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Hydrological Sciences Journal

ISSN: 0262-6667 (Print) 2150-3435 (Online) Journal homepage: www.tandfonline.com/journals/thsj20

Analyse du transport solide en suspension dans le


bassin versant de l'Oued El Hammam (Algérie du
Nord)

Aicha El Mahi, Mohamed Meddi & Jean Paul Bravard

To cite this article: Aicha El Mahi, Mohamed Meddi & Jean Paul Bravard (2012) Analyse du
transport solide en suspension dans le bassin versant de l'Oued El Hammam (Algérie du Nord),
Hydrological Sciences Journal, 57:8, 1642-1661, DOI: 10.1080/02626667.2012.717700

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1642 Hydrological Sciences Journal – Journal des Sciences Hydrologiques, 57(8) 2012

Analyse du transport solide en suspension dans le bassin versant de


l’Oued El Hammam (Algérie du Nord)

Aicha El Mahi1 , Mohamed Meddi2 et Jean Paul Bravard3


1
Laboratoire des sciences et techniques de l’eau, Faculté des sciences et de la technologie, Université de Mascara, Route El Mamounia,
Mascara, Algérie
aicha_mahi@yahoo.fr
2
Ecole Nationale Supérieure d’Hydraulique de Blida, Algérie
3
Université Lumière Lyon 2, Lyon, France

Reçu le 3 février 2010; accepté le 31 janvier 2012; la discussion concernant cet article est ouverte jusqu’au 1er mai 2013

Editeur Z.W. Kundzewicz; Editeur associé Z. Bargaoui

Citation El Mahi, A., Meddi, M., et Bravard, J.-P., 2012. Analyse du transport solide en suspension dans le bassin versant de l’Oued
El Hammam (Algérie du Nord). Hydrological Sciences Journal, 57 (8), 1642–1661.

Résumé Dans les régions semi-arides et arides, caractérisées par des précipitations relativement faibles et souvent
à caractère torrentiel, les facteurs climatiques jouent un rôle primordial dans l’érosion des sols à l’échelle des
versants. La majeure partie de l’exportation des matériaux solides est effectuée par les cours d’eau lors des crues.
La présente étude traite de l’évaluation et de la quantification du transport solide dans le bassin versant de l’Oued
El Hammam, un sous-bassin important de la Macta caractérisé par une forte érosion hydrique. La sensibilité des
roches à l’érosion, l’intensité des précipitations et les perturbations du régime d’écoulement font que le flux des
matières en suspension (MES) transportées par l’Oued El Hammam atteint des valeurs très importantes. L’analyse
du bilan qui règle le processus pluie–ruissellement–transport solide montre de bonnes relations, notamment entre
la lame d’eau écoulée et la quantité de charge solide transportée. Nous présentons des modèles statistiques perme-
ttant de reproduire les flux de MES. Après calage et validation des modèles sur les chroniques mesurées, ils sont
utilisés afin de reconstituer des chroniques de flux de MES non mesurées, à partir de données historiques de débit
et de pluie. L’étude de la relation C–Q à l’échelle de la crue a été modélisée par une fonction puissance Y = aXb ;
une analyse statistique de la constante a et de l’exposant b a été menée afin d’expliquer le comportement de ces
deux paramètres et de mieux comprendre l’aspect aussi bien pratique que théorique des processus.
Mots clés transport solide; fonction puissance; concentration; débit liquide; Oued El Hammam; Algérie

Analysis of sediment transport in the Wadi el Hammam basin, northern Algeria


Abstract In arid and semi-arid areas, characterized by limited and often torrential rainfall, climatic factors play
an essential role in explaining soil loss at the basin scale. Indeed, the largest share of solid materials export occurs
during floods. The present study deals with the evaluation and quantification of sediment transport in the Wadi El
Hammam basin, a large sub-basin of the Macta watershed characterized by strong rates of erosion. The sensitivity
of rocks to erosion, the intensity of rainfall, and the human-induced alterations to the flow regime explain why
the flux of suspended solids (SS) transported by the Wadi El Hammam may reach very high values. The sediment
budget related to the of rainfall–runoff–sediment transport process shows good relationships, especially between
the equivalent discharge (Q) and the quantity of sediment transported (C). Statistical models to reproduce SS flux
are presented. After calibration and validation of models at the measured time scales, they are used to reconstruct
time series of SS flux estimated from historical data of water discharge and rainfall., The relationship C–Q was
modelled at the flood scale and adjusted by a power function Y = aXb ; statistical analysis of the constant a and
exponent b was used to explain the behaviour of these two parameters and lead to a better understanding of the
practical and theoretical aspects of the processes at work in the watershed.
Key words sediment transport; power function; concentration; discharge; Oued El Hammam; Algeria

ISSN 0262-6667 print/ISSN 2150-3435 online


© 2012 IAHS Press
http://dx.doi.org/10.1080/02626667.2012.717700
http://www.tandfonline.com
Analyse du transport solide en suspension 1643

