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ULB – Ecole de Santé Publique

Année académique 2020-21


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« La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un
parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à
quoi que ce soit, si ce n’est aux faits eux-mêmes ; parce que, pour
elle se soumettre, ce serait cesser d’exister. »

Henri Poincarré, 1909

Table des matières

1. La Mort au fil du temps, une question de religio (religio : relation)

1.1 À l’aube de l’humanité, l’éveil de la spiritualité

1.2 La mort-renaissance

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1.3 Le concept du double

1.4 De la divinisation à l’intériorisation

1.5 La mort dans notre civilisation

2. L’euthanasie

2.1 Définitions

2.2 Conceptions éthiques

2.2.1 La morale n’est pas éthique

2.3 Le Comité Consultatif de Bioéthique de Belgique

2.4 Conceptions philosophiques

2.5 L’évolution de notre perception de la souffrance

3. La pratique de l’euthanasie en Belgique

3.1 La loi de 2002

3.1.1 Les conditions essentielles

3.2 Le rôle de la commission fédérale de contrôle de l’euthanasie

3.3 Deux cas de figure

3.4 Les critiques émises à l’encontre de cette loi

3.5 Les éléments qui ont contribué à la dépénalisation

3.6 La dépénalisation de l’avortement en Belgique

3.7 Les changements apportés à la loi en 2020

3.8 Quelques chiffres à titre informatif

4. L’euthanasie au niveau européen

4.1 La France et la loi Leonetti

4.2 La situation de l’euthanasie en Suisse

5. Le don d’organes en général et dans le cas de l’euthanasie en particulier

5.1 Le don d’organes

5.2 Le don d’organes en lien avec l’euthanasie

5.3 Les différents types de don

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5.4 Les principes à respecter

6. La bonne mort et les traditions religieuses

6.1 Dans le christianisme

6.2 Dans le judaïsme

6.3 Dans l’islam

6.4 Dans le bouddhisme

6.5 La contribution des traditions religieuses

Annexes

1. La Mort au fil du temps, une question de religion

1.1 À l’aube de l’humanité, l’éveil de la spiritualité

La conscience de la mort est une caractéristique de l’homme, dans la mesure où il est capable,
notamment par le langage et le symbole, de postuler l’avenir et de se placer au-delà du
moment présent. Cela explique sans doute que l’Homo sapiens (notre ancêtre apparu il y a

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environ 300.000 ans) réalisa les premières sépultures vieilles, pour les plus anciennes, de
100.000 ans.

On a retrouvé les restes de cadavres déposés, dans des fosses, parfois couchés en position
fœtale (faut-il y voir le symbole d’une renaissance ? Edgar Morin 1 en tous les cas parle, ici, de
mort-renaissance). Le mort est paré et accompagné d’offrandes, sans doute pour un voyage
symbolique, dans un autre monde...

Sépulture coffrée de pierres datant du Néolithique (Calvados, 2014)

1.2 La mort-renaissance

Suivons donc Edgar Morin qui nous dit que dans la conscience archaïque de l’homme, la mort
semble indissociable de la fécondité : l’arbre perd ses feuilles qui pourrissant se transforment
un humus, lui-même nourrissant la terre où il puisera à nouveau les forces pour
bourgeonner, à nouveau. Le nouveau-né reprend la place (parfois le nom) de l’ancêtre.

Même si d’autres civilisations parleront de réincarnation, on évoquera aussi le culte agraire


(les sépultures sont parfois en bordure des champs) , ou ces populations encore liant mort et
renaissance réingurgitent un animal qui “représente” l’ancêtre afin de s’approprier les forces
du défunt (animal totem en Afrique, endocannibalisme,..).
1
Edgar Morin, de son vrai nom Edgar Nahoum, est un sociologue et philosophe français. Auteur de nombreux
ouvrages, Edgar Morin se revendique comme penseur « constructiviste », et se définit comme un « incroyant
radical ».

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Doit-on voir dans ces dernières pratiques l’origine de l’Eucharistie (ce sacrement dont la
doctrine chrétienne affirme qu’il contient le corps du Christ, dans le pain et le vin qu’il
représente: “Prenez et mangez, ceci est mon corps. Buvez-en tous car ceci est mon sang”.) ?

Les sacrifices humains ou d’animaux montrent à l’envi la force fécondante de la mort. Elle
témoigne pour Edgar Morin (“L’homme et la mort”) du peu de cas qui est fait de la mort
individuelle.

1.3 Le concept du double

Au paléolithique, les sépultures contiennent armes et nourritures. C’est le “double” du mort


qui, dans l’esprit archaïque, reste vivant. Il faut l’honorer obséquieusement car on le craint et
les offrandes qu’on lui fait nous rappellent que les sacrifices deviennent plus
symboliques, avec le temps. Il reste que le concept de mort-renaissance, s’il est distinct du
concept du double, évolue concomitamment dans la conscience collective. C’est ainsi que
l’univers des “doubles” se différencie progressivement du monde des vivants.

Le culte des morts se complique quand il permettra de différencier le commun des mortels des
chefs qui deviennent des divinités. Le double s’est donc détaché progressivement de l’homme
pour être parfois divinisé (réminiscence de ce passé qui est en nous : les mausolées et autres
dépôts de cendres, au Panthéon, ...).

1.4 De la divinisation à l’intériorisation

Le “double” se spiritualise. Il devient l’âme, le souffle, l’anima et s’intériorise aussi, puisqu’il


devient cette “parcelle immatérielle” (immanente ou transcendante) en nous-même. Le double
s’est intériorisé pour devenir l’âme. Celle-ci ne se séparera pas instantanément du corps au
moment du décès puisqu’elle rôdera un moment autour du cadavre.

Mettre la dépouille au contact avec la terre mère aidera à la séparation corps-âme. Il


conviendra de préparer l’âme au voyage en pourvoyant le corps de nourriture.

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Et, pour éviter son retour, on coudra le linceul et on l’entourera de bandelettes. Certaines
traditions prétendent que l’âme restera, trois jours, au cimetière, parfois davantage. Celles
pour lesquelles, on n’a pas pu accomplir les derniers devoirs erreront au cimetière (errer
comme une âme en peine) ou, comme en Bretagne, dans les haies.

Bref, concevoir l’idée d’une âme ne pourra émerger que dans une civilisation individualisée
comme le sont devenues celles du bord de la Méditerranée, l’Inde ou la Chine.

Il faut croire selon divers auteurs que la croyance en l’immortalité de l’âme qui est apparue,
au Ve-VIe siècles avant J.-C. est la synthèse de ces deux intuitions : le double et la mort-
renaissance. Notre civilisation en fera les religions du salut. Cette conception est centrale,
profonde et assurément bien encrée, dans les mentalités.

1.5 La mort dans notre civilisation

Les religions y ont marqué une empreinte indélébile que les Églises ont renforcées. L’homme
y a puisé le moyen de lutter contre l’angoisse et la peur de sa propre finitude.

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Au début du christianisme, le chrétien s’endort jusqu’au jour du second avènement, pour se
réveiller, à la fin des temps, au Paradis. Vers le XIIe siècle, on parle de la “mort de soi”. Celle
qui correspond au bilan d’une vie individuelle : le jugement dernier (l’Archange Saint Michel
pèse les âmes et sépare les justes des damnés).

Pesée des âmes, détail de


l'œuvre « Le Jugement dernier » de Rogier van der Weyden, 1450.

Il semble qu’au Moyen Âge, la peur de l’enfer supplantait celle de la mort. C’est l’époque de
la “mort acceptée” : résignation familière au destin collectif de l’espèce. Plus tard, une
conception se généralise qui veut que le “jugement” se fait immédiatement après la mort, les
anges et les démons se disputant l’âme au lit du mourant. La mort est cérémonie publique où
le mourant attend, couché sur le dos, implorant le pardon de son entourage, priant et recevant
l’absolution.

Il y a un relais qui dans l’imaginaire collectif existe entre la mort et la Résurrection (l’âme vit
séparée du corps” et le “purgatoire” est inventé, à la fin du XIIe siècle. Au XIVe jusqu’au
XVe siècle, on conçoit que les âmes resteront au purgatoire selon un temps proportionné
à la gravité de leurs péchés. Ceux-ci sont rachetables par les actes de piété des vivants en leur

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faveur (prières, aumônes, jeûne, messes pour les morts). C’est l’ère du “macabre” (danses,
défilés, importance donnée au squelette, dans l’iconographie et la peinture...)

C’est aussi le temps des épidémies (Peste Noire qui se répand de Florence sur toute l’Italie et
la France, puis sur toute l’Europe, en 1348-49 avec ses 25 millions de morts : un tiers des
citadins et un huitième des populations rurales) qui ramène l’espérance de vie, à la
fin du XIVe siècle, à 25 ans !

Reproduction d’une gravure illustrant l’hécatombe causée par la peste en Angleterre

La mort est toujours présente (on note encore une épidémie, en 1722, à Marseille), les gens
s’y préparent et le croyant est toujours prêt à se présenter devant Dieu, pour le passage, à la
vie éternelle. Le trépas est valorisé. Au XVIIe siècle, on connaît d’impressionnantes
cérémonies publiques (la mort spectacle) de personnages importants avec toute sa pompe :
l’annonce de l’imminence de la mort, la confession, la messe dans la chambre, la communion,
les adieux aux domestiques et à la famille, l’extrême-onction (voir la mort du Roi-soleil...,
mais aussi les scènes peintes sur de nombreux tableaux qui témoignent de cérémonies
adaptées à toutes les conditions sociales).

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Détail
d'une gravure du XIXe siècle dépeignant la chambre mortuaire de Louis XIV, 1715

Petit à petit pourtant, le rôle essentiel que joue le prêtre va être pris par le médecin et cette
réalité va immanquablement aboutir à la négation complète de la mort comme phénomène
naturel. La mort est devenue un accident que les techniciens doivent empêcher !

Déjà au XVIIIe siècle, on rationalisait la mort (démographie statistique, dissertations des


philosophes sur le suicide, le goût des tombeaux, des cimetières...). La “mort de toi” a
remplacé la “mort de soi” (Ariès2, 1977). Si on connaît, à cette époque, la peur de
l’inhumation
prématurée (voir littérature et arts graphiques), on décide de construire des cimetières, hors
des villes : l’incertitude des signes de la mort retarde l’inhumation jusqu’aux premiers signes
de putréfaction... qui fait peur et finit par précipiter l’enterrement !

La mort reste une réalité vécue, dans toutes les familles (il y a 100 ans, l’espérance de vie était
de 44 ans, pour les hommes). Aujourd’hui, on meurt davantage à l’hôpital. On est passé de la
“mort apprivoisée” à la “mort escamotée”. On voit ainsi le médecin jouer le rôle d’arbitre
qui interdit d’abandonner la partie !

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Philippe Ariès est un journaliste, essayiste et historien français. Il a longtemps étudié le sentiment de la
population face à la mort à travers l'histoire, y voyant un pilier de la construction de la société. Il est connu pour
ses deux études : L'Enfant et la vie familiale sous l'Ancien Régime et L'Homme devant la mort.

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La société va réagir contre l’acharnement thérapeutique qui n’est pourtant pas clairement
défini, pour réclamer davantage d’autonomie et de compassion. C'est ainsi qu'il s'agit,
aujourd’hui de mettre en balance les chances "d'une prolongation significative d'une vie de
qualité raisonnable" avec "le caractère pénible et les inconvénients" des traitements et des
actes thérapeutiques. Il reste encore beaucoup de travail pour que la mort soit à nouveau
perçue comme naturelle !

M.M.

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2. L’euthanasie

1.6 Définitions

Étymologiquement, le mot euthanasie vient du grec ancien « eû » : bien et «thánatos» : la


mort, et signifie donc : bonne mort, mort douce. Une mort sans souffrance, accompagnée et
soutenue par les bons mots et les bons gestes. Certains considèrent que l’euthanasie est l’un
des meilleurs moyens d’accéder à une fin douce et paisible. Dans notre société, la mort est
une expérience de moins en moins partagée. Actuellement, elle incarne moins un rite de
passage qu’un évènement privé et institutionnalisé qui se déroule à l’hôpital. Et le personnel
soignant est inéluctablement confronté au contact direct avec la finitude qui est devenu un
interdit culturel majeur, un véritable tabou. La mort n’est plus pensée comme un phénomène
normal inséré dans le cycle de la vie. La vieillesse, elle, est immanquablement assimilée à de
grandes souffrances physiques et morales. Les nouvelles unités de soins intensifs deviennent
en quelque sorte des lieux de prolongation de l’agonie. Paradoxalement, malgré les progrès
de la médecine, le nombre de mauvaises morts tend donc à augmenter.
▲ Notons d’emblée que l’on distingue différents types d’euthanasie :
- Euthanasie non volontaire : Quand le patient est inconscient.
- Euthanasie passive : Quand on laisse faire les choses et que l’on refuse toutes formes
d’acharnement thérapeutique.
- Euthanasie directe : Aujourd’hui, c’est celle pratiquée en Belgique en regard de la loi.
- Euthanasie indirecte : Quand un médicament administré a pour effet secondaire de
précipiter la fin de vie du patient.

L’euthanasie est non involontaire quand le patient est inconscient. Elle est passive quand on
laisse faire la nature, ce qui correspond au refus de tout acharnement thérapeutique.

On récuse parfois la différence entre l’euthanasie active ou passive car le résultat escompté
dans les deux cas est le même : la mort. En effet, que l’on pose un acte ou qu’on s’abstienne
d’en poser un n’apporte finalement pas de différence sur le plan moral. Mais du point de vue
juridique, il y a une énorme différence entre une euthanasie directe et indirecte.

On ne peut pas véritablement parler d’euthanasie dans le cas de l’euthanasie indirecte si l’on
s’appuie sur la définition de législation de 2002 sur l’euthanasie. L'euthanasie est définie dans
cette loi comme un "acte (médical), pratiqué par un tiers (médecin), qui met
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intentionnellement fin à la vie d'une personne à la demande de celle-ci". L'euthanasie n'est
cependant pas un droit en Belgique : introduire une demande d'euthanasie ne garantit pas
que celle-ci soit pratiquée.

Néanmoins les institutions de soins n’ont pas attendu la loi pour faire des entorses. Arrêter un
traitement prolongeant la vie, ne pas enclencher un respirateur ou le débrancher, retirer une
sonde alimentaire, etc. Tout cela implique la décision de provoquer la mort et même dans les
deux derniers cas un acte actif. Administrer un analgésique à forte dose dont la conséquence
est la mort était et reste une pratique régulière.
Du temps où la loi ne permettait pas l’euthanasie, les produits utilisés n’étaient pas
nécessairement adéquats et l’agonie pouvait durer longtemps, très longtemps.

La loi sur la dépénalisation de l’euthanasie n’empêche donc pas d’autres pratiques (sédation,
etc.) mettant fin à la vie. Les procédures intitulées comme sédation terminale sont
régulièrement utilisées dans les services de soins palliatifs, mais aussi dans les unités de soins
intensifs (USI). Les problèmes résolurent par des soins palliatifs : l’association de famille,
proche des malades. De fois les patients ont des expériences plutôt intéressantes et comment
ils réagissent avec autant de courage, une certaine sérénité. Livre conseillé : l’euthanasie
une sérénité partagée. Si elle arrive tôt la seule injustice sera l’âge.

Mais n’oublions pas aussi que la société est très importante.

Ceux qui on mis en avant l’euta la question est donc philosophique chacun à son choix
de vie

Utilisable seulement dans les derniers jours de la vie, la sédation terminale consiste à
plonger le patient dans un sommeil profond en attendant le décès. C’est le double effet (on
soulage la douleur et la mort survient après un temps indéterminé) Cette technique délicate
peut aussi poser un certain nombre de problèmes en termes d’éthique, mais ce n’est pas une
euthanasie car aucun produit létal n’est utilisé.

L’euthanasie directe est réalisée à l’aide d’injections intraveineuses, une première de 2 à 3g


de thiopental qui plonge le patient dans un sommeil profond, suivie d’une deuxième injection
d’un paralysant neuro-musculaire (sauf si le décès provoqué par l’arrêt cardio-respiratoire
arrive directement après la première injection).

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1.7 Conceptions éthiques

Le débat éthique en Belgique concernant l’euthanasie se base sur deux courants


philosophiques qui sont contraires depuis toujours. Les partisans de l’euthanasie volontaire
privilégient la libre disposition de soi et la possibilité de choisir sa mort

Il y a évidemment des laïques qui étaient malgré tout opposés à la législation que nous allons
aborder et des catholiques qui parlaient eux d’état de nécessité (philosophie de la
transgression nécessaire). Nous développerons ce point plus loin avec la notion de moindre
mal.

▲ Le philosophe belge Edouard Delruelle3 schématise ce débat en opposant deux


positionnements éthiques :

 Les communautariens pour qui le corps humain nait des autres, et demeure lié aux
autres. Notre corps est le maillon d’une chaîne. Pour les communautariens, l’idée qu’il
est possible pour un individu d’être autonome, libre, en dehors d’un univers culturel de
référence est un leurre aboutissant à des problèmes de justice plutôt qu’à une véritable
société juste.
 Les libéraux qui sont, au sens philosophique du terme, davantage individualistes et
pour qui le corps appartient à un sujet souverain. Ton corps t’appartient, libre à toi
d’en disposer comme tu l’entends.

Ce sont deux approches tout à fait différentes. Il faut toutes deux les respecter et les prendre
en considération lorsqu’on veut comprendre autrui, ou établir sa propre réflexion. Ce qui va
déranger le laïque c’est qu’un point de vue particulier, qu’il soit religieux ou non, puisse être
imposer à tous. Les mentalités évoluent et le positionnement des autorités religieuses vis-à-vis
3
Edouard Delruelle est un philosophe belge engagé dans des combats tels que le droit de mourir dans la dignité,
le dialogue interculturel et la justice sociale.

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de nombreuses thématiques s’assouplit mais il reste du chemin à parcourir. Toutefois il faut
demeurer vigilant, rien n’est jamais vraiment acquis.

1.7.1 La morale n’est pas éthique

La différenciation entre la morale et l’éthique repose notamment sur deux traditions antiques :

o Celle des Romains (peuple très uni) pour qui la morale était quelque chose de
supposément commun à tous et s’appliquait à l’ensemble du groupe.
o Celle des Grecs (plus individualistes) : l’éthique avait pour eux une dimension
plus personnelle, plus individuelle.

 La morale correspond à une espèce de science du bien et du mal socialement admise.


Selon cette notion, nous sommes tous soumis à certains devoirs et nos actions doivent
avoir pour objectif le bien commun.
Toute morale évolue par la transgression des règles → consonance plutôt latine. La
morale ne se réduit pas à l’éthique et inversement.

 L’éthique quant à elle correspond à l’ensemble des conceptions morales d’un individu.
L’éthique d’une personne n’érige pas d’autre tribunal que sa propre conscience.

Il y a donc une opposition entre la morale qui impose la même chose à tous, et l’éthique qui
revêt une dimension plus individuelle. Les questions éthiques sont abordées de manière
pragmatique. C’est par rapport au vécu médical, au vécu du patient, que l’on adapte notre
position. Un questionnement éthique doit donc toujours se poser de façon individuelle, c’est
du cas par cas. La morale est quant à elle davantage collective.

La réflexion éthique est pragmatique et donc éloignée de la morale car une approche
pragmatique est toujours conflictuelle. Il y a d’abord les conflits de valeurs en fonction des
idéaux divergents et puis les conflits de compétences → tout ça aboutit à une remise en
question permanente. Au niveau de l’euthanasie, il y a eu des évolutions très marquées depuis
les années 90 grâce à de nombreuses remises en question que nous aborderons plus loin.

