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EXPERT Canin

Article
de synthèse

MÉDECINE PRÉVENTIVE NAC


Frédéric Vlaemynck,

Bilan de santé
Céline Depas,
Émilie Tessier
Cliniques vétérinaires CaduVet
Parc Eurasanté
57, rue Salvador-Allende

d’un psittaciforme
59120 Lille-Loos

0,05 CFC
par article lu

Avant qu’elles ne prennent plus d’ampleur, bon nombre d’affections et d’erreurs environnementales
peuvent être détectées grâce à un bilan de santé précoce. La demande de la clientèle pour cette
médecine préventive est en constante augmentation.
fLa visite annuelle avec notamment santé de l’animal et exemple, dépistages de la chlamydiose aviaire, de la cir-
chez un vétérinaire l’organisation doit être complété covirose aviaire, ou maladie du bec et des plumes, de la
ou lors de l’achat de la cage et par des examens polyomavirose, de la bornavirose aviaire, ou maladie de
d’un oiseau est l’alimentation complémentaires : dilatation du proventricule, etc.). Pour ces examens, il
une étape clé donnée, et de prise de sang et convient de relever la technique de laboratoire utilisée,
Résumé

dans le processus prévenir les troubles écouvillons pour pour juger de sa fiabilité, et la date de réalisation pour
d’adoption. Elle comportementaux le dépistage de estimer les risques de contamination ultérieure avant
permet d’aborder liés à un certaines affections,
acquisition. En cas de possession d’autres animaux, le
les modalités environnement analyse de selles
recueil des différentes espèces, de leur dépistage et de
de l’acquisition, hypostimulant. pour une évaluation
de vérifier les L’examen clinique de la flore digestive leurs antécédents médicaux est nécessaire. Les modalités
conditions de fournit un premier ou encore des clichés du sevrage sont à détailler (âge de transition, type d’ali-
maintenance, aperçu de l’état de radiographiques. ments, température et fréquence des repas si élevage à
la main) [13].

2. environnement
Une bonne qualité de l’air est primordiale dans l’environ-

L
nement des oiseaux. Un accès direct à la cuisine est donc
e bilan de santé d’un psittaciforme peut embar- à éviter, tout autant que la présence de fumeurs, d’une
rasser un vétérinaire peu habitué aux oiseaux. cheminée, d’encens, etc. Les courants d’air et les varia-
Cependant, l’absence de cette consultation pré- tions brusques de température sont également à bannir.
ventive chez le jeune animal ou de sa reconduite De plus, l’exposition à un spectre lumineux complet (non
annuelle conduit parfois, quelques mois, voire seulement le spectre visible, mais également les UVA et
quelques années plus tard, à une consultation d’urgence UVB), disponible avec un accès extérieur ou des lampes
plus complexe où le pronostic vital de l’animal est engagé. adaptées, stimule l’immunité et le comportement. Un nyc-
Bien qu’il requière une démarche précise et rigoureuse, thémère physiologique est à respecter. Enfin, un environ-
ce service nécessite peu de matériel spécifique et sa mise nement calme doit être recréé, à l’écart de toute source de
en place dès le plus jeune âge (chez un animal souvent stress potentielle (pièce bruyante, chien qui aboie, enfant
docile) le rend accessible à tout vétérinaire. en bas âge). La cage est à considérer comme un abri pour
l’animal. Il doit pouvoir exprimer son comportement en

commémoratiFs dehors de celle-ci pour son bon épanouissement (accès


sur une pièce réservée, sur un arbre d’éveil) (photo 1) [13].
La consultation commence avec le recueil des commé-
moratifs (conditions de vie, antécédents médicaux de 3. Cage
l’animal, bilan de santé antérieur, etc.), laissant le temps La cage doit comporter des éléments indispensables
à l’oiseau de se calmer, après le stress du transport. (gamelles, perchoirs, jouets) qui, mal choisis, se révèlent
Nombre d’affections des psittaciformes sont liées à leur parfois dangereux (tableau 1) . Certains de ces objets,
environnement, à leurs conditions de maintenance et à notamment les cloches, les miroirs et les jouets en métal,
leur alimentation, d’où l’importance de ce recueil. peuvent être recouverts d’une surface galvanisée en zinc,
facilement accessible pour un bec crochu. De même, il
Conflit
d’intérêts
1. Acquisition convient de prêter attention aux jouets et aux gamelles
Le lieu, la date, le sexe et l’âge de l’animal sont à deman- peints qui sont susceptibles de contenir du plomb ou
Aucun. der, ainsi que les tests de dépistage effectués (par des composants non alimentaires. En plus des risques

