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Marché du travail et Politiques

d’emploi
Retranscription: Yannick N’GUEMA
Enseignant – Chercheur en GRH
Chef de département SAM, QHSE et GRH à ITO
Introduction

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Introduction
Les économistes classiques du siècle dernier étaient préoccupés par le
problème de la distribution de la richesse. Comment la production se
répartit-elle entre les facteurs de production (capital, travail et terre)?
Quelle rémunération reçoit chaque facteur ?

Pour Adam Smith l’importance des mécanismes du marché résident dans


l'aspect plus ou moins pénible / agréable du travail, le coût d'acquisition
des aptitudes et l’éducation etc... Déjà l’éducation est considérée en tant
que moyen possible d'accroissement du revenu futur.

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Introduction
Par contre J S. Mill considère que le marché du travail est composé
de groupes de travailleurs qui ne sont pas en situation de
concurrence et de libre compétition.

Le travail et l’emploi sont deux notions distinctes. Les questions


relatives à l’emploi et au travail : une tradition de partage entre
économie et sociologie.

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Thème d’exposé:
• L’évolution du chômage au Gabon depuis ces dix (10) dernières
années. Causes, manifestations, et conséquences sur le pays.
• Mesures politiques mises en place pour combattre le chômage et
favoriser l’employabilité au Gabon. Propositions, réalisations, et
conséquences.
• L’employabilité des femmes et des jeunes sur le marché du travail
gabonais. Etat actuel, politiques mises en place, et résultats.
• La mondialisation et son effet sur le marché de l’emploi national .
Impact sur le chômage et employabilité.
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I. CARACTÉRISTIQUES DE
L’EMPLOI
ET DU CHÔMAGE

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I- CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOI ET DU
CHÔMAGE
A. La mesure des phénomènes:
1- La mesure de l’emploi : simple en apparence, mais complexe
en réalité
– les notions de population active, population active occupée.
– Les sources statistiques : les enquêtes-emploi..
– Les problèmes de mesure : l’économie souterraine*…

* E. souterraine: économie générée par le travail au noir, les délits économiques ou activités criminelles et leur recel.
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I- CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOI ET DU
CHÔMAGE
2- La mesure du chômage : une mesure problématique et conflictuelle
Le chômage est une construction relevant d’une convention : des définitions différentes,
des critères différents, des méthodes différentes, donc des résultats différents. La
définition du chômage au sens du BIT et au sens de l’OST est renforcé par la
complexité des statuts : situations entre l’inactivité et le chômage (ex. formation,
cessation anticipée, chômeurs découragés), entre le chômage et l’emploi (temps partiel
involontaire), entre l’emploi et l’inactivité (temps partiel volontaire) et à la frontière des
trois (travail clandestin).

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I- CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOI ET DU
CHÔMAGE
B. Caractéristiques et évolution du chômage
1. Evolution et caractéristique du chômage

• Les causes de ces évolutions : Des interprétations différentes selon le cadre théorique de
référence et, à chaque époque, des facteurs lourds spécifiques : modernisation économique
pour affronter les défis internationaux, modernisation sociale qui conduit les femmes sur le
marché du travail, chocs pétroliers et monétaires des années 1970, choix productifs visant à
l’économie de main d’oeuvre pour faire face à la dégradation de la rentabilité, rigueur
monétaire qui renchérit le coût des investissements, stratégies financières des entreprises
soumises aux diktats des marchés financiers…

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I- CARACTÉRISTIQUES DE L’EMPLOI ET DU
CHÔMAGE
2. Les inégalités face au chômage
Les statistiques macroéconomiques donnent, du chômage et du
sous-emploi, une vision trop homogène. En réalité, plusieurs
formes de discrimination sur le marché du travail, tant sur le
plan de l’exposition au chômage que des chances de retour à
l’emploi. Ces différences justifient d’ailleurs largement le
caractère ciblé sur des populations spécifiques des politiques
d’emploi

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• Le sexe: il joue un rôle important sur les chances de sortir du chômage que
sur l’accès à l’emploi où les disparités ont diminué : dans les années 70 à
travers le monde, 2 chômeurs sur 3 étaient des chômeuses, le taux de
chômage des femmes est aujourd’hui plus proche de celui des hommes.
Cependant un écart subsiste qui tient à plusieurs facteurs (sexisme des
employeurs, plus grande proportion de CDD chez les femmes, concentration
des femmes sur des secteurs à forte restructuration…).

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• L’âge: « L’âge rigidifie les situations » a-t-on dit. En effet, si un travailleur âgé est
moins exposé au chômage qu’un jeune, en revanche, ses chances de retour à
l’emploi sont plus faibles que celles d’un jeune. Les jeunes sont plutôt caractérisés
par la vulnérabilité de leur emploi alors que les plus âgés connaissent davantage
une situation d’inemployabilité.
Du coup, la durée du chômage sera beaucoup plus longue chez les travailleurs les plus
âgés. La vulnérabilité des jeunes s’explique, elle aussi, par les incertitudes des
employeurs quant à leur productivité, par la forte proportion d’emplois précaires
(CDD, intérim) qui, souvent, se terminent par un retour au chômage.

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• Le diplôme
Le niveau de formation est une bonne garantie contre le chômage et sa
durée : le taux de chômage des non diplômés étant environ deux fois
plus élevé que celui des diplômés de l’enseignement supérieur.
Souvent, il suffit d’avoir un très faible niveau de diplôme pour être
beaucoup moins exposé au chômage, le niveau d’instruction jouant
comme indicateur de socialisation autant que comme mesure de la
compétence.

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• Autres facteurs:
D’autres facteurs de disparités existent. On trouve ainsi de fortes différences selon la
catégorie socioprofessionnelle : les personnes hiérarchiquement élevées sont moins
exposées au chômage (moins de 5% chez les cadres supérieurs et près de 13%
chez les ouvriers) et bénéficient d’un plus facile retour à l’emploi que les personnes
du bas de la hiérarchie.