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L’euthanasie soulève et soulèvera toujours de nombreuses questions qui relèvent de l’éthique,
il n’est pas possible que tout le monde adhère à l’idée. L’euthanasie ne doit pas être
considérée en termes de bien ou de mal, on ne se situe pas au niveau moral ou immoral, elle
ne doit pas non plus être considérée en termes de ce qui est juste (pour une personne ou pour
la société). L’éthique, ce n’est pas la morale. Le geste euthanasique tel qu’il est défini par la
loi, n’est ni une transgression, ni une exception éthique. Ce n’est pas une transgression dès
lors que cela renvoie à un acte dûment réfléchi et répondant à un souhait exprimé par un
malade dans une situation sans issue. Il s’agit de l’expression de l’éthique appliquée devant un
sujet complexe, mais non insolite, qui conduit à un consensus pragmatique dans l’expression
de la liberté de chacun.

1.8 Le Comité Consultatif de Bioéthique de Belgique

En 1997, la question de l’euthanasie émerge en Belgique. C’est ainsi que naquit le Comité
Consultatif de Bioéthique (CCB), chargé d’une double mission : rendre des avis et informer.
Le CCB remet des avis sur demande (pouvoirs publics, ministères, parlement, comité
d’éthique) ou sur initiative. Sa mission d’information s’adresse tant aux pouvoirs publics
qu’au public de manière générale.
Le CCB n’impose pas, il donne des avis et cela a une conséquence essentielle : c’est celle
d’admettre implicitement le clivage philosophique existant entre les divers réseaux
hospitaliers que compte le pays et cela a permis de clarifier les débats et de comprendre
certaines convergences.

L’avis n°1 du CCB date du 12/05/1997 et a fait apparaitre des divergences irréductibles sur la
question suivante : « l’acte de l’euthanasie est-il moralement et éthiquement acceptable ? »
C’est ainsi que le CCB a émis 4 propositions et a engagé un large débat démocrate. Le Sénat a
pleinement hérité d’un riche débat pour tenter de trancher entre ces 4 propositions.

▲ Les 4 propositions qui ont initialement été émises en Belgique :

1) Modification législative dépénalisant l’euthanasie et s’appuyant sur l’idée que la loi


doit garantir explicitement le droit de tout individu de disposer lui-même de sa vie et
de vivre selon ses convictions propres et en respectant celles des autres. (J’ai la liberté
de disposer de mon corps et de ma vie comme je le souhaite) : Position maximaliste
option pas retenue !

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2) Régulation procédurale à postériori de l’euthanasie décidée en colloque singulier (=
discussion entre le patient et le médecin). Cela équivaut à un alignement sur le
compromis hollandais qui propose un maintien symbolique de l’interdit pénal de
l’euthanasie, tout en définissant les conditions dans lesquelles le médecin pratiquant
l’euthanasie pourra être considéré d’un point de vue juridique en état de nécessité
(donc pas condamné). Dimension procédurale après, option retenue
Remarque : Le compromis hollandais, maintenant symboliquement l’interdit pénal, est
toujours d’application, même en Belgique. Dépénaliser conditionnellement cela ne
veut pas dire que l’euthanasie est un droit, cela veut dire qu’il y a des conditions à
respecter. Ces conditions excluent un ensemble de personnes.

3) Régulation procédurale à priori des décisions médicales : l’euthanasie ne peut être


envisagée qu’après une consultation collégiale : Tribunalisation de la mort. Des
membres d’un comité d’éthique ainsi qu’un curé sont dépêchés et déterminent si l’on
accepte ou non la demande. Cette proposition a, sans surprise, remporté de très
nombreuses voix de le part des représentants catholiques. (des gens décideraient pour
la personne ) dimension procédural avant, pose problème.

4) Maintenir simplement l’interdit légal : pratiquer une euthanasie est, et doit rester, un
crime.

Le débat a eu lieu, les 4 propositions ont été mises sur la table, 5 positions distinctes vont
découler de ces 4 propositions initiales.

1) L’euthanasie est intrinsèquement mauvaise, position absolutiste. La religion indique


le caractère sacré de la vie humaine et l’interdiction d’y mettre fin. La société ne peut
jamais accepter qu’on tue un être-humain innocent malgré sa demande →
l’euthanasie doit rester interdite.

2) Position plus nuancée défendue par des personnes qui dans des cas exceptionnels
souhaite, par compassion, hâter la mort d’un malade pour mettre fin à ses souffrances.
L’euthanasie reste une transgression et ne concerne que la seule conscience du
médecin, on considère que le problème est médico-éthique et ne nécessite pas que la
loi soit modifiée.

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3) Certains veulent faire de l’euthanasie « un meurtre par pitié ». Un délit spécial puni
moins sévèrement que l’homicide volontaire (c’est le cas encore actuellement au
Danemark, en Finlande, en Norvège, et en l’Allemagne). La notion de personne
vulnérable et du moindre mal sont des notions éthiques centrales ici.
La règle du moindre mal : Dans les cas où les soins palliatifs et thérapeutiques de la
douleur restent inefficaces, que faire ? La réponse est claire : dans une situation où,
quoi que l’on fasse, on aboutit à un résultat indésirable, il faut avoir le courage de
provoquer délibérément l’issue la moins indésirable.

4) D’autres qui préconisent la législation de l’aide médicale au suicide des malades


incurables en phase terminale. (Cas de l’Oregon)

NB : En suisse, la mentalité est différente. Comme nous le verrons plus loin, on parle en
Suisse de suicide assisté, et cela n’est condamnable que s’il est réalisé dans un but intéressé.
Ce qui signifie qu’en Suisse, si on aide quelqu’un à mourir, la personne qui l’aide doit
prouver qu’elle n’a aucun lien avec la personne qu’elle a aidée (surtout aucun lien financier).
Et donc, si on fait partie d’une même famille, on ne pourra pas aider au suicide.

5) Ceux qui se basent sur l’autonomie de l’individu, le droit à l’autodétermination et la


liberté de choisir sa vie. Ils proposent de décriminaliser ou de dépénaliser
l’euthanasie volontaire et l’aide médicale au suicide selon des modalités qui
pourraient s’inspirer du modèle hollandais.

C’est la cinquième position qui a finalement été retenue.

1.9 Conceptions philosophiques

Sur le plan philosophique, la mort a toujours été au centre des débats et des questionnements.

Il y a deux types d’attitudes :

 Une première attitude selon laquelle la mort constitue une initiation à un mieux-être,
idée selon laquelle notre vie terrestre ne serait qu’une escale. La mort n’est pas
négative, elle n’est pas la fin, mais le début d’une vie éternelle.

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 Une seconde attitude qui tend quant à elle à ce que l’on ne considère pas la mort
comme quelque chose de positif ou négatif, elle n’est que la fin inéluctable d’une
aventure individuelle.

Le problématique de la mort a été abordée dans les traditions religieuses qui veulent y voir
une forme de continuité, la mort ne serait qu’une étape transitoire, une virgule. Il n’y aura
qu’une rupture passagère, cette continuité répond en cela, à la plus grande souffrance qui est
la solitude. Le succès des grandes religions repose sur le fait d’être parvenu à taire cette
angoisse existentielle en offrant une réponse rassurante, la promesse d’un « après ».

▲ Approche socio-philosophique du bien mourir et de la bonne mort :

Les formes et le contenu de la « bonne mort » et du « bien mourir » ont constamment évolué
au cours de l’histoire.

La question du bien mourir est la question que nous nous posons tous quand on parle de la
mort. La manière de vivre, de comprendre et de voir la mort aujourd’hui correspond à la
manière dont notre société aborde les choses. Les multiples conceptions anthropologiques
actuelles entrainent des visions extrêmement différentes et même parfois contradictoires du
bien mourir.
Mais dans tous les cas, la quête du bien mourir s'affirme avant tout comme une aspiration à
une mort sans souffrance.

La mort entretient toujours un rapport étroit avec l’imaginaire social. Selon Philippe Ariès la
« bonne mort » signifiait mourir à la maison, entouré des siens. C’est une idée qui existait
dans les années 50. La mort était un événement familial, paroissial, religieux et social. Au
moment où la personne s’apprêtait à mourir, le médecin se retirait et le prêtre prenait le relais,
la famille restait près du malade conscient que son heure était venue. Il s’agissait d’un
évènement collectif, la mort était partagée.

Dans les années 70, on entre dans une aire un peu plus moderne, la mort a pris une autre
forme, dès l’annonce de la maladie, le malade entre à l’hôpital. Le médecin est davantage en
mesure de réaliser un prolongement extraordinaire. Et si le pronostic s’avère être que la mort
est prochaine, la famille est mise au courant. Parfois, une véritable conspiration du silence
s’organise alors entre les médecins, les infirmiers et la famille car il faut éviter une souffrance
inutile au malade condamné. On souhaite lui épargner l’état de désespoir que susciterait

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l’annonce d’une nouvelle désastreuse. Souvent on cache donc même les choses au patient.
D’ailleurs, à cette époque, on n'admettait pas la famille à l’hôpital et notamment les petits
enfants des personnes âgées. Un tel contact risquait d’être trop dur pour les enfants, on ne
voulait pas ça dans les années 70. La personne mourante était donc d’une certaine
manière privée de la mort partagée. Dans les années 70, la mort était mise de côté. Et déjà à
cette époque, il y a un troisième modèle qui prenait forme, c’est-à-dire un modèle qui critique
les excès de la mort médicalisée. Les croyances et valeurs sur lesquelles repose l’émergence
de ce nouveau modèle de gestion du mourir doivent être recherchées dans l’idéal d’une mort

douce, acceptée et pacifiée qui prédomine dans le champ des soins palliatifs. S’établit alors un
autre discours plus général, l’opposition à l’acharnement thérapeutique se généralise. Cette
opposition met l’accent sur la responsabilité que la personne malade devrait avoir dans la
participation aux décisions qui la concerne. Naissent ainsi les soins palliatifs, l’idée de
testament de vie, et le droit à l’arrêt de traitement.
Avec l’émergence des soins palliatifs, on assiste à une redéfinition des critères de la bonne
mort.

Au cours des dernières décennies, un quatrième modèle émerge. Ce modèle défend le droit à
la mort ou à la mort digne, cette nouvelle manière d’aborder la mort est assurément plus
adaptée aux situations nouvelles engendrées par le développement de la médecine et la
reconnaissance de l’individu. Ce nouveau modèle repose sur le droit de la personne de
déterminer le moment de sa mort. Il est clair que c’est la mise en place de cette réflexion qui a
permis d’amener l’euthanasie.

Notons que l’euthanasie peut être réalisée au sein de la résidence du patient. La présence de
proches au côté de la personne est autorisée. La mort survient après quelques minutes de
sommeil profond. Quand cela est pratiqué dans les conditions légales et que ces critères
favorables sont réunis, c’est une fin de vie beaucoup plus humaine. Une mort digne.

La notion de dignité humaine présente des dimensions multiples, aux niveaux philosophique,
religieux, et juridique. La dignité de l’être humain n'est pas seulement un droit fondamental en
soi, mais constitue la base même des droits fondamentaux. Il est évident que l’homme ne doit
pas perdre sa dignité du seul fait qu’il est malade, inconscient, dément, ou à l’agonie.

20
1.10 L’évolution de notre perception de la souffrance

À partir du 20ème siècle, la souffrance ne joue plus le rôle pédagogique que lui attribuait la
moralité chrétienne. Autrefois, on « offrait » nos souffrances, notre douleur, à Dieu. Les
chrétiens voyaient la souffrance comme l’occasion de participer à la rédemption et de mériter
le ciel. Ce paradigme apparait désormais comme absurde aux yeux de la majorité des gens
habitués au confort et au soulagement généralisé de la douleur (aspirine, anxiolytiques, etc.).
Le monde chrétien s’est détourné de cette conception de la douleur, de cette morale doloriste,
conception selon laquelle la douleur est une mise à l’épreuve, elle devait être accueillie et
endurée, pour se tourner vers un modèle où l’on l’accompagne et aide l’individu qui souffre
jusqu’au bout. C’est dans cette perspective sociale et religieuse que le monde chrétien investit
dans les soins palliatifs. L’idée des soins palliatifs est née dans le monde chrétien.

L’image d’une bonne mort, la hantise de la souffrance sont des choses qui nous interpellent. Il
est clair que ce qui nous fait peur c’est de souffrir, la souffrance et la perspective de la
déchéance nous terrifient. La souffrance est, dans tous les cas, injustifiable.

Elisabeth Kübler-Ross4 a identifié différents stades émotionnels par lesquels passe toute
personne à l’agonie (ces différents stades peuvent bien entendu survenir dans un ordre
différent) :

1. La dénégation ou le déni : « Ce n'est pas possible, vous devez faire erreur. »


2. La colère : « C’est injuste ! Pourquoi moi et pas un autre ?! »
3. Le marchandage : « Je ferai tout ce que vous voudrez, mais faites-moi vivre encore
quelques années de plus. »
4. La dépression/le découragement : « Je vais mourir… Et alors ? »
5. L’acceptation : « Je suis prêt. »

La mort fonde la culture, ce que les gens font de la mort, la façon qu’ils ont de l’aborder, tout
cela se retrouve au cœur de notre culture et façonnent nos mythes, rites, cultes et plus
globalement notre façon d’être au monde. Rendre un culte ce n’est pas seulement se trouver

4
Elisabeth Kübler-Ross est une psychiatre helvético-américaine, véritable pionnière de l'approche des soins
palliatifs pour les personnes en fin de vie.

21
en communion face à un objet sacralisé, c’est aussi projeter son être sur un réceptacle qui lui
confère un sens.

À cet égard, on peut relever l’importance que peuvent revêtir les ritualisations, un rite à 3
fonctions. Un rite représente :

o Le respect d’une réalité sacrée


o Le moyen d’inscrire un événement dans la collectivité des hommes
o Faire entendre un système de référence ou de croyance par lesquelles l’homme se
dit à lui-même ce qu’il croit de lui, de l’homme et de son infini.

C’est sans doute pour ces raisons que mêmes dans les cérémonies les plus laïques, les rites
continuent d’exister comme expression de la communauté religieuse. Mais si les rituels
marquent d’une pierre blanche des moments dits importants de la vie, c’est dans le quotidien
que l’individu trouve ou non une réponse à cette question qui contribue à définir sa
personnalité.

Levinas5 nous dit « La vie quotidienne, loin de constituer une chute, loin d’apparaitre comme
une trahison de notre destin métaphysique, émane de notre solitude et forme
l’accomplissement même de la solitude et de la tentative infiniment grave de répondre à son
malheur profond. » Pour lui, c’est au départ de la solitude que se construit l’idéal du social,
lequel se réalise par fusion dans les relations de face à face, dans la relation que le sujet
entretient d’abord avec un visage. Et c’est ainsi que la temporalité cesse d’être simple, la
situation de face à face serait l’accomplissement même du temps, l’empiètement du présent
sur l’avenir. Le visage est ce qu’on ne peut tuer → tu ne tueras point, ce qui empêche de tuer,
mais aussi de se tuer. Autrui permet de donner du sens au temps, d’assumer la temporalité
autrement que dans l’attente sans espoir.

C’est bien dans le regard de l’autre que se construit notre besoin spirituel et il prend racine
dans la dimension religieuse. Ce besoin peut s’exprimer de manières très diversifiées, allant
de la religion à la philosophie, à l’engagement politique, à la vie professionnelle, la vie
politique, la danse, l’art, la nature, l’amour, etc. Finalement tout peut être chemin
d’expression → On peut parler de besoins psycho-socio-spirituel. C’est ce que relève l’OMS
(1990), le spirituel est repris comme « les aspects de la vie humaine liés aux expériences qui

5
Emmanuel Levinas est un philosophe français d’origine lituanienne. Sa philosophie est centrée sur la question
éthique et métaphysique d’autrui. Pour Levinas, se rapporter à l'absolu en tant qu’athée c'est s'offrir
véritablement au dialogue avec l'Autre et non pas le réduire à l'objet d'un discours.

22
transcendent les phénomènes sensoriels, il est un facteur d’intégration, maintenant ensemble
les composantes physiques, psychologiques et sociales de l’être humain.»

Il y a une dimension qui relève aussi de l’autonomie et de la confiance et donc permet de


désenclaver le spirituel du religieux. Et en ce sens, il est nécessaire de rappeler que
l’autonomie existe grâce à l’exercice de 3 facultés :

o La conscience, le choix
o La spontanéité, la réaction dans l’ici et maintenant, en accord avec ce que l’on est
o L’intimité, c’est à dire l’échange véritable entre deux personnes

On voit encore une fois ici que l’histoire de la mort est donc beaucoup plus compliquée qu’il
n’y parait.

▲ Les situations conflictuelles :

Lorsqu’on parle de la vie finissante, on ne peut pas mettre de côté les positions conflictuelles
qui existent et qui finalement existeront toujours.

Il existe certaines questions où il ne peut tout simplement pas y avoir de consensus. En


Belgique au sein du comité consultatif de bioéthique
(https://www.health.belgium.be/fr/comite-consultatif-de-bioethique-de-belgique), quand il y a
des désaccords, il est indiqué qu’ils ont examiné en profondeur le problème et mentionnent les
différents points de vue existants. On est dans l’éthique du débat, quand on connait tous les
points de vue, on les prend tous en considération et on s’attèle à faire le choix le plus juste. Ce
dernier choix doit être pris par le législateur.

3. La pratique de l’euthanasie en Belgique

1.11 La loi de 2002

1.11.1 En Belgique, la loi de dépénalisation


conditionnelle de l’euthanasie de 2002 régit
l’euthanasie, elle définit l’euthanasie comme suit :
« acte pratiqué par un tiers, qui met

23
intentionnellement fin à la vie d'une personne à la
demande de celle-ci ». Mais l’euthanasie ne peut
se résumer à un simple acte mettant fin à la vie
d’un malade, car ce geste est précédé d’une
procédure complexe. On la qualifie de sérénité
partagée. (L'euthanasie, Une sérénité partagée.
Une question de santé publique Marc Mayer, Ed
Memogramme (collection ISIS),ISBN 2-9304718-
96-6,192 pages)

L’euthanasie qui n’est pas un droit est dépénalisé. Le médecin ne commet pas un crime
(contravention, délit, crime) s’il respecte les conditions énoncées.
L’euthanasie est reconnu comme un droit pour chaque malade de poser ses choix en termes de
vie et de mort pour autant qu’il se trouve dans les conditions étiquetées par la loi. Celle-ci
comporte deux cas de figures :

1) La déclaration directe. Le patient est conscient et peut exprimer et écrire sa


demande.
2) La déclaration anticipée de demande d’euthanasie : on peut exprimer ses intentions
ainsi que ses éventuels refus en termes de soins de santé préventivement ou en
prévision du jour où on ne sera plus en capacité de manifester sa volonté. Dans cette
déclaration, le patient encore capable d’exprimer sa volonté, demande de manière
explicite de pratiquer ultérieurement une euthanasie volontaire.

Rappel des critères de l’euthanasie :

 Le patient est atteint d’une affection accidentelle ou pathologique grave ou incurable.


 Le patient est inconscient : le coma, état végétatif ou sa situation est irréversible selon
l’état actuel de la science.

Cette déclaration est valide si elle a été rédigée conformément au formulaire prescrit par la loi
(Cf. Annexe I). Elle doit avoir été établie et confirmée au moins 5 ans à l’avance (du moins
c’était le cas avant le 20 mars 2020, étant donné que la déclaration anticipée est à présent
pérenne) et elle doit avoir été établie en présence de témoins.

24
2) La demande d’euthanasie peut également être pratiquée à la demande expresse du patient,
au moment où il est encore capable d’exprimer sa volonté de mourir. Cette demande doit être
faite par écrit, datée, et signée. Elle peut être rédigée par une tierce personne en présence du
médecin, si le patient est incapable d’écrire.

1.11.2 Les conditions essentielles

▲ Une euthanasie ne peut être pratiquée si et seulement si les conditions essentielles


suivantes sont respectées :

 La demande écrite est formulée de manière volontaire, réfléchie et répétée et ne fait


l’objet d’aucune pression.
 Le patient se trouve dans une situation médicale sans issue.
 La souffrance physique et/ou psychique est constante, insupportable et inapaisable.
 L’état du patient est dû à une affection accidentelle ou pathologique grave ou
incurable.
 Le patient est une personne majeure capable d’exprimer ce qu’elle désire ou le patient
est une personne mineure doté de sa capacité de discernement → Un pédosychiatre
décide de la capacité de discernement du mineur. De plus, pour le mineur, celui-ci doit
être en phase terminale. Enfin, toujours dans le cas du mineur, seule la douleur
physique est recevable.

