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De la grammaire de phrase à la grammaire de texte ou grammaire textuelle.

Quand peut-on dire qu’une phrase est grammaticale ou non ?

Une phrase est considérée comme grammaticale si elle suit les règles et les
structures grammaticales d'une langue donnée. En d'autres termes, une phrase
grammaticale est une phrase qui est correcte sur le plan linguistique et qui respecte les
conventions syntaxiques de la langue. Voici quelques points clés pour déterminer si
une phrase est grammaticale ou non :

1. Syntaxe correcte : Une phrase grammaticale suit les règles syntaxiques de la


langue, c'est-à-dire l'ordre correct des mots :"sujet-verbe-objet".

2. Accord : Les éléments de la phrase, tels que les sujets, les verbes et les
adjectifs, doivent s'accorder correctement en genre, en nombre et en temps.

3. Concordance des temps : Les temps verbaux dans une phrase doivent être
utilisés de manière cohérente. Il faut utiliser le temps approprié pour indiquer
si une action se produit au passé, au présent ou au futur.

4. Ponctuation correcte : La ponctuation est importante pour déterminer la


grammaticalité d'une phrase. Une utilisation appropriée de la ponctuation, telle
que les virgules, les points, les points-virgules, etc., est nécessaire.

5. Utilisation appropriée des mots : Les mots utilisés dans une phrase doivent
être appropriés dans le contexte et utilisés correctement.

6. Absence d'ambiguïté : Une phrase grammaticale est généralement claire et ne


prête pas à confusion. Les structures ambiguës ou les erreurs de construction
peuvent rendre une phrase non grammaticale.

Qu’est-ce qu'un texte ?

Si nous remontons à la définition d'origine du mot texte, nous soulignons qu'il


vient du mot latin textus qui signifie tissus et qui a connu plusieurs présentations selon
les conceptions qui le prennent en charge. Un texte est un ensemble structuré et
cohérent de phrases véhiculant un message et réalisant une intention de
communication.

Traditionnellement, plusieurs approches conçoivent la notion de texte comme un


phénomène étroitement lié à la cohésion et à la cohérence. Cette définition le spécifie
par rapport au discours ou énoncé, mais, progressivement, avec l'avènement des
théories de l'énonciation, et dans des perspectives de l'analyse de discours, il a pris des
valeurs variables en tant que discours ou énoncé. Il s'emploie comme un équivalent de
l'énoncé ou comme une suite linguistique autonome, orale ou écrite, produite par un
ou plusieurs énonciateurs dans une situation de communication déterminée.

1
Bien qu’elles soient grammaticales et impeccables au niveau de toutes les
structures grammaticales et lexicales d’une langue, un texte n'est pas seulement un
simple assemblage de phrases.

Avec l’apparition de l’approche théorique en linguistique qui a été développée par


Noam Chomsky dans les années 1950 sous le nom de la grammaire générative
transformationnelle, on estimait que les différences entre le niveau du texte et celui
de la phrase étaient d'ordre purement quantitatif et que l'on pourrait venir à bout des «
exceptions » en renforçant le système de règles descriptives. C'était ignorer, ainsi que
le notera plus tard de Beaugrande, que « ce qui fait qu'un texte est un texte n'est pas sa
grammaticalité mais sa textualité »1

Jean-Michel Adam a présenté dans son ouvrage « La linguistique textuelle » une


définition de la textualité comme étant « un ensemble d'opérations qui amènent un
sujet à considérer à la projection et/ou à la lecture/audition qu'une suite d'énoncés
forme un tout signifiant »2. Cela veut dire que le texte est : ce qui constitue, d’après le
lecteur, une unité sémantique cohérente. Dans le programme de sa réflexion, il
s’interroge, plutôt sur « les facteurs qui amènent un sujet écrivant ou lisant à porter
sur une suite d’énoncés un jugement de textualité et sur les conséquences de ce
jugement sur l’interprétation des énoncés »3. Il précise que son jugement s’appuie sur
« un triple sentiment » qui renvoie à la « connexité », la « cohésion » et la «
cohérence ». Il mentionne l'exemple de « la description » et le définit comme «le
résultat du passage de la séquence à la configuration, c’est-à-dire de la linéarité de
l’énoncé à la figure, de la séquence textuelle comme suite linéaire d’unités
linguistiques (connexité) à la reconstruction de cette séquence comme un tout
signifiant (cohésif et cohérent) »4.

