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Décembre20ll ii

Nouvelle Serie ; Volume 1, i.


Numém 2. ,:,
ISSN: 1563-2938
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NACUETEDE LETTRES ET SCIENCES
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'Beyond the Scene of Representation:Transfixing


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Mitemasy representaciones-en el El abrazode amor del


rmiversô, la tierra (México), Diego y el seflor Xolotl,
(Frida Kahlo, 1949)Allela-Kwevi Clotilde -Chantal

Languesde commrmicationgnégaireet véhiculairedans


rme concessionà Libreville. JacquelineBJLLIË,Z ;
EugénieEYTANG

Le Vaudou dans I'identité haîtienne : histoire d'une


',': tajectoire. SergeAlain \IZ-AMBA
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les gabonitesdansIæ Voyaged'Oncle lv{â


de JeanDMSSANYAMA. Lucien DITOUGOU

Universitô OMARBONGO - Libreville

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UNIVERSITE OMAR BONGO

FACULTE DE LETTRESET SCIENCESHUMAINES

Annalesdela FLSH SérieSciencesHUMAINESET SOCIALES


Directeurdela Publication
MadameMoniqueMAVOUNGOUBOTIYOU
Doyendela Faculté
Directeurdela Rédaction
Théodore KOUMBA
Assesseur
ChargédeLa Recherche
COMITE SCIENTIFIQUE

AMALRIC JeanClaude,ProfesseurEmérite, (UniversitéPaul Valéry, Montpellier


trI), KANDJI MAMADOU, Professeurtitulaire (Universite Cheikh Anta Diop,
Dakar); KWENZI-MIKALA Jérôme, Professeur Titulaire (Université Omar
BONGO, Libreville); M. MOUKAGHA Hugues,ProfesseurTitulaire (Université
Omar BONGO, Libreville); NZE NGUEMA Fidèle, Professeur Titulaire
(UniversitéOmarBONGO, Libreville) ; ROPIVIA Marc Louis, ProfesseurTitulaire
(Université Omar BONGO, Libreville); M. TAOFICK MOUGIAMA DAOUDA
Patrick, ProfesseurTitulaire (Université Omar BONGO, Libreville); M. TONDA
JosephProfesseurTitulaire, (UniversitéOmarBONGO, Libreville)

COMITE DE IÆ,CTURE(Sériel-ettreset L^angues)


Mr AKENDENGUE Daniel René, Maître de Conférences,(Université Omar
BONGO, Libreville) ; M. MAMBENGA YLAGOU Frédérique, Maître de
Conférences,(Uaiversité OMAR BONGO, Libreville). M. MBONDOBARI
Sylvere, Maître de Conferences;(Université Omar BONGO, Libreville); M.
MOUGIAMA DAOUDA Patrick Taoficlq ProfesseurTitulaire, (UniversitéOMAR
BONGO, Libreville) ; NGOU MVE Nicolas (Maître de Conferences), M. ONDO
(UniversitéOmarBONGO, Libreville)
MEBIAME Pierre,Maître de Conferences,

Rédaction-Administration
UOB-FLSHB.P. 17004-Libreville. Té173-16-42
Décembre 2011.
Annalesde la Facultéde Letoes et SciencesHumaines.Nouvelle Série: volume l. numéro2
Lettreset Langues
ISSN/ 1563-2938
Sommaire

"Beyond the Sceneof Representation:Transfixing Slaveryin Edward P. 3


Jones'sTheKnovarWorld." Ange GaelPamboPamboN'diaye

Mitemasy representaciones en el El abraznde arnordel universo,la tierra 13


(México),Diego y el seôorXolotl, (FridaKahlo, 1949)
Allela-Kwevi Clotilde -Chantal

Languesde communicationgrégaireet véhiculairedansune concessionà 31


Libreville. JacquelineBfr-LIF,Z ; EugénieEYEANG

Le Vaudou dansf iderrtitéhartienne: histoire d'une trajectote, 49


SergeAlain NZAMBA

Comprendreles gabonitésdansIæ Voyaged'Oncle Ir,{âde Jean 7l


DIVASSA NYAMA. Lucien DITOUGOU.
Le Vaudou dans f identité hailienne : histoire d'une traiectoire

Serge Alain NZAMBA, Docteur Nouveau Régime en Etudes


de I'UPVD, membredu CRENEL,
Ibériqueset Latino-américaines
du CRILAUP et enseignant(assistant),à la Facultede Lettres et
SciencesHumainede I'U.O.B, au Département d'Etudeslbériques
I @yahoo.fr.
et Latino-américaines/costamy200

<<L identité n'est pas donnée une fois pour toutes, elle se
construit et se transforme tout au long de l'existence >>.

Amin MAALOUF, Iæs identités meurtrières, Paris, Grasset&


Fasquelle,1998,p. 31.

( Il s'agira de déconstruire la notion d'identité en


récusantle mythe d'une insularité>.
ClaudeLEVI-STRAUSS,L'identité, Paris, QuadrigeÆUF,
1977.

< Haïti doit servir à la réhabilitationde I'Afrique >>,Anténor


Firmin, De l'égalité des races humaines,Paris, Librairie
Cotillon,1885,p. XIII.

Résumé

Questiond'actualité,la problématiquede I'identité (nationale)revient au devantde


la scènede nombreuxpaysoccidentauxà I'instar de la France.Partantde ce constat,
nous nous inclinons à interroger l'histoire sur I'apport du vaudou dans la
constructionde l'identité nationalehaTtienne sachantque cettereligion ne bénéficiait
guère d'une bonne image auprèsdes élites à I'instar de tout ce qui venait du bas
peuple et qui ne pouvait faire partie de cette identité. En d'autres termes, nous
voulons faire reconnaîtredansla constructionde I'identité de ce pays la dimension
religieuse,mieux, la dimensionreligieuseautre que la catholiqued'autantplus que,
comme I'indiquent W. KYMLICKA et S. MESURE (200A. 282), I'identité se
forme < à partir d'un pluriel par un mouvementd'aller-retour, d'intégration et de
rejet [...]. Surtout,elle se nourrit d'une multiplicité et se constitueune unité:
l'identité est alors richesse(diversitéinteractive).[En définitive], I'identité est une
multiplicité de rapportset non une barrière>>.

Mots clés: identité,vaudou,Haiïi, religion,culture,politique,reconnaissance.

49
Summarv

National identity is a topic which is highlightedin manydevelopedcountriessuchas


France.We start from this assessment to wonder aboutvoodoo's contributionin the
building of Haitian nationalidentity. We haveto keepin mind that this religion had
rather a bad reputationfor the elites like everythingwhich stemmedfrom the hoi
polloi and which could not be consideredas inner part of the Haitian national
identity. In otherwords,we want to shedlight on the religious aspectin the building
of the identity of this country.We meanthe religious aspectwhich differs from the
catholic one.This is all thee more significantas W. KYMLICKA and S. MESURE
(2000: 282) state that identity is taking shape "from several elements,with a
swaying motion of integration and reject t ] Moreover, it is nurtured on
multiplicity and forms unity. Identity is thereby wealth (interactive diversity).
Finally identity is multiplicity of relationsand not a barrier."

