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Pr. Dr. Benyounes A.

Master Académique -Production et Technologie Laitières- Conduite de la Production Laitière

Chap. V. Le Contrôle Laitier

1. Importance et Buts

Le contrôle laitier consiste à mesurer l’évolution tant quantitative (quantité de lait


produite / jour de traite) que qualitative (taux de matières grasse et protéique, et autres
éléments de qualité tels que les matières minérales, le lactose…) et même sanitaire (taux
cellulaire par rapport aux mammites) de la production lactée au cours d’une lactation.
Quelle que soit l’espèce élevée, cette opération d’une importance capitale pour la
bonne conduite et la réussite de tout élevage laitier, a plusieurs buts, tant pour :

- L’éleveur, pour connaitre le niveau de production de ses laitières et faire la


différence entre les fortes et les faibles productrices, pour garder et faire multiplier les
premières et éliminer et faire remplacer les secondes signalées par les futures laitières issues
des femelles à haut niveau de production. En plus bien sûr d’un souci d’adaptation de la ration
et du régime alimentaire aux niveaux de production des femelles en lactation. Ainsi, l'intérêt
du contrôle laitier réside dans le fait qu'il permet à l’éleveur de disposer d'un outil de décision
efficace en matière de gestion du troupeau : sélection interne, performances de reproduction,
durée et persistance de la lactation, productivité des vaches laitières, affouragement...

- Le vétérinaire, pour identifier surtout les cas de mammites sous ses différentes
formes (clinique, sub-clinique, aigue ou chronique), ce qui l’aide à la prise de décision des cas
de réforme.

- Le généticien/sélectionneur, pour choisir les meilleures laitières et/ou tester les


meilleurs taureaux laitiers pour leur utilisation en inséminations naturelle, mais surtout
artificielle.

Le contrôle laitier est donc une opération qui doit être régulière et systématique,
réalisée selon des procédés standardisés, qui permet de réunir et produire des données
nécessaires à la bonne gestion des troupeaux laitiers, pour un souci d’améliorer leur
rentabilité.
Il permet la constitution et l'archivage des séries chronologiques de données
d'importance pour la conception et la conduite des politiques d'élevage tels que la sélection et
l’amélioration génétique, la productivité zootechnique, les coûts de production... Ce sont ces
indicateurs qui facilitent la prise de décision sur le plan zootechnique et économique.
Par conséquent, le contrôle laitier doit être soutenu par un système d'encadrement
technique et économique des producteurs, et de conseils techniques réguliers permanents et
personnalisés en direction des éleveurs.
Ainsi, par la régularité et l'objectivité des conseils prodigués, les agents chargés du
contrôle laitier peuvent tisser des relations utiles et particulières avec les éleveurs, ce qui leur
confère un fort potentiel d'analyse et de compréhension des projets mis en œuvre par ces
derniers.

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Origines

L’idée du contrôle laitier date de la fin du XIXe siècle, quand les éleveurs de Jersey et
les Danois ont commencé à s'intéresser à la production laitière de leurs animaux, ce qui a
rapidement aboutit à la création de «concours beurriers et laitiers».
En France, les premiers contrôles qui ont été rapidement suivis ensuite, ont eu lieu dès
le début du XXe siècle ; et leur réel essor a été observé à partir des années 1960.
Compte tenu de sa complexité et de son surcoût (mesure de la quantité et de la qualité
du lait), cette opération a été confiée à des syndicats, qui en plus de ce contrôle laitier,
apportent des conseils et vulgarisent des techniques sur la reproduction, l'alimentation des
animaux, et leur état sanitaire.
Actuellement dans les pays industrialisés, à tradition d'élevage, le contrôle laitier est
très développé et institutionnalisé, et pris en charge par les organismes professionnels, et
même par les éleveurs eux-mêmes dans certains pays.
En Algérie, le contrôle laitier qui n’a pratiquement aucune existence officielle, est une
opération très secondaire, et reste encore à l’état embryonnaire, compte tenu de l’ignorance
des éleveurs et de la faible implication de leurs organisations et institutions professionnelles.
Le seul réseau de contrôle laitier existant dans notre pays, est le CIZ (Centre
d’Informations Zootechniques) de l'ITELV (Institut Technique des Elevages, Baba Ali,
Alger). Ce dernier produit depuis 1988 des informations relatives à la productivité des
élevages bovins laitiers, qui ne touche malheureusement que 1 % de l’effectif bovin laitier
amélioré contre 60 et 10 %, respectivement en France et au Maroc.

