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- CASSOU Jean, « L’Esprit du symbolisme », dans CASSOU Jean, Encyclopédie du Symbolisme,
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- CREPALDI Gabriele, L’art au XIXème siècle, Paris, Hazan, 2005
- DENIZEAU Gérard, Vocabulaire des arts visuels du XIXe siècle, Paris, Minerve, 2004
- DENIZEAU Gérard, Panorama des grands courants artistiques, Paris, Larousse, 2019
- GENTY Gilles (et al.), L’ABCdaire du Symbolisme et de l’Art Nouveau, Paris, Flammarion,
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- GIRARD Xavier, Matisse “Une splendeur inouïe”, Paris, Gallimard, 2008 (1ère éd. Paris,
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- MATHIEU Pierre-Louis, Gustave Moreau, Paris, Flammarion, 1994
- PILLEMENT Georges, « Peinture, Gravure et Sculpture », dans Encyclopédie du Symbolisme,
Paris, Somogy, 1988
- TUFFELLI Nicole, L’art au XIXème siècle, Paris, Larousse, 2013
Plan : chronologique, on reste en france mais tout ce qui vient des autres pays en terme
d’influence on l’inclut
Vers 1880, en Europe, l’idée et l’idéal prennent leur revanche sur la nature et le vrai, et les
artistes se réfèrent au mouvement anglais parce qu’ils y trouvent un matériel littéraire,
Le symbolisme connut des développements féconds dans l’Europe entière, mais nous ne
verrons que le cas de la France.
De l’Angleterre à l’Italie, de l’Espagne à la Scandinavie, de la France à la Russie, le
symbolisme regroupe des artistes très divers. Ce qu’ils ont en commun c’est moins un
programme que ce contre quoi ils s’élèvent : l’académisme, le réalisme et l’impressionnisme,
le matérialisme et le positivisme, la civilisation industrielle dont les progrès leur paraissent
être des facteurs de dégradation ou de décadence. Ils leur préfèrent le rêve, l’imaginaire, le
monde de la pensée.
Les grands peintres et personnages du symbolismes semblent reclus dans leur univers. De
nombreux symbolistes s’intéressent à l’occulte et considéraient l’hermétisme comme une
vertu. Cette réculsion comdamne-t-elle le symbolisme à n’avoir aucun autre apport sur ses
prédécesseurs ? De plus, le symbolisme n’apparait pas par hasard. On peut donc se
demander si le symbolisme français est au carrefour des mouvements.
Dans un premier temps, il s’agira de comprendre les origines du symbolisme, puis de le
présenter et enfin de comprendre ses répercussions sur l’art moderne.
Problématique : le symbolisme français au carrefour des mouvements
I. Les prémisses du symbolisme
La Renaissance et les préraphaélites
Tout d’abord, nous allons voir que la Renaissance et les préraphaélites anglais ont joué un
rôle important dans la naissance du symbolisme.
Dans la peinture de la Renaissance, il est difficile de séparer l’idée du symbole. L’art de la
Renaissance présente des qualités et des idées qui allaient fasciner les peintres et les
sculpteurs symbolistes du XIXème siècle. On y trouve le conflit de système de
communication « ouvert » et « fermé ». Des éléments empruntés à un langage que toute
personne instruite pouvait comprendre, mais d’autres symboles étaient compris seulement
par des initiés. Le symbole acquiert une résonance dans l’esprit du spectateur.
Les maîtres italiens veulent faire vivre l’imagerie de l'antiquité païenne en la réinterprétant.
Feu Edgar Wind, dans son livre les Mystères païens de la Renaissance, comprit que l’une des
clés de l’interprétation des tableaux se trouvaient dans les écrits philosophiques
néoplatoniciens tels que Plotin, ainsi que dans la lecture des humanistes de l’époque. Le
néoplatonisme selon le CNRTL est un “courant artistique, littéraire, philosophique qui se
réclame des doctrines de Platon et de Plotin”. Elle s'inspire aussi des doctrines religieuses
orientales. Le néoplatonisme se caractérise par l’importance du Premier principe et l’Un qui
correspond à la cause première de l’ensemble de l’univers en métaphysique, ainsi que par
des expériences mystiques. Le mysticisme est la recherche de l’absolu ou de Dieu à travers la
contemplation ou de l’extase.
Le néoplatonisme au sens général eut presque autant d’importance pour les philosophes et
artistes du mouvement symboliste qu’il en a eu pour les pionniers de la Renaissance. Dans le
milieu symboliste, les philosophes en vogue étaient Hegel et Schopenhauer qui présentent
tous les deux une composante néo-platonicienne non négligeable.
