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Tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes pour le jeune Candide, docile et
ingénu. Le baron de Thunder-ten-tronckh, l’« un des plus puissants seigneurs de la Vestphalie », et
probablement son oncle, l’a accueilli dans un château protégé et clos, qui fait rempart à toute
violence extérieure. Candide est secrètement amoureux de Cunégonde, la fille du baron et de la
baronne. La félicité est absolue, jusqu’au drame : Candide et Cunégonde sont surpris par le baron
dans leurs ébats, Candide est chassé du paradis, et l’aventure commence. Candide n’aura de cesse
de retrouver Cunégonde, objet d’une quête qui le révélera peu à peu à lui-même.
À travers les yeux de Candide, le château protecteur renvoie à un âge d’or où l’abondance et
l’équilibre apparents dispensent d’une réflexion plus aboutie que la philosophie de Pangloss,
précepteur de la maison. Ce paradis se révèle cependant artificiel : l’exclusion du héros ouvre la
boîte de Pandore, et l’idéologie qui animait cet univers ne résiste pas longtemps aux tempêtes.
Voltaire inscrit d’emblée le conte dans une référence commune qu’il va s’appliquer à déconstruire
à travers un voyage où le héros se trouve successivement confronté à tous les malheurs du
monde, puis aux turpitudes de l’âme humaine.
Chapitre II
Seul et désemparé, Candide rencontre dans la ville voisine de Valdberghoff-trarbk-dikdorff, à la
porte d’un cabaret, deux recruteurs de l’armée du roi des Bulgares qui l’enrôlent aussitôt, au seul
motif que Candide mesure « cinq pieds cinq pouces de haut ». Après des débuts difficiles, Candide,
peu au fait des usages militaires, déserte avant d’être rattrapé et conduit au cachot. Un choix lui
est offert : « être fustigé trente-six fois par tout le régiment, ou recevoir à la fois douze balles de
plomb dans la cervelle ». Candide choisit le fouet, puis les balles, avant d’être sauvé par le roi des
Bulgares, sensible à ce jeune métaphysicien « fort ignorant des choses de ce monde ».
Chapitre IV
Le « gueux tout couvert de pustules » se révèle être Pangloss, à bout de forces, malade de la vérole
et dans l’incapacité de se soigner. Il informe Candide de la destruction du château après son
départ, de la mort du baron, de la baronne, de leur fils, et, surtout, de Cunégonde. Le paradis n’est
plus. Candide s’interroge : « Ah ! Meilleur des mondes, où êtes-vous ? », tout en restant fidèle aux
certitudes de Pangloss qui s’évertue à justifier jusqu’à la vérole qui le tue. Jacques, le bon
anabaptiste, parvient à guérir Pangloss et le prend avec Candide à son service.
Ils embarquent ensemble pour Lisbonne et affrontent une terrible tempête à l’approche du port.
L’optimisme du philosophe est confronté à l’épreuve des faits. Les personnages s’obstinent
cependant, ce n’est que le début du voyage…
Chapitre VI
Afin d’empêcher les tremblements de terre, des hommes sont brûlés pour des raisons absurdes ;
Pangloss et Candide sont proches de subir un sort identique : Pangloss est pendu, et Candide,
fouetté. Cette cérémonie n’empêche en rien un nouveau séisme, le soir même. Une parodie de
raisonnement tente d’enchaîner les liens de cause à effet. Mais Candide s’interroge : dans un
grand désarroi, il voit s’ébranler ses certitudes…
Chapitre VIII
Cunégonde se lance dans un récit aux nombreuses péripéties : suite à l’attaque du château, elle
tombe sous le joug d’un capitaine bulgare qui la revend à un trafiquant, Don Issachar. Celui-ci la
partage depuis six mois avec le grand inquisiteur. Ces malheurs en série la conduisent à remettre
en cause la philosophie de Pangloss.
Chapitre IX
Don Issachar n’apprécie guère la présence de Candide et la perspective d’un second rival : il le
menace d’un poignard ; Candide brandit une épée et abat son adversaire. L’inquisiteur surgit ;
Candide commence à raisonner, l’épée à la main et tue l’inquisiteur. Pour une nature si peu
belliqueuse, c’est là un changement radical. Candide s’explique : « Ma belle demoiselle, […] quand
on est amoureux, jaloux et fouetté par l’Inquisition, on ne se connaît plus ». La vieille les exhorte à
l’action et ils s’éloignent sur des chevaux andalous avant l’arrivée de la Sainte-Hermandad, la
police régionale. Ils gagnent alors la ville d’Avacena dans les montagnes de la Sierra Morena.