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ENCADRÉ 1
Alimentation des psittacidés
f Fruits secs et graines germées
et graines : noix, (blé, millet, tournesol,
amande, pignon avoine, luzerne)
de pin, lin et céréales Distribués en quantité
(alpiste, millet) modérée, mais
Alimentation quotidiennement et
sèche à donner avec diversité. Chaque
occasionnellement, oiseau a ses goûts et ses
en friandises et en couleurs préférés.
récompenses. f Extrudés
f Fruits (pomme, (par exemple,
1 abricot, fraise, baie, Harrison®, Kaytee®)
1. Arbre d’éveil d’un perroquet. Cet outil permet figue, kiwi, raisin), Base de l’alimentation
l’enrichissement du milieu de l’animal, notamment par végétaux (carotte, quotidienne. La quantité
la recherche de nourriture et l’exposition à une source de
lumière contenant des UVA et UVB. Sa mise en place doit
courgette, fève, donnée dépend du
être progressive et de complexité croissante pour l’animal. haricot, pois, poivron) poids de l’oiseau.
photo : CaduVet

toxiques, les miroirs engendrent parfois une stimulation de l’espèce (20 à 30 g pour un gris du Gabon). Quelques
sexuelle pouvant être la cause d’affections de la repro- fruits secs et graines peuvent être exceptionnellement
duction (ponte trop fréquente, rétention d’œuf, etc.) [12]. donnés comme récompenses lors d’efforts musculaires
ou cérébraux importants.
4. Alimentation Pour les jeunes vendus non sevrés (pratique à déconseil-
Les mélanges de graines pour perroquets, largement ler car des troubles comportementaux peuvent en décou-
répandus en animalerie, sont carencés en plus de trente ler, et les soins de nourrissage demeurent ­complexes et
vitamines et minéraux indispensables, ainsi qu’en acides risqués pour des personnes inexpérimentées), les nour-
aminés. Ils contiennent, à l’inverse, d’autres composés rissages reposent sur une alimentation liquide adaptée
largement en excès tels que des lipides [3]. Sur le plan et de bonne qualité, à une température d’administration
qualitatif, leur composition est instable dans le temps et précise (38 à 39 °C, à vérifier avec un thermomètre). Tout
connaît une dégradation des teneurs en nutriments essen- écart de température entraîne un risque de régurgitions
tiels. De plus, ils ne sont pas toujours indemnes de para- ou de brûlures. L’aliment est donné jusqu’à un remplis-
sites et d’éléments fongiques (aspergillose, mycotoxines, sage raisonnable du jabot. Les propriétaires doivent
etc.). Avec le temps, une maladie de malnutrition s’ins- savoir palper celui-ci, afin d’être en mesure de déterminer
talle, aggravée par le tri de l’oiseau, qui préfère souvent l’heure du prochain repas, qui a lieu après que sa vidange
le tournesol et l’arachide [8]. Pour une alimentation soit bien engagée. Au fur et à mesure de la croissance
équilibrée, des aliments complets comme des extrudés de l’animal, les repas sont espacés et progressivement
sont recommandés (par exemple, Harrison®, Kaytee®), une alimentation sèche est introduite. La période de la
associés à un apport journalier de fruits, de légumes frais transition alimentaire varie d’une espèce à l’autre, par
et de graines germées (encadré 1). La composition et les exemple aux alentours du cinquième mois chez le gris
quantités journalières de ces extrudés varient en fonction du Gabon [13].

