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Extrait du livre de Marie-Monique Robin, Escadrons de la mort, l'école française, La Découverte,

2008.

« S’appuyant sur le quadrillage du territoire et les techniques de contre-guérilla acquises en


Indochine, la reconquête militaire passe par la dissémination géographique des forces armées et
donc la décentralisation du commandement dans le but de traquer au plus près les « bandes de
hors-la-loi ». « La guerre du bled, écrit l’historien Pierre-Vidal Naquet, plus qu’une guerre de
généraux et de colonels, est une guerre de de capitaines (…) et même une guerre de sous
o ciers et de trou ons (1) ». Résultats : livrés à eux-mêmes sur un bout de territoire, les o ciers
mènent la guerre comme ils l’entendent, c’est-à-dire en s’asseyant le plus souvent sur tous les
principes qui régissent normalement leur « art » : exécution « pour l’exemple » de fuyards ou de
simples suspects, achèvement des blessés, « corvées de bois » (2), assassinats d’otages en
représailles à la mort de soldats, destructions de mechtas (3), égorgement d’un Arabe, histoire
de montrer que le fameux « sourire kabyle » (4), n’est pas l’apanage du FLN ou de venger un
camarade retrouvé massacré « les couilles dans la bouche », selon les mots du général
Chabannes, ou encore largage de prisonniers dans la mer : le 19 août 1956, le jeune rappelé Noël
Favrelière déserte, emmenant avec lui un prisonnier qui devait être jeté du haut d’un hélicoptère
(…)
L’arbitraire de la répression est tel qu’il se retourne bien souvent contre l’armée elle-même, en
alimentant indé niment le cycle répression-rébellion, lequel contribue à étendre l’insurrection bien
plus qu’à la contenir. C’est ainsi que le colonel Bigeard passent deux mois dans le douar Aïn-
Madjar (5) où il prétend avoir abattu vingt-quatre fellaghas. En fait, les « rebelles » étaient de
simple bergers qui n’avaient rien à voir avec l’insurrection. Quelques jours plus tard, dix-neuf
soldats d’infanterie sont massacrés en représailles ».

(1) Simple soldat


(2) Expression pour désigner la pratique de l’exécution sommaire des prisonniers c’est-à-dire
sans procès
(3) Désigne les hameaux en Algérie autrement-dit les groupes d’habitations en milieu rural.
(4) Méthode d'assassinat qui consistait à égorger la victime et qui était employée par des
membres du FLN en Kabylie (région montagneuse du nord de l’Algérie) pendant la guerre
d’Algérie.
(5) Le « Douar » est une division administrative rurale. Aïn-Madjar se situe dans la région de Sétif.

Questions :

1/ Quels sont les exemples dans ce texte qui permettent de conclure que la guerre contre-
insurrectionnelle n’était pas uniquement dirigée contre les combattants du FLN mais
également contre la population ?

2/ Quelle conséquence la guerre contre-insurrectionnelle a t-elle entrainé pour l’armée


française ?

3/ Quelle conclusion ce texte vous permet-il de tirer quant à la nature et à la forme de la


guerre d’Algérie ?
ffi
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