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Ian Bichelmeier PARAMÈTRES CONDITIONNÉS OU CONDITIONNELS ?

EPFL 2019
Énoncé Théorique de Master d’Architecture
Ian Bichelmeier

Une Proposition de Processus Paramétrique


Le Logement
Remerciements

Pr. Paolo Tombesi


Pr. Bernard Cache
Christophe Berther

3
Lorsque l'on considère la recherche matérielle comme une substance,

l’exploration du savoir-faire en tant qu'objectif,

la conception numérique en tant que méthodologie,

et la fabrication numérique en tant que technique,

une procédure de conception architecturale intégrée émerge,

à laquelle l'architecte peut appliquer des données spécifiques.

Philip Yuan

4
AVANT-PROPOS

Une énorme part du travail de l’architecte est une succession de tâches


fastidieuses qui sont fondamentales mais aussi répétitives et calculatoires. Il ne s’agit
pas seulement de mesurer des longueurs, des surfaces ou des volumes mais aussi
des efficiences énergétiques ou des coûts de construction par exemple. C’est un
travail qui peut être perçu comme peu gratifiant et peu spectaculaire mais qui est
pourtant indispensable, et qui doit être rigoureux car l’erreur est impardonnable.

D’autre part un projet rassemble plusieurs disciplines et il est nécessaire de


partager les informations avec tous les acteurs variés du projet1. Le langage de
l’architecte est unique à l’architecture mais chaque acteur nécessite et utilise un
langage spécifique qui lui permet de contribuer sa part au projet. L’architecte doit donc
traduire ces informations pour faciliter, voire rendre possible la réalisation du projet.

L’émergence des technologies numériques commence à faciliter ce travail


interdisciplinaire. Des programmes tels que Revit ou ArchiCad se servent de
plateforme d’interaction pour ce partage d’informations, et servent de base pour la
mise en œuvre de ce que nous appelons un système multi-agent (SMA). Les bureaux
d’architectures utilisent souvent l’ordinateur pour organiser les processus de
documentation et de construction2. Mais la plupart n’arrivent pas à utiliser la puissance
du numérique dans le processus de conception, en l’intégrant dans une méthode

1
Peggy Deamer et Phillip Gordon Bernstein, éd., Building (in) the Future : Recasting Labor in Architecture, 1.
ed (New York : Princeton Architectural Press [u.a.], 2010).
2
Scott Marble, éd., Digital workflows in architecture : designing design, designing assembly. designing
industry, (Basel: Birkhäuser, 2012).

5
générative3 basée sur un système paramétrique utilisant des critères multiples, comme
les contraintes de site, les éléments typologiques ou le programme.

Avec l’utilisation d’outils paramétriques comme Grasshopper, les algorithmes et


plus généralement les technologies de l’information tendent de plus en plus à
s’immiscer dans le processus de la conception architecturale. Ces plateformes de
traitement d’information favorisent ainsi la création d’un langage partagé. Cette mise
à niveau d’un langage qui devient utilisable par tous pose néanmoins des questions
sociaux-techniques au niveau même de ce mode de production, qui n’est pas
seulement formel ou mécanique, et comme nous allons le voir, pas forcément
autonome4.

De nos jours, la plupart des acteurs impliqués dans la conception architecturale


utilisent des systèmes de conceptions dépassés, car non-adaptés aux nouvelles
conditions de production. Les nouveaux systèmes ne paraissent pas intégrés dans
nos activités cognitives et instrumentales, et rencontrent même une certaine résistance
parmi les architectes. Il me semble que cela est explicable par le fait qu’il soit difficile
d’ajuster notre quotidien à des bonds technologiques qui se développent à une
cadence aussi effrénée que celle d’aujourd’hui.

« Une part du progrès consiste à préserver l’ordre en dépit du changement, et le


changement en dépit de l’ordre »5
A.N. Whitehead

À travers cet énoncé, j’essaye de mettre en évidence un cadre dans lequel


l’utilisation des outils paramétriques, et plus généralement des outils numériques, n’est
plus associée à un style, mais peut s’insérer dans n’importe quel type de pratique

3
Patrick Janssen, A generative evolutionary design method, Digital Creativity 17, no 1 (1 janvier 2006),
https://doi.org/10.1080/14626260600665736.
4
Yasser Zarei, The Challenges of Parametric Design in Architecture Today : Mapping the Design Practice,
Thesis, Master of Philosophy, (Universtiy of machester 2012).
5
Alfred North Whitehead, David Ray Griffin, et Donald W. Sherburne, Process and Reality : An Essay in
Cosmology : Gifford Lectures Delivered in the University of Edinburgh during the Session 1927-28, p. 515,
Corr. ed., first Free Press paperback edition (New York : Free Press, 1985).

6
architecturale. C’est pourquoi j’opte ici pour une approche théorique qui tente de
mettre en avant les possibilités offertes par ces outils et les conditions nécessaires à
l’incorporation de ces technologies dans des pratiques quotidiennes6. Pour me guider
dans cette réflexion, je tenterai de répondre à trois questions.

Pourquoi et comment le fait d’utiliser ces nouveaux outils change la manière de


concevoir l’architecture, et pourquoi la confrontation de l’architecte avec des
systèmes ouverts et en évolution permanente définit un nouveau mode de
production ?

Quelles conditions l’architecte doit-il intégrer dans une approche paramétrique qui
structure un processus de conception basé sur des contraintes et des possibilités
qualitatives, et comment peut-il les utiliser dans un modèle paramétrique ?

Comment l’architecte doit-il utiliser ces données générées dans un environnement


donné et quel poids doit-il leur donner en rapport à l’observation des usages des
utilisateurs dans son travail architectural ?

Un traitement automatisé des informations et d’analyse des données nous pousse


d’un mode de production qui était à la base un processus linéaire et fini à un mode de
production qui est un processus ouvert et continu. Cette production architecturale
devient extrêmement libre et nous devenons architecte de la conception de ces
automatisations de prises de décisions. Peut-il ainsi garder une dimension créative
dans la programmation d’un système multi-agents ? Nous allons essayer de voir ce
qui pourrait déterminer les conditions de ces processus.

6
Roland Hudson, Strategies for Parametric Design in Architecture, Thesis, Doctor of Philosophy, University of
Bath (2010).

7
SOMMAIRE

AVANT-PROPOS 5

INTRODUCTION 10

I / INTENTIONS PARAMETRIQUES 13

Le Paramètre 14
Evolutions 20
Notations 29
Evaluation 34
Condensation 40

II / CONDITIONS INDIVIDUELLES 45

Les Besoins Humains 46


Les Relations Entre L’Homme et L’Espace 50
L’Habitude Comme Vecteur 54
Les Topologies Du Contrôle Social 61
Les Systèmes Interactifs 65

III / CONDITIONS SPACIALES 70

La Forme De L’Espace 71
Les Relations Spatiales 77
Les Articulations Spatiales 83
Les Imbrications Opérationnelles 89
Les Interactions Conditionnelles 97

8
IV / CONDITIONS CONTEXTUELLES 106

Les Seuils Entre L’Intérieur et L’Extérieur. 107


L’Intégration Dans La Ville 113
Les Règles Urbaines 117
Les Variations Environnementales 121
La Formalisation Intérieure 125

V / CONCEPTIONS PARAMETRIQUES 132

La Conceptualisation Paramétrique 133


La Temporalité De L’Espace 137
L’Adaptabilité, Liberté ou Flexibilité ? 141
Le Mouvement et La Fonctionnalité 145
La Réutilisation et La Réhabilitation 149

CONCLUSION 154

BIBLIOGRAPHIE 157

9
INTRODUCTION

À travers cet énoncé nous allons définir les conditions, qui sont nécessaires à la
vérification des paramètres influençant le projet architectural. L’irruption du numérique
dans divers processus architecturaux a changé notre pratique architecturale, ouvrant
de nouvelles voies vers de nouveaux modèles de conception. Souvent perçue comme
brutale, l’adaptation des pratiques professionnelles aux bouleversements du
numérique nécessite des efforts considérables, à la fois intellectuels et économiques.
Dans cette ère du numérique, la question est finalement de savoir si l’architecture doit
évoluer pour devenir véritablement digitale, ou si elle peut s’affranchir de ces nouveaux
outils et ne pas changer une façon bien établie de pratiquer ?

Nous allons voir comment et à quel point ces nouvelles technologies peuvent
permettre d’optimiser les processus de conception7 d’un projet, notamment en
digitalisant certaines étapes du projet. Un objet digital doit remplir des conditions bien
définies pour être qualifié de digital. Les paramètres variables répondent aux itérations
d'un algorithme, soit un ensemble de règles opératoires propres à un calcul et une
suite de règles formelles, et le 21ème siècle a vu l'ordinateur absorber une langue
basée sur ces variables. De plus, un des attributs principaux d'un artefact digital est la
possibilité de modification, d'interactivité, de programmabilité et de distribution. En
tant que telles, les technologies informatiques architecturales intègrent donc ce
processus de numérisation en utilisant diverses plateformes pour mettre en œuvre une
méthode de travail. Ces plateformes sont variées et leur utilisation n’induit pas les
mêmes comportements de conception en fonction du programme et de leurs

7
Roland Hudson, Strategies for Parametric Design in Architecture, Thesis, Doctor of Philosophy, (University of
Bath, 2010).

10
utilisateurs. Il est essentiel de se rendre compte que, si nous utilisons un programme
numérique, le processus de conception n’est en lui-même pas vraiment numérique.

Une plateforme sert de cadre pour un « Processus sociotechnique d'application


de techniques de numérisation à un contexte social et institutionnel plus large qui
rend les technologies numériques infrastructurelles »8

Le principal obstacle à un processus de conception architecturale numérique est


le manque de mise en œuvre de bases de données informatives générales ou locales.
Elles doivent être fondamentales pour être utilisables par l'architecte dans les
infrastructures numériques actuelles, et permettre ainsi leurs diffusions. Le besoin
existe, mais pas forcément la capacité de traiter l’information. Il faut donc définir la
structure numérique du processus architectural actuel pour mieux comprendre où se
situe le problème de l’insertion numérique en architecture. Pour le moment, nous
restons dans une « structure modulaire avec une limite fixe »9. Cela veut dire que le
processus conception est centralisé autour d’un concepteur, ici l’architecte, qui crée
une architecture numérique de base, avec des sous-systèmes pour en coordonner
ensuite les différents acteurs impliqués. Ces modules numériques explicites définissent
donc une série finie d'étapes et d'instructions, organisées en une séquence linéaire. Il
s’agit d‘éviter le hasard, afin d’arriver à un résultat déterminé et figé.

Une restructuration possible serait d’implanter des modules numériques


génératifs, qui ne connaissent pas forcément le projet dans sa globalité, ni la manière
dont chaque module sera intégré aux autres modules. Par contre, cela laisserait place
à des éléments indéterminés, qui empêchent l’auteur d’anticiper le résultat. Que se
passerait-il si nous laissons certains processus, dictés par des conditions exprimées
sous forme de paramètres, s’autodéterminer ? Cela induirait un consensus aléatoire,
rendant l’utilisation des outils paramétriques peut être moins stylistique. Pouvons-nous

8
Gianluigi Visuci, Information Technology & Digital Strategy, MTE, (EPFL, 2018).
9
Patrick Cohendet, Morad Diani, et Christophe Lerch, Stratégie modulaire dans la conception. Une
interprétation en termes de communautés, Revue Française de Gestion, (Paris,2005).

11
créer une théorie systématique de la forme architecturale qui incorpore la psychologie
et les théories des systèmes et de l’information ?

Dans cet énoncé nous tentons tout d’abord de définir les conditions de mise en
œuvre de ces outils, et verrons comment ces outils sont ou peuvent être implémentés.
La notion même d’architecture paramétrique est ambiguë et toute méthode se doit
d’être remise en cause et réinterprétée.

Tout objet architectural ne peut se concevoir sans d’abord définir comment


l’homme utilise l’espace. Nous examinerons si nous pouvons intégrer ce postulat en
tant que condition. Nous en déduirons s’il est possible de définir cette confrontation
hommes-espaces en tant que paramètre génératif. S’en suivent des considérations
spatiales issues de ces définitions. Chaque élément constituant une architecture est
défini par lui-même mais aussi par sa relation aux autres éléments. L’ordre spatial et
ses limites sont essentiels pour comprendre comment ces éléments peuvent être
imbriqués spatialement et également au niveau du programme. Leurs
interdépendances ajoutent ainsi des conditions très spécifiques qui sont aussi liées à
leur utilisation. Suivant cette logique relationnelle il faut de la même manière définir les
conditions qui régissent les relations entre des éléments architecturaux avec les
éléments extérieurs, directs ou urbains, et prendre en compte tous les facteurs
environnementaux spécifiques au site. Ces facteurs vont forcément avoir des
répercussions spatiales extérieures, mais aussi intérieures, et il faut voir à quel point
cela peut influencer les éléments du projet dans leur globalité et dans leur individualité.

Pour terminer nous prendrons position par rapport au poids que nous donnons
aux différentes conditions établies précédemment. Il faut savoir quelle place nous
devons laisser à l’élaboration d’un concept propre au projet, et quelle liberté nous lui
donnons dans le temps et dans l’espace. Nous appelons ici à l’ouverture d’esprit du
lecteur, car les points élaborés dans cet énoncé ne sont en aucun cas des conditions
qui doivent explicitement être mise en œuvre telles qu’elles, car il restera toujours une
dimension émotive, ou basée sur l’expérience de l’architecte, aux choix qu’il doit faire
lors de l’élaboration d’un projet.

12
13
Le Paramètre

Paramètre (nom masculin) : du grec Pará (à côté de) et Metron (mesure)

Nous pouvons trouver plusieurs définitions10 de ce qu’est un paramètre. La


première est géométrique et est assez représentative de l’utilisation actuelle des outils
paramétrique dans l’architecture.

Pour un arc paramétré (I, f), nombre réel variable qui décrit I ; pour une surface
paramétrée (A, g), chacune des deux variables réelles de la fonction g.

Mais nous allons porter notre attention sur deux autres définitions, qui dans un
sens, sont plus intéressantes dans la pratique architecturale.

Grandeur mesurable permettant de présenter de façon plus simple et plus


abrégée les caractéristiques principales d'un ensemble statistique.

Élément en fonction duquel on explicite les caractéristiques essentielles d'un


phénomène, d'une question.

À partir du moment où nous définissons la notion de paramètre par sa racine


étymologique, il est plus simple de comprendre pourquoi son utilisation est
intéressante et pourquoi elle s’intègre aujourd’hui dans la digitalisation du processus
du travail architectural. Un projet architectural est un processus complexe dans lequel
la gestion des connaissances doit être liée à la conception de manière opérationnelle.

Un paramètre est une séquence d'un ensemble fini d'instructions pouvant être
exécutée de manière déterministe11.

10
Dictionnaires Larousse français monolingue et bilingues, (consulté le 1 janvier 2019), https://www.larousse.fr/
dictionnaires/francais.
11
Daniel Davis, A History of Parametric, http://www.danieldavis.com/a-history-of-parametric/, (6 août 2013).

14
Les paramètres sont donc toutes les catégories d'informations qui affectent la
prise de décision dans un processus d’élaboration de projet. C'est une possibilité de
l'architecture paramétrique : aller au-delà de la géométrie et de la forme, afin de
concevoir un système intégrant toutes les variables impliquées dans le processus.
Contrairement à ce que nous croyons, un ordinateur n’est pas seulement un système
mathématique. C’est aussi un système grammatical qui « réécrit12 » des mots selon un
alphabet donné. Mais comme nous l’a démontré Turing, il est dépendant de sa
capacité à réécrire ces mots et donc limité par son alphabet. Si les mots décrivent
l’état d’un modèle basé sur un langage, ils décrivent une expérience. Si ce langage
décrivait un état différent, l’ordinateur changerait cet état en réécrivant les mots
décrivant cet état. Cette réécriture permet le changement d’un état à un autre : si nous
prenons par exemple un loup dont nous changeons l’état de bien nourri à affamé, son
comportement change d’errance à chasse.

Nous pouvons ainsi déterminer des contraintes, des variables et des règles de
production, et en faire des systèmes parallèles évolutifs13. Un des composants
constituant ce système peut générer une forme, mais il ne reconnaitra pas la forme
générale dans laquelle il s’intègre. Il fait partie d’un réseau maillé, dont chaque élément
peut échanger des informations avec les autres, ainsi que collecter ces informations
en temps réel, comme la température, la luminosité, l’humidité, le bruit, ou la force du
vent. Si chaque élément reçoit ces informations, cela va influencer des décisions prises
au niveau de l’élément. Si nous ajoutons ces fonctions dans un programme cela
permet la création de géométries variables, mais pour le moment nous pouvons
difficilement parler d’une génération de forme. S’il faut construire un système
génératif14, il faudra y intégrer des moteurs génératifs, des processus de sélections,

12
Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-
Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).
13
Gianluigi Visuci, Information Technology & Digital Strategy, MTE, (EPFL, 2018).
14
Patrick Janssen, « A generative evolutionary design method », Digital Creativity 17, n 1, (1 janvier 2006).
o

15
des algorithmes génératifs, ainsi qu’un système de conception incluant la création, le
développement, l’optimisation et la résolution15 de ses composants.

« De cette façon, ce que j'ai longtemps sollicité et que j'appelle "architecture


paramétrique" va naître. Son caractère géométrique inéluctable, sa concentration
rigoureuse de formes, sa liberté absolue de fantaisie qui naîtra dans des endroits
où les équations ne peuvent pas fixer leurs propres racines, lui donneront une
splendeur cristalline. » 16
Luigi Moretti

Nous trouvons aujourd’hui différents types de techniques de modélisation


paramétrique, comme la modélisation d’objets, le travail associatif, la gestion de flux
de données ou la répartition procédurale. Elles diffèrent surtout dans leur capacité à
supporter des itérations et dans leur manière de manipuler les différents plans. Un
point de vue peut exister en dehors de l’objet, offrant un contrôle de conception
extérieur ; ou à l’inverse, chaque élément peut offrir son propre point de contrôle, tout
en créant ainsi collectivement un système.17 C’est le potentiel offert par des outils
logiciels modernes18 comme Grasshopper, Rhinoceros, Revit, Dynamo ou ArchiCad,
qui modifient le processus de conception architecturale, en faisant des architectes des
concepteurs de systèmes. Ces outils permettent de concevoir des espaces avec des
contenus programmatiques variés, pour une multitude de groupes d’utilisateurs
interdépendants19, créant ainsi un espace partagé par le biais de processus
fonctionnels et interactifs. Ces espaces reposent sur leurs capacités à communiquer
les processus sociaux voulus à l’habitant par le biais de séparations spatiales et de

15
John Frazer, An Evolutionary Architecture : Themes VII, éd. par Pamela Johnston, (London: Architectural
Association Publications, 1995).
16
John Frazer, Parametric computation, History and Future, dans Parametricism 2.0: Rethinking Achitecture’s
Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design Profile, no 240, (London: John
Wiley & Sons, 2016).
17
Voir Figure : Inner Viewpoints, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri No-Kenchiku,
éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).
18
Arturo Tedeschi et Fulvio Wirz, AAD - Algorithms-Aided Design, (Brienza : Le Penseur, 2014).
19
Voir Figure : La gestion traditionnelle vs. la gestion algorithmique, Rémy Bourganel, Frédérique Pain, et Cléo
Collomb, Algorithmes, (Paris, PUF, 2016).

