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LES PROJETS D'APPROVISIONNEMENT COMMUNAUTAIRE EN EAU : UNE

ARÈNE D'EXPRESSION DES MÉCONTENTEMENTS POLITIQUES. LE CAS


DE KUMBO, AU CAMEROUN

Gillian Sanguv Ngefor

De Boeck Supérieur | « Mondes en développement »

2011/3 n°155 | pages 59 à 76


ISSN 0302-3052
ISBN 9782804165130
DOI 10.3917/med.155.0059
Article disponible en ligne à l'adresse :
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DOI : 10.3917/med.155.0059

Les projets d’approvisionnement


communautaire en eau : une arène
d’expression des mécontentements politiques.
Le cas de Kumbo, au Cameroun
Gillian Sanguv NGEFOR1

L e Nord-Ouest du Cameroun précolonial était organisé sur le modèle de la


chefferie, avec à sa tête un “Fon”, monarque de droit divin assisté par
des conseillers, certains d’entre eux étant constitués en sociétés secrètes.
L’intrusion coloniale, d’abord allemande, puis française, a cherché à transformer
les chefferies en auxiliaires dociles, sans y parvenir car elles ont su conserver
une grande partie de leurs prérogatives. Le Cameroun indépendant a tenté
d’utiliser la chefferie pour faire passer ses directives et pour convaincre les
habitants de voter en faveur du pouvoir en place. Il n’y est jamais arrivé du fait
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de l’opposition farouche de ceux qui continuent de considérer le “Fon” comme
leur chef légitime. Lorsque l’ingénieur Wehrle (Helvetas, 2007, 6) a voulu, en
1972, construire un système d’adduction d’eau au Nord-Ouest du Cameroun
avec l’aide des villageois qui devaient participer aux travaux, il a pensé pouvoir
se passer de l’appui du “Fon”. Malgré des séances de sensibilisation, il ne reçut
aucun soutien de la population. Découragé, il s’adressa finalement à celui-ci qui,
par l’intermédiaire des sociétés secrètes, envoya des messages aux villageois. Le
lendemain, des milliers d’individus étaient prêts à participer au projet !
Le rôle de la chefferie dans le Cameroun postcolonial demeure ambigu dans ses
rapports avec le pouvoir politique et la communauté dont elle reste la
représentante naturelle. Le “Fon” doit composer avec les injonctions du
pouvoir étatique, d’où des compromis que la communauté juge comme des
trahisons. Le chef et les élites2 qui l’entourent sont confrontés à la fois aux
exigences de la politique nationale et aux attentes de leurs sujets, deux réalités
parfois antinomiques.

1
Dynamiques rurales, Université de Toulouse 2 le Mirail. ngeforsanguv@yahoo.com
2
La notion polysémique d’élites est difficile à cerner. Nous l’entendons dans le sens des élites
entrepreneuriales, administratives, intellectuelles, ainsi que les élites traditionnelles, soit
l’ensemble des groupes sociaux qui contrôlent la société par leur influence, leur prestige,
leur richesse, leur pouvoir (politique, économique, moral ou intellectuel).

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L'introduction du processus démocratique (par le biais du multipartisme) au


Cameroun en 1990 a permis l'apparition de nouveaux acteurs sur la scène
politique nationale, dont les chefs traditionnels. Cette nouvelle configuration est
apparue à un moment de mécontentement des populations vis-à-vis de l’État
dont l’implication dans l'approvisionnement en eau potable a servi de
détonateur aux conflits. Les communautés considèrent l'intrusion de l'État
comme une atteinte à leurs droits, craignant qu’il ne les prive de leur patrimoine
collectif comme la terre et les sources sacrées (Bakker 2009, Olivier De Sardan,
1995). Cette apparente violation des droits communautaires génère des
protestations qui dénoncent l’ingérence de l'État dont les motivations sont
considérées comme uniquement lucratives. Ces manifestations, parfois
véhémentes, et qui ont contrecarré les actions de l'État, puisent leurs racines
dans l'atmosphère politique actuelle du pays.
La gestion de l'approvisionnement en eau au Cameroun illustre ce processus
conflictuel et contradictoire de la transition démocratique.
Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les débats sur le système le plus
efficace d’approvisionnement en eau (gestion publique ou privée) sont
prégnants. Actuellement, les réflexions portent sur des modalités de partenariat
originales entre le public, le privé et les communautés et leur efficience dans un
contexte d’insatisfaction politique. Plusieurs questions se posent. La résistance à
l’intervention de l'État est-elle liée à l'augmentation du prix de l'eau, comme
l’invoquent les communautés, ou ne s’agit-il pas de défendre un patrimoine
supposé menacé par l’action étatique ? L’approvisionnement en eau ne sert-il
pas à la communauté comme une arène pour exprimer ses mécontentements
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par rapport au politique ? Des tentatives de réponse sont proposées à partir de
l’analyse critique des luttes pour l'approvisionnement en eau au Cameroun.
La première partie présente les débats de nature théorique sur la gouvernance
de l’eau en mettant l’accent sur la participation des communautés. La seconde
analyse les enjeux de ces questionnements à travers l’exemple de Kumbo.

