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La préservation de la vie privée de l’enfant en droit

camerounais
Par
MOHO FOPA Éric Aristide
Maître de Conférences de Droit privé
Maître-Assistant CAMES
Université de Dschang

L’enfance est une période très importante du cycle de la vie humaine. Elle constitue la première
étape d’une vie. C’est la période où la personne accède à la vie, découvre la vie et commence à
s’épanouir ou à s’affirmer dans cette vie. Mais, l’enfance est évanescente dans sa conception. Son
caractère furtif ou instable est tributaire de ses différentes figures. Le terme est employé tantôt de
manière collective tantôt de manière individuelle.
Pris collectivement, l’enfance désigne l’ensemble des enfants ou tout simplement la jeunesse.
Non pas cette jeunesse extensive qui va de « 7 à 77 ans », mais la tendre jeunesse ou la tendre enfance.
On parlera ainsi d’enfance joyeuse, d’enfance exploitée, d’enfance maltraitée ou d’enfance
délinquante.
À titre d’individualité, l’enfance va du nouveau-né à la jeune fille ou au jeune garçon, en passant
par l’adolescent et le pubère. À ce niveau, l’enfant est une personne fragile nécessitant constamment
une protection et un encadrement marqué. Il est alors placé sous la garde ou l’influence de ses parents
ou de ses représentants à travers des institutions spécifiques que sont par exemple la tutelle et
l’administration légale.
Pour le juriste, l’enfant correspond parfois au mineur. Dans ce sens, l'article 2 de la Charte
africaine des droits et du bien-être de l’enfant 1 prévoit que l’enfant est « tout être humain âgé de moins
de 18 ans ». Cette disposition va dans le même sens que l’article 1 er de la Convention de New York sur
les droits de l’enfant2 qui précise pour sa part que l'enfant est « tout être humain âgé de moins de 18
ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt ». Au Cameroun, l’enfant est également défini par la
législation comme « toute personne âgée de moins de dix-huit (18) ans » 3. Au regard de ces différents
textes, si la minorité n’est pas établie avant 18 ans, l’enfance prend fin à 18 ans. Autrement dit, dans
les pays concernés par ces instruments internationaux et où la majorité est établie à 18 ans, l’enfance se
confond avec la minorité. On peut notamment citer les cas du Sénégal 4 et de la France5. Par contre, au
Cameroun, tout comme au Tchad où la majorité est fixée à l’âge de 21 ans 4, l’enfance ne saurait
absolument se confondre avec la minorité. On assistera alors à deux cas de figures : les enfants-

1 Cette Charte a été adoptée lors de la 26 e conférence des Chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation de l’Unité
Africaine en juillet 1990. Elle est entrée en vigueur le 29 novembre 1999.
2 La Convention Internationale relative aux droits de l’enfant a été adoptée le 20 novembre 1989 par la résolution
44/25 de l’Assemblée générale des Nations Unies lors de sa quarante-quatrième session. Cette Convention met en avant
quatre principes fondamentaux concernant les enfants : la non-discrimination, l’intérêt supérieur de l’enfant, le droit de
vivre, survivre et se développer ainsi que le respect des opinions de l’enfant.
3 Voir article 3 de la loi n° 2023/009 du 25 juillet 2023 portant Charte de protection des enfants en ligne au
Cameroun. 4 L’article 340 du Code de la famille sénégalais dispose : « à 18 ans accomplis, les personnes de l’un et l’autre
sexe sont majeures et capables de tous les actes de la vie civile ». 5 Voir article 414 du Code civil français.
4 Dans ces deux pays, l’article 388 du Code civil dispose que « le mineur est l'individu de l'un et de l'autre sexe qui n'a
point encore l'âge de vingt et un ans accomplis ».
1
mineurs dont l’âge est inférieur à 18 ans et les mineurs non enfants dont l’âge est comprise entre 18 et
21 ans.
Dans tous les cas, l’enfant implique vulnérabilité et dépendance. Mais cette dépendance, aussi
grande fut-elle, n’empêche pas la reconnaissance d’un certain nombre de droits à son profit. Ces droits,
qui relèvent des droits de l’Homme ou des droits de la personnalité, englobent le droit à la vie privée.
La vie privée désigne le cadre strict d’intimité de chaque personne. C’est tout ce qui dans la vie
d’une personne, ne regarde personne d’autre qu’elle et ses intimes à moins qu’elle ne consente à la
dévoiler5. Elle renvoie ainsi à la sphère d’intimité réservée à chaque individu et protégée contre les
intrusions extérieures, qu’elles proviennent des autres individus ou même de l’État 6. En s’opposant à la
vie publique d’une personne, la vie privée qui est parfois présentée comme le « rempart » ou le «
sanctuaire »7 d’un individu englobe sa vie sentimentale, sa vie conjugale, sa vie familiale, la face
cachée de ses loisirs entre autres.
La vie privée englobe donc l’intimité. Elle recouvre aussi le domaine le plus secret de la
personne, concerne des situations où l'individu est en droit de se croire à l'abri du regard ou de l'écoute
d'autrui, où il peut se livrer à des activités strictement personnelles dans le champ étroit d'un lieu
privé8. En tant que tel, sa protection devient une nécessité de premier ordre. Cette protection est
recherchée tant au plan international qu’au plan national.
Sur le plan international, quelques textes remarquables garantissent la protection de la vie privée.
À titre d’illustration, on peut citer au niveau mondial, la Déclaration universelle des droits de l’Homme
qui prévoit que « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son
domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit
à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes »9. Cette disposition est
presque similaire à celle de l’article 17 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques 10.
La Convention de New York sur les droits de l’enfant précitée va dans le même sens en disposant que
« l’enfant a le droit d’être protégé contre toute immixtion dans sa vie privée, sa famille, son domicile
et sa correspondance, et contre les atteintes illégales à son honneur »13.
Au niveau continental africain, quelques textes d’envergure s’évertuent à garantir la protection de
la vie privée. On peut citer à cet effet la Convention de l’Union Africaine sur la cybersécurité et la
protection des données personnelles11 ainsi que la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.
D’après ce dernier texte, « aucun enfant ne peut être soumis à une ingérence arbitraire ou illégale
dans sa vie privée, sa famille, son foyer ou sa correspondance, ni à des atteintes à son honneur ou à sa
réputation, étant entendu toutefois que les parents gardent le droit d'exercer un contrôle raisonnable
sur la conduite de leur enfant. L'enfant a le droit à la protection de la loi contre de telles ingérences ou
atteintes »15.