de manière globale, à court et à long terme. Il est donc


1 PROBLEMATIQUE
primordial de comprendre les cycles des apports aux
Les milieux arides et semi-arides sont soumis à cours d’eau et les processus qui affectent les matières
un climat particulier qui fait d’eux des zones frag- qui y sont transportées si l’on veut protéger les ter-
iles et complexes. Ce climat est caractérisé par de res, mais surtout d’éviter l’envasement trop rapide des
longues périodes sèches lors desquelles les cours barrages; l’objectif est aussi de maintenir une bonne
d’eau présentent un débit faible, voire nul, notamment qualité physico-chimique des eaux des rivières.
durant les périodes estivales. Ces périodes sèches sont Dans ce contexte, notre étude porte sur l’analyse
interrompues par de brefs mais violents épisodes plu- des variations des flux de matières en suspension
vieux provoquant de forts lessivages de surface et dans le bassin versant de l’Oued El Hammam, un
d’intenses crues transportant de grandes quantités de sous bassin de l’Oued Macta situé dans une zone
matières solides. La quantification des matières trans- caractérisée par un climat agressif qui s’applique à
portées par les cours d’eau est une tâche délicate à des terrains particulièrement érodables (Morsli et al.
cause du caractère irrégulier du régime hydrologique 2004). Cette approche est basée sur l’exploitation
et du manque de données du aux difficultés inhérentes d’un nombre important de mesures des concentra-
à des prélèvements effectués au cours de crues vio- tions et des débits liquides, effectuées par l’Agence
lentes et brèves. Face à ce manque de données, il con- Nationale des Ressources Hydrauliques (ANRH). Ces
vient de développer des outils permettant de simuler données instantanées ont permis d’établir des corréla-
de longues chroniques réalistes, afin de tester et de tions entre débits et concentrations et ont permis de
valider différentes règles de gestion et de quantifier proposer une fonction reliant la concentration au débit
leurs effets sur de longues périodes d’utilisation. liquide. Cette relation permet d’estimer les valeurs
De nombreux travaux menés sur l’érosion en de la charge solide en cas de manque d’information.
Algérie ont montré que les sols sont particulièrement L’objectif de cette étude est de quantifier et de mod-
sensibles au ruissellement et à l’érosion (Tixeront éliser le flux de sédiments en suspension transportés
1960, Demmak 1982, Meddi 1992, 1999, Roose et al. par l’Oued El Hamman, bassin peu étudié jusqu’à
1999, Chebbani et al. 1999, Terfous et al. 2001, présent, et d’y vérifier la validité des modèles déjà
Bouanani 2004, Achite et al. 2005, 2007, Meguenni et appliqués dans d’autres bassins versants maghrébins.
Remini 2008). Outre la grande sensibilité des roches
à l’érosion, les fortes variations pluviométriques et
2 AIRE D’ETUDE
hydrologiques, la présence d’un relief accidenté et
la pauvreté de la végétation constituent des condi- Le bassin versant de l’Oued El Hammam est situé
tions favorables à l’entraînement et au transport des au Nord-Ouest de l’Algérie. D’une superficie de
matériaux (Gartet et al. 2005). Les transports solides 8348 km2 , il appartient à l’ensemble des bassins
représentent une contrainte pour la plupart des cours côtiers oranais et plus particulièrement au grand
d’eau équipés de barrages. La sédimentation impor- bassin de la Macta (Fig. 1). Le bassin de l’Oued El-
tante dans les retenues a conduit à leur envasement Hammam, situé sur le flanc nord des hautes plaines
progressif (Remini 1997, Bouvard 2004). En Algérie, oranaises, présente une forme allongée et son alti-
les études montrent que dans les retenues de 57 grands tude moyenne est de 790 m. Si environ 65% de la
barrages, 45 millions de m3 de matériaux se déposent superficie du bassin de l’Oued El Hammam se situe
en moyenne chaque année, ce qui représente une en-dessous de 1000 m, 3,6% sont à plus de 1200 m,
perte de capacité annuelle égale à 0,7% de la capac- le point culminant dépassant les 1400 m à proximité
ité totale. Le volume de vase estimé en 2002 était de la confluence de la Macta (Fig. 2).
0,9 × 109 m3 , soit un taux cumulé de comblement Les monts de Beni Chougrane (932 m) occupent
de 17% (Remini 2008). Le transport solide constitue une bonne partie de la zone moyenne du bassin ver-
donc, de par son importance, un problème majeur en sant. Celui-ci remonte, à l’est, jusqu’aux Monts de
Algérie, car le taux d’érosion spécifique atteint des Saïda (1201 m au Djebel Tiffrit) et, au Sud, jusqu’aux
valeurs dépassant les 2000 t km-2 an-1 (Meguenni et Monts de Dhaya et jusqu’aux hauteurs de la bordure
Remini 2008). Face à de graves pénuries d’eau, à un septentrionale des hauts plateaux qui séparent le ter-
envasement précoce des barrages et à une dégradation rain d’étude de la dépression du Chott Ech Chergui
croissante de la qualité des eaux, il apparaît intéres- (Meddi et al. 2009).
sant d’améliorer la gestion des sédiments à l’échelle L’Oued El Hammam prend sa source à 16 km
du bassin versant. Celle-ci doit être étudiée et définie au sud-ouest de Ras Elma et parcourt une distance
1644 Aicha El Mahi et al.

Fig. 1 Situation du bassin versant de l’Oued El Hammam dans l’ensemble des bassins versants algériens.

Fig. 2 Courbe hypsométrique et répartition altimétrique du bassin versant de l’Oued El Hammam.

de 175,5 km selon une direction sud-est–nord-ouest. L’Oued El Hammam est barré en deux points
Le débit de l’Oued El Hammam est régularisé par situés dans le sillon sud-tellien, une région de tec-
les trois barrages de Fergoug, Bouhanifia et Ouizert tonique complexe où la sédimentation n’a donné que
(Fig. 1). Les travaux effectués sur la quantification de des roches imperméables et compressibles (argiles
l’envasement des barrages en Algérie montrent l’état et marnes), ou très perméables et peu cohérentes, à
sérieux des deux réservoirs de Fergoug et Bouhanifia, l’exception de quelques bancs durs (grès, poudingues
qui présentent respectivement des pourcentages de et sables plus ou moins cimentés) dans la bordure
perte de volume utile de 61% et 42% (Bessenasse nord (Monts de Beni Chougrane). On constate ici
et al. 2003). la prédominance de marnes de couleur noire, grise
Analyse du transport solide en suspension 1645

et jaune ocre (quand elles sont sableuses). La bor- En effet, environ 46% des terres sont couvertes de
dure orientale (Monts de Saida) est constituée de grandes cultures; ces cultures sont temporaires, dis-
dolomies surmontant des calcaires. Au centre de la continues et ne protègent pas efficacement le sol. Le
plaine de Ghriss, le remplissage est formé d’argiles labour favorise cependant l’infiltration et constitue un
et de marnes gris vert. Le Sud du bassin (Monts de moyen de lutte anti-érosive lorsqu’il n’est pas effec-
Dhaya) est formé de marnes et de grès reposant sur tué dans le sens de la pente. Finalement les terrains
un socle rigide qui s’étend des Monts de Tlemcen à de parcours, les maquis et les terrains définitivement
ceux de Saida. improductifs occupent le reste du bassin (Fig. 3).
Le climat régnant sur le bassin, typiquement
semi-aride, avec une moyenne de précipitations de
280 mm, est caractérisé par: 3 METHODOLOGIE
– la diminution de la pluviométrie du Nord au Sud Cette étude porte sur les données de la station de
(350 à 150 mm); Trois Rivières qui se situe à l’amont du barrage
– l’irrégularité des précipitations saisonnières; et de Bouhanifia. L’Oued El Hammam a trois grands
– une longue période de sécheresse estivale. affluents: l’Oued Hounet, l’Oued Melrir et l’Oued
Sahouat (Fig. 1). Le choix de la station de Trois
Les variations pluviométriques sont particulière-
Rivières, située à la confluence des trois branches
ment contrastées, tant du point de vue intra-annuel
principales, a été fondé (a) sur la disponibilité des
qu’interannuel, avec des années de sécheresse sévère.
données instantanées de débits liquides et débits
Le régime hydrologique de l’oued à la station de Trois
solides obtenues auprès de l’Agence Nationale des
Rivières est caractérisé par son extrême irrégularité,
Ressources Hydrauliques (ANRH), (b) sur le fait que
à la fois spatiale et temporelle, par des hautes eaux
les apports hydriques sont limités à l’aval, de sorte
d’automne, par un hiver et un printemps à écoule-
que cette station est représentative de l’ensemble du
ment modéré et par un étiage estival très prononcé
bassin, et (c) à la qualité des données liée à son bon
(Meddi et al. 2009). Les débits minimaux varient de
fonctionnement.
0 à 2,5 m3 /s; les débits moyens journaliers de crue
Les débits solides ont été obtenus à partir
dépassent fréquemment les 200 m3 /s, et les débits
des valeurs instantanées des débits liquides (Ql ),
maximaux de crue atteignent 600 m3 /s. Les débits
exprimées en m3 /s, et de la concentration des
horaires ont atteint 1400 m3 /s en octobre 1966 (188 L
matières en suspension (g/L). La méthode de mesure
s-1 km-2 ), 564 m3 /s en octobre 1986 (75,8 L s-1 km-2 ),
du débit solide consiste à prélever des échantillons
892 m3 /s (120 L s-1 km-2 ) en octobre 1990 (Meddi
d’eau depuis les rives de l’oued au moyen d’un con-
et al. 2009).
teneur de 50 cL. La boue recueillie sur un papier filtre
La couverture forestière actuelle du bassin ver-
est pesée après séchage à l’étuve à 105◦ C pendant
sant de l’Oued El Hammam révèle une modifica-
30 minutes. On détermine ensuite la charge corre-
tion sensible par rapport à la couverture représentée
spondant à un litre d’eau prélevé, ce qui établit la
sur les cartes topographiques anciennes. La plupart
concentration, exprimée en g/L. La fréquence des
des surfaces boisées actuelles ne sont composées
prélèvements dépend de la variation de la hauteur
que d’une formation très dégradée, que l’imagerie
d’eau dans l’oued. En période de crue, un échantil-
représente avec une texture grossière et irrégulière.
lon a été prélevé à chaque variation de 10 cm de la
C’est généralement sur les versants tournés vers le
hauteur d’eau au limnimètre. En période normale, le
Nord que sont présentes ces tâches de verdure. Les
prélèvement a été effectué une fois tous les deux jours
espèces dominantes sont le chêne et le pin d’Alep.
(Bouanani 2004).
La densité forestière a diminué ces dernières années
Le débit solide est calculé grâce à la formule:
suite à l’action anthropique et aux incendies. Cette
dégradation écologique, également liée aux condi-
tions hydroclimatiques, a favorisé plus ou moins Qs = QC (1)
fortement les risques d’érosion et de ruissellement
à l’échelle du bassin (Mazour et Roose 2002). Une où Qs est le débit solide en suspension (kg/s); C est la
arboriculture riche domine sur les riches terrasses que concentration (g/L); et Q est le débit liquide (m3 /s).
l’on trouve dans la vallée, les arbres rustiques tels que En réalité, la masse des sédiments de l’échantillon
l’amandier, le figuier et l’olivier occupant des sur- ne représente pas la totalité des matériaux mis en
faces importantes. Toutefois, le bassin de l’Oued El mouvement par la dynamique globale affectant le
Hammam est utilisé en majorité à des fins agricoles. bassin versant. Les transports solides spécifiques issus
1646 Aicha El Mahi et al.

