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9782729614942
Ail rights reserved. This work may not be translated or copied in whole or in part without the
written permission of the publisher, Dunod, 5 rue Laromiguière, 75005 Paris www.dunod.com.
Introduction
Cette question, vous vous l'êtes souvent posée, en tant que manager. Vous
avez trouvé des éléments de réponse au cours de votre vie professionnelle
ou dans les livres de management. Mais vous voudriez aller plus loin.
Vous avez probablement compris qu'il y a des démarches motivationnelles
qui fonctionnent bien avec certains, et moins bien avec d'autres. Car chaque
personne possède en elle-même les rouages de sa propre motivation. Vous
aimeriez comprendre comment aider votre collaborateur à découvrir et à
actionner ces rouages, à les entretenir au cours du temps, à découvrir
d'autres rouages ou d'autres façons de les assembler, à entretenir l'énergie
pour que les rouages tournent bien et longtemps.
Parmi ces multiples rouages, imbriqués façon puzzle, il y en a un
fondamental. Il s'agit du sentiment que l'on est capable d'y arriver, que l'on a
de la valeur, que ce que l'on fait sert à quelque chose. De la valeur à ses
propres yeux et aux yeux de l'entreprise. Pour alimenter ce sentiment de
valeur, de sens et de réussite, son propre regard ne suffit pas. On a besoin
du regard des autres et en particulier de celui de son manager, représentant
par excellence de l'entreprise. On a besoin de reconnaissance.
Or le manager n'est pas forcément sensible à ce besoin de reconnaissance et
encore moins formé à le prodiguer de manière appropriée. En quoi le besoin
de reconnaissance est-il une composante essentielle de la motivation ?
Comment le détecter chez les autres, le comprendre et y répondre de
manière appropriée ? Comment trouver les bons messages pour que cette
reconnaissance entretienne les compétences, la motivation et l'engagement
des personnes ? Au fil des pages de ce livre, vous trouverez des réponses à
ces questions. Vous allez apprendre à regarder celles et ceux que vous
managez, apprendre à les connaître, à les comprendre. Ou les connaître et
les comprendre différemment. Plus profondément. Vous allez découvrir
comment construire une relation riche avec vos collaborateurs afin de les
aider à trouver l'énergie pour repousser les limites de leur performance et de
leur épanouissement. Mais bien plus encore. Vous allez aussi trouver vos
propres clés, source de votre propre motivation et de votre propre
performance, des clés pour vivre votre rôle le mieux possible, avec passion,
recul, professionnalisme et dans l'idéal… avec plaisir !
Laissez-vous secouer !
Cet ouvrage est le fruit d'une longue observation de la nature humaine et
d'une profonde réflexion sur le métier de manager. C'est au cours de vingt
année d'expérience au sein d'entreprises internationales que j'ai pu
développer ma passion pour l'être humain, d'abord en tant qu'ingénieur, chef
de projets, puis en tant que manager et en tant que « RH » au travers de
diverses fonctions Ressources Humaines. Plus récemment, mon expérience
de consultante coach aux États-Unis m'a sensibilisée à l'universalité du
besoin de reconnaissance et à la diversité des réponses qui peuvent y être
apportées.
Je sais que le rôle de manager est un rôle difficile car il exige de
nombreuses qualités, qui peuvent parfois paraître contradictoires. Mais s'il
est vécu avec passion et plénitude, cela peut faire partie des plus beaux
moments de votre vie. Alors je voulais vous faire partager mes réflexions,
mes points de vue, mes conseils. Je me permets de m'adresser directement à
vous. Vous qui êtes manager ou qui souhaitez le devenir. Parfois, je vais
vous interpeller, vous secouer peut-être, pour faire bouger les idées et les
émotions dans votre tête et dans votre cœur. Cela ne va peut-être pas vous
plaire… mais si vous êtes d'accord pour partager ce petit bout de chemin
avec moi, laissez-vous secouer. Mon approche est bienveillante, car j'ai
beaucoup de respect pour vous qui lisez ce livre et beaucoup d'admiration
pour votre métier.
Pour les personnes de la gente féminine qui lisent mon ouvrage, qu'elles ne
s'offusquent pas de la dénomination « homme » tout au long de ce livre et
de l'emploi du masculin. Dans un objectif de simplification de lecture,
« homme » s'entend ici comme « être humain ». Je préfère que vous
utilisiez vos neurones à réfléchir à votre fonction plutôt qu'à décrypter des
« e » entre parenthèses.
Les anecdotes, bien que correspondant à des situations vécues en entreprise
ou dérivées de faits relatés en entretiens de coaching, ont été modifiées pour
constituer des études de cas et pour préserver la confidentialité des
échanges. Les prénoms ont également été modifiés. Afin de vous en faciliter
la lecture, les managers ont des prénoms commençant par la lettre M, et les
membres de leurs équipes, appelés collaborateurs dans ce livre, ont des
prénoms commençant pas la lettre C.
Vous reconnaîtrez-vous parmi les protagonistes de ce livre ? N'attendez-pas
pour le découvrir.
I les
clés
pour comprendre – Les signes de
reconnaissance
La reconnaissance,
un besoin vital
aux multiples facettes
Le salarié a besoin d'un effet miroir qui lui confirme qu'il existe au sein de l'entreprise.
Il est plus facile d'agir sur les signes de reconnaissance que sur la reconnaissance en elle-
même.
L'importance de la culture
Les signes de reconnaissance peuvent prendre différentes formes, verbales
ou non verbales, monétaires ou symboliques, en public ou en face-à-face.
Le manager doit être particulièrement attentif à ce que le signe soit bien
perçu par le collaborateur comme vecteur de reconnaissance, les aspects
culturels étant essentiels dans ce contexte.
Par exemple, un manager anglo-saxon dira ou écrira « Good job! » à son
collaborateur lorsque ce dernier aura fait simplement son travail, pour
témoigner son soutien et l'encourager à continuer. Un manager français dira
« Good job! » ou « Bon travail ! » lorsque le collaborateur a fait son travail
de manière particulièrement performante ou bien lorsque la personne est
allée au-delà de ce qui était attendu. Le manager anglo-saxon distribue très
fréquemment les « Good job! » alors que le manager français le réserve aux
performances au-dessus de la moyenne et le considère comme un signe de
reconnaissance.
Tout n'est qu'affaire de perception. Et le « perceptomètre » de chacun est
très calibré par sa culture.
L'émission et la réception des signes de reconnaissance sont modulées par plusieurs filtres,
dont la culture.
Un vecteur de performance
Des études ont montré que la qualité de la relation entre un manager et son
collaborateur est un des premiers facteurs de productivité de ce dernier et de
son attachement à l'entreprise[3].
La performance globale de l'entreprise dépend de la performance des
individus qui la composent. Un individu, pour être performant et entretenir
durablement sa motivation, a besoin de reconnaissance, de structure, de
sens, de perspectives. C'est particulièrement vrai au sein de la Génération
Y[4]. Non pas que ce ne soit pas important pour les autres. Mais la
Génération Y le clame haut et fort, ose l'affirmer, le revendiquer.
Susciter la motivation
et l'engagement des salariés
Les entreprises doivent actuellement faire face à un phénomène de
désengagement de la part des salariés. Selon les enquêtes, le désengagement
des salariés vis-à-vis de leur entreprise est en augmentation depuis plusieurs
années[8]. Cela signifie que l'on observe globalement un phénomène de
retrait : les personnes vont travailler, mais elles prennent de la distance par
rapport à l'entreprise et à leur travail, leur motivation bat de l'aile, elles ne
sont pas aussi impliquées que l'étaient les personnes de la génération de
leurs parents. Ce retrait est considéré par certains comme une forme de
protection, contre le burn-out ou contre d'éventuelles trahisons de
l'entreprise qui est perçue comme accordant plus d'importance aux intérêts
financiers qu'aux personnes qui constituent l'organisation.
Face à ce phénomène, intégrer la reconnaissance dans ses pratiques de
leadership constitue un moyen éthique, humain et efficace de restaurer
l'engagement des collaborateurs. Selon Clint Swindall[9], la pratique de la
reconnaissance de ses collaborateurs doit être intégrée dans les concepts de
leadership. La méthodologie développée par Clint Swindall explicite les
concepts clés de leadership que les managers doivent utiliser pour mettre en
place une culture de l'engagement. Plus que des concepts, il décrit des
recommandations et des pratiques ayant pour objectif le retour de la
motivation et l'implication des salariés. Parmi ces pratiques, la
reconnaissance et le renforcement positif ont leur place d'honneur. Par
exemple, énoncer les conséquences positives liées à un résultat à atteindre
puis valoriser la personne lorsque le résultat est atteint. Accorder de la
flexibilité personnalisée aux collaborateurs avec, à la clé, l'atteinte de leurs
objectifs. Trop simple ? Peut-être pas tant que ça… Pourquoi dans ce cas,
ces pratiques ne sont-elles pas plus répandues ? On verra plus loin quels
sont les freins et comment faire pour les lever.
