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net/publication/367161325
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All content following this page was uploaded by Abdelouahed El-Amrani on 15 January 2023.
Résumé
Le Grand Agadir est un ensemble urbain qui a connu une évolution rapide du nombre de sa population. Par
conséquent, une sensible surcharge démographique s’est manifestée dans cette partie de la région du Souss, surtout
en approvisionnement d’eau potable. Cette agglomération urbaine, qui s'est élargie sur une superficie très étendue,
est installée dans la partie ouest de la plaine de Sous ; une dépression bordée par le Haut Atlas occidental au nord,
et par l’Anti-Atlas au sud. Cette plaine, située à la limite de la zone tempérée et la zone saharienne, présente des
caractères arides très accusés. Elle engendre en totalité un déficit hydrique inquiétant lié aux années de sécheresse.
La question des besoins en eau potable s’impose ainsi dans cette région qui vit au rythme d’une dégradation
annuelle. Par ailleurs, la relation entre la démographie urbaine actuelle et la pénurie en eau potable demeure encore
ambiguë en raison d’absence d’étude spécifique des corrélations entre les variables de la population urbaine et
celles de la consommation d’eau potable. A partir de ce constat, on s’interroge davantage sur l’impact
démographique par rapport à la dégradation des eaux souterraines dans une région semi-aride à travers l’étude du
cas de la grande ville d’Agadir. Pour cela, nous proposons d’étudier les interactions entre les déterminants
sociodémographiques et les niveaux de consommation d’eau à travers une approche démo géographique qui se
s’appuie sur l’analyse statistique et comparative des faits spatiaux.
Mots clés : population, urbain, consommation, eau, impacts, Grand Agadir, Maroc
Abstract
URBAN POPULATION AND WATER CONSUMPTION IN A SEMI-ARID REGION: CASE OF THE
GREET AGADIR (MOROCCO)
The Greater Agadir is an urban complex that has experienced a rapid evolution in the number of its
population. Consequently, a sensitive demographic overload has manifested in this part of the Souss region on
several levels, especially in the drinking water supply. This urban agglomeration, which has widened on an
extended area, is installed in the western part of the Souss plain; depression bordered by the western High Atlas in
the north and the Anti-Atlas in the south. This plain, located on the limit of the temperate zone and the Saharan
area, has very accused arid characters. It fully generates a disturbing water deficit linked to the years of drought.
Consequently, the question of drinking water needs is imposed in this region which lives at the rate of annual
degradation. Furthermore, the relationship between current urban demography and the shortage of drinking water
is still ambiguous due to the absence of a specific study of the correlations between the variables shared by the
following two elements: the urban population and consumption drinking water. Thus, we wonder more about the
demographic impact in the degradation of groundwater in a semi-arid region through the study of the case of the
big city of Agadir. For this, we propose to study the interactions between demographic determinants and water
consumption levels through a demo geographic approach. The latter will be based on the statistical and
comparative analysis of the spatial facts.
Keywords: urban, population, water; consumption, impacts, Greet Agadir, Morocco.