Botticelli comme Mantegna sont des figures qui influencent fortement les peintres
symbolistes, particulièrement en Angleterre. Par exemple, Mantegna remplissait chaque
espace vide par de la roche et on retrouve cela chez Moreau.
L’héritage le plus prophétique laissé par la Renaissance au symbolistes et probablement
l’orage de Giorgione. Comme le montre Wind, le tableau de Giorgione constitue une des plus
grandes énigmes. On a des éléments ouvertement allégoriques. Le tableau témoigne d’une
mystérieuse capacité à véhiculer du sens sans être complètement spécifique. C’est le
spectateur qui complète l’œuvre à l’aide d'éléments qu’il trouve en lui-même. Cette
suggestivité et cette ambiguïté constituent l'essence même de la poésie symboliste, que
nous verrons par la suite. Elle ne pouvait qu'avoir une égale importance pour les artistes
symbolistes.
Les théoriciens du mouvement symboliste reconnaissaient que le symbole pouvait être un
objet doté d’un existence propre. Diffusant une influence mystérieuse et affectant
l’ensemble du contexte où il se trouvait.
De plus le néoclassique anglais touche largement l’Europe avec la figure de Flaxman, célèbre
pour ses illustrations d’Homère. Constable, un artiste d’un genre tout à fait différent, eut un
impact considérable sur Delacroix lorsque son travail fut exposé à Paris. L’artiste ayant le
plus influencé le courant symboliste semble être Turner. Il est reconnu comme un génie
d’envergure européenne. Les préraphaélites sont aussi très importants dans l’art européen
de la 2ème moitié du XIXème siècle. Ils représentent un esprit idéaliste présent dans l’art
anglais depuis le début du siècle. William Blake, qui a passé toute sa vie à construire un
univers symbolique, est le père du courant préraphaélite. Nous allons principalement nous
attacher aux préraphaélites.
Ce fut la fondation de la Confrérie préraphaélite qui assure le devenir de la tendance
idéaliste et symbolique de l’art anglais. Le préraphaélisme trouve son inspiration à partir du
mouvement allemand nazaréen et en partie chez William Blake. Les premières années du
préraphaélisme furent des œuvres quasiment photographiques. Ce courant anglais débute
en 1848 lors de la fondation de la Pre-Raphaelite Brotherhood. Les membres sont William
Hunt, John Everett Millais et Dante Gabriel Rossetti. Ils sont fortement influencés par les
écrits de Ruskin. Comme leur nom l’indique leur nom, ils se réclament des peintres de la
première Renaissance italienne. Ils rejettent la tradition académique, ils veulent se
rapprocher de l’art gothique et du Quattrocento.
La technique picturale académique est remise en question. Les couleurs deviennent plus
éclatantes, le style est précis et s’intéresse aux moindres détails. Leurs sujets s'inspirent
directement de la nature ou bien sont chargés d'intentions littéraires ou d’illusions
mystiques, tout en portant une visée symbolique, morale et philosophique. Ils s’appuient sur
des récits littéraires comme la Bible mais aussi des légendes. Leur but est d’atteindre une
pureté spirituelle qu’ils considèrent comme perdue à leur époque.
Les préraphaélites utilisent une technique d’une exactitude absolue. Ils se rapprochent de ce
fait de la photographie. Cette fidélité rend plus crédibles les scènes légendaires, historiques
ou bibliques. On donne donc l’impression par ce naturalisme que l'enchanteur Merlin est
réel par exemple.
Leur style prend en notoriété et réalise un grand succès à Paris lors de l’Exposition
universelle de 1855. Le groupe se dissout peu à peu, mais influence, par la suite, de
nombreux artistes symbolistes. Les historiens de l’art s’accordent aujourd’hui pour dire que
les préraphaélites sont les principaux précurseurs des symbolistes. Ce premier
préraphaélisme (il y en a plusieurs) influence directement la génération de peintres de
Moreau et Puvis de Chavannes.
Une autre partie du préraphaélisme influence fortement les peintres et symbolistes français.
Il s’agit du concept de la “femme fatale” réalisé par Rossetti. Ses femmes sont dans un
univers à part, elles ne sont pas situées de façon précise dans l’espace et le temps. La toile
Astarté Syriaca de 1877, incarne cette conception et est représentée avec ses attributs les
plus caractéristiques.
Un autre grand peintre de la seconde phase du préraphaélisme est Burnes-Jones. Il
représente souvent des thèmes mythologiques. Il est un des premiers peintres à s’adresser
délibérément à un public restreint, composé de personnes assez sensibles pour recevoir le
message qu’il souhaite transmettre. On voit que ses œuvres se rapprochent des idées
symbolistes françaises. Pour l’ouverture de la Grosvenor Gallery, le magazine Punch publie
“Les peintures - pour la plupart elles étaient de celles qu’on regarde plutôt qu’un achète -
l'étrange, le bizarre, le démesurément mystique, le lugubre et l’aride”.
