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« La première fois qu’est évoquée la notion de fraternité dans la Bible, il est question de meurtre :

pourtant la fraternité est l’antidote de la violence. »


Avant de se concentrer sur la thèse et les notions qui la composent, il est intéressant de se
concentrer sur ce premier épisode biblique faisant appel à la notion de fraternité. Celle-ci est pour la
première fois évoquée dans le quatrième chapitre de la Genèse rapportant l’histoire d’Abel et Caïn.
Ce texte biblique nous raconte l’histoire de deux frères, Abel et Caïn, fils d’Adam et Ève, Abel
étant pasteur de petit bétail et Caïn travaillant le sol. Un jour, les frères vinrent faire des offrandes
au Seigneur, Abel offrit du petit bétail et leur graisse, tandis que Caïn proposa des fruits du sol.
Seule l’offrande d’Abel intéressa le Seigneur ce qui dérangeait beaucoup Caïn, celui-ci décida suite
à cet événement de tuer son frère Abel. Il est donc bel et bien question de meurtre et de fraternité
dans ce récit biblique. Suite à cela, des questions en tout genre remontent à la surface, des
incompréhensions naissent et le questionnement sur la relation à l’autre et dans ce récit plus
précisément les relations entre frères s’ouvrent.
Il est intéressant d’éclairer cette notion fraternité utilisée dans la thèse mais également
exploitée dans la Bible. Certes, la fraternité a comme première idée de représenter le lien de parenté
entre frères et sœurs mais le deuxième sens du mot est bien plus élargi ; camaraderie, entente,
solidarité, lien d’amitié qui unit deux ou plusieurs personnes qui ne sont pas de la même famille.
Aucun de ses termes ne possèdent de lien direct avec la violence ou encore le meurtre, la fraternité
propose une dimension affective dans son sens universel. On peut ensuite l’interpréter dans un
lexique plus religieux, Dieu représentant notre père à tous, un point commun entre les hommes,
nous sommes tous frères d’une certaine manière, nos liens se caractérisent par la notion de
fraternité. La fraternité est vue comme un idéal, comme en France par exemple où la république a
pour principe « liberté, égalité et fraternité ». La fraternité est un concept universel défendu par de
nombreuses disciplines ; en droit, en morale, en religion, dans le christianisme, l’Islam, le judaïsme
et les fraternités interreligieuses ainsi qu’en philosophie et j’en passe. Cela pose question, comment
une notion aussi défendue peut-elle être liée au meurtre et faire appel à la violence lors de sa
première apparition dans la Bible ? La Bible fait-elle référence au premier, deuxième ou au sens
religieux du terme ?
Pour une meilleure compréhension des choses, il est intéressant de séparer la fraternité en
deux composantes : la première est la fraternité créée par la fratrie et la seconde par choix, par
nomination d’une personne qu’on estime « notre frère », « notre sœur » ou de façon plus élargie
« notre communauté ». N’importe quelle famille se composant de plusieurs enfants, à l’heure
d’aujourd’hui un peu plus complexe ; frères et sœurs biologiques, demi-frères et sœurs, frères et
sœurs adoptives, peu importe le lien de parenté partagé par les enfants, biologique ou légal, ceux-ci
forment qu’ils le veuillent ou non, une fratrie. La fratrie représente l’ensemble des frères et sœurs
d’une même famille recomposée ou non. Si vous avez des frères et sœurs vous comprendrez
certainement qu’au sein d’une fratrie tout n’est pas toujours facile ; conflit, jalousie et concurrence
sont souvent au rendez-vous. Ces mots ne sont certes pas synonymes de fraternité. Comme le dit si
bien Albert Donval (2005) « La fratrie est un fait, la fraternité est à faire. La fratrie est imposée, la
fraternité est une création ». Chaque fratrie ne découle donc pas sur une fraternité, il s’agit d’un
choix, la comparaison peut se faire avec le père et sa paternité, la mère et sa maternité et le couple
et sa conjugalité, ce n’est pas un fait en soit, il faut le vouloir et se donner les moyens d’y arriver.
Le plus compliqué, comme dans le cas du couple, régit dans le fait que les personnes ne sont pas
seules face à leurs choix, mais il s’agit d’une fratrie. Il s’agit certes d’une égalité féconde mais
d’une différence de place, de sexe, de personnalité, de santé, de projet futur et la fratrie pour qu’elle
forme une fraternité doit intégrer ces différences, les nourrir.
Partageant pourtant le même sang et la même éducation, les croyances, les pensées et les
opinions peuvent fortement différés, cela ne veut pas dire que la fraternité au sein d’une fratrie est
impossible parce que celle-ci se nourrit des désaccords et des disputes pour ensuite se renforcer