En Belgique, la loi de 2002 ouvre un droit à la DEMANDE d’euthanasie, mais il ne s’agit pas
d’un droit d’euthanasie, on a le droit de la demander. La loi vise, pour le médecin qui la
pratique, à dépénaliser l’acte moyennant le respect de différents critères précis et d’une
procédure méticuleuse. En aucun cas, le médecin n’est obligé de pratiquer une euthanasie,
c’est au patient de choisir un médecin qui acceptera sa demande.

Le médecin qui réalise l’euthanasie ne commet pas d’infraction pour autant qu’il respecte les
conditions imposées. En d'autres termes, cela veut dire que l’euthanasie est toujours
interdite, elle est possible uniquement si l’on respecte les conditions suivantes :

25
▲ Les conditions concernant les obligations imposées au médecin :

 Le demandeur doit être majeur ou mineur émancipé.


 Le demandeur doit être doté de sa capacité de discernement et conscient au moment de
la demande.
 La demande est formulée de manière volontaire, réfléchie et répétée et ne doit pas
subir de pression extérieure.
 Le patient se trouve dans une situation médicale sans issue et fait état d’une souffrance
physique ou psychique constante, insupportable, inapaisable. Cette souffrance est la
résultante d’une affection grave et incurable.
 Le patient doit avoir été informé de manière claire, compréhensible de son état de
santé, de son espérance de vie, des possibilités thérapeutiques qui lui sont offertes et
aussi des autres possibilités en termes de soins palliatifs.
 S’assurer que le patient ait pu rencontrer les personnes qu’il voulait rencontrer.

Il faut la présence de deux médecins quand la mort est censée survenir à brève échéance.
Quand cela n’est pas le cas, un troisième médecin est nécessaire.

Il y a quatre différences (voir plus loin) quant à l’euthanasie d’un mineur.

1.12 Le rôle de la commission fédérale de contrôle de


l’euthanasie

▲ Modalités après le décès de la personne en lien avec la commission fédérale de


contrôle et d’évaluation de l’euthanasie

La mort qui résulte d’une euthanasie est considérée comme une “mort naturelle” notamment
en ce qui concerne les contrats d’assurance vie, il en est de même pour les actes de décès.

La loi a institué la mise en place d’une Commission Fédérale de Contrôle d’Evaluation


d’Euthanasie (CFCEE) en 2002 : Dans les 4 jours qui suivent l’euthanasie, le médecin doit
faire une déclaration à cette commission.

Cette commission traite les documents d’enregistrement qui lui sont transmis. Elle vérifie si
l’euthanasie a été pratiquée conformément aux conditions essentielles et à la procédure prévue

26
par la loi. Elle comporte 16 membres effectifs (8 médecins, 4 juristes, 4 membres issus des
milieux concernés par la prise en charge de patients avec des maladies incurables). Cette
commission respecte une parité linguistique, une parité philosophique, et une parité des
genres. Cette commission a contribué à l’évaluation de la loi et à l’élaboration de la
déclaration anticipée qui figure désormais dans la loi. La Commission a également pour
mission légale de rédiger un rapport bisannuel qui est transmis à la Chambre des
représentants. La Commission n’a pas légalement de pouvoir d’instruction ou de compétence
pour évaluer le professionnalisme des médecins.

La Commission peut ainsi approuver dans sa globalité une euthanasie pratiquée malgré
certaines lacunes de forme. Elle agit comme tampon entre les médecins et le pouvoir
judiciaire.
Il est à noter qu’il y a parmi ceux et celles qui siègent à cette commission des personnes qui
sont opposées à l’euthanasie.

1.13 Deux cas de figure

▲ Il y a deux situations discernables :

1) Le patient est conscient, capable d’exprimer sa demande et dans une situation médicale
respectant les conditions fixées par la loi.

 Il faut une demande écrite, datée et signée par le patient lui-même, en cas d’incapacité
la demande est actée par écrit et signée par un tiers majeur qui n’a aucun intérêt
matériel au décès, ceci en présence d’un médecin.
 L’euthanasie est ouverte au mineur depuis 2014, mais le patient mineur doit être doté
de la capacité de discernement, faire état de souffrance physique (les souffrances
psychiques ne sont pas prises en compte pour les mineurs) et doit se trouver dans une
situation médicale sans issue entrainant le décès à brève échéance. Les représentants
légaux du mineur doivent donner leurs accords concernant sa demande et il faut la
présence d’un pédopsychiatre.

27
2) Le patient est incapable d’exprimer sa demande, car plongé dans un état d’inconscience
irréversible et dans une situation médicale respectant les conditions fixées par la loi.

 Il a rédigé une déclaration anticipée comme prévu par la loi avec les témoins
obligatoires (Cf. Annexe I).

NB : Il s’agit de la situation plus délicate, car le patient ne sait pas s’exprimer et le médecin
peut se retirer donc plus facilement. Il s’agit d’un document écrit où la personne donne son
accord pour qu’un médecin pratique à l’avenir une euthanasie dans les conditions fixées par la
loi, dans l’hypothèse où le patient ne pourrait plus manifester sa volonté, car inconscient de
manière irréversible (coma, état végétatif). Il fallait autrefois renouveler ponctuellement ce
document pour qu’il soit valide mais la validité est depuis peu pérenne.

Ce type de déclaration n’est pas accessible aux mineurs d’âge.

 Le médecin qui pratique l’euthanasie sur base d’une déclaration anticipée doit
préalablement constater que le patient souffre d’une affection accidentelle
pathologique grave et incurable.
 Le patient est inconscient et cette situation est irréversible en vue de l’état actuel de la
science.

▲ Pour la demande d’euthanasie d’un mineur, il existe donc 4 grandes différences :

- Il faut l’accord des parents.


- L’enfant doit impérativement être en phase terminale.
- la douleur psychique ne peut pas constituer l’unique motif pour la demande.
- Le médecin doit être un pédopsychiatre qui doit marquer son accord.

1.14 Les critiques émises à l’encontre de cette loi

Passons en revue différentes critiques qui ont été formulées à l’égard de cette loi :

1ère critique : Certains la jugent tout simplement inutile car elle ne corrigerait pas la situation
antérieure.

2ème critique : Elle est émise par ceux qui fustigent la loi qui, en prévoyant d’avance les cas où
l’euthanasie est envisageable, et définit une procédure à suivre, transforme ce qui devait rester
un cas de conscience en une simple démarche administrative standardisée. Autrement dit, on

28
ne contrôlerait plus le pourquoi mais bien le comment. C’est l’argument employé par les
personnes qui souhaitent que la question reste médico-éthique. Cet argument se rapporte à une
certaine forme de paternalisme médical. La loi serait une contrainte posée à la liberté
individuelle et au sens de la responsabilité.

3ème critique : Il y a ceux qui y voient un premier pas pour banaliser le geste concret de tuer et
par là affaiblir le sens de l’interdit légal. C’est l’argument de ceux qui ne comprennent pas
que dépénaliser n’équivaut en rien à lever l’interdit, car cela reste toujours interdit sur le plan
symbolique.

4ème critique : Tous conviennent qu’il faut pouvoir dénoncer et poursuivre l’euthanasie dite
économique, celle accomplit par intérêt. Contrairement à la loi qui encadre le suicide assisté
en Suisse, la loi belge n’explicite pas que l’on ne peut pas pratiquer l’euthanasie s’il y a un
intérêt quelconque pour un tiers derrière. Il est clair que l’on ne peut pas tenir compte de la
demande s’il y a une pression de la famille dans la discussion.

5ème critique : D’autres fustigent les conditions prévues par la loi qui seraient tellement
restrictives et lourdes en termes de procédure qu’on ne voit pas en quoi cela libèrerait le
médecin. De plus, ils fustigent le fait que les conditions prévues par la loi excluent certains
cas d’euthanasie. Il est vrai que la loi n’aborde initialement que le patient conscient. Les
procédures existent en unités de soins intensifs (USI) où les décisions doivent être prises en
accord avec toute l’équipe pluridisciplinarité de soin et du corps médical qui refusent
l’acharnement thérapeutique. Mais dans tous les cas, il semble que les mentalités évoluent, il
devient plus aisé d’aborder ouvertement ces questions dans les institutions. Si l’on peut parler
de ces questions, c’est que cette loi a permis une chose fondamentale, c’est de permettre
qu’on puisse en parler, rien que le fait de pouvoir en parler et en débattre, c’est un acquis
extraordinaire.

1.15 Les éléments qui ont contribué à la dépénalisation

▲ Comment expliquer que nous sommes parvenus à dépénaliser l’euthanasie en


Belgique ? Quels éléments ont contribué à rendre cela possible ?

29
- Nous ne sommes plus dans une société paroissiale, il y a eu une réelle évolution
philosophique. La société a évolué. La douleur n’est plus considérée de la même manière
qu’autrefois.
- Il y a le fait qu’en 2002, il n’y avait pas de catholique dans le gouvernement qui a
contribué à faire voter cette loi. En effet, il y avait en 2002 des partis libéraux flamands et
des libéraux socialistes au gouvernement, et pour la première fois, il n’y avait pas de parti
catholique. Ça c’est une raison sociologique. Les catholiques ont longtemps dominé la
vie politique belge, sur les 51 premiers ministres de l'histoire belge, 37 étaient issus d'un
parti catholique.
- Il y a eu de nombreux progrès techno-scientifiques, on est notamment parvenu à mettre
au point des médications pour mieux soulager la douleur (pain clinic – clinique de la
douleur).
- Il est clair qu’on a vécu une forme de basculement de transcendance et qu’on peut
considérer que notre société toute entière fonctionne complètement différemment
qu’autrefois. Nietzsche6 disait que ce qui est sacré : « c’est ce pourquoi on est prêt à se
sacrifier ». Longtemps les hommes se sont sacrifiés pour Dieu, puis on se sacrifiait pour
la Nation. Aujourd’hui, on ne se sacrifie plus ni pour la Nation ni pour un Dieu, mais pour
notre famille et nos proches. Les transcendances sont devenues horizontales alors
qu’avant elles étaient verticales.

1.16 La dépénalisation de l’avortement en Belgique

▲ Un élément qui a eu une importance majeure car il a ouvert la voie, c’est la


dépénalisation partielle de l’avortement en 1990 :

La question de l’avortement et sa dépénalisation partielle ont eu une incidence politique très


forte. La Belgique a voté la dépénalisation partielle de l’avortement sans raison médicale
jusqu’à 12 semaines de grossesse en 1990.

6
Friedrich Nietzsche est un philosophe allemand du XIX ème siècle. À 24 ans, Nietzsche est nommé professeur de
philologie classique à l'Université de Bâle. Durant ses années d’enseignement, il développe une philosophie dans laquelle
il oppose les valeurs traditionalistes, notamment présentes dans le christianisme, aux valeurs défendues par un
"surhomme", individualiste et indépendant. Nietzsche exprime ses idées dans des ouvrages tels que Le Gai savoir en
1883, ou encore L'Antéchrist en 1896.

30
Ce fut une grande avancée permettant aux femmes de décider en toute autonomie de leur
parcours de vie.

Les débats autour de l’interruption volontaire de la grossesse et les législations qui en


découlent ont joué un rôle important dans les débats sur la fin de vie et l’euthanasie, cela
a permis d’ouvrir le dialogue sur l’interruption volontaire de la vie.

La Société belge pour la légalisation de l'avortement (SBLA) naît en 1970, fondée par le
gynécologue Willy Peers. La même année, le Conseil national des femmes belges organise un
débat sur l'avortement. Le 18 janvier 1973, Willy Peers est arrêté pour avoir pratiqué plus de
300 avortements dans la région de Namur. Les manifestations pour sa libération et la révision
de la loi rassemblent plusieurs centaines de milliers de personnes. Il fut libéré après 34 jours
d’emprisonnement.

L'avortement aux Pays-Bas est légal depuis 1984. Il est autorisé jusqu'à la vingt-quatrième
semaine de grossesse, après une période de réflexion de cinq jours suivant la première
rencontre avec un médecin. Il s'agit du pays d'Europe avec la législation la plus progressiste,
et dont les délais d'avortement sont les plus longs.
À partir de 1984, les Belges qui souhaitaient avorter et qui avaient l’argent nécessaire
faisaient le voyage → cela constituait une importante forme d’injustice sociale en termes
d’accessibilité financière puisque les personnes les plus démunies n’y avaient donc pas accès.

Au niveau des législations belges, l’avortement est définitivement dépénalisé en 1990 avec la
loi de dépénalisation partielle dite loi Lallemand-Michielsen, du nom de Roger Lallemand,
ancien président du Cercle du Libre Examen de l’ULB, qui était à l’époque sénateur socialiste
et qui avait défendu comme avocat Willy Peers en 1973, et de Lucienne Michielsen, membre
du parti libéral flamand.
L’avortement devint un droit en Belgique. Mais la loi de dépénalisation est le fruit d'un
compromis politique délicat…

Dès 1986, le mouvement catholique Vie Féminine s’était positionné pour la dépénalisation
partielle de l'avortement. Il y avait donc les laïques qui étaient les initiateurs et les porteurs de
ce projet de loi mais également aussi des catholiques qui y étaient favorables. C’est parce
qu’une partie des catholiques était aussi favorable qu’on a pu avancer dans les

31
législations et que la loi sur l’avortement a pu passer en Belgique.

Le Roi Baudouin n’était en revanche pas favorable, il jugeait cette loi nécessaire pour son
peuple, mais en tant que catholique profondément croyant et conservateur, il ne pouvait se
résoudre à y apposer sa signature. Or il s’agissait là d’une condition sine qua non pour qu’elle
puisse être votée et devenir effective. Il s’agissait donc d’un problème de conscience. Tant les
ministres que l'entourage du Roi ont tenté de le convaincre de signer la loi. Ils lui ont proposé
de publier en même temps une lettre où il expliquerait sa position personnelle. Mais le Roi
estimait qu'il ne pouvait pas séparer sa personne de sa fonction.
Le Roi a donc décidé de « démissionner » le temps d’une journée afin que la loi puisse être
votée. Le gouvernement a dû signer lui-même la loi. Le lendemain, le Roi repris sa place sur
le trône. Certains déplorent que le Souverain ait fait passer des préoccupations personnelles
avant l'intérêt général, mais le principal est que cette loi ait finalement pu être votée.

Rien n’est jamais acquis, d’ailleurs certains pays qui avaient dans un premier temps
dépénaliser l’avortement sont revenus en arrière, comme la Pologne par exemple. Cela illustre
que ces débats éthiques ne sont jamais véritablement réglés car les conflits de valeurs sont
toujours présents. Quand il y a des compromis il y a toujours des insatisfaits.

Pour que cette loi passe en 1990, il aura fallu 20 ans de militantisme, de lutte et de
débats.

32
Médaille commémorative de la Saint-Verhaegen de 1981

En 2020, une proposition de loi pour dépénaliser totalement l'avortement et allonger le délai
de 12 à 18 semaines a été déposée. La question de sa dépénalisation totale suscite encore de
nombreux débats et de vives tensions entre les partis politiques belges.

33
Les chiffres ci-dessous illustrent l’évolution de notre société (Source : Musée Belvue)

34
1.17 Les changements apportés à la loi en 2020

▲ Changements concernant la législation belge sur l’euthanasie en 2020 :

Le 5 mars 2020, la chambre a adopté à une majorité confortable la réforme de la loi relative à
l’euthanasie tendant à rendre nos déclarations anticipées d’euthanasie pérennes et
règlementant le bon usage de la Clause de conscience 7. Depuis le 24 mars 2020, on peut
considérer que ceux qui font une demande anticipée( elle n’a pas le caractère
contraignant qu’on lui accordait), voit cette demande devenir pérenne, il n’est donc plus
nécessaire de la renouveler. Depuis avril 2020, les nouvelles déclarations anticipées ou
confirmées n’auront plus de délai de péremption. Attention, la loi n’est pas rétroactive c’est-à-
dire que ceux l’ayant fait avant cette date (24 mars 2020) doivent la refaire dans les 5 années
après la rédaction de celle-ci.

Pour ce qui est de la Clause de conscience, désormais aucune clause écrite ou non écrite ne
pourra empêcher un médecin de pratiquer une euthanasie dans les clauses légales → La
Clause de conscience est individuelle !

1.18 Quelques chiffres à titre informatif

En termes de statistiques, les euthanasies sont réalisées dans 80 % des cas pour raison de
cancers, dans 10% des cas ce sont des infections neuro-musculaires qui sont rapportées, 2%
pour les infections neuro-musculaires non évolutives, 1% pour les infections pulmonaires non
cancéreuses, 2% pour les infections cardio-vasculaires, puis pour finir 1,5% des cas sont en
lien avec d’autres situations telles que des troubles psychiatriques sévères, notamment des
formes graves de la maladie d’Alzheimer. Ce dernier point pose problème car il y a des
psychiatriques qui considèrent que la réponse au mal-être psychique ne peut aucunement être
l’euthanasie, jamais, c’est souvent une position de principe.

En Belgique, l’euthanasie reste excessivement rare chez les patients de moins de 40 ans (39
cas soit 1,1% du nombre total). En 2019, un mineur d’âge a été euthanasié, il était âgé de 17
ans. Plus de 2/3 des patients qui ont bénéficié de l’euthanasie jusqu’ici avaient plus de 70 ans.
7
Une clause de conscience est le droit reconnu à certains professionnels, dans leur statut légal, de pouvoir
s'opposer à une décision ou de ne pas accomplir un acte comportant des enjeux éthiques importants.

35
Et pour le 1/3 restant, les patients avaient plus de 80 ans. Le groupe de patients le plus
important concerne la tranche d’âge 70-79 ans. En 2020, 8 patients âgés de plus de 100 ans
ont pu être euthanasiés.

Dans 83 % des cas, les médecins ont indiqué qu’une mort était prévisible à brève échéance.
Dans 16 % des cas, la mort n’était pas attendue dans les semaines ou mois suivants, ces
patients-là souffraient le martyr, ils présentaient de multiples pathologies.

4. L’euthanasie au niveau européen

▲ Quels sont les différentes législations qui existent au niveau Européen ?

La légalisation des états-membres est différente en l’absence d’une harmonisation


européenne, il est donc possible de classer les pays en 3 catégories :

- Les pays qui autorisent l’euthanasie


- Les pays où l’euthanasie est interdite mais une forme d’aide à la mort est possible
- Les pays où l’euthanasie est strictement interdite

▲ Les pays qui autorisent l’euthanasie :

Les Pays-Bas : Premier pays au monde à avoir légalisé l’euthanasie sous certaines conditions,
les médicaments mortels sont légalement administrés par un médecin, en cas de maladie
incurable ou de souffrance intolérable, à des patients l’ayant demandé en toute conscience.
C’est une loi votée en 2001 au Pays-Bas qui assure une plus grande sécurité en faveur des
médecins car ils peuvent pratiquer l’’euthanasie sans risque de poursuite judiciaire s’ils
respectent certains critères. En juin 2015, l’association des pédiatres s’étaient publiquement
positionnés comme étant favorables à l’extension de la loi en faveur du droit à la mort aux
enfants de moins de 12 ans. Mais jusqu’à ce jour cela n’a pas été plus loin.

En Belgique : La loi de septembre de 2002 a partiellement légalisé l’euthanasie en insistant


sur les conditions précédemment énoncées. De plus, le parlement a voté en 2014 une loi
autorisant l’euthanasie des mineurs en PHASE TERMINALE. Cependant, la demande est
soumise à l’accord des deux parents et à l’évaluation du discernement de l’enfant.

36
Le Luxembourg : L’euthanasie a été légalisée en mars 2009 en cas de situation médicale
sans issue. Mais elle est complètement interdite aux mineurs.

