−1 + . . . + un v0 = uk vk0 .
k+k0 =n
Notons également
n
X n
X X X
Wn = wp = uk vk0 = uk vk0 .
p=0 p=0 k+k0 =p (k,k0 )∈Bn
Bn = {(k, k 0 )/ 0 ≤ k ≤ n, 0 ≤ k 0 ≤ n; 0 ≤ k + k 0 ≤ n}
. Ainsi,
Bn ⊆ An ⊆ B2n ⊆ A2n .
P
La série wn est absolument convergente : en effet,
n
X X
|wp | ≤ |uk |.|vk0 |
p=0 (k,k0 )∈B n
n n n
! !
X X X X
≤ |uk |.|vk0 | = |uk |.|vk0 | = |uk | |vk | .
(k,k0 )∈An k,k0 =0 k=0 k=0
P P
Les deux séries uP
n et vn étant supposées absolument convergentes, lePterme de droite
est majoré et donc np=0 |wp | l’est aussi et donc la série à termes positifs |wp | converge
(rappelons
P qu’une série à termes positifs a toujours une somme, finie ou infinie). Donc la
série wn est absolument convergente, et donc convergente. Démontrons que sa somme
est ss0 . Pour tout entier n,
X X X
|W2n − Un Vn | = uk vk0 ≤ |uk vk0 | ≤ |uk vk0 |.
(k,k0 )∈B2n \An (k,k0 )∈B2n \An (k,k0 )∈A2n \An
Construction des fonctions usuelles 149
Or
X X X
|uk vk0 | = |uk |.|vk0 | − |uk |.|vk0 |
(k,k0 )∈A2n \An (k,k0 )∈A2n (k,k0 )∈An
2n 2n n n
! ! ! !
X X X X
= |uk | |vk | − |uk | |vk | .
k=0 k=0 k=0 k=0
Donc
2n 2n n n
! ! ! !
X X X X
|W2n − Un Vn | ≤ |uk | |vk | − |uk | |vk | .
k=0 k=0 k=0 k=0
P P
Les séries P |un | et P |vn | sont convergentes par hypothèse. Notons X et Y les sommes
des séries |un | et |vn | et passons à la limite dans la dernière inégalité :
+∞
X
wk − ss0 ≤ XY − XY = 0
k=0
n n
X z k (z 0 )n−k 1 X k k 0 n−k (z + z 0 )n
wn = = Cn z (z ) = ,
k! (n − k)! n! n!
k=0 k=0
Comme dans le cas réel vu en terminale, nous pouvons déduire de cette proriété que,
pour tout x ∈ Q, exp(x) = ex , où l’on a noté e = exp(1). Si z ∈ C \ Q, on convient de
noter aussi :
exp(z) = ez .
(2) cos(a + b) = cos a cos b − sin a sin b, sin(a + b) = sin a cos b + sin b cos a,
150 Analyse réelle pour le CAPES
+∞ +∞
X
n z 2n X z 2n+1
(4) cos z = (−1) , sin z = (−1)n+1 .
(2n)! (2n + 1)!
n=0 n=0
Les deux séries entières qui définissent ces deux fonctions ont un rayon de convergence
infini (c’est celui de l’exponentielle).
Tout le problème consiste alors à vérifier que, pour z réel, ces définitions coı̈ncident
avec les définitions géométriques données en classe de première. C’est ce que nous allons
voir maintenant. Nous nous restreignons maintenant aux variables réelles. Nous suivons
ici le livre de W. Rudin cité en référence.
Commençons par passer en revue les propriétés des deux fonctions sin et cos qui se
déduisent rapidement de leurs définitions.
Tout d’abord, la définition de l’exponentielle complexe nous montre que, si x ∈ R,
alors eix = e−ix . Nous pouvons en déduire que
En particulier, cos x et sin x sont des nombres réels. Ainsi, nous avons :
sin 0 = 0, cos 0 = 1.
Une dérivation terme à terme de ces deux séries entières montre de plus que
Le nombre π
Lemme II.1 La fonction cos s’annule au moins une fois sur ]0, +∞[.
Démonstration. Supposons que ce n’est pas le cas. Puisque cos 0 = 1 > 0 et que la fonction
cos est continue, cela entraı̂ne que cos x > 0 pour tout x > 0 et, puisque sin0 = cos, que
la fonction sinus est strictement croissante sur [0, +∞[. Puisque sin 0 = 0, nous avons
sin x > 0 pour tout x > 0. Par conséquent, si 0 < x < y,
Z y
(y − x) sin x < S(t) dt = cos x − cos y ≤ 2
x
(nous savons depuis (5) que le cosinus est borné par 1). Donc S(x) ≤ 2/(y − x), pour tout
y > x. En faisant tendre y vers l’infini, cela entraı̂ne que S(x) = 0, et nous avons une
contradiction.
L’ensemble des zéros d’une fonction continue étant un fermé, nous pouvons définir
(6) π = 2c.
