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Centre scientifique et technique

de la Construction

Béton autoplaçant léger à base de


granulats d’Argex
10/03/2015

1. Introduction et objectif du projet :


Ce document présente un bref aperçu du projet de recherche intitulé « Béton autoplaçant léger à
base de granulats d’Argex ». Dans le cadre de ce projet, une méthode a été étudiée et mise au
point pour la conception de plusieurs types de béton autoplaçant léger (BAPL). À cet égard, les
principes de départ étaient les suivants :
 L’utilisation de granulats d’Argex, et principalement de grains destinés à des
« applications structurelles » ;
 Une approche systématique, partant d’un modèle théorique pour la conception du
mélange, afin de pouvoir mettre au point une procédure polyvalente pouvant réagir
aux diverses matières premières utilisées.

Dans le cadre de la conception d'un BAP léger, les défis se posent à différents niveaux :
 L’intégration de granulats poreux et légers peut avoir un impact sur la demande en eau
d’un mélange et avoir des conséquences sur la rhéologie et le rapport E/C efficace.
 Les granulats légers entraînent un risque de ségrégation (inversée) : en raison de leur
masse volumique inférieure, ils peuvent remonter à la surface de la matrice/pâte.
 L’utilisation de quantités bien déterminées de granulats légers, nécessaires pour obtenir
une masse volumique déterminée pour le béton, impose des limites à la granulométrie
totale du squelette.

Figure 1 : Granulats d’Argex de calibre 4/8 Figure 2 : Coupe d’un BAP léger à base de
granulats d’Argex.

Le projet a étudié un large éventail de types possibles de BAP léger, tant en termes de classe de
résistance à la compression qu’en termes de masse volumique sèche du béton. Grosso modo, la
masse volumique sèche (séchage en étuve) est comprise entre 1400 et 2000 kg/m³ et les classes
de résistance à la compression vont de la classe LC 25/28 à la classe LC 50/55 (Tableau 1).

Tableau 1 : Combinaisons réalisées de résistance à la compression et de masse volumique sèche.


Classes de résistance à la compression
D 1.6
de LC 25/28 à LC 35/38
(1400 < masse volumique sèche ≤ 1600 kg/m³)

D 1.8
de LC 25/28 à LC 40/44
(1600 < masse volumique sèche ≤ 1800 kg/m³)
D 2.0
(1800 < masse volumique sèche ≤ 2.000 kg/m³)
de LC 30/33 à LC 50/55

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Outre les caractéristiques résultantes pour le béton durci, les propriétés du béton frais (hyper
fluide) sont évidemment essentielles. Le programme d’essais pratique a permis d’affiner ou
d’élargir les critères connus pour les tests de BAP typiques, comme l’étalement (« slump
flow »), l’écoulement à l’entonnoir en V (« V-Funnel ») et la boîte en L.

2. Approche et principes de base


Le modèle adapté de Brouwers, basé sur la méthode de conception chinoise, a servi de point de
départ pour ce projet. Les principes de base de cette méthode sont les suivants :
 Une matrice compacte, grâce à l’optimalisation du squelette granulaire. Á cet égard, on
applique en fait le principe de Fuller, mais la courbe théorique est adaptée afin de
permettre l’utilisation d’un sable plus fin. Cette courbe adaptée d’Andersen &
Andreassen convient davantage aux types de béton comportant une quantité
relativement importante de sable et d’additions, comme le béton à haute performance et
le béton autoplaçant.
 En principe, une matrice compacte donne lieu à un mélange plus dense et améliore
fortement la fluidité du mélange.
 L’utilisation de sable fin peut réduire la teneur en additions, ce qui est intéressant sur le
plan économique.

L’application de cette méthode de conception pour un programme d’essais étendu a permis une
adaptation ciblée pour le BAP léger, où l’intégration de grandes quantités de granulats légers
entraîne parfois une difficulté supplémentaire. L’élaboration d’un nouvel ensemble de courbes
de référence, adaptées à chaque classe de densité, facilite désormais la conception du mélange
(voir aussi la Figure 3).

