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QUE SAIS-JE ?

Le management de projet

JEAN-JACQUES NÉRÉ

Quatrième édition mise à jour


11e mille
À lire également en
« Que sais-je ? »

Raymond-Alain Thietart, Le management, n° 1860


Jean-Pierre Boutinet, Psychologie des conduites à projet, n° 2770
Sylvie Chevrier, Le management interculturel, n° 2535
Alain Bouvier, Management et sciences cognitives, n° 3711
Pierre Angel, Patrick Amar, Le coaching, n° 3724
978-2-13-073330-0

Dépôt légal – 1re édition : 2006


4e édition mise à jour : 2015, septembre

© Presses Universitaires de France, 2006


6, avenue Reille, 75014 Paris
Sommaire

Page de titre
À lire également en « Que sais-je ? »
Page de Copyright
Introduction
Chapitre I – Le point de départ : la gestion de projet
I. – Qu’est-ce qu’un projet ?
II. – La définition et l’ordonnancement des tâches, point de départ
de la mise en œuvre d’un projet
III. – Les techniques d’ordonnancement qui en résultent : PERT,
Gantt…
IV. – Maillage des tâches et optimisation des délais
V. – La prise en compte de l’économie du projet
VI. – La prise en compte des risques autres que managériaux
Chapitre II – Les conditions de fonctionnement : le management de
projet
I. – Passer de la gestion au management de projet
II. – Les acteurs et leurs rôles
III. – Les structures de management de projet et la transversalité
IV. – Les aspects relationnels
V. – La communication autour du projet
VI. – Les risques managériaux et les façons de s’en prémunir
Chapitre III – Les phases d’un projet
I. – La genèse du projet
II. – L’étude d’opportunité
III. – L’initialisation du projet
IV. – Le lancement
V. – La vie du projet
VI. – La clôture du projet
VII. – Les arbitrages entre projets
Chapitre IV – Le rôle du projet dans l’évolution du management
I. – Le projet, porteur de principes forts dans une logique de
contractualisation
II. – Le projet, porteur d’une vision transversale, prospective,
élément d’intégration des équipes
Chapitre V – Le projet, levier d’évolution ? Le management « par projet
»
Chapitre VI – Intérêt et limites culturelles du management de projet
I. – La justification du management de projet dans son universalité
II. – Ce que suppose le management par projet dans la culture
occidentale
III. – Projets et cultures locales : des barrières culturelles au
développement ?
Bibliographie
Notes
Introduction

Il serait anachronique et présomptueux de faire remonter la notion de


projet à une époque récente. En réalité, il est certain que les hommes ont
connu et manipulé les concepts sous-tendant la notion de projet depuis des
millénaires : les grands travaux d’Égypte ou d’Assyrie, les temples aztèques
ou les routes romaines, les travaux d’adduction d’eau et d’irrigation de
l’Antiquité, les expéditions militaires de grande envergure, les constructions
navales, les grandes entreprises commerciales n’ont pu voir le jour que
parce que leurs responsables avaient assimilé, d’une manière ou d’une
autre, les notions de partage de responsabilités, de gestion en parallèle des
tâches, de calendrier de réalisation, de budget et même de gestion des
risques.
C’est cependant au cours du XXe siècle, et en particulier dans leur
généralisation au cours de la dernière guerre mondiale, que ces notions ont
été formalisées, intégrées dans des méthodologies et se sont imposées
comme mode courant de management tant dans les organismes publics que
dans les entreprises privées ou les associations.
L’histoire de cette formalisation est intéressante pour ce qu’elle nous
apporte dans la manière de mener un projet, mais surtout parce que les
outils qu’elle a engendrés ont permis d’aller au-delà des besoins techniques
qu’ils cherchaient à satisfaire.
En 1917, Henry L. Gantt, un ingénieur disciple de Frederick Taylor, doit
optimiser la production d’un atelier. Plusieurs stades de fabrication
coexistent. Il constate que certaines opérations dépendent de la réalisation
d’autres, tissant ainsi entre elles un réseau de dépendances. Il en déduit que
certaines opérations peuvent être menées en parallèle, que d’autres doivent
se succéder.
Dans le but d’optimiser les temps de fabrication en utilisant cette
possibilité de travail en parallèle, il développe un système de représentation
graphique des activités sur une échelle de temps : le diagramme à barres.
Chaque tâche à réaliser est représentée par une barre d’une longueur
proportionnelle à sa durée estimée. Il y a une ligne par tâche. Les
dépendances se traduisent par la position des barres les unes par rapport aux
autres. L’affichage graphique en fait en outre un outil de communication
entre les acteurs du processus. Aujourd’hui, on parle de « diagramme de
Gantt » :

Fig. 1. – Diagramme de Gantt

Dans les années 1950, les sociétés Dupont de Nemours et Remington


Rand cherchent une technique qui permette de gérer au mieux un grand
nombre de tâches liées entre elles. À la même époque, Morgan Walter et
James Kelley mettent au point un algorithme de calcul, le CPM (Critical
Path Method, ou méthode du chemin critique). Cet algorithme permet de
calculer la durée totale d’un projet à partir de la durée de chaque tâche et
des liaisons existant entre elles : le chemin critique est l’ensemble des
tâches telles que toute augmentation de durée de l’une d’elles entraîne une
augmentation au moins égale de la durée totale du projet. Les tâches situées
sur le chemin critique ou proches de ce chemin1 devront être
particulièrement surveillées dans une optique de contrôle des délais.
Parallèlement au CPM, la méthode PERT (Program Evaluation and
Review Technique) est créée par la marine américaine, après des essais
méthodologiques au cours de la guerre du Pacifique, pour l’élaboration de
ses missiles Polaris. Cette technique met graphiquement en évidence des
relations entre les tâches. Elle permet d’intégrer les dates de début et de fin
au plus tôt et au plus tard, à partir d’estimation des durées de chaque tâche
selon une hypothèse optimiste, probable, pessimiste. Elle permet enfin de
tenir compte des centaines de tâches composant les gros projets qui voient
le jour à cette époque.
Dès 1958, le calcul mathématique du CPM (devenu « chemin critique »)
est appliqué au PERT. Par ce raisonnement, toute modification de la durée
d’une tâche située sur ce chemin critique entraîne une modification dans la
date de fin du projet. L’un des avantages majeurs de cette méthode est
l’optimisation des délais d’un projet par la « parallélisation » systématique
de toutes les tâches pouvant l’être. La marine américaine, utilisant ces
méthodes, estime n’avoir passé que cinq ans sur le projet Polaris au lieu des
sept prévus.
Ces méthodes, perfectionnées au cours du temps et informatisées dans
des logiciels ad hoc, se sont depuis largement répandues.
Aujourd’hui, on conjugue ces techniques. Un « Gantt » affiche les
relations entre les tâches et se combine avec un réseau PERT pour aussi
afficher le chemin critique.
Les techniques de gestion de projets s’appliquent depuis la fin de la
Seconde Guerre mondiale à de nombreux secteurs d’activité : l’industrie
lourde, les constructions aéronautiques, automobiles et navales, les travaux
publics, l’informatique, mais aussi plus récemment de très nombreux
projets visant des transformations organisationnelles, dans tous les secteurs.
Cet aspect certes « mécaniste » de la gestion de projets reste une base
incontournable pour qui veut parler projets. Il est cependant loin d’être le
seul qui doive être envisagé.
Tout d’abord, tout projet suppose par définition une projection dans
l’avenir, avec le lot d’incertitudes qu’une telle projection comporte
nécessairement. Chaque projet présente un certain caractère de nouveauté
par rapport aux pratiques existantes, qui ajoute encore des facteurs de
risques et d’incertitudes.
De plus, les projets conjuguent de multiples compétences internes ou
externes à l’organisme qui le mène : la réalisation d’un projet suppose la
contribution de multiples acteurs ayant chacun une vision, des intérêts, des
cultures différents. Aussi, aux techniques que nous avons évoquées plus
haut s’ajoute une dimension capitale en matière de management de projet :
comment faire travailler ensemble efficacement des acteurs dissemblables
et prendre les bonnes décisions ménageant un degré de risque acceptable ?
C’est là le cœur du management de projet.
Comme nous le verrons, les exigences du management de projet ont
nécessité l’émergence de qualités particulières au sein des équipes projets :
aptitudes à travailler de façon collective et « systémique », à imaginer des
solutions inédites, à accepter et accompagner les changements les plus
importants.
L’étape suivante, souhaitée par un nombre croissant d’organismes,
consiste à considérer que le processus de management de projet peut être
recherché pour lui-même : il s’agit dès lors moins d’atteindre un résultat
matériel tangible que d’amener les acteurs du projet à vivre un processus de
changement. C’est la logique de ce qu’on appelle le « management par
projet ». Le changement est alors considéré comme possible s’il est mené
selon ce processus participatif, qui devient presque une fin en soi.
Enfin, les organismes entreprenant de mener à bien de nombreux projets
doivent mettre en place des structures de coordination et d’arbitrage de ces
« portefeuilles de projets ».
Le management de projet, outre le fait de comporter un outillage
technique, est donc en lui-même un vecteur de transformations fortes dans
les pratiques managériales. Généralisé aux grands projets nationaux et
internationaux, il s’impose comme norme de réflexion et d’action, ciment
du développement dirigé et financé par nos sociétés occidentales.
Chapitre I
Le point de départ : la gestion de projet

I. – Qu’est-ce qu’un projet ?

« Faire des projets », dans le langage courant, c’est « projeter » sa propre


action dans l’avenir, avec l’incertitude attachée à cette activité du fait même
qu’elle se déroule dans l’avenir. Cela s’applique aussi bien à un projet
personnel, familial, de vacances, qu’à un projet professionnel tel qu’on le
rencontre dans nos organisations.
Il s’agit tout d’abord de savoir quand l’idée générale, l’intention encore
vague qui est toujours première, se transforme en un « projet ».
Prenons par exemple l’envie qu’ont M. et Mme Martin de faire un voyage
d’agrément en Nouvelle-Calédonie avec un couple ami, les Lefèvre. Les
Martin ont une relation, M. Alexandre, qui a eu l’occasion de se rendre sur
ce territoire plusieurs fois pour son travail, et en a rapporté films et photos
qui ont tenté les Martin et les Lefèvre. Cette idée, évoquée lors d’un dîner,
enthousiasme les deux couples. Mais quand cette idée se transformera-t-elle
véritablement en projet ? Il faudra pour cela préciser les objectifs, c’est-à-
dire les goûts et envies de chacun, les périodes possibles, le budget que
chacun est prêt à y consacrer. Il faudra ensuite définir précisément toutes les
tâches qui doivent être effectuées pour permettre ce voyage… puis il faudra
définir qui fait quoi dans l’organisation du voyage, voir quelle aide M.
Alexandre est prêt à leur offrir, enfin, accomplir ces tâches en gérant les
imprévus.
Dans un projet d’entreprise, il s’agit aussi toujours de prévoir, planifier,
cerner le mieux possible une action dans l’avenir. Le projet professionnel
est, d’autre part, une démarche impliquant plusieurs acteurs. Elle est enfin
généralement d’une ampleur telle qu’elle mérite d’être formalisée
davantage. Cependant, les principes restent les mêmes, et nous nous
servirons de l’exemple simple de l’organisation d’un voyage pour les
illustrer. Bien entendu, nous examinerons également certaines
caractéristiques qui ne se rencontrent que dans de grands projets,
évidemment plus complexes que celui que nous prenons comme exemple,
limité en taille et en complexité pour pouvoir être facilement appréhendé
dans le cadre de cet ouvrage.
Essayons donc de caractériser cette démarche, de façon aussi
pragmatique que possible.

Il s’agit d’une démarche conduisant à des résultats observables


destinés à un ou plusieurs bénéficiaires, accompagnée d’un faisceau de
contraintes. – Sans la recherche d’un résultat concret, précisant son ou ses
bénéficiaires, il n’y a pas de projet. C’est en effet la seule réponse possible à
la question : « Pourquoi entreprendre ce projet ? » Le fait de préciser
l’objectif en termes de résultats attendus pour des destinataires, et de
préciser les contraintes correspondantes, est primordial.
Dans notre exemple, la définition des activités à prévoir, des visites à
effectuer, du niveau de confort de l’hôtellerie et des moyens de transport
sont essentiels. De même sont essentielles les contraintes portant sur le
budget à prévoir et les périodes possibles.

La démarche ne peut pas être totalement répétitive. – Elle présente en


effet toujours un caractère partiellement singulier. Si l’on pouvait décrire de
façon déterministe tant le processus que les résultats, il s’agirait d’une
procédure figée, pas d’un projet. Toute organisation définit de telles
procédures, pour ce qu’elle sait faire de façon routinière. Il n’y a dans ce
dernier cas ni inconnu, ni initiative, ni décision véritable. On peut dire que
l’on passe de la procédure au projet du fait du caractère non répétitif,
singulier pour au moins une part, du processus engagé.

La démarche présente un caractère incertain. – Dans notre exemple,


même si le fait de commander un billet d’avion est une tâche parfaitement
maîtrisée, l’ensemble des tâches concourant à la réalisation du projet et les
choix qui sont faits sont originaux et entachés d’une part d’incertitude. Ce
caractère incertain résulte du fait de sa singularité et du fait qu’elle se
projette dans l’avenir. Cette incertitude fait intégralement partie de la vie
des projets : dans la mesure où plusieurs des éléments constitutifs du projet
sont nouveaux et que le projet se déroule par définition dans l’avenir, il est
soumis d’une part aux aléas provenant de l’environnement, d’autre part aux
défauts d’appréciation des éléments nouveaux non encore maîtrisés par les
membres de l’équipe projet.
Dans notre exemple, les souhaits de visites peuvent se trouver
compliqués par des difficultés d’organisation, des impossibilités
budgétaires, des contraintes climatiques, des mouvements sociaux… et la
réalisation s’avérer différente de ce qui était souhaité à l’origine.

La démarche nécessite la mise en œuvre de plusieurs activités


complémentaires. – La multiplicité des contributions possibles, et
généralement, de ce fait, des acteurs qui interviennent dans la vie du projet,
rend cette complémentarité inhérente à la notion de projet.
Dans notre exemple, cette multiplicité d’activités complémentaires est
évidemment plus limitée que dans un projet professionnel important.
Cependant, on pourra mettre en évidence les activités très différentes de
réservations de prestations, de financement, de « pose de congés », de
composition des bagages avec les vêtements adaptés, etc.
II. – La définition et l’ordonnancement des tâches, point de
départ de la mise en œuvre d’un projet

Historiquement, nous avons vu que la première action concrète


permettant de matérialiser la réalisation d’un projet est sa décomposition en
tâches élémentaires, puis leur ordonnancement.
Il s’agit de lister l’ensemble de ce qui doit être fait pour que le projet
atteigne les résultats visés, sous forme d’unités élémentaires d’activités
homogènes. Chacune de ces unités peut être définie par son objet,
l’événement qui la déclenche et l’événement qui en précise la fin,
l’estimation de sa durée, les moyens qu’elle implique, enfin les tâches qui
lui sont logiquement rattachées avec la chronologie correspondante. La
tâche est le plus fin des éléments d’action du projet.

Dans notre exemple. – Quelles seraient, dans notre exemple, les tâches à
accomplir ?
Les deux couples, se réunissant avec M. Alexandre qui connaissait bien
le pays, avaient projeté de réaliser les excursions suivantes :
– première semaine : après deux jours à Nouméa et une visite, dans le
Sud de la Grande-Terre, au lac de Yaté et aux chutes de la
Madeleine, ils iraient visiter le Nord de l’île, sur trois jours, avec
séjour en tribu et visite de la côte est et des sites miniers ;
– le week-end suivant serait consacré à une visite à l’île des Pins, avec
logement en gîte. Après le trajet Nouméaîle des Pins sur le
catamaran à grande vitesse Betico, le samedi serait consacré à une
visite de l’île en voiture de location, le dimanche à l’excursion en
pirogue dans la baie d’Upi, puis à la visite de la piscine naturelle
avec déjeuner à l’hôtel Méridien. Le retour serait prévu le dimanche
soir par le même moyen de transport qu’à l’aller ;
– la semaine suivante serait consacrée à une visite à l’île de Lifou,
l’une des îles Loyauté, dans l’est de la Grande-Terre, avec aller en
bateau, séjour en gîte et visite en voiture de location, retour en
avion ;
– le dernier week-end serait consacré à une visite au phare Amédée et
à sa réserve marine, et à des compléments de visite des sites de la
Province Sud, notamment autour de la baie de Prony.
L’ensemble des tâches de ce projet peut être représenté par la figure 2.
L’organisation de ces activités constitue la figure 2. En même temps, M.
Alexandre leur a proposé de noter la durée probable de chaque tâche,
l’événement qui permettrait de s’assurer que la tâche est bien terminée, les
tâches qui devraient la précéder et/ou la suivre.
M. Alexandre, qui avait l’habitude de mener des projets, leur indiqua
alors qu’en effet les tâches avaient généralement entre elles des relations
logiques, se traduisant par des liens chronologiques (voir figure 2 ci-après).
Le tableau ci-dessous, réalisé de façon sommaire au démarrage du projet,
permet de se faire une idée des tâches devant être réalisées pour lancer le
projet. Les seules relations entre tâches présentes dans cet exemple simple
sont des relations F-D et D-F (Fin à Début et Début à Fin2).
Devant cette liste, Les Martin et les Lefèvre demandèrent à M. Alexandre
s’il voulait bien prendre en charge les réservations d’avions, bateaux, hôtels
et voitures, étant donné qu’il disposait de toutes les informations pour le
faire. M. Alexandre accepta, et on regroupa en une seule les tâches
correspondantes (5 à 14) (voir fig. 3 ci-après) :
La liste des tâches se trouve simplifiée, le tableau est plus lisible et moins
fastidieux. Cependant, on peut d’ores et déjà remarquer que la tâche V ne
peut débuter qu’après que la tâche 4 a été achevée, alors que dans la version
précédente, la tâche 5 pouvait débuter dès la fin de la tâche 3, soit environ
une semaine avant. Ce regroupement de tâches est essentiel dans de grands
projets pour rendre le tableau d’ordonnancement des graphiques PERT et
Gantt lisibles, et pour rendre plus claires les responsabilités
Fig. 2. – Liste des tâches, des événements clôturant chacune d’elles, des durées estimées et des
tâches précédant chacune d’elles
Fig. 3. – Liste des tâches avec regroupement, des événements clôturant chacune d’elles, des
durées estimées et des tâches précédant chacune d’elles

Dans la généralité. – Le premier travail de la personne en charge du


projet sera de préciser l’ensemble des tâches qui le composent et leur
ordonnancement : nous verrons qu’il s’agira d’un « chef de projet »,
mandaté pour être responsable de sa bonne fin. Une fois fixés les objectifs
et les contraintes majeures du projet, il devra diviser le projet en tâches. Ce
sera là de sa part une première définition, car il ne sera pas spécialiste de
tous les domaines mis en jeu dans le projet. Cependant, ce premier travail
devra être fait, car il représentera l’ossature du projet.
Mais peut-on préciser, au-delà des critères cités précédemment3, cette
notion de tâche ? Il s’agit d’une fraction du projet :
– relative à une spécialité donnée ;
– qui peut être confiée à un responsable unique, compétent dans cette
spécialité ;
– qui fait appel à des intervenants eux aussi bien identifiés ou
identifiables ;
– dont le délai de réalisation peut être évalué ;
– qui peut être quantifiée en termes de ressources, elles-mêmes
clairement identifiées et chiffrées.
Lorsqu’on chiffre une tâche, que fait-on ?
– On décrit le plus précisément possible comment elle doit se
dérouler ;
– on chiffre le temps que doit y passer chaque intervenant
(généralement en jours × hommes). En se fondant sur l’évaluation
du coût à la journée de chacun des intervenants (établi
indépendamment des tâches sur lesquelles ils interviennent), on
arrive donc à un coût global des ressources humaines relatif à cette
tâche ;
– on chiffre les autres sources de coûts (en les précisant) ;
– on évalue les délais nécessaires, autres que les délais dus au degré de
disponibilité des hommes.
Il faut faire cela pour chacune des tâches du projet. Des logiciels de
gestion de projet peuvent servir aujourd’hui de guide et d’appui pour ce
travail, mais il est clair qu’ils ne remplacent pas l’évaluation elle-même.
Un problème se pose lorsque le chef de projet manque de compétence sur
telle ou telle tâche au point de ne pas être capable d’ébaucher ce travail
d’évaluation. Ce cas doit rester l’exception, le chef de projet devant avoir
une bonne compétence globale sur les domaines couverts par le projet. Il
n’est pas interdit qu’il s’entoure de l’avis de spécialistes, internes ou
externes. Sa compétence sur tel ou tel sujet peut en effet aussi bien provenir
de ses connaissances propres que de sa capacité à mobiliser les
compétences de tiers.

III. – Les techniques d’ordonnancement qui en résultent :


PERT, Gantt…

La question qui se pose ensuite est de savoir quand mener à bien ces
différentes tâches pour que le projet respecte les contraintes définies au
départ, et notamment les contraintes de délais. Pour cela, nous allons
aborder les techniques d’ordonnancement propres à la gestion de projets,
qui en constituent la base historique et restent la pratique habituelle.
Nous verrons deux des méthodes les plus courantes d’ordonnancement :
le PERT et le calcul du chemin critique ;
le diagramme Gantt.
Le diagramme PERT permet de représenter chaque tâche sous forme de
rectangle, les liens entre tâches étant représentés par des flèches les reliant.
Chaque rectangle est porteur d’un certain nombre d’informations :
– le nom de la tâche ;
– sa durée ;
– la date de début au plus tôt ;
– la date de fin au plus tard ;
– la « marge », c’est-à-dire le temps que la tâche peut prendre excédant
sa durée normale pour que, démarrant à la date au plus tôt, elle se
termine à la date au plus tard. Cette « marge » dépassée, la tâche se
retrouve sur le chemin critique ;
– plusieurs autres informations peuvent être ajoutées, notamment les
besoins quantifiés des différents types de ressources requises pour
son exécution.
Ce diagramme se construit par calcul : en effet, étant donné les
définitions de tâches, leurs durées et les dépendances entre elles, les dates
au plus tôt et au plus tard sont calculées. On met ainsi en évidence le
chemin liant les tâches sans marge : si l’une de ces tâches prend plus de
temps que prévu, l’ensemble du projet « dérapera » en délai d’une valeur au
moins égale au dérapage de la tâche incriminée. C’est ce que l’on appelle le
« chemin critique ».
Dans notre exemple, les tâches précédemment décrites ont été traitées par
la méthode PERT, et le chemin critique a été mis en évidence : on constate
que pour un départ le 27 mai 2012, il faut prendre la décision initiale le
3 mars.
Les marges concernant les tâches ne faisant pas partie du chemin critique
sont assez larges, mais attention à la fable du lièvre et de la tortue ! Il faudra
tout de même s’y prendre à temps pour les réaliser.
Nous pouvons constater que cet effort de formalisation conduit
naturellement à compléter certains liens et à les préciser. L’une des
difficultés importantes consiste à estimer le plus exactement possible les
durées des diverses tâches et leur degré de dépendance. Ces difficultés
d’appréciation restent l’une des causes importantes des incertitudes pesant
sur le projet.
Le diagramme Gantt permet de visualiser sur un schéma chronologique
le parallélisme des tâches et leur durée. Il ne permet pas d’effectuer le
calcul du chemin critique. Cependant, la plupart des logiciels actuellement
sur le marché permettent de mettre en évidence les marges sur le
diagramme de Gantt lui-même, en associant la méthode PERT et la
représentation de Gantt.
Les logiciels de gestion de projet permettent en outre de définir les
ressources qui doivent être utilisées et leur degré d’occupation par les
différentes tâches, notamment lorsque celles-là sont effectuées en parallèle.
Fig. 4. – Diagramme PERT du voyage
Fig. 5. – Diagramme Gantt du voyage

IV. – Maillage des tâches et optimisation des délais

Nous avons vu que des tâches pouvaient être regroupées en


« macrotâches », ces macrotâches pouvant même se transformer pour les
projets importants en véritables sous-projets avec leurs objectifs (résultats
attendus de la macrotâche) et contraintes (délai global, coût et qualité).
Pourquoi regrouper les tâches ? – Les gros projets peuvent comporter
des centaines, voire des milliers de tâches. Les principaux logiciels de
gestion de projets peuvent techniquement en ordonnancer une grande
quantité, mais cette masse d’informations peut se révéler ingérable : nul ne
peut embrasser la réalité de plusieurs milliers, ou même de plusieurs
centaines de tâches. Alors, on peut s’efforcer de regrouper les tâches
isolables du reste des tâches du projet, pour lesquelles on peut définir un
résultat unique. C’est ce que nous avons vu dans l’exemple traité
précédemment.
Une autre raison qui conduit à regrouper les tâches est que, pour des
besoins de gestion, ces dernières doivent être de tailles analogues : en effet,
la disproportion entre les tâches soit en durée, soit en consommation de
ressources empêche d’en assurer vraiment le suivi. Ce dernier est toujours
fondé sur des comparaisons, en particulier de délais et de coûts, et il faut
pour cela que les valeurs rattachées aux diverses tâches soient comparables.
C’est ce qu’on appelle le « maillage » des tâches. Pour fixer les idées, un
projet reste maîtrisable s’il est décomposé en quelques dizaines de tâches ou
de sous-projets (une centaine au maximum), chaque sous-projet pouvant
être lui-même décomposé en un nombre comparable de tâches.
Ainsi, un grand projet pourra être décomposé en quelques dizaines de
sous-projets, eux-mêmes divisés en tâches. Le responsable du projet global
pourra avoir une vision globale des sous-projets, et chacun des responsables
des sous-projets pourra maîtriser les tâches élémentaires lui incombant. On
pourra, en cas de problème, analyser le détail, mais sans perdre la vision
d’ensemble.

