Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
net/publication/343485416
CITATIONS READS
0 125
2 authors, including:
Yves Gauthier
none
175 PUBLICATIONS 3,142 CITATIONS
SEE PROFILE
Some of the authors of this publication are also working on these related projects:
All content following this page was uploaded by Yves Gauthier on 06 August 2020.
N° 21 — 2020
Les Cahiers de l’AARS
Les Cahiers de l’AARS N° 21
Impression : CopyMedia
CS 20 023, 33693 — Mérignac Cedex.
ISSN : 1627-2773
Photos de couverture :
Tad›ast, photo Jean-Loïc Le Quellec.
Niola Doa, photo Yves Gauthier.
Directeur de la publication :
Jean-Loïc Le Quellec
Conseil scientifique :
Paul Bahn, Hull (Grande-Bretagne)
François-Xavier Fauvelle (Paris)
Bertrand Hirsch, CEMAf, Paris (France)
Tilmann Lensen-Erz, Barth Institut, Köln (Allemagne)
Karim Sadr, GAES, University of the Witswatersrand, Johannesburg (Afrique du Sud)
Jean-Louis Bernezat
Abris peints inédits de l’Ăhélakan occidental (Parc National Culturel du Tassili, Algérie) …………………… 7
Julien d’Huy
Phylogénie tombale : À propos des rituels d’incubation dans le Sahara néolithique ……………………………… 129
Première mythologie du serpent et art rupestre saharien …………………………………………………………… 135
Jean-Loïc Le Quellec
Fezzāniana 1 : Gravures et peintures de Gaṣr el-Meherig …………………………………………………………… 145
Marie Maka
La conservation dans la Tasīli-n-Ăjjer ? …………………………………………………………………………… 221
Estelle Yven
Oummat el-Ham Bi’r (Nord-Ouest de la Mauritanie) : Une saison de chasse ? ……………………………… 267
Résumé : Nous poursuivons l’inventaire des chars saha- Abstract : We are continuing the inventory of the Saha-
riens en présentant des travaux de terrain. En parallèle, ran chariots with field work. At the same time, we are
nous jetons un regard critique sur des chars aberrants taking a critical look at weird and fanciful ones, most
publiés, pour la plupart, sous forme de relevé unique- of which are published only in the form of a survey.
ment. Nous proposons d’en éliminer une centaine, no- We propose to eliminate about a hundred of them, es-
tamment pour les sites d’Aouineght et d’el-Ghallaouyia. pecially for the sites of Aouineght and el-Ghallaouyia.
Nous en présentons soixante-cinq nouveaux provenant We present sixty-five new ones from the countries bor-
des pays riverains de l’Atlantique et du Sahara central. dering the Atlantic and from Central Sahara. Thanks
Grâce à ces documents, nous mettons en évidence des to these documents, we are highlighting new methods
modes d’attelage inédits témoignant d’une créativité of harnessing vehicles, showing unsuspected creativity,
insoupçonnée, et nous publions les premières images and we are publishing the first images showing single
montrant des femmes seules menant des chars. women driving chariots.
Fig. 1. Carte de
chaleur (densité) des
sites rupestres, tous
thèmes et époques
confondus et sites
à chars (points
500 km noirs). Image
Google Earth.
*yves.gauthier8@wanadoo.fr
la région considérée. Si l’on persistait dans l’idée semble du Sahara. À cette époque, l’exploration et
qu’il aurait existé une route des chars, celle-ci serait la recherche scientifique au Sahara étaient encore
pareillement celles des girafes, des chameaux, des balbutiantes… et la plupart des découvertes étaient
tifinagh, des bovinés et de divers autres motifs que faites à proximité des grands axes. Une carte éta-
l’on retrouve plus ou moins dans tous les secteurs blie avec ces quelques dizaines de chars reprodui-
rupestres. sait ainsi les itinéraires suivis par les découvreurs,
Dans un autre chapitre de son livre, s’appuyant donnant l’impression d’une route balisée. Comme le
sur l’abondante documentation dont il dispose, montre la Fig. 1, avec plus de 1450 chars répartis sur
Lhote met à mal les travaux de Jean Spruytte. Celui- 444 stations, le scénario n’est plus du tout le même.
ci, qui a pu étudier de près les chars peints de la On pourrait multiplier les exemples (en pui-
région de Tamajert où il était en poste, semble avoir sant pour partie dans nos propres publications)
mal interprété les peintures qui lui ont servi de base sans changer le diagnostic : la vérité scientifique
pour ses reconstitutions et ses essais de différents s’accommode rarement d’une base de données tron-
types d’attelage. quée.
« Quant au mode d’attelage, les timons bien Après déjà trois articles sur le sujet (Gauthier &
visibles arrivent toujours [souligné par nous] der- Gauthier 2011, 2015, 2019), nous revenons encore
rière la tête et, confirmant cette position, en parti- sur la matière. Ce qui, avec une analyse superfi-
culier à Tamajert, les extrémités courbes des jougs cielle, pourrait passer pour de l’acharnement n’est
dépassent de part et d’autre de la tête des bêtes. en fait que la poursuite d’un objectif très clair : éta-
D’après ces figures, il s’agissait indiscutablement blir une base photographique solide et aussi com-
d’un joug d’encolure […] Pourquoi, devant des plète que possible de données relatives aux chars,
détails aussi nets, J. Spruytte a-t-il nié l’existence pour réduire au mieux les erreurs ou déductions
d’un véritable joug et a-t-il proposé une barre de trop hâtives s’appuyant sur une documentation
traction s’appuyant sur le poitrail… ? » (Lhote 1982 : insuffisante.
71-72).
Établir un tel inventaire passe bien entendu par
Lhote a raison pour ce qui concerne certaines des recherches de terrain sur les zones pas ou peu
peintures de Tamajert ou d’autres sites du Sahara exploitées jusque-là, par des visites sur des sites
central : on y voit des timons qui, manifestement, déjà bien connus — tout n’y a pas été vu et/ou pho-
aboutissent à l’encolure des tractionneurs. Par tographié — ou encore par une plongée dans les
contre, la généralisation qu’il opère est certainement documentations photographiques accumulées par
indue. À Ano Mellen par exemple (Fig. 2), la barre divers voyageurs sahariens et contenant des iné-
d’attelage est clairement sous les museaux, en avant
dits. Une part tout aussi importante, voire même
du poitrail, et le timon est caché par le corps des
cruciale, consiste en une analyse critique des don-
chevaux sans reparaître au niveau de l’encolure : il
nées publiées il y a plus de cinquante ans et dont
s’agit indiscutablement d’un attelage sous-jugulaire,
beaucoup ne fournissent aucune photo, l’essentiel
conforme à ce que Spruytte proposait.
des illustrations se résumant à des relevés quand ce
Si Lhote avait disposé de ce document (décou- n’est pas à de simples croquis faits à main levée et
vert bien après la parution de son livre), il n’aurait d’une fiabilité plus que douteuse.
certainement pas contredit les conclusions de
Dès lors que l’on s’intéresse aux chars, à leur
Spruytte. Soulignons qu’à propos de queues cou-
technologie, à leur origine, à leur position chrono-
pées et reprenant les propos de Camps, Lhote pointe
lui-même le doigt sur l’insuffisance de la docu- logique et à d’éventuelles diffusions ou influences
mentation de Spruytte pour conclure valablement extérieures, il est inévitable de se pencher sur le
(Lhote 1982 :68). contenu des publications relatives aux stations qui
en comportent le plus et de s’interroger sur leur
De même, en 1950, soit juste avant la sortie
pertinence. Le site à gravures d’Aouineght (Mau-
de l’article de Monod et Cauneille et du premier
ritanie) joue un rôle majeur dans les domaines de
inventaire des chars (1951), les chercheurs connais-
l’art rupestre saharien et plus spécialement de la
saient au plus une cinquantaine de chars pour l’en-
charrerie car il est, après Taouz (Maroc) et l’oued
La’ar (Algérie) le troisième par ordre d’importance
quantitative (Gauthier & Gauthier 2011). Selon les
auteurs des deux seuls articles portant sur ce banc
Fig. 2. Ano Mellen.