1. CONTEXTE ET CADRE THÉORIQUE :


GOUVERNANCE DE L’EAU ET DYNAMIQUES
“PARTICIPATIVES”
Le désengagement relatif de l’État camerounais dans les secteurs de l'éducation,
de la santé, de la construction et de l'entretien des infrastructures a été en partie
compensé par des efforts consentis par les villages en collaboration avec des
organisations non gouvernementales (ONG), ou des instances internationales.
La communauté a développé un esprit d'entraide et d'autonomie3, mais à un
coût élevé. Ainsi, l’élaboration de nouvelles formes de gouvernance et la
consolidation de dynamiques participatives nous conduisent à préciser les
3
L’autonomie de la communauté s’exprime, dans le secteur de l’eau, par le fait que la
population est libre de décider du prix de l'eau et de pratiquer les rites autour des sources.

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débats autour de ces concepts ambigus de gouvernance, participation et


communautés en prenant pour cas particulier le secteur de l’eau.

1.1 Le contexte
Les contestations actuelles dans le domaine politique peuvent être analysées
comme la recherche d'une émancipation des communautés et de leurs
organisations de la tutelle des structures du gouvernement central dans un
contexte de crise économique ayant conduit à des programmes d’ajustement
structurel drastiques. La crise politique au Cameroun a commencé dans les
années 1980, après la suppression des parlements régionaux et la proclamation
de la République. Les activités, auparavant décentralisées, ont été transférées à
l'administration centrale. En 1986, les réformes (sous l’influence du Fonds
monétaire international) ont engendré une réduction de 50% des salaires des
fonctionnaires. En 1994, le Franc CFA a été dévalué de 50%. Ces deux
phénomènes combinés ont conduit à une perte de pouvoir d'achat de 75% qui
n'a pas été compensée. Cette crise s’est assortie d’un affaiblissement significatif
de l'administration publique, se traduisant par une moindre pression sur les
villages. L’opposition, encadrée par le Social Democratic Front (SDF),
dominant dans la région du Nord-Ouest Cameroun, en a été renforcée.
Dans le secteur de l’eau, l’approvisionnement des populations dépend en partie
de facteurs climatiques. Par sa situation géographique, le pays présente une
grande diversité, avec au sud un climat équatorial (précipitations entre 2 000 et
10 000 mm/an), et au nord un climat presque sahélien (moins de 800 mm/an).
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Par ailleurs, une diversité de modalités de gestion (publique, privée ou
communautaire) existe (tableau 1). Il convient de signaler les différences entre
les parties anglophones et francophones du Cameroun. D’après des études
réalisées en 2007, dans la partie francophone de l’Ouest Cameroun, plus de
80% de la population a recours à des puits et à des forages individuels. Au
Nord-Ouest (partie anglophone), 85% de la population utilise le modèle
communautaire (bornes-fontaines).
Tableau 1 : Diversité des stratégies d’approvisionnement en eau et modes de
gestion de l’eau potable au Cameroun
Modes d’approvisionnement en eau Système de gestion de l’eau
Bornes-fontaines publiques (Société Partenariat public-privé entre le
nationale des eaux du Cameroun (SNEC), concessionnaire CAMWATER
privatisée en 2007, devenue Cameroun (Cameroon Water Utilities Company)
Water Utilities Company et Camerounaise et CDE (Camerounaise des Eaux) et
EAU des Eaux) l’État)
POTABLE Bornes-fontaines communautaires Pour la plupart avec les partenariats
Forages communautaires public-privé-communautaire (dont la
Sources aménagées communautaires mairie, les ONG et la communauté)
Les comités de gestions locales
Rivières et sources non aménagées Les règles traditionnelles
Puits et forages individuels Les règles des propriétaires

