Vous êtes sur la page 1sur 21

Revue

Construction Référence

Métallique MIX-CAL 2-01

STABILITÉ AU DÉVERSEMENT
DE TRAVERSES ARTICULÉES OU SEMI-CONTINUES
D’OSSATURES MIXTES ACIER-BÉTON
EN PHASE DE CONSTRUCTION
par J.-M. Aribert

1. – PRÉSENTATION DU PROBLEME

L’étude concerne la stabilité au déversement des poutres primaires et secondaires d’un


plancher mixte lorsque l’on coule la dalle de béton, elle-même de type mixte (c’est-à-
dire réalisée avec une tôle mince profilée, ultérieurement collaborante). Les poteaux de
l’ossature sont en acier ou de type mixte acier-béton (par exemple partiellement enro-
bés de béton) et sont supposés ici contreventés dans leurs deux plans verticaux de
flexion.

La figure 1 montre une disposition classique en grillage de poutres de plancher avec


une portée  des poutres secondaires de l’ordre de 8 à 12 m et une portée ′ des poutres
primaires de 6 à 9 m. Dans une maille définie par quatre poteaux, une ou deux solives
(ici A′B ′) peuvent être placées parallèlement aux poutres secondaires (AB et CD) de
manière que la portée de la tôle profilée reste de l’ordre de 3 à 3,5 m, dans le but d’évi-
ter l’étayage de la dalle en phase de construction.

Sur le plan de la terminologie, le terme de « poutre primaire » se conçoit mieux en pré-


sence de deux solives (′ de l’ordre de 9 m) dans la mesure où AC devient alors la
poutre la plus chargée. On conservera néanmoins ce terme pour AC en présence d’une
seule solive.

Lorsque la tôle profilée est convenablement fixée aux poutres et solives, par exemple à
l’aide de goujons soudés au travers de la tôle, on considère généralement que cette der-
nière apporte un maintien latéral efficace aux semelles des poutres sur lesquelles elle
prend appui. Dès lors, si les assemblages des poutres secondaires AB et CD sur les ailes
des poteaux peuvent être considérés comme articulés, les poutres en question se trou-
vent automatiquement à l’abri du risque de déversement. En pratique, plus pour des rai-
sons de limitation de flèche en phase de construction que de capacité portante, on peut
avoir intérêt à concevoir des assemblages métalliques qui offrent une rigidité flexion-
nelle non négligeable, c’est-à-dire des assemblages classifiés comme semi-rigides dans
les codes actuels.

La figure 2 donne deux exemples de tels assemblages, réalisés d’une part avec platine
boulonnée non débordante, d’autre part avec cornières boulonnées (à noter que ces

J.-M. ARIBERT – Professeur des Universités, Directeur du laboratoire de structures à l’INSA de Rennes

CENTRE TECHNIQUE INDUSTRIEL Domaine de Saint-Paul, 78470 Saint-Rémy-lès-Chevreuse


Tél.: 01-30-85-25-00 - Télécopieur 01-30-52-75-38
DE LA CONSTRUCTION MÉTALLIQUE
Construction Métallique, n° 2-2001
64 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

assemblages restent, en général, semi-rigides et partiellement résistants en phase de


fonctionnement mixte). Si la valeur de flèche des poutres secondaires peut se trouver
réduite de manière significative, en phase de construction, de part la semi-continuité
introduite par les assemblages poutres-poteaux, en revanche la stabilité au déverse-
ment peut devenir critique du fait de la flexion négative de la poutre qui en résulte, avec
une semelle métallique inférieure comprimée et non maintenue latéralement. Il
convient également de signaler que la poutre adjacente (c’est-à-dire celle en prolonge-
ment de AB et non représentée sur la figure 1) peut n’être que faiblement chargée
lorsqu’on réalise la dalle de la poutre AB en question ; la zone de moment négatif peut
s’étendre alors sur une longueur importante, voir la totalité, de cette poutre adjacente.

2 
A Poutre secondaire B

0,5 ′ Sens des nervures


de tôle
A′ Solive B′

Poutre
0,5 ′ primaire

C Poutre secondaire D

Fig. 1 – Disposition classique des poutres d’un plancher avec dalle mixte

Le cas où la tôle profilée maintient latéralement la semelle supérieure de la poutre


métallique avec tout ou partie de la semelle inférieure en compression n’est pas couvert
par l’Eurocode 3 vis-à-vis du risque de déversement (cf. clause 5.5.2 et Annexe F de [1]).
L’objet de la présente rubrique est de proposer une solution pratique à ce problème, se
plaçant du côté de la sécurité et s’appuyant sur une formulation différente tirée de la
norme britannique BS 59 50 [2].

Poutre Poutre
secondaire secondaire

Poutre
primaire

Fig. 2 – Assemblages boulonnés semi-rigides des poutres secondaires

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 65

MIX-CAL 2-01

En ce qui concerne les poutres primaires, de type AC, elles peuvent être attachées aux
poteaux, au niveau de leur âme, par des liaisons agissant perpendiculairement à l’âme
de ces poteaux, par exemple par l’intermédiaire d’un gousset soudé perpendiculaire-
ment à l’âme lorsque celle-ci est enrobée de béton armé et plus souvent par des cor-
nières boulonnées et s’apparentant à des articulations (cf. schéma de droite de la
figure 2).

De même, des cornières boulonnées peuvent être utilisées pour assurer la liaison, de
type A′, de la solive avec la poutre primaire comme le montre la figure 3.

Solive

Fig. 3 – Assemblage articulé de la solive sur la poutre primaire

Par ailleurs, les nervures de la tôle profilée étant parallèles aux poutres primaires, on ne
peut considérer que la semelle supérieure de ces poutres est maintenue par la tôle ;
seule la ou les solives situées entre les poutres secondaires apportent un entretoise-
ment localisé aux poutres primaires (points A′ et B ′ sur la figure 1). Dans ces conditions,
les méthodes couramment admises pour la vérification au déversement des poutres
métalliques non maintenues latéralement, et donc celle de l’Eurocode 3, s’appliquent.