Bien utilisé, un 360 peut s'avérer être non seulement un superbe outil de
connaissance de soi, mais aussi un moyen de développer les compétences
managériales.
« Efforts and courage are not enough without purpose and direction »
[1]
.
John F. Kennedy
Zoom sur…
les cinq dimensions de la culture d'Hofstede
Individualisme/Collectivisme – Dans les sociétés individualistes, l'individu s'occupe de lui-
même et de sa famille immédiate. L'identité de l'individu est basée sur le « Je ». Par
opposition, dans les sociétés collectivistes, l'individu est intégré dans un groupe (qui peut être
la famille ou l'entreprise) qui lui assure protection en échange de sa loyauté. L'identité de
l'individu est basée sur celle du groupe, sur le « Nous ».
Distance hiérarchique – Cette dimension concerne le degré d'acceptation des inégalités de
pouvoir par ceux ne détenant pas le pouvoir. Dans les pays à forte distance hiérarchique, les
personnes acceptent davantage les différentes de statuts et l'autorité des chefs que dans les
pays à faible distance hiérarchique.
Masculinité/Féminité – Dans les sociétés masculines, les rôles entre les hommes et les
femmes sont très distincts. Les hommes sont dominants, et ces sociétés valorisent la recherche
des biens matériels, la prospérité, le succès et l'argent. Les sociétés féminines ne différencient
pas les rôles entre les deux sexes. Ces sociétés valorisent la qualité de vie et les relations
humaines.
Aversion pour l'incertitude – Cette dimension concerne le comportement face à l'incertitude,
l'ambiguïté et l'inconnu. Les société à faible aversion pour l'incertitude n'ont pas peur des
risques et tolèrent les différences. A contrario, dans les pays à forte aversion pour
l'incertitude, les personnes aspirent à la stabilité de l'emploi, indiquent ressentir du stress dans
leur vie quotidienne et une inquiétude face à l'avenir.
Orientation à Court-terme / Long-terme – Dans les cultures à orientation à long terme, les
valeurs d'économie, de persévérance et d'attente de résultats ultérieurs d'un dur travail sont
prédominantes. A contrario, les cultures court-terme privilégient les résultats immédiats sur la
préservation de l'avenir.
Attention : ces dimensions s'appliquent statistiquement au niveau d'une culture et non pas au
niveau individuel. Tous les individus partageant une même culture n'ont pas tous les mêmes
caractéristiques. En outre, la dénomination des dimensions désigne des extrêmes : les
caractéristiques des cultures se trouvent sur un continuum entre les deux extrêmes.
Regardons d'un peu plus près les différences culturelles entre les Français et
les Américains. L'objectif de la comparaison qui suit est de montrer en quoi
les différences culturelles expliquent que ce qui paraît « normal » ne va pas
de soi pour tout le monde.
Les résultats de l'étude ont montré que les Américains sont plus
individualistes que les Français. Mais que ces derniers le sont tout de
même… bien plus que les Asiatiques. Les Français n'ont en général pas de
problème avec cette dimension de la culture américaine, qui détient la
palme en matière d'individualisme. Les entretiens individuels d'évaluation
annuelle, par exemple, très prisés dans la culture de la mesure de la
performance américaine, sont en général bien acceptés en France. Sous
réserve que ceux-ci prennent en considération la personne et son besoin de
reconnaissance et non pas seulement les résultats.
En ce qui concerne la distance hiérarchique, le manager international que
vous êtes ne sera pas surpris d'avoir la confirmation que les résultats de
l'étude ont montré que la distance hiérarchique est plus faible en Amérique
du Nord qu'en France. Effectivement, les managers américains sont en
général plus accessibles que les managers à la française et supportent la
contradiction en réunion de la part de leurs collaborateurs… dans la mesure
où cela a un impact positif sur les résultats. En fait, managers et
collaborateurs américains se considèrent comme égaux par essence, le
manager ayant une position qui lui confère un certain pouvoir, celui-ci
pouvant être renversé du jour au lendemain au gré des réorganisations au
profit de l'un de ses collaborateurs. Tout le monde peut, en théorie, devenir
manager, selon un vieux principe américain qui veut que chacun a toutes les
chances de réussite. En France, en revanche, être manager relève du statut,
celui-ci étant en général régi par des règles au sein de l'entreprise et souvent
par une convention collective. Il en résulte une culture des statuts ou
« logique de l'honneur », admirablement bien décrite par Philippe
d'Iribarne[3] dans son livre éponyme. Il y a une certaine fierté à être
manager en France et être promu manager est considéré par beaucoup
comme un signe de reconnaissance très fort.
Les États-Unis ont une culture plus masculine que la France. La France est
proche de la moyenne Masculin/Féminin, et bien moins féminine que les
pays d'Europe du Nord où l'équilibre de la répartition des rôles
hommes/femmes et la recherche de la qualité de vie font partie de valeurs
fondamentales. Il est ainsi communément admis aux États-Unis de
rechercher la richesse, la réussite et le confort matériel. Vouloir gagner de
l'argent n'y est pas honteux. Contrairement aux Français contraints dans leur
logique de l'honneur héritée des anciennes noblesses, où les privilèges ne
sont pas toujours étalés en plein jour, les Américains n'ont aucune honte à
parler argent, salaires et à montrer des signes ostentatoires de richesse.
L'argent est un signe de reconnaissance fort aux États-Unis. Cela ne veut
évidemment pas dire qu'en France il ne le soit pas… Mais la nuance est
subtile, salaire et statut doivent aller de pair, et un salarié français se sentira
en manque de reconnaissance s'il considère que son statut n'est pas assez
élevé par rapport à son salaire. Il considérera qu'étant donné son salaire, il
« mérite » d'avoir un titre représentatif du statut qu'il brigue.
Les Français n'aiment pas l'incertitude et sont angoissés par leur avenir.
Bien plus que les Américains. Cela ne veut évidemment pas dire que les
Américains ne sont jamais angoissés par leur avenir, ni que les Français ne
sont jamais confiants… Mais globalement, les Américains pensent qu'ils
vont avoir la capacité de surmonter les difficultés et de réussir. La culture
américaine prône l'optimisme et la confiance en soi. Les enfants sont
encouragés à réussir dès leur plus jeune âge et sont éduqués avec des
feedbacks positifs qui les encouragent à progresser. Une mère américaine
dira à son enfant «You're great! You can do it! », là où la mère française dira
« Tu risques d'avoir froid. Tu as pris ton gilet ? ». Il en résulte que les
Américains peuvent apparaître comme naïfs et hypocrites et les Français
râleurs et pessimistes… Et si la sagesse se trouvait entre les deux ?
Les Américains sont short-term oriented, encore plus que les Français. On
ne peut pas dire que les Français s'inscrivent dans le long terme en
comparaison aux cultures asiatiques, mais ils sont un peu moins dans le
court terme que les Américains. Il peut en résulter un stress certain des
Français par rapport aux pratiques managériales américaines qui attendent
un retour sur investissement immédiat et pilotent à vue par rapport aux
résultats trimestriels. En termes de reconnaissance, cela permet également
de comprendre que les salariés américains attendent une reconnaissance
immédiate de leurs performances. Ce besoin de reconnaissance immédiate
est particulièrement présent chez les jeunes générations.
D'autres dimensions
Les dimensions d'Hofstede ne sont évidemment pas les seuls traits
caractéristiques des différences interculturelles et d'autres éléments ont été
mis en évidence et font l'objet d'ouvrages complets. Retenons en
particulier les travaux de l'anthropologue Edward T. Hall.
Il est important de savoir C'est le point de vue le plus ouvert et qui offre le
reconnaître les personnes plus de possibilités pour que les personnes se sentent
individuellement, mais reconnues individuellement, tout en favorisant la
également la contribution de cohésion d'équipe.
l'équipe et à l'équipe
Tout le monde peut devenir Quels sont, selon vous, les critères de sélection ou
manager, c'est une question de les caractéristiques nécessaires pour devenir
motivation et de savoir saisir les manager ?
opportunités
Pour être manager, il faut avoir Trouvez-vous des exemples de personnes de votre
fait les bonnes études et avoir connaissance qui sont devenus managers sans avoir
« la fibre » fait les bonnes études ni avoir la «fibre ». Comment
ont-elles fait ?
Le culte de l'urgence est une En quoi ce culte de l'urgence est-il une bonne chose
qualité essentielle dans le et dans quelles situations vaut-il mieux prendre le
business temps nécessaire pour sortir des produits de qualité ?
Je valorise ceux qui savent bien Le fait de savoir gérer votre temps et votre stress
gérer leur temps et leur stress vous permet(trait)-il d'être un meilleur manager ?
Comment font les gens qui savent faire ?
Je place avant tout la réussite Quels sont les avantages associés à cette vision des
professionnelle et le salaire choses ? Quels en sont les inconvénients en termes
de reconnaissance des personnes ?