Figure 3 : Élaboration des courbes de référence empiriques sur la base des résultats obtenus avec les
courbes granulométriques théoriques.

3. Intégration de granulats légers


La principale préoccupation lors de l’utilisation de granulats légers réside dans l’influence des
granulats quelque peu poreux sur la demande en eau du mélange. Assurément à l’état sec, les
granulats peuvent absorber l'eau relativement rapidement, comme le montre la Figure 4 pour 3
types de grains d’Argex. Il apparaît clairement que la vitesse d’absorption est très élevée au
début (pendant les 5 premières minutes), puis diminue progressivement. La solution consiste dès
lors à pré-humidifier les granulats, ce qui fait baisser fortement l’absorption (Figure 5).

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35

AM 4/8 - 650
30

25 AR 0/4 - 650
Water absorption [% weight]

20

15
AM 4/8 - 750

10

0
0' 5' 30' 24 h. 2 d. 3 d. 6 d. 7 d.
Time

Figure 4 : Courbes d’absorption pour des grains d’Argex, à partir d’un état sec.

Absorption d’humidité après 5' pour AM 4/8-650 et AM 4/8-750

12%

AM 4/8 - 750 AM 4/8 - 650

Expon. (AM 4/8 - 750) Expon. (AM 4/8 - 650)


10%

Absorption d’eau après 5' [%]


8%

6%

4%

2%

0%
0% 5% 10% 15% 20% 25%
Taux d’humidité de départ [%]

Figure 5 : Mesures de l’absorption d’eau des granulats après 5 minutes, à partir d’un certain taux
d’humidité de départ.

Lorsque le taux d’humidité des granulats dépasse un certain seuil, par exemple 15 %, on peut
affirmer que l’absorption supplémentaire reste dans une gamme de valeurs qui ne perturbent plus
le mélange. Pour cette étude, des granulats pré-humidifiés présentant un taux d'humidité
d'environ 20 % ont donc toujours été utilisés. Pour ce qui est de la pratique quotidienne, on peut
probablement admettre qu’un taux d’humidité compris entre 15 et 25 % reste tout à fait
acceptable. Des granulats trop humides et une absorption importante autour des grains peuvent
entraîner une libération d’eau.

Une alternative (innovante) pour maîtriser cette absorption consiste à appliquer un coating
autour des grains d’Argex, limitant fortement l'absorption d'eau future (voir les Figures 6 et 7).

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Waterabsorption Waterabsorption
[% weight] [% weight]
25% 25%

23% 23%

20% moisture = 12 % 20% moisture = 8.5 %


Reduction water absorption : 66 % Reduction water absorption : 75 %
18% 18% UNCOATED
UNCOATED

15% 15%

13% 13%

10% 10%

8% 8%

5% 5%

COATED COATED
3% 3%

0% 0%
WA 5' (%) WA 30' (%) WA 1h (%) WA 2h (%) WA 5' (%) WA 30' (%) WA 1h (%) WA 2h (%)

Time Time

Figure 6 : Coating AM 4/8-650 C - Mesures de Figure 7 : Coating AR 0/4-700 C - Mesures de


l’absorption d’eau des granulats avec le temps l’absorption d’eau des granulats avec le temps
(conformément à l’EN 1097-6). (conformément à l’EN 1097-6).

Un deuxième point d’attention lié à l’utilisation de granulats légers réside dans le risque de
ségrégation (inversée) : les granulats légers ont tendance à remonter à la surface. Généralement,
l’utilisation d’un agent de viscosité peut y remédier. Par ailleurs, cet adjuvant peut servir de
« tampon » pour atténuer l'effet d’éventuelles variations du taux d’humidité des granulats.