Au sujet de la définition d’un critère de flèche des poutres métalliques d’un plancher
mixte lors de la phase de construction, on ne trouve pas vraiment de limite précise dans
les textes normatifs actuels. Ainsi, un commentaire du Document d’Application Natio-
nale de l’Eurocode 4 [3], donné à la clause 5.2.1(4), est le suivant :

« Pour les poutres non étayées où le niveau de référence est la face supérieure de la
poutre, il n’y a pas lieu de compter dans la composante δ1 de δmax la flèche prise par la
poutre métallique résistant seule. L’attention est attirée toutefois sur le supplément de
charge résultant de la surépaisseur de béton compensant la flèche (effet de mare)… ».
Pour mémoire, δ1 est la composante de la flèche due aux actions de courte durée et δmax
la flèche totale de la poutre mixte (comme expliqué à la clause 4.2.2 de l’Eurocode 3 [1]).
En conséquence, il y aura intérêt à limiter raisonnablement l’effet de mare au niveau
d’une poutre porteuse en adoptant un critère similaire à celui utilisé pour les dalles
mixtes (cf. clause 7.3.2(4) de [3]). On conviendra ici que : « Sous le poids propre du pro-
filé, de la tôle et du béton frais, la flèche à l’ELS, à mi-portée des poutres, reste infé-
rieure à la plus petite des deux valeurs /250 et 20 mm ».

Le plan de cette rubrique se présente alors comme suit :

– On donne tout d’abord quelques notions de l’analyse globale élastique d’une tra-
verse avec assemblages semi-rigides fixés sur des poteaux présentant une forte rigi-
dité flexionnelle.

Construction Métallique, n° 2-2001


66 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

– On expose ensuite la méthode de vérification simplifiée vis-à-vis du déversement


selon les BS 59 50 qui est proposée ici pour les poutres secondaires. On rappelle éga-
lement comment la méthode de l’Eurocode 3 s’applique sans difficultés aux poutres
primaires.

– Un exemple pratique est traité, pour illustrer les méthodes précédentes.

– Une analyse plus complète est donnée, à titre indicatif, pour montrer comment l’effet
de flexibilité des poteaux peut être pris en compte.

– Enfin, quelques considérations sont avancées au sujet de la résistance de la tôle par


les connecteurs.
4

2. – ANALYSE GLOBALE ÉLASTIQUE D’UNE POUTRE

AVEC DES ASSEMBLAGES SEMI-RIGIDES

2,1. – Calcul des rotations et moments fléchissants au droit des assemblages

On considère la poutre AB de la figure 4, soumise à une charge uniformément répartie p


par unité de longueur et fixée à des supports rigides par l’intermédiaire d’assemblages
de rigidité Sj en rotation. Soit EI la rigidité flexionnelle de la poutre et  sa portée.

M, θ > 0
p
Sj Sj

EI, 
A B
Fig. 4 – Poutre élastique avec assemblages semi-rigides

Désignant par MAB le moment exercé par l’assemblage en A sur la poutre et par θA la
rotation de l’extrémité A de la poutre, la relation de comportement élastique de la
poutre est donnée par :

p2 2EI
MAB = – –––––– + θ ,
–––––– (1)
12  A

compte tenu de la géométrie du problème (θB = – θA).

Le moment exercé sur l’assemblage étant – MAB , la relation de comportement élastique


de celui-ci s’écrit :

– MAB = Sj θA (2)

Des relations (1) et (2), on déduit immédiatement :

p2 1
θA = ––––––
–––––––––––––––– (3)
12 2EI/ + Sj

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 67

MIX-CAL 2-01

et
p2 1
MAB = – –––––– ––––––––––––––––––––– (4)
12 1 + 2EI / (Sj )

À noter que les expressions (3) et (4) redonnent bien, à la limite, des valeurs classiques.
Ainsi :

p3
– si Sj → 0, θA → ––––––– et MAB → 0 ;
24EI

p2
– si Sj → , θA → 0 et MAB → – .
–––––––
12 5

2,2. – Calcul de la flèche à mi-portée (Fig. 5)

M, θ > 0

θA δ( x ) > 0

A B
x
θ( x )
Fig. 5 – Déformée élastique de la poutre

De la relation moment-courbure dans une section quelconque de poutre (d’abscisse x) :

dθ M(x)
–––– = – (5)
dx EI

et de l’expression du moment fléchissant :

px
M(x) = MAB + ( – x) , (6)
2

on déduit par intégration :

px 2
EI(θ – θA) = – MAB x – (3 – 2x)
12

 

(puisque θ = θA pour x = 0), puis par nouvelle intégration compte tenu de θ = :
dx

 
x2 p x4
EIδ (x) = EIθAx – MAB – x3 –
2 12 2

(puisque δ = 0 pour x = 0).

Construction Métallique, n° 2-2001


68 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

La flèche maximale est donc donnée par :

 2
 
1 p 4
δmax = δ(/2) = θA – MAB + (7)
2 EI 8 128

avec θA et MAB exprimés en (3) et (4).

À la limite, on retrouve selon (7) les valeurs classiques de flèche. Ainsi :

– pour la poutre simplement appuyée :

p 3 5 p4
6 θA =
24EI
, MAB = 0 et δmax =
384 EI
;

– pour la poutre parfaitement encastrée :

p 2 1 p4
θA = 0, MAB = et δmax = .
12 384 EI

2,3. – Illustration de l’effet de liaison semi-rigide

Adoptons par exemple la valeur :

EI
Sj = 6 (8)


pour la rigidité en rotation des assemblages. Pour mémoire, cette valeur est un peu infé-
8EI
rieure à la valeur limite à partir de laquelle une ossature contreventée peut être

considérée à nœuds rigides (cf. clause 6.9.6.2 de [1]) ; d’autre part, cette valeur est assez
élevée pour conduire par la suite à des zones significatives de moment négatif, adja-
centes aux assemblages, et à une réduction importante de la flèche maximale. Ainsi, les
expressions (3), (4) et (7) donnent successivement avec la valeur (8) choisie pour Sj :

p 3
θA = , (9)
96EI

p 2
MAB = – , (10)
16

p 4
et : δmax = . (11)
192EI

La flèche est donc réduite dans un rapport de 2,5 par rapport à celle de la poutre simple-
ment appuyée.