L’origine ethnique et la situation géographique des travailleurs sont aussi des facteurs
de discrimination mais ces disparités sont beaucoup moins documentées
statistiquement.

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3. La durée du chômage
Avant le milieu des années 70, un chômeur sur 4 était encore au chômage au bout d’un an (durée qui
correspond à la notion de chômage de longue durée). De nos jours, cette proportion est passée à
près d’un chômeur sur deux. Ceci montre que le chômage ne fonctionne plus comme une « file
d’attente », mais comme une machine à exclure. L’employabilité des travailleurs semble donc bien
inversement liée à la durée du chômage, contrairement à ce que suggère le théorie du job search.
La longue durée du chômage tient d’abord à la difficulté de retrouver un emploi mais également au moindre
retrait des chômeurs vers l’inactivité comme c’était le cas dans les années 1970.

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C. Caractéristiques et évolution de l’emploi.
1. Evolution globale à long terme
L’emploi connaît depuis un ½ siècle des transformations majeures. Nous rappelons les
plus importantes.
• Extension du salariat.
Ce mouvement de salarisation ne s’est jamais interrompu. A l’heure actuelle, environ 88 %
de la population active est salariée. Le recul des activités indépendantes
(agriculteurs, patrons de l’industrie et du commerce) est dû à la fois à la taille prise
par les entreprises et aux transformations juridiques des entreprises qui, en devenant
des sociétés, ont fait passer leurs dirigeants du statut de patrons à celui de PDG.

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L’extension du salariat a eu de nombreuses conséquences, en
particulier l’extension du recours au marché pour la satisfaction
de tous les besoins et, par ailleurs, une emprise très forte des
salariés sur la définition des modèles culturels qui ne sont plus
tant ceux de la bourgeoisie industrielle et commerciale mais ceux
des franges supérieures du salariat.

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• Tertiairisation.
Près de 3 actifs sur 4 travaillent aujourd’hui dans le « secteur tertiaire », c'est-à-dire si l’on reprend la
typologie de Colin Clark, dans les services. La place prise par le tertiaire résulte d’un phénomène que le
français Alfred Sauvy a désigné du nom de « déversement » : la main d’oeuvre rendue disponible dans
l’agriculture et l’industrie s’est « déversée » dans les services.
Liée à la moindre productivité de ce secteur par rapport à celles des secteurs primaire et secondaire (cf.
Baumol) mais aussi à l’extension croissante de la demande de services, (cf. loi de A. Wagner du XIX°
siècle) la tertiairisation est aussi le fait de l’extériorisation d’activités tertiaires vers des entreprises
industrielles. De ce point de vue, les activités tertiaires ont moins progressé que les activités organisées
par le secteur tertiaire.

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• Féminisation
46% des salariés sont aujourd’hui des salariées. Le mouvement de féminisation des
emplois s’est renforcé à parti du début des années 1970 : entre 1975 et 1982, près de
200 000 femmes sont entrées dans l’activité chaque année en moyenne contre 35 000
hommes ; dans la période 1954-1962, les chiffres de la population active augmentaient
respectivement de 3000 pour les femmes et 36 000 pour les hommes chaque année
La féminisation des emplois est allée de pair avec l’extension du secteur tertiaire
puisque c’est dans ce secteur que la proportion de femmes est la plus large : la moitié
des professions intermédiaires, 36% des cadres et 77% des employés sont des
femmes.

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Cette féminisation a eu des causes diverses : désir d’indépendance et d’épanouissement
personnel lié à la « libération des femmes et à l’augmentation des diplômées qui ont
cherché à valoriser leur capital scolaire sur le marché du travail ; nécessité
d’augmenter le revenu du ménage pour entrer dans l’ère de la consommation de
masse ; transformations de la famille (divorces, monoparentalité) qui a rendu le travail
des femmes obligatoire… Cette nouvelle donne a, dès lors, atténué mais sans le faire
disparaître, le clivage hommes-femmes entre activités économiques et activités
sociales et domestiques ; il a d’autre part contribué à transformer les images
paternelles et maternelles dans le processus de socialisation..

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2. Les tendances récentes de l’emploi
On peut retenir trois tendances récentes du marché de l’emploi qui marquent une certaine rupture par
rapport aux évolutions de longue période.
• Le recul du chômage
Dans les années 90, dans le monde entier, le taux de chômage est faible à celui des années qui viendront
juste après. Les interprétations de ce reflux ne sont pas faciles. Il y a d’une part les méthodes de
comptage qui ont conduit à la radiation de nombreux chômeurs des listes des bureaux de l’emploi
(ONE). Il y a eu, d’autre part, un effet positif sur l’emploi de la baisse des taux d’intérêt en France par
exemple qui a redynamisé la consommation et l’investissement depuis le début des années 2000.

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En troisième lieu, les gains de productivité se sont ralentis, ce qui a permis
moins de suppressions d’emplois. Par ailleurs, les dispositifs
d’indemnisation sont, devenus moins généreux pour les chômeurs et les a
incités à accepter davantage tout type d’emploi qu’on leur a proposé.
Enfin, il convient de rajouter que la croissance économique, pour molle
qu’elle ait été ces dernières années, n’en a pas été moins riche en
emplois.

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• Une croissance plus riche en emplois
Cet enrichissement de la croissance en emplois peut se lire dans l’évolution de la productivité du
travail. La conservation des emplois peut en effet signifier que les gains de productivité ont été
faibles et qu’ils n’ont donc pas conduit à supprimer des emplois. Or, la productivité connaît,
depuis les années 1990, un ralentissement notable.
Les interprétations de ces phénomènes sont cependant discordantes. Certains ont mis en avant les
effets du développement du temps partiel qui auraient, depuis 1992, augmenté les effectifs de
salariés pour la même durée totale de travail embauché, par un mécanisme de partage du
travail. D’autres attribuent le ralentissement de la productivité à l’augmentation de la part des
services dans la valeur ajoutée.