Réduire les délais en revenant au niveau de détail ? – Intéressons-nous


maintenant aux tâches situées sur le chemin critique, que l’on cherche
presque toujours à réduire. Une optimisation « quasi mécanique » des délais
est souvent possible. Prenons le cas simple qui nous a servi d’exemple
précédemment : le chemin critique nous montre qu’un délai de treize
semaines sépare la décision de partir du jour du départ, en se fondant sur les
hypothèses prises. Supposons que nous voulions réduire ce délai : il faudra
s’intéresser en priorité aux tâches faisant partie du chemin critique, une
réduction des durées des autres tâches n’ayant par définition pas d’impact
sur la durée totale du projet. Pour cela, ce qui est souvent fait est de
s’interroger sur la validité des estimations de durée faites initialement pour
chacune de ces tâches.
Cette pratique nous semble douteuse : elle dénote soit un laxisme
condamnable dans l’évaluation première des durées, ce qui jette un doute
sur la fiabilité des prévisions faites, soit une tentative de réduire
exagérément des prévisions faites initialement en toute honnêteté, ce qui
augure mal de la réalité des délais que l’on pourra effectivement tenir.
La règle que l’on devrait se fixer est d’être le plus honnête possible sur
ses estimations initiales, pour ensuite s’y tenir sans chercher à les
« biaiser » pour les besoins de la cause.
En revanche, il y a souvent un moyen de réduire les délais de façon
mécanique. Dans notre cas, des tâches avaient été regroupées sous l’intitulé
« V – Effectuer les réservations avions, bateaux, hôtels, gîtes et tribus,
voitures », ce qui pouvait être considéré comme un sous-projet. Ce sous-
projet était prévu pour durer trois semaines. Une tâche du chemin critique
dépend directement de son achèvement : « 16. Fixer le budget définitif ».
Or, il est clair que point n’est besoin d’avoir achevé totalement le sous-
projet et d’avoir effectué toutes les réservations pour fixer le budget : il
suffit d’avoir choisi les prestataires et le type de prestations, et d’en avoir
estimé le coût.
Fig. 6. – Optimisation des délais dans un projet
Fig. 6bis. – Diagramme de Gantt d’optimisation des délais

Entrant dans le détail des tâches de ce sous-projet, on pourra alors les


transformer pour rendre cette évaluation possible en début de sous-projet,
raccourcissant de ce fait les délais devant être pris en compte dans le
chemin critique.
Le budget pourra ainsi être établi dès que cette tâche aura été effectuée.
Le reste du sous-projet sortira du chemin critique, et ce dernier se trouvera
raccourci de deux semaines, sans toucher aux délais primitivement évalués
ni à la marche générale du projet.
C’est ainsi qu’un examen attentif de la décomposition des tâches et des
relations de dépendance entre les tâches permettra d’optimiser le calendrier,
tout en rationalisant le projet, et de retarder d’autant la décision définitive
de lancer le projet.

V. – La prise en compte de l’économie du projet

La deuxième évaluation classique d’un projet est celle des coûts.


Elle porte généralement sur deux chapitres bien distincts :
– l’évaluation économique du produit fini ou de l’investissement dont
l’étude est l’objet du projet. Cette évaluation n’existe évidemment
que lorsque le projet doit déboucher sur ce type de résultat. Elle
comporte l’évaluation économique des bénéfices pour le destinataire
du projet ;
– l’évaluation du coût du projet : il s’agit de chiffrer le coût de mise en
œuvre du processus d’élaboration lui-même.
L’évaluation économique du produit fini. – Cette évaluation n’existe
pas toujours : il est des projets dont le résultat attendu ne s’exprime pas en
termes économiques : la prise en compte d’une nouvelle législation dans le
système informatique d’une entreprise ou d’une administration, la
conception et l’appropriation par le personnel d’une entreprise
d’orientations stratégiques n’aboutissent généralement pas à des résultats
chiffrés sur un plan économique. En revanche, la création d’un nouveau
produit, la construction d’une usine donnent évidemment lieu à un chiffrage
du résultat, qui souvent constitue un élément majeur dans la décision de
poursuivre ou d’arrêter le projet.
Cette évaluation se fait de façon « classique », comme pour tout chiffrage
d’investissement.
Évaluation des coûts fixes et des coûts variables du produit ou
service devant être lancés à l’issue du projet, évaluation des
quantités correspondant aux coûts variables ;
Évaluation des profits attendus et, de même que pour les coûts,
évaluation des quantités correspondantes ;
Évaluation des cash-flows, année par année et calcul du retour sur
investissement par les diverses méthodes classiques (ROI, TRI,
VAN, Pay Back…) que notre propos n’est pas de développer ici.
L’évaluation économique du déroulement du projet lui-même. – Cette
évaluation doit toujours exister. Il s’agit de prévoir, puis de suivre le coût
représenté par la réalisation des différentes tâches prévues par le projet.
Cette évaluation doit porter sur tous les éléments prévisibles ou
simplement évaluables :
– les coûts externes prévisibles ;
– les coûts liés au temps passé par les équipes qui seront impliquées
par le projet.
La figure ci-dessous (fig. 7) donne un exemple de chiffrage d’une tâche
particulière d’un projet, ainsi qu’un chiffrage de la totalité du projet. Dans
cet exemple, on a distingué les temps passés par les différents intervenants,
qu’ils soient externes ou internes à l’entreprise, ainsi que les autres coûts.
Fig. 7. – Évaluation des coûts d’une tâche et des coûtsd’un projet

Dans cet exemple, la tâche 3 du projet fera appel à des intervenants


externes de la COFRACA et de la DIFRAC4. Elle compte faire appel
également à des membres de l’organisme : chef de projet, chef du service
maintenance, contrôleur de gestion, responsable planning… Elle nécessitera
enfin des frais de reprographie, des frais de déplacement ainsi que des frais
de fabrication d’une maquette.
Ce chiffrage suppose que l’on dispose d’une comptabilité analytique ou,
au moins, d’éléments d’évaluation qui permettent de chiffrer le coût de la
journée de chacun des intervenants potentiels, notamment des intervenants
internes. Cela suppose aussi que les intervenants aient contracté l’habitude
d’évaluer les temps qu’ils passent aux diverses activités qu’ils ont à réaliser.
Ce chiffrage sert, au cours du suivi du projet, à comparer prévisions et
réalisations. Mais il sert également, lors de la première évaluation, à prévoir
le volume de temps à passer pour chaque tâche. Cette habitude, prise depuis
longtemps dans les cabinets de conseil, les SSII, et d’une façon générale des
entreprises qui doivent « vendre » le temps de leur personnel, est beaucoup
plus rarement en usage dans d’autres organismes. C’est un vrai problème
culturel pour certains d’entre eux, dont les personnels perçoivent souvent
l’évaluation et le suivi des temps passés par chaque membre du personnel
comme une intrusion inadmissible dans leur vie privée…

VI. – La prise en compte des risques autres que managériaux

C’est un troisième souci majeur qui se fait jour dès l’origine du projet.
Une première catégorie de risques peut être distinguée à ce stade technique
de la gestion du projet. Nous aborderons d’autres types de risques,
davantage liés au management du projet, ultérieurement.

Risques internes au projet lui-même. – Il s’agit des risques portant sur


l’ensemble des évaluations qui ont été décrites plus haut :
– risques de mauvaise évaluation des délais et des coûts du projet lui-
même ;
– risques de mauvaise évaluation du résultat final, notamment sur le
plan de la faisabilité et sur le plan économique ;
– risque de mauvaise perception du projet par son environnement, que
ce dernier soit ou non impliqué dans sa réalisation.
D’autres questions se posent également :
– disposera-t-on des ressources nécessaires (internes et externes) ?
On aura listé les ressources nécessaires : pourra-t-on disposer
effectivement, de façon réaliste, desdites ressources ? Rappelons que ces
ressources sont :
– Des ressources humaines, internes et externes : pourra-t-on les
trouver, les mobiliser à la hauteur des besoins ?
– Des ressources matérielles, et en particulier financières : la situation
de l’organisme permettra-t-elle d’affecter les ressources nécessaires
à ce projet ?
– La mobilisation des relations des responsables de l’organisme pour
promouvoir le projet à l’extérieur, quand le besoin s’en fait sentir :
ces responsables engageront-ils leur image pour défendre et
promouvoir le projet ?
– Dans le cas de ressources externes, est-on capable d’exercer un
contrôle suffisant sur le ou les sous-traitants ?
• Dans les cas où les ressources internes sont inexistantes ou ne peuvent
être mobilisées à la hauteur des besoins, on envisage de faire appel à des
ressources externes : ces ressources peuvent-elles être facilement trouvées ?
Et dans le cas où on peut les trouver, qui pourra les gérer ? En effet, pour
utiliser de façon pertinente des ressources externes, encore faut-il avoir en
interne une ressource qui soit compétente pour servir d’interface et de
maître d’ouvrage vis-à-vis de cette ressource externe, afin d’exercer un rôle
de délégation – contrôle à son égard. Dispose-t-on de cette ressource ? Le
contrôle de la sous-traitance nécessite en effet des compétences
particulières : connaissance technique pour pouvoir dialoguer et donner des
instructions au sous-traitant, compétences juridiques en matière de contrats,
compétences en matière de contrôle de l’exécution.

• Ne cumule-t-on pas nouveauté d’objectifs et nouveauté de moyens ?


Le patron d’une grande entreprise industrielle japonaise faisait de ce
principe une règle de conduite : le risque généré par une innovation est
évidemment plus élevé que le risque résiduel lié à l’utilisation d’un procédé
éprouvé. Le cumul d’une innovation portant sur l’originalité du produit et
d’une innovation portant sur les méthodes et les techniques de fabrication
introduit un effet multiplicateur, sinon exponentiel, sur le risque total du
projet. Il faut donc éviter de se placer dans ce cas de figure. On pourrait
résumer le propos par la formule : « À produit innovant, procédé classique ;
à produit classique, procédé innovant. »
• Les contraintes simultanées ne sont-elles pas trop fortes, et compatibles
avec l’objectif recherché ?
C’est la dernière des vérifications techniques qu’il convient de mener : on
aura déjà listé les contraintes de délai, les contraintes économiques, les
contraintes de qualité. Chacune d’elles doit être évaluée avec ses marges de
manœuvre telles qu’on peut les percevoir à ce stade. Là encore un bilan
s’impose.
Par exemple, si une forte contrainte de délai existe, et qu’on perçoit le
délai de réalisation global du projet comme étant très proche de cette
contrainte, avec en outre peu de marge de manœuvre sur les coûts et la
qualité, on pourra en conclure que le projet présente un fort risque
technique dû au non-respect de ces contraintes.
Se lancer dans un projet dont on sait à l’avance que les contraintes sont
fortes exigera dès lors une mobilisation politique importante, c’est-à-dire
l’acceptation implicite par l’organisme d’ajouter des moyens si nécessaire.
Si ce n’est pas le cas, il vaudra mieux revoir les objectifs ou le périmètre du
projet, les délais, les coûts de façon à rendre le projet plus réaliste.

• Quels risques y a-t-il à ne pas mener le projet ?


On s’intéresse généralement aux risques qu’il y a à mener à bien le
projet. Nous voudrions juste attirer l’attention sur le risque qu’il y aurait à
ne pas mener le projet. L’analyse de ces risques conduit assez souvent à ne
plus se poser de questions : il est des projets que l’on ne peut pas se
permettre de ne pas mener à bien.

Risques exogènes. – Une autre évaluation de risques consiste à imaginer


les événements extérieurs pouvant contrarier le déroulement du projet. Ces
risques doivent être listés, puis évalués selon le quadruple critère de leurs
enjeux réels, de leur probabilité d’occurrence, de leur gravité et des
difficultés que l’on peut avoir pour s’en prémunir ou y pallier.
Face à l’ensemble de ces risques, on peut utiliser un tableau semblable à
celui présenté ci-dessous, puis classer les risques d’après les résultats de la
dernière colonne. La décision à prendre est ensuite une question
d’appréciation, en fonction notamment de l’intérêt stratégique du projet :
Comment construire et utiliser un tableau de ce type ?
Il faut d’abord lister les différentes sources de risques possibles. Une
réunion de brainstorming est bien adaptée à cet objet. Elle doit regrouper le
maximum de personnes intéressées par le projet, d’origines diverses et
connaissant suffisamment bien le sujet pour qu’on ne risque pas de passer à
côté d’un risque majeur. L’échantillon présenté dans le tableau ci-après
montre la diversité des risques qui peuvent être encourus.
Une fois tous les risques possibles énumérés, il faut s’interroger sur leur
probabilité d’occurrence (colonne A). Pour un risque de catastrophe
naturelle pour lequel un recours à un assureur, ou la valeur de la prime
d’assurance par rapport au montant du sinistre, peut donner des indications,
le chiffrage des autres risques présente un caractère assez subjectif.
Cependant, prenons par exemple un risque politique (changement de
législation, projet de loi) ; il est bien rare qu’il vienne à l’esprit de
quiconque si des informations n’ont pas filtré dans la presse ou dans les
milieux professionnels. Ce risque représente au moins 5 % de chances : nul
n’y penserait en dessous de cette probabilité. On s’attachera, pour préciser
ce taux de risque, à proportionner les risques les uns par rapport aux autres ;
partant d’un risque mieux connu (par exemple, le risque naturel), et en
estimant les autres risques par rapport à celui-là.
L’évaluation de la colonne suivante (colonne B) est plutôt plus facile : se
mettant dans le cas où le risque se réalise et qu’on ne s’en est pas prémuni,
on arrive à chiffrer plus facilement la gravité de ses conséquences : elles
vont de l’abandon pur et simple du projet (impossibilité de continuer) à une
gêne importante (dans notre tableau, 33 % pour l’arrivée sur le marché d’un
concurrent avec un procédé analogue). En réalité, dans nombre de ces cas,
on sera capable de préciser le coût probable de l’occurrence de cet
événement.
La colonne C est une simple multiplication des deux précédentes : elle
donnera une indication de l’attention que l’on devra porter à ce risque.
Cependant, lorsqu’il s’agit de risque aux conséquences graves sur la vie
humaine, on devra tenir compte de ce risque même avec des probabilités
d’occurrence très faibles… Le résultat, même si la valeur qui est affichée
n’a pas de signification intrinsèque fiable, permet de classer les risques de
façon relative, mettant ainsi en évidence les risques majeurs et évaluant les
possibilités de s’en prémunir simplement.
La constitution de la colonne D obligera à se mettre en position de
réfléchir aux solutions possibles pour prévenir ce risque. Cette réflexion
permet de trouver et de mettre en place des parades au risque défini.
La colonne E conduira à réfléchir sur les moyens de limiter les
conséquences de la réalisation de ce risque s’il se concrétise malgré les
précautions prises pour l’éviter.
La démarche, outre la prise de conscience à laquelle elle conduit, permet
d’imaginer l’essentiel des mesures conservatoires qui devront être prises
soit à l’avance (s’en prémunir), soit au moment où le risque se concrétisera
(y pallier), évitant alors de perdre un temps qui peut se révéler décisif au
moment de prendre une décision.

Le plan de maîtrise des risques. – Le résultat de l’établissement de ce


tableau revêt une importance capitale sur le plan opérationnel : il permettra
en effet d’inclure dans la réalisation du projet toutes les mesures permettant
de limiter au maximum la survenue du risque (colonne D) et, si
malheureusement le risque survient tout de même, de savoir quoi faire pour
en limiter les effets négatifs (colonne E).
La reprise des colonnes D et E permettra d’établir un plan de maîtrise des
risques. Ce plan devra évidemment être défini avant le démarrage du projet,
car la plupart des mesures de maîtrise trouvées impliquent des actions au
cours de la réalisation des différentes tâches. Elles portent notamment sur le
choix des sous-traitants, les clauses à inclure dans les contrats, les
assurances à prendre, voire des actions techniques plus lourdes encore.
Fig. 8. – Tableau de prise en compte des risques techniques d’un projet
Chapitre II

Les conditions de fonctionnement : le


management de projet

I. – Passer de la gestion au management de projet

Nous avons vu au cours du chapitre précédent que tout projet suppose la


mise en œuvre d’outils techniques de prévision, d’ordonnancement des
tâches, de chiffrage des éléments économiques, d’appréciation des risques.
Ces outils doivent être mis en œuvre dans tout projet de quelque ampleur, et
nous n’insisterons jamais assez sur l’importance qu’il y a à les maîtriser.
Cependant, s’ils sont nécessaires, ils ne suffisent jamais à mener à bien
un projet : il faut que l’équipe qui va participer au projet soit correctement
constituée, que les structures de travail et de décision soient bien pensées,
que les acteurs soient motivés et connaissent le sens et les limites de leurs
rôles respectifs.
La compréhension fondamentale des rôles des uns et des autres réside
dans la distinction, qui nous vient des métiers de la construction et des
travaux publics, entre « maître d’ouvrage » et « maître d’œuvre ». Il y a en
effet dans tout projet :
des destinataires, bénéficiaires des résultats du projet ;
des décideurs, qui financent ou représentent les financeurs, qui
décident des objectifs et fixent les contraintes du projet. Ce sont eux
qui représentent la « maîtrise d’ouvrage ». Ces contraintes
comportent toujours :
– des délais,
– des coûts,
– un périmètre et des notions de qualité attachés aux résultats
attendus.
Ces décideurs peuvent être différents des bénéficiaires : c’est même
presque toujours le cas des projets menés par la puissance publique ou les
organismes supranationaux :
une équipe qui réalise les tâches du projet (incluant les sous-traitants
éventuels). C’est cette équipe qui représente la « maîtrise d’œuvre »
du projet ;
quelquefois, on doit tenir compte « d’acteurs externes » qui, sans
décider ni œuvrer au sein du projet, ont une influence sur son
orientation ou son déroulement.
Ce sont les décideurs, donc la maîtrise d’ouvrage, qui définissent les
objectifs et les contraintes a priori du projet : c’est en effet autour de cette
définition qu’ils peuvent décider de lancer et de poursuivre ou non le projet.
Ils n’ont pas au départ à définir la façon dont le projet pourra être mené.
Ils doivent simplement en déterminer les contours « externes » : objectifs,
résultats à atteindre d’une part, contraintes et caractère plus ou moins
dirimants de chacune d’elles d’autre part. La façon de faire, qui sera sous la
responsabilité du maître d’œuvre, est alors considérée comme une « boîte
noire ».
Objectifs, résultats à atteindre :

Fig. 9. – Définition des objectifs et contraintes « externes » du projet

En s’adressant à la maîtrise d’œuvre, la maîtrise d’ouvrage devra


commencer par s’assurer auprès de cette dernière que le projet est
réalisable, en posant les questions suivantes : Comment le faire ? Est-ce
possible ?
Ce sont donc les futurs réalisateurs, la maîtrise d’œuvre, qui vérifient
d’abord que les objectifs et les contraintes sont réalistes, et négocient avec
la maîtrise d’ouvrage le « contrat de réalisation » du projet : en effet, si cette
maîtrise d’œuvre estime que le projet ne peut pas être mené à bien en
respectant à la fois objectifs et contraintes, elle a le devoir de le signaler et
de ne pas accepter de s’y lancer. C’est au sein de la maîtrise d’œuvre que
l’on trouve la compétence technique pour réaliser le projet et, bien entendu,
pour valider le réalisme des hypothèses.
C’est ainsi que la maîtrise d’œuvre va imaginer un ou plusieurs processus
possibles, une division en tâches, un ordonnancement, un chiffrage… et
dire à la maîtrise d’ouvrage :
– « Oui, c’est possible et je vois comment le faire. »
– « Non, je ne vois pas comment atteindre ces résultats avec les
contraintes que vous fixez. Il faut modifier les uns ou les autres, et
nous allons voir comment. »
Objectifs, résultats à atteindre :

Fig. 10. – Confrontation des souhaits et des possibilités de réalisation

Cette distinction fondamentale entre ceux qui décident et ceux qui


réalisent doit être présente dans tout projet. La confusion de ces deux rôles
est une source majeure d’échec.
Si la maîtrise d’œuvre ne voit pas comment respecter les souhaits de la
maîtrise d’ouvrage, elle a le devoir impérieux de le lui faire savoir : si elle
entreprend un projet dans des conditions irréalistes, le projet n’aura aucune
chance d’aboutir, et la maîtrise d’ouvrage sera trompée. Hélas, trop souvent
la maîtrise d’œuvre ne joue pas ce rôle, prenant les souhaits de la maîtrise
d’ouvrage, généralement d’un niveau hiérarchique supérieur, comme des
ordres incontournables. Il arrive aussi fréquemment que la maîtrise
d’ouvrage tente de « forcer la main » de la maîtrise d’œuvre, partant du
principe qu’elle pourra, au pied du mur, faire en sorte que les choses se
fassent. Ce type de relations est particulièrement malsain.
Après avoir défini les contours du projet et s’être assurée de sa faisabilité
par une équipe projet ad hoc, la maîtrise d’ouvrage sera l’organe de
contrôle et de décision du projet, jusqu’à son terme. Nous verrons que c’est
là un rôle majeur, et qu’il est souvent insuffisamment tenu du fait que les
maîtrises d’ouvrages ne connaissent que mal les principes de management
de projet.

