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B 377
Anti-inflammatoires
non stéroïdiens
Principes et règles d’utilisation
Pr Bernard BANNWARTH
Service de rhumatologie, groupe hospitalier Pellegrin, 33076 Bordeaux cedex.
Laboratoire de thérapeutique, université Victor-Segalen, 33076 Bordeaux cedex.
TABLEAU
AINS : principales formes orales destinées à l’adulte
2. Métabolisme et élimination sépare les AINS en 3 catégories selon que leur demi-vie
Une biotransformation dans le foie est indispensable à l’ac- moyenne est :
tivité de promédicaments tels que le fenbufène et le sulin- – longue, de l’ordre de 1 à 4 jours (oxicams, phénylbuta-
dac. De plus un catabolisme hépatique plus ou moins zone) qui ne nécessitent en principe qu’une seule prise
important précède et facilite l’excrétion des AINS – qui est quotidienne ;
principalement urinaire. Dans les reins, les AINS peuvent – moyenne, entre 10 et 18 heures (diflunisal, sulindac,
entrer en compétition avec des substances endogènes fenbufène et naproxène) ;
(acide urique) ou d’autres médicaments (lithium, métho- – courte, inférieure à 8 heures (autres AINS), imposant
trexate…) au niveau des processus de sécrétion et de réab- a priori 2-3 administrations journalières.
sorption tubulaires. En réalité, le fractionnement des doses est parfois sou-
haitable pour améliorer la tolérance digestive des AINS
3. Demi-vie d’élimination plasmatique à demi-vie longue. Inversement, les formes à libération
La demi-vie d’élimination plasmatique d’un AINS condi- prolongée des AINS à demi-vie courte autorisent une
tionne en partie son rythme d’administration. À cet égard, on prise quotidienne unique.
œdèmes, d’installation rapide, en quelques jours. Elle se notamment ORL ou stomatologique. Cela tiendrait
corrige en règle dès l’arrêt de l’AINS. Cette complica- davantage aux propriétés des AINS, susceptibles de
tion dose-dépendante a pour circonstance favorisante masquer les symptômes d’une infection et de retarder le
une hypoperfusion rénale préalable (insuffisance car- diagnostic qu’à une improbable diminution des défenses
diaque, hypovolémie efficace par déshydratation, prise immunitaires sous AINS.
de diurétiques, syndrome néphrotique, cirrhose décom- Il reste que les injections intramusculaires d’AINS com-
pensée…), les prostaglandines locales intervenant alors portent un réel risque de nécrose tissulaire, voire de fas-
dans le maintien du débit de filtration glomérulaire. ciite nécrosante et d’abcès.
• Les néphrites interstitielles aiguës, exceptionnelles, se
développent après quelques semaines ou mois de traite-
ment et laissent volontiers des séquelles. Règles d’utilisation
• Les néphropathies interstitielles chroniques, clas-
siques « néphropathies aux analgésiques » se rencon- Indications
trent avec une fréquence accrue après une utilisation
prolongée d’AINS. Bien qu’ils aient le même profil pharmacologique, les
• Des troubles hydroélectrolytiques peuvent résulter de AINS ne partagent pas les mêmes indications thérapeu-
l’inhibition de la synthèse des prostaglandines rénales : tiques en raison de différences :
– rétention hydrosodée, avec potentielle augmentation – de rapport bénéfice/risque, avérées (médicaments
de la pression artérielle ; anciens) ou présumées (médicaments récents), diffé-
– hyperkaliémie par hypoaldostéronisme hyporéni- rences que reflètent leur inscription sur la liste I ou la
nique. liste II ou leur exonération (« hors liste ») des substances
vénéneuses ;
4. Manifestations hématologiques – d’essais cliniques menés en vue de l’obtention de l’au-
torisation de mise sur le marché (AMM) ;
Le plus souvent à point de départ médullaire, les com- – de stratégies marketing entre laboratoires pharmaceu-
plications hématologiques comprennent de rares neutro- tiques.
pénies et thrombopénies, et d’exceptionnelles agranulo- En pratique, il est nécessaire de consulter le dictionnai-
cytoses, anémies érythroblastopéniques et pancytopé- re Vidal pour connaître le libellé exact des indications
nies. Elles sont surtout le fait de la phénylbutazone – qui reconnues à chaque spécialité. Toutefois, le champ des
n’en a toutefois par l’apanage. indications tend à s’élargir progressivement de la phé-
Les anémies consécutives à un saignement digestif nylbutazone à l’aspirine, amenant schématiquement à
occulte sont moins inhabituelles. considérer 4 catégories d’AINS.
• Information des malades.: il faut énoncer aux patients 2/ AINS commercialisés comme
les principales complications des AINS pour qu’ils antalgiques
arrêtent le traitement ou sollicitent un avis médical Plusieurs AINS sont commercialisés comme antalgiques (ou antal-
devant certains signes d’alerte, en particulier cutanéo- giques-antipyrétiques) : certaines spécialités d’aspirine, l’ibuprofè-
ne 200 mg, le kétoprofène 25 mg, le fénoprofène, l’acide méféna-
muqueux et digestifs. Comme l’automédication est fré- mique (voir tableau). Chacun a pour indications un éventail plus ou
quente dans les syndromes douloureux, il convient de moins large de syndromes algiques.
mentionner l’incompatibilité entre le médicament pres- Leur caractéristique commune est une restriction des doses unitaires
crit et les AINS vendus comme antalgiques-antipyré- et quotidiennes qui, en principe, ne leur permet pas de diminuer la
composante œdémateuse de la réaction inflammatoire tout en étant
tiques. efficaces sur la douleur (et la fièvre).
• Surveillance : l’administration prolongée d’un AINS La limitation posologique a pour conséquence une réduction du
risque notamment digestif et rénal. Pour autant, ces médicaments
justifie une évaluation régulière de son efficacité et de restent des AINS et ils partagent les effets indésirables, les interac-
sa tolérance en tenant compte du terrain physiopatholo- tions et contre-indications de leur classe. De plus, la variabilité
gique du malade et des médicaments associés. ■ interindividuelle de réponse aux AINS fait qu’ils peuvent convenir
à des malades souffrant de rhumatismes inflammatoires.