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Seq2 Economie Circulaire
Seq2 Economie Circulaire
ECONOMIE CIRCULAIRE
Dr. Abdoul Alpha Dia
Séquence 2: Les bénéfices de l’économie circulaire
De l’antiquité aux années 1970, l’homme n’a extrait et utilisé qu’une vingtaine de métaux. Depuis les
années 1950, leur consommation annuelle s’est multipliée par 20 et plus, particulièrement dans
l’industrie du bâtiment, des transports (automobiles, trains, avions) et de l’électroménager. Ils
paraissaient inépuisables mais s’avèrent aujourd’hui clairement en quantité limitée. Au moins huit
d’entre eux (argent, or, zinc, étain, plomb, cuivre, chrome, mercure) poseront des problèmes
d’approvisionnement dans plus ou moins quarante ans, au rythme de la consommation actuelle. En
outre, surtout pour l’électronique, on utilise désormais quarante nouveaux métaux (lithium,
germanium, tantale, gallium, etc.) majoritairement aussi en quantité limitée.
L’économie circulaire minimise donc la pollution. Elle agit en ce sens en fermant les cycles. Elle vise
à s’assurer que les produits sont non toxiques, qu’ils ont la plus longue vie possible et, qu’en fin de
vie, ces produits et les matériaux qui les composent reviennent en début de cycle pour servir à la
fabrication de nouveaux biens. Dans le cas des produits de courte vie, tels les produits d’hygiène, il
s’agit de pouvoir les retourner en toute sûreté à la terre, en enrichissant cette dernière, non sans en
avoir extrait des molécules utiles ou de l’énergie. Cette stratégie de boucles fermées permet ainsi de
minimiser les déchets et de réduire l’apport de ressources naturelles vierges qui devraient
autrement être extraites avec des répercussions environnementales importantes et, forcément, une
émission de contaminants et une pollution associées.
Productivité des terres et santé des sols. Selon les estimations, la dégradation des sols coûte 40
milliards de dollars par an dans le monde. Et ce chiffre ne tient pas compte des coûts cachés liés à
l’utilisation accrue des engrais, à la perte de biodiversité et à la disparition de paysages uniques.
L’augmentation de la productivité des terres, la réduction des déchets dans la chaîne de valeur
alimentaire et le retour des nutriments dans les sols permettront de revaloriser les actifs que
représentent les terrains et les sols. L’économie circulaire, en accompagnant un volume plus
important de matériaux biologiques vers les processus de méthanisation et de compostage, va
conduire à la réduction des besoins en nutriments additionnels. L’utilisation systématique des
déchets organiques disponibles pourrait contribuer à régénérer les terres et se substituer 2,7 fois aux
engrais chimiques. Si une approche d’économie circulaire est adoptée pour les systèmes
alimentaires, il serait possible de réduire la consommation d’engrais chimiques jusqu’à 80% d’ici
2050. Il s’agit ici de mettre en œuvre les principes de régénération.
Productivité et préservation des terres agricoles. Le coût de la dégradation des sols est estimé
mondialement à 40 milliards de dollars par an, sans prendre ne compte le coût caché de l’utilisation
croissante d’engrais synthétiques, la perte de la biodiversité et des paysages remarquables. Une
meilleure productivité des sols, moins de perte dans la chaîne de valeur alimentaire, ainsi que le
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ECONOMIE CIRCULAIRE
Séquence 2: Les bénéfices de l’économie circulaire
retour bénéfique de nutriments aux terres agricoles devrait permettre de restaurer les atouts de ces
écosystèmes. L’économie circulaire, en favorisant la digestion anaérobie d’un stock plus important
de matières organiques, puis grâce à la régénération des sols, devrait contribuer à la réduction des
besoins en nutriments complémentaires.
2. Bénéfices économiques
La croissance économique, telle que définie par le PIB, peut être atteinte essentiellement grâce à une
combinaison de revenus en hausse générés par les activités circulaires des marchés émergents, et de
la réduction des coûts de production attribuable à une utilisation plus efficace des intrants. Cette
évolution de la performance de la production économique affecte l’offre, la demande et les prix sur
l’ensemble du marché, se répercute dans tous les secteurs de l’économie et provoque une série
d’effets indirects qui contribuent à la croissance globale. Ces effets comprennent la hausse des
dépenses et de l’épargne qui s’explique par la hausse des revenus des ménages, et qui entraîne une
meilleure rémunération du travail. Ensemble, ces effets contribuent à une hausse du PIB. Dans un
système économique circulaire, des estimations ont montré que le PIB européen pourrait croître
jusqu’à 11% d’ici 2030 et 27% d’ici 2050, contre respectivement 4 et 15% dans le modèle linéaire
actuel (cf. L’économie circulaire : pour une Europe compétitive », Fondation Ellen MacArthur, SUN,
McKinsey & Co., 2015).