Fig. 3 Occupation du sol du bassin versant de l’Oued El Hammam.

de ces concentrations ne tiennent pas compte des 3.1 Relation débits liquides–transports solides
charriages de fond; des transports en solution; des
La relation entre l’écoulement et le débit solide
variations de la teneur en matières en suspension
dépend de plusieurs paramètres. Toutefois, s’il est
d’un point à l’autre dans la section mouillée, par-
difficile d’établir une formule reliant les différentes
ticulièrement durant les périodes de crue qui ren-
variables, du moins peut-on, en utilisant les méthodes
dent les prélèvements dangereux pour l’observateur;
de corrélation, espérer établir une expression mathé-
enfin des variations de la teneur en suspension selon
matique qui mette en évidence la relation entre ces
les changements verticaux et horizontaux du point
deux phénomènes. Si on essaye de rattacher le débit
d’échantillonnage en période d’écoulement normal
liquide au débit solide, on est amené à utiliser le coef-
(Touat 1989).
ficient mensuel d’écoulement de Pardé, c’est-à-dire
Ainsi, la charge solide mesurée représente-t-elle
le rapport entre l’écoulement de chaque mois consid-
les éléments fins et très fins véhiculés en suspen-
éré et l’écoulement annuel moyen (Fournier et Hénin
sion par l’Oued El Hammam et ses affluents. Ces
1968).
matériaux proviennent en forte proportion des zones
Il est important de détailler les données util-
d’apport constituées par les formations argileuses et
isées, la période d’enregistrement ainsi que les out-
marneuses des Monts de Beni-Chougrane, et par les
ils qui nous permettront d’évaluer et de comparer
formations gréseuses et de sables fins des Monts de
la qualité des modélisations. Les données utilisées
Dhaya.
dans cette partie sont celles des débits solides et
Notre base de données est issue d’une série
liquides instantanés, les débits (solides et liquides)
de 12 années (1993–2005) comportant 3993 valeurs
moyens mensuels, les cumuls de pluies mensu-
de hauteurs d’eau, de débits liquides instantanés
elles ainsi que les pluies journalières maximales de
et de concentration en matière en suspension. En
chaque mois disponibles sur une période commune,
outre, nous disposons des séries de débits liquides
à savoir 1993–2005. Ces données serviront à caler
journaliers et de précipitations mensuelles sur la péri-
les paramètres des modèles, afin qu’ils reproduisent
ode 1973–2006.
Analyse du transport solide en suspension 1647

Tableau 1 Répartition des données pour le calage et la Il faut signaler que ce critère de validation à
validation en vue de la paramétrisation des modèles. été utilisé par de nombreux auteurs en modélisation
Période de calage Période de validation hydrologique (Servat et Dezetter 1988, Benkaci Ali et
Decemie 2004, Mano 2008).
Début Fin Début Fin
1993/94 2000/01 2001/02 2004/05
3.3 Modélisation par régression multiple
au mieux les flux ou débits solides mesurés (période Lorsque l’on dispose de données supplémentaires,
de calage). Une partie de ces données devra néan- comme la pluie, l’estimation des flux peut être
moins être conservée hors de la période de calage afin améliorée à l’aide d’une régression multiple. Le flux
de vérifier l’adéquation du modèle calé avec les don- modélisé prend alors la forme:
nées mesurées (période de validation). Il faut signaler
que le choix de la période de validation nécessite de 
n
bien inclure les années de fort transport solide (années F mod = a i Xi + b (4)
2001–2002) et celles de faibles à moyen transport. Les i=1
périodes de calage et de validation du modèle sont
résumées dans le Tableau 1. où F mod est le flux mensuel modélisé; les Xi sont les
n variables explicatives du modèle; ai sont les coef-
ficients de régression multiple; et b est la constante
3.2 Critères d’évaluation pour les modèles du modèle. Ces paramètres sont calés sur un critère
utilisés des moindres carrés calculé sur les flux mesurés et
3.2.1 L’écart arithmétique moyen (EAM) modélisés.
Ce pourcentage prend en compte les écarts entre Dans le cas présent, les variables explicatives
flux modélisés et flux mesurés. Un modèle représen- utilisées sont: le débit moyen mensuel et son carré
tant parfaitement les données mesurées présentera un (Qmoy et Q2moy ), le cumul de pluie liquide mensuelle,
EAM égal à 0: celui du mois précédent et leur carré respectif (Pm ,
2,P 2
Pm m-1, Pm−1 ), ainsi que les pluies journalières max-

n imales et leur carré (Pj,max , Pj2max ). Les carrés des
|Qmes (i) − Q mod (i)| variables sont introduits afin de prendre en compte les
i=1
EAM = 100 non linéarités des relations entre les flux de sédiments