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même si dans certains cas nous avons à faire à « une mauvaise fratrie » comme la surnomme
Philippe Caillé. Il s’agit de fratries où la concurrence et la compétition prennent un rythme effréné,
où l’assouvissement de certains désirs dépasse tout le reste. Les fratries évoquées dans la
mythologie n’en font pas exception. Dans l’histoire de Caïn et Abel, il se ressent une jalousie
importante, celle-ci peut venir de la place occupée dans la famille, Abel étant le petit dernier,
ensuite du métier occupé par les frères, Abel pasteur de petit bétail et Caïn s’occupant de la terre, un
travail plus dur et dépendant des saisons. La jalousie se renforce lors des offrandes, la fratrie est en
compétition dans l’optique de plaire au Seigneur et là c’est Abel qui « gagne » ou en tout cas, Caïn
a l’impression de perdre. Dans les premiers versets du chapitre 4 de la Genèse nous avons pourtant
l’impression d’être en contact avec une fratrie stable, à priori normale mais on se rend vite compte
que la jalousie est dissimulée derrière ces convenances et qu’à la moindre situation sensible et dans
ce cas-ci pas prometteuse pour Caïn, la situation débouchera sur un conflit irréversible causé
pourtant par un enjeu qu’on pourrait qualifier de minime. Le conflit irréversible mène dans ce cas-ci
au meurtre d’Abel par son frère Caïn. Dit comme ça, cela parait invraisemblable, un fait totalement
isolé. Mais qu’en est-il alors de Romulus et Rémus ? Du Fils prodigue ? De Joseph vendu par ses
frères ? Du droit d’aînesse vendu par Ésaü pour Jacob ? Les mythes de la Genèse font état de
rivalités entre frères, de conflits au sein d’une fratrie, tout comme le récit légendaire relatant de la
fondation de Rome. Cela doit bien vouloir dire que ces faits existent et qu’ils ne sont pas si isolés
que ça. Renseignons-nous dans l’actualité.
Il n’est pas compliqué de trouver un article de presse récent traitant de meurtre au sein d’une
fratrie « Fratricide à Uccle : Olivier de Bock est condamné à 17 ans de prison pour le meurtre de
son frère » (2019). Nous ne sommes plus dans les mythes et pourtant la fratrie ne s’avère pas être
un antidote à la violence. Mais qu’en est-il de la fraternité ? En prenant connaissance de plusieurs
articles, on se rend compte qu’avant le meurtre les deux frères n’avaient pas de gros problèmes
d’entente, on n’aurait probablement pas pu les qualifier d’une « mauvaise fratrie ». On ressent tout
de même une certaine compétition au niveau de l’argent, Olivier ne gérant pas à merveille ses
affaires, son frère Yves avait pris la décision de se retirer en tant qu’actionnaire des sociétés de son
frère suite à une mauvaise gestion. Il est ressorti des enquêtes qu’Olivier était dans une situation
financière délicate, il vivait au-dessus de ses moyens et peu avant le meurtre, une de ses sociétés
avait été déclarée en faillite. Pour conserver son train de vie, Olivier demandait de l’argent à sa
mère qui s’est avéré être une partie de l’héritage du père décédé. Yves avait pris connaissance des
donations non-identifiées de sa mère, celles-ci étant plutôt importantes. En effet la mère avait
donné plusieurs centaines de milliers d’euros à Olivier. Yves, estimant que son frère dilapidait
l’héritage de son père, avait comme projet de tenir une discussion avec son cadet, il avait fait part
de son intention à sa mère. Dans tous les cas, Yves n’avait pas l’intention d’abandonner son frère, la
discussion devait être constructive et en ce qui concerne l’actionnariat, Yves s’est uniquement retiré
parce que son frère gérait mal ses affaires. La dernière chose que l’on sait c’est qu’Yves a été
retrouvé tué. Après 5 ans de procès, son frère, Oliver de Bock est accusé de meurtre, celui-ci n’a
pourtant jamais avoué son crime mais beaucoup d’éléments laissent penser qu’il est bien
responsable de la mort de son frère, ADN, circonstances de l’héritage et le fait qu’Yves a pour la
dernière fois été vu au domicile de son cadet.
Nombreux sont les meurtres en ce genre, fratricide comme on les appelle, les mythes de la
Genèse ne sont pas les seuls à y faire allusion. Dans tous les cas de fratricide exposés ici et existant
à l’extérieur, une fratrie est forcément impliquée. La question maintenant se situe au niveau de la
notion de fraternité car comme dit précédemment, fratrie n’est pas un synonyme de fraternité. Le
lien moral et affectueux qui peut découler d’une fratrie n’est pas une fin en soi, celui-ci peut tout à
fait ne jamais existé ou uniquement temporairement ou encore de façon fragile. Dans le cas de
fratricide ou de meurtre au sein d’une fratrie où en est cette notion de fraternité ?