Tableau 1
Matériaux de cage et accessoires recommandés et déconseillés
pour les psittacidés
Intérieur de la cage Recommandés Déconseillés
Barreaux Les cages dénuées de zinc (zinc free) existent, Surfaces galvanisées avec zinc (présentes dans
mais elles sont onéreuses la plupart des cages)
Jouets Jouets en bois, en lin, en chanvre, en acier inoxy- Cloche, miroir, métal oxydable ou jouet à bord
dable, en bon état et sans risque traumatique tranchant
Gamelle Acier inoxydable Peinture, matériau inconnu
Litière Papier journal, essuie-tout, avec une grille de • Sable (irritant pour les voies respiratoires)
séparation • Accès direct aux matières fécales, sans grille de
séparation
Perchoir Branches d’arbres non toxiques (pommier, Perchoirs cylindriques uniformes (de type
­poirier, bouleau), de diamètres et de formes “manche à balai”) ou perchoirs plastiques striés
­différents, propres et non parasitées

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Examen clinique
L’examen clinique d’un oiseau se décompose en deux
parties : un examen à distance en premier lieu, suivi, si
l’état de l’animal le permet, d’un examen rapproché avec
contention.

1. Examen à distance
L’examen à distance permet d’évaluer non seulement
l’animal, mais aussi son environnement. La présence de la
cage de vie, ou, à défaut, de celle du transport, permet de
connaître les matériaux au contact de l’oiseau, ainsi que
l’aspect des déjections des dernières 24 heures. La forme,
le volume, la couleur et la consistance de ces dernières
(urines, urates et selles) sont à noter afin de détecter une
éventuelle anomalie (tableau 2). Les propriétaires doivent
2a donc être avertis de ne pas laver le fond de la cage le jour
qui précède la consultation [3].
L’observation de l’animal permet d’apprécier son état
de vigilance, l’existence de difficultés respiratoires (bec
ouvert, mouvements de la queue, dilatation des sacs
aériens), sa position (yeux mi-clos, dos rond) ou encore
2a et 2b. Anomalies le plumage (picage, déformation, décoloration, plumage
du plumage.
2a. Aberrations ébouriffé) (photos 2a et 2b) [14].
chromatiques chez Cette première étape permet d’identifier rapidement les
un gris du Gabon premières anomalies présentes, d’évaluer la sévérité du
(Psittacus erithacus)
atteint d’une circovirose trouble et d’orienter l’examen clinique rapproché, si tou-
aviaire (maladie du bec tefois la contention est réalisable.
et des plumes).
2b. Picage intensif chez
un cacatoès à huppe 2. Contention
jaune (Cacatua galerita). Afin que l’oiseau n’associe pas le stress de l’examen à son
2b photos : CaduVet propriétaire et que ce dernier ne coure aucun danger, la
contention de l’oiseau s’effectue le plus souvent avec un

Tableau 2
Principales anomalies lors de l’évaluation des selles d’un oiseau
Principales anomalies Étiologie
Diarrhée Causes variées : alimentaire, inflammatoire infectieuse ou non, métabolique (insuffisance
rénale, hépatopathie, pancréatite), tumorale
Fientes volumineuses, résidus Maldigestion, malabsorption (maladie du proventricule), femelle reproductrice active,
non digérés ­organomégalie abdominale
Méléna Origine infectieuse (parasitaire, virale, bactérienne, fongique), coagulopathie, tumeur gastrique
(occasionnelle, surtout chez la perruche ondulée), ulcère proventriculaire ou ventriculaire
Fientes malodorantes Surdéveloppement de bactéries (clostridiennes notamment) ou mycoses, rétention de fèces
(cacatoès en particulier)
Fientes aériques Appelées “selles pop-corn”, fréquentes lors de giardiose chez les cacatoès
Urates jaunes à verts Biliverdinurie et hépatose le plus souvent
Urates rouges à roses • Sang ou hémoglobine (fréquent lors de néphropathie)
• Urates roses à marron lors d’intoxication au plomb dans certaines espèces (amazones,
­eclectus, cacatoès)
Urates orange Colorants artificiels alimentaires ou iatrogènes (injections de vitamine B)
Urates pâteux Déshydratation
Polyurie Causes variées : néphropathie, métabolique (diabète sucré, pancréatite, diabète i­nsipide),
­infectieuse (sarcocystose), toxique (métaux lourds), tumorale (adénome pituitaire),
­gastro-entérite, affection rénale
Anurie • Obstruction : fécolithes ou urolithes, rétention d’œuf, prolapsus cloacal, papillomatose
• Cause fonctionnelle : maladie rénale, déshydratation sévère
L’observation des selles fait partie intégrale de la consultation d’un psittacidé. Associée aux commémoratifs et à l’examen clinique, elle permet de dépister
certaines affections de manière précoce, parfois avant l’apparition d’autres signes cliniques. D’après [3].