Je place avant tout l'équilibre Quels sont les avantages associés à cette vision des
vie privée / vie professionnelle et choses ? Quels en sont les inconvénients en termes
la qualité des relations de reconnaissance des personnes ?
J'ai du mal à travailler avec des Qu'est-ce qui vous dérange dans le fait que d'autres
gens qui n'ont pas le même point n'aient pas le même point de vue sur le sujet ?
de vue que moi sur le sujet Pensez-vous qu'ils soient moins compétents ?
Comment reconnaître leur contribution à l'entreprise
sans introduire le biais d'une différence de point de
vue ?
Risques = opportunités ⇒ Quels sont les avantages à savoir prendre des
indispensables risques ?
Risques = danger ⇒ à éviter Quels en sont les inconvénients ?
J'admire les gens qui savent Comment peut prendre des risques en limitant les
prendre des risques mais ce n'est inconvénients ?
pas mon cas
Dans le monde de l'entreprise, il Comment faites-vous pour vérifier si vous êtes bien
faut savoir parler de manière sur la même longueur d'onde que votre interlocuteur
détournée et lire entre les lignes de ce point de vue ?
J'ai beaucoup de mal avec les Quels sont les avantages associés à l'utilisation de
gens qui parlent toujours par sous-entendus ? Comment clarifier la
sous-entendus communication quand vous pensez qu'elle ne l'est
pas ?
La ponctualité doit être respectée Quels sont les avantages associés à cette vision des
par tout le monde choses ? Quels en sont les inconvénients en termes
de reconnaissance des personnes ?
Je suis toujours en retard, mais Quels sont les conséquences du fait que vous soyez
les gens sont habitués et ne m'en toujours en retard ? Comment êtes-vous sûr que les
tiennent pas rigueur autres ne vous en tiennent pas rigueur ?
Le temps est une ressource Si vous n'avez pas coché cette case, quels seraient
précieuse qu'il faut savoir les avantages et les contraintes associés à cette vision
accorder aux personnes et/ou aux des choses ? Sauriez-vous le faire ? Comment font
actions de manière pertinente les personnes qui savent le faire ?
Quelques questions complémentaires
À la lumière de ces éléments sur les différences culturelles, qu'est-ce que cela voudrait dire
prendre le meilleur de chaque culture ? Riche de ces différences qui sont à la fois des forces et
des faiblesses, quelle serait « la juste mesure » en termes de comportements managériaux ?
Comment caractériseriez-vous la culture de votre entreprise ? Comment votre entreprise
transmet-elles ses valeurs, comment les comportements sont-ils reproduits dans votre
entreprise ?
Selon vous, qu'est-ce que la « culture managériale » ? Quelle est la culture managériale de
votre entreprise ? Que vous ont appris les livres de management que vous avez lus, en termes
de cultures managériales ? Quelle est votre culture managériale propre, c'est-à-dire la vôtre ?
En considérant l'ensemble de toutes les cultures vous pensez avoir en vous-même, c'est-à-dire
votre culture nationale, celle de votre entreprise, celle de votre classe sociale, celles des
associations auxquelles vous appartenez, d'autres cultures auxquelles vous pensez, ainsi que
votre culture managériale, quelles sont, selon vous, les caractéristiques de votre culture ?
En quoi votre culture et/ou la culture de votre entreprise constituent-elles un avantage ou au
contraire un frein à la reconnaissance au travail ? Quelles pourraient être les améliorations à
apporter ?
II les clés
pour réussir –
Les situations
où pratiquer
l'art de la
reconnaissance
est indispensable
L'entreprise n'a pas forcément besoin que de collaborateurs Top Gun, elle a
aussi besoin de contributeurs qui font bien leur travail respectif, mais sans
plus. Ces collaborateurs-là ont aussi besoin d'être reconnus comme ayant
bien fait leur travail ou comme ayant fait des efforts pour y arriver.
Cette reconnaissance est importante pour que le collaborateur reste
impliqué dans son travail. Car un collaborateur moyen et impliqué apporte
une contribution acceptable à l'entreprise. En revanche, un collaborateur
moyen, mais non reconnu, va devenir peu à peu de plus en plus démotivé,
de moins en moins impliqué et passera moins de temps à entretenir ses
compétences. Cela posera à terme un problème pour lui-même et pour
l'entreprise.
Le ranking
Beaucoup d'entreprises pratiquent le ranking lors des évaluations annuelles
de performance des salariés. Il s'agit d'affecter aux salariés une note ou un
rang ou une évaluation de type « excellent », « bon » ou « en dessous du
niveau attendu ». Chaque personne se voit ainsi affecter par son
management une évaluation codifiée ou « niveau de contribution »
correspondant à l'atteinte de ses objectifs sur l'année qui vient de s'écouler.
Les dénominations varient selon les entreprises, ainsi que le niveau de
granularité et le processus associé.
L'impact de cette pratique en termes de reconnaissance est énorme. Il l'est
d'autant plus si l'entreprise pratique le forced ranking : dans ce cas, le
nombre ou le pourcentage (ou une fourchette de pourcentages) de personnes
positionnées dans chaque niveau de contribution est déterminé à l'avance.
à accomplir son travail de manière à ce qu'il soit cohérent à la fois avec sa propre vision de son
projet professionnel et la vision de l'entreprise ;
à ce que son rôle ait du sens pour lui ;
à avoir une vision de lui-même « où la vie professionnelle vaut la peine d'être vécue, y
compris dans les tâches les plus courantes et les plus routinières »[4] ;
à ce que son projet professionnel s'intègre dans son projet de vie.
Les techniques et outils pour renforcer l'estime de soi peuvent être utiles
pour aider un collaborateur à mettre en valeur ses compétences, ses
réalisations ou sa personne. Savoir se vendre n'est plus une compétence
réservée aux professionnels de la vente, c'est devenue une compétence
essentielle pour tout un chacun : d'une part pour faciliter son évolution dans
les organisations en réseau des entreprises modernes, d'autre part pour
exprimer de manière concrète son besoin de reconnaissance, car l'on peut
raisonnablement apprécier d'être reconnu sur les qualités vendues !
Aider son collaborateur à valoriser ses compétences et à faire connaître sa
contribution au sein de l'organisation, c'est l'aider à multiplier les
opportunités d'être reconnu… mais aussi d'être promu, d'être recruté, de
nouer des contacts utiles, de mieux faire son travail, d'être plus créatif…
Surmonter
les difficultés du management à distance
Lorsque vous managez à distance, prenez le temps de rencontrer en personne au moins une
fois par an chacun de vos collaborateurs, si possible individuellement[4].
Dire merci en personne avec le langage non verbal associé n'est pas équivalent à envoyer un
e-mail pour dire merci.
Cela ne veut pas dire pour autant qu'il ne faille pas envoyer d'e-mail de
félicitations. Mais cet exemple montre combien il est important de ne pas le
faire à la légère. Il faut estimer l'impact d'un e-mail de félicitations avant de
l'envoyer : pertinence du message, contenu, formulation eu égard aux faits
relatés, personnes en destinataires, personnes en copie et personnes non
destinataires.
Un e-mail de félicitation personnalisé est un beau signe de reconnaissance.
Certains managers hésitent à le faire, en se disant que, si un jour, ils
souhaitent se séparer de leur collaborateur pour performances insuffisantes,
ce dernier pourra ressortir l'e-mail du placard pour contrecarrer
l'argumentaire du manager. C'est un risque. Ce n'est pas une raison pour
autant pour ne pas envoyer l'e-mail. Il appartient au manager de s'assurer
que le contenu n'est pas surdimensionné et qu'il est bien représentatif de la
compétence ou de la contribution réelle du collaborateur. Féliciter le
collaborateur à bon escient, dans une mesure que l'on estime à sa juste
valeur, dans un contexte donné. Encore faut-il savoir estimer la juste valeur.
Montrer à son collaborateur que l'on essaie de le faire, c'est également faire
preuve de reconnaissance.
Savoir reconnaître
les équipes
C'est une discussion que j'ai souvent avec les managers qui passent me voir
pour savoir comment mieux impliquer, motiver ou reconnaître leurs
collaborateurs. Je leur indique souvent de ne pas prendre l'ensemble de cette
responsabilité sur leurs épaules, mais de la partager avec leurs
collaborateurs. D'abord parce que le manager ne peut pas contrôler tous ces
aspects chez ses collaborateurs. Heureusement d'ailleurs. Et ce n'est pas la
peine qu'il s'épuise à essayer de le faire. Ensuite parce que c'est une bonne
chose que ses collaborateurs se sentent acteurs de leur propre
développement, du développement de leur équipe et du développement de
leur entreprise.
Le collectif
Le manager ne gère pas que des personnes, il gère également une équipe ou
des équipes. Et c'est bien le collectif qui fait réussir l'entreprise. Lorsque
l'équipe de France de football avait gagné la coupe du monde en 1998, le
sélectionneur Aimé Jacquet avait été interrogé sur les raisons de la victoire.
Il avait répondu « Le collectif ».