Key words : identity,voodoo,Haiti, religion,politics,gratitude.

Introduction

Venu dans les calesdes naviresnégriersavec les esclavescapturéssur les


côtes ouest-africaines soit comme prisonniersde guerressoit comme criminels
(crime de lèse-majesté,sorcellerie,délits communs),le vaudou s'est aussitôt
implantédanslâ sociétéhaitiennegrâceà la présence,parmi les esclaves,de prêtres
ou des serviteursdes dieux. Malgré I'arrachementbrutal à leur milieu social, les
esclavesont pu, en terre d'exil, reconstituer,en partie, les cadresreligieux dans
lesquelsils avaientété élevés.De générationen génération,ils se sont transmisles
noms des dieux, leurs attributset les sacrificesqu'ils exigeaient.Cependant,la
persistancede cette religion dans le NouveauMonde peut étonnerplus d'un. Il y a
néanmoinsplusieursexplicationsà cela.Pour Alfred Métraux,celas'expliqued'une
part par le fait que dansles sociétésafricaines,la religion est si intimementliée à la
vie quotidienneet d'autre part par l'oralité qui était la seule forme d'écriture. Par
ailleurs,il souligneque la permanencede cette religion en Haiti plus qu'ailleurs
vient de ce que ce culte des espritset des dieux ainsi que la magie étaientpour les
esclavesà la fois un refugeet une forme de résistanceà I'oppressionen dépit d'un
régime esclavagistesévère et des châtimentsterribles qui frappaient ceux qui
participarentà des cérémoniespalennesoù les colons ne voyaient que sorcellerie
(1958: 34). Pour FrançoisHoutart et AnselmeRemy, le vaudouest ce qu'on peut

50
appeler la haitianité inavouable44oq la trace45, c'est-à-dire la partie de
I'inconscient collectif, I'héritage dont l'origine africaine véhicule les seules
référencessouverainement produiteset non imposéesde l'extérieur (2000'. 26).
<<C'est la penséequi permet d'aller au loin des étranglements de système.Elle
réfute[..] tout comblede possession> (GLISSANT. T997: 20). il n'en demeure
pas moins que, du fait des desseinsinavouésdes pouvoirs politiques formels et
informelsainsiqued'<<un absolude l'Être imposépar les pensées de système> (Id :
20), le vaudou va évoluer en vase clos ne recevantd'autres apportsque ceux du
catholicisme.Dès lors les questionsqui nousviennentà I'esprit sont les suivantes:
quelleplaceattribuerau vaudoudansI'identité hartiennealorsqu'on lui accordepeu
de crédit ? Est-il une simple exploitation de la religion par des pauvres ou des
charlatans? A traversla théorie de Will Kymlicka, à savoir l'intégrationet le rejet,
nousvérifieronsla trajectoiredu vaudoudansla constructionde I'identité en Haïti.

Le rôle politique

Malgré son confinement au bas-peuple et la primauté du catholicisme, le


vaudou a joué un rôle primordial dans la constitution de l'Etat haïtien. Son premier
emploi remonte à la colonie et il est d'ordre politique. En effet, il s'est illustré dans
la révolte des esclavesen ce que les meneursd'hommes, -les leaderscharismatiques
tels que Makandal, Hyacinthe, Boukman et Biassou, -conciliaient deux fonctions:
l'une militaire, l'autre religieuse.Le premier des chefs ci-dessuscité est à I'origine
de la célèbre eérémonie du < Bois-Calman > (14 août 1791)46, cérémonie qui
donnera aux esclaves toute l'énergie qui les conduira sur les chemins de la liberté.

aaExpression
empruntée à Laënnec HURBON, Comprendre Haiti. Essai sur l'Éat, la nation,
la culture, Paris, L'Harmattan, 1987,p. 147.
a5
Édouard GLISSANT, Tiaité du Tout-Monde (Poétique IV), Paris Gallimard, 1997, pp. 19-
20.
a6
Reprenant la pensée du sociologue Jean Remy, François Houtart et Anselme Remy
reconnaissentégalement le caractere important que revêt cet événement dans la construction
de I'identiæ nationale en Haïti. Ils afiirment en ce sens : < la cérémonie du Bois-Caitnan est
l'un des ces actes forts qu'exige I'identité en période de crise, en ce qu'elle est l'expression
d'une consciencefière. [...] Quand l'ancien esclaveBoukman, proclama l'émancipation du
peuple, son indépendanceet l'établissement de la justice, en opposant le Dieu des Blancs à
celui des Noirs, un tel acte revêtit un caractère fondateur, non seulement d'une
reconnaissanceculturelle, mais aussi, en l'occurrence, d'une identité nationale > (In Flaïti et
la mondialisation de la culture. Etude des mentalités et des religions àce aux réalités
économiques,sociales et politiques, Paris, L'Harmattan, 2000, p. 27) .

51
L'importance du vaudou dans cet événepent nous est ici rapportée par les écrits
d'un fonctionnairede l'époque :

La colonie pullule d'esclaves, des soidisant devins


et sorciers, qui empoisonnent et qui, depuis
longtemps, ont conçu le plan d'éliminer
insensiblementtous les Blancs [...] Ces Noin font
partie d'une secte ou praliquent une nouvelle sorte
de religion fondée par deux chefs, des vieux Noirs
qui, pendant des années, furent des fugitifs et dont
les noms sont Macandal et Tessereau: ces deux
sectaires ont heureusementété anêtés [...] Mais,
malheureusementils ont un nombre considérable de
disciples ; il y en a actuellement plus de deux cents
dans les prisons du Cap. Nous en avons à peu près
une douzaine dans celle de Port-de-Paix depuis que
des instructions ont été envoyées, il y a une
quinzaine de jours, et vingtdeux aufres ont éte
dénoncés; etj'ai des raisonsde croire que ceux qui
restent encore à découvrir dans les différents
quafiiers de ce déparæment sont en nombre égal à
ceux du Cap.47

Même si le Vaudou fut un facteur crucial dans l'émergencede la lutte des


esclavescontreleur conditioncommeil le fut danscelle du peuplehaïtiencontreles
colonisateursfrançais,on ne peut néanmoinsfaire, commeI'ont soulignéMintz et
Trouillot, d'une croyancereligieusele seul fermentde la rébellion.Car d'aprèsces
auteurs,il y avaitaussibeaucoupd'individuset de groupes,quijouèrentun rôle non
négligeabledansla Révolutionet l'émergencede la Républiquequi s'ensuivit,qui
rejetaientouvertementle vaudou48ou le rejetterontplus tard.

