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LA PRATIQUE
JOURNALIERE
DU R I T E
ECOSSAIS RECTIFIÉ

• •• •

LE GRADE
DE COMPAGNON

CET OUVRAGE EST RÉSERVÉ AUX COMPAGNONS ET MAÎTRES


INTRODUCTION
« Réunir ce qui est épars »
Devise maçonnique

Le texte de référence, qui sera commenté dans les pages qui suivent, est le texte présenté en 1998 par les res-
ponsables de la Province d'Auvergne comprenant le Grand Prieuré de France et le Grand Prieuré de Provence, et en
usage dans les Loges de la Grande Loge Traditionnelle et Symbolique (Opéra), dont il constitue le Rite Officiel.
Les commentaires sont ceux d'un Frère initié dans une Loge de cette Obédience et qui y a été reçu à tous
les grades ("bleus", "verts" et "blancs") du Rite Ecossais Rectifié. Ils n'engagent que lui. Ces commentaires ne
sauraient par conséquent présenter un quelconque aspect " officiel ". L'auteur s'est cependant astreint à respecter
rigoureusement l'enseignement reçu de ses Maîtres Instructeurs dans ce Rite. Il leur manifeste ici-même sa grati-
tude et son admiration et espère ardemment avoir réussi à leur rester fidèles, tout en présentant dans cette étude
des commentaires qui lui sont évidemment absolument personnels. La pratique d'un Rite maçonnique n'a en effet
d'utilité que sous deux conditions: la première, c'est d'être fondé sur les textes-mêmes qui ont été établis par les
fondateurs, et donc, en l'occurrence, par Jean-Baptiste Willermoz; la seconde est de considérer ces textes comme
base d'étude constante. Ce n'est en effet que par l'étude constante du Rituel que le Maçon peut progresser dans
la compréhension du message symbolique contenu dans les mots, les gestes, les objets, les maximes, les préceptes
et les conseils qui lui sont prodigués à chaque étape de sa vie maçonnique.
Il est en effet patent que dans ce Rituel, les Maîtres-fondateurs, que l'on peut sans risque de se tromper,
après étude approfondie de leur oeuvre, qualifier de "Grands Initiés", se trouve cachée une richesse telle, qu'elle
ne se découvre que petit à petit, par l'étude de chaque détail. L'erreur à ne surtout pas commettre, consisterait à
"ronronner" en écoutant d'une oreille distraite les paroles enseignées à l'impétrant (parce qu'on les a déjà maintes
fois entendues), à regarder sans y faire attention, les détails des objets dont chacun a une utilité didactique abso-
lue, à suivre d'un oeil distrait la gestuelle d'une Ouverture, d'une Fermeture des Travaux ou d'une Réception à tel
ou tel grade. Au contraire. Tenue après Tenue, le Maçon avisé cherchera à entrer de plus en plus profondément
dans la compréhension du message qui lui est délivré, à lui-même - fût-il "chevronné " comme à l'impétrant qui
les voit et entend pour la première fois.
Les présents commentaires doivent donc être considérés par l e lecteur comme une proposition de
recherche. A lui de les dépasser encore par sa propre réflexion.
Le grade d'Apprenti reste généralement fortement gravé dans la mémoire de tout Maçon. Il constitue le point
de départ d'une grandiose aventure qui, si tout se passe bien. marquera toute sa vie d'une empreinte indélébile.
Le grade de Maître est perçu comme une apothéose: on devient" Maître Maçon ", reconnu comme tel dans
le monde entier.

Le grade de Compagnon est de ce fait souvent ressenti comme un grade " intermédiaire ", de moindre
importance. Dans le Rite Ecossais Rectifié, cela constitue une grave erreur: ce grade est au contraire d'une impor-
tance capitale: Si le nouveau Compagnon suit rigoureusement les préceptes, conseils et recommandations qui lui
sont prodigués lors de sa réception. il deviendra par la force des choses un autre homme, un "homme nouveau
comme aurait dit Saint Paul. Et le grade de Maître viendra alors confirmer, consolider, réaliser c e qui aura été
acquis pendant le temps de compagnonnage.
C'est ce que nous allons tenter de montrer dans les pages qui suivent.
N.B. : l i Les textes du Rituel et les indications contenues dans les documents officiels sont imprimés en bleu. Les commentaires de
l'auteur sont imprimés en noir.
2) Comme pour le grade d'Apprenti. il nous a pani intéressant d'étudier d'abord l'Ouverture et la Fermeture des Travaux, avant de
passer à l'étude de la Cérémonie de Réception.
LE TA B L E A U D U D E U X I È M E G R A D E
OUVERTURE D E L A L O G E
POUR L E GRADE D E COMPAGNON

Les propositions relatives au Premier Grade étant terminées, le Vénérable Maître, debout
à sa place, frappe seul un coup et dit:
V.M. : A l'ordre, mes Frères.
Aussitôt, tous les Frères tirent leur épée qu'ils tiennent de la main gauche, pointe contre
terre et portent leur main droite au signe d'ordre de Compagnon.
Le Vénérable Maître prend du feu au chandelier à trois branches avec une mèche cirée à
l'extrémité d'un roseau et allume l'Etoile Flamboyante, en disant, en trois temps séparés, à
mesure qu'il allume les lampions:
V.M: Q u e cette étoile répande sa lumière de l'Orient à l'Occident, du Nord au Midi;
Qu'elle serve de guide à ceux qui cherchent avec un cœur droit;
Puissent les profanes, un jour, être éclairés par sa lumière bienfaisante.
Observons d'abord (simple détail ! ) que si Willermoz avait écrit ce texte de nos jours, il
n'aurait pas parlé " d'une mèche cirée à l'extrémité d'un roseau ". L'expression ancienne est
touchante à nos oreilles. Disons que le Vénérable Maître prend un boute-feu...
Qu'on nous pardonne cette petite impertinence... Autrement plus sérieux est l'examen
des paroles prononcées:
Quelle peut donc être cette étoile (à cinq branches !) qui répand sa lumière partout en
même temps ? Nous savons bien que notre soleil est une étoile bien sûr. Mais le soleil est tou-
jours représenté par un cercle et non avec cinq branches... Il s'agit donc bien d'une étoile qui
brille au firmament, dans la nuit. Mais dans ce cas, de quelle étoile s'agit-il, parmi les milliards
qui scintillent dans nos nuits étoilées ?... Etoile dont la lumière brille aussi au nord, dit le
Vénérable Maître... C'est un sérieux problème qui nous est posé là.
Le nombre de ses pointes, cinq, devrait nous rappeler aussitôt les cinq "plans" dont les
hermétistes disent qu'ils constituent la totalité de l'univers, à savoir: le plan physique, le plan
"astral" ou plan des sentiments, le plan mental, le plan de l'intuition pure, enfin le plan divin.
Atteindre le cinquième plan signifie donc atteindre le divin. Ainsi, dans les Evangiles (selon
Matthieu), le Christ procède à deux "multiplications des pains": l'une destinée à quatre mille
hommes (le quaternaire matériel: les hommes peu spiritualisés), l'autre à cinq mille hommes
(ceux qui sont parvenus au cinquième plan et sont donc proches du divin). Le résultat des opé-
rations est infiniment plus important pour les "cinq mille" que pour les "quatre mille"...
Observons aussi que cette étoile à cinq branches fut choisie pour emblème, sur le plan
profane, entre autre, lors de la dernière guerre 1939-1945, aussi bien sur les chars américains
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que sur les engins soviétiques... Rien à voir, par exemple, avec " é t o i l e de David "ou "sceau
de Salornon ", qui n'est pas à proprement parler une étoile, mais deux triangles entrelacés, donc
un symbole, puissant et riche d'enseignement, mais en aucun cas une étoile...
Remarquons par contre que les Anciens Egyptiens représentaient toujours une étoile,
et en particulier l'étoile Sepedet (que les Grecs appelaient: Sothis e t nous: Sinus) avec cinq
branches. Toutes les sociétés initiatiques, comme le Compagnonnage se réfèrent à l'Ancienne
Egypte. Et tous les rituels maçonniques se réfèrent à l'Etoile à cinq branches.

SIRIUS, étoile alpha de la constellation Canis Major (le Grand Chien)


et la constellation voisine
avec, à gauche, les trois étoiles du "baudrier d'Orion"
Lorsque dans les années trente, les ethnologues français Marcel Griaule et Germaine
Dieterlin étudièrent les Dogons, actuellement établis au Mali, ils apprirent avec stupéfaction
que cette " peuplade" savait depuis des siècles que l'étoile Sirius était une étoile double et que
son compagnon, invisible à l'oeil nu, se comportait comme une planète. Ils savaient en outre
que la révolution du compagnon de Sirius durait un peu moins de cinquante ans (d'où. dans les
religions - en particulier juive et chrétienne " l'année jubilaire "qui a lieu tous les cinquan-
te ans.. Ils savaient enfin que ce compagnon de Sirius était immensément lourd. Or, nous
n'avons découvert tout cela que depuis quelques décennies. Ils apprirent en outre à Marcel
Griaule et à Germaine Dieterlin que notre galaxie toute entière avait été Armée pan ce com-
pagnon " plus lourd que le fer comme ils disaient. Or, nos astronomes savent depuis peu que
ce compagnon, qu'ils appellent " Sirius B "est une " naine blanche" d'une densité 50 000 fois
(cinquante mille fois !!) supérieure à celle de notre soleil. Nous savons maintenant que les
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Dogons étaient jadis voisins de l'Egypte. Nous réalisons alors que la légende bien connue
d'Isis la brillante (et de sa soeur sombre Nephtys) et Osiris (et de son frère Seth - le " Satan "
des religions), accompagnés du chien Anubis (la constellation du Grand Chien) constitue à la
fois une clé astronomique et une clé de l'origine de notre monde et de notre humanité. Les pha-
raons, quant à eux, surnommés " Horus " ( l e faucon) durant leur règne, devenaient " Orion
à leur mort, et étaient dits "retourner après leur mort auprès de leurs ancêtres dans la constel-
lation d'Orion ". Nous ne faisons que redécouvrir peu à peu cette connaissance fondamenta-
le, qui était connue également des civilisations mésopotamiennes et qui s'est transmise sous le
sceau du secret dans les légendes initiatiques d'un certain nombre d'autres peuples, comme
(ainsi que nous venons de le voir) les Dogons. Nous commençons également à comprendre
maintenant, l'importance majeure de la constellation d'Orion, dont les trois étoiles du "bau-
drier " sont fidèlement reproduites sur le plateau de Giseh, par les trois célèbres et mons-
trueuses pyramides dites "de Chéops, Kephréen et Mykérinos. Les Egyptologues commencent
à comprendre (enfin !) pourquoi Mykérinos est décalée par rapport aux deux autres. En effet,
les trois grandes pyramides représentent les trois étoiles Mintaka, Alnilam et Alnitak, du bau-
drier d'Orion, rigoureusement reproduites sur la terre comme elles se présentent à nos yeux
dans le ciel. C'est dire l'importance majeure de cette constellation d'Orion pour les Egyptiens
... et pour l'humanité toute entière.

Les trois étoiles du Baudrier d'Orion


montrant l'exacte position qu'elles ont dans le ciel, avec le décalage de la troisième
correspondant au décalage de Mikerinos par rapport à Chéops et Kephréen
(Tombe de Senmout - Nouvel empire - connaissance qui s'est transmise au long des millénaires)
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Nous commençons également à comprendre pourquoi la Franc-Maçonnerie a toujours


été soupçonnée de transmettre parmi certains de ses Frères, des secrets de la plus haute impor-
tance. Nul doute que notre mystérieuse étoile du grade de Compagnon, dont il est fait si grand
cas dans tous les rituels, cache cette connaissance secrète transmise sans discontinuer, depuis
des millénaires, par la voie initiatique. On comprend que cette étoile, à nulle autre pareille,
répand sa lumière de l'Orient ( c ' e s t à dire de l'Egypte, foyer de toute connaissance) à
l'Occident et du Nord au Midi car son mystère est la clé de toute connaissance approfondie de
l'histoire de l'homme et du cosmos qui nous entoure. Il est bien évident que c'est elle, et elle
seule, dont la connaissance peut servir de guide à ceux qui cherchent avec un coeur droit.
Nous aurons de plus l'occasion, plus loin, d e nous apercevoir que le cœur droit est un
élément à ce point mentionné et répété, que le Frère, reçu au deuxième grade, ne peut pas man-
quer d'y porter une attention soutenue...
Il apparaît aussi comme évident que si tout le monde profane avait cette connaissance,
l'humanité cesserait de se comporter comme une espèce vivante aussi stupide que bagarreuse.
C'est le but de la Maçonnerie, de porter parmi les autres hommes les vertus (le "coeur droit "...
mais aussi les connaissances) dont nous avons promis de donner l'exemple. Question insi-
dieuse autant que lancinante: A quel moment, à quelle occasion, avons-nous donc promis de
donner cet exemple? Cette phrase, prononcée par le Vénérable Maître lors de la Fermeture des
Travaux, nous ne l'avons pas relevée ni commentée dans notre étude du Premier Grade. Et
pourtant, qui peut répondre à cette question: "Quand avons-nous fait cette promesse dont parle
le Vénérable Maître à la fin de chaque Tenue " ?... Nous en reparlerons plus tard...
Ensuite, le Vénérable Maître frappe un coup sur l'Autel, qui est répété par les deux
Surveillants, et dit:
V.M. : Frère Premier Surveillant, annoncez aux Frères que je vais ouvrir la Loge de
Compagnons.
I" Surv. : Frère Second Surveillant, annoncez aux Frères que le Vénérable Maître va
ouvrir la Loge de Compagnons.
Surv. : Mes Frères, je vous annonce de la part du Vénérable Maître qu'il va ouvrir la
Loge de Compagnons.
I" Surv. : Mes Frères, je vous annonce de la part du Vénérable Maître qu'il va ouvrir la
Loge de Compagnons.
L'annonce étant faite, le Rituel va pouvoir se dérouler. Selon notre habitude, prenons
bien garde aux paroles prononcées:
V.M. : Frère Premier Surveillant, quel est le motif qui nous rassemble ?
I Surv. : Frère Second Surveillant, quel est le motif qui nous rassemble ?
2ème Surv. : Celui de chercher à nous connaître nous-mêmes pour faire de nouveaux pro-
grès dans la Franc-Maçonnerie.
ler Surv. : Vénérable Maître, c'est celui de chercher à nous connaître nous-mêmes pour
faire de nouveaux progrès dans la Franc-Maçonnerie.
Voilà bien un énoncé qui peut passer pour banal... N'avons-nous pas l'impression de bien
nous connaître ? De savoir que les autres sont pleins de défauts et nous pleins de qualités,
même si nous nous accordons par grandeur d'âme, quelques (petits) défauts ? Allons, nous
allons, bien sûr. améliorer ces petits défauts et tout ira bien.
Or, il ne s'agit pas de cela. En quoi "améliorer nos petits défauts" nous ferait-il faire de
nouveaux progrès dans la Franc-Maçoimerie ?
Il faut aller au fond des choses. Nous connaître nous-mêmes consiste à répondre à la
question: " Qui suis-je ? ". Question apparemment banale et stupide. Tout le monde sait bien
qui il est... Eh bien non, précisément ! Cessons de nous comporter comme des gamins préten-
tieux et ignorants. Vous me demandez qui je suis ? Mais je suis Jules Tartempion, comme cha-
cun sait - et moi tout le premier - et comme c'est marqué sur ma carte d'identité ! Encore une
fois, il ne s'agit pas de cela ! Jules Tartempion est le nom qu'un père et une mère ont donné à
un bébé qui vient de naître... Mais si lu crois être Jules Tartempion, qui seras-tu dans un siècle?
dans mille ans? Qui étais-tu il y a un siècle? Il y a mille ans ? Il y a un million d'années? Les
Maîtres Zen posent à leurs disciples la question: "Quel était ton nom avant que tes parents fuis-
sent nés ?". Un bon Frère à qui je posais cette question des Maîtres Zen, me répondit étourdi-
ment: " C h e z moi, c'est très simple: Depuis des générations, tous les premiers-nés s'appellent
Pierre; donc mon nom était prévu de longue date, avant que mes parents fussent nés ". Il n'avait
pas pris garde à la question, comme très souvent, nous ne prenons pas garde à ce qui est dit lors
d'un Rituel... Comment ce bon Frère pouvait-il penser être assuré de naître justement dans cette
famille, où tous les premiers-nés...etc...etc... Et il y a mille ans, comment s'appelait-il ?... et
dans mille ans, comment s'appellera-t-il donc?
En fait, mon Frère, tu n'es pas ce que tu crois être. Manifestement, tu crois être ce corps,
agrémenté d'un mental qui fonctionne jour et nuit (sauf pendant le sommeil profond). Pendant
les rêves de la nuit comme pendant la journée, nous pensons (nous croyons - au sens propre
du mot) être une personne qui porte un nom, qui est née à une certaine date, et qui. bien sûr, va
mourir un jour, que l'on espère le plus lointain possible. Et après la mort ? Au Rite Ecossais
Rectifié, tout Frère est sensé être chrétien. Donc croire en la vie éternelle. Nous porterons donc
le même nom, de toute éternité ? Et si la vie est éternelle elle n'a donc ni fin ni commence-
ment (quelque chose qui est éternel ne peut pas avoir de commencement ) Donc, nous portions
déjà notre nom actuel il y a un million d'années et même plus ? On voit combien cela est absur-
de et enfantin. "chercher à nous connaître nous-mêmes" n'est pas une question banale, à
prendre à la légère.
Nous ne sommes pas ce que nous croyons être. Nous ne sommes manifestement pas l e
corps. C a r le corps va disparaître... et qu'est-ce qui va vivre éternellement alors ? Nous ne
sommes pas le mental non plus. Celui-là est affaire de synapses, lesquels disparaîtront égale-
ment à la mort du corps. Qui sommes-nous donc alors ? Nous voyons que la question est d'im-
portance. La Franc-Maçonnerie s'occupe de choses importantes. Pas de puérilités...
Nous allons donc devoir répondre à cette question: " Q u i sommes-nous réellement ?
Notre être éternel, qui est-il ? Le Vénérable Maître pose alors la bonne question:
V.M. : Comment pouvons-nous y parvenir ?
Car il faut en effet parvenir à répondre à cette question fondamentale. Sinon, notre grade
de Compagnon ne sera qu'un titre sans valeur...
Surv. : Frère Second Surveillant. comment pouvons-nous y parvenir ?
La question, ainsi répétée, prend un ton angoissant... Et c'est, encore une fois, le Second
Surveillant, qui va répondre par l'essentiel:
2'1"e Surv. : Avec un vrai désir, du courage et de l'intelligence.
ler Surv. : Vénérable Maître, avec un vrai désir, du courage et de [ intelligence.
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Vous vous souvenez qu'au premier degré, le Vénérable Maître promettait "un vrai
bonheur" au futur Maçon. Nous posions donc la question: Y a-t-il de vrais bonheurs et de faux
bonheurs ? Maintenant, voilà qu'il est question d'un vrai désir. Y aurait-il de faux désirs ?
Nous pouvons nous souvenir du Bouddha qui disait que l'état de Sagesse était obtenu par l'ex-
tinction de tous les désirs. Il s'agit exactement de cela ici: Tous les désirs que nous pouvons
avoir au cours de notre vie : manger une glace au chocolat, acheter un château en Espagne,
changer de voiture, faire l'amour avec la femme de nos rêves, etc... sont soumis aux aléas de
la providence o u à notre humeur changeante. Tout cela n'a pas beaucoup de consistance. Ce
sont justement ces désirs, qui naissent dans le "petit moi", que le Bouddha conseille de faire
disparaître. C'est ce que l'on nomme "l'extinction des désirs". Le vrai désir sera d'une toute
autre dimension : c'est désirer plus que tout - précisément - nous connaître nous-mêmes,
découvrir enfin qui nous sonzmes réellement, dépasser le niveau du " petit moi " et accéder à
un niveau bien supérieur. Il s'agit là d'un vrai travail de longue haleine, pour lequel, en effet,
il faut du courage, et aussi de l'intelligence. Car il faut apprendre quel chemin mène à notre
réalité intime et ultime ; puis il faut suivre ce chemin avec persévérance. Ce n'est pas une mince
affaire. Cela nous rebute-t-il ? Cela nous paraît-il inopportun, troublant la quiétude de notre si
cher "petit moi" ? Alors, abandonnons la Maçonnerie. Abandonnons le Rite Ecossais Rectifié.
Nous sommes faits, dans ce cas, pour naître, vivoter notre "petite" vie, et mourir comme tout
le monde, avoir nos obsèques (petites ou grandioses, suivant le cas) puis tomber dans l'oubli
qui arrivera tôt ou tard, de toutes façons. Allez donc voir au Père Lachaise, les tombeaux de
toutes ces gloires "immortelles", tombées dans l'oubli le plus profond...
Le Rite Ecossais Rectifié propose tout autre chose : un combat pour la Vérité (la "vraie
Vérité" pourrions-nous paraphraser...) qui demande, en effet, un vrai désir, un solide courage,
une intelligence acérée... Mais au fait, quel est le but de tout cela ?...
V.M. : Pourquoi cette connaissance nous est-elle nécessaire ?
De quelle "connaissance" le Vénérable Maître parle-t-il ? Mais bien précisément de la
"connaissance de nous-mêmes" ainsi réputée "nécessaire".
I" Surs,. : Frère Second Surveillant, pourquoi cette connaissance nous est-elle nécessaire ?
Surv. : Pour nous garantir de l'erreur, nous apprendre à remplir nos devoirs et nous
rendre dignes de servir de guides à nos Frères.
Surv. : Vénérable Maître, c'est pour nous garantir de l'erreur, nous apprendre à remplir
nos devoirs et nous rendre dignes de servir de guides à nos Frères.
Voilà une nouvelle question qui surgit: Nous garantir de quelle erreur ?
Si manifestement nous ne sommes pas l e corps, croire que nous le sommes est l'erreur
fondamentale, tragique même. Abandonner cette erreur funeste est donc d'une extrême impor-
tance. Pour ne pas dire : d'une extrême urgence. "Ne pas mourir idiot", suivant la formule bien
connue, s'applique là d'une façon incroyablement juste et pertinente.
Il apparaît ensuite que le Maçon qui est sur le chemin de cette rectification, n'est plus un
de ces hommes qui ne pensent qu'à leurs droits et à leurs revendications, mais est devenu en
effet un homme de devoir, comme les chevaliers de jadis qui ne pensaient qu'à leurs devoirs et
ne parlaient jamais de leurs droits - encore moins de leur "bon plaisir" (!). Alors seulement, ils
sont aptes à servir de guides à leurs Frères... et aux "autres hommes", comme dit le Rituel.
V.M. : Où sont tracées les règles de nos devoirs ?
I" Sun/. : Frère Second Surveillant. où sont tracées les règles de nos devoirs ?
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2'" Surv. : Elles sont empreintes dans nos cœurs, la raison nous en instruit, la Religion
les perfectionne et la Tempérance nous aide à nous y conformer.
Surv. : Vénérable Maître, elles sont empreintes dans nos cœurs, la Raison nous en ins-
truit, la Religion les perfectionne et la Tempérance nous aide à nous y conformer.
Une fois de plus, on met l'accent sur nos cœurs. Soyons précis et rigoureux: Dans un
Rituel maçonnique et dans le Rituel du Rite Ecossais Rectifié en particulier, il n'y a pas de "lan-
gage poétique", il n'y a pas de "figure de style". Il ne s'agit pas là du cœur physique qui pro-
pulse le sang dans nos artères... Mais de quel "cœur" alors ? Il s'agit bien du "cœur" dans lequel
les règles de nos devoirs sont tracées: rien à voir avec un organe, aussi précieux soit-il... Voyons
cela de plus près
Dans l'Ancien Testament (Ecclésiaste, X, 2), il est dit : "Le Sage a le cœur à droite, mais
le fou a le cœur à gauche". Et l'Ecclésiaste poursuit finement (v.3): " E t même, quand l' insen-
sé marche dans le chemin, le sens lui manque.../...) Voilà bien pourquoi il vient de nous être dit
"qu'il y faut de l'intelligence", pour que nous ne nous comportions pas comme l'insensé de
l'Ecclésiaste... Souvenons-nous aussi que le soldat Longuin porta au Christ son coup de lance
à la droite d e la poitrine, dont le sang jaillit aussitôt: Le Christ était donc, comme le dit
l'Ecclésiaste, "un Sage". De nos jours, un Sage hindou, Shri Bhagavan Ramana Maharshi,
expliquait: " L e coeur spirituel à droite de la poitrine n'est pas un des chakras (centres) yogui
il est le centre e t la résidence du Soi (de "l'étincelle divine en nous")" (Arthur OSBORNE
Ramana Maharishi et le sentier de la Connaissance de Soi, Edition Victor Attinger 1957, page
170 et ss.). Ne montrons-nous pas tous, instinctivement, ce point précis avec l'index de notre
main droite quand nous disons : "C'est moi qui..." ? Voilà donc de quel "cœur" le Rituel nous
parle. On comprend, répétons-le, qu'il y faut "de l'intelligence". Vraiment, dans notre Rituel,
chaque mot est lourd de sens ! II y faut aussi, c'est vrai, "du courage" pour entreprendre cette
démarche fondamentale. Si nous ne l'entreprenons pas, courageusement et intelligemment, la
Franc-Maçonnerie sera pour nous aussi peu importante qu'un aimable "club- de gentlemen
anglais...
Car l'enjeu est bien de devenir -des Maîtres", non point par un tablier maçonnique, qui
n'est qu'un emblème extérieur, n'ayant pas de sens, s'il n'est pas la marque d'une réalisation
intérieure, courageusement et intelligemment acquise dans notre coeur_
Cette réalisation consistera donc bien évidemment à "séjourner" dans le cœur spirituel
pour y trouver le silence, la paix, et l'obscurité féconde (que Saint Jean de la Croix appelait -la
nuit obscure").
Alors, comme la graine enfouie dans l'obscurité et le silence, dans le sein de notre bonne
Mère la Terre, la Conscience, enfouie dans le Cœur, germera et permettra de faire naître "Christ
en soi", comme disait Saint Paul. La hiérarchie des sons comprend trois niveaux: le bruit, la
musique, le silence. La musique (la vraie, l'harmonie des sons) est donc l'étape qui introduit
au silence fécond qui permet au vrai cherchant de découvrir, en lui, niais pas par une activité
mentale (le "vacarme de cervelle" comme disait Montaigne...) la source profonde et divine du
Soi. Alors la sérénité permet à la Lumière (que recherchent les Maçons) de s'épanouir. Voici ce
qu'en disait le grand poète allemand Rainer Maria RILKE :
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LA SOURCE D U CŒUR