Le « contrat de projet ». – Le succès du projet suppose que le


« contrat » entre la maîtrise d’œuvre et la maîtrise d’ouvrage soit respecté :
tant que le maître d’œuvre peut atteindre les résultats en restant dans les
limites des contraintes fixées, il prend les décisions qui relèvent de sa
responsabilité pour mener à bien le projet. La maîtrise d’ouvrage peut par
ailleurs décider de se réserver certaines décisions, à condition de les avoir
fait connaître à la maîtrise d’œuvre au départ du projet. Mais si, en
revanche, le chef de projet ne peut plus remplir son contrat avec les moyens
à sa disposition, ou si la concrétisation de certains risques montre un
changement radical dans la formulation de ce contrat, il a le devoir d’alerter
la maîtrise d’ouvrage : en effet, cette situation signifie qu’une décision ne
relevant que de cette dernière doit être prise ; il s’agit soit d’en rabattre sur
les résultats attendus, soit de réduire une ou plusieurs des contraintes. On
acceptera des coûts supplémentaires pour « tenir les délais », ou encore on
acceptera une qualité moindre, ou on pourra accepter d’allonger les délais
pour ne pas dépasser le budget prévu, ou encore réduire les objectifs. On
pourra enfin juger que le projet, dans ces conditions, n’est plus pertinent et
doit être arrêté. Ce changement de contrat doit être rediscuté entre la
maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’œuvre, comme au démarrage du projet.
Le « devoir d’alerte » doit donc être une obligation absolue pour la
maîtrise d’œuvre vis-à-vis de sa maîtrise d’ouvrage.
Mais détaillons maintenant les différents rôles des acteurs du projet, en
commençant par les plus opérationnels.

II. – Les acteurs et leurs rôles

L’équipe projet : la maîtrise d’œuvre. – Elle est constituée de tous ceux


qui prennent une part active à la réalisation du projet. C’est au sein de ce
groupe que devront être analysés en première analyse et résolus quand ils
pourront l’être à ce niveau les problèmes qui se poseront au cours de la vie
du projet. On inclut généralement dans cette équipe :
– les personnes travaillant activement dans une ou plusieurs tâches ;
– les responsables de tâches ;
– le chef de projet.
Les personnes travaillant activement dans une ou plusieurs tâches. – Ce
sont des intervenants qui seront mis à contribution de façon épisodique au
cours du projet.
La difficulté majeure avec ces acteurs sera d’obtenir la contribution
efficace qu’on attend d’eux. S’ils ont été bien choisis, ce n’est pas leur
compétence qui sera en cause. Il faudra en revanche qu’ils comprennent
bien les tenants et aboutissants du projet dans son ensemble d’une part, et
de la tâche pour laquelle ils sont sollicités d’autre part, pour qu’ils apportent
la contribution juste, limitée mais efficace que l’on attend d’eux.

• Si l’on se contente de leur présenter le projet dans sa globalité, il est


probable qu’ils vont avoir sur le projet leur propre vision, remettant en
cause la façon dont le projet a été défini : il y a en effet très souvent
plusieurs façons sensées de conduire le projet, et il n’y a aucune raison que
la leur corresponde à celle qu’on aura choisie.
• Si l’on se contente de leur poser les questions sur la stricte contribution
matérielle qu’on attend d’eux, ils ne sauront pas dans quel cadre inscrire
cette action, et il y a toutes les chances qu’ils fournissent une contribution
inadaptée.
Il faut donc à la fois présenter un cadre général et définir précisément la
contribution qu’on attend d’eux, ses enjeux, ses contraintes et ses limites
pour que la présence de ce type d’acteurs soit efficace.

Les responsables de tâches. – Nous avons vu que les tâches ou les


« sous-projets » sont placés sous la responsabilité de « responsables de
tâches ». Ce sont des professionnels du domaine traité dans la ou les tâches
dont ils sont responsables. Ils doivent bien évidemment apporter leur
compétence d’expert dans ces tâches. Cependant, leur rôle est loin de
s’arrêter là : ils doivent se sentir véritablement en charge des tâches dont ils
sont responsables, et prendre sur eux d’apporter toute modification utile
dans la façon de la mener. Ils doivent prendre comme étant de leur
responsabilité propre les contraintes de délais, de coût et de qualité
attachées à la tâche et de façon plus large au projet. Cela aura des
conséquences sur la façon de manager ces responsables, notamment sur la
nécessaire délégation dont ils doivent faire l’objet…

Le chef de projet. – Il doit veiller globalement à la bonne marche du


projet dans son ensemble. Face à la maîtrise d’ouvrage, il devra donc, dès le
début du projet :
– négocier avec cette dernière, de façon contractuelle ou quasi
contractuelle, les objectifs, les moyens, les contraintes, les
principales étapes du projet ;
– expliciter ses marges de manœuvre, ses obligations d’alerte et ses
espaces de décision, les circonstances dans lesquelles la maîtrise
d’ouvrage décidera.
Les relations entre le chef de projet et le représentant de la maîtrise
d’ouvrage trouvent leur parallèle dans les relations existant entre les
responsables de tâches et le chef de projet :
– fixation des objectifs, des moyens et des contraintes attachées à
chacune des tâches ;
– fixation des marges de manœuvre et de décision respectives du
responsable de tâche et du chef de projet ;
– devoir d’alerte en cas de problème.
Le chef de projet doit y ajouter le souci d’entretenir la motivation des
responsables de tâches qui, ayant une vue moins globale du projet et y étant
généralement moins totalement impliqués, peuvent subir davantage de
« passages à vide ».

La maîtrise d’ouvrage

Le « promoteur5 ». – C’est le représentant principal de la maîtrise


d’ouvrage.
Son rôle est vital, et un projet pour lequel ce rôle fait défaut a peu de
chances d’aboutir.
Par définition, il n’est pas impliqué directement dans la vie
opérationnelle du projet, et ne s’y consacre pratiquement jamais à plein-
temps.
Cependant, il est le véritable porteur du projet au niveau politique. Il doit
donc appartenir à l’instance de direction apte à prendre toute décision
concernant ce type de projet6. Il a de ce fait connaissance des enjeux
véritables du projet par rapport à l’ensemble des autres enjeux et
contraintes. Il doit être à même de prendre lui-même les décisions ou de se
faire l’avocat du projet auprès des instances décisionnelles supérieures
telles que le Comité de direction de l’organisme ou le « Comité d’arbitrage
entre projets7 », et de « débloquer » des situations nécessitant l’octroi de
moyens supplémentaires. Il est le seul à pouvoir le faire, le chef de projet
n’ayant en principe accès ni à toutes les informations pouvant influer sur
ces décisions ni à ce niveau de décision.
Ce rôle n’est évidemment pas à sens unique : si les circonstances
l’exigent, il peut au contraire accepter de transiger avec les contraintes de
délais ou de réduire les moyens affectés à ce projet au profit d’autres
impératifs jugés par le comité de direction plus prioritaires. Le promoteur
aura alors à cœur d’expliquer la situation à l’équipe de projet, afin de ne pas
laisser cette équipe sur une impression d’incompréhension, voire de
« lâchage » de la part du comité de direction. C’est là son rôle d’arbitrage
entre projets, et d’une façon générale entre les différentes ressources de
l’organisme. Ce rôle ne va pas dans le sens d’une défense sans nuance du
projet en question. Cependant, le promoteur, fortement engagé dans sa
réussite et convaincu du bien-fondé des enjeux qu’il représente, sera le
meilleur avocat du projet.
Il aura également, ceci est un corollaire de cela, un rôle important
d’information et de communication sur le déroulement du projet, non
seulement auprès de ses collègues de la direction générale, mais aussi de
l’extérieur de la structure et en interne auprès de l’ensemble des salariés.
C’est là l’un des seuls rôles opérationnels qu’il devra jouer.
Bien entendu, il préside le comité de pilotage.

Le Comité de pilotage. – Le rôle du comité de pilotage prolonge celui du


promoteur : le projet, pour passer d’une étape importante à une autre, ou en
cas de difficulté particulière, a besoin d’un aval de nature politique. Un
comité de pilotage devra être capable de prendre ces décisions : le
promoteur prendra les mesures conservatoires et les décisions urgentes que
le chef de projet ne pourrait pas prendre, en attendant de se référer pour
approbation au comité de pilotage, et présentera par ailleurs à ce dernier les
solutions alternatives pour des décisions ne présentant pas le même
caractère d’urgence.

L’arbitrage entre projets. – Ce rôle d’arbitrage est très important, et est


loin d’être correctement formalisé dans la majorité des organismes ayant à
gérer des projets. Lorsqu’il est formalisé en « comité d’arbitrage entre
projets », il constitue l’instance de décision qui supervise l’ensemble des
projets.
Il y a un seul comité d’arbitrage, composé essentiellement de membres
du comité de direction quand il ne se confond pas avec ce dernier. En
revanche, il y a un comité de pilotage et une équipe projet par projet :

Fig. 10bis. – L’arbitrage entre projets


Son rôle commence par la première idée du projet et la décision qui lui
appartient de lancer ou non une préétude, et de désigner la personne qui la
réalisera (voir figure 10ter). Cette préétude une fois réalisée, son examen
conduit à une deuxième décision de sa part : la décision de lancer
effectivement le projet, en désignant le promoteur et le comité de pilotage.
Une première réunion de ce dernier permettra de désigner officiellement le
chef de projet, d’élaborer une première version de sa lettre de mission8,
d’officialiser sa mission.
Ensuite, le management du projet relèvera essentiellement de l’équipe
projet contrôlée par le comité de pilotage et par le promoteur.
Cependant, des situations exceptionnelles peuvent amener le comité
d’arbitrage (ou le comité de direction si ce dernier n’a pas été mis en place)
à reconsidérer jusqu’à la poursuite du projet :
– modification majeure de l’environnement remettant en cause le
contexte et partant l’intérêt même du projet, cette modification
incluant des changements réglementaires ;
– dérapage du projet lui-même tel que les objectifs et les contraintes
majeures doivent être remis en cause ;
– dérapage d’un autre projet puisant partiellement dans les mêmes
ressources, et jugé plus stratégique…
Une remise à plat de l’ensemble des projets en cours ou prévus s’impose
alors. L’organe susceptible de le faire est bien entendu d’un niveau plus
élevé que les différents comités de pilotage des projets.
Le comité d’arbitrage devra alors procéder de la façon suivante :
Pesée des enjeux stratégiques de chaque projet.
Pour chaque projet :
– lister les enjeux stratégiques incontournables ;
– calibrer le projet en s’y limitant (version A) ;
– effectuer des extensions de projets en ajoutant les autres
enjeux (B1, B2, …).
Fig. 10ter – Rôle et acteurs d’un projet

Consolider les versions A de tous les projets.


Évaluer les ressources restantes après cette consolidation.
Il devra ensuite analyser les risques liés au maintien ou à l’abandon de
tout ou partie de chaque projet :
Risque de ne pas mener à bien le projet, notamment le risque
d’image.
Risque de dépassement des délais, des coûts : sont-ils acceptables ?
Risque de dégradation inacceptable du résultat final.
Puis il devra :
Évaluer les extensions B en comparant les enjeux et les ressources :
– déjà mobilisées ;
– à mobiliser (le « reste à faire », dans les différentes
hypothèses).
Choisir les projets à réviser.
Décider, pour chaque projet concerné, de son maintien, de son
abandon, de sa réduction en termes de :
– délais ;
– ressources ;
– qualité ;
– amplitude du projet.
Enfin, il devra prendre en compte :
Les budgets déjà engagés dans chaque projet, les budgets restant à
engager.
L’implication des intéressés, les conséquences humaines possibles.
Une fois les décisions prises (elles peuvent être douloureuses, et donc
difficiles à assumer), le comité devra consacrer un important effort à la
communication auprès des équipes projets touchées et auprès du reste de la
structure, afin de pallier le risque de déstabilisation dû à ces décisions :
Comment l’annoncer à l’équipe du projet ?
– expliquer le plus complètement possible les raisons de la
décision : une décision raisonnée est plus acceptable, éviter
le sentiment du « fait du prince » ;
– consacrer un certain effort à la communication.
Toujours traiter la communication de façon professionnelle :
– À qui s’adresser ?
– Quel contenu ?
– Quand ?
– Comment ? Par quel moyen ?
– Quel rôle doit jouer la direction ? Le management direct ?
– Comment assurer le suivi de la communication ?

III. – Les structures de management de projet et la


transversalité

La superposition de quelques projets sur une structure hiérarchique


classique. – La réflexion menée sur les rôles des différents acteurs amène
nécessairement à se poser la question des structures à mettre en place pour
mener des projets.
Nous avons supposé implicitement, dans l’analyse des acteurs et de leurs
rôles, que l’organisme menait en parallèle des activités fondées sur des
relations hiérarchiques « classiques » et des projets. Nous verrons plus loin
que ce n’est pas toujours le cas ; mais intéressons-nous d’abord à cette
configuration.
Supposons une organisation structurée en directions hiérarchiques,
opérationnelles et fonctionnelles. Chaque direction est spécialisée dans un
domaine particulier : c’est la logique du système. Dans le schéma de la
figure 11, ces directions apparaissent sous forme de pyramides, les
directeurs figurant dans des cercles les surmontant : D1, D2, D3.
Les personnes appartenant à chacune de ces directions sont sous la
responsabilité hiérarchique du directeur, qui organise leur travail et est
responsable de leurs activités.
Lorsqu’un projet est initié dans une structure de cette forme, il vient se
superposer aux activités « ordinaires » organisées selon la ligne
hiérarchique.
Le projet ayant besoin de ressources internes de diverses natures, il va les
puiser dans les directions, comme le figure la flèche horizontale partant du
chef de projet de la figure 11.
Fig. 11. – Structure d’un projet dans un contexte de directions hiérarchiques classiques

Pour cela, le chef de projet va devoir « négocier » la participation de ceux


qu’il pressent pour devenir les membres de son équipe avec les différents
directeurs.
C’est ce que l’on appelle le management « transversal » ou « matriciel ».
Les personnes ainsi pressenties pour le projet dépendent pour l’organisation
de leurs activités de leur responsable hiérarchique. On peut penser qu’elles
sont déjà occupées : le temps qu’elles sont supposées consacrer au projet
vient en conflit avec le temps qu’elles consacrent à leurs autres travaux. Il
faut donc que le responsable hiérarchique y consente : il arrive assez
souvent que la réponse de ce dernier soit mitigée. C’est alors que
l’existence d’un « promoteur » d’un niveau hiérarchique suffisant est
nécessaire : il pourra engager son influence au sein de la structure pour
peser sur la décision au profit du projet.
C’est donc un jeu subtil de négociation et d’influence qui va se jouer dès
l’origine du projet.
On voit par ce simple exemple qu’un projet qui ne serait pas appuyé par
un promoteur d’un niveau hiérarchique suffisant a peu de chances de se
dérouler convenablement. Même si les responsables hiérarchiques donnent
leur accord au démarrage du projet, parce qu’ils n’ont pas encore planifié
les activités de leurs collaborateurs dans un avenir qui leur paraît lointain,
lorsque l’échéance arrive, ils découvrent qu’ils ont mille choses plus
urgentes à faire au sein de leur direction que de participer à un projet dont
l’importance leur paraît douteuse… D’où l’intérêt de faire participer les
principaux directeurs intéressés au comité de pilotage.
Aussi certains projets de très grande envergure sont-ils souvent gérés
d’une autre façon.
Les projets gérés partiellement ou totalement en task force. –
Imaginons qu’un projet demande une importante mobilisation de ressources
internes et soit vital pour l’organisme (on rencontre ce type de structure
essentiellement dans l’entreprise, mais rien ne s’opposerait à ce qu’on la
rencontre dans des administrations ou encore dans des ONG…).
On pourra éliminer le souci énoncé plus haut, et les interminables
négociations qui en résultent, en créant une structure hiérarchique
temporaire regroupant les principaux contributeurs au projet.
Il faut évidemment pour cela que ces contributeurs soient requis au moins
plusieurs mois consécutifs sur le projet. Ils seront alors détachés de leurs
directions respectives pour cette période, et placés sous la responsabilité
hiérarchique du chef de projet. Cette structure n’évitera pas que des
contributeurs moins impliqués que ceux qui sont intégrés dans la task force
ne restent dans leurs directions respectives et ne voient leur participation
« négociée » comme nous l’avons vu précédemment, mais elle permet que
les ressources soient pour l’essentiel directement disponibles et placées sous
l’autorité hiérarchique du chef de projet.
Le schéma de cette structure fait l’objet de la figure 12.

Fig. 12. – Structure en task force

La complémentarité des compétences présentes dans la task force permet


un travail multidisciplinaire, mais au sein de la même équipe. Les
responsables de tâches sont alors généralement pris au sein de la task force.
Les contributeurs extérieurs à la task force sont intégrés selon les besoins et
fonctionnent comme dans l’organisation précédemment décrite.
Les personnes ainsi détachées dans la task force retournent, en principe,
dans leurs directions respectives à la fin du projet.
On trouve, par exemple, des structures de ce genre chez les constructeurs
automobiles, navals ou aériens, pour lesquels la conception de produits
nouveaux constitue d’énormes projets nécessitant des compétences
multiples et avec des volumes de travail importants.
Les évolutions de ces projets abandonnant les structures matricielles au
profit de structures projets ont évolué dans nombre d’entreprises
industrielles vers des structures projets couplées avec des « plates-formes »
ou « centres de développement ». Ces plates-formes regroupent des
compétences technologiques conceptuellement proches, et servant à
quelques gros projets. Les dirigeants de Toyota, par exemple, regroupèrent
au début des années 1990 l’ensemble des compétences techniques
nécessaires à la conception de leurs modèles en trois plates-formes : la
première regroupait les compétences liées aux véhicules à propulsion
arrière, une autre aux véhicules à traction avant, une troisième aux
véhicules utilitaires. Chaque plate-forme « sert » la conception simultanée
de quatre ou cinq projets-modèles. Plus tard, un quatrième centre fut créé
pour développer les composants pour tous les projets de véhicules.
Depuis, ces structures se sont généralisées, et même on assiste à
l’émergence de plates-formes communes à plusieurs concurrents qui
s’associent pour partager les coûts de développement de certains
composants9…

Cas des entreprises-projet. – Voyons enfin un dernier cas particulier :


celui des entreprises dont le mode de fonctionnement unique est le mode
projet, qui même ne sont créées que dans le seul but de réaliser un projet.
Ces entreprises sont de plus en plus nombreuses. C’est le cas des
producteurs de films, des concepteurs de jeux vidéo, de l’organisation de
manifestations telles que Jeux olympiques, Coupe du monde de football ou
America’s Cup, de certaines ONG gérant des programmes outre-mer…
Là, les équipes sont constituées uniquement pour la durée du projet, puis
se dissolvent ou sont mobilisées sur un autre projet. La difficulté est alors,
pour les responsables du projet, de mobiliser les énergies jusqu’à la fin : les
contributeurs peuvent alors en effet être davantage préoccupés de ce qu’ils
deviendront après la fin du projet que de la bonne fin de ce dernier.

IV. – Les aspects relationnels


Les rôles liés à la maîtrise d’ouvrage. – Dans les rôles précédemment
cités, deux sont liés à une fonction typique de maîtrise d’ouvrage : le rôle
du promoteur et le rôle du comité de pilotage.
On comprend bien par ce seul énoncé que lorsque le chef de projet est
seul, sans l’appui de l’une au moins de ces structures, le projet ne peut pas
fonctionner : il lui manque cette fonction fondamentale. Résumons en quoi
elle consiste et ce qui fait son originalité et sa spécificité par rapport aux
rôles opérationnels, de type « maîtrise d’œuvre », qui sont ceux de l’équipe
de projet.

Explicitation et maintien des objectifs et des enjeux du projet. – Ces


objectifs et ces enjeux ont été exprimés, d’un commun accord avec le chef
de projet, au démarrage.
Il revient à la maîtrise d’ouvrage de les rappeler périodiquement parce
que l’action courante amène souvent les opérationnels à des dérives par
rapport aux objectifs initiaux et à leurs enjeux, aux raisons fondamentales
qui ont fait que le projet a vu le jour, cela au profit de l’efficacité
opérationnelle quotidienne.
Le fait de disposer de cette ressource précieuse que constituent des
acteurs moins impliqués dans le quotidien, et qui ont pour rôle de se
rattacher en permanence à ces objectifs initiaux, sera important.

Décision quant aux arbitrages à faire. – Nous connaissons peu de chefs


de projets qui, devant un dérapage ou autre incident nécessitant pour être
résolu des ressources supplémentaires, exposeront au comité de pilotage
que décidément il n’est pas raisonnable d’accroître ces ressources et qu’il
vaut mieux réduire l’ambition du projet ou en dégrader la qualité. Le rôle de
la maîtrise d’ouvrage est évidemment plus équilibré et a priori moins
partisan : certes, elle doit se faire exposer les difficultés et les solutions
possibles ; certes, elle est pour partie solidaire du projet et doit être
convaincue de son bien-fondé. Mais elle doit aussi tenir compte des autres
contraintes et priorités de l’organisme, et faire appel au comité d’arbitrage.
Si elle n’est pas capable de le faire, elle ne tient pas complètement son rôle
de maître d’ouvrage.

Soutien relationnel. – Lorsque les arbitrages dépassent le pouvoir du chef


de projet, c’est à la maîtrise d’ouvrage de prendre le relais et d’arbitrer avec
les autres directions hiérarchiques l’apport de ressources, notamment
humaines.

Soutien sur le plan de la communication, de la représentation du projet


vis-à-vis de l’extérieur. – Ce rôle est fondamental. C’est en grande partie la
maîtrise d’ouvrage qui pourra le jouer. Ce sera même souvent son seul rôle
opérationnel dans la conduite du projet.

Les rôles liés à la maîtrise d’œuvre. – Pour une activité aussi


impliquante, faisant intervenir des acteurs multiples, et d’aussi longue
durée, les aspects relationnels revêtent pour la maîtrise d’œuvre une
importance capitale. Ils présentent plusieurs composantes.

L’identification de l’équipe au projet. – La création du sentiment


d’appartenance au projet pour les membres de l’équipe projet et son
maintien au cours du temps sont des éléments importants.
En effet, pour les personnes extérieures à cette équipe, il risquera de
régner une incertitude, voire un certain flou sur ce projet, accentué par le
fait que souvent il n’en sortira pendant un certain temps aucun résultat
concret.
Face à cette difficulté, le renforcement d’un sentiment d’appartenance
facilitera la cohésion de l’équipe en interne et son positionnement vis-à-vis
du reste de l’organisme. Ce renforcement peut passer par des signes
d’identification du projet, qui permettront en outre de le rendre plus concret
pour son environnement. Ces signes peuvent prendre plusieurs formes :
sigles et logos, papier à lettres et cartes, petit journal interne…

Les motivations des intervenants. – Les intervenants qui démarrent un


projet sont en général, du moins lorsque leur intégration dans le projet a été
faite convenablement, motivés, voire enthousiastes : le fait de démarrer une
activité nouvelle et par définition non routinière, avec une part d’inconnu,
de créativité, la création d’une équipe nouvelle et multidisciplinaire sont des
éléments fortement motivants. Cependant, des éléments viennent au cours
du temps émousser cet enthousiasme initial.