Ainsi, en dehors de la complexité des définitions du concept de « textualité », leur


combinaison adéquate mène à constater que la textualité est une qualité/propriété
intrinsèque et essentielle des textes, et par laquelle des phrases/propositions
successives forment un tout/texte cohérent, soumis à interprétation et non pas une
séquence aléatoire. La textualité est donc liée à l’organisation des textes et le
fonctionnement des mécanismes cognitifs associés à eux tels que la gestion de la
cohésion, la cohérence textuelle, et les éléments contribuant à leur réalisation.

En conséquence, le texte ne sera pas limité à une succession de mots et aura du


sens et une visée discursive en rapport avec les genres discursifs.

1
Robert-Alain de Beaugrande « Text Linguistics and New Applications. vol. 11, Annual Review of Applied
Linguistics », 1990, pp. 17-41..
2
Adam J.M. » La linguistique textuelle : Introduction à l’analyse textuelle des discours », Armand Colin, Paris,
2011, p.14.
3
Adam J.M. « Continuité et textualité ». Dans Adam Jean-Michel. Faire texte : « frontières textuelles et
opérations de textualisation ». Besançon. Presses universitaires de Franche-Comté, 2015, p. 35-80.
4
Adam J.M. « Textualité et séquentialité ». L'exemple de la description - In : Langue française. n°74, La typologie
des discours, sous la direction de Jean-Louis Chiss et Jacques Filliolet, 1987, p. 55.

2
Pour déterminer le rôle que joue le texte en tant que support de la textualité, nous
passons en revue quelques approches linguistiques qui ont pris en charge ce concept.

I. L'approche communicationnelle.

« Nous ne nous exprimons pas avec des mots ou des phrases isolées. Dans
l'évènement communicatif : le texte entier apparaît comme un champ de force où
s'exerce une permanente tension, sémantique et formelle […] ».5

2. L’approche fonctionnaliste

L’approche fonctionnaliste, pareille à l’approche structuraliste stricte, est fondée


sur le principe du statut de texte en tant qu’unité linguistique. Elle aborde la
cohérence du texte du point de vue de l'organisation thématique. Cependant, les
concepts de thème et de rhème sont les éléments fondamentaux :

- Le thème : c’est le point de départ de l’énoncé, connu et clair aux participants de la


communication, il représente ce dont on parle dans la phrase/ l’énoncé.

- Le rhème : c’est l’élément nouveau introduit dans l’énoncé, il représente ce qu’on


dit à propos du thème. Trois types de progression thématique sont introduits :

- La progression à thème constant : dans ce type, le thème ne change pas, il est


repris dans toutes les phrases qui se succèdent, alors que les thèmes changent à
chaque fois. Cette forme de progression est fréquente dans les textes narratifs et
descriptifs.

Dans ce type de progression, les substituts lexicaux (reprises nominales, périphrases,


…) et grammaticaux (reprises pronominales, compléments, …) servent à éviter les
répétitions.

- La progression à thème linéaire : il s’agit du rhème d’une phrase qui devient le


thème de la phrase de la phrase qui suit. L’argumentation, les textes descriptifs et
explicatifs privilégient ce type de progression.

- La progression à thèmes dérivés : dans cette progression, les thèmes des phrases
successives sont différents mais ils sont dérivés d’un thème commun appelé « hyper
thème ». La progression à thèmes dérivés est privilégiée dans la description.

Les concepts de thème/rhème sont des éléments fondamentaux de la textualité : la


cohérence d’un texte dépend de la « progression thématique »

3. L’approche opérationnelle

Bernard Combette reprend la progression thématique et lui donne une typologie. Il


affirme aussi l'existence d’autres schémas de progression éventuels dans la
progression à thèmes dérivés, selon lui : « L'hyperthème n'est pas obligatoirement le
thème de la première phrase du passage […] Et plus précisément, c'est souvent non
plus un hyperthème qui éclate en sous-thèmes, mais un rhème « multiple » dont les
5
Jeandillou J F. L’analyse textuelle. Armand Colin. Paris, 1997, p.81

3
éléments sont repris en divers thèmes […] »6. Il voit que le thème représente l'élément
du départ de la construction du texte qui se développe ensuite au sein de la structure
thématique, il joue alors un rôle important en garantissant la continuité d’une
compréhension entière du sens du texte, tandis que le rhème renforce le sens qui lui
est accordé.

