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Gynécologie - Obstétrique

B 160

Post-partum
Surveillance clinique, allaitement et ses complications
PR Michel HERLICOVIEZ
Clinique de gynécologie-obstétrique, hôpital Clémenceau, 14033 Caen Cedex.

Points Forts à comprendre 3. Modifications du vagin et des organes


génitaux externes
• Le post-partum est la période qui va L’épithélium vaginal subit des modifications parallèles à
de l’accouchement jusqu’au retour de couches, celles de l’endomètre ; on assiste à une récupération de
c’est-à-dire aux premières règles normales ; la tonicité des organes génitaux externes.
il est marqué par la disparition progressive
des modifications de l’organisme liée à l’état Modifications de l’organisme
gravidique. dans le post-partum
• Dans le post-partum immédiat, l’attention
doit être attirée vers le risque d’hémorragie, On assiste à la disparition de l’imprégnation hormonale
d’infection et de thrombose. gravidique : les œstrogènes qui se sont effondrés dès
• Cette période doit faire l’objet d’informations l’accouchement ne font leur réapparition dans l’organisme
concernant la prise en charge du nouveau-né qu’à la reprise du cycle ovarien, c’est-à-dire à partir du
et la contraception. 25e jour ; pour la progestérone, il faut attendre la reprise
• Chez la femme qui allaite, il faut réunir d’un cycle ovulatoire, c’est-à-dire le plus souvent après
les conditions permettant d’assurer le retour de couches.
harmonieusement cette fonction, prévenir Il en résulte que les modifications de l’organisme liées à
et traiter d’éventuelles complications . l’imprégnation hormonale gravidique ne s’atténuent que
progressivement. Il en va ainsi de :
– l’hypotonie des voies urinaires et des voies biliaires
qui persiste pendant 3 mois, ce qui rend peu interprétables
Modifications physiologiques les examens échographiques et radiologiques pendant
cette période ;
et anatomiques des suites de couches – l’hypercoagulabilité qui persiste pendant au moins
2 à 3 semaines : elle est liée à l’augmentation du
Retour à la normale de l’appareil génital fibrinogène (x 2) et des autres facteurs de la coagu-
1. Involution utérine lation ; associée à la stase veineuse, à l’œdème gravi-
dique, à une éventuelle anémie, à la sédentarité, elle
Elle est d’abord rapide puis plus lente jusqu’au 2e mois ; explique le risque accru de thrombose pendant cette
l’utérus passe ainsi d’un volume d’une grossesse de période ;
4 mois et demi après la délivrance, soit un poids de – la normalisation de la tolérance aux sucres et des
1 500 à 1 700 g, une hauteur de 20 à 30 cm , à des dimen- modifications des lipides (triglycérides, cholestérol) ;
sions d’avant la grossesse (70 g et 7 à 8 cm de hauteur) ; il faut attendre le retour de couches pour réaliser le
Le segment inférieur disparaît rapidement et le col utérin bilan glucido-lipidique préalable à la prescription de
se reconstitue en quelques jours (à noter la persistance contraceptifs oraux.
d’un ectropion jusqu’à 6 à 12 mois).
2. Régénération de la muqueuse endométriale
Surveillance clinique des suites
Elle se fait en 4 étapes : de couches
– une phase de régression (4 à 5 j) ;
– une phase de cicatrisation (6e au 25e j) à partir des Suites de couches
culs-de-sac glandulaires ;
– une phase hormonale de régénération (25e au 45e j), L’hospitalisation est habituellement de 4 à 6 jours, plus
sous l’effet d’une stimulation œstrogénique seule ; brève si existe la possibilité d’hospitalisation à domicile,
l’endomètre a alors l’aspect d’une phase folliculaire ; plus longue en cas de césarienne.
– une phase de reprise du cycle menstruel au-delà de Les objectifs de cette hospitalisation sont :
45 j : le premier cycle est habituellement anovulatoire ; – d’éviter et de prévenir les complications du post-partum ;
chez les femmes qui allaitent, la première menstruation –l’enseignement des jeunes mères (puériculture, alimen-
ne survient en général qu’après l’arrêt de l’allaitement. tation du nouveau-né, rééducation périnéale, contraception).