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D’autres encore soulignent la modération du coût salarial et la baisse de la
durée du travail pour expliquer le ralentissement de la productivité et
l’enrichissement de la croissance qui en a résulté. Les politiques de
l’emploi ont donc des effets sur le volume des emplois et le contenu en
emplois de la croissance économique.

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• La déqualification des emplois.
Remarque préliminaire : la qualification est une notion complexe. D’une part, on ne parle pas de la même
chose quand on envisage la qualification du salarié et celle du poste qu’il occupe. Un salarié diplômé
peut occuper un poste faiblement qualifié parce qu’il n’a pas trouvé de meilleur emploi. D’autre part, il
n’y a pas de définition institutionnalisée de la qualification à l’exception des conventions collectives qui
définissent les emplois qualifiés et déqualifiés : ainsi, les grilles des conventions collectives distinguent
ainsi les différents types d’ouvriers selon leur degré de qualification (OQ, OS, Manoeuvres). Le
problème est que les non qualifiés étaient surtout ouvriers alors qu’aujourd’hui, ils sont parmi les
employés majoritairement. Et là, il n’y a pas de conventions collectives sur lesquelles s’appuyer pour
distinguer les salariés. Les définitions sont, du coup, nombreuses.

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Cependant, quelle que soit la définition choisie, un fait s’impose : alors que l’emploi non qualifié a reculé
jusqu’au début des années 1990, il remonte depuis. L’enrichissement de la croissance en emplois
semble donc surtout concerner des emplois à faible qualification. En France par exemple en 1982, 3%
des actifs ayant un niveau égal ou supérieur au baccalauréat occupaient des postes déqualifiés ; en
2002, la proportion est passée à 13 %.
On peut attribuer cette déqualification des emplois aux mesures d’exonérations sur les bas salaires qui ont
encouragé les chefs d’entreprise à embaucher des travailleurs moins qualifiés mais qui leur coûteraient
moins cher. Du coup, la déqualification des emplois permet d’expliquer le ralentissement des gains de
productivité ainsi que l’enrichissement de la croissance en emplois.
Le problème est alors celui de la fragilité des emplois créés.

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3. La fragilité des emplois
• Les faits de précarité.
Sur environ un bon nombre de salariés, près du tier occupent aujourd’hui un emploi
précaire (CDD, missions d’intérim, stages rémunérés de formation professionnelle ou
de contrats de prestation). Les emplois précaires se trouvent le plus souvent dans le
secteur privé, qui emploie plus de salariés que le public. Mais, proportionnellement,
le secteur public ne met pas davantage que le privé les salariés à l’abri de la
précarité. Une bonne partie des salariés travaillent à temps partiel ou en qualité de
contractuel, journalier…. ce type d’emploi est accepté faute de contrat à temps plein.

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La montée de la précarité témoigne d’un effritement de plus
en plus prononcé de la norme d’emploi dite « fordiste »
qui a prévalu dans les « trente glorieuses » et qui a
caractérisé ce que l’on appelle la « société salariale » :
emploi à temps plein, à durée indéterminée, doté de
protections juridiques et sociales.

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• Les causes de la précarité
La précarisation des emplois a trouvé plusieurs types d’interprétation :
– L’incertitude sur la demande adressée à l’entreprise : celle-ci embaucherait alors un volant de
travailleurs précaires pour faire face aux pics de production et que l’on remercierait dès que la
conjoncture baisse de nouveau.
– L’incertitude sur les qualifications des salariés : l’entreprise utiliserait alors les contrats
précaires comme un round d’observation du travailleur. Le contrat serait converti en CDI seulement
si le salarié se montre à la hauteur des attentes de la hiérarchie.
– La recherche d’une division du collectif de travail : les précaires feraient pression à la baisse
des salaires et permettraient de contenir les exigences des salariés fixes de l’entreprise.

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• Les causes de la précarité
Les conséquences de précarité :
– baisse de la mobilité des salariés
– baisse de leur pouvoir d’achat avec ses conséquences sur la demande de consommation
– individualisation de la négociation salariale, les employeurs ayant intérêt à cette individualisation pour
sortir des inconvénients que représentait pour eux la convention collective.
– Nouveau type d’inégalités qui séparent des individus aux parcours de plus en plus proches. Ce
phénomène inégalitaire concerne des personnes d’âges, de diplômes ou de catégories
socioprofessionnelles identiques.

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II- MÉCANISMES :
FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ
DU
TRAVAIL ET EXPLICATIONS
DU
CHÔMAGE.

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II- MÉCANISMES : FONCTIONNEMENT DU MARCHÉ
DU TRAVAIL ET EXPLICATIONS DU CHÔMAGE.
A- Les théories traditionnelles
1- Les théories classiques : l’équilibre par élimination
• Le salaire « naturel »est le salaire de « subsistance » celui que l’on donne à ceux
réalisant « des travaux simples et grossiers » (J.B.SAY), celui qui permet d’acheter
un « panier » nécessaire à l’entretien des travailleurs et de leurs familles
(RICARDO).
• La croissance démographique tend à abaisser le salaire au dessous du seuil de
subsistance et conduit à l’élimination physique des travailleurs, donc à la baisse de
l’offre de travail, ce qui ramène le salaire au niveau de subsistance.

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2- L’analyse de K. Marx : l’emploi comme lieu de l’exploitation capitaliste.
• Le niveau de subsistance est « socialement déterminé ». A chaque époque
correspondent des besoins sociaux différents.
• La reproduction de la force de travail : Le salaire se fixe au niveau où il permet au
salarié de reproduire sa force de travail et celle de sa famille.
• L’ « armée industrielle de réserve » : le chômage relève d’une stratégie du mode de
production capitaliste pour faire pression à la baisse des salaires.