ملخص
) حالة أكادير الكبير (المغرب:الساكنة الحضرية واالستهالك المائي بالمنطقة شبه الجافة
ونتيجة لذلك التوسع العمراني فقد. شهد نموا سريعا في عدد سكانه،يشكل أكادير الكبير أكبر تجمع حضري في جنوب المغرب
يتميز هذا التجمع الحضري بتوسعه. وبشكل خاص على الماء الشروب،تكون تكتل سكاني ضاغط في الجزء الغربي لسهل سوس
الذي يشكل منخفضا رسوبيا تحده مرتفعات األطلس الكبير الغربي شماال،المترامي على مساحة ممتدة في الجانب الغربي لسهل سوس
جعله مجاال، في الحدود الفاصلة بين النطاق المتوسطي المعتدل والنطاق الصحراوي الحار، موقع هذا السهل.واألطلس الصغير جنوبا
واالستهالك، والسيما مع توالي سنوات من الجفاف، ومن ثم فإن المنطقة تواجه نقصا مائيا مقلقا.انتقاليا تميزه ظروف مناخية جافة بينة
لذلك ما فتئت مسألة تأمين الحاجات المائية تفرض نفسها بإلحاح على صعيد جهة سوس التي تشهد تناقصا سنويا في.المفرط للماء
ومن ثم نتساءل حول العالقة المبهمة بين خصائص الديمغرافية الحضرية الحالية ومشكلة الماء الصالح للشرب التي.مخزونها المائي
وذلك في ظل غياب دراسة متخصصة تكشف عن طبيعة الترابطات بين المتغيرات السكانية وأنماط االستهالك،تتردد من حين آلخر
، لهذا ارتأينا أن نقيم الوقع الديمغرافي في عالقته بالهبوط الذي أصاب مستويات الفرشة المائية في منطقة شبه قاحلة.المائي الحضري
وعبر مقاربة ديموغرافية جغرافية تعتمد أساسا منهج التحليل الكمي المقارن للوقائع،وذلك من خالل دراسة حالة المدينة الكبيرة ألكادير
.المكانية
المغرب، أكادير الكبير، العالقات، االستهالك، الماء، الساكنة الحضرية، :الكلمات المفاتيح
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Geomaghreb, numéro 17, année 2021
Introduction
Le Souss est une région qui se situe dans une zone semi-aride, vit au rythme de pénurie d’eau, vu
son cadre spatial, sa situation climatique, et ses ressources hydriques limitées. A l’ouest de cette région,
s’étale un espace urbain appelé le Grand Agadir, traduisant à la fois une forte évolution des citadins et
des besoins croissants en eau potable. Cette demande enregistre des variations socio-spatiales qui
suscitent plus de clarifications. Ceci s’impose puisque la relation entre les variables
sociodémographiques et la consommation de l’eau potable demeure encore floue. Au sein de sa plaine,
le Grand Agadir, qui forme la plus grande ville au centre-ouest du Maroc, s’est élargi au fil des années
sur un territoire espacé vers le Sud, l’Est et le Nord autour de la ville noyau Agadir. La population de
cet ensemble urbain dépasse aujourd’hui la barre d’un million d’habitants. Elle a connu une urbanisation
forte qui s’est traduite par l’évolution rapide de l’effectif des citadins, suite à une accélération du rythme
d’accroissement, notamment au cours des décennies précédentes. Par conséquent, une sensible
surcharge démographique se manifeste, en volume et en concentration, dans cette partie de la plaine de
Souss, à plusieurs niveaux : l’emploi, le logement, le transport, et particulièrement en matière
d’approvisionnement en eau potable (Kidou B., 1994, 2019).
Deux principales questions se posent, à savoir :
- la population urbaine est-elle responsable de la pénurie de l’eau ?
- comment varient, spatialement et socio démographiquement, les niveaux de consommation
d’eau entre les citadins ?
Pour apporter des réponses à cela, nous avons avancé deux hypothèses essentielles :
- la première question juge que l’effectif de la population n’est pas le seul facteur explicatif
du problème de l’eau, mais elle est liée plutôt au comportement des consommateurs.
- la deuxième suppose que le niveau de consommation de l’eau potable est très variable au
sein de la population d’Agadir, par quartier de résidence, et selon les composantes
sociodémographiques et économiques.
1. Méthodologie et objectifs
L’absence d’étude spécifique des corrélations, entre les variables de la population urbaine et de la
consommation de l’eau potable, laisse la relation précise entre l’état de la démographie urbaine et la
pénurie en eau potable encore ambiguë. Cela nous a incité à focaliser cette recherche pilote sur l’étude
de la relation entre l’impact démographique et la dégradation de la ressource en eau dans une région
semi-aride, et ce à travers une identification spatialisée du cas de la grande ville d’Agadir. Pour aboutir
à cela, nous proposons d’étudier les interactions et mesurer les degrés d’influence qui existent entre les
déterminants démographiques et les niveaux de consommation d’eau à travers une approche démo-
géographique qui s’appuiera méthodologiquement sur l’étude des corrélations entre les variables
sociodémographiques et les indices de consommation d’eau potable. Ce qui aidera à schématiser
comparativement les faits spatiaux inhérents à la problématique posée. Ainsi, nous avons opté à la mise
en application de plusieurs outils d’analyse adéquats pour produire des informations cohérentes
concernant le comportement consommatif de la population urbaine et ses effets sur la réserve d’eau. Les
résultats obtenus dans cette recherche sont basés sur l’exploitation de quelques données statistiques
officielles, mais essentiellement sur les données relevées de notre enquête de terrain.
