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28/06/2021 Les Fausses confidences, acte II scène 13 : analyse pour le bac

Les Fausses confidences, Marivaux, acte 2 scène 13 :


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Les Fausses confidences, acte 2 scène 13, introduction


Marivaux est l’un des dramaturges français les plus reconnus qui excella dans la
comédie bourgeoise et psychologique.

Ses intrigues complexes et virtuoses reposent souvent sur des procédés d’interversions
où maîtres et valets échangent leurs rôles.

Les Fausses Confidences, comédie en prose et en trois actes jouée pour la première
fois en 1737.

Dorante, honnête petit bourgeois ruiné, aime en secret Araminte, la haute et riche
bourgeoise qui l’emploie. Malgré leur écart de fortune, leur amour triomphera grâce aux
stratagèmes habiles du valet Dubois. (Voir la fiche de lecture des Fausses confidences
de Marivaux)

Dans la scène 13 de l’acte II, les deux amants ne se sont pas encore révélés leurs
sentiments. Araminte fait croire à Dorante qu’elle va épouser le comte afin d’observer ses
réactions.

Problématique
Nous verrons comment, dans cette scène à la fois comique et galante, la fausse
confidence d’Araminte suscite chez Dorante un trouble révélateur de son amour pour
elle.

I – Araminte demande à Dorante d’écrire au comte qu’elle l’épouse

(De « "Araminte, d’un air délibéré : Il n’y en aura aucune »," à « "procès


douteux" »)

Dans la scène précédente, Araminte confie à Dubois à propos de Dorante : « "j’ai envie


de lui tendre un piège. "» C’est justement ce piège qui prend forme sous les yeux du
spectateur à la scène 13 de l’acte 2 : Araminte feint de vouloir épouser le comte pour
éprouver les sentiments de Dorante.

La didascalie témoigne de l’« "air délibéré" » d’Araminte, qui affecte à l’égard de Dorante


une détermination indifférente. Ce n’est bien évidemment qu’un « air » qu’elle se donne,
soit un masque qu’elle porte pour tenter de faire surgir la vérité des sentiments de
Dorante.

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Il s’agit bien d’une nouvelle scène de fausse confidence : Araminte ment en confiant
son projet de mariage, afin de démêler les sentiments qu’éprouve Dorante pour elle.

Les ordres à l’impératif qu’elle adresse à son intendant témoignent d’une relation
professionnelle hiérarchisée, où Dorante est à son service : « "Ne vous embarrassez
pas, et écrivez le billet que je vais vous dicter" ».

Marivaux s’amuse à renverser les attentes du spectateur et les codes de la comédie,


puisque la conversation entre les amants est aux antipodes de la galanterie
amoureuse. Ce décalage suscite un effet comique.

Dorante est troublé comme l’indique l’interrogation (« "Et pour qui, madame ? » )", mais
il est contraint de se soumettre aux codes que sa situation professionnelle exige, d’où
son interrogation accompagnée d’une adresse polie (« madame« )

Araminte explique à Dorante que la lettre annonçant le mariage est « Pour le comte » et
a pour but de « "le surprendre bien agréablement" » car il est parti « "extrêmement
inquiet"« . L’antithèse « agréablement » / « inquiet », qui évoque les sentiments du
Comte crée un effet comique car elle reflète aussi la succession d’émotions qu’éprouve
Dorante à cette nouvelle.

Araminte lui inflige volontairement une tâche blessante : il doit écrire à son rival, pour lui
annoncer qu’il épouse celle qu’il aime « en [s]on nom ».

L’expression « "le petit mot" » est une litote cruelle car cette lettre ravage intérieurement
Dorante. La comédie légère repose donc sur des procédés sadiques. La fausse
confidence suscite de vraies blessures.

L’adjectif de la didascalie (« "Dorante reste rêveur" ») pouvait avoir au XVIIIe le sens fort
d’« ému ». Dorante est sous le choc.

Araminte l’interpelle, lui imposant son rythme, et l’interroge : « "À quoi rêvez-vous ?" »

A cette question ouverte, Dorante, "«toujours distrait." », répond « "Oui, Madame" »


comme si on lui avait posé une question fermée. Sa perte de maîtrise langagière
constitue une perte de pouvoir.

La didascalie suivante montre qu’Araminte parle « à part », de même que Dorante. Cette
scène entre deux personnages se déploie donc sur trois plans : le dialogue entre les
amants, et le dialogue de chacun avec lui-même, et donc avec le spectateur. Si les
personnages se mentent, ils se disent toutefois la vérité lorsqu’ils se parlent à eux-
mêmes. Cette double énonciation omniprésente (les répliques des personnages
s’adressent aussi au spectateur) fait le charme et la complexité de cette scène galante.

Araminte jouit avec cruauté de ce stratagème amoureux, et commente : « "Il ne sait ce


qu’il fait" ».

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Dorante, lui, se croit trompé par Dubois et se lamente : « "Ah ! Dubois m’a trompé"« . Le
comique repose sur ces vertigineux entrelacements de mensonges qui se répondent.