Le dernier artiste préraphaélite important est George Watts. Il dit à propos de lui : “Je peins
des idées, et non des choses. Je peins avant tout parce que j’ai quelque chose à dire. [...]
Mon intention n’est pas tant de peindre des tableaux plaisants à l’oeil que de suggérer de
grandes pensées qui s’adresseront à l’imagination et au coeur et éveilleront tout ce qu’il y a
de meilleur et de plus noble en l’homme.”
Le romantisme
Le symbolisme doit être compris dans le mouvement du romantisme. Le romantisme
représente un bouleversement des esprits. On rompt avec la croyance fortement ancrée en
la capacité de la raison humaine à gouverner toutes les actions et résoudre tous les
problèmes.
Chez les romantiques, on trouve une part de rébellion contre les restrictions de tous genres.
La validité et l’autorité du monde sont mises en doute, et de cela triomphe inévitablement la
subjectivité. Dans le romantisme, les hommes cherchent en eux-mêmes la ligne à suivre. De
là est né le mythe du “génie”, de l’homme à l’inspiration divine, capable grâce à son
imagination de transformer en art toutes ses expériences et émotions. En termes artistiques,
l’essence du romantisme est l’imagination. Les peintres romantiques s’inspirent beaucoup
de Goya, Blake et Füssli. Ils réalisent les bases sur lesquelles se développe un art qui redonne
la priorité aux spirituelles sur la matière. Goya, dans ses peintures, traduit ses cauchemars et
ses hallucinations en forme des monstres, fait appel aux sorcières et ouvre la porte à la folie.
Il apprivoisé les formes qu'il n'existe que dans l'imagination des hommes. Blake poète
peintre et graveur méprise profondément la nature et la réalité pour vivre dans l'imaginaire.
Tout comme Goya et Blake, Füssli évolue dans le monde de ses rêves et du surnaturel.
Le tableau Le Colosse de Goya peut être considéré comme “pré-symboliste”. La silhouette
imposante domine l’espace de la toile. Elle traduit en termes picturaux la panique qui
grandit jusqu’à remplir tous les recoins de l’esprit. je sais pas trop je trouve que l’auteur va
peut être un peu loin pour Goya
De fait, plus on s’intéresse au romantisme, plus on mesure l’importance de la symbolique.
Par exemple, les paysages sublimes de Caspar David Friedrich sont empreints de
symbolisme. Les contemplations mystiques du peintre frappent par leur silence. Les
compositions de Friedrich suggèrent l’infériorité de l’homme face aux forces de la Nature. Le
Naufrage du Hope peint en 1821 par Friedrich montre l’importance de la symbolique. La
source d’inspiration vient d’un fait réel mais la source historique est vite écartée. Le bateau
est l'espoir qui sombre dans les étendues gelées qui sont le symbole de la mort et du
désespoir. Friedrich fait résonner dans l’esprit une simple métaphore picturale, il la
transforme donc en symbole.
On retrouve aussi une parenté dans les dessins du poète Victor Hugo comme le Rêve. Ce
dessin témoigne d’une figure unique qui préfigure les lithographies d'Odilon Redon.
Delacroix joue un rôle important dans le processus qui fait émerger le mouvement
symboliste en tant que tel du romantisme. Delacroix représente souvent des sujets bibliques
où la mort est centrale. Les femmes qu’il représente sont souvent tourmentées
psychologiquement et physiquement. Le lien entre Delacroix et le symbolisme s’illustre dans
un de ses principaux chefs-d'œuvre la Mort de Sardanapale exposé au Salon en 1827. La
posture langoureuse presque efféminée de Sardanapale, les montagnes d’or et de joyaux qui
l’entourent, le sadisme de l’esclave qui égorge une des femmes. Ce sont tous des éléments
qu’on retrouvera dans le travail de Moreau.
Un autre peintre romantique influencera considérablement les symbolistes. Il s’agit de
Théodore Chassériau. Il était élève de Ingres, et fût vite happé par l’imaginaire. Il a visité
l’Algérie comme Delacroix, et fut séduit par l’Orient. Il utilise des couleurs chatoyantes.