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3- L’analyse néoclassique : l’impossibilité du sous-emploi
• L’offre de travail :
– comparaison entre le salaire et le coût du renoncement au loisir ;
– la demande de travail : comparaison entre le coût salarial et la productivité marginale
du travail.
• Le rôle d’ajustement du salaire : la variation du prix du travail comme condition de
l’équilibre du marché.
• Le chômage « frictionnel » : les délais d’adaptation de l’offre et de la demande.
• Le chômage « volontaire » : la responsabilité des syndicats et des protections
administratives (le SMIC, les allocations de chômage).

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4- L’analyse keynésienne : le chômage involontaire
• L’emploi doit s’analyser comme un élément de l’économie globale. Le chômage se
forme sur le marché des biens et des services et dépend du niveau de la demande
effective.
• Le plein emploi est donc une situation exceptionnelle en dehors de toute régulation de
l’économie par la puissance publique.
• Le chômage est involontaire ; toute baisse des salaires, au lieu de favoriser l’emploi,
engendre du chômage puisqu’elle conduit à la baisse de la demande effective.

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B- Les réactualisations théoriques
1- La réactualisation des analyses libérales.
Face à la montée du chômage et constatant que le marché du
travail n’est pas en mesure de garantir l’équilibre comme le
prétend la théorie standard, les économistes libéraux se sont
mis à explorer un certain nombre de pistes montrant que le
fonctionnement du marché était susceptible d’imperfections.

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Interprétations principales :
• Les imperfections de l’information
L’information sur les caractéristiques des échangistes est difficile à obtenir (George STIGLER, Edmund
PHELPS). Pour y remédier, l’employeur peut proposer au salarié un « salaire d’efficience » plus élevé
que celui du marché afin de provoquer une hausse de la productivité du salarié. D’un point de vue
théorique, on rompt avec le modèle néoclassique standard qui stipulait que la productivité déterminait le
salaire. Ici, c’est le salaire qui est censé conduire à accroître la productivité.
Les salariés et l’employeur peuvent aussi passer une sorte de « contrat implicite » : sorte de contrat
d’assurance aux termes duquel si la situation économique se dégrade, le salaire sera conservé mais si la
situation s’améliore, le salaire ne sera pas augmenté.

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• La théorie du « job search » (ou recherche d’emploi)
Selon cette théorie née aux Etats-Unis, les chômeurs mettent à profit le temps du chômage
pour rechercher le meilleur emploi possible. On prétend expliquer ainsi le sur-chômage
des femmes et des jeunes : ceux-ci ayant moins besoin d’un revenu puisque leurs
maris ou leurs parents travaillent, peuvent se consacrer plus longtemps à la recherche
d’un meilleur emploi. Mais cette approche semble oublier la réalité statistique : la durée
mis dans le chômage tend à éloigner de l’emploi plus qu’en rapprocher !

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L’inadaptation des qualifications : les théories du capital humain établissent que le
capital humain (diplôme, savoir-faire, savoir être, relations) est long à obtenir alors que
les qualifications demandées sont très vite obsolètes. Il y a donc un risque
d’inadaptation entre les qualifications demandées et les qualifications possédées.
Malheureusement, le problème du marché du travail est aujourd’hui que beaucoup de
travailleurs qualifiés occupent des postes déqualifiés. L’inadaptation semble être plutôt
dans l’autre sens que celui souligné par la théorie libérale

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2- Thèse institutionnaliste de la segmentation du marché du travail
Michaël PIORE et Peter DOERINGER ont montré en 1971 l’existence de 2 marchés du
travail, un marché primaire et un marché secondaire. Sur chacun, des règles
spécifiques de recrutement, de rémunération ou de promotion interne.
Sur le marché primaire,
primaire l’employeur conçoit le recrutement de main d’oeuvre comme un
investissement et non comme un achat d’une simple marchandise qui serait la force de
travail. Les salariés, plutôt hommes, qualifiés, nationaux, ont des rémunérations plutôt
élevées et des possibilités de promotion dans l’entreprise.

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Sur le marché secondaire, le salaire est fixé par confrontation entre offre et
demande, conformément à la vision néoclassique. On y trouve les travailleurs les
plus stigmatisés (immigrés, femmes, jeunes, personnes sans qualification).
Aucune institution telle qu’un syndicat ne vient perturber le jeu de la
concurrence.
Cette segmentation a trouvé plusieurs types d’interprétations: incertitude de la
demande ; incertitude sur la qualification des salariés recrutés ; division du
collectif de travail.

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Cette théorie de la segmentation a débouché sur une analyse en
termes d’ « insiders-outsiders» : ceux qui ont des positions
protégées (insiders) négocient des niveaux de rémunération qui
ne permettent pas d’embaucher ceux qui sont au chômage.
Ceux-ci sont d’autant plus exposés au chômage que le niveau
de syndicalisation est faible et que les outsiders sont mal
défendus.

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3- L’économie de la synthèse : néoclassiques et keynésiens

Vers la fin des années 1970, des économistes vont reprendre l’hypothèse des
marchés à prix rigides de John Richard HICKS (1904-1989), et démontrer
qu’en cas de prix rigides, les ajustements se font par les quantités. Cette
théorie annoncera « l’économie de la synthèse » entre néoclassiques et
keynésiens. Ainsi, au début des années 1980, Edmond MALINVAUD
proposera une « nouvelle théorie du chômage » avec l’idée qu’il existe
plusieurs sortes de déséquilibres sur le marchés des biens et services et sur
le marché du travail : soit l’offre est supérieure à la demande sur les deux
marchés ;les travailleurs sont rationnés mais les offreurs de biens aussi
puisque la demande est insuffisante (« chômage keynésien ») ; soit l’offre
est supérieure à la demande sur le marché du travail (chômage) et la
demande supérieure à l’offre sur le marché des biens et services où les
consommateurs sont rationnés (« chômage classique »).
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Le premier cas nécessite une politique de relance de la
demande ; le second une politique de restauration de
la rentabilité des entreprises. Le 3ème cas envisagé
ne correspond pas à une situation de chômage mais
d’inflation face à laquelle il convient de mettre en
œuvre une politique de stabilisation fondée, entre
autres, sur une limitation de la masse monétaire et,
donc, une augmentation des taux d’intérêt.