C'est dans ce dernier cas de figure que l'on peut ranger Toussaint
Louverture,Dessalines,Pétion et Christophequi ont pris la suite du mouvement
d'émancipationjusqu'à l'Indépendance du pays.Quoiques'étantservi du Vaudou
pour accéderau pouvoir, ils ne firent pasde ce culte la religion offrcielle. DansLes

47CitÉpar Sidney MINTZ et Michel-Rolph TROUILLOT, < Pour une histoire socialedu
Vaudou>, in Michel LE BRIS,Vaudou,Tours,MameImprimeur,2003,p.29.
48 Ibid.,p, 35.

52
mystèresdu Vaudou,LaënnecHurbon penseque cetteabsencede statutvient de ce
que ce n'est pas un culte fondé sur l'écriture ni disposantde dogmesprécisni de
bureaucratiecentralisée,encoremoins d'un rituel rigide. Toutefois,il préciseplus
loin que cesagissements doivent être mis sur le comptede manæuwespolitiquesen
ce que ces héros voulaient traiter sur une base égalitaire avec les nations
européennes49sans pour autant changer les formes de gestion de la société
(l'exploitationdesmassesanalphabètes par uneminorité).

Mais dans Iæ Vodou haitien. Reflet d'une sociétébloquéeson confrère


Fridolin Saint-Louisimpute ce déni à l'ambivalencede l'élite haiTienne, une élite
beaucoupplus soucieusedes bonnes conventionssocialesque de convictions
religieusesà proprementparlées.Il fait aussiobserverque cette<<caste>>était et est
tournéevers les canonsoccidentaux(l'Eglise catholique,l'Etat, I'Ecole, les Forces
armées..), qui-consacrent I'honorabilité,la respectabilitéet la dignité,qui sont ceux
de la sociétéoffrcielle. Plus que tout, il perçoit dansce groupesocial une lutte sans
fin entre le modèle africain intériorisé,vécu (le vaudou) et le modèle européen
extériorisé,utilisépour les avantages sociaux.En d'autrestermes,le secondavaiten
sa faveurla légitimitéet une chargesymboliquetandisque le premieren assuraitle
contrepoidsmêmechez cescroyantsofficiels qui ne se privaient guèredesservices
deshougansto. De ce point de vue, ils ne concevaientl'identitéhartiennequ'à partir
de certainesfixités idéologiques,c'est-à-direque c'était une identité à ( racine-
unique>>51selonle terme d'EdouardGlissant.Et c'est sur ce postulatqu'en 1860,
I'Etat haTtiensigna un concordatavec le Vatican et déclenchales premières
persécutions contre le Vaudou52.Le Concordatconsacradès lors la pénalisation
mais surtout une dénégationde cette religion chez les élites hartiennes.Des faits
qu'on peut lire en parcourantle chapitreIV de I'ouwage Iæ Vodou haiïien. Reflet
d'une sociétébloquée.Ce liwe rappelle,avecjustesse,les vicissitudesdu vodou :

Le vodou haitien n'eut pas la vie facile, dans


son milieu d'origine. Il aurait dû connaître le
sort du poussin tué dans l'æuf. Dès le premier
matin de sa naissance, des attaques violentes
lui arrivèrent de toutes parts, très précisément
des deux principales sources du pouvoir

nnLaénoecHURBON,Iæsmystèresdu Vaudou,Paris,Gallimard,1993,p. 49. Faitsaussi


développéspar Alfred METRAUX dansIe Vaudouhaïtien,préfacede Michel Leiris, Paris,
Gallimard,1958,pp. 298-317
50Prêtresvaudous.
slÉdouardGLISSANT,Poétiquede la Relation(III), Paris,Gallimard,1990,pp. 157-158.
52 Fridolin SAINT-LOUIS, Le Vodou haitien. Reflet d'une société bloquée, Paris,
L'Harmattan,2000,pp.9I-92.

53
haîtien: l'Eglise catholique,religion d'Etat, et
I'Etat lui-même. La dialectique de
complémentaritedu sabre et du goupillon
aboutit à une alliance pour la chasse aux
sorcières.Toute l'histoire du vodou fut celle
d'une batailletantôt voilée.tântôtouverteentre
l'Europe et I'Afrique. L'Europe à traversses
æuvres,l'Eglise,I'Etat ; I'Afrique à traversses
descendantset leur institution relisieuse et
culturelle,le vodou.53

Dans le même sens, son auteur fait remarquer :

Une ordonnance de I7A4 int€rdit. sans


équivoque aux esclaves de faire des
assemblées de nuit, sous prétexte de danses
générales. [...] C'est ainsi que fut créée en
1765,la première Légion de Saint-Domingue,
corps de troupes légères ayant pour fonction
principale de dissiper les assemblées et les
calendas des nègres t I En 1801, après
l'abolition officielle de l'esclavage, le général
Dessalines, informé qu'une cérémonie vodou
se déroulait dans une clairière de la plaine de
Cul-de-sac, s'y transporta en toute hâte à la
tête d'un bataillon de la 8" demi-brigade.
Sanglante opération de police s'il en fut:
cinquante des affiliés furent passés au fil de
l'épée [...]. Quelques années plus tard, la
constitution d'Haïti reconnut le catrolicisme
cornme religion officielle et d'Etat, du même
coup, le vodou passa pour des pratiques
délictueuses avec peine, pour tout adepte jugé
coupable, sans présomption d'innocence.

t'
Ibid., pp. 80-81. François Houtart et Anselme Rettty rapportent aussi le long labyrinthe du
vaudou dans l'histoire d'Halï : < Réprimé par les Français, car religion des esclaves;
pourchassépar les nouveaux pouvoirs de l'indépendance, qui, après Jean-JacquesDessalines,
voulaient avant tout s'emparer des commandes de l'économie sans changer les formes
d'exploitation >>.In François HOUTART et Anselme REMY, Haïti et la mondialisation de la
culture...,op. cit.,p.26.

54
Officiellement,le vodou était mis hors la loi et
persécuæ.54

En dépit de cette atmosphère de persécution permanente, qui se poursuivra


pendant longtemps (jusqu'au milieu du X)f siècle), ce culte fit preuve d'une
étonnante capacité de survie que Saint-Louis a appelé des <<résistanceshistoriques
aux persécutions>55. Autrement dit, <<le vaudou ne pouvait s'éradiquer ni par
décret ni par la force parce que c'est I'un des vecteur d'une penséemagique qui
répond à une situation objective et qui permet à ceux qui vivent dans la misère et
I'oppression de se réaliser en tant qu'êtres humains et pas simplement comme des
bêtes de somme )56. À travers donc cette respiration de la créature opprimée57 et
surtout en utilisant le vaudou comme artifice magique, les hougans avaient compris
le parti qu'ils pouvaient tirer auprès des politiques hailiens soucieux de consolider
leurs positiogs sociales. Ce jeu faisait du vaudou un élément clé de la culture du
pays.