2. Méthodes et Principes Pratiques


Plusieurs méthodes de calcul des lactations sont couramment employées dans
différents pays à travers le monde. A cet effet, nous allons exposer les méthodes utilisées en
Europe et aux Etats-Unis.

Les Méthodes Européennes

Les méthodes européennes de calcul des lactations ont été définies par l’Accord
Européen pour l’unification des méthodes de contrôle laitier-beurrier.
Trois méthodes ont été admises par le Comité Européen de Contrôle Laitier-Beurrier.

Méthode n°1. La production de lait (et de matière grasse) s’obtient en faisant la


somme des quantités de lait (ou de matière grasse) enregistrées au cours des différents
contrôles, en divisant cette somme par le nombre de contrôles effectués, et en multipliant le
quotient par le nombre de jours de lactation.

Méthode n° 2. On calcule séparément, pour chaque intervalle entre deux contrôles


successifs, la quantité de lait (ou de matière grasse produite), en multipliant le résultat de la
pesée du jour du contrôle par le nombre de jours de l’intervalle correspondant. Le jour de
l’épreuve étant considéré comme le jour moyen de cet intervalle. L’addition des résultats
partiels obtenus par cette méthode, donne le total du lait (ou de la matière grasse) produit
pendant toute la période de lactation. Cette méthode est équivalente à la «Centering Method»
utilisée aux U. S. A.

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Méthode n° 3. C’est la méthode Fleischmann utilisée généralement dans plusieurs


pays. Son principe consiste à considérer la durée de lactation, laquelle est déterminée par
rapport à son début : le lendemain du jour de vêlage ; et sa fin : 14 jours après le dernier
contrôle, comme le spécifient les accords européens sur le contrôle laitier (Rome, 1951).
Ainsi son calcul, consiste à déterminer séparément pour chaque intervalle la quantité de lait
produite, représentée par la moyenne des deux contrôles, multipliée par la longueur de
l’intervalle. A cet effet, sa formule sera alors la suivante :

X = N.C1 + C1+ C2 .i1 + C2 + C3 .i2 + Cn-1 + Cn .in-1 + Cn.in


2 2 2

Avec : i : est l’intervalle entre 2 contrôles.


N : est l’intervalle vêlage-premier contrôle.
n : est le nombre ou le numéro de contrôles.
Avantage
Cette formule intègre d’une façon idéale la courbe de lactation telle que nous pouvons
la représenter par l’échantillon des contrôles mensuels.

Inconvénients
Cette formule conduit à un calcul compliqué et long. Une personne bien entraînée
arrive à calculer en moyenne une quinzaine de lactations par journée de travail de 8 heures, si
elle n’a pas de machine à calculer à sa disposition. Elle ne peut pas se servir de règle à calcul
par suite de la précision ridicule exigée dans l’expression des performances, en particulier de
la production de matière grasse. Seules les machines mécanographiques rendent possible
l’adoption de cette méthode sur une vaste échelle.

Les Méthodes Américaines

La Méthode par Mois de Calendrier ou « Calendar Month Method » est utilisée pour
30 % des animaux contrôlés par le D. H. I. A. (Dairy Herd Improvement Association) et par le
H. I. R. (Herd Improvement Registry). C’est une méthode très simple, qui consiste à attribuer
la production enregistrée au cours du contrôle à tous les jours du mois de l’année, quelle que
soit la position du contrôle dans ce mois.