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POST-PARTUM

1. État général 7. Contraception du post-partum


• Le premier jour est principalement consacré au La contraception doit être discutée et proposée car, bien
dépistage d’une hémorragie secondaire ; cette surveillance que peu fréquentes, les grossesses sont néanmoins
est effectuée obligatoirement en salle d’accouchement possibles dès les premières semaines suivant l’accou-
dans les 2 premières heures puis dans le service d’hospi- chement, y compris chez les femmes qui allaitent.
talisation. Il faut tenir compte :
Elle consiste en la prise régulière du pouls, de la tension – de l’hypercoagulabilité et du risque de thrombose du
artérielle et l’observation de la coloration cutanéo- post-partum qui risque d’être majoré par les œstro-
muqueuse, l’examen de l’écoulement vulvaire (aspect des progestatifs au cours des 2 premières semaines ;
garnitures), la palpation du globe utérin de sécurité (uté- – du passage des stéroïdes dans le lait maternel.
rus de 4 mois, ferme et dont le volume n’augmente pas). Elle peut faire appel à :
Il est normal qu’il y ait, principalement chez les multi- – des moyens mécaniques locaux : préservatif ou
pares, des contractions utérines douloureuses appelées utilisation d’ovules ou de crèmes spermicides
« tranchées ». (Pharmatex) ;
• Les jours suivants, on observe les signes de pancarte : – des œstroprogestatifs minidosés débutés 15 jours après
surveillance du pouls, de la pression artérielle, de la tem- l’accouchement chez les femmes qui n’allaitent pas ;
pérature 2 fois par jour – une élévation de la température – des progestatifs purs microdosés chez les femmes qui
peut faire évoquer une endométrite – ; au 3e jour, elle peut allaitent.
simplement être contemporaine de la montée laiteuse ;
l’accélération du pouls sans élévation de la température Retour de couches et examen postnatal
doit faire rechercher une thrombose ; on réalise éventuel-
lement une numération formule sanguine au 3e jour . 1. Retour de couches
2. Involution utérine Il s’agit des premières règles normales : en l’absence
• Le fond utérin palpé s’abaisse de jour en jour : au d’allaitement, elles surviennent de 6 semaines à 3 mois
7e jour, il est perçu à mi-distance entre le pubis et l’om- après l’accouchement ; chez la femme qui allaite, le
bilic, au 15e jour, l’utérus ne dépasse plus la symphyse retour de couches peut être retardé jusqu’au 5e mois.
pubienne et le col utérin est fermé. 2. Examen postnatal
• Les lochies sont des écoulements d’origine utérine ;
elles sont sanglantes et fluides les premiers jours et Il doit avoir lieu au 2e mois et comporte :
deviennent rosées à la fin de la 1re semaine. – un examen général : poids, pression artérielle, examen
du cœur et des poumons, état des muscles abdominaux,
3. Fonctions d’évacuation des seins ;
La vessie est atone et il en résulte parfois une rétention – un examen gynécologique :
souvent incomplète. Il n’est pas rare non plus de constater – examen de la vulve et du périnée : il est essentielle-
une petite incontinence urinaire d’effort, voire une ment centré sur l’examen des cicatrices périnéales :
incontinence anale. Le risque de survenue d’une crise les cicatrices d’épisiotomie ou de déchirures péri-
hémorroïdaire justifie le traitement de la constipation, néales peuvent être encore sensibles ; il faut apprécier
habituelle dans les premiers jours. la qualité de la réparation, la souplesse des tissus,
rechercher la présence d’un granulome ; s’il y a eu
4. Périnée reprise des relations sexuelles, il faut s’enquérir sur
Si le périnée est intact, on réalise une toilette vulvaire leur caractère douloureux ou non,
simple et une protection par des garnitures ; si le périnée – il faut rechercher un prolapsus, une incontinence
a été suturé, il doit être examiné, nettoyé avec une solu- urinaire d’effort au cours d’efforts de poussée,
tion antiseptique et soigneusement séché au moins une – examen au spéculum : il n’est pas rare que persiste
fois par jour. encore un ectropion cervical ; cet examen est égale-
ment l’occasion de faire un frottis de dépistage,
5. Seins et lactation – au toucher vaginal, on note un orifice cervical déhis-
La surveillance doit être particulièrement vigilante afin cent et un corps utérin de taille normale,
d’obtenir une bonne mise en route de l’allaitement et d’en – le testing des releveurs, coté de 0 à 5, permet d’évaluer
éviter les complications. Elle est envisagée plus loin. la nécessité d’une rééducation périnéale.
6. Prévention des thromboses 3. Mesures d’accompagnement
Elle comporte la surveillance par la palpation des • Il faut prescrire une rééducation du périnée : 10 séances
mollets et surtout les mesures préventives comme le de rééducation chez un kinésithérapeute ou une sage-
lever précoce et les bas de contention en cas de mauvais femme sont prises en charge par la Sécurité sociale ; il
réseau veineux. Dans certains cas, pourra être discutée faut privilégier la rééducation périnéale à la rééducation
la mise en route d’un traitement anticoagulant (hépa- de la sangle abdominale qui est envisagée dans un second
rines de bas poids moléculaire). temps.