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Récapitulatif

Marché des
Marché du Type de
biens et Politique à mener
travail chômage
services

Relance de la consommation et de
Offre > Demande Offre > Demande Keynésien l’investissement = politiques
conjoncturelles

Restauration de la rentabilité =
Demande > Offre Offre > Demande Classique
politique structurelle

Demande > Offre Demande > Offre Inflation Stabilisation

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3- Une synthèse entre keynésiens et marxistes : l’école de la régulation
• Les notions : la régulation désigne « l’ensemble des conditions et des mécanismes institutionnels qui
assurent la production et la reproduction de la force de travail » : modalités de la concurrence entre les
entreprises, mode de fixation des salaires, modalités d’utilisation de ces salaires, procédures de
redistribution et d’intervention de l’Etat.
• Une mise en perspective historique : Robert BOYER distingue une régulation concurrentielle
caractéristique du capitalisme jusqu’à la crise des années 1930, puis une régulation monopoliste de type
« fordiste » après la deuxième guerre mondiale. Le « rapport salarial » est différent dans ces deux
modèles : alors que l’emploi fonctionne comme une variable soumise aux aléas conjoncturels dans la
première période, le plein emploi devient l’objectif de la politique économique de la seconde.

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4- Le fonctionnement du marché du travail dans le courant de l’ « économie des conventions »
• Prise en compte de l’arrière plan institutionnel des transactions économiques. Celles-ci se font dans le
cadre de « conventions ». les transformations de ces conventions fournissent dès lors, mieux que la
croissance ou le fonctionnement du marché du travail, les clés de compréhension du chômage et de
l’emploi.

• Une première transformations concerne les qualifications : celles-ci ne sont plus définies de façon
objective comme dans les « 30 glorieuses » ; la compétence de l’individu devient une variable clé. Mais,
du coup, l’appréciation des travailleurs se fait sur des critères plus subjectifs alors qu’elle se faisait, dans
la période antérieure, sur des grilles de qualification objectivées par des diplômes ou une expérience
professionnelle.

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Une deuxième transformation concerne le contrat de travail qui ne
peut plus, être fixé une fois pour toutes. Il ouvre alors la voie à la
flexibilité sans être pour autant, pour l’instant en tous cas,
accompagné de sécurité dans les trajectoires professionnelles.

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l'emploi
III- QUELS SONT LES OUTILS DES
POLITIQUES DE L’EMPLOI?

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1. Les politiques de l’emploi comprennent l’ensemble des interventions publiques sur le marché
du travail qui visent à en corriger les déséquilibres et les effets néfastes qui peuvent en résulter.
Cette définition au sens strict exclut a priori les politiques macroéconomiques de relance qui lutte
contre le chômage conjoncturel, car elles ne concernent qu’indirectement le marché du travail.
La politique de l’emploi est une politique structurelle. En revanche, la politique pour l’emploi
comprend l’ensemble des interventions publiques sur les différents marchés (marché des biens
et services, marché des capitaux, marché du travail) qui cherchent à agir sur le niveau de
l’emploi et le niveau du chômage. La politique pour l’emploi comprend donc la politique de
relance keynésienne.

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2. Les politiques de l’emploi comprennent des mesures très
diverses : réglementation du marché du travail (Salaire minimum,
règles de licenciement, durée légale du travail) ; incitations à
l’activité; indemnisation du chômage (CNAMGS); incitation à
l’inactivité (Préretraite); mesures ciblées sur les chômeurs
(Formation, aide à la recherche d’un emploi (ONE) ; stages, un
jeune un métier..).

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l'emploi
Les types de mesures pour vaincre le chômage sont « actives » et « passives » :
– Les mesures actives ont pour objectif de remettre les chômeurs en emploi et
d’augmenter le niveau d’emploi, soit de manière directe (création d’emplois publics
temporaires, subventions à l’embauche), soit de manière indirecte (formation, service
public à l’emploi). On parle de traitement économique du chômage.
– Les mesures passives comprennent l’indemnisation du chômage et les dispositifs de
cessation anticipée d’activité dont l’objectif est d’atténuer les conséquences du
chômage. On parle, dans ce cas, de traitement social du chômage.

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l'emploi
3. La politique de relance keynésienne
a) L’équilibre de sous-emploi et le chômage keynésien

John Maynard Keynes va révolutionner la pensée économique en publiant la "Théorie générale de l'emploi,
de l'intérêt et de la monnaie" (1936). Il se situe au niveau macro-économique et raisonne à court terme
pour s'opposer aux théories libérales du marché du travail

La critique de la flexibilité du salaire : John Maynard Keynes va critiquer, point par point, l'analyse libérale
des classiques et des néo-classiques. Pour lui, le chômage n'est pas du à un mauvais
fonctionnement du marché du travail. Il réfute l'idée de l'existence d'un marché du travail au sens
néo-classique. Ce n'est pas le marché du travail qui fixe le niveau de l'emploi ni celui des salaires
réels :

Marché du travail et politique de


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l'emploi
• D'une part, les travailleurs se sont organisés collectivement pour rendre les salaires
nominaux rigides à la baisse (syndicats, conventions collectives...).
• D'autre part, les salaires réels dépendent du rythme de l'inflation qui est déterminé par les
entrepreneurs dans un marché de concurrence imparfaite. Les salariés ne peuvent offrir
un travail en fonction d'un salaire réel puisqu'ils ne maîtrisent pas les prix des biens et
des services. Ils négocient seulement un salaire nominal.
• Enfin, la quantité d'emplois dépend, avant tout, du volume de la production compte tenu
des conditions techniques de production du moment. Cela signifie que le volume de
l'emploi n'atteint pas toujours le plein emploi car il dépend des variations de la demande.