La mission du manager est de faire réussir un collectif. Il a une double
mission de faire réussir à la fois les personnes, les bons, les moins bons, les
divas, les contributeurs discrets… tous ensemble.
En matière de reconnaissance, cela signifie être capable à la fois de
reconnaître les personnes pour leur contribution individuelle, leur réussite
individuelle et leur contribution à celle de l'équipe. C'est-à-dire pousser
chacun à donner le meilleur de lui-même tout en coopérant avec les autres.
Insuffler un savant dosage d'esprit de compétition et d'esprit de
coopération : un rêve irréaliste ? Pas forcément. En fait, au fond de lui-
même l'individu, par essence ambivalent, a un double besoin : un besoin
d'appartenance et un besoin de se différencier de la masse. Il a besoin d'être
reconnu comme appartenant à l'équipe et comme appartenant à l'entreprise.
Et en même temps, il a besoin de sentir qu'il n'est pas noyé au sein du
collectif, qu'il est différent. Et il a besoin que cette différence soit reconnue,
en particulier dans les cultures individualistes[1]. Sortir du lot, en étant plus
brillant, plus créatif, plus généreux, plus travailleur, plus … quelque chose
de plus et de mieux. Et ce « plus, en mieux» dépend des caractéristiques
personnelles de l'individu. Les collaborateurs envoient un message à leur
manager qui dit « Je fais partie de la masse, mais je suis différent de la
masse ». Et ce message est particulièrement clair à la suite de la distribution
des enveloppes des augmentations salariales : chaque collaborateur a un
discours différent pour expliquer en quoi, selon lui, il mérite plus que la
moyenne[2].
Éviter le piège
du manque de temps
Quelques pistes pour passer du temps, du bon temps et du temps bon… avec ses
collaborateurs
La reconnaissance de l'expérience
Claude pose la problématique de la reconnaissance de l'expérience, souvent
évoquée par les seniors dans l'entreprise.
Un jeune débutant et un senior expérimenté qui font le même travail
doivent-ils gagner le même salaire ? Font-ils exactement le même travail ?
Doit-on valoriser l'expérience intrinsèquement ou bien le surplus de
compétences qu'elle confère ? Comment est identifié ou qualifié ce surplus
de compétences ?
La guerre des talents sur le marché du travail peut amener une entreprise à
recruter des personnes à l'extérieur à un salaire plus élevé que celui des
personnes en poste dans l'entreprise faisant le même travail. Doit-elle
rattraper les salaires des personnes en poste ? Nous sommes ramenés à la
question précédente « Reconnaissance des meilleurs ou rattrapage des
salaires ». Si l'on a suffisamment d'argent, il conviendrait probablement de
faire les deux. Mais si l'enveloppe est limitée ?
Zoom sur…
la théorie de l'équité d'Adams
Selon cette théorie de la motivation, l'individu va comparer l'échange entre ce qu'il donne à
l'entreprise et ce qu'il en reçoit en retour.
Il va calculer un ratio pour lui-même et pour les autres pour déterminer s'il y a justice
sociale :
Par exemple :
Il y aura un sentiment d'iniquité lorsque ce qu'il aura l'impression que ce qu'il reçoit de son
entreprise se situe en-dessous de ce qu'ont pu recevoir les autres personnes évaluées dans le
même ratio. Il va alors considérer que ce n'est pas juste et qu'il est défavorisé par rapport à
ceux avec qui il s'est comparé.
Il y a deux aspects de la justice ressentie[3] :
Deuil non effectué « J'ai eu 5 % les autres années, et Aider le salarié à faire le deuil des années
je n'ai eu que 2 % cette année, fastes. Lui donner des pistes pour se
alors que j'ai bossé deux fois développer professionnellement
plus » indépendamment du salaire.
Pratiquer l'art
de la reconnaissance
avec la Génération Y
Zoom sur…
la Génération Y
Chaque génération est marquée par son environnement vécu au temps de sa jeunesse, par
l'éducation reçue de ses parents mais aussi par le contexte économique et social de son
époque. La Génération Y[2] est la génération des personnes nées entre 1980 et 1990.
Aux yeux des générations plus anciennes, les personnes de la Génération Y apparaissent
comme individualistes. On parle « d'individualisme tribal », ils sont adeptes des réseaux
sociaux, appartiennent à plusieurs réseaux à la fois, et apprécient d'appartenir à des
communautés. Ils sont débrouillards, agiles, ont la culture Internet et la capacité de passer
sans problème du virtuel au réel. Ils veulent « tout, tout de suite » et pratiquent le zapping.
Au sein de l'entreprise, les Gen Y pratiquent le donnant-donnant et attendent une récompense
immédiate à ce qu'ils donnent. Tout est négociable et ils mesurent ce que la hiérarchie leur
apporte personnellement.
Ils n'ont de respect pour l'autorité que s'ils y trouvent leurs intérêts et s'ils considèrent que leur
manager est compétent. Ils n'aiment pas rentrer dans un moule et n'hésitent pas à revendiquer
leurs droits.
Ils ne sont pas attachés à leur entreprise mais plutôt à leurs propres compétences qu'ils ont à
cœur d'entretenir et de développer. Et de voir reconnues…
NB : ces caractéristiques se dégagent de manière globale au niveau de cette génération et non
pas au niveau individuel. Cela implique d'une part que toutes les personnes de la
Génération Y ne possèdent pas ces caractéristiques et d'autre part que des personnes des
autres générations peuvent posséder ces caractéristiques.
De nouvelles technologies
au service de la reconnaissance
Les réseaux sociaux et les nouveaux moyens de communications
multimédia ont créé de nouveaux types de relations entre les personnes, en
particulier chez les jeunes.
Utiliser les réseaux sociaux en parallèle pour valoriser les personnes via de
nouveaux signes de reconnaissance online va devenir très vite un
incontournable. Toutefois, avant d'utiliser les réseaux sociaux pour exprimer
des signes de reconnaissance, il convient de mener une réflexion globale, en
cohérence avec la culture d'entreprise et les objectifs corporate. Ces réseaux
sont en plein essor et les possibilités offertes sont énormes. Elles peuvent
prendre différentes formes : par exemple, mettre à disposition des salariés
un outil leur permettant de créer leur profil en ligne dans lequel ils pourront
mettre en avant leurs compétences, proposer à un expert d'animer une
communauté virtuelle, valoriser des réalisations d'équipes ou individuelles
par le biais d'articles en ligne, réfléchir autour de l'utilisation judicieuse de
blogs ou de forums pour aider les personnes à être connues et reconnues.
Les jeunes Y ont probablement d'autres idées dont la mise en application
pourrait avoir le double effet d'innover pour l'entreprise et de motiver la
personne à l'origine de l'idée. Néanmoins, nous n'avons pas à ce jour
suffisamment de recul pour mesurer d'une part l'efficacité et d'autre part les
effets secondaires liés à l'utilisation de ces outils.
Ces derniers sont à utiliser avec les précautions qui s'imposent car la
philosophie du réseau étant non hiérarchisée et ouverte par essence, les
signes de reconnaissance peuvent venir de toutes parts, ce qui est plutôt une
bonne chose s'ils sont positifs, mais représentent un risque s'ils s'avèrent
négatifs. De nouveaux champs des possibles s'ouvrent et nous n'en sommes
qu'aux prémices car de nouvelles innovations technologiques vont voir le
jour dans les mois et les années qui viennent : ces nouveaux outils sont
l'occasion de mettre en œuvre de nouveaux modes de reconnaissance,
auxquels les nouvelles générations seront plus sensibles et plus réceptives.
À chaque entreprise d'être créative et d'utiliser ces outils au service de ses
objectifs. Et rendez-vous dans dix ans pour un retour d'expérience…
Les technologies informatiques ont de l'avenir, mais elles ne remplaceront
jamais les contacts en face-à-face entre les personnes. Si les jeunes
générations sont adeptes des contacts virtuels et apprécient la valorisation
par l'image au travers des réseaux sociaux, ce n'est pas pour autant que les
contacts humains en face-à-face ont perdu, à leurs yeux, de leur valeur, de
leur utilité et de leur impact. Ce serait une erreur de négliger la relation
directe avec des collaborateurs en devenir, à un âge où ils ont intensément
besoin de soutien et de support pour déployer leurs ailes et développer leur
potentiel.
Rien ne vaut un contact direct avec la personne pour lui exprimer que vous
croyez en elle, en son potentiel, et en sa capacité à construire un avenir
brillant. Et lui assurer votre soutien en ce sens. Les nouvelles technologies
et les contacts directs doivent être vus comme des moyens de
communication complémentaires. De facto, les signes de reconnaissances
doivent s'exprimer par ces deux moyens.