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ENCADRÉ 2
Principales règles
de contre‑indication
de la saisie d’un psittaciforme
f Atteinte respiratoire : autour du doigt,
dyspnée, respiration bec notamment.
ouvert, polypnée. f Animal immobile une
f Yeux clos pendant fois saisi, qui ne cherche
toute la première partie pas à bouger ni à mordre
de la consultation. la serviette.
f Faiblesse extrême ; f Au moindre doute,
ne serre pas les griffes relâcher l’animal.
3
Cette liste n’est pas exhaustive. D’après [13].

assistant. L’oiseau est alors enroulé dans une serviette, les


ailes plaquées le long du corps, les pattes tenues dans une
main, pendant que la tête est maintenue en arrière du bec,
par le pouce et l’index du manipulateur (photo 3) [14].
Pour les grands psittaciformes, dans les très rares cas où
l’oiseau est parfaitement apprivoisé, la contention peut
s’effectuer avec l’aide du propriétaire. Ce dernier main-
tient son animal debout sur la table, les mains de part et
d’autre de son corps, tout en le rassurant, pendant que le
vétérinaire réalise son examen clinique.
Dans tous les cas, l’examen doit être conduit dans un
court laps de temps (un quart d’heure au maximum)
pour prévenir tous risques pour l’animal. Le recours à
la sédation est envisageable pour faciliter cet examen 4
clinique et la réalisation des examens complémentaires
3. Contention à l’aide d’une serviette chez un gris
(par exemple, inoculation intranasale d’un mélange de du Gabon (Psittacus erithacus).
midazolam et de butorphanol). Pour les petits psittaci-
4. Contention à une main entre index et majeur
dés animaux exotiques, une contention est réalisable au chez un kakariki à front jaune (Cyanoramphus auriceps).
creux de la main, en positionnant le cou de l’animal entre photos : CaduVet
l’index et le majeur (photo 4) [14].
Avant de saisir l’animal, il convient de s’assurer qu’il est
en état d’être maintenu (espèces très sensibles au collap- 3. Examen rapproché
sus cardiorespiratoire). Les principales règles de contre- L’examen rapproché comprend une inspection générale
indication de la saisie d’un oiseau concernent surtout les du corps, une palpation et une auscultation cardiorespi-
détresses respiratoires, les états de choc et les faiblesses ratoire et la pesée de l’animal.
extrêmes (encadré 2) [13].
Inspection
Lors de l’inspection sont à inspecter (sous un bon éclai-
rage et au besoin à l’aide de dispositifs grossissants tels
que des loupes chirurgicales) :
Points forts - le plumage ;
- l’état de déshydratation ;
€La réalisation du bilan de santé d’un psittaciforme requiert une
démarche précise et rigoureuse, mais reste accessible à tout praticien. - la tête, les yeux et les narines ;
- le cloaque ;
€La correction précoce des erreurs environnementales et alimentaires - la glande uropygienne ;
permet de prévenir de nombreuses affections. - les ailes ;
€L’alimentation conseillée d’un psittacidé est composée d’extrudés, - les pattes (encadré 3, photos 5a et 5b)
et de fruits et légumes variés. L’apport de graines et de noix doit être
contrôlé. Palpation
€Avant de pratiquer l’examen clinique rapproché d’un oiseau, La palpation du corps commence avec celle du jabot, pour
il convient de s’assurer qu’il n’est pas dans un état qui contre-indique vérifier sa vidange, les signes d’impaction, de traumatismes
sa contention. (mutilation, brûlure) ou de douleur. Celle du bréchet et
des muscles pectoraux est nécessaire pour apprécier l’état
€Un dépistage sanguin des principaux virus atteignant les psittacidés corporel de l’oiseau. Bien que rarement informative en rai-
est recommandé lors de l’achat.
son du peu d’espace disponible, la palpation de la cavité
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5a et 5b.
Gale du bec
et des pattes
chez une per-
ruche ­ondulée
(­Melopsittacus
undulatus),
due à l’acarien
­Knemidocoptes
pilae.
5a. Hyperkéra-
tose du bec.
5b. Hyperkéra-
tose des pattes.
photos : CaduVet