Créer une économie centrée sur l’utilisateur et la fonctionnalité aura un impact favorable sur la
création d’emplois.
La Fondation Ellen MacArthur, SUN et McKinsey ont dirigé l’étude comparée la plus importante à
ce jour sur les effets d’une transition vers une économie circulaire sur l’emploi. Soixante-cinq (65)
articles étudiés indiquent que « les études existantes attestent des effets bénéfiques sur l’emploi en
cas de passage à une économie de type circulaire ». Ces effets sont largement attribuables à la
hausse des dépenses due aux anticipations de baisse des prix dans l’ensemble des secteurs et à
l’intensité en main-d’œuvre des activités de recyclage de haute qualité et aux emplois plus
spécialisés dans la refabrication, ou remanufacturing. Les opportunités d’emplois ne se limiteraient
pas à la refabrication et à la croissance au sein des grands groupes ; la situation de l’emploi dans un
système d’économie circulaire est riche et variée. Des emplois seront créés dans l’ensemble des
secteurs de l’industrie, grâce au développement de dispositifs locaux de logistique inverse, dans les
petites et moyennes entreprises, grâce à la hausse de l’innovation et de l’entrepreneuriat, et à un
nouveau modèle économique basé sur les services. Dans le cadre de l’analyse menée au Danemark,
la modélisation indique que dix opportunités économiques de type circulaire pourraient créer
l’équivalent de 7 300 à 13 300 emplois d’ici 2035, soit 0,4 à 0,6% de la population active, comparé au
scénario linéaire actuel. À plus long terme, l’emploi est souvent synonyme d’innovation et de
compétitivité, et devrait donc bénéficier d’un modèle de développement circulaire.
2.3 Innovation
Le modèle circulaire s’affirme comme un cadre cohérent propre à stimuler la créativité et à offrir des
perspectives tangibles au niveau de l’innovation.
L’ambition de remplacer des produits dont le cycle de vie est à sens unique, par d’autres de type «
circulaire par nature » et qui créent des réseaux logistiques inverses et d’autres systèmes destinés à
soutenir l’économie circulaire, est une incitation efficace aux idées nouvelles. Une économie plus
innovante favorise un taux de progrès technologique plus élevé, des matériaux plus performants,
une meilleure rentabilité de la main-d’œuvre, une meilleure efficacité énergétique et des
opportunités de profits plus nombreuses pour les entreprises, une meilleure efficacité énergétique et
des opportunités de profits plus nombreuses pour les entreprises.
Un modèle circulaire permettrait de limiter les effets des externalités négatives comme
l’encombrement des espaces urbains, la pollution de l’air et de l’eau et la pollution sonore, la
libération de substances toxiques et le changement climatique. Par exemple, le modèle circulaire
bénéficierait aux ménages en réduisant de 16% le temps perdu dans les embouteillages d’ici 2030, et
de près de 60% d’ici 2050.
L’approche circulaire offre une voie vers une prospérité solide, une réponse au problème de la
dépendance à certaines ressources limitées, une façon de réduire l’exposition aux risques liés aux
fluctuations de prix (et chocs associés), ainsi qu’une réduction des externalités négatives au niveau
environnemental et social. Une économie circulaire permettrait de s’éloigner d’un modèle basé sur
l’extraction des matières premières, de créer des filières “inverses” dédiées à la collecte, la
réutilisation, la re- fabrication et le recyclage (au sens propre du terme). Il est important de se
pencher sur la dynamique et les retombées que l’adoption d’une économie circulaire serait
susceptible de générer.
Une économie circulaire est restaurative et régénérative par nature et tend à préserver la valeur et la
qualité intrinsèque des produits, des composants et des matériaux à chaque étape de leur utilisation.
Une économie circulaire est un modèle industriel qui se veut par définition « réparateur » ou
« régénérant ». Il substitue le concept de « fin de vie » par celui de « réparation » ou de
« compensation », il tend vers l’utilisation d’énergies renouvelables, cherche à éliminer les produits
chimiques toxiques en favorisant une conception plus élaborée des produits, des matériaux, des
systèmes, et plus généralement innove en matière de « business models ». Le concept distingue les
cycles biologiques et techniques. Ce nouveau modèle économique a pour objectif de décorréler le
développement économique mondial de la consommation de ressources limitées.