Les timons cachés
rocheux, il comporte(rait) 105 chars gravés (Monod
par le corps des & Cauneille 1951) et 377 autres gravures (Lhote
chevaux et la barre 1957). À l’époque de sa publication, Aouineght
d’attelage mani- était, de loin, le site sur lequel on avait relevé le plus
festement sous- de chars : cela représente environ le double de ce qui
jugulaire excluent était alors connu pour tout le Sahara. Ce bond quan-
totalement une
fixation sur l’enco-
titatif est certainement ce qui a motivé Théodore
lure. Photo T. B. Monod à établir ce qui est alors le premier inven-
taire des chars sahariens.
68
Compléments à l’inventaire des chars
Les données relatives à Aouineght sont cepen- une badine en main. Nous avons évoqué à ce propos
dant entachées de ce défaut majeur et classique pour la représentation possible de scènes de débourrage
les années 1950-1980 et signalé plus haut : l’inté- et d’entraînement en vue de l’attelage (Gauthier &
gralité des gravures y est présentée sous forme de Gauthier 2019). D’autres documents viennent affi-
schémas. Il est quasi certain que Monod et Lhote ner notre interprétation et contribuent d’une part à
n’ont jamais visité ces rochers et qu’ils ont rédigé préciser l’aire de distribution de ce thème, et d’autre
leurs contributions avec les seules notes et croquis part à affiner son calage culturel et chronologique.
fournis par Cauneille 1. 1. « Nous devons au
Nous terminerons par des commentaires géné-
capitaine Cau-
Dans deux contributions précédentes (Gau- raux sur l’état actuel de l’inventaire et sur les actions neille un important
thier & Gauthier 2011 et 2019), nous avons expli- à entreprendre, notamment en matière de révision matériel rupestre,
qué notre perplexité à la vue de certains de ces d’autres données anciennes. qu’il releva près des
croquis et devant le fait que l’on puisse considérer Des cartes de localisation sont proposées en “ oglats ” d’Aoui-
comme chars des motifs sans rapport aucun avec neght, dans lequel
annexe.
figurent, en particu-
un véhicule à traction animale : ils ont été retenus,
Chars et autres gravures d’Aouineght lier, 105 schémas de
par Cauneille, le découvreur et dessinateur, puis par chars. Ces derniers
Monod et Lhote. D’autres après eux (Vernet 1993 ; En novembre 2016, des conditions météo très nous sont connus
Vernet & Ould Mohamed Naffé 2003), ont visible- mauvaises et un terrain détrempé, avec sables par une publication
ment oublié eux aussi tout sens critique en repro- mouvants et zones inondées à l’approche, ne nous du Pr. Monod, qui
duisant sans discussion le bilan chiffré et tout ou avaient pas laissé le loisir d’explorer correctement avait fait part de
partie de ces dessins, dont certains sont délirants. le banc d’Aouineght. Néanmoins, nous avions rapi- cette étonnante
dement réalisé que les gravures étaient bien moins découverte au
C’est la raison pour laquelle nous sommes allés sur Congrès panafricain
place à deux reprises pour a/ prendre la mesure du nombreuses que dans les planches de Cauneille. de préhistoire de
problème, b/ faire une couverture photographique À ce stade, il importe de rappeler que ces Nairobi, en janvier
du site et finalement c/ comparer notre inventaire à planches contiennent des animaux et chars informes 1947. Le reste s’est
ceux de Monod et Lhote. et à tout le moins surprenants, suggérant une mani- trouvé inédit par
festation de paréidolie qui aurait frappé le dessina- suite des difficultés
Avec soixante-quatre chars (Vernet 1996), le site de publication inhé-
d’el-Ghallaouyia, dans l’Adrar mauritanien, vient en teur, en l’occurrence le capitaine Cauneille. rentes à l’époque
quatrième position par le nombre d’éléments annon- Par ailleurs, alors que nous avons observé quatre d’après guerre. »
cés, soit juste après le site d’Aouineght. Il était donc chars inédits, nous avons été incapables de retrouver (Lhote, 1957).
assez naturel de s’y intéresser et de lui consacrer
une visite d’autant plus nécessaire que ces chars, à
quelques rares exceptions près, n’étaient publiés que
sous forme de relevés. Comme à Aouineght, mais à
un bien moindre degré cependant, nous avons mis
en évidence des écarts notables entre les dessins et
la réalité. Par ailleurs un balayage, incomplet, du
site nous a permis de relever quelques manques.
La première partie du présent travail est une
synthèse des observations relatives aux chars faites
récemment sur ces deux sites et sur celui de Rkeiz.
Nous expliquons notamment pourquoi nous éva-
cuons de la liste la quasi-totalité des chars recen- oglats
sés par Cauneille à Aouineght et certains autres du
canyon d’el-Ghallaouyia publiés par Vernet.
Grâce à l’aide de nombreux voyageurs sahariens
(la plupart membre de l’AARS), nous avons pu élar-
gir notre base de photos et compléter nos informa-
tions sur les chars et sur leur localisation. Ces don-
nées nouvelles ont permis de contrôler une bonne
partie de l’inventaire des chars établi par Lhote
(1982) qui n’est pas exempt d’erreurs ni d’omissions. Fig. 3. Aouineght.
Le banc rocheux et
Outre une trentaine d’autres exemplaires inédits, la zone à gravures
nous en avons aussi extrait des photos de chars indiquée par
connus uniquement sous forme de relevés ou signa- Monod & Cauneille
lés aux détours d’une publication sans jamais avoir (1951). Les oglāt se
été illustrés. C’est ce que nous développons dans la trouvent à l’inter-
Oummat el Lham
deuxième partie de cet article. section du relief et
de l’oued Aoui-
Dans une troisième partie nous revenons sur neght (25°42’18"N,
un groupe de figurations montrant des bovinés au 2 km 17°44’11"O). Source
galop, tenus en longe par des personnages en course, de l'image : Bing.
69
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 5. Le banc
rocheux et une mare
résiduelle (oglat)
à son intersection
avec l’oued Aoui-
neght, en décembre
2018. Vue en direc-
tion du SSE avec,
à gauche, le massif
d’Oummat el-Lham.
Fig. 6. Le même
banc rocheux et la
cluse ennoyée en
novembre 2016.
70
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 8. Emplace-
ment des gravures
sur le banc d’Aoui-
neght. Chars (bleu),
autres (rouge), sujets
identifiés dans les
publications de
Monod & Cauneille
1951 et Lhote 1957
(vert). Limites de
1 km nos prospections :
lignes blanches.
moyenne résolution
de Google Earth©.
Toutes les gravures
ineght
identifiées (vert)
200 m sont regroupées
autour de la cluse.
(Fig. 4-6). Nous avons pu vérifier qu’il n’y a pas nous a laissé qu’un temps limité pour les prospec-
de gravures sur le passage de l’oued (sous l’eau en tions et nous n’avons pu couvrir l’intégralité de la
2016), ou bien elles ont disparu du fait de l’érosion. zone marquée par Cauneille,
Anticipant sur une possible et légitime question, En 2016, le quadrillage du site a été effectué par
nous pouvons affirmer que nous nous trouvions au quatre personnes pour une partie et par des équipes
bon endroit, sur le site visité par Cauneille : d’une de deux pour une autre. Du fait des conditions
part, nous avons pu identifier des motifs inclus dans météo et pour des raisons de sécurité, la recherche
les planches publiées (voir plus loin) et d’autre part, a été restreinte aux secteurs les plus proches des
nous étions bien à proximité du cimetière islamique oglāt. En 2018, nous avons exploré un total de cinq
indiqué sur le croquis de localisation de Cauneille. kilomètres, dont les zones déjà prospectées en 2016
Notre inventaire s’appuie sur un peu plus de (Fig. 8-9).