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l'emploi
Autrement dit, toute baisse massive des salaires
réels ne peut que dissuader les entrepreneurs
d'embaucher puisque la demande sera faible au
niveau macroéconomique. Ce n'est pas le
marché qui régule l'emploi mais un système
d'emploi qui dépend du système de production
et des relations sociales qui s'y sont établies

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l'emploi
Les explications du chômage par Keynes : Pour Keynes, le niveau de l’emploi dépend du
niveau de production, pour un niveau de productivité et une durée annuelle du travail
donnés, qui lui-même dépend du niveau de la « demande effective » des entrepreneurs.
Cette « demande effective » correspond à la demande anticipée des entrepreneurs, c'est
à dire celle qu'ils prévoient et pour laquelle ils vont mettre en œuvre un certain volume de
production. En conséquence, le niveau d'emploi peut ne pas correspondre au niveau du
plein emploi. Si la demande effective (au sens anticipée) est faible, les entrepreneurs
fixeront un niveau de production faible et toute la population active ne trouvera pas
forcément d'emploi.

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l'emploi
Keynes conteste la capacité de l’économie réelle à assurer
automatiquement le plein emploi. Il peut donc exister des situations
où l’offre et la demande de marchandises s’équilibrent et où il y ait
néanmoins chômage, c’est ce qu’il appelle un équilibre de sous-
emploi qui conjugue équilibre entre l’offre et la demande de biens et
déséquilibre entre l’offre et la demande de travail.

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l'emploi
Il peut donc exister un chômage involontaire causé par une insuffisance de la
demande de biens et services adressée aux entreprises, laquelle provient de
la faiblesse des revenus distribués aux salariés (salaires réels insuffisants)
ou de l’insuffisance des investissements. Le chômage existant accroît encore
cette insuffisance de la demande et s’enclenche alors le cercle vicieux de la
dépression (ou de la récession) que l’on ne pourra briser que par
l’intervention de l’Etat à travers une politique volontariste de soutien de la
demande (ou de relance par la demande).

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l'emploi
L’équilibre de sous-emploi et le chômage keynésien

Niveau de la
productivité Population
Active

Niveau de la
Niveau de la Niveau de Niveau du
demande
production l’emploi Chômage
active

Durée
annuelle du
travail

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l'emploi
Pour Keynes, la "demande effective" est composée de la consommation et de l'investissement, qui ne
dépendent pas seulement des revenus comme le pensaient les libéraux.
• La consommation finale est une fonction décroissante du revenu disponible (variable "endogène") :

Consommation Finale = Revenu Disponible x Propension Moyenne à Consommer

Loi de la consommation de Keynes : lorsque le revenu augmente, la propension marginale à consommer,


c’est-à-dire la part de l’augmentation du revenu qui est consacrée à l’augmentation de la consommation,
diminue et la propension marginale à épargner augmente, ce qui signifie que la consommation augmente
moins vite que le revenu, les besoins se saturant peu à peu, et l'épargne plus vite.

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l'emploi
• L'investissement ne dépend pas directement des revenus (c'est une variable "exogène"). Il
est déterminé par la comparaison entre :

– L'efficacité marginale du capital, c'est à dire le taux de rentabilité, qui mesure le profit
attendu que rapporte un investissement.
– Le taux d'intérêt réel à long terme, c’est-à-dire le prix de la monnaie prêtée à long terme
sans inflation. on retrouve donc la notion de profitabilité.
L'entrepreneur ne va investir que si le taux de rentabilité est supérieur au taux d'intérêt réel.
Dans le cas contraire, il préférera placer ses capitaux.

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l'emploi
• Ces prévisions peuvent être erronées et ne garantissent pas automatiquement un niveau de plein
emploi. Cette nécessaire prise en compte de l'incertitude face à l'avenir introduit une variable
psychologique : « l'état de la confiance » des entrepreneurs.

Revenu disponible
Niveau de la
consommation finale

Niveau du chômage
Propension marginal

Niveau de l’emploi
demande effective
à consommer

Niveau de la

Niveau de la
production
Taux de rentabilité
espérée

Taux d’intérêt réel à Niveau de


long terme l’investissement

Niveau de confiance
des entrepreneurs
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l'emploi
Il y a donc très peu de chance pour que la demande effective se fixe à un
niveau tel qu'il permette le plein emploi de la main d'oeuvre. Edmond
Malinvaud, appelle « chômage keynésien » le chômage qui est dû à
une insuffisance de la demande effective lorsque les salaires sont
rigides. C'est un chômage conjoncturel qui accompagne le
ralentissement de la croissance économique.

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l'emploi
b) Les principes de la relance
1. La politique keynésienne de l'emploi : le marché étant incapable de rééquilibrer automatiquement une
économie nationale et d'assurer le plein emploi, il faut que l'Etat intervienne avec pour objectif d'atteindre le
plein emploi. Il a sa disposition deux moyens :
– La politique budgétaire de relance : l'Etat peut lancer une politique de grands travaux (augmentation
des investissements publics) qui vont susciter un flux de dépenses et provoquer le phénomène du
multiplicateur ; il peut aussi augmenter les revenus sociaux des catégories défavorisées de la population
car elles ont une forte propension à consommer ; il peut aussi diminuer la fiscalité sur les revenus ou sur
la consommation afin de redonner du pouvoir d’achat aux consommateurs pour qu’ils augmentent leur
consommation ; il peut, enfin, subventionner ou défiscaliser les investissements privés afin d’inciter les
agents économiques à investir.

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l'emploi
• La politique monétaire : L'Etat, pour relancer la demande, doit diminuer le taux d'intérêt afin d’inciter les agents
économiques à emprunter pour dépenser. Cela permet aussi d'accroître la profitabilité des entreprises et les
inciter à investir

Politique
conjoncturelle
Keynésienne

Soutenir la
demande

Politique Politique
budgétaire monétaire

Hausse des
Baisse du taux
dépenses
d’intérêt de la
publiques et
Banque centrale
déficit budgétaire
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l'emploi
Keynes est à l'origine de la plupart des politiques économiques menées par les Etats après la seconde guerre
mondiale (la politique du New Deal de Roosevelt peut être considérée comme une politique pré-keynésienne).