16
connexions, qui introduiront ensuite les événements et des organisations sociales
déterminés.

À propos de la conception paramétrique : « Un processus basé sur une pensée


algorithmique qui permet l'expression de paramètres et de règles qui, ensemble,
définissent, encodent et clarifient la relation entre l'intention de conception et la
réponse de conception. » 20
Wassim Jabi

20
John Frazer, Parametric computation, History and Future, dans Parametricism 2.0: Rethinking Achitecture’s
Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design Profile, no 240, (London: John
Wiley & Sons, 2016).

17
Figure 1: Inner Viewpoints, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri No-Kenchiku, éd.
par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

18
Figure 2 : La gestion traditionnelle vs. la gestion algorithmique, Rémy Bourganel, Frédérique Pain, et Cléo
Collomb, Algorithmes, (Paris, PUF, 2016).

19
Evolutions

Comment la façon de pratiquer l’architecture s’adapte à une façon de construire ?


Pourquoi la notion de paramètre varie historiquement21 ? Nous allons retracer
l’évolution des paramètres dans la pratique architecturale, dans ses aspects sociaux,
matériels et constructifs, en revenant sur le développement des paramètres et
catalogues antérieurs à la technologie informatique actuelle. Il faut pour cela évaluer la
traduction des paramètres en architecture pour en comprendre les composants
paramétriques.

L’histoire du paramétrique nous permet de comprendre les origines sociales et


environnementales de ces techniques génératives et évolutives. Le terme et le concept
du paramétrique a été véritablement associé à l’architecture pour la première fois dans
« Architectura Parametrica » de Luigi Moretti en 1940, avant même qu’il existe une
quelconque capacité informatique. En 1960, Moretti présente à la XII Trienale di Milano
son Progetti de strutture per le sport e le spettacolo. Il est alorsest le premier à créer
une forme architecturale tridimensionnelle en utilisant un ensemble de relations
paramétriques résolus par calcul numérique à l’aide d’un ordinateur. La conception
assistée par ordinateur s’est poursuivie dans les années 1970 pour finalement intégrer
la notion de paramètres, mais à part quelques expériences cybernétiques, il n’y a pas
eu de changement majeur dans les pratiques architecturales jusqu'à nos jours.

En essayant de connecter cette vision moderne des mathématiques aux méthodes


géométriques historiques, Gilles Deleuze22 explique le changement qui s’opère quand

21
Mario Carpo, The birth of the non-standard, dans Block et Bhooshan, Parametricism 2.0: Rethinking
Achitecture’s Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design Profile, no 240,
(London: John Wiley & Sons, 2016).
22
Gilles Deleuze, Le pli : Leibniz et le Baroque, (Editions de Minuit, 1988).

20
nous changeons un nombre par un paramètre dans une fonction. Le paramètre a
d’abord été considéré comme la notation générale du script d’une fonction permettant
de représenter des familles génériques de courbes. Cette généralité de la notation
paramétrique permet néanmoins la création de scripts qui permettent ensuite de
définir un ensemble complet d’objets par simples itérations.

Il y a un changement dans la logique et dans les professions liées à la conception,


et le mouvement des avant-gardes s’initie aux avancées technologiques. Les années
90’ marquent un tournant dans l’architecture digitale grâce à des interfaces utilisateurs
plus graphiques et des modélisateurs numériques, rendant ainsi plus simple et plus
intuitive la conception assistée par ordinateur. Les déconstructivistes et les formalistes
se sont appropriés ces outils avec enthousiasme pour la création de géométries
complexes.

Pourtant des travaux plus anciens peuvent être considérés dans leur essence
comme paramétriques. Il y a des précédents à la variabilité calculatoire d’aujourd’hui,
que nous trouvons dans les théories architecturales de l’Antiquité classique ou du
Moyen-Age23. Ainsi les colonnes antiques24 sont définie par des bases paramétriques :
des règles de proportion définissent les relations entre les éléments qui constituent
chaque colonne, comme la base, le chapiteau et l’entablement, ou des spécificités
dans sa dimension par rapport à son application variable, comme sa hauteur et sa
situation dans le bâti. D’autres dimensions comme son diamètre sont aussi des
variables dépendantes qui dérivent des règles de proportion. Ce qui est intéressant ici,
c’est que le changement de ces règles de proportions marque le changement dans le
style des colonnes, qui peuvent donc être de style dorique, ionique ou corinthien, tout

23
Daniel Davis, A History of Parametric, http://www.danieldavis.com/a-history-of-parametric/, (consulté le 6
août 2013).
24
Voir Figure : Les 5 Ordres d'Architecture, Diderot & d'Alembert, Dictionnaire raisonné des sciences, des arts
et des métiers, (Paris : 1751-1772).

21
comme le changement d’un script paramétrique change le projet sans pour autant en
changer les variables.

Les premières traces de conception scriptée peuvent ainsi être attribuées à


Vitruve25 ou à Leon Batista Alberti, auteurs de manuscrits sans illustrations, qui
introduisent des règles verbales sur la manière de construire, souvent dans une
séquence de clauses « si […] alors […] », similaire à un algorithme procédural. Ces
instructions induisent la génération d’un vaste ensemble de formes et d’objets qui sont
tous différents mais similaires dans la manière dont le script commun les définit
mathématiquement par des règles génératives. Des règles géométriques orales
similaires ont été utilisées pour construire des bâtiments médiévaux. Les processus
de conception sont les mêmes pour tous les éléments du bâti et suivent des règles
qui expliquent comment construire l’élément pas à pas. Mais au final cela ne détermine
pas la forme de chaque élément individuel. Ces éléments, malgré le fait qu’ils aient la
même fonction ou les mêmes positions, sont similaires dans leurs règles mais non
identiques, donc de la même classe, du même « genus », mais différents et
spécifiques.

Nous trouvons ainsi dans ce jeu de variations, et dans cette complexité dans la
subdivision des genres, une arborescence complète de définitions, de divisions et
d’articulations. Cette façon de construire est donc générative et basée sur des règes
prédéfinies, et elle peut engendrer des variations infinies dans une certaine limite
donnée. Un exemple géométrique encore plus extrême sont les motifs arabes, appelés
« tessallations »26. Ce sont des mosaïques couvrant les murs et autres éléments qui
sont réglées de manière mathématique suivant un motif initial27. Ces règles sont
variées, et suivent des rotations, des symétries axiales ou obliques, des translations et

25
Vitruve, De Architectura, Adolphe Stapleaux, (1816).
26
Lovric Miroslav, Magic geometry : Mosaics in the Alhambra, (2009), http://www.alhambra-patronato.es
/ria/bitstream/handle/10514/56/Magic%20geometry%20mosaics%20in%20the%20Alhambra%20%20Miro
slav%20Lovric.pdf?sequence=2.
27
Voir Figure : Owen Jones, The Grammar of Ornament (London : Bernard Quaritch, 1868).

22
des répétitions, et à ce jour, 17 groupes de mosaïques ont été différenciés par
classification algorithmique.

Ce n’est finalement qu’à partir du moment où nous avons commencé à décrire


l’architecture par l’image ou par un objet tridimensionnel que cette pratique s’est
perdue. Dans un sens, que ce soit durant la Renaissance ou la Révolution Industrielle,
nous sommes dans une période de la copie, une production de masse d’éléments
identiques, très différent de ces variations artisanales. Cette culture de la copie a été
vivement critiquée par Van Doesburg28 à travers ses propositions. La première est
contre le style en général et contre le fait de copier des anciens styles. Il continue dans
la deuxième proposition en mettant en avant le coté élémentaire de l’architecture
développée par des éléments variables, et donc plastiques. Dans la neuvième
proposition il met l’accent sur le temps et l’espace, qui donne un aspect nouveau et
plastique à l’architecture29. Pouvons-nous y voir un certain parallèle avec une
architecture variable paramétriquement, et donc plastique ? C’est ce que permet le
paramétrique : une production en masse de variations. Les ordres et leurs variations
sont liés ; sans ordres, les variations sont des simples fantaisies sans fondement, et
sans variations, les ordres ne deviennent que de banales répétitions.

« Un style d’architecture est un programme cohérent et compréhensif, avec une


heuristique fonctionnelle et formelle » 30
Patrik Schumacher

En faisant intersecter des paraboloïdes hyperboliques avec des hyperboloïdes de


révolution, Antoni Gaudi revient vers une architecture flexible et à paramètres variables.
Avec l’idée de la forme libre dans l’utilisation des modèles flexibles d’Antoni Gaudi et

28
Theo van Doesburg, Towards a Plastic Architecture, (1924, De Stijl).
29
Voir Figure : Van Doesburg, De Stijl, Construction de l'espace-temps, (Paris : 1929).
30
Patrik Schumacher, The Autopoiesis of Architecture. Vol. 1 : A New Framework for Architecture (Chichester
: Wiley, 2011).

23
de Frei Otto31, nous nous voyons inspirés par la gravité, règle immuable de la nature.
L’architecture n’est plus planifiée, elle est conditionnée par la gravité32. Mais en vue
d’avoir une conception équilibrée, il était impossible de rendre cette condition absolue.
La conception change en superposant des paramètres en compétition les uns avec
les autres. Ils doivent ainsi s’équilibrer pour fonctionner ensemble. C’est un « optimum
de Pareto »33 qui rend un compromis paramétrique efficace. Il y a des différences et
des similarités entre ces deux architectes, ce qui nous montre que nous pouvons avoir
des alternatives flexibles dans ces modèles flexibles. Ces paramètres ne sont donc
pas des contraintes non-négociables et varient dans leurs domaines respectifs :
environnemental, politique, social, culturel, pratique, économique, théorique,
philosophique, comportemental, etc.

Ces exemples nous permettent de comprendre qu’il y a une matrice extrêmement


riche que la structure et le matériau créent avec les fondations physiques et
biotechniques du monde naturel. Une conception flexible permet d’étendre notre
répertoire et amène un besoin de convertir l’information issue du big data en
paramètres.

31
Mark Burry, Essential Precursors to the Parametricism Manifesto, dans Block et Bhooshan, Parametricism
2.0: Rethinking Achitecture’s Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design
Profile, no 240, London: John Wiley & Sons, 2016.
32
Voir Figure : Antonio Gaudi, El Calculo de Estructuras de la Sagrada Familia, (Barcelona : 1929).
33
Jonathan Berk, Peter DeMarzo, et Jarrad Harford, Fundamentals of Corporate Finance, Global Edition
(Harlow, United Kingdom : Pearson Education Limited, 2018).

24
Figure 3 : Les 5 Ordres d'Architecture, Diderot & d'Alembert, Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et
des métiers, (Paris : 1751-1772).

25
Figure 4 : Moresque n° 4, Owen Jones, The Grammar of Ornament (London : Bernard Quaritch, 1868).

26
Figure 5 : Van Doesburg, De Stijl, Construction de l'espace-temps, (Paris : 1929).

27
Figure 6 : Antonio Gaudi, El Calculo de Estructuras de la Sagrada Familia, (Barcelona : 1929).

28
Notations

Comment la description de ces paramètres nous permet-elle de décrire notre


architecture ? La notation34 en architecture est ce qui nous permet de passer de notre
imaginaire au réel. La question de l’évolution de la notation remet en question la façon
dont notre conscience représente une réalité. Si la notation change, ne devrait-il pas
y avoir un changement dans les possibilités et les limitations qu’a notre esprit de se
représenter les objets qu’il souhaite créer ? Le changement de notation change la
perception d'un paramètre. Les bâtiments les plus anciens étaient des structures
simples, ne comportant pas nécessairement un processus de conception puisqu'il
était possible de concevoir et construire un bâtiment sans dessin.

Quand nous apprenons à faire de l’architecture nous apprenons à la décrire avec


une certaine notation. Au début, nous faisions de l’architecture sans notation mais elle
est apparue comme aide à l’étude de l’architecture, comme outil de composition. Il
est possible de construire sans aucune notation mais lorsque les processus de
construction ont commencé à nécessiter plus de préparation, l'idée de conception a
commencé à faire partie de ce processus et une méthode pour penser et exprimer
l’espace a été créée sous la forme de plans de composition par exemple. Cette
notation spatiale permet donc d’exprimer une information spatiale. Une transmission
d’information n’étant pas possible de manière directe, et difficile verbalement pour des
projets plus compliqués, la notation permet d’abréger et de codifier ces informations
par une combinaison d’unités, de symboles et de dessins, sous la forme de plans, de
coupes et de perspectives.

34
Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-
Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

29
Notre perception d’un espace est donc induite par la notation utilisée, à condition
de savoir lire un plan ou une coupe. Cette notation va-t-elle inversement avoir un
impact sur le moment de conception ? La notation est la description d’un objet
multidimensionnel en un format bidimensionnel, et c’est donc une représentation par
projection. Nous partons d’un espace 3D à un plan 2D, ou d’une scène 4D à un film
3D, si nous prenons le temps comme une dimension. L’utilisation de cette projection
vient d’un désir de manipuler ou de contrôler, un territoire via un plan, ou une vue via
une perspective35. C’est un point d’observation, focalisé ou infini qui permet de se
projeter en parallèle ou en perspective ; et plus ce point de vue est objectif, plus le
contrôle de l’objet en question est maximisé.

La difficulté surgit quand l'espace ne correspond plus à la notation, ou


inversement, la notation à l’espace. Il y a donc des limites de lecture et si un espace
ne peut pas être expliqué par une notation spatiale conventionnelle, il va être difficile
de le créer. Certaines œuvres ne peuvent donc pas être crées de façon
conventionnelle et ne peuvent donc pas être faites par un processus humain. Elles
nécessitent donc soit un processus naturel ou informatique. L’architecte utilise une
notation spatiale qu’il a apprise. Il en devient donc adepte et il l’emploi pour échanger,
décrire et créer. Il y a donc une traduction arbitraire dans la manière dont l’homme
perçoit son environnement et cela va influencer ses idées. Même si la notation
augmente notre pouvoir de contrôle en définissant notre environnement, si elle ne
permet pas de comprendre un objet spécifique, c’est qu’il n’est pas fait par l’homme.

Suivant cette logique, plus un objet est facile à dessiner et donc facile à lire et à
comprendre par le dessin, plus l’objet est facile à construire. Qui n’a jamais dessiné
un croquis pour représenter une idée ? Dans ce cas, l’idée dérive de la notation. La
notation est une aide puissante mais elle pose aussi des contraintes dans le processus
de conception. Si l’idée de l’architecte dérive de la notation, elle restreint sa conception

35
Voir Figure : Projections in Architecture, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-
No-Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

30
de l’espace. Des langages différents produisent des résultats différents. Le fait de
changer de méthode de notation pourrait élargir notre conception de l’espace. Il est
même possible que le fait d’utiliser un nouveau concept de notation induit un nouveau
concept d’espace36.

Nous introduisons donc un nouveau point de vue. L’utilisation du paramétrique


peut nous permettre l’utilisation d’un point de vue multidimensionnel, voir même
omnidirectionnel, dépendant de la profondeur de la dimension. En tout cas nous avons
par ce biais des points de vue subjectifs qui prennent en compte tout le monde
extérieur. Ces multiples points de vue reflètent toutes ces relations qui sont liées entre
elles ; et doivent l’être afin de pouvoir se modifier mutuellement. Ce réseau de points
de vue est un réseau de notations qui s’imbriquent les unes avec les autres. Chaque
notation est liée à un certain point de vue, et le lien entre ces notations représente
intrinsèquement un élément du bâti. Un groupe de notations peut donc exprimer une
structure architecturale complète, créant un schéma de systèmes cohérents
caractéristiques des points de vue intentionnels correspondant aux éléments
architecturaux, et qui organisent les différentes liaisons associées.

Avec l'utilisation de processus contrôlés par ordinateur, la relation entre l'idée, la


notation sous forme de fichiers, et le processus de fabrication, sont plus étroitement
liés que jamais. Les capacités numériques dans chaque domaine d'activité du
bâtiment renforcent la communication entre différents acteurs tout en les redéfinissant.
En même temps, cette restructuration permet de surmonter la difficulté de passer d'un
processus autonome à un flux de travail collectif. Le paramétrage des informations
peut introduire des points d'observation multiples37 qui modifient profondément notre
façon de travailler ainsi que notre perception spatiale.

36
Voir Figure : Spatial Notation, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-Kenchiku,
éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).
37
Rémy Bourganel, Frédérique Pain, et Cléo Collomb, Algorithmes, (Paris, PUF, 2016).

31
Figure 7 : Projections in Architecture, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-
Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

32
Figure 8 : Spatial Notation, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-Kenchiku, éd.
par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

33
Evaluation

Si le système de règles peut être modifié, alors qui le décide ? D’où viennent les
besoins et les nécessités de redéfinir ces règles38 ? De plus, quels sont les niveaux
d’importance de chaque paramètre ? Certains peuvent définir des choses différentes,
impliquant des ordres contraires. Le mode de travail actuel est limité par le seul
moment d’observation de l’être humain qui peut changer de point de vue avec le
mouvement de cette observation dans un état relationnel.

L’évaluation de chaque nœud de ce système va induire une évaluation du système


qui définit cette structure. Nous pouvons voir cela comme une composition générative,
comme un essaim d’oiseau39, un nuage de points qui fait ce système. Chaque point
est relié précisément, par sa distance et sa direction, les uns avec les autres, par une
liaison immédiate. Si nous avons un obstacle ou une influence sur un point, tous les
points réagissent à cette influence, comme si chaque point du système ressent et
partage cette influence avec les autres. Il faut voir si une influence agit de la même
manière sur chaque point, si elle n’induit pas une séparation, un alignement ou une
cohésion de l’ensemble du système par rapport à l’importance de sa réaction à une
autre influence.

Une influence peut induire des réactions contraires ou similaires pour certains
points ce qui rend nécessaire un contrôle par agrégat. Nous devons donc comprendre
les conditions de groupement de ces points par types, ou par catégories, permettant
un référencement et un contrôle individuel de chaque point constituant le système et
déterminant son poids et son importance par rapport au système. Il va sans dire qu’un

38
Voir Figure : Shape Grammar Research, Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing
Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).
39
Craig W. Reynolds, Procedural Models, https://www.red3d.com/cwr/, (22 juillet 2017).

34
humain n’est pas capable de gérer cette quantité d’information. Une certaine
autonomie de décision est donc à laisser à l’ordinateur. Si un système devenait assez
intelligent, l’ordinateur pourrait contrôler lui-même le nombre de connexions et la
densité des points composant ce système40. Nous pouvons imaginer qu’une
Intelligence artificielle puisse de manière autonome créer ou dupliquer des points ce
qui amènerait à un conditionnement automatique du système.

La technologie permet par ce biais d’étendre la capacité humaine de conception.


En tout cas il y a au minimum un changement de la perception. Les technologies de
l’information changent les normes qui composent ces systèmes. Chaque opération a
une complexité numérique et génère des solutions composites avec des contraintes
multiples. Nous augmentons la perception humaine car nous gérons avec la
numérisation des perceptions que l’homme ne peut pas gérer, même si en faisant ce
pas, nous décentralisons le processus de composition. Chaque partage de ces points
d’information se fait sans plan fixé, c’est une forme partagée du contrôle par une
multitude de points autonomes créant des agrégats de points de vue multiples.