n
Qmes (i) (2) et les débits ou les pluies (Meddi 1992, Mano 2008).
i=1 La pluie au mois m – 1 est utilisée afin de prendre en
(EAM ∈ [0, +∞[) compte l’état du bassin versant le mois précédent.
Toutes les variables explicatives ne sont
où Qmes est le débit mesuré, et Qmod est le débit cependant pas forcément nécessaires. Une forte
modélisé. corrélation entre deux variables explicatives peut
rendre l’une d’elles inutile, voire pénalisante dans le
3.2.2 Le critère de Nash (NS) (Nash et modèle. L’algorithme de sélection ascendante pas à
Sutcliffe 1970) Il permet d’évaluer l’amélioration pas permet d’éviter d’introduire ce type de variable:
apportée par le modèle utilisé par rapport à un modèle – Etape 1: La variable explicative la mieux corrélée
de référence, en général l’estimateur de la moyenne. avec la variable à expliquer est introduite.
Si NS = 1, le modèle représente parfaitement les – Etape 2: Parmi les variables restantes, on cherche
données. Lorsque NS < 0, le modèle testé est un la plus utile, c’est-à-dire celle qui a le plus grand
moins bon estimateur des données mesurées que leur coefficient de corrélation partielle avec la variable
moyenne: à expliquer, compte tenu des variables explica-
tives déjà retenues. On teste alors sa p-value, qui

n
permet de déterminer si la différence observée
(Qmes (i) − Q mod (i))2
i=1 entre le modèle, avec ou sans cette nouvelle vari-
NS = 1 − n 
 2 able, est statistiquement significative, c’est-à-dire
Qmes (i) − Q mod (i) (3)
avec une faible chance d’être due au hasard. Le
i=1
plus souvent, le seuil en dessous duquel cette
(NS ∈ ]−∞, 1]) différence est significative est fixé à 0,05. Il
1648 Aicha El Mahi et al.

faut également vérifier que l’introduction de cette 4 RESULTATS ET DISCUSSION


variable ne rend pas inutile une autre variable
4.1 Régime hydro-pluviométrique
précédemment introduite.
La quantité de pluie reçue est un facteur primordial,
On recommence ensuite l’étape 2 jusqu’à épuisement mais non exclusif, du ruissellement et du transport
des variables explicatives. solide. La mobilisation des matériaux sur les versants
est étroitement liée à la façon dont sont réparties les
précipitations à la surface du bassin versant, à leur
3.4 Le modèle «rating-curve» intensité, à l’importance relative des diverses com-
La recherche de modèles reliant le flux des matières posantes de l’écoulement (ruissellement superficiel,
en suspension en transit à l’écoulement dans dif- écoulement souterrain), à la diversité des matéri-
férents bassins mondiaux a fait l’objet de multi- aux, en taille et en nature. Elle est favorisée par les
ples études qui permettent de déterminer quelques fortes pentes et l’absence de couvert végétal pro-
principes de comportement de ces paramètres tecteur. L’étude des évolutions interannuelles et intra-
(Dickinson 1981, Walling et Webb 1981, Demmak annuelles du régime pluviométrique s’avère indis-
1982, 1984, Avoine 1986, Van Wijngaarden 1999, pensable pour définir le comportement hydrologique
Restrepo et Kjerfve 2000, Rondeau et al. 2000, du cours d’eau. Le graphique sur lequel ont été
Picouet et al. 2001, Serrat 1999, Owens et Walling portées les distributions des débits mensuels et des
2002, Megnounif et al. 2003). Il s’agit des courbes de précipitations mensuelles calculées sur la période
transport sédimentaire, «rating curves», utilisées pour 1973–2006 (Fig. 4), montre la variation saisonnière de
estimer les concentrations et les flux de MES à partir ces deux variables. Il apparaît qu’à l’échelle saison-
des seules mesures de débit. Des diverses méthodes nière le régime hydrologique est très irrégulier: il
développées pour définir ces courbes de transport se calque dans ses grandes lignes sur celui des
sédimentaire, les régressions de type puissance restent précipitations, mais la concordance entre ces deux
les plus courantes pour décrire les relations entre le phénomènes est plus ou moins influencée par le rôle
débit liquide et la concentration ou le débit solide important de la lithologie. La présence de relief kars-
Qs et le débit liquide Q, exprimé soit sous la forme tique (Monts de Saida et Dhaya) permet aux circu-
des précipitations, soit sous la forme de l’écoulement lations d’eaux souterraines de soutenir l’écoulement
(Soutter et al. 2007): superficiel (rétention et restitution souterraine). D’une
façon générale, les débits moyens mensuels connais-
sent un accroissement pendant les saisons humides
Qs = aQb (5) d’automne, d’hiver et de printemps (mois de forte plu-
viosité), puis une diminution durant les mois secs.
où Qs est le débit solide en suspension (kg/s); Q est Les débits les plus soutenus sont en effet observés
le débit liquide (m3 /s); et a et b sont des coefficients au cours des mois de septembre, octobre, novembre
empiriques. et mars, liés généralement aux pluies automnales.

(a) (b)

Fig. 4 Distribution des précipitations mensuelles (a) et des débits mensuels (b) dans le bassin versant de l’Oued El Hammam
pour la période 1973–2006.
Analyse du transport solide en suspension 1649

En effet 43% en moyenne des cumuls annuels de sèche sur le plan climatique, mais humide si l’on con-
pluie sont observés au cours de ces quatre mois (Fig. sidère l’hydrologie de l’Oued El-Hammam puisque
4(a)). L’été est en général caractérisé par des étiages les débits journaliers ne tombent pas au dessous
sévères au cours des mois de juin, juillet et août (Fig. de 1,16 m3 /s. Cette distorsion est vraisemblable-
4(b)). Bien que la saison d’hiver présente des cumuls ment justifiée par la forte pluviométrie du printemps
de pluie importants (32% des cumuls annuels), les (1995/96) qui a probablement permis une bonne ali-
débits moyens mensuels ne sont pas aussi soutenus mentation de l’oued et la recharge des nappes souter-
qu’à l’automne. Ceci peut être expliqué par le fait raines alors que les précipitations ont été inexistantes
que les pluies automnales se présentent généralement à l’automne 1996. Les nappes permettent, grâce à
sous forme d’orages, générant des cumuls de pluie la lithologie de la région, de soutenir l’écoulement
élevés et des crues violentes et soudaines. En cette superficiel.
saison, le sol sec est favorable au ruissellement super- L’examen des données journalières de débit
ficiel, tandis que l’infiltration est plus importante et le révèle une petite crue de quatre jours au mois de juin
coefficient d’écoulement plus faible en hiver. 1997 (débit journalier de 8,22 m3 /s) alors que le plu-
En ce qui concerne la variabilité interannuelle, viomètre de la station n’a enregistré aucune pluie.
la Fig. 5 montre la forte irrégularité du régime plu- Cette poussée de débit pourrait être expliquée par des
viométrique et du régime hydrométrique, indiquée orages à proximité, mais les données pluviométriques
aussi par la séquence des débits journaliers de deux des stations situées à proximité et même de toutes les
années, l’une excédentaire (1995/96), l’autre défici- stations du bassin, n’enregistrent aucune précipitation
taire (1996/97) (Fig. 6). La variabilité interannuelle sauf aux deux stations de Merine (9,1 mm) et de Sid
semble plus importante pour les débits, le rapport Ahmed (3,6 mm). Une explication plus plausible est
entre une année humide et une année sèche pouvant un lâcher au barrage de Ouizert, destiné à soutenir
atteindre une valeur proche de 8, que pour les cumuls le débit du cours aval de l’Oued El-Hammam. Ce
annuels de pluie, qui ne varient que dans un rap- barrage a été achevé en 1986. Sa capacité est de
port de 1 à 3. En d’autres termes, l’existence d’une 100 hm3 . Du fait de sa taille, des pertes par évapo-
année climatiquement humide n’implique pas forcé- ration qu’il génère (évaluées à 4 hm3 /an en moyenne)
ment que cette année soit hydrologiquement abon- et de la modestie de son alimentation au cours des
dante et vice versa, car plusieurs facteurs agissent sur dernières décennies (de l’ordre de 22 hm3 /an en
l’écoulement. La présence des trois barrages dans la moyenne sur la période 1987–2002), il est susceptible
région d’étude influence très certainement les écoule- d’influencer le régime de l’Oued Sahouet (Benfetta
ments. Il faut aussi tenir compte de la lithologie, qui et Remini 2008, Meddi et al. 2009). Toutefois ce
ne varie pas, et de l’état des sols cultivés qui peut barrage n’a pas d’effet considérable sur les quan-
varier au sein d’une année et d’une année sur l’autre; tités de charge solide transportées par l’Oued El
en effet 46% de la superficie du bassin étudié sont en Hammam, car la présence en forte proportion des cal-
grande culture. Ainsi l’année 1996/97 est une année caires dolomitiques, qui sont des formations plus ou

Fig. 5 Evolution annuelle de la pluviométrie et du débit liquide.