trois cents clichés de 24 mégapixels. Ils ont pour Dans la partie centrale (Fig. 9), nous nous
l’essentiel été géolocalisés à quatre ou cinq mètres sommes retrouvés à six personnes, chacun des
près, avec deux ou trois GPS indépendants (un deux kilomètres le plus au sud étant couverts par au
sur appareil photo et un ou deux portables). Pour moins trois personnes. Comme en 2016, nous avons
quelques-uns, les coordonnées sont interpolées et balayé le relief avec un trajet en zigzag, et des allers-
sont situées à dix ou vingt mètres près. Cette préci- retours. Sur les 500 à 600 m au nord des oglāt, le
sion est bien suffisante à l’échelle des cartes et pour balayage a été effectué par six à huit personnes
les discussions ci-dessous. selon les endroits. Une incursion rapide un peu au-
Précisons encore que les images Google Earth© delà n’a pas mis de gravures en évidence.
sur ce secteur sont en moyenne résolution : elles Le bilan global de ces deux séjours est présenté
souffrent d’un décalage pouvant atteindre trente plus loin, et ce qu’il faut retenir, c’est que nous
mètres : c’est la raison pour laquelle nos points sont avons inventorié une fraction très importante de
légèrement en dehors du banc rocheux (Fig. 8-9). ce qui existe. À plusieurs, sur un banc rocheux de
vingt-cinq à quarante mètres de large, la probabilité
Zone couverte par les recherches de manquer des gravures est assez faible. Cela ne
et fiabilité des inventaires signifie pas que nous avons tout vu : comme expli-
Selon Monod & Cauneille, il y aurait des gra- qué supra, les gravures sont difficiles à détecter et,
vures sur l’intégralité du banc rocheux (1951 : 182 indépendamment des phénomènes d’inondation qui
et Fig. 3). Avec le coude à son extrémité sud, celui- intéressent surtout le voisinage des oglāt, certaines
ci s’étire sur environ dix kilomètres. Le cadre de dalles, notamment en limite ouest, sont ensablées
recherche — accompagnement d’un groupe — ne de manière aléatoire.
71
Yves Gauthier & Christine Gauthier
1
98 2 3
6
7
5
9
10 55 11
14
77
12
13
16 83
Fig. 10. Relevés des
chars d’Aouineght. 15
Échelle commune
sauf n°2. Les numé-
ros en rouge sont
ceux déjà publiés
(Gauthier 2019).
Les sept croquis
de Cauneille sont 10
identifiés par leur 47
numéro originel 18 19 21
(en vert) à côté de
nos propres relevés.
Voir les photos
sur Fig. 12 à 27. 8
17
20 56
23 22
24
Cependant, plus de trois kilomètres et demi ont de panneaux est approximativement constante et
été l’objet d’une double et, pour certains secteurs, faible sur les deux tiers sud du parcours. C’est seule-
d’une triple visite, dans des conditions d’éclairage ment de part et d’autre et à proximité des oglāt que
différentes : cela atténue sérieusement la force de cette densité devient notable (Fig. 9). Nous tenons à
cette dernière remarque et les conclusions géné- souligner que les rares gravures identifiées sur les
rales restent valides. En résumé, les données col- dessins de Cauneille sont toutes localisées sur une
25 lectées devraient refléter assez bien la réalité pour zone encore plus restreinte, d’un kilomètre de long
les parties visitées.
Fig. 11. Relevés sur environ (en vert sur les Fig. 8 et 9). Puisque nous
photo de trois autres Localisation des gravures n’avons procédé à aucun tri préalable, cela laisse
chars. Voir texte. Nous avons relevé des gravures partout sauf aux entendre que tous les sujets (105 chars et 377 autres
deux extrémités (Fig. 8). On constate que la densité gravures) relevés par Cauneille viennent essentielle-
72
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 18. Char
n° 7, tiré par un
quadrupède.
Fig. 19. Chars n° 8
et 17. Les cupules
naturelles entre
les timons ont été
intégrées au dessin
par Cauneille (voir
Fig. 10 n°10).
73
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 26. Char
n° 19 à double
timons fermés.
Photo J. Audoin.
Fig. 27. Char n° 20.
Les trois animaux
tirant ce char ont
été interprétés
comme des timons
par Cauneille
(voir Fig. 10, n° 56.
Photo J. Audoin.
Fig. 28. Bovidé.
Photo J. Audoin.
Fig. 29. Bovidé.
Photo J. Audoin.
Fig. 30. Félin ?
Photo J. Audoin.
Fig. 31. Mouflon ?
Photo J. Audoin.
74
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 32. Boviné.
Photo J. Audoin.
Fig. 33. Bovidé.
Photo J. Audoin.
Fig. 34. Boviné.
Photo J. Audoin.
Fig. 35. Boviné
à robe compar-
timentée.
Fig. 36. Boviné.
Fig. 37. Autruche
en course, tête
vers l’arrière.
Fig. 38. Autruche
penchée en avant.
Fig. 39. Personnage
et motifs ovaloïdes.
75
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 40. Qua-
drupède et deux
autruches ?
Fig. 41. Girafe
et quadrupède.
Photo J. Audoin.
Fig. 42. Éléphant.
Fig. 43. Bovidé.
Fig. 44. Qua-
drupède.
Fig. 45. Girafe.
Fig. 46. Boviné (?).
Fig. 47. Trois
cercles centrés et
deux quadrupèdes
pectiniformes.
Fig. 48. Le relevé
correspondant du
supposé « char
n° 84 » de Cau-
neille. Noter l’ajout
de deux cercles
et une disposi-
tion différente.
76
Compléments à l’inventaire des chars
ment (exclusivement ?) de cette zone centrale, et que de Cauneille (voir encarts sur les Fig. 29 à 54), les
la zone indiquée dans la publication de 1951 (voir 157 autres ne figurant pas dans ces deux publica-
Fig. 1) est probablement une simple extrapolation. tions. Soit les dessins à main levée sont trop som-
Ainsi s’expliquerait l’incompréhensible absence, maires et peu fidèles et nous n’avons pas reconnu les
dans ces publications, de gravures impossibles à sujets, soit ces 157 gravures sont inédites.
rater et situées en dehors de cette zone restreinte. Dans la première hypothèse (gravures pré-
Notons encore que la plupart des vrais chars sentes dans les publications mais pas identifiées), il
répertoriés dans ce travail sont regroupés dans cette manquerait (460-175=) 285 gravures. Dans la deu-
même zone, vers les oglāt. Sans surprise, c’est le cas xième, ce sont (460-18=) 442 gravures qui seraient
aussi des monuments qui sont concentrés dans les absentes, soit la quasi-totalité. Tout aussi perturbant
quatre cent premiers mètres de part et d’autre des est le fait que, parmi les 175 que nous avons réper-
points d’eau. toriées, des dizaines de gravures bien visibles et au
sujet parfaitement identifiable n’apparaissent pas
Inventaire des gravures
dans les croquis de Cauneille.
Nous avons insisté à dessein sur la qualité des Un constat similaire est de mise pour les chars.
gravures, sur la nature du support et sur les effets de Monod & Cauneille en annoncent 105 alors que
l’érosion particulière des dalles de cipolin. Si beau- nous n’en avons relevé que 22, répartis sur 18 pan-
coup de gravures sont parfaitement intelligibles, neaux (Fig. 10-27). À ceux-ci, il faut en ajouter trois
en dépit du tracé parfois approximatif et grossier autres, photographiés par Jean Sougy (in Vernet
des sujets, il reste une quantité non négligeable de 2014), qui nous ont échappé ou se trouvent dans
traits et d’impacts, d’origine manifestement anthro- une zone que nous n’avons pas explorée (Fig. 11).
pique, dont nous ne savons que faire. Mal définis, Sur ces 25 chars, nous en avons identifié 7 seule-
en apparence incohérents et mélangés avec ces ment dans les dessins de Cauneille. Soit il manque
innombrables traces d’érosion, il est bien délicat 80 chars (si les 25 photographiés sont présents dans
de leur attribuer un sens (ce qui ne veut pas dire les planches mais n’ont pas été reconnus) soit il en
qu’ils n’en ont pas), la patine, généralement totale, manque 98 dans l’hypothèse où 18 de ces 25 chars
ne contribuant pas à une amélioration de la lecture. sont inédits.
