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Le management de projet
JEAN-JACQUES NÉRÉ
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Introduction
Chapitre I – Le point de départ : la gestion de projet
I. – Qu’est-ce qu’un projet ?
II. – La définition et l’ordonnancement des tâches, point de départ
de la mise en œuvre d’un projet
III. – Les techniques d’ordonnancement qui en résultent : PERT,
Gantt…
IV. – Maillage des tâches et optimisation des délais
V. – La prise en compte de l’économie du projet
VI. – La prise en compte des risques autres que managériaux
Chapitre II – Les conditions de fonctionnement : le management de
projet
I. – Passer de la gestion au management de projet
II. – Les acteurs et leurs rôles
III. – Les structures de management de projet et la transversalité
IV. – Les aspects relationnels
V. – La communication autour du projet
VI. – Les risques managériaux et les façons de s’en prémunir
Chapitre III – Les phases d’un projet
I. – La genèse du projet
II. – L’étude d’opportunité
III. – L’initialisation du projet
IV. – Le lancement
V. – La vie du projet
VI. – La clôture du projet
VII. – Les arbitrages entre projets
Chapitre IV – Le rôle du projet dans l’évolution du management
I. – Le projet, porteur de principes forts dans une logique de
contractualisation
II. – Le projet, porteur d’une vision transversale, prospective,
élément d’intégration des équipes
Chapitre V – Le projet, levier d’évolution ? Le management « par projet
»
Chapitre VI – Intérêt et limites culturelles du management de projet
I. – La justification du management de projet dans son universalité
II. – Ce que suppose le management par projet dans la culture
occidentale
III. – Projets et cultures locales : des barrières culturelles au
développement ?
Bibliographie
Notes
Introduction
Dans notre exemple. – Quelles seraient, dans notre exemple, les tâches à
accomplir ?
Les deux couples, se réunissant avec M. Alexandre qui connaissait bien
le pays, avaient projeté de réaliser les excursions suivantes :
– première semaine : après deux jours à Nouméa et une visite, dans le
Sud de la Grande-Terre, au lac de Yaté et aux chutes de la
Madeleine, ils iraient visiter le Nord de l’île, sur trois jours, avec
séjour en tribu et visite de la côte est et des sites miniers ;
– le week-end suivant serait consacré à une visite à l’île des Pins, avec
logement en gîte. Après le trajet Nouméaîle des Pins sur le
catamaran à grande vitesse Betico, le samedi serait consacré à une
visite de l’île en voiture de location, le dimanche à l’excursion en
pirogue dans la baie d’Upi, puis à la visite de la piscine naturelle
avec déjeuner à l’hôtel Méridien. Le retour serait prévu le dimanche
soir par le même moyen de transport qu’à l’aller ;
– la semaine suivante serait consacrée à une visite à l’île de Lifou,
l’une des îles Loyauté, dans l’est de la Grande-Terre, avec aller en
bateau, séjour en gîte et visite en voiture de location, retour en
avion ;
– le dernier week-end serait consacré à une visite au phare Amédée et
à sa réserve marine, et à des compléments de visite des sites de la
Province Sud, notamment autour de la baie de Prony.
L’ensemble des tâches de ce projet peut être représenté par la figure 2.
L’organisation de ces activités constitue la figure 2. En même temps, M.
Alexandre leur a proposé de noter la durée probable de chaque tâche,
l’événement qui permettrait de s’assurer que la tâche est bien terminée, les
tâches qui devraient la précéder et/ou la suivre.
M. Alexandre, qui avait l’habitude de mener des projets, leur indiqua
alors qu’en effet les tâches avaient généralement entre elles des relations
logiques, se traduisant par des liens chronologiques (voir figure 2 ci-après).
Le tableau ci-dessous, réalisé de façon sommaire au démarrage du projet,
permet de se faire une idée des tâches devant être réalisées pour lancer le
projet. Les seules relations entre tâches présentes dans cet exemple simple
sont des relations F-D et D-F (Fin à Début et Début à Fin2).