Ces points de vue intériorisés de chaque point par rapport à l’information qu’il
transporte offrent des degrés de libertés dans ce processus. En tout cas pour garantir
des décisions locales, chaque information doit être simplifié à travers son point. Une
abstraction des informations et des implications avec d’autres points permet de vérifier
sa propre importance et stabilité. Ce sont les conditions imposées qui doivent
déterminer si un point peut satisfaire la condition par lui-même, s’il doit se dupliquer,
ou s’il doit disparaître. Cette décision de rester, disparaître ou se dupliquer n’est-il pas
similaire au garder, supprimer ou ajouter une ligne sur un dessin ?

Nous devons aussi définir les conditions qui régissent les points entre eux. Il y a
des conditions structurelles, qui régissent combien de points sont connectés entre

40
Voir Figure : Interarcting Swarm, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-
Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

35
eux. Un manque de visibilité entre éléments et donc leur nombre induirait une
duplication des points constituant le système. Il y a aussi des conditions de
connexions41. Si un point est influencé par trop d’autres points il faut que certaines
conditions soit relâchée dans un souci de dispersion. Si le nombre de connexion est
trop grand, certaines doivent être effacées pour en réduire le nombre. Si la distance
de connexion, donc sa pondération, est trop courte, il s’agit aussi d’effacer certains
points pour garantir une distance minimum. Si un point peut évaluer la distance et la
direction d’un obstacle il doit choisir d’éviter ou de toucher cet obstacle.

Un système composé d’un nuage de point42 doit donc avoir la force et la liberté de
s’évaluer de manière autonome. Pour cela, les points composant ce système doivent
s’autoévaluer entre eux et par rapport à eux même. Si une influence extérieure ne peut
être prise en compte dans notre système, les points qui relaient cette influence sont
inutiles et ne doivent pas corrompre d’autres points. À l’inverse, si une influence est
plus importante, le nombre de points la relayant doit être plus important de même que
leurs connexions avec les autres points.

41
Voir Figure : Omnidirectional Viewpoints, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-
No-Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).
42
Rémy Bourganel, Frédérique Pain, et Cléo Collomb, Algorithmes, (Paris, PUF, 2016).

36
Figure 9 : Shape Grammar Research, Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing
Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).

37
Figure 10: Interarcting Swarm, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-Kenchiku,
éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

38
Figure 11 : Omnidirectional Viewpoints, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture = Chiri-No-Me, Chiri-No-
Kenchiku, éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

39
Condensation

Nous comprenons rapidement qu’un tel système est en constante évolution et qu’il
est très difficile de se rendre compte de la portée d’un point par rapport à un autre. Il
est essentiel d’implémenter des manières de voir et de montrer ce processus et de le
rendre intelligible à un observateur, tel un « roadmap43 » permettant d’expliquer les
étapes parcourues, donc de contrôler les différentes branches de ce système. De la
même manière que des plans ou des coupes permettent de contrôler un élément
tridimensionnel, il faut trouver une notation qui dérive de la manière de concevoir. Il est
plus difficile de représenter un système multidimensionnel qui est lui-même
représentatif de points multidimensionnels.

Il est plus facile en revanche de représenter un processus fini et il faut donc


chercher à représenter l’état dans lequel le processus s’arrête quand certaines
conditions sont remplies. Il faut pour cela définir l’objectif que nous voulons livrer, et à
partir de là, toutes les conditions doivent se « condenser »44 progressivement, de leurs
parties spécifiques vers une solution globale. Chaque point doit d’être configuré pour
permettre la génération d’un processus qui prend ces condensations en compte.
Comme c’est un système comportemental, il peut être trop complexe pour être
compris tel quel. Il faut pouvoir expliquer l’expérience liée à ce système, le modéliser
par exemple, pour que nous pouvons le percevoir et en piloter sa conception. Un
concept n’a de signification qu’à l’intérieur d’un langage logiquement cohérent, et ici,
le concept de l’espace doit englober la totalité du système architectural. Les points de

43
How To Build A Roadmap, Hub Designs Magazine, (consulté le 12 novembre 2018),
https://hubdesignsmagazine.com/2011/03/05/how-to-build-a-roadmap/.
44
Craig W. Reynolds, Procedural Models, https://www.red3d.com/cwr/, (22 juillet 2017).

40
vue de toutes les catégories d’éléments et de leurs relations sémantiques créent le
système.

« Un système architectural consiste en catégories coordonnées de tâches de la


construction qui sont liées à un style et à un système technique plus ou moins
limité au moyen de règles sémantique déterminées »45
Christian Norberg-Schulz

Imaginons un système nerveux architectural, par exemple une maison qui peut
contrôler des ouvertures en réponse à des conditions extérieures. Cela repose sur des
cellules « nerveuse » qui peuvent détecter et transmettre cette information à un
système de contrôle central. Nous devons voir ce qu’il se passe si nous appliquons la
même logique pour un système de conception architectural. Pour cela nous pourrions
concevoir un système basé sur un modèle « auto-phorétique », donc basé sur des
points qui transportent et traitent des informations que d’autres points ont détectées,
et chaque point doit être conçu pour répondre à ces informations multiples46.

En même temps nous devons concevoir un système qui permet de garder


l’intégrité de sa structure. Si les points composant le système ont trop de libertés,
nous réduisons la liberté du système complet. Certains points ont des influences
contraires, et il faut que dans un tel cas ils décident de leur propre pertinence par
rapport aux autres points. À la manière d’un muscle, les points doivent être capables
de se geler et de se relâcher individuellement pour que à certains moments ils puissent
être fixes, et donc stables, servant de points de repère pour d’autres points. Cela peut
servir de base pour un processus de vérification, des parties entre elles, mais aussi du
système entier, pour vérifier s’il remplit les conditions données47.

45
Christian Norberg-Schulz, Système logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1
(Liège : P. Mardaga, 1988).
46
Voir Figure : Multiple Viewpoints Network Altering Themselves, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture,
éd. par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).
47
Voir Figure : Mesh Networks Data Exchange, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture, éd. par
Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

41
Figure 12: Multiple Viewpoints Network Altering Themselves, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture, éd.
par Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

42
Figure 13 : Mesh Networks Data Exchange, Izumi Akiyama, Dust Eyes, Dust Architecture, éd. par
Daburunegativusu-Ākitekuchā, (Tokyo: INAX, 2011).

43
Intentions Paramétriques

Depuis l’utilisation des technologies numériques, nous observons une modification


dans la manière de travailler qui va dans le sens de l’utilisation de l’ordinateur en tant
qu’aide et support au processus de conception. Celle-ci s’effectue de manière plus
coopérative car l’architecte doit encore combiner son rôle créatif et intuitif avec la
puissance calculatoire de l’ordinateur de manière plus efficace et rationnelle. La
puissance de l’ordinateur permet de créer une grande variété de solutions par
itérations, analyses algorithmiques ou contrôle manuel. Cela permet d’essayer
plusieurs combinaisons et de les comparer, tout en prenant en compte une grande
quantité de données intrinsèques au projet. Il n’y a pas forcement de solution optimale,
ce qui rend l’ensemble des systèmes possibles infini, et seul un bon équilibre entre les
différents points du projet peut nous aider à trouver la solution qui convienne. Nous
allons donc par la suite essayer de simplifier les points qui composent notre système
architectural, d’abord de manière individuelle, puis dans les relations et les connexions
à travers le système. Ceci nous donne la possibilité de facilement comprendre
l’équilibre que nous essayons de créer dans notre architecture, tout en mettant en
lumière les limites auxquelles nous allons nous confronter. Il s’agit de créer des parties
plus petites dans notre modèle, qui représentent chaque facette du projet et qui se
focalisent sur une donnée. Cela nous permet de traiter chaque élément de manière
simple puis de les coordonner avec les autres éléments par catégories, en leur
donnant plus ou moins de poids selon leur importance. De cette manière, nous
obtenons dans notre modèle une structure plus synthétique. Il sera aussi plus facile
de procéder à des modifications à l’intérieur même du modèle sans devoir tout
modifier.

44
45
Les Besoins Humains

Dans la notion d’habiter, s’abriter n’est qu’une fraction des besoins humains. Il
n’est pas seulement question de se protéger du froid et de la faim, tout comme il n’est
pas seulement question de se loger. Le mot « maison » vient du latin mansionem ;
c’est le lieu où nous demeurons, une installation sur un sol donné. Le logement à
l’inverse désigne un campement ou un logis dans lequel nous nous établissons de
manière précaire. En allemand il existe deux termes pour qualifier la maison : le
« Haus », qui représente la réalité matérielle de la construction, et le « Heim » qui
introduit un caractère de l’intime48. Avoir un « chez-soi » est très différent du fait
d’occuper un logement. Le « chez soi » est une entité secrète, où les choses et les
êtres conservent une histoire qui leur est propre. Il est difficile de définir l’intime ; habiter
c’est d’abord être habité. Retrouver sa maison, son village ou sa région, c’est d’abord
se retrouver soi-même. Lorsque nous habitons un lieu, nous partageons avec d’autres
l’histoire de ce lieu. Nous devons comprendre l’essence de l’homme et donner sens
à ses comportements inconscient et à sa façon d’habiter. Les fondements de l’habiter
doivent induire les fondations du bâti qui appuient l’espace fondé par l’essence de
l’homme et les particularités de chacun. Tous habitent, mais différemment, de par
leurs pratiques et leurs conduites, et de par leurs besoins communs et individuels.

« On donne aux habitants un langage avec un vocabulaire approprié et, grâce au


soutien qu’on leur apporte, ils doivent eux-mêmes fabriquer leurs phrases propres
et en commun »49
Bernard Salignon

48
Voir Figure : Kratz Walter, La Cuisine, (1941), EPFL LAPIS – « Archives de l'imaginaire »,
archivesdelimaginaire.epfl.ch.
49
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ? p. 66, Collection Penser l’espace, (Paris : La Villette, 2010).

46
Nous nous devons de questionner l’individu, afin de comprendre le paramètre
humain dans l’utilisation de l’espace. D’où la question du besoin. Est-ce l’homme qui
a besoin de l’espace ou l’espace qui a besoin de l’homme pour se créer ? Les besoins
primaires de l’homme dans un espace de vie sont variés, tout en étant lié par un besoin
de protection. Ces besoins sont variables selon les conditions de vie de l’habitant, et
du monde extérieur duquel il se protège. Il va par exemple avoir besoin de se réchauffer
ou de se rafraichir. Auquel cas est-ce l’espace qui doit le réchauffer ou le refroidir ? Ou
est-ce lui qui contrôle la température de l’espace ? L’espace se définit à partir des
besoins de l’homme50. Il doit y avoir une correspondance entre la forme et la fonction,
entre le contenant et le contenu. La construction doit refléter les conditions sociales et
culturelles de ses habitants, car c’est l’homme qui adopte sa propre sphère habitable
et nous devons déterminer les conditions à remplir pour aboutir à ce résultat. Nous
devons ainsi déterminer les habitudes et l’histoire des habitants pour comprendre la
manière dont nous devons construire. Il est évidement difficile de conditionner système
pour prendre en compte le paramètre humain, mais à l’inverse un système
architectural est conditionnel dans la manière de vivre de ses habitants. Il s’agit de
comprendre fondamentalement l’habitant pour que le système reflète au mieux ses
habitudes, et le cas échéant, lui permettre de s’adapter le plus facilement possible à
son habitat.

50
Voir Figure : Pierre d'Avoine, Projet Crouches Field, (2015).

47
Figure 14 : Kratz Walter, La Cuisine, (1941), EPFL LAPIS – « Archives de l'imaginaire »,
archivesdelimaginaire.epfl.ch.

48
Figure 15 : Pierre d'Avoine, Projet Crouches Field, (2015).

49
Les Relations Entre L’Homme et L’Espace

Il y a une relation entre l’habitant et l’habitat, créée par le tissu qui existe entre
l’homme et l’histoire qu’il se crée à l’intérieur. Ces événements et ces hommes qui font
notre histoire, font et se confondent avec l’histoire de l’habitat. Avant d’être un endroit
ou un lieu, l’habitat est un point commun de cette histoire avec d’autres.
Réciproquement, l’habitat doit refléter cette histoire commune. Il doit aussi donner à
chacun la possibilité d’y ajouter un morceau de sa propre histoire. Cependant, aucun
partage n’est possible si l’homme ne peut être accueilli lors de son installation en ces
lieux, dans des conditions qui lui permettent de s’approprier un endroit. Se
l’approprier, pas forcément financièrement, mais plutôt dans la manière dont l’homme
en fait son objet symbolique et son ancrage, et comment l’habitat permet l’installation
de l’homme dans un espace et un temps. Ce lien, issu d’une dynamique sociale liée
à son temps et à son espace, doit être réévalué pour en comprendre les
caractéristiques implicites et son essence51. Il y a une sorte d’universalité dans la
manière unique et diversifiée que l’homme a de trouver son ancrage et sa singularité
dans l’habitat. Sans cela il n’habite pas, il transite de manière précaire. Il y a deux types
d’ancrage qui permettent d’habiter : historique, donc plutôt de l’ordre du culturel, du
symbolique et du poétique, et quotidien, donc de l’ordre de la pratique, de l’imaginaire
et du fluctuant. L’être et la demeure sont liés car l’habitat est le cadre de l’être.

« L’habitat obéit implicitement et explicitement à des lois, à des modes de vie, à


des pratiques […] » 52
Bernard Salignon

51
Voir Figure : Analysis of Interior Spaces, Jay Thakkar et Skye Morrison, Matra : Ways of Measuring Vernacular
Built Forms of Himachal Pradesh, (2008).
52
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ? p. 11, Collection Penser l’espace (Paris : La Villette, 2010).

50
Les relations entre l’habitant et l’espace habité peuvent créer des conditions qui
peuvent refléter les interactions sociales qui ont lieu dans un espace donné. Ces
données d’utilisateurs peuvent créer des données qui pourrait servir à déterminer un
enchainement, une manière de vivre et une utilisation optimisée de l’espace pour ces
habitants. Le Feng-shui53, par exemple est basé sur un ensemble de conditions à
remplir dans l’agencement des différents éléments qui constituent l’espace afin de
garantir le bien-être54 des personnes utilisant cet espace. Il se peut aussi que l’étude
de formes vernaculaires nous aident à dégager des règles toujours valables
aujourd’hui55. La culture du bâti est une forme historiquement liée à une certaine façon
de vivre dans un certain environnement donné. Avoir des paramètres basés sur une
façon de réagir à des forces extérieures depuis l’intérieur, nous montre la manière qu’a
l’homme d’arranger son espace pour répondre à des exigences sociales et des
contraintes locales.

La perception de l’espace habité se base sur des schémas opérationnels et ce


sont ces schémas opérationnels qui donnent les règles sémantiques régissant les
relations entre la symbolique d’un lieu et la réalité qu’elle désigne. Sa communication
doit donc être basés sur un système structurés de ces symboles. Il est certain que la
relation entre l’habitant et l’espace habité n’est pas directement lisible mais l’étude des
manières de construire locale, voir vernaculaire56, peut nous aider à comprendre
certains éléments pertinents à l’élaborations d’un projet. Reprendre ces éléments et
leurs symboliques et les conditionner peut s’avérer important dans l’amélioration ou la
création d’un lieu de vie, qui peut, tout en s’améliorant, garder une empreinte sensible
d’une façon de vivre à travers l’espace.

53
Lillian Too, L’Encyclopédie du Feng Shui (Könemann, 2001).
54
Gina Lazenby, La maison du bien-être (Paris : Flammarion, 2001).
55
Voir Figure : Social use of Space, Jay Thakkar et Skye Morrison, Matra : Ways of Measuring Vernacular Built
Forms of Himachal Pradesh, (2008).
56
Philip Yuan, Parametric Regionalism, dans Block et Bhooshan, Parametricism 2.0: Rethinking Achitecture’s
Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design Profile, no 240, (London: John
Wiley & Sons, 2016).

51
Figure 16 : Analysis of Interior Spaces, Jay Thakkar et Skye Morrison, Matra : Ways of Measuring Vernacular
Built Forms of Himachal Pradesh, (2008).

52
Figure 17 : Social use of Space, Jay Thakkar et Skye Morrison, Matra : Ways of Measuring Vernacular Built
Forms of Himachal Pradesh, (2008).

53
L’Habitude Comme Vecteur

« Habiter c’est être le lieu des effets du vécu tout autant que la cause57»

Gina Lazenby

Une maison peut être considérée comme un « équipement », et afin de le définir,


nous devons considérer ses caractéristiques et sa généalogie. Nous y retrouvons
certaines habitudes « organiques » inhérentes à tout être humain, liées aux espaces
qui servent à manger, dormir, se laver, etc. En revanche, la mise en action de ces
besoins est individuelle et certaines habitudes domestiques sont spécifiques à chaque
être humain. Ces habitudes nécessitent donc une certaine liberté dans l’architecture.
L’intérieur est le lieu du rapport physique et immédiat avec l’architecture, et de ce fait
il crée cette sphère domestique impliquant une dimension quotidienne. Cette
expérience intérieure propre au « chez soi 58» est vécue par chaque habitant.

Les pièces, les portes, les murs et les fenêtres encadrent nos pratiques
quotidiennes, et font de l’intériorité de l’habitat un univers spatial, avec leur
significations complexes dans la domesticité résultante qui ne sont pas uniquement
de l’ordre du programme fonctionnel. Nous voulons expérimenter l’habitat par
l’intérieur, par sa matérialité et son atmosphère, par le filtre de la manière de vivre de
ses habitants et en se focalisant sur les assemblages de ces fonctions et leurs
capacités d’adaptation59. De plus nous devons poser la question de l’identification de
l’habitant à ces espaces à travers l’étude de ses habitudes. Mais la pratique
domestique devrait-elle être anticipée ou induite ?

57
Gina Lazenby, La maison du bien-être, p. 20 (Paris : Flammarion, 2001).
58
Gaston Bachelard, La poétique de l’espace (Paris : PUF, 2008).
59
Christophe Joud, éd., À l’intérieur : les espaces domestiques du logement collectif Suisse, Cahier de théorie
13 (Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 2016).

54
Nous pouvons trouver dans chaque habitat un trajet séquentiel entre l’extérieur et
les différents intérieurs du logement. Pas forcément dans le même ordre60 selon la
topologie de l’habitat, ce trajet comporte divers éléments qui font cet habitat, tel que
l’entrée, le foyer, le couloir, les portes, les fenêtres intérieures et extérieures, un balcon
une loggia, etc. Les dispositifs de transitions utilisées par les habitants à travers les
pratiques domestiques, sont conditionnés par les ouvertures, dans la mise en relation
des espaces, et sur leurs incidences dans la hiérarchie des passages. De même les
relations avec l’extérieur de chaque espace vont engendrer des attitudes différentes,
de protection ou de représentation, par rapport à leurs degrés d’intimité.