Il nous est très vite apparu que cette confusion entre Il y a donc une différence abyssale entre ce que
marques d’érosion et traits anthropiques pouvait nous avons pu observer et ce qui apparaît dans les
être à l’origine de nombre des croquis de Cauneille croquis de Cauneille. N’étaient ces quelques motifs
qui a crû y reconnaître les animaux difformes, identifiés dans les planches, on pourrait croire que
les chars bizarres et les autres motifs étranges qui nous parlons d’un site qui n’a rien à voir avec Aoui-
figurent dans les deux publications. neght. Pourtant, comme expliqué auparavant, le
Notre inventaire se limite donc aux motifs d’ori- contexte ne laisse place à aucune ambiguïté.
gine manifestement anthropique et intelligibles Diverses possibilités s’offrent alors pour rendre
pour les divers observateurs présents. compte de ce désaccord et de ces absences qui sont
Des figures indéterminées et d’interprétation tout sauf anodines :
hautement discutable n’apportent rien au débat, quel 1/ les 366 (voire 540) gravures manquantes sont
que soit le thème (voir Le Quellec & Mouchet 2020 toutes dans les zones que nous n’avons pas visitées ;
dans ce volume), et leur seul impact est quantita- 2/ certaines se cachent dans les quelques
tif : cela gonfle artificiellement les inventaires, au dizaines de panneaux couverts de traits et pique-
même titre que des cercles isolés, rayonnés ou non, tages incompréhensibles ;
et considérés comme roues (de secours ?) viennent
3/ nous avons raté l’essentiel des gravures ;
augmenter artificiellement et inutilement le nombre
de chars (Gauthier & Gauthier 2019 et voir aussi 4/ une majorité de ces gravures résulte d’une
notre réponse aux commentaires de Dupuy dans ce interprétation trop poussée des aspérités et traits
même volume). naturels des dalles.
Une combinaison de ces quatre hypothèses est
Comparaison avec les données également possible.
de la littérature et paréidolie
La première possibilité est cependant la moins
Quantitativement, notre inventaire est bien probable compte tenu de la localisation de tous les
moins important que ceux de Monod-Cauneille sujets reconnus dans les dessins de Cauneille, juste
pour les chars, et de Lhote pour les autres thèmes. autour de la cluse (Fig. 8-9). La deuxième explique-
Si l’on prend en compte une double numérota- rait l’absence d’une petite partie seulement des gra-
tion pour une planche complète de dessins et l’oubli vures et pas celle, dans les planches de Cauneille,
de quelques autres, le nombre total de gravures de gravures importantes et parfaitement visibles
autres que des chars s’élève en réalité à 460 dans la reconnues dans le même secteur.
publication de Lhote (1967). Trois faits décisifs permettent d’écarter la
Pour notre part, nous en avons répertorié seule- troisième hypothèse ou ne lui laissent qu’une très
ment 175, réparties sur 108 panneaux. Parmi celles- faible probabilité : a/ à plus de deux kilomètres des
ci, 18 seulement sont identifiables dans les dessins oglāt la densité de gravures devient très faible ;
77
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 49. Boviné
à robe compar-
timentée.
Fig. 50. Bovidé.
Fig. 51. Antilope
à long cou.
Fig. 52. Motif
énigmatique.
Fig. 53. Éléphant ?
Fig. 54. Bovidé,
motif en forme
d’haltère et autres
traits et piquetage.
Fig. 55. Personnage
à tunique évasée
avec un objet ovale
attaché à la ceinture.
78
Le site d’Aouineght revisité
b/ les zones restées inexplorées sont précisément exemples de relevés indiquant un nombre erroné de
les plus éloignées des oglāt. La probabilité d’y timons. Ces erreurs ne sont pas anodines car elles
trouver des centaines de gravures est très faible. peuvent entraîner des chercheurs sur de fausses
c/ toutes les gravures que nous avons identifiées pistes (Gauthier & Gauthier 2019 : 42).
dans les croquis de Cauneille sont regroupées vers Pour la plupart (20), les chars sont dételés.
les oglāt. Quatre chars à timon unique sont tractés par deux
Doublée d’un manque de vigilance de la part de animaux ou un seul. Dans ce dernier cas, la posi-
Monod et Lhote quant à la pertinence des dessins, tion asymétrique de l’animal laisse penser qu’il
la quatrième hypothèse, une paréidolie de la part de s’agit probablement d’un bige là aussi. Les dessins
Cauneille, est la plus plausible, en association avec sont trop petits et trop sommaires pour déduire l’es-
une collection des données sur quelques centaines pèce des tractionneurs. Un seul char à deux timons
de mètres seulement de part et d’autre des oglāt. (n° 20) est attelé en trige, comme expliqué ci-dessus.
Notre conclusion est renforcée par les observa- Des plateformes rectangulaires, placées elles
tions d’un autre groupe de dix visiteurs qui, notre aussi en avant de l’essieu, sont figurées pour deux
article de 2019 en main, ont visité le site en février des chars à double timon.
2020. Leur guide, un habitant de Bir Moghreïn qui Comme il est fréquent pour les chars gravés, les
connaît bien la région et ce banc rocheux d’Aoui- roues sont généralement sans rayons et seuls trois
neght, se demandait même ce qu’ils venaient faire d’entre elles en comportent.
là où il n’y a (quasiment) rien à voir. L’un d’entre Tous les éléments de construction figurés sur ce
eux nous a expliqué être arrivé exactement au même site reprennent des schémas connus et recensés sur
constat (« enfumage de la part de Cauneille ») mais de nombreux sites sahariens.
cet avis n’est pas partagé par tous ces visiteurs (voir
Au plan technique, il y a une grande homo-
Annexe).
généité : tous les chars sont piquetés avec cepen-
À ce stade, sans chercher à être exhaustif, il dant quelques traits partiellement polis. Les dalles
nous paraît nécessaire de donner une meilleure idée sont toutes faites du même matériau et ont toutes
du contenu de ce site, afin de corriger les erreurs et la même orientation . En première approximation,
de lui accorder la place qu’il mérite dans le contexte la variabilité des patines peut donc être utilisée
saharien. comme un indice chronologique relatif à l’échelle
Les gravures de chars du site. Elles s’échelonnent de 3 à 5 sur une échelle
Comme spécifié plus haut, nous avons catalogué de 5 (patine totale), et reproduisent grosso modo
vingt-cinq chars dont les relevés sont regroupés sur celles des animaux voisins, bovinés compris. Une
les Fig. 10 et 11. Des photos (Fig. 12-27) sont aussi fois rectifié, cet inventaire des chars rétrograde
proposées pour ceux qui n’ont pas été déjà illustrés Aouineght au cinquième rang par ordre quantitatif
dans notre article précédent ou dans celui de Vernet derrière Taouz, l’oued La’ar, el-Ghallaouyia et Bou-
(2014). Quitte à être répétitifs, nous rappelons qu’un lakouas (voir tableau in Gauthier & Gauthier 2011).
relevé n’est qu’une aide à la lecture, les photos étant Les autres gravures d’Aouineght
plus proches de la réalité. Comme pour les chars, les autres gravures
Un classement sommaire peut être opéré en (Fig. 28-56) exhibent des patines totales ou très
fonction du nombre de timons. Dix-huit chars prononcées ; il y a très peu de sujets à patine claire.