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Le fratricide à Uccle présente des points communs avec l’histoire d’Abel et Caïn sauf que
dans le cas actuel, les offrandes au Seigneur sont en réalité l’héritage. L’héritage est le sujet le plus
sensible qu’une famille puisse aborder. Premièrement car l’héritage est précédé par le décès d’un
être cher, le deuil est très personnel, il se vit différemment par les membres de la famille. Ensuite, il
est question d’argent, de propriétés, d’œuvre d’art, d’objet avec une valeur sentimentale et ces
éléments sont distribués entre les différents héritiers. Il s’agit certes d’une situation assez radicale
mais n’en faisons pas une généralité, toutes fratries ne commettent pas un meurtre suite à un
héritage mais les situations restent souvent délicates. Il est tentant de penser que des fratries ayant
créé leur propre fraternité règlent les problèmes d’héritage sans utiliser aucune forme de violence
qu’il soit.
À mi-parcours, il est temps de faire le point et de se remettre les idées en place. Fratrie n’est
pas un synonyme de fraternité. Certaines fratries arrivent à créer un lien moral, affectueux, ils
créent leur fraternité, d’autres fratries ont un lien affectueux d’une échelle moindre, un lien plus
sensible, cela ne veut pas dire qu’il est inexistant mais uniquement qu’une situation délicate,
comme un héritage, peut mener à un conflit irréversible et parfois au meurtre, au fratricide. La
dernière possibilité est que la fratrie reste une simple fratrie, partageant parfois uniquement le sang
ou encore un parent, considérant les différences trop importantes, les pensées incompatibles, il
s’agit de « mauvaises fratries », les situations y sont souvent sensibles, le dialogue n’est pas fort
ouvert entre les personnes de ce type de fratrie, des souvenirs, des jalousies refont surface à chaque
moment critique, ce qui a tendance à mener à la violence.
La relation à l’autre n’est pas affaire facile, au sein d’une fratrie malgré la même parenté, de
simples différences peuvent avoir de grandes conséquences, il est important qu’il y ait des règles en
son sein, des cadres, des parents, il n’est pas donné à tout le monde d’élever un enfant mais faire
coexister des enfants sous le même toit, avec des places différentes, des maladies, des passions
différentes… c’est encore plus difficile. Certains parents se retourneraient dans leur tombe s’ils
apprenaient le nombre de dispute que peut causer un héritage même quand l’éducation de la fratrie
était un succès et que la fraternité avait pointé le bout de son nez.
Comme nous l’avons vu précédemment la fratrie n’est pas l’antidote de la violence, la
Genèse et les journaux en regorgent d’exemples. Il n’est pas rare que la violence se glisse au sein de
la famille et que deux frères deviennent des « frères ennemis » ou encore qu’un héritage ou des
offrandes pousse un membre de la fratrie à commettre un meurtre. Mais comment des frères et
sœurs peuvent venir à se battre, se détester, se tuer ? Le problème réside dans le fait qu’au sein
d’une fratrie, les enfants ou même les adultes veulent les mêmes choses. Mettez deux frères dans
une même pièce remplie de jouets, vous pouvez être surs que ceux-ci vont vouloir le même et donc
forcément se disputer à ce sujet. Nous sommes des êtres mimétiques, nous adoptons un
comportement mimétique de nature et au sein d’une fratrie ces types de comportement sont encore
plus importants. Dans les exemples cités précédemment, ce phénomène se ressent, Romulus et
Rémus désire tous deux une ville, Abel et Caïn font tous deux des offrandes au seigneur, dans le cas
plus actuel, il est question d’héritage. Au sein d’une fratrie, il y a malheureusement toujours des
nouveaux objets à convoiter. La fraternité naturelle existe pourtant bel et bien, il doit donc y avoir
un moyen de sortir des rivalités mimétiques. Comme sur tous les terrains de jeu, la présence
d’arbitres est indispensable et dans le cas de la fratrie, les arbitres sont les parents. La présence des
parents ou tuteurs, leur autorité et l’éducation qu’ils offrent à la fratrie sont primordiales et
directement dépendantes de la présence ou non d’une fraternité naturelle obtenue par la suite. Tous
les enfants membres d’une fratrie ont chacun l’impression « que leur frère est préféré », « que leur
sœur est pourri-gâtée »… ce sont des sentiments fréquents, les enfants font ensuite tout pour attirer
l’attention de leurs parents, et étant jeunes, se vengent sur leur frère et sœur, la violence fait souvent
son apparition dans ce genre de situation liée à la jalousie la plupart du temps. C’est dans ces
situations qu’un parent ou une personne concernée doit intervenir, régler l’histoire et empêcher que