Motiver
ses collaborateurs
par la pratique
de la reconnaissance
« Courage is what it takes to stand up and speak; courage is also what it takes to seat down
and listen [1] . »
Winston Churchill
(Suite)
Ambition Besoin qu'on lui « Quelle sera mon évolution Reconnaissance de sa réussite et
projette des de carrière / mon nouveau de ses performances. Apprécie
perspectives poste ?» « Quand pourrais-je d'être reconnu pour son potentiel.
d'évolution avoir un poste de …/ la
fonction de… ? »
Grande Passe beaucoup de « Cela fait 3 mois que je Reconnaissance de son travail,
capacité de temps au bureau et travaille jour et nuit sur ce de ses efforts et de ses
travail abat une grande projet » « C'est en sacrifiant compétences
quantité de travail tous mes week-ends… »
(Suite)
Laxisme ou Ne passe pas « Je n'ai pas encore eu le temps Reconnaissance du… peu
faible beaucoup de temps de… » « J'ai beaucoup de qu'il peut y avoir à
contribution au bureau et abat une priorités à gérer en même temps » reconnaître et recadrage sur
ce qui est attendu
faible quantité de « On m'en demande toujours L'absence totale de
travail plus » reconnaissance pourrait être
interprétée comme de
l'indifférence et renforcer
son laxisme
Anxiété Peur de ne pas avoir « Est-ce que mes résultats sont au Reconnaissance du travail
complètement réussi niveau attendus ? » « Est-ce que effectué et valorisation des
Peur pour son mes compétences me permettront résultats.
avenir d'avoir un poste dans 2 ans avec Apprécie d'être rassuré sur
toutes ces réorganisations ? » sa capacité à progresser.
Le besoin de plaire
L'individu en quête de reconnaissance au travail a besoin de plaire, d'attirer
le regard de l'autre pour se sentir regardé. Besoin de séduire pour mettre en
avant ses qualités. Ce comportement de séduction va s'exprimer de manière
différente en fonction des individus et des réactions suscitées. Et les
réactions peuvent être très diverses, déclinées sur un continuum entre
l'indifférence et le début d'une relation féconde.
Séduire ou être séduit, susciter des émotions ou être ému : vivre des
émotions au travail, c'est se sentir vivant. Les occasions sont nombreuses.
Lesquelles d'entre elles vous parlent ?
L'Intelligence Émotionnelle
Savoir maîtriser ses émotions, tel est l'objectif de l'Intelligence
Émotionnelle. Beaucoup de formations au management comprennent un
module d'Intelligence Émotionnelle. Ce concept, né aux États-Unis dans les
années 1990, a été développé et popularisé par Daniel Goleman.
« L'intelligence émotionnelle désigne notre capacité à reconnaître nos
propres sentiments et ceux des autres, à nous motiver nous-même et à bien
gérer nos émotions en nous-même et dans nos relations avec autrui[1]. »
Longtemps ignorées dans le contexte professionnel, les chercheurs en
management considèrent aujourd'hui que non seulement les émotions
existent aussi sur le lieu de travail et ne doivent pas être négligées mais que,
de surcroît, elles sont un vecteur de performance : les émotions font partie
intégrantes de notre contribution, une personne qui gère bien ses émotions,
qui sait développer des relations constructives avec les autres sera plus
performante au travail.
Au sein des entreprises aujourd'hui, la réussite des individus requiert non
seulement des compétences techniques, mais également des compétences
émotionnelles, qui permettent de contrôler ses propres émotions et celles
des autres ainsi que des compétences relationnelles. C'est encore plus vrai
pour les managers. Des études ont mis en évidence que, parmi les facteurs
dont dépend la réussite dans la vie, le QI représente au mieux 20 %[2].
Exemple de débordement
Michel, directeur d'une entité technologique, s'est mis à hurler aujourd'hui en réunion, il est
« parti en vrille » comme très souvent. Plus personne n'a osé exprimer son opinion sur des
sujets pourtant majeurs. Intrinsèquement, Michel n'est pas réellement méprisant, mais il est
apparu comme tel. En fait, il n'a pas su gérer son stress par rapport aux énormes enjeux dont il
est responsable. À cause de son comportement, il a raté des informations décisives pour
prendre des décisions stratégiques.
Construire ce rôle
qui vous inspire
« Don't let your ego get too close to your position, so that if your
position gets shot down, your ego doesn't go with it. [1] »
Colin Powell
Pause. Vous appuyez sur le bouton pause du livre, et vous laissez émerger
dans votre tête des expériences que vous avez vécues, des situations qui vous
reviennent à l'esprit par rapport à ce que vous venez de lire.
Essayez de revivre mentalement ces situations. Puis essayez de les
reconstruire en mettant en œuvre des pratiques de reconnaissance. Imaginez
ensuite des situations où, dans le futur, vous souhaitez appliquer ces
pratiques de manière concrète sur le terrain : par exemple lors des entretiens
annuels d'évaluations, ou dans des cas de remote management, ou avec des
personnes en particulier. Comment allez-vous vous y prendre ? Qu'est-ce qui
peut vous aider ? Qu'est-ce qui vous en empêche ?
Imaginez maintenant que vous êtes le protagoniste principal du paragraphe
« Échanges sur le terrain » ayant pour trame un cas concret sur lequel vous
souhaitez travailler. Que dites-vous, que ressentez-vous ? Vous me faites part
des difficultés que vous rencontrez dans la mise en œuvre de ce cas. Quelles
sont-elles ? Quelles sont les obstacles que vous voyez par rapport aux
concepts et pratiques décrits dans ce livre ?
Vous n'avez rencontré aucun obstacle et vous avez l'intention de passer
réellement à l'action avec vos équipes ? Bravo ! Vous êtes prêt à pratiquer
l'art de la reconnaissance au quotidien dans votre rôle de manager. Peut-être
d'ailleurs le faites-vous déjà depuis longtemps.
Montagne, brouillard ou panne d'essence vous empêchent d'aller plus loin ?
Peut-être trouverez-vous des éléments de réponses dans ce qui suit.
Je n'ai pas la prétention de dresser une liste exhaustive de toutes les
difficultés que vous pouvez rencontrer. Mais laissez-moi examiner avec
vous, au travers de quelques études de cas, les difficultés et obstacles les
plus courants.
Exemple
Matthieu a déjà eu des feedbacks relatifs à un manque de reconnaissance, de communication ou
de coopération, mais il pense que les gens exagèrent. Il réussit très bien jusqu'à présent, il ne
voit pas pourquoi il changerait son comportement pour avoir de meilleures relations avec ses
collaborateurs et ses pairs. Ce serait probablement une bonne chose, mais on n'est pas dans un
monde idéal, et l'atteinte de ses objectifs business est plus importante. Et en ce qui concerne ses
objectifs business, il est au top.
Que peut-on dire de ce cas ? L'obstacle auquel fait face Matthieu est un des
plus difficiles à surmonter, puisque… il ne le voit pas !
Marshall Goldsmith, dans son livre What got you here, won't get you
there[2], explique que l'une des difficultés majeures rencontrées par les
managers lors de leur évolution professionnelle est de se rendre compte que
ce qui a fait leur réussite jusqu'à présent n'est pas forcément la solution pour
leur réussite future. Il met en évidence que plus on progresse dans sa carrière
et plus la qualité des relations interpersonnelles est importante. Pour certains,
cela va de soi. Pour d'autres, cela ne les concerne pas. Dans sa pratique
d'executive coaching, il a dû amener beaucoup de ses clients à comprendre
qu'ils ont pu réussir jusqu'à présent non pas grâce à leur comportement, mais
en dépit de leur comportement. Son travail avec ces hauts potentiels et ces
executives performants a consisté à leur faire prendre conscience de la
nécessité de devoir faire évoluer leurs comportements vis-à-vis de leurs
collaborateurs.
Pour ceux qui restaient dans le déni, malgré des difficultés relationnelles au
sein de l'entreprise, l'analyse d'un 360 les a aidés à faire face aux points
précis sur lesquels ils devaient évoluer. Parmi ces points se trouvait celui de
l'écoute et celui de savoir exprimer de la reconnaissance de manière
appropriée. Cette prise de conscience n'est pas facile, car la réussite est un
frein au changement. Pourquoi devrais-je changer étant donné que je réussis
parfaitement ? Qui es-tu, toi, pour me dire ce que je dois faire alors que tu
n'es pas à ma place et que je suis quelqu'un d'important ? Goldsmith a dû
faire face à ces objections et accompagner ses clients dans leur évolution,
pour les aider à passer ce cap vers leur performance future.
J'ai travaillé avec un manager qui ressemblait à Matthieu. Je lui ai demandé
ce qu'il pensait du vieux dicton « On ne change pas une équipe qui gagne ».
Il m'a répondu que c'était un dicton dépassé : le monde change autour de
nous, et l'équipe d'aujourd'hui, même si elle gagne, n'est pas forcément
adaptée pour faire face aux challenges de demain. Je lui demandé en quoi ce
qui était vrai pour une équipe n'était pas vrai pour lui en tant qu'être humain.
Qu'auriez-vous répondu à sa place ?