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Dans le secteur de l’eau, on est d’abord passé d’une gestion assurée par l'État
(SNEC) à la communauté villageoise, puis aux mairies (tableau 1).

1.2 Participation et démocratie : deux instruments


incontournables dans le développement local
L’idée d’un gouvernement central comme seule autorité de décision a été
remise en cause depuis les années 1980. Le concept de gouvernance
polycentrique et multi-échelles rend compte de la diversité des intervenants
dans la gestion nationale, voire globale d'une ressource (Baron, 2003). Cette
évolution reflète la tendance des politiques publiques à s'éloigner du modèle
hiérarchique dans lequel les autorités étatiques exercent un contrôle souverain
sur les personnes et les groupes qui composent la société (Kohler-Koch et
Larat, 2001). Dans un mode de gouvernance non hiérarchique, les différentes
parties prenantes, comme les organismes gouvernementaux, les entreprises, les
groupes d'intérêt et les individus, collaborent dans la formulation et la mise en
œuvre des politiques publiques (Bakker, 2009) selon des principes participatifs.
La participation est un concept complexe et multidimensionnel. Fleming (1991)
suggère que la participation met l'accent sur le rôle décisionnel de la
communauté. Celle-ci contribue à améliorer la conception des politiques, de
sorte qu'elles correspondent aux besoins et aux conditions des personnes à qui
elles sont destinées (Cornia et al., 1987). Fenster (1993) établit une distinction
entre la définition des économistes de la participation communautaire, entendue
comme le partage équitable des avantages des projets, et la vision des socio-
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anthropologues qui insistent sur la contribution de la communauté à la prise de
décision. L’idée de légitimité démocratique suppose que tous ceux concernés
par les mesures prises doivent avoir la possibilité de participer activement au
processus de décision (Perret et al., 2006). Les principes d'équité et de justice
sociale exigent, également, que les voix des plus faibles soient entendues. Les
décisions collectives sont nécessaires pour mettre en œuvre des stratégies de
gestion efficaces, et la combinaison de démarches allant de haut en bas et de
bas en haut dans les négociations institutionnelles conduit à une meilleure
acceptation par les acteurs.
Quelques exemples pertinents de l'importance de la « gouvernance
participative » (Brohman, 1996) peuvent être donnés dans le domaine de la
gestion de l'eau. Certains (Bakker, 2007 ; World Bank, 1989) soulignent la
nécessité d'une évolution vers la cogestion. Des organismes intermédiaires
(ONG) sont aptes à jouer un rôle majeur dans la coopération, en particulier
dans l'apprentissage de la gestion.
La participation requiert de nouvelles compétences, des structures de gestion
flexibles (formelles ou informelles), l'accès aux connaissances des experts tout
en tenant compte des pratiques locales. L'incapacité apparente à relever les défis
qui découlent des problèmes de gestion constitue le déclencheur du
changement dans la structure de gouvernance globale de l'eau (Bakker, 2009).
Toutefois, un changement fondamental ne peut se limiter à la gouvernance