2. Le grand Agadir, un espace urbain élargi au Sud marocain
2.1. L’ampleur d’un espace urbain qui continue à se former
La plaine du Souss s’étend sur une large superficie sous une forme triangulaire, bordée au Nord
par le Haut Atlas et au Sud par l’Anti Atlas, traversée par l’oued Souss. Cette plaine qui se situe à la
limite de la zone tempérée et la zone saharienne, présente des caractères semi-arides très accusés. C’est
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une région qui engendre, en totalité, un déficit hydrique suite à la succession des années de sécheresse.
Par conséquent, les besoins en eau potable s’imposent énormément d’une année à l’autre, notamment
pour l’agriculture, le tourisme, l’industrie et la consommation domestique. A l’Ouest de ladite plaine se
place une grande agglomération urbaine appelée le Grand Agadir qui illustre de plus en plus cette
situation de besoin additif en eau potable. Cette constellation urbaine, qui est formée de plusieurs villes
et centres urbains émergeants, s’étale sur une superficie élargie d’environ 770km2 (Chbaïcheb, 2021),
et englobe plusieurs communes territoriales. Ainsi, elle est devenue aujourd’hui la plus grande ville au
Sud du Maroc et l’une des cinq premières au pays en termes démographique, attractivité et compétitivité.
Elle est dotée d’une économie dynamique très variée basée principalement sur le tourisme, la pêche,
l’industrie et le commerce ; elle est soutenue par l’agriculture moderne développée dans la plaine.
(Fig.1).
La ville d’Agadir est aussi la capitale de la région du Souss Massa. Elle chapote un système urbain
régional qui repose sur un réseau composé de plusieurs grandes et moyennes villes, et un nombre
important de centres urbains émergeants, dont les rôles sont nettement assez différents. Le périmètre
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spatial d’urbanisation, qui s’est beaucoup élargi au cours des décennies précédentes, se compose
aujourd’hui d’une structure urbaine multicentrique et des entités urbaines diverses, proches et
adjacentes, parfois dispersées et isolées par des espaces vides ou ruraux. Dans ce paysage urbain
régional, le Grand Agadir s’affirme très dominant par son poids démographique et son rôle économique
que procurent principalement les villes d’Agadir, d’Inezgane et d’Aït Melloul (Kidou, 2009).
Si les unités spatiales de Dcheira Aljihadia, Ben Sergao, Tarrast, Jorf et Tikiouine jouent les rôles
de quartiers dortoirs, Aït Melloul, comme deuxième ville du groupe, s’acquitte de recevoir les unités
industrielles de transformation agroalimentaire. Elle joue également le rôle d’une ville intermédiaire au
sein du paysage urbain, car elle facilite l’accès aux services urbains pour les zones rurales de son
rayonnement. Au nord du quartier d’Anza, Taghazote et Aourir, évoluent rapidement en tant que deux
centres locaux émergeants à vocation dortoir qui abritent essentiellement les populations issues des
zones environnantes. Ils s’étendent tout au long de la côte montagneuse, tout près des nouvelles zones
touristiques en cours d’aménagement. En somme, l’économie du Grand Agadir est dominée par les
activités des secteurs secondaire et tertiaire, qui ont connu une croissance rapide au cours des trois
dernières décennies, en particulier à Agadir, Aït Melloul, Inezgane et Dcheira-El-Jihadia, principalement
des activités du commerce, du transport, de construction, des travaux publics, en plus des services. La
ville d’Agadir se distingue, à l’échelle nationale, par l’importance de ses activités touristiques et
portuaires. La ville d’Inezgane, dont l’histoire remonte au XVIIIe siècle, est connue par la vitalité de son
activité commerciale, qui en a fait le plus grand centre commercial d’approvisionnement au Sud du
Maroc (SRAT-SM, 2020).