Cette alliance entre politique et vaudou se vérifiera avec beaucoup


d'ampleur sous le régime de François Duvalier alias Papa Doc (1957- 197I).
Laennec F{urbon, un æil averti de la réalité haïtienne, souligne que Duvalier père qui
considérait ce culte comme <<l'âme de la nation et de la race noire >58 le sortira de
la clandestinité en utilisant les prêtres vaudous soit comme informateurs soit comme
agents incorporés dans la police parallèle que représentaientles Tontons macoutes.

tn
Fridolin SAINTT-LOUIS,I-e Vodou haitien..., op. cir., pp. 80-81.
tt
ldem. Dans le même sens on peut lire avec intérêt le point de vue de Leslie gs5pengles
sur l'attitude des présidents haïtiens à l'endroit du vaudou: < During the forty years
following independence (1804-44), the first three black presidents set themselves against
Vodou and atæmpted vigorously to suppress it >, in Leslie Gérald DESMANGLES, The
âces of the Gods: Vodou and Roman Catholicism in Haiti, USA, The University of North
Carolina Press/ChapelHill & London, 1992,p.45.
56
FrançoisHOUTART et Anselme REMY, op. cit., p.27-25.
tt
Idem.
tt
Cette prise conscience part d'un choc, celui provoqué par l'occupation américaine de
1915. En effet, l'occupation du pays n'avait pas produit le résultat escompté parmi la classe
possédante en majorité formée par les mrrlâtres. Car depuis 1848 (date de I'arrivée au
pouvoir de Faustin Soulouque, un mulâtre), leur rêve a toujours été d'orienter la lutte dans le
sensd'un protectorat : ils avaient cru qu'en perdarrt I'Indépendance, ils auraient les étrangers
à leur têæ et les Noirs sous leurs pieds. Mais ils se trompèrent. Tout le monde, sans
exception, fut dans le même panier, c'est-àdire qu'il n'eut aucun traitement de faveur vis-à-
vis des groupes ethniques. Ce choc marqua alors un moment important dans l'histoire
politique, culturelle et sociale d'Flaiti. En littérature, il donna naissanceà l'Ecole indigénisæ,
mouvement qui eut pour objectif de rappeler, avec insistance, à l'Haïtien ses origines
africaines.

55
Mais à la chute du régime à vie, Macoutes et hougans furent-ils confondus et
pourchassés59.Fridolin Saint-Louis ne pensepas autrementquand il écrit que :

Très près de nous,en 1986,[...] une mini-


tempête religieuse se faufila dans les
mouvements de foules, causa des dégâts
importantsaux églisesdes dieux et des loas
venus d'Afrique. C'était le lendemain du
départde Jean-claude Duvalier.Accusésd'être
des malfaiteurs, d'être impliqués dans la
famille duvaliérienne, des hougans, des
mambos ont expérimenté; malgré eux,
l'épreuve de la tourmente.Près d'un millier,
[...] a subi le supplicedu collier, c'est-à-dire,
, brûlévif aprèsavoir étéaspergéd'essence.60

Mais on doit à la vérité de dire, à la suite de Moreau de Saint-Méry, que


même si François Duvalier se faisait passer pour un partisan avoué du vaudou
comme authentiquereligion du peuple, ciment nécessairede I'identité raciale des
Haitiens, il avait les défauts traditionnels des politiciens haïtiens. En effet, aucun
acte officiel de son gouvernement n'a été signé en ce sens pour démontrer une
quelconque propension à soutenir la religion des classespopulaires haïtiennes.6l
Toutefois, il faut retenir que I'arrivée au pouvoir de François Duvalier avait modifié,
de façon irréversible, la perception du vaudou dans la société haïtienne. Cette
nouvelle conception du vaudou entraîna un besoin irrésistible de redéfinition de soi
dans la société haitienne profanée, en politique, en littérature, en musique et sur le
plan religieux. .Chez les vaudouistes respectés de Port-au-Prince, appartenant à la
classe moyenne, elle conduisit à I'affirmation publique de leur adhésion à cette
religion. Plus important encore, elle produisit un élan d'unification chez les prêtres
vaudous des villes et chez les hougans des plus grands centres vaudous des
campagnes,un élan qui aboutira à la création de la première organisation nationale
de défense du vaudou dénomméeZantray62.

Cette prise de conscienceseraà l'origine de la suppressionde la pénalisation


traditionnelle du vaudou et de sa reconnaissance comme culte par la nouvelle

tn
Laennec HURBON op. cit., pp. 119-127. Cette opération de chasse aux sorcières est
connue en Haiti sous le nom de dechoukaj (anachage de souches).
uo
Fridolin SAINT-LOUIS op. cit., pp. 82-83.
ut
Michel LE BRIS, op. cit., p. 47.
u'
L'ac.onyme signifie enfants de la tradition haitienne (zenàn tradisyon ayisien). Mais le
mot créole antray (entrailles) veut aussi dire cæur (au sensfiguré).

56
constitution (votée le 29 mars 1987)63, -constitution qui avait pour objectif le
rétablissement de la démocratie. Plus que tout, son droit de cité était de moins en
moins contesté et l'ancienne perception, qui faisait de ce culte la religion exclusive
des 95 ou 98% des paysans et du prolétariat urbairl cède devant l'analyse plus ou
moins approfondie64. Ce mouvement de visibilité du vaudou ira crescendo avec
I'arrivée au pouvoir du père Aristide en 1990. Car, pour accéder à la magistrature
suprême, ce prêtre avait rallié sur sa candidature à la fois les catholiques, les
protestants et les vaudouisants. Il donna ainsi lieu à une libre coexistence des trois
systèmes religieux, mais une libre coexistence non reconnue par les instances
supérieures de chaque religion. C'est également sous sa présidence qu'on
commémora,le 22 août 1991,publiquement,pour la première fois depuis deux cents
ans, la cérémonie du < Bois-Carman >>.Mais à ce rôle politique du vaudou, il faut
ajouter celui de pansementdes misèresquotidiennesdespopulationshaïtiennes.

L'emploi social

D'emblée, il faut dire que le vaudou remplissait et remplit toujours une


fonction sociale importante en Haïti. En premier, il permet un certain divertissement
de la population mais aussi l'évasion d'une Éalité sordide grâce à ses chants et ses
danses.Par ailleurs, les cérémoniesvaudoueset I'influence des mambos (prêtresses
du vaudou) et hougans raffermissent la solidarité de ses membres et sont un élément
de cohésion dans la structure élargie de la paysanneriehaitienne. I1 est très suggestif
de lire le témoignage de Fridolin Saint-Louis qui présente ce culte comme étant un
phénomène social total, une force de cohésion efficace qu'utilisent le paysan et les
prolétarreshaïtiens:

Aux prises avec les caprices de la nature


incontrôlable, imprévisible, impitoyable à
travers intempéries, sécheresse t ] ils
préfèrent tout laisser aux soins des esprits et ou
du Bon Dieu Bon. [...] Rien d'étonnant que le
vaudou soit placé au cæur même des
marginalisés sociaux. Chez eux, il joue le rôle
polyvalent de religion, de fête, d'économie, de
justice, de médecine, de défoulement collectif,
de protestation ouverte ou voilée, de bouche-