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seule dans la mesure où les régimes de gestion de l'eau sont étroitement liés au
contexte global de la société (Olivier de Sardan, 1995). Définie par le Global
Water Partnership (2004)4, la gouvernance de l'eau se réfère à la gamme des
systèmes politiques, sociaux, économiques et administratifs qui sont en place
pour réglementer le développement et la gestion des ressources en eau, ainsi
que la fourniture des services d'eau à différents niveaux de la société. Nous
adoptons ici cette approche large de la gouvernance, qui englobe tous les
modes de pilotage politico-socio-économique.
En dehors des liens formels comme ceux concernant les structures
réglementaires, les influences informelles telles que la culture politique de
participation peuvent avoir un effet sur la gouvernance de l'eau (Breuil, 2005).
En effet, des études empiriques révèlent que le contexte culturel a une influence
significative sur les processus participatifs. L’arène des acteurs informels peut
agir comme un élément structurant pour accroître la capacité d'adaptation des
modes de gouvernance de l'eau. La présence d’institutions5 informelles aide à
maintenir la flexibilité indispensable pour répondre aux défis émergents
puisqu’elles sont “spontanément” acceptées par les populations, les institutions
formelles étant trop rigides et sans souplesse. La participation “spontanée” est
entravée lorsque les règles sont imposées par le haut. La population peut cesser
de participer à toute action lorsqu’elle n’a pas été associée.
Néanmoins, le manque de responsabilité et de règles explicites en cas
d’informalité excessive peut créer des situations d'arbitraire et une gestion de
l'eau difficile. La participation “spontanée” n’est possible que lorsqu'il existe
une articulation, voire une hybridation, entre les règles formelles et informelles.
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Cette complexité explique que la participation soit restée un concept vague.
Brohman (1996) fait valoir que, dans les dernières décennies, de nombreuses
définitions et une pluralité de méthodes de mise en œuvre ont été élaborées.
Des questions sont restées sans réponse : qui participe, à quoi, comment et
pour quelles raisons ? Quelle coordination imaginable entre les différents
acteurs ? Même si de nombreux programmes de développement ont été
promus à travers le discours sur la décentralisation et la participation, dans la
pratique, ils ont été contrôlés par l'État ou les institutions de développement
étrangères. La plupart des États continuent de craindre que les organisations de
base ne soient des terreaux pour une émancipation populaire potentiellement
dangereuse. Une société civile puissante risque de défendre les intérêts de la
communauté, aux dépens de l’État. Tout ce processus est déterminé par le

4
Organisme international qui s’occupe de la gestion de l’eau et qui a des branches nationales
dans beaucoup de pays, avec par exemple le Global Water Partnership Cameroun.
5
Nous utilisons le mot “institutions” pour désigner les règles formelles et informelles qui
régissent le comportement des êtres humains. Les institutions formelles comprennent les
lois et les règlements, les structures organisationnelles et les procédures formelles. Les
institutions informelles peuvent être définies comme des règles socialement partagées,
généralement non écrites, qui sont créées, communiquées et appliquées en dehors des
canaux officiellement reconnus (Baron, 2005).

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contexte politique, la gouvernance de l'eau étant influencée par le système


politique national et la culture locale (Hagberg, 2010).

1.3 État versus organisation communautaire :


une source de conflits
L'intervention des instances politiques dans la gestion de l'approvisionnement
en eau conduit à des affrontements avec les communautés qui aboutissent à ce
que Fokwang (2003) appelle la « politique de la tradition » et que Rist (2001)
qualifie « d’émancipation politique ». Ces termes évoquent l'entrée en force
dans la scène politique nationale des élites traditionnelles à des fins diverses (la
plupart du temps pour des intérêts personnels), sous prétexte qu'ils représentent
la voix de la communauté. La construction et la gestion des adductions d'eau au
niveau local ont conduit à une interaction accrue entre l'État (à travers les
mairies) et les villages, avec des rapports conflictuels, et ont renforcé la capacité
des villages à négocier directement avec les donateurs et les partis politiques.
Toutefois, la participation renvoie à deux représentations différentes de la part
des communautés. La participation de quelques uns dans la vie politique est
considérée par certains comme un forum de prise de décision supplémentaire,
avantageux pour la communauté. Par contre, d’autres, les plus nombreux dans
la communauté, considèrent cette implication comme une zone potentielle de
conflit entre le traditionnel et le prétendu système démocratique représenté par
la mairie dont on devrait se méfier.
La compréhension du comportement de résistance de la population peut être
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interprétée à partir de la définition de la communauté proposée par Fulcher
(1989). Pour lui, la communauté suppose un groupe de personnes dans une
localité de résidence ayant au moins une des trois dimensions suivantes :
perceptive (un sentiment d'appartenance à une région ou localité), fonctionnelle
(existence de relations fonctionnelles entre personnes vivant sur le même
territoire) et politique, avec, en perspective, la capacité de l'organe élu de
représenter les intérêts collectifs et d’aplanir les conflits entre les membres.
Cette définition englobe les deux interprétations de la notion de communauté.
La dimension “perceptive” se rapporte à la capacité des membres à s’identifier à
la zone à laquelle ils se sentent appartenir. Une communauté peut être qualifiée
de vivante si les gens ont une affinité, ou sont en symbiose, avec la région et les
personnes qui y vivent. Ils se voient comme partageant des intérêts et des
systèmes de valeurs avec ce sentiment d'identité avec le local.
Sabourin (2008) part des relations entre des paysans au Brésil pour enrichir le
concept de communauté en insistant sur la réciprocité des acteurs dans tout
projet commun. La réciprocité est, selon lui, une catégorie spécifique
d'échanges associée à la redistribution des pouvoirs. La logique de la réciprocité
vise à élargir les relations sociales entre les acteurs en privilégiant les relations
horizontales. À partir de cette analyse, la gestion communautaire ou