Les critères de textualité

L’analyse d’un texte revient à rendre compte des phénomènes caractérisant la


textualité qui sont au nombre de sept critères fondamentaux. Parmi lesquels le
couple-titre : cohérence et cohésion, lié aux conditions logico-sémantiques, cristallise
les relations transphrastiques à l'intérieur du texte et contribue à la configuration
textuelle.

1. La cohérence

Selon De Beaugrande, la cohérence est définie comme une « continuité du sens »


établie à l'aide d’une connaissance extralinguistique ; une connaissance schématique
du lecteur/récepteur (d'ailleurs, son approche souligne le rôle important de ce dernier
dans l'interprétation et la compréhension du texte) et des effets pragmatiques et
contextuels. Le rapport entre le savoir textuel et le savoir sur le monde révèle le sens.
Beaugrande signale que la cohérence ne concerne que les relations implicites. En
revanche, d’autres théories exposent une cohérence explicite dans laquelle les
relations entre les différents segments du texte se distinguent par des connecteurs
logiques, aussi appelés les organisateurs ou bien les marqueurs de relation.

Autre acception de la cohérence

Le concept de cohérence

Dès que l'on veut appréhender les phénomènes de type textuel, on est amené à
recourir à la notion de cohérence. En dépit de son utilité, celle-ci est
extrêmement difficile à cerner. Le plus souvent, on la définira négativement, un
peu comme on le fait avec celle de « bonne santé » : un texte est cohérent quand
il n’est pas ... incohérent!

Mais à quoi reconnaît-on une rupture de cohérence?

En principe, on admet généralement que, sauf cas de maladie mentale, l'esprit


humain fonctionne de manière cohérente. Le jugement d'incohérence est donc
nécessairement porté de l'extérieur; c'est le point de vue d'un lecteur qui ne
parvient pas à identifier les enchaînements entre les informations qui lui sont
livrées. On dit alors des choses comme « Je ne vois pas le lien », « J'ai perdu le fil
», « Ça n'a ni queue ni tête », ou encore : « Mais de quoi parle-t-on ici au juste? »

Il apparaît ainsi que, si la pensée est en principe cohérente, un texte peut ne pas
l'être pour un lecteur donné. Des liens entre des informations, qui étaient
6
Combettes B. Pour une grammaire textuelle. La progression thématique. De Boeck, Paris-Gembloux: Duculot,
Bruxelles-, 1983, p.139.

4
évidents pour le scripteur au moment de l'écriture, peuvent avoir été omis dans
le texte. Ce dernier semblera alors incohérent parce que le lecteur ne peut pas les
reconstruire par inférence, surtout s'il lui manque les connaissances communes
qui lui permettraient de se projeter dans l'esprit du scripteur. Parfois, c'est le
scripteur lui-même qui ne retrouvera plus, après coup, ce qu'il avait voulu dire:
la constellation mentale dans laquelle les divers éléments du texte formaient sens
a disparu et le texte ne fournit pas suffisamment d'instructions pour la recréer.

Plus les locuteurs ont de connaissances en commun, plus facilement ils peuvent
apercevoir la cohérence d'énoncés qui, pour quelqu'un de l'extérieur,
sembleraient incohérents. À titre d'exemple, examinons cet extrait de dialogue:

(2) — As-tu donné à manger au chat? demanda-t-il.

— Il faudra l'emmener chez le vétérinaire, répondit-elle.

La réplique de la femme est sans doute cohérente pour l'interlocuteur parce que
ce dernier sait, par exemple, que le chat ne veut rien manger depuis plusieurs
jours; qu'il a peut-être même déjà été question de l'emmener chez le vétérinaire
au cas où il ne toucherait pas à une nouvelle boîte de nourriture. Mais un lecteur
qui ignore ce contexte pourra trouver l'ellipse trop difficile à résoudre et
décréter qu'il y a rupture de cohérence: cela revient à dire que l'auteur a rompu
le contrat implicite en vertu duquel un texte doit être rédigé de façon à
communiquer efficacement ses informations, sans exiger d'inférences risquées de
la part de ses lecteurs. (Notons tout de suite que ce « contrat » de cohérence peut
varier selon les types de texte.