5 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2018, v° Vie privée.


6 H. M. Tchabo Sontang, « Le droit à la vie privée à l’ère des TIC au Cameroun », La Revue des Droits de l’Homme n°
17/2020, OpenEdition Journals, p. 1.
7 Idem.
8 M.-T. Feydeau, « L’intimité de la personne », Les Petites Affiches du 1er Juillet 2004, n° 131, p. 39.
9 Voir article 12.
10 Ce texte dispose : « nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son
domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la
protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes » 13 Article 16.
11 adoptée à Malabo, en Guinée Équatoriale, le du 27 juin 2014, lors de la vingt-troisième session ordinaire de la
Conférence de l’Union Africaine. 15 Article 10.
2
Au plan national, quelques textes sont expressément ou implicitement consacrés à la protection
de la vie privée. De manière expresse, la loi n° 2010-012 relative à la cybersécurité et la
cybercriminalité dispose que « toute personne a droit au respect de sa vie privée »12. Cette loi se situe
dans le sillage de la Constitution qui, sans nommément viser la vie privée, évoque, dans son
préambule, la protection des éléments qui la compose à l’instar du domicile et du secret de la
correspondance dont le principe de l’inviolabilité est fermement posé. De même, la loi n° 2023/009 du
25 juillet 2023 précitée prévoit des mesures qui, de manière implicite, garantissent la protection de la
vie privée de l’enfant dans le cyberespace. Elle impose notamment la mise en place par les pouvoirs
publics et le secteur privé, d’un
« cyberespace national plus sécurisé pour les enfants » 13. Pour veiller à la mise en œuvre de toutes ces
mesures de protection, le Code pénal prévoit et réprime les infractions de violation du secret de la
correspondance14, du domicile15 ainsi que les atteintes à l’honneur.
Comme on le voit de ce qui précède, toute personne, même enfant, a une vie privée et peut dès
lors s’en prévaloir. Toutefois, cette vie privée suppose une certaine autonomie et une capacité certaine
pour clairement s’affirmer. Or, l’autonomie et la capacité n’étant a priori pas reconnues aux enfants, la
question de leur vie privée est alors très délicate.
Les raisons de la délicatesse de la vie privée de l’enfant sont variées. On peut ainsi relever le
défaut de discernement suffisant. L’enfant manque d’abord de discernement suffisant pour se
construire lui-même sa propre individualité, et partant, pour avoir une vie privée sereine. Ne sachant
pas toujours distinguer le permis de l’interdit, il est difficile, voire impossible de laisser à l’enfant le
soin de gérer lui-même sa vie privée.
Le lien de dépendance étroit entre l’enfant et les personnes assurant et assumant sa garde ou son
éducation empêche ensuite à l’enfant d’avoir une vie privée complètement autonome. C’est d’ailleurs
pourquoi, en posant le principe de la garantie de la vie privée de l’enfant, la Charte africaine des droits
et du bien-être de l’enfant s’empresse d’y apporter une nuance en ces termes : « aucun enfant ne peut
être soumis à une ingérence arbitraire ou illégale dans sa vie privée (…) étant entendu toutefois que
les parents gardent le droit d'exercer un contrôle raisonnable sur la conduite de leur enfant ». La
fragilité de l’enfant enfin, être malléable à souhait et facilement influençable, ne lui permet pas de
disposer d’une vie privée entière. Cette fragilité est davantage mise à rude épreuve aujourd’hui avec le
développement à outrance des TIC et des activités sur les réseaux sociaux.
Le développement de l’informatique influence en effet grandement la vie privée, tant dans sa
conception que dans son déploiement. Il a été démontré que la vie privée n’est pas une notion naturelle
et figée. Ses contours s’adaptent et évoluent au rythme de l’évolution de la société. Il faut désormais
l’envisager aujourd’hui à l’aune de l’informatique et de ses applications. En effet, « avec le
développement de l’informatique et de ses applications, le domaine traditionnel de la vie privée