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démocratique d'un projet d'approvisionnement en eau dépend « des acteurs, de


leurs pouvoirs et de la “redevabilité” » (Ribot, 2002, 17)6. Pour qu’un projet
d’adduction d'eau soit géré démocratiquement, les représentants des acteurs
locaux munis de pouvoirs réels et responsables devant la population locale
doivent participer (Ribot, 2002).
Quel que soit leur niveau réel d’implication, il est important que les membres de
la communauté pensent, ou constatent, que leurs opinions sont prises en
compte, ou qu'ils peuvent participer à la prise de décisions chaque fois qu’ils le
souhaitent (dimension politique). Plus un groupe de personnes dans une localité
a ce sentiment, plus il se persuadera que les décisions prises le sont dans
l’intérêt de la communauté. On verra par la suite que les communautés peuvent
être très hostiles lorsque la dimension politique n'est pas respectée. Dans
l’exemple que nous présenterons (Kumbo), les individus ont eu un sentiment
de trahison et d’abandon quand ils ont réalisé que leurs chefs militaient dans un
parti politique national plutôt que de défendre les intérêts de leur communauté.
Selon Baron (2003) et Bakker (2007), dans le domaine de la gestion de l'eau, le
concept de communauté est associé à l’idée de la participation communautaire
avec la délégation d'un pouvoir de décision aux acteurs non étatiques, aux
différentes échelles de la gouvernance. Les avis d'un grand nombre
d'intervenants représentant divers intérêts et traités de manière égale sont pris
en compte. De même, on reconnaît le principe selon lequel la prise de décision
ne devrait pas être laissée uniquement aux experts gouvernementaux. Le
discours sur la participation de la communauté a évolué avec le passage du
concept de gouvernement à celui de gouvernance. Ce changement de
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paradigme a été associé à de nouvelles approches de la décentralisation et de la
participation dans le domaine de la gouvernance de l'eau, ainsi que l'acceptation
de la légitimité de la communauté. Selon Hagberg (2010) la décentralisation
tend à ignorer les règles, les coutumes et les perceptions traditionnelles de
gouvernance. En outre, comme le montrent des travaux sur les pouvoirs locaux
et les arènes locales en Afrique de l'Ouest (Bierschenk, Chauveau et Olivier de
Sardan, 2000), les pratiques de décentralisation ont parfois conduit à une
politique identitaire et à des conflits communautaires. La catégorie d’acteurs
chargée de piloter les projets communautaires d’adduction d’eau influence
considérablement les résultats attendus. Si, pour certains, la gestion
communautaire conduit à une plus grande responsabilisation, il existe des
contre-exemples qui mettent en exergue le manque de transparence et
supposent une modification des règles (Ostrom, 1990). Par ailleurs, Hagberg
(2010) souligne qu'il existe de nombreuses autres variables en jeu, au-delà de la
participation, comme le climat politique du pays. Au fil des ans, ce climat a
changé au Cameroun par rapport aux attentes des citoyens sur la démocratie.
Depuis le début des années 1990, après les élections présidentielles, boycottées

6
Le terme “redevabilité” utilisé pour traduire le mot “accountability” signifie la capacité des
citoyens à contrôler leurs dirigeants et leur aptitude à répondre aux attentes de la société.