(n° 1-16 et 23-24) sont équipés d’un simple timon. La technique très majoritaire est le piquetage. Une
Onze d’entre eux sont munis d’une barre d’attelage partie des sujets est à surface endopérigraphique
rectiligne ou d’un joug à double courbure. Semi-cir- bouchardée (ex. : Fig. 39, 53). Nous présentons une
culaires ou quadrangulaires, les plateformes, larges sélection seulement de ces 175 gravures, prises
comme la moitié de l’essieu, sont toutes placées en parmi les plus lisibles. Quelques autres sont pro-
avant de celui-ci. posées dans notre précédent travail (Gauthier &
Les sept autres chars (n° 17-22, 25) possèdent Gauthier 2019). Lorsqu’un croquis de Cauneille a
deux timons avec une barre d’attelage à leur extré- pu être identifié, nous l’avons rajouté sur la photo
mité ou légèrement décalée vers l’essieu. Aucun des correspondante. Nous n’avons pas effectué de
chars n’a plus de deux timons. décompte précis, mais les quadrupèdes sont très
Comme on peut le vérifier sur photo, le trige majoritaires : antilopes, bovidés, bovinés dont cer-
n° 20 n’a que deux timons et pas cinq comme mon- tains sont compartimentés, éléphants (un certain et
tré sur le dessin de Cauneille (Fig. 10 et 27). Ce der- un autre probable), des girafes et un possible félin
nier a pris les trois animaux de trait, figurés par de (Fig. 30). Les anthropomorphes sont très rares (deux
petits segments perpendiculaires à la barre d’atte- seulement). Outre des motifs énigmatiques, et des
lage, pour des timons supplémentaires. Une telle cercles concentriques, on relève encore des cercles,
erreur est fortement préjudiciable à l’analyse des centrés ou non, dont une partie a été « transformée »
parties techniques et du mode d’attelage (bige, trige, en chars par Cauneille (Fig. 47-48).
quadrige), induit des distorsions dans le classement Puisque, avec d’autres sujets, ils ont été repris
typologique et modifie les statistiques ainsi que les dans la littérature (Vernet 1993 : 136 ; Vernet et al.
cartes de distribution. Nous avons produit d’autres 2003 : 34) et pour éviter une contamination plus
79
Yves Gauthier & Christine Gauthier
récusés
douteux
80
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 58. El-Ghal-
laouyia. Les chars
du panneau 170 de
Vernet dont un à
deux timons fermés
(en bas à droite). À
gauche et en haut,
notre photo et notre
relevé montrant
deux chars à timon
unique, plate-
forme en avant de
l’essieu et arceaux/
boucles en arrière
de celui-ci. Des
traits parasites ont
Vernet 1996 :131 été incorporés au
dessin de Vernet.
générale, il importe de souligner que nous n’avons sons que celles exposées pour Aouineght, il nous
pas retrouvé les « cinq bœufs porteurs harnachés » a paru bon de nous rendre compte de la réalité.
identifiés par Lhote (1957:621) : ils font très proba- Sur les soixante et un chars réellement dénombrés,
blement partie des gravures « inventées » par Cau- cinq seulement ont été illustrés avec des photos, les
neille. Alors que Lhote a été capable d’identifier des autres n’étant figurés que sous forme de relevés.
chevaux (1957 : n°621 et 624) — on se demande bien La visite n’a pas été inutile puisque, parmi les
comment compte tenu de la précision anatomique dessins proposés, nous avons constaté, là aussi,
des tracés de Cauneille et sans parler de leur carac- quelques défauts notables méritant d’être signalés.
tère paréidolique — nous sommes bien en peine de Par ailleurs, nous pensons avoir trouvé d’autres
trouver le moindre équidé dans les quadrupèdes chars inédits.
représentés. En d’autres termes, comme sur d’autres Pour simplifier la discussion et la comparaison
sites de la façade atlantique, les chars se fondent avec nos photos, nous avons distribué les chars
dans un univers où le cheval est absent, ce qui, selon de Vernet en trois sous-ensembles : ceux qui nous
toute vraisemblance, laisse pour seule possibilité la paraissent acceptables (au nombre de 48), trois qui
traction par des bovinés 2. nous paraissent douteux, et enfin ceux, une dizaine,
Autre élément décisif pour une classification que nous rejetons (voir Fig. 57). 2. Sur ce sujet,
et un cadrage chronologique de ces gravures, l’ab- Pour cette dernière catégorie, on se demande voir citations et
sence de tifinagh sur l’ensemble du site et même en effet comment on peut qualifier de char des
références dans
dans toute la région alentour. Dans un rayon de choses informes de la sorte ou des motifs tellement
la discussion en
soixante-quinze kilomètres autour d’Aouineght, simples qu’ils peuvent figurer tout et n’importe quoi,
annexe de Gauthier
nous ne connaissons que quatre sites seulement y compris des pièces de chars tels des fragments
& Gauthier 2019, et
voir aussi notre ré-
avec des inscriptions, souvent très courtes, ou par- de timons et/ou de barre d’attelage. Certains de ces ponse à Dupuy dans
fois des caractères isolés. C’est seulement à l’ap- « chars » ont des « roues » dans de telles positions ce présent numéro.
proche de la Seguia el Hamra au nord ou à plus qu’on peine à y reconnaître un véhicule… à moins
de trois cents kilomètres vers le sud et le sud-ouest qu’on ne soit en présence de chars accidentés ? Et
que l’on observe une densité notable d'inscriptions pour certains (n° 160 par exemple), leur proximité
(Fig. 139). De même, nous n’avons pas trouvé le
avec de « vraies » représentations de chars n’en fait
moindre chameau, espèce peu représentée dans la
pas pour autant des documents valables et exploi-
région.
tables pour une quelconque analyse.
Les chars d’el-Ghallaouyia Parmi les chars que nous avons pu observer et
Autre site quantitativement important lui aussi photographier, nous relevons bien des détails qui
pour l’étude des chars, el-Ghallaouyia (Vernet 1996) diffèrent de la réalité picturale. Pour une large par-
se situait, à l’époque de notre premier décompte tie, cela ne remet pas en cause la lecture et l’exploi-
(Gauthier & Gauthier 2011) en quatrième position tation pour des analyses statistiques. Pour d’autres
avec soixante-quatre chars. Pour les mêmes rai- en revanche, les relevés distordent les faits et donc
81
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Vernet 1996 :121
Vernet 1996 :131
Vernet 1996 :130
Fig. 60. El-Ghal-
laouyia. Le char
du panneau 118 de
Vernet. Le cocher
et les deux guides
qu’il tient en main
apparaissent res-
pectivement comme
un élément de pla-
teforme dépassant
sur l’arrière (ou un
arceau) et comme
timons supplémen-
taires. Noter aussi
l’absence de la
barre d’attelage.
À droite et en bas,
photo du même char
et notre relevé.
82
Compléments à l’inventaire des chars
20 cm
Fig. 63. El-Ghal-
laouyia. Char à
timon unique. Photo
J.-L. Le Quellec.
Fig. 64. El-Ghal-
laouyia. Bige. Photo
J.-L. Le Quellec.
83
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 73. El-Ghal-
laouyia. Char
à simple timon
et joug semi-
circulaire.
Fig. 74. El-Ghal-
laouyia. Char à
double timon et
arceaux arrières.
84
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 78. El-Ghal-
laouyia. Char à
deux timons très
rapprochés.
Fig. 79. Le pseudo
char de Rkeiz :
relevé de Vernet
(1993) à gauche, une
photo du motif et
notre relevé à droite.
85
Yves Gauthier & Christine Gauthier
ceux proposés par Vernet (Fig. 60) qui en fait un Nous avons signalé plus haut, pour un char
char apparemment à quatre timons. La gravure d’Aouineght, la confusion entre traits figurant les
d’une patine très claire, qui se détache très bien du animaux et timons supplémentaires. Ce type de
rocher assez foncé, montre que la plateforme rec- confusion (guide/timon) qui s’ajoute à la précédente
tangulaire, fixée en avant de l’essieu, est occupée (entre trait pour les animaux et timons) n’est peut-
par un cocher. Celui-ci tient en main deux guides être pas exceptionnel, et cela n’avait pas échappé
qui se terminent au niveau des cornes du bovin, à Alfred Muzzolini (1990 : 116). D’autres relevés
lequel tracte un char à deux timons. En conclu- de chars à multiples timons méritent certainement
sion, ce char à quatre timons et sans aurige selon d’être reconsidérés (Gauthier & Gauthier 2019 : 42).
cet auteur est en réalité un char à deux timons, Un inventaire provisoire
reliés par une barre d’attelage — absente sur le Outre les modifications proposées ci-dessus, il
dessin de Vernet — fixée en arrière de la tête du faut prendre en compte une série de chars qui, appa-
bovin tractionneur, et mené par un cocher : une remment (nous n’avons que des relevés pas toujours
tout autre lecture ! fidèles pour comparer) n’ont pu être identifiés dans
86
Compléments à l’inventaire des chars
87
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Le char, attelé à un unique animal, ne com- La plateforme est occupée par un personnage
porte en apparence qu’un seul timon qui se ter- similaire aux trois précédents, brandissant une
mine sur le museau du tractionneur (autre exemple lance et un autre objet long. Compte-tenu de la sil-
contredisant les propos de Lhote ; cf. introduc- houette, ce personnage (le cocher sans doute) est
probablement assis. Sur la gauche, un trait incliné
)
88
Compléments à l’inventaire des chars
89
Yves Gauthier & Christine Gauthier
3
Fig. 98. Amsed-
jenit. Panneau
avec cinq chars
(numéros) et deux 1
grands personnages.
