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RESUME
Les risques hydrauliques recouvrent toutes les manifestations dues aux dégradations provoquées par les
eaux fluviales. Les inondations représentent 70 % des risques majeurs. Elles font l'objet de nombreuses
études méthodologiques de prévision ; les grands bassins sont équipés en dispositifs d'annonce de
crues et, depuis la loi du 13 juillet 1982, l'Etat a obligation d'élaborer des plans d'exposition aux
risques (PER) prévisibles.
Les phénomènes de transport solide du sédiment, les érosions qui en sont le corollaire, les affouille-
ments sont des phénomènes naturels qui provoquent la disparition des terres non protégées et
conduisent parfois à la ruine des ouvrages. Ces phénomènes, dont l'action était mal connue, se sont
manifestés plus particulièrement ces dernières années du fait d'interventions humaines sur les cours
d'eau et plus particulièrement du fait des extractions de granulats.
L'article donne des exemples de désordres occasionnés aux berges et aux ouvrages à la suite d'une
évolution du lit d'une rivière soumise à une extraction intensive de granulats.
MOTS CLÉS : 36 • Inondation - Érosion • Affouillement • Eau - Cours d'eau • Risque • Prévision •
Extraction - Granulat.
158
Bull, liaison Labo P. et Ch. - 150/151 - j u M . - a o û t / sept.-oct. 1987 - Réf. 3228
Si ce type de sinistre est heureusement relativement Il revêt une place importante parmi les risques
rare, par contre l'inondation d'une commune, majeurs. Ce risque est connu depuis des millénaires
phénomène très courant, porte atteinte aux biens et i l fut et continue d'être l'objet du combat incessant
privés ainsi qu'aux biens de la collectivité. L ' i m - de l'homme pour s'en protéger. Les premières
portance des événements, leur étendue, ont un tentatives dateraient des cinquième et quatrième
caractère catastrophique nécessitant alors la mise en millénaires en Mésopotamie et du troisième millénaire
place de fonds de secours aux sinistrés. en Egypte sous le R o i Menés. Les protections
consistent en l'élévation de digues le long des fleuves
L a loi du 13 juillet 1982, relative aux indemnisations et des rivières, et en la création de réservoirs et
des victimes des catastrophes naturelles, permet barrages régulateurs de débit permettant d'étaler les
d'apporter des secours financiers aux sinistrés. Elle crues.
prévoit, en contrepartie, l'obligation pour l'État
d'élaborer des plans d'exposition aux risques (PER) Si le risque d'inondations est un événement bien
prévisibles. Le décret du 3 mai 1984, pris pour son connu, d'autres risques dus à l'action de l'eau, sans
application, fixe les conditions d'élaboration de ces présenter des aspects immédiats aussi catastrophiques,
plans. n'en nécessitent pas moins la mise en œuvre de
réparations ou de protections dont le coût est très
D'après un recensement effectué en 1982, plus de élevé et parfois difficilement supportable par la
10 000 communes, soit environ un tiers des communes collectivité.
de métropole, sont sujettes à des risques majeurs.
Nous évoquons ci-après certains aspects des risques
Sur l'ensemble de ces communes, les quatre risques
hydrauliques, en limitant notre propos aux érosions
majeurs pris en compte sont les séismes, les
du lit et aux affouillements, avec les conséquences
inondations, les avalanches et les mouvements de
sur la stabilité des berges et des fondations des
terrain, et ils se répartissent comme indiqué sur la
ponts ; le risque d'inondations n'est donné que dans
figure 1.
un bref rappel.
Pourcentage de
1
communes concernées
L E RISQUE D'INONDATIONS
159
— pluviométrie dont les éléments sont fournis par O n observe alors un premier front de crue
la Météorologie nationale ou par les systèmes généralement brutal et dû à l'assainissement. Le
d'annonce de crue des grands bassins ; second front de crue correspond ensuite aux
eaux de l'amont et aux ruissellements sur les
— hydrologie : à partir des séries de débit, basées terres, le décalage entre ces deux derniers fronts
sur des relations pluie-débit, détermination des peut être de plusieurs heures, et généralement de
crues de projet ; plusieurs jours. Le rôle des bassins réservoirs est
d'éviter le premier front de crue en atténuant la
— calcul des lignes d'eau à l'aide de programmes vitesse de montée des eaux et d'en écrêter sa
de calcul plus ou moins complexes, en régime hauteur.