Depuis une trentaine d'années, le Center for Creative Leadership[3] mène
des études auprès des executives d'Amérique du Nord et d'Europe pour
essayer de déterminer quelles sont les caractéristiques des leaders qui
réussissent par rapport à ceux qui échouent. Ses conclusions sont éclairantes.
Les résultats de ces études mettent en évidence plusieurs facteurs, dont deux
facteurs clés : la capacité à établir des relations interpersonnelles de qualité
ainsi que l'aptitude à s'adapter et à gérer le changement. En particulier, les
leaders qui réussissent attachent une importance particulière aux aspects
humains du management et, dans l'objectif de progresser dans leur
développement personnel, n'ignorent pas les feedbacks des personnes avec
qui ils travaillent.
La passivité
Exemple
Maurice pense qu'il y aurait beaucoup à faire dans son équipe et dans son entreprise en matière
de reconnaissance. Mais il se dit que, s'il est le seul à changer, cela ne sert à rien. Selon lui, il
faut qu'il y ait une réelle volonté de l'entreprise et de ses dirigeants pour faire changer les
choses, sinon cela demandera trop d'efforts pour un feu de paille. « Il faut que cela vienne du
haut, sinon cela ne marche pas, c'est bien connu ».
Le pouvoir
Exemple
Marc a toujours aimé le pouvoir. C'est ce qui le fait vibrer dans son rôle de Vice-Président,
l'exercice du pouvoir. Pour lui, le monde de l'entreprise est le théâtre d'une guerre permanente :
pour réussir, il faut se battre et conquérir du terrain sur les autres. Il considère que la seule
personne à qui il puisse faire confiance, c'est lui-même. Il travaille énormément pour faire partie
des gagnants. Il est brillant, il percute vite et il attend de ses collaborateurs qu'ils fassent de
même. Il les écoute peu car il n'a pas de temps à perdre : dans la majorité des cas, c'est lui qui a
raison. Alors pourquoi perdre du temps à écouter des avis dont, de toute façon, il ne tiendra pas
compte ? Tant mieux pour ceux qui le suivent, tant pis pour les autres.
Que peut-on dire de ce cas ? La question ici n'est pas de savoir si Marc a tort
ou s'il a raison d'aimer le pouvoir et de se comporter ainsi. Jusqu'à présent,
son comportement a porté sa réussite et celle de son entreprise. Le goût du
pouvoir pousse des êtres humains à prendre des responsabilités, à travailler
dur et à garder courage devant les difficultés pour atteindre leurs objectifs.
Sans le goût du pouvoir, il n'y aurait pas d'hommes politiques ni de
dirigeants.
Une « bonne dose » de goût du pouvoir est plutôt une bonne chose. La
question est de savoir qu'est-ce qu'une « bonne » dose et comment faire pour
que ce goût du pouvoir n'aveugle pas celui qui le détient. L'on peut se
demander également si son comportement est de nature à lui assurer sa
réussite sur le long terme. Que se passera-t-il pour lui si, un jour, l'entreprise
réduit de manière significative le périmètre de son poste ?
Je me suis posé plusieurs fois la question, j'ai beaucoup discuté avec des
managers, des coachs, des amis. Quelle quête poursuit le manager, celui qui
veut devenir top-manager, VP, C-Level ? Ce manager qui veut des équipes
toujours plus grandes, avec plus de responsabilités, un plus grand périmètre,
un titre plus imposant ? Que poursuit-il ?
Le pouvoir ? Pour être reconnu et admiré ? La quête du pouvoir serait-elle
également, comme la quête d'amour[4], une forme particulière de quête de
reconnaissance ? C'est ce que soutient Jean-Claude Kaufmann qui, dans son
superbe livre L'invention de soi, indique « La lutte pour le pouvoir est
généralement une explication bien courte pour ce qui, en-deçà, se révèle être
une quête amère et triste pour la simple reconnaissance. Accéder à des
positions encore plus hautes n'est souvent que le moyen de conforter le
sentiment d'exister au moins un peu »[5]. Certains ont besoin de sentir la
reconnaissance de leur puissance dans le regard de l'autre.
Jusqu'à quelles limites maîtrise-t-on le pouvoir et dans quelle mesure est-on
sous son emprise ? On pourrait conseiller à Marc de réfléchir en quoi son
goût du pouvoir est une force et en quoi est-ce une faiblesse sur le long
terme. On pourrait également reprendre les conclusions du Center for
Creative Leadership[6] et rappeler à Marc qu'enrichir ses relations avec les
personnes avec qui il travaille, en particulier grâce à l'écoute et à la
collaboration, aura un impact positif sur sa carrière. Et probablement aussi
sur son rayonnement personnel.
Gagnant-gagnant
Qu'est-ce que cela voudrait dire une « bonne dose » de goût du pouvoir et
comment faire pour y arriver ?
Les managers qui aiment le pouvoir et qui réussissent sur le long terme ont
compris l'intérêt d'adopter une démarche « gagnant-gagnant », plutôt que
« gagnant-perdant ». Un comportement « gagnant-gagnant » permet de
continuer à réussir tout en favorisant et en permettant la réussite de l'autre,
des autres. Cela implique de savoir tenir compte des autres, de savoir ajuster
son comportement, ses points de vue, voire ses décisions, en fonction des
personnes. C'est accepter l'idée que, dans le monde de l'entreprise
aujourd'hui, on réussit rarement sans les autres. À nous de savoir les faire
participer à notre réussite et de participer à la leur.
Le stress
Exemple
Aux dires de ses collaborateurs, Michel est un bon manager. Il a des qualités humaines
indéniables et les personnes de ses équipes sont satisfaites de travailler avec lui. Le problème
apparaît dans les périodes de stress : quand les commandes se font rares, quand l'entreprise
connaît des difficultés, à la fin de l'année quand il faut retrouver une bottom line positive. Mike
se transforme alors en une personne différente. Il devient contrôlant, demandant des justificatifs
à outrance, accusateur dans ses propos et incapable de la moindre parole d'encouragement ou de
reconnaissance. Il lui arrive de rentrer dans des colères violentes et de descendre en flèche
certains de ses collaborateurs. Au moment où les équipes ont le plus besoin de se sentir
soutenues pour maintenir leurs efforts sans se décourager, il se transforme en despote froid et
autoritaire. « On travaille dur en ces moments difficiles, on aimerait bien un minimum de
solidarité », expriment ses équipes.
Que peut-on retenir de ce cas ? Le stress, lié à la pression des résultats ainsi
qu'au manque de temps et de moyens pour les atteindre, est un fléau au sein
de l'entreprise moderne et les managers sont particulièrement touchés par ce
phénomène.
Observez cet automobiliste, coincé au volant de sa voiture dans un
embouteillage, excédé d'être retard, et dont la voiture vient de se faire
légèrement tamponner par une autre voiture. Il sort en furie de sa voiture et
se met à hurler une bordée d'injures vers le conducteur. Ce monsieur est
pourtant en général plutôt agréable et bien élevé. Alors pourquoi avoir
agressé cette personne de manière aussi insultante ? L'effet du stress. On a
parfois l'impression que certaines personnes changent de personnalité sous
l'effet du stress.
Pour un manager, savoir gérer son stress et aider ses collaborateurs à gérer le
leur est une compétence essentielle. En effet, l'impact de son comportement
sous stress peut avoir des effets néfastes sur la motivation des équipes et sur
les résultats. Apprendre à gérer son stress passe par la gestion de ses
émotions[10] et implique un travail sur soi, qui n'est certes pas facile, mais
dont l'aboutissement est source d'épanouissement tant sur le plan personnel
que professionnel.
La peur
Exemple
Martha a peur de « s'attendrir » et d'être trop sympa vis-à-vis de ses collaborateurs, au détriment
des résultats. Elle a peur de quitter la logique rassurante des fichiers Excel et de ne pas savoir
quoi dire, de devenir faible face aux demandes des personnes de son équipe. Peur de ne pas être
rationnelle, de quitter le monde structuré des tableaux de bord pour rentrer dans la logique floue
de l'être humain. D'être moins performante parce qu'elle aura été plus altruiste. Elle craint de
perdre pied et de perdre le contrôle. De ne plus maîtriser.
Pensez-vous que l'on puisse être les deux, à la fois rationnel et altruiste ?
Je me souviens d'une expérience intéressante avec un groupe de managers.
On avait fait un exercice où on leur avait demandé de se mettre debout et de
changer quelque chose sur eux. Certains ont enlevé leurs lunettes, d'autres
leur cravate, etc. On a refait l'exercice plusieurs fois, à la fin de l'exercice
beaucoup avaient enlevé ceinture, chaussures et chaussettes, mais… très peu
avaient pensé à rajouter quelque chose sur eux. Quelque chose qu'ils auraient
par exemple échangé avec un autre participant. Pourtant rien dans les
consignes n'interdisait de le faire.