Encarts : 1/ croquis
des deux person-
nages (Verviale
1947) ; 2/ relevé
du char n°1 (Lhote
1982 : 29). Photo
B.T. avec traitement
DStretch_CRGB.
5
Fig. 100. Idem.
Détail du char n°5.
Les trois chevaux
sont reliés par
une barre d’atte-
lage fixée sous le
museau. Photo B.T. 4 5
DStretch_LRD.
90
Compléments à l'inventaire des chars
91
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Lhote 1982 : 15
— 177 à 1(9)79 : AMASSEDJEMT, Medak, Tassili-n-Ajjer, Algérie cf. Verviale (M.), 1947, p. 245 : « Des chevaux de race pure, aux
formes élégantes, traînent des chars attelés deux à deux, trois à trois, parfois quatre à quatre ». Cela implique au moins trois chars de style
au galop volant. Inédits.
Lhote 1982 : 30
— 485 à 488 : AMSEDENET, confins du Medak, Tassili-n-Ajjer, Algérie sur piste abareka ouan Terourirt : quatre chars au galop volant
dont un tiré par quatre chevaux, monté par deux hommes, avec roue à quatre rayons ; un autre tiré par quatre chevaux. Découverte Lhote (H.),
juin 1969 ; cf. Lhote(H.), 1970, fig. 1. (associé à la fig. 9 p29 - NDA)
Lhote 1982 : 26
- 447 : Fait double emploi avec 446.
92
Compléments à l’inventaire des chars
93
Yves Gauthier & Christine Gauthier
trait courbe et parallèle qui est certainement le reste positionnée en avant de l’essieu et prenant appui sur
d’un deuxième timon. On ne distingue pas le lien lui ainsi que sur le timon. Les roues sont à quatre
entre ces timons et les chevaux. Un arceau stabili- rais, et l’une d’elle est équipée d’une jante très
sateur, légèrement incliné vers l’extérieur, est fixé haute. Trois lances sont placées derrière le cocher.
longitudinalement sur le timon gauche. L’essieu est Un deuxième char, lui aussi avec timon unique et
supporté par des roues à six raies. Le trait vertical plateforme triangulaire, est figuré sous le premier,
qui recoupe une antilope bicolore (dama ?) figure un le cocher, très incliné en avant et les tractionneurs
fouet ou une lance. venant en superposition sur le ventre des chevaux
du premier char.
Ajelway
Deux points méritent d’être soulignés pour Ihelfen
un bige au galop volant provenant d’Ajelway, en Deux chars similaires sont gravés sur les rochers
bordure sud-ouest du plateau des Ăjjer, à environ de l’oued Ihelfen, une douzaine de kilomètres à
trente-cinq kilomètres au nord-ouest de Djanet : l’ouest de l’aéroport de Tamanghasset (Fig. 110-
1/ les roues comportent quatre rayons avec renfort 111). Les plateformes, quadrangulaires, sont fixées
Fig. 109. I-n-Alhi- en avant de l’essieu. Celui-ci, et c’est une configu-
nen. Bige avec plate- triangulaire à l’attache sur la jante ; 2/ la plateforme
forme triangulaire semi-circulaire est bien détaillée, avec un tressage ration peu fréquente, se prolonge jusqu’au centre
et roue à jante large. en oblique et symétrique de part et d’autre du timon des roues sans rayons. Le timon unique est muni
Trois lances sont (Fig. 108). d’une barre d’attelage. Deux traits perpendiculaires
entreposées à l’ar- à cette barre et à leurs extrémités nous paraissent un
rière. Un autre char, I-n-Alhinen
peu trop longs pour être l’indication du joug. Plus
tout petit et lui aussi Seul DStretch® révèle la présence de ce bige, vraisemblablement, ce sont les tractionneurs qui
à plateforme trian- quasi indétectable sur le cliché original. Le cocher,
gulaire, vient en sont figurés de façon sommaire.
superposition sur le très incliné vers l’avant, tient en main quatre guides
Tassakarot
ventre des chevaux. dont on ne voit pas l’extrémité, le panneau étant trop
Photo L.-N. Viallet. dégradé à l’emplacement des têtes des tractionneurs Perdu dans le panneau bien connu de Tassa-
DStretch_RGB. (Fig. 109). Il monte une plateforme triangulaire karot et dans lequel figurent deux chars au galop
volant (Lajoux 1977 : 161 ; Lhote 1982 : n° 438), un
troisième attelage a échappé à l’attention de tous
les observateurs (Fig. 112). Partiellement mêlé à la
tête d’une vache, il est remarquable à deux titres
au moins.
Le tractionneur, qui progresse à une allure tran-
quille, est un bovin d’une facture sortant de l’ordi-
naire dans le groupe de figurations en style Cabal-
lin auquel cette peinture appartient sans doute : le
style est original avec un double trait pour les lignes
dorsales et ventrales et surtout avec le pelage réti-
culé qui rappelle celui des girafes et contraste avec
les robes unies ou bicolores habituelles. La traction
est opérée par l’intermédiaire de deux timons, l’un
d’eux venant surcharger le corps de l’animal. On ne
voit rien du mode de fixation sur l’avant. Il est très
original aussi par le sexe de son cocher, manifes-
tement une femme à tête en bâtonnet, vêtue d’une
robe longue, et assise sur la plateforme qu’elle dis-
simule. Si des femmes montent des chars c’est habi-
tuellement comme passagers, ainsi que nous l’en-
94
Compléments à l’inventaire des chars
95
Yves Gauthier & Christine Gauthier
96
Compléments à l’inventaire des chars
provenant de cette région est donc bienvenue. Sur sont à verser au dossier concernant la place des
le site de Ti-n-Agakhou, localisé approximative- femmes dans la société. Pour autant faut-il s’éton-
ment (carte Fig. 140) un char inédit a été relevé. ner de voir des femmes mener un char ? Hérodote
Quatre tractionneurs d’espèce indéterminable et à (Hist., IV.cxciii) écrit : « Les Zauèces touchent aux
forte croupe (les queues repliées ?) filent au galop Libyens Maxies. Quand ils font la guerre, leurs
volant en tirant un char à double timon (Fig. 121).
femmes conduisent les chars. »
Reproduisant un schéma déjà
vu, les timons convergent sur
la nuque des animaux : aucun
détail du harnachement n’est
apparent. Les timons, assez
proches l’un de l’autre, sup-
portent une petite plateforme
striée qui s’appuie sur l’essieu.
Deux arceaux dirigés vers
l’arrière du char sont arri-
més sur celui-ci. Le cocher,
derrière lequel se dessinent
deux lances, mène l’attelage à
quatre guides. Il est tout à fait
inhabituel de voir un cocher
vêtu d’une robe longue et
transparente : sans doute est-
ce une femme. Généralement,
ces chars sont conduits par des
auriges portant une tunique
courte et légèrement évasée.
Nous avons expliqué qu’à
Tassakarot un char est aussi
mené — probablement — par
une femme en robe longue,
mais le contexte est radicale- Fig. 118. I-n-
ment différent : elle est assise, Kaokan.
et le véhicule est tracté par un Trige au galop
volant. Photo
bovin qui avance paisiblement
Bernard Fouilleux.
au pas. Ces deux documents
97
Yves Gauthier & Christine Gauthier
98
Compléments à l’inventaire des chars
Fig. 121. Ti-n-
Agakhou. Quadrige
au galop volant
avec double timon
convergent. Deux
arceaux sont fixés
en arrière de
l’essieu. La cocher
est vêtu d’une robe
longue. Les quatre
tractionneurs d’un
autre probable qua-
drige sont visibles
en bas et à gauche.