Par définition, nous avons : cos(π/2) = 0, et, d’après (5), sin(π/2) = ±1. Mais, comme
sin0 x = cos x > 0 sur l’intervalle [0, π/2] (par définition de π), la fonction sinus est
croissante sur [0, π/2] et donc, puisque sin 0 = 0, sin(π/2) = 1. Par conséquent,
eiπ/2 = i.
En élevant cette égalité une fois, puis deux fois, au carré, nous obtenons :
ez+2iπ = ez e2iπ = ez .
En particulier, pour z = ix, x ∈ R, nous en déduisons que les fonctions cos et sin sont
2π-périodiques.
Lemme II.2
– Pour tout t ∈]0, 2π[, eit 6= 1.
– Pour tout nombre complexe z de module 1, il existe un unique t ∈ [0, 2π[ tel que
eit = z.
Démonstration.
– Soit t ∈]0, π/2[. Nous voulons démontrer que e4it 6= 1. Notons x = cos t, y = sin t.
Nous savons que 0 < x, y < 1. Or :
– Supposons que eit = eis , avec s, t ∈ [0, 2π[. Supposons par exemple t > s. Alors
1 = eit e−is = ei(t−s) . Par ce qui précède, cela montre que t = s. D’où l’unicité de t.
Soit maintenant z un complexe de module 1. Notons : z = x + iy, x, y ∈ R.
Supposons tout d’abord que x, y ≥ 0. La fonction cos décroit de 1 à 0 entre 0 et π/2,
donc il existe un t ∈ [0, π/2] tel que cos t = x. Comme
eit = −iz.
0
Nous multiplions ceci par i = eiπ/2 , pour obtenir : z = ei(t+π/2) = eit , avec t0 ∈ [0, π].
Si, enfin, y < 0, nous appliquons ce qui précède au nombre complexe −z : il y a un
t ∈ [0, π] tel que
−z = eit .
Il suffit de multiplier le tout par −1 = eiπ pour finir la démonstration.
γ : [0, 2π] → C
t 7→ eit .
Puisque, pour tout t ∈ R, |eit | = 1, cette courbe est contenue dans le cercle trigonométrique
C. D’après le lemme II.2, γ est en fait une bijection de [0, 2π[ sur le cercle C. La boucle
sera bouclée, si l’on peut dire, lorsque nous aurons vu que, pour t ∈ [0, 2π[, la longueur
de l’arc de cercle qui relie le point γ(0) au point γ(t) est égale à t. Mais nous savons que
cette longueur vaut (voir le cours sur les longueurs d’arcs paramétrés) :
Z t Z t Z t
0 iu
l(t) = |γ (u)| du = |ie | du = du = t.
0 0 0
Donc tout va bien : le point γ(t) = eit est situé au bon endroit du cercle trigonométrique, et,
par définition de l’arc γ, les réels cos t et sin t sont, respectivement, l’abscisse et l’ordonnée
du point γ(t). Nous retrouvons ainsi exactement la définition géométrique classique du
cosinus et du sinus.
Notons en particulier que la longueur du cercle complet est égale à l(2π) = 2π, ce qui
montre que notre définition (6) du nombre π était bien la bonne...
III. Le logarithme
III.1. Le logarithme sur ]0, +∞[ Le logarithme d’un réel x > 0 est défini traditionnel-
lement par : Z x
dt
ln x = .
1 t
On démontre ensuite que sa fonction réciproque est solution sur R de l’équation différen-
tielle y 0 = y, y(0) = 1, et l’on définit ainsi l’exponentielle. Actuellement, c’est la démarche
154 Analyse réelle pour le CAPES
inverse qui est préférée en terminale. En effet, la notion d’intégrale ne reposant pas sur
des bases très rigoureuses dans cette classe, l’existence d’une primitive de la fonction
x 7→ 1/x y est admise. C’est pourquoi on commence par définir l’exponentielle avec toute
la rigueur possible, comme nous l’avons vu plus haut, et l’on démontre ensuite que sa
fonction réciproque est une primitive de x 7→ 1/x † .
Nous supposons donc construite la fonction exponentielle ; nous savons que cette fonc-
tion est strictement croissante, et donc injective, sur R, que e0 = 1 et que limx→+∞ ex =
+∞. Nous en déduisons que
1 1
lim ex = lim = = 0.
x→−∞ x→−∞ e−x limx→+∞ ex
Par conséquent, le théorème des valeurs intermédiaires nous assure que l’exponentielle est
une surjection, et donc finalement une bijection, de R sur ]0, +∞[. Cette fonction admet
donc une fonction réciproque, appelée logarithme népérien, notée depuis quelque temps
ln, définie sur ]0, +∞[ et strictement croissante. On a, par construction :
La propriété connue de dérivabilité d’une fonction réciproque montre de plus que le loga-
rithme est une fonction dérivable et que, pour tout x > 0,
1 1 1
ln0 (x) = = = .
exp0 (ln x) exp(ln x) x
Par ailleurs, si a, b > 0, on voit que les deux réels ln(ab) et ln a + ln b ont même exponen-
tielle :
exp(ln(ab)) = ab; exp(ln a + ln b) = exp(ln a) exp(ln b) = ab.