12 Article 41.
13 Voir article 11, alinéa 1, notamment.
14 Article 300 du Code pénal : « (1) Est puni d’un emprisonnement de quinze (15) jours à un (1) an et d’une
amende de cinq mille (5.000) à cent mille (100.000) francs ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui, sans
l’autorisation du destinataire, supprime ou ouvre la correspondance d’autrui ».
15 Article 299 du Code pénal : « (1) Est puni d’un emprisonnement de dix (10) jours à un (1) an et d’une amende de
cinq mille (5.000) à cinquante mille (50.000) francs ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui s’introduit ou se
maintient dans le domicile d’autrui contre son gré. (2) Les peines prévues à l’alinéa 1 ci-dessus sont doublées si
l’infraction est commise pendant la nuit ou à l’aide des menaces, violences ou voies de fait. (3) La poursuite ne peut être
exercée que sur plainte de la victime ».
3
s’enrichit chaque jour de nouveaux éléments »16. Il faut y intégrer la prise en considération les données
personnelles ainsi que les multiples activités des citoyens sur Internet. Le concept de vie privée a alors
subi une transformation. Si autrefois il était rigoureusement fondé sur le secret, « maintenant il tend
vers son opposé, la transparence »17. La vie privée s’épanouit à la lumière de l’informatique qui la fait
progressivement sortir de l’ombre. Les enfants se retrouvent très souvent piégés et perdus dans cette
évolution. N’ayant malheureusement pas suffisamment de discernement pour faire la différence entre
ce qu’il faut ou ne faut pas exposer sur les réseaux sociaux, ils se retrouvent piégés par les mauvais
choix qu’ils font et qui contribuent à une exposition à outrance de leur vie privée voire de celle de leurs
proches. En effet, ils sont de plus en plus adeptes des sites de réseau social, de socialisation en ligne,
voir des sites de réseautage social, à travers une surexposition de leur vie personnelle. Ils y ont
tendance à étaler leurs pensées, même les plus intimes, leurs photographies ou vidéos personnelles et
tous les événements de leur vie, sans toujours percevoir le risque auquel cela les expose.
Pourtant, la protection de leur vie privée est fondamentale. C’est pourquoi, il devient nécessaire
de questionner les mécanismes qui la garantissent en droit camerounais.
L’enfant, adulte en miniature ou adulte en devenir, a une vie privée qui est naturellement
fragilisée, du fait de la vulnérabilité et de la délicatesse de son statut. C’est pourquoi, les contours de
cette vie privée doivent être clairement définis. Sa délimitation qui s’établie en prenant en compte le
statut particulier de l’enfant (I) permet un meilleur déploiement de sa protection (II).
I- La délimitation de la vie privée de l’enfant
La vie privée de l’enfant sera considérée en fonction de son âge. Pendant sa prime enfance, il est
évident que celle-ci n’existe que par rapport à ceux qui exercent l’autorité parentale à son égard, c’est-
à-dire en principe ses parents. En grandissant, certains aspects de sa vie privée pourront s’imposer aux
adultes, soit de manière naturelle, soit par l’enfant lui-même. Mais, quoiqu’il en soit, la détermination
de la vie privée de l’enfant repose sur un critère fondamental qui est la prise en compte de son intérêt
supérieur
(A). Toutefois, l’enfant étant naturellement incapable et manquant de discernement, des limites
nécessaires sont prévues afin d’encadrer cette vie privée à sa juste mesure (B).

A- Le critère de détermination de la vie privée de l’enfant : la prise en compte de


son intérêt supérieur

L’intérêt de l’enfant apparaît comme une « formule magique »18. Par cette expression, le Doyen
Carbonnier évoquait, à sa manière, le caractère insaisissable 19 de cette notion, qui est pourtant auréolée
du prestige associé à la protection de la vie privée de l’enfant. L’intérêt de l’enfant est ainsi une notion
aussi bien floue qu’une notion à contenu variable. La loi ou la jurisprudence ne saurait, de manière
objective, définir cet intérêt. L’intérêt de l’enfant va certainement varier en fonction de son âge, de son