Ii est tout entier en soi

Cehti qui réside dans l'immobilité


féconde du coeur.

Il est tout entier au monde

Cehti qui vit dans la caverne secrète


du coeur.

Il est tout entier à l'Univers

Celui qui, du jardin de son silence,


Livre son coeur.
c's1
ll est tout entier au Divin

Celui qui plonge ses racines dans la source,


La source cristalline de son coeur.
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Rainer Maria RILKE

On comprend alors ce que signifie le mot "Maître", que le Vénérable Maître va pro-
noncer et que le Rituel écrit avec une majuscule
V.M. : Mes Frères, que les leçons et les exemples des Maîtres nous enseignent donc à
pratiquer cette vertu. Unissez-vous à moi pour ouvrir cette Loge de Compagnons.
l'r Surv. : Mes Frères, unissons-nous au Vénérable Maître pour ouvrir la Loge de
Compagnons.
2'1"c Surv. : Mes Frères, unissons-nous au Vénérable Maître pour ouvrir la Loge de
Compagnons.
: Unissez-vous à moi, mes Frères !

Le Vénérable Maître, ainsi que tous les Frères font, deux fois successivement, le signe de
Compagnon et restent ensuite au signe d'ordre, qui est la main droite posée en équerre sur le
cceun...

Précisons qu'au Rite Ecossais Rectifié, la main est placée, le pouce en équerre et les
quatre doigts accolés, posée sur le cœur. le pouce étant vertical au milieu de la poitrine. I l ne
s'agit donc pas de la main, carrément placée à gauche, doigts en crochets, dans la position
"d'arracher le cœur-organe" qui se fait à un autre Rite : le symbolisme en est tout différent. Ne
mélangeons pas le symbolisme des différents Rites maçonniques !
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après quoi. le Vénérable Maître dit

V.M. : A la gloire du Grand Architecte de l'Univers


Au nom de l'Ordre,
Et par le pouvoir que j'en ai reçu,
J'ouvre cette Loge de Compagnons.

Il bat aussitôt, avec son maillet, les six coups d'ouverture 0 0 0 0 0 0 , lesquels sont
répétés par les deux Surveillants. Puis
V.M. : Frères Surveillants, annoncez à tous les Frères que la Loge de Compagnons est
ouverte et dites-leur d'être attentifs au travail.

1" Surv. : Mes Frères, la Loge de Compagnons est ouverte ; soyez attentifs au travail.
2'nle.Surv. : Mes Frères, la Loge de Compagnons est ouverte; soyez attentifs au travail.
V.M. : Ayez attention, mes Frères.
Le Vénérable Maître et tous les Frères avec lui, répètent pour la troisième et dernière fois
le signe entier de Compagnon
Le Vénérable Maître pose son épée nue en travers sur la Bible ouverte au premier cha-
pitre de l'Evangile de saint Jean et tous les Frères, en même temps, remettent la leur au four-
reau.

Le Vénérable Maître, en s'asseyant, invite tous les Frères à s'asseoir et à observer le plus
profond silence.
V.M. : Prenez place, mes Frères, et observez le plus profond silence.
Ce silence "le plus profond" n'est-il pas en résonance avec ce que nous venons d'expo-
ser plus haut ?... Ce silence que nous n'entendons jamais avec nos oreilles, mais que nous ne
découvrons qu'au "plus profond de notre coeur" (comme dit le Vénérablke Maître), après avoir
réussi à faire taire enfin le "vacarme de cervelle" incessant... Dur, très dur labeur en effet. Mais
tant d'hommes et de femmes ont réussi ce travail, harassant au début, mais si merveilleux par
la suite... qu'on ne peut plus vivre autrement que dans ce Silence intérieur, au milieu des
activités du "petit moi", plongé dans la "vie courante"...
Ainsi se termine l'Ouverture des Travaux au grade de Compagnon.
Ainsi que nous l'avons fait pour le premier grade, étudions maintenant le Rituel de
Fermeture des Travaux, avant de passer à la Réception d'un Apprenti au deuxième grade.
CLÔTURE D E L A L O G E
AU GRADE D E COMPAGNON

Le Vénérable Maître frappe un coup sur l'Autel, - 0 - , qui est répété par les deux
Surveillants et dit
V.M. : A l'ordre, mes Frères !
Il se tient debout, son épée pointe haute appuyée sur l'Autel. Tous les Frères se lèvent en
même temps et tirent leur épée qu'ils tiennent dans la main gauche la pointe contre terre, en se
mettant au signe de Compagnon.
Le Vénérable Maître dit

V.M. : Frères Surveillants, puisque le travail des Compagnons est fini, avertissez les
Frères que je vais fermer la Loge de Compagnons.
1" Surv. : Frère Second Surveillant, puisque le travail des Compagnons est fini, avertis-
sez les Frères que le Vénérable Maître va fermer la Loge de Compagnons.
2ème Surv. : Mes Frères, puisque le travail des Compagnons est fini, je vous annonce que
le Vénérable Maître va fermer la Loge de Compagnons.
V.M. : Mes Frères, aidez-moi tous à fermer la Loge de Compagnons.
1" Surv. : Mes Frères, aidons tous le Vénérable Maître à fermer la Loge de Compagnons.
2'me Surv. : Mes Frères, aidons tous le Vénérable Maître à fermer la Loge de Compagnons.
Ainsi, comme au premier degré, ce n'est pas le Vénérable Maître tout seul qui ouvre et
ferme les travaux, mais l'ensemble des Frères, unis au Vénérable Maître, qui n'assistent pas,
mais qui participent aux travaux. Le Vénérable Maître va d'ailleurs le préciser clairement:
V.M. : Unissez-vous à moi, mes Frères.
Aussitôt, ils donnent tous ensemble, deux fois de suite, le signe de Compagnon, et se
remettent sur le champ au premier temps du signe, excepté le Vénérable Maître qui prend le
maillet avec la main droite et dit:

: A la gloire du Grand Architecte de l'Univers


Au nom de l'Ordre,
Et par le pouvoir que j'en ai reçu,
Je ferme cette Loge de Compagnons.
18

Il bat aussitôt, avec son maillet, les six coups de clôture, 0 0 0 0 0 0 , lesquels sont
répétés par les deux Surveillants.
V.M. : Frères Surveillants, annoncez à tous les Frères que la Loge de Compagnons est
fermée.

l r Surv : Mes Frères, la Loge de Compagnons est fermée.


2ème Surv. : Mes Frères, la Loge de Compagnons est fermée.
V.M. : Ayez attention mes Frères.
Troisième et dernier signe d'ordre, puis
Le Vénérable Maître va aussitôt éteindre lui-même l'Etoile Flamboyante, après quoi, il
revient à sa place
Le Rituel d'Ouverture et celui de Fermeture semblent dépouillés en comparaison de ceux
du premier degré. Il n'y a rien de trop, rien de superflu au R.E.R. Ce qui donne d'autant plus
d'importance au Rituel de la Cérémonie de Réception au deuxième grade, que nous allons étu-
dier maintenant.
PROCLAMATION
POUR L A RÉCEPTION D ' U N COMPAGNON

V.M. : Mes Frères, l'Apprenti N.... désire faire de nouveaux progrès dans la Franc-
Maçonnerie et être reçu dans la classe des Frères Compagnons de l'Ordre. Il a fini son temps
(ou son mérite personnel lui fait obtenir dispense d'une partie du temps prescrit). La Loge a
consenti à son avancement par un scrutin régulier ainsi que la lecture du protocole va vous le
confirmer. Voici le moment de donner votre consentement définitif à sa réception. Frère
Secrétaire, lisez l e protocole du scrutin et d'admission du Frère N... pour le grade de
Compagnon.
Après la lecture du protocole, le Vénérable Maître dit
V.M. : Frère Préparateur, faites-nous connaître les dispositions actuelles du Frère
Apprenti.
Le Frère Préparateur fait son rapport e t , si l e Candidat a mis par écrit quelques
réflexions, le Frère Préparateur les remet au Vénérable Maître ainsi qu'il a été dit au Rituel
d'Apprenti, et il termine son rapport par ces paroles:
Le F. Prép. : J e vous conjure, Vénérable Maître, d'accorder à l'Apprenti un conseil
courageux et impartial, qui lui apprenne à se connaître lui-même, pour se garantir de la pré-
somption et de l'orgueil.
: Mon Frère, celui qui cherche à se connaître lui-même avec la volonté ferme et sin-
cère de se perfectionner, trouvera toujours les moyens nécessaires pour arriver à son but
Nous ne pouvons pas ne pas relever l'insistance avec laquelle le Rituel insiste de façon
répétée sur la nécessité de se connaître soi-même avec une volonté ferme I l s'agit là d'un tra-
vail pour lequel il faut du courage c e l a a été répété maintes fois depuis que le profane a été
reçu Apprenti. Maintenant, on le répète encore et encore. Ce n'est pas une formule de style, soit
dit à nouveau. C'est bien le fondement-même du travail initiatique: "Tu n'es pas ce que tu crois
être ", disent les Maîtres à leurs disciples... "Tu n'es pas le corps, agrémenté d'un mental qui
folâtre à longueur de journées et de nuits. Cherche qui tu es en réalité, dans ton essence-même,
immortelle et impérissable de toute éternité !". On comprendra aisément que ceci n'est pas une
mince affaire et que les efforts à faire et les connaissances à acquérir ne peuvent pas être
d'ordre intellectuel : Il ne s'agit pas d'ajouter un diplôme universitaire à d'autres diplômes déjà
éventuellement accumulés. L'intelligence discursive n'est là d'aucun secours. Les aptitudes
exigées sont d'un tout autre ordre. La recherche intérieure dans la grotte du cœur ne demande
aucune réflexion d'ordre mental. Bien au contraire, il s'agit de faire taire le mental "dans le
20

plus profond silence" afin, précisément, de découvrir notre vérité profonde. Et quand la volonté
d'y parvenir est ferme et sincère, alors en effet, tout naturellement les moyens nécessaires pour
arriver au but se découvrent de la façon la plus naturelle...
J'accorderai cependant un guide à ce Frère, si la Loge le trouve digne de participer
à nos travaux.../...

C'est bien la particularité d'une société initiatique de guider ses membres dans leur
recherche personnelle...
Mes chers Frères, persistez-vous dans le consentement que vous avez donné à
l'admission de ce Frère au grade de Compagnon ?
Le signe de consentement se fait en étendant le bras en avant, la main en équerre, la
paume de la main tournée contre terre.
Le consentement donné, le Vénérable Maître ajoute:
V.M. : Puisque personne ne s'y oppose, l'Apprenti sera élevé au grade de Compagnon.
Frère N... Introducteur, que j'ai nommé pour diriger et introduire le Candidat, allez finir sa pré-
paration suivant les lois et usages de l'Ordre ; le Frère N... son parrain, vous assistera dans ce
travail et vous le présenterez ensuite à la Loge.
Aussitôt, le Frère Introducteur et le Parrain viennent se placer entre les deux Surveillants
et, après s'être inclinés devant l'Autel d'Orient, ayant la main au signe de Compagnon, ils sor-
tent pour remplir leurs fonctions.
LE CANDIDAT À L A PORTE D E L A L O G E

Le Frère Introducteur ayant annoncé le Candidat à la porte de la Loge par la batterie


d'Apprenti, le Second Surveillant dit au Premier Surveillant:
2111" Surv. : Frère Premier Surveillant, on frappe à la porte de la Loge en Apprenti.
Surv. : Vénérable Maître, on frappe à la porte de la Loge en Apprenti.
V.M. : Frère Premier Surveillant, dites au Frère Second Surveillant de voir qui frappe ainsi.
I" Surv. : Frère Second Surveillant, veuillez voir qui frappe ainsi.
Le Second Surveillant, ayant reçu l'ordre du Premier Surveillant, va frapper à son tour
les trois coups d'Apprenti et de suite il ouvre la porte en disant:
2é"1c Surv. : Q u i frappe ainsi ?
Introd. : C ' e s t un Apprenti qui demande à être reçu Compagnon.
Le Second Surveillant laisse entrer le Frère Parrain, referme la porte et dit:
Surv. : Frère Premier Surveillant, c'est un Apprenti q u i demande à être reçu
Compagnon.
Surv. : Vénérable Maître, c'est un Apprenti qui demande à être reçu Compagnon.
V.M. : Frère Premier Surveillant, quel est son nom de baptême, son nom de famille, son
état-civil son âge, le lieu de son domicile et sa religion ?
Suit alors le jeu habituel des questions-réponses entre le Vénérable Maître et les deux
Surveillants. Ensuite, le Vénérable Maître demande:
V.M. : Frère Second Surveillant, quel est son nom et son âge d•Ordre ? Où a-t-il travaillé
et sur quelle partie a-t-il fait son travail ?
Suivent encore les habituelles questions-réponses.
Introd. : Son nom est N._ il a trois ans. il a travaillé dans le Porche du Temple à dégros-
sir la pierre brute.
Le temps d'Apprentissage se passe en effet à dégrossir la pierre brute. L a pierre brute
est le symbole de l'Apprenti lui-même. Nous avons vu de quel travail sur lui-même i l est ques-
tion. Il n'est pas encore apte à entrer puis à séjourner dans le Temple symbolique qu'il est lui-
même comme le Christ en personne l'a bien laissé entendre. Et ce Temple est précisément la
grotte du coeur où il est si difficile d'entrer et encore plus difficile de séjourner, dans le silence
et l'obscurité féconde, comme nous l'avons vu._ En tant que Compagnon, il va devoir réussir
ce travail difficile.
22

V.M. : Frère Premier Surveillant, a-t-il fini son temps, ses maîtres sont-ils satisfaits de lui
et qui est-ce qui répond de lui dans la Loge ?
Nouveau jeu de questions-réponses habituel. Le Frère Parrain ayant répondu favorable-
ment, le Vénérable Maître demande pour la dernière fois le consentement des Frères de la
Loge. Celui-ci étant donné, la réception peut alors commencer :
V.M. : Mes Frères, formez la Loge !
Aussitôt, tous les Frères viennent se ranger autour du Tapis, dans l'ordre suivant: les
Compagnons vont se placer à l'Occident, entre le Tapis et les tables des Surveillants; ensuite
les Maîtres quittent leurs places et vont se ranger sur les deux colonnes en prenant soin de lais-
ser une place vide vers le haut et le bas du Tapis afin que le Vénérable Maître et le Candidat
puissent se voir respectivement lorsque celui-ci est arrêté à la fin de chaque tour, à l'Occident.
Les Dignitaires, Vénérables et autres, qui siègent à l'Orient, se placent aussi à l'Orient entre
l'Autel et le Tapis, en face des Compagnons. Pendant que les Frères se placent ainsi, le
Vénérable Maître donne ordre au Maître des Cérémonies de faire descendre le cadre ou voile
qui doit cacher au Candidat l'Etoile Flamboyante.
Tout étant disposé, le Vénérable Maître frappe un coup d'ordre qui est répété par les deux
Surveillants, et dit:
: Frère Premier Surveillant, puisque le Frère N... Apprenti persévère dans le désir
de faire de nouveaux progrès dans l'Ordre, qu'il soit introduit.
Surv. : Frère Second Surveillant, puisque le Frère N... Apprenti, persévère dans le désir
de faire de nouveaux progrès dans l'Ordre, qu'il soit introduit.
Le Second Surveillant va frapper à la porte par la batterie d'Apprenti, qui lui est répétée
par le Frère Introducteur; aussitôt, le Frère Second Surveillant ouvre la porte et dit:
2'"e Surv. : Mes Frères, le Vénérable Maître permet que vous introduisiez dans la Loge
de Compagnons le Frère Apprenti qui persévère dans son désir.
Le Frère Apprenti va donc être introduit dans la Loge de Compagnons et sa réception va
pouvoir se dérouler, avec tout ce qu'elle comporte d'instructions, d'enseignements et de conseils.
LE CANDIDAT EST INTRODUIT
DANS L A L O G E

Le Frère Introducteur, tenant le Candidat par la main, entre avec lui, à pas libres et va se
placer avec lui à l'Occident entre les Surveillants ; il lui fait faire le signe d'Apprenti et saluer
l'Orient ; ensuite il lui dit
Introd. : Mon Frère, pour répondre à votre désir et à votre confiance, je vous ai conduit
dans un lieu dont vous n'auriez pu vous approcher sans guide ; mais il vous faut, ici, de nou-
veaux secours pour les travaux que vous allez entreprendre, et je supplie le Vénérable Maître
de vous les accorder.