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• La contraception est abordée au cours de cette consul- • Les péritonites généralisées sont exceptionnelles.
tation qui est aussi le moment de discuter régulation des • Les thrombophlébites pelviennes suppurées des gros
naissances et de mettre au point la contraception définitive. troncs veineux latéro-utérins sont secondaires à une
• Le vécu de l’accouchement et l’état de l’enfant sont endométrite. Les signes généraux sont inquiétants, la
abordés ainsi que le déroulement de la grossesse, de température est désarticulée, associée à des frissons ; on
l’accouchement, du point de vue médical, bien sûr mais recherche des signes de phlébite pelvienne : douleur
aussi psychologique. Il faut demander des nouvelles de latéro-utérine, empâtement ou cordon unilatéral doulou-
l’enfant, souvent présent à la consultation et laisser la reux. L’évolution est marquée par l’extension de la
femme exprimer sa joie, mais aussi ses difficultés et son thrombose et l’apparition de métastases.
appréhension à l’évocation de la reprise de son activité • Les septicémies puerpérales sont gravissimes.
professionnelle.

Maladie thrombo-embolique veineuse


Complications des suites
de couches Le risque thrombo-embolique est favorisé par l’impor-
tance de la stase veineuse, l’augmentation de la masse
Infections puerpérales sanguine, l’hyperpression veineuse des membres
inférieurs, et l’hypercoagulabilité sanguine, auxquelles
Les germes le plus souvent rencontrés sont les strepto- il faut ajouter la sédentarité, l’anémie et l’infection.
coques, les staphylocoques, les colibacilles. Elle est marquée par des signes :
Parmi les circonstances favorisantes liées à l’accouche- – pelviens : la thrombose débute au niveau des veines
ment, on relèvera : le terrain (toxémie, anémie) ; un pelviennes, il en résulte des petits troubles urinaires et
accouchement long avec rupture prolongée des mem- digestifs ;
branes ; une hémorragie de la délivrance ; la réalisation – cruro-jambiers unilatéraux à type de pesanteur, de
de manœuvres endo-utérines ; la césarienne. tension, voire de douleur du mollet ;
Les germes sont souvent manuportés (sage-femme, – généraux : accélération du pouls précédant l’augmen-
accoucheur), ce qui doit faire insister sur la nécessité :
tation de la température, fréquemment associée à une
du dépistage et du traitement des infections génitales
sensation d’angoisse.
pendant la grossesse ; d’une asepsie rigoureuse pendant
• L’examen du mollet doit rechercher : une augmentation
toute la durée du travail, tout particulièrement lorsque
de son volume, une augmentation de la chaleur locale,
les membranes sont rompues ; les touchers doivent être
une diminution du ballottement, une douleur provoquée
réduits au minimum nécessaire pour suivre la bonne
marche du travail. sur un trajet veineux, une douleur à la dorsiflexion du
Les voies génitales et l’aire placentaire sont le point de pied (signe de Homans).
départ de l’infection et la propagation se fait par voie • L’évolution se fait : rarement vers la phlegmatia
canalaire, veineuse et lymphatique au tissu cellulo-gan- alba dolens ; parfois vers l’embolie pulmonaire qui
glionnaire du ligament large. peut être inaugurale et parfois fatale lorsqu’elle est
• L’endométrite du post-partum survient quelques massive.
jours après l’accouchement, associant : des signes géné-
raux – température à 38-38,5 ˚C, pouls accéléré, état
général plus ou moins altéré ; des lochies abondantes et Allaitement
fétides (faire un examen bactériologique) ; un utérus
gros, mou, douloureux, avec un col ouvert. Parmi les Physiologie
signes négatifs, on note : des culs-de-sac libres et indo-
lores, des seins normaux, des urines stériles. • Pendant la grossesse, la lactation est préparée par :
Il existe des formes frustes au diagnostic difficile, des l’hormone lactogène placentaire qui a une action trophique
formes hémorragiques posant le problème du diagnostic sur la glande mammaire ; les œstrogènes qui permettent
différentiel avec une rétention placentaire. le développement des canaux galactophores ; la proges-
• La pelvipéritonite des suites de couches succède à térone qui exerce son action sur les acini glandulaires en
une endométrite méconnue et non traitée à la fin de la assurant leur croissance et le blocage de la fonction
1re semaine. Les signes généraux sont plus sévères avec, sécrétoire.
en particulier, une température atteignant 39 à 40 ˚C, des • Au moment de l’accouchement, on assiste : à
douleurs pelviennes intenses associées à un état sub- l’effondrement des sécrétions d’œstrogènes et de
occlusif, une défense sus-pubienne. Au toucher vaginal, progestérone ; à la levée du rétrocontrôle négatif hypo-
l’utérus est bloqué, douloureux, les culs-de-sac vagi- thalamique (PIF) ; et donc à la stimulation de la sécré-
naux empâtés et douloureux. tion de prolactine.
• Des collections suppurées peuvent être secondaires à • L’entretien de la sécrétion lactée est réalisé par un
une endométrite : il s’agit d’un abcès du Douglas ou réflexe neuro-hormonal à point de départ mamelonnaire
d’un phlegmon du ligament large. (réflexe de Fergusson) (figure 1).