Enfin, il convient également d’accorder l’attention nécessaire au dosage des granulats légers.
Les granulats légers peuvent être dosés tant en volume qu’en masse. En raison de risques
potentiels de gonflement (surtout pour le sable léger de calibre 0/4), il est conseillé de toujours
effectuer un dosage en masse. Le dosage en masse consiste surtout à vérifier régulièrement la
masse volumique correcte et le taux d’humidité des granulats humides ; cette valeur étant
toujours prise en compte dans le calcul. Le contrôle du taux d’humidité correct permet non
seulement d’adapter les dosages des granulats, mais aussi d’évaluer si le taux d’humidité est
suffisant pour fabriquer un BAP de bonne qualité.

4. Campagne d’essais en laboratoire


Les caractéristiques de base des mélanges conçus ont été contrôlées sur la base d'essais réalisés
en laboratoire, tant à l’état frais qu’à l’état durci. Pour les tests typiques sur BAP frais, les
valeurs cibles suivantes peuvent être avancées, qui diffèrent peu de celles d'un BAP de masse
volumique normale :
o Étalement ou Slump flow : idéalement 700 à 750 mm, une fourchette plus large de 650 à
800 mm restant possible pour autant que le risque d’une fluidité trop faible ou d’un
blocage soit également évalué ;
o Durée d’écoulement dans l’entonnoir en V : 5 à 25 secondes, avec des variations élevées
selon le choix de l’adjuvant ;
o Rapport de la boîte en L : minimum 0.7 (évaluation selon le domaine d’application) ;
o J-Ring : blocking step en-dessous de 15 mm ;
o Sieve stability test : difficilement exploitable, un contrôle sur béton durci est indiqué.

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Figure 8 : Contrôle de l’étalement (gauche) et essai à la boîte en L (droite).

La résistance à la compression et la masse volumique sèche constituent les caractéristiques de


base du béton durci et ont dès lors été déterminées pour tous les mélanges de laboratoire. La
Figure 7 illustre la relation entre la résistance moyenne à la compression et la masse volumique
sèche (séchage en étuve) et compare les résultats des BAP légers aux valeurs moyennes d’un
béton léger ordinaire. La Figure 10 présente les valeurs pour la résistance à la compression
caractéristique en fonction de la masse volumique sèche (séchage en étuve) (sur la base de 3 à 6
échantillons).
75
Average compressive strength 28d (f_cm) [N/mm²]

70

65

60

55

50

45

40

35 Average LWAC
30

25
1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100
Oven-dry density concrete [kg/m³]

Figure 9 : Relation entre la résistance moyenne à la compression et la masse volumique sèche.

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75

Characteristic compressive strength f_ck 28d


70

65

60

[N/mm²] 55

50

45

40

35

30

25
1400 1500 1600 1700 1800 1900 2000 2100
Oven-dry density concrete [kg/m³]

Figure 10 : Relation entre la résistance caractéristique à la compression et la masse volumique


sèche.

Par souci d’exhaustivité, les valeurs de retrait et le module d’élasticité ont également été
contrôlés pour un nombre limité de mélanges. Les valeurs de retrait les plus élevées sont
observées pour les mélanges les plus légers, ce qui peut s’expliquer par deux phénomènes :
 des teneurs plus élevées en poudre (aussi bien en ciment qu’en additions) ;
 une teneur plus faible en gros granulats.
L’ordre de grandeur des valeurs de retrait pour le BAP léger reste identique à celui du béton
léger normal. La Figure 11 compare les valeurs mesurées aux courbes de retrait proposées dans
l’Eurocode 2 pour le béton léger, chaque fois pour les classes de résistance à la compression
correspondantes.

0
0 50 100 150 200 250 300 350 400 450

-100

-200 D1.6

D1.8
Shrinkage [µm/m]

D2.0
-300
D1.8 C30/37
C35/45
-400
C45/55

-500
D1.6 D2.0

-600

-700

-800
Time [d]

Figure 11 : Comparaison des courbes mesurées avec les courbes de retrait des Eurocodes pour le
béton léger

Enfin, le module d’élasticité a également été déterminé pour six mélanges. Les résultats sont
présentés au Tableau 2. Ils sont conformes aux prévisions de l’Eurocode 2 (calcul sur la base de
la résistance à la compression et de la masse volumique).