Nous projetons nous même nos propres habitudes dans un espace. Nous
inscrivons dans tout espace des pratiques banales mais représentatives de notre
quotidien ; par exemple dans la manière dont nous posons nos clefs et nous enlevons
nos chaussures dans un hall ou un vestibule. Cet espace est plus que de la
distribution. Il est ce centre autour duquel le reste est regroupé ; il est distributif dans
son contrôle de l’intimité, même si de nos jours il est plus souvent couplé à la salle à
manger, la cuisine et le salon. Il montre un lien avec les habitudes rurales d’avoir tous
les éléments qui font partie de la vie commune dans une pièce centrale qui regroupe
les activités domestiques61.

Bien entendu il existe une multiplicité de dispositifs qui placent l’entrée par rapport
à d’autres espaces, et qui peuvent appliquer ou au contraire remettre en cause les
séquences traditionnelles du parcours d’accès. Le hall, est un espace de distribution,
ce qui en soit est un parti pris, car il en résulte aussi d’une perte d’espace. En essayant
d’optimiser et donc de minimiser l’espace de distribution, nous essayons de relier les
chambres aux espaces de vie, ce qui résulte en une perte de leur intimité. À l’inverse
si nous choisissons une répartition de ces espaces intimes à partir d’un espace de

60
Georges Perec, Espèces d’espaces, Nouv. éd. rev. et corrigée, Collection l’espace critique (Paris: Éd. Galilée,
2010).
61
Voir Figure : Duplex Architekten, Concours Hohlweg, (Rapperswill, 2010).

55
distribution, nous permettons une plus grande flexibilité dans l’usage de ces espaces.
Il permet aussi sous une forme fragmentée une meilleure distinction entre les espaces
nuits et jours. C’est un espace dédié au mouvement et ces espaces dynamiques nous
aident à envisager l’habitat sous l’angle du mouvement car ils déterminent la manière
dont nous nous déplaçons.

« Les usages quotidiens sont issus de la répétition, influant la signification de la


forme. »62
Bruno Taut

Nous pouvons parler de parcours dans l’habitat, mais cela suggère quelque chose
d’orienté. Nous allons donc plutôt utiliser le terme de « promenade » utilisé par Le
Corbusier, qui sous-entend une part d’aléatoire dans le déplacement. Il y a une
continuité dans le déplacement, une mise en perspective progressive de la séquence
des espaces. Le couloir n’a pas besoin de se manifester physiquement, se confondant
avec les pièces qu’il traverse. Il n’a pas non plus besoin être linéaire, ni orienté,
permettant ainsi de varier la hiérarchisation des espaces, pour un parcours différentié
et fluide63.

L’espace de distribution permet une progression dans l’intimité de l’appartements,


par gradations successives. S’il se trouve intégré dans le caractère spatial de
l’ensemble et dans le système de pièces, il peut se placer de manière presque
organique, ce qui peut induire des formes spatiales complexes, liées à l’agencement
des pièces. L’espace qui fait centralité de l’habitat permet de s’identifier à l’intimité et
à la stabilité de cet habitat, et les cheminements qui représentent les usages quotidiens
font ressortir cette forme de centralité. C’est à partir de cette centralité que se
développent les degrés d’intimité, rendant le collectif possible tout en gardant
l’individualité. Jaques Lin, éducateur pour enfant, a ainsi tracé les chemins empruntés
par les enfants malades qu’il accueillait chez lui, basé sur leur parcours quotidien, a

62
Grit Tuchscheerer et Bruno Taut, Die neue Wohnung, die Frau als Schöpferin, (Leipzig 1928) : Studienarbeit
(München : Grin-Verl, 2003).
63
Voir Figure : Edelaar Mosayebi Inderbizn Architekten, Wohnbauten Steinwies-/Irisstrasse, (Zurich, 2015).

56
raison d’un calque par jour. À travers ce tracé du quotidien, nous pouvons voir les
cartes et les lignes d’erre qui montrent la manière de percevoir l’espace commun à
travers non pas seulement un langage, mais au travers des éléments mis en scène
pour transcrire une expérience de l’espace sur papier64. Les manières de se mouvoir
et d’utiliser un espace, obéissent à des règles conditionnées par la forme. Il s’agit donc
de comprendre ces flux pour les optimiser par rapport aux habitudes des habitants et
de cette manière les rendre conditionnels.

« En fait, nous sommes à la recherche d’une sorte de « vérité de l’usage » que


nous pressentons intuitivement dans le voisinage de la fonctionnalité et de la
consommation mais qui nous interpelle pour aussi à l’antipode complet de ces
représentations de la valeur. Ce n’est donc pas tellement l’optimisation des modes
d’utilisation du bâti qui retient notre attention que le processus de dépôt et de
sédimentation des significations dans les formes tel qu’il résulte de la répétition
inlassable des usages quotidiens »65
Marcel Meili

64
Voir Figure : tracés par Jacques Lin, deux calques de fond tracés par Gisèle Durand, 15ème calque sur 24,
Graniers, 1er septembre 1977 - 31 janvier 1978, dans Sandra Aévarez de Toledo, Cartes et dignes d’erre,
traces du réseau de Fernand Deligny de 1969-1979, (L’Arachnéen, Avril 2013).
65
Peter Disch et Martin Steinmann, éd., Architektur in der deutschen Schweiz 1980-1990 : L’architecture
récente en Suisse alémanique : ein Katalog und Architekturführer, p. 64, 2. Aufl (Lugano : ADV Advertising
Company & Publishing House, 1991).

57
Figure 18 : Duplex Architekten, Concours Hohlweg, (Rapperswill, 2010).

58
Figure 19 : Edelaar Mosayebi Inderbizn Architekten, Wohnbauten Steinwies-/Irisstrasse, (Zurich, 2015).

59
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Figure 20 : tracés par Jacques Lin, deux calques de fond tracés par Gisèle Durand, 15ème calque sur 24,
Graniers, 1er septembre 1977 - 31 janvier 1978, dans Sandra Aévarez de Toledo, Cartes et dignes d’erre,
traces du réseau de Fernand Deligny de 1969-1979, (L’Arachnéen, Avril 2013).

60
Les Topologies Du Contrôle Social

Entre le site du bâtiment et l’intime du logement, nous pouvons envisager une


dialectique entre l’ombre et la lumière, entre le seuil et les transitions et entre le dedans
et le dehors, ce qui définit un sens profond du rapport de l’homme à son espace
habité. Une région est un espace « régi » par des lois, des coutumes ou des habitudes
issues de l’histoire communes des habitants66. Celles-ci donnent une âme au site, un
cadre définit par les règles implicites entres les habitants, intériorisées par sa politique
dans l’espace de vie. Il faut donc faire de ces espaces habités l’expression naturelle
de l’âme de sa communauté67. L’essentiel des pratiques dans l’espace social se fait
dès la conception du projet, déterminant les conditions dans lesquelles le
développement des individus doit-être soutenu par le corps social, et ainsi, contribuer
au développement de la société.

Est-t-il possible de créer une topologie sociale ? Les processus paramétriques


peuvent nous aider à définir les besoins et élargir la carte mentale de l’habitant pour le
connecter à l'espace, au bâtiment et donc à l’architecture. Une géométrie
architecturale complexe se fait généralement au détriment de l’efficacité des structures
et de la construction. Elle n’est pas convaincante si elle ne tient pas compte du rôle
important des facteurs locaux, culturels et socio-économiques68. La complexité, si elle
s'accompagne d'un mépris des flux matériels ou des ressources financières, est
contre-productive. L'utilisation appropriée de matériaux ou d'autres limitations locales

66
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ? p. 11, Collection Penser l’espace (Paris : La Villette, 2010).
67
Jay Thakkar et Skye Morrison, Matra : Ways of Measuring Vernacular Built Forms of Himachal Pradesh, 2008.
68
Voir Figure : The différent dimension of the building cycle, Paolo Tombesi, What do we mean by building
design ? dans Scott Marble, éd., Digital workflows in architecture : designing design, designing assembly.
Designing industry, (Basel: Birkhäuser, 2012).

61
doit rester au cœur du processus de conception, ce qui implique que l'architecture
doit répondre à ces paramètres techniques tout en visant une élégance de la forme.

« Il faut retracer la frontière entre extérieur et intérieur, privé et public, local et global,
sédentaire et nomade. […] car nous pouvons observer aujourd’hui le brouillage
des notions de privé, d’intimité - et d’extimité dans nos sociétés69 »
Georges Teyssot

L’utilisation de modèles généralisés de processus domestiques peut introduire


dans les espaces sélectionnés des fonctions spécifiques et des processus
d’interactions dans leur modélisation70. Ceci permet l’élaboration de chaque espace
par rapport à sa fonctionnalité sociale. La fonctionnalité sociale de l’architecture réside
surtout dans sa capacité à reproduire l’organisation sociale en ordonnant les
processus sociaux par la séparation ou la connexion, et en construisant une sorte de
machine à habiter71. Nous créons ainsi des scénarios d’interactions qui dépendent de
la manière dont les habitants évoluent et s’orientent dans l’habitation. Les interactions
sociales sont conditionnées par des attentes mutuelles entre les habitants. C’est une
question de réaction à une action donnée. Une situation spatialement définie permet
aux habitants de comprendre et de s’accorder sur les actions demandées qui vont
déterminer les interactions sociales qui vont avoir lieu. Nous créons ainsi un cadre
commun qui valorise ces interactions. C’est uniquement quand les fonctions de ces
cadres deviennent différentiées qu’il faut considérer les formes et les distributions
topologiques spatiales. Ces interactions sont en général associées à une forme
physique dans un lieu ou dans un espace. Dépendant du type d’interaction que nous
souhaitons induire dans un endroit, elle peut conditionner une forme particulière.

69
Georges Teyssot, Une topologie du quotidien, p. 13, 1 éd. (PPUR, 2016).
re

70
Patrick Schumacher, Advancing social fonctionoality via agent-based parametric semiology, dans Block et
Bhooshan, Parametricism 2.0: Rethinking Achitecture’s Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik
Schumacher, Architectural Design Profile, no 240, (London: John Wiley & Sons, 2016).
71
Voir Figure : Machine à habiter, Carl Bergsten, MS Kungsholm snitt, (1927).

62
program spatial
goals design /visual
design
design
stakeholders performance
design design

building building
opportunity scope
resources specifications
generation formulation
design design

materials
procurement
/systems
design
design

project
operations building tectonics
design
definition and building manufacturing design
control

coalition fabrication
design design

building use
change building testing
and
design erection design
maintenance

maintenance use site assembly


design design design design

Figure 21 : The différent dimension of the building cycle, Paolo Tombesi, What do we mean by building design
? dans Scott Marble, éd., Digital workflows in architecture : designing design, designing assembly. designing
industry, (Basel: Birkhäuser, 2012).

63
Figure 22 : Machine à habiter, Carl Bergsten, MS Kungsholm snitt, (1927), EPFL LAPIS - Archives de
l'imaginaire », archivesdelimaginaire.epfl.ch.

64
Les Systèmes Interactifs

Lorsque nous intégrons dans le programme d’un projet la recherche


pluridisciplinaire nécessaire à son élaboration, chaque acteur a les mêmes objectifs
mais un projet propre en fonction de ses champs d’intervention. Leur regroupement
autour du projet introduit une multitude de dimensions qui ne peut se résoudre que
par la rencontre entre chacun de ces acteurs. Mais l'architecture en elle-même peut-
elle être une écologie de système en interaction72 ? Nous devons créer un
environnement spatial adaptatif, émotif et comportemental qui tente de construire des
scénarios d’interactions, en forgeant des échanges intimes avec l’habitant en tant que
relation évolutive à travers la participation73. Il s'agit d'une évolution vers une
architecture intelligente ou même un apprentissage automatique, car nous devons
également prendre en compte les interactions entre machines. L’architecture est ainsi
un cadre ouvert, qui stimule la participation.

« L’intelligence dépend de l’interface de nos interactions. »74


Ranulph Glanville.

L’environnement numérique doit pouvoir être partagé et être relationnel. Des


études comportementales peuvent générer de la donnée en continue et en temps réel,
forçant des adaptations et des réactions de différentes installations ou d’architectures
animées. Nous devons considérer un système pouvant avoir des relations avec ses
utilisateurs. Des pratiques simples consistent, par exemple, en un contrôle automatisé
des stores selon les préférences définies par l’utilisateur. Cette adaptation automatisée
peut être prise en compte dans les conditions d’utilisation spatiale. Si nous concevons

72
Arturo Tedeschi et Fulvio Wirz, AAD - Algorithms-Aided Design, (Brienza : Le Penseur, 2014).
73
Voir Figure : Interactive "Living" Wall, Lotus Dome, Studio Roosegaarde, (Lille, 2010-2011).
74
Ranulph Glanville, An Intelligent Architecture, p. 2, Convergence 7, no 2 (1 juin 2001).

65
l’architecture comme un environnement de systèmes en interactions, nous pouvons
créer des environnements spatiaux adaptifs, émotionnels et comportementaux qui
peuvent construire des scénarios interactifs et participatifs entre l’utilisateur et l’espace
par le biais d’interfaces spatiales.

C’est le concept des Smart-Homes75 qui utilisent les communications, homme-


machine et machine-machine à travers la domotique76. L’architecture proposée est
active, anticipative et adaptive à travers des échanges numériques constants et en
temps réel basés sur les comportements de l’habitant. Ces conditionnements,
l’apprentissage automatique et les bâtiments collectifs, nous offrent des nouvelles
conceptions architecturales qui vont au-delà de la simple production et réalisation
formelle. La smart architecture77 est un modèle adaptatif qui évolue avec l’hommes et
avec ces échanges avec des programmes numériques. Ces systèmes intégrés dans
l’habitat s’adaptent en fonctions des besoins des habitants. Ainsi, en intégrant un
système numérique dans un système paramétrique nous offrons encore plus de
libertés dans l’utilisation de l’espace habité.

75
The Future of the Smart Home, (consulté le 1 janvier 2019), https://www.predictingourfuture.com/smart-
home/.
76
Voir Figure : The Evolution of Smart-Homes, DES – Digital Enterprise Show, 2019), https://www.des-
madrid.com/evolution-smart-homes/.
77
Smart Architecture, consulté le (26 décembre 2018), http://www.smart-arch.com/.

66
Figure 23 : Interactive "Living" Wall, Lotus Dome, Studio Roosegaarde, (Lille, 2010-2011).

67
Figure 24: The Evolution of Smart-Homes, DES – Digital Enterprise Show, (2019), https://www.des-
madrid.com/evolution-smart-homes/

68
Conditions Individuelles

Dans la confrontation entre l’homme et l’espace, nous trouvons deux types


d’interactions. Le premier vient du fait que l’homme est conditionné par l’espace dans
lequel il évolue. L’habitant donne à l’architecte le pouvoir de conditionner l’espace
dans lequel il va vivre et c’est donc d’analyser l’habitant pour que l’espace lui
correspondent au mieux. Le rôle de l’architecte est de faire le pont entre ses
observations et l’habitat qu’il souhaite créer, et l’habitant est conditionnel uniquement
si l’architecte réussi à le représenter. Le deuxième type d’interaction vient du fait que
l’habitant, si le cadre lui convient, s’approprie l’espace. Ce faisant, en plaçant ses
meubles ou en agrandissant sa cuisine, il conditionne lui-même son lieu de vie pour
qu’il corresponde à ses besoins. Mais cette appropriation spatiale reste conditionnée
par la liberté que lui laisse l’architecte à effectuer ces changements.

La perception spatiale est en partie conditionné par l’intuition et la subjectivité de


l’architecte et des habitants, et il peut être difficile d’expliquer de manière rationnelle
les critères qui la définissent. Dans certains espaces, les problèmes deviennent
apparents qu’après la production car ils doivent être vécus pour être décrits. La seule
manière de contourner ces problèmes est d’utiliser des solutions standardisées78 ou
de tester des solutions variées jusqu'à ce qu’elles conviennent. À ceci s’ajoute une
part d’indécision dans le modèle paramétrique. Le besoin de rationalisation dans le
processus peut nous mener vers une complexité qui n’est pas nécessaire, et il est
donc nécessaire d’inclure dès le début de la conception les règles de l’habitude et de
souligner la présence d’un contexte social déjà établi.

78
Ernst Neufert, Peter Neufert, et Johannes Kister, Architects’ Data, 4th ed (Chichester, West Sussex, UK ;
Ames, Iowa : Wiley-Blackwell, 2012).

69
70
La Forme De L’Espace

Comment pouvons-nous définir l'espace dans une intention architecturale ? Est-il


possible de rationaliser le processus ? Pour définir une forme qui satisfasse à des
conditions ou des paramètres, il faut commencer par redéfinir le concept de l’espace
et de sa perception psychologique79. Une forme est déterminée par un squelette, fait
de lignes et de points, plus que par un contour. Pour appréhender une forme, nous
nous basons simultanément sur sa direction, ses dimensions et sa distance par
rapport à nous. Bien entendu, différents matériaux offrent différentes possibilités
formelles. Mais si nous considérons la forme en tant que structure, nous comprenons
que la forme architecturale est un ensemble qui réunit plusieurs facteurs différents,
dont les éléments et les relations, qui déterminent la totalité formelle, ainsi que leurs
contenus, et par là les relations entre les formes et les contenus. Un élément est une
unité caractéristique qui appartient à une forme architecturale80. Il est toujours possible
de décomposer un élément en plusieurs éléments et leurs relations subordonnés, ou
à l’inverse d’unifier des éléments et leurs relations dans des éléments supérieurs.

Il est important de classer les éléments architecturaux en trois catégories


formelles : la masse, l’espace et la surface. La masse est définie par la représentation
d’un élément en trois dimensions. L’espace représente un volume défini par les
surfaces délimitantes des masses environnantes ; et la surface représente la limite de
la masse ou de l’espace. La masse est déterminée par les séparations latérales, plus
que par les limitations supérieures et inférieurs. L’espace est aussi défini par les murs
certes, mais contrairement à la masse, surtout par le sol et le plafond. Les surfaces

79
Georges Teyssot, Une topologie du quotidien, 1re éd. (PPUR, 2016).
80
Christian Norberg-Schulz, Système logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1
(Liège : P. Mardaga, 1988).

71
ainsi créées jouent des rôles différenciés dans la formation architecturale. Par exemple,
le sol a souvent un caractère unifiant, qui aide à définir la forme de l’espace tout en
servant d’appuis pour les éléments de masse. Les murs ou le plafond sont plus libres :
le plafond est déterminé par des éléments techniques, plus fixes et distants, et les
murs s’adaptent aux situations données par les fonctions dont ils sont le cadre.81
L’espace et la masse sont donc déterminés par leurs formes topologiques et
géométriques, ainsi que par la disposition des ouvertures et le traitement des surfaces
délimitantes.82 Ils permettent donc des relations formelles qui sont une manière de
distribuer les éléments spatialement.

