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Littérature francophone en

Afrique subsaharienne
De l’oral à l’écrit
• Nous noterons que l’héritage littéraire oral qui s’est perpétué à travers les
générations avait commencé à faire écho, en occident, dès le 19 ème, grâce aux
transcriptions et travaux de traduction faits principalement par des missionnaires et
des voyageurs s’étant intéressés aux mythes et légendes de l’Afrique.

• La première étude où il est question de la littérature orale africaine (entre autres


aspects de la culture africaine) est celle de l’abbé Henri Grégoire, De la littérature
des nègres ou Recherches sur leurs facultés intellectuelles, leurs qualités morales et
leur littérature, suivies de notices sur la vie et les ouvrages nègres qui se sont
distingués dans les sciences, les lettres et les arts, parue en 1808 chez Marandan.
Par ailleurs, le baron Roger, gouverneur du Sénégal, publie deux recueils de
« fables », en 1828, Kélédor : histoire africaine, et Fables sénégalaises recueillies
de l'ouolof et mises en vers français avec des notes sur la Sénégambie, son climat,
ses principales productions, la civilisation et les mœurs des habitants.
• L’abbé Boilat, pour sa part, inclut dans ses Esquisses
sénégalaises de 1853 quelques adages, proverbes et
légendes et le Dr Béranger-Féraud signe en 1885 une
étude et la traduction de 25 contes recueillis auprès
de plusieurs ethnies, intitulée Contes de la
Sénégambie. Les noirs peints par eux-mêmes, publié
en 1883 par l’abbé Bouche, présente des contes,
proverbes et énigmes de la région de Ouidah (le
Bénin actuel). L’avènement du magnétophone
facilitera, considérablement, la tâche, en permettant
d’enregistrer les griots et les conteurs et d’en en
conserver la trace sonore pouvant être exploitée plus
tard.
Précurseurs

• Ceci dit, cette littérature a dû faire un pas gigantesque du caractère oral


au caractère écrit. Commençant dans les périodiques et les revues, les
textes littéraires d’expression française paraissent et se développent dès
1913. Ce n’est qu’en 1947(Paris) qu’est fondée la première maison
d’édition consacrée entièrement à la littérature africaine.

• Précurseur du mouvement de la négritude, le soudanais Félix Darfour


est à l’origine des tous premiers textes littéraires africains (Haïti 1819).
C’est, dans la prose, que débutera la littérature du 20 ème siècle,
notamment, avec Amadou Mapaté Diagne(Sénégal) et son compatriote
Massyla Diop.
L’affranchissement