2.2. Une population urbaine croissante
Comme l’illustre le tableau1, la population du Grand Agadir dépasse aujourd’hui 1 200 000
d’habitants, c’est ainsi que cette grande ville se classe nationalement à la cinquième position. Son effectif
a enregistré une remarquable évolution au cours des décennies précédentes en passant de 765 375 à
environ 1 263 410 entre 2004 et 2022, avec un rythme de croissance nettement moyen (2.8%). Toutefois,
il est à noter que cette croissance a été alimentée principalement par l’extension des unités urbaines de
la banlieue d’Agadir, comme le fut le cas à Lqliaa (6.1%), Drargua (8.7%), Temsia (5.2%) et Aourir
(4.0%). Quoique, le poids démographique de la commune d’Agadir reste encore très pesant (42.6%),
devant Aït Melloul et Inezgane. C’est-à-dire que la grande concentration des populations au Grand
Agadir se manifeste clairement dans cette surface qui représente le noyau dur de cet ensemble urbain
(Kidou, 2009).
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Cette grande concentration urbaine révèle en outre une distribution inégale selon les unités
spatiales (communes ou centres urbains) qui la composent (fig. 2). Cela signifie en parallèle une
diversité de fléaux quotidiens concernant l’emploi, le logement, le transport, et surtout en matière
d’approvisionnement en eau potable. D’où, il est important de mesurer l’impact de la démographie
actuelle sur la dégradation du stockage en eau, et ce à travers l’étude des différents aspects du
comportement consommatif au sein des ménages urbains du Grand Agadir.
Figure 2. Répartition et croissance de la population urbaine du Grand Agadir (2004-2020). Source : Rapport de
RAMSA
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3.1. Le secteur agricole moderne est le plus grand consommateur d’eau dans le Souss
Comme il a été signalé auparavant, la population de l’aire urbaine d'Agadir a connu une
importante expansion au cours des décennies précédentes sous l’influence combinée des facteurs démo
géographiques et socio-économiques. Cette tendance urbaine, qui exprimait d’énormes changements
socio-spatiaux dans la région, traduit sans doute la croissance des besoins en matière d’emploi,
logement…etc., et manifeste aussi une utilisation accrue et diversifiée des ressources en eau. C’est ainsi
que l’eau est devenue une question qui préoccupe à la fois les décideurs et l’opinion publique. Toutefois,
il est à souligner que la consommation d’eau s’effectue inégalement par unité spatiale.
L’éclaircissement réclamé des différentes facettes de l’état de la question, pousse à s’interroger
d’abord sur les sources d’approvisionnement en eau pour un espace aussi large comme celui du Grand
Agadir. Les données en la matière démontrent que l'approvisionnement des habitants est assuré
conjointement par les eaux pompées de la nappe phréatique du Souss et les eaux de surface collectées
principalement dans le barrage Abdelmoumen et celui de Moulay Abdallah. La production et la
distribution, qui sont supervisées par l’Office National de l’Electricité et de l’Eau Potable, se
répartissaient comme suit :
- 13 millions de m3 proviennent des eaux souterraines, assurées par 28 forages et puits ; ladite
collection d'eau est dirigée vers plusieurs points de la zone du Souss à savoir : les champs de
l'Ahmar Boudhar, le Sud (Lamzar), l'Est, l’Admine, Ait Melloul, le Golf et le Nord (Taghazout).
- 22,7 millions m3 d'eau de surface correspondent à la dotation allouée à partir des deux barrages
Abdelmoumen et Moulay Abdellah depuis l’année 2007 ; c’est-à-dire qu’une bonne partie d’eaux
utilisées s’appuie sur une collecte qui dépend strictement du niveau de la pluviométrie annuelle
(PDAIRE, 2007).
Une multitude de facteurs interviennent, certes, pour expliquer cette situation hydrique nettement
sensible dans le Souss, à savoir la position géographique transitionnelle entre un climat méditerranéen
assez doux au Nord, et un climat Saharien sec au Sud. Cela rend la balance hydrique instable et très
dépendante de la variabilité climatique et ses équilibres annuels. Ajoutons à cela, l’économie régionale
qui s’appuie sur le dynamisme des secteurs économiques très compétitifs et grands consommateurs
d’eau comme le fut le cas de l’agriculture moderne qui consomme 96%, soit un volume annuel d’environ
1.042Mm3 (Tnourji, 2019).