1650 Aicha El Mahi et al.

pluie (mm)
20
40
60 Pluie mensuelle Pm
Pluie journalière maximale Pjmax
80
400
360
320
Débit journalier Qj (m3/s)

280
240
200
160
120
80
40
0
Sept
Oct
Nov
Dec
Jan
Fev
Mars
AvT
Mai
Juin
Juil
Aout
Sept
Oct
Nov
Déc
Jan
Fev
Mars
AvT
Mai
Juin
Jui1
Aout
1995–1996 1996–1997

Fig. 6 Evolution des précipitations mensuelles et des débits liquides journaliers durant les années 1995/96 et 1996/97.

moins dures dans cette région, rend l’Oued Sahouet 4.2 Dynamique sédimentaire
moins chargé si on le compare aux autres affluents
Le taux de dégradation spécifique, estimé à 256 t km-2
qui forment l’Oued El Hammam. On peut en déduire
an-1 pour l’Oued El Hammam, se situe au dessous de
que le régime d’écoulement de l’Oued El Hammam,
celui proposé par Probst et Amiotte Suchet (1992).
comme celui d’autres bassins versants semi-arides,
En se fondant sur les travaux réalisés au Maghreb,
est caractérisé par deux saisons bien marquées:
ces auteurs estiment que la dégradation spécifique est
de 397 t km-2 an-1 (Probst et Amiotte Suchet 1992).
– une saison d’abondance hydrologique de septem- Mais pour le bassin versant de la Tafna (bassin voisin
bre à mai, caractérisée par des crues produites par en Algérie), Sogreah (1967) a estimé la dégradation
des averses ruisselantes, elles-mêmes engendrées spécifique à 150 t km-2 an-1 , valeur proche de celles
par des pluies souvent violentes; et trouvées par Bouanani (2004) pour les Oueds Sikkak
– une saison d’étiage de juin à août, période pra- et Isser, qui sont respectivement de 170 et 180 t km-2
tiquement sans pluie à l’exception de quelques an-1 . Certains taux observés dans le monde, en Asie
orages localisés. L’écoulement apparent disparaît par exemple (16 300 t km-2 an-1 pour un bassin ver-
et les débits de l’Oued El Hammam et de ses sant de 3800 km2 ), sont nettement supérieurs (Hadley
affluents présentent de très faibles valeurs mini- et al. 1985).
males qui deviennent nulles la plupart des années Les flux mensuels les plus élevés surviennent
à l’exception de deux ou trois valeurs enregistrées durant l’automne, notamment au mois d’octobre
chaque décennie. (Fig. 7). Les flux que l’on observe en cette saison
proviennent généralement d’orages survenus sur le
Il est important de signaler que l’étude des étiages bassin. Au cours des mois de juin, juillet et août,
de ce bassin est difficile car elle se heurte à des les précipitations sont faibles, voire nulles, mais les
problèmes techniques délicats. Le jaugeage en péri- orages estivaux contribuent à augmenter le transport
ode d’étiage nécessite en effet une grande précision sédimentaire de manière significative. A titre indi-
et les résultats peuvent facilement être erronés. En catif, 87% de la charge solide est transportée au cours
période de sécheresse, les besoins en eau augmentent de quatre mois seulement: en septembre 22%, en
et les prélèvements d’eau perturbent le régime des octobre 50%, en novembre 8% et en août 6%. Pendant
oueds. les mois de décembre, janvier et février, les sols sont
Analyse du transport solide en suspension 1651

Fig. 7 Flux mensuels de matières en suspension dans le bassin versant de l’Oued El Hammam (1993–2005).

Fig. 8 Relation entre le coefficient de débit solide et le coefficient de débit liquide (1993–2005).

saturés et cohésifs, si bien que le transport sédimen- dans la période des hautes eaux, donc en situa-
taire s’arrête durant cette période, faute de matériaux tion de crue. De ce fait, les apports tant liquides
disponibles. La Fig. 8 porte en ordonnée les valeurs que solides sont considérables. Il faut signaler
des coefficients mensuels de débits liquides et en que les mois appartenant à cette zone ont enreg-
abscisse les coefficients des débits solides correspon- istré des périodes de crues assez importantes tant
dants (les mois sont numérotés à partir de janvier de 1 en fréquence qu’en intensité. Il faut également
à 12); elle fait apparaître deux zones différenciées par signaler qu’à partir d’un coefficient mensuel de
les valeurs du coefficient mensuel d’écoulement qui débit liquide égal à 1,5 apparaît une dispersion des
sont inférieures ou supérieures à 1. L’interprétation points; au delà de 2,5 cette dispersion devient plus
de ces zones est la suivante: importante, c’est-à-dire que les mois à fort coef-
ficient mensuel de débit sont caractérisés par de
– La zone 1, pour laquelle les coefficients mensu-
fortes intensités de précipitations (à deux reprises
els de débit sont inférieurs à l’unité, correspond
en septembre et novembre, et à quatre reprises en
aux périodes de basses eaux, l’oued coulant dans
octobre le débit solide est considérable).
son lit et la quantité de matériaux transportés étant
forcément faible. Selon Fournier et Hénin (1968), on pourrait, dans une
– Dans la zone 2, les coefficients mensuels de débit certaine mesure, considérer l’ensemble de la distribu-
dépassent l’unité; on peut considérer que l’on est tion des points comme parabolique, mais il est plus
1652 Aicha El Mahi et al.

