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indiqué sur LCI que ce G7 avait été « utile et efficace »


sur le fond, puisqu’il avait permis « de faire bouger les
Macron après le G7 de Biarritz: derrière
lignes sur les grands sujets ».
la com’, le statu quo
PAR ELLEN SALVI
ARTICLE PUBLIÉ LE MERCREDI 28 AOÛT 2019

Donald Trump et Emmanuel Macron à Biarritz, le 26 août. © Reuters

En termes de communication, l’exercice est


Donald Trump et Emmanuel Macron à Biarritz, le 26 août. © Reuters effectivement réussi. L’arrivée « surprise » du
Après une rentrée catastrophique en 2018, Emmanuel ministre iranien des affaires étrangères à Biarritz a
Macron a attaqué celle de 2019 en se plaçant au centre ravi les éditorialistes de BFM-TV qui, comme le
du jeu international. L’exercice du G7 de Biarritz a souligne Samuel Gontier sur son blog de Télérama,
été unanimement salué par la presse française, qui a ont unanimement salué ce « coup de théâtre », cette
présenté cette séquence comme un « succès ». Sur le « diplomatie créative », ce « gros coup » – la liste
fond des dossiers, pourtant, rien n’a changé. des qualificatifs est longue. Le chef de l’État, moqué à
À lire les titres de presse, le constat est sans appel : plusieurs reprises par Donald Trump, a également pris
Emmanuel Macron a réussi sa rentrée politique en se soin de se placer, trois jours durant, à côté de son hôte
plaçant au centre du jeu international. Entre la venue américain. Question d’image, là encore.
de Poutine au fort de Brégançon (Var), le 19 août, Le bras de fer engagé avec le président brésilien, sur
celle du premier ministre britannique, Boris Johnson, fond d’urgence écologique en Amazonie et d’échanges
quelques jours plus tard à l’Élysée, et la tenue du G7 guère diplomatiques sur Twitter, a aussi permis
à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) pendant trois jours, à Emmanuel Macron de verdir son blason. Son
le président de la République aurait, selon nombre de opposition« en l’état » à l’accord sur le Mercosur a
commentateurs, réalisé un sans-faute. même été applaudie par Nicolas Hulot, qui avait quitté
Il a rétabli « la capacité d’initiative française », le gouvernement avec fracas un an plus tôt. Ajoutez
écrivent certains. Il a gagné son « brevet d’homme à cela une interview accordée à Konbini pour répéter
d’État », estiment d’autres. Le principal intéressé – car ce n’est pas la première fois – qu’il avait opéré
ne cache d’ailleurs pas sa satisfaction : « On une mue écologique, et le tour est joué.
a formidablement réussi ce sommet, la France a Sur le fond pourtant, et derrière la mise en scène,
rayonné », s’est-il félicité, lundi 26 août, au 20 heures le bilan du G7 est bien plus maigre qu’il n’y paraît.
de France 2. Au-delà de l’image, le ministre de Le président de la République avait d’ailleurs tout
l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a même fait, là encore en termes de communication, pour
doucher d’entrée de jeu les éventuels espoirs. « Nous
ne réussirons sans doute pas sur tout et ne m’en
voulez pas si parfois nous n’y arrivons pas », avait-
il expliqué dans une allocution aux Français, juste
avant que ne démarre le sommet. De même avait-il
prévenu qu’aucun communiqué ne viendrait conclure
ce dernier, sous prétexte que « personne ne lit » ce
genre de document.