Aussitôt, les deux Surveillants s'approchent du candidat et restent à ses côtés et le Frère
Introducteur se place derrière lui et l'accompagne jusqu'à l'époque où, la réception étant finie,
le Candidat aura travaillé sur la pierre cubique.
Ainsi le Frère Introducteur ne quittera jamais le Candidat jusqu'à ce que celui-ci ait tra-
vaillé sur la pierre cubique. M a i s c'est le Frère Second Surveillant qui va conduire son
Apprenti tout au long des épreuves de la réception au grade de Compagnon. Ainsi l'impétrant
n'est jamais seul. Pendant tout le temps de cette réception, le Frère Introducteur jouera ainsi le
rôle de l'Ange Gardien qui accompagne en permanence et en silence, celui (ou celle bien sûr)
qui fait de son mieux à travers les épreuves de la vie, pour que cette vie lui permette de gravir
un échelon supérieur dans l'échelle de la Sagesse, car c'est bien pour cela et pour cela seule-
ment, que nous nous "incarnons" sur cette terre (ou ailleurs peut-être aussi, mais cela... c'est
un autre problème...). Rappelons que nous avons ici le même schéma qu'au premier degré, où
le Frère Introducteur dit à l'impétrant: "Monsieur, je vous ai guidé jusqu'ici pour seconder vos
désirs ; je vous laisse en ce moment, car ma tâche est finie, mais vous êtes entre les mains de
conducteurs sûrs et fidèles, donnez-leur toute votre confiance". Et nous ajoutions les commen-
taires suivants: "pourtant la tâche du Frère Introducteur est loin d'être terminée et le Candidat
entendra encore sa voix, lors de la présentation des éléments; et le Frère Introducteur le pren-
dra encore en charge pour le faire sortir du Temple et le faire se rhabiller. Il l'accompagnera
encore pendant toute la cérémonie, jusqu'au moment où le profane, devenu le nouvel Apprenti,
aura fait son premier travail en frappant les trois coups sur la pierre brute.../..." (La Pratique
Journalière du Rite Ecossais Rectifié, Le Grade d'Apprenti). Nous voyons par cette comparai-
son entre les deux cérémonies, que le Frère Introducteur est bien "l'Ange Gardien" de l'impé-
trant. Ainsi durant toute notre vie, avons-nous le secours permanent autant que discret de notre
"Ange Gardien", selon la terminologie chrétienne. Nous comprendrons plus tard qui est réelle-
ment cet "Ange Gardien" si sympathique qui nous soutient avec tant de sollicitude... A une per-
sonne qui se plaignait de devoir quitter un Sage à cause de ses obligations professionnelles, le
24

Sage répondit: "Vous n'êtes jamais seule". De même, dès le début des Entretiens dans les
"Dialogues avec l'Ange", l'Ange dit à Gitta: "Tu n'es jamais seule !" (Entretien NI' 2). C'est
bien en recherchant avec persévérance qui nous sommes que nous comprenons finalement tout
ceci... Courage, intelligence et persévérance sont nécessaires en cette recherche. Il faut aussi
abandonner nos si belles certitudes (mais non pas notre discernement) afin de poursuivre cette
recherche avec un esprit ouvert...
Après un moment de silence (pendant lequel non seulement l'impétrant, mais tous les
Frères présents peuvent s'efforcer de comprendre ce qui se passe et va se passer réellement
pendant cette cérémonie...), le Vénérable Maître adresse au Frère Introducteur les questions
suivantes (en réalité deux questions sont adressées au Frère Introducteur et la troisième à
l'Apprenti directement):
V.M. : Frère Introducteur, que demandez-vous pour le Frère Apprenti ?
Imm. Je prie cette Respectable Loge d'admettre le Candidat parmi les Compagnons de
I ' Ordre.

V.M. : Quel est le vrai motif de cette demande ?


Intro. Le désir qu'a le Candidat d'augmenter ses connaissances et d'acquérir de plus
grandes forces pour remplir tous ses devoirs.
V.M. : Frère Apprenti, êtes-vous donc persuadé que vous pouvez devenir plus fort et
meilleur parmi nous ?
Candidat J e le crois.

Encore une fois, le Vénérable Maître emploie l'adjectif "vrai": "Quel est le vrai motif de
cette demande ?". Y aurait-il de faux motifs ? L a réponse du Frère Introducteur est en fait
assez évasive. Car si l'Apprenti n'a pas rempli tous ses devoirs, pourquoi l'accepte-t-on dans
la Loge de Compagnons ? Et que sont ces "plus grandes forces" nécessaires pour accomplir ces
devoirs tellement difficiles ? Le Vénérable Maître va donner à l'Apprenti quelques éclaircisse-
ments à ce sujet :
V.M. : Frère Apprenti, lorsque vous avez été présenté pour la première fois à la Loge,
vous avez été annoncé comme un Cherchant ; votre constance dans le travail e t votre bonne
conduite vous font reconnaître aujourd'hui pour un vrai Persévérant dans notre Ordre respec-
table. C'est à ce titre que les portes de la Loge des Compagnons viennent de vous être ouvertes.
Le désir que vous avez témoigné d'acquérir de nouvelles connaissances pour augmenter vos
forces, a déterminé la Loge à consentir à votre avancement. Devenez donc de plus en plus digne
de la faveur qu'elle vous accorde. C'est le seul moyen de répondre à la confiance de vos
Frères....

Quand le Vénérable Maître parle de forces q u ' i l s'agit d'augmenter, ce ne sont naturel-
lement pas des forces physiques. Il est donc nécessaire d'acquérir des forces morales. Quant
aux connaissances e n question, il ne s'agit pas non plus de connaissances intellectuelles: Il
suffirait dans ce cas de lui donner un document à étudier, comme à l'école... I l va donc falloir
bien comprendre le discours du Vénérable Maître, qui s'exprime à demi-mots, pour ne pas
effrayer le candidat...
Dans votre réception au grade d'Apprenti, vous avez fait plusieurs voyages embléma-
tiques, mais étant alors privé de la Lumière, votre propre intérêt suffisait pour vous engager à
suivre fidèlement vos guides: aussi n'exigea-t-on de vous qu'une confiance sincère. E n ce
moment, vous allez faire de nouveaux voyages mais vous ne serez pas dans les ténèbres comme
25

vous l'étiez alors, et vous devrez faire preuve devant nous non seulement d'une confiance entiè-
re dans vos guides, mais d'une docilité sans réserve. Ces voyages sont très difficiles et quoique
la voie vous en soit ouverte, vous vous égareriez infailliblement si vous vous conduisiez par
vous-même...

Comme ces voyages ne sont d'aucune difficulté sur le plan physique - ni sur le plan intel-
lectuel - il faut bien que la difficulté que l'on annonce très grande, soit située sur un autre plan.
Sinon, l'Apprenti ne comprendra pas ce discours du Vénérable Maître...
....Sachez donc devenir humble et renoncez à votre propre sensibilité, quelque éclairé que
vous croyiez être et laissez-vous guider par ceux qui sont plus instruits que vous, si vous vou-
lez arriver heureusement au terme. C'est ainsi, mon Frère, que vous mériterez de connaître le
véritable but de ces emblèmes.

Voilà déjà, sous une apparence anodine, des directives d'une importance capitale: Tout
d'abord, le Vénérable Maître conseille à l'in-ipétrant de devenir humble. Si ce conseil n'est pas
suivi - comme il appert que ce soit le cas parfois - l'impétrant ne prend pas garde à ce discours
du Vénérable Maître et croit qu'il est simplement en train d'acquérir un "grade" honorifique, à
la mode profane... et ce sera une catastrophe pour son avenir maçonnique. L'humilité est en
effet la première et la plus importante des vertus. Sans l'humilité (la vraie, pas l'humilité de
façade), aucune autre vertu ne peut être acquise ; mais surtout, aucune compréhension ne pour-
ra être atteinte, de l'enseignement profond qui est ici prodigué !
Ce n'est qu'ainsi que le véritable but d u cursus maçonnique (donc initiatique) pourra
être connu. Remarquons encore une fois l'emploi des adjectifs vrai, véritable : En Maçonnerie,
plus encore qu'ailleurs, il faut chercher le sens profond de l'enseiunement. Si l'on en reste à la
forme extérieure, on ne parviendra pas à grand-chose et toute cette peine (des Frères de toute
la Loge ainsi que du Vénérable Maître, de même que celle de l'impétrant lui-même) sera per-
due et le Frère en question pourra peut-être parcourir les différents grades sans jamais saisir le
fond de l'enseignement...
VOYAGES D U CANDIDAT

Le Vénérable Maître frappe un coup qui est répété par les deux Surveillants et dit:
V.M. : Frère Second Surveillant, l'Apprenti persévère dans son désir parce qu'il ignore
encore les obstacles qu'il faut vaincre et les sacrifices qu'il doit faire
Encore une fois, ce langage n'est pas une formule de style. Saint Paul disait : "Vous devez
tous devenir des saints !". En langage maçonnique, il aurait sans doute dit : "Vous devez tous
atteindre l'état de Sagesse !". Le mot "Sagesse" ayant été prononcé par le vénérable Maître,
lors de la réception au grade d'Apprenti (" ...la Sagesse est la seule parure qui distingue vrai-
ment les hommes..." dit le Vénérable Maître avant de faire reprendre ses vêtements au Candidat
- cf. "La Pratique journalière du Rite Ecossais Rectifié", Grade d'Apprenti) on comprendra que
le véritable but dont il a été question, n'est évidemment pas une mince affaire... Il a aussi été
dit au futur Apprenti par le Vénérable Maître : "Les Lois de la Justice sont éternelles et
immuables. Celui qui. étant effrayé des sacrifices qu'elle exige, refuse de s'y soumettre est un
lâche qui se déshonore et se perd...". La "Justice" en question est ce qui est "juste", donc par-
fait. La justice rendue par le Roi Salomon était "juste" parce qu'il était lui-même fermement
établi dans l'état de Sagesse.
Qu'il lui soit donc permis d'entreprendre les cinq voyages emblématiques afin qu'il
s'éprouve lui-même, et guidez-le dans ce travail.
Les voyages (et leur contenu) sont donc bien "emblématiques". Cela signifie qu'ils
cachent un enseignement qui doit être décrypté, faute de quoi ils ne servent à rien...
Le Frère Second Surveillant prend, avec la main gauche. la main droite du candidat et lui
fait tenir, avec la main gauche, la pointe d'une épée nue sur le coeur.
Encore et toujours, le coeur est visé par ce geste. Il est et sera au centre de l'action que le
Candidat devra faire sur lui-même.
Dans cet état, il lui fait faire le tour de la Loge, passant derrière les Frères qui sont autour
du Tapis, ainsi que derrière le trône du Vénérable Maître et derrière les Surveillants, allant de
l'Occident à l'Orient par le Midi et revenant de l'Orient à l'Occident par le Nord, ce qui se fait
pour les trois voyages.
Le fait que certains voyages se font p a r le Nord (deux au grade d'Apprenti) et d'autres
par le Midi (un au grade d'Apprenti et trois au grade de Compagnons) sera expliqué au grade
de Maître.

Le Frère Introducteur les accompagne, ne devant jamais quitter l'Apprenti pendant toute
la Réception.
28

En effet, comment un "Ange Gardien" pourrait-il abandonner son protégé ne serait-ce


qu'un instant, pendant les tribulations de la vie ?...
Au premier tour, le Second Surveillant fait arrêter l'Apprenti au Nord ; le Frère chargé
des métaux présente à ce dernier la plaque ou monnaie d'argent sur la tablette de bois noir et
la lui fait prendre dans la main droite. Alors le Frère Introducteur lui dit:
Introd. : Quel est ce métal ?
L'Appr. : L'Argent
Introd. : L'Argent a divisé les hommes et séparé les Frères, jetez-le à vos pieds.
(Simple petite remarque, en passant: Le Second Surveillant évitera la malencontreuse
liaison tant de fois entendue: " Jetez-le-z-à vos pieds" ...)
Et aussitôt, il lui fait jeter l'Argent à ses pieds. Alors, le Second Surveillant continue le
voyage et, étant arrivé à l'Occident, il lui fait saluer l'Orient. Le Vénérable Maître frappe seul
un coup - 0 - sur l'Autel et dit la première maxime:
V.M. : Frère Apprenti, l'amour de l'Argent, lorsqu' il s'empare de l'homme, dessèche son
coeur et fait tarir en lui la source des plus nobles aspirations. La satisfaction de nos besoins et
de nos appétits matériels, serait-elle l'unique but de notre travail ici-bas ?
L'insensé voyage toute sa vie sans savoir ni où il va, ni d'où il vient, ni ce qu'il doit faire.
Mais le Sage se rend compte de tous ses pas, parce qu'il en connaît l'importance et le but.
Le Vénérable Maître pose la question: "La satisfaction de nos besoins et de nos appétits
matériels serait-elle l'unique but de notre travail ici-bas ?". C'est une question fondamentale.
Que faisons-nous sur terre ? A quoi sert notre vie ici-bas ? Si nous considérons la Nature, le
Cosmos tout entier, nous constatons que l'Univers est un immense utérus qui a pour seul but
de reproduire en permanence et à l'infini un nombre impressionnant d'espèces vivantes (plu-
sieurs dizaines de millions simplement sur notre petite planète). Et pour faire fonctionner cette
gigantesque machine à reproduire sans cesse des milliards d'êtres vivants de toutes espèces,
l'Univers est aussi un gigantesque estomac où tout le monde mange tout le monde: l e gros
mange le moyen, le moyen mange le petit et, à la fin, tous sont mangés par l'infiniment petit.
La Nature a tendu un piège: elle a rendu ces deux occupations agréables et donc, toutes les
espèces sont poussées en permanence (ou à certaines périodes, ce qui ne change pas le problè-
me) à manger et à copuler. Quand on prend conscience de cet état de choses, on peut com-
prendre que certains (comme par exemple les Cathares) ont conseillé de stopper ce cycle infer-
nal. Le Cherchant sur le chemin de la Sagesse pourra se poser la question: "Est-ce que je veux
participer à ce système sans fin, ou est-ce que je souhaite dépasser cette fatalité ?".
Plus importante encore est la phrase suivante du Vénérable Maître: "L'insensé voyage
toute sa vie sans savoir ni où il va, ni d'où il vient, ni ce qu'il doit faire". L'insensé est l'hom-
me défini par la Bible, nous l'avons vu: Le fou (l'insensé) a le coeur à gauche, le Sage a le coeur
à droite. Celui pour qui le centre de son univers est le coeur matériel est "l'insensé"; le Sage,
lui, sait que son centre est le coeur spirituel, à droite. Le Sage a répondu à la question: "Qui
suis-je réellement ?". Dès lors, il sait ce qu'il est venu faire sur cette terre; il sait d'où il vient
et où il va. Et donc ce qu'il doit faire... C'est ainsi que le Sage "se rend compte de tous ses
pas, parce qu'il en connaît l'importance et le but. L a Maçonnerie a pour mission de faire
connaître à ses adeptes quel est ce but. Et le Vénérable Maître s'applique à transmettre cet
enseignement progressivement, avec prudence. Il est donc de la plus haute importance que nous
l'écoutions quand il donne ses maximes, ses conseils, ses encouragements.
29

Après un moment de silence, le Vénérable Maître dit:


V.M. : Frère Second Surveillant, faites-lui faire le second voyage.
Le Frère chargé des métaux a eu soin de prendre son second poste au Midi et le Frère
Surveillant, ayant arrêté le Candidat devant lui, ce Frère lui présente et lui fait prendre le Cuivre
ou l'Airain, ainsi qu'il a été fait pour l'Argent et aussitôt le Frère Introducteur lui dit:
Introd. : Quel est ce métal ?
L'Appr. : Le Cuivre.
Introd. : Mon Frère, ce métal est l'emblème de l'orgueil, de l'ambition, dont les entraî-
nements dégradent les plus grandes vertus : jetez-le à vos pieds.
Il lui fait jeter le cuivre à ses pieds. Alors le Second Surveillant continue le voyage jus-
qu'à l'Occident et lui fait saluer l'Orient. Le Vénérable Maître frappe un seul coup -0- sur
l'Autel et dit la deuxième maxime

V.M. : L'homme est naturellement bon, juste et compatissant.


Pourquoi est-il si souvent en contradiction avec lui-même ?
Cherchez-en sérieusement la cause, Frère Apprenti, elle est bien importante à découvrir.
Voici donc la deuxième maxime donnée à l'Apprenti, suite à la présentation du deuxiè-
me métal. On se souvient qu'à sa réception au grade d'Apprenti, le profane avait dû com-
prendre que le Maçon "laissait ses métaux à la porte du Temple". Maintenant, sous l'allégorie
de trois de ces métaux (le troisième sera le Fer) le Vénérable Maître fait plonger l'Apprenti plus
profondément encore dans cet enseignement. Au Nord, au point le plus défavorable, où la
Lumière (le soleil) ne séjourne jamais, on lui a présenté l'Argent, métal précieux, (avec son
"compère" l'Or), mais aussi symbole de la cupidité qui englue l'individu dans la matière (dans
la matérialité) dont il aura toutes les peines à se dégager. A travers le symbole du Cuivre, pré-
senté au Midi, séjour du plein soleil aux rayons d'or, c'est le défaut le plus important que
découvre l'impétrant: l'orgueil, l'ambition... qui risque de lui faire prendre les grades maçon-
niques comme des marques de supériorité (comme par exemple les grades militaires...). Il y a
là un écueil énorme que certains maçons ont bien du mal à contourner... On voit bien que les
Maçons, même les plus chevronnés, ont intérêt à revivre leur propre avancement quand ils par-
ticipent à la réception d'un nouvel impétrant...
Remarquons que le Vénérable Maître, lors de la présentation emblématique du premier
métal, avait fondé sa première maxime en partant de ce même métal. Cette fois, le Vénérable
Maître ne reprend pas l'emblème du deuxième métal, mais glisse sur une présentation : il ne
parle pas de l'orgueil, important défaut, mais assure que, naturellement, [homme est bon, juste
et compatissant. Il est évident que l'orgueil induit un comportement qui ne génère pas la bonté,
la justice ni la compassion. Il faut donc bien un changement radical de façon d'être. C'est la
"conversio momm" de Saint Benoît, dont nous avions parlé au premier grade...
D'autre part, le Vénérable Maître ne développe pas son argumentation. I l demande à
l'impétrant de chercher lui-même et en lui-même par conséquent, la cause de ce défaut. Nous
ne faisons que répéter que le Maçon doit en effet non point accumuler des connaissances sup-
plémentaires : mais au contraire épurer sans cesse sa propre pierre brute, ce qui est bien sûr plus
30

Reste le troisième voyage


Après un moment de silence, il dit:
V.M. : Frère Second Surveillant, faites-lui faire le troisième voyage.
Le Frère chargé des métaux a pris son poste à l'Occident, derrière le Candidat et sans être
vu. Le Frère Second Surveillant commence le troisième voyage et, étant arrivé à l'Occident, en
présence du dit Frère, celui-ci présente au Candidat le Fer, comme il a été fait des autres métaux
et, le Candidat l'ayant dans la main droite, le Frère Introducteur lui dit
Introd. : Quel est ce métal ?
L'Appr. : Le Fer.
Introd. : Frère Apprenti, le plus utile des métaux est détruit par la rouille ; jetez-le à vos pieds.
Le Frère Apprenti jette le Fer à ses pieds. Alors, le Frère Second Surveillant, ayant placé
le Candidat en face du Vénérable Maître, lui fait saluer l'Orient.
Le Vénérable Maître frappe seul un coup -0- sur l'Autel et dit la troisième maxime
V.M. : L'égoïsme est comme la rouille, il détruit tout ce qu'il y a de plus beau et de plus
pur dans le cœur de [homme.
Nous voici donc arrivés à la troisième maxime, présentée alors que le Candidat se trou-
ve à l'Occident, où se tiennent les Surveillants, adjoints du Vénérable Maître. On présente le
Fer, "le plus utile des métaux". En effet, les hommes primitifs n'ont que très tardivement connu
le fer, métal dur permettant la fabrication d'objets et d'outils solides, ainsi que, hélas, d'armes
également plus solides et donc plus dangereuses qu'avec les métaux précédemment utilisés.
L'or, lui, ne peut servir qu'à exprimer l'orgueil ; il est tout juste bon (comme chez les peuples
d'Amérique centrale), à couvrir les temples sous forme de tuiles - ce qui a stupéfié les
Conquistadores... Les hommes primitifs n'ont tout d'abord connu que le Fer "don des dieux",
à savoir le fer météoritique, qui tombait du ciel, et était pour cela considéré comme un présent
des dieux... Plus tard, ils ont connu le fer extrait de la terre. Les forgerons étaient des hommes
admirés pour leur savoir, mais aussi redoutés, car ils osaient violer le sein de notre Mère la
Terre pour lui voler le précieux métal... Mais même ce métal le plus utile, le plus solide, finit
par rouiller. Et la rouille, insidieusement, détruit ce métal dur. Ainsi l'égoïsme détruit-il insi-
dieusement le coeur de l'homme.

