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LES INSTRUMENTS FINANCIERS DONT PEUVENT BÉNÉFICIER

LES BAILLEURS SOCIAUX S’ÉQUIPANT D’UN BOITIER ELAX


- Analyse du décret-charges 1982 -

Note juridique interne – 25 Janvier 2022

Cette note a pour objectif d’analyser si les coûts liés au boîtier Elax peuvent être considérés comme
des charges récupérables dont le bailleur peut demander remboursement au locataire.

Deux principaux coûts résultent du boîtier Elax qui est installé sur un chauffe-eau afin de mesurer et
adapter la température aux besoins réels des locataires. Il s’agit, d’une part, des coûts liés à son
installation et, d’autre part, des coûts liés au pilotage du chauffe-eau.

Il convient de préciser que cette note exclut toute explication sur la justification des charges, le
versement et la régularisation de la provision par le bailleur.

EN DROIT

1. Définition d’une charge récupérable

L’article L442-3 du code de la construction et de l'habitation relatif aux logements HLM définit les
charges récupérables comme les «  sommes accessoires au loyer principal [qui] sont exigibles en
contrepartie :
- des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée ;
- des dépenses d'entretien courant et des menues réparations sur les éléments d'usage
commun de la chose louée, qui ne sont pas la conséquence d'une erreur de conception ou
d'un vice de réalisation. Sont notamment récupérables à ce titre les dépenses engagées par
le bailleur dans le cadre d'un contrat d'entretien relatif aux ascenseurs […]
- des impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement. »
(Surlignage ajouté)

Il en résulte que les charges récupérables correspondent aux sommes que le locataire doit verser
au bailleur en plus du montant du loyer principal pour acquitter les prestations accessoires
résultant du contrat de location. Le fait de scinder le loyer et les charges permet ainsi au locataire
de mieux cerner le montant d’une consommation, imposition, et ou prestation qui pèsent dans son
budget et d’en suivre l’évolution.

Le régime juridique des charges locatives résulte du point d'équilibre entre les dépenses liées à
l'investissement du propriétaire/bailleur, qui restent à sa charge, et celles liées au fonctionnement
courant, qui sont à la charge du locataire. 1 Ainsi, les charges récupérables sont les dépenses liées
au fonctionnement courant de l’immeuble acquittées par le bailleur par nécessité ou par
commodité de gestion et qui est autorisé, par la loi, à en exiger le remboursement par le locataire.

2. Liste limitative des charges récupérables

L’article L442-3 du code de la construction et de l’habitation précise que la liste des charges
récupérables est fixée par décret du Conseil d’Etat. Il s’agit d’une liste limitative. Cela signifie que
le propriétaire pourra demander le remboursement de toutes les dépenses qui y figurent, mais
uniquement de celles-ci : toutes dépenses qui n'y figurent pas incombent au propriétaire/bailleur. 2

1
Ce concept de « charges récupérables » et ce point d’équilibre trouve son origine dans ce qu’il est courant d’appeler les
accords Delmon du 19 octobre 1974
2
Civ. 3ème, 27 novembre 2002 n°01-11130 et Civ. 3ème, 1er juin 2005, n°04-12137

1
Toutefois, une charge non récupérable peut le devenir si elle vise à améliorer la sécurité ou la
prise en compte du développement durable. Pour cela, il faut que le bailleur et le locataire
concluent un accord collectif conformément à l' l'article 42 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre
1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et
le développement de l'offre foncière).

Le décret n°82-955 du 9 novembre 1982 fixe la liste des charges récupérables pour les bailleurs
sociaux (ci-après ‘décret-charges’). Ces charges sont réparties en huit postes :
- Poste 1 : ascenseur et monte-charge ;
- Poste 2 : eau froide, eau chaude et chauffage collectif ;
- Poste 3 : installation individuelle de chauffage et d'eau chaude ;
- Poste 4 : parties communes intérieures au bâtiment ou à l'ensemble des bâtiments
d'habitation ;
- Poste 5 : espaces extérieurs au bâtiment ou à l'ensemble des bâtiments d'habitation ;
- Poste 6 : hygiène ;
- Poste 7 : équipements divers du bâtiment ou de l'ensemble des bâtiments d'habitation ;
- Poste 8 : impositions et redevances.

Pour ce qui est des dépenses relatives au poste 3, c’est-à-dire aux installations individuelles de
chauffage et d’eau chaude, sont considérées comme des charges récupérables l’exploitation et
l’entretien courant relatif au :
- «  Réglage de débit et température de l'eau chaude sanitaire ;
- Vérification et réglage des appareils de commande, d'asservissement, de sécurité d'aquastat
et de pompe ;
- Dépannage ;
- Contrôle des raccordements et de l'alimentation des chauffe-eau électriques, contrôle
de l'intensité absorbée ;
- Vérification de l'état des résistances, des thermostats, nettoyage ;
- Réglage des thermostats et contrôle de la température d'eau ;
- Contrôle et réfection d'étanchéité des raccordements eau froide, eau chaude ;
- Contrôle des groupes de sécurité ;
- Rodage des sièges de clapets des robinets ;
- Réglage des mécanismes de chasses d'eau. » (Surlignage ajouté) 

3. Jurisprudence relative aux charges liées au chauffe-eau

La liste des charges récupérables est interprétée strictement et littéralement par la jurisprudence.
Autrement dit, dès lors que l'objet d'une dépense n'est pas mentionné dans le décret-charges
1982, le bailleur ne peut récupérer cette dépense auprès du locataire. 3

En matière de charges liées à l’eau chaude, il existe très peu de jurisprudence. Il convient dès lors
de regarder les clarifications relatives au chauffage collectif qui, comme le chauffe-eau, implique
une installation et peut faire l’objet d’un contrat d’entretien.