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 69

MIX-CAL 2-01

3. – MÉTHODES DE VÉRIFICATION SIMPLIFIÉE VIS-À-VIS DU DÉVERSEMENT

3,1. – Cas des poutres secondaires avec assemblages semi-rigides et maintien


latéral de la semelle supérieure

Comme expliqué plus haut, la méthode qui suit est basée sur la norme BS 5950-Partie 1
[2], plus précisément sur l’Annexe G de cette norme où il est affirmé d’ailleurs que la
méthode se place en sécurité. Cette annexe s’applique à des poutres ou tronçons de
poutre maintenus à leurs extrémités de manière efficace vis-à-vis de la torsion (avec
entretoisement des deux semelles en acier), la semelle supérieure étant maintenue vis- 7
à-vis du déplacement latéral de manière continue sur toute sa longueur, et la semelle
inférieure étant libre de se déplacer latéralement. Pour simplifier la présentation, seul le
cas des poutres à section constante est traité ci-après, mais il faut signaler que l’Annexe
G peut s’appliquer également au cas de poutres à section variable et lorsque la position
de la ligne de maintien latéral diffère de l’axe de la semelle supérieure.

L’élancement au déversement de la poutre ou du tronçon de poutre est calculé à l’aide


de la formule de base suivante :

λLT = nt u vt λ (12)

où :

λ est l’élancement /iz de l’élément entre deux sections droites entretoisées vis-à-vis
de la torsion (iz correspondant au rayon de giration de la section de poutre autour de
l’axe faible) ;

u est un paramètre d’instabilité (proche de 0,9) qui, pour les sections symétriques
(avec semelles) autour de l’axe faible, est donné par :

u = [2Wpl /(Ahs)]1/2 (13)

où A et Wpl sont respectivement l’aire et le module plastique de la section droite de


poutre, et hs la distance entre les centres de cisaillement des semelles ;

vt est un facteur d’élancement donné par :

1 λ 2 –1/2


vt = 1 +  
40 x
(14)

où x est un indice de torsion égal, pour les sections (avec semelles) symétriques
autour de l’axe faible, à :

x = 0,566hs (A/It )1/2 (15)

où It est l’inertie de torsion de la section (au sens de St. Venant).

Enfin, nt est un facteur de correction déterminé à partir du diagramme de moment de


flexion. Comme le précise la clause G.3.6 de l’Annexe précitée, la valeur de nt peut être
déduite de la relation suivante (dont la forme résulte d’une intégrale calculée numéri-
quement à l’aide de la formule de Simpson) :

1
 12M 
1/2
(1)
nt = [M Sd + 3 M (2) (3) (4) (5)
Sd + 4 M Sd + 3 M Sd + M Sd + 2(MS – ME)] (16)
pl.Rd

Construction Métallique, n° 2-2001


70 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

Ici :
(1)
M Sd à M (5)
Sd sont les valeurs des moments exercés respectivement à une extrémité, au
quart, à la moitié, aux trois quarts et à l’autre extrémité de la longueur comprise entre
les deux sections maintenues en torsion. Toutefois, seuls les moments négatifs M (i) Sd
(c’est-à-dire amenant la semelle inférieure à être comprimée) doivent être considérés et
pris en valeur absolue dans la formule (16) ;

Mpl . Rd est le moment de résistance plastique de la section droite de poutre (par rapport
à l’axe fort), indépendamment de la classe de la section (à noter que cette dernière est
prise en considération plus loin, à la relation (17)) ;

8 MS est le maximum de M (2) (3) (4)


Sd , M Sd et M Sd , et

(1)
ME est le maximum de M Sd et M (5)
Sd ;

seules les valeurs positives de (MS – ME) doivent être retenues dans la formule (16).

La figure 6 donne deux exemples d’application de la formule (16), d’une part pour une
poutre assemblée de manière semi-rigide à deux poteaux intérieurs et chargée par le
poids du béton frais, d’autre part pour une poutre adjacente assemblée à un poteau
intérieur et à un poteau de rive et non encore chargée par le béton frais (en général, la
liaison avec un poteau de rive est considérée comme une articulation).

Remarque : l’expression (12) de λLT présente en fait une forme assez similaire à
l’expression (F-20) de l’Annexe F de [1], en notant que numériquement le terme
λ 1 λ
1 + 20  x     
1 2 0,25 2 0,5
n’est pas très éloigné de 1 + et qu’en flexion uniforme, on
40 x
a : 1/C 0,5
1 = nt = 1.


Une fois l’élancement λLT calculé à l’aide de (12), on peut déduire l’élancement relatif λLT
tel qu’il est défini dans l’Eurocode 3 (clause 5.5.2(5) de [1]), à savoir :

λLT = (λLT / λ1)βw
0,5 (17)

où λ1 est l’élancement limite élastique :

λ1 = π(E/fy )0,5 (18)

et où βw est le facteur correctif selon la classe de section :

βw = 1 pour les sections de classe 1 ou 2 ;

βw = Wel / Wpl pour les sections de classe 3 (où Wel est le module élastique de flexion et
Wpl le module plastique de flexion).

Lorsque la valeur λLT ne dépasse pas 0,4, on considère qu’il n’est pas nécessaire de véri-
fier l’élément vis-à-vis du déversement (clause 5.5.2(7) de [1]).

Lorsque λLT  0,4, il convient de déterminer le moment résistant de calcul au déverse-
ment à l’aide de la relation :

Mb . Rd = χLT (λLT)βwWpl fy / γM1 (19)

où χLT est le coefficient de réduction pour le déversement (donné aux clauses 5.5.2(2) et
(3) de [1]) et où γM1 est le facteur partiel de sécurité généralement pris égal à 1,10.

