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Cours Arts Plastiques

Enseignant : Pauline Vachon


Élevé : Julia Mazzutti Bastian Solé

La question de la monumentalité dans l'art contemporain et les


frontières perméables entre l'art, l'architecture et le design

Terre Protégée II, Pinerolo, juin 1969 - Gina Pane, 1970


Biographie de l’artiste :

Gina Pane est une artiste française, née à Biarritz en 1939 et morte à Paris en
1990. Son père était Italien et sa mère Autrichienne. Pane a passé une partie
de sa vie en Italie et revient en France pour faire ses études aux Beaux-Arts de
Paris de 1961 à 1966.

Elle a commencé sa carrière artistique avec des peintures et sculptures,


marquée par les enseignements classiques de l'École des Beaux-Arts. Ensuite,
elle produit des performances et actions directement dans le paysage qui l’ont
marqué comme un des plus grands représentants du mouvement L'art
corporel, qui est un ensemble de pratiques artistiques effectuées sur ou avec le
corps.

Gina Pane a également été professeur à l'école des Beaux-arts du Mans de


1975 à 1990 et dirigea un atelier de performance au centre Georges Pompidou
en 1978 et 1979 à la demande de Pontus Hulten.

L'artiste elle-même distingue son ensemble de œuvres et son évolution


artistique en trois périodes :

Le première, de 1968 à 1970-71, où, " par ses actions corporelles, elle met en
question la relation personnelle à la nature. Ses actions ou ses installations se
déroulent souvent dans l'intimité."

Une deuxième période, au cours des années 1970, Gina Pane pose " la
problématique du corps actif face au public. Le support du travail est
l'espace-temps. De l'œuvre d'art proprement dite, il reste le relevé
photographique d'un certain nombre de moments soigneusement choisis et
l'objet performatif. Les actions constituent une recherche d'un autre langage,
d'une pratique biologique de l'existence par une tentative de transformation de
l'individu au travers d'une volonté de communion avec l'Autre. Par l'absolu de
la créativité d'une démarche en constant renouveau, Gina Pane bouleverse
l'esthétisme et donne une nouvelle image de la beauté. "

Le troisième et dernière phase, intitulée "Les Partitions", a commencé à la fin


des années 1970. - "Le rôle du corps et sa relation au monde demeurent le
sujet central. Le langage mis en place dans ses actions est alors utilisé dans un
travail de création autonome. La représentation de la blessure devient
symbolique. Dans les dernières « Partitions », la matérialité du corps se
retrouve traduite au travers de matériaux tels le bois, le fer, le verre et le
cuivre."
Présentation formelle de l'œuvre

Titre : Terre Protégée II, Pinerolo, juin 1969


Artiste : Gina Pane
Année : 1970
Photographie noir et blanc, épreuve aux seins d'argent
Dimensions : 100 x 67,5 cm
Collection MAC/VAL, Musée d'Art Contemporain du Val-de-Marne,
Vitry-sur-Seine

Selon l’artiste, à propos de Terre protégée II : « (…) j’ai protégé un morceau


de terre équivalent à l’espace de mon corps – je l’ai protégé pendant 4 heures,
sans bouger et encore une fois c’était une sorte de… de… presque d’affection
que j’avais pour cette terre qui me manquait, qui me manque, évidemment.
Mais je l’ai protégée avec ma chair, c’est-à-dire que j’ai fait une analogie entre
un fait biologique et un fait matériel qui se complètent l’un l’autre. La terre est
nourricière de mon propre organisme biologique et moi, je la protège parce
que je suis coupable de ce qu’elle n’existe plus, de ce qu’elle disparaît ».

« L’image offerte, appelée « constat d’action », n’est pas le simple


enregistrement d’un événement. Prémisses de l’utilisation du corps dans
l’œuvre, ces actions in situ sont à rapprocher du mouvement du land art
américain et de sa portée écologique. Le corps comme matériau et non plus
comme représentation, d’une part, la photographie comme outil d’analyse du
geste accompli, d’autre part, désignent Gina Pane comme l’une des premières
en France à chercher les bases d’un vocabulaire nouveau tentant de repousser
les limites de l’art. »
Présentation de l'œuvre dans le contexte de l'exposition

L’exposition Là où commence le jour, présentée au LaM, fait partie de la série


d'événements de Lille 3000 – Renaissance. Elle dévoile une compilation de
sculptures, installations, photographies, vidéos, œuvres sur papier et peintures
contemporaines qui dialoguent avec une sélection de livres, estampes et
dessins du Moyen Âge et de la Renaissance.