Devant cette liste, Les Martin et les Lefèvre demandèrent à M. Alexandre
s’il voulait bien prendre en charge les réservations d’avions, bateaux, hôtels
et voitures, étant donné qu’il disposait de toutes les informations pour le
faire. M. Alexandre accepta, et on regroupa en une seule les tâches
correspondantes (5 à 14) (voir fig. 3 ci-après) :
La liste des tâches se trouve simplifiée, le tableau est plus lisible et moins
fastidieux. Cependant, on peut d’ores et déjà remarquer que la tâche V ne
peut débuter qu’après que la tâche 4 a été achevée, alors que dans la version
précédente, la tâche 5 pouvait débuter dès la fin de la tâche 3, soit environ
une semaine avant. Ce regroupement de tâches est essentiel dans de grands
projets pour rendre le tableau d’ordonnancement des graphiques PERT et
Gantt lisibles, et pour rendre plus claires les responsabilités
Fig. 2. – Liste des tâches, des événements clôturant chacune d’elles, des durées estimées et des
tâches précédant chacune d’elles
Fig. 3. – Liste des tâches avec regroupement, des événements clôturant chacune d’elles, des
durées estimées et des tâches précédant chacune d’elles
La question qui se pose ensuite est de savoir quand mener à bien ces
différentes tâches pour que le projet respecte les contraintes définies au
départ, et notamment les contraintes de délais. Pour cela, nous allons
aborder les techniques d’ordonnancement propres à la gestion de projets,
qui en constituent la base historique et restent la pratique habituelle.
Nous verrons deux des méthodes les plus courantes d’ordonnancement :
le PERT et le calcul du chemin critique ;
le diagramme Gantt.
Le diagramme PERT permet de représenter chaque tâche sous forme de
rectangle, les liens entre tâches étant représentés par des flèches les reliant.
Chaque rectangle est porteur d’un certain nombre d’informations :
– le nom de la tâche ;
– sa durée ;
– la date de début au plus tôt ;
– la date de fin au plus tard ;
– la « marge », c’est-à-dire le temps que la tâche peut prendre excédant
sa durée normale pour que, démarrant à la date au plus tôt, elle se
termine à la date au plus tard. Cette « marge » dépassée, la tâche se
retrouve sur le chemin critique ;
– plusieurs autres informations peuvent être ajoutées, notamment les
besoins quantifiés des différents types de ressources requises pour
son exécution.
Ce diagramme se construit par calcul : en effet, étant donné les
définitions de tâches, leurs durées et les dépendances entre elles, les dates
au plus tôt et au plus tard sont calculées. On met ainsi en évidence le
chemin liant les tâches sans marge : si l’une de ces tâches prend plus de
temps que prévu, l’ensemble du projet « dérapera » en délai d’une valeur au
moins égale au dérapage de la tâche incriminée. C’est ce que l’on appelle le
« chemin critique ».
Dans notre exemple, les tâches précédemment décrites ont été traitées par
la méthode PERT, et le chemin critique a été mis en évidence : on constate
que pour un départ le 27 mai 2012, il faut prendre la décision initiale le
3 mars.
Les marges concernant les tâches ne faisant pas partie du chemin critique
sont assez larges, mais attention à la fable du lièvre et de la tortue ! Il faudra
tout de même s’y prendre à temps pour les réaliser.
Nous pouvons constater que cet effort de formalisation conduit
naturellement à compléter certains liens et à les préciser. L’une des
difficultés importantes consiste à estimer le plus exactement possible les
durées des diverses tâches et leur degré de dépendance. Ces difficultés
d’appréciation restent l’une des causes importantes des incertitudes pesant
sur le projet.
Le diagramme Gantt permet de visualiser sur un schéma chronologique
le parallélisme des tâches et leur durée. Il ne permet pas d’effectuer le
calcul du chemin critique. Cependant, la plupart des logiciels actuellement
sur le marché permettent de mettre en évidence les marges sur le
diagramme de Gantt lui-même, en associant la méthode PERT et la
représentation de Gantt.