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POST-PARTUM

L’alimentation de la mère doit être équilibrée et doit privi-


légier les laitages qui assurent un apport supplémentaire
SUCCION en calcium et en protéines. Il faut boire abondamment.
Sont contre-indiqués : l’alcool, les excitants, le tabac. En
ce qui concerne les médicaments, ils risquent de passer
HYPOTHALAMUS dans le lait et certains d’entre eux sont contre-indiqués.
Les premiers jours sont quelquefois difficiles et nécessitent
beaucoup d’attention et d’encouragements. C’est souligner
le rôle important sur le plan éducatif, dans le post-partum
HYPOPHYSE ANTÉRIEURE HYPOPHYSE POSTÉRIEURE immédiat, des sages-femmes et des puéricultrices.

Bénéfices
PROLACTINE OCYTOCINE
Le lait maternel est l’aliment naturel du nouveau-né.
• Le colostrum précédant la montée laiteuse est très
ACINI : précieux ; sa valeur nutritive est exceptionnelle : moins
ACINI : sucré que le lait et plus riche en protéines, il est facile à
SÉCRÉTION
CONTRACTION digérer et bien assimilé ; par ailleurs, sa richesse en anti-
DES FIBRES corps est un atout efficace dans la lutte contre les infec-
MUSCULAIRES
tions bactériennes et virales.
ET ÉVACUATION
• Le lait maternel prend le relais du colostrum à partir
du 4e jour et sa composition est idéale pour le nouveau-né
dont il assure la croissance harmonieuse. Il est recommandé
Entretien de la sécrétion lactée. chez l’enfant de petit poids et tout particulièrement chez le
prématuré : sa composition est parfaitement adaptée ; sa
digestibilité est parfaite ; il protège des infections digestives
et respiratoires.
Modalités • Le bénéfice psychologique est obtenu par le contact
1. Mise en route étroit et l’établissement du lien mère-enfant. Toutefois,
l’allaitement nécessite une certaine motivation de la part
La mise au sein doit être faite dès que possible, en salle de la mère et s’il doit être conseillé ne doit jamais être
d’accouchement, afin de favoriser la montée laiteuse. imposé.
2. Installation
Il faut conseiller aux femmes d’adopter une position Inhibition de la lactation
confortable : assise, dos maintenu, l’enfant doit être
Les femmes qui ne souhaitent pas allaiter doivent
placé à hauteur du mamelon qu’il doit admettre entière-
recevoir, dès le jour de l’accouchement, un inhibiteur de
ment dans sa bouche. Après les 2 premiers jours où les
la prolactine ; il s’agit de la bromocriptine (Parlodel,
tétées sont courtes et fréquentes et où les 2 seins sont
proposés, on conseille d’espacer progressivement les Norprolac) prescrite à raison de 2 comprimés par jour
tétées (toutes les 4 h environ), tout en mettant l’enfant au pendant 3 semaines. Les premiers jours du traitement, la
sein dès qu’il réclame. Il faut alterner les seins une fois prise de bromocriptine doit être fractionnée afin d’éviter
sur 2 et ne pas laisser l’enfant au sein trop longtemps (20 des sensations vertigineuses.
min environ).
Complications
3. Montée laiteuse
La montée laiteuse se produit le 3e ou le 4e jour et se Elles sont essentiellement dues à une mise en route de
traduit par une élévation thermique modérée (38 à 38,5 ˚C) l’allaitement inadaptée et à une mauvaise hygiène locale.
et un gonflement des seins qui deviennent tendus. C’est 1. Engorgement mammaire
une journée délicate car l’enfant qui a perdu 1/10e de
son poids devient plus exigeant car il a faim alors que la Il survient en général aux alentours du 3e jour du post-
sécrétion lactée est tout juste en train de s’installer. partum, en général associé à une montée laiteuse retardée
L’équipe médicale doit alors être présente pour éviter que la femme tente de favoriser par des boissons trop
que la femme ne se décourage. abondantes ; il se manifeste par des seins tendus, durs et
douloureux, se vidant mal.
4. Hygiène Le traitement est local : douches chaudes sur les seins ;
Les règles élémentaires d’hygiène doivent être respectées petites doses d’ocytocine avant les tétées afin d’améliorer
(se laver les mains et nettoyer les mamelons au sérum l’excrétion lactée, utilisation en dernier recours d’un
physiologique avant et après chaque tétée sans les irriter). tire-lait électrique.

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2. Crevasses du mamelon Complications du retour