16 Voir exposé des motifs de la loi sénégalaise n° 2008-12 du 25 janvier 2008 portant sur la Protection des données à
caractère personnel.
17 C. Vallet, « Le dévoilement de la vie privée sur les sites de réseau social. Des changements significatifs », Droit et
Société n° 80, 2012/1, p. 165.
18 J. Carbonnier, Droit civil, 21e éd., t. 2, La famille, l’enfant, le couple, PUF, 2002, p. 85.
19 Certains auteurs préfèrent plutôt parler de « notion-cadre » (C. Lienhard, Le rôle du juge aux affaires
matrimoniales », Economica, 1985, p. 128), d’autres de « standard » (P. Bonfils et A. Gouttoire, Droit des mineurs, Dalloz,
2008, p. 45). 24 T. Dumortier, « L’intérêt de l’enfant : les ambivalences d’une notion « protectrice » », Journal du Droit
des Jeunes n° 329, 2013/9, p. 16.
4
aptitude, de son degré d’intelligence et du contexte culturel et socioéconomique de sa vie. Malgré cette
flexibilité, on peut tout de même tenter de l’envisager globalement comme ce qui permet le bien-être
de l’enfant. Ainsi, l’administration légale et la tutelle sont nécessaires pour l’enfant parce qu’il y va de
son intérêt.
Dans cette logique, le recours à l’intérêt de l’enfant sera très souvent « destiné à fonder un
arbitrage entre deux revendications opposées, deux droits en conflit, tandis que dans d’autres cas, il
permet de restreindre l’exercice d’un droit » 24. Dans sa fonction arbitrale, l’intérêt de l’enfant pourra
aider à trancher entre les revendications opposées du père et de la mère concernant notamment
l’attribution de la garde de l’enfant ou le droit de visite ou d’hébergement de l’un des parents 20.
De même, l’intérêt de l’enfant sera grandement considéré chaque fois qu’il existera un
antagonisme entre les parents et l’enfant sur des questions relevant de la vie privée de ce dernier. Sa
considération pourra alors aboutir à la restriction d’un droit des parents ou de l’enfant. Dans tous les
cas, il s’agit, en toute circonstance, de préserver l’intérêt supérieur de l’enfant ou son meilleur intérêt,
comme l’exige d’ailleurs la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant 21. Mais, en pratique,
la solution ne sera pas toujours aisée à établir. On peut facilement imaginer des cas complexes. Par
exemple, une fille, jeune enfant qui a conçu à la suite d’un viol dont elle a été victime veut garder son
enfant, contrairement à l’avis de ses parents 22. Vouloir garder son enfant ici relève exclusivement de sa
vie privée. Or, la jeune fille étant encore enfant, le rôle de ses parents dans la délimitation de ce qui
relève de sa vie privée est encore significatif.
Les raisons avancées par chaque partie dans cette circonstance peuvent être nombreuses et toutes
pertinentes. Pour la jeune fille, son souci est de connaître les joies de la maternité et de prendre soin de
son enfant. Pour les parents, il est question d’assurer l’équilibre psychologique de la jeune enfant, de
l’aider à oublier le traumatisme du viol en rompant tout lien avec l’auteur, de lui permettre de suivre
aisément son éducation bref, d’assurer son avenir.
Au regard de cette hypothèse, on se rend compte que de part et d’autre, les raisons avancées vont
dans l’intérêt moral de la jeune enfant. D’aucuns iront même jusqu’à avancer le respect de la dignité de
la jeune fille concernée. Dans cette circonstance, il pourra être utile de considérer l’opinion de la jeune
enfant, surtout si la maternité ne présente pas de danger sanitaire pour son organisme. La liberté
d’expression et d’opinion qui est reconnue à l’enfant par certains textes internationaux 23 peut
efficacement contribuer à la détermination du contenu de la vie privée de l’enfant à travers la prise en
considération de son avis. La liberté d’opinion de l’enfant sera donc considérée à ce niveau comme le
réfèrent sur lequel est délimité la vie privée de l’enfant. L’enfant sera donc à ce niveau, le meilleur juge
de son intérêt. Toutefois, les raisons liées à sa santé physique ou morale pourront primer sur cette
volonté et permettre de faire primer son bien-être au détriment de sa volonté.
Mais, l’intérêt de l’enfant n’est pas monolithique. Il est, au final, plus approprié de parler plutôt des
intérêts de l’enfant. En réalité, plusieurs intérêts peuvent être relevés. On peut citer à titre indicatif, son
intérêt moral, son intérêt matériel et son intérêt familial. La sphère de la vie privée de l’enfant doit