Moreau et Puvis de Chavannes fréquentent son atelier et sont influencés par sa technique et
le choix de ses sujets. Il transmit sa technique picturale à Moreau qui lui voua toute sa vie
une véritable vénération. De plus, les symbolistes sont séduits par les femmes que
représente Chassériau. Moreau repris notamment le thème de Sapho, comme on le voit
dans Sapho de 1849. Sapho est l'image même de la destinée tragique des génies incapables
de se consoler d’un amour perdu.
les thèmes
Dans cette partie, nous allons nous intéresser aux grands thèmes abordés par les
peintres symbolistes. Il est difficile de définir clairement un style symboliste, puisque le
mouvement a réuni de nombreuses tendances différentes les unes des autres. Un certain
nombre de thèmes sont cependant communs à tous les artistes.
Le premier grand groupe de thèmes que nous allons aborder est celui qui rassemble
le thème de la femme, de l’amour, la sexualité, la sensualité, lié à la mort. Ainsi, que le type
de l’androgyne. La femme, sous tous ses aspects, est souvent au centre de la thématique
symboliste, sous son visage fatal (Salomé, Dalila), sacré (Sainte Geneviève par ex) ou
magique (fée, sphinges…).
La femme fatale est un thème largement répandu au XIXème siècle dans l’art
symbolique, que ce soit en littérature dans Salammbô ou dans La Tentation de Saint-Antoine
de Flaubert. L’imaginaire de la femme fatale est aussi alimenté à l’époque par la
psychanalyse naissante et notamment grâce aux travaux sur l’hystérie de Jean-Martin
Charcot. L’hystérie devient une source d’inspiration. Les peintres vont réaliser de
nombreuses représentations de cette femme fatale, impure et perverse. L’archétype
demeure les figures bibliques de Judith ou encore Salomé, qui associent la sexualité à la
mort, à la sensualité morbide, ainsi qu’au sadisme et à la luxure, la perversion. Les peintres
reprennent donc le thème de l’amour-passion consommé dans la mort. Sur ce thème, nous
avons de nombreuses représentations de Salomé qui connaît un très grand succès, comme
chez Gustave Moreau dans L’Apparition où on voit Salomé dansant devant Hérode avec une
vision de la tête flottante de Jean-Baptiste décapité. Les représentations du personnage de
Salomé prit au fil du temps une dimension de plus en plus érotique au point de devenir selon
Huysmans : « la déité symbolique de l'indestructible Luxure, la déesse de l'immortelle
Hystérie, la Beauté maudite (…), la Bête monstrueuse, indifférente, irresponsable,
insensible…». La figure de la femme domine parce qu’elle symbolise par elle-même
l’ambivalence du désir et de la mort, la pulsion physique, le vice, la déchéance. Elle est
représentée comme un être attirant et fatal, perverse et dangereuse. Les femmes chez
Moreau, lorsqu’elles ne sont pas d’actives destructrices comme Salomé, sont des êtres qu’il
ne faut pas offenser. Ses fées sont des personnages sinistres et puissants mais d’une grande
beauté. Elles semblent participer à une célébration imaginative des peurs masculines de la
castration et de l’impuissance. La beauté fatale entraîne l’homme à la mort. Marqués par la
conscience de l’instabilité du monde, la fin des valeurs spirituelles et la déchéance
inéluctable du corps humain, les esprits sont hantés par la mort. Cette obsession est
partagée par des artistes et transparait très bien à travers la femme fatale associée à la
mort, à un nouvel érotisme sulfureux, mêlant fétichisme, sadisme, et satanisme. Les artistes
symbolistes cherchent à représenter l'éternel féminin cruel tel qu'il le conçoivent.
Ce thème de la femme fatale peut également être représentée par la figure magique du
sphinx, qui connait un extraordinaire regain de faveur auprès des artistes symbolistes. La
nature hybride du Sphinx correspond, à l’époque symboliste, à la double nature de la
femme. Instrument de la tentation, la sphinge, dont la froideur pensive est une des
expressions de la cruauté féminine, envahit la peinture. Les artistes voient dans cette
créature énigmatique, mi-homme mi-bête, le détenteur de mystères ésotériques. Moreau
avait notamment rencontré le succès au Salon de 1864 avec Œdipe et le Sphinx, œuvre dans
laquelle on discerne un mélange pervers d’attirance et de répulsion. Moreau opposait dans
la figure du Sphinx les « ailes prometteuses de l’Idéal » et le « corps du monstre, du
carnassier qui déchire et anéantit ».
Ces images de la femme ont une double connotation démonique ou angélique, avec des
allusions érotiques. Le femme fatale s’opposent donc aux d’effigies de la chasteté comme la
figure d’Ophélie, Béatrice ou de la Vierge Marie, de sainte Geneviève, qui représentent la
femme idéalisée, pure, hiératique, vertueuse, devenues anges ou fiancées ésotériques et
mystiques. C’est donc une vision idyllique comme chez Maurice Denis avec son tableau
Saintes femmes au tombeau de 1894, où les femmes sont empreintes de sentiments
religieux. La nudité innocente des femmes de Puvis de Chavannes, comme dans l’Eté de
1891, incarnent l’espérance, la pureté porté par cette deuxième vision de la femme.