2. La cohésion

La notion de cohésion renvoie à une continuité sémantique où les rapports qui


relient les énoncés à l’intérieur du texte sont établis au moyen de marqueurs
linguistiques. En effet, elle apparaît explicitement par le biais des moyens cohésifs.

Contrairement à la cohérence qui est définie comme une « textualité basée sur
l’information », Beaugrande voit que la cohésion correspond à une « textualité basée
sur la forme » sous laquelle l’ensemble textuel survient aux niveaux microstructural et
macro-structurel. Pour lui, la cohérence est un aspect de l’acceptabilité alors que la
cohésion est un aspect de la grammaticalité.

3. L’intentionnalité et l’acceptabilité

A travers le critère d’intentionnalité, il est important de déterminer l'intention et


l'attitude du locuteur pour produire un texte jugé cohérent et cohésif, pour faire passer
un message, pour avoir /laisser un effet chez l'interlocuteur et pour communiquer un
sens voulu.

Quant’ à celui d’acceptabilité, il fera référence au récepteur et à son attente de


recevoir un ensemble cohérent, cohésif, acceptable et significatif et qu’il peut juger

5
utile ou important pour lui. Autrement dit, elle concerne le degré d’acceptation du
texte par lui.

4. L’informativité

Tout texte contient des informations, qu'elles soient transparentes ou opaques,


explicites ou implicites, attendues ou inattendues, connues ou inconnues, et pour
qu'un texte soit un texte, il faut qu'il soit au centre de ces contradictions et partage un
certain équilibre entre eux. En d’autres termes, un texte qui est complètement
transparent, explicite, attendu et qui ne contient donc pas d’information nouvelle
n’attire pas l’intérêt du récepteur et pour lui il est non informatif et tant que le texte
contient des informations inattendues et nouvelles, il est informatif et obtient son
acceptation, mais pas de manière exagérée jusqu'à atteindre des problèmes de
communication.

5. La situationnalité

Ce concept renvoie à la relation et le lien entre le texte et son contexte et aux


facteurs de sa création et de son fonctionnement. C’est-à-dire, il associe le texte à une
situation donnée et à d’autres phénomènes non-linguistiques et externes.

6. L’intertextualité

C'est la dépendance d'un texte à des connaissances préexistantes dans d'autres


textes. En outre, c'est des "interactions textuelles" placées à l'intérieur d'un texte
donné sous forme de citations, de parodies, de pastiches, d’allusions, de plagiat, de
préférences, de liens et d’hypertextes.

6
Cela veut dire qu’elles soient grammaticales et impeccables au niveau de toutes
les structures grammaticales et lexicales d’une langue, un texte n'est pas seulement un
simple assemblage de phrases.

Donc, depuis le début des années 70, le domaine d'intervention sur un autre
plan que celui de la simple orthographe grammaticale et lexicale de la phrase est de
plus en plus étudié pour se constituer sous le nom de grammaire textuelle ou de
grammaire du texte.

Par la suite, le concept de grammaire textuelle évoluera selon les auteurs. Ainsi, il
recouvre, chez Harald Weinrich, la totalité des faits de grammaire, avec la
particularité que ceux-ci sont étudiés dans le cadre d'une linguistique dialogique. Cela
signifie que, pour appréhender la valeur d'un fait de langue, il faut le replacer dans le
contexte communicatif où il est susceptible d'apparaître. Le dialogue étant considéré
par Weinrich comme la situation de base du langage. Les énoncés sont ainsi
considérés comme autant d'instructions « qu'un émetteur adresse à un récepteur pour
lui faire savoir comment on attend de lui qu'il se comporte dans la situation donnée ».

La plupart des chercheurs assignent cependant à la grammaire textuelle la prise en


compte des aspects qui relèvent spécifiquement de la compréhension d'un ensemble
de deux phrases ou plus. Certains, tel Jean-Michel Adam, placent leurs travaux sous
l'intitulé de linguistique textuelle, ce qui évite le recouvrement par la grammaire
traditionnelle.

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