Les logiciels de gestion de projet permettent en outre de définir les
ressources qui doivent être utilisées et leur degré d’occupation par les
différentes tâches, notamment lorsque celles-là sont effectuées en parallèle.
Fig. 4. – Diagramme PERT du voyage
Fig. 5. – Diagramme Gantt du voyage
C’est un troisième souci majeur qui se fait jour dès l’origine du projet.
Une première catégorie de risques peut être distinguée à ce stade technique
de la gestion du projet. Nous aborderons d’autres types de risques,
davantage liés au management du projet, ultérieurement.
La maîtrise d’ouvrage
C’est une partie fondamentale dans la conduite d’un projet. C’est elle qui
va permettre :
– de fédérer l’équipe projet, de lui donner une existence reconnue dans
son environnement de travail, contribuant au maintien de sa
motivation ;
– d’informer le reste de l’organisation de ce qui se fait en son sein et
d’éviter par là même les phénomènes de rumeurs ;
– d’informer l’extérieur de l’organisation, s’il y a lieu, essentiellement
pour susciter ou faciliter les accords et désamorcer les oppositions,
mais aussi pour obtenir des appuis, conseils, suggestions, et
provoquer les synergies utiles.
Cette fonction est particulièrement complexe dans le cadre de la conduite
d’un projet, du fait :
– de la diversité des intervenants et des angles de vue, chacun ayant
une façon de voir le problème que sa personnalité, ses compétences
et sa culture rendent différent ;
– de la diversité dans la perception des enjeux du projet pour chacun ;
– de la culture de chacun, ce qui implique des formulations qui, pour
être pertinentes, doivent être personnalisées en fonction des
interlocuteurs.
Il convient donc, là plus encore qu’habituellement, de se poser les
questions classiques mais, hélas, trop souvent absentes des réflexions des
responsables quel que soit leur niveau :
– Que communiquer, à qui, quand et pourquoi ?
– Comment communiquer vers chacune des cibles ?
– Quel risque prend-on vers ne pas communiquer ?
– Quel risque prend-on en communiquant vers tel ou tel interlocuteur ?
Ces questions étant régulièrement posées, il convient de les traiter de la
façon la plus professionnelle possible, un amateurisme de mauvais aloi
devant être banni. La largeur de vue que nécessite cette communication,
ainsi que les aspects politiques qu’elle implique sont généralement à
l’origine de sa prise en charge par le promoteur et la maîtrise d’ouvrage.
C’est même la seule « tâche » opérationnelle qui relève de cette maîtrise
d’ouvrage.
Ces risques sont importants, et souvent négligés par ceux-là mêmes qui
devraient s’en préoccuper le plus. On peut citer les suivants :
I. – La genèse du projet
Le futur projet est maintenant sorti des limbes. Mais il n’est pas encore
question de le lancer : il faut d’abord vérifier qu’il est viable, qu’il possède
le minimum de qualités nécessaires pour parvenir à son terme.
C’est l’objet de l’étude d’opportunité. Cette dernière doit rassembler,
analyser, compléter les informations permettant de décider si le projet est
viable et peut être poursuivi. La décision de lancer ou non le projet au vu
des conclusions de l’étude d’opportunité relève également du comité
d’arbitrage ou à défaut du comité de direction.
Cette étude doit contenir les éléments suivants :
Analyse des risques. – Nous avons vu, dans le chapitre consacré aux
techniques de gestion de projet, comment appréhender et formaliser les
risques inhérents au projet. Il est important de faire un inventaire des
risques que l’on peut percevoir à ce stade, de leur gravité, de leur
probabilité d’occurrence, des contre-mesures possibles. Si ces risques sont
trop importants par rapport aux enjeux, il appartiendra à la maîtrise
d’ouvrage de renoncer au projet ou de le transformer de telle sorte que les
risques principaux soient atténués ou supprimés.