2. Cette politique keynésienne semble avoir du succès au moment de la crise de 2008-2009. Les pouvoirs publics
se sont mobilisés avec une rapidité, une vigueur et un degré de coordination relativement sans précédent. Une
politique keynésienne mondiale a répondu au risque systémique pesant sur les institutions financières et à la
menace d'une déflation*.

* Déflation: Gain de pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une baisse durable du niveau général des prix. A ne pas confondre avec la désinflation qui est un ralentissement de
l’inflation, soit une diminution du taux d’inflation.

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l'emploi
c) Les limites de l’analyse keynésienne

1. Les limites de la politique keynésienne de relance : à partir des années 70, les
plans de relance keynésiens ont semblé moins efficace et ont été fortement
critiqué par les libéraux, Milton Friedman en particulier. Après la crise de 2008-
2009, on peut observer un paradoxe : ce sont les pays qui ont les déficits publics
et l’endettement public les plus faibles relativement à leur PIB qui ont les taux de
chômage les plus faibles (Allemagne, Suède, Danemark) alors que les Etats qui
sont lourdement endettés ont des taux de chômage élevés (Etats-Unis, Royaume-
Uni, France).

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l'emploi
2. 1ère limite : la relance de la demande peut buter sur la contrainte extérieure. Si l’appareil productif
national n’est pas compétitif en matière de prix ou mal adapté à la demande des consommateurs,
toute relance de la demande par l’Etat va se traduire par une hausse des importations (ce qui ne va
pas réduire le chômage intérieur) et par un déficit extérieur. Dans un régime de taux de change fixe,
ce déficit va provoquer une baisse du taux de change qui va obliger l’Etat à ralentir la croissance
pour ralentir les importations. Dans la zone euro par exemple, la dévaluation n’est pas possible. Les
Etats sont alors obligés de mener des politiques déflationnistes pour diminuer le coût salarial unitaire
et retrouver une compétitivité-prix. Ces politiques d’austérité ralentissent la croissance et augmente
le chômage. Autrement dit, la relance n’est possible que si l’économie nationale est compétitive.
L’Allemagne, la Suède, le Danemark, ont profité des plans de relance pour accroître leurs
exportations, soutenir la croissance et diminuer leur taux de chômage alors que la France,
l’Espagne, l’Italie étaient condamnés à la rigueur. Les Etats-Unis n’ont pas cette contrainte
extérieure car ils n’ont pas à défendre le taux de change du dollar puisqu’il est accepté dans le
monde entier.

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l'emploi
Politique de relance

Déficit Baisse du taux


budgétaire d’intérêt

Hausse de la demande
et du PIB

Marché du travail et politique de


Hausse des
importations

l'emploi
Offre Déficit du commerce
Insuffisante Extérieur

Baisse du taux de
Chômage
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2ème limite : la politique de relance bute sur la contrainte budgétaire. Lorsque le déficit budgétaire
devient permanent, la dette de l’Etat augmente fortement et le déficit ne sert plus qu’à payer les
intérêts de la dette ce qui n’a aucun effet sur la relance de la croissance. En augmentant son
endettement et en provoquant une hausse du taux d’intérêt, l’Etat augmente le service de la dette
qui comprend la charge de la dette (les intérêts à verser) et l’amortissement des sommes prêtées
(une partie du capital emprunté) qu’il doit chaque année à ses créanciers. L’Etat entre alors dans un
« cercle vicieux » : le déficit engendre des dépenses qui creusent le déficit. On parle d’ « effet boule
de neige ». Dans ce cas, les Etats sont contraints de diminuer, voire d’annuler leur déficit
budgétaire, en diminuant les dépenses publiques et en augmentant les recettes fiscales. Ces
politiques d’austérité menées dans la zone euro entretiennent récessions et ralentissement de la
croissance qui ont des effets négatifs sur l’emploi et le chômage.

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l'emploi
3ème limite : la relance de croissance n’entraine pas toujours une augmentation des
emplois. A court terme, il n’y a pas un lien direct entre la croissance et la création
d’emploi. En effet, lorsque la croissance redémarre, les entreprises se contentent
d’augmenter la productivité de leurs salariés sans embaucher. A l’inverse, lorsque
la croissance ralentit, elles ne licencient pas tout de suite les salariés ce qui
diminue la productivité de l’entreprise. A long terme, la croissance de l’emploi sera
moins forte que celle de la production car le progrès technique va permettre des
gains de productivité qui économisent le travail. On a donc une déconnexion entre
la croissance du PIB et celle de l’emploi selon Michel Husson.

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l'emploi
4ème limite : la création d’emplois ne diminue pas nécessairement le chômage. En effet, trois cas
peuvent se présenter :

• D’une part, la création nette d’emplois peut être inférieure au nombre de nouveaux entrants sur le
marché du travail. Dans ce cas, la croissance de l’emploi n’empêchera pas le chômage.

• D’autre part, lorsque les entreprises créent des emplois, elles font sortir de la « réserve » des
inactifs (femmes au foyer, étudiants) qui postulent pour ces nouveaux emplois et gonflent le nombre
de demandeurs d’emplois. Autrement dit, la création de 100 emplois ne diminue que de 80
(industrie) ou de 60 (tertiaire) le chômage selon le secteur d’activité. Il faut au moins créer 130
emplois pour réduire le chômage de 100. C’est le « taux de flexion » (Robert Salais).

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l'emploi
Enfin, les emplois crées peuvent ne pas correspondre aux compétences et
aux qualifications des chômeurs. Ceci explique les offres d’emplois non
satisfaites et la pénurie de travailleurs dans certains secteurs d’activité (le
bâtiment, la restauration, l’informatique…). Les plans de relance ont pour
objectif de combattre le chômage conjoncturel mais ils ne sont pas
adaptés pour le chômage structurel qui résulte d’une mauvaise adéquation
entre l’offre et la demande de travail.