5a 5b

cœlomique peut permettre de détecter des anomalies L’auscultation cardiaque se réalise de part et d’autre de
comme une ascite ou une masse abdominale (organo- la région pectorale. L’apex du cœur est écouté en plaçant
mégalie, rétention d’œuf) [14]. le stéthoscope juste en arrière du sternum au niveau de
l’abdomen ventral [3, 4].
Auscultation
L’auscultation donne une première appréciation des fonc-
tions cardiaque et respiratoire. Le stéthoscope pédiatrique Examens
est l’outil idéal. Les poumons sont écoutés sur la face dor-
sale de l’animal. Si un léger souffle au passage de l’air complémentaires
n’a rien d’anormal, en revanche, la présence de craque- 1. Analyse de selles
ments ou de sifflements indique un trouble respiratoire L’analyse de selles peut s’effectuer sur un écouvillon cloa-
sous-jacent. Les sacs aériens abdominaux et thoraciques cal ou des fientes fraîches.
s’auscultent aussi facilement. Les principaux bruits res- L’examen direct entre lame et lamelle avec du sérum
piratoires anormaux sont le plus souvent associés à des physiologique à la température de l’oiseau permet de
rhinolithes, à des sinusites, à des sténoses trachéales ou rechercher la présence de parasites internes : helminthes
encore à des affections des sacs aériens. et protozoaires (coccidioses, giardiose) principalement.

ENCADRÉ 3

Inspection rapprochée
f Plumage présenter d’écailles, de décoloration ni de f Glande uropygienne
L’aspect et l’intégrité (picage, bords déformation. Les oreilles sont examinées Chez les espèces en possédant une, la
abîmés, présence de lignes de stress), la minutieusement. Le conduit auditif glande uropygienne doit être examinée
couleur (aberration chromatique), ainsi externe, tapissé de glandes sébacées et (possibilité de surinfection ou de néoplasie).
que la propreté du plumage sont vérifiés. cérumineuses, est sensible aux infections. f Ailes
Il convient de rechercher également les La cavité buccale peut être maintenue Les ailes sont à déployer une par une pour
signes d’éventuels d’acariens ou d’autres ouverte à l’aide d’un spéculum. L’aspect vérifier l’absence de lésions des plumes,
parasites externes (rarissimes, sauf pour les des choanes (atrophie des papilles lors cutanées ou osseuses, ainsi que pour
perruches ondulées) [13, 14]. d’hypovitaminose A) et l’éventuelle mettre en évidence une coupe de plume
f Déshydratation présence de placards diphtériques ou antérieure. Les signes de saignements,
La déshydratation est signée par des globes de points de coloration blanchâtre consécutifs à un traumatisme ou à une
oculaires enfoncés, un aspect plissé de la (hypovitaminose A, trichomonose chez la coagulopathie, sont à rechercher [14].
peau autour de l’œil, une perte d’élasticité perruche ondulée et la perruche calopsitte, f Pattes
de l’épiderme de manière générale et la candidose) sont à vérifier lorsque l’une de Les pattes sont étendues à la recherche
présence de fausses membranes dans la ces anomalies est retrouvée, un écouvillon d’une plaie, d’une masse, d’une lésion
cavité buccale [13, 14]. est recommandé [3, 4]. secondaire à la présence d’une bague,
f Tête, yeux et narines f Cloaque d’une hyperkératose des extrémités
La tête, les yeux et les narines doivent Il convient de s’assurer de la propreté (hypovitaminose A, gale des pattes) ou
être propres, sans écoulement (épiphora, du cloaque, de l’absence de ténesme ou d’autres signes cliniques de parasitose
jetage, épistaxis). L’opercule kératinisé de diarrhée. Pour certaines espèces, le [8]. Les pododermatites, très fréquentes,
nasal, présent de manière physiologique proctodeum est examiné pour vérifier sont à dépister précocement pour une
à l’entrée de l’orifice nasal, est à distinguer l’absence de papillomes cloacaux. Un récupération la plus rapide possible. Elles
d’un corps étranger, d’un granulome écouvillon est recommandé afin de réaliser sont majoritairement liées à la qualité des
ou d’un rhinolithe. Le bec ne doit pas une analyse perchoirs et à l’hygiène de la cage [14].