▲ Les pays où l’euthanasie est interdite mais une forme d’aide à la mort est possible :

Certains états permettent l’abstention thérapeutique, les médecins peuvent dès lors mettre un
terme à l’acharnement thérapeutique avec l’accord du patient et/ou de la famille.
L’encadrement de l’euthanasie passive est variable. Pour rappel, l’euthanasie active, c’est ce
que l’on pratique en Belgique. Certains pays comme la France ont voté une loi pour
règlementer la fin de vie des personnes en souffrance, d’autres n’ont pas légiféré, et seule la
pratique et les décisions des tribunaux importent.

La France : L’euthanasie est illégale mais le code pénal distingue l’euthanasie active
(associée à un homicide) et l’euthanasie passive, c’est-à-dire l’abstention thérapeutique
considérée comme non-assistance à personne en danger. La loi Leonetti8 a été approuvée en
2005, ce texte traitant de la fin de vie et instaure un droit à la sédation profonde et continue
jusqu’au décès pour les malades en phase terminale. Cette loi ne permet cependant pas
l’euthanasie ni le suicide assisté, mais seulement la sédation du patient atteint d’une affection
grave et incurable dont le pronostic vital est engagé à court terme. Le patient peut manifester
sa volonté de refuser l’acharnement thérapeutique, mais le médecin peut y déroger lorsque ce
refus apparaît, selon lui, non approprié ou non conforme à la situation médicale. Dans le fond,
il y a un conflit entre la notion d’autonomie et le fait que c’est le médecin qui décide toujours.

Au Danemark : L’euthanasie active est interdite mais un patient incurable peut décider de
l’arrêt des traitements et depuis 1992, les Danois peuvent faire un testament médical que les
médecins doivent respecter et l’euthanasie passive doit être pratiquée lorsqu’elle est réclamée.

En Italie : L’euthanasie est interdite (= homicide) mais le droit de refuser les soins est
reconnu par la constitution (même dynamique que dans l’euthanasie passive).

En Allemagne : L’euthanasie passive n’est pas illégale, tout comme le fait de débrancher la
machine si le patient a donné son consentement. Dans l’éventualité où le patient est dans le
coma et ce de façon irrémédiable, la famille peut consentir à sa place. Si l’administration d’un
8
Jean Leonetti est un homme politique français. Très impliqué dans les questions d'éthique, notamment
médicales, Jean Leonetti a présidé en France la « Mission parlementaire sur l’accompagnement de la fin de vie »
en 2004, qui a conduit à la rédaction d'un rapport Léonetti. Ce rapport contient entre autres les besoins des
professionnels de santé et de la population concernant la fin de vie. Ce premier rapport a conduit à la « loi
relative aux droits des malades et à la fin de vie » de 2005, loi à laquelle il donna son nom.

37
médicament mortel est condamnée, la cour d’appel de Frankfort a fait jurisprudence,
l’euthanasie peut être décidée si elle correspond à la volonté du patient sans ambiguïté et donc
ici, l’acte est considéré comme un suicide.

En Espagne : Elle vient de l’autoriser alors qu’ils étaient dans une situation assez complexe
depuis la dépénalisation du suicide assisté en 95. Les peines d’emprisonnement ne
s’appliquent pas lorsque le patient a fait une demande. Ils ont longtemps tergiversé mais
aujourd’hui l’euthanasie est acquise.

En Hongrie et en République Tchèque : Les malades peuvent refuser les traitements.

En Slovaquie : L’euthanasie et le suicide assisté sont illégaux. Néanmoins, le personnel


médical peut atténuer la douleur des malades et des mourants à leur demande, en respectant la
législation.

La Suisse : En Suisse, l'assistance au suicide n'est pas punissable, pour autant qu'elle ne
réponde pas à un mobile égoïste. Nous développerons ce point plus loin.

▲ Les pays où l’euthanasie est strictement interdite :

En Grèce, en Roumanie : L’euthanasie sous ses différentes formes est interdite et un non-
respect peut amener à un emprisonnement allant jusqu’à 7 ans de prison.

En Croatie : L’euthanasie est punie au même titre qu’un homicide.

En Pologne : L’euthanasie est passible de 3 mois à 5 ans de prison mais dans certains cas
exceptionnels le tribunal peut atténuer la peine voire renoncer à l’infliger.

En Irlande : La loi ne fait pas mention d’euthanasie mais tout forme d’assistance à la mort ou
au suicide est illégale et passible de 14 ans de prison. La différence avec la Pologne est
qu’elle parle de l’euthanasie alors que l’Irlande n’en parle pas.

En Italie : Le suicide assisté a été dépénalisé en septembre 2019 mais reste interdit par la loi.
Il dépénalise le suicide assisté tout en disant que cela demeure formellement interdit par
la loi, c’est un cas très particulier et assez déconcertant.

Le Portugal : Fin janvier 2021, le Parlement portugais avait voté en faveur de la


dépénalisation du suicide assisté et de l’euthanasie, mais la Cour constitutionnelle a annulé la
loi autorisant l’euthanasie le 15 mars 2021. Saisis par le président de la République, Marcelo

38
de Sousa, les juges ont bloqué la loi votée à une large majorité par la Parlement. L’euthanasie
demeure donc finalement interdite. 80 % des Portugais se disent catholiques, l’opinion
publique est contre l’euthanasie, massivement contre.

▲ Aujourd’hui, à travers le monde, il y a 7 pays où l’euthanasie est dépénalisée. Le


premier a été les Pays-Bas, puis la Belgique, le Luxembourg, le Canada, la Nouvelle-
Zélande, et pour finir l’Espagne.

1.19 La France et la loi Leonetti

Le Comité consultatif national d’éthique français (CCNE) a clairement déclaré qu’il interdit le
suicide assisté/l’euthanasie, mais les associations parlementaires votent néanmoins des lois
qui y sont favorables.

Le Comité ne s’y oppose pas en disant ce n’est pas moralement acceptable, mais ils disent
qu’il n’y a pas eu le consensus social nécessaire pour l’approuver en France. Il s’est malgré
tout dégagé un consensus qui admet que l’on meurt très mal en France. L’ancien député
Leonetti qui a donné son nom à la loi a partagé ce même constat. On met des malades
souffrant dans des situations d’indignité, qui les font réclamer d’abréger leurs souffrances.
Dans l’esprit de Leonetti rendre la fin de vie plus sereine, c’est entrer dans le conflit entre le
principe d’autonomie et de bienfaisance, car en France c’est toujours à l’heure actuelle le
médecin qui décide.

Le Comité donne une série de recommandations pour permettre une meilleure application de
la loi de Leonetti, notamment :

 Un plan gouvernemental de développement des soins palliatifs


 Proposer les soins palliatifs au patient dès l’annonce d’une maladie grave et incurable
et pas seulement en fin de vie

En France, il y a l’association “Pour le droit de mourir dans la dignité”. Pour eux le corps
médical a sa part de responsabilité dans la souffrance des patients en fin de vie. Aujourd’hui,
la loi pourrait être mieux appliquée, mais ce sont les médecins qui décident de ne pas

39
l’appliquer. Malgré cela, même si la loi serait appliquée correctement, cela ne réglerait bien
évidemment pas tous les problèmes. Le gouvernement français a déjà indiqué que la fin de vie
ne participerait pas au projet de loi de bioéthique.

Les choses bougent lentement, mais cette loi Leonetti autorise pour les personnes souffrant
d’une maladie grave et incurable, en phase avancée ou terminale, une sédation profonde et
continue. Ceci jusqu’à la mort, en lien avec une analgésie pour atténuer les souffrances. Cette
loi met fin au principe d’acharnement thérapeutique et permet au patient de demander l’arrêt
d’un traitement médical trop lourd.

▲ Jean Leonetti a rendu un rapport en 2004 qui a contribué à l’émergence d’une loi
très importante en France en 2005. Voici les points forts de la loi Leonetti :

1. Interdiction de l’obstination déraisonnable : les actes ne doivent pas être poursuivis


par une obstination déraisonnable lorsqu'ils paraissent inutiles / disproportionnés ou
n’ayant pas d’autre effet que le maintien artificiel de la vie. Ils peuvent être suspendus
ou ne pas être entrepris, dans ce cas le médecin assure la dignité du mourant et la
qualité de sa vie en dispensant les soins palliatifs.

2. Soulagement des souffrances même si cela abrège la vie, à la condition d’informer le


patient, la ou les personne(s) de confiance, ainsi que ses proches : Si le médecin
constate qu’il ne peut soulager les souffrances d’une personne en phase avancée ou
terminale d’une affection grave ou incurable, quelle qu’en soit la cause, si ce n’est en
lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger la vie
(double effet), il doit en informer le malade, les personnes de confiance et la famille de
ce dernier. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.

3. Respect du choix réitéré du patient lorsqu’il refuse un traitement à condition qu’il


soit correctement informé des conséquences : Lorsqu’une personne en phase avancée
ou terminale d’une grave ou incurable, quelle qu’en soit la cause, décide de limiter ou
d’arrêter tout traitement, le médecin doit respecter sa volonté après l’avoir informé des
conséquences de son choix. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.
Le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de fin de vie en

40
dispensant des soins palliatifs.

4. Procédure collégiale pour toute décision de limitation ou d’arrêt thérapeutique active


lorsque le patient n’est pas en état d’exprimer sa volonté : Lorsque la personne
n’est pas en état d’exprimer sa volonté, la limitation ou l’arrêt de traitement
susceptible de mettre sa vie en danger ne peut être réalisé sans avoir respecter la
procédure collégiale définie par le code de déontologie médicale et sans que la
personne de confiance, la famille et/ou les personnes proches soient informées. Le cas
échéant, la directive anticipée de la personne est consultée. La décision motivée de
limitation ou d’arrêt de traitement est inscrite dans le dossier médical.

5. L’obligation de sauvegarde de la dignité du mourant et la possibilité des soins


palliatifs : Prise en compte des directives anticipées, toute personne peut rédiger les
directives anticipées, elles seront prises en considération à condition qu’elles aient été
établies il y a moins de 3 ans.

Les modifications de la loi et l’introduction de nouveaux articles sont complétés par la


modification du code de déontologie médicale en France qui inscrit que :

a. Le médecin peut renoncer à entreprendre ou poursuivre des traitements qui


apparaissent inutiles, disproportionnés ou qui n’ont d’autres effet que le maintien
artificiel de la vie.
b. Il n’a pas le droit de donner délibérément la mort.

La France ne se s’est donc pas inspirée de ce qui est fait en Belgique, au contraire, les
Français sont opposés aux principes appliqués en Belgique.
Il faut proposer quelques postulats et éléments de réflexion. La question éthique à propos de
l’euthanasie se poserait véritablement si l’homme était immortel ou si les hommes mourraient
tous au même âge. Il n’y a pas une éthique, mais des éthiques, il existe une tension entre le
concept d’autonomie et de bienfaisance. Le médecin aura tendance à se dire qu’il applique les
règles médicales, car c’est pour le bien-être du patient, mais ce positionnement paternaliste
engendre une tension avec l’autonomie du patient. Et toute décision médicale aura un impact
sur la vie du patient, agir ou ne pas agir, c’est toujours faire quelque chose. Toutes les

41
décisions humaines ne sont pas systématiquement raisonnées, dans la demande d’euthanasie,
on exige subitement du patient qu’il ait une réflexion ou une position aigue en matière
d’éthique.

L’Institut Européen de Bioéthique (IEB) a publié en avril 2012 un rapport sur les 10 ans
d’application de la loi en Belgique. En réalité, ceux qui dirigent l’institut européen de
bioéthique ne disent pas qui ils sont, mais ce sont des catholiques… Les conclusions sont
tendancieuses et confirment que les opposants à la législation essayent par tous les moyens
d’avancer leurs arguments. Dans la conclusion de ce rapport il est dit : « il existe une
banalisation de l’acte euthanasique qui engendre chez les médecins concernés un sentiment
d’impunité ».

1.20 La situation de l’euthanasie en Suisse

▲ En Suisse, on parle de suicide assisté :

Il y a eu un combat en Suisse pour faire respecter les directives anticipées qui étaient
reconnues dans la législation Suisse. L'article 115 parle d’une incitation aux assistances au
suicide, il y est abordé la question du mobile égoïste c’est-à-dire une motivation liée à l’argent
(lien familial, héritage, etc). Le suicide assisté n’est pas punissable si l’on agit par compassion
et que l’on n'a pas de mobile égoïste. 5 critères doivent être impérativement respectés :

 Il faut que le demandeur ait le discernement


 Il faut que la demande soit sérieuse et répétée
 La maladie dont est atteint le demandeur doit être incurable
 Les souffrances physiques/psychiques dont il souffre sont intolérables
 Son invalidité doit être importante

La feuille de route qui doit être remise aux autorités policières après un suicide assisté montre
évidemment que tous ces critères ont été scrupuleusement respectés. Les critères suisses ne
sont pas très éloignés de ceux de la loi belge, mais il ne s’agit pas d’une euthanasie →
l’euthanasie par définition est un acte pratiqué par un tiers (=médecin) qui met
intentionnellement fin à la vie d’une personne, uniquement à la demande de celle-ci. Dans le

42
cas du suicide assisté, le patient bénéficie d’une assistance, mais c’est lui qui s’administre le
produit qui conduira à sa mort.

L’assistance au suicide ne relève pas du droit pénal, sauf dans le cas où le mobile égoïste est
avéré. L’article 115 stipule concernant le mobile égoïste que : “Celui qui, poussé par un
mobile égoïste, aura incité une personne au suicide ou lui aura prêter assistance au suicide,
sera, si le suicide a été intenté, puni d’une peine de privation de liberté de 5 ans ou plus, ou
d’une peine pécuniaire.”

Une assistance au suicide reposant sur une motivation altruiste ne matérialise pas le délit
nommé par l’article 115. Le juge pénal n’est pas concerné par un tel geste.

Les débats de l’époque mettent en évidence qu’il faut dépénaliser l’assistance altruiste au
suicide pour 3 raisons principales :

1. La dépénalisation est une conséquence logique de la dépénalisation du suicide lui-


même. Le suicide n’étant donc plus un délit, il n’y a pas de complicité possible, si le
code pénal continue de légiférer concernant le suicide, c’est dans l’unique but de
permettre de punir celui qui induit une malfaisance spécifique dépassant la personne
qui veut mettre fin à ses jours. C’est le sens du motif égoïste, s’il y a une malfaisance
derrière → le motif du geste est considéré comme égoïste.
2. Le suicide n’est pas nécessairement un symptôme de maladie mentale. Or, seul le
suicide pathologique porte en lui-même la nécessité d’une intervention pour
l’empêcher.
3. Le suicide rationnel n’est pas l’affaire de l’état ni du corps médical. L’empêcher
représente une intervention paternaliste illégitime au regard des libertés personnels du
citoyen.

La situation Suisse mérite d’être relevée, l’euthanasie reste interdite, même si le droit laisse
une porte ouverte. Le suicide assisté réalisé par pur altruisme est accepté, mais on ne veut pas
aller jusqu’à autoriser l’euthanasie, celle-ci reste interdite. Celui qui pratique une euthanasie
aura un emprisonnement, mais moins important qu’une personne qui aurait tué quelqu’un
dans d’autres circonstances.

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En Suisse quelques associations se sont développées pour aider au suicide, cela peut se passer
à domicile ou dans des caravanes mobiles, on donne un produit à boire. C’est un service très
onéreux, la préparation d’un suicide assisté varie entre 8000 et 11.000 €.

5. Le don d’organes en général et dans le cas de l’euthanasie


en particulier

1.21 Le don d’organes

Lorsque l’on aborde la thématique de la fin de vie, il y a évidemment une autre question
fondamentale qui se pose, celle du don d’organes. C’est en France que les premières lois
concernant le don d’organes ont vu le jour, puis elles ont rapidement été adoptées également
en Belgique. De prime abord on considère désormais, tout du moins si l’on ne marque pas une
opposition au don d’organes, que l’on est tous présumés donneurs.

Si on donne également notre accord dans le dossier, cela facilite grandement le travail des
équipes, car si tout le monde est présumé donneur, les médecins veulent généralement tout de
même l’adhésion des familles des défunts. Ce qui se passe souvent, c’est que le médecin
contacte les proches afin de déterminer si oui ou non le patient avait marqué son opposition au
don d’organe. La famille, qui doit donc communiquer l’information comme si elle
transmettait le point de vue du patient, donne souvent son propre point de vue.

C’est pour le moins problématique car, en Belgique et dans les pays frontaliers, concernant
ces questions de transplantation, il n’y a pas assez de possibilités de faire des dons d’organes.
Il y a beaucoup de refus où l’on ne parvient finalement jamais à savoir si la décision était bel
et bien le point de vue du patient et non celle de ses proches.
Aujourd’hui le manque d’organes est un problème majeur pour les programmes de greffes et
ce partout dans le monde. Chaque année, des malades qui pourraient être sauvés meurent en
attente d’une transplantation, il est dès lors important d’informer et de promouvoir le don
d’organe. La Belgique est un des pays qui a l’un des taux de greffes le plus important au
monde, ceci est dû à une loi favorable dans ce domaine, mais également à la médecine de
pointe dont nous bénéficions et à l’effort institutionnel.

44
1.22 Le don d’organes en lien avec l’euthanasie

On va maintenant aborder une thématique épineuse : le don d’organes et l’euthanasie. Si le


nombre de potentiels candidats augmentent constamment en raison du vieillissement de la
population, de l’amélioration de la PEC médicale, du nombre de patients présentant des
maladies organiques terminales, et de meilleurs moyens d’aide diagnostic. Le nombre de
donneurs d’organes est resté stable au cours des 10 dernières années, tous les efforts doivent
être entrepris.

La première action est d’informer et de promouvoir. Toute personne décédée étant un donneur
potentiel, sauf si l’on a exprimé son opposition. Il est maintenant également possible de
s’inscrire en tant que donneur d’organes ce qui permet d’éviter les questions douloureuses (le
don d’organes doit être gratuit et anonyme). Le manque d’organe est criant, mais il est
nécessaire de respecter les conditions morales/philosophiques et religieuses de chacun y
compris dans l’expression d’une opposition au don d’organe. Les oppositions semblent
parfois beaucoup plus de l’ordre affectif que religieux. Les aspects religieux peuvent aussi
bien sûr jouer, mais les catholiques ne sont pas du tout opposés au don d’organes
(contrairement aux témoins de Jéhova).

En Belgique, le don d’organes est régi par l’Arrêté Royal du 13 juin 1986 publié en février 87
basé sur le principe de la solidarité présumée “l’opting out” cela signifie que toute personne
n’ayant pas manifesté de son vivant son opposition à cette loi, est présumée consentante avec
le prélèvement d’organes après sa mort. Toute personne âgée de 18 ans et plus peut exprimer
sa volonté de plusieurs manières.

À partir de 13 ans, on peut décider de devenir donneur en se présentant à la maison


communale pour enregistrer la décision en matière de don d’organes. Il est souhaitable de
partager cette volonté avec ses proches, car les membres de la famille au 1 er degré pourraient
s’opposer à notre volonté de donner nos organes au moment venu.

Si on veut exprimer sa volonté explicite en termes de don d’organes, on doit se rendre auprès
d’une maison communale, mais aujourd’hui cela peut également se faire en ligne. Cette
décision sera transférée dans une banque de données (registre national) que les équipes
médicales consultent obligatoirement pour connaitre notre volonté en termes de don

45
d’organes. À noter que toute source d’information exploitable pourra être utilisée par exemple
un simple papier sur lequel la volonté du défunt est inscrite.

▲ En Belgique, la loi qui régit les dons prévoit 4 choses essentielles :

1. L’anonymat du don de sorte que le receveur ne pourra pas connaitre l'’identité du


donneur et inversement
2. La gratuité du don : les coûts liés au prélèvement d’organes et aux soins du donneur
sont pris entièrement en charge par la mutualité des receveurs par ailleurs le commerce
de ces organes est formellement interdit.
3. Respect de l’allocation de l’organe qui est géré de manière scrupuleuse par
Eurotransplant, un organisme qui existe depuis plus de 50 ans et qui gère l’allocation
des organes, c’est à dire qu’en fonction de la gravité des maladies on sait qu’à tel
moment on va intervenir sur telle personne. Eurotransplant organise tous les transferts
d’un pays à l’autre, car cela ne se fait pas uniquement en Belgique.
4. La distinction entre l’équipe du donneur et l’équipe du receveur doit être étanche.
Afin d’éviter le copinage, il ne peut y avoir aucun lien entre l’équipe du donneur et
celle du receveur. L’état de mort cérébrale est établi par 3 médecins différents aux
moyens de critères de diagnostic précis et ces médecins sont indépendants des
différentes équipes de transplantation.