DStretch_YBK.
Photo Marie Maka.
se dirigeant vers la droite (Fig. 130). Deux autres en main la badine que tiennent ses compagnons.
scènes relevées par l’équipe Lhote, l’une à I-n-Iti- Alors que l’esprit est le même que pour les précé-
nen (Fig. 131) et l’autre à Tissukaï (Fig. 132) doivent dents — un homme et un bovin tous deux en course
sans doute être ajoutées à cet inventaire. Moins et reliés par une longe — le deuxième panneau de
détaillée que les autres, celle d’I-n-Itinen regroupe Tissukaï (Fig. 132) nous introduit dans un univers
quatre anthropomorphe en style caballin à tête en culturel apparemment différent : à l’aplat des pre-
bâtonnet, dont l’un semble relié par une longe au mières scènes répond un contour fin ; la silhouette
quadrupède acère — semblable aux bovinés pré- de l’animal est bien plus détaillée et proche de la
cédents — qui galope devant lui. L’homme n’a pas réalité ; l’allure de son guide (silhouette, vêtements)
Fig. 122. Wa-n-
Habdu. Restes
d’un char dont on
devine le timon,
une barre d’attelage
sous-jugulaire, les
jambes et le bassin
du cocher. Devant
lui, un quadrupède
(boviné ?) est peut-
être relié par une
longe au cocher.
Photo P. Lecol-
laire. DStretch_
CB_LABI.
Fig. 123. Wa-n-
Habdu. Relevé élec-
tronique du char de
la figure précédente.
99
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Fig. 125. Oued n’a rien à voir avec celles des anthropomorphes en leurs, comme le prouvent aussi les images ci-des-
Djerāt, Station IV.
DStretch_LRE.
style Caballin ; sans badine ou objet barbelé, il court sus, nombre de ces peintures sont très effacées et
Photo F.V. Donzé. à côté de l’animal et pas derrière lui. peuvent passer inaperçues si l’on n’utilise pas des
Synthèse provisoire traitements numériques : il donc faut s’attendre, à
Fig. 126. Oued
Djerāt, Station moyen ou court terme, à des modifications de la
Dans l’état actuel des connaissances, cette asso-
IV. Suite de la ciation d’un bovin au galop et d’un humain qui le distribution et des densités locales.
Fig. précédente. Les conclusions tirées ici ne peuvent donc être
DStretch_LRE. tient en longe se rencontre exclusivement dans les
limites strictes du plateau des Ăjjer (Fig. 140) mais que provisoires, car elles ne portent que sur quinze
Photo F.V. Donzé.
cette carte est inévitablement incomplète. En effet, cas probables de cette association, répartis sur
Fig. 127. Oued douze abris. Néanmoins, on peut constater que la
Djerāt, Station IV. la mise en évidence de cette association est récente,
Détail de la partie toute la documentation n’a pas été passée en revue plupart de ces images sont rattachées aux auteurs
basse et gauche du pour trouver d’autres exemples, et l’exploration de des peintures en style Caballin. Pour autant, ces
relevé MNHN 59-4. la région n’est pas terminée, loin s’en faut. Par ail- images sont loin d’être uniformes et stéréotypées :
100
Compléments à l’inventaire des chars
101
Yves Gauthier & Christine Gauthier
102
Le site d’Aouineght revisité
Remerciements
Pour la documentation, nous avons bénéficié de
l’aide précieuse de Jacques Audoin, Tertia Barnett,
Marie-Anne Civrac, Frédéric-Victor Donzé, Frédé-
rique Duquesnoy, Annie et Gérard Garcin, Suzie
et Gérard lachaud, Pierre Lecollaire, Jean-Loïc
Le Quellec, Marie Maka, Louis-Noël Viallet et
deux autres informateurs qui souhaitent rester ano-
nymes. Les commentaires bienveillants de Jean-
Loïc Le Quellec et Frédérique Duquesnoy nous ont
permis d’améliorer substantiellement le texte. Nous
remercions Monique Crossley pour la traduction du
résumé. Relevés et photos des auteurs sauf spéci-
fication contraire. Merci également au Musée de Fig. 134. Aoui-
l’Homme, qui a permis à l’AARS l’accès aux rele- neght. Exemple de
vés des équipes Lhote numérisés par Jean-Chris- motif(s) pouvant
tophe Domenech, afin de pouvoir contribuer à leur être abusivement
contextualisation. lu(s) comme char.
103
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Changer le point de vue (plus ou moins rasant) Le total de « chars éventuels » dénombrés par
et d’heure pour l’éclairage ne donne pas plus de ce visiteur sur un quart du site égale celui des réels
cohérence à l’ensemble. Un retour sur les planches chars publiés ici. Ces derniers ont été observés sur
de Cauneille (1951) ou de Vernet (1996) dévoile que plus de 50% du site, et environ la moitié d’entre eux
divers croquis (Fig. 137), considérés par les auteurs se trouvent sur le secteur nord-est du banc rocheux
comme des chars, montrent de fortes analogies avec (Fig. 8-9)… que n’a pas foulé ce visiteur (ainsi que
ces motifs géométriques. Dans d’autres cas, il n’y nous l’a indiqué un autre des participants au même
a aucune incertitude sur le caractère anthropique voyage — in letteris, 5 mars 2020).
des tracés, et nous refusons de prendre en compte Nous retenons bien le caractère « éventuel » de
des motifs trop simples, comme ces cercles (rayon- ces chars et renvoyons le lecteur, ce visiteur et le
nés ou pas), « haltères » (ex. : Fig. 138), croix ou webmaster à notre section sur Aouineght, où nous
fourches qui se voient sur les relevés de Vernet (1996 discutons des densités de gravures selon les zones,
et ici Fig. 57, n° 160). Quand on découvre ce type de la localisation des sujets identifiés sur les des-
de croquis comportant des motifs informes ou trop sins de Cauneille, de la qualité des clichés, des
simples pour être d’une quelconque utilité scienti- conditions de prises de vues et du quadrillage du
fique, car pouvant figurer tout et n’importe quoi, on site. Nous attendons avec beaucoup de sérénité la
peut se demander quel crédit accorder aux auteurs publication d’excellentes photos de ces vingt-quatre
qui les produisent comme éléments d’analyse. Tout chars et des gravures parmi les plus marquantes de
en cherchant à convaincre la communauté qu’il est l’article de Lhote que ce visiteur n’aura certaine-
salutaire de « faire le ménage » dans les inventaires ment pas manquées. Et à ce stade, on appréciera à sa
et publications anciennes, qu’il s’agisse de chars ou juste valeur cette remarque du webmaster, qui com-
d’autres thèmes, nous ne pouvons qu’émettre le vœu mente ainsi notre article de 2019 : « Il apparaît donc
de ne plus retrouver dans la littérature des « chars » que la station d’Aouineght, immense et difficile à
délirants ou d’hypothétiques « parties de chars ». analyser du fait que les gravures se trouvent sur des
Apparemment ce n’est pas gagné, si l’on en juge par roches horizontales et gris bleuté peu lisibles sans
ces propos d’un récent visiteur d’Aouineght, publiés une lumière rasante, nécessite non un bref passage
sur un site web maintenu par Robert Vernet : « 24 mais une longue prospection, qui pourra déboucher
chars éventuels. J’estime avoir vu 25 % du site. Il sur autre chose que des conclusions hâtives comme
pourrait donc en contenir 96, ce qui n’est pas loin dans l’article d’Yves Gauthier. »
du décompte de Cauneille […] Je donne à celui qui Il est satisfaisant pour notre ego de voir que
aurait l’intention de le vérifier le conseil de s’y établir Robert Vernet reprend nos propres mises en garde
plusieurs jours et de visiter tôt le matin et tard le soir sur la difficulté à observer ces gravures. Simultané-
pour profiter d’un éclairage frisant (F. Auvray, rap- ment il oublie (?) de rappeler que nous avions bien
port inédit, 4 avril 2020) » (https://bit.ly/2WFlTcn/ signalé la possibilité de risque d’erreur de notre part.