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celle-ci se reproduise sous une autre forme, les enfants doivent construire d’une dispute pour
évoluer vers une forme fraternité.
Pour conclure cette première partie, il faudrait établir une petite modification dans la thèse,
« la première fois qu’est évoquée la notion de fratrie dans la Bible, il est question de meurtre : la
fratrie n’est pourtant pas l’antidote de la violence ». Nous ne connaissons pas vraiment la relation
partagée par Abel et Caïn dans le texte, mais à première vue il n’est pas question d’un lien
affectueux fort, ni d’une relation parent et enfant très équilibré, on a l’impression que le rôle de la
maman est uniquement d’enfanter, soit de mettre au monde, mais la maternité ce n’est pas ça, si
maternité et paternité sont absentes, la création de la fraternité au sein de la fratrie prend un mauvais
départ. Dans le cas de Romulus et Rémus, les peintures représentent toutes, les deux nouveaux nés
en dessous d’une louve, il ne s’agit pas non plus de la représentation d’un cadre optimal. Les
enfants sont seuls face à leurs différences. La fraternité est déjà assez difficile à atteindre dans des
fratries équilibrées et bien entourées, alors laisser deux jeunes garçons, deux frères, grandir
ensemble, sans aucune règle ni limite peut s’avérer très compliqué surtout quand ceux-ci traversent
une mauvaise passe. L’importance qu’ils portent à l’offrande ou à la fondation de leur ville, peut se
comparer à celle de l’héritage. Éviter un conflit ou un désaccord dans ce genre de situation est très
compliqué, dans la situation d’Abel et Caïn, la fin est atroce, cruelle mais pas étonnante…
Dans la Genèse et les exemples évoqués plus tôt, la référence à la fratrie est immédiate,
uniquement le premier sens de fraternité est utilisé mais qu’en est-il du deuxième sens et du sens
religieux ?
La Genèse traite à de nombreuses reprises de la fraternité, le mot « frère » est très présent
dans cette partie de la Bible, mais ce n’est pas la seule. L’Exode nous décrit également une fratrie à
travers Moïse et Aaron, mais on se rendra vite compte que ce récit biblique est bien différent des
précédents. Au fur et à mesure de la lecture de la Torah, la notion de fraternité et sa relation avec les
hommes évolue. Dans la Genèse, il était plutôt question de fratrie que de fraternité car les frères
sont tous des frères biologiques, de plus les relations entre frères se limitaient souvent à des conflits,
une compétition, de la jalousie pour terminer par un meurtre. L’Exode et les trois livres suivants de
la Torah ne se limitent pas aux préoccupations biologiques, ils vont plus loin. En effet, dès le début
de l’Exode il est question de fraternité, surtout au sein d’un même peuple, d’une même
communauté, la fraternité biologique est quant à elle présentée bien plus tard (6,20). La Genèse
traite du concept sociologique du terme fraternité tandis que l’Exode fait référence au concept
moral, à des frères qui se choisissent dans le but de créer une vie communautaire par exemple. Il est
question de plusieurs fraternités, la première au niveau du peuple et la seconde entre Moïse et
Aaron, représentant d’abord une fratrie, celle-ci différente des précédentes. En effet, ils se
rencontrent à l’âge adulte et ont tous les deux déjà une famille. Malgré le fait qu’ils n’aient pas de
passé commun et que leur parcours commun soit nourri de jugement, colère et désaccords, ils
arrivent tout de même à être unis, ils dépassent l’envie de tuer l’autre qui était tant présente dans la
Genèse.
En effet, la relation entre Moïse et Aaron est différente, Yhwh joue un rôle de cadre,
d’arbitre primordial au sein de la fratrie, celui-ci permet la rencontre entre les frères mais stabilise
également la fratrie. Chaque frère a un rôle bien précis et distinct et c’est dans le respect de la
différence de fonction sans pour autant s’y enfermer, qu’ils peuvent atteindre la fraternité naturelle.
Leurs différences sont nourries et leur place réaffirmée, ce qui permet à un lien moral de se créer.
La seconde idée de fraternité présentée dans la suite de la Torah est uniquement créée grâce à la
fratrie. En effet, nous découvrons que la collaboration entre les deux frères les ouvrent à une
nouvelle forme de fraternité, celle qui unit les protagonistes à leur peuple sur le chemin de la
libération. Le lien de sang est remplacé par l’alliance, permettant la naissance d’une fraternité
universelle et le respect des rôles permettant sa pérennité.