La Méthode de Date Centrée ou « Centered Date Method » est une méthode qui
adopte le même principe que la méthode n° 2 des accords européens. On choisit une date
arbitraire (i) ou « centered date » ou date centrée pour chaque élevage, date qui est à peu près
celle de passage du contrôleur sur l’exploitation. La production du contrôle est attribuée aux
15 jours qui suivent la « date centrée » et, suivant la longueur du mois, aux 13 à 16 jours qui
précèdent la date centrée » (cette dernière étant inclue). La « Centered Date Method » est
officielle pour l’organisation D.H. I. A. et utilisée dans 70 % des étables contrôlées.

Inconvénients
Lorsque les contrôles sont situés au début du mois, le calcul par mois de calendrier
surestime la production des vaches laitières. En parallèle, lorsque les contrôles sont situés à la
fin du mois, cette méthode sous-estime la production.

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Principes des Nouvelles Méthodes Essayées


Plusieurs et diverses méthodes ont été essayées pour tenter de trouver une méthode
répondant aux conditions suivantes : rapidité, efficacité, précision et coût faible.
En conséquence, il a été procédé selon plusieurs principes, tels que :
- reprise des anciennes méthodes utilisant la somme des contrôles et la moyenne des
contrôles ;
- essai également de considérer la courbe de lactation comme une droite et d’intégrer
ainsi, la lactation ;
- toutes les méthodes antérieures à la méthode Fleischmann donnent une importance
trop faible au premier contrôle. A cet effet, il a été essayé de corriger ce fait en affectant le
premier contrôle d’un facteur de pondération spécial.

Méthodes Analogues aux Anciennes Méthodes

Méthode (1). Somme des productions enregistrées au cours des différents contrôles multipliée
par 30 ; soit X = 30 ∑C

Méthode (2). Somme des productions enregistrées au cours des différents contrôles multipliée
par l’écart moyen entre contrôles ; soit X = i ∑C

Méthode (3). Moyenne des productions enregistrées au cours des différents contrôles,
multipliée par la durée de lactation ; soit X = ∑C . F
n

Méthode Considérant la Courbe de Lactation Comme une Droite

Méthode (4). Moyenne entre les productions enregistrées au cours du premier et du dernier
contrôle, multipliée par la durée de lactation ; soit X = C1 + Cn . F
2

Méthodes Analogues aux Anciennes Méthodes mais Pondérant le Premier Contrôle

Méthode (5). La somme des productions enregistrées au cours des différents contrôles, plus la
moitié de la production au premier contrôle, est divisée par le nombre de contrôles plus un
demi ; cette quantité est analogue à la moyenne. On la multiplie par la durée de lactation ; soit

∑C + C1
X= 2 .F
n + 1
2

Méthode (6). Somme des productions enregistrées au cours des différents contrôles plus la
moitié de la production au premier contrôle multipliée par 30 ; soit X = ( ∑C + C1 ) . 30
2

Méthode (7). Somme des productions enregistrées au cours des différents contrôles, plus la
moitié de la production au premier contrôle, multipliée par l’intervalle moyen entre les
contrôles ; soit X = ( ∑C + C1 ) . i
2

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Méthode (8). Si l’intervalle vêlage-premier contrôle est inférieur ou égal à 15 jours, on utilise
la méthode (3) et si cet intervalle est supérieur à 15, on utilise la méthode (5) :

X = ∑C . F si N ≤ 15 ∑C + C1 si N > 15
n X= 2 .F
n + 1
2

Conclusions
La meilleure méthode semble être la méthode (8) peu différente de la méthode
Fleischmann si on considère les différences relatives en valeur algébrique. La méthode (8)
utilise, rappelons nous, l’alternance entre les méthodes (3) et (5) suivant que l’intervalle
vêlage-premier contrôle est inférieur ou supérieur à 15 jours.
L’examen des différences relatives avec la méthode Fleischmann supérieures à 2 %
fait ressortir les remarques suivantes :
- certaines différences sont plus faibles pour la méthode (3) que pour la méthode (5) et
c’est pourtant cette dernière qui est choisie : le seuil des 15 jours est-il bon ?
- on pondère brutalement le premier contrôle à partir d’un certain seuil (par exemple
15 jours) alors que l’importance de ce premier contrôle est continue et augmente avec N
(intervalle vêlage-premier contrôle).