A en voir la description du site internet du musée, l’exposition « prend la forme


d’un parcours poétique ayant pour thème l’émancipation de l’individu par la
(re)connaissance du monde qui l’entoure. À l’instar de L’Odyssée d’Homère ou
de La Divine Comédie de Dante – mais aussi des jeux de rôles contemporains
–, ce récit visuel inédit invite le visiteur à accomplir un voyage sensible et
mystérieux où lui sont révélées, d’œuvre en œuvre, la perception et la
conscience que l’être humain a des savoirs, des symboles, de la nature, du
corps, de la création, de l’espace et du temps. »

L’exposition est développée et encadrée dans la temporalité ‘du crépuscule à


l’aube’. Cette temporalité est représentée par la mise en page et le thème des
œuvres, qui sont divisées en douze sections, aussi appelées chapitres - Le
Début du Voyage ; Le Monde n’est qu’illusion ; Objets mystérieux, armes
magiques ; Les Trois Grâces ; Les Prêtresses ; Les Quatre Éléments(le feu, la
terre, l’air, l’eau) ; Le Corps et sa mesure ; Le Monde entre mes mains ;
L’Expérience des limites ; Au Bord du monde ; Le Jardin des merveilles ; La Fin
du voyage – qui sont précédées d’un prologue et suivies d’un épilogue. Cette
division entraîne le spectateur dans un voyage durant lequel sont proposées
des questions sur l'existence humaine et la relation de l'homme avec son
corps, avec la nature et avec les objets qui vous entourent. Les titres de
chapitre renforcent l'idée du voyage, le parcours de la découverte ; et sont
aussi un moyen d’avoir un principe central de guidage qui intègre au sein de
chaque groupe, les œuvres de différents époques et médias artistiques.

L'œuvre de Gina Pane est située sur la sixième partie de l'exposition, intitulée
Les Quatre Éléments. Cette section propose au spectateur de retrouver le sens
des éléments premiers de la nature tels que l’eau, l’air, la terre et le feu.

« Deux figures mythologiques introduisent cette nouvelle séquence de


parcours de l'exposition. D'un côté la Fortune, déesse symbolisant le destin
avec toutes ses inconnues, mais également la course inexorable de la vie et du
temps ; ses emblèmes principaux étant la sphère et la roue - deux éléments
déjà présents dans la gravure Melancolia I de Durer. De l'autre Atlas, Titan qui,
condamné par Zeus, soutient éternellement le globe terrestre sur ses épaules.
Au regard de ces deux allégories, l’être humain semble encore prisonnier d'un
monde qui le dépasse. »

Jusqu’au début de l’ensemble, nous avons la photographie de Gina Pane qui


représente d’une maniéré extrêmement sensible la relation et le contact entre
l'homme et l'élément terre. Le travail de Pane est situé à côte et est liée à
d'autres expérimentations performatifs qui cherchent à créer une
représentation artistique à partir du contact direct avec l'environnement en
question, dans le cas de Pale, la nature et le sol. Après être interrogé sur les
moyens de compréhension du monde, de confronter des objets mystiques
utilisés dans une tentative de comprendre ce monde et à réfléchir sur les
limites de l'univers, le visiteur est ramené aux quatre éléments primaires qui
représentent au même temps le début de tout et la matérialité de l'homme, qui
est résumée dans sa relation avec la matière et l'esprit qui a émergé de lui.
Les bras ouverts, la performance de Gina Pane démontre l'inquiétude proposée
par l'exposition qui demande le visiteur à examiner et à se remettre dans la
redécouverte de sa relation avec le monde, comme c’est le cas pour Pane qui
s’est totalement abandonnée à la terre, proposant une connexion et un
manifeste sur la nature.

La photographie de Gina Pane est intégrée à l'exposition au moment oú elle


évoque ce sentiment de protection et de réunion fournie par l'énergie terrestre.
Aussi, elle illustre parfaitement le contexte des quatre éléments à révéler la
pensée, les gestes, les pulsions, les interactions ou la communion harmonique
du corps de l'artiste avec ce corps retrouvé de la nature.

Analyse critique de l'œuvre en replaçant cette analyse dans le contexte


de l'histoire de l'art en lien si possible avec le cours

La relation entre l'homme et la nature est traitée de différentes façons au long


de l'histoire de l'art. Dans les premiers enregistrements de ce que nous
appelons aujourd'hui l'art rupestre, nous avons la pure représentation de
l’homme et de sa vie qui, à cette époque, a été entièrement insérée dans
l'environnement. Au fil des années, dans les peintures de la Renaissance et du
Baroque on peut voir la figure humaine immergée dans un paysage naturel qui
parfois intensifie le drame de la scène, comme dans les appareils d'éclairage et
l'ombre baroque, et parfois uniquement comme arrière-plan pour la bataille
humaine qui se déroule au premier plan. En passant par le néo-classicisme où
la nature fonctionne toujours en arrière-plan, nous arrivons au romantisme et
au réalisme où l'homme et la nature font partie du même plan, intégrer
ensemble la scène que nous voulons afficher. Au XXe siècle, les avant-gardes
artistiques étaient représentés par les impressionnistes qui, contrairement à la
voie académique classique, prennent la nature comme leur objet d'étude et
d'admiration. Sous l'apparence de sensations, l'effet des variations de lumière
sur la perception de l'artiste sont représentés dans la façon la plus crédible
possible. Puis, nous allons à travers des premières décennies du XXe siècle, où
l'art et la représentation du monde ont été interrogés et présentés de façon
complètement différente, jusqu’aux années 1960, où Gina Pane a commencé
sa carrière artistique.