« Trente rayons convergent vers un seul moyeu ;


C'est sur le trou au centre que dépend la fonction de l'essieu.
Nous fabriquons un vase à partir d'un morceau d'argile ;
C'est l'espace vide à l'intérieur du navire qui le rend utile
Nous fabriquons des portes et des fenêtres pour une pièce ;
Mais ce sont ces espaces vides qui rendent la pièce habitable
Ainsi, alors que le tangible a des avantages ;
C'est l'immatériel qui le rend utile »83
Lao Tzu (550 A.C)

De cette structure spatio-formelle créée par l’espace, la masse et la surface, nous


pouvons ensuite reprendre le concept spatial pour en tirer une forme. La forme n’est
donc pas seulement géométrique car elle doit s’adapter constamment à un contexte
plus vaste. Elle peut exister par elle-même, par un processus progressif qui incorpore
des dimensions multiples. Ils peuvent être de nature géométrique mais aussi définis
par une structure intérieure, par une organisation fonctionnelle, par les matériaux dans
de leur tectonique et leur réalité tactile, par la lumière naturelle ou artificielle, et par
toute autre expérience sensorielle et temporelle. L’espace est le médium de la

81
Voir Figure : Cellules d'espace. Fermeture, murs directeurs et ouvertures, dans Christian Norberg-Schulz,
Système logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).
82
Voir Figure : La cellule d'espace en tant que fonction des ouvertures, dans Christian Norberg-Schulz, Système
logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).
83
Cornelis van de Ven, Space in architecture: the evolution of a new idea in the theory and history of the modern
movements, p. 3, Van Gorcum, (Assen/Maastricht, The Netherlands ; Wolfeboro, N.H., U.S.A , 1987).

72
formation d’images tactiles et visuelles qui augmentent la psychologie perceptuelle de
l’homme. Il est l’expression artistique la plus matériel possible tout en donnant un sens
immatériel au concept du style.

En parlant de la forme de l’espace nous questionnons la proportion et la géométrie


immatérielle de l’espace. La notion de l’espace est compliquée à cerner et plusieurs
architectes se sont essayés à l’exercice. Le Corbusier a établi ses principes clés de la
création de l’espace en abordant d’abord la notion de la masse, et de ses jeux, révélés
par la lumière. Puis par la surface il insiste sur la propreté, ou la simplicité, de la forme
en elle-même. Il introduit ensuite le concept du plan générateur de la forme qui contrôle
les relations entre la masse et l’espace. Ces relations sont ordonnées par des lignes
de réglages tridimensionnelles. Van Doesburg a plutôt supporté l’idée de la réalisation
plastique du concept de l’espace à travers le temps, expression de la continuité de
l’espace sur un plan. Lissitzky a mis en avant les tensions entre les éléments issus de
l’espace matériel et le vide. Dans ses enseignements au Bauhaus, Gropius a promu
l’architecture comme la formation de la matière selon une idée. En parallèle Moholy-
Nagy évoque l’espace comme la relation entre la position des masses de manière à
ce que l’intérieur est spatialement connecté à l’extérieur en tant que continuum spatial.
Finalement Wright nous parle de la destruction de la boite spatiale, par la continuité
des espaces, générateurs des mouvements conscients à travers les cellules spatiales
qui constituent l’habitat. Tous se rejoignent cependant sur le fait que l’espace est la
négation de la masse.

Une idée intéressante est celle de l’espace comme un endroit. Si nous reprenons
les concepts d’Einstein sur l’espace, donc le concept de l’espace en tant que lieu
identifiable par un nom, le concept de l’espace absolu, et le concept de l’espace relatif
en quatre dimensions, nous nous rendons compte que les trois concepts existent
simultanément dans n’importe quelle œuvre humaine. Phénoménologiquement84,

84
Jean-Hugues Barthélémy, La « révolution de l’espace » et l’architecture comme « réalisation de la
philosophie » dans Écumes de Sloterdijk, Appareil, no 11 (2 juillet 2013).

73
habiter est le point de jonction des divers besoins qu’il faut satisfaire. Nous
comprenons donc que l’espace doit permettre une multiplicité des usages de ses
habitants. Il n’y a pas de solution prédéterminée mais il faut permettre toutes les
combinaisons possibles. Si habiter ne remplit pas sa fonctionnalité, il peut en résulter
un sentiment d’exclusion. Ce n’est pas seulement une question technique au niveau
de la construction mais aussi d’esthétique et d’adéquation des articulations sociales
et techniques de l’espace. Habiter, c’est créer un espace dans l’espace et se
représenter dans son espace. L’espace offre des conditions de possibilités, créant
des ponts entre l’espace physique et l’espace psychique.

Il est difficile de définir l’espace. Les qualités que nous voulons lui donner sont très
subjectives. Comme vu plus haut, une forme est déterminée par son squelette, fait de
lignes et de points. La forme étant la négation de l’espace, pourquoi ne pas déterminer
l’espace de la même manière. Si nous voulons créer des éléments simples, il est
possible d’incorporer les points de contrôle qui règlent ces espaces dans un système
paramétrique. Nous introduisons ainsi une manière de conditionner l’espace, certes à
travers un prisme subjectif, mais en garantissant une certaine adaptabilité dans son
utilisation.

74
Figure 25 : Cellules d'espace. Fermeture, murs directeurs et ouvertures, dans Christian Norberg-Schulz,
Système logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).

75
Figure 26 : La cellule d'espace en tant que fonction des ouvertures, dans Christian Norberg-Schulz, Système
logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).

76
Les Relations Spatiales

L’habitant doit être rattaché à un système de relations, par le biais d’un système
spatial. Mais pourquoi lier ce qui doit être lié ? Un paramètre pourrait-il transcrire la
tension que nous pouvons introduire lors de cette liaison ? Les paramètres liés au
logement induisent une question d'ordre et d’importance des familles paramétriques,
et demandent un protocole spécifique à la manière d’un schéma conceptuel. Les
relations géométriques que nous essayons de poser sont plutôt une lecture biaisée
des relations spatiales. Les proportions des pièces, leur agencement et les
composantes industrielles liées au logement des années 1950’, fournissent, avec les
études rationalistes de Dioallevi et Marescotti ou avec les logements de Francfort de
Ernst May85, des exemples de recherches de données liées au logement.

L’organisation de l’espace physique intervient comme paramètre intentionnel dans


la concrétisation architecturale. Elle requiert l’analyse des relations entre les masses et
les espaces. Toutes les compositions architecturales impliquent une succession
continue d’éléments, dont les différentes variantes restent cependant ramifiées. À
partir d’une description stéréométrique des espaces et des volumes ainsi que de leur
caractère architectural nous pouvons prendre en compte toutes les possibilités de
groupement et de hiérarchie. La proximité des éléments détermine l’agencement et
l’organisation intérieure, par la distribution des éléments de masses et d’espaces et
des traitements des surfaces de séparations. Elle introduit des relations particulières,
comme des successions, des continuités, des répétitions, des contrastes, des
dominances, des interpénétrations ou des centralisations, et nous fournit également

85
Thomas Elsaesser, The Camera in the Kitchen : Grete Schütte-Lihotsky and Domestic Modernity, s. d.

77
des directions à suivre grâce à des éléments directeurs qui sont communs à plusieurs
éléments continus comme des lignes directrices ou des surfaces continues.

« Je découpe des ouvertures dans les murs quand j’en ai besoin pour la vue ou
l’éclairage »86
Mies van der Rohe

L’architecte essaie de diriger, par le mur et l’ouverture87, et nous essayons de lier


ces géométries entre elles pour faire sens. Il y a différentes manières de traiter les
relations spatiales à travers l’ouverture88. Un percement en hauteur permet de garder
de l’intimité en partie basse et d’obtenir un éclairage par le haut par exemple.
L’ouverture permet la modification de la hiérarchie spatiale, en rendant les limites plus
souples et en laissant apparaître de nouvelles connections spatiales. Nous pouvons
ainsi créer un intérieur plus poreux, plus transparent, doté d’une continuité spatiale,
qui met en relation les espaces de manière plus visuelle et sociale. Cela permet d’avoir
des pièces qui paraissent plus amples et généreuses par la pluralité des vues, en
utilisant la dimension psychique de la vue.

« S’il n’y a pas de transparence dans l’espace, si vous ne pouvez pas voir d’une
pièce à l’autre, alors il n’y a pas de sentiment de vie »89
Peter Märkli

La vue permet le contrôle du cadre domestique, et son cadre offre une


ornementation de la domesticité, tel un tableau dans lequel les habitants sont à la fois
acteurs et spectateurs. Elle permet l’articulation non pas seulement des espaces mais
aussi de la vie en communauté au quotidien. Tout en connectant les diverses parties
de l’habitat, la vue dissout les frontières internes du logement et reflète le quotidien.

86
Mies van der Rohe et al., « G : Materials for Elemental Form-Creation », 1923, p. 1, dans An Avant-Garde
Journal of Art, Architecture, Design, and Film, 1926, Gideon Fink Shapiro, (Getty Research Institue, 2010).
87
Voir Figure : Mies van der Rohe, Brick Country House, (Potsdam-Neubabelsberg, 1964).
88
Voir Figure : La cellule d'espace en tant que fonction des ouvertures, dans Christian Norberg-Schulz, Système
logique de l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).
89
Christophe Joud, éd., À l’intérieur : les espaces domestiques du logement collectif Suisse, Cahier de théorie
13, (Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 2016).

78
Les connexions causales induites, sont aussi le reflet des « connexions empiriques
causé par les relations sémantiques »90 qu’il y a entre la forme et le contenu. Tout
autant que la forme, le contenu surtout doit former un lien logique de passage et
d’utilisation.

Lors de l’étude d’un logement, il y a une question de l’ordre des choses et de leur
importance, que nous pourrions classer dans des familles paramétriques et utiliser
comme protocole. C’est un travail typologique91, mais avec un contrôle variable et une
personnalisation par rapport à un programme prédéfini92. Il faut, pour insérer les
conditions de ces connexions spatiales dans un système paramétrique, prédéterminer
l’ordre des pièces et donner l’écart possible des surfaces et des volumes que nous
leurs attribuons. Nous pouvons ainsi créer, par les possibilités d’expansion et de
contraction de chaque espace, une certaine flexibilité dans la relation entre les
différents espaces et les relations entre les étages.

90
Christian Norberg-Schulz, Système logique de l’architecture, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P.
Mardaga, 1988).
91
Voir Figure : Variation in typology, dans Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing
Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).
92
Voir Figure : Variation in program and matrix, dans Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational
Housing Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).

79
Figure 27 : Mies van der Rohe, Brick Country House, (Potsdam-Neubabelsberg, 1964).

80
Figure 28: Variation in typology, dans Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing
Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).

81
Figure 29 : Variation in program and matrix, dans Bryce R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational
Housing Typology, (Architecture Program, University of Nebraska, 2012).

82
Les Articulations Spatiales

Dès la conception il faut noter l’importance des espaces d’articulations,


déterminants dans l’appropriation du logement, que cela soit au niveau individuel ou
au niveau collectif. Comment peuvent-ils contribuer à confronter les espaces et à voir
les conditions qui déterminent des liens spatiaux de manière adaptative ? Les
articulations marquent des limites mais offrent également des passerelles entre
éléments. Cette position à la fois très claire et à la fois très flottante ne permet pas de
qualifier les articulations comme étant des limites précises, mais plutôt comme étant
des lignes adaptables et non figées sur lesquelles les éléments peuvent s’accrocher.
Ces articulations nous fournissent donc un canevas de cellules intérieures par les liens
qu’elles créent et nous devons donc construire un organigramme plutôt qu’un
programme afin d’en comprendre leur structure.

Plus généralement il y a plusieurs types d’articulations spatiales. Les « filtres »,


offrent une connexion indirecte entre deux espaces ; les « raccords » sont des
connexions physiques directes ; les « barrières » permettent de séparer différents
éléments ; et les « commutateurs » sont des raccords avec un rôle régulateur93. Elles
permettent de créer une structure fonctionnelle de l’habitat, qui peut ainsi s’analyser
avec un diagramme topologique représentant les lieux d’action et leurs connexions.
Par fonctions nous entendons toutes activités qui réclament un cadre architectural
approprié, chacun de ces lieux pouvant avoir différents niveaux d’importance. La
relation entre les éléments est plus importante que l’élément isolé, même si, du fait
qu’il appartienne au système, il doit absolument y jouer un rôle. C’est ces relations qui
permettent une structure formelle qui peut générer une infinité de combinaisons

93
Voir Figure : Analyse de contrôle physique et des fonctions, Christian Norberg-Schulz, Système logique de
l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).

83
différentes d’éléments et de relations. L’œuvre architectural doit être un système de
cohérence, et cette analyse induit sa concrétisation par les concepts qualitatifs de ces
ensembles formés par le mélange de plusieurs dimensions analytiques. Ces
ensembles sont caractérisants car ils résument les résultats, et facilitent la mise en
relation des ensembles du système total94.

Certaines de ces articulations se manifestent de manière physique. C’est le cas


d’une porte par exemple, dont il en existe une grande variété, et qui, en lien avec la
spécificité des espaces, sépare les usages, protège les pratiques intimes et assure
l’ordre domestique par les relations spatiale qu’elle gère. Les portes n’ont pas toutes
non plus les mêmes expressions par rapport aux fonctions de l’espace auxquelles
elles donnent accès. En effet, le besoin de fermeture n’est pas le même pour toutes
les pièces, et ce sont leurs ouvertures variées qui participent au bon déroulement de
la vie quotidienne, par leur fonction de communication entre les pièces et par leur
expérience visuelle.

« S’il y a une chose décrite par un plan architectural, c’est bien la nature des
relations humaines, puisque les éléments dont il enregistre les traces - murs,
portes, fenêtres et escaliers - servent à diviser d’abord puis à réunifier
sélectivement l’espace habité »95
Robin Evans

D’où la grande variation des systèmes de portes : coulissants, simples ou doubles,


et de leurs expressions, vitrés, opaques, ou avec imposte. Elles permettent d’enrichir
la spatialité des pièces et la hiérarchie du parcours à l’intérieur de l’habitat. Des tailles
de portes différentes au sein d’un même espace peuvent enrichir et montrer la
hiérarchie des espaces accolés en fonction de leur statut. Si nous faisons disparaître
le cadre d’une porte, nous observons une meilleure continuité spatiale de par la
continuité spatiale du sol et du plafond. Avec une séparation plus douce, avec une

94
Voir Figure : Steps showing computational translation of grammar or basic organization of home, dans Bryce
R. Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing Typology, (University of Nebraska, 2012).
95
Robin Evans, Figure, portes et passages, p. 23, Urbi n°5 (Liège : Mardaga, 1982).

84
double porte vitrée, ou translucide, nous permettons une appropriation plus souple de
l’espace. Un changement dans la position d’une porte induit une modification de la
dynamique du plan96. Une porte sert à séparer ce qui doit être séparé, c’est à dire les
différentes couches d’intimité. Une porte, qu’elle soit palière ou interne au logement,
sert d’interface au contrôle social de l’habitat.

Certains espaces ne sont pas articulés de manière physique, mais l’articulation


reste présente de manière visible, ou induite par la manière dont nous nous déplaçons
à travers ces espaces. Nous allons donc instaurer des règles qui donnent les
conditions d’articulations entres les fonctions de chaque espace. Il s’agit ainsi de
déterminer, à travers l’ordre spatial choisi, les manières dont chaque catégorie
d’espace s’articule avec les autres catégories, et d’intégrer ces règles dans un
système paramétrique.

96
Voir Figure : Steps showing parametric layers being added to grammar based organization, dans Bryce R.
Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing Typology, (University of Nebraska, 2012).

85
Figure 30 : Analyse de contrôle physique et des fonctions, Christian Norberg-Schulz, Système logique de
l’architecture, p. 253, 3e éd, Architecture + recherches 1 (Liège : P. Mardaga, 1988).

86
Figure 31 : Steps showing computational translation of grammar or basic organization of home, dans Bryce R.
Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing Typology, (University of Nebraska, 2012).

87
Figure 32: Steps showing parametric layers being added to grammar based organization, dans Bryce R. Willis,
Digital Morphogenesis : A Computational Housing Typology, (University of Nebraska, 2012).

88
Les Imbrications Opérationnelles

Commencer un projet par des opérations spatiales nous permet de traduire l’idée
conceptuelle et d’intégrer nos observations dans un langage spatial. Lorsque nous
parlons d’opérations97, nous parlons d’une action de conception à travers l’utilisation
de verbes spécifiques qui permettent de décrire une relation volumétrique, des
adjacences, voire même des facteurs liés à une expérience spatiale personnelle.
Géométriquement, nous créons des combinaisons ou des agrégations de volumes à
travers les études typologique et programmatique d’un ensemble architectural. Ces
verbes permettent une interprétation spatiale et architecturale en créant un langage de
conception spatiale. Dans les « verb list compilation » de Richard Serra nous
retrouvons une approche systématique dans la considération des caractères spatiaux.
Elles permettent de décrire l’essence de ces espaces crées par ces actions qui
établissent un rapport entre ces derniers et soi-même. Il met en place un système qui
catégorise les opérations volumétriques, de manière à rendre les actions
fondamentales de la formation spatiale procédurales. De nos jours, nous concevons
des enveloppes ou des plans avec des manipulations planaires qui suggèrent, à
travers les processus de génération de surfaces, les volumes associés98. Nous
configurons l’espace en manipulant des surfaces et cette formation spatiale issue des
dessins bidimensionnels créée des relations actives entre les zones définies99. Que se
passe-t-il si au contraire, la formation spatiale se fait directement par des manipulations
spatiales ou des interactions volumétriques ?

97
Voir Figure : Operations, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial Verbs
(Amsterdam : BIS Pub, 2012).
98
Steven Holl, Parallax (Basel, Boston, New York, Birkhäuser-Publishers for Architecture ; Princeton
Architectural Press, 2000).
99
Foreign Office Architects, Institute of Contemporary Arts, et Exhibition Foreign Office Architects, Phylogenesis
: FOA’s Ark (Barcelona : Actar, 2008).

89
Le processus génératif doit pour cela être basé sur un langage simple, permettant
des commandes simples. La pensée spatiale doit être décrite par des mouvements
ou une action, et ces verbes permettent un processus actif et fluide. Actif, car ils
doivent suivre l’évolution d’une configuration volumétrique changeante, tout en
permettant une variation flexible dans leurs spécifications. Cette relation entre les
commandes et les variations volumétriques peut être liée aux besoins spatiaux
programmatiques spécifiques requis. Le cadre de ces commandes doit être fournit
pour permettre cette flexibilité, car si nous multiplions les interprétations de chaque
verbe, la génération des relations spatiales induit une réflexion spatiale abstraite sur
les résultats des interactions volumétriques liées à ces espaces et leur expérience
spatiale.

Cette génération spatiale peut se complexifier par la combinaison des opérations.


La combinaison de plusieurs commandes génère des hybrides volumétriques. La mise
en forme d’une génération spatiale à partir de chaines d’opérations, qui dérivent des
combinaisons d’opérations entre les catégories, permet de mettre en liens ces
opérations et les verbes associés pour produire une quantité illimitée de combinaisons
et d’agrégations. Une combinaison100 des verbes « intersecter » et « diviser » ne donne
pas le même résultat que « diviser » et « intégrer ». Idem lors d’une agrégation101 de
verbes, comme « refléter », « empiler », « déployer », « joindre », « étendre » ou « dévier »
qui supportent ces chaines d’opérations. Nous pouvons étudier102 un projet en prenant
comme base ces verbes opérationnels, qui peuvent être lus comme des ensembles
d’opérations volumétrique. La « maison N » de Sou Fujimoto103, implémente le verbe
« nicher » en plan et en coupe, et ce verbe incarne à la fois les relations

100
Voir Figure : Combination, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial
Verbs (Amsterdam : BIS Pub, 2012).
101
Voir Figure : Agregation, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial Verbs
(Amsterdam : BIS Pub, 2012).
102
Voir Figure : Implementations, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial
Verbs (Amsterdam : BIS Pub, 2012).