• L’aspect « course de fond » : la conduite d’un projet est souvent longue,


émaillée de difficultés multiples, et les résultats concrets et visibles se font
souvent attendre presque jusqu’à la fin du projet. Le côté « course de fond »
joue alors à plein : les collègues des membres de l’équipe de projet ne
voient que le temps passé, pas de résultats, deviennent parfois railleurs, au
moins critiques.
• L’aspect « charrettes à répétition » : autre aspect de beaucoup de
projets. Cette expression désigne en jargon d’architecte, généralisé au
monde du projet, un travail intensif pour « boucler un dossier » dans les
délais impartis. Cela implique souvent des jours et des nuits de travail
continu et intensif, avec la fatigue qui en résulte. La conduite d’un projet
génère souvent, de par les contraintes de délais qui lui sont inhérents, des
événements de ce genre. Il ne faut pas qu’ils deviennent le mode habituel de
gestion !

Les relations avec la hiérarchie. – Il s’agit essentiellement des relations


avec la hiérarchie des responsables de tâches et autres membres importants
de l’équipe projet, pour des problèmes d’allocations des ressources.
Les tâches ayant été définies par le chef de projet dans une première
approche, il faut tout d’abord voir avec les directions concernées quel
spécialiste affecter à telle ou telle partie du projet. Souvent, ce choix est
limité, les organisations n’étant pas riches au point de disposer d’une telle
abondance de compétences.
De deux choses l’une :
ou l’intéressé est à même de résoudre seul ce problème, soit qu’il ne
soit pas aigu, soit qu’il dispose d’une autonomie suffisante pour
gérer lui-même une partie de son temps, et il n’y a pas à faire
remonter le problème à sa hiérarchie : il se chargera lui-même d’en
débattre avec son supérieur hiérarchique ;
ou il ne l’est pas, et il faut remonter à son supérieur hiérarchique
pour obtenir cet arbitrage. Là encore, de deux choses l’une :
– ou bien le chef de projet a un poids suffisant pour négocier
directement avec ce supérieur, et il le fera,
– ou bien il ne l’a pas, et il fera intervenir le promoteur du
projet, quitte à aménager ou réorganiser la ou les tâches
correspondantes pour satisfaire les contraintes de chacun.
Il est en tout cas indispensable d’obtenir dès le début du projet l’accord le
plus explicite possible sur l’allocation du temps des membres de l’équipe de
projet. Toute autre solution, et notamment une solution du type « qui ne dit
mot consent », expose à subir de graves déconvenues ultérieurement…
C’est la raison pour laquelle les responsables hiérarchiques des principales
directions concernées sont souvent sollicités pour faire partie du comité de
pilotage.

4. La gestion de la fin du projet. – Les aspects relationnels ne se


terminent pas au moment où le projet s’achève. Il y a à ce moment-là
beaucoup à gagner à « bien finir » le projet. Il reste deux choses à faire, qui
sont essentielles : la valorisation des résultats du projet et la valorisation des
membres de l’équipe.

A) La valorisation des résultats du projet. – Il s’agit en réalité de trois


choses :
– de « retours d’expériences », permettant de faire le point notamment
sur les difficultés rencontrées, sur la façon dont l’équipe les a
résolues, sur la façon dont le « devoir d’alerte » s’est exercé, sur la
façon dont les différents rouages mis en place ont été utilisés
efficacement ;
– d’un bilan des résultats du projet. Pour cela, le fait d’avoir au départ
consigné non seulement les objectifs du projet, mais encore les
critères de réussite, permet de faire un bilan objectif en fin de
projet ;
– enfin, d’une séance de travail créatif de groupe permet de déceler les
apports du projet dans des domaines où ils n’avaient pas été perçus à
l’origine et de définir des pistes pour les exploiter.

B) La valorisation des membres de l’équipe. – Le deuxième volet


concerne les membres de l’équipe. En effet, la fin du projet signifie pour
eux d’une part un grand vide, après un travail particulièrement prenant et
intensif, d’autre part souvent le sentiment que l’organisme n’utilise pas à sa
juste mesure l’expérience qu’ils ont acquise. Les membres des équipes de
projet ont en réalité appris par l’expérience fondamentalement six choses :
ils ont consolidé la transversalité de leur vision des problèmes : on
n’est pas membre d’une équipe de projet sans se rendre compte que
face à une question donnée il existe plusieurs visions, plusieurs
façons d’aborder le problème, et que ces visions ont leur richesse et
sont complémentaires ;
ils auront appris à travailler en équipe, le travail d’équipe étant
indispensable à la conduite de tout projet ;
ils auront appris à déléguer, à rendre compte, à alerter ; ils auront
consolidé leur sens des responsabilités et leur respect intelligent des
règles de fonctionnement d’une organisation ;
ils auront appris à mener une réunion constructive ou à y participer ;
ils auront compris l’importance de la communication et auront
appris à l’utiliser à bon escient ;
enfin, ils auront acquis les techniques propres à la gestion de projet.
Ces qualités qu’ils auront développées doivent pouvoir être exploitées,
non seulement dans le cadre d’autres projets, mais aussi dans le reste de
leur vie professionnelle. Encore faut-il le savoir et le faire savoir !
C’est l’un des rôles du promoteur qui, du fait de son niveau hiérarchique,
pourra valoriser le plus possible ces acquis.

V. – La communication autour du projet

C’est une partie fondamentale dans la conduite d’un projet. C’est elle qui
va permettre :
– de fédérer l’équipe projet, de lui donner une existence reconnue dans
son environnement de travail, contribuant au maintien de sa
motivation ;
– d’informer le reste de l’organisation de ce qui se fait en son sein et
d’éviter par là même les phénomènes de rumeurs ;
– d’informer l’extérieur de l’organisation, s’il y a lieu, essentiellement
pour susciter ou faciliter les accords et désamorcer les oppositions,
mais aussi pour obtenir des appuis, conseils, suggestions, et
provoquer les synergies utiles.
Cette fonction est particulièrement complexe dans le cadre de la conduite
d’un projet, du fait :
– de la diversité des intervenants et des angles de vue, chacun ayant
une façon de voir le problème que sa personnalité, ses compétences
et sa culture rendent différent ;
– de la diversité dans la perception des enjeux du projet pour chacun ;
– de la culture de chacun, ce qui implique des formulations qui, pour
être pertinentes, doivent être personnalisées en fonction des
interlocuteurs.
Il convient donc, là plus encore qu’habituellement, de se poser les
questions classiques mais, hélas, trop souvent absentes des réflexions des
responsables quel que soit leur niveau :
– Que communiquer, à qui, quand et pourquoi ?
– Comment communiquer vers chacune des cibles ?
– Quel risque prend-on vers ne pas communiquer ?
– Quel risque prend-on en communiquant vers tel ou tel interlocuteur ?
Ces questions étant régulièrement posées, il convient de les traiter de la
façon la plus professionnelle possible, un amateurisme de mauvais aloi
devant être banni. La largeur de vue que nécessite cette communication,
ainsi que les aspects politiques qu’elle implique sont généralement à
l’origine de sa prise en charge par le promoteur et la maîtrise d’ouvrage.
C’est même la seule « tâche » opérationnelle qui relève de cette maîtrise
d’ouvrage.

VI. – Les risques managériaux et les façons de s’en prémunir

Ces risques sont importants, et souvent négligés par ceux-là mêmes qui
devraient s’en préoccuper le plus. On peut citer les suivants :

• Absence de culture projet au sein de l’entreprise. Nombre d’entreprises


n’ont pas ou peu de « culture projet », ou limitée aux équipes projet et
négligent de développer la compétence des responsables de haut niveau
appelés à être promoteurs ou membres des comités de pilotage.
• Absence d’explicitation des objectifs, des bénéficiaires, des contraintes
externes.
• Absence de cadre de référence du projet, ce qui ne permet pas à
l’équipe projet d’avoir les guides indispensables à son action.
Certains dirigeants pensent, à tort, que ces éléments pourront être
précisés « chemin faisant ». En réalité, ils empêchent l’équipe projet
d’imaginer un processus pertinent.

• Absence d’un promoteur du bon niveau hiérarchique et du bon niveau


de motivation.

Ce manque est fréquent. Faute souvent d’avoir conscience de


l’importance de ce rôle, les dirigeants se contentent de constituer un comité
de pilotage. Or, qu’un problème grave survienne ou même qu’il faille
persuader un directeur de laisser l’un des experts de sa direction consacrer
le temps nécessaire au projet, et ce n’est pas un groupe de personnalités
plus ou moins impliquées qui va pouvoir aider le chef de projet à résoudre
le problème : il faut un promoteur du bon niveau de responsabilité ou
d’influence, personne physique qui prenne suffisamment le projet à cœur
pour résoudre le problème.

• Absence de négociation initiale, d’une « lettre de mission » jugée


réalisable par le chef de projet.
Les objectifs et les contraintes « externes » ayant été fixés, il reste à
démontrer la faisabilité du projet, c’est-à-dire la capacité qu’aura l’équipe
projet à atteindre les objectifs en respectant les contraintes. Si cette équipe
n’imagine pas un moyen de satisfaire ces exigences, elle a le devoir de le
signaler à la maîtrise d’ouvrage, son commanditaire. Si elle ne le fait pas, le
projet est condamné à échouer. Or, souvent le chef de projet, étant
hiérarchiquement d’un niveau inférieur aux membres de la maîtrise
d’ouvrage, n’ose pas le faire et prend cette proposition de lettre de mission
comme un ordre non discutable. Combien de fois n’entend-on pas : « Je sais
bien que c’est irréalisable, mais c’est le chef qui le veut… Vous ne le
connaissez pas ! Alors, on va “se planter”, c’est sûr. Que voulez-vous qu’on
y fasse ? » Cette attitude, éminemment condamnable, est souvent
encouragée par l’attitude des responsables hiérarchiques, qui manquent de
la culture projet qui les garderait peut-être d’une telle erreur.

• Insuffisante prise en compte des facteurs de risques, de l’importance


stratégique du projet par rapport à d’autres projets concurrents pour
l’obtention des ressources.
L’analyse des risques et du positionnement du projet par rapport aux
autres projets de l’entreprise conduit souvent à entreprendre des projets et à
mobiliser des équipes, avec l’énergie que cela suppose, pour s’apercevoir
quelque temps après que le projet a toutes chances d’être arrêté. Le nombre
de projets avortés dépasse parfois 75 % du total des projets d’une
entreprise !

• Absence des outils de suivi minimum.


Le suivi d’un projet, à commencer par son chiffrage initial en délais et en
coûts, suppose l’existence d’outils techniques qui manquent souvent :
contrôle de gestion digne de ce nom, outils permettant d’évaluer puis de
mesurer les temps passés par les intervenants, logiciels de gestion de
projets. L’absence de ces outils ne rend pas rigoureusement impossible le
management du projet, mais le complique et l’alourdit singulièrement.

• Défaut de rigueur dans le suivi, crainte d’alerter lorsque cela est


nécessaire.
L’une des qualités d’un bon chef de projet et de son équipe est de suivre
avec rigueur l’état d’avancement du projet : points réguliers, évaluation la
plus honnête possible du « reste à faire », et surtout alerte lorsque les
moyens d’action de l’équipe projet ne permettent plus de respecter la lettre
de mission. Un dérapage peut survenir, dans la mesure où de nombreuses
incertitudes pèsent sur tout projet ; en revanche, il n’est pas admissible
qu’un chef de projet, se rendant compte qu’il ne peut plus respecter le
« contrat » qui le lie à la maîtrise d’ouvrage, ne le signale pas
immédiatement : il revient en effet à cette dernière et à elle seule de décider
soit d’arrêter le projet, soit d’en réduire les objectifs ou le périmètre, soit
d’accepter un allongement des délais, un accroissement de budget, une
moindre qualité dans le résultat atteint.

• Défaut de communication aux destinataires et autres personnes


impliquées.
Les projets ont souvent pour bénéficiaires des personnes qui ne sont pas
directement impliquées dans le projet : elles ne font pas partie de l’équipe
projet, ni souvent du comité de pilotage. En revanche, leur bonne
acceptation du projet est vitale pour que ses résultats soient convenablement
utilisés. Souvent, ces personnes n’étant ni décisionnaires ni acteurs, on ne
les consulte pas, et même, on ne les informe pas. Le projet, en ce cas, soit
est remis en cause au cours de son élaboration par des groupes de pression
qui en ont vent, soit est rejeté au moment où ses résultats sont mis à la
disposition des bénéficiaires.
Une analyse des « acteurs externes » et des « groupes d’influence » est
dans ce cas déterminante dès le début du projet. Cela permet généralement
de construire une stratégie de communication et d’influence. La pratique
des « enquêtes d’utilité publique » constitue un bon exemple de cette
préoccupation.
Chapitre III

Les phases d’un projet


La connaissance de ces différentes phases est primordiale : au travers de
cette chronologie s’organisent la vie du projet, les interventions des
différents acteurs, les ajustements du projet et ses relations avec le reste de
la structure.

I. – La genèse du projet

Il est particulièrement difficile de définir l’instant de la naissance d’un


projet. Certains font naître le projet dès qu’apparaît l’idée qui en constitue
l’origine, d’autres situent cette naissance un peu plus tard, quand une
certaine formalisation des objectifs et des contraintes apparaît. Toujours est-
il que tout projet naît d’une idée portant en elle une action à accomplir dans
un but déterminé. Une analyse formelle du problème qui se pose sera alors
nécessaire pour préciser le contour de ce futur projet.
On décidera d’envisager de transformer cette idée en projet si les
conditions suivantes sont présentes :
– l’action présente un certain caractère de nouveauté, n’entre pas dans
une procédure existante ;
– elle est d’une certaine importance pour justifier la mise en œuvre
d’une « logique projet » ;
– on peut déterminer un ou plusieurs bénéficiaires, et une ou plusieurs
personnes ou structures ayant un intérêt réel et sérieux à son
accomplissement.
Il s’agira alors de savoir qui décidera de l’opportunité de ce projet. Cette
décision relève du comité d’arbitrage, ou du comité de direction si ce
comité n’a pas été mis en place.
On se situe à ce stade au niveau de la future maîtrise d’ouvrage, c’est-à-
dire au niveau des preneurs des décisions concernant les objectifs et les
contraintes vus de façon « externe ».
Il arrive souvent que l’idée du projet vienne de personnes qui, proches du
terrain, seront motivées pour le faire. Il faudra alors nettement distinguer les
rôles, et que chacun puisse se situer soit dans la maîtrise d’ouvrage, soit
dans la future maîtrise d’œuvre. La confusion des deux rôles, trop
fréquente, est source de difficultés majeures : la maîtrise d’œuvre ne doit
pas en effet se sentir investie d’un pouvoir de décision sur les objectifs ou
les contraintes, et la maîtrise d’ouvrage ne devra pas se mêler de prendre
elle-même les décisions opérationnelles relevant de la délégation qu’elle
doit donner à la maîtrise d’œuvre.

II. – L’étude d’opportunité

Le futur projet est maintenant sorti des limbes. Mais il n’est pas encore
question de le lancer : il faut d’abord vérifier qu’il est viable, qu’il possède
le minimum de qualités nécessaires pour parvenir à son terme.
C’est l’objet de l’étude d’opportunité. Cette dernière doit rassembler,
analyser, compléter les informations permettant de décider si le projet est
viable et peut être poursuivi. La décision de lancer ou non le projet au vu
des conclusions de l’étude d’opportunité relève également du comité
d’arbitrage ou à défaut du comité de direction.
Cette étude doit contenir les éléments suivants :

Contenu de l’étude d’opportunité

Historique et origine du projet. – La façon dont l’idée du projet a germé


est toujours un élément utile que l’on doit rappeler pour comprendre
comment et pourquoi le projet a vu le jour.
Il s’agit essentiellement de reprendre :
– l’analyse du problème ou de la volonté d’action qui a présidé à l’idée
du projet ;
– les éléments de contexte qui l’éclairent ;
– les acteurs qui sont intervenus dans cette démarche ;
– le processus qui a conduit à la décision de mener une étude
d’opportunité.
Ce chapitre servira de cadre général et d’élément de compréhension
d’ensemble du projet. Il permettra entre autres choses d’éclairer les enjeux
du projet en termes généraux. Il permettra de consigner également les
acteurs impliqués, directement ou indirectement, dans le projet. Ce dernier
point est souvent négligé, notamment par les « techniciens » qui voient
l’intérêt technique du projet et négligent l’importance souvent décisive des
aspects relationnels ou contextuels. Il arrive souvent en effet que la
personnalité du décideur, ou des contraintes externes fortes rendent
inévitable le lancement d’un projet, indépendamment de toute autre
considération. Il arrive au contraire qu’une opposition nette d’un acteur
influant bloque les projets apparemment les plus intéressants.

Objet et objectifs généraux. – Il est ensuite nécessaire de préciser son


objet et les objectifs qu’on veut lui voir atteindre. Ces objectifs doivent être
définis dans les termes les plus opérationnels possibles. Les résultats à
attendre d’un projet sont toujours des résultats concrets. Les objectifs dont
la formulation serait « Faire en sorte de… », « Favoriser… » sont à bannir.
Des exemples de résultats admissibles sont :
– une réalisation concrète, de type produit matériel, que ce soit un
produit fini ou une maquette ;
– la mise au point et le lancement d’un service opérationnel ;
– une étude suivie d’une expérimentation visant à vérifier la validité
technique ou économique d’un produit ou d’un service ;
– la réalisation d’une opération complète (déménagement d’usine ou
de siège social, par exemple).

Enjeux, liens avec la stratégie, risques stratégiques. – Le troisième volet


de cette étude consiste à apprécier les enjeux, qu’ils soient positifs ou
négatifs, que peut représenter le projet par rapport à l’organisme tout entier.
Ces enjeux peuvent être, pour simplifier, vitaux, importants ou
secondaires.
Prenons l’exemple d’une entreprise de technologie de pointe dans le
domaine de l’analyse biologique, dont le portefeuille de produits, basé sur
une technologie de traçage nucléaire, est en train d’être progressivement
battu en brèche par une technologie de traçage biologique.
Elle analyse un projet visant au lancement d’un produit majeur, qui
pourra remplacer son produit phare, et qui est fondé sur une technologie
biologique très compétitive par rapport à celle de ses concurrents. Une
analyse des cycles de vie de ses produits et de la composition de son
portefeuille de produits montre assez vite que la réussite de ce produit
constitue pour elle la dernière chance de survie. Le projet correspondant
sera d’une importance stratégique majeure.
Suivons cette même entreprise quelques années plus tard. Elle a
heureusement réussi son pari, et son nouveau produit phare, qui a pris une
part importante du marché, est en phase de fin de croissance : il va aborder
la période bénie et rentable de la maturité. Cela laisse quelque temps de
répit. Un projet portant sur un nouveau produit, capable de représenter 5 %
du chiffre d’affaires et 10 % de la rentabilité de l’entreprise, est proposé. Ce
projet sera bien entendu important, mais non vital.
Alors que les relations avec les clients sont normales, la Direction
informatique propose un projet permettant d’optimiser la gestion des
comptes clients. L’enjeu est de réduire de cinq à dix jours en moyenne les
délais de paiement des clients. La rentabilité de l’entreprise est bonne, sa
trésorerie ne pose pas de problème majeur, l’enjeu de ce troisième projet
sera stratégiquement secondaire, quoique utile.
L’analyse de ces enjeux, et de leur importance par rapport aux enjeux
majeurs de l’organisme, éclairera sur les chances qu’aura le projet de
surmonter les difficultés qu’il pourra rencontrer : si les enjeux qu’il
représente ne sont pas déterminants, il est fort probable qu’au cours de sa
durée de vie d’autres projets, plus prioritaires, seront choisis à son détriment
et qu’il sera arrêté, retardé ou réduit en conséquence.

Contraintes principales. – Le quatrième volet de l’étude d’opportunité a


trait à l’analyse des contraintes.
Nous avons vu que tout projet « butait » sur trois types de contraintes :
des contraintes de délais, des contraintes économiques et des contraintes de
qualité. Cependant, si toutes trois existent toujours, généralement l’une
d’elles est prédominante.
Prenons quelques exemples :
Une entreprise projette de présenter un modèle nouveau à un salon
important. La date de ce salon ne peut évidemment pas être modifiée. Or,
c’est précisément à ce salon que se décide l’avenir du produit : il est clair
que la contrainte de délai sera très forte, tout retard si petit soit-il pouvant
signifier le retard d’un an dans le lancement du produit, c’est-à-dire peut-
être sa condamnation.
Une entreprise de transport urbain souhaite tester un système renouvelé
de tramway dit « en site propre », c’est-à-dire n’utilisant pas ou le moins
possible la voirie déjà utilisée par les voitures particulières, les bus et les
camions. Le problème qui se pose est double :
– savoir si ce système peut s’avérer rentable, faute de quoi on
reviendra au réseau bus classique ;
– s’assurer par une expérimentation de garder un taux de sécurité
maximum, ce taux étant défini par des normes de fréquence et de
gravité d’accidents.
Pour ce projet, il est clair qu’une contrainte majeure sera la qualité, et la
contrainte discriminante sera la rentabilité. Les délais d’expérimentation
passeront très probablement au second plan.
On peut s’apercevoir en effectuant cette évaluation de contraintes que ce
que l’on demande au projet paraît irréalisable. Il est temps alors de mieux
calibrer les contraintes, de limiter quand c’est possible les objectifs du
projet ou d’y renoncer si le projet n’est ni vital ni important.
On pourra également préciser le faisceau des objectifs et des contraintes
qui semblent a priori réalistes, et on ajustera les unes et les autres en
conséquence. Cependant, cette analyse est encore une analyse dite
« externe » : on n’a pas encore défini le processus qui devra conduire au
résultat final, et les objectifs et les contraintes sont ceux qui sont
simplement souhaités par les commanditaires du projet.

Analyse des risques. – Nous avons vu, dans le chapitre consacré aux
techniques de gestion de projet, comment appréhender et formaliser les
risques inhérents au projet. Il est important de faire un inventaire des
risques que l’on peut percevoir à ce stade, de leur gravité, de leur
probabilité d’occurrence, des contre-mesures possibles. Si ces risques sont
trop importants par rapport aux enjeux, il appartiendra à la maîtrise
d’ouvrage de renoncer au projet ou de le transformer de telle sorte que les
risques principaux soient atténués ou supprimés.

Détermination de la maîtrise d’œuvre. – Dès ce stade, le maître


d’ouvrage doit être celui qui analyse l’étude et décide de poursuivre ou non.
En effet, souvent les personnes les plus impliquées, qui sont généralement à
l’origine de l’idée du projet, ont une telle envie de poursuivre l’action
entreprise qu’ils peuvent minimiser les risques et les difficultés probables,
et grossissent les avantages du projet. Il faut donc déterminer qui sera le
représentant de la maîtrise d’ouvrage, souvent autre que l’auteur de l’étude.
Partant du responsable qui a décidé de mener l’étude d’opportunité, et
qui est généralement un décideur de haut niveau de l’organisme – pour
simplifier les idées, un membre de la direction générale ou du comité de
direction –, il lui faudra déterminer qui sera décideur de plus haut niveau
dans ce projet, s’il est mené. Ce décideur devra disposer de l’autorité
suffisante pour modifier les objectifs et les contraintes du projet, et pour
intervenir dans l’attribution des ressources nécessaires à l’accomplissement
du projet. Il devra être évidemment concerné au premier chef par la réussite
du projet, mais en ayant le recul nécessaire pour faire passer l’intérêt
général de l’organisme avant la bonne fin du projet. Il sera le promoteur du
projet et en présidera le comité de pilotage.
Ce promoteur devra pouvoir être sollicité à tout moment par le chef de
projet pour prendre des décisions en urgence ou lui apporter le soutien dont
il a besoin.
Ce promoteur, au vu des conclusions de l’étude d’opportunité, prendra la
décision de lancer ou non le projet. Les données de cette étude
d’opportunité l’aideront à constituer l’équipe représentant la maîtrise
d’ouvrage, c’est-à-dire le comité de pilotage.
Ce comité de pilotage comprendra, de façon classique, les responsables
des directions appelées à apporter les contributions principales au projet, un
représentant de la direction financière et, lorsque cela a un sens, un
représentant des bénéficiaires du projet. Cependant, il est important que ce
comité ne soit pas composé d’un trop grand nombre de personnes, et que
chacun soit bien conscient du caractère indispensable de sa présence
effective aux réunions. Le chiffre de cinq ou six personnes semble être le
bon. Rien n’est pire qu’un comité pléthorique, gêné de ce fait pour prendre
les décisions nécessaires, et dont les membres se font remplacer
régulièrement par des adjoints peu au courant du projet et n’ayant pas de
réel pouvoir de décision.
S’il peut être constitué avant l’examen de l’étude d’opportunité, ce sera
lui qui l’examinera. Sinon, il sera constitué immédiatement après une
décision positive à la suite de cette étude.
C’est le comité de pilotage qui sera, par la suite, l’organe décisionnel
suprême du projet.