Gina Pane avait une formation classique aux Beaux-Arts qui lui a permit de
conserver un intérêt sans cesse renouvelé pour le corps. Cependant, tout au
long de sa carrière, elle a utilisé ses références classiques de manière
innovante, se donnant complétement comme artiste et comme être humain à
ce contact avec la nature. Plus que ça, à un moment de l'histoire de l'art où
beaucoup d'artistes soulignent leur « identité culturelle », elle revendique
surtout un internationalisme qui n'est guère à la mode : « J'ai des relations
avec des formes et des problèmes qui appartiennent au monde entier [...]. Ma
culture est un croisement ; elle est métisse. »

Avec d’autres représentants de l’art corporel comme Marina Abramovic, Michel


Jouniac et Chris Burden, Gina Pane a fait un travail qu’implique la lecture avec
le corps tout entier. Ces artistes sont insérés dans une période de
transformations artistiques et sociales intenses qui ont suscité à ceux le besoin
d'utiliser le corps pour faire la question et peut-être essayer d'expliquer cette
nouvelle relation avec le monde.

A côté de cela, l'amélioration des techniques et des moyens de la


représentation a donné au corps humain une locution plus forte qui permet de
le démontrer comme une expression de la recherche existentielle humaine.

Dans ce contexte, au début des années 1970 Gina Pane produit son œuvre
Terre Protégée II. Elle fait de son corps un instrument de langage et non
l'objet de son art. Ce travail peut être considéré comme une compilation de
l'agitation de l'artiste sur le monde autour et la recherche du calme perdu dans
la nature. Entre tous les nouveaux médias modernes, tels que les installations
et les collages, Pane a choisi pour ce travail la photographie comme un moyen
de présenter en temps réel et avec la plus grande fidélité possible son
expérience performative à la terre.

L’œuvre est insérée dans la première période de son développement artistique


et en accord total avec l’idée générale de cette phase, de mettre en question la
relation personnelle à la nature par des actions corporelles. Son travail se
présente comme une réflexion politique et se veut plus qu’une simple
performance. L’artiste utilise ici son corps pour inciter le public à faire face à
des questions sur le monde et sur la destruction de la nature. Tous ses actions
sont minutieusement préparées et documentées, où chaque geste est accompli
avec une dimension rituelle.

Le travail est une démonstration de la conscience écologique et exprime au


même temps un rapport affectif et filial au sol. Dans l’action de la performance
où l'artiste étend ses bras dans une partie définie de la terre, comme un geste
de protection et d'appartenance, « la photographie en est le témoin et l’outil
d’analyse ».

Le corps de l’artiste est déplacé en tant que « émetteur – récepteur « de son


environnement. L’œuvre, éphémère et fragile par rapport au univers, utilise le
corps comme un lien entre le ciel et le terre, le divine et l’humain, l’immatériel
et le matériel.

« Cette œuvre veut ainsi réactiver la dimension rituelle d'un geste en voie de
se perdre : celui de la main de l'homme se plongeant dans la terre, au moment
même où l'urbanisation et la mécanisation de l'agriculture connaissent leur
prodigieux essor. Le geste sensible de Gina Pane - les mains enclosent l’espace
vide de la terre, les mains sont ouvertes au-dessus de la terre. »
Enfin, le travail de Gina Pane propose, selon l’artiste, « La nature comme une
force poétique, comme un lieu de mémoire et d’énergies » ; c’est la terre, dans
toute sa matérialité, comme un moyen d'encourager et de développer la place
de l'homme sur l’existence corporelle.
Sources:

http://www.musee-lam.fr/archives/category/decouvrir/agenda?mode=agenda
&evt=13010&anneemois=2015-10

http://www.dailymotion.com/video/xf9tt8_portraits-de-femmes-artistes-gina-p
_news

http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article625

http://www.universalis.fr/encyclopedie/gina-pane/

http://www.macval.fr/francais/collection/oeuvres-de-la-collection/article/gina-
pane-4315

KINDERSLEY, Dorling, Art - The Definitive Visual Guide, DK UK, London

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