1.23 Les différents types de don

▲ Il existe 3 types de don :

1. Le don à la suite du diagnostic d’une mort cérébrale (donneur à cœur battant) :


ces donneurs sont ceux qui se trouvent en état de mort cérébrale (altération majeure et
irréversible du fonctionnement du cerveau). Ce diagnostic repose sur un ensemble de
critères cliniques précis, dans certains cas on pourrait recourir à certains examens
complémentaires pour confirmer le diagnostic. Pour ces donneurs l’ensemble des
organes peut être prélevé (cœur, poumons, foie, pancréas, intestin) en tenant compte
toutefois de leur état de fonctionnement. Les donneurs en mort cérébrale développent
souvent une instabilité hémodynamique potentiellement sévère qui pourrait nécessiter
la continuité du traitement médical.

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2. Le don après arrêt cardiaque (donneur à cœur non-battant) : Il est devenu
possible de procéder au prélèvement d’organes auprès de patients victimes d’un arrêt
cardiaque. Les critères de Maastricht pour le don d’organes constituent une
classification reconnue qui définit 5 critères pour les potentiels donneurs au cœur
arrêté.
Classification internationale de Maastricht :
a. Classe 1 : L’arrêt cardiaque à eu lieu avant l’arrivée à l’hôpital
b. Classe 2 : Manœuvre de réanimation inefficace
c. Classe 3 : Le patient présentant un problème neurologique majeur et dont les
chances de survie sont si mauvaises qu’on décide de procéder à un arrêt
thérapeutique.
d. Classe 4 : L’arrêt cardiaque est survenu après la mort cérébrale

Les patients de la catégorie 3 sont généralement en soins intensifs. Dans ce cas-ci on peut
prélever les poumons, le foie, le pancréas et les reins.

3. Le donneur vivant : dans certains cas, on peut faire don d’un organe (un morceau du
foie, un rein) à un proche ou à un membre de sa famille en tenant compte des règles de
compatibilité.

En cas de don d’organes, ce n’est en théorie pas la décision de la famille qui prime, mais celle
du médecin. Cependant, certaines familles refusent catégoriquement et le médecin doit alors
accepter qu’on ne pourra finalement pas procéder au don. C’est le piège, les médecins, même
lorsqu’il est clairement établi que le patient a donné son accord de son vivant, tiennent
comptent de l’avis de la famille.

Eurotransplant est un organisme international qui gère l’allocation des organes (l’offre et la
demande) des donneurs de 8 pays qui se sont associés afin de collaborer entre eux : Belgique,
Pays-Bas, Luxembourg, l’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie, la Slovénie et la Croatie. La
zone couverte par Eurotransplant couvre 135 millions de personnes et les avantages de la
collaboration permettent de multiplier les efforts et de trouver le receveur le plus approprié
pour chaque donneur et de n’avoir qu’une liste d’attente centrale. Un don d’organes peut être
stressant aussi pour le receveur, car il faut qu’il soit présent dans la demi-heure et donc avoir
une valise prête en permanence.

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Pour attribuer les organes on tient compte du groupe sanguin, de la maladie du receveur, de
son état de santé, des données morphologiques, et de la comptabilité HLA.

En janvier 2021, il y avait 1350 patients sur la liste d’attente, 1012 enregistrements en 2020 et
794 transplantations d’organes en 2020.
Donc sur 1012 attentes d’organes, 794 ont été transplantés. Les 79 centres de transplantations
d’Eurotransplant gardent toutes les caractéristiques des patients qui attendent une
transplantation d’organes dans la base de données. Dès qu’un donneur est disponible, les
données de celui-ci sont introduites dans la banque centrale.

Quelques chiffres plus anciens illustrant l’implication de la Belgique au sein de ce système

48
Après le prélèvement, les organes doivent être transplantés dans les 12 heures qui suivent,
l’organisation et le transport est donc d’une importance vitale. Lorsqu’un donneur a été
annoncé, Euro-transplant donne via un programme informatique une liste de receveurs
compatibles pour chaque organe.

Pour l’allocation, il y a 4 principes généraux importants :

 Résultats prévisibles après la transplantation donnés en fonctions des paramètres


respectifs des receveurs et des donneurs
 Le degré d’urgence est établi par les spécialistes
 Le temps d’attente et l’équilibre national entre les organes à importer et les organes à
exporter
 Pour plus de sureté, l’organe est également proposé au 2ème patient sur la liste

En d’autres termes, cela signifie que lorsque l’on nous appelle, ce n’est pas sûr à 100 % que
l’organe sera pour nous. S’il y a un quelconque problème d’un côté, il faut pouvoir réagir
promptement et transférer l’organe vers un autre hôpital.

Exemple concret : Homme de 61 ans souffrant d’une sclérose amyotrophique responsable


d’une tétraplégie, d’une paralysie laryngée ne lui permettant plus de s’exprimer correctement
et de troubles de la déglutition nécessitant une nutrition entérale via une sonde d’alimentation.
Depuis quelques semaines, il présente une dyspnée croissante liée à une paralysie
diaphragmatique progressive. Face à sa situation médicale sans issue, le malade émet auprès
de son médecin traitant le souhait de pouvoir bénéficier d’une euthanasie, mais également de
pouvoir être donneur d’organes. Dans son esprit, le fait de pouvoir donner des organes, ne
pouvait pas être dissociable de sa demande d’euthanasie. L’euthanasie a eu lieu en 2017.

Le patient en question remplissait les conditions légales pour que sa demande d’euthanasie
soit prise en compte. Celui-ci souffrant d’une pathologie neurologique isolée, il était
potentiellement également un excellent candidat pour être donneur d’organes. Après
concertation des différents médecins, la procédure est initiée dans le respect du protocole de
don d’organes de l’hôpital. Les services ont rencontré le malade et sa famille pour expliquer
le déroulement de l’euthanasie et du don d’organes, après le décès constaté, le patient a donc
fait don de ses poumons, de ses reins et de son foie. Grace à son don, plusieurs vies ont pu
être sauvées.

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En Belgique, le prélèvement et la transplantation sont réglementés par l’Arrêté Royal de 86
basé sur le consentement présumé du donneur. Le prélèvement est donc possible sur le corps
de toutes personnes enregistrées sur le registre de la population ou depuis plus de 6 moins sur
le registre des étrangers, sauf si le candidat exprime de son vivant une opposition au
prélèvement au registre nationale via sa maison communale. Les prélèvements d’organes
peuvent aussi être effectués sur des patients en mort cérébrale. Ils peuvent aussi s’effectuer
sur des donneurs chez qui le diagnostic de mort est basé sur une objectivation d’un arrêt
cardiaque. Pour ces derniers, il y a la classification de Maastricht précédemment énoncée. La
Belgique a donc amené sur le tapis un cinquième point aux critères de Maastricht avec
l’euthanasie.

L’euthanasie et le don d’organes sont donc deux procédures distinctes, définies toutes deux
par deux cadres légaux stricts, mais elles n’en demeurent pas moins possiblement
conciliables.

Dans la majorité des cas, les patients euthanasiés qui ont fait don de leurs organes présentaient
des cancers, des polypathologies, des maladies cardio-respiratoires et dans 10% des cas, les
patients avaient une maladie du système nerveux ou des troubles du comportement. Les
souffrances étaient mixtes dans la plupart des cas, 38 % étaient uniquement physiques, 5%
étaient uniquement psychiques. Parmi les souffrances psychiques évoquées, on parle de la
dépendance, la solitude, la perte d’autonomie, le désespoir, la perte de sens et de dignité.

Une première mondiale : Le tout premier don d’organe effectué à la suite d’une euthanasie
l’a été à l’hôpital universitaire d’Anvers, en 2005. La Belgique a donc véritablement joué un
rôle de précurseur.

Cette double procédure a été réalisée 25 fois les années suivantes en Belgique. Dans la très
grande majorité des cas, cela s’est auguré du côté de la Flandre avec un rapport de 4:1.
L’analyse des patients euthanasiés desquels des organes ont été prélevés a démontré que tous
ces patients avaient une maladie du système nerveux ou présentaient des troubles mentaux
et/ou du comportement. Ils ont pu faire don d’un ou de plusieurs organes de bonne qualité
avec d’excellents résultats de transplantation. Les autres patients qui ont bénéficié d’une
euthanasie mais qui n’ont en revanche pas pu être donneurs d’organes souffraient d’un cancer
généralisé ou d’une polypathologie qui rendaient leurs organes inexploitables.

50
On constate que si sur le plan éthique cette intervention est désormais bien acceptée, la
procédure reste encore peu connue. Il n’est pas dans les habitudes des équipes soignantes qui
vont pratiquer une euthanasie d’aborder la question du don d’organes. On attend que, le cas
échéant, la question soit abordée par le patient. La question de refus du don ne se pose donc
généralement pas. Afin d’éviter la confusion entre décision d’euthanasie et décision de
prélèvement et de don d’organes après l’euthanasie, certains principes éthiques et plusieurs
points doivent être impérativement respectés :

1. La décision d’euthanasie ne doit pas être affectée ou modifiée du fait d’un don
éventuel
2. La procédure menant à la décision d’euthanasie doit être en tout point irréprochable
3. La procédure menant au don doit suivre une procédure rigoureuse

Il est donc fondamental de séparer les procédures et les équipes soignantes. La décision
d’euthanasie se prend en général en concertation avec le médecin traitant du patient et
éventuellement avec l’équipe de soins palliatifs du patient. La demande de don d’organes se
fait par l’équipe de soins intensifs qui entre ensuite en contact avec le centre de
transplantation, et qui organise la procédure d’euthanasie en salle d’opération. La troisième
équipe effectue enfin le prélèvement après que le décès ait été constaté et que le délai de
respect de la dépouille ait été respectée. Il est donc important de noter la séparation absolue
entre les équipes qui prélèvent les organes et les équipes qui font l’euthanasie. Il est
également fondamental de respecter les règles de bioéthique (principe d’autonomie, de
bienfaisance, de non-malfaisance et de justice). Ces principes aident à agir adéquatement.

51
1.24 Les principes à respecter

 Le principe d’autonomie : reconnait que la personne puisse avoir des opinions ou


faire des choix réfléchis et entreprendre des actions en fonction de ses propres valeurs
et croyances personnelles sans subir une pression extérieure. Cela s’applique bien
entendu aussi par-delà la mort. Le défunt a droit au respect de sa volonté avant de
mourir mais aussi après. En respectant l’autonomie d’un patient, on s’abstient de faire
obstacles aux actions entreprises à moins que, de façon évidente, elles ne causent un
préjudice aux autres.

 Le principe de bienfaisance : s’applique au patient, aux équipes soignantes, et au


receveur. Ce principe commande de considérer en premier le bien-être et l’intérêt du
patient. La bienfaisance peut dès lors être différente en fonction de la situation dans
laquelle le malade se trouve. Pour le patient ayant exprimé le souhait de mettre fin à
ses jours, il s’agit de mettre un terme à ses souffrances et de l’accompagner dans sa fin
de vie. Pour le futur receveur, il s’agit de lui permettre de poursuivre sa vie avec le
don d’organes.
NB : Engelhardt9 insiste sur le respect de la liberté individuelle et le respect mutuel,
nul ne pouvant contraindre autrui au nom du principe de bienfaisance.

 Le principe de non-malfaisance : Il vise à ne pas faire du mal à autrui ou à minimiser


le mal. Même si le patient le demande, cela permet au médecin de refuser un acte
inutile ou délétère.

 Le principe de justice distributive : désigne les règles justes d’attribution des


ressources en santé de manière collective. Principalement dans le système d’allocation
des organes à greffer.

Si l’ensemble des règles légales et éthiques sont respectées et si l’on défend l’idée que chacun
a le droit de décider ce qui est pour lui la façon la plus acceptable de terminer sa vie. Si on
admet le droit du patient à l’euthanasie, il ne faut pas le priver de pouvoir donner ses organes
9
Hugo Tristram Engelhardt est un philosophe américain. Docteur en philosophie et en médecine, il est l’auteur
de nombreux ouvrages en philosophie de la médecine, en bioéthique et en philosophie.

52
à la collectivité. Les principes éthiques guident la réflexion, mais dans tous les cas, du point
de vue pratique, les équipes sont séparées. Le don d’organes après euthanasie c’est
l’association de deux procédures bien distinctes.

6. La bonne mort et les traditions religieuses

Quelles sont les représentations, les croyances, les valeurs de la mort qui caractérisent les
différents professionnels hospitaliers ? Leurs idées de la bonne et/ou mauvaise mort pour leurs
patients sont-elles en adéquation avec ce que désirent véritablement ces patients ? En
définitive, dans notre société caractérisée par la médicalisation croissante, les soignants ne
risquent-ils pas de repousser toujours plus loin les limites de la vieillesse mais aussi de la
dépendance ?

Il est clair que les multiples traditions religieuses accordent un intérêt particulier à la mort, à
la vie et à la santé. La vie est une chose qu’il faut promouvoir et protéger malgré la maladie.
N’y-a-t-il pas une contradiction ? Car selon les religions, la vie dans l’au-delà constitue
supposément la plus belle récompense que quelqu’un puisse espérer. Le croyant ne devrait-il
donc pas hâter sa mort pour rejoindre la plénitude de son Dieu ? Nombre de martyrs chrétiens
de l’église ne semblent-t-ils pas habités de cette conviction ? Les grands prophètes des
fondamentaux religieux ne vont pas dans cette direction, ils n’exhortent jamais les croyants a
précipiter leur mort, la vie est un don de Dieu, cela serait d’ailleurs l’attitude qui les
distinguerait de certaines sectes poussant au suicide collectif. Les religions invitent leurs
fidèles à prendre les meilleures dispositions pour demeurer en bonne santé. L’hygiène, la
nourriture, le repos et le recours au médecin constitue des pratiques recommandées dans
toutes les religions en raison de la valeur de la vie sur terre. Et ces recommandations se
comprennent bien car le monde et la vie sont l’œuvre de Dieu qui invite l’être humain à
habiter cette terre et à vivre sa vie le plus longuement possible.

C’est pourquoi quand la vie est blessée, le croyant est appelé à travailler sa guérison, les
approches de guérison s’adresse à tous les êtres humains autant dans la dimension
physiologique, que biologique et spirituelles. Pour les religions, tomber malade c’est être
blessé et stoppé dans son cheminement. Et la vie devient « handicapée », elle a besoin de
guérison et de salut, le salut qui signifie par ailleurs santé en latin et dans quelques langues
53
modernes. Si les grandes religions sont profondément liées à la médecine de leur milieu, c’est
d’abord en raison de leur souci de toute personne et de l’importance qu’elles accordent à la
guérison. Citons par exemple la haute estime dans laquelle le judaïsme tient la médecine, la
déférence que le prophète Mohamed manifeste à l’égard des médecins, le rôle central du
christianisme dans le développement de l’hôpital (expression de l’hospitalité à l’égard de la
personne malade), et l’identification de Bouddha au médecin qui est ami du malade. Donc, se
soigner, c’est aussi répondre aux prescriptions religieuses. Au départ, les hospices avec les
prêtres étaient les premiers hôpitaux. Cette vision positive n’exclut en rien la place essentielle
qu’occupe la croyance en une autre vie. Même si l’imaginaire à ce propos s’exprime
différemment, cette question habite la conscience humaine depuis le début de l’histoire. Elle
en constitue même le signe spécifique de l’humanité.

Ce qu’il y a de commun à toutes les religions, c’est en quelque sorte de défier les apparences
de notre finitude et de s’avancer par-delà tout ce qui est visible, dans l’invisible. De cela
justement le tombeau est le témoignage visible de tous les êtres, l’homme sait qu’il doit
mourir et quand il pense à l’après et à l’au-delà, il pense aussi à l’ici et au maintenant de son
existence. C’est-à-dire qu’il médite sur lui-même autour des tombeaux qui cristallisent la
question du : « d’où je viens et où vais-je ? ». Et finalement : « qui suis-je par de là chacune
de mes actions ou de mes expériences ? ».

▲ Les 5 religions reconnues en Belgique à l’heure actuelle :

o Le judaïsme
o Le christianisme catholique
o Le christianisme protestant
o Le christianisme anglican
o L’islam

Depuis 1993, il y a également la reconnaissance constitutionnelle de la laïcité. Elle est en


quelque sorte reconnue comme un culte.

On présente souvent la laïcité comme antireligieuse parce qu’elle s’est opposée au pouvoir de
l’Église catholique dominante et dominatrice dans nos régions. La laïcité est anticléricale,
certes, mais il ne faut pas confondre antireligieux et anticlérical. La laïcité s’oppose à

54
l’emprise de tout « clerc » sur la conscience des gens et dénonce dans la foulée l’arbitraire
d’un état quel qu’il soit face à la liberté de conscience de chaque individu. C’est en ce sens
que la laïcité prétend que les conceptions de vie sont affaire privée et qu’il faut que la sphère
publique puisse être le lieu de neutralisation des passions individuelles.

Le bouddhisme n’est pas encore reconnu en Belgique donc il ne reçoit pas de budget mais il
est sur le chemin de la reconnaissance. Il y a des temples et des lieux de culte bouddhiste en
Belgique mais ils sont financés par le privé.

En reconnaissant ces cultes, la Belgique exerce un certain contrôle sur ceux-ci, contrairement
à la France. Comme la loi française de 1905 traitait de la séparation de l’église et de l’état,
l’état français ne pouvait plus intervenir dans les différents cultes. Du coup, il y avait des
cultes qui s’y développaient avec de l’argent venu de l’étranger.

En Allemagne il y a un impôt philosophique philosophiquement dédicacé (des religions selon


nos croyances) et donc il est notamment demandé aux employeurs à quelles religions
appartiennent leurs employés. Chaque mois, il retire « des impôts religieux ». Pour exemple,
les citoyens allemands catholiques reversent donc directement un certain montant à l’Eglise
via les impôts. Cela existe également en Italie et en Espagne. Le souci, c’est que l’on
demande à l’employeur de quelle religion sont ses employés, par conséquent, il y a une
certaine atteinte à la vie privée.

C’est pour cela que le mouvement laïque en Belgique ne s’appuie pas sur ce principe d’impôts
philosophiquement dédiés.

En Belgique, une partie de nos impôts sont destinés aux différents cultes, quel que soit
nos conceptions. Tout le monde paye l’impôt donc une partie de nos impôts sert à
financer tous les cultes.

Au début de la Belgique, quand les libéraux et les catholiques se sont alliés, ils se sont mis
d’accord car il fallait déterminer une religion dominante et ils ont décidé de faire de la
religion catholique la religion principale en Belgique pour rendre service aux personnes. Les
laïques se sont organisés et ont mis également à disposition des assistances morales (d’abord
dans les prisons puis dans les hôpitaux). Cela a servi de levier et la laïcité a été reconnue en
1993 à côté des cultes. Mais beaucoup de laïques s’accordent à dire que la laïcité n'a rien à
voir avec les cultes. Le pragmatisme Belge, et le fait que la laïcité soit reconnue a permis de

55
développer un certain nombre de choses, comme par exemple le festival du cinéma des
libertés.

1.25 Dans le christianisme

Y a-t-il une réponse universelle par rapport à la question du bien mourir ? Les interprétations
sont multiformes, les uns attribuent à la souffrance qu’entraine la maladie une valeur
rédemptrice en vue de préparer la rencontre avec le seigneur. D’autres soulignent que le
contrôle de la douleur (dont il est question avec les soins palliatifs) constitue la nouvelle
orientation chrétienne de la façon de mourir. D’autres encore proclament que le caractère
sacré de la vie permet de faire appel à tous les moyens disponibles pour protéger la vie. Enfin,
certains affirment que la reconnaissance de la qualité de la vie doit orienter les soins de fin de
vie.