III. – L’initialisation du projet

Maintenant que la décision de lancer le projet est prise, il va falloir le


démarrer. L’objet principal de cette phase d’initialisation consiste à trouver
un processus opérationnel permettant d’atteindre les objectifs fixés dans le
respect des contraintes, et à contractualiser cet équilibre entre le possible et
le souhaitable. Il est très possible que l’on ne trouve pas de déroulement
possible permettant de respecter les divers éléments définis lors de l’étape
précédente, qui constituent la définition des caractéristiques « externes » du
projet. Il faudra alors s’ajuster, afin de définir un ensemble objectifs-
contraintes qui puisse être respecté. C’est la vérification de faisabilité
« interne » qui conduira l’équipe projet à s’engager, avec de bonnes chances
de réussite, à respecter objectifs et contraintes.
Cette initialisation doit se faire par approches successives, ce démarrage
demandant beaucoup de doigté.
Il s’agit, avant de choisir les membres de l’équipe projet, de fixer
l’architecture générale des tâches constitutives du projet et leur
ordonnancement. C’est ce qui permettra notamment, lors de la présentation
du projet aux différents membres de l’équipe et singulièrement aux
responsables de tâches, de disposer d’un schéma structuré autour duquel
une discussion puisse s’engager. Il ne s’agit certainement pas de figer cette
première architecture, et nous verrons que les contributions éventuellement
critiques des différents responsables de tâches seront non seulement
acceptées, mais vivement encouragées. Mais il s’agit de fixer un premier
cadre permettant au projet de « tenir debout ».

Le choix du chef de projet. – C’est la première des choses à faire, et


c’est au promoteur d’effectuer ce choix.
Les qualités requises pour ce poste sont, idéalement, les suivantes :
compétence en matière de méthode de management de projet. La
conduite d’un projet nécessite la maîtrise d’une démarche qui ne va
pas de soi. Le choix d’une personne déjà correctement formée à la
conduite de projet et ayant déjà eu des responsabilités, par exemple
celles de responsable de tâche, dans un projet précédent, est
souhaitable ;
compétence technique sur le fond du sujet traité. D’aucuns affirment
qu’il n’est pas besoin de connaître le fond du sujet pour conduire un
projet. Nous ne partageons pas ce point de vue. Certes, les méthodes
de conduite de projet sont les mêmes quel que soit le sujet traité, et
celui qui les maîtrise sera à même de les appliquer à tout projet.
Cependant, une connaissance minimum du fond du sujet paraît
indispensable pour :
– imaginer un déroulement, appréhender les méthodes que l’on
se propose de mettre en œuvre, apprécier les ressources et les
délais nécessaires pour mener à bien les différentes tâches,
– déceler et analyser les problèmes techniques qui ne
manqueront pas de se poser,
– dialoguer avec les membres de l’équipe de projet. Si le chef
de projet est par trop incompétent sur le plan technique, il y a
fort à parier qu’il sera très rapidement court-circuité et que
les membres de son équipe ne s’adresseront à lui que pour
régler les questions purement administratives, et que le
projet ira à vau-l’eau.
Pour toutes ces raisons, s’il est bien entendu que des compétences
techniques minima sur le fond du sujet ne sont jamais suffisantes, elles sont
nécessaires.

• Qualités relationnelles. Travail d’équipe s’il en est, le travail sur un


projet nécessite de la part des membres de l’équipe une aptitude certaine à
cet exercice : cela se traduit par une communication facile, une réelle écoute
des autres.

Ces qualités, qui sont demandées à tous les membres de l’équipe, il est
évident que le chef de projet doit les posséder à un degré suffisant. Un chef
de projet autoritaire, misanthrope, colérique, acariâtre ou doté d’une
capacité d’écoute par trop limitée fera immanquablement échouer le projet
le plus prometteur.

• Qualités managériales. Nous avons vu que le management d’un projet


implique d’être capable de gérer des relations transversales, de gérer la
double dépendance des membres de l’équipe à une hiérarchie verticale par
métier et à l’autorité horizontale liée au projet. C’est donc une compétence
forte en matière de management des équipes qui lui est demandée. Ces
qualités sont essentiellement les suivantes :
– savoir déléguer : une délégation existera chaque fois qu’une tâche
sera confiée à un responsable autre que le chef de projet. Ce dernier
devra dans ce cas négocier avec le responsable de tâche un contrat
d’objectifs et de moyens, en ayant prévu un système de contrôle
régulier, accompagné d’un devoir d’alerte ;
– savoir négocier : le contenu et les modalités d’exécution des tâches
seront négociés avec les responsables. D’autre part, le chef de projet
devra négocier avec les hiérarchiques des membres de son équipe
les allocations de temps qui lui sont nécessaires ;
– assertivité10 : savoir dire oui ou non sans faire intervenir son
affectivité et sans provoquer de réactions d’agressivité de la part de
son interlocuteur constitue une qualité fondamentale du chef de
projet ;
– savoir communiquer. Voilà une autre qualité fondamentale du chef
de projet : il devra à de multiples reprises communiquer des
informations, en les présentant de façon intelligible pour ses
interlocuteurs ;
– donner le droit à l’erreur : il n’y a pas d’attitude franche possible si
ce droit n’existe pas, si les difficultés sont d’abord pensées en
termes de fautes et de sanctions possibles et non pas en termes de
difficultés à résoudre en commun. Si le chef de projet veut que les
problèmes lui soient « remontés », il faut que d’emblée il soit clair
pour chacun que c’est cette logique qui prévaut ;
– exiger un retour, exiger l’alerte : en corollaire du droit à l’erreur, le
chef de projet doit en revanche exiger que lui soient remontées les
difficultés ne pouvant être maîtrisées, à quelque niveau que ce soit.
Ce devoir d’alerte doit être strictement respecté, faute de quoi le
droit à l’erreur se transformerait en laxisme ;
– contrôler : de même que le devoir d’alerte doit passer à l’état de
réflexe au sein de l’équipe de projet, le contrôle doit être considéré
comme une pratique parfaitement naturelle.
Comme toujours lorsqu’on recrute, il est pratiquement impossible de
trouver quelqu’un qui possède toutes les qualités requises au meilleur
niveau. Ce qui est important dans ce cas est que le futur chef de projet ne
présente aucune déficience majeure : qu’il n’ait aucune compétence en
matière de gestion de projet ou n’ait aucune compétence sur le fond du
sujet, aucune aptitude relationnelle ou aucune compétence managériale et le
projet est condamné !

Élaboration d’une vision « interne » du projet par le chef de projet. –


Une fois le chef de projet pressenti par le promoteur, il est important qu’il
puisse « négocier » sa mission, pour pouvoir se retrouver en pleine
acceptation des objectifs du projet et des moyens dont il pourra disposer
pour y parvenir. Un véritable « contrat de délégation » doit concrétiser cet
accord.
Pour cela, nous avons vu que le chef de projet doit imaginer un processus
permettant d’atteindre les résultats attendus, le décomposer en tâches
élémentaires et chiffrer ces tâches en termes de délais requis et de
ressources nécessaires, les ordonnancer et les regrouper ou les décomposer
pour obtenir un maillage convenable. Il s’agit là d’une première approche,
encore grossière, de la description du « comment faire ». Elle a un double
objet :
– obtenir un processus permettant de respecter les objectifs et les
contraintes externes proposés par la maîtrise d’ouvrage, ou à défaut
servir de base à une négociation des objectifs et des contraintes entre
le chef de projet et le promoteur pour aboutir à une solution viable ;
– disposer d’un schéma de principe à présenter lors de la phase de
lancement aux membres de l’équipe projet, afin qu’ils puissent se
faire une idée plus précise du projet et des engagements qu’il
représentera pour eux.
Le chef de projet pourra s’entourer d’avis pour les parties du projet qu’il
maîtrise le moins. Mais il doit être à même de concevoir l’architecture
d’ensemble du projet et d’en comprendre les problématiques principales.
C’est en cela que ses compétences techniques sur le sujet à traiter sont
essentielles.
Le chef de projet, au cours de ce travail, réfléchira également en termes
d’équipe à constituer : il est en effet normal que le chef de projet pense, au
moment de la définition des tâches, aux responsables possibles pouvant
prendre en charge ces tâches.

Première négociation entre le promoteur et le chef de projet. – La


vision du chef de projet en termes d’hypothèses concrètes de réalisation va
devoir être confrontée à la vision « externe » décrite par les commanditaires
du projet. Il est assez rare qu’elles coïncident. Un ajustement est alors
nécessaire et négocié entre le chef de projet et le promoteur :
– le délai est impératif. Le promoteur doit choisir entre une réduction
des objectifs ou du périmètre du projet, un accroissement du budget,
ou l’acceptation d’un niveau de qualité moindre. Le chef de projet
doit alors revoir le processus qu’il a imaginé en conséquence ;
– les coûts dépassent l’enveloppe fixée au départ. Le promoteur doit
soit accepter ce dépassement, soit voir avec le chef de projet si un
allongement du délai, une réduction des objectifs ou du périmètre,
une diminution de la qualité permettent de respecter le budget ;
– la qualité. Une qualité minimum est toujours requise, quel que soit le
projet, même si les acteurs n’en ont pas immédiatement conscience.
Face au plan de réalisation imaginé par le chef de projet, la modification
des objectifs ou des contraintes dépendent de la maîtrise d’ouvrage.
L’accord entre ce qui est souhaité, défini par le promoteur, et ce qui est
possible, défini par le chef de projet, doit impérativement être obtenu à ce
stade. C’est la condition sine qua non pour que le projet puisse démarrer
dans de bonnes conditions.

Fixation des « livrables » et des réunions du comité de pilotage. – Ces


réunions constituent des jalons importants dans le déroulement du projet.
Avec la définition des livrables qui généralement coïncident avec ces
réunions, elles vont rythmer la vie du projet et dater les décisions que se
réservera le comité de pilotage, ainsi que les moments du contrôle qu’il
exercera sur le projet.
Le positionnement des réunions du comité de pilotage. Les réunions ont
pour but de faire le point en vue de prendre des décisions ou de valider des
résultats. Pour cela, on a l’habitude de définir pour le projet ce qu’on
appelle des « jalons », points marquant la fin d’une partie importante du
travail et le début d’une autre. Par « partie importante », il faut entendre une
partie fortement consommatrice de ressources, stratégique sur le plan de la
qualité, ou ayant une forte influence sur les délais. Les décisions
correspondantes sortent généralement du cadre des décisions relevant du
seul chef de projet.
Chacun de ces jalons, par rapport auxquels on définira des retards ou des
avances sur le calendrier prévu, ou encore des points particuliers en matière
de suivi des coûts et de la qualité, sera naturellement marqué par une
réunion du comité de pilotage.

• À l’issue d’une étape importante, elle servira à expliciter le travail


effectué, présenter les conclusions et les conséquences sur la suite du projet.
Ce point d’étape se traduira généralement par un livrable particulier.
• Avant une étape nouvelle : le comité se verra présenter la façon dont
l’équipe de projet envisage de mener cette nouvelle étape, et les éventuelles
modifications qu’elle propose par rapport à ce qui avait été prévu à
l’origine, pour tenir compte des événements survenus au cours du projet. Le
comité validera ces options, demandera des modifications ou un travail
complémentaire à l’équipe de projet.
• Pour prendre une décision relevant explicitement du comité il existe des
projets, notamment ceux comportant une phase d’expérimentation suivie
d’une phase de mise en œuvre, pour lesquels une décision doit être prise en
cours de projet : continuer ou non, et si l’on continue sous quelle forme. Le
comité devra bien entendu se réunir à cette occasion. Le chef de projet, avec
l’accord du promoteur, lui présentera les solutions possibles, leurs enjeux et
leurs conséquences, leurs avantages et leurs inconvénients, et le comité
devra statuer.

Ces différents thèmes à traiter, que nous avons distingués ici pour la
clarté du raisonnement, se regroupent souvent dans la même réunion du
comité : lorsqu’une étape se termine, par exemple, il est assez évident
qu’une autre va commencer, et le bilan de l’une et la présentation de l’autre
se feront au cours de la même séance.
Ces considérations devraient suffire à positionner les réunions du comité
de pilotage au cours du projet. Cependant, il faudra aussi tenir compte
d’une fréquence « nécessaire et suffisante » : cette fréquence de réunion
doit en effet être suffisante pour que les membres du comité ne « perdent
pas le fil » du projet entre deux réunions successives ; elle ne doit pas être
d’autre part trop rapprochée pour que les vrais décideurs puissent y assister.
Des réunions intermédiaires doivent alors être positionnées, en s’efforçant
de leur faire correspondre la fin de tâches importantes.

La lettre de mission du chef de projet. – Le promoteur et le chef de


projet pourront alors fixer la mission du chef de projet. Le contrat de
délégation nommant le chef de projet, c’est-à-dire sa lettre de mission,
devra comporter au moins les éléments suivants :
– présentation du projet, de son objet, de ses enjeux, de ses objectifs ;
– définition précise des livrables : ce que devra produire le projet, et à
quel moment. C’est une bonne façon de concrétiser les objectifs du
projet, et de marquer des étapes intermédiaires correspondant aux
étapes du déroulement du projet ;
– principales contraintes à respecter (délais, contraintes de qualité,
enveloppe budgétaire) ;
– équipe possible, conditions de réussite (le chef de projet par exemple
pourra ne s’engager que si telle ou telle ressource peut être rendue
disponible) ;
– positionnement du chef de projet par rapport aux responsables
hiérarchiques de l’entreprise ;
– composition du comité de pilotage ;
– définition du type de décision dépendant du chef de projet, des
décisions que se réserve le promoteur, de celles qui devront faire
l’objet d’un accord du comité de pilotage ;
– détermination des règles conduisant aux obligations d’alerte, et aux
possibilités de recours auprès du promoteur.
La lettre de mission doit être effectivement négociée, et non imposée
comme on le voit trop souvent, ne serait-ce qu’à cause de la position
hiérarchique souvent élevée du promoteur. Si, lors de cette négociation, le
chef de projet reste sans réaction, c’est qu’il ne s’engagera pas réellement
sur la bonne fin du projet, se situant soit dans une position de soumission au
promoteur, en étant convaincu qu’il n’arrivera pas à mener le projet à bonne
fin dans les conditions qui lui apparaissent comme imposées, ou en
n’accordant pas une importance majeure au fait de tenir ses engagements.
Au contraire, un chef de projet qui propose de modifier ce qui a été prévu
par le promoteur, de faire intervenir d’autres acteurs, qui arrive à une
évaluation des délais et du budget différents de ce à quoi aboutissait l’étude
d’opportunité, montre par là même qu’il prend le projet à son compte, qu’il
fait preuve d’un esprit de responsabilité : en un mot, il a de bonnes chances
de jouer pleinement son rôle de chef de projet.

IV. – Le lancement

Le travail d’initialisation étant effectué, il va falloir constituer l’équipe du


projet, présenter à chacun ce qu’on attend de lui, officialiser le projet, enfin
préparer et tenir la réunion de lancement. C’est l’objet de cette phase.
Le chef de projet a procédé à une première description des tâches, de leur
évaluation, de leur enchaînement, des budgets qu’on doit leur consacrer.
Cependant, ce travail s’est fait sans les responsables de tâches ou de
sousprojets, non encore nommés.
Il est en effet important de ne pas contacter les responsables
hiérarchiques des membres de l’équipe projet pressentis sur ces domaines
avant que la lettre de mission ne soit établie :
– le chef de projet n’est pas encore certain des responsables de tâches
qu’il va désigner ;
– il ne peut pas leur présenter un projet suffisamment structuré ;
– l’équilibre entre les rôles de chacun a besoin d’être mûri avant de
proposer des choix.
Donc, malgré le caractère imparfait du travail mené par le chef de projet,
ce premier « dégrossissage » est indispensable.
En revanche, c’est au cours de la phase de lancement que vont intervenir
pour la première fois les responsables de tâches.
Préparation de la présentation aux membres de l’équipe. – Le chef de
projet commence bien entendu par prendre contact avec les responsables
hiérarchiques des personnes qu’il compte pressentir pour faire partie de
l’équipe projet, et obtenir leur accord de principe. Le chef de projet prépare
ensuite l’entretien individuel qu’il va avoir avec chacun des responsables de
tâches. Il est important que le chef de projet commence par des entretiens
individuels, en débutant par les responsables des tâches les plus
« critiques ». En effet, le projet est amené à être modifié au cours de ces
entretiens, et se reconstruira progressivement en fonction des apports des
uns et des autres.
Certains pensent pouvoir mener d’emblée une réunion générale de
lancement avec tous les membres pressentis pour composer l’équipe projet
en se dispensant des entretiens individuels préalables. C’est à notre avis une
erreur : chaque intervenant devra pouvoir mesurer le niveau d’engagement
qu’implique sa participation au projet, proposer des modifications
concernant les tâches qu’il aura à gérer, négocier sa participation avec son
responsable hiérarchique. Cela n’est pas possible au cours d’une réunion
plénière ; les intervenants ayant une vision et des intérêts éventuellement
divergents, le chef de projet se trouverait au cours d’une réunion de
lancement non préparée par des entretiens individuels devant une situation
incontrôlable, et laisserait seulement à chacun une première impression
désastreuse d’improvisation.
Il faudra ensuite, au cours de ces entretiens individuels, convaincre
chacun de l’importance de son rôle et de l’intérêt de son travail, les
informer de la façon dont le projet sera mené, et faire en sorte qu’ils
prennent à leur compte le travail qu’ils auront à mener.
Il faudra enfin vérifier avec leur hiérarchie que la contribution qui leur
est demandée par le projet ne sera pas excessive.
Pour cela, le chef de projet devra, avant de les rencontrer, procéder aux
analyses suivantes :

• Analyse générale de leur position par rapport au projet.


Cette analyse aura pour principe d’examiner le projet du point de vue des
intéressés. Pour cela, il faudra :
– analyser leur rôle tout au long du projet. Une vision cohérente de ce
rôle et de sa valeur ajoutée par rapport au projet est primordiale :
c’est par là que l’intéressé aura une vision claire et positive du
périmètre et de la valeur de sa participation. C’est à ce moment-là
qu’on peut s’apercevoir que telle tâche, dont on allait a priori
confier la responsabilité à quelqu’un d’autre, lui revient
logiquement,
– recenser les facteurs de motivation et de risque propres à cet acteur.
Penser à ce que peut apporter le projet à chacun des acteurs est une
démarche indispensable, si l’on veut avoir une équipe motivée. En
effet, chacun peut percevoir dans le projet des éléments de
valorisation personnelle, d’acquisition d’expérience, mais aussi de
risque selon l’idée qu’il se fait des chances de succès du projet,
– tenir compte de la position possible du responsable hiérarchique dont
il dépend. Le chef de projet envisage d’utiliser les ressources que
constituent le temps de travail et les compétences de ce futur
responsable de tâche. Il faut donc que le responsable hiérarchique de
l’intéressé soit d’accord avec le niveau de cette participation : il y a
là une source structurelle de conflit. Mais si le projet a été
correctement positionné, avec un promoteur de poids, si ses enjeux
sont stratégiques pour l’entreprise, le responsable hiérarchique en
question pourra difficilement s’y opposer. Ce sera d’autant plus
facile s’il fait partie du comité de pilotage. De plus, la participation
de sa direction au projet sera souvent un élément valorisant pour lui,
et assez souvent même il la revendiquera. La discussion portera
généralement sur les modalités de cette collaboration, sur les
conflits de calendrier et sur le volume de travail que le projet
exigera de l’intéressé. La question se posera de façon d’autant plus
aiguë que ce dernier aura des compétences rares et appréciées ;
• L’analyse tâche par tâche.
Cette analyse globale étant faite, le chef de projet doit reprendre chacune
des tâches qu’il pense confier à l’intéressé, pour préciser ce qu’il attend de
lui :
– identifier l’apport majeur de la tâche. Le positionnement de chacune
des tâches dont l’intéressé sera responsable au sein du projet, son
apport et la valeur ajoutée pour le projet ont besoin d’être explicités,
– justification du choix par le chef de projet de l’intéressé pour être
responsable de cette tâche. C’est un élément important de
motivation ; ce sera aussi le moyen d’expliciter les compétences
requises, pourquoi le chef de projet pense que l’intéressé, possédant
ces compétences spécifiques, sera le mieux placé pour jouer ce rôle,
– donner les priorités et les contraintes attachées à cette tâche. Il est
indispensable que l’intéressé comprenne bien comment la tâche
s’insère dans le projet, avec quelles autres tâches elle est liée,
comment elle se situe par rapport au chemin critique, quel est son
budget, à quelles contraintes de qualité elle est soumise. Par
exemple, une tâche située sur le chemin critique, ou avec peu de
marge par rapport à ce chemin, sera généralement soumise à une
contrainte majeure quant au respect des délais. Une tâche
représentant un investissement important, avec une incertitude
possible sur les montants engagés, ou encore une tâche faisant appel
à du personnel externe en régie, sera soumise à des contraintes
budgétaires fortes… Si la tâche en question est traitée comme un
sous-projet, son analyse devra suivre les mêmes règles.

La présentation du projet à chacun des membres de l’équipe et la


négociation qui en résulte. – Le chef de projet prendra rendez-vous
successivement avec chacune des personnes pressenties pour être
responsables de tâches, si possible dans l’ordre décroissant de leur
importance11 dans le projet.

• Présentation du projet.
Au cours de ces réunions, il commencera par présenter le projet, la
spécificité du rôle qu’il propose à l’intervenant en question, le cadre qu’il
lui propose pour leurs relations, les règles du jeu du travail en équipe telles
qu’il les comprend : contrôle, points sur lesquels portera le devoir d’alerte,
règles de documentation et de communication au sein du projet.

• Visions contradictoires portant sur les tâches à réaliser.