Chapitre X
Les dernières richesses de Cunégonde ont été volées ; le trio est dans l’embarras : « Quel parti
prendre ? », s’interroge Candide. Ils vendent l’un des trois chevaux et arrivent à Cadix. Une flotte
s’apprête à partir pour le Paraguay afin de combattre des révérends pères jésuites : Candide
convainc le général de ses compétences militaires et devient capitaine d’un équipage. Cunégonde,
la vieille, et deux valets embarquent, avec deux chevaux, pour le Nouveau Monde, avec l’espoir
que celui-là sera meilleur. L’espace est clos ; le temps est alors au récit : la vieille raconte son
histoire.
Chapitre XII
La vieille poursuit un récit qui propose une vision extrêmement sombre de la nature humaine. Elle
survit à la peste et, vendue comme esclave, passe, au fil des transactions, de Tunis à Tripoli,
d’Alexandrie à Smyrne, de Constantinople à Moscou. Elle y perd une fesse en pleine famine,
sacrifiée pour satisfaire les soldats turcs. Devenue la servante de Don Issachar, elle rencontre alors
Cunégonde.
Trahison, anthropophagie, suicide sont abordés dans ce périple vers le Nouveau Monde : autant
de questions débattues au XVIII e siècle. L’ironie de la narration favorise la construction d’une
distance critique.
Chapitre XIII
L’histoire de la vieille fait école, et le vaisseau avance au fil du récit des voyageurs. Ils arrivent
finalement à Buenos Aires, et y rencontrent le gouverneur qui s’empresse de demander
Cunégonde en mariage. La vieille encourage cette dernière à accepter « d’épouser monsieur le
gouverneur et de faire la fortune de monsieur le capitaine Candide ». Mais le passé les rattrape, et
ils risquent la mort pour avoir tué le grand inquisiteur. Candide fuit, Cunégonde reste ; leur chemin
se sépare pour la deuxième fois.
Chapitre XIV
Candide est accompagné dans sa fuite par un valet nommé Cacambo. « Il avait été enfant de
chœur, sacristain, matelot, moine, facteur, soldat, laquais » : voilà un compagnon de choix pour un
Candide en pleine évolution. Homme d’action plein d’allant, il encourage son maître : « quand on
n’a pas son compte dans un monde, on le trouve dans un autre ». Au Paraguay, chez les jésuites,
Candide reconnaît dans le commandant le frère de Cunégonde, le fils du baron, miraculeusement
rescapé du massacre du château.
Chapitre XV
Le fils du baron raconte – C’est la troisième fois pour le lecteur – l’invasion du château par l’armée
bulgare et comment, tenu pour mort, il fut sauvé par un jésuite. Les retrouvailles se déroulent sous
les meilleurs auspices, le baron qualifiant Candide de « frère » et de « sauveur ». Les relations se
dégradent cependant lorsque Candide fait part de son souhait d’épouser Cunégonde : fidèle aux
valeurs familiales, le baron refuse catégoriquement, car Candide n’a pas les quartiers de noblesse
requis. Candide tente d’argumenter et de défendre l’attachement de Cunégonde à son égard,
mais, devant l’obstination du baron, il n’a d’autre choix que de le tuer. Habillés en jésuites,
Candide et Cacambo parviennent à s’enfuir.
Chapitre XVII
L’Eldorado est découvert par Candide et Cacambo au hasard de ce périple en Amérique du Sud.
Les expériences douloureuses du Nouveau Monde ont convaincu Cacambo de retourner en
Europe, mais les deux protagonistes n’ont d’autres choix que de poursuivre leur route, et
s’embarquent à l’aventure dans une petite barque en se recommandant à la Providence. Le canot
finit par se fracasser contre des écueils qui ouvrent la porte de l’Eldorado : « C’est probablement le
pays où tout va bien ; car il faut absolument qu’il y en ait un de cette espèce », espère Candide.
Chapitre XXI
Aux abords des côtes françaises, Candide expose son projet : rejoindre Venise depuis Bordeaux.
Nulle curiosité de sa part après un mois passé dans l’Eldorado, d’autant que les commentaires de
Martin sur les Français sont sans appel. Candide veut atteindre l’Italie pour y attendre Cunégonde ;
Martin accepte de le suivre pour son argent. La fin du voyage est l’occasion de questions de
Candide à Martin sur la pérennité du mal et sur la possibilité du bien. Son raisonnement s’affine : il
est question en dernier lieu du libre arbitre.