La démonstration de l'exercice était de mettre en évidence que, la plupart du
temps, si l'on demande à l'individu de développer une compétence altruiste
qu'il n'a pas, il pense que cela va se faire au détriment de ses compétences
cognitives. Il pense par exemple que s'il prend du temps pour écouter ses
collaborateurs et pour tenter de les comprendre, cela va se faire au détriment
de son travail et de son efficacité. C'est une croyance limitante, c'est-à-dire
que les gens pensent ne pas pouvoir y arriver, alors qu'ils ont parfaitement la
capacité de le faire. On peut tout à fait être ouvert, chaleureux et à l'écoute
d'un collaborateur quand il le faut, et être ferme, autoritaire et concentré sur
l'action à d'autres moments. Questions de circonstances, d'interlocuteurs, de
stratégie. Et justement, l'excellence managériale, consiste à avoir le
comportement qu'il faut au bon moment.
Prenons un exemple. Est-ce se laisser attendrir que d'accorder un délai de
réponse d'un ou deux jours à la demande d'un collaborateur ? Cela dépend
des circonstances. Le manager doit être capable de sentir si la personne est
au bord de l'épuisement professionnel ou bien si elle exagère, il doit être
capable d'évaluer si, en fait, il appréhende de demander un délai à son propre
management ou bien si la finalité de la réponse ne tolère aucun retard, il doit
être capable de juger si l'urgence de la demande est exceptionnelle ou bien si
les demandes sont stockées dans des boîtes e-mails avant d'arriver
systématiquement en retard au niveau du dernier maillon de la chaîne.
Les règles et politiques RH de l'entreprise sont là pour favoriser l'impartialité
et l'équité. Mais la gestion de l'être humain ne peut pas rentrer complètement
dans des règles et politiques. Et c'est justement là que le manager a un rôle
primordial à jouer. Entrer dans la relation avec son collaborateur pour guider,
arbitrer, reconnaître, ajuster, recadrer. S'il ne le fait pas par peur de sortir de
l'univers rassurant du rationnel, il y a des liens qui ne se créent pas dans
l'entreprise et des transmissions qui ne se font pas dans les immenses
rouages de l'entreprise. Et ces chaînons manquants entraînent une cassure de
la motivation et de l'engagement.
Développer ses compétences relationnelles ne se fait pas au détriment de ses
compétences cognitives. Au contraire, plus un individu est riche en
compétences diverses et expérimenté dans la manière de les mettre en œuvre
de manière adéquate, et plus il est capable de résoudre des problématiques
complexes.
Craindre de perdre du temps à développer la relation au détriment du travail
opérationnel et de l'efficacité chiffrée est une vision à très court terme des
choses. On laisse évidemment au manager le soin de trouver le juste
équilibre entre pas assez de temps et trop de temps. Dans la mesure où le
temps passé est correctement dosé, le temps passé à créer et entretenir la
relation avec un collaborateur n'est pas du temps perdu. Car le collaborateur
sera plus motivé, plus impliqué, voire plus compétent.
Certains managers, à l'instar de Martha, essaient de limiter la communication
avec leurs collaborateurs afin de limiter le risque de devoir faire face à des
demandes auxquelles ils ne sauront pas répondre, et de créer ainsi de la
frustration, du ressenti voire de la démotivation. Ils se disent qu'il vaut
mieux ne pas parler des problèmes, comme ça les problèmes n'existent pas.
Ou la politique de l'évitement. Le risque est que les problèmes, qui de toute
façon existent, s'enveniment du fait de ne pas être traités et explosent trop
tard, c'est-à-dire bien plus poisseux que s'ils avaient été traités à la base. Le
jeu en vaut-il bien la chandelle ? Écouter ses collaborateurs ne veut pas dire
être d'accord pour satisfaire toutes leurs demandes. La notion de rôle
abordée plus loin dans le chapitre pourra aider le manager à discerner quels
sont les intérêts en jeu, entre ceux de l'entreprise ceux des collaborateurs et
les siens propres, pour apporter des réponses appropriées. Des formations
« savoir dire non » et autres techniques d'assertivité peuvent également aider
à formuler des réponses dans des situations délicates.
Certains craignent de se dévoiler, d'avouer leurs faiblesses, leurs doutes, de
ne pas paraître aussi parfait que l'image qu'ils veulent bien donner. Est-ce
l'inquiétude de ne pas être apprécié en tant qu'individu ou bien celle de ternir
leur image et de courir le risque de voir leur progression de carrière mise en
péril ?
Que peut-on conseiller à Martha et aux managers qui lui ressemblent ? Avez-
vous déjà considéré que, d'une certaine manière, la peur est un sentiment
utile ? De manière intuitive, elle nous protège du danger. Dans le contexte de
l'entreprise, elle nous envoie un signal, qui, s'il est détecté de manière
adéquate, nous permet de prendre des mesures pour éviter d'échouer. Mais si
cette peur est trop intense, alors elle nous empêche d'avancer et de réussir.
Un travail avec un coach peut alors s'avérer nécessaire.
Il ne s'agit pas de supprimer complètement nos peurs, afin de rester réceptif
aux signaux qu'elles transmettent, mais de savoir les gérer.
Une manière d'aborder la rencontre avec l'autre, en étant ouvert tout en se
protégeant, peut être d'utiliser la notion de rôle.
La méthode 3R4R
Ce rôle qui vous apporte support et inspiration, doit être le vôtre : vous
devez passer du temps à le définir, à le rendre opérationnel, à le faire évoluer
au cours de votre vie professionnelle. Pour construire ce rôle, vous pouvez
vous appuyer sur trois sources, trois groupes de données d'entrée que l'on va
appeler référentiels :
Exemples : Savoir gérer une équipe, connaître le droit du travail pour les aspects managériaux
–
–
Exemples : Marc mon N+2 il y a 3 ans, Mélanie VP Marketing chez XXX, Le Manager intuitif
, Meryem Le Saget, Dunod, 2006
–
–
Comment font-ils pour résoudre les difficultés que je rencontre ?
–
–
Mes trois plus belles réussites en tant que manager. Qu'ai-je appris ?
Exemple : démission de NN
Ce que j'ai appris : impact de l'absence d'entretiens réguliers en face-à-face avec la personne
qui m'auraient peut-être permis de « sentir » le départ prochain et d'y remédier
1–
Ce que j'ai appris :
2–
Ce que j'ai appris :
3–
Ce que j'ai appris :
Exemple : importance de savoir gérer son stress et de savoir prendre du recul, importance de la
capacité de discernement, savoir cultiver les relations à tous les niveaux
–
–
–
Mes valeurs
Exemple : en quoi la décision que je vais prendre est-elle bonne pour l'entreprise, pour la
personne et pour moi ? Qu'est-ce qui est sous mon contrôle, qu'est-ce qui ne l'est pas ? Quelles
vont être les conséquences de la décision que je vais prendre ?
–
–
–
Une image, une photo, une phrase, un proverbe, une citation, une réflexion. Votre devise.
–
–
–
La reconnaissance, outil
de développement personnel
Zoom sur…
la méthode d'essais-ajustements
Peut-on changer ? La réponse est oui. On peut changer ses comportements.
Pour autant, changer d'un seul coup d'un seul n'est ni facile ni souhaitable. Lorsque nous
changeons nos comportements, il y a fort à parier que les comportements de ceux avec qui
nous interagissons changent également et que par effet de rétroaction leurs changements aient
un effet sur notre propre changement. Un changement trop rapide ou trop radical de notre
part entraînerait peut-être une réponse trop violente de notre environnement.
Il convient de commencer par changer son regard sur le monde et l'image que l'on a de soi, en
construisant dans sa tête l'image de cette nouvelle personne : humaine, ouverte, et… quoi
d'autre en ce qui vous concerne ?
Ensuite, il s'agira d'imaginer le chemin à parcourir pour devenir cette personne, de jalonner
ce chemin d'actions concrètes et de commencer par les premières actions. Les toutes premières
seront de petites actions, d'abord parce que c'est plus facile à mettre en œuvre et ensuite parce
que cela permet de corriger facilement si cela ne fonctionne pas. Être convaincu de la réussite
de la démarche mais se donner le droit à des erreurs de parcours. De petites erreurs, car de
petites actions, qui vont permettre d'apprendre et de progresser.
La méthode d'essais-ajustements, dont le principe est d'essayer puis de rectifier si nécessaire
avant de continuer est une méthode extrêmement efficace. Elle consiste à essayer à petits pas,
par petites touches, afin de ne pas perdre la face si cela ne marche pas et de pouvoir rectifier
facilement. Elle permet de changer tout en restant soi-même, d'intégrer de nouveaux
comportements dans notre manière d'être, sans rupture avec notre identité, de tenir compte des
réactions de notre environnement pour évoluer avec lui.
Dans le domaine de la reconnaissance, elle consiste à démarrer très doucement et à observer
les réactions chez ses collaborateurs. Observer quelles sont leurs besoins et leurs
préoccupations, tenter quelques réponses, observer, s'arrêter ou ajuster et continuer. Observer
leurs feedback, c'est-à-dire ce que cela change chez eux, mais également observer ce que cela
change chez soi et pour l'entreprise. Ajuster, contrôler, progresser.