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 71

MIX-CAL 2-01

Poids de la poutre métallique, de la tôle et du béton frais

(5)
(1) MSd
MSd

A B Assemblage
M (Sd4) semi-rigide
( 2)
M Sd
M (Sd3) 9
 
1 0,5
nt = (1)
(M Sd  + M Sd
(5)
)
12MRd
a) Travée intérieure chargée par le poids du béton frais

Poids de la poutre métallique et de la tôle

(5)
M S( 4) M Sd
Articulation ( 3)
M S

A (2)
M Sd B

 12M 
1 0,5
nt = (3)
(4M Sd  + 3M Sd
(4)
 + M Sd
(5)
)
Rd

b) Travée de rive non encore chargée par du béton frais

Fig. 6 – Exemples de détermination du facteur de correction nt

Il est utile de préciser ici que la section de référence concernée par Mb . Rd est celle où
(5)
s’exerce le moment le plus sévère sous flexion négative (c’est-à-dire M Sd sur les deux
cas montrés à la figure 6). En particulier, lorsque l’on utilise une analyse globale élas-
tique à l’état limite ultime, le moment résistant au déversement ne doit pas être infé-
rieur au moment négatif de calcul le plus sévère, considéré ici en valeur absolue (par
exemple, Mb . Rd  M Sd
(5)
 sur la figure 6.b).

3,2. – Cas des poutres primaires articulées aux extrémités et sans maintien
latéral continu de la semelle supérieure

On revient maintenant au cas des poutres de type AC à la figure 1, avec un entretoise-


ment localisé en A′ apporté par la présence d’une solive (ou éventuellement de deux
entretoisements localisés s’il y a deux solives).

Construction Métallique, n° 2-2001


72 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

La poutre étant supposée articulée aux poteaux, l’Eurocode 3 (clause 5.5.2 et Annexe F
de [1]), permet en principe de résoudre le problème sans difficultés particulières.

Si la poutre est seulement entretoisée à mi-travée, le moment critique élastique vis-à-vis


du déversement pour la section de référence située ici à mi-travée (donc sous moment
positif) est donné par la formule générale de l’Eurocode 3 :

π2EIz (0,5′)2GIt
  
Iw 0,5
Mcr = C1 + + (C2zG)2 – C2zG (20)
(0,5′)2 Iz π2EIz

dans la mesure où la section droite est doublement symétrique (le coefficient C3 n’inter-
vient pas) et en désignant, pour les notations non encore précisées, par :
10
Iz : le moment d’inertie de flexion de la section autour de son axe faible ;

Iw : le moment d’inertie de gauchissement de la section ;

C1 : un facteur qui traduit l’effet du type de chargement de la poutre ;

C2 : un facteur qui traduit l’effet déstabilisant du chargement vertical lorsque celui-ci


est appliqué au-dessus de l’axe moyen de la poutre ;

zG : la distance (comptée ici positive) entre la niveau d’application du chargement et le


centre de cisaillement de la section (ici le centre de gravité).

En pratique, dans un souci de simplification, on peut considérer que la poutre est essen-
tiellement soumise à une charge concentrée en A′, venant du report des charges des
deux solives situées de part et d’autre. Le diagramme du moment fléchissant est alors
triangulaire sur la demi-travée 0,5′ (Fig. 7), et le tableau F.1.1 de [1] donne la valeur sui-
vante du facteur C1 :

C1 = 1,879 (21)

mais il ne propose pas de valeur du facteur C2 ; en fait l’Eurocode considère implicite-


ment dans le tableau en question que les distributions linéaires de moment fléchissant
résultent de moments d’extrémité appliqués au niveau du centre de gravité de la sec-
tion impliquant zG = 0, ce qui ne signifie pas pour autant que C2 soit nul. De toute façon,
pour la vérification au déversement concernée ici, la valeur de zG est relativement faible
dans le mesure où l’axe moyen des solives n’est que légèrement décalé de l’axe moyen
de la poutre primaire (Fig. 3) et que l’effort concentré apporté par les solives transite à
mi-hauteur des cornières boulonnées. L’effet du terme C2zG dans le relation (20) pourra
donc être raisonnablement négligé.

Entretoisement
latéral
PSd

0,5′ 0,5′

A A′
C

PSd ′/ 4

Fig. 7 – Diagramme de moment fléchissant adopté pour la poutre primaire

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 73

MIX-CAL 2-01

Une fois calculé Mcr , l’élancement relatif λLT peut être déterminé à son tour par la rela-
tion :

λLT = (βw Wpl fy / Mcr)0,5 (22)

où le facteur βw a déjà été explicité à l’occasion de la relation (17).

L’expression (19) du moment résistant de calcul au déversement Mb . Rd reste toujours


valable, en soulignant encore une fois que la section de référence à laquelle elle
s’applique est celle à mi-travée (section A′ de la figure 7).

Il va de soi que l’on procèderait de manière analogue à ce qui précède pour le cas d’une
poutre primaire qui serait entretoisée au tiers et aux deux-tiers de sa travée par la pré-
sence de deux solives ; le tiers de travée central serait évidemment le plus critique vis-à-
11
vis du déversement puisque soumis au plus grand moment fléchissant, de surcroît uni-
forme, amenant à utiliser dans (20) la valeur classique :

C1 = 1. (23)

4. – EXEMPLE D’APPLICATION

La configuration de maille de plancher est celle de la figure 1 où :

– les poutres primaires, de portée l ′ = 6 m, sont des profilés IPE 360 en acier S235 ;

– les poutres secondaires et la solive, de portée l = 9 m, sont des profilés IPE 300 en
acier S235 ;

– la tôle mince nervurée utilisée est de type HI-BOND 55, d’épaisseur 1 mm, en vue de
couler une dalle d’épaisseur totale 120 mm.

Les poteaux sont supposés ici suffisamment rigides en flexion (cet aspect sera revu au
paragraphe 5).