permanent graduellement varié unidimensionnel
ou maillé, ou en régime transitoire. Le calage O n observe un phénomène sensiblement analogue
des modèles est effectué sur les crues historiques au niveau du bassin versant dès lors que des
ou les courbes de tarage en diverses sections. remembrements ont été conduits avec des tracés
O n dispose alors d'une vue longitudinale des rectilignes des fossés, un recalibrage avec modification
cours d'eau avec les niveaux d'eau correspondant de la largeur des rus et une évacuation directe et
aux différentes crues de projet. immédiate des eaux de ruissellement vers le cours
d'eau. Les eaux météoriques sont alors évacuées
Disposant des hauteurs d'eau dans toutes les sections, dans un délai relativement court, et elles viennent
la phase protection vis-à-vis des risques encourus grossir les différents affluents, toutes en même temps
peut alors être entreprise en étudiant différentes et dans un laps de temps assez bref. Cette rapidité
d'évacuation des eaux, si elle assure un drainage
dispositions comme :
des terres agricoles, provoque par contre une montée
brutale des eaux. Les crues seraient alors plus
— les endiguements et les protections des berges : nombreuses, plus fortes et plus brèves qu'antérieu-
l'édification des levés et des digues sont des rement.
techniques anciennes qui ont prouvé leur efficacité.
Néanmoins, les activités humaines se concentrant
D u fait des aménagements supprimant les haies,
dans les vallées fluviales, les endiguements étant
transformant les ruisseaux tortueux en rigoles rec-
quasiment continus sur la longueur des cours
tilignes de drainage, i l y aurait modification des
d'eau, i l n'est pas rare d'observer pour de petits
débits de crue de type décennal une élévation paramètres traduisant les capacités d'emmagasine-
du plan d'eau qui correspondait antérieurement ment des sols du bassin versant. Les arrivées d'eau
à une crue de type centennal, voire millénal. à la rivière, qui étaient étalées dans le temps, seraient
Ainsi telle zone d'extension d'habitat de type maintenant plus brutales et plus brèves.
pavillonnaire ou de résidences collectives, ou telle
Effectivement, i l est constaté des modifications
zone industrielle, édifiées sur des remblais les
d'hydrogrammes de crues à l'exutoire de parcelles
mettant hors d'atteinte des crues connues de
drainées ou en terroir rural. Mais i l convient de
type centennal, se sont trouvées inondées sous
rester prudent quant aux conclusions de changement
plusieurs décimètres d'eau par une crue subite
de comportement de la rivière ; l'intégration des
de durée de retour inférieure à dix ans ;
résultats locaux à l'échelle du bassin étendu nécessite
de nombreuses mises au point méthodologiques
— la régularisation du cours de la rivière par des [Jacquet, 1984].
barrages écrêteurs ou des seuils avec bassins
réservoirs permettant de stocker une partie des Les chercheurs travaillent également sur les effets
eaux ; cette technique d'origine très ancienne parfois antagonistes des pratiques agricoles —
(Egypte, troisième millénaire) est généralement drainage et assainissement — dont i l est malaisé de
la solution bien adaptée au contexte actuel où prévoir la résultante sur les crues.
il est nécessaire de prendre en compte les activités
économiques implantées dans la vallée. Si elle Il apparaît par contre à l'examen des séries, que le
permet également d'assurer le soutien des étiages nombre et la distribution des crues fluviales n'ont
en période de déficit pluviométrique et de pas varié sur les derniers siècles étudiés.
contribuer à l'irrigation des terres agricoles, elle
nécessite de trouver des terrains aptes et relati- Quant aux crues en zones urbanisées, elles font
vement libres de constructions et d'activités l'objet de recherches, notamment au sein du
économiques pour permettre l'édification des C E R G R E N E * et du Laboratoire d'Hydrologie
ouvrages et le stockage du volume d'eau du mathématique de Montpellier.
réservoir ;
De nombreuses équipes de chercheurs étudient ces
— dans le même ordre d'idée, on construit à l'heure phénomènes, aussi laisserons-nous sans réponse
actuelle des bassins réservoirs de stockage des précise la question suivante :
eaux météoriques. Effectivement, du fait des Y-a-t-il augmentation du nombre et de l'importance
aménagements des villes, de leur extension, de des crues dues aux changements de régime des eaux
l'imperméabilisation sur des aires importantes, par l'action de l'homme ?
toutes les eaux fluviales sont directement recueillies
dans leur quasi-intégralité et collectées, puis
* C E R G R E N E : Centre de Recherche sur la Gestion des
évacuées directement dans un bref délai à la Ressources Naturelles et de l'Environnement, dépendant de
rivière la plus proche. l'ENPC.