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6 et 7. Prise
de clichés
radiographiques
(face et profil)
chez un gris du
Gabon (Psittacus
erithacus).
8. Aspect
microscopique
d’un frottis
sanguin chez un
oiseau.
photos : CaduVet

6 7

La coloration de Gram, bien que ne permettant pas de


mettre en évidence des bactéries pathogènes (à la diffé-
rence d’une coproculture) donne un aperçu de l’état de
santé de l’oiseau. En effet, chez les psittaciformes, un ani-
mal sain dont le régime alimentaire est approprié présente
une population bactérienne fécale largement dominée
par les bactéries à Gram positif (> 90 %), tandis que le pro-
fil bactérien fécal d’un oiseau victime de malnutrition, ou
d’une maladie digestive ou systémique est modifié (aug-
mentation de la quantité de bacilles à Gram négatif, deve-
nant majoritaires). Des éléments cellulaires (leucocytes,
cellules épithéliales) ou fongiques (Macrorhabdus spp.,
Aspergillus spp., Candida spp., etc.) peuvent également
être retrouvés. Avant de certifier leur pathogénicité, les 8
résultats doivent être interprétés en tenant compte de l’ali-
mentation et de l’environnement. En effet, dans certains Pour le profil, l’oiseau est positionné sur le côté droit afin
nutriments, notamment ceux pour les jeunes oiseaux, ou de limiter la vision du proventricule situé à gauche, les
issus de l’alimentation humaine (pain, biscuits, etc.), des ailes parallèles l’une sur l’autre caudalement au corps
levures sont présentes, susceptibles de se retrouver dans (photos 6 et 7) [2, 9].
les selles [3]. Les principales anomalies radio-visibles sont une orga-
La présence de sang occulte est à rechercher à l’aide de nomégalie (hépatomégalie, dilatation du proventricule),
tests rapides prêts à l’emploi (Hemo-FEC®). une microcardie (déshydratation) et des striures des sacs
aériens ou, à l’inverse, leur comblement lors d’aérosac-
2. Autres écouvillons culite [9].
Les selles ne sont pas le seul support intéressant pour Une athérosclérose (dépôt de lipides sur la paroi des
une analyse microscopique. Des observations de lames artères entraînant leur sclérose, conséquence d’une
réalisées à partir d’écouvillons du jabot ou des choanes alimentation déséquilibrée) est parfois visible à l’exa-
peuvent également se révéler très instructives. La présence men radiographique [1]. La densité de la silhouette car-
d’agents infectieux pathogènes se visualise sur un simple diaque est augmentée et la radio-opacité des poumons
étalement frais ou une coloration (écouvillon humidifié s’accroît au fur et à mesure de leur congestion. Dans les
effectué sur des placards blanchâtres buccaux avec, après stades avancés, les parois des vaisseaux, principalement
observation entre lame et lamelle, des éléments spiralés l’aorte et les artères brachiocéphaliques, deviennent à
mobiles identifiés comme des protozoaires du genre leur tour plus radio-opaques. Les vaisseaux cardiaques
Trichomonas). élargis, secondairement à la congestion pulmonaire,
voire ­s ystémique, peuvent être aisément différenciés
3. Examen radiographique sur le profil [9].
Un cliché radiographique du corps complet de l’animal
permet une appréciation des différents organes internes. 4. Analyses sanguines
Afin de respecter les règles de radioprotection, de pré- Le dernier examen complémentaire lors du bilan de
venir tout traumatisme et d’obtenir un positionnement santé d’un psittacidé est une prise de sang avec une
parfait, il est réalisé sous anesthésie gazeuse (isoflurane, numération et une formule sanguines et un panel biochi-
sévoflurane). Cet examen est très utile pour un bilan mique (différent selon les espèces) (photo 8). Elle permet
d’acquisition. notamment le dépistage des principaux virus aviaires et
Pour le cliché de face, l’oiseau est maintenu sur le dos, un sexage peut également être proposé à cette occasion
les ailes écartées de chaque côté et les pattes bien droites. (tableau 3).