103
Voir Figure : Sou Fujimoto, House N, (Oita, Japon, 2008).

90
programmatiques et les relations entre l’extérieur et l’intérieur. C’est ce jeu
volumétrique qui a orchestré la création de ces grandes ouvertures. C’est une question
de flux spatiaux et de contraintes.

Nous essayons de trouver un cadre capable de mettre en évidence les différentes


conditions créées par les opérations volumétriques, comme un ensemble d’itérations
et de possibilités de conception. L’objectif est de passer de la surface aux volumes
afin d'explorer leurs interactions volumétriques et ainsi, de comprendre les espaces
habitables. En utilisant des opérations simples, nous pouvons conditionner les règles
génératrices de volumes et donc les implémenter dans un système de règles
paramétriques.

91
Figure 33 : Operations, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial Verbs
(Amsterdam : BIS Pub, 2012).

92
Figure 34 : Combination, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial Verbs
(Amsterdam : BIS Pub, 2012).

93
Figure 35 : Agregation, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial Verbs
(Amsterdam : BIS Pub, 2012).

94
Figure 36 : Implementations, dans Anthony Di Mari et Nora Yoo, Operative Design : A Catalogue of Spatial
Verbs (Amsterdam : BIS Pub, 2012).

95
Figure 37 : Sou Fujimoto, House N, (Oita, Japon, 2008).

96
Les Interactions Conditionnelles

Ce sont donc les opérations volumétriques qui permettent de créer le cadre de


conditions nécessaires pour les opérations plus complexes. Ce cadre nous offre de
nouvelles possibilités et permet la prise en compte de contraintes plus poussées que
pour l’élaboration de volumes abstraits. En ce sens, les conditions104 peuvent
s’exprimer par des ensembles d’équations dont la résolution se fait de façon itérative
par approximations successives. Pour dépasser les formes abstraites originales, nous
devons introduire un facteur d’échelle, tel que la circulation verticale, les ouvertures,
ou le site en lui-même. Cela nous donne la possibilité de relier l’espace construit à une
expérience personnelle, et de répondre au programme donné ou aux contraintes du
site. Il faut aussi résoudre les questions de connexions, entre chaque espace intérieur,
mais aussi entre ces espaces et le site, entre le dedans et le dehors. Afin de répondre
à cette variété de besoins, d’utilisations et de contraintes, l’application des conditions
correspondantes doit être itératives, ce qui montre la pluralité des chemins possibles
pour approcher un projet.

C’est en commençant par ce jeu spatial abstrait, et en continuant à chercher cet


équilibre conditionnel entre le programme et son site, que nous pouvons peut-être
élaborer des espaces intriguants, complexes et inspirants. En manipulant l’espace à
travers les opérations, des conditions spatiales variées peuvent émerger, qui nous
permettent de considérer plusieurs opportunités conditionnelles. Nous pouvons
considérer, par exemple, le fait de connecter un volume à un autre, d’ouvrir un volume
pour y introduire de la lumière ou pour y permettre l’entrée, de situer ces volumes en
relation avec le sol, ou de considérer comment l’ensemble de ces volumes manipulés

104
Voir Figure : Conditions, dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental Architecture
(Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

97
se rapportent et affectent les conditions du site. Lors d’une « imbrication » de volumes
nous créons une zone intérieure que se partagent ces volumes résultant de cette
opération. Cette zone peut servir de connexion, donc l’imbrication peut servir de
stratégie formelle pour monter cette même connexion. Un moment spatial voit le jour,
et induit des qualités spatiales internes. De même, « rogner », soit l’action d’enlever
des parties volumétriques, nous donne de nouvelles opportunités spatiales, pour créer
des ouvertures à partir de cette soustraction.

Ces approches systématiques nous permettent d’éviter un placement aléatoire de


ces éléments en les intégrant directement dans une méthode de conception liée aux
conditions données par le programme, l’ouverture et l’accessibilité, et en réaction à
ces conditions, ou en créant des nouvelles conditions basées sur ces opérations.

« La programmation corrélationnelle interroge, compare et envisage diverses


combinaisons sans prétention absolue à l’instrumentalité. Son but est de faire
réfléchir et d'occuper l'espace de nouvelles façons.105 »

Steven Holl.

La vie moderne est caractérisée par des fluctuations programmatiques, issues de


notre utilisation quotidienne des outils numériques. Ces fluctuations peuvent être vues
comme un code de conception, une méthodologie, résultant d’une approche
systématique, qui offre une variété de possibilités de conception et introduit un
système d'options. Une lecture claire de ces processus est cependant nécessaire
pour donner de la consistance au résultat. La variété et la multiplicité des conditions
de conception conduisent à des itérations multiples et la finalité du système est liée à
l’espace crée et à l’expérience liée à ces manipulations volumétriques. Ces options
conditionnelles intègrent des éléments tels que la lumière, le sol et la circulation tout

105
Steven Holl, Parallax (Basel, Boston, New York, Birkhäuser-Publishers for Architecture ; Princeton
Architectural Press, 2000).

98
en mettant en avant l'expérience spatiale dans son contexte existant. Ce sont donc
ces conditions et ces contraintes qui crée le caractère architectural du système.

Nous avons vu qu’il est essentiel de donner une échelle à l’enveloppe


volumétrique, mais nous devons aussi définir les différents plans dimensionnels qui
définissent ces volumes car c’est à partir des plans que nous pouvons construire un
caractère spatial. Les opérations simples peuvent être combinées à l'infini pour
effectuer des opérations complexes. Des opérations comme « addition », « déplacer »
ou « soustraire », nous aident à répertorier la manière dont ces opérations variées sont
créées. Ces plans du volume nous permettent de considérer l’intérieur, la dynamique
entre l’intérieur et l’extérieur, d’améliorer ou de générer les conditions au sol. En
introduisant des éléments spatiaux comme la fenêtre, l’escalier ou le sol, nous mettons
en avant ces opportunités conditionnelles qui ont abouti des mouvements opératifs.

La même opération combinée106 par des opérations multiples peut développer


plusieurs conditions. Il y a de ce fait plus d’une occurrence dans une opération sur un
ensemble de volumes. Une opération peut être utilisée pour répondre à plusieurs
conditions, ou à l’inverse, des conditions distinctes peuvent être explorées à travers
différentes opérations. Une seule opération peut induire plusieurs options de
conception. L’opération « déplacer » utilisée plusieurs fois, peut introduire plusieurs
ouvertures, ou cette même opération peut introduire des connexions spatiales. La
combinaison de plusieurs opérations demande une hiérarchie des conditions dans la
conception. Pour une condition déterminée, les volumes de bases peuvent-être
agrégés107 pour étudier l’effet multiplicateur de cette condition et de sa mise en série.
En « imbriquant » plusieurs volumes nous créons des connexions. Puis en « empilant »

106
Voir Figure : Combinations, dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental
Architecture (Amsterdam: BIS Publishers, 2014).
107
Voir Figure : Agregations, dansAnthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental
Architecture (Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

99
ces volumes nous agrégeons verticalement ces modules tout en connectant tous les
niveaux de l’ensemble.

Ces manipulations volumétriques à l’échelle architecturale introduisent des


mouvements formels complétés par ces éléments qui introduisent ces connexions ou
ces ouvertures. Les différentes manières dont les volumes sont connectés au sol
affinent leur expérience spatiale. Les mouvements conditionnels organisent, à travers
l’assemblage des volumes programmatiques multiples, le programme du bâti, et les
éléments de connexions forment des zones d’utilisation plutôt qu’un espace
d’habitation.

La « Poli House » de Pezo von Ellrichshausen108 montre que le « décalage » du


volume crée un périmètre épaissi d’un programme et d’une utilité spécifique. Le
« décalage » est une opération volumétrique générale, mais celle-ci a induit la
modification de plusieurs conditions à un niveau plus détaillé. Avec la « Wolf House »
ces mêmes architectes ont suivis l’opération « étendre » systématiquement sur leurs
volumes tout en gardant une organisation programmatique claire. Ceci a permis la
création d’un espace servant, tout en définissant les espaces d’habitation. Cette
opération volumétrique simple a donné une opportunité de circulation, a favorisé une
circulation fluide et a donné une logique aux ouvertures. De même, en utilisant
l’opération « lever » sur la « Solo House », ils ont créé une circulation forte et une
relation au sol originale.

Une logique conceptuelle claire permet donc de créer des regroupements


programmatiques fonctionnels. Chaque projet est spécifique dans son programme,
son site et son échelle, et il est important de considérer toutes les conditions. Elles
permettent une interprétation dans son implémentation et une unicité dans ses
ouvertures, ses connexions spatiales et sa relation au site.

108
Voir Figure : Implementations dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental
Architecture (Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

100
Figure 38 : Conditions, dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental Architecture
(Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

101
Figure 39 : Combination, dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental Architecture
(Amsterdam: BIS Publishers, 2014)..

102
Figure 40 : Agregations, dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental Architecture
(Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

103
Figure 41 : Implementations dans Anthony Di Mari, Conditional Design: An Introduction to Elemental
Architecture (Amsterdam: BIS Publishers, 2014).

104
Conditions Spatiales

Pour commencer un processus de conception paramétrique il faut déterminer les


conditions liées aux caractéristiques nécessaires au projet et à l’optimisation spatiale.
Ces conditions peuvent nous donner des principes qui vont guider le projet et nous
aider à explorer les variations possibles de manière flexible. Les relations entre les
éléments qui composent le projet architectural sont primordiaux. Nous devons
simplifier la manière de décrire les espaces et leurs relations de manière paramétrique
pour pouvoir les intégrer dans un système qui peut, par itérations, générer leurs liens
et leurs articulations. Il reste une part de choix, dans la manière donc nous voulons
agencer ces connexions, et dans la hiérarchie que nous appliquons entre les espaces.
L’architecte doit d’abord déterminer le programme architectural pour ensuite l’insérer
dans un système paramétrique afin de l’optimiser dans un cadre donné. Les conditions
qu’il choisit en déterminant les interdépendances programmatiques vont conditionner
les catégories spatiales qu’il souhaite utiliser dans son projet. Nous devons les
regrouper dans le projet par rapport à leurs fonctions. Les interactions entre ces
catégories génèrent ainsi les volumes habitables à travers des opérations
volumétriques. Nous comprenons donc que les interactions entre tous les éléments
du projet sont conditionnelles et induisent des relations spatiales conditionnées.

105
106
Les Seuils Entre L’Intérieur et L’Extérieur.

Un projet est caractérisé par des limites, voir des frontières, intérieures et
extérieures, et il s’agit de trouver comment ces mêmes limites définissent et
circonscrivent les variables du projet. Une analyse de site nous permet d’y insérer une
volumétrie de base, qui nous permet de sélectionner les différentes typologies
possibles qui s’y trouverons, pour ensuite nous donner les règles qui guiderons la
conception de notre bâtiment. Ces limites affectent la masse et le type de bâti, et
permettent de mieux comprendre ce qui peut être construit et de réduire les coûts liés
au travail de préparation du site. L’empreinte du bâtiment est déterminée par le
programme. C’est finalement un cadre que nous posons, conditionné par le site et ses
alentours109. Un bâtiment est-il simplement aligné sur la rue ? Ou doit-il au contraire
sortir du gabarit et de la composition induite par la configuration des immeubles
mitoyens aux alentours, pour s’approprier l’espace dans lequel nous l’insèrerons, et
ainsi changer la manière de vivre la limite ? Cette tension pourrait ouvrir un espace de
l’entre-deux, permettant d’adoucir ou au contraire de durcir la limite, devenant un
espace tampon entre l’intérieur et l’extérieur.

Il faut porter une certaine attention à l’espace extérieur en lien avec l’intérieur. C’est
un lieu de passage, de rencontres et de voisinage. C’est un espace qui peut être
transformable selon les saisons, qui doit répondre à la fois à un besoin d’intimité, et
qui en même temps doit répondre à un besoin de rencontre et de lien social. C’est le
lien entre l’accueil et la réserve qui permet de lier l’homme avec les autres, le logement
à son environnement et l’ensemble à la ville. C’est un espace qui dans son essence
se cache de lui-même, mais qui doit pourtant être transformable pour être

109
Voir Figure : Catalogue of multiple wall materials, doors, windows and architectural artifacts, dans James
Wines, Highrise of Homes – Theoretical project by SITE for urban locations in the USA, (1981).

107
appropriable. Il permet le lien entre le privé et le public et est donc essentiel au rapport
humain. L’appartement est de l’ordre de l’intime, l’extérieur et le voisinage de l’ordre
du commun, et l’articulation entre les deux est fondamentale. C’est cette articulation
qui forme le lien entre les lieux passages, de rencontres et d’échanges. Elle n’est pas
seulement un espace intermédiaire, mais peut même être un des espaces principaux.
Cette articulation entre l’intérieur et l’extérieur est marquée par un seuil, qui propose
plusieurs rapports dialectiques. La façade est ce qui se rapporte à la rue ; la cour ou
le jardin séparent l’entrée de l’espace commun ; et les balcons ou les vérandas forment
des espaces semi-publics à l’étage.

« L’opposition des façades accentuera le contraste entre l’espace public qu’est la


ruelle et l’espace semi-public et plus intime qu’est le parc. Autant l’une se ferme,
autant l’autre s’ouvre sur l’extérieur. ; autant l’une est dure dans ses lignes, autant
l’autre les incline, les adoucit ; autant l’une dissimule sa partition, autant l’autre
valorise son éclatement. Deux façades presque en positif-négatif » 110

D. Petit « 80 logements sociaux à Nancy »

L’extérieur est associé à un vécu, et s’il apparait comme hostile, l’homme va se


replier dans l’intérieur. Les seuils agissent donc comme des limites qui font respirer
l’habitat de l’homme111. Il y a plusieurs degrés de seuil, correspondants à différents
niveaux de limites par rapport aux autres habitants, qui ne permettent pas forcement
de laisser entrer n’importe qui, mais qui laissent passer ou recevoir. Ce n’est pas
nécessairement une question de distance : une fenêtre est un lien sur le lointain, rendu
possible par le fait d’être ancrés « chez soi », mais qui repousse les limites entre
l’intérieur et l’extérieur. Le « chez soi » est par ce biais ouvert sur l’infinité du monde,
tout en rapprochant cet infini de chez soi. La nuit, cette ouverture se referme et le lien
vers l’infini disparait, donnant au « chez soi » toute son importance112. La relation

110
Monique Eleb-Vidal, Anne-Marie Châtelet, et Theirry Mandoul, Penser l’habité : le logement en questions ;
PAN 14, 2. éd, Programme architecture nouvelle 14 (Liège: Mardaga, 1990).
111
Figure : Aldo Rossi, Le temps suspendu, (Cimetière de Modène, 1978).
112
Voir Figure : Julius Shulman, Case Study House #22, (Los Angeles, 1960).

108
directe avec le voisin peut être vue de la même manière : un rapport de l’homme avec
son environnement. Il y a une dialectique qui se construit, entre l’intime et le commun,
le proche et le lointain du voisinage, et l’échange entre ces dimensions doit être
constant. De cette manière, le « chez soi » représenterait la continuité entre le lieu où
« j’habite » et l’espace que « j’habite ».

« Le seuil n’est ni du dedans ni du dehors, et est en même temps du dedans et du


dehors » 113
Georges Teyssot

C’est donc ces hiérarchies multiples qu’il faut intégrer dans notre système
paramétrique. Les chemins parcourus pour atteindre la porte palière de l’habitat
depuis l’espace public sont conditionnés par les rapports que l’ensemble entretient
avec la rue. Chaque élément qui caractérise un seuil doit être positionné pour respecter
les différents degrés d’intimité. C’est donc un système de distribution que nous devons
intégrer par gradation par rapport à la fonction de délimitation et de passage des
éléments qui composent les seuils. Dans un même temps, ce sont ces seuils qui vont
conditionner la manière de relier chaque habitat aux différents degrés du commun.
Cette perméabilité dans les deux sens doit être contrôlée et optimisée de manière à
rendre la transition aisée et agréable, mais aussi de manière à respecter les normes
incendies par exemple.

113
Georges Teyssot, Une topologie du quotidien, p. 32, 1ère éd. (PPUR, 2016).

109
Figure 42 : Catalogue of multiple wall materials, doors, windows and architectural artifacts, dans James Wines,
Highrise of Homes – Theoretical project by SITE for urban locations in the USA, (1981),

110
Figure 43 : Aldo Rossi, Le temps suspendu, (Cimetière de Modène, 1978).

111
Figure 44 : Julius Shulman, Case Study House #22, (Los Angeles, 1960).

112
L’Intégration Dans La Ville

Dans sa relation sociale à l’intérieur d’un quartier, un ensemble, ou un lotissement,


habiter doit être conçu et conditionné par des pratiques et des usages locaux, au
risque d’induire un sentiment d’insécurité, de repli, voire d’ostracisme. Cette relation
doit prendre en compte la culture et les modes de vie des habitants. Le commun est
possible uniquement si l’intime est possible. L’évolution du commun est donc
contrainte par l'intérieur et l'extérieur, par les liens avec le site et les règles issues des
environs immédiats. L’adaptation de ces contraintes à la conception paramétrique doit
également répondre aux spécificités régionales et aux différences de cultures et
d'environnements, grâce à l'étude de paramètres performatifs du climat local, des
matériaux et des traditions artisanales. Les informations peuvent ensuite être
directement intégrées dans les paramètres géométriques du bâtiment. Elles
permettent d'améliorer le contexte visuel, physique et social en réinterprétant
l’environnement, les matériaux, l'organisation sociale et le comportement humain dans
une région donnée.

Construire de manière paramétrique ne doit pas forcément conduire à une certaine


monotonie, un stéréotype, voir une forme anonyme d’architecture114, qu’il faut éviter
au risque que l’homme n’y trouve plus l’attention qu’il espère y trouver. L’architecture
doit s’articuler par rapport à la ville, s’y ouvrir même. Le lien avec la rue peut être direct
ou non, le bâtiment tourné vers l’intérieur ou vers l’extérieur. Plus le clivage entre la
ville et le logement est grand, plus les habitants se sentiront exclus de la vie en ville. Il
faut donc conserver une certaine unité de l’ensemble, afin d’éviter l’éclatement des
fonctions qui font la ville. L’articulations de ces fonctions ouvrent l’espace vide entre

114
Voir Figure : Bollmann Hermann, Map of NYC, (1963), EPFL LAPIS - Archives de l'imaginaire »,
archivesdelimaginaire.epfl.ch

113
les choses ou les séparent. Dans tous les cas elles les tiennent ensemble. L’espace
public est le rejet du plein pour partager le vide115, comme condition d’être ensemble.
L’espace vide en devenir, et dans ses ouvertures possibles, rend possible et même
attrayant les rencontres dans les lieux publics. Ces espaces de rassemblement, qui
nouent le temps présent et le temps à venir, sont les vecteurs dynamiques de la ville.