commode de l’envisager sous la forme de deux seg- le transport solide en suspension. Les volumes d’eau
ments de droite dont le point de raccordement indique augmentent plus régulièrement, y compris en dehors
la limite entre l’état de crue et l’état d’étiage. des périodes de crues et les paliers sont moins nets.
Les apports liés aux crues sont importants, mais
moins marqués que les apports solides.
4.3 Quantification du caractère épisodique du
En calculant la distribution statistique empirique
transport solide en suspension
des flux journaliers sur la période d’étude, on peut
Dans le but de mettre en évidence le caractère définir le 50ème et le 95ème centile de leur distribu-
épisodique du transport en suspension, on s’est tion, c’est-à-dire le flux journalier non dépassé pen-
intéressé aux courbes des flux cumulés sur l’ensemble dant 50% et 95% du temps. Les flux sont inférieurs à
de la période d’étude. Ces courbes présentent une 193 t/j sur 50% de la période de mesure. En revanche,
forme caractéristique en escalier: le flux cumulé est pendant 5% du temps, soit environ 18 jours par an,
presque constant sur une période, puis augmente bru- ils sont supérieurs à 4345 t/j. Un rapport de plus
talement pour atteindre un nouveau palier. Ces aug- de 20 est donc observé entre les flux journaliers non
mentations soudaines des flux cumulés sont directe- dépassés plus de 50% du temps et les flux journaliers
ment liées aux crues qui peuvent transporter des au cours des évènements de fort transport. Les flux
masses importantes de sédiments en très peu de journaliers de matière en suspension sont très vari-
temps. On distingue quatre évènements particuliers ables entre les jours de faible transport et les jours
qui contribuent de manière très importante au cumul de crues. Ces derniers sont peu fréquents au cours
total (Fig. 9). En effet, les 29 et 30 septembre 1994, de l’année, mais les flux journaliers correspondants
3234 × 106 t de sédiments ont transité à la station sont très importants. De plus, ces jours de fort trans-
de Trois Rivières, 2104 × 106 t le 17 octobre 1994, port en suspension ne surviennent pas aléatoirement
4352 × 106 t le 23 et 24 octobre 2000, puis 2927 × au cours de l’année hydrologique. Ils sont répartis
106 t le 10 octobre 2001, ce qui représente envi- sur les périodes où les pluies sont les plus intenses
ron 57% des 23,95 × 106 t cumulées pour ce bassin (Fig. 10).
versant sur la période 1993–2005. Ces exemples mon- Les courbes bi-fréquences représentent le
trent bien l’importance que peuvent prendre quelques pourcentage du flux de sédiments qui transite en
évènements majeurs de transport en suspension dans fonction du pourcentage du temps et du pourcentage
le bilan sédimentaire de l’Oued El Hammam. Le des flux liquides. Ces courbes permettent de con-
reste des sédiments provient d’autres crues, moins firmer et de quantifier le caractère épisodique du
violentes mais plus fréquentes. On peut également transport solide en suspension à l’échelle du bassin
remarquer sur la Fig. 9 que l’impact des crues sur versant étudié (Fig. 11). En effet, le temps nécessaire
les volumes cumulés est aussi bien visible. Toutefois, pour faire passer 50% du flux sédimentaire est
leur forme en escalier est moins marquée que pour inférieur à 0,13%, ce qui représente moins de 6 jours

Fig. 9 Evolution du flux de sédiments et des volumes d’eau journaliers cumulés (1993–2005).
Analyse du transport solide en suspension 1653

Fig. 10 Fréquences cumulées empiriques des flux journaliers sur le bassin versant de l’Oued El Hammam (1993–2005).

Fig. 11 Courbes bi-fréquence pour le bassin versant de l’Oued El Hammam (1993–2005).

de fort transport solide au cours de la période d’étude. des flux liquides sont 10 fois supérieures à celles
Il faut en revanche 2,35% du temps, soit 103 jours du transfert de 50% des sédiments. Ceci traduit
(environ 8 j/an) pour faire transiter 90% du volume bien un écoulement des flux liquides plus régulier
total de sédiments. Les sédiments sont transportés que celui des flux solides dans le bassin versant
dans des volumes d’eau relativement peu importants. (Fig. 12).
En effet, la moitié des flux sédimentaires sur la
période de mesure est transportée par moins de 18%
des volumes d’eau totaux écoulés. Et 52,53% des 4.4 Modélisation statistique des flux de
flux d’eau sont nécessaires pour faire transiter 90% sédiments
des sédiments.
On peut aussi calculer les temps de transfert 4.4.1 Modélisation par régression multiple
des flux liquide, ou pourcentage du temps qu’ils Toutes les variables explicatives citées plus haut sont
mettent pour s’écouler dans l’Oued El-Hammam. introduites dans le modèle, l’équation de régression
Les durées nécessaires pour faire transiter 50% s’écrit donc comme suit:
1654 Aicha El Mahi et al.

Fig. 12 Pourcentage du flux liquide journalier en fonction du temps dans l’Oued El Hammam (1993–2005).

F mod = −14336.92Qmoy + 10157.78Q2moy + 1774.25Pm des débits liquides Q s’écrit Qs = 5.12Q1.37 , qui est
représentée par une droite sur un diagramme log–log.
− 41.49Pm2 − 3138.34Pm−1 + 49.57Pm−1
2
(6) L’équation d’ajustement présente un exposant de
1,37 conforme aux valeurs généralement observées
+ 1437.94Pj max − 54.84Pj2max + 26798.49 dans d’autres régions et notamment dans les bassins
versants maghrébins, où celles-ci oscillent entre 1 et 2
Le modèle présente des résultats intéressants en (Muller et Forstner 1968, Wood 1977, Walling et
calage, les critères de validation sont néanmoins aussi Webb 1981, 1982, Meybeck 1984, Ben Khaled et
bons lorsque l’on utilise le modèle en validation Remini 2003, Bouanani 2004, Achite et Meddi 2005).
(Tableau 2). Une partie de la variabilité de la relation peut
être expliquée par les boucles d’hystérésis que l’on
4.4.2 Le modèle «rating-curve» L’appli- peut observer au cours d’un évènement de fort trans-
cation de ce modèle a porté sur les valeurs instanta- port solide, mais également par les phénomènes de
nées des débits liquides en m3 /s et des débits solides dépôt/reprise existant à l’échelle du bassin versant.
en kg/s, mesurées à la station de Trois Rivières sur Entre deux évènements semblables d’un point de vue
la période de calage 1993–2001. L’ensemble des hydroclimatique, le flux de MES à l’exutoire peut se
données représente un total de 2817 mesures; les révéler très variable en fonction du stock de sédiments
débits solides et les débits liquides correspondants facilement mobilisables (Mano 2008).
sont reportés sur la Fig. 13. Malgré une certaine dis- Néanmoins le Tableau 3 montre que les critères
persion des valeurs, il existe une relation puissance d’évaluation pour la période de calage sont en effet
évidente entre les deux paramètres. On remarque tous moins bons, alors que la qualité des débits
également qu’à de faibles débits liquides peuvent modélisés est meilleure sur la période de valida-
être associés de forts débits solides et vice versa. tion; cela peut être justifié par le fait que la plupart
La relation entre l’ensemble des débits solides Qs et des crues importantes ont été enregistrées pendant la
période de calage (1993–2001), ce qui rend le mod-
èle moins robuste. On notera également que bien
Tableau 2 Critères d’évaluation pour un modèle de régres- que significatives, les relations sont parfois difficile-
sion multiple, calculés sur les données observées des péri-
odes de calage et de validation pour le bassin versant de
ment applicables aux débits les plus élevés (Antonelli
l’Oued El Hammam. 2002). En effet, l’utilisation de la fonction puis-
sance ne s’est pas révélée être la plus pertinente
Calage Validation
pour décrire les relations MES = f (Q). Différents
EAM Nash R2 EAM Nash R2
auteurs ont montré que la relation concentration–
40,12% 0,98 0,98 61,83% 0,79 0,88 débit pour les valeurs extrêmes pouvait être différente
Analyse du transport solide en suspension 1655

Fig. 13 Relation entre le débit liquide et le débit solide (données instantanées, septembre 1993 à août 2001).