Ainsi, les trois métaux et les trois maximes apprennent-ils à l'Apprenti que l'amour des
richesses matérielles, l'orgueil et l'égoïsme sont les trois principaux écueils à éradiquer : Vaste
programme, on en conviendra... Mais quel magnifique résultat quand le coeur a ainsi été épuré !
Quelle transformation le Maçon a-t-il pu atteindre par ses efforts constants sur lui-même !
Mais ceci ne constituait que trois conseils préliminaires. Le plus important reste à découvrir :
V.M. : Frère Second Surveillant, où en est le travail de l'Apprenti ?
2'me Surv. Vénérable Maître, il a fait trois voyages ; il a vaincu les obstacles des métaux
après en avoir connu les dangers.
V.M. : Frère Second Surveillant, l'Apprenti devait faire cinq voyages pour parvenir au
grade de Compagnon ; mais en suivant vos conseils avec docilité dans les trois premiers qu'il
a faits, il nous a suffisamment prouvé la défiance qu'il a de lui-même. Je le dispense donc des
deux derniers voyages, dans lesquels il aurait peut-être succombé.
31

L'Apprenti est donc supposé avoir accompli les améliorations, suite à l'abandon des
"métaux" qu'on lui a présentés. On le dispense donc des deux voyages qu'il aurait dû accom-
plir à la suite. Nous n'oublierons pas ce détail important...
Le Vénérable Maître, avant de poursuivre, s'assure que l'Apprenti a bien compris l'im-
portance de ce qui vient de lui être prescrit:
Le Vénérable Maître garde encore un instant le silence et dit
V.W1 : Frère Apprenti, avez-vous bien entendu les trois nouvelles maximes qui viennent
de vous être données au nom de l'Ordre ?

Le Candidat ayant répondu affirmativement, le Vénérable Maître continue


V.M. : Méditez-les donc souvent afin qu'elles vous servent à régler vos actions. Le pro-
mettez-vous ?
Le Candidat répond et le Vénérable Maître continue
V.M. J'accepte votre promesse. Soyez fidèle et ne vous flattez d'aucun succès dans
l'Ordre si vous négligez de la remplir.
Le Vénérable Maître ayant frappé seulement un coup sur l'Autel - 0 -, aussitôt tous les
Frères vont, en silence et avec le moins de bruit possible, reprendre leurs places ordinaires.
Nous savons tous que pendant une Réception, le Récipiendaire est quelque peu ému, les
épisodes se suivent et, l'émotion aidant, il lui est matériellement impossible de se remémorer
tout ce qu'il vient d'entendre... Si le Vénérable Maître, à ce moment de la Cérémonie, lui
demandait de lui répéter ce que le Frère Introducteur vient de lui dire à chaque découverte d'un
des trois métaux ainsi que les trois maximes qui viennent de lui être données, il serait sans
doute bien en peine de s'exécuter... I l s'en suit que le premier travail du Frère Premier
Surveillant devrait être d e lui redonner les maximes en question ainsi que tout l'enseigne-
ment qu'il vient de recevoir. Faute de quoi, tout le profit de la Réception sera perdu et, comme
nous l'avons précisé dès le début de cette étude, le grade de Compagnon ne sera ressenti que
comme un simple trait d'union entre la Réception au grade d'Apprenti et la Réception (dès lors
attendue) au grade de Maître...
LEÇON EMBLÉMATIQUE DONNÉE
AU CANDIDAT POUR L U I APPRENDRE
A B I E N SE CONDUIRE

Lorsque tous les Frères sont placés, le Maître des Cérémonies allume les deux bougies
du miroir. Le Vénérable Maître dit au Candidat
V.M. : Frère Apprenti, la pierre sur laquelle vous avez dû travailler était brute et informe.
Les Maîtres mêmes n'en pouvaient connaître les défauts ni la beauté. Vous avez été chargé de
la nettoyer et de la dégrossir afin que vos chefs puissent l'estimer à sa véritable valeur e t en
déterminer '
N'oublions pas que la pierre brute est l'emblème... de l'Apprenti lui-même. Il s'agit donc
bien de savoir ce que les chefs de cet Apprenti vont pouvoir penser de ses progrès sur lui-même,
car en effet, on ne peut savoir dès le départ, malgré les précautions prises, malgré les trois
enquêtes sur le Profane, ce que deviendra ce Profane après qu'il aura été reçu Apprenti. Le
Parrain lui-même, bien qu'il se soit porté garant, ne peut savoir si le fruit mûrira comme on
l'espère_ D'où les précautions oratoires du Vénérable Maître
Vous croyez sans doute avoir accompli votre tâche et mérité le salaire qui vous est
accordé ? Détrompez-vous, car l'Apprenti se fait toujours illusion à lui-même ; il s'applaudit
ordinairement de ses moindres efforts ; il admire son ouvrage quoiqu'il soit encore très irrégu-
lier et rempli de défauts. Vous n'avez pas su, mon Frère, vous garantir de cette erreur. Si vous
pouviez voir de l'oeil impartial de la Vérité cette pierre sur laquelle vous avez travaillé, et dont
vous paraissez satisfait, vous seriez étonné de ce qui vous reste encore à faire. Soyez convain-
cu que votre travail est bien loin d'être achevé. Vous allez du reste en juger vous-même...
Bien entendu, l'Apprenti n'a pas transformé sa pierre - c'est à dire lui-même - de façon
radicale et largement visible, et bien du chemin, bien du travail, bien des efforts lui restent à
accomplir...
Frères Surveillants, conduisez l'Apprenti à l'emblème des Compagnons afin qu'il
apprenne ce qui lui reste à faire.
Les deux Surveillants le conduisent devant la glace ou miroir qui est caché par le rideau.
Le Frère Premier Surveillant lui dit
l't Surv. : M o n Frère, lisez attentivement ces mots : c'est pour vous qu'ils sont écrits.
L'Apprenti lit à haute voix la maxime écrite sur le rideau
L'Appr. : "Si tu as un vrai désir, du courage et de l'intelligence, écarte ce voile et tu
apprendras à te connaître".
34

Aussitôt que le Candidat a lu la maxime écrite sur le rideau, le Premier Surveillant lui fait
écarter le store et lui dit

1- Sun,. : Vo y e z - v o u s donc tel que vous êtes.

Le miroir étant découvert, le Candidat reste en place pendant quelques moments.


Voilà donc le Candidat devant la célèbre épreuve du miroir.
Epreuve cruciale, fondamentale, riche d'enseignement ...si l'impétrant parvient à com-
prendre de quoi il s'agit O n peut même dire que ce moment est le plus fort de tout le cursus
initiatique et évolutif du Rite Ecossais Rectifié. Là se trouve la clé fondamentale de l'ensei-
gnement qui est donné dans ce Rite. Tous les autres grades qui vont suivre ne pourront pas être
compris si cette épreuve du miroir n'est pas assimilée et si son enseignement n'est pas le début
d'une transformation radicale dans la façon de se voir soi-même et de voir le monde.
"Voyez vous donc tel que vous êtes !". N'est-il pas élémentaire de dire qu'il ne s'agit pas
de se rendre compte de son aspect physique... Qu'on soit beau ou laid, gros ou mince, intelligent
ou... un peu moins intelligent (II faut quand-même une certaine dose d'intelligence, puisqu'il
nous a été répété précisément "qu'il y fallait de l'intelligence"...) Là n'est pas le problème posé
au Candidat. Il s'agit pour lui de se voir en profondeur, de tâcher de comprendre ou au moins de
commencer à réaliser qu'il s'agit une bonne fois pour toutes de s'évertuer à répondre à la ques-
tion si fondamentale "Qui suis-je, dans mon essence la plus profonde de mon être ?". Nous avons
déjà esquissé le problème posé par cette difficile question. C'est maintenant le moment ou jamais
d'envisager la solution. Nous connaissons tous la bévue du tout jeune Apprenti, lors de la tenue
qui suit sa Réception: A la question qui lui est posée à brûle pourpoint : "Quel est votre nom ?"
ou "Quel est votre âge ?", il répond sans réfléchir par ses noms et âge civils... C'est exactement
le même problème ici. Devant le miroir, il n'est plus Jules Tartempion. Mais quel est son véri-
table nom alors, au delà de celui que le Vénérable Maître lui a donné lors de sa Réception, pour
lui faire comprendre dès le départ que son identité n'est plus celle de l'état civil. Tout au long du
temps de l'Apprentissage, il a dû (il aurait dû) se pencher sur ce problème qui le concerne pour-
tant personnellement au premier chef... "Vous n'êtes pas ce que vous croyez que vous êtes" disent
les Sages à ceux qui viennent les interroger. "Quel était ton nom avant que tes parents fussent
nés ?" demandent les Maîtres Zen, nous l'avons vu. Il est temps de répondre !
Ici le Frère Surveillant ne lui dit pas : "Regardez-vous dans le miroir", mais "Voyez-
vous tel que vous êtes". Or, que voit-il dans le miroir ? Manifestement non pas lui-même, mais
une image de lui-même. Ainsi ce qu'il doit être ne serait qu'une image ? Qu'elle est donc sa
réalité ? Alors, voilà la vraie question. Qui serons-nous après l a mort du corps ? Qui étions-
nous avant la naissance ? C'est cette identité-là qu'il nous faut rechercher. Car nous ne sommes
pas le personnage du miroir. Nous sommes en effet littéralement hypnotisés dès la naissance
(en commençant d'ailleurs par les affirmations de nos parents, eux-mêmes "hypnotisés" depuis
leur propre naissance, à ce sujet). Nous croyons que nous sommes le corps, alors que nous ne
le sommes justement pas, puisque nous allons le quitter un jour comme on quitte un vêtement
usé... En y réfléchissant quelques instants, on se rend bien vite compte de cette évidence, et
pourtant, on n'a guère envie de trouver la réponse, somnolants que nous sommes dans les
innombrables problèmes journaliers. N'est-ce donc pas justement pour cela que les Sages nom-
ment ce moment de la recherche spirituelle: "I'Evell" ? Car nous passons à travers la vie
comme à travers un songe, en effet: Si nous comparons le rêve de la nuit dans le déroulement
35

de ses événements, on ne peut pas ne pas se rendre compte de la ressemblance exacte entre le
rêve de la nuit et le "rêve de la journée". Au réveil, nous changeons de rêve. TOUS les Sages
ont enseigné cette évidence dans toutes les civilisations, chez tous les peuples, dans toutes les
religions (à ceux qui étaient capables de comprendre cette révélation à première vue ahuris-
sante...) C'est d'ailleurs pour cela que l'empereur JULIEN a dit

" Les énigmes initiatiques ont été imaginées afin que les
sublimes vérités des Mystères, qui ne parviendraient pas sans dan-
ger toutes nues aux oreilles du vulgaire, ne s'apprennent que sous
l'enveloppe des symboles ". ( J u l i e n , Orationes, VII).

Or, les Maçons ne sont pas, justement, l e "vulgaire". I l s sont donc capables de
comprendre ces choses-mêmes, dites dans un langage symbolique. D'autre part, à notre époque,
la science nous a habitués à ne plus être effarés devant des conquêtes et des révélations qui, il n'y
guère qu'un demi-siècle, auraient posé problèmes mêmes a des gens en principe "intelligents",
comme ce distingué homme de science qui, lors de l'invention du chemin de fer a cru bon pré-
venir les autorités françaises qu'à la vitesse de 80 km-heure, les passagers mourraient d'étouffe-
ment par suite du courant d'air provoqué par la vitesse o u ces membres de l'Académie des
Sciences qui crièrent au scandale quand on leur présenta la découverte du gramophone : Ils se
croyaient victimes d'un ventriloque, car, n'est-ce pas, tout le monde sait bien que le son de la voix
humaine ne saurait entrer et séjourner dans une machine... ou encore cet autre membre de
l'Académie des Sciences à qui l'on parlait des météorites, qui se gaussait car, disait-il "Tout le
monde sait bien (décidément, la formule fait florès, et ce n'est pas fini !)... qu'il n'y a pas de
pierres dans l'air !!". Actuellement, alors que tous les laboratoires cherchent le moyen de dépas-
ser le mur de la lumière comme nous avons jadis dépassé ("l'infranchissable") mur du son, "tout
le monde sait bien" disent les beaux esprits, que les visiteurs de l'espace que les commandants de
Boeings ou chasseurs supersoniques voient évoluer à des vitesses ahurissantes à proximité de
leurs appareils, ne peuvent pas exister. Ah, les autruches ont décidément trouvé un bon moyen de
ne pas voir ce qui les dérange.... Mais les Maçons ne sont pas des autruches et quand les Sages
répètent depuis des millénaires "Réveillez-vous enfin de ce rêve de la vie ! Réalisez qui vous êtes
réellement, etc..." et que les Maîtres fondateurs du Rite Ecossais Rectifié placent le futur
Compagnon devant le miroir dans l'espoir qu'il saura résoudre l'énigme (sa propre énigme !), ils
pensent que quelques-uns, peut-être, s'attelleront à résoudre le problème posé.
Or donc, si le "rêve de la journée" est identique au "rêve de la nuit", ce dernier étant une
production de notre propre mental, il s'en suit logiquement que le "rêve de la journée" est aussi
une production du mental. Et en effet, dans notre rêve de la nuit, nous nous voyons, comme
pendant la journée, comme un personnage indépendant (séparé) des autres personnages et des
objets qui nous entourent, nous agissons, avons des pensées, des sentiments, des peurs ou des
joies, comme pendant la journée. Pourtant nous savons à l'évidence que nous-mêmes, les
autres, les objets, etc. étaient tous u n e pure production de notre mental. La première conquê-
te à faire dans notre recherche, c'est donc de devenir conscient de ce phénomène qui change
du tout au tout notre optique de la vie de tous les jours. Remarquons que le Second Surveillant
a dit : "Voyez-vous tel que vous êtes !" et non "Regardez-vous ...". Il ne s'agit en effet non pas
de se "regarder dans la glace", mais de "VOIR" enfin, c'est à dire de comprendre q u i nous
sommes en réalité. Ce verbe "voir" est ici synonyme de "comprendre" comme Même les
aveugles disent "Oui, je vois", dans le sens de "Je comprends" On l'aura compris : l'épreuve
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du miroir nous pousse à considérer le problemelOndaniental de la réallié lace à l'illusion. Nous


sommes tellement habitués, obnubilés même, par le personnage qui est dans le miroir, que nous
finissons par croire que nous sommes l e personnage du miroir et nous perdons de vue notre
propre réalité. Nous sommes littéralement hypnotisés par l'illusion du personnage du miroir,
aussi nous est-il très difficile de nous réveiller de ce rêve hypnotique. D'où, encore une fois, la
notion de l'éveil nécessaire pour sortir de cette illusion hypnotique (rappelons que upnoV (hyp-
nos ) en grec signifie : le sommeil). Le Sage est aussi appelé "l'éveillé". Tout initié est appelé
de par l'initiation, à devenir un "éveillé" qui, par ses efforts et la mise en application des pré-
ceptes initiatiques qui lui sont donnés, parvient à sortir de l'illusion du monde, qui n'est qu'un
rêve, et à se réveiller dans sa propre réalité.
Ceci étant dit, nous retrouverons cet enseignement plus tard. Le Rite Ecossais Rectifié est
didactique et nos Maîtres connaissaient l'adage romain: "Repetitio mater studiomm est !" (la
répétition est la mère des études). Profitons du temps que nous passons sur les colonnes pour
réfléchir à cet enseignement, afin d'être aptes à comprendre la suite quand le moment sera venu...
Ensuite, le Vénérable Maître frappe seul un coup - 0 -
Aussitôt les Surveillants ramènent en silence le Candidat à l'Occident, le visage tourné
vers l'Orient. Le Maître des Cérémonies éteint les deux bougies du miroir.
Le Vénérable Maître dit au Candidat

V.M. : Frère Apprenti, donnez dès à présent toute votre attention au conseil que vous
venez de recevoir. Pénétrez courageusement dans les replis de votre coeur. Sondez jusque
dans le plus profond de votre âme pour y trouver la connaissance de vous-même. Ce travail
est pénible, mais il donne la clef de tous les mystères et conduit au vrai bonheur

Ce que le Vénérable Maître vient de dire à l'Apprenti devrait être écrit en lettres de feu au
pied du lit de tout Maçon. Beaucoup, sans doute, entendant cela (et le réentendant à chaque
réception au grade de Compagnon !) doivent penser qu'il s'agit là d'une figure de style, type
"recommandations d'un confesseur, voire d'un prêtre en chaire...". Il n'en est rien. LE (vrai) tra-
vail intérieur à faire est défini par ces quelques conseils du Vénérable Maître. Non point d'une
façon "symbolique" ou "emblématique" mais en langage clair, sans le moindre sous-entendu
"Pénétrez courageusement dans les replis de votre coeur !". Bien entendu, il ne s'agit pas
du coeur physique, comme nous l'avons déjà mentionné. Pour ce faire, une seule technique,
universelle, en usage chez tous les peuples, enseignée par tous les Maîtres spirituels de toutes
les religions, par tous les (vrais ) philosophes, les Socrate, Platon, Lao-Tseu, Saint Jean de la
Croix, les Hésychastes chrétiens, les Maîtres thibétains, hindous, chinois, japonais, et bien
d'autres encore. Une seule technique, que voici résumée
Quand le Maçon est seul, chez lui, dans son cabinet d'étude, il s'assied confortablement,
mais la colonne vertébrale bien droite sans rigidité, ferme les yeux, calme sa respiration sans
la forcer d'aucune manière, et ensuite place sa conscience à l'emplacement exact du cœur spi-
rituel à deux doigts à droite dans la poitrine, symétrique au coeur physique, puis arrête totale-
ment le déroulement habituel des pensées.
Cette chose si simple paraît au début d'une incroyable difficulté. L'immense majorité des
cherchants y renonce rapidement, d'autant que cela n'a rien de fascinant (... au début !) Mais
Bismarck ne disait-il pas : "Aller Anfang ist schwer !" T o u t début est difficile). Le Vénérable
Maître n'a-t-il pas dit et répété "qu'il y fallait de la persévérance"... Et aussi du courage, car il
LE CANDIDAT AU BAS D E L'ESCALIER
DU TEMPLE

Le Maître des Cérémonies prépare le transparent de la Tempérance.