L’exponentielle étant injective, il vient :
ln(ab) = ln a + lnb.
De même, on vérifie que, pour tout a > 0 et x ∈ R, ln(ax ) et x ln a ont même exponentielle,
et donc que :
(7) ln(ax ) = x ln a.
Le comportement asymptotique du logarithme en 0 et +∞ se déduit aisément de celui
de l’exponentielle en +∞ : tout d’abord, puisque ex /x tend vers l’infini lorsque x → +∞
et puisque ln t → +∞ quand t → +∞, on a : eln t / ln t → +∞ à l’infini, c’est-à-dire, en
passant à l’inverse :
ln t
lim = 0.
t→+∞ t
†
Certes, la construction de l’exponentielle faite en terminale repose aussi sur du sable puisque l’on
y admet le théorème sur les suites adjacentes, qui est équivalent, on le sait, au fait que R est complet.
Mais tout ce qui est fait dans ce présent cours et dans tout le programme du CAPES n’a pas de bases
fondamentalement plus assurées, puisque tout repose sur la théorie axiomatique des ensembles, dont on
sait depuis Gödel qu’il est impossible de démontrer la cohérence. Il est donc vain de vouloir à tout prix
évacuer l’intuition. On peut tout au plus parvenir à en cerner les limites, ce qui n’est déjà pas si mal. C’est
d’ailleurs là toute la substance de la démarche mathématique.
Construction des fonctions usuelles 155
Soit α > 0. Alors tα tend vers l’infini avec t. On en déduit que ln(tα )/tα tend vers 0 quand
t tend vers l’infini et donc, en utilisant (7),
ln t
lim = 0, ∀α > 0.
t→+∞ tα
Ceci entraı̂ne, si l’on pose u = 1/t, que uα ln(u−α ) → 0 quand u → 0+ . Comme ln(u−α ) =
−α ln u, on a donc :
lim uα ln u = 0, ∀α > 0.
u→+∞
III.2. Le logarithme complexe Comme dans le cas réel, on appelle logarithme d’un
nombre complexe z tout nombre complexe t tel que et = z † . Mais l’exponentielle n’étant
pas injective dans C, un nombre complexe admet en général plusieurs logarithmes. Il en
admet même une infinité s’il n’est pas nul, comme nous allons le voir maintenant. Donnons
d’abord une définition.
Définition III.1 Soit z ∈ C∗ . On appelle argument de z tout réel θ tel que z = |z|eiθ .
Une conséquence immédiate du lemme II.2, p. 152 est qu’un nombre complexe non nul
admet toujours au moins un argument. Nous pouvons aussi déduire de ce lemme que deux
arguments d’un même nombre complexe sont congrus modulo 2π :
Lemme III.2 Soient θ et θ0 deux arguments du nombre complexe non nul z. Alors θ−θ0 ∈
2πZ.
ln ρ + i(θ + 2nπ), n ∈ Z.
Les nombres complexes annoncés dans le théorème sont donc bien des logarithmes de z.
Pour voir qu’il n’y en a pas d’autre, choisissons t = x + iy, x, y ∈ R et supposons que t est
un logarithme de z. Alors z = et = ex eiy . Par conséquent,
Remarquons que le nombre complexe 0 n’a, lui, pas de logarithme. En effet, la relation
ez e−z = 1 montre que, pour tout z ∈ C, ez 6= 1.
†
la notion de logarithme complexe n’est pas au programme du CAPES.
156 Analyse réelle pour le CAPES
Le logarithme principal
Démonstration. Nous savons depuis le lemme II.2, p. 152 qu’il existe un unique t ∈ [0, 2π[
tel que z/|z| = eit . Posons alors : θ = t si t ∈ [0, π] et θ = t − 2π si t ∈]π, 2π[. La fonction
u 7→ eiu étant 2π-périodique sur R, le réel θ satisfait la condition posée. En particulier,
θ 6= π, car, sinon, on aurait :z = |z|eiπ = −|z| ∈ R− .
Par ailleurs, l’unicité de l’argument principal provient de ce que deux arguments de z
sont au moins distants de 2π ; il ne peut donc y en avoir deux dans l’intervalle ] − π, π[.
157
158 Analyse réelle pour le CAPES
Taylor
-Lagrange (formule de), 66
-MacLaurin (formule de), 67
-Young (formule), 68
avec reste intégral (formule de), 68
Taylor (formules de), 216
Taylor avec reste intégral (formule), 217
Taylor-Young (formule de), 217
trapèze (formule du), 103
valeur absolue, 12
valeur d’adhérence
d’une suite, 177
valeurs intermédiaires, 33
valeurs intermédiaires (théorème des), 199
Van der Pol (équations de), 141
voisinage, 171
Wallis
formule de, 118
intégrales de, 118
Weierstrass
théorème de, 174
Weierstrass (théorème), 19
Weierstrass (théoreme), 53
Wronskien, 161