160
Annonce des crues Il varie avec la hauteur d'eau, la pente d'énergie
de la rivière, la masse spécifique des grains et leurs
U n des éléments essentiels pour limiter les catas- diamètres moyens. Les modes de transport du
trophes dues aux inondations est bien entendu sédiment ont été étudiés au Laboratoire national
l'annonce des crues. d'Hydraulique ( L N H ) de Chatou [Ramette].
L a mission « annonce des crues » a évolué ces Le lit des rivières est constitué de limons, de sables,
dernières années. Les services concernés ont été de graviers ; i l est mobile. Dès que l'intensité de
réorganisés administrativement, et surtout ont été l'écoulement liquide dépasse un certain seuil, les
modernisés ou sont en cours de modernisation de sédiments sont entraînés sur une certaine épaisseur.
leurs méthodes de prévision. L a masse des matériaux en mouvement s'organise
de façon différente selon les caractéristiques de
A l'origine de cette évolution, l'action locale de l'écoulement.
certains services d'annonce des crues (SAC), tel celui
de Toulouse notamment ; elle est maintenant relayée Schématiquement, la mise en mouvement s'effectue
au niveau central et des crédits importants y sont selon les modes suivants (fig. 2) :
affectés. — transport sur fond plat, les sédiments se déplacent
en tapis sur une certaine épaisseur ;
L a méthode repose sur un certain nombre d'opé-
rations résumées ci-dessous [Leoussoff, 1984] : — transport en dunes, avec déplacement par trans-
lation d'une série d'ondes à front raide ;
— acquisition automatique des données météorolo-
— transport en rides, qui se forme pour un sédiment
giques et des mesures de hauteur d'eau ;
fin dont les grains ont un diamètre inférieur à
— télétransmission des informations jusqu'à un poste 0,6 mm ;
central ;
— transport en suspension, où le sédiment est véhiculé
— traitement des informations et calcul des lignes dans la masse même du fluide et en partie par
d'eau en régime transitoire ; saltation ;
— enregistrement et diffusion de messages d'alerte — les anti-dunes apparaissent pour des écoulements
aux autorités régionales et locales. torrentiels. Elles doivent leur nom à une progression
apparente de l'onde sableuse en sens inverse du
Le processus est encore loin de l'automatisation
courant.
complète. Le prévisionniste garde un rôle prépon-
dérant dans la validation des données, la répartition En régime fluvial, qui est celui intéressant la majorité
temporelle de l'apport des sous-bassins, l'appréciation des ouvrages, les sédiments se déplacent selon les
du temps de transfert des crues. modes donnés sur la figure 2. Pour les rivières
naturelles (non canalisées), ce déplacement intéresse
Bien entendu, toutes les données sont archivées et tous les sédiments situés au-dessus de la cote y,
les traitements des informations stockés pour per-
mesurée sous le niveau de la surface libre.
mettre de tester les modèles de prévision.
V
|y_. Î.
L'ÉROSION E T L E T R A N S P O R T SOLIDE —^ y
161
Les affouillements Nicollet [1982] et Ramette [1979] conseillent d'adopter
une profondeur maximale de l'affouillement égale à
En section courante d'une rivière naturelle, les deux fois la largeur du maître couple de l'appui.
sédiments se déplacent sur une certaine épaisseur y Pour les ouvrages modernes aux appuis élancés,
(fig. 2) lorsque certaines conditions d'écoulement sont l'affouillement local atteint des profondeurs de 2 à
remplies. 4 m environ.
qu'elle était avant la construction du pont. en 1978. A ces chiffres, i l convient d'ajouter les
prélèvements occasionnels, mais importants, pour la
D u fait de la concentration du courant entre les réalisation de zones industrielles, de remblais routiers
culées, i l y a abaissement de la cote des fonds non 6 3
(1.10 m ) ou encore du quartier de l'Ile Beaulieu à
perturbés ; le lit ayant alors une largeur réduite Nantes (5.10 m ). 6 3
162
granulats en rappelant au préalable les autres facteurs Hauteur à l'échelle de 'Montjean (m)
qui peuvent intervenir.