Le Premier Surveillant, aidé par le Second Surveillant, place le Candidat au pied de l'es-
calier du Temple, ayant les deux pieds en équerre; ils lui font monter les trois premières
marches par trois pas d'équerre en avançant chaque fois le pied gauche; ils le font arrêter au
palier où est tracé le chiffre "3" ; étant là, ils lui font faire en entier le signe d'Apprenti, après
lequel il reste au premier temps du signe.. Ensuite ils lui font monter de même les deux autres
degrés qui conduisent au palier où est tracé le chiffre "5", où ils le font arrêter brusquement
ils lui montrent avec leur épée le transparent de la Tempérance. Aussitôt, le Vénérable Maître
dit d'un ton ferme et imposant :
V.M. Comment celui qui n a pas encore réglé ses pensées, ses paroles et ses actions par
la Tempérance, ose-t-il approcher du Temple de la Justice qu'il ne saurait pratiquer tant qu'il
est l'esclave de ses penchants désordonnés ?
Il fait une légère pause, puis il dit d'un ton moins élevé:
V.M. Mes Frères, c'est par la Tempérance que l'homme s'abstient de ce qui peut le cor-
rompre et l'éloigner de la Vérité.
Le Vénérable Maître vient de s'adresser non plus seulement au Candidat, mais à tous les
Frères de la Loge, pour leur rappeler la Tempérance (toujours le repetitio mater studiorum
est...). A l'Apprenti, i l venait de signifier qu'il n'avait manifestement pas encore réglé ses
pensées, ses paroles et ses actes par la Tempérance. Par conséquent, il ne peut pratiquer la
Justice. Il faut toujours se rappeler qu'il ne s'agit pas, pour un Maçon, de devenir un "juge" des
autres hommes, mais de devenir ce que la Bible appelle précisément "un Juste", en d'autres
termes moins "sémites", un "Sage", terme plutôt grec (socratique). La Tempérance des pensées
(nommées en premier) est le premier pas vers l'expérience du "vide mental ", pratiqué par les
moines bénédictins comme par tous les autres hommes sur le chemin de la spiritualité.
Il laisse le Candidat un instant à ses réflexions (répétons que ces réflexions se trouveront
bien d'être approfondies ensuite, en particulier avec le Frère Premier Surveillant qui va le prendre
en charge dès la fin de la Réception...) ensuite, frappant un coup sur l'Autel - 0 -, il dit:
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La Tempérance
(Tombeau de François II, Nantes)
Tiré de Fuleanelli : Les Demeures philosophales, I I I
avec [horloge et le mors d'un cheval
(Commentaire de: Adulais N'401 page 241)

V.M. Frère Premier Surveillant, que demandez-vous ?


1" Surv. : L e Frère Apprenti est parvenu à monter les cinq premières marches de l'es-
calier du Temple, mais, n'ayant pas le signe caractéristique, il n'a pu monter plus haut.
Certes, à ce stade, il n'est pas possible de parvenir au Septenaire sacré. Ce sera pour plus
tard. Cependant, l'Apprenti, qui a déjà fait du chemin sur la Voie, n'est plus un mécréant, c'est
un cherchant qui - on peut l'espérer - va encore progresser. C'est (pour reprendre un langage
symbolique de l'Evangile de Matthieu qui nous relate deux multiplications des pains) un
"homme des cinq mille", à qui l'on promet en effet la totalité de l'enseignement de l'ère des
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Poissons (sous le symbolisme des deux poissons ) ce qui leur donnera la plénitude (symbolisée
par les douze corbeilles restantes).
Le Maître des Cérémonies prépare l'Etoile Flamboyante.
V.M. : Faites-le redescendre, son temps n'est pas venu; son travail n'est pas encore assez
parfait et l'entrée ne lui est pas encore permise
Enseignement constant dans toutes les traditions: Dans la Voie spirituelle, il ne faut pas
vouloir aller trop vite, sinon, on chute et on rétrograde.
mais auparavant, faites-lui connaître l'Etoile Flamboyante dont la lumière doit désor-
mais l e diriger, e t vous l e présenterez ensuite à l'Autel d'Orient par l a marche des
Compagnons.
On dévoile l'Etoile Flamboyante qui est au dessus de l'Autel d'Orient.
Le Premier Surveillant dit au Candidat:

Surs'. : Contemplez cette Etoile Flamboyante à cinq pointes; apprenez à la connaître


et qu'elle soit, dès à présent, votre unique guide.
Il faut avouer que nous sommes ici encore une fois devant une espèce d'énigme: Cette
"Etoile Flamboyante à cinq pointes" doit donc être, dès ce moment, son (notre) unique
guide ?... Il faut donc qu'elle soit chargée d'un enseignement d'une extrême importance ! Nous
avons expliqué plus haut que cette connaissance nous a été transmise depuis l'ancienne Egypte
et qu'elle recèle la clé de l'origine des "dieux qui ont créé le genre humain"...Ne disions-nous
pas également que la réception au grade de Compagnon était un moment capital du cursus ini-
tiatique du Rite Ecossais Rectifié ?
Quels commentaires supplémentaires pourrions-nous faire à ce sujet ? C'est à chaque
Compagnon de chercher "au plus profond de son cœur" ce que ce symbole peut lui suggérer.
Ajoutons simplement ceci
Sur le strict plan mathématique, le côté du pentagone étoilé est obtenu en joignant de
quatre en quatre les sommets d'un décagone régulier inscrit dans un cercle de rayon R. La lon-
gueur du côté sera égale à R qui multiplie 5 + racine de 5, le tout sur 2 E n clair, le côté sera
égal à R x 1,902 donc presque l e double du rayon du cercle circonscrit. En langage symbo-
lique, nous pouvons traduire ainsi: Le nombre 5 étant le nombre de l'Homme, qui seul peut
avoir accès aux cinq plans généraux de la Nature (voir " L a Pratique Journalière du Rite
Ecossais Rectifié,Tome I, le Grade d'Apprenti), nous pouvons dire que l'Homme (avec une
majuscule) est le résultat d'un festival de racines de 5, divisé par la Dualité fondamentale M a i s
le nombre-clé sera le rayon du cercle circonscrit, et le cercle symbolise l'Unité, l'Unique, "le
Tout", Dieu.
42

L' Etoile flamboyante


(ou pentagramme étoilé)

Nous nous souvenons que l'Etoile à cinq branches (c.à d. le pentagramme étoilé) était
le symbole de toute étoile en Ancienne Egypte et tout particulièrement de la "déesse" Isis-
Sirius, maîtresse de notre galaxie. Nous devenons conscients, peu à peu, que le "gnwti seau-
ton" (gnôti se-auton) de Socrate (Connais-toi toi-même), va coïncider avec "Connais le monde
en te connaissant toi-même". Si en effet le monde est une production de notre mental, un rêve
produit par notre mental comme il produit aussi le rêve de la nuit, se connaître soi-même nous
fera connaître le monde en même temps. Vo i l à pourquoi, l'adage complet d e Socrate est:
"Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et les dieux". Atteindre " l'état de Sagesse
est un formidable défi. Mais la plupart des hommes pensent que cela est réservé à une toute
petite élite, et l'on cite toujours, comme une litanie (ce que nous avons déjà fait nous-mêmes
au cours de cette étude): Socrate, Platon, Lao-Tseu, etc... Mais cette liste-là ne comporte que
les plus célèbres d'entre eux. Quand on dit qu'il y a des Sages un peu partout, mais qu'ils ne
portent pas un écriteau sur leur poitrine, cela laisse toujours sceptique. C'est pourtant vrai.
Mais si quelques-uns d'entre eux ont enseigné (Socrate, Platon, Pythagore...) peu s'engagent
dans cette activité. Par contre, tous ayant atteint l'Amour universel, ils répondent volontiers aux
vrais "cherchants" qui leur posent des questions afin de les aider à réaliser ce qu'ils ont eux-
mêmes réalisé. Mais comprenons que, lorsqu'on a réalisé que le monde est effectivement un
rêve, pourquoi aurait-on envie de s'investir dans un rêve ? Tout au long de cette étude, nous
nous apercevrons de plus en plus nettement que les fondateurs du Rite Ecossais Rectifié ont
élaboré un monument rituel comme une cathédrale romane ou gothique : Tout l'enseignement
est là, à notre portée. Seuls ceux qui se donnent la peine de l'étudier àfond en tirent le profit
escompté (le "vrai bonheur"...).
Pour ne citer qu'une seule anecdote, racontons qu'un célèbre écrivain britannique a posé
un jour cette question à un Sage: "Moi qui suis lu par des millions de lecteurs, que puis-je faire
pour améliorer ce monde qui en a bien besoin ?". Le Sage sourit doucement et répondit
"Atteignez d'abord l'état de Sagesse, et vous saurez alors ce qu'est le monde e t par consé-
quent vous verrez clairement ce que vous pouvez faire pour lui". En clair, si vous devenez un
Sage (ce qui est donné à tout homme qui s'en donne la peine), vous saurez que le monde n'est
qu'un film sans aucune réalité. Dans ces conditions, comment pouvez-vous prétendre changer
quoi que ce soit à un film ? Laissez donc le monde tel qu'il est et occupez-vous de vous
d'abord. C e qui n'est nullement égoïste, car un Sage est d'une efficacité extraordinaire à
43

l'égard de tout individu qui vient vers lui. C'est cela, "changer le monde". Et c'est cela aussi
le sens du célèbre adage chrétien : "Charité bien ordonnée commence par soi-même"...
Chaque angle situé entre deux pointes de l'Etoile à cinq pointes (là d'où jaillissent les
flammes de l'étoile flamboyante) présente un angle de 72', soit la division de 360 par 5. Il repré-
sente donc un des cinq plans sur lesquels toute la création s'étage. Or précisément, l'homme est
traditionnellement représenté debout dans le pentagramme étoilé :

L'Homme microcosme,
d'après Agrippa von Nettesheim
(tiré de : Maffia C. Gin/KA - Le Nombre d'Or Tome I, p.54)

De plus, 72 est 8 x 9 : Les neuf degrés de la Sagesse sont atteints à travers les épreuves,
les tribulations (8) de la vie dans le monde manifesté.
Le grade de Compagnon constitue bien la période pendant laquelle le Maçon doit s'ef-
forcer de comprendre toutes ces choses, puis de les réaliser. Mais c'est un long travail. On
comprend alors pourquoi le Vénérable Maître ne lui permet pas, au moment de sa réception, de
séjourner sur la cinquième marche du Temple... mais l'en fait redescendre: ces marches, ce
qu'elles représentent, doivent d'abord être conquises de haute lutte d a n s son coeur
Le Vénérable Maître va lui expliquer tout ceci, après l'avoir fait redescendre puis exécu-
ter les trois pas maçonniques par dessus le Tapis
Etant toujours assisté du Frère Second Surveillant, i l (le Frère Premier Surveillant) lui
fait ensuite, en reculant, redescendre les cinq marches qu'il avait montées, et lui fait faire les
trois pas maçonniques du Grade par dessus le Tapis ; et ils le conduisent ensemble, à pas libres,
vers l'Autel d'Orient.
Lorsqu'il y est parvenu, le Vénérable Maître lui dit
V.M. : Mon Frère, comme Apprenti, vous avez monté les trois premières marches de
l'escalier du Temple et vous avez acquis l'âge de trois ans ! Aujourd'hui, vos efforts vous ont
permis de monter deux marches de plus. Mais n'ayant pas le signe caractéristique qui pourrait
vous élever _jusqu'au plus haut de l'escalier mystérieux, vous avez été arrêté au nombre cinq....
44

Pourquoi cet escalier est-il mystérieux ? Mais parce qu. il ne se situe pas dans un lieu
quelconque, mais dans le cœur de l'adepte.
Le Vénérable Maître, continuant son discours, lui rappelle la vertu de Tempérance qui lui
a été proposée précédemment, lui rappelle également qu'il doit devenir un "Juste", et lui rap-
pelle enfin que l'Etoile flamboyante doit désormais le guider sur la Voie:
C'est là qu'on vous a fait connaître la Vertu sans laquelle nul ne peut aimer la Justice
ni se soumettre à ses lois, et que vous avez acquis l'âge de cinq ans. C'est là aussi qu'on vous
a fait apercevoir cette Etoile Flamboyante dont la lumière vous est si nécessaire pour vérifier
votre travail ; que sa clarté vous aide donc à en découvrir les défauts et que vos Maîtres s'aper-
çoivent que vous vous efforcez de les rectifier
Le Maçon doit donc rectifier ses défauts et acquérir les Vertus. C'est un programme
constant à suivre avec persévérance, jour après jour (et pas seulement une ou deux fois par
mois, lors des Tenues maçonniques), jusqu'à la Maîtrise - la vraie Maîtrise, qui ne consiste
pas à porter un beau tablier, mais à avoir atteint les sommets de la spiritualité, dont la Voie nous
est ouverte par les préceptes, conseils, maximes, adages et symboles dévoilés à chaque étape
par le Vénérable Maître
C'est ainsi mon Frère, que vous mériterez de voir s'ouvrir devant vous les portes de
ce Temple, mais souvenez-vous que si vous n'avez pas un vrai désir, du courage et de l'intelli-
gence, vous ne pourrez vaincre les obstacles...
Il y a une telle insistance, dans les paroles rituelles du Vénérable Maître, qu'il faut bien
se rendre à l'évidence : la marche initiatique vers la Sagesse n'est pas faite pour les faibles,
pour les tièdes, pour les nonchalants (pour les eunuques, dit l'adage chrétien). Il faut com-
prendre l e Rituel qui nous enseigne le chemin (donc il faut de l'intelligence) ; i l faut vouloir
faire l'effort pour suivre cette voie ardue (donc il faut un vrai désir de parvenir à ce but), il faut
enfin oser entreprendre un tel travail sur soi, afin de parvenir à une telle transformation (donc
il faut du courage ô combien, car les débuts sont difficiles et rébarbatifs). Mais ce magnifique
travail mené jusqu'à son terme, l'illumination arrive dans le coeur (spirituel) de l'adepte et à ce
moment béni

"toutes les illusions disparaissent plus vite que l'éclair"


comme l'avait promis le Vénérable Maître au profane lors de sa réception au grade
d'Apprenti (cf "La Pratique Journalière....tome I), alors que le Second Surveillant lui avait fait
comprendre que la gloire illusoire du monde disparaît car elle est fallacieuse ("sic transit glo-
ria mundi" avait dit le Second Surveillant : Ainsi passe la gloire du monde, à l'image de l'em-
brasement momentané de la pipe à lycopode...).
Etes-vous bien décidé à profiter des nouveaux secours qui viennent de vous être accor-
dés, et à redoubler d'efforts pour rendre votre travail plus parfait ?
Ah. oui, i l faut redoubler d'effbrts et surtout veiller à ce qu'ils soient constants,
persévérants, journaliers._
Le Candidat répond
V.M. : Vous êtes donc disposé à renouveler vos premiers engagements et à vous lier par
ceux de Compagnons ?
Le candidat ayant répondu affirmativement, le Vénérable Maître dit
: Frères Surveillants, faites-le placer comme il doit l'être pour prononcer l'engage-
ment de ce Grade.
45

Les deux Surveillants le font mettre à genoux sur le coussin qui est au bas de l'Autel,
ayant le genou droit sur l'équerre et le gauche relevé (on se souvient : le genou droit , signe
d'humilité et le genou gauche , signe d'initiation - saint Jean-Baptiste est toujours représenté
par les peintres initiés, le genou gauche découvert) ; ils lui font mettre aussi la main droite
dégantée sur le Livre de l'Evangile de saint Jean, ouvert au premier chapitre et sur l'épée du
Vénérable Maître qui est posée dessus. Le Vénérable Maître lui met le Compas ouvert dans la
main gauche, dont il lui fait placer la pointe sur le cœur, et lui dit:
V.M. : Vous étiez dans l'obscurité, quoique parfaitement libre, lorsque vous prêtâtes vos
premiers engagements maçonniques. Aujourd'hui que vous vous trouvez dans la lumière et que
vous pouvez déjà porter un jugement sur le but de vos travaux, dites-nous si vous persistez
librement dans la volonté de renouveler les engagements que vous avez déjà prêtés et d'en
contracter de plus étendus.
Le Candidat ayant répondu affirmativement, Le Vénérable Maître frappe seul un coup sur
l'Autel - 0 - et dit:
V.M. : A [Ordre, mes Frères.
Aussitôt tous les Frères se lèvent et tirent l'épée qu'ils tiennent de la main droite, la
pointe haute, tenant leur chapeau de la main gauche.
Rappelons qu'au Rite Ecossais Rectifié, l'épée est toujours tenue de la main gauche, la
main droite étant au signe d'ordre, selon le grade, sauf lors de la prestation de serment (quel
que soit le grade), où l'épée est tenue pointe en haut, de la main droite.
ENGAGEMENT DES COMPAGNONS

Le Premier Surveillant prend sur l'Autel l a feuille où est écrit l'Engagement et la


présente au Candidat, qui le prononce à haute voix, comme il suit
Remarquons c e changement d'avec l a méthode employée a u Premier Degré:
L'engagement de l'Apprenti était lu par le Premier Surveillant, puis le Premier Surveillant
faisait prononcer l'engagement phrase par phrase après lui, par le Candidat, ce qui fait que les
paroles de l'engagement étaient énoncées trois fois de suite. Ici, l e futur Compagnon a
l'engagement sous les yeux et le prononce directement.
FORMULE D E L'ENGAGEMENT DES COMPAGNONS:

Moi, N...(nom et prénom)...


* je promets devant le Grand Architecte de l'Univers
* et je m'engage sur ma parole d'honneur, devant cette respectable Assemblée
* de ne point révéler aux profanes, ni même à aucun Apprenti, les mystères et secrets
particuliers du Grade de Compagnon;
'' de les tenir inviolablement cachés dans mon cœur envers tous ceux que je n'aurai pas
reconnus pour vrais et légitimes Frères Maçons Compagnons,
* et je renouvelle tous les engagements que j'ai contractés en entrant dans l'Ordre. Ainsi,
que Dieu me soit en aide.
Comme nous l'avions fait pour l'engagement des Apprentis, constatons ic i que l e
Candidat prononce cinq phrases (quatorze, pour l'Apprenti). Admirons donc, encore une fois,
ici sur le plan de la numérologie sacrée, la minutie avec laquelle ce Rituel a été bâti par les
Maîtres... Nous sommes donc forcés de constater une fois de plus l'insistance avec laquelle
l'impétrant quelque peu attentif observe l'importance du nombre cinq.., alors même que le
nombre de coups de maillet, au grade de Compagnon, est de deux fois trois, soit six.
Le Vénérable Maître, soutenant avec la main gauche la tête du Compas, dit
V.M. : A la gloire du Grand Architecte de l'Univers
Au nom de l'Ordre

Et par les pouvoirs que j'en ai reçus,


Je vous reçois Compagnon Franc-Maçon
48

Ayant prononcé ces mots, il bat sur la tête du Compas deux fois trois coups - 0 0 0 0 0 0 -
et dit: aussitôt

V.M. : Qu'il soit écrit sur le Livre d'Ordre, que le Frère N... a été reçu Compagnon et
que son nom soit désormais parmi ceux des Frères de ce Grade...
Les deux Surveillants font relever le Frère nouvellement reçu et le Vénérable Maître lui
dit :

V.M. : Frère Compagnon, vous avez jusqu'à présent travaillé pour dégrossir les matériaux
destinés à la construction du Temple. Vous devez maintenant vous employer sans relâche à les
perfectionner pour les mettre en œuvre. Préparez donc sans délai les outils qui vous sont néces-
saires ; votre intelligence en déterminera le choix, mais c'est votre conscience seule qui doit en
diriger l'usage. Venez recevoir les signes et les marques distinctives de votre Grade.
On aura encore une fois noté le terme "sans relâche" dans la bouche du Vénérable Maître
Il est interdit de ronronner sur les colonnes, pourrait-on s'amuser à dire. Mais c'est bien plus
sérieux: En alchimie, il est répété que le "feu de roue" doit être constant et régulier. S i l'on
relâche l'attention et le travail, on recule. Quant au choix des outils, "votre intelligence en
déterminera le choix" signifie que chacun doit chercher son rythme, ses méthodes personnelles,
tout ces petits riens qui rendent le travail moins difficile... Mais le fond du problème est tou-
jours la maîtrise du mental : c'est la vigilance dans le travail intérieur qui est gage de succès.
Et aussi la règle : ni trop, ni trop peu.
Le Vénérable Maître bat seul un coup sur l'Autel - 0 A u s s i t ô t , tous les Frères remet-
tent leur épée au fourreau, se couvrent et s'assoient. Les deux Surveillants vont reprendre leur
place à l'Occident et le Maître des Cérémonies fait avancer le nouveau reçu vers le Vénérable
Maître, du côté droit de l'Autel.
SIGNES E T MARQUES DISTINCTIFS
DES COMPAGNONS