20 Cass. civ. 1ere, 18 mai 2005, pourvoi n° 02-16336.


21 Il ressort de l’article 4. 1 de la Charte que « dans toute action concernant un enfant, entreprise par une quelconque
personne ou autorité, l'intérêt supérieur de l'enfant sera la considération primordiale. »
22 D’après l’article 339 du Code pénal, l’avortement médicalisé n’est pas une infraction au sens de l’article 337 en cas de
viol à condition qu’il soit effectué après attestation du ministère public sur la matérialité des faits.
23 Article 7 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant ; articles 12 et 13 de la Convention Internationale
relative aux droits de l’enfant.
5
alors pouvoir prendre en compte les différents aspects de ses intérêts. Mais, étant donné que ces
intérêts ne coïncident pas forcément, la nécessité de trancher et de faire primer la dignité de l’enfant et
certains intérêts le concernant sur d’autres s’impose en cas de conflit.
L’intérêt matériel et l’intérêt moral de l’enfant sont ceux les plus susceptibles de s’opposer. Bien
qu’étant clairement distincts, ces deux intérêts se recoupent parfois. Il en est ainsi par exemple lorsque
les parents agissent en justice en cessation d’un emploi inconvenant de certains aspects de la vie privée
de l’enfant tout en demandant, au nom de l’enfant, réparation du préjudice subi. Une telle démarche est
certes motivée par un souci de protection de l’enfant, mais la motivation peut aussi provenir du droit de
jouissance légal des parents qui leur permettra de tirer profit de l’indemnité versé à l’enfant.
Lorsque l’intérêt moral et l’intérêt matériel de l’enfant divergent ainsi, on remarque en droit comparé
que les juges français font facilement primer son intérêt moral sur son intérêt matériel ou financier.
Ainsi, lorsqu’une image privée d’un enfant est diffusée par un journaliste essentiellement soucieux de
provoquer l’émotion chez les téléspectateurs, les juges recherchent également si les parents n’ont pas
aussi instrumentalisé le droit à l’image de leur enfant pour quelques profits pécuniaires. Et dans cette
hypothèse justement, le juge a estimé que la condamnation du journaliste à l’euro symbolique était plus
juste24.
B- L’encadrement de la vie privée de l’enfant
La vie privée de l’enfant ne saurait avoir la même substance ou la même vitalité que celle de l’adulte.
En effet, même si reconnaître à l’enfant une vie privée parfois autonome permet de le traiter dans une
certaine mesure comme un adulte en miniature, son statut a du mal à s'affranchir de toute comparaison
avec celui des adultes, car il est forgé par ces derniers, parfois dans leur intérêt. En fonction de son âge
ou même de son manque de discernement, l’enfant ne saurait confectionner comme bon lui semble sa
vie privée. Celle-ci est en général conçue, orientée, bâtie et imposée dans (1) ou en dehors (2) du cadre
familial.
1- L’aménagement par le cadre familial
Les architectes par excellence de la vie privée de l’enfant sont les parents qui assurent sa garde.
L’enfant ne pourra adopter une manière d’être, de vivre, de se vêtir voire un comportement alimentaire
précis que par rapport à la volonté des parents. Cette intrusion des parents va parfois jusqu’au choix
des amis de leur progéniture. L’enfant, à ce niveau, se contentera donc de la vie privée qui sera taillée
sur mesure par les parents, parce que ce sont ces derniers qui décident discrétionnairement des valeurs
devant sous-tendre cette vie privée. Cette marge de manœuvre reconnue aux parents est très souvent
indispensable surtout lorsque les choix privés de l’enfant concernent des aspects très délicats de sa vie.
Il en est ainsi notamment de la question du mariage des enfants. En effet, l’enfant de sexe féminin peut
contracter mariage à partir de 15 ans 25. Mais, à cet âge, il est évident que sa fragilité morale la rende
facilement manipulable et soit de nature à la pousser, dans ces circonstances, vers des choix
inappropriés pour elle. Dès lors, les parents, plus clairvoyants et plus aptes à juger de ce qui est
compatible à l’intérêt de l’enfant, devraient pouvoir significativement influencer ou orienter les choix
de l’enfant. C’est d’ailleurs pourquoi les enfants ne peuvent valablement contracter mariage qu’avec le
consentement de leurs parents26.