Au large des côtes du Grand Agadir s’est développée une des plus grandes stations balnéaires
nationales (fig. 3), ce qui lui octroie certes de devenir le 1er pôle touristique du pays qui réalise jusqu’à
35% de recettes en devises. Toutefois, cette importance du secteur du tourisme implique aussi une
importante pression sur le potentiel d’eau disponible dans la région, vu le volume de consommation qui
s’élève jusqu’à environ 2.248.353Mm3 par an en fonction du degré d’afflux touristique, comme il a été
enregistré en 2019. Par évidence, le niveau de consommation varie considérablement selon les saisons
et par unité hôtelière. La consommation atteint son pic pendant la période estivale, 7 hôtels à Agadir
consomment d’énormes des quantités allant jusqu’à plus de 111.500m3/mois ; les grands hôtels de type
5 étoiles, comme l’Atlantic Hôtel (30.000m3), le Sahara hôtel et le Royal hôtel (20.000m3), le Sofitel
Agadir (18.000m3) enregistrent souvent des niveaux de consommation remarquablement élevés.
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803 654
702 570
401 125
379 396 388 081 371 502
350 028
312 994
Figure 4. Evolution de la consommation d’eau du secteur industriel (m3). Source : Rapport de RAMSA, 2021
Les trois secteurs d’activité économiques, qui représentent le noyau dur du dynamisme
économique régional, se distinguent cependant comme grands consommateurs pressants sur la ressource
hydrique existante. De ce fait, il est indispensable d’évaluer la faisabilité des choix économiques
comparativement à leurs impacts sur la question de l’eau dans la région. Il est à se demander lequel des
deux est prioritaire ? Est-ce la sauvegarde de l’eau ou le gain économique ? Est-ce qu’il n’aura pas
d’autres possibilités de compenser les grandes consommations d’eau par des investissements
durablement bénéfiques pour la région et sa population ? Nous pensons que la meilleure stratégie est
celle qui prendra en considération ce constat et ses prérogatives. Le projet de station de salinisation,
dernièrement mise en place, en est l’exemple concret, mais aussi à qu’il prix, notamment sur les deux
plans environnemental et socioéconomique ?
3.2. Le secteur humain non ménager est aussi un utilisateur d’eau très pesant dans la ville
Une autre forme de consommation devient de plus en plus pesante dans ce système urbain de
consommation d’eau, il s’agit de celle inhérente aux établissements non domestiques. Selon l’enquête
effectuée au début de l’année 2020, juste avant la pandémie du Covid 19, les services de proximité (les
douches, les hammams publics) et les services de lavage des voitures représentaient des sous-secteurs
non négligeables qui participent énormément à l’élévation de la facture de consommation d’eau dans les
quartiers de la ville (fig. 5). A Aït Melloul, par exemple, 35% des services de lavage de voitures
consomment des quantités d'eau comprises entre 1400 et 2600 litres/jour, alors que 23% en utilise un
volume plus accru qui oscille entre 2600 et 5000 litres par jour. La consommation de chacun des dits
services peut atteindre des niveaux très étonnants, par jour et par mois, non pas uniquement en fonction
du nombre de clients servi au cours d’une période donnée, mais aussi selon le type de véhicule lavé et
la situation géographique de l’établissement du lavage. Se sont donc autant de facteurs qui agissent
différemment sur les niveaux de consommation que peuvent atteindre ces services de proximité
utilisateurs d’eau dans le Grand Agadir.
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Figure 5. Volume d’eau potable consommé (ℓ/j) par les stations de lavage des voitures en 2020 (%)
En plus des secteurs cités plus haut, dont l’impact est très clair sur l’utilisation d’eau au Grand
Agadir, la consommation humaine non domestique apparait aussi agissante d’une façon nettement moins
forte que les précédentes dans le système de consommation urbain. Au Grand Agadir, les services de
proximité consomment entre 52 631 et 45 000m3/an (fig.6).