La rigidité des assemblages des poutres secondaires aux poteaux est supposée
atteindre la valeur mentionnée en (8), les poutres primaires étant supposées articulées
sur les poteaux.

4,1. – Vérification des poutres secondaires (type AB)

Les charges à prendre en compte dans les calculs sont les suivantes (ramenées à des
valeurs par mètre linéaire) :

– charges permanentes :

● poids du béton frais : G ′ = (0,12 – 0,055/2) × 3 × 25 = 6,94 kN/m

● poids de la tôle nervurée : G ″ = 0,15 × 3 = 0,45 kN/m

● poids du profilé en acier : G ′′′ = 0,42 kN/m ;

Construction Métallique, n° 2-2001


74 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

– charge variable (estimée pour la phase de construction) :

Q = 0,5 kN / m2 × 3 m = 1,5 kN/m.

La combinaison de ces charges conduit pour les vérifications à l’ELS et à l’ELU aux
valeurs de charges réparties suivantes :
(ELS)
pSd = 6,94 + 0,45 + 0,42 + 1,5 = 9,31 kN/m ;
(ELU)
p(Sd) = 1,35(6,94 + 0,45 + 0,42) + 1,5 × 1,5
= 12,80 kN/m.

12 Le moment résistant de calcul de la poutre IPE 300 (de classe 1 en flexion) est égal à :

Mpl . Rd = Wpl fy / γMo = 2 × 314 × 103 × 235/1,0 Nmm


= 147,6 kN m.

Il est intéressant de noter que si les liaisons en A et B étaient de simples articulations, la


vérification en résistance serait satisfaite puisque :

 /8 = 12,8 × 92/8 = 129,6 kNm  147,6 kNm,
(ELU) 2
pSd

mais la flèche (sous charges non pondérées) serait excessive :




(ELS) 4
5 pSd 5 9,3 × 94 × 1012
δmax = = ×
384 EI 384 2,1 × 105 × 8 356 × 104
= 45,3 mm,

soit environ 1/200e de la portée et donc bien supérieure aux 20 mm exigés vis-à-vis de
l’effet de mare (cf. paragraphe 1).

La prise en compte de la semi-rigidité des liaisons en A et B permet d’éviter l’étayage de


la poutre puisque, conformément à (11), on a alors :

Sd 
1 p(ELS) 4 2
δmax = = × 45,3 mm = 18,1 mm.
192 EI 5

Par ailleurs, la vérification en résistance flexionnelle de la poutre est très largement


satisfaite ; conformément à (10), on a le même moment fléchissant (au signe près) à mi-
travée et à chaque liaison :
Sd 
p(ELU) 2

M Sd
±
= = 12,8 × 92/16 = 64,8 kNm  147,6 kNm
16
(mais ce type de vérification deviendrait plus critique au stade définitif de construction,
non étudié dans la présente rubrique).

À noter que, par cohérence avec l’analyse globale élastique utilisée dans ce calcul à
l’ELU avec une rigidité initiale en rotation Sj des assemblages supposée rester
constante, il semblerait opportun de conférer à ces assemblages un moment résistant
de calcul supérieur (cf. figure 6.9.8 de [1]), de l’ordre de :

3
Mj, Rd  × 64,8 kNm = 97,2 kNm,
2

c’est-à-dire de l’ordre de 0,65 fois le moment plastique de calcul de la poutre, ce qui est
tout à fait réalisable avec des assemblages suffisamment boulonnés par platine ou par
cornières, du type de ceux représentés à la figure 2.

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 75

MIX-CAL 2-01

Enfin, il reste à vérifier la poutre vis-à-vis du risque de déversement. La semelle supé-


rieure étant maintenue par la tôle nervurée, la méthode exposée en 3.1 peut s’appli-
quer (en notant que seulement une longueur de 15 % de la travée, à chaque extrémité,
est sous flexion négative) :

 
1 64,8 0,5
nt = ×2× = 0,271
12 147,6

λ = /iz = 9 000/33,5 = 268,7

4 × 314 × 103
 Ah  =  5 380(300 – 10,7) 
2Wpl 0,5 0,5
u= = 0,90
s 13
 194 700 
5 380 0,5
x = 0,566 hs (A/It)0,5 = 0,566(300 – 10,7) = 27,2

λ/x = 9,88.

D’où :
0,271 × 0,90 × 268,7
λLT = = 35,3.
[1 + 9,882/40]0,5

L’élancement limite élastique valant :

λ1 = π(210 000/235)0,5 = 93,9,

l’élancement relatif au déversement est donc égal à :



λLT = 35,3/93,9 = 0,375,

donc est inférieur à 0,4. On est en droit de considérer qu’il n’y a pas de risque de déver-
sement.

4,2. – Vérification des poutres primaires (type AC)

La charge concentrée à mi-travée de la poutre primaire a pour valeur :

– à l’état limite de service :

P (ELS)
Sd = 9 × 9,31 = 83,8 kN ;

– à l’état limite ultime :

P (ELU)
Sd = 9 × 12,80 = 115,2 kN.

● Vérification de la flèche :

Avec le moment d’inertie I = 16 270 104 mm4 d’un IPE 360, on a :



′
(ELS) 3
PSd 83,8 × 103 × 63 × 109
δmax = = = 11,0 mm,
48EI 48 × 2,1 × 105 × 16 270 × 104

valeur qui est bien inférieure à min (′/250, 20 mm).

Construction Métallique, n° 2-2001


76 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

● Vérification de la résistance flexionnelle :

Le moment résistant de calcul de la poutre IPE 360 (de classe 1 en flexion) est égal à :

Mpl . Rd = 2 × 510 × 103 × 235/1,0 Nmm


= 239,7 kNm

Le moment fléchissant maximal MSd est bien inférieur à ce moment résistant :

PS(ELU)
d ′/4 = 115,2 × 6/4 = 172,8 kNm  239,7 kNm.