Puis, il entamera un débat sur le fond des tâches qu’il compte déléguer,
afin d’arriver à la formulation d’une forme de « contrat », plus ou moins
explicite selon les habitudes de l’organisme, avec chacun d’eux. Il faudra
discuter de la façon dont il voit la réalisation des tâches qui vont lui
incomber. Il est capital que les personnes qui vont prendre la responsabilité
d’une ou plusieurs de ces tâches se les approprient afin de s’en sentir
véritablement responsables.
Là, de deux choses l’une :
– ou bien ce dernier ne dit mot, accepte ce qui lui a été proposé sans
réactions majeures, et… paradoxalement, le chef de projet a tout
lieu de s’inquiéter ;
– ou bien, il discute, propose des modifications dans les tâches dont il
va être responsable, et le chef de projet, tout en s’efforçant de
maintenir ces suggestions dans des limites acceptables dans le cadre
de l’architecture globale du projet et de ses contraintes, a tout lieu
d’être satisfait.
En effet, la première attitude montre que le responsable pressenti va
suivre ce qu’il considère être des instructions, mais ne se sent pas
véritablement responsable de la bonne exécution des tâches qui lui sont
confiées. La deuxième, au contraire, montre que la personne pressentie va
prendre sur elle de réaliser ce qui lui est confié avec ses méthodes et sa
façon de voir : l’attitude la plus critique en apparence vis-à-vis du chef de
projet sera la plus positive pour le déroulement du projet. Enfin, le chef de
projet doit se dire que, si c’était à lui de mener à bien la tâche qu’il confie à
ce responsable, il aurait peut-être fait différemment, mais c’est ce dernier
qui la mènera à bien : autant vaut que ce soit conformément à ses propres
façons de faire.
Cette discussion est donc un travail itératif, s’appuyant sur les travaux
précédents, mais admettant la controverse dans le cadre d’une architecture
d’ensemble que l’on s’est efforcé de structurer au maximum.

Lettre de mission propre à chacun des responsables de tâches. – Les


entretiens précédemment décrits sont très analogues à ceux qui se sont
passés entre le promoteur et le chef de projet. Il est assez logique qu’ils se
concluent par un accord de même nature, une sorte de lettre de mission,
même si cette dernière prend rarement le même caractère formel : on se
contentera souvent d’un compte rendu de réunion faisant office d’accord
entre les interlocuteurs. Il est très important que le responsable de tâche, et
bien entendu cela est aussi vrai pour le responsable d’un sous-projet,
accepte les termes de cette mission et la juge faisable.
Le chef de projet s’attachera à ce que ces nouvelles dispositions
respectent les limites de sa lettre de mission. S’il n’y parvient pas, dans le
cas où les arguments du responsable de tâche sont fondés, il devra revenir
vers le promoteur pour revoir le projet et sa propre lettre de mission.

La réunion de lancement. – Il faut maintenant donner le coup d’envoi


du projet. C’est la fonction de la réunion de lancement. Mais pourquoi
s’embarrasser d’une réunion de lancement, alors que tout a été dit lors des
entretiens individuels avec les différents responsables ? Tout simplement
parce que l’équipe ne sera véritablement constituée, presque
institutionnalisée, que quand chacun verra que le promoteur délivre un
message cohérent avec celui qu’il a entendu, que leur propre rôle sera
présenté officiellement. Cela tient peut-être du rite social, mais quelle
société humaine n’en a pas ?
Les objectifs majeurs de cette réunion seront les suivants :
– situer ce projet dans sa perspective politique et son importance par le
promoteur, communication que le chef de projet ne pouvait pas
effectuer seul ;
– clarifier les rôles respectifs du promoteur et du chef de projet ;
– établir des relations « en réseau » entre les membres de l’équipe
projet. Jusque-là les relations au sein de l’équipe projet ont été
seulement bilatérales entre le chef de projet et chacun des
responsables de tâches. Il est temps d’établir entre eux des relations
multilatérales, ce qui fluidifiera le fonctionnement du projet ! Si tout
passe par le chef de projet, ce dernier sera rapidement surchargé…
Cette réunion doit obéir à un certain nombre de règles :
– elle sera préparée avec le promoteur, afin que les rôles soient bien
partagés, les messages cohérents, l’impression d’unité de vue totale ;
– le promoteur sera présent de bout en bout.
Le déroulement pourra être le suivant :
– rappel de l’historique du projet, de ses enjeux, de ses objectifs, des
contraintes principales, des exigences de la maîtrise d’ouvrage ;
– structure, attentes en matière de reporting de la part du comité de
pilotage : c’est le promoteur qui prendra en charge ces deux
premières phases de la réunion ;
– présentation des jalons principaux, des livrables et de leur
calendrier : nous passons à l’organisation du projet, au « comment
faire », et c’est donc au chef de projet de prendre le relais ;
– présentation des tâches principales, de leur ordonnancement, des
responsables de tâches, des contraintes particulières s’attachant à
chaque groupe de tâches ;
– présentation des modes de fonctionnement du projet (coordination,
procédures de qualité, devoir d’alerte et d’information, procédures
de reporting, règles de documentation, secrétariat du projet) par le
chef de projet ;
– présentation de la communication envisagée pour le lancement du
projet : le promoteur reprendra la parole, la communication relevant
essentiellement du comité de pilotage ;
– soutiens possibles de la part du promoteur, bien entendu par lui-
même ;
– débat, questions-réponses.
Cette réunion se terminera par un moment de convivialité entre les
membres de l’équipe, afin de permettre aux divers membres de l’équipe de
se rencontrer de façon détendue.
À la suite de cette réunion, le projet pourra commencer effectivement à
fonctionner.

La communication interne et externe de lancement. – Un projet en


cours de lancement va soulever des questions auxquelles il convient de
répondre rapidement. On devra suivre les principes classiques de toute
communication : réfléchir à qui et pourquoi, quoi, comment, quand
communiquer.

La communication interne à l’organisme. – La hiérarchie de l’organisme,


les collaborateurs des directions impliquées dans le projet devront être
informés. Pour des projets importants, une information large à tous les
membres de l’organisme pourra être organisée.
Que ces personnes devront-elles savoir du projet, au minimum ?
– il faudra qu’elles sachent identifier le projet (nom, sigle, logo),
« signes d’appartenance » pour les membres de l’équipe projet ;
– il faudra qu’elles connaissent son objet et ses enjeux principaux ;
– il faudra qu’elles sachent qui est le promoteur, qui est le chef de
projet, quelles directions de l’organisme sont impliquées ;
– il faudra qu’elles sachent que le projet démarre, et quand il est prévu
qu’il se termine.
Avec ces éléments, on évitera les rumeurs accompagnant souvent
l’absence d’informations.

La communication externe à l’organisme. – Pour une majorité de projets,


ceux qui sont purement internes, cette communication est sans objet.
Il y a cependant des projets qui ont des implications à l’extérieur de
l’organisme. Il faudra reprendre la réflexion qui aura été menée
précédemment sur les acteurs externes, leurs motivations, leurs réticences
éventuelles, leurs moyens d’action et éventuellement de nuisance pour
définir une véritable politique de communication.
À ce stade, l’intervention de spécialistes est pratiquement indispensable :
les sujets étant souvent sensibles, le choix des mots, des images doit être
pesé avec soin.
C’est sans doute là l’un des travaux les plus délicats de la phase de
lancement d’un tel projet.

Comment procéder ? . – L’aspect éminemment politique de la


communication implique que le promoteur y joue un rôle particulièrement
actif. Du fait de la largeur de vue sur la stratégie de l’organisme et sur son
environnement qu’entraîne sa position, c’est lui qui sera le plus à même de
juger des répercussions du projet sur les différentes directions et donc de
donner les lignes directrices de la présentation du projet.
Le second principe est que cette communication n’est pas moins difficile
que toute autre communication, notamment de nature commerciale. Aussi,
sauf à avoir au sein de l’équipe de projet des compétences reconnues dans
ce domaine, l’équipe projet aura intérêt à s’entourer de spécialistes.

Le contrôle qualité du projet. – Certains projets, notamment les projets


techniques et industriels, ont leur logique de qualité propre : cette logique
porte sur le fond du sujet traité. Elle est liée à la nature des techniques mises
en œuvre, et les équipes concernées procèdent à la création de tâches
particulières faisant partie intégrante du déroulement du projet.
Fig. 13. – Exemple de tableau de contrôle qualité d’une phase d’un projet

En revanche, la qualité liée au management général du projet doit


toujours être traitée dès cette étape. Les validations correspondantes, à ce
stade comme aux stades suivants, peuvent prendre la forme d’un tableau
permettant de vérifier qu’on s’est posé les bonnes questions, et qu’on y a
apporté des réponses pertinentes. Voici un exemple d’un premier tableau,
devant être rempli au moment de la phase de lancement (voir fig. 13) :
On voit sur cet exemple que les questions de ce tableau peuvent être
reprises pour la grande majorité des projets ; il est possible d’en ajouter,
selon la spécificité de l’organisme. Ce qui importe est de garder la même
trame pour tous les projets et de ne pas retrancher de lignes selon le projet
traité : il sera plus sain de déclarer la question « non applicable », ce qui
oblige à justifier son choix et à ne pas éluder une question gênante en la
retirant simplement de la liste. Dans l’exemple ci-contre, le projet est dans
un stade avancé de sa phase de lancement. Cependant, deux points sont
encore en suspens, et le niveau de validation requis est de 100 % : il faudra
donc achever de traiter ces points avant de passer à la suite du projet.
Le pourcentage de lignes validées donne un pourcentage de « qualité »
relative au management du projet.

V. – La vie du projet

Le projet a démarré. Il faut maintenant le mener à bien et suivre son


exécution. Il se peut qu’il se déroule conformément aux prévisions : encore
faut-il s’en rendre compte ! Il se peut aussi – et c’est bien sûr le cas le plus
fréquent – qu’il y ait en cours de projet des imprévus, des dérapages qui
obligent à réagir.
Cette phase de vie sera rythmée par des réunions de l’équipe projet, de
réunions avec le promoteur, de réunions du comité de pilotage.
Rappelons que le projet va se situer à l’intérieur d’un faisceau de trois
contraintes : les délais, la qualité, les coûts.
Toute dérive un peu importante du projet va le faire immanquablement
« buter » sur l’une au moins de ces contraintes.
Prenons l’exemple de la contrainte de délais : un retard survient sur une
tâche du chemin critique ou sur une tâche disposant de peu de marge par
rapport au chemin critique. Or, la contrainte de délais est impérative : pour
tenir les délais, ou bien on maintient la qualité prévue, mais à un coût plus
élevé (on fait intervenir des équipes plus importantes, qu’il faut former, on
fait appel à plus de sous-traitance, etc.), ou bien on reste dans l’enveloppe
de coûts prévue mais en acceptant de transiger sur certains aspects de la
qualité. C’est le genre de situations devant lesquelles on va se trouver.
Pour pouvoir prendre en connaissance de cause ce genre de décisions, il
faut que plusieurs facteurs soient réunis :
– il faut tout d’abord être capable de repérer les dérapages ; cela va
être le rôle des tableaux de bord et des tableaux de suivi, ainsi que
de tout l’appareillage d’information et d’alerte mis en place ;
– il faudra ensuite être capable d’analyser les causes réelles du
problème, afin d’établir un diagnostic fiable. Nous verrons qu’il
s’agit là d’un travail d’équipe, pour lequel chacun sera mis à
contribution ;
– enfin, il faudra établir un pronostic, c’est-à-dire trouver des solutions
adéquates, et prendre des décisions : décisions dépendant de
l’équipe projet et singulièrement du chef de projet dans un premier
temps, appel au promoteur dans le cas où ces décisions n’entrent pas
dans son périmètre de décision, appel au comité de pilotage dans les
cas particulièrement graves.
C’est l’objet des méthodes et outils de suivi du projet.

Les objectifs du suivi du projet. – Le suivi du projet consistera donc à :


repérer les dérapages critiques… :
– en délai,
– en consommation de ressources, en budget,
– en qualité ;
… pour analyser de façon pertinente… :
– en identifiant l’origine réelle du problème,
– en l’analysant avec les responsables intéressés ;
… et agir à temps :
– en prenant des mesures immédiates,
– en préparant des décisions,
– en en référant au bon niveau de décision.

Repérer les dérapages critiques…. – C’est le tableau de bord du projet


qui devra jouer ce rôle. Il s’appuiera fondamentalement sur le suivi des
tâches.

Le suivi des tâches. – Ce suivi se trouve à l’origine des données


constituant le tableau de bord. Il utilisera ce que l’on a pris soin de préciser
au moment des phases d’initialisation et de lancement :
– un résultat tangible marquant la fin de chacune des tâches : nous
pourrons donc identifier sans équivoque possible les tâches
effectivement terminées ;
– le suivi des tâches en cours : ressources consommées, suivi des
délais, problèmes divers rencontrés, chemin restant à parcourir
jusqu’à l’achèvement complet de la tâche. Là, il convient de
dénoncer une pratique déplorable : évaluer le « reste à faire »
comme la différence arithmétique entre le prévu et le réalisé ! Tout
écart en cours de tâche est dès lors arithmétiquement indécelable !
Pour éviter cela, il est indispensable de demander au responsable de
tâche ce qui à son avis reste à faire normalement pour achever la
tâche : « À votre avis, dans combien de temps pensez-vous en avoir
fini ? Que vous reste-t-il à faire, dans quel délai ? Quelles autres
dépenses restent encore à engager ? »
Cette notion de « reste à faire », quand elle sera acquise et utilisée avec
honnêteté, permettra en effet de déceler tout de suite, en cours d’exécution
de tâche, les dérapages éventuels. La comparaison pourra en effet se faire
selon l’identité suivante :
Écart = prévu – (consommé + reste à faire), tandis qu’au travers de
l’arithmétique présentée plus haut l’écart serait toujours et par construction
nul !
Les dérapages critiques doivent pouvoir être décelés au travers du tableau
de bord du projet.

Les caractéristiques du tableau de bord. – Pour être opérationnel et


répondre à ce qu’on attend de lui, le tableau de bord doit présenter les
qualités suivantes :
– il doit être synthétique pour être lisible. Il faut être très sélectif sur le
choix des indicateurs, et ne garder que ceux qui vont permettre de
déceler que globalement quelque chose ne va pas ;
– il doit répondre à un souci de présentation. Il faut que le tableau de
bord soit parlant, et que la sélection parcimonieuse des indicateurs
soit le pendant de la présentation la plus parlante possible ;
– sa fréquence de parution doit être bien adaptée. Nous avons vu que le
maillage des tâches répondait entre autres au souci de réagir vite à
un dérapage, de savoir ce qui se passe le plus vite possible. Il faut
évidemment que la fréquence de collecte des données et
d’élaboration du tableau de bord soit compatible avec ces exigences.
Le tableau de bord doit donc avoir une fréquence de sortie
comparable à la durée des tâches. Il faut en revanche qu’il ne soit
pas prévu une fréquence d’établissement du tableau de bord trop
forte : le management du projet en serait trop alourdi, inefficace et
rapidement abandonné

Le suivi des délais. – Cas typique de suivi global et présenté de façon


synthétique, le suivi des délais pourra être présenté en faisant figurer les
marges ou les retards par rapport aux principaux jalons définis pour le
projet, pour l’ordonnancement initial, le dernier ordonnancement examiné
et celui que l’on examine aujourd’hui. Voici en exemple de ce type de
présentation :

Dates limites pour tenir le


15/10/2011 23/03/2013
calendrier des jalons
Ordonnancement initial 20 jours
Dernier ordonnancement observé 5 jours
Ordonnancement actuel – 10 jours

Fig. 14. – Tableau de bord – état de suivi des délais

Dans cet exemple, le projet a démarré le 15 octobre 2011. La fin du


projet est prévue le 23 mars 2013. Au démarrage du projet,
l’ordonnancement des tâches et le calcul du chemin critique ont indiqué
qu’il restait une marge de vingt jours. Lors de l’édition du précédent tableau
de bord, on a constaté que la marge s’était réduite et commençait à être
assez inquiétante : cinq jours.
L’édition du dernier tableau de bord est plus alarmante. En effet, la marge
est passée de cinq jours à une marge négative de dix jours : dans l’état
actuel du projet, on ne tient pas les délais.
Une présentation simple et claire, très synthétique, permet de constater
l’existence d’une difficulté. Des pastilles de couleurs peuvent être ajoutées
pour la lisibilité du tableau. Signalons que l’élaboration de ce document ne
demande pas beaucoup de travail si l’on utilise de simples outils de gestion
de projets : les graphiques PERT et Gantt, à jour des réalisations des tâches
achevées et du « reste à faire » des tâches en cours, donnent ces
informations quasiment par lecture directe.
Il faudra ensuite, dans un cas comme celui cité en exemple, se reporter au
détail des tâches pour analyser le problème et trouver une solution. Mais le
tableau de bord permettra immédiatement, et c’est son rôle, de voir qu’il y a
problème, et de quelle nature et de quelle gravité il est.

Le suivi des coûts. – Les mêmes règles de simplicité prévalent. Là


encore, nous vous proposons un type de tableau de bord de suivi des coûts
qui permet de déceler tout de suite s’il existe un problème :

Fig. 15. – Tableau de bord – état de suivi des coûts

Comme vous le voyez, ce tableau ne comporte que quatre lignes :


– celle concernant les tâches achevées, pour lesquelles ne restent que
les informations concernant le prévu, le réalisé et les écarts ;
– celle concernant les tâches en cours, pour lesquelles on dispose du
prévu, du réalisé, du reste à faire, valorisé comme indiqué plus haut,
et les écarts calculés comme étant le prévu – (le réalisé et le reste à
faire) : c’est ce qui permettra de déceler un éventuel écart
significatif sur ces tâches ;
– celle concernant les tâches restant à accomplir, où le réalisé est bien
entendu absent, mais pour lesquelles on a demandé aux responsables
de tâches une réévaluation du « reste à faire » compte tenu de la
tournure qu’a pris le projet et de l’expérience acquise dans la
réalisation des autres tâches ;
– une extrapolation globale calculée automatiquement sur l’ensemble
du projet, qui tient donc compte des réalisations et d’une
réévaluation des tâches en cours et à venir compte tenu de
l’expérience acquise.
Ce tableau très synthétique permet de suivre en permanence l’état
budgétaire du projet. La mise à jour des tâches réalisées est extrêmement
simple. Celle des tâches en cours nécessite un suivi des temps passés, qui de
toute façon doit exister, et du reste à faire dont nous avons dit que ce devait
être un réflexe pour tout responsable de tâche.

Le suivi de la qualité. – Il se fera à partir de tableaux de suivi analogues à


celui présenté pour la phase de lancement.
Prenons l’exemple d’un projet devant aboutir à une expérimentation.
Plusieurs grandes étapes sont prévues :
– initiation et lancement (cette étape est la même quel que soit le
projet) ;
– conception : il s’agit, comme son nom l’indique, de concevoir les
systèmes devant être expérimentés ;
– réalisation : il s’agit de réaliser le produit que l’on se propose
d’expérimenter sur une zone définie ;
– expérimentation : il s’agit d’expérimenter le système sur le site
choisi, et d’en évaluer tous ses aspects : technique, fonctionnel,
sécurité, appréciation des utilisateurs, etc.
Face à ces étapes, il est possible de définir des tableaux de qualité
analogues à ceux que nous avons vus lors de la phase d’initialisation et
lancement. Ces tableaux serviront à consigner l’état d’avancement du projet
sur le plan de l’assurance qualité12.
La partie du tableau de bord relative à la qualité doit permettre de déceler
si un problème de cette nature se pose pour le projet. En indiquant le
nombre de lignes correspondant aux questions auxquelles on se doit de
répondre en fonction des différents stades d’avancement des phases du
projet, on aboutira à un véritable tableau de bord de la qualité (voir fig. 16).
Ce tableau de bord permet d’un seul coup d’œil de repérer l’état
d’avancement du projet sous cet angle. Si un retard important existe, ou si
des questions restées sans réponse « traînent » d’une étape à l’autre, on s’en
rendra compte immédiatement.
On voit par exemple sur ce tableau qu’on en est manifestement à l’étape
de réalisation. Cependant, un certain nombre de points à traiter dans la
phase de conception ne l’ont pas été ! Pire encore : deux questions que l’on
doit se poser lors de l’initialisation et du lancement ne sont pas validées. Il y
a lieu de s’en préoccuper. En revanche, certaines questions à traiter pour
réaliser la phase d’expérimentation ont déjà été traitées : il s’agit très
probablement de questions relatives à la définition des protocoles de tests,
qui doivent être faits très en amont… La bonne démarche est alors de se
reporter aux tableaux de détail, afin de voir ce dont il s’agit, et y remédier.

Fig. 16. – Tableau de bord – état de suivi de la qualité


… repérer les autres difficultés…. – D’autres difficultés peuvent
survenir, qui vont interférer sur la bonne marche du projet. Il faut également
les déceler, les analyser, trouver des solutions susceptibles de les résoudre.
Dressons un rapide panorama de ce qu’elles peuvent être.

L’influence d’événements extérieurs. – Le projet est immergé dans un


environnement qui exerce des influences sur sa bonne marche. Un
événement extérieur, une modification brutale de l’un des éléments de cet
environnement peuvent mettre en péril le projet.
Il faut, comme pour tous les autres problèmes qui se posent, que le chef
de projet et son équipe analysent les conséquences de ces changements
d’environnement et envisagent la ou les solutions possibles. Ensuite, si ces
solutions dépassent le cadre de leurs délégations de pouvoirs, il faut qu’ils
alertent le plus vite possible le promoteur.

Les problèmes de motivation d’équipe. – Ce sont des problèmes souvent


sous-estimés ; c’est pourtant l’une des difficultés importantes rencontrées
par les projets de longue durée.
Prenons une équipe de projet bien constituée, pour laquelle les phases
d’initiation et de lancement ont été menées de façon exemplaire. Le projet
démarre dans l’enthousiasme. Cependant, les délais sont contraignants, il
faut faire attention aux coûts, les exigences de qualité sont fortes. Les
périodes de travail intense se succèdent à un rythme rapide ! L’équipe
commence à se fatiguer. Et puis le projet dure, sans que des résultats
tangibles n’apparaissent. Les collègues parlent déjà de « serpent de mer »,
se moquent.
C’est alors qu’un événement extérieur remet en cause tout le travail déjà
fait… sans qu’il soit possible de réagir de façon véritablement efficace. La
démotivation, le découragement guettent les âmes les mieux trempées. Il est
temps d’intervenir.

… analyser l’ensemble de façon pertinente…. – Une fois les


problèmes décelés, il faut les analyser. Rappelons qu’autant les tableaux de
bord de projet sont conçus pour déceler les problèmes et les tâches en
question le plus tôt possible, autant ils ne peuvent en analyser les causes.
Pour cela, l’équipe projet dispose d’autres éléments d’information :
– le suivi des tâches dans lesquelles le détail de ce qui se passe pour
chaque tâche sera consigné ;
– l’analyse menée avec les responsables des tâches concernées : étant
au cœur du sujet, ces responsables ont une connaissance directe de
ce qui s’y passe ;
– les autres éléments de suivi : les éléments budgétaires détaillés, par
exemple, seront systématiquement repris.

Avoir une vision large des problèmes. – Ces éléments étant collectés, il
faudra que le chef de projet et son équipe prennent un maximum de recul :
en effet, dans tout projet :
– les acteurs sont multiples ;
– les domaines abordés s’entrecroisent ;
– les interférences sont multiples.
Devant un problème donné, il faut se garder de se contenter d’une
analyse trop rapide des choses, qui risquerait de n’aboutir qu’à une vision
parcellaire, privilégiant une cause immédiate sans déceler les causes plus
profondes.