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Tableau 2 : Module E mesuré et comparaison avec les valeurs de l’Eurocode 2.

M Mod E [N/mm²] Valeurs EC2 [N/mm²] Différence avec l’EC2 [%]


M89 19806 19656 1
D1.6
M90 18929 16638 12
M63 21970 23066 -5
D1.8
M64 24074 24521 -2
M79 27669 27635 0
D2.0
M80 26580 29724 -12

5. Tests industriels
Dans une dernière phase, la méthode de conception des mélanges proposée a été évaluée sur la
base d’un certain nombre de tests industriels auprès de préfabricants, avec la production de plus
grands volumes de béton et le coulage d’éléments en béton de plus grandes dimensions (figures
12 à 15). Pour chaque test, le schéma suivant a été respecté :
 Conception d’un mélange.
 Préparation d’un ou de plusieurs mélange(s) de laboratoire sur la base des matières
premières fournies par le fabricant en question.
 Test du mélange optimalisé à l’échelle industrielle, avec ou sans adaptations, par
exemple du dosage en adjuvants.
 Évaluation des éléments et échantillons confectionnés.

Figure 12 : Le BAP léger est souvent utilisé pour Figure 13 : Les mélanges proposés sont
de grands panneaux muraux. intégrés dans le processus de production et
coulés à l’aide de bennes.

Figure 14 : Le contrôle des propriétés du BAP Figure 15 : Fabrication de cubes pour le


frais est important (ici : étalement ou « slump contrôle de la résistance à la compression et
flow »). de la masse volumique sèche.

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Les tests industriels ont permis d’affiner la méthode de conception sur le plan pratique et ont
confirmé qu’il est possible, sur la base d’une mise au point théorique, d’obtenir chaque fois et
rapidement un mélange répondant aux conditions spécifiques posées (poids, résistance à la
compression, fluidité, ...).

6. Résumé et conclusions
Le projet intitulé « Béton autoplaçant léger à base de granulats d’Argex » a étudié une méthode
de conception de plusieurs types de béton autoplaçant léger (BAPL). Cette étude s’est basée sur
la méthode chinoise adaptée, une campagne d’essais étendue ayant permis d’optimaliser
davantage la méthode de conception et les procédures de travail. La méthode de conception
proprement dite a été introduite dans un logiciel qui devra permettre, par la suite, de concevoir
rapidement de nouveaux mélanges à partir de nouvelles matières premières.

Les mélanges réalisés montrent également la multitude de possibilités offertes par le béton
autoplaçant léger sur la base des types de mélange et des caractéristiques du béton durci. Les
caractéristiques telles que présentées au Tableau 3 peuvent être réalisées sur la base de mélanges
adaptés.

Tableau 3 : Combinaisons réalisées de résistance à la compression et de masse volumique sèche.


Classes de résistance à la compression
D 1.6
de LC 25/28 à LC 35/38
(1400 < masse volumique sèche ≤ 1600 kg/m³)

D 1.8
de LC 25/28 à LC 40/44
(1600 < masse volumique sèche ≤ 1800 kg/m³)
D 2.0
(1800 < masse volumique sèche ≤ 2.000 kg/m³)
de LC 30/33 à LC 50/55

Le projet ne s’est pas limité à des contrôles à l’échelle de laboratoire, mais a également impliqué
des tests à l'échelle industrielle, afin de valider le processus de conception, ce qui a permis de
travailler avec d’autres matériaux et dans des conditions de travail réelles. Dans la plupart des
tests industriels, les critères établis pour le béton frais ont pu être satisfaits et les propriétés du
béton durci sont en outre comparables aux valeurs supposées. Les conclusions tirées des essais
sur béton frais sont rappelées ci-après :

o Slump flow : 700 à 750 mm ;


o V-Funnel Time : 5 à 25 secondes ;
o J-Ring : blocking step en-dessous de 15 mm ;
o Rapport de la boîte en L : minimum 0.7 (évaluation combinée !) ;
o Sieve stability test : moins exploitable.

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