Ces deux visions extrêmes et contraires de la femme, s’accompagnent d’une forte
misogynie dans le symbolisme. Chez les symbolistes, la femme représente la nature, et est
en cela opposée à l'esprit, donc aux artistes. Ainsi, bien que les représentations de sujets
féminins abondent dans les œuvres exposées aux Salons de la Rose+Croix, les femmes
artistes en sont exclues.
Dans l’imaginaire de la fin du siècle, la femme oscille donc entre la mante religieuse comme
le décrira Sâr Péladan dans Le Vice suprême, et l’apparition asexuée donc l'androgyne. Le
rejet de la morale traditionnelle, passant par l'indifférenciation sexuelle, les métamorphoses
de l'image de la femme trouvent à s'exprimer dans une figure légitimée par la tradition
esthétique : l'androgyne. Ce « sexe artistique par excellence » obsède la littérature et la
peinture. Il y a une ambivalence dans la sexualité avec l’androgyne, qui à une charge
fantasmagorique et renvoie au mythe platonicien des origines. Le type androgyne dans
beaucoup des compositions de Moreau, comme dans Œdipe et le Sphinx, qui marqua les
esprits et exerça une très forte fascination sur les critiques et artistes de la fin du XIXème
siècle. La figure de l’androgyne chez Moreau est complexe. Dans son œuvre, ce sont surtout
les hommes qui sont langoureux et voués à la destruction. Les hommes qui apparaissent
dans ses compositions sont souvent des hommes frêles et passifs. Par exemple dans la toile
Les Prétendants, le spectateur est témoin d’un massacre de beaux jeunes hommes
efféminés et c’est vers eux que se porte la compassion.
Beaucoup de peintures symbolistes usent des sujets renvoyant aux légendes, aux
mythes, à la bible et à la littérature ancienne ou contemporaine. Ces sujets alimentent leurs
rêves. Le goût pour les récits légendaires ou mythiques répond en premier lieu à un désir
d’évasion déjà formulé par les romantiques. On a un recours à la mythologie, aux légendes
notamment médiévales comme chez les préraphaélites. A travers les mythes et légendes
anciennes, les érudits ressuscitent les civilisations anciennes et réenchante un monde vidé
de ses croyances, puisque telle est la fonction du légendaire utilisé par les symbolistes. L'art,
par le biais du mythe, communique les vérités divines. A travers les textes sacrés ou
légendaires, se révèle la tendance au mysticisme ou à la réflexion philosophique. C’est une
tendance nouvelle qui imprègne tout l’art symboliste. Les artistes puisent ainsi dans la Bible,
avec notamment le thème de Salomé, vu précédemment. Ils puisent aussi dans la
mythologie antique comme Moreau avec Jupiter et Europe de 1868, ou encore dans les
sagas nordiques, dans la religion chrétienne comme Puvis de Chavannes avec par exemple
Marie Madeleine au désert de 1869.
Les artistes tirent aussi leurs sujets des grands textes littéraires, comme Dante.
Gustave Moreau a notamment fait un tableau intitulé Dante et Virgile. La démarche
symboliste, qui procède par transposition, entretient des rapports très étroits avec les arts
du verbe. La littérature et la poésie du présent, mais aussi du passé, deviennent par
conséquent ses principales sources d’inspiration. Aucun écrivain du XIXème siècle, n’a joui
d’un succès aussi considérable qu’Edgar Poe. Ce dernier a notamment été illustré par des
peintres symbolistes comme Odilon Redon, dans sa série de lithographies intitulée A Edgar
Poe, de 1882. La communion d'idées entre peintre et homme de lettres n'a jamais été plus
réelle qu'à cette époque. Cette correspondance entre la peinture et la littérature se voit dans
le choix des sujets, dans l'attrait pour des mythes similaires.