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par le principal parti d'opposition (Social Democratic Front, SDF), la société


civile7, du moins celle du Nord-Ouest, a progressivement réalisé que ses
aspirations à un changement ne pouvaient être réalisées dans un proche avenir.
Elle a décidé de lutter pour conquérir un espace de liberté plus grand. Dans ce
but, les projets d’adduction d’eau ont été utilisés comme une arène pour
exprimer des frustrations sur le plan politique. Le SDF a été considéré comme
incompétent et a perdu de sa popularité. La plupart des chefs et les élites
politiques de l'opposition ont rejoint le parti au pouvoir et ont ouvertement
renoncé à leur neutralité. On peut citer en exemple le Chef (Fon) de Nso à
Kumbo. Bien que l'implication du Fon dans la vie politique ne soit pas
considérée en soi de façon négative par “sa” population, son rôle dans la crise
de l'eau a ravivé la méfiance et le ressentiment contre lui. Nous partirons de cet
exemple pour montrer comment le rôle d’un chef peut influer sur la
participation communautaire et sur la gestion de l'approvisionnement en eau.

2. L'ÉVOLUTION DE L'APPROVISIONNEMENT EN
EAU À KUMBO : ANTAGONISME ENTRE
AUTORITÉS POLITIQUES ET ORGANISATION
COMMUNAUTAIRE
La situation politique au Cameroun dans les années 1990 s’est dégradée. Les
citoyens, mécontents suite à la manipulation des élections, n'avaient aucun autre
moyen de montrer leur désapprobation vis-à-vis de l’État qu’à travers une
affaire locale. Cette situation s'est aggravée quand ils se sont rendus compte que
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leur Chef Fon avait ouvertement renoncé à sa neutralité politique. Le peuple a
alors utilisé comme prétexte la question de l'approvisionnement en eau et son
prix trop élevé. Le fait que ce prix soit imposé par l'État (SNEC) a justifié la
contestation à son encontre.

2.1 L’approvisionnement communautaire de l’eau à Kumbo


Kumbo offre un exemple intéressant d'un approvisionnement local en eau qui a
constamment changé du point de vue des modes organisationnels, allant d’une
gestion publique vers une gestion communautaire pour s’orienter, désormais,
vers la gestion municipale. La question qui se pose est la suivante : peut-on
penser des formes partenariales qui permettraient d’assurer la viabilité des
projets d’accès à l’eau potable ?

2.1.1 Kumbo
Kumbo est le siège administratif du Département de Bui dans la région du
Nord-Ouest du Cameroun, l'une des dix régions du pays. Il est localisé à 110

7
Entendu comme un contre-pouvoir susceptible de négocier avec les partenaires publics la
mise en place d’un modèle se société non imposé par l’État.

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L’approvisionnement communautaire en eau. Le cas de Kumbo au Cameroun 67

km au nord-est de Bamenda (figure 1), la capitale régionale. Son altitude est de


1 770 m, les précipitations annuelles sont d'environ 2 660 mm, avec une
température moyenne de 21°C.
En tant que ville d’arrière-pays, Kumbo n’a pas été un centre d'intérêt pour le
gouvernement. Elle est réputée pour le maintien des coutumes et traditions. La
mairie de Kumbo (Kumbo Council) a été créée en 1977. La population actuelle
estimée à environ 104 100 habitants, place Kumbo au rang de deuxième ville
dans la région du Nord-Ouest, après la capitale régionale, Bamenda.
L'agriculture constitue la principale activité, avec un faible pourcentage pour le
petit commerce et le secteur formel (éducation, santé).
Figure 1 : Localisation de Kumbo dans la Région du Nord-Ouest Cameroun
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Source : Ngefor, 2011.