● Vérification vis-à-vis du déversement :


14 On applique la formule (20) avec la valeur (21) du facteur C1, en négligeant le terme en
C2 et avec :

Iz = 1 043 . 104 mm4 ;

Iw /Iz = hs2/4 = (360 – 12,7)2/4 = 30 154,3 mm2 ;

It = 362 000 mm4.

D’où la valeur du moment élastique critique (à mi-travée) :

1,879 × π2 × 2,1 × 1 043 × 109 3 0002 × 80 800 × 362 000


 
0,5
Mcr = 30 154,3 +
3 0002 π2 × 2,1 × 1 043 × 109

= 928 583 × 103 N mm = 928,6 kNm

et celle de l’élancement relatif :



λLT = (239,7/928,6)0,5 = 0,51.

Le moment résistant de calcul au déversement se détermine alors comme suit (confor-


mément à la clause 5.5.2 de [1]) :

 2] = 0,663
φLT = 0,5[1 + 0,21(0,51 – 0,2) + 0,51

1
χLT = = 0,920
 2 – 0,51
0,663(0,663  2)0,5

Mb. Rd = 0,920 × 239,7/1,10 = 200,5 kNm.

Le moment fléchissant maximal MSd = 172,8 kNm est donc inférieur à Mb.Rd . Le risque
de déversement est exclu.

5. – ÉTUDE DE L’EFFET DE FLEXIBILITÉ DES POTEAUX SUR LA VÉRIFICATION

AU DÉVERSEMENT DES POUTRES SECONDAIRES

L’étude que l’on présente maintenant est donnée à titre simplement indicatif pour mon-
trer comment il est possible d’introduire un effet de flexibilité des poteaux dans les cal-
culs d’une travée intermédiaire. Le modèle d’ossature est seulement à 3 travées avec

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 77

MIX-CAL 2-01

des assemblages supposés semi-rigides pour les deux poteaux intérieurs, tous les
autres assemblages étant articulés comme cela est indiqué à la figure 8. La travée cen-
trale est supposée chargée par le béton frais, les travées de rive ne supportant que les
poids propres des profilés et de la tôle ; on notera par p1 la charge uniforme par unité de
longueur appliquée aux travées de rive, et par p2 celle appliquée à la travée intérieure.
Le cas d’une travée de rive chargée par le béton frais serait également à vérifier, mais ce
n’est pas vraiment l’objet du présent paragraphe.

Ic , c P2
P1 P1
15
I, 
G I,  A B I,  H

Ic,  c

Fig. 8 – Modèle d’ossature avec poteaux flexibles

La hauteur et le moment d’inertie en flexion des poteaux sont notés respectivement c


et Ic .

En quelque sorte, le modèle de la figure 8 se veut plus élaboré que celui de la figure 4,
l’objectif étant d’avoir une idée sur l’assouplissement de la condition de déversement
pour la travée intérieure AB et sur l’importance du risque de déversement pour les tra-
vées de rive AG et BH.

En désignant au nœud A par θc la rotation du poteau (supposé évidemment continu),


par θj(AB) la rotation de l’assemblage semi-rigide à droite de A , et par θj(AG) celle de
l’assemblage semi-rigide à gauche, on dispose des relations suivantes (voir figure 9
pour les conventions de signe) :

+
θC

– θj
( AG )

A
G B

θ(jAB)

Fig. 9 – Conventions de signe pour les moments et rotations

Construction Métallique, n° 2-2001


78 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

● Relations de comportement élastique des poutres :

2 2EI
MAB = – p2 + (θc + θj(AB )) (24)
12 

2 3EI
MAG = p1 + (θc – θj(AG)) (25)
8 

● Relations de comportement élastique des assemblages :

MAB = – Sj θj(AB ) (26)


16 MAG = Sj θj(AG) (27)

● Équilibre en moments au nœud A et comportement élastique des poteaux :

6EIc
– (MAB + MAG) = θ (28)
c c

L’ensemble des relations (24) à (28) se ramène aisément au système des 3 équations ci-
après, en θc , θj(AB ) et θj(AG) :

 θc + 1 + Sj θj(AB ) – p2  = 0
 
3

 2EI 24EI

 Sj 3


 (AG)

 θc – 1 + 3EI θj + p1 24EI = 0 (29)


 5 + 6  Ic θ + 2θ(AB ) – 3θ(AG) + (1,5p – p )  = 0
 
3

 c I c j j 1 2
12EI

Pour poursuivre l’étude, il convient d’adopter des valeurs numériques. Avec l’exemple
traité en 4, on a déjà :

p1 = (0,42 + 0,45) × 1,35 = 1,175 kN/m ; p2 = 12,80 kN/m

=9m et Sj = 6EI / .

Pour les poteaux, on va considérer les valeurs :

c = 3 m et Ic = 2I correspondant à des poteaux relativement souples (par exemple en


profil HEA 300).

Le système (29) s’écrit alors :

 θc + 4θj(AB ) – 22,2 . 10 – 3 = 0

 θc – 3θj(AG) + 2,0 . 10 – 3 = 0

 41θc + 2θj(AB ) – 3θj(AG) – 38,2 . 10 – 3 = 0

Sa solution est :

θc = 0,74 . 10 – 3 rd, θj(AB ) = 5,37 . 10 – 3 rd et θj(AG) = 0,91 . 10 – 3 rd.

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 79

MIX-CAL 2-01

conduisant aux valeurs suivantes des moments exercés par le nœud A sur les poutres :

12,8 × 92 × 106 2 × 2,1 × 105 × 8 356 × 104
MAB = – + (0,74 + 5,37)103 Nmm
12 9 × 103

= – 62,6 kNm,

1,175 × 92 × 106 3 × 2,1 × 105 × 8 356 × 104
MAG = + (0,74 – 0,91)103 Nmm
8 9 × 103

= 10,9 kNm.

Le moment de flexion négatif pour la poutre AB n’est donc que très légèrement réduit,
17
passant de – 64,8 kNm à – 62,6 kNm par suite de l’effet de flexibilité des poteaux. La
vérification vis-à-vis du déversement est automatiquement satisfaite puisqu’elle l’était
avec des moments négatifs très légèrement plus élevés en 4.1.