• Très longtemps accusés de se fondre dans le décor romanesque


français, la littérature africaine a réussi à s’affranchir des bornes
du colonisateur et à prouver qu’elle puise profondément ses
ressources dans son patrimoine oral. Contrairement à la visée
du roman colonial voulant peindre l’image du nègre primitif et
d’une Afrique barbare et inculte, une nouvelle idéologie naît où,
seront largement prises en considération l’apport et la richesse
des civilisations africaines : c’est l’africanisme.
• S’intéressant autant à la poésie qu’au roman, une première
génération d’hommes de lettres se creusera un chemin
sans faire de grandes vagues ni d’éclat jusqu’après la
Deuxième Guerre mondiale où, les romanciers prendront
leurs envols pour mettre en avant le genre majeur de la
littérature en Afrique. Prenant la relève de la poésie, le
roman se fait remarquer d’abord pour son engagement
sociopolitique anticolonialiste, qui prend une double
orientation à l’instar de la poésie de la négritude : certains
écrivains s’attachent à réhabiliter les valeurs et pratiques
socioculturelles de l’Afrique traditionnelle, d’autres
dénoncent l’oppression, les humiliations et les préjugés
raciaux et appellent à la résistance, sinon à la révolte.
Au commencement
Né à Pointe-Noire en République du Congo, le 24 février
1966, Alain Mabanckou est un écrivain, poète et
enseignant d’origine congolaise.
Il passe son enfance dans sa ville côtière où il obtient un
baccalauréat en Lettres et Philosophie au Lycée Karl-
Marx. Il s’oriente alors vers le droit. Après un premier
cycle de droit privé à l’Université Marien-Ngouabi à
Brazzaville, il obtient une bourse d’études et s’envole
pour la France à l’âge de 22 ans, avec déjà quelques
manuscrits dans ses affaires, des recueils de poèmes pour
la plupart, qu’il commencera à publier trois ans plus tard.
Début de carrière(France)
• Après un DEA de droit à l'Université de Paris-
Dauphine, il travaille une dizaine d'années dans le
groupe Suez-Lyonnaise des Eaux, mais se
consacre de plus en plus à l'écriture avec la
parution en 1998 de son premier roman Bleu-
Blanc-Rouge qui lui vaut le Grand Prix Littéraire
de l'Afrique noire. À partir de cette date, il ne
cessera de publier avec régularité, aussi bien de la
prose que de la poésie. C'est surtout le roman qui
le révèle au grand public.
Sa carrière aux USA
• En 2001, il part pour les États-Unis pour une
résidence d’écrivain qui débouche sur un poste de
professeur assistant de littératures francohones,
afro-américaines et de Creative writing, à Ann
Arbor pendant trois ans. Il sera nommé au poste
de professeur permanent dans le département de
littérature française et d’études francophones à
l’université de Californie-Los Angeles (UCLA), en
2007.
• Il vit aujourd'hui à Santa Monica, en Californie.
œuvres et consécration
• Révélé au grand public, avec notamment Verre cassé, éditions
du Seuil 2005, unanimement salué par la presse, la critique et
les lecteurs ; ce roman remporte le prix des Cinq Continents de
la Francophonie, prix RFO du livre , prix Ouest-France-
Étonnants Voyageurs.
• Mémoires de porc-épic qui lui vaut en 2006 l'obtention du Prix
Renaudot.
• En 2007 reparaissent les écrits poétiques d'Alain Mabanckou,
chez Points-Seuil, sous le titre de Tant que les arbres
s’enracineront dans la terre, ainsi que le livre qu’il consacre à
l’écrivain James Baldwin, Lettre à Jimmy(Fayard), à l’occasion
du vingtième anniversaire de la mort de l’écrivain américain.
• Le roman Black Bazar, paru aux Éditions du Seuil le 8
janvier 2009 a été classé parmi les 20 meilleures ventes de
livres en France dans les listes de L'Express, du Nouvel
Observateur et de Livres Hebdo.
• Demain j'aurai vingt ans, roman paru en 2010 marque son
entrée dans la collection Blanche des éditions Gallimard.
Cette œuvre a été couronnée par le Prix Georges Brassens
2010.
• Son essai Le Sanglot de l'homme noir, paru chez Fayard en
janvier 2012 et classé dans les meilleures ventes d'essais
et documents (palmarès de L'Express et Tite-Live)
• Lumières de Pointe-Noire, paru en janvier 2013 aux
Éditions du Seuil - Collection Fiction & Cie.
• 2015 : Petit Piment, Paris, Éditions du Seuil.
Reconnaissance internationale
• En 2010 Alain Mabanckou a été nommé par décret du
Président de la République française au grade de
Chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur.
• En 2012, l'Académie française lui a décerné le Grand Prix
de littérature Henri Gal (prix de l'Institut de France doté
d'un montant de 40.000 euros et qui couronne
l'ensemble de l'oeuvre d'un écrivain).
• En 2013, la Fondation Prince Pierre de Monaco salue
l’ensemble de son œuvre.
• 2016, désignation à la chaire annuelle de création
artistique au Collège de France.
Ses prises de position sur la francophonie
et autre
• Mabanckou a une vision très particulière de la
francophonie africaine. L’écrivain a toujours fait abstraction
du fait d’être noir ou africain, il affirme que : « C’est risqué
de parler d’une littérature africaine continentale tant cette
littérature est plurielle : elle est aussi diverse que la
géographie africaine. A l’intérieur même des zones
linguistiques, il y a des variétés importantes… Ce que nous
écrivons est le produit de nos rencontres, de nos voyages,
de nos discussions. Cela donne une palette très variée qu’on
peut difficilement unifier sous l’étiquette monolithique de
l’imaginaire africain. »
Lors de sa désignation à la chaire de création au collège de France,
il déclare: « J’aime penser que si j’ai été nommé au collège de France,
ce n’est pas parce que je suis un écrivain noir, mais parce que je suis
un écrivain tout court.
Mabanckou a toujours réclamé que La littérature française n'est plus
que française.
En Janvier 2018, Alain Mabanckou refuse de contribuer aux travaux
de réflexion autour de la langue française et de la francophonie,
projet proposé par Emmanuel Macron, Il reproche au président ses
erreurs d'expression et rappelle, incisif, l'hypocrisie historique du
pouvoir qui existe encore et toujours en matière de «francophonie»
en Afrique.
Vous pouvez lire l’intégralité de la lettre de Mabanckou à l’adresse:

https://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20180115.OBS0631/francophonie-langue-
francaise-lettre-ouverte-a-emmanuel-macron.html
Léopold Sédar
SENGHOR (1906,
Joal, Sénégal – 2001,
Verson, France)
En bref
• Poète, écrivain et homme politique sénégalais, L. S.
Senghor est né le 9 octobre 1906 à Joal, petite ville
côtière située au sud de Dakar, et mort le 20 décembre
2001 à Véson en Normandie. Chantre de la négritude,
du métissage et de la civilisation de l’universel, il a été
le premier président de la République du Sénégal
(1960–1980) et le premier écrivain noir élu à l’Académie
française en 1983. L’essentiel de ses écrits politiques et
essais littéraires sont rassemblés dans cinq volumes
sous le titre Liberté, publiés de 1964 à 1993 et ses
poésies sont disponibles en un volume Œuvre poétique
Formation
Il s’initie aux études classiques au collège-séminaire : « C’est à Dakar que j’ai
reçu la formation la plus solide... C’est ainsi que j’ai appris à tenir compte du
sens exact des mots, à rechercher la clarté et l’équilibre de la
phrase » (France-Culture, émission radiodiffusée, 1977). En 1927, après avoir
obtenu le baccalauréat, il poursuit ses études supérieures à Paris, au Lycée
Louis le Grand pour préparer l’école normale supérieure, où il se lie d’amitié
avec Aimé Césaire et Georges Pompidou, puis à la Sorbonne. Il obtient
l’agrégation de grammaire en 1935 et suit les cours de Paul Rivet, Marcel
Mauss et Marcel Cohen à l’institut d’ethnologie de Paris. L’étudiant en lettres
classiques, puis le professeur, aborde et domine rapidement l’héritage littéraire
et philosophique gréco-latin et en retire la conviction que la civilisation antique
ressemble par bien des aspects à la civilisation africaine : « l’avantage de la
civilisation gréco-latine est d’être à la hauteur, mieux, au rythme et à la couleur
de la nôtre. Les deux civilisations baignent dans la même atmosphère sociale :
morale. (Liberté III, Défense des lettres classiques, 1977).
Ses intimes convictions
• Il défend l’idée d’une fécondation de la civilisation
grecque par l’apport premier de la civilisation égyptienne
à travers le souvenir des « Éthiopiens », ’du grec
« aithiops », « noir », nom qui désignait couramment dans
les textes grecs, les peuples de l’Afrique et qui lui fournira
le titre de l’un de ses principaux recueils de poésie :
Éthiopiques (1956) : « parmi leurs civilisateurs, les anciens
Grecs comptaient les Égyptiens et d’Homère à Strabon, ce
sont leurs écrivains qui ont fait les plus grands éloges des
« Éthiopiens », c’est-à-dire des Nègres » (Liberté 3, « Le
Sénégal, le latin et les humanités classiques », 1977).
La négritude
• C’est aussi l’époque où il crée avec Léon-Gontran Damas et Aimé Césaire la
revue contestataire L’Étudiant noir en 1934. Dans ces pages, il exprime pour la
première fois sa conception de la négritude, notion introduite par Aimé Césaire,
dans un texte intitulé « Négrerie » : Mais alors que pour Césaire, la « Négritude »
est avant tout l’expression d’une race opprimée qu’il dira « mesurée au compas
de la souffrance », Senghor développe l’idée d’une négritude positive, constituée
par l’ensemble des richesses culturelles du monde noir, la revendication d’une
différence fondatrice et d’une source tout aussi première et vitale que la culture
occidentale : « Objectivement, la Négritude est un fait : une culture. C’est
l’ensemble des valeurs, économiques et politiques, intellectuelles et morales,
artistiques et morales. Subjectivement, la Négritude, c’est aussi assumer les
valeurs de civilisation du monde noir, les actualiser et féconder, au besoin avec
les apports étrangers, pour le suivre par soi-même et pour soi, mais aussi pour
les faire vivre par et pour les autres, apportant ainsi la contribution des Nègres
nouveaux à la civilisation de l’Universel » (Liberté 3, Problématique de la
Négritude).
Esprit de l’universalité