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Lorsque l’on ne promet rien, la moindre petite avancée Quant à la taxation du numérique, sujet qui ne
est un succès. Et c’est ce sur ce succès d’image concerne que la France et les États-Unis, mais sur
que l’exécutif entend insister pour attaquer cette lequel la communication gouvernementale ne cesse de
troisième rentrée du quinquennat, avant d’embrayer se gargariser pour montrer l’utilité du sommet biarrot,
sur l’épineux sujet de la réforme des retraites. Que il s’agit en réalité d’un vrai-faux succès.
retenir in fine des quelques lignes publiées par les Tandis que l’Amazonie brûle encore, les pays du
dirigeants du G7 pour « souligner leur grande unité G7 ont proposé une aide d’urgence de 20 millions de
et l’esprit positif de leurs débats » ? D’abord une dollars – 17,9 millions d’euros – pour envoyer dans
grande absente : la lutte contre les inégalités, pourtant la région des avions bombardiers et tenter d’enrayer
présentée comme l’un des thèmes principaux du les incendies qui détruisent la forêt. Aussitôt, Jair
sommet. Bolsonaro a opposé une fin de non-recevoir à cette
Sur l’Iran, les dirigeants du G7 ont écrit noir sur proposition, exigeant qu’Emmanuel Macron « retire
blanc partager deux objectifs – « faire en sorte que ses insultes proférées contre [sa] personne » avant
l’Iran ne puisse jamais se doter de l’arme nucléaire ; de discuter de quoi que ce soit. Peu de temps avant,
et favoriser la paix et la stabilité dans la région » – Donald Trump lui a apporté son soutien sur Twitter.
qu’ils partageaient déjà de longue date. Mais le nœud « J’ai appris à bien connaître le président
central, à savoir que les Européens sont incapables @jairbolsonaro dans nos relations avec le Brésil. Il
de contourner les sanctions américaines, n’a quant travaille très dur sur les incendies de l’Amazonie et, à
à lui pas été dénoué. Donald Trump s’est certes tous égards, il fait un excellent travail pour le peuple
dit prêt à rencontrer le président Rohani, mais ce brésilien – pas facile. Lui et son pays ont le plein et
dernier a immédiatement répondu qu’il attendait que entier soutien des États-Unis ! », a écrit le président
Washington fasse « le premier pas en levant les américain, écornant l’image d’unité autour d’un sujet
sanctions ». Retour à la case départ, donc. que son homologue français avait essayé de mettre
Sur ce sujet comme sur tous les autres, seul en avant. La presse étrangère, sans surprise moins
« l’avenir dira si ce G7 est un succès complet », prompte à crier « cocorico », ne s’y est d’ailleurs pas
a reconnu Emmanuel Macron, mardi 27 août, face trompée. « Les grands espoirs suscités par sa décision
aux ambassadrices et ambassadeurs réunis à l’Élysée. très médiatisée de placer ce sujet à l’ordre du jour sont
Concernant l’Ukraine, la Libye et Hong Kong, trois loin d’avoir été satisfaits », déplore ainsi le quotidien
des cinq points figurant sur la déclaration commune allemand Die Welt.
des dirigeants du G7, rien de nouveau n’a été acté. Le bilan du G7 sur les autres dossiers qui y ont
Idem sur la question du commerce, première entrée été évoqués n’a guère davantage convaincu. Estimant
du communiqué commun, sur laquelle les chefs d’État qu’Emmanuel Macron «s’affirmait de plus en plus en
et de gouvernement ont déroulé les évidences – sans tant que leader européen qui – tout en pouvant se
surprise, ils souhaitent « un commerce mondial ouvert tromper – s’efforçait d’utiliser le système multilatéral
et juste » et non pas fermé et injuste –, au moment pour apaiser les tensions et défendre l’ordre libéral »,
même où la Chine, elle, se prépare au pire. le magazine britannique The Economist s’interroge
Aucune nouveauté, non plus, sur l’engagement du toutefois : « Le président français en fait-il trop ?
G7 « à trouver un accord en 2020 pour simplifier Sa stratégie avec Donald Trump a déjà échoué par
les barrières réglementaires et moderniser la fiscalité le passé et son bilan en tant que médiateur est
internationale dans le cadre de l’OCDE ». Cette pour le moins modeste. » Quant au journal américain
décision avait été prise à Osaka, les 8 et 9 juin, à Washington Post, il note que « ce sommet entre le
l’occasion d’un G20 auquel participaient déjà tous
ceux qui étaient présents autour de la table à Biarritz.

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président Trump et les autres leaders s’achève sans


progrès significatif sur les problèmes mondiaux les
plus urgents ».

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