Le sourire, tremplin de dépassement de soi
Essayer d'apprendre à connaître les autres, de témoigner de la
reconnaissance : si ce n'est pas inné, ne court-on pas le risque de faire
semblant ? De paraître complètement hypocrite et démagogique ? De jouer
un rôle ? Vous craignez les réactions du genre, « tiens, il l'a lu dans un
manuel et il me le restitue aujourd'hui » ?
Tout dépend de la manière dont vous le faites. Si vous le faites avec le cœur,
cela sera authentique. Ce qu'il y a d'intéressant avec la méthode d'essais-
ajustements, c'est que vous avez le droit de vous tromper. Et de
recommencer. Jusqu'à trouver votre propre style. Au début, cela ne paraitra
peut-être pas naturel, et puis petit à petit cela deviendra une partie de vous-
même. Et entre temps, les gens auront apprécié vos efforts.
Avez-vous déjà testé la capacité d'entraînement du sourire, lorsqu'on le fait
avec conviction ? Le philosophe Alain préconisait de faire semblant d'être
heureux, de mimer le bonheur, pour finalement réussir à être heureux[1]. En
d'autres termes, en se forçant au début à sourire, probablement que ce
dernier viendra ensuite naturellement.
Bien sûr, j'imagine que vous ne faites pas partie des gens qui manipulent,
qui séduisent dans le but d'obtenir quelque chose, qui communiquent avec
de faux sourires. Ces gens-là sont mus par leurs propres intérêts au
détriment des intérêts des autres. Ils témoignent de la fausse reconnaissance
dans l'objectif d'obtenir quelque chose en retour à leur propre profit. Mais
en général, ils ne peuvent pas jouer ce jeu-là très longtemps, car les gens ne
sont pas dupes et la relation devient infructueuse pour tout le monde.
Faire preuve d'empathie, c'est avoir la capacité de se mettre à la place de
l'autre, c'est essayer de comprendre ce qu'il ressent. Sans pour autant se
laisser déborder par l'autre. Transmettre un vrai sourire de reconnaissance,
c'est savoir dire merci pour ce que la personne a fait, la féliciter, parce que
vous appréciez la contribution de la personne à sa juste valeur. Cela peut
aussi être un sourire de gratitude, ou un sourire associé à un regard
d'admiration.
Vous pouvez aussi recadrer et sanctionner la personne par rapport à des
actions avec un visage ferme, et sans sourire. Et peut-être, mais pas
systématiquement, lui adresser en conclusion un sourire de compassion ou
d'encouragement qui exprime que vous n'en voulez pas à la personne et que
vous lui faites confiance pour redresser la barre.
Vous pouvez adresser régulièrement un sourire de sympathie à vos équipes
sans vous sentir obligé d'être tout le temps sympathique. Il y a des moments
où l'autorité ou la rigueur s'imposent et dans ces cas là… vous ne souriez
pas.
Qui êtes-vous ?
Que veut dire pour vous, réussir votre vie de manager ? Gagner un bon
salaire, diriger une entreprise en croissance et profitable, avoir de bonnes
relations de travail, et en parallèle avoir une famille avec enfants ?
D'accord, et au-delà de ça, qu'est-ce qui vous pousse, qu'est-ce qui vous
nourrit, qu'est-ce qui vous fait avancer ? Qu'est-ce qui fait que vous êtes
différents des autres ? Vous êtes qui, vous, à l'intérieur de vous-même ?
Qui êtes-vous, en dehors du rôle de manager que vous assurez ? Carl Jung
appelait persona cette partie de nous-même que nous présentons en
société[2]. Persona fait référence au masque que les comédiens portaient
dans l'antiquité. Souvent, nous nous identifions à ce masque, cette façade
que nous offrons à la société, à notre rôle social, alors que nous sommes en
fait beaucoup plus que cela. Nous ne sommes pas réductibles à notre rôle
social. Nous avons un moi profond, la plupart du temps inconscient, qui
nous permet de donner un sens à notre vie. Accéder à notre moi profond, ou
du moins en repérer les signes, les besoins, les émotions, et assurer la
congruence avec le rôle que nous jouons, nous permet d'être bien avec
nous-même.
Nous ne jouons pas un rôle comme un acteur qui jouerait un personnage
différent de lui-même. Ce rôle fait partie de nous-même, car il est étayé sur
notre moi profond, il est forgé par notre raison de vivre, il est mis en
mouvement par nos convictions, nos émotions et nos valeurs.
C'est ce « vous complet », résultat de la congruence entre votre rôle de
manager et votre moi profond, qui s'exprime lorsque vous tissez des
relations avec les autres. Qui anime votre regard, qui allume votre sourire.
Qui fait de vous un être vrai, un manager vrai.
Votre rôle de manager vous permet de faire votre métier avec
professionnalisme, de rester ferme quand il le faut et de vous guider dans
votre vie professionnelle. Votre moi profond vous permet d'exercer votre
métier en étant vous-même, de prendre du plaisir et de tisser des relations
fructueuses pour vous et pour les autres.
Nous avons chacun notre propre vision du monde, construite au fil du temps
en fonction de notre personnalité, de notre culture et de notre histoire
personnelle. Notre vision du monde façonne nos comportements en
entreprise, et ceux-ci nous paraissent aller de soi. C'est souvent avec la
rencontre marquante d'une personne différente de nous, ou bien lors d'un
changement d'entreprise ou encore lors d'un déménagement à l'étranger que
l'on se rend compte que des comportements qui nous paraissaient naturels
ne sont en fait naturels que dans un contexte donné, une vision du monde
donnée.
Mais pourquoi attendre un changement subit pour faire évoluer nos
comportements ? Pourquoi ne pas décider volontairement d'une évolution
de nos comportements dans l'objectif d'accroître le bien-être et la
motivation des équipes ? Car une question fondamentale se pose : nos
comportements nous paraissent naturels car « C'est comme ça que cela se
fait… », mais il y a probablement des comportements qui sont plus adaptés,
plus efficaces dans nos actes de tous les jours et vis-à-vis des personnes que
nous côtoyons. La bonne nouvelle, c'est que le cerveau étant d'une plasticité
incroyable, on peut changer nos comportements. Petit à petit. En fonction
de ce qui est bon pour nous et pour le collectif. Pour cela, il faut écouter,
observer les comportements des autres et comprendre. Se débarrasser de ce
qui n'apporte rien et s'inspirer de ce qui marche.
Pour être épanoui dans son travail et alimenter sa motivation, un individu a
besoin de se sentir utile, valorisé ou compétent dans le regard des autres, et
en particulier dans celui de son manager. Ce regard qui le reconnaît dans sa
démarche professionnelle et l'encourage à continuer.
Son besoin de reconnaissance, il l'exprimera de manière personnelle. Nous
n'avons pas entre nos mains les clés de tous ces paramètres, ni le décryptage
de tous les comportements. Mais ce que nous pouvons avoir, c'est la volonté
de le reconnaître, de communiquer et de s'enrichir de cet échange. S'enrichir
des visions du monde des autres, c'est se donner la possibilité de grandir. De
changer, en mieux. C'est ouvrir des portes à des solutions plus innovantes
pour l'entreprise.
Les études récentes sur le lien entre épanouissement au travail et réussite
mettent toutes en exergue un critère qui semble s'avérer être la clé de la
réussite dans les entreprises modernes : l'importance des relations entre les
personnes[1]. Les personnes ayant un réseau relationnel développé sont plus
résistantes face aux difficultés, obtiennent plus facilement les informations
dont elles ont besoin et d'une manière générale réussissent mieux que les
autres.
En cultivant des relations enrichissantes au sein de l'entreprise, notamment
par la pratique de l'art de la reconnaissance, le manager assume son rôle de
manière plus professionnelle et progresse sur le chemin qui le mène à lui-
même. C'est au travers des relations avec les autres que le manager
consolide sa performance et construit son propre bien-être.
Vous l'avez compris, la pratique de la reconnaissance est bien plus qu'un
outil de motivation, c'est aussi un formidable outil d'épanouissement et de
bien-être. Pour ceux qui en bénéficient, mais également pour ceux qui la
pratiquent.
La reconnaissance serait donc contagieuse. Pour le bien-être de tous.
Épilogue
Vous qui avez eu le courage de me lire jusqu'à cette page (bravo, vous avez
fait le plus dur !), n'attendez pas et définissez tout de suite votre plan
d'actions. Prenez une page blanche et cogitez.
Que retenez-vous de ce livre ?
Qu'allez-vous mettre en place en termes de plan d'actions ? Quel en sera
l'objectif global et combien de temps vous donnez-vous pour l'atteindre ?
Quels en sont les cinq premières étapes ?
Quand allez-vous commencer et avec quelles personnes ?
Et puis… avant de fermer ce livre, notez quelques mots pour vous, rien que
pour vous. Des mots qui vont vous aider dans votre vie de manager. Vos
projets, vos désirs, vos rêves les plus fous…
Bibliographie