• La négritude n’a pas pour objectif le combat mais la
coopération ; la lutte mais la communication, socle
d’une « véritable union » qui ne confond pas, mais
enrichit en prenant en compte les différences.
• Senghor se plaisait à résumer sa pensée par cette
maxime : « le français est une langue essentielle, le
négro-africain, une langue existentielle ».
• L’homme a toujours cherché à concilier les
apports de la civilisation gréco-romaine et les
apports de la civilisation négro-africaine, la
culture animiste et la religion chrétienne, la
négritude et la francité et rêvait d’une
civilisation de l’universel. La création de la
Francophonie, qu’il a longtemps appelée de
ses vœux, en sera l’aboutissement.
Politiquement parlant
• Au lendemain de la guerre, après avoir été fait
prisonnier puis libéré pour cause de maladie, il obtient
en 1945 la chaire de linguistique à l’École nationale de
la France d’outre-mer qu’il occupe jusqu’à
l’indépendance du Sénégal en 1960. Élu député du
Sénégal en 1945 et constamment réélu (1946, 1951,
1956) jusqu’à son accession à la présidence de la
République en 1960.
• Élu le 5 septembre 1960, Senghor est réélu Président
de la République du Sénégal en 1963, 1968, 1973, 1978
et se démet de ses fonctions le 31 décembre 1980.
Senghor et la poésie
• Les poèmes d’Hosties noires (1948), recueil composé durant sa
captivité pendant la seconde guerre mondiale, comportent également
une tonalité éminemment religieuse : si les poèmes sont « hosties »,
c’est parce qu’ils sont eux-mêmes symboles de l’alliance universelle
des Noirs et des Blancs.
• Le rythme issu des traditions orales du continent noir, qu’il s’agisse du
mouvement de la danse ou de la « transe du tamtam » est comme
l’expression antérieure à la parole, et est au centre, à juste titre, de la
poésie de Senghor.
• La volonté d’élever l’Afrique à la dignité d’acteur reconnu et d’objet
poétique est l’une des plus constantes préoccupations de Senghor qui
passe constamment de l’exposé des motifs sociopolitiques à leur
intégration dans le processus de création poétique et réciproquement.
Consécrations
• Ses activités culturelles seront constantes : en
1966, se tient, à Dakar, le 1er Festival mondial
des arts nègres. Il est titulaire de nombreux
grands prix nationaux et internationaux de
poésie et de littérature, docteur honoris causa
de trente-sept universités et membre de près
d’une dizaine d’académies. Il est élu à
l’Académie française, le 2 juin 1983, au
fauteuil du duc de Lévis-Mirepoix.

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