Kumbo a un système administratif traditionnel fondé sur le chef suprême
(Fon). Dans cette région, cette organisation en grandes chefferies est la règle, le
chef étant l'incarnation de la tradition et le gardien de la coutume (Page, 2003).
Selon la tradition de Nso, les chefs ne doivent pas participer à la vie politique
nationale. Pourtant, les observations sur le terrain montrent que leur place dans
la politique a un impact considérable dans la gestion de l'approvisionnement en
eau. Depuis l’indépendance du Cameroun, les chefferies sont organisées de
façon hiérarchique, avec des tâches théoriquement définies et des salaires payés
par l’État, correspondant à ces niveaux. De ce fait, ils sont peu ou prou des
auxiliaires de l’État et ne sont pas vraiment autonomes. Le Fon de Nso est au
plus haut niveau de la hiérarchie des chefs traditionnels et continue de recevoir
un salaire du gouvernement. En retour, il réalise une série de services

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68 Gillian Sanguv NGEFOR

spécifiques, en son nom. Au Cameroun, les chefs interviennent dans la gestion


des conflits fonciers, dans les programmes de développement comme
vulgarisateurs, parfois en partenariat avec les ONG, dans la gestion des marchés
locaux et dans le cadre de nombreuses fonctions socioculturelles. Cette
situation met le chef dans une position ambiguë entre ses habitants et le
gouvernement, parfois avec d’autres collaborateurs activement présents sur la
scène politique. Ces élites accumulent de la richesse sous couvert des lois
nationales et des institutions locales.
Le chef est dans une position difficile par rapport au gouvernement et à sa
communauté. D'une part, c’est une figure qui doit normalement agir selon la
volonté de la majorité (sa communauté) et non en fonction de son intérêt
personnel ; d’autre part, il dépend du gouvernement à travers le salaire qu’il
perçoit. La chefferie et la gestion du projet d’approvisionnement en eau de
Kumbo ne peuvent pas être traitées séparément. L’approvisionnement en eau à
Kumbo, qui était sous la gestion de l’État depuis 1972, est perçu comme mal
géré par la population au cours de la période d'instabilité politique de 1990-
1992. On peut se demander si les protestations du peuple Nso étaient dues
réellement à la hausse des prix de l'eau ou s’il ne s’agissait pas plutôt d’un
moyen d'exprimer des frustrations envers les dirigeants (au niveau national,
ainsi que traditionnel).

2.1.2 Conception et réalisation du programme d’adduction d’eau


L'approvisionnement en eau à Kumbo dessert environ 40 000 personnes et a
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une capacité de 139 mètres cubes par heure.
Avant les années 1960 et le début du projet d'approvisionnement en eau de
Kumbo (qui a duré de 1960 à 1972), les habitants utilisaient l’eau des rivières.
Les autorités coloniales avaient installé une borne-fontaine pour approvisionner
les résidences et les bureaux des fonctionnaires du gouvernement colonial
(Njoh, 2009). Le système, rudimentaire, dépendait de l'eau des réservoirs,
montés sur les toits, remplis manuellement par "les garçons de l'eau" (Ibid.). À la
fin des années 1950, le problème de l'eau était devenu aigu compte tenu de
l'expansion de la ville et de sa population. Basé sur le modèle de planification
des autorités coloniales (Njoh, 2009 ; Page, 2003), l'approvisionnement a été
placé sous la responsabilité de l'État. Jusqu’en 1972, l'organisme
gouvernemental en charge de l'approvisionnement en eau au Cameroun était le
Service des travaux publics (PWD). En raison du manque de moyens, seules les
villes considérées comme économiquement et administrativement importantes
ont été retenues comme prioritaires ce qui n’était pas le cas de. Kumbo. Par
conséquent, toutes les demandes des résidents de Kumbo pour avoir de l'eau
courante ne purent aboutir, malgré l’augmentation de la population.

Mondes en Développement Vol.39-2011/3-n°155


L’approvisionnement communautaire en eau. Le cas de Kumbo au Cameroun 69

Figure 2 : Acteurs intervenus dans la gestion du projet de Kumbo depuis 1968


État- Lois Gouvernement canadien
- Soutien technique et financier Soutien financier et technique
- Politiques au projet (325 millions FCFA et
(décentralisation/privatisation) étude de faisabilité)

Ministère de Mairie

Soutien extérieur
l’Eau et de (2009- 2011)
l’Énergie, SNEC Gestion et soutien
(1974 -1991) technique HELVETAS
Soutien
t h i