D’où la distinction popularisée par le pape entre moyen ordinaire et moyen extraordinaire.
Plutôt que de voir d’y voir des oppositions, ces différentes affirmations sont plutôt
simplement des tensions entre des facettes diverses et constituantes de l’expérience de vie et
du mourir. Un prêtre très connu, Patrick Verspieren 10, explique bien cette tension concernant
la fin de vie : il s’agit de trouver un équilibre entre l’estime de cette vie terrestre donnée à
chacun et la conviction que la mort n’est pas le dernier mot de l’homme.

Le christianisme, et en particulier les catholiques du dernier demi-siècle, se sont beaucoup


préoccupés des difficultés que pose le mourir dans le contexte contemporain et ont cherché
des solutions pour en sortir. Il y a plusieurs thèmes qui ont nourri cette réflexion, l’action à
double effet (distinction entre moyen ordinaire et moyen extraordinaire) et la conviction que
l’arrêt de traitement ne consiste pas à faire mourir le patient. Ces thèmes ont largement
dépassé les frontières du christianisme et témoignent de la vision chrétienne de la mort. La vie
humaine possède une valeur de la plus haute importance mais elle n’est pas sacrée.

L’action a double effet exprime notre responsabilité à l’égard de la personne dont la


souffrance a envahi tout l’espace de sa vie. On a le devoir d’adoucir leur souffrance même au
risque d’abréger leur vie. L’attention portée à la qualité de la vie apparait ainsi au cœur de la
vision chrétienne de la vie et de la mort. La distinction entre moyen ordinaire et moyen
extraordinaire à l’expression des moyens appropriés exprime les limites de la médecine à
10
Patrick Verspieren est un prêtre jésuite français. Il est responsable du département d'éthique biomédicale du
Centre Sèvres à Paris.

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l’égard du prolongement de la vie. La personne a le moyen de décider de continuer à vivre
dans le contexte de sa maladie grave qu’il l’entraine vers la mort.

En 1957, Pie XII définissait ainsi le moyen extraordinaire, selon lui, les moyens
thérapeutiques utilisé doivent être jugés non en eux-mêmes, mais en fonction du sens que
donne la personne malade à la vie.

Depuis les années 1950, le christianisme a privilégié la thèse selon laquelle mettre un terme à
des traitement non appropriés n’équivalait pas à l’euthanasie ou à l’aide au suicide. On doit
aller jusqu’au bout pour aider les personnes, mais pas les aider à mettre fin à leur vie. L’arrêt
de traitement signifie pour les chrétiens la reconnaissance que nos moyens techniques ont
atteint leurs limites et non le moyen d’accélérer la mort.

Donc l’arrêt de traitement constitue un geste d'humilité devant la mort alors que l'euthanasie
affirme la volonté de maîtriser la mort, l'euthanasie serait une manière de dire qu'on maîtrise
la mort alors que l'arrêt de traitement serait quant à lui un geste d'humilité par rapport à la
mort. Ces thèmes montrent que la vie humaine n'a pas un caractère sacré puisqu'il est tout à
fait acceptable de ne pas la prolonger si les moyens qui la prolongeraient ne permettent pas à
la personne malade de vivre avec sens les moments difficiles de la fin de vie.

Cette vie est cependant précieuse d'où le souci de ne pas imposer les prolongations et les
souffrances qui rendraient sa qualité vide de sens. Selon les chrétiens, le bien mourir n'est
donc pas d'abord une affaire purement individuelle, il se vit dans une communauté à qui on
impose des devoirs, le premier consistant à se préoccuper de la totalité de la personne malade.
Le contexte médico-hospitalier fait passer ce souci en second plan, on parle alors
d'acharnement thérapeutique. L’histoire du patient devient de moins en moins significative
pour comprendre la maladie et son évolution. Ceci au point que la reconnaissance de
l'humanité blessée du malade est absente.

C'est d'ailleurs là une des critiques majeures adressée à la médecine contemporaine :


promouvoir l'intégrité de l'être alors que toutes les conditions concrètes de l'existence tirent
dans une autre direction. Alors bien mourir exige pour le chrétien de reconnaître que la mort
appartient à notre existence humaine et qu'elle n'est pas le mal absolu. Le christianisme ne
s’oppose pas ici aux volontés contemporaines de vaincre un jour toute maladie. Il y a là une
contradiction, la mort en général est inévitable mais la mort de l'individu est contingente.

57
Il est clair que les conséquences de cette vision médicale de la mort sont dramatiques au sens
ou le coût de la mort et de la maladie est devenu extrêmement élevé dans nos sociétés. Et le
bien mourir exige la reconnaissance de la finitude humaine. Qui sommes-nous, lorsque nous
sommes « finis » ?

Le christianisme aborde ces questions fondamentales dans le domaine de l’anthropologie et de


la métaphysique. L'espérance chrétienne des sources de toute spiritualité qui permet à la vie
de mûrir encore quand la fin est toute proche. Evidemment pour celui qui pense qu'il y a une
vie après la mort, son approche de la fin de vie est un peu différente. Le christianisme aborde
la question de la souffrance même si sa manière de le faire constitue parfois un problème. Il
est né de la souffrance d'un homme mort sur une croix, ne pas se défiler devant la souffrance
de la mort tout en tentant de l'adoucir permet aux hommes de regarder en face leur réalité et
d'en chercher le sens, d'où la compassion.

On ne peut pas être chrétien sans avoir une certaine compassion qui est au cœur des aptitudes
des soignants à l'égard des personnes qui sont malades. Cette compassion a fait naitre les
soins palliatifs.

Quand la douleur est contrôlée, surgit la véritable question, celle du sens de la vie et de la
mort. Pourquoi vivre si la vie englobe la souffrance et l’attente de la mort ? Le gémissement
que ces souffrances entraîne peut trouver écho dans l'autre, la compassion qui lui répond peut
devenir une ouverture vers un sens possible, c’est une promesse d'espérance sans altérité au
moment où la souffrance détruit le sens. Il n'y a pas de dignité humaine possible évidemment
si la souffrance détruit le sens.

Pour les chrétiens, la tâche des prophéties de la santé consiste à redonner la dignité au
moment où le monde s'écroule. Ici, la nature elle est purement spirituelle. C'est la dynamique
même de l'évangile. Dans le christianisme, la communauté spirituelle est incontournable pour
favoriser le bien mourir. Pour le chrétien, il y a une vie après la mort et cette croyance définit
son approche de la fin de vie.

58
1.26 Dans le judaïsme

Le judaïsme est la religion monothéiste la plus ancienne. Du Talmud, découlent de nombreux


questionnements philosophiques. Les hommes ont-ils le droit d'intervenir dans le cours de la
maladie pour tenter de la guérir et ainsi s'opposer au cours naturel des choses ? Intervenir,
n'est-ce pas manquer de confiance en Dieu qui guérit ?

De plus, la Torah affirme que la santé représente une récompense divine pour une bonne
conduite et la maladie une punition pour le péché et la transgression. C'est quelque chose
qu'on voit souvent dans les réflexions religieuses, quand on est malade, c’est que l’on est puni
pour une raison.

Et pourtant la médecine joue un rôle essentiel puisque Dieu donne à l'homme le mandat de
guérir la maladie. La médecine est elle-même considérée comme une vocation. Le médecin
reçoit la permission de Dieu de guérir. Il en va de la tâche du médecin comme le devoir de
charité qui s'impose lorsque quelqu'un est dans le besoin.

La fiction de la maladie ne diffère pas de celle de la pauvreté, dans les deux cas les hommes
sont invités à laisser la théologie à Dieu et à accomplir leur devoir moral. Donc, le devoir de
charité du médecin est à l'image de l'agir de Dieu pour les hommes. Il y a deux médecins : l'un
est le Dieu tout-puissant, le vrai guérisseur, et le second est l’être humain, ce dernier est
l’instrument de Dieu donc il est son extension sur terre, dans son combat contre le mal. Le
médecin reçoit de Dieu la permission de travailler à la guérison de la personne malade et cette
permission se transforme en devoir. Pour bien comprendre le judaïsme, il faut prendre en
compte que le judaïsme est une orthopraxie, ce n'est pas une orthodoxie comme les religions
catholiques. Le terme orthopraxie signifie que ce qui est important pour le judaïsme, c’est son
action sur le terrain et l'action est beaucoup plus importante que l'orthodoxie. Par exemple, si
dans un contexte particulier ou une situation donnée, il est impossible pour le patient de
réaliser le Chabat le vendredi, il est excusé. Le vécu est plus important, il s’agit donc d'abord
d’une orthopraxie et non une orthodoxie.

Comment le judaïsme comprend-t-il la tâche de guérison, celle qui repose sur la conception de
la valeur infinie de la vie humaine ? Dans le judaïsme la vie humaine possède un sens
beaucoup plus élevé et plus exigeant que dans la tradition chrétienne.

59
Il faut traduire la notion de caractère sacré de la vie par quelque chose de plus précis, quelque
chose qui pourrait être applicable, plus immédiatement, en termes légaux et moraux, en
termes éthiques aussi bien que religieux. La loi juive définit chaque vie humaine comme ayant
une valeur infinie. Or l'infini est indivisible. C'est pourquoi 70 ans ou quelques secondes de
vie ont la même valeur, l'infini, la durée de l'espérance de vie ne peut donc pas représenter un
facteur déterminant dans une prise de position :

- Les conséquences de cette affirmation sont importantes pour la vision du bien mourir
dans le judaïsme. Une première conséquence concerne la tâche du médecin, ce dernier
doit aider ses patients à retrouver leur force aussi bien que leur bien-être physique. Ne
pas le faire constitue une violation du commandement biblique de ne pas causer la
mort à son prochain. C'est là une tâche qui s'impose quel que soit le statut social et
financier du patient.

- La seconde conséquence tient au refus de toute discrimination à l'égard de quelque


forme de vie humaine quelle qu’elle soit, l'obligation s'impose de sauver toute
personne quel que soit son handicap.

- La troisième conséquence correspond au fait que Dieu est le maître de la vie, nul n'a
un droit sur la vie des autres ou sur la sienne. La vie est un don de Dieu, confié à
l’homme. Dieu seul donne la vie et lui seul peut la reprendre.

On comprend donc clairement l'opposition à l'euthanasie. La souffrance et la qualité de la vie


ne sont pas des facteurs à prendre en compte dans la décision médicale. L'arrêt de traitement
est ici inacceptable dans le judaïsme. Cette présentation soulève ici bien des questions. Qu’en
est-il des situations ou le patient demande que les traitements soient arrêtés ou d'autres où le
médecin reconnaît que les moyens thérapeutiques ont épuisé leur efficacité ? Pourquoi alors
poursuivre des traitements ? Jusqu'où va l'obligation de traiter ou de se faire traiter ?

Les juifs qui discutent du Talmud discutent aussi de ces questions. Il existerait ainsi une forte
tension entre les interprètes du judaïsme et la pratique juive contemporaine. Les valeurs
juives sont donc mises à mal par le développement de la biomédecine.

60
1.27 Dans l’islam

Le bien mourir dans la religion musulmane trouve-t-il son expression la plus achevée dans la
mort volontaire des guerriers fanatiques qui se donnent la mort à la gloire de leur Dieu ? Ici,
les réponses sont diversifiées. La volonté de parler d'un seul islam contribue grandement aux
amalgames et à conférer à cette religion une image de violence et de fanatisme. Il faut préciser
d'emblée, qu’il y a dans l'islam différents branches. Si on généralise trop l’islam, on donne
l'impression que c'est un monolithe, mais ce ne l'est pas. L'identité religieuse commune des
musulmans s'exprime dans la foi envers un Dieu absolument transcendante et dans la
reconnaissance que le Coran énonce de façon parfaitement littérale le message divin transmis
par le prophète Mohamed. Le Coran détermine donc la compréhension islamique du mourir
même si certaines interprétations vont varier selon les cultures et les compléments de
législation qui vont se développer au cours de l'histoire.

Que nous dit le Coran concernant la mort ? Il enseigne qu’il n'appartient à personne de
mourir. Si ce n'est avec la permission de Dieu et d'après ce qui est irrévocablement fixé par
écrit. La vie sur terre est un devoir que Dieu exprime ainsi à Adam et Eve après leur faute :
« vous serez ennemis les uns des autres, vous trouverez sur la terre un séjour et une
jouissance pour un temps limité ». Et il dit encore : « vous y vivrez et vous y mourrez et on
vous en fera sortir ». La mort ne représente pas une punition mais constitue la fin d'une étape
et le début d'une vie nouvelle qui va culminer au jour de la résurrection et du jugement final.

Il est important de se rendre compte que pour l’islam, on est aussi dans cette situation où il y a
une vie après la mort. Le Dieu créateur de la vie fait du corps humain une merveilleuse
création appeler à servir. On peut le dire autrement pour les musulmans, son corps ne lui
appartient pas car il appartient à Dieu. En fait, il est celui qui va utiliser ce corps qui lui
appartient. Si l'homme est fait d'une argile, il est aussi harmonieusement formé puisque Dieu a
insufflé en lui son esprit au point qu'il demande aux anges de se prosterner devant cette
créature.

L’homme doit développer sa vie tout au cours de cette étape terrestre. Le corps humain devra
donc être profondément respecté pour le jour de la résurrection. Ceux qui travaillent à
l'hôpital savent quels soins les communautés musulmanes exigent lors du nettoyage des corps
des défunts afin de les préparer pour l’enterrement. Quelles sont les conséquences de cette
vision pour le travail du médecin ? Les premiers musulmans tenaient la médecine en si haute

61
estime qu'ils firent appel aux connaissances des Grecs et des juifs afin d'améliorer la qualité
de leur discipline médicale.

Cette démarche s’exprime dans des sourates qui affirment que celui qui sauve un seul homme
est considéré comme s'il avait sauvé tous les hommes. Alors, malgré l'obligation de faire
appel au médecin, il est évidemment préférable que celui-ci soit de la même foi que le patient
musulman.

L'exemple de la personne malade qui se demande si elle doit pratiquer ses devoirs religieux
doit être éclairante. La question se pose en particulier pour le ramadan et la possibilité
d'effectuer le pèlerinage. À certains moments la réponse apparaît claire mais à d'autres
moments les choix à faire sont beaucoup plus difficiles et ambigus en raison de l'importance
d'avoir accompli ces devoirs religieux en vue du passage vers l'autre vie. Et le rôle du
médecin conseiller est majeur, le médecin musulman joue ici le rôle de médiateur entre les
sphères médicales et religieuses. C'est vrai que dans l'imaginaire musulman il est préférable
d’être encadré par des soignants musulmans. Hormis cela, de nombreuses femmes
musulmanes exigent de se faire soigner exclusivement par des femmes.

Le médecin a la responsabilité d'aider la personne malade à guérir en raison du fait que c'est
Dieu seul qui décide de la mort de quelqu'un. Le prophète affirme même que Dieu n'a pas créé
de maladie pour laquelle il n'a pas créé de guérison sauf dans le cas de la vieillesse.

En 1981, la première conférence internationale sur la médecine islamique s'est tenue au


Koweït et a établi le premier code médical éthique musulman.

Ce dernier met en avant la responsabilité du médecin de soutenir le malade et reconnaît que la


santé est un bien humain fondamental. Les patients en phase terminale doivent donc recevoir
les soins appropriés et être soutenus moralement, ce qui implique qu'il faut veiller à adoucir
leur douleur et leur souffrance. Les soins doivent être appropriés à la situation personnelle du
malade et le patient est profondément respecté jusqu’ à son passage vers l'autre vie.

Le bien mourir musulman exclue donc catégoriquement le suicide assisté et l’euthanasie.


Ces deux gestes vont à l’encontre de la volonté de Dieu, lui seul décide. Celui qui contribue à
la mort d’un homme, même s’il ne s’est rendu coupable d’aucun pêché durant son existence,
est considéré comme s'il avait tué tous les hommes.

62
L'euthanasie est donc formellement interdite et condamnée car ce ne serait pas respecter l'être
humain.

Le prophète a particulièrement insisté dans son enseignement sur l'affirmation que la mort est
une ligne de séparation entre deux vies, celle-ci et l'autre qui est éternelle. Comme pour le
christianisme et le judaïsme, il y a donc une vie après la mort, c'est ce qu'on appelle le point
commun des religions dites abrahamiques. C'est pourquoi le bien mourir pour la personne
concernée ne peut être séparé de la mise au tombeau. D'une part pour le respect du corps qui
doit ressusciter, ceci exige qu'il demeure comme il est. La majorité des musulmans sont donc
farouchement opposés au don d’organe.

Voilà une première raison pour accélérer l’enterrement, à la mort du musulman le corps sera
lavé et enveloppé d'un tissu blanc en signe de respect. Et l'enterrement se fera le plus
rapidement possible. D'autre part, la mort marque le début de l'autre vie, d'où l'intérêt de
précipiter les funérailles.

La religion musulmane s'inscrit dans la lignée des deux traditions précédentes. Elle les rejoint
donc ainsi dans la reconnaissance de la médecine. Elle s'en différencie cependant en décrivant
avec plus de détails le stade du tombeau et l'événement de la résurrection. Sur ces points, elle
est beaucoup plus descriptive que les deux autres grandes religions et donc le sens du bien
mourir laisse peut-être moins de place pour l'interprétation dans l’islam que dans les
autres religions.

Mais pourquoi y a-t-il moins de place dans l’interprétation du bien mourir dans l'islam que
dans les autres religions abrahamiques ? Cela s’explique par le fait qu’elle est la religion la
plus récente, et que de ce fait elle a affiné ce que les écrits des deux autres religions
établissaient concernant ce point.

63
1.28 Dans le bouddhisme

Il s’agit d’une religion qui n’est pas encore reconnue mais elle offre une réflexion intéressante
sur le bien mourir. Le bouddhisme est l'une des grandes traditions spirituelles ayant le plus
réfléchi sur la mort. Le livre des morts tibétains constitue un texte fondamental puisqu'il est
un des livres d'instruction pour les gens qui sont au seuil de la mort. Comme pour les autres
traditions, la valeur du don de la vie humaine n'a pas de prix. Cette vie ne constitue pourtant
pas la fin de tout et représente une étape transitoire vers une autre vie. C'est pourquoi la mort
est un processus naturel à respecter, un simple passage d'une incarnation à une autre.

Le moment de la mort est particulièrement important pour permettre un passage vers une
nouvelle naissance alors il est essentiel d'avoir conscience de la mort. Il faut penser que l'on
ne demeure pas longtemps sur cette terre. Sans la conscience de la mort, nous n'arrivons pas à
profiter de la vie que nous avons déjà vécue.

Elle prend un sens puisque grâce à elle, des prolongements ultérieurs peuvent s’accomplir, et
ce à partir de la condition mentale de la personne mourante. Si elle meurt dans un état de peur,
de panique, d’anxiété, la personne pourrait se retrouver dans une situation pire que celle
qu'elle est en train de laisser. Elle doit être entièrement concentrée sur ce qui se passe dans
son corps et dans son esprit, ainsi elle acquiert une grande paix intérieure et ne craint plus ce
qui lui arrive. Dans le bouddhisme, il faut vivre intensément le moment présent, il faut donc
aussi vivre intensément la fin de vie.

L'esprit au moment de la mort est la cause prochaine de la continuation dans l'autre vie.
L’esprit doit être en paix au moment où la mort approche. Il est important pour la personne
mourante d’être entourée de sa famille, de ses amis, et des moines pour aider la personne à
mourir dans un état d'esprit pacifié.

Les personnes qui accompagnent le mourant doivent éviter les comportements négatifs. Il ne
faut pas bouleverser la personne mourante avec des regrets ou en provoquant chez elle de la
colère ou de la haine, ne vous lamentez pas sur son départ, ne pleurez pas en sa présence.
Mais aidez là à vivre un départ avec un sens.

La paix intérieure qu'il est possible de posséder au moment de la mort ne s'acquiert pas
soudainement, elle est le fruit d'un long travail sur soi qui commence dans la prise de
conscience que la mort est universelle.