63Dansla < SECTIOND ) qui rraire ( DE LA LIBERTÉ DE


CONSCIENCE>,l'arricle 30
déclaraitce qui suit : Toutesles religionset tous les cultessont libres. Toute personnea le
droit de professersa religion et son culte, pourvu que I'exercicede ce droit ne trouble pas
I'ordreet la paix publics.
unFridolin
SAINT-LOUISop. cit., pp. 90-91

57
trou. Il répond aux différents besoins de la
communautépour vivre. Vu de cette façon, il
est [...] un phénomènesocialtotal, un touL un
systèmesocialentier.65

Cependantle vaudou n'en a pas fini d'étonner plus d'un. D'ailleurs Métraux
lui reconnaît un rôle indéniable dans le domaine artistique. Il soutient qu'il a permis
à la paysanneriehartienne de préserver l'héritage africain dans deux domaines précis
que sont la danse et la musique. Pour 1ui, une cérémonie de vaudou bien conduite est
un spectaclede qualité : tambourinaires et danseurssont souvent des virtuoses.

L'ouvrage Aspects éducatifr et moraux du vaudou haitien (1995) de


Claudine Michel se situe à peu près sous le même angle d'approche. Son auteur
insiste amplement sur le fait que cette religion dispose des ressources intérieures
insoupçonnées.Elleaffirme par ailleurs qu'en plongeantsesracinesdans des valeurs
spirituelles et morales de justice sociale,de mieux être pour les oubliés, de tolérance
mutuelle, le culte vaudou véhiculerait un messageuniversel destiné aux hommes et
aux femmes de bonne volonté. En d'autres termes, il joue un rôle de cohésion et
d'espérance qui a permis aux esclaves d'hier de se libérer de la colonisation et aux
Haïtiens d'aujourd'hui de surviwe aux différentes dictatures civilo-militaires. Le
sociologue François Houtart et l'anthropologue Anselme Remy consignent ce rôle
en ces tefTnes:

Evidemment, la religion du petit paysan, en


Haïti comme ailleurs, est surtout teintée de
recours à un qnnbolisme réifiant les
"représentations pour résoudre les problèmes
insolubles autrement. L'extrême vulnérabilité
du milieu social ouvre, de façon privilégiée,
l'espace magique aux croyances et aux
pratiques. Loin d'être irrationnel, un tel
comportement est, au contraire, d'une logique
implacable, mais [...] différente de celle de la
pensee analytique. Résoudre s5rrnboliquement
ce qu'on peut maîtriser réellement relève d'une
sagesse qui pourrait inspirer utilement les
acteurs stressés d"un monde dominé par le
calcul économique.66

ut'Ibid.,pp.98-1oo
66François
HOUTART et AnselmeREMY, op. cit., p.26-27

58
Aussi,le vaudouseprésente-t-ilà lqfois commeuneexpressionculturelleet
une forme d'autoprotectionqui donneà la tradition haïtiennetoute son originalité et
assurela dignité à ces populationsface à la dégradationéconomiqueet aux dérives
politiques.C'est peut-êtrece rôle d'amortisseursocial que lui reconnaissent les
intellectuelsde tout bord et que nousdévelopperonsdansles lignesà venir.

intellectuelleet artistique
La reconnaissance

< Religion, culture,principe spirituel qui, relie I'homme a ses origines>>,


disait Hurbon, il permet à I'HaTtiende s'insérerdans le monde.Depuis le XX"
siècle,des voix d'ethnologueset de sociologuesse sont élevéespour donnerun
statut digne au vaudou.Le passageen revue de quelquesauteursnous le montrera.
Le premierà avoir entrepriscettedémarcheest JeanPrice-Mars(1876-1969).Dans
Ainsi parla I'Oncle (1928),il proposela réhabilitationdu vaudouà la fois comme
faisantpartie de la culturenationaleen HaiTiet commeun culte digne d'études.Par
cette entreprisePrice-Marsa contribué à une nouvelle interrogationsur f identité
hailienne.On perçoitaisémentcettenouvelleconceptiondansle passagequevoici .

< Le Vaudou est une religion parce que


tous les adeptescroient à l'existence des
êtres spirituels qul vivent quelque part
dans I'univers en étroite intimité avec les
humainsdont ils dominentl'activité [...].
Le Vaudou est une religion parce que le
culte dévolu à ses dieux réclameun corps
sacerdotal hiérarchisé, une société de
'fidèles,
des temples, des autels, des
cérémonieset, enfin, toute une tradition
orale qui n'est certespas parvenuejusqu'à
nous sansaltération,mais grâce à laquelle
se transmettentles parties essentiellesde
ce culte. Le Vaudou est religion parceque,
à fravers le fatras des légendes et la
comrption des fables,on peut démêlerune
théologie, un système de représentation
grâce auquel, primitivement, nos ancêtres
africains s'expliquaient les phénomènes
naturels et qui gisent de façon latente à la
base des croyances anarchiques sur

59
lesquellesrepose le c4tholicisme hybride
de nos masses populaires >>.67
En convoquant cette religion Price-Mars lançait, pour paraphraser René
Depestre dans Ainsi parle le fleuve noir68, une invite à ses compatriotesà assumer
le volet africain de leur culture que l'oligarchie dominante avait toujours renié.
C'était un inventaire cohérent de I'héritage africain, c'est-à-dire une redécouverte
d'HaiIi avec des yeux neufs, sansles préjugésdu passécolonial. Price-Mars appelait
ainsi l'intelligentsia et l'Hatti occupéepar I'armée américaineà se rafraîchir dans le
terreaufécondantde sesorigines et à s'éblouir de sesracines.

L'analyse de Laënnec Hurbon, dans Dieu dans le raudou haïtien (1987) est
à mettre en parallèle avec celle qui précède. Il a en effet découvert dans cette
religion une fonction très intéressante, la fonction thérapeutique. Mais en quoi
consiste-t-elle PD'après cet auteur, le vaudou est une vision du monde originale et
l'effort d'un peuple pour s'affirmer contre les conditions dramatiques de son histoire,
qui I'ont fait passer de I'esclavage et de la domination étrangère au sous-
développement et à la dictature politique. Pour reprendre à notre propre compte les
propos de l'éditeur, <<le vaudou constitue pour les masseshaltiennes une solution de
survie parce qu'il les aide à prendre conscienced'elles-mêmeset à s'assurercontre
I'existencemalheureuse-en "recousantles déchiruresdu tissu du monde >.69