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La fraternité peut se voir comme un idéal dépendant des actions humaines, du vivre
ensemble qui doit se développer dans un cadre propice nécessitant un certain savoir-vivre ou un
code de conduite-sociale de la part des candidats. La fraternité nous invite à adopter un certain
comportement, à dépasser certains à priori et certes l’invitation ne fait allusion à aucune sorte de
violence. Bien au contraire, quand plusieurs personnes ont réussi à développer leur fraternité
comme dans le cas de Moïse et Aaron, cela veut dire qu’ils sont passés au-dessus des sentiments de
haine, d’hostilité et de jalousie pour laisser place à la solidarité, l’égalité, la charité et le partage.
Présentée de cette façon, la fraternité est l’antidote à la violence. Deux personnes qui ont réussi à
passer au-dessus de leurs différences, intérêts et passions personnels, partageant une relation
spéciale n’ont aucune raison d’en venir à une certaine forme de violence. La fraternité invite
l’homme à échanger, se dévouer pour les autres en ayant la certitude que quelqu’un d’autre le fera
pour lui. La fraternité est un idéal, très difficile à atteindre. Nous ne serons très probablement pas
témoin d’une fraternité mondiale. On peut ici laisser sous-entendre que le concept de fraternité est
un antidote à la violence mais malheureusement ce concept est plus un idéal qu’une réalité. La
relation à l’autre est quelque chose de très complexe, assez fragile, construire un vrai lien fraternel
peut rester un objectif mais même une fois atteint, celui-ci demande de l’assiduité.
En conclusion, en ayant l’arrogance de modifier la thèse, celle-ci serait tournée de la sorte :
« La première fois qu’est évoquée la notion de fratrie dans la Bible, il est question de meurtre :
pourtant le concept de fraternité est contraire à la violence ». En effet, il s’est avéré deux choses :
premièrement, qu’au travers de la Genèse et plus précisément dans le quatrième chapitre de celle-ci,
il était bien plus question de fratrie que de fraternité, deuxièmement, cette notion de fraternité n’est
dans aucune situation une fin en soi mais plutôt une création et un entretien constant, difficile à
mettre en place et surtout à conserver, c’est pour cela qu’il est davantage question de concept que
de réalité, sans pour autant remettre en doute que la fraternité soit un antidote à la violence. Cette
thèse met en évidence la complexité que présentent les deux termes de fratrie et fraternité, leur lien
avec la violence et d’une certaine manière la complexité de la relation à l’autre. Des notions
connues de tous faisant partie de nos vies courantes et de notre patrimoine s’avèrent être bien moins
maitrisées qu’imaginé pourtant la compréhension des concepts et l’apprentissage des erreurs du
passé sont primordiales pour atteindre la fraternité naturelle et sait-on jamais une future fraternité
mondiale.

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Références bibliographiques :

Caillé Pierre, Fratries sans fraternité. Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de
réseaux, Bruxelles, De Boek, 2004, 32(1), 11-22.
DONVAL Albert, De la fratrie à la fraternité, La Croix, 2005.
Fratricide à Uccle : Olivier de Bock est condamné à 17 ans de prison pour le meurtre de son frère,
Sudinfo, 2019.
LICHTERT Claude, De la fratrie à la fraternité. Avec Moïse et Aaron, les frères amis (coll. Connaître
la Bible 60), Bruxelles, Lumen vitae, 2010, 80 p.
LICHTERT Claude, Lectures Bibliques (LTECO2201), 2019.

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