Tableau 3 Critères d’évaluation pour le modèle «rating- Walling et Webb 1981, Etchanchu et Probst 1986).
curve», calculés sur les données observées des périodes de Dans un souci d’illustration, nous avons analysé cette
calage et de validation pour le bassin versant de l’Oued El relation de puissance débit–concentration pour des
Hammam.
crues individualisées (Tableau 4).
Calage Validation L’analyse des résultats du Tableau 4 montre la
EAM Nash R2 EAM Nash R2
prédominance des crues d’automne, qui représentent
98,35% 0,37 0,62 78,12% 0,88 0,92 66,66% de l’ensemble des événements retenus. Au vu
des valeurs de coefficient de corrélation, l’ajustement
au modèle puissance montre de bonnes relations entre
la concentration et l’écoulement, même si la significa-
selon les épisodes (Wood 1977, Meybeck et al. 2003,
tion reste médiocre à faible pour quelques crues. Or
Coynel 2005, Moatar et al. 2007), et c’est pourquoi
la relation n’est souvent pas rigoureusement vérifiée,
nous analyserons dans la section suivante la relation
car C et Q ne sont pas complètement dépendants, et
concentration/débit pour différents épisodes de crue.
plusieurs facteurs affectent cette relation, notamment
à l’échelle de la crue. Ainsi, la diversité des évène-
4.5 Evolution de la relation concentration–débit ments produisant du transport solide et la notion de
à l’échelle de la crue stock permettent d’expliquer la mauvaise corrélation
entre débit et concentration. Les relations d’hystérésis
L’étude des crues permet de mettre en valeur observées à l’échelle de l’évènement sont également
l’importance du ruissellement superficiel, écoule- une source importante de dispersion de cette relation
ment responsable du déclenchement des processus (Mano 2008). La position du couple de coefficients
d’érosion mécanique des sols. Au cours du cycle (a et b) varie saisonnièrement et pourrait être reliée
hydrologique, les pluies d’averses survenues dans aux caractéristiques du bassin évoluant elles-mêmes
le bassin versant jouent un rôle prédominant avec le temps (disponibilité des sédiments, débit max-
dans l’exportation du flux des matières solides en imum). Toutefois de telles relations n’ont pas pu être
suspension. L’examen des données instantanées des encore mises en évidence malgré la subdivision des
débits et des concentrations enregistrées à la station données en périodes humides et sèches (Asselman
de Trois Rivières durant la période considérée nous 2000).
a permis de sélectionner les crues figurant dans le On observe cependant l’absence de fortes crues
Tableau 4. La concentration des sédiments en sus- durant l’hiver. La valeur moyenne du coefficient de
pension C et le débit liquide évoluent également régression a est de 18,27, avec un grand écart entre
suivant un modèle de puissance Y = aXb (Wood 1977, les valeurs minimale et maximale, et un coefficient
1656 Aicha El Mahi et al.

Tableau 4 Relation débit–concentration sur des crues de l’Oued El Hammam.


Crue Equation C = aQb N a b R2

1 septembre 1993 C = 21,67Q-0,20 36 21,67 –0,20 0,81


8 septembre 1993 C = 5,33Q0,17 06 5,33 0,17 0,98
23 septembre 1993 C = 1,09Q1,19 51 1,09 1,19 0,35
19 octobre 1993 C = 5,71Q0,40 35 5,71 0,40 0,58
4 novombre 1993 C = 4,55Q0,82 19 4,55 0,82 0,36
14 novombre 1993 C = 7,12Q0,69 27 7,12 0,69 0,86
19 avril 1994 C = 18,20Q-0,32 20 18,20 –0,32 0,71
27 septembre 1994 C = 4,98Q0,49 24 4,98 0,49 0,67
29 septembre 1994 C = 3,41Q0,59 40 3,41 0,59 0,72
2 octobre 1994 C = 51,23Q-0,23 9 51,23 –0,23 0,21
12 mars 1995 C = 6,22Q0,20 24 6,22 0,20 0,44
14 mars 1995 C = 26,36Q-0,33 36 26,36 –0,33 0,09
5 septembre 1995 C = 0,089Q1,54 47 0,08 1,54 0,55
6 octobre 1995 C = 5,98Q0,27 24 5,98 0,27 0,05
21 avril 1997 C = 4,73Q0,59 48 4,73 0,59 0,61
26 avril 1997 C = 1,04Q1,19 56 1,04 1,19 0,83
22 août 1997 C = 27,59Q0,07 23 27,59 0,07 0,12
25 août 1997 C = 65,07Q-0,14 45 65,07 –0,14 0,42
11 septembre 1997 C = 5,16Q-0,018 54 5,16 –0,01 0,12
16 septembre 1997 C = 87,78Q-0,28 89 87,78 –0,28 0,27
27 septembre 1997 C = 9,63Q0,17 89 9,63 0,17 0,25
22 novembre 1997 C = 1,17Q0,76 30 1,17 0,76 0,30
27 novembre 1997 C = 2,34Q0,68 24 2,34 0,68 0,30
15 mars 1999 C = 8,31Q0,046 36 8,31 0,04 0,01
28 septembre 2000 C = 8,44Q0,40 27 8,44 0,40 0,42
14 janvier 2001 C = 0,35Q1,43 24 0,35 1,43 0,74
3 octobre 2001 C = 22,82Q0,33 27 22,82 0,33 0,42
10 octobre 2001 C = 33,90Q0,16 43 33,90 0,16 0,79
10 novembre 2001 C =126,73Q-0,81 77 126,73 –0,81 0,35
3 avril 2002 C = 3,81Q0,34 21 3,81 0,34 0,45
12 avril 2002 C = 8,10Q0,49 36 8,10 0,49 0,32
7 mai 2002 C = 41,96Q-0,44 48 41,96 –0,44 0,34
11 janvier 2003 C = 6,42Q0,24 23 6,42 0,24 0,40
17 janvier 2003 C = 0,80Q0,68 25 0,80 0,68 0,49

C: concentration en matières en suspension (g L-1 ); Q: debit liquide (m3 /s); a et b: coefficients empiriques; N: nombre d’observations;
R2 : coefficient de détermination.

de variation important (Cv = 1,51). Concernant en fonction du débit (Asselman 2000). Ce comporte-
l’exposant b, la valeur moyenne est de 0,33; son coef- ment des sols, de l’écoulement et du transport solide
ficient de variation est également important puisqu’il exprime cette relation inversement proportionnelle
dépasse largement l’unité (Cv = 1,57). Cependant, des deux paramètres (a et b) du modèle puissance
il faut noter qu’à la valeur la plus forte de a cor- (Fig. 14).
respond la valeur la plus faible de b et vice versa Afin de préciser la relation entre la concentration
(a = 126,73; b = –0,81), (a = 0,084; b = 1,54). en matières en suspension et le débit liquide durant
Ainsi la Fig. 14 montre-t-elle une évolution inverse les crues, nous présentons la relation concentration–
des deux coefficients a et b, avec un coefficient de débit (C/Q) pour quelques crues du bassin étudié. La
corrélation négativement fort (R = –0,90); une rela- Fig. 15 donne à titre d’exemple les courbes correspon-
tion similaire, a déjà été relevée par Asselman dans dant aux crues du 19 octobre 1993, du 4 novembre
son étude sur les tributaires du Rhin (Asselman 2000). 1993, du 14 novembre 1993 et du 26 avril 1997. La
Il faut signaler que bien que le modèle soit purement forme des courbes de concentration et celle de la
statistique, quelques explications physiques existent relation C/Q dépendent en partie:
pour les paramètres a et b. Le coefficient a pourrait
traduire la sensibilité à l’érosion du bassin versant et b – du temps et du volume des sédiments provenant de
pourrait être lié à la capacité érosive de la rivière ainsi différentes sources jusqu’à la station de mesure; et
qu’à l’augmentation de la disponibilité en sédiment – de la proximité de la source des sédiments par
rapport à la station (Bouanani 2004).
Analyse du transport solide en suspension 1657

1,8

1,4

b-coefficient 1,0
b = 0,885–0,666*loga
R = –0,90
0,6

0,2

–0,2

–0,6
0,1 1,0 10,0 100,0
a-coefficient

Fig. 14 Relation entre a et b pour les différentes crues.