L’incapacité de Dorante à trouver du papier (« "Madame, je ne trouve point de papier."« )


illustre sa confusion et a un effet comique : elle réduit l’intendant rigoureux au rang
d’incapable valet.

Par un nouvel impératif, Araminte bouscule son intendant pétrifié : « "Écrivez." »

La lettre dictée par Araminte est savoureuse pour le spectateur car elle a un double
sens : « "Hâtez-vous de venir […] votre mariage est sûr…" ». En effet, la promesse de
mariage s’adresse apparemment au Comte, mais le spectateur comprend qu’Araminte
adresse ces mots de façon détournée à Dorante.

L’impératif « Hâtez-vous » vise à inciter Dorante à se révéler.

La surdité de Dorante semble confirmer à Araminte son amour : « "(À part.) Il souffre,


mais il ne dit mot ; est-ce qu’il ne parlera pas ?" » Cet aparté à la forme interrogative
exprime les doutes d’Araminte : la bourgeoise n’est plus aussi assurée.

II – Dorante conteste le mariage en trahissant son amour

(De « "Je vous ai assuré" » à « "trouvez-vous mal ?" »)

Araminte évoque le « "procès douteux" » qui l’oppose au Comte. L’adjectif dépréciatif


« "douteux" » rappelle que le mariage est une union d’affaires. Or Dorante s’exclame,
contestant la pertinence de l’adjectif : « "Douteux, il ne l’est point." » L’antéposition de
l’adjectif souligne l’opposition ferme de Dorante.

Le sujet du procès est un moyen habile pour Dorante de contester le mariage sans
révéler son amour. Il s’empare donc avec espoir de cette justification.

Mais Araminte écarte la remarque sèchement par l’impératif « achevez » qui joue
encore sur un double sens : Dorante doit achever la lettre, mais c’est le cœur de
Dorante qu’Araminte achève.

Il en va de même pour la mention du « mérite » du comte, dont la lettre fait l’éloge :


l’aristocrate n’en a visiblement pas, contrairement à Dorante, bourgeois ruiné mais
méritant. Marivaux dénonce ainsi ironiquement une société inégalitaire qui n’est pas
fondée sur le mérite.

Dorante désespère en aparté : « "Ciel ! je suis perdu !" » . Le présent d’énonciation


souligne la désillusion de l’intendant qui ne voit pas d’issue à sa situation.

Araminte rejette de nouveau les contestations de Dorante : « "Achevez, vous dis-je…" »


Sa répétition témoigne de son inflexibilité tout en créant une connivence avec le
spectateur qui, lui, démêle la situation.

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Araminte tente de provoquer la déclaration amoureuse de Dorante par une suite


d’interrogations brèves : « "Qu’est-ce que cela signifie ? Vous trouvez-vous mal ?"« .

Elle joue à être elle-même troublée, mais le spectateur peut deviner que Dorante la
trouble véritablement.

III – Araminte croit que son stratagème a échoué

(De «" Je ne me trouve pas bien, Madame" » à la fin de la scène 13)

La fausse confidence amoureuse d’Araminte condamne Dorante à cette vraie


confidence : « "Je ne me trouve pas bien, Madame." »

La surprise exclamative qu’affecte Araminte a un effet comique : « "Quoi ! si subitement !


cela est singulier." »

L‘aparté « "Le coeur me bat" » fait connaître son trouble au spectateur.

Elle tente une dernière fois d’obtenir des aveux en confrontant Dorante à sa maladresse
dans deux exclamations comiques qui réduisent Dorante au rang de valet maladroit :
« "Voilà qui est écrit  tout de travers !  Cette adresse-là n’est presque pas lisible." »

Mais c’est la déception qu’elle confesse en aparté. Araminte espérait en effet une
confession plus franche. Malgré le trouble certain de Dorante, elle estime que son
procédé a échoué comme l’exprime la négation partielle : « "Il n‘y a pas encore là de
quoi le convaincre." »

Dorante décèle finalement le stratagème amoureux : « "Ne serait-ce point aussi pour


m’éprouver ?"

La dernière phrase évoque Dubois : « "Dubois ne m’a averti de rien" » . L’évocation de


l’ingénieux Dubois montre combien Dorante le considère, à raison, comme le metteur en
scène principal de l’intrigue amoureuse.

Les Fausses confidences, acte 2 scène 13, conclusion


Dans cette scène à la fois comique et galante, la fausse confidence d’Araminte suscite
chez Dorante un trouble révélateur de son amour pour elle. Néanmoins, les amants
n’ont encore aucune certitude et leurs véritables sentiments restent masqués.

Cette scène 13 de l’acte II est particulièrement savoureuse car Araminte prend le relais
du valet Dubois en initiant une fausse confidence pour tromper Dorante. Les
personnages se manipulent entre eux pour démasquer la vérité.

Marivaux offre ainsi une pièce où la vérité naît du mensonge, dans une société où les
inégalités sociales et les mœurs entravent l’expression sincère de l’amour.

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