Pour les symboliques, le rêve est créateur. Les artistes se prêteront à une exploration
onirique pour affirmer leur refus de la modernité. C’est une activité profonde de l’âme qui
fait partie du processus créateur, notamment chez Redon. Les images jaillissent de
l’inconscient et les peintres veulent réintégrer le rêve, l’imaginaire dans leurs toiles en
écartant les thèmes prosaïques. Les peintres privilégient ainsi des sujets allégoriques et
symboliques, ils essaient de dépasser la réalité à travers les rêves, l’imagination, l’évocation,
l’invisible. L'image visuelle apprend à devenir le signe de l'inexprimable, pour transcrire ce
langage intérieur. Les artistes explorent leur être entre le bonheur et l’angoisse, le rêve et le
cauchemar dans les régions de l’ambiguïté et du mystère, jusqu’aux frontières de
l’inconscient, comme dans Le Rêve de Puvis de Chavannes datant de 1883 ou encore dans la
série lithographique intitulé Dans le rêve, de 1879, faite par Redon lui-même appelé le «
prince du rêve », puisque sa démarche repose sur la « soumission docile à la venue de
l’inconscient ». Les peintres découvrent également les expériences religieuses, mystiques ou
ésotériques. L’analogie exploitée en peinture entre la figure du christ et celle de l’artiste,
conduit naturellement à une renaissance du sentiment religieux. De plus, la plupart des
symbolistes s’intéressent à l’occultisme ou au spiritisme.
Une autre grande préoccupation des peintres symbolistes est l’univers et le moi.
Dans le monde symboliste, l’artiste repousse l’anecdote pour traiter des problèmes
fondamentaux de l’homme comme la vie, la mort, le désir, l’amour, la nature, la divinité, la
méditation sur le temps, les saisons, devant la mer ou dans la forêt. Pour le symboliste qui
prône un individualisme forcené, la vie intérieure, irréductible à la raison et à la société,
permet seule l’accès au mystère de l’être, à l’au-delà du rêve, et aux pressentiments des
correspondances universelles. Regarder au-dedans de soi, c’est affirmer la suprématie de la
pensée et de l’imagination sur la réalité du monde extérieur. Les artistes abandonnent toute
description au profit de l’évocation d’états d’âmes. Les artistes, comme Redon, dissèquent
leurs émotions et explorent l’inconscient. Dans Les Yeux clos, l’artiste représente un buste
au visage blême, les paupières baissées du sommeil ou bien de la mort, la bouche mutique.
Ces éléments évoquent le rêve, le voyage intérieur, la méditation, et peuvent même
renvoyer à l’auto contemplation.
La peinture symboliste renouvelle conjointement l’iconographie traditionnelle liée à la
représentation de la mélancolie et accorde un vif intérêt au du pessimisme. Les œuvres
symboliques suggèrent souvent un monde mélancolique, onirique et sombre dominé par la
solitude, comme dans le tableau Mélancolie d’Odilon Redon datant de 1876. Plus ils se
renferment sur leur être, plus les artistes découvrent la solitude, le silence et la mélancolie.
L’expression de soi est souvent empreinte d’une réflexion philosophique pleine de
pessimisme, proche des philosophes allemands comme Schopenhauer ou Nietzsche. La
plupart des artistes de ce mouvement sont aussi obsédés par la mort et la douleur. On
trouve donc un certain nombre d’œuvres liées à ces thèmes, comme La vie de l’Humanité de
Gustave Moreau, mêlant la Genèse et le mythe d’Orphée, se conclut sur le meurtre de Caïn.
Gustave Moreau est la figure centrale de tout débat sur l’art symboliste. Comparé à ses
contemporains, Moreau se démarque comme un artiste d’un type très particulier.
Il est la figure type du dandy,
Moreau était défenseur de deux principes étroitement liés, ceux de la Beauté de l’Inertie et
du Luxe Nécessaire. La richesse des détails servait infiniment mieux l’art à ses yeux, qu’une
simplicité poussée à l’extrême, qui trouvait ennuyeuse.
Ses premières œuvres témoignent une forte influence de Delacroix, par la suite il rencontra
Chassériau, vers 1850, qui l’influença grandement notamment son goût pour les couleurs
aux éclats chatoyants, qui allait beaucoup affecter la formation du style de Moreau.
En 1864, il fit véritablement sensation pour la première fois au Salon officiel avec Œdipe. Son
travail se taillait déjà une réputation d’étrangeté et d’excentricité.
Aujourd’hui, la majorité des experts de Moreau le définissent comme un peintre littéraire.
Certains ont même vue en lui le successeur de Flaubert notamment le roman La Tentation
de saint Antoine. Dans cet ouvrage, le foisonnement de détails est très porche des tableaux
de Moreau.
Le détail est un principe pictural très important pour lui .