Le chef de projet ne doit pas rester seul. – Cette tentation existe : il se


sent le principal responsable du projet. Il peut se sentir en faute et avoir
envie de régler le problème sans trop ébruiter les difficultés rencontrées.
Il doit lutter contre cette idée fausse, cela pour plusieurs raisons :
– il n’est pas en faute et n’a aucune raison de cacher les difficultés. Il
doit en revanche s’efforcer de trouver une solution ;
– les autres membres de l’équipe lui apporteront des visions
complémentaires indispensables pour élargir son analyse : étant de
spécialités différentes, ils verront la situation sous des angles divers,
et c’est cette diversité qui permettra d’aboutir à une analyse
pertinente et complète ;
– ces membres de l’équipe sont parties prenantes dans la bonne marche
du projet. Ils se sentiront d’autant plus responsables de la bonne
marche du projet qu’ils seront associés à la recherche de solutions
quand un problème survient.
… pour agir à temps ! – Nous avons vu qu’il était important de déceler
les problèmes le plus tôt possible et les analyser de même. Tout cela ne
servirait à rien si les décisions correspondantes tardaient à être prises. Il faut
donc que, les problèmes ayant été analysés avec toute la largeur de vue
nécessaire, les décisions appropriées soient prises avec célérité.

Mobiliser les ressources qui dépendent directement du chef de projet. –


Lorsque les décisions relèvent de la gestion ordinaire du projet, sous la
responsabilité du chef de projet, elles devront être prises sans tergiverser.
Souvent, certains chefs de projet en réfèrent systématiquement au
promoteur. C’est une erreur : leurs marges de manœuvre doivent exister, et
ils doivent prendre les décisions qui leur sont déléguées dans ce cadre.
Sinon, ils en perdront très rapidement l’usage.

Faire intervenir le promoteur quand les circonstances l’exigent. – C’est


un cas de figure fréquent. Il ne faut pas que le chef de projet hésite alors à le
faire :
– c’est de sa responsabilité : on attend de lui qu’il mette les problèmes
en lumière à temps, afin qu’une décision soit prise ;
– c’est la prise de décision qui importe, même si elle doit passer par le
fait d’alerter le promoteur.
Une chose cependant subsiste : le chef de projet est celui qui doit trouver
des solutions, faire un rapide bilan des avantages et des inconvénients de
chacune d’elles, pour les présenter au promoteur. Il ne peut pas se
« débarrasser » du problème sur le promoteur ! Au promoteur de trancher,
ou d’apporter une autre solution si les informations plus larges dont il
dispose lui en inspirent une plus adéquate.

Le « retour d’expérience ». – Cette pratique, d’usage courant


maintenant dans certaines entreprises, apporte de grands enseignements, et
permet de capitaliser l’expérience.
Il s’agit, après qu’une difficulté a été traitée, de réunir les personnes qui
ont été mêlées à son repérage, à son analyse et à sa résolution afin
d’analyser le processus vécu, et de voir si tous les éléments de ce processus
étaient fiables, efficaces, sûrs et conformes aux procédures et normes de
qualité de l’organisme. Les éléments constitutifs de ce retour d’expérience
pourront être les suivants :

Revue de forme :
– La détection du problème : d’où est-elle venue ? Aurait-on pu
déceler le problème plus tôt ?
– L’alerte : par qui, dans quel délai, le devoir d’alerte a-t-il été
respecté ?
– Les mesures conservatrices ont-elles été prises ?
– L’analyse du problème a-t-elle été faite par un groupe correctement
constitué ?
– Les conclusions ont-elles pris la forme d’analyse de solutions en
termes d’actions ?
– La remontée d’informations a-t-elle été bien gérée ?
– À quel moment le promoteur a-t-il été informé ? Était-ce le bon
moment ?
Revue de fond :
– Est-on bien revenu sur les objectifs du projet ?
– Les différents aspects du problème ont-ils été pris en compte ?
– Les solutions trouvées sont-elles réalistes ?
– Leur présentation comprend-elle les enjeux, les alternatives, les
moyens à mettre en œuvre ?
– La présentation de ces solutions met-elle clairement en évidence les
choix possibles ?

VI. – La clôture du projet

Le projet se termine. L’équipe projet va éprouver un certain vide et va


commencer un travail de deuil dû à la fin de son projet. Pourtant, dans un
certain nombre de cas, une bonne partie du bénéfice du projet se joue là,
dans les dernières semaines.
Il s’agit, après s’être effectivement assuré que le projet est fini, les
livrables achevés et les dernières tâches « bouclées » :
– de faire une évaluation finale ;
– de rédiger un bilan de fin de projet (avec les perspectives ouvertes
par le projet !) ;
– de mener à bien la communication interne et externe de fin de
projet ;
– de valoriser l’équipe projet ;
– de fêter le succès !

L’évaluation finale. – On aura en principe fait tout au long du projet des


réunions de retour d’expérience qui auront porté sur le traitement de
difficultés particulières.
Il est temps, à la fin du projet, de mener à bien une évaluation plus
globale et de la faire de telle sorte que l’expérience accumulée puisse être
acquise par les membres de l’équipe, et possible transmise au reste de
l’organisme.

L’établissement de la liste des points marquants. – Il faut pour cela


reprendre le déroulement du projet (la documentation du projet, si elle a été
bien organisée et bien suivie, devrait le permettre sans trop de difficulté),
ainsi que les rapports des réunions de retour d’expérience, pour établir,
phase par phase :
– les points positifs marquants ;
– les points à améliorer ;
– la détection des dérapages et leur traitement ;
– la pertinence des solutions choisies, en se servant du recul que
constitue la suite du projet ;
– les leçons à en tirer.

La « mémoire » du projet. – Il s’agit de définir :


– les éléments à retenir : ceux qui présentent un caractère de généralité
tel qu’on estime qu’ils pourront être réutilisés dans d’autres
circonstances ;
– comment les décrire ? Pour qu’ils soient utilisables, il faudra
notamment donner une description du contexte, de façon qu’elle
permette la transposition à d’autres situations ;
– comment les stocker ? Là, la culture de l’entreprise importe
beaucoup : si des structures d’archivage « vivant » existent, il faudra
les utiliser. Si des structures d’archivage consultables par Internet se
développent, il faut sans doute y recourir. Si rien n’existe… c’est
peut-être l’occasion de monter un projet ad hoc ;
– comment faciliter la recherche lorsque le même problème se posera ?
Il ne suffit pas de rédiger, sous une forme ou sous une autre, une
bonne documentation, encore faut-il prévoir les moyens d’accès, les
clés de recherche…

Le bilan de fin de projet. – C’est souvent l’un des « livrables13 », ce qui


règle la question. Mais il doit être rédigé également lorsque le projet a pour
objet une réalisation matérielle ou la mise en place d’un système. C’est en
effet à travers lui, et grâce au travail de réflexion que sa rédaction suppose,
qu’on va mettre en évidence l’adéquation des résultats avec ce qu’on avait
prévu, et les perspectives et les suites que l’on n’avait pas prévues.

Le contenu. – Un contenu type de bilan de fin de projet peut être le


suivant :
– rappel de l’historique ayant présidé à son lancement, objet, objectifs,
contexte ;
– rappel des critères d’évaluation définis au démarrage : il est
souhaitable lors de l’initialisation d’avoir noté soigneusement les
critères de réussite du projet ;
– bilan technique : ce qui a été produit, les méthodes utilisées, les
résultats, en comparant ce qui est obtenu avec ce qui était requis,
selon les critères d’évaluation définis ;
– bilan économique : on comparera les résultats économiques attendus
et ceux qui ont été obtenus ; pour cela, il faudra comparer les
budgets, mais aussi, pour les projets conduisant à une mise en
exploitation d’un produit ou d’un service, les marges d’exploitation
obtenues par rapport à celles qui étaient prévues ;
– perspectives d’avenir : un projet génère généralement des
perspectives que l’on n’avait pas prévues à l’origine. Il est
évidemment très intéressant de les consigner dans ce rapport.
Qui le fait ? – Le problème se pose de savoir qui va faire ce rapport. On
est bien entendu tenté de dire : l’équipe projet. Certes, elle est bien au fait
du sujet, elle a « tout en tête », et il serait impensable de ne pas la mettre à
contribution. Mais peut-on être sans inconvénient juge et partie ? Lorsque le
sujet risque d’être polémique, que le bilan a des chances d’être mitigé, la
direction de ce bilan peut être confiée à un expert extérieur. Il semble qu’un
bon compromis consiste à faire travailler l’équipe projet sur ce bilan, mais
sous la direction d’un expert extérieur.

La communication interne et externe de fin de projet. – S’il s’agit là


d’une partie importante tout au long du projet, on doit lui accorder la même
attention au moment de la clôture du projet.

Communication interne à l’organisme. – Elle a pour but d’informer le


personnel de l’organisme, et en particulier les collaborateurs des directions
qui ont été impliquées directement dans le projet, du fait qu’il est achevé, de
son bilan et de ses résultats, des suites possibles, des retours d’expérience
exploitables.
Cette communication peut prendre la forme d’un document à diffusion
assez large au sein de l’organisme, accompagné ou non d’une réunion
d’information ouverte au cours de laquelle l’équipe, chef de projet et
promoteur en tête, présente ce bilan et répond aux questions.

Communication externe à l’organisme. – Cette communication dépend


de la nature du projet. Confidentielle et limitée aux quelques personnes
extérieures à l’organisme qui ont eu à connaître le projet, elle peut prendre
des proportions très importantes pour des projets « publics ». Dans ce cas, il
faudra reprendre la démarche de communication classique :
– choisir les cibles de diffusion ;
– déterminer les messages spécifiques à chaque cible ;
– évaluer les retombées souhaitables et probables, les risques de
retombées négatives ;
– organiser la communication correspondante.

Savoir fêter le succès. – Façon que d’aucuns considéreront comme


anecdotique, une réunion un peu festive avec les membres de l’équipe, le
promoteur, les membres du comité de pilotage nous semble une bonne
façon de marquer la fin du projet et d’amorcer la démarche de valorisation
de l’équipe.

Le rôle du promoteur et du comité de pilotage. – Quel devra être leur


rôle spécifique dans cette phase ?

Retour d’expérience et évaluation. Bilan. – Ce rôle est d’abord de faire


en sorte que ce bilan soit effectué ! En effet, l’équipe projet est souvent
tellement heureuse d’en avoir fini avec la gestion opérationnelle du projet
qu’elle n’éprouve pas un goût immodéré pour les tâches de finition,
d’évaluation et de bilan.
Pour cela, l’action de ces responsables est indispensable. C’est à eux en
effet de :
– recentrer des objectifs, rappeler les objectifs d’origine et les éléments
définis dès l’initialisation et permettant de dire si le projet est ou non
une réussite ;
– participer à l’évaluation des décisions : comment le problème a-t-il
été repéré, analysé, comment les solutions ont été élaborées,
instruites, présentées, comment les devoirs d’alerte et d’information
ont-ils été exercés… ;
– s’assurer que le rapport de bilan est correctement mené. Imposer si
nécessaire un intervenant extérieur au projet pour diriger ces
travaux.

Valorisation de l’équipe. – Nous avons vu que leur rôle était déterminant


sur ce point. Ajoutons que, s’ils remplissent correctement cette fonction, ils
auront beaucoup plus de crédibilité en tant que managers !

Participation à la réunion de clôture. – Il est évident qu’ils doivent


participer à cette réunion, comme ils ont participé à la réunion de
lancement. Nul ne comprendrait qu’ils n’y fussent pas. Ils en profiteront
pour féliciter publiquement ceux qui doivent l’être.

La communication de fin de projet. – De la même façon, ce sera au


promoteur de veiller à la clarté et à la pertinence des messages de fin de
projet au sein de l’organisme. Il participera lui-même activement à la
délivrance de ces messages, envers le comité de direction d’une part, envers
les autres responsables d’autre part.

VII. – Les arbitrages entre projets

Par définition, nous avons vu que cet arbitrage dépasse le cadre du


comité de pilotage d’un projet particulier. Il doit être traité par une instance
ad hoc : le comité d’arbitrage entre projets. Cette instance est souvent, au
moins dans les organismes de petite ou moyenne importance, le comité de
direction lui-même. Mettre en place une structure d’arbitrage entre projets
est utile dès que l’organisme mène en parallèle plus d’une dizaine de
projets.
Plusieurs cas d’arbitrage peuvent se présenter :

Des difficultés d’origines diverses

• C’est du projet lui-même que vient le problème !


Nous avons vu qu’il peut arriver que le projet ait de gros problèmes :
événement extérieur ou dérapage grave. Il faut revoir profondément le sujet.
Généralement, cette révision se traduit par une demande de moyens
supplémentaires.
– Si la période est faste, et si aucun autre problème important ne se
pose simultanément, la question se limite à celle-là : est-il opportun
de continuer, de mettre encore des ressources supplémentaires,
disponibles dans ce cas particulier, sur ce projet.
– Si le promoteur a bien fait son travail, il a préparé un exposé sur les
enjeux du projet et les moyens à mettre en œuvre. Les termes du
bilan sont préparés. Il suffit de choisir. Ce sera ensuite au promoteur
d’annoncer la décision…
– Si la période est moins faste, au jugement intrinsèque sur le projet
s’ajoute un problème de choix : même si le projet en lui-même est
jugé intéressant, il faut dégager les moyens supplémentaires qu’il
demande. Et là, immanquablement, le problème du choix entre
plusieurs projets se pose. On rejoint alors le problème traité au
paragraphe suivant : les projets sont mis en concurrence !
• C’est d’un autre projet que vient le problème !
Voilà un cas courant : un autre projet a des problèmes. Son promoteur a
exposé les enjeux, les risques qu’il pouvait y avoir à ne pas le terminer, les
solutions possibles. On a conclu qu’il était souhaitable de le mener à bien.
Mais l’organisme n’a pas les moyens de tout mener de front. Il faut
ajourner, ou au moins différer ou alléger au moins l’un des deux projets.
Lequel choisir, lequel sacrifier ?

L’arbitrage proprement dit. – Devant une situation semblable, les


promoteurs des deux projets ont défendu leurs positions. Quels sont les
facteurs permettant d’éclairer les choix ? Il faut mettre en balance les
éléments suivants :
– les enjeux stratégiques de deux projets ;
– les moyens mis en œuvre ;
– leur état d’avancement respectif, les efforts déjà engagés, le « reste à
faire » ;
– leurs risques et leurs chances de réussite ;
– les risques qu’il y aurait à arrêter l’un ou l’autre des deux projets ;
– les solutions alternatives (réduction des objectifs de l’un des deux,
ou des deux).
La discussion ultérieure de l’instance d’arbitrage sera alors mieux
instruite et la décision aura de meilleures chances d’être prise dans l’intérêt
de l’organisme. Le promoteur du projet totalement ou partiellement sacrifié
devra présenter la décision à l’équipe projet. Gageons que si la décision a
été prise de façon claire et objective, selon ce que nous venons de suggérer,
non seulement elle aura des chances d’être plus judicieuse, mais elle sera
plus facile à présenter à l’équipe projet, et « fera moins de dégâts » dans la
motivation de ses membres !
Ce genre de décision nécessite bien entendu une communication adaptée,
et rendant compte aussi fidèlement que possible la réalité des choix.
Chapitre IV

Le rôle du projet dans l’évolution du


management
Le management de projet a joué et joue encore un rôle très important
dans l’évolution des pratiques managériales, et nous verrons qu’il est
parfois détourné de ses fins premières pour être utilisé essentiellement
comme facteur de changement dans les organisations. Il est vrai que le
management tel que nous l’avons décrit précédemment représente un
bouleversement des pratiques généralement admises il y a seulement
quelques décennies.

I. – Le projet, porteur de principes forts dans une logique de


contractualisation

La logique du management de projet porte en elle des principes forts, que


nous avons vus au cours des chapitres précédents.

Principe de contractualisation. – Dans toutes les étapes du déroulement


du projet, la contractualisation tient une place éminente, même si son
appellation ou sa formalisation peut varier d’une structure et d’un contexte
à l’autre :
– contractualisation entre le promoteur et le chef de projet, aboutissant
à la lettre de mission. Ce contrat est essentiel à la bonne marche du
projet, et les modifications des termes de ce contrat exigent une
redéfinition de la base contractuelle elle-même ;
– contractualisation entre le chef de projet et ses responsables de
tâches, bâtie sur un modèle relationnel analogue ;
– contractualisation, plus souple, entre l’équipe projet et les directions
d’où sont issus les membres de l’équipe projet, pour dégager les
disponibilités en compétences qu’exige le projet au moment où il en
a besoin.

Qualités associées. – Cette contractualisation suppose des qualités


comportementales indispensables :
« Assertivité ».
Il faut que les intéressés sachent dire oui ou non, sans agressivité
vis-à-vis de leurs interlocuteurs, afin que ces derniers soient
informés de ce qui est réellement faisable et de ce qui ne l’est pas.
Respect des engagements.
Les engagements pris doivent être considérés avec tout le sérieux
dont les intéressés sont capables : c’est la raison pour laquelle on
parle de contractualisation, même si ces engagements sont pris au
sein de la même entité et ne présentent pas les mêmes
caractéristiques juridiques que s’il s’agissait d’un contrat dans la
pleine acception du terme.
Plein usage des droits et des devoirs associés au contrat.
La contractualisation porte en elle-même, nous l’avons vu, des
obligations mais aussi des moyens d’action et un périmètre de
décision. La responsabilisation dans ce cadre signifie que chaque
intervenant dans le projet dispose de marges de manœuvre pour
atteindre ses objectifs en respectant ses contraintes : il doit en user.
Le fait de restreindre son propre champ de décision sous prétexte
que certaines des décisions doivent « remonter » au niveau supérieur
est une attitude perverse qui paralyse le projet.
– Obligation de décider, notamment pour les comités de pilotage.
Cette contractualisation, en précisant les périmètres de décision, rend
obligatoires certaines décisions au niveau du comité de pilotage. On
remarque que parfois ces comités répugnent à trancher et à « prendre leurs
responsabilités ». Le chef de projet est quelquefois amené à « exiger » de
son comité qu’il prenne les décisions qui lui incombent… surtout si ces
dernières ne sont pas agréables à assumer !

Principes d’initiative et d’alerte. – Le management d’un projet va au-


delà du strict respect des règles contractuelles. L’investissement personnel
des personnes associées au projet doit les conduire à anticiper les
opportunités ainsi que les menaces pouvant planer sur le projet, et
s’impliquer dans les propositions d’actions à entreprendre :
Initiatives.
La responsabilité personnelle de chacun des acteurs doit les
conduire à rechercher sans cesse et à proposer des améliorations à
apporter à la conduite du projet. Ainsi, le projet se mouvant dans un
univers partiellement nouveau, ce besoin d’analyse permanente des
situations et de construction de solutions nouvelles doit être
fortement ressenti et pris en charge par chacun. Un projet où la
majorité des acteurs « suivent » le mouvement manque
singulièrement de dynamisme, est incapable de saisir les
opportunités dont il doit se nourrir, en un mot s’appauvrit et
n’aboutit pas aux résultats escomptés.
Devoir d’alerte.
C’est le pendant du principe précédent : une analyse permanente
des situations nouvelles que rencontre le projet non seulement va
générer la prise d’initiative dont nous venons de parler, mais encore,
lorsque la situation analysée ne trouve pas de solution évidente
permettant de respecter le contrat de projet propre au responsable
qui l’a décelée, va le conduire à alerter le responsable de niveau
supérieur.
Ce devoir d’alerte est l’un des éléments fondamentaux du management
de projet. S’il fait défaut, l’ensemble du système de décision au sein du
projet s’effondre. Et si un certain nombre de circonstances d’alertes peuvent
et doivent être imaginées dès le démarrage du projet, il est impossible de les
imaginer toutes : ce sera donc aux divers intervenants de juger quand une
situation doit donner lieu à une alerte, en évaluant ses conséquences
possibles sur la poursuite du projet.

II. – Le projet, porteur d’une vision transversale, prospective,


élément d’intégration des équipes

Un autre aspect du management de projet dont il est important de se


souvenir a trait à la façon d’analyser le futur du projet et les problèmes que
soulève son déroulement.
Une vision transversale. – Le premier des aspects à prendre en compte a
trait à la multiplicité des points de vue nécessaires pour aborder
correctement les questions qui se posent. En effet, ces derniers concernent
généralement plusieurs domaines d’activité qui interfèrent. La seule
démarche qui permette de parvenir à une solution convenable est de
résoudre les problèmes de façon « transversale » : les différents spécialistes
doivent travailler en symbiose, écouter et prendre en compte les points de
vue de chacun, intégrer les différents angles d’analyse pour parvenir à une
solution. Cette façon de fonctionner est encore assez inhabituelle pour
beaucoup, tant notre société est cloisonnée en spécialités disjointes où les
spécialistes s’ignorent les uns les autres. Les techniques de résolution de
problèmes en groupes hétérogènes permettent d’enrichir les débats, et
d’imaginer des solutions originales et pertinentes.

Une vision prospective. – Tout projet concernant l’avenir et amenant


chacun des intervenants à se projeter dans le futur oblige à développer cette
vision prospective, et cela dès le début du projet et durant la totalité de son
déroulement. Nous avons vu que les premiers pas du projet consistaient à
imaginer une démarche qui permette d’atteindre les objectifs en respectant
les contraintes, et cette première démarche est déjà prospective. L’analyse
des risques procède de la prospective de façon éminente. Les analyses
successives que doivent faire les responsables du « reste à faire » des tâches
en cours, mais aussi la réévaluation des tâches à venir à la lumière de ce qui
s’est passé procèdent également d’un effort semblable.

Un élément d’intégration des équipes. – Un autre facteur d’évolution


de méthodes de travail et de pratiques managériales a trait au travail
coopératif que le projet implique.
La multidisciplinarité conduit naturellement les membres des équipes
projets à travailler ensemble et à partager des approches différentes des
mêmes sujets.
De façon plus générale, la participation à un projet amène les membres
de l’équipe projet à communiquer, à échanger des points de vue, à
construire ensemble en respectant les divers points de vue. Le management
de projet induit, lorsqu’il est correctement mené, une solidarité au sein de
l’équipe, dont les membres apprennent à se connaître et à partager plus
qu’au travers de toute autre activité professionnelle.
Ce sont donc des habitudes de pensée et de travail particuliers que la
pratique du management de projet induit auprès des personnes qui y sont
impliquées. Le projet développe indéniablement ce type de compétences.
Chapitre V

Le projet, levier d’évolution ? Le


management « par projet »
L’apport de ces habitudes de travail est tellement positif que plusieurs
organismes en sont arrivés à promouvoir la multiplication des projets non
plus principalement pour atteindre les objectifs opérationnels pour lesquels
ils sont en principe montés, mais essentiellement pour bénéficier des effets
indirects bénéfiques que procure leur management. C’est l’origine
essentielle de ce que l’on appelle le « management par projet ». L’objet
affiché est toujours d’atteindre un résultat opérationnel sous contraintes,
mais c’est le processus lui-même qui en constitue l’objectif majeur.