Pour ce qui est des charges d’installation, la Cour de cassation a précisé que les dépenses
d'installation de chauffage et les grosses réparations intégrées à la facture de chauffage et d'eau

3
D’ailleurs, les différentes tentatives de réformes des dispositions portant sur les charges récupérables ont toutes échoué
malgré l’évolution des charges d'habitation depuis les années 80 – en raison, notamment, de l'apparition de nouvelles
technologies ou de nouvelles contraintes sécuritaires – poussant ainsi le législateur à intervenir pour écarter des décisions
rendues par la Cour de cassation qui ne faisait qu'appliquer strictement les textes relatifs aux charges récupérables. La loi
n° 2006-872 du 13 juillet 2006 et la TVA et les marges bénéficiaires dans les contrats d'entreprise, le décret n° 2008-1411 du
19 décembre 2008 et les dépenses de personnel, la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 et les contrats de fourniture de
chaleur en sont de parfaites illustrations.

2
chaude doivent rester à la charge du bailleur. 4 De même, les frais de modernisation de la
chaufferie sont exclus des dépenses récupérables.5

Pour ce qui est des charges d’exploitation et d’entretien courant, elles peuvent faire l’objet d’un
contrat entre le bailleur et la société gérant l’installation. Ce type de contrat relative au chauffage
peut prévoir trois (voire quatre) groupes de prestation :
- le poste P1 correspond au prix du combustible,
- le poste P2 correspond à la conduite, au contrôle, au réglage et à l’entretien courant de
l’installation,
- le poste P3 au gros entretien et au renouvellement du matériel,
- le poste P4 correspond à l’amortissement des installations sans le cas où c’est l’exploitant qui
les a financées.
Ces contrats suscitant des difficultés en raison de leur caractère global, il a été clarifié par
réponse ministérielle que les locataires ne remboursent que les postes P1 et P2 d’un contrat
d’exploitation relatif à un chauffage, les postes P3 et P4 demeurant à la charge du bailleur. 6

EN FAIT

Concernant les dépenses liées à l’installation du boîtier Elax, elles constituent un investissement, une
amélioration de l’utilisation du chauffe-eau. Les coûts d’installation du boîtier Elax n’entrent dès lors
pas dans la catégorie des charges récupérables devant être liées au fonctionnement courant et
restent, par conséquent, à la charge du bailleur.

Concernant les dépenses liées au pilotage du boîtier Elax, elles pourraient être considérées comme
des charges récupérables sous réserve qu’elles soient liées à l’exploitation et l’entretien courant d’une
charge listée dans le décret-charges. En l’espèce, le boitier Elax permet l’entretien courant de cinq
charges relatives aux installations individuelles d’eau chaude (poste 3 du décret-charges), à savoir :
● Réglage de débit et température de l'eau chaude sanitaire ;
● Contrôle des raccordements et de l'alimentation des chauffe-eau électriques, contrôle
de l'intensité absorbée ;
● Vérification de l'état des résistances, des thermostats, nettoyage ;
● Réglage des thermostats et contrôle de la température d'eau ;
● Contrôle des groupes de sécurité.

Le pilotage effectué par le boîtier Elax participe ainsi de cinq manières à l’entretien courant de l’eau
chaude sanitaire. Premièrement, le boîtier Elax régule la température de l’eau en adaptant la
température de consigne aux besoins des usagers en temps réel. Deuxièmement, le boîtier Elax
contrôle, par le biais d’un compteur d'énergie, la consommation du chauffe-eau ce qui implique le
contrôle du bon fonctionnement des raccordements, de l’alimentation du chauffe-eau et de l'intensité
absorbée. Troisièmement, le boîtier Elax vérifie l'état de la résistance en analysant la montée en
température. Quatrièmement, via une sonde, le boîtier Elax contrôle la température de l’eau afin de
vérifier qu’il n’y a pas de risque de brûlure et de minimiser le développement potentiel de légionellose.
Cinquièmement, en contrôlant la température à la sortie du groupe de sécurité, le boîtier Elax vérifie
que le groupe de sécurité libère correctement de l'eau à chaque montée en température et peut
identifier l’existence de fuites par un possible entartrage du siège de la soupape.

Par conséquent, conformément à la réponse ministérielle clarifiant les postes d’un contrat d’entretien
d’une installation considérés comme des charges remboursables, l’ensemble des tâches listées ci-

4
Cass. 3e civ., 9 mars 2005, n° 01-18.039 
5
Cass. 3e civ., 6 déc. 1995, n° 93-17.250 
6
Rép. min. n° 2118 : JOAN Q 31 janv. 1994, p. 524 

3
dessus que le boitier Elax est en mesure d’effectuer engendre des charges relevant du poste P2 d’un
contrat d'entretien relatif à la conduite, au contrôle, au réglage et à l’entretien courant de l’installation.

EN PRATIQUE

Pour que le bailleur puisse récupérer les dépenses liées au pilotage effectué par le boitier Elax, il
faudrait qu’Elax propose un contrat d’entretien du chauffe-eau – de la même manière que les contrats
d’entretien relative au chauffage – comprenant l’aspect régulation de la température de l’eau ainsi que
l’aspect contrôle des raccordements et autres. Ce contrat d’entretien devra dûment détailler tous les
services rendus par Elax et s’ils constituent ou non une charge récupérable.

En outre, l’aspect essentiel à mettre en avant pour que les dépenses liées au pilotage effectué par le
boîtier Elax soient considérées comme des charges récupérables, est l’entretien courant du chauffe-
eau et non l’objectif que vise les boîtiers Elax, à savoir la diminution de la consommation des
locataires.

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