64
La parabole de la graine de moutarde est particulièrement éclairante : une mère profondément
en détresse qui s'était adressé à tout un chacun pour réanimer son enfant mort se rendit
finalement chez Bouddha. Elle lui demanda de redonner vie à son enfant. Bouddha, lui
répondit que la guérison est simple à obtenir, il suffira simplement de lui faire boire du thé fait
à partir de cinq ou six graines de moutarde qu'il lui faudra se procurer au village. Il ajouta que
ces graines doivent provenir d'une maison qui n'a pas connu la mort. Passant de maison en
maison, la mère ne rencontre que des familles qui avaient vécu la perte d’un ou plusieurs êtres
chers. Cette femme découvrit ainsi que la mort est universelle et que la seule manière d'y faire
face consiste à chercher à vaincre la souffrance à travers un cheminement spirituel personnel.

La graine de la moutarde qui fait comprendre à la femme que finalement la mort est partout
et qu’elle fait partie de la vie. Dans ce contexte Bouddha est le grand médecin. Quel rôle pour
le médecin ? Ce dernier joue un rôle de première importance, il doit être instruit, habile,
vertueux, se comporter en ami de la personne malade. Toutes ses qualités s'imposent puisqu'il
doit protéger la vie et au moment de la mort, il doit assister le malade sur le plan physique,
mental et spirituel.

Lorsque la souffrance de la personne mourante est très grande l'euthanasie ne serait-elle pas
une voie envisagée pour les bouddhistes ? C’est une question qu'on peut poser aux
bouddhistes. Le geste n'aurait pas de sens puisque l'acte et le processus du mourir sont en lien
direct avec la présente existence subséquente. L'état de conscience et l'état d'esprit sont d'une
importance cruciale de même que l'euthanasie est inacceptable, de même le bouddhiste à
l'agonie ne peut vouloir ni mort médicalisée ni acharnement thérapeutique. Il voudra vivre son
passage d'une incarnation à une autre.

La médecine moderne cherche à vaincre la mort en prolongeant la vie humaine le plus


longtemps possible, mais le bouddhisme cherche aussi à vaincre la mort. Non pas en
l’évacuant de la vie mais en l’intégrant au cœur même de l’existence. La seule façon de vivre
une vie éveillée et consciente de la fugacité de cette existence et de vaincre la mort de cette
manière, c’est vivre une vie meilleure. Il s’agit d’accepter la mort, de l’accueillir avec
sérénité.

65
1.29 La contribution des traditions religieuses

Que peuvent apporter les religions aux pratiques actuelles concernant le bien mourir ?
Concernant le débat sur l’euthanasie, les religieux y sont de manière générale opposés mais
participent activement au débat et contribuent donc à faire évoluer les choses.

Dans un monde sécularisé comme le nôtre, les divisions peuvent enrichir la vie. Les
conceptions des religions nous enrichissent, nous permettant de mieux comprendre l’autre et
contribuant à apporter sur la table des choses intéressantes.

Les traditions religieuses posent des questions sur les solutions apportées au défi de mourir
dans la société.

Mentionnons-en plusieurs :

Les contemporains s’opposent à l’acharnement thérapeutique et au paternalisme médical, d’où


le thème majeur d’éthique sur la question du mourir, au refus de traitement et au respect de
l’autonomie du patient. Cette approche fondée sur les droits du patient n’a pas résolu les
problèmes majeurs. Quand un patient est gravement malade ce qu’il faut attendre de lui est-il
de prendre des décisions ? Les directives préalables (déclarations anticipées) sont-elles ce qui
compte pour le patient et les siens ? Le patient ne veut-il pas sentir qu’il existe encore pour les
autres ? Les médecins et infirmiers sont attentifs à ces besoins. Et quand le malade ou la
famille hésitent face à certaines décisions à prendre, les difficultés ne sont-elles pas liées à des
perspectives spirituelles ? La principale plainte des patients aujourd’hui, n’est pas de n’être
pas suffisamment informé, mais c’est de ne pas être invité à prendre la parole pour exprimer
ses angoisses et/ou ses désirs.

La médecine a commencé à reconnaitre l’importance de maitriser la douleur de la maladie.


Les soins palliatifs ont fait un immense travail. Mais sont-ils suffisamment sensibles à la
grande différence entre douleur et souffrance ? Reconnait-on la souffrance pour ce qu’elle
est ? L’effort entrepris ces dernières années pour la contrôler fait de celle-ci une condition
physique traitable plus qu’une expérience humaine profondément complexe. Pour le dire
autrement, les religions pensent que l’on aborde la souffrance de manière très technique, trop
technique (les médicaments, les approches pour les traiter,… ) alors que la souffrance en
réalité trouve sa source dans l’esprit du malade.

66
La gestion de la douleur ne permet pas d’adoucir la souffrance causée par le spectre de la fin,
de la perte de dignité, du déclin. Toute souffrance n’est pas traitable et le croire serait nier la
dégradation de l’identité, la dégradation des actes les plus simples de la vie. Même si toute
souffrance n’est pas contrôlable, les patients peuvent être aidés dans leur quête d’un sens. Les
soins sont confrontés à un aspect plus spirituel.

Les questions que posent les traditions religieuses reposent sur une critique de la manière
avec laquelle la société moderne aborde le sens de la mort. Car les religions mettent l’accent
sur la tension caractéristique de l’expérience humaine donc une tension entre le corps et
l’esprit. L’ici et maintenant, l’avenir, l’imminence, la transcendance, l’infini, etc. Mourir est
le cœur de ces expériences. C’est pourquoi la fin de vie constitue une étape dans l’histoire de
la personne et la société moderne met l’accent sur le contrôle à exercer au moment de la mort,
le contrôle de l’individu sur la mort, le contrôle de la médecine pour les traitements à offrir ou
non. Les traditions religieuses considèrent que la mort ne prend un sens que dans la capacité
de l’être humain à se dessaisir de lui-même alors que la modernité lutte pour contrôler la mort.
On constate une nette distinction entre l’approche des religions et l’approche plus techno-
scientifique qui nous est proposée aujourd’hui.

Le sens de la mort dans les traditions religieuses conduit à certaines orientations intéressantes
qui soulèvent des questions centrales dans nos sociétés. La première touche ce qu'il est
convenu d'appeler l'accompagnement dans la communauté, et les traditions religieuses y ont
un rôle important auprès des personnes qui vont mourir. Dans nos sociétés on arrive encore
mal à résoudre le défi de l’isolement, la solitude des personnes vieillissantes malades qui
trouvent peu ou pas de soutien de la part des organismes reconnus. Les soins palliatifs
reconnaissent l’importance de la présence de la communauté, et dans les faits, cette
compliance va au-delà du cercle restreint des soins palliatifs.

La deuxième remarque concerne la limite du prolongement, les religions reconnaissent à la


fois l’importance de la qualité de vie et le devoir de respecter la vie, en particulier la vie
fragile. Mais en général, elle ne privilégie pas les prolongements qui font que la vie est sans
qualité et qui réduisent l’individu à sa seule dimension biologique. Nos progrès
technologiques entrainent des choix qui sont difficiles à faire concernant les politiques à
mettre en place à l’égard de la population âgée. Et ces choix seront humains que si l’on arrive
à garantir la qualité de la vie et la dignité.

67
La troisième remarque est destinée aux personnes qui, en raison de leur grand âge, approchent
de la mort. Les traditions religieuses reconnaissent que le vieillissement fait partie de la vie,
mais qu’il serait inacceptable pour les générations futures de chercher à le vaincre. Vieillir et
mourir appartiennent à la même logique, mais en même temps, les religions admirent les
personnes âgées comme des piliers de sagesse.

Ici encore, les religions cherchent à se mettre d’accord de manière à prendre des décisions qui
respectent les multiples facettes de l’expérience humaine. Cette manière d’envisager le
vieillissement invite la modernité à questionner ses espérances concernant le vieillissement.
La question de la mort est au cœur même de l’aventure humaine. Elle nait avec l’humanité
elle-même. Les traditions spirituelles cherchent à rendre compte de questionnements
particuliers. C’est pour cela que le témoignage des religions est important, nous devons le
garder à l’esprit lorsque l’on s’interroge la fin de vie.

68
Annexes
Annexe I : Formulaire de déclaration anticipée concernant l’euthanasie

69
70
L'article premier des statuts de l’Université Livre de Bruxelles proclame que son
enseignement a pour principe le libre examen. Celui-ci postule, en toute matière, le rejet de
l'argument d'autorité et l'indépendance de jugement.

Le libre examen qui est à la base de la méthode scientifique, est aussi un principe auquel on
souscrit par engagement... Le libre exaministe s'engage donc à mettre ses paroles et ses actes
en accord avec ce qu'il tient pour vrai. Sa vérité, il doit avoir le courage de la dire et de la
défendre.

L’Université Libre de Bruxelles, en raison même de la nature de son engagement, "accueille


en tant qu'étudiants à part entière, ceux qui ne partagent pas son idéal...". Toutefois, ceux qui
choisissent délibérément de venir y étudier, ont le devoir d'acquérir une connaissance
personnelle de ces principes.

La vie communautaire à laquelle sont conviés tous les étudiants de l’ULB, sans exception,
implique compréhension et tolérance mutuelles. Mais cette tolérance que nous préconisons
n'impose pas à proprement parler le respect des opinions d'autrui. "Comment en effet,
respecter ce qui est jugé faux, ce que l'on condamne, ce que l'on s'efforce de détruire".

La tolérance que nous proclamons est le respect de la personne et de la liberté d'autrui.

« Examiner, en dehors de toute autorité politique ou religieuse, les


grandes questions qui touchent à l’homme et à la société, sonder
librement les sources du vrai et du bien, tel est le rôle de notre
Université, telle est aussi sa raison d’être. »

Pierre-Théodore Verhaegen, 1854

Quand il a donné cette information il a encore le médecin a parlé à l'équipe soignante c'est-à-
dire l'équipe qui entourait le malin essentiellement je pense soit à domicile ou d'autres et c'est

71
seulement à ce moment-là quand il a fait tout ça avec son patient qu'il doit demander l'avis
d'un 2e médecin et si la mort n'est pas décidée Ah elle échéant il doit demander aussi le 3e
médecin qui est souvent un médecin qui est proche de la spécialité dans laquelle le pour
laquelle le le patient est évidemment suivi en sans doute donc la loi est donc passée en 2002 et
j'ai relevé si critique de cette loi alors on va examiner maintenant ces six une remarque non tu
à moins qu'il y ait peut-être une question est-ce que vous avez une question.

alors moi j'ai relevé donc 6 critiques qui étaient faites à la loi :
1 la première hier ceux qui jurent que la loi est inutile car elle ne corrigerait pas une
situation antérieure pensez cela c'est faire fi de ce que la situation intérieure est précisément
hypocrite hein c'était une situation dans laquelle les parquets ne donnaient pas forcément
ensuite aux éventuels plaints et créent en quelque sorte un sentiment d'impunité dans certains
endroits qui favorisait pas à mon sens de dire viens je pense qu'il n'est pas bon qu'une loi soit
en décalage parfois on a des pratiques sociales hospitalière en l'occurrence et donc il y a la ça
va rien changer cette loi ne change rien c'est pas vrai mais c'est une critique.

2 2e critique il y a ceux qui fustigent une loi qui en prévoyant d'avance les cas où le thanasi
est envisageable et qui en définissant une procédure à suivre transforme ce qui devait rester à
chaque fois un cas de conscience en une simple démarche administrative standardisée disait
on contrôlerait plus le pourquoi mais bien le comment. c'est l'argument qui a été envoyé par
ceux qui souhaitent que la question reste médico et technique qui renvoie au parc d'analyse
médicale on en parlait tout à l'heure mais terme qu'il faut un peu nuancer parce qu'il faut
quand même se rendre compte que c'est les médecins qui assument de responsabilité. oui et la
2e critique la 2e critique c'est ceux qui considèrent que la question doit être médico éthique et
qui disent que finalement la loi elle standardise le les les choses et alors que ça doit rester un
problème de conscience du médecin d'accord mais la loi elle dit donc ça standardise il disait
Ben c'est ceux qui voulaient que fuit chez nous la paix nous sommes assez grands les
médecins pour choisir pour savoir c'est une 2e crise

3 il y a une 3e critique parce qu'il y a ceux qui voient que cette loi est un premier pas pour
banaliser le geste et par là affaiblir le sens de l'interdit légal. fait l'argument de ceux qui
viennent ne pas comprendre que la dépénalisation n'est en rien levé l'interdit puisqu'il
demeure toujours dans l'ordre symbolique autrement dit dépénalisé Interdit hein puisque on
doit respecter un ensemble de critères et si on les respecte pas on est dans l'intérêt l'idée
banaliser les choses aujourd'hui il y en a qui mettre en avant notamment au Pays-Bas le fait

72
que le nombre d'euthanasie est tellement en train de de monter de gonfler que que ça banalise
les choses c'est à dire que aux Pays-Bas avec le temps petit à petit y a des gens qui sont en
situation de fatigue de vivre et hop on leur donne l'euthanasie hein donc il y a un problème qui
petit à petit est en train de se dire mais vous voyez bien hein on a dit que ça allait banaliser
mais Regardez ça va banaliser les choses. moi je peux vous dire qu'en 20 ans les chiffres
montent un peu mais pas beaucoup on est on n'est pas dans ce que certains après on est dans
la pente glissante hein on va autoriser et demain y en avoir il y en avoir plein plein plein plein
plein ça n'est pas le cas concrètement c'est pas le cas mais je suis aussi attentif aux critiques
qui existent aujourd'hui aux Pays-Bas je me demande ce qui est en train de se passer là aux
Pays-Bas est-ce que quelqu'un l'a déjà vu ça a entendu parler de ça non quelqu'un entendu
parler là Pays-Bas le les les les le nombre d'état étant très peu d'un coup de de grimper
beaucoup est-ce que c'est lié à la COVID ou je ne sais pas je sais pas trop je n'ai pas analysé
vraiment mais j'ai vu que il y avait là un mouvement qui m'interpelle on va essayer de
comprendre ça Ceci dit c'était une critique hein la pente glissante

4 la 4e qui éthique c'est tout ce qu'on vienne qu'il faut dénoncer et mettre poursuivre et
dans la vie dite économique c'est l'accompli par routine et cetera sur demande du patient de
leur famille et de regretter que la loi ne dise rien d'expliciter à ce propos.

c'est pas marqué dans la loi que pour des raisons économiques mais il est quand même
marqué clairement dans la loi que c'est le patient qui doit décider c'est pas sa famille qui doit
décider pour le patient hein c'est pas la famille qui doit décider c'est le patient lui en Suisse
oui mais justement c'est l'idée que des familles pour des raisons d'héritage ou d'autres ils
poussent au fait que on fasse l'euthanasie de la grand-mère hein d'accord Ah Ben oui c'est ça
les trucs économiques c'est pour ça qu'en Suisse eux ils ont dans leur législation décider que
ils font le suicide assisté pour autant qui aucune relation autrement dit ne demandez pas à leur
famille de pratiquer ou de D l'aide au suicide c'est pour ça que ce sont des associations tout à
fait indépendantes qui viennent chez vous et qui vous aident aux soucis attendez moi je
connaissais pas Monsieur XY donc on peut pas me critiquer ou me dire que j'ai une relation
d'argent relation d'argent avec vous donc et c'est comme ça qu'ils ont créé des associations
comme Exit ou d'autres des associations qui vont même jusqu'au domicile déjà parfois en
caravane figurez-vous il y a une caravane caravane est là vous pouvez venir vous coucher
dans la caravane on va vous donner le produit et vous pouvez boire votre produit bon on en
fait.

73
ça se passe en Suisse Les Français se collaboreraient français qui par des relations elle est en
Suisse évidemment c'est toujours le même problème hein c'est que pour aller à l'étranger ça
coûte plus cher il y a des français qui viennent en belgique mais là en belgique on demande
qui est une relation suivie avec le médecin donc il faut trouver des amis qui vous logent il faut
trouver des gens en france qui vous logent.

5 Ah oui il y a une 6e la 5e c'était que toutes fustigent les conditions prévues par la loi qui
serait tellement restrictive et lourde en termes de procédure qu'on ne verrait pas en quoi elle
pourrait libérer le médecin la réponse doit précisément se construire à partir du droit le statut
de médecin ne doit pas leur donner davantage d'impunité de n'importe quel autre citoyen le
critique fustige le fait que les conditions prévues par la loi excluent les cas d'euthanasie les
plus fréquents qui devront rester gravés il est vrai que la loi aborde que les situations où le
patient est conscient c'est de son et le corps médical vous savez refuse de l'acharnement
thérapeutique.

moi je dis que la loi a permis le dialogue Hey quand ils disent que les restrictions sont
tellement lourdes que ça libère pas le on parle du discours mais je comprends pas parce que le
médecin pourquoi est ce qu'il doit être dit c'est toujours ce médecin qui disent mais foutez-
moi la paix je suis assez grand je vois ce que je dois faire ça peut faire non médecin est un
citoyen comme les autres il remplit le papier ou le document comme un autre citoyen il a fait
quelque chose il doit rendre des comptes et il le remplit bon. j'ai l'impression qu'en moni on
n'aime pas tellement remplir les papiers on préfère continuer à faire ces actions terminales
hein ça au moins actuation terminale on n'a pas à compléter documents et à justifier le fait
qu'on ait pratiqué quelque chose de particulier il n'y a pas le monde ça mais d'un autre côté je
pense qu'il est important de pouvoir justifier ce qu'on fait.

2 et alors la 6e critique elle est plus en la 6e critique est plus amusante et je sais pas si
vous arriverez à bien la noter parce que c'est un peu compliqué je vais y aller douce la 6e
critique les . c'est un argument de philosophie du droit Ah ? voilà un domaine OK on est
pas habitué à travailler la philosophie du droit c'est un petit peu on va dire comme le
serpent qui se mord la QUE c'est un argument qui voudrait qu'un interdit ça veut dire
interdit l'étymologie du mot interdite c'est dire quelque chose entre interdit qui entre donc
un interdit implique dans le droit l'idée d'une relation vous comprenez ça en plus d'office
droit interdit pour pouvoir interdire il faut qu'une relation une relation entre 2 personnes
c'est la base du droit le droit de vider là maintenir cette altérité donc l'autre selon laquelle
on ne pourrait aucun cas supprimer l'espace de parole qui existe entre 2 personnes.
74
d'accord c'est dit que le droit nous force à souffrir la relation et qu'il ne peut faire en sorte
que la vie ne vienne disponible à disposition de autrement dit le droit ne permettrait pas
car il ne peut rien d'autre que maintenir la relation. autrement dit encore il n'est pas
défendable que par autonomie Oh puisse vouloir la fin de l'autonomie d'abord vous voyez
la logique difficile hein il ne on ne pourrait pas par autonomie vouloir la fin d'autonomie
autrement dit je vais mourir donc je coupe la relation on peut pas puisque le droit impose
la relation donc le droit ne peut pas faire faire qu'un métier plus d'interdit du droit hein la
philosophie du droit elle dit on ne peut pas couper l'intérêt sinon il y a plus de société on
dit ce qui le droit fait entre 2 donc il faut maintenir la relation. vous pouvez pas couper la
c'est pas par décision par autonomie personnelle vous pouvez pas couper l'autonomie.
bon là-dessus on peut dire que tout droit véhicule une idéologie évidemment et rester à ce
point théorique l'autonomie ne peut couper l'autonomie c'est dire alors qu'il est normal
que le médecin se cache ou pratiquer un interdit car pour le médecin se cachait serait bien
la preuve qui l'a mal fait non coupé par la l'autonomie mais si le médecin se cache ça
montre bien qu'il a mal fait donc l'interdit reste c'est de la logique de la philosophie du
droit à une.
Aux soins palliatifs c'est une condition fondamentale de la loi car on ne peut séparer les
soins palliatifs de l'euthanasie l'un n'est pas séparable de l'autre appellatif n'arrive pas à
régler toutes les questions je pense que je voulais montrer.
2002 CREATION DE LOIS

SOINS PALIATI ET EUTHANACIE

Les aboutissants les discussions les remarques que vous vous êtes fait je perds chacun une
certaine idée sur la question qu'est-ce qu'on pourrait presque dire En conclusion/c'est que le
monde médical et je pense que c'est heureux parle davantage aujourd'hui de soins ça va pas
bien tifou que de traitement et marque par là dans cette cité nous travaillons en compte dans la
relation thérapeutique qui se tisse avec le malade davantage que le facteur biologique soigné
c'est plus que traiter et pourquoi l'euthanasie bien conduite ne pourrait-elle pas être considérée
comme un soin une dernière manière de pouvoir témoigner une fraternité au PATIENT .

c'est que la médecine sera vraiment au légistique c'est-à-dire qu'elle tiendra compte du patient
comme un tout et cette évolution n'a été possible que grâce à une nouvelle approche de la
souffrance et de la maladie chronique qui intègre le concept de soins continus terme comme je
vous l'ai dit que je préfère en soins palliatifs car il évite de mettre une rupture entre le curatif
et le palliatif et pour que d'aucuns n'y soit impératif que aucun voit encore à tort comme une
75
réponse à l'euthanasie on a pu parler d'un engouement aussi des soins palliatifs et en
particulier dans les milieux chrétiens.