52 631
45 539
48 065
44 059 45 566
28 603
Le poids humain dans cette consommation cache plusieurs réalités et différences qui
n’apparaissent pas si on se contente uniquement des résultats des études généralisées. De ce fait, il est
judicieux d’évaluer le niveau de consommation d’eau chez les ménages urbains afin de bien apprécier
son impact sur la question d’eau dans la région, surtout si nous admettons que cet espace connait une
reconfiguration démo-spatiale impressionnante qui s’est traduite par la croissance du nombre de
citadins. Ce qui veut dire que l’urbanisation galopante qu’avait connu la partie ouest du Souss aval a été
simultanément accompagnée d’un système de consommation qui s’accentue avec le temps. Toutefois,
la relation entre démographie urbaine et niveau de consommation d’eau reste encore ambiguë. Plusieurs
questions s’imposent encore, ainsi on se demande comment la population consomme-t-elle l’eau, quelles
sont les déterminants qui affectent son comportement ? Quels sont ses réels besoins ? Cela fera
évidemment l’objet d’une analyse comparative des différents éléments démographiques et des
comportements d’utilisation d’eau au Grand Agadir dans les prochains paragraphes.
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Les quelques données révélées par le rapport du PDAIRE ont été investies pour suivre en quelque
sorte la courbe d’évolution en besoins d’eau et consommation des citadins au cours des dernières années.
Ainsi, il apparait d’après la figure 7 que la demande en eau potable a enregistré une augmentation
considérable au Grand-Agadir en passant de 27,18Mm3 à 45Mm3/an au cours des deux décennies
écoulées (2001-2020).
45,23
49,44
44,31
39,1
32,64
27,18
ABHSM, 2007.
Toutefois, il est à souligner que cette consommation retrace une courbe très fluctuante selon les
mois et saisons. Nous relevons une demande moyenne plus élevée qui remonte jusqu’à 4.4Mm3 au cours
de la saison estivale, notamment entre juillet et septembre (fig. 8). Cela s'explique essentiellement par
l’évolution annuelle du nombre de citadins, mais aussi par l’augmentation remarquable de la
consommation en eau potable pendant l'été, et surtout avec l’afflux des visiteurs estivaux. D’où la
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4,4 4,4
Jan Fev Mar Avr Mai Jui Juil Aout Sept Oct Nov Dec
Figure 8. Demande moyenne d’eau potable dans le Grand Agadir pour la période de 2001-2020 (Mm³/mois).
Source de données : PDAIRE, ABHSM, 2007.
Les résultats de l’étude montrent que la saison d’été manifeste une surconsommation qui atteint
(plus de 12Mm3) par rapport aux autres saisons (fig.8). Cela témoigne en fait sur un type de
comportement qui tend vers le gaspillage des ressources en eau pendant cette saison, notamment dans
les quartiers des villas équipés de grands jardins et piscines comme le fut le cas à Illigh dont la quantité
chez les cas enquêtés remonte jusqu’à 1113m3, très élevée par rapport à Bouargane (125m3) et Dakhla
(183m3) au cours de l’année 2020. Cette situation d’inégalités de consommation se justifie encore plus
en consultant les factures de chaque mois qui accusent de grandes disparités entre les ménages de ses
trois quartiers. Cela, malgré la faible densité humaine qui caractérise le quartier d’Iligh, dont les
logements sont occupés par des ménages de type individuel, mais qui sont aussi équipés d’équipements
consommateurs d’eau comme les douches, les salles de bain, les piscines et les grandes cuisines, voire
les jardins spatiaux. Le volume d’eau consommée ne varie pas uniquement en fonction du logement, de
l'équipement et du statut socioéconomique des ménages, mais il dépend également de l'origine
géographique et du comportement culturel du consommateur.
Plusieurs équipements représentent des éléments importants pour mieux clarifier les différences
d’utilisation domestique d’eau par les ménages ; à savoir : la sauna, le jardin, la piscine, la salle de bain
moderne ou ordinaire, le toilettes et la cuisine. Il a été constaté que la consommation varie
considérablement selon la présence ou pas de ces équipements dans le logement, mais aussi selon le
comportement adopté eu égard à l’usage quotidien de l’eau. Cela nous confirme que le type de logement,
qui reflète, grosso modo, l’appartenance sociale de ses ménages, est important à saisir comme variable
pour approcher le niveau de consommation des ménages et leur comportement vis-à-vis de l'eau (fig.9).