En revanche, la rotation du poteau θc augmente légèrement le moment fléchissant


négatif à la valeur – MAG = – 10,9 kNm de la poutre de rive alors que ce même moment
avec poteaux rigides n’atteignait que la valeur :

2 1 1,175 × 92
– p1 =– = – 7,9 kNm.
8 1 + 3EI /(Sj ) 8 × 1,5

Toutefois, il est immédiat de contrôler le risque de déversement de cette poutre de rive


dont les moments fléchissants en travée, tels que définis à la figure 6b, sont les
suivants :

1 1,175 × 2,25 × 6,75


(2)
MSd = – 10,9 × + = + 6,2 kNm
4 2

1 –2
(3)
MSd = – 10,9 × + 1,175 × 9 = + 6,4 kNm
2 8

3 1,175 × 6,75 × 2,25


(4)
MSd = – 10,9 × + = + 0,7 kNm
4 2
(5)
MSd = – 10,9 kNm.

Le facteur nt de la relation (16) n’aurait alors que la valeur :

 12 × 147,6 
10,9 0,5
nt = = 0,08.

Cette valeur de nt étant nettement inférieure à celle trouvée en 4.1 pour la traverse inter-
médiaire de mêmes caractéristiques, le risque de déversement est exclu.

Remarque au sujet de la flèche (à l’ELS)

Si la flexibilité des poteaux n’a pas rendu plus critique le risque de déversement des tra-
verses, on peut penser qu’à l’ELS la flèche δmax de la traverse centrale va être supérieure
aux 18,1 mm trouvés en 4.1.

Pour calculer la nouvelle flèche, on peut utiliser toujours l’expression (7) dans laquelle il
convient de donner à θA , MAB et p les valeurs appropriées à l’ELS. En remarquant que

Construction Métallique, n° 2-2001


80 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

les valeurs p1(ELS) et p2(ELS) des charges de la figure 8 se déduisent pratiquement de p1(ELU)
et p2(ELU) par un facteur multiplicatif de 0,74, les solutions trouvées précédemment pour
θc , θj(AB) et MAB peuvent être utilisées sans avoir à résoudre de nouveau le système (29).
On a ainsi :

θA = (θc + θj(AB)) × 0,74 = (0,74 + 5,37) 10– 3 × 0,74 = 4,52 × 10– 3 rd ;

AB = M AB × 0,74 = – 62,6 × 0,74 = – 46,324 kNm.


M (ELS) (ELU)

D’où, d’après (7) :

δmax = 4,52 × 10– 3 × 4 500


18 1 – –
– [– 46,324 × 106 × 92 × 106/8 + 9,31 × 94 × 1012/128] = 19,9 mm.
2,1 × 105 × 8 356 × 104

On constate donc que cette flèche reste acceptable puisque satisfaisant encore le critère
δmax  min (/250,20 mm)

6. – VÉRIFICATION DE LA FIXATION DE LA TOLE PROFILÉE

On se propose de montrer, pour terminer cette rubrique, que les efforts susceptibles
d’être engendrés sur les fixations de la tôle à la semelle supérieure de la poutre secon-
daire (de type AB) restent tout à fait acceptables en comparaison de leurs résistances,
permettant d’assurer un maintien latéral continu et efficace de cette semelle.

Les fixations sont assurées par les connecteurs acier-béton devant fonctionner ultérieu-
rement au sein du plancher mixte. En préalable à l’analyse des efforts, il est nécessaire
d’évaluer les résistances de la tôle seule au droit de ces connecteurs.

Si l’on considère un goujon soudé à travers la tôle, deux résistances sont à envisager
essentiellement ici concernant la tôle, que l’on peut évaluer sur la base des tableaux 8.4
et 8.2 de [4] (les résistances du goujon proprement dit en cisaillement et traction étant
nettement supérieures à celles de la tôle) :

– la résistance de la tôle en pression diamétrale :

Fb.Rd = 2,5α fu dt / γM2, (30)

soit numériquement pour une tôle d’épaisseur t = 1 mm et en acier de résistance ultime


fu = 360 N/mm2, un goujon avec un diamètre de fût d = 19 mm, un coefficient de pince
α = 1,0 et un coefficient partiel de sécurité γM2 = 1,25 :

Fb . Rd = 2,5 × 360 × 19 × 1/125 N = 13,7 kN ;

– la résistance de la tôle à l’arrachement par traction dans l’axe du goujon :

Fp.Rd = 1,1 d0 t fu / γM2 (31)

où d0 est le diamètre du fût du goujon augmenté du collier de soudure (d0  1,10d ), soit
numériquement :

Fp.Rd = 1,1 × 1,1 × 19 × 1 × 360/1,25 N = 6,6 kN.

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 81

MIX-CAL 2-01

Si l’on considère maintenant un clou en acier au carbone, enfoncé au pistolet à car-


touche et utilisé pour la fixation d’une cornière nervurée à froid de type HILTI (avec 2
clous en pied), les résistances Fb.Rd et Fp.Rd deviennent (cf. Tableau 8.3 de [4]) :

Fb.Rd = 3,2fu dn t / γM2 (32)

où dn est le diamètre du clou, soit numériquement :

Fb.Rd = 3,2 × 360 × 4,5 × 1/1,25 N = 4,1 kN ;

Fp.Rd = dw t fu / γM2 (33)

où dw est le diamètre de la rondelle d’appui du clou, soit numériquement : 19


Fp.Rd = 15 × 1 × 360/1,25 N = 3,2 kN.

Ces résistances sont à multiplier par 2 pour une cornière HILTI.