Le Vénérable Maître le ceint du Tablier de Compagnon (actuellement celui-ci est confec-


tionné, mais auparavant il consistait en un ruban bleu passé par dessus le tablier d'Apprenti,
dont il rabattait la partie supérieure) en disant
V.M. : Recevez de ma main le Tablier du deuxième Grade, bordé d'un ruban bleu.
L'Ordre, en vous décorant de cette couleur qui vous rapproche de la classe des Maîtres, vous
encourage à redoubler d'efforts et de zèle pour parvenir à la vraie Lumière.
Est-il nécessaire de relever encore une fois l'expression "la vraie Lumière" (ce dernier
mot avec une majuscule...). Il s'agit bien, nous l'avons maintes fois répété, de la Lumière divi-
ne, intérieure à chacun de nous, occultée par le fonctionnement anarchique de notre mental et
qui réapparaît lors de l'illumination.
En lui rendant son épée, il lui dit
V.M. : Je vous rends votre épée ; qu'elle soit désormais le signe de votre Vigilance pour
repousser loin de vous tout désir injuste et dangereux.
Nous ne pouvons pas ne pas nous arrêter une fois de plus pour relever l'importance et la
rigoureuse exactitude des propos du Vénérable Maître. Le mot "Vigilance" est écrit avec une
majuscule. Utilisons un langage clair: La clé fondamentale de tout ce "travail" est l'expérien-
ce du vide (mental), l'arrêt de toute pensée, qui fait découvrir une toute autre façon d'entrevoir
la vie (lorsque ce vide est complet et stable, ce qui est effectivement difficile à atteindre, mais
nullement "impossible", comme on l'entend dire parfois par ceux qui ont tenté cette recherche
sans persévérer).
Précisons encore qu'il faut agir avec son mental comme on le ferait avec un jeune chien
indiscipliné à qui l'on apprend avec patience à le faire rester aux pieds du maître... Le succès
est dû à la Vigilance, (ce que le Vénérable Maître vient de dire à l'impétrant) ou si l'on préfè-
re, à l'attention soutenue dans le silence du coeur, une attention aussi vive, mais calme et per-
sévérante, que celle d'un chat près du trou d'une souris. Au bout d'un temps (généralement
assez long, c'est vrai) l'exercice se fait avec de plus en plus de facilité et l'on finit même par y
trouver un plaisir certain, car on découvre alors en soi le Silence, merveilleux et fécond (qui
n'est pas l'absence de bruit !), l'Obscurité reposante et féconde (comme le grain de blé dans
le sein de notre bonne Mère la Terre... ou le profane lorsqu'il a les yeux bandés: obscurité qui
n'est pas ressentie comme l'absence de lumière !), et la Paix, profonde et féconde ( qui n'est
pas l'absence de guerre ou de conflits !). A celui (ou celle, bien sûr) qui a persévéré et "redou-
blé d'efforts", comme vient de dire le Vénérable Maître, qui a "travaillé sans relâche", comme
50

le Vénérable Maître avait dit juste avant, ce "travail" se change lentement en exercice tellement
agréable, qu'on y prend goût, d'autant que le calme et la joie, peu à peu, récompensent le
Persévérant, qui constate également - ô merveille ! q u e son efficacité dans le monde profane
s'accroît sans cesse, que les conflits s'apaisent autour de lui, que le "métro-boulot-dodo" chan-
ge lentement d'aspect... On commence alors à comprendre peu à peu ce que voulait dire le
Vénérable Maître, tout au début, lorsqu'il prédisait au profane d'atteindre le "vrai bonheur"...
à condition de faire ce que le Rituel enseigne, et d'être persévérant. On reçoit la récompense
en fonction de son mérite.

Quant aux "désirs injustes et dangereux", ce sont les désirs qui éloigneraient et empê-
cheraient l'adepte de devenir un "Juste" et seraient donc dangereux pour la suite du travail....
Ce sont précisément tous ces désirs-là que le Bouddha conseillait de faire "s'éteindre"...
En lui rendant son chapeau, il lui dit
V.M. : Je vous rends aussi votre chapeau ; cependant il vous est interdit de vous en ser-
vir en Loge, mon Frère, votre front devant toujours être à découvert pour les Maîtres chargés
de veiller sur vos travaux...

Bien sûr, il s'agit là, à première vue, d'une marque de respect à l'égard des Maîtres. Mais
ceci est une explication profane... I l serait plutôt intéressant de savoir pourquoi les Maîtres
portent un chapeau en Loge, pourquoi les rois portent une couronne, les princes et princesses
un diadème, le pape une tiare, les chefs sioux un bandeau orné d'une plume, etc... Cela a été
signalé et expliqué au Grade d'Apprenti (La Pratique Journalière... Tome I)
...11 y a pour chaque grade des signes, attouchements, paroles et mots particuliers, je vais
vous donner ceux de Compagnons.
En lui donnant le signe, il lui dit
V. M. : Le signe se fait en portant la main droite étendue en équerre appliquée sur le
coeur ; on la retire horizontalement vers le côté droit et on la descend perpendiculairement le
long de la cuisse droite, ce qui complète le signe. Le premier temps de ce signe, qui est de
mettre la main droite sur le coeur, est le signe d'Ordre en Loge de Compagnons.
Précisons qu'au Rite Ecossais Rectifié, la main est sur le coeur, le pouce à l'équerre sur
la ligne médiane de la poitrine e t les autres doigts allongés l'un contre l'autre. Nous l'avons
déjà rappelé.
En lui donnant l'attouchement, il lui dit
V. M. : L'attouchement se fait /
En lui donnant le mot du Grade, il lui dit:
Nous avons fait remarquer, au premier Grade, que lors de cet épisode, le Vénérable
Maître prononçait les voyelles et l'Apprenti, les consonnes. Et nous en avons donné l'explica-
tion. Au Grade de Compagnon, chacun prononce autant de consonnes que de voyelles: l'ou-
verture de l'Esprit a commencé chez le nouveau Compagnon...
En lui donnant la parole de reconnaissance, il lui dit
V.M. : La parole de reconnaissance est C e t t e parole sera votre nom caractéristique
en Loge, comme Compagnon. En cette qualité, vous venez d'acquérir l'âge de cinq ans ; méri-
tez par votre zèle et vos vertus, l'âge auquel vous devez aspirer.
Nous ne serons pas étonnés que le Compagnon ait précisément l'âge de cinq ans...
51

Ayant dit, le Vénérable Maître lui donne le baiser fraternel qui se fait en trois temps, les
deux joues, la droite et la gauche, et le front : ensuite il lui dit
V.M. : Mon Frère, les Compagnons doivent travailler sur la pierre cubique ; allez vers le
Frère Premier Surveillant qui vous apprendra à faire ce travail par la batterie de votre grade.
Le Maître des Cérémonies conduit l e nouveau Compagnon vers l e Frère Premier
Surveillant qui, l'ayant approché de la pierre cubique dessinée sur le Tapis, frappe avec son
maillet deux fois trois coups
le' Surv. : 0 0 0 0 0 0

Après quoi, il remet son maillet au Frère Compagnon qui y frappe aussi par le même
nombre
Le Frère Comp. : 0 0 0 , 0 0 0
Le Frère Introducteur va reprendre sa place dans la Loge.
Nous avions fait remarquer, dans le premier tome (Apprenti), que le Frère Introducteur,
ayant introduit le Profane dans le Temple, lui avait signifié qu'il l'abandonnait dans les mains
des Surveillants. Malgré cela, il lui plaçait la main sur l'épaule, dans un geste de protection
ininterrompu jusqu'au moment où le nouvel Apprenti avait fait son travail sous la conduite du
Frère Second Surveillant, et nous en avions conclu qu'en quelque sorte, il jouait le rôle de
l'Ange Gardien. Nous nous apercevons q u ' à l a réception d u Second Grade, l e Frère
Introducteur se comporte de la même manière. Dans la logique remarquable du R.E.R., ce rôle
d'Ange Gardien" est parfaitement conforme à la réalité occulte de l'être humain. En effet, qui
est "l'Ange Gardien" en chacun de nous ? Il faudra bien répondre à cette question... Mais, là
encore, l a réponse vient d'elle-même "dans les replis de votre coeur", comme disait l e
Vénérable Maître... En effet

Dans l'étape élémentaire, l'homme est un corps (qu'il croit être) et une âme (qu'il res-
sent comme étant l e mental, partie -invisible" de lui même, fonctionnant sans trêve, jour et
nuit, sauf pendant le sommeil profond). Pour les Pères de l'Eglise, comme pour les Sages de
toutes les religions, l'homme a aussi "en lui", une parcelle de l'Esprit (Rouah e n hébreu,
Atman en sanscrit). Cet Esprit dont il ne se soucie guère dans la vie courante, est pourtant la
partie divine en lui-même. Elle est "le Maître Intérieur" dans la terminologie des "Dialogues
avec l'Ange". E l l e accompagne l'homme non évolué spirituellement, e n permanence.
Comment pourrait-elle s'éloigner du "petit moi", puisqu'elle fait partie intégrante de l'être
humain ? C'est elle qui procure au "petit moi" les fulgurances de "l'intuition", c'est elle qui est
"la petite voix de la conscience". C'est elle qui nous accompagne discrètement jour et nuit, qui
nous guide, qui nous mène, discrètement aussi, sous l'aspect du "hasard" et pour autant que le
petit moi ne se rebelle pas stupidement, vers les éléments qui sont susceptibles de nous faire
évoluer spirituellement. C'est, au R.E.R., le rôle personnifié du Frère Introducteur, qui s'abs-
tient dès que le "petit moi" travaille à son perfectionnement (dans la cérémonie de Réception
à un grade maçonnique, par exemple...), mais qui cependant est toujours là, présent sans jamais
faillir, mais toujours d'une discrétion telle que, quand nous commençons à avoir conscience de
tout ceci, nous sommes amenés à la rechercher sans trêve en nous-mêmes dans ce que l'on
appelle la méditation...
Le Maître des Cérémonies ramène le Candidat entre les deux Surveillants à l'Occident et
le Vénérable Maître lui dit
Ce sont les dernières recommandations du Vénérable Maître avant la fin de la Cérémonie.
C'est un discours magistral, que l'impétrant ne peut mémoriser en l'entendant dans l'émotion
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de la Cérémonie, mais que le premier Surveillant devrait pour bien faire, lui relire et commen-
ter, tant il est important pour la compréhension de l'ensemble de la voie spirituelle suivie - il
faut l'espérer - par le Candidat
V.M. : Frère Compagnon, cette pierre cubique sur laquelle vous, venez de frapper...
et qui représente l'impétrant lui-même, cela a été formellement exposé au Premier
Degré...
• d o i t vous servir de modèle dans le travail qui vous reste à faire sur la pierre brute...
qui n'est donc pas encore devenue cubique et parfaite par le simple fait que l'Apprenti
est reçu Compagnon ! I l a au contraire encore tant de travail à faire pour atteindre l a
Perfection... Le Vénérable Maître le lui précise aussitôt
• C e n'est que par votre constance à la polir que vous ferez disparaître en elle toute les
irrégularités qu'on y voit encore. Reconnaissez donc ici, mon cher Frère, l'emblème de ce que
vous devez faire sur vous-même, et n'abandonnez pas cette entreprise avant qu'elle ne soit tout
à fait accomplie...
Il est donc rappelé que la pierre (actuellement encore brute et tout juste ébauchée) est
1' emblème du nouveau Compagnon : l'essentiel du travail est encore à accomplir, l'apprentis-
sage n'étant qu'une ébauche, une entrée en matière...
D'autre part, il est conseillé au nouveau Compagnon de ne pas fléchir avant d'avoir
atteint la Perfection : exactement le précepte alchimique du "feu de roue" symbolisant le tra-
vail constant, régulier et assidu jusqu'à ce que le plomb soit changé en or. Alors seulement, la
transformation sera effective. Or, numérologiquement parlant, le nombre six est le symbole de
la transformation, du changement d'un état dans un autre... ce que le Vénérable Maître va lui
signifier en lui citant deux fois de suite le nombre six
On vous a fait frapper six coups sur la pierre cubique à six faces pour vous apprendre
à redoubler de zèle et vous rappeler qu'il n'est aucune partie de votre être sur laquelle vous ne
devez travailler si vous voulez atteindre à la perfection de ce modèle.
Aucune partie de votre être : donc à commencer par votre corps physique, qui doit être
maintenu en bon état. On n' attrappe pas une maladie : celle-ci est le résultat d'une mauvaise
façon de se comporter. Les abus dans l'alimentation, dans l'ingestion d'alcool, le fait de fumer
(le tabac est un frein sur le plan spirituel !!...), etc... trouvent fatalement leur réponse dans la
maladie. Dans le monde pollué où nous vivons actuellement, nous devons redoubler d'efforts
pour vivre sainement. Se sentir responsable de soi-même, à commencer par la santé du corps,
voilà le comportement correct. Comment pourrait-on réussir le travail intérieur (la méditation
profonde),...si l'on souffre d'une rage de dents ? "Charité bien ordonnée commence par soi-
même" enseigne l'adage chrétien (si mal compris généralement !)... ainsi le travail sur soi-
même commence par le corps, qui est l'outil qui nous est donné pour parfaire ce travail. Les
Compagnons du Tour de France choisissent, voire confectionnent eux-mêmes leurs outils et les
gardent jalousement dans un parfait état. La perfection de l'outil est nécessaire à la perfection
du geste. Alors, la perfection du résultat est atteinte. C'est donc grâce à un outil corporel soli-
de et sain que nous pouvons construire un perfectionnement lui-même solide et sain.
Ajoutons que, comme tout se tient dans la nature et que tout est "interactif-, une bonne
santé physique permet un bon travail spirituel et, vice versa, la pratique journalière de la médi-
tation a de son côté une influence particulièrement bénéfique sur le corps, par l'harmonisation
des courants énergétiques, le renforcement du système immunitaire, la disparition de la tension
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nerveuse et du stress, etc... (la directrice de l'Ecole Normale de Yoga à Sèvres me signalait en
1998 que deux de ses stagiaires, "sidéens", présentaient une étonnante diminution des mani-
festations morbides depuis qu'ils pratiquaient le yoga intensément a u grand étonnement des
médecins ! ).
Mais une rigueur sévère est nécessaire dans ces deux domaines, corporel et spirituel
c'est le terme que le Vénérable Maître va employer maintenant
Que vos recherches soient donc assez sévères pour que les autres ne voient point en
vous des imperfections qui vous soient inconnues, car vous ne pourriez corriger vos défauts si
vous les ignorez; ce serait bien pire encore si vous les preniez pour des vertus....
On croirait entendre Socrate et son célèbre "Connais-toi toi-même !". Tout est fait, tout
est dit, pour bien faire comprendre à l'impétrant de quelle nature est le travail à faire sur soi
on pourrait dire en soi... Et le Vénérable Maître insiste... (faut-il dire : lourdement ?):
Nul homme, mon cher Frère, ne fait des progrès vers le bien sans la connaissance de
lui-même....

Et de nouveau ce qui a été dit au Premier Grade


Celui qui ne se connait pas encore, n'a aucune idée juste de son origine et de sa des-
tination ; il est sans but, sans règle et n'agit que par l'impulsion dominante des habitudes et des
passions dont il est l'esclave. Soumis à l'influence de tous les objets qui l'environnent, il ne
connaît pas la Tempérance ; il fait toujours trop ou trop peu. Evitez cet écueil, mon cher Frère.
Que votre oeil pénétrant découvre les motifs de vos penchants et de vos désirs; si vous recon-
naissez que vous êtes loin de la route, gardez-vous d'errer plus longtemps dans le désert et
n'oubliez pas qu'il vous faut un asile avant la fin du jour ;....
C'est à dire : avant la mort. Car la vie est comme une journée de travail, et pour Dieu,
"mille ans sont comme un jour"... Au grade d'Apprenti, le Vénérable Maître utilisait l'expres-
sion: "11 ne sait ni d'où il vient ni où il va". Toujours le même enseignement répété... Est-ce
vraiment suffisamment répété ?
mais si la nuit venait à vous surprendre, ne vous découragez pas, et bien loin d'abais-
ser les yeux vers la terre, cherchez au dessus de vous cette Etoile Flamboyante qui pourra seule
diriger votre marche et vous ramener près de vos Frères, dans les avenues de ce Temple....
Rappelons-nous la parole du Christ, quand il disait: "Qui sont ma mère, mes Frères....?".
Mais ici, l'expression "la nuit" peut aussi signifier "la mort". Car la mort, bien souvent,
" surprend "celui qui ne s'y est pas préparé. Il faut alors résolument s'avancer vers la "Claire
Lumière", sans regarder en arrière vers ce (et ceux) que l'on quitte. (Voir à ce sujet les célèbres
livres du Docteur Moody et ceux d' Elisabeth Kilbler-Ross, tout aussi célèbres et instructifs).
Frère Maître des Cérémonies, pour que ce Compagnon puisse se faire connaître en
cette qualité par ses Frères, présentez-le d'abord aux Surveillants de la Loge et à son Parrain.
Le nouveau Compagnon, après s'être fait reconnaître des Surveillants et de son Parrain,
par les signes, attouchements et mots du Grade, est ramené au Vénérable Maître à qui il rend
les signes, attouchements et mots. Le Vénérable Maître lui dit ensuite
V.M. : L'Ordre, vous le savez mon Frère, doit son secours aux indigents ; allez donc vous
présenter au Frère Elémosinaire et vous mettrez dans le tronc des aumônes ce que vous juge-
rez à propos.
54

Mon Frère, placez-vous entre les Surveillants pour y entendre les explications du Grade
que vous venez de recevoir; écoutez-les attentivement et méditez-les sans cesse si vous voulez
faire des progrès dans l'Ordre.
A nouveau, l'expression "sans cesse", comme au Premier Grade. Sans cesse signifie
"jour et nuit". Ce n'est pas une "façon de parler", c'est la réalité du travail sur soi....

Avant de clore les Travaux, le Vénérable Maître lui fait donc écouter les Instructions du
Grade, que voici ci-après :
INSTRUCTIONS
PAR DEMANDES ET RÉPONSES
POUR LE GRADE DE COMPAGNON

PREMIÈRE SECTION

D.- Êtes-vous Compagnon ?


R.- Oui, je le suis.
D.- A quoi le reconnaitrai-je ?
R.- A mes nouveaux signe, attouchement, mots et parole.
D.- Quel est le signe du Compagnon ?
R.- Le pectoral.
D.- Donnez-le moi.
R.- (on donne le signe pectoral en entier)
D.- Donnez-moi l'attouchement.
R.- (on le donne)
D.- Donnez-moi la parole.
R.- Je vous la donnerai comme je l'ai reçue.
D.- Donnez-moi la première lettre, je vous donnerai la seconde.
R.- (on épelle, chacun à son tour le mot BOOZ)
Rappelons encore que si, au Grade d'Apprenti, ce système permettait au questionneur de
prononcer toutes les voyelles et à l'Apprenti toutes les consonnes, au second Grade, chacun
prononce une consonne et une voyelle. La consonne est la charpente matérielle (corporelle) du
mot. La voyelle est le souffle (Rouah en hébreu, le souffle vital) qui donne vie aux consonnes
et permet de les prononcer. Le symbolisme est remarquable : le Compagnon, à ce Grade.
commence à s'élever dans la voie spirituelle et à connaître le souffle divin en lui.
D.- Que signifie cette parole ?
R.- Le Seigneur est ma force.
D.- Quel est le nom d'un Compagnon qui lui sert de mot de reconnaissance ?
R.-

D.- Que signifie ce mot ?


R.- Expert tailleur de pierre.
56

D.- Pourquoi vous a-t-on donné ce nom ?