30 30 30
29 29 29
16 16 16 16 16 16
14
9
5
Figure 9. Variations d’utilisation d’eau selon l’équipement du logement (%). Source : enquête de
terrain, février 2021
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En addition à cela, la variable démographique, exprimée dans notre cas par le nombre de
personnes par ménage, s’avère moins déterminante dans l’élévation du volume de consommation d’eau
urbain. La corrélation entre ces deux variables est bien négative (-0.4). La consommation moyenne des
ménages diminue, par conséquent, au fur et à mesure que les individus augmentent au sein du ménage.
Le ménage de 2 à 4 personnes consomme deux fois plus que le ménage de 5 à 6 personnes (fig.10). En
outre, l’origine géographique du ménage est une variable explicative des disparités socio spatiales. Les
données recueillies sur le terrain ont montré que le niveau de consommation d’eau au sein des ménages
d’origine urbaine est relativement supérieur à celui enregistré chez les ménages d’origine rurale.
969
890 Correlation: -0.4
477
310
Figure 10. Consommation moyenne d’eau selon le nombre de personnes par ménage. Source :
enquête de terrain, février 2021)
En ce qui concerne l’activité du chef de ménage, la part d’eau la plus élevée est celle consommée
par les ménages dont les chefs exercent dans le secteur d’éducation-formation, suivis par les
professionnels libéraux. Ceux qui pratiquent dans le secteur public, les ouvriers, et les non qualifiés
n’enregistrent que de faibles parts (fig. 11). Cela montre, que de plus en plus que le niveau de vie ou
d’instruction est élevé chez les ménages, de plus en plus la consommation de l’eau potable est forte.
753 791
662
305
161 153
69
Geomaghreb, numéro 17, année 2021
67
201 & 300 301 & 400 401 & 500 Plus de 500 57 56
43 44
Corrélation : 0.4 33 34
29
20
12
5
Figure 12. Consommation ménagère d’eau selon le niveau d’étude du chef de ménage (en l/jour). Source
: enquête de terrain, février 2021
1311 1341
538
155
70
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1311
Corrélation : 0.7
445 398
126
Figure 14. Consommation moyenne d’eau selon la fréquence d’usage pour le ménage par semaine.
Source : Enquête de terrain, février 2021
Conclusion
Pour conclure, il ressort de cette étude que le Grand Agadir est un ensemble urbain qui s’impose
dans la région du Souss. Cette dernière, qui se situe dans une zone semi-aride, vit aussi au rythme d’une
situation hydrique assez vulnérable, où les eaux souterraines diminuent de plus en plus sous l’effet de
plusieurs facteurs : physique, économique et humain. L’approche spatiale des niveaux de consommation
hydrique a bien montré que les volumes d’eau potable utilisée n’ont pas seulement cessé d’augmenter,
mais ils sont inégalement répartis selon les unités spatiales, et particulièrement entre les secteurs
économiques et humains. L’agriculture moderne s’accapare à elle seule la plus grande part de l’eau
utilisée dans la région du Souss. La population urbaine consomme une part non négligeable, mais loin
derrière les autres secteurs vitaux dans la grande agglomération gadiri. En outre, elle accuse un
comportement consommatif qui varie inégalement selon les différentes catégories :
sociodémographique, socio-économique et culturelle. De ce fait, Il est très recommandé d’abord de
revoir les choix stratégiques de l’agriculture moderne et ses produits non compatibles à la situation
hydrique de la région. Il est aussi opportun d’agir aujourd’hui dans le sens des projets visant à valoriser,
à diversifier et à mobiliser les ressources régionales en eau, et dans un autre sens, qui vielle à sensibiliser
au maximum les citadins et à maintenir un comportement de consommation raisonnable au sein de la
grande ville.
Références bibliographiques
Askassay K., 2015. L’eau et la société dans un milieu rural aride, de l’analyse vers la modélisation d’un
système fragile et complexe : le cas du bassin versant du Souss au centre ouest du Maroc. Actes de la
Journée Nationale sous le titre (Quelques facettes des recherches actuelles dans les sciences de
l'organisation de l’espace), FLSH, Université Ibn Zohr, Agadir, Maroc, pp. 9-40.
Kidou B., 1994. Contribution à l’étude démo géographique de la population urbaine du Grand Agadir.
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