Revenant alors au problème du maintien latéral de la semelle supérieure, on peut


(pour simplifier les calculs) considérer le cas très défavorable où la semelle inférieure
serait uniformément comprimée sur la longueur  de la poutre, le déplacement laté-
ral de cette semelle étant partiellement empêché par la flexion élastique de l’âme,
celle-ci entraînant une certaine distorsion de la section droite du profilé comme illus-
tré à la figure 10. La tôle profilée est évidemment supposée continue au passage du
profilé et l’on peut admettre, pour simplifier (et pour aller dans le sens de plus
grands efforts sur les connecteurs), que la rigidité flexionnelle de cette tôle est nette-
ment plus élevée que celle de l’âme (un calcul rapide montrerait ici qu’elle est 3 à 4
fois plus forte).

L’hypothèse d’une flexion négative uniforme de la poutre est évidemment sévère,


puisque l’on notera que l’utilisation d’assemblages dont la rigidité en rotation est don-
née par (8) conduit à n’avoir pratiquement que 15 % de la travée sous flexion négative à
chaque extrémité. La rigidité k de l’âme par unité de longueur de poutre (Fig. 10) est
égale à :

3
Et w
k= , (34)
4(1 – v 2)hs3

 bf

Tôle nervurée
k
N N
v0

v hs
tw

Vue en long

Vue en section

Fig. 10 – Flexion de la semelle inférieure

Construction Métallique, n° 2-2001


82 Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS

MIX-CAL 2-01

soit numériquement, avec un IPE 300 :

2,1 × 105 × 


7,13
k= = 0,8528 N/mm2.
 3
4 × 0,91 × 289,3

La charge critique de la semelle par flexion transversale est donnée par :

π2 k 4
Ncr = EIfz
2m2+
m2 π 4 EIfz  (35)

où m est le nombre de demi-ondes qui minimise le terme de droite [5]. Le moment


20 d’inertie de flexion de la semelle seule étant égal à :

3
10,7 × 150
Ifz = = 3 009 375 mm4,
12

on a :

k 4 0,8 528 × 


9 0004
= = 90,892
π 4 EI π4 × 2,1 × 105 × 3 009 375

et l’on vérifie aisément que le nombre entier m = 3 est celui minimisant (35). D’où :

2,1 × 105 × 3 009 375 × π2


9 + 
90,892
Ncr =

9 0002 9

= 1 470 695 N = 1 470,7 kN.

Soit v0 le défaut de rectitude de la semelle, généralement admis comme /500 lorsque


l’instabilité ne comporte qu’une demi-onde (m = 1) ; dans le cas présent (avec m = 3), il
semble normal de n’admettre qu’un défaut v0 = /1 500. L’accroissement de la déformée
sous l’action de l’effort axial maximal N étant :

N /Ncr
v – v0 = v0 , (36)
1 – N /Ncr

les efforts à reprendre au niveau de la fixation de la semelle supérieure (par unité de


longueur de poutre) sont alors les suivants :

– effort horizontal :

N /Ncr
F = k (v – v0) = k v0 ; (37)
1 – N /Ncr

– couple :

C = F hs . (38)

Numériquement, avec le moment maximal de – 64,8 kNm obtenu en 4.1, on obtient :

64,8 × 106
N= = 223 989 N = 224 kN,
289,3

N/ Ncr = 224/14 707 = 0,152

Construction Métallique, n° 2-2001


Rubrique TECHNIQUE ET APPLICATIONS 83

MIX-CAL 2-01

et donc :

9 000 0,152
F = 0,8528 × × = 0,917 N/mm.
1 500 1 – 0,152

Il est clair que la résistance offerte par la tôle en pression diamétrale au droit des
connecteurs est très supérieure à l’effort horizontal F. Ainsi, même en envisageant le cas
extrême d’une seule cornière HILTI tous les 800 mm (espacement maximal autorisé
pour les connecteurs) et en adoptant un coefficient de fonctionnement de 2 pour éviter
que la tôle ne se déforme trop, la résistance par unité de longueur aurait encore la
valeur :

FRd = 4 100/800 = 5,1 N/mm. 21


En ce qui concerne la reprise du couple C par unité de longueur, évalué en (38), en
adoptant un modèle de « pied de biche » s’appuyant à l’extrémité de la semelle, le
couple résistant à l’arrachement serait :

CRd = (Fp.Rd /2) × (bf /2)/800 = 3 300 × 75/800 = 309,4 N,

en envisageant la situation défavorable d’un seul goujon tous les 800 mm (toujours
avec un coefficient de fonctionnement de 2). Or le couple maximal exercé n’est jamais
que de :

C = 0,917 × 289,3 = 265,3 N.

En conclusion, on est en droit de considérer que la résistance offerte par la tôle fixée par
les connecteurs est assez nettement supérieure à l’effort de stabilisation exigé vis-à-vis
du déversement (le cas d’une semelle supérieure comprimée n’est même pas à envisa-
ger puisque F aurait pratiquement la même valeur et C serait nul).

RÉFÉRENCES

[1] Eurocode 3 et document d’application nationale : « Calcul des structures en acier » –


Partie 1-1 : «Règles générales et règles pour les bâtiments» – Norme AFNOR P22-311
– Déc. 1992.

[2] BS 5950 « Structural use of steelwork in building – Part 1 – Code of practice for
design in simple and continuous construction : hot rolled sections ». British Stan-
dards Institution, London, 1990.

[3] Eurocode 4 et document d’application nationale : « Conception et dimensionne-


ment des structures mixtes acier-béton » – Partie 1-1 : « Règles générales et règles
pour les bâtiments » – Norme AFNOR P22-391 – Sept. 1994.

[4] Eurocode 3 – Part 1.3 « Design of steel structures – Cold formed thin gauge mem-
bers and sheeting » – Revised version – April 1992.

[5] Timoshenko S.-P. – « Théorie de la stabilité élastique ». Dunod, Paris, 1966.

[6] Anderson D., Aribert J.-M., Bode H., Huber G., Jaspart J.-P., Kronenberger H.-J.
and Tschemmernegg F. – « Design of Composite Joints for Buildings ». E.C.C.S.
Document n° 109, 1999.

Construction Métallique, n° 2-2001

Vous aimerez peut-être aussi