Q = SOOmVs
Autres facteurs concourant aux modifications du
régime hydraulique ^ 0 = 300mVs
1903 /
Le surcreusement est généralement difficile à quan-
/
tifier, car peu de mesures de profils en long et en 2 /
j9_38_ t.
travers sont faites. Les bathymétries, peu nombreuses, 1
^/
La Rabotìère 1
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St-Félix 1
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n t e r m é d i a i r e ' "~endi g u é e
d'Ancenis et 4 à 5 m au droit de Nantes.
!
1
163
Le marnage a une action sur les berges équivalente moyen du sédiment, i l peut y avoir perte des
à une crue avec décrue rapide. propriétés mécaniques des sols du fond du lit par
affouillement général. Le phénomène est analogue à
• Augmentation de la vitesse du courant une augmentation de la hauteur du talus, au même
L'abaissement des lignes d'eau s'accompagne d'un titre que l'action des dragages, avec diminution ou
approfondissement du lit et d'un rétrécissement du disparition de la butée de pied de talus. Les
lit mineur du fait des endiguements, des protections matériaux du corps de talus glissent et sont emportés
des berges et des appuis des ouvrages implantés sur par charriage, la berge présente alors un surplomb.
le cours d'eau. Le débouché superficiel est réduit,
et, à débit constant, la vitesse du courant augmentée. A la décrue, ce surplomb se rompt par dessiccation
ou par effet de variation de pressions interstitielles
Sur la Loire on considère qu'en moyenne, pour le et des écoulements de la nappe dans le talus (fig. 5).
débit d'étiage, la vitesse du courant a sensiblement L a berge atteint un nouvel état d'équilibre après
doublé dans le chenal navigable sur les trente avoir subi une récession de tête.
dernières années.
Les causes d'instabilité des berges peuvent être Sur la hauteur d'abaissement rapide du plan d'eau,
classées en différentes catégories [Levillain, 1980] il y a variation de la pression interstitielle à l'intérieur
(fig. 5). des sédiments, qui peut entraîner une liquéfaction
locale du matériau.
Pseudo « fluidification » du lit en crue et action des
dragages De plus, l'énergie de déferlement des ondes sur le
talus de la berge provoque une érosion par remise
Au-delà d'une certaine vitesse d'écoulement critique, en suspension et entraînement du sédiment par les
fonction de la hauteur du plan d'eau et du diamètre ondes réfléchies.
164
de morphologie fluviale qu'il
Ecoulement dans importe de réaliser pour r é -
Me talus
pondre au devenir d'une rivière
ou d'un fleuve modifié par
l'homme dans telle ou telle
partie de son cours. Cette
Ruptures
tures y. "•
science a beaucoup progressé
Action du marnage
ces dernières années ; d'essen-
Action directe des dragages
tiellement expérimentale et ré-
^ R e c e s s i o n de t ê t e
servée à des spécialistes che-
vronnés, elle a évolué, et, malgré
sa complexité, doit permettre à
l'ingénieur projeteur quelques
Glissement du talus
réflexions et critiques sur le
Nouveau profil >v.-
par érosion du pied devenir de la rivière étudiée
[Ramette, 1979].
Action du batillage Zone du fond fluidité .
Récession de t ê t e
L a pérennité d'une protection
Action des crues
ou d'un endiguement bien
conçu, respectant les critères de
morphologie fluviale du cours
Etiage
Fig. 5. — Influence
d'eau étudié, ne sera assurée
des actions hydrauliques cependant que moyennant une
sur les berges. surveillance, un entretien et le
Evolution de la berge vers respect de certaines réglemen-
un nouveau profil d'équilibre
tations régissant les travaux en
rivière.
U n projet de protection de berges doit tenir compte Bien qu'anciens, les ouvrages du siècle dernier
de toutes les agressions évoquées ci-dessus : courants constituent un patrimoine très important vis-à-vis
de crues, dragages, marnage éventuellement, batil- du nombre total des ouvrages de franchissement.
lage : mais i l doit également tenir compte des Par ailleurs, a priori moins vulnérables parce que
interventions humaines sur le cours de la rivière. théoriquement mieux fondés, les ouvrages récents
sont également agressés et parfois mis en péril par
U n cours d'eau sur lequel on vient perturber des évolutions du cours d'eau ou de l'environnement
l'environnement va réagir. C'est l'objet des études lors d'interventions humaines sur celui-ci.