24 CA Aix-en-Provence, 12 juin 2014…


25 D’après l’article 52 de l’Ordonnance n° 81-02 du 29 juin 1981, la fille de 15 ans est apte à contracter mariage
contrairement au jeune garçon qui ne peut le faire qu’à partir de 18 ans. Or, à 18 ans, le mineur n’est plus enfant.
26 Article 49 de l’Ordonnance n° 81-02 du 29 Juin 1981 portant organisation de l’état civil et des diverses
dispositions relatives à l’état des personnes physiques. 32 Articles 8 et 9 de la Charte. 33 Article 9. 2 de la Charte.
6
Par ailleurs, certains éléments de la vie privée de l’enfant, telles que les libertés de pensée,
d’association, de conscience et de religion lui sont reconnus par la Charte africaine des droits et du
bienêtre de l’enfant32. Mais, ces libertés ne peuvent pas véritablement être garanties sans l’encadrement
voire l’orientation des parents. Ces derniers doivent alors guider les enfants dans l’exercice de ces
droits. À cet effet, la Charte précitée leur fait obligation de fournir conseils et orientations dans
l'exercice de ces droits d'une façon et dans la mesure compatibles avec l'évolution des capacités et
l'intérêt supérieur de l'enfant33. Ainsi par exemple, il est évident que la manière de penser de l’enfant
dépendra en grande partie de l’éducation reçue de ses parents. La marge de manœuvre ou d’initiative
laissée à l’enfant dans le cadre familial, le niveau intellectuel des parents mis à contribution dans son
éducation ainsi que les moyens d’information mis à sa disposition surtout à la maison comme la
télévision ou l’Internet, sont autant d’éléments de nature à orienter la manière de penser des enfants.
Ceux issus d’une famille où le dialogue avec les parents est libre et où ses opinions sont considérées,
développeront certainement une manière de penser différente de ceux qui vivent dans un cadre familial
hostile à la libre expression des enfants. La liberté religieuse de l’enfant quant à elle ne peut
véritablement s’exprimer qu’à un certain âge. Au regard de cette considération, certains pays ont
aménagé une majorité religieuse de l’enfant anticipée par rapport à l’âge de la majorité civile 27.
- Dans d’autres pays par contre, le choix de la religion de l'enfant relève ainsi des prérogatives de
l'autorité parentale, avec possibilité de conflits entre la volonté du père et celle de la mère. À
titre de droit comparé, il a été décidé en France que rien ne s’opposait à ce que la mère d’une
fillette placée sous assistance éducative puisse faire baptiser son enfant dès lors qu'il n'est pas
démontré que le baptême envisagé serait contraire à l'intérêt de cette dernière 28.
- Le contrôle parental des activités intimes des enfants : restrictions d’accès à certains
programmes ou sites, contrôle des correspondances29…
2- L’aménagement en dehors du cadre familial
- Les limites dans le cadre éducatif
Le droit à l’éducation de l’enfant s’oppose bien souvent au droit à sa vie privée sur certains points. Les
exigences du système éducatif dans lequel l’enfant est inscrit, imposent très souvent des règles qui
empiètent, voire remettent en cause, les aspects de la vie privée de l’enfant. Ces exigences concernent
par exemple le port de l’uniforme, la manière de coiffer, la fourniture à l’établissement scolaire des
données personnelles à caractère médical notamment 30, l’interdiction de faire de la politique ou
d’exprimer certaines opinions en milieu scolaire ou universitaire. On en déduit, au regard de ce qui
précède que le droit à l’Éducation de l’enfant est toujours prioritaire face au droit à la vie privée, à la
liberté de pensée et de religion qui sont gérés au gré des nécessités et urgences de son éducation 38. -
Les limites émanant des pouvoirs publics

27 F. Boulanger, « Autorité parentale et formation religieuse des mineurs (essai comparatif) » : Dr. Famille novembre
2013, n° 11, étude 14.
28 CA Douai, 8 janvier 2013, rapporté par M. Dupuis et autre, Les petites affiches du 4 août 2014, n° 154, p. 6.
29 L’infraction de violation du secret de correspondance de l’article 300 du Code pénal n’existe pas entre parents ou tuteurs
et enfants à charge. Voir notamment R. Assontsa et B. M. Kem Chekem, « Les liens de famille en matière pénale au
Cameroun », Juridis périodique n° 85, janvier-février 2011, p. 102.
30 Les informations liées à l’état de santé de l’enfant peuvent être nécessaires pour l’établissement scolaire dans la
mesure où le personnel peut en avoir besoin pour répondre à des besoins médicaux précis, élaborer éventuellement un plan
d’enseignement individualisé correspondant à l’état de l’enfant ou planifier des interventions en cas d’urgence médicale.
38
Fr. Sudre, Droit international et européen des droits de l’homme, idem, p. 173. 39 Débits de boisson, boîte de nuit, sites
réservés aux adultes…
7
Divers procédés apportant des aménagements à la vie privée de l’enfant sont parfois mis sur pieds par
les pouvoirs publics ou sous leur impulsion. Bien que constituant des limites à la vie de l’enfant, les
mesures adoptées à cet effet visent la protection de son intégrité physique ou morale ainsi que de sa
dignité. Ainsi en est-il des mesures interdisant l’accès des mineurs à certains lieux 39 ou sur certains
sites internet, sous peine de sanction des contrevenants. Relativement à cette dernière mesure, la la loi
n° 2023/009 du 25 juillet 2023 portant Charte de protection des enfants en ligne au Cameroun impose
aux fournisseurs d’accès à Internet de mettre à la disposition des utilisateurs des procédures et des
moyens techniques facilitant le contrôle de l’accès des enfants à Internet. Il est également fait
obligation à ces fournisseurs d’offrir des dispositifs de contrôle parental aux fins de surveiller, filtrer et
bloquer des sites ayant des contenus portant atteinte à la dignité et à l’intégrité des enfants 31. De même,
l’interdiction de la consommation et de la vente des boissons alcoolisées ou du tabac aux enfants sont
sans doute destinés à préserver leur santé physique et mentale du fait de leur fragilité. II- La
protection de la vie privée de l’enfant
Comme tout être humain, l’enfant a droit à la protection de sa vie privée (A), laquelle peut conduire à
l’application des sanctions en cas de nécessité (B).
A- Le droit du mineur à la protection de sa vie privée
La vie privée du mineur est avant tout protégée contre les agissements de ceux qui sont chargés de
l’encadrer au quotidien, c’est-à-dire les parents (1). En plus, cette protection prend une connotation
particulière en matière processuelle (2).
1- La protection générale contre les agissements des parents
Toute personne a droit au respect et à la protection de sa vie privée. À l’évidence, les hypothèses
d’action visant la protection de la vie privée des enfants et des incapables en général, seront rares.
Cette rareté se justifie par ce que leur capacité de revendication reste limitée. De même, les actions en
ce sens dépendent en général de leurs représentants32. Dans tous les cas, face à une intrusion non
justifiée et dommageable dans la vie privée de l’enfant, ses représentants légaux (ou cet enfant lui-
même, une fois la majorité obtenue), peuvent mener des actions en vue d’obtenir la sanction de ces
violations.
Dans cette logique, l’enfant doit être préservée contre les pratiques de ses parents de nature à
nuire à sa propre vie privée. Il en sera ainsi lorsque les parents, adeptes d’une secte ou d’une société
ésotérique, exercent les pratiques relatives à leurs croyances au domicile conjugal, au vu et au su des
enfants. Dans une telle hypothèse, lorsqu’il est établit que de telles pratiques heurtent la sensibilité des
enfants, le juge peut interdire leur exercice en présence de ces derniers. La Cour d’appel de Versailles a
décidé en 2001 dans ce sens en France, à propos d’une mère dont les pratiques sectaires et les réunions
répétées des autres adeptes de cette secte au domicile familial, étaient de nature à influencer
négativement les enfants33. Face cette interdiction, la mère invoqua sa propre vie privée qui empêche le
juge de pouvoir interdire ou restreindre la manifestation de ses convictions religieuses et de lui
interdire de pratiquer collectivement sa religion à tout moment. De même, elle estima que c’est une
atteinte à sa vie privée que de prohiber la réunion des membres de la secte à laquelle elle appartient à
son domicile, car cela porte atteinte à ses libertés fondamentales. Mais, cette argumentation n’a pas
retenue la faveur de la Cour de cassation. D’après cette dernière, il n’y avait pas d’atteinte directe aux