C'est un peintre qui a traité des thèmes mythologiques, religieux ou encore fantastique dans
la 2e moitié du 19e siècle. Solitaire et secret, refusant l’accès de son atelier à ses propres
amateurs, dilettante ne vivant que pour sa création, Gustave Moreau n’a cessé, pour sa part,
d’évolue entre allégorie et mythologie, répondant par l’obscurité raffinée de son symbolisme
aux agressions de la civilisation industrielle et opposant son esthétisme sensuel et décadent
aux lumières de l’impressionnisme comme à la santé du réalisme. La quête du mystère, du
légendaire, de l’ésotérique, hante désormais le peintre,
L’art de Gustave Moreau (1826-1898) s’inspire des principes académiques, romantique et
italianisant.
Il a su combiner ces influences pour aboutir à des créations originales, fortement
individualisées et qui ne ressemblent à rien d’autre. Son but étant de faire voyager le
spectateur vers un autre monde. Ses compositions avaient pour ambition de les faire rêver.
« Orphée » peint en 1865 constitue l’un des premiers exemples de peinture symboliste. La
composition de Moreau illustre le mythe grec selon lequel Orphée aurait été dépecé par les
Ménades qu’il avait charmé avec sa musique afin de ramener des Enfers sa femme Eurydice.
Moreau prolongea le mythe en dépeignant une jeune fille recueillant la tête du poète. Ces
deux derniers se regardent dans une contemplation semblant infinie. Cette scène apaisée se
soustrait mystérieusement à la morbidité. La composition est baignée par une lumière
crépusculaire sur fond de paysages fantastiques évoquant le sfumato de Léonard de Vinci. «
Orphée » illustre un univers semi-fantastique à l’atmosphère inquiétante imprégnée de
charmes ambigus.
Odilon Redon dit de Moreau qu’il ne dévoile rien de sa vie intérieure dans ses toiles, ses
personnages sont privés de spontanéités et d’expression instinctive sincères.
Moreau inspire l’imagination dans ses œuvres, il inspire Huysman, le Sâr Péladan qui lui voue
une véritable adoration.
Redon
Odilon Redon : « Après un effort pour copier minutieusement un caillou, un brin d’herbe,
une main, un profil ou toute autre chose de la vie vivante, je sens une ébullition mentale
venir ; j’ai alors besoin de créer, de me laisser aller à la représentation de l’imaginaire ».
Usant d’une formule élémentaire, Odilon Redon livre ainsi les clefs de son art visionnaire,
véritable aventure spirituelle. Le « Mallarmé de la peinture » selon Maurice Denis, a
longtemps confié au fusain et à la lithographie le soin de traduire ses obsessions. De 1870 à
1895, c’est la période des « Noirs », étonnante épopée introspective à la recherche des «
monstres ». Les albums Dans le rêve de 1879, A Edgar Poe de 1882, Les Origines de 1883,
Hommage à Goya de 1898 ou Songes en 1891 relèvent d’un ésotérisme qui lie l’artiste aux
poètes symbolistes,. Les illustrations pour Les Fleurs du Mal de Baudelaire ou La Tentation
de saint Antoine de Flaubert, accusent encore la part du facteur obsessionnel (l’œil, le micro-
univers, l’insecte).
Si Redon évoque de façon très personnelle des auteurs admirés des symbolistes, ses œuvres
nourries de mystère entrainent à leur tour de multiples transpositions littéraires en France et
en Belgique. Redon partage l’amitié de Mallarmé et de Verhaeren pour qui il conçoit
plusieurs frontispices.
Les fusains et les lithographies de Redon, gages d’une suggestion recherchée, plongent le
spectateur dans un univers résolument onirique. Une sourde angoisse imprègne bon
nombre de ses compositions d'où le fantastique n'est pas exclu.
A partir de 1890, il se tourne vers les couleurs qu’il rendra chatoyantes, irradiantes.
C’était un artiste secret et solitaire.
Chez Odilon Redon les thèmes oniriques ou religieux dominent.
l a pu y voir les peintures de Millet, Corot, Moreau et Delacroix. Il porta sa dévotion sur ce
dernier. Il écrit même qu’il éprouvait « des frissons et de la fièvre » devant les toiles de
Delacroix.
Cet apprentissage chez le lithogrpahe Bresdin explique pourquoi Odilon Redon ne se limite
qu’au noir et blanc ainsi qu’aux lithographie et aux dessins. Son premier recueil de
lithographies, Dans le rêve, est publié en 1879. Il explique qu’il aime produire des
lithographies afin d’éveiller chez le spectateur un attirance pour « le monde ambigu de
l’indéterminé ».
Peu à peu Paris remarque aussi Odilon Redon. C’est à Paris qu’il découvrit la couleur. Dans
son travail de la première moitié des années 1890, il reprend un thème unique de façon
obsessionnel, celui de la tête aux paupières closes. Suivi d’une période plus brève, où il
représente de façon abondante le Christ.
Dans la seconde phase de sa carrière, Redon n’était plus forcément assimilé à Moreau mais
plutôt à Cézanne.