L’économie circulaire permet aux entreprises (i) d’appréhender le pilier environnemental de la RSE
dans une logique positive de synergies, et non seulement dans une logique d’impacts ; (ii) d’aller
au-delà d’une simple vision « intra » pour tendre vers une vision « inter », et cela au niveau de la
filière comme du territoire, de faire travailler les entreprises ensemble et avec d’autres acteurs
(symbioses industrielles ; (iii) des synergies de mutualisation et de substitution, etc.) ; (iv) de
développer des modèles avec un fort ancrage local et des emplois non délocalisables ; (v) de
challenger les modèles économiques des entreprises (exemple : passer de la vente de biens à la vente
de services) et, finalement, de répondre aux exigences réglementaires de la RSE.
A titre illustratif, ci-après une liste des bénéfices de l’économie circulaire pour les entreprises.
Par le biais de la revente et de la récupération des composants, les entreprises peuvent réduire de
manière significative leur facture de matières premières.
En se basant sur une modélisation détaillée des produits, la Fondation Ellen MacArthur a estimé
qu’en Europe, dans les secteurs des produits complexes à durée de vie moyenne, les opportunités
de réduction des coûts nets de matériaux se chiffrent à 630 milliards de dollars dans un contexte de
développement circulaire avancé. Fondé sur une modélisation détaillée au niveau des produits, le
rapport estime que l’économie circulaire permettrait de réaliser une économie nette annuelle en
termes de dépense de matériaux allant de 340 à 380 milliards de dollars au niveau européen pour un
scénario de « transition » et de 520 à 630 milliards par an, soit 3 à 3,9% de PIB de l’Europe en 2010
pour un scénario « avancé ».
Les bénéfices sont encore plus importants pour l’industrie automobile (de 120 à 130 milliards de US
dollars par an), puis vient l’industrie de la machinerie et de l’équipement (de 80 à 90 milliards US
dollars par an), et l’industrie de la machinerie électrique (de 40 à 43 milliards US dollars par an).
Pour l’acier, on estime que le potentiel pourrait atteindre un total de 100 millions de tonnes de
minerai économisées d’ici 2025, si le modèle était appliqué aux secteurs les plus concernés (gros
consommateurs d’acier tels que l’industrie automobile, machines-outils et autres secteurs liés au
transport, qui représentent 40% de la demande). De plus, ceci aurait pour effet de réduire
l’instabilité des prix liée à la demande.
Pour les biens de consommation à rotation rapide, il a été identifié un potentiel supplémentaire de
près de 700 milliards de dollars à l’échelle mondiale. Ces économies pourraient représenter environ
20% des coûts de matériaux entrant dans l’industrie des biens de consommation courante. En outre,
une analyse sectorielle a indiqué que le Royaume-Uni pourrait économiser 1,1 milliard de dollars
par an sur les coûts de mise en décharge, générer l’équivalent de 2 GWh d’électricité et fournir une
régénération des sols très utile et des engrais chimiques spécifiques en ne déversant pas les déchets
organiques dans les décharges. Ces perspectives clairement prometteuses nécessitent néanmoins de
la part des entreprises de la créativité et de l’audace afin de rompre avec le modèle linéaire et
pérenniser leur choix.
Les économies réalisées (au niveau des matériaux) grâce à l’économie circulaire permettraient de
réduire la pression sur l’offre, et par conséquent de stabiliser les prix.
Ces dernières décennies ont été caractérisées par une augmentation sans précédent du prix des
matières premières. Dans l’ensemble, entre 2002 et 2010, le prix des ressources naturelles s’est accru
de 150%. En outre, le prix des métaux, comme celui des céréales et d’autres produits agricoles,
s’avère plus volatil que jamais.
Il semble bien que cette situation doive perdurer. Si les prix augmentent, c’est que près de trois
milliards de personnes sont sur le point d’accéder finalement à la société de consommation alors
que l’offre de plusieurs denrées de base ne suit plus. Quant à la volatilité, elle résulte d’une
demande de plus en plus sujette aux humeurs des consommateurs, d’une concurrence accrue entre
les producteurs ainsi que des aléas de l’approvisionnement liés à la raréfaction des ressources et aux
facteurs géopolitiques (comme l’illustre le cas des terres rares).
Dans ce contexte, les entreprises disposent de trois solutions possibles : (i) trouver de nouveaux
gisements, (ii) recourir à des substituts ou récupérer et (iii) conserver les ressources déjà mises en
œuvre. Ces trois voies ne sont pas mutuellement exclusives, mais c’est la dernière qui apparaît
actuellement comme la plus sensée.