site en cache consulté le 18 mai 2020). Eût-il bien voulu participer à la réunion de L’AARS
104
Compléments à l’inventaire des chars
de mai 2019, il aurait assisté à la communication Par ailleurs dans divers travaux (voir supra), il
dans laquelle nous présentions une documentation s’est borné à reprendre sans jamais les critiquer le
encore plus large que ce qui est proposé ici, docu- décompte des chars et les dessins erronés publiés
mentation confirmant notre première analyse. par Cauneille : c’est une attitude pour le moins éton-
En écrivant ces lignes critiques et en repre- nante, et simultanément une bonne indication qu’il
nant à son compte le rapport de Francis Auvray, n’a (probablement) jamais visité Aouineght.
notre commentateur hâtif se met dans une posi- Nous comprenons donc qu’il ait été irrité par
tion particulièrement délicate, car soit il a visité le notre article de 2019, qui souligne son manque
site d’Aouineght, soit, en dépit de très nombreuses criant d’esprit critique et dénonce une méthodolo-
années passées en Mauritanie pour ses travaux en gie surannée, mais bien en ligne avec sa publication
archéologie, il ne s’y est jamais rendu.
de chars fantômes comme celui de Rkeiz ou son
Dans le premier cas, on s’attendrait à trouver travail quelque peu hâtif sur les chars d’el-Ghal-
dans la littérature au moins un article faisant état
laouyia (voir le chapitre correspondant plus haut,
de ses propres informations, accompagnées de pho-
ses dessins de chars fantaisistes, les nouveaux
tos : nous cherchons en vain cette publication sur
documents inédits).
laquelle il pourrait s’appuyer pour nous contredire.
Il se contente du rapport inédit d’un visiteur ayant Si des informations contradictoires sont conte-
passé trois heures sur le site sans l’avoir balayé nues dans les archives inédites de Jean Sougy,
comme nous l’avons fait nous mêmes, des quelques géologue ayant travaillé sur le secteur, nous nous
photos de Jean Sougy (une trentaine) et des copies réjouirons de leur publication, qui rendra service à
de carnets de notes qu’il a mises sur son site. Pour la communauté bien plus et bien mieux que R. Ver-
juger de l’ampleur réelle du contenu d’une station net ne l’a fait jusqu’à présent en extrapolant à partir
qui s’étale sur dix kilomètres, Vernet le dit lui- de trop rares documents mal localisés et connus de
même, il faut plus que cela. seconde main.
Bibliographie
Barnett Tertia 2019. An engraved landscape : rock car- Lhote Henri 1982. Les chars rupestres sahariens. Tou-
ving in the wadi el-Ajal, Libya. London : The Society louse : Éditions des Hespérides, 272 p.
for Libyan studies, London. 2 vol. 338 + 259 p.
Lluch Pascal & Sylvain Philip 2003. « Six stations à gra-
Camps Gabriel 1989. « Les chars sahariens. Images d’une vures du N.E. de l’Adrar (Dhar Chinguetti, Maurita-
société aristocratique. » Antiquités africaines 25 : nie). » Les Cahiers de l’AARS 8 : 87-96.
11-40.
Mauny Raymond 1947. « Une route préhistorique à tra-
Gautier Émile-Félix 1935. « Anciennes voies de com- vers le Sahara occidental. » Bulletin de l'IFAN 9: 341-
merce transsaharien. » Geografiska Annaler 17 (Sup- 357.
plement: Hyllningsskrift Tillagnad Sven Hedin) :
550-562. Mauny Raymond 1955. « Autour de la répartition des
chars rupestres du Nord-Ouest africain. » Actes du
Gauthier Yves & Christine Gauthier 2011. « Des chars congrès panafricain de Préhistoire, Alger, 1952.
et des Tifinagh : étude aréale et corrélations. » Les Paris: Arts et Métiers Graphiques, p. 741-746.
Cahiers de l’AARS 15 : 91-118.
Monod Théodore & Cauneille (Cap.) 1951. « Nouvelles
Gauthier Yves & Christine Gauthier 2015. « Nouvelles
figurations rupestres de chars du Sahara Occiden-
figurations de chars sahariens: technicité et posi-
tionnement chronologique relativement au style de tal. » Bull. IFAN XIII, 1 : 181-197.
Tazina. » Les Cahiers de l’AARS 18, 70 p. Muzzolini Alfred 1990. « Au sujet de la datation des
Gauthier Yves & Christine Gauthier 2019. « Petit chars au galop volant. » Sahara 3 : 115-118.
manuel d’attelage : gravures et peintures de chars Puigaudeau Odette du 1966. « Une route des chars à
sahariens. » Les Cahiers de l’AARS 20 : 37-88. bœufs. » Archéologia 9 : 37-39.
Lajoux Jean-Dominique 1977. Tassili n’Ajjer. Paris ; Édi- Vernet Robert 1993. Préhistoire de la Mauritanie.
tions du Chêne, 182 p. Centre Culturel Français de Nouakchott - Sépia.
Lajoux Jean-Dominique 2011. Murs d’images : Art 427p.
rupestre du Sahara préhistorique. Arles : Errance, Vernet Robert 1996. « Le site rupestre d’El Rhallaouiya
314 p. (Adrar de Mauritanie). » Beiträge zur allgemeine und
Lambert Nicole 1972. « Objets en cuivre et Néolithique Vergleichende Archäologie 16 : 109-137.
de Mauritanie occidentale. » Actes du 6e Congrès
Panafricain de Préhistoire. Dakar 1967 : 159-174. Vernet Robert 2014. « Les marges préhistoriques du
nord-est de la Mauritanie: le Tiris et le Zemmour. »
Le Quellec Jean-Loïc & Annie Mouchet 2020. « À propos Les Cahiers de l’AARS 17: 209-247.
d’un panneau orné de γelanγela qui fit couler beaucoup
d’encre. » Les Cahiers de l’AARS 21 : 155-178. Vernet Robert & Bouaba o/ Md Naffe 2003. Diction-
naire archéologique de la Mauritanie. CRIAA, Uni-
Lhote Henri 1957. « Les gravures rupestres d’Aouineght versité de Nouakchott, 165p.
(Sahara occidental). Nouvelle contribution à l’étude
des chars rupestres du Sahara. » Bulletin de l'IFAN Verviale Lt. 1947. « Les gravures et peintures rupestres
19 (3-4) : 617-658. en pays Ajjer. » BSPF 7-8 : 235-252.
105
Yves Gauthier & Christine Gauthier
Bu Kerch
Aouineght
Bir Moghreïn
Ti-n-Bunan
Zouérate
Rkeiz
G. Ghzalia
el-Rhallaouiya
Tillilit
Atar
Tidjikja
200 km
Fig. 139. Localisation des lieux mentionnés en Mauritanie. En noir, stations avec inscriptions en tifinagh.
Illizi
18
16
1 20
2
17
19 3
5
4 7
21
6 8 9
22 10
Djanet 12 11
13
50 km 14 15
Fig. 140. Sites du plateau des Ăjjer : chars (rouge) ; bovins tenus en longe (vert) et cercles centrés pour ceux publiés en 2019. 1/ Tassakarot,
2/ Aïtou, 3/ Serkaya, 4/ Wa-n-Habdu, 5/ Amsedjenit, 6/ Ajelway, 7/ Tissukaï, 8/ Tin-Tartaït, 9/ Ti-n-Aboteka, 10/ I-n-Kaokan, 11/ I-n-Alhinen,
12/ Alan-Edumen, 13/ Ti-n-Agakhou, 14/ Mulan-Naga, 15/ Tabarakat, 16/ Ekkat Burchina, 17/ Ekad-n-Usher, 18/ Djerāt, 19/ Immeseridjen,
20/ Amelrar, 21/ Talawatwat, 22/ I-n-Itinen.
106
Indications techniques pour les Cahiers de l’AARS
Conseil d’administration
Président : Jean-Loïc Le Quellec
Vice-Président : Frédérique Duquesnoy
Secrétaire : Jean-Marc Rouzet
Trésorière : Anne-Catherine Benchellah
Trésorière adjointe : Nicole Honoré
Responsable site Web : Thierry Devauton
Assesseurs : Gérard Germond, Marie-Jean Nézondet