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De plus, la plupart des intervalles de référence héma-


tologiques et biochimiques disponibles dans les don-
9. Prise de nées publiées ont été réalisées chez un nombre limité
sang à la veine d’oiseaux. Ils sont donc souvent non représentatifs de la
jugulaire droite
chez un ara (Ara population générale. Cet examen capital permet donc
ararauna). d’établir des normes pour l’oiseau, utilisées ultérieure-
photo : CaduVet ment en cas de maladie.
Les oiseaux possédant un grand volume sanguin et tolé-
rant bien l’hémodilution, les prélèvements peuvent s’éle-
ver jusqu’à 1 % du poids vif de l’animal (soit 1 ml pour
un individu de 100 g). Le site de réalisation le plus utilisé
9 est la veine jugulaire droite, chez un oiseau vigile ou sous
Tableau 3
Principales affections dépistables des psittacidés
Épidémiologie Symptômes Évolution et pronostic Diagnostic et traitement
Chlamydiose ou psittacose (Chlamydia psittaci)
• Espèces : toutes, calopsitte et per- • Dépression • Évolution : suraiguë (jeunes), • Diagnostic : PCR sur un ­écouvillon
ruche ondulée souvent porteuses • Digestifs : anorexie, perte de subaiguë à chronique conjonctivo-naso-cloacal et
saines, aras et amazones + poids, diarrhée (souvent jaunâtre • Pronostic : réservé, affection ­sérologie
• Âge : plus grande sensibilité des trahissant une atteinte hépatique) ­souvent fatale si non traitée • Traitement : le traitement de choix
jeunes • Respiratoires : sinusite, dyspnée est la doxycycline ou l’azithromy-
- Incubation : difficile à déterminer : • Oculaire : conjonctivite cine pendant au moins 21 à 45
de 42 jours à plusieurs années • Urinaire : polyurie-polydipsie jours.
- Transmission : fèces, salive, urine Les autres tétracyclines sont uni-
et exsudats respiratoires, oculaires quement recommandées comme
et nasaux ; poussières de fientes additifs alimentaires
séchées
PBFD = psittacine beak and feather disease (maladie du bec et des plumes) (circovirus)
• Espèces : toutes, gris du Gabon, • Plumage : dystrophie du bec et • Évolution : aiguë (mort en 12 • Diagnostic : PCR sur sang
cacatoès, calopsitte et insépa- des plumes (décoloration ou aber- à 48 heures pour les jeunes) à • Absence de traitement spécifique
rables ++ ration chromatique, déformation, ­chronique ou de vaccin
• Âge : plus grande sensibilité des fracture, etc.) • Pronostic : réservé à sombre
jeunes (de moins de 3 ans) Chez le gris du Gabon, la principale
• Incubation : jusqu’à 4 semaines présentation est une anémie et une
• Transmission : poussières de leucopénie sévères, la plupart du
plume et fèces inhalées ou ingérées temps sans affection visible du plu-
mage
• Respiratoires
• Digestifs
Polyomavirose (polyomavirus)
• Espèces : toutes, perruche ondu- • Coagulopathie + • Évolution : aiguë (mort en 12 • Diagnostic : PCR sur sang et
lée ++ • Digestifs : amaigrissement, retard à 48 heures pour les jeunes) à ­écouvillon cloacal ou buccal, voire
• Âge : nouveau-nés et jeunes de vidange du jabot, régurgitation, ­chronique écouvillons sur foie, rate et reins si
• Incubation : 7 à 120 jours, essen- diarrhée • Pronostic : réservé à sombre l’animal est mort
tiellement 7 à 14 jours • Plumage : anomalies chez les per- • Absence de traitement et de
- Transmission : verticale ou hori- ruches ondulées ­vaccin en France
zontale (poussières de plume ingé-
rées ou inhalées)
Maladie de Pacheco (herpèsvirus)
• Espèces : toutes, amazones, • Digestifs : anorexie, diarrhée, • Évolution : suraiguë (mort subite) • Diagnostic : PCR sur sang et écou-
conures, aras ++ régurgitations à subaiguë villon cloacal ou buccal, analyse his-
• Transmission : mécanisme encore • Urinaires : biliverdinurie, polyurie- • Pronostic : réservé. Les oiseaux tologique (nécrose hépatique)
incertain polydipsie survivants deviennent potentielle- • Traitement : Acyclovir®(1), 80 mg/kg
• Respiratoires ment porteurs à vie PO/IM, 2 ou 3 fois/j pendant 10 jours
PDD = proventricular dilatation disease (syndrome de dilatation du proventricule) (bornavirus)
• Espèces : toutes (sauf la perruche • Digestifs : amaigrissement, retard • Évolution : aiguë à chronique • Diagnostic : analyses sérologique
ondulée). Surtout les aras et perro- de vidange du jabot régurgitation, • Pronostic : sombre avec la surve- et histologique des organes diges-
quets gris maldigestion nue de la mort dans les 2 ans après tifs (dont proventricule et gésier),
• Tout âge • Neurologiques l’apparition des symptômes PCR sur tissus, histologie démon-
• Transmission : par voies orale et trant les lésions caractéristiques du
cloacale jabot, PCR sur selles permettant de
• Mécanisme : infiltration lympho- détecter les animaux excréteurs
plasmocytaire a minima du proven- • Pas de traitement spécifique.
tricule Les AINS Cox-2 diminuent les
­symptômes
PCR : polymerase chain reaction, réaction d’amplification en chaîne ; PO : per os ; IM : voie intramusculaire ; AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens ; + : fréquent ; ++ : très fréquent.
(1) Médicament humain.
D’après [5-7, 10, 11, 15].