R.- En mémoire des Giblins, ou habitants de Giblos, qui étaient les plus habiles dans la
coupe des pierres et que Salomon employa pour tailler celles qui devaient entrer dans les fim-
dements du Temple.
Rappelons qu'en Maçonnerie, le "Temple de Salomon à Jérusalem" est symbolique du
"Temple intérieur" du Maçon. Signalons que Gibil était le dieu du feu chez les Babyloniens et
que le mot français gible désigne l'ensemble des briques arrangées dans le four pour être cuites.
D.- Quel est le signe de l'Ordre en Loge ?
R.- La main droite en équerre sur le coeur
D.- Que signifie ce signe ?
R.- a i e les Maçons doivent garder fidèlement, dans leur cœur tous les secrets et mys-
tères de l'Ordre.
Rappelons encore une fois que ce signe se fait, au R.E.R., avec la main droite à plat, en
équerre, le pouce sur la ligne médiane de la poitrine, les autres doigts serrés et allongés. En
aucun cas sur la gauche de la poitrine, les doigts crochus, comme pour arracher le coeur, ceci
étant pratiqué dans un autre Rite, avec un symbolisme différent.
D.- Pourquoi vous êtes-vous fait recevoir Compagnon Maçon ?
R.- Pour apprendre à connaître la lettre G.
D.- Où l'avez-vous vue ?
R.- Au centre de l'Etoile Flamboyante.
D.- Que signifie-t-elle ?
R.- Géométrie ou cinquième des sciences.
Nous avons déjà commenté, en son temps, la lettre G, qui constitue, avons-nous vu. un
mystère au sein de la Maçonnerie. En fait, la réponse "Géométrie" constitue une des multiples
réponses possibles. Nous constatons que c'est cette réponse qui importe au R.E.R. rejoignant
en cela l'enseignement pythagoricien. Et la Gnose, pourrions-nous ajouter...
D.- Où avez-vous été reçu Compagnon ?
R.- A l'entrée du Temple, près de la colonne B qui est du côté du Midi.
C'est en effet là que le nouveau Compagnon prend place après la Cérémonie.
D.- Comment y êtes-vous parvenu ?
R.- Par la porte d'Occident
Souvenons-nous que l'Apprenti travaillait dans le Porche. Le Compagnon est maintenant
entré dans le Temple (mais pas encore dans le Sanctuaire...) Il est entré pal- la Porte d'Occident
et il séjourne près de la colonne B, sous le regard du Premier Surveillant.
D.- Quel travail avez-vous fait pour être reçu ?
R.- J'ai travaillé à polir la pierre brute.
Le travail de l'Apprenti consistait à dégrossir la pierre brute. Nuance...
D.- Que signifie-t-telle ?
R.- L'homme dans l'état d'ignorance et de chaos dont tout est provenu.
Le travail du Maçon est défini par: "Ordo ab chao" (l'Ordre issu du chaos). Cette
recherche constante de l'ordre, dans tout acte de l'homme, de l'empereur au dernier citoyen, a
été l'oeuvre constante de toute la vie de Kong Fu Tseu (Confucius).
57

D.- Sur quoi avez-vous travaillé comme Compagnon ?


R.- Sur la pierre cubique.
D.- Que signifie-t-elle ?
R.- La Ibrce des vertus maçonniques.
D.- Que signifie les quatre angles de la pierre cubique ?
R.- L'universalité de l'Ordre et les quatre parties du monde dans lequel il est répandu.
Nous avons déjà fait remarquer que les Anciens considéraient seulement quatre parties dans
le monde. Pour eux, l'Océanie n'étaient que des îles, non un continent. Remarquons qu'à chaque
pointe de la pierre parfaite (il y en a huit), il y a trois angles s o i t 24 en tout : 2 + 4 6 : la pierre
cubique représente le passage du chaos à l'ordre, la nunsformation de l'Apprenti en Compagnon
fini, capable de faire un chef-d'oeuvre
D.- A quoi sert-elle aux Compagnons ?
R.- Pour aiguiser leurs outils et préparer ceux des Apprentis.
Nous nous souvenons que les outils sont le corps et le mental, qu'il s'agit de transfor-
mer, aiguiser, rendre parfaits, afin de devenir des exemples pour les Apprentis.
D.- Comment avez-vous travaillé sur la pierre cubique ?
R.- Par deux fois trois coups qui sont la batterie de mon grade.
D.- Que signifient les deux fois trois coups ?
R.- La double exactitude avec laqzzelle le Compagnon doit travailler à remplir tous ses devoirs.
Rappelons encore que six (coups) est le symbole de la transformation...
D.- Quels sont les instruments symboliques des Maçons ?
R.- Le compas, l'équerre, le niveau et la perpendiculaire.
D.- Que signifient-ils ?
R.- La droiture de notre coeur, la justesse de notre esprit, la pureté de nos actions et le
respect que nous devons au Grand Architecte de l'Univers.
Encore une fois, i l s'agit du travail sur le cœur (le coeur spirituel, à droite dans la
poitrine), et l'esprit (avec une minuscule) que l'on appelle plutôt l e mental pour éviter toute
confusion, travail qui conduit à la pureté des actions et bien sûr au respect du Grand Architecte
de l'Univers que ce travail permet de connaître.

DEUXIÈME SECTION

D.- Pouvez-vous m'expliquer les circonstances particulières de votre réception ?


R.- Oui, Vénérable Maître.
D.- Pourquoi vous a-t-on interrogé sur l'instruction du grade d'Apprenti, avant de vous
conduire à la Loge des Compagnons ?
R.- Pour s'assurer si par mon application et mon travail, je nzéritais d'être avancé dans
un grade plus élevé.
Il semble bien qu'on "oublie" souvent cette interrogation, avant de recevoir un Apprenti
en Loge de Compagnon... ce qui sous-entend que l'Apprenti n'a peut-être pas étudié l e s
Instructions.., et que le Deuxième Surveillant a peut être pu oublier de les commenter à son
(ses) Apprenti(s)... Si c'est le cas, c'est à coup sûr un "oubli- regrettable et préjudiciable à la
bonne marche du travail de l'Apprenti.
58

D.- Pourquoi avez-vous été conduit en Loge avec votre tablier et les yeux découverts ?
R.- Pour me faire sentir que j'étais déjà sur la bonne voie et que je devais in 'appliquer à
la suivre.
D.- Où avez-vous été placé en entrant en Loge ?
R.- Entre les deux Surveillants que j'ai reconnus pour mes Frères, guides ‘fidèles et vrais
amis.
D.- Qu'ont-ils fait de vous ?
R.- Le Second Surveillant m'a fait faire cinq voyages mystérieux de l'Occident à l'Orient
par le Midi et de l'Orient à l'Occident par le Nord, en ayant la pointe d'une épée nue sur le
cœur

Mais nous savons bien que l'impétrant n'a fait que trois de ces cinq voyages. Nous étu-
dierons l'ensemble des voyages plus tard...
D.- Pourquoi l'épée nue sur le coeur ?
R.- Pour in 'apprendre que je tomberais dans l'obscurité sue ne pratiquais les maximes
qui in 'étaient enseignées
N'est-ce pas encore une fois lumineusement clair ? Les maximes doivent être pratiquées,
faute de quoi, tout cela ne servirait à rien et le Compagnon resterait ou retomberait dans l'obs-
curité dont on l'avait tiré lors de sa réception au grade d'Apprenti... Qui n'avance pas recule,
c'est une loi absolue !

D.- Que vous est-il arrivé ensuite ?


R.- On m'a fait retourner contre l'Occident et l'on mn 'a mis à l'épreuve.
D.- En quoi consistait cette épreuve ?
R.- On m'a fait arracher le voile qui cachait mes propres défauts pour mn 'apprendre à me
connaître moi-même.
Remarquable définition de la célèbre épreuve du miroir. Nous l'avons amplement com-
mentée lors de la Cérémonie. Il s'agit donc bien du "gnwti seauton" s e a u t o n , Connais-
toi toi-même) de Socrate, le Maître des maîtres...
D.- Qu'ont fait ensuite de vous les deux Surveillants ?
R.- Ils mn 'ont fait monter par 3, puis 2, les cinq premières marches de l'escalier du
Temple, mais on m'a fait encore redescendre.
D.- Pourquoi vous les a-t-on fait monter et ensuite redescendre ?
R.- Pour me rapprocher de la Lumière et éprouver ma résignation.
D.- Avez-vous donc aperçu quelque nouvelle Lumière ?
R.- Oui, l'Etoile Flamboyante m'a été montrée dans son éclat avec la lettre G au milieu.
(Remarque : A cet endroit du Rituel, le mot "Lumière", qui apparaît dans la réponse pré-
cédente puis dans la nouvelle question, est écrit avec une minuscule. Nous croyons qu'il s'agit
là d'une petite erreur "de frappe", car la Lumière de l'Etoile Flamboyante est bien le symbole
de LA "Lumière", avec majuscule...)
D.- Que signifie cette lettre ?
R.- J'en connais peu la valeur, mais on mn 'a enseigné qu'elle signifiait <géométrie> ou
la cinquième des sciences auxquelles un bon Maçon doit s'appliquer
Nous avons suffisamment gnosé sur la lettre G, dès le commentaire du Grade d'Apprenti,
ainsi que dans celui-ci, pour y revenir maintenant...
59

D.- Qu'êtes-vous devenu ensuite ?


R.- On in 'a conduit par trois pas maçonniques à l'autel d'Orient où j'ai renouvelé mes
premiers engagements.
D.- Pourquoi ce renouvellement ?
R.- Pour un 'apprendre qu 'il ne suffit pas de prendre de bonnes résolutions, mais qu'il .faut
savoir persister.
N'avons-nous pas relevé ce point à maintes occasions, au risque de lasser ?... mais il est
tellement important ! "Cherchant, Persévérant , Souffrant", i l faut sans cesse se souvenir de
cette trilogie !
D.- Que vous a produit ce renouvellement ?
R.- De nouveaux signes, attouchement, mots et parole par lesquels j'ai été ensuite recon-
nu Compagnon par mes Frères.
Il est intéressant de relever ce terme: "J'ai été reconnu" par mes Frères. Un "Grade"
maçonnique n'est pas une distinction honorifique, ni une marque de pouvoir profane, c'est bien
la reconnaissance par les Frères, du changement perceptible qui s'est opéré dans l'Apprenti,
qui lui vaut d'être reconnu comme Compagnon. Il en sera de même pour la suite, bien enten-
du...

TROISIÈME SECTION

D.- Quelle différence y a-t-il entre le Tapis des Compagnons et celui des Apprentis ?
R.- Aucune autre, si ce n'est la lettre B sur la colonne à la gauche du temple
D.- Pourquoi n'avez-vous pas aperçu plus tôt cette lettre sur la seconde colonne ?
R.- Parce qu'il m 'était défendu d'en approcheu ce qui n'est permis qu'aux Compagnons
et non aux Apprentis qui ne doivent pas chercher à connaître les choses qui sont au dessus de
leur grade.
D.- Combien y a-t-il de colonnes à l'entrée du Temple ?
R.- Deux, en tout semblables, mais seulement désignées par la première lettre du nom qui
leur est attribuée.
D.- Quelle était leur hauteur ?
R.- Dix huit coudées

D.- De quelle hauteur étaient les fûts de ces colonnes ?


R.- Douze coudées.

D.- De quelle hauteur étaient leur chapiteau ?


R.- Près de cinq coudées.
D.- Quelle était la hauteur totale ?
R.- Trente cinq coudées.
D.- Quelle était leur circonférence ?
R.- Douze coudées.

D.- Quelle était leur épaisseur ?


R.- Quatre pouces
60

D.- Pourquoi seulement cette épaisseur ?


R.- Parce qu'elles étaient creuses.
D.- Quel était leur ornement ?
R.- Elles soutenaient des globes sphériques ornés de lys et de grenades.
D.- Quel était leur usage pendant la construction du Temple ?
R.- Elles servaient à renlèrmer les outils de géométrie et le trésor pour payer les ouvriers
suivant leur classe.

D.- Pouvez-vous m'en donner la parfaite explication ?


Je ne le puis, parce qu'elle renferme des mystères qui me sont encore inconnus, quoi-
qu'ils' me soient indiqués par les noms qu'elle portent en Loge.

Nous avons donné toutes ces Questions-Réponses concernant les colonnes, sans les inter-
rompre par des commentaires, puisqu'elles doivent encore rester inconnues. Elles n'ont donc
pas à être expliquées mais doivent inciter les Compagnons à faire leurs propres recherches sur
ce sujet - comme sur tous les autres sujets...
Faisons simplement remarquer qu'il y a là à l'évidence, un jeu de nombres. Nous avions
signalé dès le début des commentaires du Grade d'Apprenti que la Numérologie Sacrée serait
un compagnon de route permanent du Cherchant...

Le symbole de l a Loge de Compagnon

D.- Quel est le symbole de la Loge des Compagnons ?


R.- Une pierre cubique sur laquelle est posée une équerre avec ces mots: " DIRIGIT
OBLIQUA ".
D.- Que signifient ce symbole et l'inscription ?
E.-Le but et la perftction des travaux de l'Ordre.
61

La colonne tronquée est maintenant dépassée. La construction du Temple (intérieur) a


commencé. Il s'en suit que la plus grande rigueur est nécessaire pour que l'édifice s'élève bien
droit vers le ciel (intérieur). Le symbolisme de la "construction du Temple" (intérieur) est par-
fait. On peut maintenant comprendre pourquoi, au Grade d'Apprenti, la colonne tronquée a été
choisie : vraie image de l'Apprenti dont la vie spirituelle est tronquée et donc incomplète (vers
le haut), mais dont la base est solide : tous les éléments sont à pied d'oeuvre, le corps, le men-
tal e t l'Etincelle divine q u i veille e t attend l e démarrage des travaux... A u Grade de
Compagnon, les travaux battent leur plein. On espère seulement qu'ils ne seront pas interrom-
pus parce que le Compagnon aurait envie de musarder. Dans la Voie spirituelle comme pour un
chantier de pierres et de bois, un chantier qui s'arrête est un chantier qui se dégrade : De grands
efforts sont alors nécessaires pour tout remettre en route... On voit combien notre symbolisme
est riche et peut être "pensé" à tous propos.
"Dirigit obliqua" signifie : "Il redresse tout ce qui est oblique" : Parfaite définition du
Compagnon qui sait redresser (en lui-même !) tout ce qui n'est pas encore droit.
D.- Quel âge avez-vous comme Compagnon ?
R.- Cinq ans passés.
D.- Comment avez-vous acquis cet âge ?
R.- En faisant les cinq voyages mystérieux autour des ouvrages et en montant les cinq
premières marches du Temple.
On peut s'étonner que les Instructions passent sous silence le fait que le Vénérable Maître
avait accordé au Candidat de faire seulement trois voyages sur les cinq prévus. Nous ne pour-
rons considérer ce point que plus tard....
N'oublions pas non plus que tous les voyages en Maçonnerie sont qualifiés de "mysté-
rieux". Ce ne sont pas des voyages "matériels" quoiqu'ils consistent en circumambulations
autour de la Loge ( m a i s la Loge symbolise le cosmos tout entier). Ces voyages sont "mys-
térieux" parce qu'ils doivent être effectués en nous-mêmes E t ce que l'on découvre alors est
effectivement mystérieux parce qu'il n'est pas possible de décrire avec des mots ce que l'on
réalise : la Réalité du divin dépasse les facultés du mental et donc du vocabulaire. Quand tout
cela est bien compris, on découvre aussi que la vie sur cette terre est elle-même un voyage mys-
térieux initiatique. Mais peu d'hommes et de femmes s'en rendent compte et beaucoup. à l'heu-
re de la mort (du corps) s'aperçoivent qu'ils ont perdu bien du temps (précieux) en promenades
et en marivaudages inutiles.., et qu'il va falloir par conséquent recommencer le "voyage" en
question...
D.- Que signifie cet âge ?
R.- Que j'ai appris à connaître les cinq ordres d'architecture.
D.- Quels sont-ils ?
R.- le ionique, le dorique, le corinthien, le romain et le composite.
D.- Quels rapports y a-t-il entre les ordres d'architecture et les travaux mystérieux des
Maçons '?
R.- Comme la connaissance des cinq ordres d'architecture est nécessaire à un architec-
te pour exercer son art, de même aussi les Maçons doivent ne pas négliger d'acquérir aucune
des connaissances qui peuvent contribuer à la petfection de leurs travaux.
NOus pouvons être étonnés de voir mentionnés les ordres d'architecture dans ces
Instructions, alors qu'il n'en a aucunement été question lors de la Réception. Ce qui prouve que
l'étude des Instructions est une nécessité absolue.
62

LES ORDRES D'ARCHITECTURE


Au centre, les trois ordres grecs : Dorique, Ionique, Corinthien
À gauche, l'Ordre Toscan ; à droite, l'Ordre Composite

Les ordres d'architecture fondamentaux sont au nombre de trois. Ce sont les trois ordre
grecs dorique, ionique et corinthien. Indépendamment du fait qu'ils sont apparus, historique-
ment, l'un après l'autre, dans le monde grec, ils sont, également, hautement symboliques. En
effet :

l'ordre dorique correspond à la matière (au peuple),


l'ordre ionique correspond à la Connaissance (au roi)
et l'ordre corinthien correspond au divin (à Dieu).
Leurs détails respectifs confirment ce symbolisme : (cf. entre autres : Jules Boucher, La
Symbolique maçonnique, p.101).
La colonne dorique a une hauteur qui équivaut à huit f o i s son diamètre. Nous savons
qu'en numérologie sacrée, le nombre huit symbolise la souffrance. Son fût est orné de vingt
cannelures à arêtes vives. Son chapiteau est rectangulaire et peu élevé: toutes ses proportions
rappellent la matière....
La colonne ionique a sa hauteur qui équivaut à n e u f fois son diamètre. Neuf est le
nombre de la Sagesse (cf. les neuf degrés de la Sagesse de saint Jean de la Croix et des mys-
tiques rhénans) ; son fût est orné de vingt-quatre cannelures séparées par un filet, sans arêtes
vives. C'est le style royal: le roi se doit d'être un Sage...
La colonne corinthienne est la plus fine et la plus belle ; la hauteur de son fût est de dix
fois son diamètre ; le nombre 10 symbolise le retour à l'unité divine. Son fût est souvent lisse
63

(le cercle parfait = Dieu). Son chapiteau est orné de feuilles d'acanthe, plante ornementale
méditerranéenne réputée pour la grande beauté de ses feuilles.
Ce symbolisme se retrouve au château de Versailles, de style ionique (c.à d. royal) alors
que la Chapelle de Versailles est de style corinthien (c.à d. divin). Ce symbolisme fondamen-
tal, en vigueur pendant des siècles nombreux commença à être perdu dès Louis XV (qui était,
rappelons-le, l'arrière petit-fils de Louis X I V et dont le comportement prouve qu'il ignorait
totalement le message symbolique profond de l'oeuvre de son trisaïeul...).
Les quatrième et cinquième ordres sont le composite et le toscan, ordres romains, qui
n'ont pas - et de loin - la profondeur symbolique des trois ordres grecs...
On voit encore combien le Grade de Compagnon jette les bases de toute l'évolution du
Maçon dans sa marche personnelle vers la Sagesse... (voir Annexe 3)
Les Instructions précisent, dans la réponse, que "les Maçons doivent ne pas négliger d'ac-
quérir aucune connaissance qui peuvent contribuer à la perfection de leurs travaux". Or, les
cinq ordres d'architecture sont symboliques des cinq plans généraux du cosmos dont nous
avons déjà parlé. La Voie spirituelle implique donc la connaissance de ces cinq plans fonda-
mentaux, avant d'en connaître le détail qui permet d'arriver au nombre sept. puis au nombre
neuf, des neuf degrés de la Sagesse que l'on retrouve symbolisés sur le trumeau central de
Notre Dame de Paris, dans les bras de Dame Alchimie ou Dame Sagesse...
D.- Avez-vous été payé de votre salaire ?
R.- Oui, Vénérable Maître.
D.- Où avez-vous reçu votre salaire ?
R.- A la colonne B, à la gauche du Temple où s'assemblaient les compagnons pour y
recevoir le leur.

D.- Combien avez-vous reçu ?


R.- Je connais la signification de la lettre B et j'en suis content.
Et le Vénérable Maître termine en s'adressant à tous les Frères

V.M. : Mes Frères, apprenons à nous bien connaître...