Les écrivains ne sont pas en marge de ce processus de reconnaissancede


cette religion. Ils lui ont en effet donné une image qui ne frt pas négative. René
Depestre a par exemple décrit le vaudou comme étant une religion qui génère la
ressourceculturelle si particulière à I'univers du peuple hailien. Il a aussi souligné la
forte présencedu-vaudou dans la vie quotidienne des Haitiens. D'après cet écrivain,

utlbid.,
p. 20.
u*Grigny,
Éditions Parolesd'Aube, 1998,pp. 42-43.
6e
Ce constat est plus expliciæ dans un autre de ses livres dans lequel on pôut y lire : < La
persécution par l'esprit pose une question à I'individu vaudouisant et celui-ci est comme
enchaînépar cette question. Elle est celle du destin : le lwa est une force étrangère,inconnue
et anonyme, qui s'abat sur l'individu qui ne pourra retrouver l'équilibre qu'en renouant le
dialogue avec lui. En nommant le lwa, en lui rendant un culte qui plaît. le vaudouisant
obtient une protection. I1 ne gît plus dans le non-sens et la confusion. Il reconnaît sa propre
place dans le groupe, celle des autres et celle des choses dans I'univers. Le dialogue renoué
avec le lwa, c'est le sens retrouvé. C'est qu'il n'y en a pas pour le vaudouisant en dehors de
celui offert par la coutume ou la tradition. Les lwa sont [ ] les fondements et la cohésion
du groupe social culturel. Perdre le dialogue avec eux, c'est perdre le dialogue avec la
à la mort >, in
communauté, c'est être livré à l'individualité, à I'insécurité, à l'anon1,.,rna1,
LaênnecHURBON, læs mystèresdu vaudou..., op.cit., p. 146.

60
par sa grandepuissanceonirique, il fait tolalementcorps avec la matièrelittéraire,
commela sèveappartientà I'arbre. Il conçoitainsi cettereligion :

Le vaudou est l'un des éléments constitutifs de


l'imaginaire des Haïtiens. I1 aura éte leur
première réponse, de nature mystique, à la
trarte atlantique et aux autres grands malheurs
de I'esclavage et du fait colonial. [...] Le
vaudou est un psychodrame, un théâtre, un
opér4 une école de danse, une chaudière à
vapeur érotique, le générateur du réel
merveilleux haïtien sous toutes ses formes
existentielles.T0

Jacques Roumain est sur la même longueur d'ondes que Depestre. Dans
Gouverneursde la rosée (1944), le vaudou se donne à voir sous ses deux aspects:
I'un constitué par I'atmosphère du réel merveilleux et l'autre incarné par la magie
noire qui symbolise la dictature de Duvalier et le vaudou. En développant ses
aspects dans cette æuvre, il prend, selon les sociologues, le parti d'innocenter le
vaudou, en ce qui concerne le mal, et propose de le rationaliser. La présence de
cette religion est vénfiable à travers la cérémonie vaudoue qu'offre Délira (la mère)
en I'honneur de son fils Manuel, revenu de Cuba (personnage central du roman).
Tout le chapitre IV est dédie à cette cérémonie. Il serait fastidieux de vous le
rapporter en entier. Citons uniquement cet extrait montrant I'arrivée de Dorméus, le
hounsan:

Une rumeur de voix, sur la route, annonça


I'arrivée de Dorméus. Bienaimé I'attendait
déjà à la barrière. Le houngan s'avança ; c'était
un grand nègre rougeâtre, du sérieux dans
chacun de ses mouvements ; la théorie de ses
hounsi (initiés du vaudou) coiftes et vêtues de
blanc immaculé le suivait, et elles élevaient
dans leurs mains des esquilles de pin allumées.
Elles précedaient le La Place, ordonnateur du
cérémonial, les portedrapeaux, les joueurs de
tambourset de gong.

Faisant une révérence, Bienaimé offrit à


Dorméus une cruche d'eau. Le houngan la
reçut avec gravite, la souleva lentement de ses

to
Philippe BERNARD, < Haiti, littérature et vaudou >>,op. cit., p. 21 1.

61
deux mains jointes vers les quatre directions
cardinales. Ses lèvres murmuraient les paroles
secrètes.Il arrosa ensuite le sol, traça un cercle
magique, redressa sa haute taille et se mit à
chanter accompagnéde tous les assistants:

Papa lægba, I'ouwi barriè-a pou nous, ago


vé!
Atibon Iægba, ah l'ouvri barriè a pou nous,
pou nouspasser

L n'a rivé,n'a remerciéloa yo

Papa kgba, mait'e trois carrefours,mait'e


- trois chemins,mait'etrois rigoles

L'ouwi barriè-apou nous,pou nousentrer

l.o n'a entré,n'a remerciéloa yo.7l.

Mais le vaudou prend toute son ampleur dans [æs arbres musiciens (1957)
de Jacques Stephen Alexis, En effet, Bois-d'Orme Létiro, personnagecentral du
roman, est un hougan de haut rang. Celui-ci sera aidé dans sa lutte contre le mal par
un puissant loa. Par contre, Gonaïbo, le petit prince de la forêt enchantée, sera
contraint à la rencontre avec la brutalité des hommes et la confrontation sera rude.
La fin du roman mêle onirisme et merveilleuxT2 lors de l'ultime rencontre entre le
vieux hougan dépositaire des secretsde I'initiation vaudoue et le jeune sauvagequ'il
a choisi comme héritier spirituel, réunissanten un seul être, par son geste,la poésie,

tt
Ja"q,r"sROUMAIN, Goul€rneurs de la rosée,Paris,Messidor, 1989,pp. 58-60.
''
René Depestre a donné, dans Ainsi parle le fleuve noir, une définition assezjuste de ce que
signifie ce concept en Haiti : < [r réalisme merveilleu,x des Haïtiens, est la négation
poétique, romanesque,picturale, des donnéesimpitoyables de la domination coloniale. C'est
l'antithèse artistique, la réfutation idéale des événements qui, dans I'ordre économique,
politique et social, ont dominé la scène insulaire de Saint-Domingue. Les faits
extraordinaires de la traite négrière prennent dans les esprits les dimensions culturelles et
mystiques sans précedent. L'appréhension esthétique des expériences de la plantation ouvre
des horizons jamais vus à I'aventure créole des images, des formes, des sons et des couleurs ;
l'histoire, les mæurs, les mentalités épousent les contours d'un imaginaire extrêmement
composite dans son baroquisme et son surréalisme populaire. Né de la folle démesure de
l'ordre esclavagiste, le vaudou projette sur l'histoire des ÉIaitiens les effets d'une
< illumination > fantastique, une sorte d'agrandissement des échelles de perception du réel,
où l'atroce et le merveilleux, le mystique et l'érotique, le carnavalesqueet le politique, se
côtoient, s'interpénètrenL se recoupent entre eux, dans une tanse et une exubérance
effrénées>>,René DEPESTRE, Ainsi parle le fleuve noir..., op. cit., pp. 60-61.

62
la tradition et la magie73.Dans ce court extrait, il évoqueI'atmosphèrede mystère
qui entoureles préparatifsd'une cérémonievaudoue.