165
Conséquences de l'abaissement des lignes d'eau Conséquences de l'abaissement du Ut
Une première conséquence immédiate sur les fon- L'abaissement du lit autour des appuis provoque
dations est la mise à l'air libre d'éléments toujours un déchaussement des fondations et une perte
immergés. Les pièces de bois qui, si elles sont d'encastrement. Par la suite, la stabilité des appuis
toujours immergées et protégées de l'érosion et de diminue notablement et la sécurité peut ne plus être
l'abrasion des sédiments charriés, ont une remar- assurée. O n est conduit à procéder à des travaux
quable tenue dans le temps, sont soumises à des de reprise en sous-œuvre des appuis.
alternances d'exposition à l'air et à l'eau.
A u droit des fondations anciennes, le creusement
Il y a risque de pourrissement plus ou moins rapide du lit consécutif à l'abaissement des fonds est
et d'attaque par des champignons provoquant à d'abord limité aux zones non protégées par les
terme la ruine des pièces de bois. enrochements. Les talus des massifs de protection
se raidissent, les enrochements de pied s'enfouissent
Une deuxième conséquence très importante est la dans les alluvions affouillées, le niveau perturbé du
diminution du débouché superficiel au droit de lit étant alors situé plus bas, et les protections
l'ouvrage. Les fondations anciennes, larges, généra- deviennent instables. Les alluvions peuvent disparaître
lement protégées par des massifs d'enrochements, sous la carapace d'enrochements par effet de vortex
constituent de véritables obstacles à l'écoulement : dû aux écoulements tourbillonnaires, comme on l'a
ce sont des barrages noyés sur lesquels l'eau déverse. observé au pont Wilson à Tours [Grattesat, 1980].
Il se crée, en aval des ponts des fosses d'érosion
dont la profondeur atteint plusieurs mètres (fig. 6). En règle générale, ces enrochements doivent impé-
rativement être maintenus autour des appuis dans
la mesure o ù ils font partie intégrante de la
fondation, ou alors un projet de confortation,
mettant en œuvre un corsetage et des radiers
inaffouillables, doit être réalisé en améliorant l'écou-
lement autour des appuis.
Conséquence de l'augmentation
des vitesses de courant
Profil en
octobre 1979
L'augmentation des vitesses de courant va avoir
Om NGF
plusieurs actions en augmentant le risque d'affouil-
lement, en déstabilisant la tenue des enrochements
de protection, et en provoquant un charriage plus
L e v é en rive gauche
-4,40m NGF Erosion r é g r e s s i v e -5.15V -¿.80
important.
de l'appui le 12-2-80
du talus \
Ces fosses, d'abord localisées derrière les appuis, UN EXEMPLE DE RUPTURE D E BERGE
finissent par se rejoindre et former une véritable
vallée noyée transversale au fleuve ou à la rivière.
Lorsque des berges de rivière sont en équilibre
Sur la Loire, des fosses d'érosion de 3 à 4 m de précaire du fait de caractéristiques mécaniques faibles,
profondeur sont observées en aval d'appuis établis ou de pentes de talus trop raides ou encore du fait
superficiellement dans les alluvions, avec un encas- d'absence de protection, des variations rapides de
trement de 2 m en moyenne. niveau de la nappe peuvent entraîner des ruptures.
En amont de Nantes, des fosses d'environ 15 à 20 m L a Sèvre Nantaise est un affluent de la Loire dont
de profondeur ont été observées et les ouvrages ont le confluent est situé légèrement en aval de
dû être confortés selon diverses techniques, dont l'agglomération nantaise. Sur son cours inférieur,
l'une a consisté à réaliser un pavage à l'aide de cette rivière est maintenant soumise au marnage dû
2
15 000 m de gabions (pont S N C F sur le bras de à la remontée de la marée en Loire. L'amplitude y
Pirmil en amont de Nantes). atteint 3 à 4 mètres.