Définition des Méthodes Retenues


Les méthodes retenues prendront les appellations suivantes :
Méthode A pour celle appelée anciennement méthode (3).
Méthode B pour celle appelée anciennement méthode (5).
Méthode C est un choix entre A et B à partir d’un seuil à définir.

La Nouvelle Méthode dite Méthode D

Pour laquelle : X = F + 15 – N ∑C + (N – 15) C1


n

Précision de la méthode D

Par rapport à la méthode Fleischmann, la méthode dite D n’a jamais été trouvée
statistiquement différente à cette dernière, pour la production laitière, le taux butyreux et la
matière grasse.
Par rapport à la performance réelle en comparaison avec la méthode Fleischmann,
95 % des résultats sont connus avec une différence inférieure à 1,2 % par rapport à cette
dernière, ce qui nous paraît négligeable par rapport à la précision du contrôle mensuel pour
estimer une performance.
La dispersion des différences est la même pour les méthodes Fleischmann et D, ce qui
indique que les deux méthodes sont également précises pour estimer une production.
Ainsi, la cause essentielle des différences entre la méthode Fleischmann et la
méthode D est la variabilité des intervalles entre contrôles.

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Intérêt de la méthode dite D


Si les deux méthodes sont aussi précises, la méthode D présente les avantages
suivants:
- Calcul rapide de la performance : l’éleveur pourra connaître plus rapidement les
performances de ses animaux, car les contrôleurs laitiers pourront à nouveau effectuer leurs
calculs de lactation à la ferme.
- Économie pour les organisations de contrôle laitier : la simplicité de cette méthode
permet d’accélérer le calcul des lactations dans les installations mécanographiques,
d’augmenter la capacité de ces installations, donc de diminuer le prix de revient des
opérations comptables nécessaires pour le calcul des performances et l’établissement des
certificats de contrôle laitier-beurrier.

Ainsi donc, le contrôle laitier reste toujours cette opération qui est généralement
réalisée :
- sur des femelles individuelles, un groupe de femelles ou sur tout le troupeau laitier ;
- tous les mois ; soient 11 contrôles par an ;
- pour toutes les traites (une, deux, trois ou plus lorsqu’il s’agit d’un robot de
traite/exemple) effectuées pendant une journée ;
- pour une lactation de référence de 305 jours ;
- pour prélever des échantillons de mélange de lait de tous les quartiers de la
mamelle pour leur analyse qualitative (matières grasse et protéique, et autres éléments
nutritionnels) ;
- pour prélever des échantillons pour le comptage cellulaire (taux cellulaire) ;
- au moins 1 ; 5 ; 10 ou 14 à 15 jours après la mise bas pour le 1er contrôle d’une
lactation ; et qu’en fin de lactation, on considère qu’une vache est tarie 14 jours après son
dernier contrôle laitier ;
- les % de matières grasse et protéique sont calculés en divisant les quantités totales de
matières grasse et protéique sur la quantité totale de lait produite.

Par ailleurs, il y a lieu d’indiquer que :


- toutes les informations concernant la réalisation de l’opération du contrôle laitier
doivent être enregistrées sur un document (formulaire) de suivi de l’opération avec la
consignation de tous les résultats (quantité de lait produite par traite…) et les événements en
relation avec les femelles laitières (mise bas, tarissement, vente…) ;
- les résultats mensuels de l’unité de production sont présentés pour toutes les laitières,
par numéro et stade de lactation. Les résultats quantitatifs et qualitatifs des 10 mois de
contrôle précédents sont également consignés.
- les résultats mensuels du comptage cellulaire (taux cellulaire).

Dans tous les cas, quelle que soit la méthode utilisée, le contrôle laitier reste
toujours cette opération qui doit répondre aux qualités et conditions suivantes : rapide,
efficace, fiable et précise, facile à utiliser, non contraignante, et surtout non coûteuse.

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