Les oftandes s'accumulèrent devant les autels


des hounforts, des pirogues chargées de vins,
de liqueurs, de gâleaux, de fleurs et de fruits
furent pousséessur le lac. Agouret Arroyo, le
dieu des eaux, était le père de la région, il
fallait calmer sa faim, tempérer sa soif et lui
lancer un vaisseau dans lequel, mangeant des
mets choisis, grisé d'alcools spiritueux, le Loa
viendrait jusqu'à la berge et ferait à ses enfants
3 le signe qu'ils attendaient.T4

Des pagesplus loin (pp. 175-177),Ie vaudouest à nouveauévoquécette


fois-ci grâce à un conclave des papaloas,convoquépar le vieux hounganBois-
d'Orme Létiro, réunionau coursde laquelleils devaientdéciderde la soumission
apparentevis-à-vis du catholicisme, c'est-à-dire le maintien des rites dans la
clandestinitéet le déménagementdes templesvers des reposoirssecretsou de la
lutte décidéeet résolueavecla défensedestemples.

Le généralMiracin, badgigandu sanctuairede


Nan-Remembrance,avait bien rempli sa
mission. Par toutes les routes; tous les
chemins de sente, par toutes les passesde
-montâgnequi aboutissentà Fonds-Parisiense
hâtaient les papaloas. Presque tous les
hounforts du département, quelques hauts-
lieu-xde l'Artiboniæ, du Nord, du Nord-Ouest
et du Sud avaientjugé bon de participer au
conclaveconvoquépat le vieux Boisd'Orme
Létiro, le chef prestigieux d'une des plus
vieilles et plus pures sectesvaudouesaradas.
Des représentants de l'autre côtede la frontière
étaient même arrivés. Cette nuit avait une
profondeur inhabituelle,- une nuit noire ;
sidérale,creuse,mousseused'étoiles. La brise
nocturne elle-mêmesemblait immatérielle et

tt PhilippeBERNARD,op. cir.,p.212.
to Paris,Gallimard,1957,pp.7l-72.
Jacqrr"sStephenALEXIS, I.es arbresmusiciens,

63
son souffle se lissait sur_ la terre sans le
moindre mufinure. Les deux flamboyants qui
délimitent l'entrée du sanctuaire de Nan-
Remembrance haussaient leurs troncs et leurs
frts divisés. énormes cuisses à la musculature
athléûque. Les branches puissantes
s'entecroisaient æls des paquets de membres
humaines, avec de longs biceps, des jarrets
noueux, des mollets torses et des renflements
herculéens, arbres quasi humains, monstrueux
titans a trente bras et vingt jambes brandies.
Les chevaux et les mules s'ébrouaient le long
des clôtures tandis que de nouvelles montures
hennissantes ne cessaient d'avancer sur la
il route crevassée.Les papaloas affluaient, jeunes
et vieux, portant des têtes hermétiques. Une
grande serviette blanche étalée au beau milieu
de la barrière du sanctuaire éclatait,
immaculée. L'<<impératrice>, vêtue d'un
caraco blanc,les reins ceints d'un foulard bleu,
accueillait les arrivants75

Dans la même verve, il ajoute :

C'était la plantureuse femme de l'agent des


Contibuables, Mme Ange Desameaux en
personne, hounsi, servante de Mambo-Nanan,
.la déessede sagesseet d'azur, la mère de tous
les Loas-grenadiers. Elle leur souhaitait la
bienvenue en silence avec une double poignée
de main, les pieds nus dans la poussière, puis
les conduisait à travers la cour jusqu'aux lieux
saints. À quelques pas du temple d'Ayizan,
épouse d'Atibon Legba, déesse des eaux
douces, des marchés, des portes et des routes,
la première déesse de l'Ol5,mpe orthodoxe
arada, brûlait un grand foyer. [...] Sous le
péristyle qui donne accès à la Maison des
Saints, debout veillait Aristil Dessin,
l'<empereur >>, gardien et décorateur du
temple. Vêtu de son meilleur pantalon et d'une
vareuse délavée, Aristil, serviteur, < cheval >

tt
Ibid., pp. 175-177.

64
d'Atchassou Zangôdô - e!'en d'autres lieux
on dénomme Damballah Oueddo, la couleuvre
d'Alada- se tenait droit et calme. Les papaloas
allaient à lui, leur < batterie > à la main et
Aristil les faisait pénétrer dans la salle du badgi
Bois-d'Orme Létiro était assis à terre, juste
devant le soba. À sa gauche, il avait son
badgigan, ( geal > Miracin, serviteur de Sobo
Naki dahomey, le lieu à la hache indienne de
jadéite et à sa droite, maigre et décharnée.
servante de Ayizan de Guinée. Autour de la
vaste salle, la table de Mambo Nannan,
recouverte d'une nappe bleue, celle de Papa
Liss4 celle de Zanmandon, celle de Papa
? Kiéviésou Danlé, celle de Loko Azagou, celle
de Atchassou Zangôdô, celle du Damoiseau
Blanc, celle de Kadja Dossous, celle de la
Belle Vénus. Les papaloas faisaient le cercle,
assis à même le sol de terre battue ils étaient là
quaûe-vingts près et d'autres continuaient à
entrer76.

Il n'est point besoind'en dire plus sinon de soulignerque <<le vaudouétait


l'âme du peuple,sa waie foi et sa seuleressource. Les loas étaientamalgamésau
corps de la nation, ils fécondaientla terre commele mâle fertilise sa femelle ! Leur
souffle ventait partout, dans les savanes,dans les vallées, dans les plaines et les
carrefours,il infiltrait partout,par tous les poresdes faubourgs,se frayant à travers
les quartiersaux maisonsblanches,danstoutesles cours,dansles foyers, se lissant
dans les consciences.La politique, la production, le commerce, f industrie,
I'enseignement,les sports,la culture,les rêvesdeshommes,tout était influencépar
la religionpopulaire>>.77

C'est pourquoi, il n'est pas surprenantque la musique postule aussi à la


réhabilitation et la valorisation du vaudou dans l'identité haltienne.À ce propos,
I'anthropologueaméricaineCatherineDunham a réalisé une importanterecherche
sur la significationde la gestuellesacrée.Ce qui la conduiraaprèsle constatselon
lequel la dansehartiennes'accompagned'une musique puissanteet supposeune
expérience unique du mouvement, à la création de sa célèbre < Technique

tuldem.

" lbid,.,p. r79.

65
Dunham >78 et à la publication du livre Iæs danses d'Haïti, son organisation
sociale, classification, formes et fonctions (1947). Sous le même angle, il faut
considérer le travail de Martha Jean-Claudeet d'Emérante de Pradines : ces derniers
ont non seulement remis à l'honneur les divers rythmes de la musique vaudou, mais
il les ont également enrichis avec la pop américaine et popularisés à travers des
groupes comme Boulanan Ekpéryans, Rarrq Boukan Ginen, Azor et Rasin Mapou,
Chandel, Koudjay, Kanpech, Tokay.