31 Voir article 21.


32 J. Hauser, « Vie privée des incapables : l’image des enfants », note sous Paris, 8 e ch., 14 févr. 2002, RTD Civ. 2002, p.
487.
33 Cour d'appel de Versailles
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droits et libertés fondamentaux de la mère, mais simplement la soumission de l’exercice de ces libertés
à certaines conditions commandées par le seul intérêt des enfants 34. Dès lors, on en déduit que les
libertés fondamentales et la vie privée des parents peuvent être limitées dans leur exercice lorsque la
protection de certains intérêts supérieurs de l’enfant le commande. La vie privée de l'enfant se trouve
ainsi hissée au rang des motifs légitimes de limitation de l'exercice des libertés fondamentales et de la
vie privée des parents44.
Dans cette logique, la vie privée de l’enfant est protégée au détriment de celle du parent assurant sa
garde. Elle l’emporte même sur celle des parents en cas de conflit, lorsque son intérêt moral est en jeu.
Cela traduit à suffisance son autonomie par rapport à celle de ceux qui assurent l’autorité parentale sur
sa personne.
Concernant la diffusion de l’image de l’enfant :
- l'intérêt supérieur de l'enfant conduit à le protéger nonobstant la complaisance de ses parents en
contrôlant plus étroitement les conditions dans lesquelles la divulgation de la vie privée a été utilisée
par les médias.
- Ensuite, l'attitude ambigüe des parents ne saurait être considérée comme une autorisation
donnée pour une intrusion intempestive dans la vie privée de l'enfant, laquelle autorisation doit être
exclusivement expresse.
Illustration : dans les affaires Laurence Ferrari35 et Rachida Dati36 tranchées en 2013, les
juridictions françaises sanctionnent la publication non autorisée de photographies des intéressées
accompagnées de leur enfant, prises à leur insu, dans des activités strictement privées, précisément
pendant les vacances. Le lien entre ces deux affaires provient du comportement antérieur des victimes,
lesquelles s'étaient montrées très complaisantes à l'égard de la presse en leur révélant plusieurs fois des
confidences concernant les enfants. Dans l’affaire Laurence Ferrari notamment, la Cour d’appel de
Versailles indique clairement que l’enfant « a droit au respect de sa vie privée, distincte de celle de ses
parents, en sorte qu'il ne peut être argué ni de telle ou telle attitude des parents à l'égard de la presse
pour restreindre les droits de l'enfant à la protection alors que ce dernier ne remplit, quant à lui,
aucune fonction ou activité publique ».
De là, on en déduit que la notoriété des parents n’est pas celle de leurs enfants. Les divers
tempéraments au principe du respect de la vie privée des personnalités publiques ne doivent pas être
étendus à celui des enfants.
2- La protection particulière en matière processuelle
Le procès de l’enfant doit se dérouler dans la perspective du respect de sa vie privée grâce au
huis clos, et de l’application des mesures de sûreté adaptées à la minorité. Lorsqu’un enfant est
impliqué dans une procédure judiciaire, des mesures particulières sont prévues, tant au plan
international que national, dans le but de préserver sa vie privée. Au plan international, plusieurs règles
ont été adoptées au niveau des Nations unies dans le but de prôner une justice pour enfants,
respectueuses de leurs droits fondamentaux. On peut à cet effet citer les règles de Beijing sur la justice
des mineurs37, les Principes de Riad sur la prévention de la délinquance juvénile 38, les Règles de La