L’examen des courbes concentration–débit montre par des teneurs en MES beaucoup plus faibles
que: que pour celle du 19 octobre 1993. La crue du
14 novembre possède une boucle décrite dans le
1. Pour la crue du 19 octobre 1993, les concen- sens anti-horaire et, comme la précédente, est car-
trations des matières en suspension évoluent en actérisée par des concentrations basses bien que
excellente synchronisation avec le débit liquide. le débit soit plus élevé (pics de 30 g/L et de
On remarque que le pic de concentration (60 g/L) 11,8 m3 /s). L’originalité de ces deux crues peut
et le pic de débit liquide (450 m3 /s) sont simul- s’expliquer par le fait que l’intervalle de temps
tanés avec des largeurs et des pentes similaires, ce séparant les trois crues successives d’octobre et
qui montre l’apport continu des sédiments pen- novembre 1993 est court, respectivement de 15 et
dant toute la durée de la crue (Wood 1977); on 10 jours. Les mécanismes entrant en jeu ont été
note également que pendant cette crue impor- décrits par Wood (1977) et des observations com-
tante, l’eau conserve une forte concentration sur parables ont été faites par Al-Jabbari et al. (1980)
une durée d’environ 15 heures. Ces caractères et Milliman (1980). Selon ces auteurs, ce type de
sont probablement dus: (a) à l’intensité remar- comportement caractérise un fonctionnement où
quable des précipitations; (b) au long épisode de la faiblesse du transport solide est liée à un faible
faibles précipitations et de faible débit qui a pu apport de particules en provenance des versants
permettre la préparation du matériel sur les ver- et/ou à une diminution de la réserve sédimen-
sants; (c) au stockage dans le chenal d’apports taire disponible dans le lit fluvial au moment du
en provenance directe des versants; et (d) au fait déclenchement des crues. La reconstitution du
que la crue a eu la possibilité de se charger pen- stock sédimentaire demande du temps et, s’il y
dant toute sa durée par la reprise d’un stock a plusieurs crues consécutives, le stock épuisé n’a
sédimentaire en place. Ce dernier peut être lié pas le temps de se reconstituer. Ainsi la charge
à la disponibilité en sédiments produits par les solide reste-t-elle d’autant plus faible que les
petites crues précédentes et stockés dans le lit crues sont rapprochées (Avoine 1986).
fluvial (dans notre cas, les crues de septembre, 3. La crue du 26 avril 1997 montre une relation
Tableau 4). de sens anti-horaire; ce type de courbe carac-
2. Pour la crue du 4 novembre 1993, la courbe térise surtout les crues d’hiver et du printemps
forme une boucle d’hystérésis décrite dans le (Bouanani 2004). En effet, durant ces saisons le
sens horaire. La concentration en MES maxi- sol est généralement saturé et la couverture végé-
male (pic de 25 g/L) précède en effet le pic tale, plus ou moins dense, résiste mieux à la pluie.
de débit liquide (4,5 m3 /s), phénomène qui a Ces caractères impliquent que le transport des
été décrit dès 1935 par Hjülstrom dans plusieurs matières en suspension est légèrement retardé par
rivières, et plus récemment par Wood (1977) et rapport à l’écoulement.
Milliman (1980). Cette crue est donc caractérisée
1658 Aicha El Mahi et al.

Fig. 15 Evolution des concentrations des sédiments transportés en suspension et des débits liquides pour quelques crues de
l’Oued El Hammam.

5 CONCLUSION en sédiments sont en général faibles dans le cours


d’eau étudié mais peuvent dépasser plusieurs dizaine
Le transport de MES dans le bassin versant de
de g/L durant les crues. Ces évènements occupent
l’Oued El Hammam est très variable dans le temps.
une place prépondérante dans le bilan sédimentaire à
L’analyse de la répartition saisonnière des flux de
l’échelle du bassin versant. Le temps nécessaire pour
MES met en évidence de fortes gammes de variations
faire passer 50% du flux sédimentaire est inférieur
à l’échelle journalière et sub-journalière, avec un fort
à 0,13%, ce qui représente moins de 6 jours de fort
impact des événements de crues. Les concentrations
Analyse du transport solide en suspension 1659

transport solide au cours de la période d’étude. De magrébins comme celui de l’Oued El Hammam la
plus ces 50% de la charge sédimentaire annuelle pluie et le ruissellement sont les deux principaux
ne sont transportés que par 18% des volumes d’eau processus qui gouvernent la production de MES.
transitant pendant la période de mesure. Par ailleurs, l’Oued El Hammam est un cours d’eau
Dans les bassins versant magrébins, des mod- drainant un bassin versant soumis à une forte érosion
èles statistiques de type corrélation simple ou mul- du fait de sa topographie relativement accidentée, de
tiple peuvent être adaptés pour représenter les flux son couvert végétal clairsemé et de la faible extension
de MES. Or cette modélisation statistique permet des aménagements anti-érosifs.
d’améliorer considérablement la reconstitution des Bien que la station de Trois Rivières draine
flux et d’extrapoler des mesures ponctuelles. Le mod- presque la totalité (7440 km2 ) du bassin versant de
èle en loi de puissance reliant le débit solide au débit l’Oued El Hammam, la quantification des transferts
liquide reste l’approche la plus simple et la plus signi- de MES devrait être poursuivie sur plusieurs sta-
ficative, expliquant près de 80% de la variation totale. tions hydrométriques représentant différentes typolo-
Ce modèle instantané montre que les paramètres de gies afin de caractériser la sensibilité du milieu en
régression a = 5,12 et b = 1, 37 sont proches de ceux terme d’érosion aux éventuels changements. Entre
trouvés par de nombreux auteurs ayant travaillé sur autres, le bassin étudié devrait bénéficier d’un tel suivi
les régions arides et semi-arides: notamment à l’amont car il y a surtout un barrage qui
«bloque» près de 25% (2145 km2 ) de la superficie du
– bassin versant de l’Oued Wahrane: 1,46 < a <
bassin versant.
6,43 et 1,32 < b < 1,95 (Ben Khaled et Remini
2003);
– bassin versant de la Tafna: 0,2 < a < 0,4 et 1,5 < REFERENCES
b < 1,8 (Bouanani 2004);
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réaliser une modélisation probabiliste des événements algérien de Ouizert. Sécheresse, 19, 185–192.
extrêmes de MES à l’aide de méthodes d’analyse Benkaci Ali, T. et Dechemie, N., 2004. Modélisation pluie–
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