Toutefois I'article de Ralph Boncy < Vaudou et musique populaire en


HaiIi >79 montre avec à propos que c'est surtout avec Boukman Ekspeyrans que le
vaudou prend véritablement sa revanche au grand jour. Plus que tout, ce groupe
annonce I'officialisation du genre <<musique racine >>et l'octroi à la formation des
frères Beaubrun le premier prix du 3" Konkou Mizik (1989) avec la chansonWet
Chenn (Briser los chaînes) puis, dans la foulée, le premier prix du carnaval national
avec le triomphant Ke m'Pa Sote au début de I'année suivante. Un mouvement
populiste déclaré accompagneral'arrivée au pouvoir de Jean Bertrand Aristide, élu
le 16 décembre 1990. Â partir de ce moment, la musique plus authentiquereprend
ses droits sur les ondes des stations de radio à travers tout le pays et surtout <<sur le
béton > de la capitale, renversant la tradition des méringués carnavalesques à
laquelle le public s'était habitué depuis un demi-siècle. Les textes virulents
dénoncentdésormaisla misère, la corruption et les injustices du systèmepolitique.

La peinture participe également de ce mouvement de défense du vaudou.


Dans Haïti et ses peintres, de 1804 à 1980, Michel Philippe Lerebours constatele
dynamisme que confère I'imaginaire vaudou aux artisteshaiTiens.D'après celui-ci,
les peintures hartiennes, bien que morcelées, ne sont pas réductibles à leur plus
simple expression.Il estime plutôt que c'est une peinture, unique et indivisible qui
lie la créativité à la culture, à I'histoire, à la religion en général et au vaudou en
particulier ou à d'autres éléments de la tradition populaire. En d'autres termes, c'est
une peinture renouvelée, riche et variée.

Ce n'est pas autre chose que relate Jean-Marie Drot dans <<un peuple
artiste)80. Il constateà l'occasion que le peuple haltien est un peuple de peintres.

78
La technique Dunham n'est pas seulement une technique, c'est une façon de vivre. Les
danseurssont amenés à ressentir les mouvements comme une expérience et non pas comme
un simple acte d'imitation. Leur entraînementse fonde sur une parfaite maîtrise du rythme et
un travail physique intense. À travers sa pratique personnelle du mouvement, Catherine
Dunham a su faire cohabiter danses populaires, rituels afro-caribéens et danse classique
occidentale, parvenant à imposer une signature singulière.
tn
Michel LE BRIS, op. cit., pp. 102-105.
to
Ibid.,p. 169.

66
En visitant le Centred'art, lors de son séjo.prsur l'île, (nous l'avons aussiconstaté
lors de notre séjour, en 2008, sur l'île et nous sommesrestésadmiratif) il a été
frappépar l'originalité destoiles exposéessouventhautesen couleur.D'un tableauà
I'autre, il avait perçu un air de famille, un cousinage?une sorte de tutoiement.
Chaquepeintre semblait, selon lui, jouer quelquesnotes d'une vaste symphonie
populaire.Pour comprendrece qu'est véritablementcettepeintureet son contenu,il
est intéressantde s'en tenir aux propos de Philippe Auguste, un des rois de la
peinturehartienne,:

L'idée de peindrea surgi dansma tête lorsque


j'avais déjà 52 ans. Il me faut vous dire,
monsieur,que j'ai pour la natureun goût très
profond. J'oseraisdire une sorte d'adoration.
Etant fils de poèteet, je l'avoue, un peu poète
i}

moi-même, avec ses arbrss, ses plantes, ses


couleurs, ses parfrrms, la nature haiïienne m'a
toujours émerveillé. Evidemment, pour
je
compléter mes tableaux, dois faire travailler
mon imagination, car ici, en F{aïti, quelle que
soit la beaué de nos montagnes et de nos
plaines, nous n'avons pas une faune aussi riche
que celle de l'Afrique ou de I'Asie. Et, pour
mes toiles, j'ai besoin du pelage des zèbres,de
la peau épaisse des hippopotames, il me faut
aussi le cou flexible des girafes. Souvent par
monts et vallées, je me promène dans les
_campagnes de mon petit pays, et, un beau
matin, sans la directive d'aucun maître, j'ai
commencéàpeindre.8l

Plus manifeste est le point de vue de l'écrivain martiniquais Édouard


GlissantdansIæ discoursantillais danslequel la peinturehartiennese donneà voir
commeI'expressionen grosplan du réel,c'est-à-direqu'il permetde substitueraux
rusesde la perspectiveles ingénuités(le détour)de l'évidence:

Elle est la letffe de ce qui du réel se voit peu.


Elle est transfert et transport de ceux-là même
qui n'écrivenl pas. Elle manifeste par son signe
les écarts de I'oralité. t ] La peinture

tt rbid.,p. r72

67
haitienne récuse la magie de l'<authenticite >
des æuvres. Elle est le signe de la
communauté. La parole de tout un peuple. La
mesurede son énersie.82

Conclusion

En définitive, la présencedu vaudou est incontestabledans l'identité


haitienne.Il a d'abord imprégnéI'histoire en tant que force de contestationau temps
de l'esclavage.Ce qui lui avait permis de fedérer les différentes forces pour la
libérationdesesclaves.Ce rôle politiquelui permitpour la premièrefois de sortir de
la clandestinité.Il n'était plus seulementune forme d'expression des masses
défavorisées et exploitéesde ce pays.Méprisépar les pèresde I'Indépendance qui
lui préferaient le catholicisme, il réapparaît au grand jour sous la dictature
duvaliéristeoù Tl participeraà la préservationde ce régime.Malgré les persécutions
conjuguéesde I'Etat haltien, du clergécatholiqueet desprédicateursprotestants,cet
emploi politique connaîtrason apothéoseavec la commémorationde la cérémonie
du < Bois-Camain> sousla présidencedu prêtre-président, BertrandAristide. Mais
le Vaudou a surtout fondé I'imaginaire original et forgé I'identité noire d'Haïti à
traversla danseet la musique.Deux sourcesqui contribuentau soulagementd'une
réalité difficile. C'est pourquoi ce culte n'est pas réductibleà une < aliénation
purementsociale et politique >. Il est comme une pieuwe avec ses tentacules,il
imprègneplutôt plusieursunivers tels que la littérature,la musiqueet la peinture.
Aussi, depuisle milieu du XX" siècle,connaît-ilun mouvementde réhabilitationde
la part des intellectuelsqui tentent de lui donner la place qui lui convient dans
I'identité hailienne.Car, par le vaudoules Haltiensinversentles donnéesfunesteset
les valeursfaussesdu racismeet de la colonisation.Ils refusentde les considérer
commeI'ordre natureldeschosesde la vie et de I'histoiredescivilisations.Dansla
souffranceet la révolte,en dansantleurs malheurs,ils placent,commele dirait René
Depestre(1998 : 61), sur un même pied d'égalité avec la civilisation européenne
leur propresensde la joie devivre et de la liberté.

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70

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