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Ses intrigues complexes et virtuoses reposent souvent sur des procédés d’interversions
où maîtres et valets échangent leurs rôles.
Les Fausses Confidences, comédie en prose et en trois actes jouée pour la première
fois en 1737.
Dorante, honnête petit bourgeois ruiné, aime en secret Araminte, la haute et riche
bourgeoise qui l’emploie. Malgré leur écart de fortune, leur amour triomphera grâce aux
stratagèmes habiles du valet Dubois. (Voir la fiche de lecture des Fausses confidences
de Marivaux)
Dans la scène 13 de l’acte II, les deux amants ne se sont pas encore révélés leurs
sentiments. Araminte fait croire à Dorante qu’elle va épouser le comte afin d’observer ses
réactions.
Problématique
Nous verrons comment, dans cette scène à la fois comique et galante, la fausse
confidence d’Araminte suscite chez Dorante un trouble révélateur de son amour pour
elle.
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28/06/2021 Les Fausses confidences, acte II scène 13 : analyse pour le bac
Il s’agit bien d’une nouvelle scène de fausse confidence : Araminte ment en confiant
son projet de mariage, afin de démêler les sentiments qu’éprouve Dorante pour elle.
Les ordres à l’impératif qu’elle adresse à son intendant témoignent d’une relation
professionnelle hiérarchisée, où Dorante est à son service : « "Ne vous embarrassez
pas, et écrivez le billet que je vais vous dicter" ».
Dorante est troublé comme l’indique l’interrogation (« "Et pour qui, madame ? » )", mais
il est contraint de se soumettre aux codes que sa situation professionnelle exige, d’où
son interrogation accompagnée d’une adresse polie (« madame« )
Araminte explique à Dorante que la lettre annonçant le mariage est « Pour le comte » et
a pour but de « "le surprendre bien agréablement" » car il est parti « "extrêmement
inquiet"« . L’antithèse « agréablement » / « inquiet », qui évoque les sentiments du
Comte crée un effet comique car elle reflète aussi la succession d’émotions qu’éprouve
Dorante à cette nouvelle.
Araminte lui inflige volontairement une tâche blessante : il doit écrire à son rival, pour lui
annoncer qu’il épouse celle qu’il aime « en [s]on nom ».
L’expression « "le petit mot" » est une litote cruelle car cette lettre ravage intérieurement
Dorante. La comédie légère repose donc sur des procédés sadiques. La fausse
confidence suscite de vraies blessures.
L’adjectif de la didascalie (« "Dorante reste rêveur" ») pouvait avoir au XVIIIe le sens fort
d’« ému ». Dorante est sous le choc.
Araminte l’interpelle, lui imposant son rythme, et l’interroge : « "À quoi rêvez-vous ?" »
La didascalie suivante montre qu’Araminte parle « à part », de même que Dorante. Cette
scène entre deux personnages se déploie donc sur trois plans : le dialogue entre les
amants, et le dialogue de chacun avec lui-même, et donc avec le spectateur. Si les
personnages se mentent, ils se disent toutefois la vérité lorsqu’ils se parlent à eux-
mêmes. Cette double énonciation omniprésente (les répliques des personnages
s’adressent aussi au spectateur) fait le charme et la complexité de cette scène galante.
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28/06/2021 Les Fausses confidences, acte II scène 13 : analyse pour le bac
Dorante, lui, se croit trompé par Dubois et se lamente : « "Ah ! Dubois m’a trompé"« . Le
comique repose sur ces vertigineux entrelacements de mensonges qui se répondent.
La lettre dictée par Araminte est savoureuse pour le spectateur car elle a un double
sens : « "Hâtez-vous de venir […] votre mariage est sûr…" ». En effet, la promesse de
mariage s’adresse apparemment au Comte, mais le spectateur comprend qu’Araminte
adresse ces mots de façon détournée à Dorante.
Le sujet du procès est un moyen habile pour Dorante de contester le mariage sans
révéler son amour. Il s’empare donc avec espoir de cette justification.
Mais Araminte écarte la remarque sèchement par l’impératif « achevez » qui joue
encore sur un double sens : Dorante doit achever la lettre, mais c’est le cœur de
Dorante qu’Araminte achève.
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28/06/2021 Les Fausses confidences, acte II scène 13 : analyse pour le bac
Elle joue à être elle-même troublée, mais le spectateur peut deviner que Dorante la
trouble véritablement.
Elle tente une dernière fois d’obtenir des aveux en confrontant Dorante à sa maladresse
dans deux exclamations comiques qui réduisent Dorante au rang de valet maladroit :
« "Voilà qui est écrit tout de travers ! Cette adresse-là n’est presque pas lisible." »
Mais c’est la déception qu’elle confesse en aparté. Araminte espérait en effet une
confession plus franche. Malgré le trouble certain de Dorante, elle estime que son
procédé a échoué comme l’exprime la négation partielle : « "Il n‘y a pas encore là de
quoi le convaincre." »
Cette scène 13 de l’acte II est particulièrement savoureuse car Araminte prend le relais
du valet Dubois en initiant une fausse confidence pour tromper Dorante. Les
personnages se manipulent entre eux pour démasquer la vérité.
Marivaux offre ainsi une pièce où la vérité naît du mensonge, dans une société où les
inégalités sociales et les mœurs entravent l’expression sincère de l’amour.
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28/06/2021 Les Fausses confidences, acte II scène 13 : analyse pour le bac
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