Elles se manifestent par des douleurs au moment de la de couches
tétée associées à des saignements. Il se forme des fissures
ou érosions radiées des mamelons. Le traitement est Hémorragies
local (antiseptiques, pommades cicatrisantes, « bouts de
seins » évitant transitoirement le contact direct), associé Elles sont habituellement en rapport avec une endométrite.
à une mise au point avec la patiente de sa méthode Elles peuvent être favorisées par des rétentions placen-
d’allaitement, afin d’éviter les récidives ou d’autres taires a minima, passées inaperçues (polype placentaire).
complications.
Aménorrhée
3. Lymphangite aiguë du sein
Il s’agit d’une complication aiguë faisant généralement Elle se définit par l’absence de survenue du retour de
suite à des crevasses du mamelon. Elle se manifeste par couches au-delà de 3 mois si la femme n’allaite pas, de
une température élevée à 40 ˚C avec des frissons, de 5 mois si elle allaite.
vives douleurs au niveau d’un sein et la présence sur Le diagnostic est orienté par la courbe ménothermique
un des seins d’un placard lymphangitique rouge, sans et le test à la progestérone (administration pendant 10 j
induration sous-jacente. de rétroprogestérone [Duphaston]) qui est positif lorsque
Le traitement ne nécessite pas l’arrêt de l’allaitement ; celle-ci aboutit à une hémorragie de privation, témoi-
tout au plus le lait sera tiré jusqu’à la guérison en règle gnant alors d’une imprégnation œstrogénique suffisante
générale rapide sous l’effet des traitements locaux (com- pour assurer un développement endométrial.
presses alcoolisées, cataplasmes à l’Antiphlogistine), • Si la courbe thermique est plate, il s’agit alors le plus
des anti-inflammatoires et, si besoin, des antibiotiques souvent d’une anovulation par inertie hypothalamo-
antistaphylococciques. hypophysaire ; le test à la progestérone est habituellement
positif, et le plus souvent le cycle menstruel se remet
4. Abcès du sein spontanément en place.
C’est la complication la plus sévère, qui va nécessiter • Si la courbe thermique est biphasique, il faut évoquer
l’arrêt de l’allaitement ; il survient à partir de crevasses une synéchie utérine faisant suite à une manœuvre endo-
négligées. On distingue : utérine, elle-même compliquée d’une endométrite.
– une phase de galactophorite, initiale, marquée par • En cas de plateau thermique prolongé et de test à la
une tension douloureuse d’un sein, une température à progestérone négatif, il faut penser à une nouvelle
38 ˚C, le signe de Budin : issue de lait mélangé à du grossesse, toujours possible avant le retour de couches
pus laissant une tache jaune sur la compresse. Le et demander un dosage d’hCG.
traitement repose sur l’arrêt de l’allaitement ; le lait
est tiré et jeté. À ce stade, l’association d’anti-inflam- Troubles psychologiques
matoires et d’antibiotiques peut encore permettre la
guérison ; La période du post-partum est une période de vulnérabilité
– une phase de mastite aiguë qui succède à la galacto- pendant laquelle il faut être particulièrement attentif à la
phorite et qui ne guérit que par la fistulisation de survenue de troubles psychologiques.
l’abcès ou, mieux, son drainage chirurgical. Elle se
manifeste par des douleurs vives, une altération de 1. « Post-partum blues »