34 Ch. Courtin, L'intérêt de l'enfant et les droits et libertés fondamentaux des parents, Dalloz 2001, Jurisprudence
p. 422. 44 Idem.
35 CA Versailles, 31 octobre 2013.
36 CA Versailles, 12 septembre 2013.
37 Objet de la résolution 40/33 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 29 novembre 1985.
38 Adoptés par l’Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1990.
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Havane sur la protection des mineurs privés de libertés 39, les Règles de Tokyo sur les mesures non
privatives de libertés40. De manière générale, il ressort de ces textes que tout au long de la procédure
pénale notamment, la vie privée de l’enfant est strictement protégée non seulement contre la publicité,
mais aussi contre la qualification pénale et la divulgation de son identité. Ces mesures sont importantes
dans l’intérêt de l’enfant dans la mesure où elles sont destinées à éviter des dommages certains dans sa
vie future41.
Ces exigences ont un écho retentissant en droit camerounais à travers l’imposition, d’ordre
public, du huis clos devant toute juridiction pénale appelée à connaître d’une affaire dans laquelle un
mineur est impliqué. Tout jugement ne respectant pas cette exigence encourt nullité 52. Pour préserver
autant que possible l’intimité du mineur à cette occasion, la liste des personnes pouvant assister aux
débats a été restreinte. Seuls y sont admis, « les parents, tuteur, avocats, représentants des services ou
institutions s’occupant des problèmes de l’enfance et les délégués à la liberté surveillée » 42. Comme on
le constate, en dehors des parents ou des représentants légaux, les autres personnes pouvant être
admises au cours des débats concernant un enfant poursuivi sont des professionnels qui sauront
certainement traiter des informations dévoilées au cours du procès avec circonspection. Dans la même
lancée, les traces du jugement ainsi que l’identité de l’enfant poursuivi sont strictement règlementées,
afin de le protéger. À cet effet, même si le jugement pénal rendu à l’encontre de l’enfant peut être
publié, il ne doit toutefois pas indiquer son nom, même par initiales, et ne doit comporter aucun
renseignement personnel ou familial le concernant 54. Par cette mesure, l’identité de l’enfant est
protégée, ce qui est une garantie de la préservation de son intimité.
La protection de la vie privée du mineur faisant l’objet d’une mesure d’incarcération, est
également assurée. De manière générale, le principe en la matière est celui de la restriction des mesures
de détention et d’incarcération. Toutefois, quand, cela s’avère nécessaire 43, l’enfant est détenu ou
incarcéré dans des conditions exposant le moins sa vie privée. Pour ce faire, le mineur ne peut être
détenu que dans un établissement de rééducation, un quartier spécial d’une prison habilitée à accueillir
les mineurs. À défaut de ces établissements spécialisés, l’enfant peut être détenu dans une prison pour
majeurs, mais dans un cadre séparé de ceux-ci 44. Ces disposions consacrent le principe de la séparation
de l’enfant et de l’adulte en cas de détention ou d’emprisonnement. Dans ces conditions, l’enfant est
préservé de la mauvaise influence des adultes délinquants. Toutefois, il peut être dérogé à cette règle si,
dans l’intérêt supérieur de l’enfant, il est indispensable qu’il reste avec les membres de sa famille
également détenus.

B- Les sanctions en cas d’atteinte à la vie privée du mineur


1- Les sanctions civiles

39 Adoptées par l’Assemblée générale des Nations Unies à travers la résolution 45/113 du 14 décembre 1990.
40 Objet de la résolution 45/110 de l’Assemblée générales des Nations Unies du 14 décembre 1990.
41 Voir S. B. Thierno, « L’examen de l’article 37 de la Convention relative aux droits de l’enfant et des règles et
principes des Nations Unies relatifs à la privation des libertés des enfants en conflit avec la loi », Revue de l’Université de
Moncton, numéro Hors série, 2017, p. 91, https://doi.org/10.7202/1043659ar. 52 Article 720 du Code de procédure pénale.
42 Article 720, alinéa 2 du Code de procédure
pénale. 54 Article 721, alinéa 2 du Code de procédure
pénale.
43 Il en est ainsi notamment en cas d’assassinat, de meurtre ou de coups mortels pour le mineur de douze à quatorze
ans : voir article 704 du Code de procédure pénale. Pour l’enfant de quatorze à dix-huit ans, la détention provisoire peut
être envisagée si elle paraît indispensable.
44 Article 706 du Code de procédure pénale.
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2- Les sanctions pénales

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