« Les centres sont toujours virtuel, mais ils ne sont pas nécessairement possibles.
Le virtuel est en effet lié à l’actuel en tant qu’ils sont réels l’un et l’autre, mais le
virtuel n’est pas la puissance immanente. […] les centres sont ce qui distribuent et
organisent tout un champ de forces dans une réalité qui n’a pas d’autre sens que
son action immanente et réelle. Le virtuel […] rend à la dynamique des rapports
leur multiplicité […]. 116
Deleuze

Nous devons comprendre ce qui fait la particularité de la ville pour intégrer dans le
projet architectural les différentes échelles qui vont avoir une influence sur l’habitat.
Les paramètres issus de l’observation des caractères du site nous donnent de
précieuses conditions à remplir pour rendre possible l’intégration de notre ensemble
dans la ville dans laquelle il s’inscrit. Le rôle de l’architecte est de comprendre quelles
liaisons la ville peut offrir au projet. Les liaisons qu’entretient notre projet à l’ensemble
de la ville conditionne la forme et la position de notre projet sur le site. Il faut donc
intégrer ces liaisons dans notre système car elles vont conditionner l’articulation entre
l’espace public et l’habitat.

115
Voir Figure : Bernardo Secchi & Paola Vigano, Une Ville Poreuse, (Paris, 2009).
116
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ?, p. 130, Collection Penser l’espace (Paris : La Villette, 2010).

114
Figure 45 : Bollmann Hermann, Map of NYC, (1963), EPFL LAPIS - Archives de l'imaginaire »,
archivesdelimaginaire.epfl.ch

115
Figure 46 : Bernardo Secchi & Paola Vigano, Une Ville Poreuse, (Paris, 2009)

116
Les Règles Urbaines

Nous allons questionner les règles données par le site et la question d'intégration
urbaine par les métadonnées.117 De nos jours, il y a de plus en plus d’acteurs dans la
production techniques de ces cartographies, améliorant la collecte numérique des
données. Les cartes, qui représentaient auparavant une réalité physique, deviennent
de plus en plus une manière de révéler des données, grâce à des systèmes
d’informations géographique (SIG) numériques, dont la variété de couches en fait des
« atlas d’atlas »118. Ces données ne sont plus statiques, mais représentent en temps
réel une cartographie dynamique, révolutionnant la manière dont les fonctions de la
carte sont en relation avec la ville. À travers la collaboration et l’échange, le rapport de
l’utilisateur et la carte, donc à la ville, change. Ceci crée de nouvelles relations entre
l’utilisateur et sa municipalité, permettant par exemple à l’utilisateur d’émettre des avis,
ou à l’inverse à municipalité de transmettre des alertes pollution. Le travail de Christian
Nold119 à travers ses « cartes du tendre » montre ces fabrications cartographiques à
partir des réactions émotionnelles des sujets à travers la ville. Ce système de ville
intelligente induit une nouvelle forme de comportement collectif et individuel qui produit
une intelligence collective numérique. La géolocalisation est devenue l’indicateur
spatial du numérique, d’une ville appréhendée pas seulement de manière physique,
mais aussi par ces moyens numériques. Eric Fisher120, artiste-chercheur britannique a
réussi à mapper les manières dont interagissent les touristes ou les locaux avec la ville.

117
Antoine Picon, Digital Culture in Architecture : An Introduction for the Design Professions (Basel : Birkhäuser,
2010).
118
Antoine Picon,, « Maps and Urban Intelligence in the Digital Age », Habitats in Time : Mapping Palimpsest
Horizon, Doctoral Program of Architecture, (EPFL, décembre 2018).
119
Voir Figure : Poptronics, Les cartes du tendre (avec GPS) de Christian Nold , (consulté le 18 décembre
2018), https://www.poptronics.fr/Christian-Nold-geographe-ultra.
120
Eric Fischer, FlowingData, (consulté le 18 décembre 2018), https://flowingdata.com/tag/eric-fischer/.

117
En utilisant les balises géographiques des photos prises à travers la ville121, il a créé
ainsi une infrastructure du savoir, où l’espace devient la carte. La plupart des
plateformes interactives, comme Uber, utilisent et collectent ces données sur les
activités passées, des choses liées à un lieu et à une date. Ces circonstances passées
permettent de simuler ce qui va se passer dans le futur, permettant aux urbanistes
d’évaluer leur planification sur la base de la création d’un scénario. Tout ce qu’importe
aux sujets dans la ville est ce qui est en train de changer. Cette rationalisation de la
ville se fait à travers les bâtiments et les flux, et crée une ville faite de réseaux et
d’évènements. Ce sont ces évènements numériques calculables qui font la nouvelle
matière de la ville, décalés de sa réalité physique et en même temps intimement liés.

Comme l’une des caractéristiques fondamentales de la conception paramétrique


est l’adaptabilité, qui inclut également une éventuelle adaptation aux spécificités
régionales. Sa portée mondiale n'implique pas une homogénéisation globale, car elle
offre une nouvelle spécification des identités régionales. « Relational Urbanism »122,
basé à Londres, a développé des modèles urbains participatifs pouvant traduire les
données en paramètres. La manière dont nous examinons les flux de données modifie
la façon dont nous analysons le domaine urbain. Ces flux permettent ainsi le partage
d'informations et le retour d'informations, de l'utilisateur à l'équipe de conception. Cela
permet une compréhension relationnelle de l'espace, des interdépendances et du
temps, ainsi qu'une prise de conscience de certains problèmes spécifiques. Nous
construisons ainsi des valeurs communes et nous introduisons une dimension tacite
dans un processus qui devient une connaissance générale plus conceptuelle. Nous
devons ensuite introduire la micro-échelle de l'individu et la macro-échelle de la société
afin de comprendre les différentes communautés et leurs organisations. Une
évaluation en temps réel permet d’influencer ces processus participatifs jusqu'à une
échelle urbaine.

121
Voir figure : Eric Fischer, Tourists vs. Local Photographs Mapping in Manhattan, (2010).
122
Relational Urbanism, (consulté le 18 décembre 2018), https://www.relationalurbanism.com.

118
Figure 47 : Poptronics, Les cartes du tendre (avec GPS) de Christian Nold , (consulté le 18 décembre 2018),
https://www.poptronics.fr/Christian-Nold-geographe-ultra.

119
Figure 48 : Eric Fischer, Tourists vs. Local Photographs Mapping in Manhattan, 2010.

120
Les Variations Environnementales

L’orientation d’un projet dépend souvent des conditions environnementales du


site, comme la course du soleil ou la force du vent sur certains axes. Les outils
d’aujourd’hui permettent de prendre en compte ce type de conditions factuelles pour
en dégager des solutions localement adaptées. Les fichiers environnementaux
contiennent toutes les données liées aux conditions locales comme les jours de soleil,
les vents dominants, les températures extérieures, le volume des précipitations,
l’humidité ambiante, etc. Ces données permettent de déterminer par exemple les
radiations solaires incidentes, leurs absorbations ou leurs transmissions dans le bâti et
leurs influences sur l’espace intérieur, et de déterminer des solutions de protection,
par exemple solaire ou d’isolation, adaptées123. Les données environnementales
permettent aussi de contrôler des conditions intérieures physiques, comme la chaleur,
l’acoustique, l’éclairage, le conditionnement de l’air ou l’olfaction. Par exemple le
contrôle de l’éclairage est possible en déterminant la taille et la direction des ouvertures
en fonction de l’ensoleillement. Poussées plus loin, ces mêmes données pourraient
influer des éléments plus grande échelle comme la répartition programmatique ou la
géométrie générale du bâti. La compréhension de ces données peut nous amener à
une conception soucieuse de l’environnement124 et nous aider à contrôler et à informer
certaines transformations géométriques.

Ces données environnementales, couplées à la géométrie du bâtiment nous


permettent de trouver des solutions pour maximiser les efficiences énergétiques de
chaque mur, ouverture ou dalle des logements, en calculant les pertes énergétiques,

123
Voir Figure : Paul Wintour, Ladybug & Honeybee, ParametricMonkey, (2016), https://parametricmonkey.com
/2016/03/13/ladybug-honeybee/.
124
Arturo Tedeschi et Fulvio Wirz, AAD - Algorithms-Aided Design, (Brienza : Le Penseur, 2014).

121
les gains solaires ou la luminosité de chaque pièce. Cela permet une optimisation
géométrique et matérielle du bâtiment, tout en prenant en compte le confort physique
et visuel de l’habitant. La masse et le toit doivent donner la direction et la pente de la
forme, pour placer des panneaux solaires par exemple. Cette recherche
d’optimisation peut aussi nous aider à choisir les manières de compléter les besoins
en lumière artificielle et en chauffage. De même, des données sur le bruit urbain
environnant permettent de déterminer les besoins en protection sonore d’un bâtiment.
Ces données urbaines peuvent nous aider à élaborer des systèmes dynamiques
complexes qui réagissent en temps réel à des modifications du contexte
environnemental.

L’architecture ordonne notre environnement, et favorise les relations entre les


hommes et leur environnement, en créant un milieu et un cadre. Il y a une relation
topographique entre l’habitat et l’environnement, le paysage et les autres bâtiments. Il
ne s’agit pas seulement de refléter un contexte climatique et environnemental local
mais aussi des aspects culturels comme les matériaux de construction et les savoir-
faires locaux qui sont liés à leur environnement. Des systèmes sociaux régionaux nous
permettent d’impliquer des traditions et des cultures locales en relation à leur
environnement et à leurs productions locales. Il est donc possible de combiner des
pratiques architecturales technologiquement avancées avec des savoirs
traditionnels125 ce qui demande peut-être, par l’exploration des nouvelles possibilités
de fabrications numériques, la mise en place d’un artisanat digital126. Une conception
basée sur la performance des matériaux de construction traditionnels, favorise le
développement de ces matériaux et d’un artisanat local, en intégrant les outils
paramétriques dans une recherche culturelle et architecturale.

125
Voir Figure : Archi-Union Architects, Silk Wall, (Shanghai, 2011).
126
Philip Yuan, Parametric Regionalism, dans Block et Bhooshan, Parametricism 2.0: Rethinking Achitecture’s
Agenda for the 21st Century, éd. par Patrik Schumacher, Architectural Design Profile, no 240, (London: John
Wiley & Sons, 2016).

122
Figure 49 : Paul Wintour, Ladybug & Honeybee, ParametricMonkey, (2016), https://parametricmonkey.com/
2016/03/13/ladybug-honeybee/

123
Figure 50 : Archi-Union Architects, Silk Wall, (Shanghai, 2011).

124
La Formalisation Intérieure

L’intérieur doit s'adapter en fonction des contraintes extérieures127 et nous devons


comprendre comment les conditions extérieures formalisent l’intérieur. Peut-on
générer des types de logements différents en fonction des multiples critères de
contraintes de site, de caractéristiques typologiques, de fonctions et d’autres
contraintes pragmatiques liés à l’habitat ? La question de l’ordre d’importance des
contraintes est ici essentielle, de même que la « définitions de règles intelligentes »128.
Nous parlons donc plus de processus que de concept, et la multiplicité et
l’interdépendance des éléments qui composent ce processus le rendent très
vulnérable aux variations. Les modifications d’un élément se répercute sur les autres
par effet de propagation. Le résultat est un ensemble qui peut évoluer à l’infini, avec
une part d’inconnu, et dont la forme et sa relation aux conditions évolue constamment
en fonction des paramètres changeants. La détermination de cette forme déterminera
aussi un système dynamique et modifiable de l’espace vécu, et donc, son utilisation.

L’exemple le plus parlant est celui de la fenêtre, qui à ce caractère de seuil liant et
séparant à la fois, séparant deux échelles et deux univers. Elle répond également à
l’influence de son environnement direct, de la même façon qu’elle a, de par sa forme
et sa matérialisation, une influence sur la perception de l’espace et sur son usage.

La fenêtre est une « frontière entre deux espaces antithétiques, l’endroit où l’on se
trouve et le lieu de la nostalgie »129
Bruno Reichlin

127
Bryce Willis, A parametric Multi-Criterion Housing Typology, p. 503, University of Nebraska-Lincoln,
Synthetic Digital Ecologies, (ACADIA, 2012).
128
Arturo Tedeschi et Fulvio Wirz, AAD - Algorithms-Aided Design, (Brienza: Le Penseur, 2014).
129
Klaus Spechtenhauser, Gerhard Auer, et Michelle Corrodi, LichtEinfall Tageslicht im Wohnbau, p. 91, (Basel
: De Gruyter, 2008).

125
Même si la fenêtre a d’abord un rôle sur l’aération et la lumière, son influence sur
la qualité et l’atmosphère des espace liés est indéniable. Elle permet de contrôler la
lumière et par là, d’influer sur l’intimité des espaces, par leur sublimation par la
lumière130, ou au contraire par leur retrait par l’ombre131. La fenêtre structure l’espace
par sa position, sa taille et ses proportions. Elle influe sur les caractères spatiaux et
donc sur les manières de se les approprier. Ce cadrage hiérarchise les rapports entre
les intérieurs et l’extérieurs, donnant à l’espace, selon sa taille, un caractère soit plus
extraverti soit plus intraverti. Il y a deux types de fenêtre, celle pour la vue, et celle pour
la lumière. Il faut les dissocier car en orientant la vue, la fenêtre conditionne la nature
de la relation instaurée avec l’intérieur. Elle doit s’adapter à la hauteur de sa position
et à sa position par rapport aux conditions extérieures, comme l’ensoleillement ou les
vis-à-vis. Sa variation dans la forme et la taille sert donc à contrôler les degrés de
domesticités des espaces.

« Le « langage » tenu par la pièce dépend largement du propos lié à la fenêtre,


principal sujet d’attention de la part des occupants de la pièce. La fenêtre fait la
pièce, en lui prêtant à la fois sens, aspect et raison d’être »132
Gilles Barbey.

Si nous acceptons que le mouvement serve de base à la perception architecturale,


l’attirance visuelle de la lumière133 crée des vecteurs spatiaux qui lient les habitants aux
ouvertures. Les fenêtres ont donc un rôle structurant dans les déplacements dans
l’espace. Chaque ouverture ponctue un lieu dans le logement et donne à ce lieu un
pouvoir d’attraction sur l’habitant. Elle peut devenir un lieu à part entière, dans sa
capacité à devenir un sous espace dans le logement, nous permettant d’expérimenter
le seuil dans l’épaisseur de son cadre et transforme ainsi le caractère d’un logement.

130
S. Giedion, Espace, temps, architecture, (Paris : Denoël, 1990).
131
Junichirô Tanizaki, Éloge de l’ombre (Lagrasse : Verdier, 2015).
132
Gilles Barbey, L’évasion domestique : essai sur les relations d’affectivité au logis, p. 167, 1. éd, Collection
d’architecture (Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 1990).
133
Voir Figure : Peter Zumthor, La chapelle de "frère Nicolas", (Wachendorf, 2007).

126
De la même manière, la loggia créée une pièce supplémentaire, tout en supportant
des usages multiples, de par son ouverture contenue dans le volume du bâti. En
sortant du cadre, le balcon en sailli ou la terrasse, communiquent avec l’intérieur après
la façade, comme des prolongements extérieurs privatifs de l’habitat134 en
agrandissant les pièces qui les portent. Ces seuils directs de l’habitat portent en eux
une vision sociale de la vie domestique, et ils mettent en scène le quotidien par leur
utilisation courante, en permettant de nouvelles habitudes selon les saisons.

Cet exemple nous donne les clés pour comprendre les modifications des
interactions entre différents éléments intérieurs par des contraintes extérieures.
L’influence de l’extérieur a des répercussions sur les surfaces et les formes des
éléments qui composent le projet architectural ; sur la hauteur de plafond, sur les
portes et les autres espaces de liaisons, sur les chambres et sur les espaces
communs. Une belle vue dirigera l’ensemble de l’habitat vers le paysage135. Au
contraire, un vis-à-vis nous oblige à fermer ce côté de l’habitat, l’organisant autour
d’une cour intérieure par exemple. C’est au bon sens de l’architecte que nous devons
nous référer pour choisir quels paramètres incorporer dans le système paramétrique.
Ce système doit garantir cette flexibilité mais est possible de le garder intact malgré
une grande variété dans les conditions d’interaction avec l’extérieur.

134
Voir Figure : Hans Scharoun Immeuble résidentiel Romeo et Juliette, (Stuttgart, 1959).
135
Voir Figure : Ricardo Bofill, La Muralla Roja, (Calpe, 1973).

127
Figure 51 : Peter Zumthor, La chapelle de "frère Nicolas", (Wachendorf, 2007).

128
Figure 52 : Hans Scharoun Immeuble résidentiel Romeo et Juliette, (Stuttgart, 1959).

129
Figure 53: Ricardo Bofill, La Muralla Roja, (Calpe, 1973).

130
Conditions Contextuelles

Nous comprenons donc que les liens de l’habitat avec l’extérieur sont multiples, et
que chaque condition extérieure va avoir une répercussion sur l’intérieur. Des outils
numériques d’optimisation nous permettent grâce à des solveurs heuristiques de
trouver les meilleurs compromis entre les conditions extérieures et leurs influences
intérieures. Les outils numériques permettent de contrôler l’impact volumétrique de
notre projet dans un contexte donné. Nous évaluons ainsi les connaissances que nous
pouvons agréger à l’intérieur du modèle paramétrique avec l’objectif d’optimiser ces
relations de manière rationnelle et dynamique, tout en combinant les critères spatiaux
existants, et en renvoyant aux choix effectués auparavant de manière à les
questionner. La transformation du système de production architecturale en intégrant
les données environnementales, ainsi qu’une éthique écologique, améliorera les
processus de conception architecturale. Nous pouvons grâce à la puissance des
systèmes informatiques facilement comprendre les contraintes d’une région et donc
favoriser un processus d’étude de proto-typologies rurales.

131
132
La Conceptualisation Paramétrique

Nous pouvons donc déterminer ici deux types d’intentionnalités. L’une à visée
formelle136 et l’autre à visée subjective. Elles visent, dans et par l’espace déterminé
dans le temps et par la multiplicité des rapports humains, à bâtir la relation du rapport
humain au monde à travers sa demeure. Seul un espace inachevé permet un travail
sur l’habitat. Si nous nous basons sur l’idée d’un modèle de logement paramétrique
multicritère137, nous devons optimiser de multiples variables tout en résolvant les
paramètres conflictuels. L'esthétique, si nous privilégions le formel ou le spatial, vient
de conventions paramétriques différentes qui résultent des relations entre conditions.
Les outils paramétriques permettent des itérations variées possibles dans une même
typologie, nous donnant des logements sur mesure, spécifiques au site et optimisés.138

"La langue de la programmation génère des briefs de conception basés sur les
données de l'utilisateur ; le langage de conception fournit les règles pour générer
des concepts dans un style particulier, et un ensemble de règles heuristiques guide
la génération de concepts vers une solution qui correspond au brief de
conception"139
Duarte

Mais à quel point un projet paramétrique peut-il être conceptuel ? À priori, le


résultat n’est plus établi par l’architecte, mais plutôt par le processus des données
élaborées. Le projet n’est plus le résultat cristallisé d’un raisonnement particulier, mais
plutôt un instantané d’un instant t, d’un processus en constante évolution. Il reste donc

136
Voir Figure : Cam Parkin, Formal Study 01, (2016).
137
Poelman Sjoerd, Parametric approach for designing affordable & high density housing, (Intecture, TU Delft,
2017).
138
Bryce Willis, Digital Morphogenesis : A Computational Housing Typology, (Architecture Program, University
of Nebraska, 2012).
139
Bryce Willis, A parametric Multi-Criterion Housing Typology, p. 503, University of Nebraska-Lincoln,
Synthetic Digital Ecologies, (ACADIA, 2012).