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expert
Bilan de santé
Canin
d’un psittaciforme

anesthésie volatile (photo 9). Les veines alaires ou méta- à partir de l’épidémiologie de la maladie qu’il recherche.
tarsiennes médiales sont parfois employées, mais avec un Des vaccins pourraient également apparaître sur le mar-
risque d’hématome plus conséquent [1]. ché [13]. ❚

Conclusion
Le bilan de santé des psittaciformes est bien plus qu’un
simple examen clinique. Avec son abord zootechnique
et la réalisation d’examens complémentaires simples, il
Summary
est accessible à tout vétérinaire ayant un intérêt et des
Health check for Psittaciformes
connaissances de base en médecine des perroquets. Ce
rendez-vous permet d’établir un lien de confiance entre fThe annual visit to a veterinarian or when buying a
bird is a key step in the adoption process. During the
les propriétaires et le vétérinaire, et assure le suivi régulier
consultation, the terms of the acquisition can be veri-
de l’animal tout au long de sa vie. fied, the maintenance conditions checked, including
Des études et recherches sont en cours dans le domaine the organisation of the cage and the food provided, and
de la médecine préventive aviaire. Elles permettront methods to prevent behavioural disorders associated
peut-être de compléter ces bilans, avec notamment le with a hypostimulant environment. Clinical examina-
développement des tests NAT (nucleic acid amplification tion provides an initial overview of the health status
testing, test d’amplification de l’acide nucléique) utilisant of the animal and must be supplemented by ancillary
les techniques de PCR en temps réel pour détecter plus tests: blood and swabs samples for the detection of cer-
précocement les infections actives que les méthodes tain diseases, faecal analysis for the evaluation of the
diagnostiques actuelles. Toutefois, pour ne pas se perdre intestinal flora or radiographs.
dans un screening trop vaste et onéreux, face aux nom-
breux tests de dépistage existants et à venir, le praticien Keywords
doit s’attacher à les interpréter dans le contexte clinique et Exotic pets, Psittaciformes, preventive medicine.

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