l’état général, une température oscillante, un sein très Il s’agit de manifestations de tristesse avec pleurs ou
sensible avec un noyau dur exquisément douloureux. d’irritabilité survenant habituellement au 3e jour, souvent
Il ne faut pas donner d’antibiotiques mais attendre que contemporaines de la montée laiteuse ou de difficultés à
l’abcès « mûrisse » et se collecte ; l’allaitement. S’y associent des troubles du sommeil
– une phase de suppuration de collection permet attribués au réveil par le bébé, mais aussi à des douleurs
l’incision de l’abcès. Les douleurs deviennent d’épisiotomie ou encore des contractions utérines. Il se
lancinantes, pulsatiles, entraînant une insomnie ; on voit chez près de la moitié des accouchées.
assiste alors à un ramollissement du noyau avec
des modifications de la peau en regard, qui devient 2. Dépression du post-partum
rouge, succulente. On peut réaliser l’incision et le Elle survient dans 10 à 15 % des cas. Son début est plus
drainage. tardif, entre 4 et 6 semaines après l’accouchement.
Elle se traduit par des pleurs, une labilité de l’humeur,
5. Anomalies de la sécrétion lactée un sentiment de découragement, d’épuisement aggravés
• L’agalactie totale est exceptionnelle (il convient de le soir, avec des difficultés d’endormissement. Sont
penser au syndrome de Sheehan). particulièrement caractéristiques : un sentiment d’inca-
• L’hypogalactie peut témoigner d’une anomalie mam- pacité à s’occuper de son enfant, l’absence de plaisir à
maire, de grossesses trop rapprochées, de carences ali- faire les soins, une agressivité vis-à-vis de l’entourage
mentaires. familial et principalement du conjoint.

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POST-PARTUM

Son dépistage précoce permet une prise en charge Points Forts à retenir
adaptée ; il pourrait éviter, chez l’enfant, l’apparition
ultérieure de troubles du comportement et de retards • La période des suites de couches est marquée
d’acquisition. par la disparition progressive des modifications
3. Psychose puerpérale gravidiques de l’organisme maternel.
Elle survient dans environ 0,2 % des naissances. Il s’agit • Dans les suites de l’accouchement, la surveillance
d’un état confuso-onirique aigu. porte sur les risques hémorragique, infectieux
Elle survient brutalement, 12 à 15 jours après l’accouche- et thrombo-embolique veineux.
ment ; elle est marquée par une confusion avec désorienta- • La mise en route de l’allaitement maternel
tion, des troubles de l’identification des proches et des nécessite toutes les attentions, afin de favoriser
manifestations oniriques avec, en particulier, des tableaux son bon déroulement ultérieur.
inquiétants voire terrifiants. On peut voir apparaître • Cette période est également idéale
parfois un état mélancolique ou un état pseudo-maniaque. pour promouvoir la contraception.
L’évolution peut être très dangereuse avec risque de • Enfin, la fréquence de la dépression du post-
suicide, ou d’infanticide. Le traitement doit comporter partum doit attirer toute notre vigilance en raison
l’isolement en milieu psychiatrique et aboutit habituel- des risques encourus par la mère et l’enfant.
lement à la guérison totale à distance. ■

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