Mais il n’était pas un peintre naïf, bien qu’étant un des peintres piliers du mouvement
symboliste, Redon s’intéresse aux découvertes contemporaines du matériel scientifique. Un
grand nombre des formes dans ses compositions semblent avoir été inspirées par le type
d’image qu’on pouvait voir en microscope. Les créatures qu’il représente ressemblent à des
spermatozoïdes ou des bacilles. Il dit d’ailleurs à propos de son art « toute mon originalité
consiste donc à faire vivre humainement des êtres invraisemblables selon les règles du
vraisemblable ».
Si on se penche sur le symbolisme de Redon, on y trouve les éléments typiques du
symbolisme : masque, monstres aux allures de serpent comme la mort verte, têtes
tranchées, femmes fatales, nouvelles interprétations de la mythologie classique. Mais il les
traite d’une manière très personnelle. Maurice Denis dit que Redon était incapable de
peindre quelque chose qui ne représente pas son état d’âme, une émotion ou une vision
intérieure.
vOdilon Redon : peintre et graveur, Odilon Redon est l’un des représentants les plus
intéressant du symbolisme français : ses œuvres ont une considérable force de suggestion
et un charme hors du commun.
En 1889, il fait la connaissance d’Emile Bernard et des autres peintres nabis : orphelins de
Gauguin parti pour la Polynésie, ces derniers voient en lui un maître et un inspirateur.
Dans la première partie de sa carrière, Redon se concentre sur les lithographies, où il
témoigne d’un rare talent de dessinateur et d’une grande imagination. Il ne commencera
que plus tard à utiliser les couleurs, réalisant des aquarelles, des pastels et des huiles,
visionnaires et suggestives, où se mêlent éléments naturels et fantastiques qui se chargent
de délicates allusions symboliques.
Le tableau Les Yeux clos d’Odilon Redon peint en 1890 et conservé à Orsay, est considéré
comme le manifeste de la peinture symboliste. Les Yeux fermés sont une image de
méditation intérieure : au lieu de regarder la réalité avec les sens, on l’explore avec l’esprit.
La couleur bleue du fond et la bande horizontale confirment qu’il ne s’agit pas d’un décor
réel : nous sommes dans un rêve, qui est pour l’artiste la dimensions véritable de l’art.
conclusion :
En conclusion, il apparaît donc que le symbolisme en France est au carrefour des
mouvements qui ont conduit à sa naissance et des mouvements qui en découlent. En effet,
on comprend donc que la première Renaissance italienne apporte le symbole dans l’art, les
préraphaélites, le détail et le romantisme, l'imagination et le sentiment. Et, que la littérature
joue un rôle important dans l’origine de ce mouvement, qui se traduira en peinture.
Rarement en France les contacts entre les peintres et les poètes n'ont été plus étroits. Ils
aimaient se rencontrer, discuter, recevoir les mêmes influences philosophiques et sociales.
Le symbolisme est comme une passerelle entre le romantisme et la première moitié du
XXème siècle, puisqu’en effet ce mouvement témoigne de cette profonde mutation de l’art
de cette époque, ouvrant la voie au groupe des Nabis, à l’Ecole de Pont-Aven, ainsi qu’au
fauvisme et au cubisme du 20ème s.
Nous pouvons donc considérer le symbolisme comme le précurseur de la modernité en
peinture et introduit le XXème siècle. Les historiens ont souvent qualifié cette période de
post impressionniste.
Le symbolisme est avant tout une démarche intellectuelle. L’utilisation d’un terme normé a
pour risque de rassembler sous une même étiquette des mouvements qui ne coïncident
qu’en surface. En effet, il s’agit d’un courant aux contours imprécis plutôt qu’un mouvement
artistique délimité. Chaque peintre symboliste produit une œuvre singulière.
Le symbolisme fut un mouvement qui transcenda l’Europe et se diffusa dans le monde
entier. Il ne généra pas de style commun, mais au contraire des styles très différents propre
à chaque artiste. Si les prémices au symbolisme sont plurales, le mouvement fut avant tout
français et belge avant de devenir international. Nous avons choisi de n'évoquer que la
France pour pouvoir présenter de façon plus précise les spécificités du symbolisme français.
L'Europe tout entière va contribuer à donner un visage au symbolisme. Cette dimension
européenne a longtemps été occultée par l’historiographie. Les centres de gravité oscillent
entre Paris, Bruxelles, Vienne, Londres et Munich. Parmi les artistes européens reliés au
courant symboliste, nous pouvons citer James Abbott McNeil Whistler, Gustav Klimt et
Edvard Munch.