N'est-il pas extraordinaire de voir combien le Rituel insiste d'innombrables fois sur cette
injonction fondamentale socratique : "Connais-toi toi-même !". Faut-il que ce soit important
pour chacun de nous !
travaillons sans relâche à polir la pierre brute....
Encore et encore... Et ceci s'adresse à tous les Frères._ même les Maîtres au cas, n'est-
ce pas, où la pierre brute de l'un ou l'autre d'entre nous ne soit pas encore parfaitement polie...
venons souvent contempler l*Etoile Flamboyante, puisque c'est le moyen de parvenir
un jour à connaître les mystères qui nous sont encore voilés.
Nous avons, dans cette étude, soulevé un tout petit coin du voile, en particulier concer-
nant cette fameuse étoile dont la connaissance nous est parvenue depuis la nuit des temps, à
travers les Egyptiens anciens, les Sumériens (réputés avoir été "le peuple antédiluvien" et, plus
près de nous, les Dogons ! A chacun de faire le reste...
Ainsi se terminent les Instructions au Grade de Compagnon.
CONCLUSION

L'auteur a bien conscience que certains de ces commentaires peuvent peut-être avoir "interpellé"
(comme on dit de nos jours) certains lecteurs... On lui accordera cependant qu'il a rigoureusement
"collé" au texte du Rituel tel qu'il nous est fourni par les instances compétentes du Rite. Nous devons
d'ailleurs leur être reconnaissants des efforts constants et persévérants avec lesquels ils sauvegardent le
texte originel qui a été établi par nos Illustres Frères fondateurs.
Il apparaît évident que ce que ceux-ci ont voulu transmettre provenait (manifestement, à nos
yeux) d'une expérience vécue et non d'un raisonnement intellectuel. C'est en cela que réside la haute
valeur du Rite Ecossais Rectifié tel que nous avons la chance de l'avoir reçu sans altérations. Nul, en
effet, ne peut s'arroger le droit de changer quoi que ce soit à un Rituel maçonnique. Ce qui peut éven-
tuellement être amélioré, pour la bonne compréhension des phrases et des mots employés, ce pourrait
être une (prudente) mise à jour du vocabulaire. Car c'est vrai que les mots sont vivants et que leur sens
évolue sans cesse lentement. C'est d'ailleurs pour cette raison que notre vénérable Académie Française
avance avec une prudence extrême dans ses définitions du Dictionnaire... Nous nous devons d'être
aussi prudents que les Académiciens....
Ceci dit, il est absolument certain qu'une mise en pratique sérieuse d e ce Rituel du Rite
Ecossais Rectifié, provoque à coup sûr une évolution et une réalisation spirituelle telle que l'auteur a
tenté de l'exposer e t qui est finalement le but de toute initiation, depuis des millénaires. Car depuis
le néolithique, les initiations qui se tenaient dans des grottes à l'abri des regards et des oreilles indis-
crètes avaient pour seul but d'amener les hommes et les femmes de bonne volonté à un éveil, dans un
premier temps, lequel provoque ensuite un cheminement vers ce que les Chrétiens appellent
Illumination, les Japonais le Satori, les Hindous la Réalisation Divine, etc... Il n'y a jamais eu d'autre
but que celui-là lors des Initiations, quel que soit le peuple, la civilisation, l'époque. La Franc-
Maçonnerie ne fait pas exception à cet effort grandiose: le seul qui vaille pour l'amélioration du genre
humain. Car l'amélioration des conditions matérielles de vie qui ne se fonde pas sur une évolution spi-
rituelle, est vouée à l'échec. Il suffit de regarder les reportages à la télévision pour se rendre compte
que les peuples souriants, détendus, manifestement heureux de vivre, n'ont nul besoin de cuisinières
électriques, de réfrigérateurs, de télévision, ni de bombes atomiques; ils sont au contraire soucieux de
l'environnement, ne blessent pas notre bonne Mère la Terre, ne chassent les animaux que pour leurs
stricts besoins de nourriture, ne connaissent en aucune façon "le plaisir de la chasse", respectent tout
ce qui vit et sont toujours d'un haut niveau spirituel, que nous avons parfois du mal à percevoir, mais
que les chercheurs qui les étudient, finissent par découvrir avec émerveillement.
Si les lecteurs de ces commentaires ont compris ce que l'auteur a tenté de montrer, il sera lar-
gement récompensé de ses efforts. Et que Dieu nous soit en aide !
Mes Bien Aimés Frères, j'ai dit !
ANNEXE I

QUESTIONS POSÉES AU CANDIDAT


DANS LE CABINET DE RÉFLEXION:

Première Question

Quelle est votre croyance en l'existence d'un Dieu créateur et principe


unique de toutes choses ; sur la Providence et sur l'immortalité de rame
humaine ; et que pensez-vous de la religion chrétienne ?

Deuxième Question

Quelle idée vous êtes-vous formée de la vertu considérée dans ses rap-
ports avec Dieu et avec la religion, avec vous-même et avec vos semblables ?

Troisième Question

Quelle est votre opinion sur les vrais besoins des hommes et en quoi
croyez-vous que vous puissiez leur être le plus utile ?
ANNEXE I I

RAPPEL DES MAXIMES


DES DEUX PREMIERS GRADES

Premier Grade:

1) L'homme est limage immortelle de Dieu, mais qui pourra la recon-


naître s'il la défigure lui-même ?
2) Celui qui rougit de la Religion, de la Vertu et de ses Frères, est
indigne de l'estime et de l'amitié des Maçons.
3) Le Maçon dont le cœur ne s'ouvre pas aux besoins et aux malheurs
des hommes est un monstre dans la société des Frères.

Deuxième Grade:

4) L'amour de l'argent, lorsqu'il s'empare de l'homme, dessèche son coeur


et fait tarir en lui la source des plus nobles aspirations. La satisfaction de
nos besoins et de nos appétits matériels seraient-elles l'unique but de notre
travail ici-bas ?
L'insensé voyage toute sa vie sans savoir ni où il va, ni d'où il vient, ni ce
qu'il doit faire.
Mais le Sage se rend compte de tous ses pas, parce qu'il en connaît l'im-
portance et le but.
5) L'homme est naturellement bon, juste et compatissant. Pourquoi est-
il si souvent en contradiction avec lui-même ? Cherchez-en sérieusement la
cause, elle est bien importante à découvrir.
6) L'égoïsme est comme la rouille : il détruit tout ce qu'il y a de plus beau
et de plus pur dans le coeur de l'homme.
70

LES ÉLÉMENTS A U P R E M I E R GRADE

Le FEU au MIDI: Le Feu consume la corruption, mais il dévore l'être


corrompu.
L'EAU au NORD: C'est par la dissolution des choses impures que l'eau
lave et purifie, mais elle recèle des influences funestes et les principes de
la putréfaction.
La TERRE à l'OCCIDENT: Le grain mis en terre y reçoit la vie, mais si
son germe est altéré, la Terre même en accélère la putréfaction.

LES M É TA U X A U D E U X I È M E GRADE

L'ARGENT au NORD : L'Argent a divisé les hommes e t séparé les


Frères. Jetez-le à vos pieds !
Le CUIVRE au MIDI: Mon Frère, ce métal est l'emblème de l'orgueil, de
l'ambition, dont les entraînements dégradent les plus grandes vertus. Jetez-
le à vos pieds !
Le FER à l'OCCIbENT: Mon Frère, le plus utile des métaux est détruit
par la rouille. Jetez-le à vos pieds !

LES PHRASES ET TERMES IMPORTANTS

Au Grade d'Apprenti: CHERCHANT, PERSÉVÉRANT, SOUFFRANT


Au Grade de Compagnon: AVEC UN VRAI DÉSIR, DU COURAGE, ET
DE L'INTELLIGENCE.

"Pénétrez courageusement dans les replis de votre coeur Sondez


jusque dans le plus profond de votre âme pour y trouver la connaissance de
vous-même. Ce travail est pénible, mais il donne la clef de tous les mystères
et conduit au VRAI BONHEUR."

"La plus belle prérogative de l'homme, mon Frère, c'est de pouvoir se


connaître lui-même"

yvco-rt G E a u T o v
gnôti seauton

(Connais-toi toi-même)
Socrate
ANNEXE I I I

Nous avons compris, dès le Grade d'Apprenti, l'importance de la Numérologie Sacrée.


Le Grade de Compagnon nous confirme cette importance. Aussi pensons-nous utile de donner
ici quelques éléments de cette Numérologie Sacrée sans laquelle le Rituel et son enseignement
ne peuvent pas être compris.
La Bible n'enseigne-t-elle pas que : "Dieu a disposé toutes choses avec Nombre, Mesure
et Poids" (Sagesse, X1,20)
Saint Augustin disait : "Méconnaître le sens des Nombres, s'est s'exposer à ne pas com-
prendre une infinité de choses consignées dans l'Ecriture".
Et Joseph de Maistre de renchérir : "Ôtez le Nombre et vous ôtez les arts, les sciences et
1 ' intelligence".
Chez les Grecs, la science des Nombres comportait trois catégories
1) La Logistique, qui était l'arithmétique pour gens d'affaires, "reléguée très bas", disait
Matila Ghika.

2) L'Arithmétique, qui était la théorie des Nombres, pour les philosophes.


3) Enfin l'Arithmologie, qui enseignait la mystique des Nombres.
C'est dans cette dernière catégorie que se situe la Numérologie Sacrée.
Les Grecs avaient une notion aigüe de la valeur intrinsèque des Nombres. Ils parlaient de
"contenance" des Nombres. Le nombre parfait (apt,0tog TEXctog) était celui dont la somme
des diviseurs était égale au nombre lui-même. Ainsi le nombre 6 a pour diviseurs : 1 , 2 , et 3
(1+2+3, 6). De même 28 a pour diviseurs : 1, 2, 4 ,7 , et 14 (1+2+4+7+14 , 28). Ces nombres
sont très rares. Ainsi, après 6 et 28, nous trouvons 496, puis 8128, puis 33 550 336
On comprend tout de suite pourquoi les promotions de l'école pythagoricienne étaient de
28 élèves...

Le plus parfait de tous les nombres est le nombre 6. Car non seulement la somme, mais
aussi la multiplication de ses diviseurs, vaut six: 1+2+3 , I x2x3 6 .
Tous les autres nombres ont la somme de leurs diviseurs soit plus grande soit plus petite
que le nombre lui-même. Ainsi le nombre 8 a pour diviseurs 1, 2, 4. Total : 7 Le nombre huit
"est moins riche" qu'il n'en a l'air. Le nombre 12 par contre, a pour diviseurs: 1, 2, 3, 4, 6.
Total: 16. Le nombre 12 "est plus riche" qu'il n'en a l'air.
Ceci pourrait sembler un pur amusement enfantin. 11 n'en est rien. Car chaque être
humain peut être symbolisé par un nombre. Les êtres humains aussi peuvent être plus riches ou
moins riches qu'il n'en ont l'air. C'est tout le problème - fondamental - de l'ÊTRE et du
PARAÎTRE.

Chez les Grecs toujours, certains Nombres étaient dits "triangulaires", lorsqu'on les
représentaient par des bâtonnets. Là encore, toute une philosophie s'en dégageait : Ainsi

, I
) DIEU
=2 - Total de l'ensemble = 3

=3 i d = 6
) L'HOMME
I = 4 i d I 0 )

Ceci représente la fameuse "décade pythagoricienne", avec laquelle Pythagore expliquait


le monde et l'homme. Ainsi la première ligne représentait Dieu, l'Un, l'Unique, le Tout...
L'ensemble des deux premières lignes représentait l a Manifestation divine, le Ternaire divin.
Les anciens Egyptiens disaient: "Quand Râ a créé le monde, il a d'abord ouvert les deux mains.
En ouvrant les deux mains devant lui, il a créé la Dualité, fondement du Monde manifesté sur
tous les plans (haut/bas, droite/gauche, jour/nuit, mais aussi amour/haine, bonté/méchanceté,
etc...). M a i s lorsque cette Dualité universelle se manifeste, elle apparaîr sous forme
quaternaire : Matin et soir, mais en même temps aube et crépuscule; saison chaude et saison
froide, mais aussi printemps et automne, etc... D'autre part, lorsque Râ ouvre les deux mains
en tendant les bras, il crée en même temps l e Ternaire avec lui-même. Il s'en suit donc que
lorsque Dieu (l'UN) se manifeste, i l apparaît sous forme de Ternaire (La sainte Trinité, la
Trimurti hindoue, etc...)
En résumé, l'UN se manifeste par le Ternaire et la Dualité _fondamentale se manifeste par
le Quaternaire.
Si, clans le triangle de la décade pythagoricienne, nous considérons les deux premières
lignes, nous avons par conséquent "Dieu manifesté", la Trinité. Si nous considérons les troi-
sième et quatrième ligne, nous avons le schéma de l'Homme. En effet, l'hornme est d'une part,
matériel (le 4) et d'autre part, la divinité se trouve en lui-même (le 3) Voilà pourquoi l'homme
est symbolisé par le septenaire, car il comprend en lui le matériel qui est quaternaire et le
Ternaire divin. Total : 7. Dans toutes les traditions, dans toutes les religions, le Nombre 7 est le
nombre de l'homme, qui se subdivise en sept "corps", comme disent les hermétistes, quatre qui
se dissolvent à la mort (qui "meurent": I) le corps physique, 2) le "double éthérique" (le fantô-
me des cimetières), 3) le corps "astral" (sphère des sentiments), 4) le corps mental inférieur
(idéations concrètes). Et trois "corps" qui perdurent et se réincarnent : 5) le corps mental supé-
rieur (idéations abstraites), 6) le "corps" de l'Intuition pure, et 7) le "corps" divin (l'Etincelle
divine en l'homme).
Pour parfaire le symbolisme de ce septenaire, il faut ajouter que - comme nous venons de
le voir par les lignes 3 et 4 de la décade pythagoricienne, l'Etincelle divine en l'homme est tout
naturellement ternaire, puisqu'elle est Dieu manifesté e n l'homme. La totalité de l'échelle
mystique de l'homme est par conséquent de 9 degrés. D'où les "neuf degrés de la Sagesse" de
saint Jean de la Croix et des mystiques rhénans. Et naturellement le nombre neuf qui apparaît
à tous les degrés du Rite Ecossais Rectifié (les 9 Officiers d'une Loge, les neuf Lumières
d'Ordre de la Loge d'Apprenti, etc...etc...). Voici donc le diagramme universellement ensei-
gné par les hermétistes :
73

LE TERNAIRE GÉNÉRAL EN L'HOMME


9
Le Ternaire divin en l'homme (l'Etincelle divine) 8 L ' É t i n c e l l e divine (ternaire) en l'homme
7
Le corps de l'Intuition pure 6
Le corps mental supérieur (idéations abstraites) 5

LE QUATERNAIRE
Le corps mental inférieur (idéations concrètes) 4
Le corps " astral " (la sphère des sentiments) 3
Le double éthérique (le " fantôme des cimetières) 2
Le corps physique I

Le Septenaire partagé en "Quatre et Trois" correspond également, sur le plan religieux,


dans l'enseignement de l'Eglise, aux sept vertus, partagées en quatre vertus cardinales (la
Justice, la Tempérance, la Prudence et la Force, que l'on trouve, dans la cathédrale de Nantes,
entourant le tombeau de François H de Bretagne, père de la célèbre Duchesse Anne, deux fois
reine de France - et trois vertus théologales (la Foi, l'Espérance et la Charité, cette dernière
dans son acception grecque de zaptg, —t-rog). Cette partition du septenaire est souvent repré-
sentée sous forme géométrique par un carré surmonté d•un triangle

A
Le Quaternaire matériel et le Ternaire spirituel

Remarquons encore que la Dualité fondamentale correspond exactement à ce que nous


constatons dans la nature. Celle-ci ne fonctionne pas par l'addition d'unités les unes aux autres,
comme notre raisonnement rationnel le fait couramment. L'Un ouvre les mains et crée la
Dualité: Une cellule de l'embryon se dédouble et donne deux cellules, qui se dédoublent et
donnent quatre cellules, et ainsi de suite. La Nature fonctionne par divisions successives et non
pas par additions. Les Anciens étaient de fins observateurs des processus de notre bonne Mère
la Terre
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En ce qui concerne la Dualité fondamentale, il convient de se souvenir du célèbre Taï-ld


chinois, remarquable symbole universel de l a structure et du fonctionnement intime du
cosmos :

YIN

YANG

Le Taï-ki

On pense généralement que ce symbole est statique. Il n'en est rien : Le point blanc dans
la plage noire est destiné à grossir et remplir toute la plage, à l'exception d'un point qui reste-
ra noir. De même pour la plage blanche. Tout, dans la nature fonctionne ainsi : "Après la pluie,
le beau temps" dit fort bien la Sagesse populaire... En effet, RIEN dans la nature n'est statique.
Tout bouge, tout se transforme en permanence. C'est le jeu éternel de la Dualité. Le Sage ne
peut pas interdire à la Nature de fonctionner selon la loi de la Dualité. Mais il peut se placer au
dessus des lois de la Nature, puisqu'il séjourne dans le plan divin, dans lequel le Temps et
l'Espace n'existent pas.
Lorsque l'homme a maîtrisé ses sept "corps", il a donc gravi sept étapes. La septième étant
triple, quiconque atteint le septenaire atteint ipso facto le novénaire. D'où l'expression "7 et
plus" .... que l'on entend parfois... et qui confirme cet enseignement de la Numérologie Sacrée.
En ce qui concerne les "Neuf degrés de la Sagesse", on pourra se rendre à Notre-Dame
de Paris et admirer l'écusson situé au centre du trumeau du portail central de la façade.
On y admirera Dame SAGESSE (ou Dame Alchimie, ce qui revient au même), les pieds
sur la terre, les cheveux dans les nuages, assise sur son trône et tenant le sceptre de la Sagesse
dans sa main gauche et deux livres dans la droite: un livre ouvert symbolisant l'enseignement
donné à la foule et le livre fermé symbolisant l'enseignement donné au "petit nombre", de ceux
qui sont capables de comprendre... Les Francs-Maçons, comme tous les Initiés des temps pas-
sée, présents et futurs, font (devraient faire... ?) partie de ces derniers... Entre ses jambes,
l'échelle de Sagesse à neuf degrés . Ce qui confirme tout ce que nous venons d'exposer...
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Nous pouvons donc résumer le jeu des Nombres concernant l'être humain
Pour les gens simples, l'homme est double : le corps et l'âme (anima) - (l'homme visible
et l'homme invisible).
Pour les Pères de l'Eglise, l'homme est triple : le corps. l'âme (animus) et l'Esprit en
lui.

Pour les hermétistes, l'homme évolue sur les cinq plans généraux de l a Nature
Physique Emotionnel, Mental, Intuition pure, Divin.
Le plan physique et le plan mental étant doubles, on arrive au Septenaire sacré : Physique
et "Ethérique", Astral (sentiments), Mental Inférieur et mental Supérieur (idéations concrètes
et idéations abstraites), Intuition pure, Divin.
Enfin, le plan divin étant d'essence triple, on en arrive aux neuf degrés de la Sagesse.

DAME ALCHIMIE

Les neuf degrés de la Sagesse à Notre-Dame de Paris


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Rappelons encore, mais sans en faire la démonstration qui dépasserait le cadre de cet
ouvrage, que le nombre six symbolise le passage, la transformation d'un état inférieur en un
état supérieur. C'est un des nombreux sens du Sceau de Salomon ou Etoile de David.
Dépassant le nombre six, on aboutit en effet dans le septenaire sacré. Signalons en passant,
mais sans insister à ce niveau, que le Sceau de Salomon ou Étoile de David, peut être positif et
bénéfique, ou bien négatif et maléfique selon la façon dont les deux triangles sont entrelacés.
Ce que nous étudierons plus tard.

Le Sceau de Salomon ou Etoile de David

Le nombre huit quant à lui, symbolise les tribulations, la souffrance. C'est le nombre
christique par excellence. Le nom-même de Jésus en grec : t y p o u g vaut 888. I l est en effet
"la Grande Ogdoade chrétienne". Dans tous les temples de l'ancienne Egypte on trouvait une
ogdoade de dieux, dirigée par un maître. Jésus est l'Ogdoade chrétienne sous la direction du
Père...

Le Nombre neuf symbolise. lui, la perfection atteinte dans l'action menée. Voilà pourquoi
toutes les ambassades templière, les missions, etc... étaient composées de neuf chevaliers.
Toute l'organisation templière était fondée sur les lois de la Numérologie Sacrée.
Ce bref aperçu sur la Numérologie Sacrée devrait inciter les Compagnons à se plonger
avec ardeur et assiduité dans l'étude des Nombres car paraphrasant Saint Augustin que nous
avons cité, on peut sans se tromper dire que le Maçon qui ne prend pas garde aux Nombres ne
perçoit qu'une infime partie de l'enseignement du Rituel. Faut-il rappeler une fois de plus qu'il
y a neuf Lumières d'Ordre en Loge d'Apprenti et de Compagnon, et neuf Officiers qui dirigent
la Loge...si sept suffisent pour la rendre "juste et parfaite". Confirmation de ce que nous avons
dit du sept et du neuf...
TABLE DES MATIÈRES

Introduction 5

Ouverture de la Loge pour le Grade de Compagnon 7

Clôture de la Loge de Compagnon 1 7

Proclamation pour la Réception d'un Compagnon 1 9

Le Candidat à la porte de la Loge 2 1

Le Candidat est introduit dans la Loge 2 3

Voyages du Candidat

Leçon emblématique donnée au Candidat 3 3

Le Candidat au bas de l'escalier du Temple 3 9

Engagement des Compagnons 4 7

Signes et marques distinctes des Compagnons 4 9

Instructions par demandes et réponses - Première section 5 5


Deuxième section 5 7
Troisième section 5 9

Conclusion 6 5

Annexes 6 7

Table des matières 7 7


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MES NOTES ET REMARQUES ÉVENTUELLES:

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