Ces qualités, qui sont demandées à tous les membres de l’équipe, il est
évident que le chef de projet doit les posséder à un degré suffisant. Un chef
de projet autoritaire, misanthrope, colérique, acariâtre ou doté d’une
capacité d’écoute par trop limitée fera immanquablement échouer le projet
le plus prometteur.
Ces différents thèmes à traiter, que nous avons distingués ici pour la
clarté du raisonnement, se regroupent souvent dans la même réunion du
comité : lorsqu’une étape se termine, par exemple, il est assez évident
qu’une autre va commencer, et le bilan de l’une et la présentation de l’autre
se feront au cours de la même séance.
Ces considérations devraient suffire à positionner les réunions du comité
de pilotage au cours du projet. Cependant, il faudra aussi tenir compte
d’une fréquence « nécessaire et suffisante » : cette fréquence de réunion
doit en effet être suffisante pour que les membres du comité ne « perdent
pas le fil » du projet entre deux réunions successives ; elle ne doit pas être
d’autre part trop rapprochée pour que les vrais décideurs puissent y assister.
Des réunions intermédiaires doivent alors être positionnées, en s’efforçant
de leur faire correspondre la fin de tâches importantes.
IV. – Le lancement
• Présentation du projet.
Au cours de ces réunions, il commencera par présenter le projet, la
spécificité du rôle qu’il propose à l’intervenant en question, le cadre qu’il
lui propose pour leurs relations, les règles du jeu du travail en équipe telles
qu’il les comprend : contrôle, points sur lesquels portera le devoir d’alerte,
règles de documentation et de communication au sein du projet.
V. – La vie du projet
Avoir une vision large des problèmes. – Ces éléments étant collectés, il
faudra que le chef de projet et son équipe prennent un maximum de recul :
en effet, dans tout projet :
– les acteurs sont multiples ;
– les domaines abordés s’entrecroisent ;
– les interférences sont multiples.
Devant un problème donné, il faut se garder de se contenter d’une
analyse trop rapide des choses, qui risquerait de n’aboutir qu’à une vision
parcellaire, privilégiant une cause immédiate sans déceler les causes plus
profondes.
Revue de forme :
– La détection du problème : d’où est-elle venue ? Aurait-on pu
déceler le problème plus tôt ?
– L’alerte : par qui, dans quel délai, le devoir d’alerte a-t-il été
respecté ?
– Les mesures conservatrices ont-elles été prises ?
– L’analyse du problème a-t-elle été faite par un groupe correctement
constitué ?
– Les conclusions ont-elles pris la forme d’analyse de solutions en
termes d’actions ?
– La remontée d’informations a-t-elle été bien gérée ?
– À quel moment le promoteur a-t-il été informé ? Était-ce le bon
moment ?
Revue de fond :
– Est-on bien revenu sur les objectifs du projet ?
– Les différents aspects du problème ont-ils été pris en compte ?
– Les solutions trouvées sont-elles réalistes ?
– Leur présentation comprend-elle les enjeux, les alternatives, les
moyens à mettre en œuvre ?
– La présentation de ces solutions met-elle clairement en évidence les
choix possibles ?
Le rapport au temps. – Nous avons créé une relation au temps qui vise à
le maîtriser – si tant est que cela ait un sens –, en tout cas à le prévoir, le
planifier, suivre ce que l’on fait et que le temps enserre. C’est un élément
majeur du management de projet, et l’une de ses contraintes fortes et
permanentes.
Que cette relation au temps soit plus lâche, et la façon de mener un projet
est profondément modifiée. Il nous est souvent arrivé d’être très contrarié,
en arrivant dans certains pays, de constater que les engagements pris et
planifiés n’étaient pas tenus et que cela semblait ne déranger personne. Le
conflit entre un calendrier personnel surchargé et ce qui apparaissait comme
une désinvolture choquante était en réalité purement culturel… mais bien
gênant pour mener un projet comme nous avons pu le décrire !