166
A u cours de l'hiver 1982-1983, des crues importantes d'habitation se trouvait ainsi affecté par les ruptures
noient la vallée inondable et vraisemblablement ont («g. 7).
fait remonter le niveau de la nappe phréatique dans
la plaine. E n 1983, les étiages de la Sèvre suivent Une expertise effectuée sur les fondations du bâtiment
l'évolution du plan d'eau de la Loire qui s'abaisse a mis en évidence qu'après rupture i l y avait fluage
et, au mois de juin, ce sont plus de 400 m de berge lent du sol sur une certaine épaisseur, par suite de
en rive droite qui s'effondrent ; au mois de septembre, la disparition de la berge. Les sols de fondation du
ce sont à nouveau 300 m de berge, mais en rive bâtiment situés en arrière de la rupture et sur une
gauche. distance de 6 à 10 m avaient subi un déplacement
horizontal de plusieurs centimètres et provoqué la
Les ruptures présentent un décrochement vertical de rupture des pieux moulés non armés de fondation
l'ordre de 3 à 4 m de hauteur et affectent les terres du pignon. Cette partie de l'immeuble a été évacuée
riveraines sur une largeur de 3 à 6 m environ. Ce et ses occupants relogés provisoirement en attendant
sont généralement des ruptures de type rotationnel la réparation.
car les alluvions de la Sèvre sont des argiles
plastiques cohérentes. A u cours des reconnaissances L a berge de la Sèvre Nantaise a été confortée sur
effectuées par sondages carottés pour prélever des une longueur de 1 400 m, et une paroi moulée de
échantillons intacts, i l a été mis en évidence des 25 m de longueur encastrée dans le substratum
surfaces de rupture fossiles, preuve que ce phénomène rocheux, ancrée en tête par des tirants, a été réalisée
n'est pas particulier à notre époque. devant le pignon de l'immeuble dont les fondations
ont été reprises en sous-œuvre (fig. 8).
Toutefois, l'urbanisation conduit construire a
proximité immédiate des berges, un bâtiment Le montant des travaux de confortation s'est élevé
à 6,5 M F pour la rive droite dont 2 M F
pour les berges sur une longueur de
1 400 m, et à 4,5 M F pour la confortation
nn n n 0
Terrassement p r é a l a b l e et substitution de l'immeuble par paroi moulée
ancrée et reprise en sous-œuvre
0
n n n n par micropieux.
nn n n • nD. Niveau en crue
167
CONCLUSION rivière à la suite des modifications apportées par
l'homme.
L a prévention contre les risques hydrauliques vise A ces évolutions de tracé en plan, de niveaux de
à limiter et, si possible, à éviter les conséquences lignes d'eau et de fond du lit que l'on sait déterminer
dommageables des actions permanentes ou occa- théoriquement, i l faut ajouter l'étude des actions
sionnelles de l'eau vis-à-vis des activités humaines. induites sur les berges qui sont la frontière naturelle
entre le lit mineur et la plaine alluviale, et les
De nombreux paramètres sont en jeu, le terme actions sur les fondations. Les phénomènes de
risque hydraulique recouvrant toutes les manifesta- transport solide, les érosions, les affouillements et
tions dues aux dégradations des écoulements fluviaux. les dépôts par sédimentation sont des actions
Le risque le plus important et également le plus naturelles qui provoquent la disparition des terres
spectaculaire est bien entendu le risque d'inondations. non protégées et conduisent parfois à la ruine des
Ce fléau est connu depuis des millénaires et l'homme fondations des ouvrages. Tous les phénomènes
lutte avec ténacité pour tenter de contenir les hydrauliques du cours d'eau, leur évolution prévisible,
débordements dus aux crues. L'urbanisation crois- doivent être pris en compte dans les études de
sante des vallées fluviales, les modifications apportées stabilité et de protection des berges et des fondations
par l'homme à l'environnement, ou directement au d'appuis d'ouvrages en site aquatique. Faute d'avoir
cours d'eau, provoquent des actions pas toujours maîtrisé cette étude des paramètres, les projets de
maîtrisées car elles ne se manifestent que quelques confortation peuvent devenir rapidement caducs.
années ou des dizaines d'années après réalisation de
l'aménagement.
Compte tenu de l'évolution de notre société où la
ruine d'un pont ou la chute de plusieurs centaines
Il est parfois bien difficile de mettre en évidence de mètres de berges sont devenues difficilement
l'origine d'un désordre, et pourtant nous avons acceptables, les travaux de protection ou de confor-
actuellement les moyens d'appréhender la plupart tation doivent être prévus et réalisés en leur temps
de ceux-ci. pour garantir la sécurité des ouvrages.
Les progrès réalisés, en matière de morphologie Ces travaux représentent un coût économique
fluviale en particulier, sont tels que l'on peut généralement élevé qu'il faut accepter si l'on veut
expliquer le comportement des cours d'eau. Cette éviter des sinistres.
science permet maintenant de quantifier les phéno-
mènes et le devenir de telle ou telle portion de Rédigé en avril 1987
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