Dans la charte des soins palliatifs l'opposition l'euthanasie ce qui est plus impératif mais qui
était une réalité ou nous pouvons enfin dire que c'est une aberration mais si vous écoutez la
radio française ou les débats en France ils en sont encore à ce stade-là hein d'opposer soit un
palliatif euthanasie.

Les francais vous dans vos institutions de soins vous avez un rapport au médecin qui est on va
dire un peu plus horizontal qu'en France En France c'est encore le professeur c'est encore le
médecin c'est avoir plus de poids encore que chez nous donc les les approches je sais pas je
trouve qu'elles sont pas pas les mêmes que chez nous en Belgique est ce que c'est parce que
nous sommes un petit pays plus plus sympathique plus facile arrive dans les relations mais
mais En France comme on dit les pompes les médecins c'est encore quelque chose ça a plus
de poids dans l'institution je sais pas ce que vous comprenez cette remarque hein. comprenez
donc je sais pas du tout comment va réagir la France au débat moi je trouve que que la
Belgique a été a été sur ces questions-là très intelligent alors c'est peut être lié en 2002 notes
ça aussi dans un des arguments quand vous poserez la question Comment expliquer que un
pays comme la Belgique a réalisé une législation au commissaire mais en 2002 c'était la
première fois depuis j'ai pas moi 50 60 septante 100 ans que les catholiques n'étaient pas au
gouvernement Ah.

et il n'était pas au gouvernement pour une bonne et simple raison c'est que lorsque il y a eu la
législation sur la dépénalisation de l'avortement catholiques ont été vaincues ils ont très mal
pris ça sans compter le roi qui a disparu pendant 2 jours, la personne qui a osé crier dans la
rue vive la République hein personne n'a osé hein moi j'étais trop jeune peut-être pour pour le
faire je l'aurais bien fait parce que je trouve ça incroyable surréalisme belge il y a qu'en
Belgique on peut mettre le roi pendant 2 jours vous êtes dans l'incapacité de régner c'est c'est
c'est hallucinant quand vous expliquez

nous on l'a pas guillotiné mais pendant 2 jours impossibilité de régler et donc les les
catholiques était traumatisé sur le plan éthique et les catholiques disaient on va aux élections
mais si on fait un accord au gouvernement les questions éthiques hors de l'accord du
gouvernement on ne veut pas la question éthique dans l'accord de gouvernement on Touche
pas au démenti catholique comme ça ils sont encore un peu toujours comme ça des questions
éthiques on veut pas du coup quand ils sont mis en accord gouvernement qu'ils ont abordé il

76
faut aborder les questions éthiques machin truc les catholiques sont mis en dehors alors on va
gouverner sans les catholiques par les catholiques au gouvernement et en 2002 il y a pas les
catholiques le gouvernement c'était un parti mené par le libéral vorst à l'époque libéral
flamand qui était Premier ministre et il y avait des écolos des socialistes, des libéraux et pas
de carte

ça c'est le gouvernement tel qu'il existe en 2002

.pas de question éthique dans la constition.

Luxembourg a aussi reconnu ou permis la dépénaliser l'euthanasie et dernièrement il y a 2 ans


l'Espagne L'Espagne aussi et en même temps le Portugal avait bien avancé mais le président
portugais probablement un copain de l'ancien roi des Belges président portugais il a dit il y a
quelques soucis dans la loi c'est pas possible et il a tout freiné 4 faits et la loi n'est pas passée
au Parlement portugais et pour le moment elle est toujours en suspens ces 8 parce que
politiquement ne sont pas arrivés à se mettre d'accord entre-temps j'ai entendu au Canada ça a
bouger ça a bougé aussi en Nouvelle-Zélande enfin bon ça vous retrouverez sur internet les
pays dans lesquels l'euthanasie a été reconnue mais en tous les cas on peut quand même dire
me semble-t-il globalement que

sur le plan des valeurs le pluralisme actuel qui prédomine en Occident et l'ouverture à la
vision alors je vais faire de la réalité de la mort questionne évidemment un mouvement des
soins palliatifs d'une part alors, vous aurez compris que Marie vision : est une vision dans
lequel les les je suis sensible à la vision que les gens donnent de leur vie

et et d'autres ça me semble central dans la manière d'aborder ces questions parce que
tellement moment qu'on vit à la satisfaction du patient il était intéressant et il est important de
s'intéresser à tous les facteurs psychosociaux qui persistent en faire sous peu à l'histoire la
qualité et la relation thérapeutique est déterminante mais la manière dont le patient vit sous
nos spiralisation est à mon sens tout à fait fondamental

tant qu'on peut dire qu'une éthique nouvelle était en gestation accèderons sur le respect de la
vie comme concept mais sur le respect des êtres qui vivent et qui souffrent sur l'acceptation la
responsabilité des conséquences de gestes posés et non sur la dissimulation..

il faut savoir que l'interdit ne permettait pas la libre décision du médecin c'est la prise en
compte par les décisions médicales de la manière dont chaque patient définit la qualité de sa
c'est reconnaître enfin que face à une situation médicale sans issue que chacun a bien entendu

77
le droit de choisir de vivre sans souffrance jusqu'à les séances naturelles mais qu'il a aussi le
droit de refuser ces offres et d'obtenir une mort librement choisie ; donc le euthanasie

Il voulait bien gouverner mais sur les questions éthiques il disait pas d'accord le
gouvernement donc ce qui veut dire que il il a empêché le gouvernement de prendre une
direction pour régler des problèmes éthiques

voilà ça c'était la position des chrétiens ils sont encore toujours un peu comme ça les les
chrétiens sous les questions éthiques ils veulent le le problème de la religion catholique pour
faire bref c'est que dès le moment que la religion ils détiennent une une vérité si vous voulez
la vérité c'est c'est Dieu c'est c'est la vérité donc ils veulent imposer une certaine vision à tout
le monde et donc ils ont toujours du mal quand les autres ne suivent pas leur propre vision ça
se comprend et donc ils sont toujours là un petit peu en en difficulté les les les les catholiques
c'est pour ces aspects-là dans une société plus moderne une société qui remet parfois en cause
justement le diktat de l'église catholiqueu vie être longue et pleine de joie, et votre mort brève
et sans douleur.

Exemple de la personne dépressive en Belgique: elle à assister à une explosion d’une


bombe == donc maladie psychique ; elle a 23 ans et les médecins ont suivi la loi ou la
législation (situation irréversible, ,douleur inacceptable) et ont décidé de pratiquer la mort
assister. Donc le cas a été fortement critiquer par les Français.

LA mort

Sont un peu éloignés les actions mais vont découler de celle-là où vont avoir ou nation où
certaine manière c'est ensemble je voudrais qu'on analyse sur le plan on va dire historique peu
l'histoire de la mort la mort au fil du temps veuillez voir aussi que c'est une question cette
cette vision des choses est aussi liée aux questions religieuses et le contre.

donc à à l'aube de de l'humanité je veux dire un peu l'éveil de la spiritualité la conscience de la


mort et une caractéristique de l'homme dans la mesure où il est capable notamment par le
langage et le symbole de postuler l'avenir et de se placer au-delà du moment présent cela

78
explique sans doute que l'homo sapiens notre ancêtre apparu il y a environ 300000 ans réalisa
les premières sépultures vieille pour les plus anciennes 200000.

alors on a retrouvé les restes de cadavres déposés dans des fosses parfois couchés en position
fœtale faut-il y voir le symbole d'une renaissance Edgar Morin en tous les cas par lui dans ses
ouvrages de mort renaissant le mort est paré et accompagné d'offrande sans doute un voyage
symbolique dans un autre monde.

il Pierre Morand ça c'est son nom de son vrai nom Edgar lahoun est un sociologue et
philosophe français auteur de nombreuses grèves Edgar Morin se revendique comme penseur
constructiviste il se définit comme un incroyant radical ces ouvrages sont intéressants et
notamment celui qui parle de la mort si vous êtes intéressé donc premier point on va dire la
mort remâchant suivons donc garde Morin qui nous dit que dans la conscience archaïque de
l'homme la mort semble indissociable de la fécondité l'arbre perd ses feuilles qui pourrissent
se transforment en humus lui-même nourrissant la terre où il puisera à nouveau les forces
bourgeonnaient à nouveau le nouveau-né reprend la place parfois le nom de l'ancêtre. et dans
les traditions quand on donne le nom de l'ancêtre c'est cette idée de mort René Cassin.

même si d'autres civilisations parleront de réincarnation on évoquera aussi le culte agraire les
sépultures sont parfois en bordure des champs ou ces populations encore liées en mort et
renaissance régurgite un animal qui représente l'ancêtre afin de s'approprier les forces du
défunt, animal totem en Afrique en tout cannibalisme etc doit-on voir dans cette dernières
pratiques l'origine de l'eucharistie ce ********* dont la doctrine chrétienne affirme qu'il
contient le corps du Christ dans le pain et le vin qu'il représente prenez et mangez ceci est
mon corps buvez en tout cas ceci c'est mon chant,

les sacrifices humains ou d'animaux montrent à l'envie la force fécondante de la mort elle
témoigne pour une guerre Morin l'homme et la mort c'est son ouvrage non mais la mort du
peu de cas qui est fait de la mort individuelle, donc ça c'était un peu pou au départ oui la mort
renaissance.

puis vous avez parce qu'en fait le concept du double au paléolithique les sépultures
contiennent armes et nourriture c'est le double du mort qui dans l'esprit archaïque reste vivant
il faut l'honorer obséquieusement car on le craint et les offrandes qu'on lui fait nous rappelle
que les sacrifices deviennent plus symboliques avec le temps. il reste que le concept mort

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naissant si les 19 du concept du double évolue concomitamment dans la conscience collective
C'est ainsi que l'univers des doubles se différencie progressivement du monde des vivants et le
culte des morts se complique quand il permettra de différencier le commun des mortels des
chefs qui deviennent des divinités. le double s'est donc détaché progressivement de l'âme pour
être parfois divinisé réminiscence de ce passé qui est en nous les mausolées et autres dépôts
de sang ou par ailleurs et cetera on connaît.

on va passer de cette dimension là à celle de la divination à l'intériorisation le double le


double comment le 2 ce spiritualise et devient là le souffle l'anima et Saint théorise aussi
puisqu'il devient cette parcelle immatérielle immanente où transcendante en nous-mêmes, le
double est intériorisé pour devenir l'arme celle-ci ne se séparera pas instantanément du corps
au moment du décès puisqu'elle rodera un moment autour du cadavre être la dépouille au
contact avec la terre mer aidera à la séparation corps âme. il deviendra et conviendra de de
préparer l'âme au voyage en pourvoyant le corps de nourriture et pour éviter son retour au
courant de la seule et on entoura devant de lette certaines traditions prétendent que l'arme
restera 3 jours au cimetière parfois davantage celle pour lesquelles on n'a pas pu accomplir les
derniers devoirs gerolt au cimetière vous connaissez ces expressions et réac comme une âme
en peine hein ou comment en Bretagne dans les bref concevoir l'idée d'une arme ne pourra
émerger que dans une civilisation individualisée comme le sont devenus celles du bord de la
Méditerranée de l'Inde ou de la Chine il faut croire selon divers auteurs que la croyance en
l'immortalité de l'âme qui est apparu au 5e et 6e siècle avant Jésus-Christ et la synthèse de ces
2 intuitions c'est-à-dire le double et la mort renaissance notre civilisation en fera la religion du
salut cette conception est centrale ******** et assurément bien ancrée dans les mentalités je
vous appelais l'immortalité de l'âme est une idée qui est une lutte centrale dans dans les dans
les religions. l'idée de ce que

Que les églises ont renforcé l'homme y a puisé le moyen de lutter contre l'angoisse et la peur
de sa propre finitude, au début du christianisme le chrétien s'endort jusqu'au jour du 2nd
avènement, pour se réveiller à la fin des temps au paradis vers le 12e siècle on parle de la
mort de soi, celle qui correspond au bilan d'une vie individuelle, et le jugement dernier
l'archange Saint-Michel pèse les armes et sépare les justes des damnés il semble qu au moyen-
âge la peur de l'enfer supplantait celle de la mort c'est l'époque de la mort acceptée résiliation
familière au destin collectif de l'espèce plus tard une conception se généralise qui veut que le
jugement se fait immédiatement après la mort les anges ne démons se disputaient larmes au lit
du mourant.

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et la mort est une cérémonie publique où le mourant atteint couché sur le dos implorant le
pardon de son entourage priant et recevant l'absolution et petit à petit pourtant le rôle essentiel
que joue le prêtre va être pris par le médecin en cette réalité ça va immanquablement aboutir à
la négation complète de la mort comme phénomène naturel la mort est devenue un accident
que les techniciens doivent empêcher, déjà au 18e siècle on rationalisait l'amour démographie
statistique dissertation des philosophes sur le suicide le goût des tombeaux les cimetières la
mort de toi a remplacé la mort de soi nous dit un auteur comme mariés 1957 si on connaît à
cette époque la peur de l'inhumation prématurée voir littérature et à graphique on décide de
construire des cimetières hors dès l'incertitude des signes de la mort retarde l'inhumation
jusqu'au premier signe de putréfaction qui fait peur et finit par précipiter l'enterrement

la mort reste une réalité vécue dans toutes les familles hein il y a 100 ans l'espérance de vie
était de 44 ans pour les hommes aujourd'hui on meurt davantage à l'hôpital on est passé de la
mort à apprivoiser à la mort escamotée on voit ainsi le médecin jouer le rôle de l'arbitre qui
est interdit d'abandonner la partie il y a un relais qui dans l'imaginaire collectif existe entre la
mort et la résurrection c'est-à-dire l'âme vit séparée du corps et le purgatoire est inventé à la
fin du 12e siècle au 14e jusqu'au 15e siècle on conçoit que les âmes restaurant au purgatoire
selon un temps proportionné à la gravité de leurs péchés ceux-ci sont rachetables par les actes
de piété des vivants en leur faveur prière au monde jeune pour les mains c'est l'ère du macabre
danse défilé importance donnée aux squelettes dans l'iconographie la peinture

c'est aussi le temps des épidémies hein la peste noire qui se répand de Florence toute l'Italie à
France puis sur toute l'Europe en 13 148 49 avec 25000000 de membres 1/3 des citadins et
1/8 des populations rurales qui ramène l'espérance de vie à la fin du 14e siècle à 25 ans

la mort est toujours présente on note encore une épidémie en 10 722 à Marseille les gens s'y
préparent et le croyant est toujours prêt à se présenter devant Dieu pour le passage à la vie
éternelle le trépas est valorisé et au 17e siècle on s'en est impressionnante cérémonie
publique.

la mort spectacle le personnage important avec toute sa pompe l'annonce de l'immanence de la


mort la confession la mèche dans la chambre de communion les adieux domestique à la fin
l'extrême-onction voir la mort du roi soleil hein mais aussi les scènes peintes sous de
nombreux tableaux qui témoignent de cérémonies adaptées à toutes les conditions sociales la
société va réagir contre l'acharnement thérapeutique chez nous qui qui n'est pourtant pas
clairement défini pour réclamer davantage d'autonomie et de compassion C'est ainsi qu'il

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s'agit donc aujourd'hui de mettre en balance les chances d'une prolongation significative de
vie et qualité raisonnable avec le caractère pénible et les inconvénients c'est le traitement et
des actes thérapeutiques il reste encore vos travail pour que la mort soit à nouveau perçue
comme bref comme naturel donc vous voyez bien l'histoire de la mort où ce rapport que nous
avons à la mort, à une dimension toute historique et là varié dans le temps elle varie
aujourd'hui et je pense qu'elle varie aussi d'une société à l'autre notamment les sociétés
africaines ont par rapport à la mort une dimension très intéressante hein moi j'entendais de
collègues vos amis africains dire que la mort était partout quand on voyait de l'eau qui circule
ou le flat ça fait partie de rappel à la mort et donc quelque part cette dimension philosophique
de la mort elle est vécue partout et et c'est partout qu'on peut la ressentir

alors aujourd'hui quelle est notre vision et là évidemment profondément changé puisqu'on est
même dans une société où publicité faisant on a l'air de gommer à la mort hein c'est comme si
c'était quelque chose qui n'existait plus et c'est quelque chose qui qui rageusement va désirer
manière ne nous empêche pas de vivre on ne peut même pas s'imaginer ce qu'était la mort à
l'époque où les mamans elles perdaient la majorité de leurs enfants parce que c'était comme ça
la vie on peut même pas imaginer aujourd'hui une société dans laquelle la mortalité infantile
est presque réduite hein et ça c'est quand même les progrès de de la médecine qui ont permis
de faire ça mais qui nous montre que il est pour nous aujourd'hui difficile de se placer à à
l'époque comment on voyait comment on pouvait vivre avec un mort moi je crois même que
si on regarde les choses à la grande louche on peut même dire que d'une certaine manière le
CE qui représente la plus grande solitude de l'homme c'est précisément la mort et que par
rapport à cette grande solitude l'église a trouvé d'emblée une réponse formidable en disant à
l'homme qu'il n'allait jamais rester seul puisque une fois mort il allait revivre donc tu ne
certaine manière les églises ont pu et ont réussi à répondre à la plus grande angoisse de l'être
humain et donc en cela réussi à convaincre et réussit à être ce qu'elles sont aujourd'hui donc le
rapport à la mort et à la religion sont des choses qui sont très prégnantes alors notre société
aujourd'hui je vous disais la majorité des gens meurent à l'hôpital on le voit c'est une réalité
vous le savez bien et donc d'une certaine manière c'est comme si on avait des déshumanisé
quelque part

Et donc on est on est parfois étonné de de de de de de de de la réaction des gens qui de plus en
plus ont le souhait de vouloir terminer chez eux c'est ce qui se fait d'ailleurs on développe de
plus en plus des soins à domicile ou d'autres aspects de de de la vie mais en tous les cas on ne

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peut pas dire que le questionnement sur la mort et quelque chose qui est et est encore toujours
très présent dans nos sociétés dans nos sociétés modernes et pourtant c'est parfois paradoxal

parce que il vous suffit d'allumer la télévision il suffit d'aller au spectacle pour voir que on te
tout le temps hein il y a pas soir s'il y a pas des morts en télévision ou des films dans lesquels
nous montre la mort donc la société est devenue un peu paradoxale la mort on en parle on a
l'impression d'en parler beaucoup et en réalité on n'en parle pas trop je vous demandais tout à
l'heure qui ce qui était allé à la commune pour faire valoir des documents de disposition
anticipé ou d'autres choses on ne le fait plus on ne le fait pas parce que la mort on essaye de
ne pas vivre de ne pas vivre à et donc à cet égard la société moderne a un rapport qui a changé
et donc on ne doit pas s'étonner de ce que les questions d'aborder la mort un peu différemment
d'enfant.

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