La hausse des prix relance naturellement l’exploration de nouvelles ressources. Mais le coût de cette
activité croît avec la rareté, l’exploitation des nouveaux sites coûte très cher et la découverte de sites
prometteurs est par ailleurs soumise à de nombreux aléas, dont ceux de la géopolitique.
L’exploitation plus onéreuse de certaines ressources encourage aussi, bien sûr, l’emploi de substituts
qu’on considérerait autrement comme non rentables. Dans certains cas, toutefois, comme celui des
terres rares, il n’existe pas d’alternative à l’heure actuelle. Il s’en présentera sans doute (grâce
notamment aux nanotechnologies), mais l’incertitude demeure et ne devrait pas s’estomper dans
l’immédiat.
Pour la plupart des entreprises, il faut donc en priorité chercher à maintenir le plus possible à son
niveau actuel le stock de ressources existant. Cette avenue est précisément celle de l’économie
circulaire qui, en théorie, propose des notions relativement simples. En pratique, toutefois, les défis
d’implantation sont nombreux. Il faut mobiliser de nombreux acteurs dispersés le long de chaînes
de valeur souvent longues et complexes, ce qui exigera des mesures coordonnées des firmes, des
gouvernements locaux et nationaux, voire de la société civile. Il faut aussi accroître significativement
les capacités des filières traditionnelles du recyclage et du réusinage, ce qui passe souvent par la
réorganisation des marchés. Quoi qu’il en soit, les choses changent petit à petit ; tant que la vérité
des prix continuera de prévaloir, on peut espérer que les décideurs politiques ne céderont pas à la
tentation de subventionner l’inertie plutôt que le changement. La recherche appliquée, les
motivations des agents économiques et le marché devraient apporter à court et à moyen termes les
remèdes qui s’imposent.
Une économie circulaire stimulerait la demande pour de nouvelles activités de services telles que :
• les entreprises de collecte spécialisées dans la logistique inverse, qui soutiennent la
réintroduction des produits en fin de vie dans le circuit économique
• les sociétés de recommercialisation des produits et les plateformes de vente qui facilitent le
prolongement de la vie des produits ou leur utilisation plus intensive
• le savoir-faire spécialisé dans la refabrication des pièces détachées et des composants, et la
rénovation des produits La collecte, le désassemblage et la rénovation des produits,
l’intégration dans le processus de refabrication et la redistribution aux utilisateurs
nécessitent des compétences spécialisées et un savoir-faire en matière de process. Dans la
plupart des cas, les entreprises qui proposent ce type de services à grande échelle sont des
filiales de fabricants existants, ce qui aboutit à de nouvelles opportunités en matière de
modèle économique pour les acteurs du secteur.
Encadré 1 - Exemples d’entreprises qui ont su créer des modèles économiques innovants au sein de l’industrie des biens de consommation courante
Les solutions circulaires offrent de nouveaux moyens de fidéliser les clients en se montrant
créatives. Les nouveaux modèles économiques basés par exemple sur la location ou les contrats de
leasing permettent d’établir une relation commerciale à plus long terme avec les clients, puisque le
nombre de contacts avec eux augmente tout au long de la durée de vie d’un produit. Ces modèles
économiques offrent aux entreprises la possibilité d’acquérir des connaissances uniques sur les
modes d’utilisation qui pourront permettre l’amélioration des produits et des services et de mieux
satisfaire les clients.
Obtenir des consommateurs qu’ils rapportent leurs produits en fin de vie nécessite l’établissement
d’une nouvelle relation avec le client : de « consommateur », il passe à « utilisateur ». Avec des
contrats de leasing ou de « performance », une plus grande connaissance des attentes des
consommateurs est essentielle dans une perspective de personnalisation, ou de services adaptés.
Parvenir à créer une base ou une ossature réutilisable pour chaque produit et traiter les autres
éléments comme des ajouts (tels que les logiciels, les revêtements ou les extensions) permet aux
entreprises d’envisager une meilleure gestion des produits au cycle de vie court et de fournir des
solutions extrêmement adaptées tout en gardant la complexité de la gamme de produit à un niveau
relativement bas.
L’économie circulaire offre plusieurs opportunités aux consommateurs. Les bénéfices pour le
consommateur vont au-delà de la réduction des prix et s’étendent à la réduction des coûts de
l’obsolescence, à l’extension des choix et aux bénéfices secondaires.