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Hausse de la
demande

Moindre hausse de la
Niveau des stocks
production

Hausse de la Moindre hausse de


productivité ou de la l’emploi
durée du travail

Inactifs sortants de la
« réserve »
Pas de baisse du
chômage
Qualification inadaptée
des chômeurs
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4. La réduction du coût du travail
a) Les effets de la réduction du coût du travail sur le chômage
classique
1. Le coût du travail comprend le salaire net versé au salarié (avec
primes,…), les cotisations sociales versées aux organismes de
protection sociale ( pour le Gabon CNSS et CNAMGS) et les
coûts d’embauche et de licenciement. Il est considéré comme le
déterminant principal du volume de l’emploi et du chômage par
les économistes libéraux.

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Cout du travail

Coût d’ajustement de
Coût salarial
la main-d'œuvre

Cotisations
Salaire brut Coût d’embauche Coût du licenciement
patronales

Cotisations
salariales
Salaire net

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2. Pour les économistes libéraux (Walras, Pareto, Pigou, Rueff…), le chômage a pour principale raison la
rigidité du marché du travail, et, en particulier, la rigidité des salaires réels. En effet, en concurrence pure et
parfaite, toute hausse du chômage devrait se traduire par une baisse du salaire réel puisque l’offre de travail
devient supérieure à la demande de travail. Cette baisse du coût du travail devrait avoir de nombreux effets
positifs :

– Les entrepreneurs seront incités à embaucher davantage. En effet, le coût marginal du travail, celui du
dernier travailleur embauché, deviendra inférieur à sa productivité marginale. En d’autres termes,
embaucher deviendra profitable puisque le travailleur rapportera plus à l’entreprise que ce qu’il coûte.
L’entreprise préférera donc employer un salarié supplémentaire plutôt que de substituer le capital au
travail. Ceci devrait profiter aux jeunes et aux sans diplôme qui ont une faible productivité par manque
d’expérience et de qualification. En diminuant leurs cotisations sociales, on incite les entreprises à
substituer du travail (peu qualifié) au capital (« croissance riche en emplois »).

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– La baisse du coût salarial devrait rendre les entreprises plus compétitives. La baisse du coût unitaire du
travail réduit les coûts unitaires de production et, dans un marché concurrentiel, les prix de vente. Les
entreprises vont donc augmenter leur compétitivité-prix sur les marchés internes et externes. Elles vont
augmenter leurs parts de marché et produire davantage pour répondre à la hausse de la demande. A
productivité constante, cette hausse de la production se traduira par des embauches et une diminution du
chômage.

– La baisse du coût du travail augmente le profit des entreprises. En effet, si le coût du travail diminue alors
que la productivité des travailleurs continue d’augmenter, le coût salarial unitaire diminue. Le partage de la
valeur ajoutée devient favorable aux profits. Or, selon le théorème du chancelier Helmut Schmidt, « les
profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ».

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– Enfin, la baisse du salaire réel devrait inciter un certain nombre de salarié de
se retirer du marché du travail. Si le revenu que rapporte le travail devient
inférieur à la valeur que le salarié attribue à son temps libre, il devient inutile de
rechercher un emploi. Les chômeurs découragés contribuent à la diminution
statistique du chômage.

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5. L’amélioration du fonctionnement du marché du travail
a) La flexibilisation du marché du travail et le chômage structurel
A partir des années 70, les entreprises ont éprouvé le besoin de flexibiliser le travail. La flexibilité
du travail consiste à ajuster, dans les délais les plus brefs, la quantité de travail ou les salaires à la
quantité de biens et services produits. En d’autres termes, une baisse de la production doit se traduire
immédiatement par une baisse de la quantité de travail (durée du travail et nombre de travailleurs) et
par une baisse du salaire réel versé. Un système productif est flexible lorsque la quantité de travail et
le salaire sont capables de s'adapter instantanément aux variations de la demande. Bernard Brunhes
distingue cinq formes de flexibilité du travail que l’on peut regrouper en trois types :

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1ère type : La flexibilité externe consiste à faire varier les effectifs en fonction de la demande ce qui peut
être obtenu de deux façons :

– La flexibilité quantitative externe qui consiste à faire fluctuer les effectifs de l'entreprise en
fonction des besoins, ce qui suppose une liberté d'embauche et de licenciement (le Lay off aux
Etats-Unis) et des contrats à durée très limitée (CDD, apprentissage, stages rémunérés).

– L'externalisation consiste à reporter sur une autre entreprise (le sous-traitant, l'entreprise
intérim) le lien contractuel avec le travailleur afin de mettre hors du champ des conventions
collectives ces travailleurs et de diminuer les charges en profitant de la souplesse du contrat
commercial. A la limite, le salarié est contraint de devenir indépendant. Toute baisse de
l’activité se traduira par une rupture du contrat commercial entre firmes.

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2ème type : La flexibilité interne consiste à faire varier le temps de travail et les postes de travail des salariés en
fonction de la demande. Elle prend deux formes :

– La flexibilité quantitative interne consiste à moduler les heures de travail en fonction de l'activité :
annualisation du temps de travail (permet à la firme de faire varier les horaires dans la semaine tout en
gardant une durée annuelle définie à l’avance), temps partiel contraint, travail posté (travail en équipes : 2
x 8, 3 x 8, 6 x 4, VSD...), heures supplémentaires, chômage technique ou partiel…

– La flexibilité fonctionnelle consiste à employer des travailleurs polyvalents à des fonctions variables pour
faire face aux mutations des marchés, des produits et des techniques (Toyotisme*).
Le toyotisme repose sur le « principe des 5 zéros » : Zéro panne, zéro défaut,
zéro papier, zéro délai, zéro stock.

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Fin du module

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