133
une part de sensibilité de l’architecte qui, en choisissant et contrôlant les paramètres
ainsi qu’en évaluant des solutions alternatives d’instant t multiples140, fait un choix
qualitatif qui satisfait son idée. C’est ce moment crucial qui va cristalliser son
processus en un projet. Nous devons déterminer en amont un processus qui prend
en compte un concept prédéfini et le poids que doit prendre l’idée par rapport aux
conditions établie. Nous devons voir si le concept du projet doit être lui-même une
condition, ou au contraire si nous devons laisser la place à cette inconnue.

140
Voir Figure : Visualization of the diversity calculation for each design set, dans Nathan Brown & Caitlin Mueller,
Quantiffying diversity in parametric design, (Cambridge University Press, 2018)

134
Figure 54 : Cam Parkin, Formal Study 01, (2016).

135
Figure 55 : Visualization of the diversity calculation for each design set, dans Nathan Brown & Caitlin Mueller,
Quantiffying diversity in parametric design, (Cambridge University Press, 2018)

136
La Temporalité De L’Espace

Il existe une articulation entre les diverses façons d’avoir vécu, de vivre et d’espérer
vivre, tant au niveau individuel que familial et collectif, à l’échelle de l’immeuble, de la
rue, du quartier, et de la ville. Être présent dans son espace permet de joindre son
passé et son futur dans son quotidien. Il faut pour cela s’approprier l’espace au risque
de se figer dans le passé ou de s’imaginer un futur irréel. Afin de répondre aux besoins
quotidiens, il faut rendre à l’espace habité sa fonction majeure de ressourcement de
la vie quotidienne, un espace qui doit apaiser plutôt qu’agresser, ouvrir plutôt que
renfermer, et offrir plutôt que priver. L’habitant doit avoir un projet de « chez soi », pour
se construire et s’approprier son futur. Pour cela, il faut laisser de l’espace pour cette
interprétation du lieu et cette construction, et de l’espace pour s’y investir. L’existence
de l ’habitat ouvre, au-delà des formes physiques, un temps de la présence esthétique.
Elle dynamise aussi ce qui projette les hommes dans le futur, permettant de relier
l’espace avec le temps.

L’espace doit permettre ces différentes topologies temporelles141 et sociales. Il faut


savoir ce qui est vraiment nécessaire pour synthétiser un projet simplement. Des
paramètres trop précis réduisent l’adaptabilité de l’espace dans le temps142. Etant un
instantané d’un temps t, que devient-il si les conditions continuent d’évoluer ? C’est
une question de satisfaction : bien que figé, notre processus peut continuer à évoluer
dans sa cristallisation. Mais est-il possible de conditionner ou de paramétrer cette
possible évolution dans le temps ? S’agissant de conditions exhaustives, des
évaluations mal fondées rendent difficile de prévoir le besoin d’évolution futur d’un

141
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ? Collection Penser l’espace (Paris : La Villette, 2010).
142
Voir Figure : Joseph Michael Gandy, Rotunda of the Bank of England, (1798), ​EPFL LAPIS – « Archives de
l'imaginaire », archivesdelimaginaire.epfl.ch.

137
projet. C’était déjà le cas avant, mais la différence majeure entre un projet paramétré
et un projet plus conventionnel est que l’attribution et la mise en œuvre des paramètres
est tellement plus spécifique et déterminé que cela pourrait rendre un projet très peu
adaptable à des besoins futurs. Un exemple, pourtant moins extrême, sont les
logements des années 70’ : malgré certains chef-d‘œuvres « intemporels »143, ceux-ci
ont du mal à remplir nos besoins contemporains dans leur état originel. Le temps étant
difficile à paramétrer, nous devons imaginer des paramètres qui laissent assez de
libertés pour pouvoir évoluer avec lui.

143
Voir Figure : Le Lignon, dans Franz Graf, la cité du Lignon 1963-1971. Etude architecturales et stratégies
d'intervention, Patrimoine et architecture, (Genève, 2012).

138
Figure 56 : Joseph Michael Gandy, Rotunda of the Bank of England, (1798), ​EPFL LAPIS – « Archives de
l'imaginaire », archivesdelimaginaire.epfl.ch.

139
Figure 57 : Le Lignon, dans Franz Graf, la cité du Lignon 1963-1971. Etude architecturales et stratégies
d'intervention, Patrimoine et architecture, (Genève, 2012).

140
L’Adaptabilité, Liberté ou Flexibilité ?

Soutenir l’habitant, c’est apporter du soin à la réalisation architecturale. Si les


habitants se sentent pris en compte, ils prolongeront eux même ce soutien à la qualité
architecturale. Ces espaces en devenir doivent offrir la flexibilité nécessaire pour une
appropriation de l’espace par chaque habitant. Nous devons permettre des usages
différents, des conceptions multiples et des initiatives de la part des habitants. Laisser
des possibilités d’interventions à l’habitant lui permet la gestion et la transformation de
l’espace intérieur par rapport à ses besoins.

« J’oserai affirmer ici que la famille est constituée d’un ordre social instable, parce
que constamment bouleversé par des phénomènes temporels extrêmement
diversifiés. L’urgence et la nécessité pour le logement de s’adapter à ces
évolutions familiales seraient corroborées par ce qu’on appelle la mobilité des
occupants : revoir l’évolution de différentes temporalités d’une même famille c’est
d’emblée rendre possible l’adaptation du logement pour différents types de
familles. Le choix fait ici est celui d’un espace « adapté ». C’est à dire d’une
capacité de plusieurs valeurs pour le même lieu. Plus que jamais ici, le logement
n’est que support à la pratique : il n’est pas pratique elle-même. »

D. Petit, « 80 logements sociaux à Nancy » 144

Nous avons vu que l'adaptabilité dans le temps est difficile. Comment pouvons-
nous donner à l’habitat assez de liberté pour permettre un changement d'utilisation
dans le temps ? Si nous définissons nos espaces comme une limite spatiale dans
lequel les paramètres interagissent, nous pouvons, dans le cas où nous nous
affranchissons de cette limite, continuer de les organiser. Une autre possibilité pour

144
Monique Eleb-Vidal, Anne-Marie Châtelet, et Theirry Mandoul, Penser l’habité : le logement en question ;
PAN 14, p. 48, 2. éd, Programme architecture nouvelle 14 (Liège : Mardaga, 1990).

141
s’adapter aux évolutions dans le temps145, serait d’introduire une certaine flexibilité :
faut-il nécessairement figer ce que nous construisons ? Nous pouvons au contraire
paramétrer un même espace pour une multitude de besoins différents. Il est possible
d’incorporer une certaine flexibilité dans nos conditions paramétriques. Pour que les
espaces soient pensés pour des utilisations multiples, nous pourrions permettre l’ajout
et le retrait de certains éléments146 sans pour autant perdre la cohérence de l’ensemble
du bâti. Un espace n’est pas adaptable à l’infini, et nous nous retrouverons
éventuellement dans un cas où la limite se fera sentir, mais cela permettrait un certain
degré de liberté et une certaine flexibilité de point de vue, tout en gardant le cadre
donné par nos conditions.

145
Voir Figure : Kisho Kurokawa, Nagakin Capsule Tower, (Tokyo, 1972).
146
Voir Figure : Mathias Klotz & Tecnofast, Modulo prefabricado para victimas del terremoto, Casa Modular
Mk1, Mk4 y Mk5, (Chile, 2010).

142
Figure 58 : Kisho Kurokawa, Nagakin Capsule Tower, (Tokyo, 1972).

143
Figure 59 : Mathias Klotz & Tecnofast, Modulo prefabricado para victimas del terremoto, Casa Modular Mk1,
Mk4 y Mk5, (Chile, 2010).

144
Le Mouvement et La Fonctionnalité

Un mouvement spatial doit être caractérisé par un dépassement de l’affect et de


l’intériorité. Nous pouvons étendre la condition flexible d’un espace et laisser une part
d’adaptabilité à certains éléments secondaires, ceci pour garder une liberté dans
l’utilisation de cet espace. Il s’agirai ici de déterminer s’il est possible de conditionner
la transformation de la fonctionnalité d’une pièce par le mouvement de certains
éléments, changeant et en interaction, et qui permettent la subdivision ou la fermeture
de certains espaces. Le premier exemple de ce type d’élément est donné par les shojis
japonais147. Mais nous pouvons voir aujourd’hui d’autres exemples modernes
d’habitats modulaires148, qui permettent de changer le fonctionnement, l’utilisation et
la forme d’un espace de vie par l’utilisation d’éléments mobiles.

Nous ne pouvons pas qualifier ce type d’habitat modulaire de maison évolutives,


comme les escaliers de l’entrée du château de Poudlard149. Il s’agit plus d’une flexibilité
limitée par les contraintes de l’ingéniosité des mécanismes. Il est cependant
intéressant de voir comment, en rendant possible le déplacement d’une paroi, un
espace peut radicalement changer ses attributs. En rendant une fonctionnalité spatiale
multiple, Nous arrivons à rendre multiple une expérience du vécu dans l’espace150.
Nous créons ainsi un système technique par la répétition d’un nombre limité
d’éléments techniques, et qui dépendent des dimensions spatiales et des matériaux
utilisés. Ceci demande une distinction entre les éléments porteurs et les éléments de

147
Voir Figure : Tokugawa, Nijo-jo, (Kyoto, 1626).
148
Anna Minguet et Patricia Martínez, Modular loft : creating flexible-use environments that optimize the space
(Sant Adrià de Besós, Barcelona : Monsa, 2017).
149
Chris Columbus, Harry Potter à l’école des sorciers, (2001).
150
Voir Figure : Yuko Shibata, Switch Apartment, (Tokyo, 2010).

145
séparations. Ces ouvertures possibles participent au système global, donnant plus de
libertés aux surfaces délimitantes.

Il serait intéressant de voir ce qu’il se passe quand nous attribuons à un même


espace plusieurs fonctions distinctes, en intégrant d’abord dans notre système une
part d’indécision quant à l’attribution programmatique des espaces, puis en résolvant
ces incohérences par une transformation spatiale grâce à ces éléments mobiles. Il faut
pour cela déterminer quels types d’espace peuvent fonctionner en symbiose et les
intégrer dans l’unité de l’habitat. Ces raisonnements pourraient augmenter la qualité
des habitats dans un cas où le projet se situe dans une zone de population très dense.

146
Figure 60 : Tokugawa, Nijo-jo, (Kyoto, 1626).

147
Figure 61 : Yuko Shibata, Switch Apartment, (Tokyo, 2010).

148
La Réutilisation et La Réhabilitation

Il y a un certain paradoxe dans un processus de réhabilitation car nous proposons


à un même groupe d’habitants une nouvelle manière de se regrouper. Nous marquons
une rupture de l’habitat dans la continuité de l’habitation, et en modifiant l’espace,
nous modifions les comportements de ses habitants. Il y a un avant et un après, une
articulation temporelle qui montre ces différences créées dans l’espace à travers le
temps. Ceci modifie le rapport des individus à un espace, et leur donne une autre idée
d’eux même, en leur proposant un futur différent. À travers ce changement, nous
pouvons modifier la relation de l’habitant avec l’habitat, mais aussi la relations entre
les habitants.

« L’espace est l’ensemble de toutes les places non seulement actuelles, mais
possible ; l’espace est de l’or de tous les coexistant possibles. L’espace est un
rapport qui mène aux possibles et donc à la réalité ; il est ce qui résulte des places
prises ensemble. » 151
Leibniz

Lors d’un changement de l’utilisation d’un habitat152, les premières questions à


poser sont de l’ordre du devenir et de l’appropriation du temps et de l’espace. C’est
l’homme qui a ici une fonction déterminante, par ses pratiques et ses comportements,
ainsi qu’une certaine forme d’investissement. Il doit se fixer et s’installer en faisant des
compromis liés à son espace. Le travail de l’architecte est de limiter ces compromis
en créant un espace qui peut soutenir des utilisations multiples pouvant s’adapter à
différents besoins. Mais au final, par le fait même de s’installer, en meublant par
exemple ou en aménageant, c’est l’habitant qui va se créer son propre espace. Les

151
Bernard Salignon, Qu’est-ce qu’habiter ?, p.130, Collection Penser l’espace (Paris : La Villette, 2010).
152
Voir Figure : Lacaton & Vassal, Extensions d'appartements, (Bordeaux, 2011).

149
réflexions sur les transformations et les améliorations de l’espace habité153 pour
s’adapter à un nouveau espace-temps ne sont pas les uniques vecteurs dans
l’amélioration d’un confort de vie. Dans le cas d’une rupture dans l’habitation, il n’y a
pas forcement une rupture de l’habitat, mais nous demandons plutôt à l’habitant de
réadapter son utilisation de l’espace. L’architecture est un cadre, et un changement
de cadre change une façon d’habiter. À l’inverse, un changement dans la façon
d’habiter induit-t-il une nécessité d’un changement de cadre ? Ce qui est sûr c’est
que la fixation d’un cadre, qui peut être un fondement, doit s’accompagner par des
mesures permettant d’adapter localement des éléments plus secondaires. Le cadre
crée par un système paramétrique doit pouvoir se soumettre à une réhabilitation en
temps voulu, sans pour autant changer l’articulation de son système.

153
Voir Figure : Buchner Bründler Architekten, Casa d'Estate, (Linescio, 2010).

150
Figure 62 : Lacaton & Vassal, Extensions d'appartements, (Bordeaux, 2011).

151
Figure 63: Buchner Bründler Architekten, Casa d'Estate, (Linescio, 2010).

152
Conception Paramétrique

Une conception paramétrique doit se faire en gardant à l’esprit que le processus


n’est pas automatique. Même s’il peut générer certaines conditions à partir de
données numériques existantes, l’architecte doit aussi y intégrer ses propres
observations, qui sont souvent subjectives, issues de ses expériences dans le
domaine de la construction. Pour rendre un projet paramétrique fort, il doit, en plus de
prendre en compte des conditions rationnelles, créer son propre langage à travers son
propre prisme conceptuel. Nous parlons de la rationalisation d’un processus, mais
c’est l’architecte qui va cristalliser son projet à partir des choix qu’il fait dans sa
sélection de conditions. Les outils paramétriques peuvent nous aider à réduire les
erreurs de conception en intégrant dans notre système plus de données que ce que
l’architecte peut percevoir par lui-même. Il faut comprendre que les outils
paramétriques restent des extensions de la pensée conceptuelle de l’architecte. De
plus, certains paramètres peuvent difficilement être intégrés dans un système
paramétrique, ce qui induit quelques inconnues. Ces inconnues demandent une
certaine flexibilité du système pour donner à l’architecte l’opportunité de les résoudre
par une analyse plus « humaine ». Mais nous rappelons que de nos jours, certains
d’architectes n’arrivent plus à concilier les facteurs de coûts et de temps du projet à
une qualité architecturale. C’est pourtant ce même système paramétrique qui pourrait
offrir à l’architecte la possibilité et le temps de se pencher sur ces parties plus
complexe d’un projet.

153
CONCLUSION

« Une réforme du paradigme paramétrique devrait être l'objectif plutôt que le


résultat, car le paramétrique ne s'est jamais imposé comme une idée intellectuelle
ou un style »154.
Yasser Zarei

Un style est un système d’éléments et de relations qui apparaissent avec divers


degrés de probabilité. Il indique la structure formelle la plus probable, établissant une
norme utilisable. Ses déviations mettent en avant ses alternatives, mais ces variations
présupposent que certaines propriétés restent constantes, tout en s’accomplissant
dans les limites de la constance formelle. Un style devient un style si ses formes
correspondent aux attentes humaines. Les outils paramétriques permettent la
construction d’un ensemble stylistique en conditionnant les éléments qui font le
système architectural de ce style. Le paradigme paramétrique est en train de devenir
une interprétation en profondeur de la signification des paramètres.

Nous avons essayé de déterminer à travers cet énoncé théorique les paramètres
qui affectent directement ou indirectement la manière d’appréhender un espace et
donc l’architecture. La fragmentation de l’architecture en spécialités nécessite un
travail en équipe, et la collaboration avec des spécialistes. L’architecte n’est plus
capable de travailler seul car l’architecture est devenue trop complexe. Mais il n’existe
pas de théorie de l’architecture intégrative. L’architecte doit être formé à la production
synthétique pour pouvoir fragmenter l’ensemble en éléments attribués aux différents
spécialistes. Sinon l’architecture restera un jeu de formes arbitraire incompréhensible.

154
Yasser Zarei, The Challenges of Parametric Design in Architecture Today : Mapping the Design Practice,
Thesis, Master of Philosophy, (Universtiy of machester 2012).

154
À partir de ce constat, le questionnement suivi pourrait être une manière d’aborder les
nouveaux outils numériques.

« La possibilité d'appliquer différentes règles à différents moments de la conception


d'une solution unique permet aux formes d'être flexible au sein d'un grand système
et de créer un large éventail de conceptions finales. » 155
Bryce Willis

Plutôt que d’utiliser ces outils pour traiter la forme, la préoccupation majeure
devrait être de recentrer l’humain dans un contexte spatial, car le rôle de l’architecture
est aussi de refléter les conditions sociales et culturelles d’un lieu. L’aide paramétrique
permet la compréhension et la création de la totalité architecturale, très complexe car
caractérisée par l’interdépendance de ses parties. Elle permet de considérer tous les
facteurs simultanément sans y être formé spécifiquement. Cela induit un processus
de conception entièrement associatif156, qui combine une méthodologie de conception
traditionnelle avec une méthode paramétrique, et qui définit une architecture d’une
plus grande complexité, basée sur des critères plus équilibrés. Il faut comprendre que
certaines choses ne peuvent pas être rationnalisées. Un modèle paramétrique est
donc limité dans les solutions qu’il peut offrir, ce qui rend l’automatisation complète
du processus de conception impossible et laisse ainsi place aux décisions et à
l’intuition de l’architecte.

155
Bryce Willis, A parametric Multi-Criterion Housing Typology, p. 503, University of Nebraska-Lincoln,
Synthetic Digital Ecologies, (ACADIA, 2012).
156
Bernard Cache, Chapitre 10 : Towards a Fully Associative Architecture, dans Branko Kolarevic, éd.,
Architecture in the Digital Age, (New York: Taylor & Francis, 2009).

155
Figure 64 : Traditionnal Workflow Method, dans Roland Hudson, Strategies for Parametric Design in
Architecture, Thesis, Doctor of Philosophy, University of Bath (2010).

Figure 65 : InternalBIM Workflow Model dans Roland Hudson, Strategies for Parametric Design in Architecture,
Thesis, Doctor of Philosophy, University of Bath (2010).

Figure 66 : Integrated Workflow Model, dans Roland Hudson, Strategies for Parametric Design in Architecture,
Thesis, Doctor of Philosophy, University of Bath (2010).

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