Chapitre XXIII
Sur fond d’explication de la guerre qui oppose à grands frais les armées anglaise et française pour
une terre canadienne fort éloignée, l’arrivée à Portsmouth coïncide avec l’exécution d’un amiral
qui bouleverse Candide : l’homme périt de n’avoir pas provoqué assez de morts en affrontant
l’ennemi. Candide refuse de descendre du navire et arrange au plus vite un départ pour Venise,
toujours conduit par le désir de retrouver Cunégonde.
Chapitre XXIV
Cacambo et Cunégonde ne sont pas au rendez-vous vénitien, et Candide sombre dans la
mélancolie, prêt à succomber au pessimisme de Martin : « Que vous avez raison, mon cher Martin !
Tout n’est qu’illusion et calamité. » Les idées sombres ne résistent pas, cependant, à la vision
plaisante d’un moine théatin, frère Giroflée, avec une fille à son bras. Celle-ci se révèle être
Paquette, la servante du château de Thunder-ten-tronckh. Derrière l’image du couple amoureux,
se cache la sordide histoire d’un moine défroqué et d’une misérable prostituée, ravagée par la
maladie. Candide s’obstine toutefois à croire à l’amour et continue à attendre un improbable
retour de Cunégonde.
Chapitre XXVII
En route vers Constantinople, Cacambo décrit la situation de Cunégonde : esclave dans la maison
d’un ancien souverain sur le rivage de la Propontide, « chez un prince qui a très peu d’écuelles », «
elle est devenue horriblement laide ». Candide se soucie peu de cette évolution, mais s’interroge
sur l’usage de la fortune, dilapidée selon un schéma désormais classique dans le conte : rachat de
la personne humaine, piraterie, errance, esclavage. Cacambo est racheté par Candide, et le petit
groupe retrouve au hasard de la traversée le frère de Cunégonde et Pangloss, devenus tous deux
galériens. Les derniers diamants de l’Eldorado libèrent les deux malheureux, et tous repartent vers
la Turquie pour délivrer Cunégonde.
Chapitre XXVIII
Le baron et Pangloss racontent leur histoire : l’un, réchappé du coup d’épée de Candide, devenu
aumônier avant d’être condamné aux galères ; l’autre, pendu, disséqué, un temps laquais, avant
d’être à son tour condamné aux galères. Devant ces injustices nées de l’intolérance et de la
superstition, Candide, à présent capable de discernement, interroge Pangloss : « avez-vous
toujours pensé que tout allait le mieux du monde ? ». Pangloss est formel : son jugement n’a pas
évolué.
Chapitre XXIX
Narration des aventures, raisonnement sur les effets et les causes, interrogation sur le mal moral
et sur le mal physique, sur la liberté et la nécessité, portent les protagonistes jusqu’à la maison du
prince de Transylvanie, où ils retrouvent, enfin, Cunégonde et la vieille. Cacambo avait dit juste :
Cunégonde est bien laide et Candide s’en émeut avec élégance. Le fils du baron n’a pas changé : il
refuse toujours radicalement une possible union entre Cunégonde et Candide, malgré les larmes
de sa sœur, et la colère de Candide devant tant d’absurdité et d’ingratitude. L’apparence de
Cunégonde détourne désormais quiconque de tout désir d’union.
Chapitre XXX : En Orient, le jardin
Attaché à une domination aristocratique qui n’a plus cours, le baron s’avère incapable d’évoluer et
s’exclut de la nouvelle communauté. Celle-ci, privée des richesses de l’Eldorado, doit trouver en
elle-même les ressources pour développer, non sans mal, la modeste métairie dans laquelle elle
s’est installée. Cacambo en a assez de cultiver les légumes ; le caractère de Cunégonde se dégrade
; Pangloss souffre de ne pouvoir briller. Seul, Martin, avec son fatalisme habituel, s’accommode de
la situation. Tous philosophent cependant, alors que Paquette et le frère Giroflée les rejoignent. La
devise d’un bon vieillard turc donne sens à ce jardin comme promesse de vie : « le travail éloigne
de nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin. ». Candide la fait sienne et tous l’acceptent
: « chacun se mit à exercer ses talents » et la petite société prend sens.
Ce jardin métaphorique constitue le point d’aboutissement d’un périple qui, à partir d’un lieu clos
et hiérarchisé, a conduit à parcourir un monde extérieur, hanté par le mal et la violence, et un
monde intérieur plus trouble encore, permettant à Candide de se révéler. L’Eldorado est
déterminant puisqu’il propose l’espoir d’un autre système social, appuyé sur le consentement
collectif. Le jardin, par la place laissée à chacun et la reconnaissance de son travail, ouvre l’espace
d’une liberté et d’un bonheur, certes plus modestes mais assurément plus fiables.