Les projets dits « de changement ». – C’est notamment le cas de


nombre de projets dits « de changement », pour lesquels il serait
inconcevable de ne pas procéder par projet : le but essentiel du projet n’est
pas le résultat final tangible, même s’il est important d’y parvenir, mais bien
la façon dont on l’a obtenu qui a permis de fédérer les intéressés.
On peut citer de nombreux exemples de cette approche. En voici
quelques-uns :
Mise en place d’une démarche qualité.
Le résultat final d’un système qualité a évidemment sa valeur,
mais la façon de mener le projet compte au moins autant : plus les
salariés y sont associés, meilleure sera l’appropriation qu’ils auront
de la démarche. L’efficacité sera souvent à la clé. De plus, ils
prendront au cours du projet l’habitude de la responsabilisation, de
la transparence, et cette habitude sera précieuse pour vivre la
démarche qualité elle-même.
Participation à l’élaboration des orientations stratégiques.
Beaucoup croient souvent que la définition de la stratégie
concerne uniquement les hautes sphères de la hiérarchie. Certes, il
est des sujets qui demandent une grande confidentialité et qui se
limitent de ce fait aux comités de direction, mais la plupart des
éléments du plan stratégique peuvent être largement partagés au sein
de l’organisme. Partager une démarche stratégique permet de
mobiliser l’énergie des salariés et d’accroître fortement leur
motivation. Elle permet aussi que, la vision de l’avenir étant
largement partagée entre eux et la direction, les décisions
opérationnelles qui en résultent soient intégrées dans un tout
cohérent, correctement interprétées et donc exécutées avec
beaucoup plus de pertinence.
Mise en place d’une démarche d’évaluation, élaboration d’un
référentiel de compétences.
La façon de mener ce genre de démarche est déterminante pour
aboutir à un résultat utilisable. Ne pas associer les salariés dans une
démarche projet et l’échec est à peu près garanti : les résistances au
changement, la peur qu’une évaluation mal comprise aboutisse à des
jugements de valeur est évidemment à la base du rejet de systèmes
construits sans la participation des intéressés. Même du strict point
de vue technique, les systèmes imaginés « en chambre » manquent
toujours du réalisme des situations vécues qu’apportent les
professionnels eux-mêmes dans une démarche de participation14
.
L’apport du travail coopératif et participatif dans ces projets est
considérable. Il convient cependant de le mener avec méthode et
discernement. La crainte de beaucoup de dirigeants est de « perdre
la main » et de laisser le pouvoir de décision aux salariés sans que
ces derniers puissent en comprendre les tenants et aboutissants.
Cette crainte est fondée lorsque les objectifs et les limites du projet
n’ont pas été clairement définis dès le départ. Mais si cela est fait
correctement, les intéressés sont parfaitement capables de
comprendre que la décision finale ne leur appartient pas, que leurs
propositions peuvent être amendées et que les décisions doivent être
prises par les instances décisionnelles ordinaires.
La recherche du projet vecteur du changement.
En poussant la logique à son terme, il est des cas où le principal
but du projet réside dans ses effets indirects.
La pratique des fusions et acquisitions de sociétés est aujourd’hui très
courante. Si les aspects financiers de ces rapprochements sont bien
maîtrisés, si les synergies industrielles et commerciales, les compatibilités
des périmètres couverts sont le plus souvent prises en compte et jouent
même souvent un rôle majeur, force est de constater que les fusions des
équipes, qui sont généralement la clé d’une réussite à long terme de ces
rapprochements, sont beaucoup plus rarement traitées et beaucoup moins
bien maîtrisées.
Chacun peut en voir les conséquences : les salariés issus des différentes
structures fusionnées s’ignorent, voire se détestent. On assiste souvent à des
compétitions internes telles qu’une branche préfère voir la concurrence
externe prendre le pas sur une branche rivale de la même société ! De
nombreuses années après des fusions, il n’est pas rare de voir des salariés se
reconnaître entre eux d’après leur appartenance initiale à telle ou telle
structure disparue depuis longtemps. Bien sûr, les rapprochements
s’accompagnent presque toujours de réductions de personnels, ou au moins
de concurrence de deux responsables sur le même poste, et cela marque les
relations humaines des premières années de ces fusions. Mais ces
problèmes humains, pour importants qu’ils soient, n’expliquent pas tout,
surtout sur le long terme. La plupart des salariés qui continuent à travailler
dans ces structures, qui ont souvent des compétences voisines et
comparables, devraient pouvoir unir leurs efforts au lieu d’entrer en
compétition.
Le problème de la recherche de synergie des équipes et d’instauration de
pratiques de collaboration peut trouver sa solution par un travail en
commun : ainsi, les membres des différentes équipes peuvent se rencontrer,
échanger, travailler ensemble et les barrières sociologiques que nous avons
évoquées peuvent de ce fait tomber. Quel meilleur moyen de créer ce travail
en commun que de les faire participer aux mêmes projets ?
C’est ainsi que l’on est arrivé à imaginer la mise en place de projets ayant
pour objectif principal de permettre ce travail en commun. Bien entendu, il
faut trouver un projet pertinent. Mais le seul fait de permettre le travail en
mode projet sera dans ce cas l’un des principaux objectifs poursuivis.
Chapitre VI

Intérêt et limites culturelles du


management de projet
Nous avons vu les différents aspects du management de projet et ses
prolongements dans le management et la culture des organisations, ainsi
que le profit que l’on pouvait en tirer. Interrogeons-nous pour terminer sur
le développement actuel de ces pratiques, son intérêt mais aussi ses limites.

I. – La justification du management de projet dans son


universalité

Le management de projet semble être aujourd’hui universellement admis.


Ses apports sont en effet manifestes. Sans parler des apports managériaux et
culturels que nous venons d’évoquer, l’intérêt évident est de disposer :
– d’une décomposition des politiques et des actions en unités
identifiables auxquelles sont attachés des objectifs, des résultats, des
contraintes. C’est une tendance lourde actuelle que de raisonner en
ces termes ;
– d’un mode de fonctionnement qui mette en responsabilité les acteurs
vers ces objectifs explicites ;
– d’une réévaluation constante des objectifs et des moyens qui
permette le pilotage effectif des actions entreprises.
Ce qui est vrai pour un organisme, quelle que soit sa taille, vaut
également pour des états et des organes supranationaux. Actuellement, la
grande majorité des actions multinationales utilisent ce mode de
fonctionnement. Il apporte en effet les éléments indispensables à la mise en
place et au suivi des actions politiques et économiques. Aussi le
fonctionnement par projets est une règle aujourd’hui universellement
admise.
Nous n’entrerons pas dans le détail des méthodes particulières en usage
ici ou là. Elles diffèrent par leurs modalités et leurs formalismes, même si
ces derniers sont parfois exagérément pointilleux et contraignants, mais
leurs principes restent fondamentalement les mêmes. Nous dirons volontiers
que l’important est de s’accorder sur une méthode commune et de s’y tenir
plus que de rechercher « la » méthode idéale, qui bien entendu n’existe pas.
Cependant, on constate que dans de très nombreux cas les financements
prévus pour tel ou tel programme international ne sont pas dépensés faute
de projets jugés pertinents pour en bénéficier.
Nous constatons également que souvent les porteurs de projets renoncent
à bénéficier de financements auxquels ils pourraient prétendre devant la
lourdeur et la difficulté de mise en place des dossiers correspondants.
Ce phénomène ne se limite pas aux pays en voie de développement,
comme certains pourraient le croire, mais aussi, quoique dans une moindre
mesure, dans les économies développées.
D’un côté, l’intérêt évident et incontestable du management de projet
pour mener toute action efficace va jusqu’à imaginer des projets dans le
seul but de bénéficier des avantages indirects que procure ce type de
management, tandis que, de l’autre côté, des résistances freinent ou
empêchent des projets d’être menés à bien et même de voir le jour.
Il y a en effet des résistances fortes au management de projet que nous
allons tenter d’examiner.

II. – Ce que suppose le management par projet dans la culture


occidentale

Un certain nombre de résistances à la « culture projet » existent dans nos


sociétés. Elles ont trait à l’insuffisance de certains outils, à des résistances
psychosociologiques, à des lacunes dans les compétences relatives à la
gestion de projets, enfin à l’absence de structures favorisant le management
de projet.

Insuffisance de certains outils. – Nous passerons sur l’absence dans


certains organismes de logiciels de gestion de projets : il existe de
nombreux logiciels de ce type à des prix très abordables, y compris dans les
logiciels de bureautique, et il s’agit là d’un faux problème.
Plus sérieuse est l’absence de comptabilité analytique, ou de tout autre
moyen permettant de calculer le coût journalier d’un salarié d’une part,
d’affecter les coûts enregistrés en comptabilité à telle ou telle tâche du
projet d’autre part. Cette lacune est plus fréquente qu’on ne croit, et
particulièrement au sein du secteur public qui n’avait pas, jusqu’à un passé
récent, ce type de préoccupation ni de culture. La mise en place de logiques
de missions, programmes, résultats fondés sur l’efficacité amène les acteurs
de ce secteur en particulier à mettre en place des techniques de ce genre, qui
sont nettement plus développées et depuis beaucoup plus longtemps,
quoique encore de façon souvent insuffisante, au sein des entreprises.

Résistances psychosociologiques. – Nous avons vu qu’un suivi de projet


n’atteint pas sa pleine efficacité sans un relevé des temps passés par les
différents acteurs sur les tâches du projet. Cela passe par l’existence de ces
relevés sur ses différentes activités, et par leur consolidation au niveau de
chaque projet. Cette pratique est banale dans les entreprises qui vendent le
temps de leur personnel telles que les sociétés de conseil, les sociétés de
service informatique, et d’une façon générale les entreprises dont le mode
de fonctionnement normal est le projet. Beaucoup plus rares ailleurs, ces
pratiques sont souvent considérées, quand on veut les introduire, comme
une « atteinte inadmissible à la vie personnelle ». Beaucoup de salariés y
voient une ingérence intolérable de la direction générale dans leur activité
professionnelle, une absence de confiance, une surveillance quasi policière
de leurs faits et gestes… Or, il s’agit normalement d’un simple suivi
d’activité dont on ne voit pas bien comment on pourrait se passer dans le
cadre d’un projet parfaitement suivi.
La responsabilité individuelle, la maîtrise par chacun de ses actes
professionnels et de leurs conséquences, est considérée par beaucoup
comme valorisante et fortement recherchée. Mais elle ne l’est pas par tous,
et le fait d’assumer les conséquences de ses propres décisions est
difficilement vécu par certains. Cette difficulté se manifeste au moins dans
quatre cas :
– difficulté des comités de pilotage à prendre des décisions
impopulaires, telles que la réduction de la portée d’un projet ou sa
suppression, ou encore l’affirmation nette de contraintes à
respecter ;
– difficulté qu’éprouve une bonne part des chefs de projets ou des
responsables de tâches à faire état de problèmes qu’ils rencontrent et
qu’ils ne peuvent pas résoudre avec les moyens qui leur sont
délégués ;
– difficulté des responsables de tâches à établir honnêtement le « reste
à faire » relatif aux tâches en cours dont ils ont la responsabilité ;
– appréhension des chefs de projets devant la perspective d’une
réunion de leur comité de pilotage, et soulagement de ces derniers
lorsque la réunion s’est déroulée « sans faire de vagues », entendons
par là sans critiques mais souvent sans décision !
La responsabilité individuelle, qui passe pour être une valeur classique de
la culture occidentale, a encore dans de nombreux cas des progrès à faire
pour être inscrite dans les comportements quotidiens.

Lacunes de compétences. – L’utilisation dans le langage professionnel


de termes liés au management de projet ne doit pas faire illusion : il masque
souvent une inculture notoire sur le sujet. Que ne voit-on nommer « chefs
de projets » ou « chargés de projets » des personnes qui n’ont strictement
aucune idée de la façon dont peut se dérouler un projet :
les chefs de projets et les responsables au sein des équipes projets :
les déficiences dans la maîtrise méthodologique de la conduite de
projets et de ce qu’elle implique sont évidemment très préjudiciables
à leur bonne marche ;
plus souvent encore, les comités de pilotage sont insuffisamment
préparés à leur rôle : n’ayant qu’une idée approximative des
fonctions qu’ils doivent exercer, ils négligent leurs responsabilités
de contrôle en n’assurant pas le minimum de suivi du déroulement
du projet, en ne prenant pas les décisions indispensables à la bonne
marche du projet, en négligeant leur rôle d’influence ou de
communication. Ils prennent a contrario des décisions relevant
normalement de l’équipe projet, laissant cette dernière désemparée
et ne sachant plus où commence et où s’arrête son pouvoir réel.
Si la formation des chefs de projets est souvent prévue, la formation des
comités de pilotage n’est à peu près jamais envisagée : on suppose que le
niveau de responsabilité de leurs membres supplée leur absence de
compétences, ce qui est éminemment discutable.

Absence de structures favorisant le management de projet. – Il est


enfin trop rare que les organismes entreprenant de mener des projets se
dotent de structures ad hoc. Ces structures passent par :
– la formalisation d’instances d’arbitrages entre projets ;
– l’existence et l’utilisation effective d’un arsenal méthodologique
minimum : lettres de missions types, plans des études d’opportunité,
formalisation d’un tableau de bord de suivi de projet uniforme
permettant de suivre de façon cohérente plusieurs projets en
parallèle, formules d’alerte, guides d’analyse des risques, plans de
réunions de retours d’expériences, etc. ;
– l’adoption d’une méthodologie de management de projet qui permet
aux équipes projets de s’appuyer sur une culture et des pratiques
communes.
Ces quelques éléments montrent s’il en était besoin que le management
de projet est loin d’être couramment admis, pratiqué, passé dans les mœurs
au sein de nos sociétés. Le chemin est encore long pour que cette pratique
de management soit parfaitement intégrée dans notre paysage professionnel.

III. – Projets et cultures locales : des barrières culturelles au


développement ?

À l’ensemble des difficultés précédemment décrites s’ajoutent, pour des


sociétés non occidentales, d’autres difficultés culturelles, distinctes selon
chacune de ces cultures locales. D’autres aspects culturels de ces sociétés
sont au contraire favorables, quoique moins nombreux, ne serait-ce que du
fait que les méthodes de management de projet ont été inventées par les
sociétés occidentales.
Nous allons tenter de faire percevoir la réalité de certaines de ces
barrières et de ces éléments favorables, sans bien entendu prétendre à
l’exhaustivité.

Aspects culturels favorables


Travail en équipe. – L’un des apports majeurs du management de projet
est le fait de favoriser le travail en équipe. Il est certain que beaucoup de
cultures extraeuropéennes favorisent ce type de travail nettement plus que
la nôtre : cet aspect des choses ne les gêne donc pas. L’écoute de l’autre est
souvent plus développée, et nos sociétés ont beaucoup à apprendre d’autres
civilisations sur ce plan. Il faut parfois ne pas aller très loin pour cela : nos
voisins anglo-saxons ou germaniques peuvent nous en remontrer sur ce
sujet, sans aller nécessairement chercher les leçons au Japon.

Solidarité. – Il en est de même du sentiment de solidarité sociale qui est


plus développé dans certaines cultures autres que la nôtre : la solidarité
familiale, la solidarité du village ou du clan sont souvent davantage
présentes hors de la civilisation occidentale qui a mis l’accent sur des
valeurs plus individuelles, voire individualistes. Certaines pratiques mises
en évidence dans les projets, telles que la résolution de problèmes en
groupes ou encore la mise en œuvre de solutions collectives, sont à ce
niveau facilitées par la culture plus communautaire d’autres civilisations.

Les difficultés supplémentaires. – Il est en revanche de nombreuses


barrières culturelles qui gênent la mise en place de pratiques de
management de projet.

« Perdre la face », une situation insupportable ! . – Une valeur répandue,


principalement en Extrême-Orient, consiste à considérer comme
absolument inacceptable soit de perdre la face, soit de la faire perdre à son
interlocuteur.
Cette valeur vient gêner considérablement un certain nombre de pratiques
mises en avant par le management de projet : l’« assertivité » qui amène à
dire non lorsque la proposition faite, même et surtout par un supérieur, ne
semble pas réaliste ; le « droit à l’erreur » inhérent à la notion même de
projet, qui peut conduire au sentiment d’avoir perdu la face vis-à-vis de ses
supérieurs.

La « valeur travail ». – Nul ne saurait remettre aujourd’hui15 en cause


dans nos sociétés la valeur prééminente du travail : l’engagement
professionnel passe avant la plupart des obligations sociales. Rappelons à
titre d’exemple que les cas de congés exceptionnels du fait de circonstances
de la vie se limitent à des décès de proches et la naissance de ses propres
enfants, et cela de façon encadrée et normalisée.
Il est d’autres sociétés qui n’accordent pas la même valeur aux
obligations liées au travail. Citons un service de plusieurs dizaines de
personnes qui s’était arrêté de travailler, était injoignable, pour partir faire
une « coutume de deuil » parce qu’un parent d’un des employés s’était tué
sur la route. Quand on a posé à leurs collègues d’un service voisin la
question de savoir quel jour on pourrait compter sur eux au bureau, ils ont
répondu « Quand le chef de la tribu en décidera ». La valeur d’une
« coutume de deuil » passait évidemment pour eux très au-dessus de toute
autre considération.
Il n’est pas question ici de juger le moins du monde la qualité comparée
de ces systèmes de valeurs, mais de bien comprendre que leurs différences
remettent en cause ce qui peut nous apparaître comme des évidences, et qui
ne l’est pas. Il est certain que cela ne facilite pas une pratique supposée
universelle du management de projet et des engagements forts qu’elle
implique !
Dans un autre ordre d’idée, il nous semble naturel de travailler – ou du
moins d’essayer de travailler – continûment tout au long de sa vie
professionnelle. Cette valeur est loin d’être partagée par de nombreuses
cultures : le travail est souvent considéré comme une situation temporaire
destinée à gagner l’argent nécessaire à la satisfaction d’un besoin précis. Ce
besoin étant satisfait, le maintien au travail devient inutile, voire aberrant.
Dans ces conditions, le projet considéré comme un moyen d’accroître ses
compétences afin de poursuivre sa vie professionnelle de façon plus
autonome, plus responsable, plus intéressante perd toute raison d’être.

Le rapport au temps. – Nous avons créé une relation au temps qui vise à
le maîtriser – si tant est que cela ait un sens –, en tout cas à le prévoir, le
planifier, suivre ce que l’on fait et que le temps enserre. C’est un élément
majeur du management de projet, et l’une de ses contraintes fortes et
permanentes.
Que cette relation au temps soit plus lâche, et la façon de mener un projet
est profondément modifiée. Il nous est souvent arrivé d’être très contrarié,
en arrivant dans certains pays, de constater que les engagements pris et
planifiés n’étaient pas tenus et que cela semblait ne déranger personne. Le
conflit entre un calendrier personnel surchargé et ce qui apparaissait comme
une désinvolture choquante était en réalité purement culturel… mais bien
gênant pour mener un projet comme nous avons pu le décrire !

L’influence de la position sociale de certains responsables. – Cet aspect


des choses se retrouve dans un peu toutes les sociétés. Cependant, il est plus
ou moins prégnant. Dans un management de projet classique, chacun va
s’efforcer de tenir compte des impératifs du projet, de ses contraintes, des
éléments objectifs qu’il porte en lui plutôt que de tenir compte exagérément
de qui décide, propose, juge. Il existe des sociétés où ces clés sont
essentielles, et où il ne viendrait à l’idée de personne de les transgresser. Il
est clair que cet élément culturel fort est de nature à fausser le bon
déroulement de tout projet.

Le rapport à l’autorité et le dilemme entre la vie économique et la vie


tribale. – Dans le même ordre d’idée, un dilemme fort existe parfois entre le
rôle d’un individu au sein de l’organisme qui porte un projet et sa position
au sein de la structure tribale à laquelle il appartient. Il arrive fréquemment,
lorsque cette double hiérarchie existe, qu’un cadre responsable dans une
entreprise se retrouve au sein de sa tribu avec un statut social très inférieur à
l’un de ses subordonnés. Il est clair que les relations de travail entre ces
deux personnes – et cet exemple dépasse le seul management de projet,
mais l’inclut à l’évidence – sont parfaitement faussées et ne permettent pas
de pratiquer un management de projet digne de ce nom.

La perception d’une contrainte « occidentale » au travers des exigences


de management de projet. – Cette perception, que l’on rencontre parfois,
trouve en réalité son origine dans les points cités précédemment. Elle
consiste pour certains responsables à estimer que le management de projet
imposé par les instances internationales, dont nous avons décrit tout
l’intérêt, impose en réalité des normes, des méthodes, mais au-delà de cela
des valeurs et une façon de se représenter l’univers qui ne correspond pas à
leur culture. De là à imaginer qu’il existe quelque complot occidental pour
imposer ses valeurs, il n’y a qu’un pas que certains franchissent
allégrement…
Le fait est que les méthodes de management de projet sont largement
sous-tendues par notre propre conception de la vie en société et de la vie
économique. Ces conceptions se heurtent déjà dans nombre d’organismes
occidentaux à des problèmes culturels. Ils en rencontrent plus encore dans
des cultures non occidentales. C’est peut-être ce type de questions que nous
devrons nous poser avec honnêteté et réalisme si nous voulons tirer toute la
bénéfique quintessence du management de projet dans la perception
universelle que nous pourrions en avoir…
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transformation de l’entreprise, InterÉditions, 1996.
Moisdon J.-C. et Weil B., « L’invention d’une voiture : un exercice de
relations sociales ? », revue Gérer et comprendre, septembre 1992, p.
32-40.
Muller J.-L. et Joly M., De la gestion de projet au management par projet.
Maîtriser les risques d’une organisation transversale, AFNOR, 2002.
Néré J.-J., Comment manager un projet, Demos, 2000.
Petitdemange P., Le Management par projet, Formation Entreprise, 1997.
Sarre C.-A., Le Dossier vérité du Concorde (1959-2000), Les Éditions
Aéronautiques, 2002.
Vallet G., Techniques de planification de projets, Dunod, 2001.
Notes
1
C’est-à-dire susceptibles de se retrouver sur le chemin critique en cas
d’allongement peu important de leur durée, en se substituant alors à une
autre tâche effectuée en parallèle.
2
F-D marque une relation liant deux tâches fin de la première avant le début
de la seconde ; la seconde ne peut démarrer avant que la première ne soit
achevée. D-F : la seconde tâche doit être terminée avant que la première ne
commence. Il y a deux autres liaisons possibles : D-D (démarrages
simultanés) et F-F (fins simultanées).
3
Rappelons qu’il s’agit de son objet, de l’événement qui la déclenche et de
l’événement qui en précise la fin, l’estimation de sa durée, les tâches qui lui
sont directement rattachées avec la chronologie correspondante.
4
Toute homonymie avec des entreprises existantes serait purement fortuite.
5
Encore appelé du terme anglo-saxon de Sponsor.
6
Il est souvent membre, pour des projets de quelque importance, du Comité
de direction, Comité exécutif ou de l’instance équivalente dans l’organisme
qui mène le projet.
7
Lorsqu’un comité d’arbitrage a été mis en place (voir infra le rôle de ce
comité). Sinon, c’est le comité de direction qui en tient lieu.
8
Cf. chapitre III.
9
Cf. A. Asquin, C. Falcoz et T. Pick, Ce que manager par projet veut dire,
Éditions d’Organisation, 2005, p. 29.
10
Issu du terme anglo-saxon assertiveness, ce néologisme est aujourd’hui
admis en matière de relations humaines dans l’entreprise. Nous
l’employons ici faute d’équivalent français, et nous prions le lecteur de bien
vouloir nous en excuser. Son explication est contenue dans le contexte de
l’alinéa qui le suit.
11
En termes de positionnement sur le chemin critique ou avec peu de marge
par rapport à ce dernier, en termes d’importance budgétaire, en termes
d’importance au niveau de la qualité, de la sécurité, des risques encourus.
12
Des exemples de ces tableaux peuvent être consultés dans l’ouvrage du
même auteur : Comment manager un projet, Demos, 2000.
13
Élément produit par l’équipe projet et défini contractuellement. Les
livrables constituent les résultats intermédiaires présentés à la maîtrise
d’ouvrage.
14
Cf. J.-J. Néré, Démarche compétences et pratiques managériales, Demos,
2005.
15
Peut-on simplement rappeler que ce n’était pas du tout le cas il y a un siècle
et demi, bien au contraire : l’état de rentier, d’oisif était alors considéré non
seulement comme plus enviable, mais plus noble que le fait d’être obligé de
gagner sa vie en travaillant.
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