Association et
élites (NSODA ;
période transitoire
PROJET DE Redevabilité de 1991/92)
KUMBO (KWA)

économiques et politiques

gouvernement canadien
Bénéfices socio-

Soutien du
Soutien

Population locale et comité de gestion


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(1991-2009)
- participation aux travaux Estimé à 80
de construction du projet millions FCFA
- contribution financière (1€ = 655

2.1.3 Le Kumbo Water Authority (KWA), à la recherche d'un équilibre


introuvable
Le projet d’adduction d’eau a été une initiative de la communauté Nso mais
aussi de l'État. Le projet, initialement évalué à 200 millions FCFA, s’est élevé à
572 millions FCFA (Njoh, 2009), au-delà de la capacité de financement de la
communauté. Cherchant d’autres sources de financement, la communauté s’est
tournée vers les élites qui ont utilisé leur position pour demander l’aide
d’organismes internationaux, notamment du Canada.
Le gouvernement canadien a accepté de fournir les matériaux nécessaires pour
achever le projet et de les acheminer jusqu’au port de Douala. La responsabilité
du transport jusqu’à Kumbo incomba aux responsables du projet. La phase de
démarrage a été supervisée par le Fon qui s’appuya sur les chefs des différents
quartiers. Selon la tradition, certains jours de la semaine sont réservés aux
travaux communaux. Ces jours-là ont été consacrés au projet pour creuser les
canalisations. Le premier système de canalisation d'approvisionnement en eau à
Kumbo a été construit entre 1968 et 1970 par le travail communautaire, mais
aussi par des cotisations en espèces (1 500 FCFA par homme et 1 000 FCFA

Mondes en Développement Vol.39-2011/3-n°155


70 Gillian Sanguv NGEFOR

par femme), ce qui a été estimé à 80 millions FCFA8. Lorsque le projet a été
achevé, il y avait 74 bornes-fontaines gratuites. Le financement provenait du
gouvernement canadien (325 millions FCFA), de la République Fédérale du
Cameroun et du gouvernement de l'Ouest Cameroun. Le nombre important
d’intervenants dans le financement du projet fait que le groupe Kumbo Water
Authority se revendique de plusieurs propriétaires. Deux points de vue tout
aussi convaincants, mais contradictoires, s’opposent. Pour les uns, le projet est
considéré par la population comme une initiative entièrement communautaire,
avec le soutien financier du gouvernement canadien et les élites Nso. Dans cette
optique, les membres de la communauté ont toujours considéré le projet
d'approvisionnement en eau comme leur appartenant et ils récusent toute
intervention de l'État. Pour d’autres, qui bénéficient du soutien de l'État, il
relève de la propriété publique, étant donné le rôle technique et diplomatique
du gouvernement du Cameroun dans sa réalisation. Par conséquent, l'État a
toujours considéré le projet comme relevant de sa compétence comme les
autres systèmes d'approvisionnement en eau pour lesquels il impose les tarifs.

2.1.4 Le Kumbo Water Authority : une arène où exprimer des


mécontentements politiques
L'approvisionnement en eau après la réalisation du projet a toujours posé
problème. Peu de temps après l'achèvement du projet en 1972, il fut placé sous
l’autorité du ministère des Travaux publics. La communauté Nso affirme qu’un
décret présidentiel a placé tous les projets d’eau potable sous l’autorité de la
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SNEC. Elle considère ce transfert contraire au souhait du conseil traditionnel et
de la communauté. Pour la majorité de la population, le Fon et le maire ont été
manipulés et contraints à signer un contrat de transfert. Peu de temps après le
transfert de la gestion, les résidents ont critiqué le prix de l’eau fixé
arbitrairement et à un niveau élevé (figure 3) alors que la qualité de l'eau et du
service se détérioraient. Cette situation aurait amené la population de Kumbo à
revenir à un approvisionnement dans les ruisseaux.
Figure 3 : Les prix de l’eau (par mois) entre les différents dirigeants du projet
depuis 1974 en FCFA
Type de client SNEC La Communauté Mairie
(1974-1991) (1991 -2009) (2009 -2011)
Consommateurs de la borne- Payé via la mairie 125 FCFA/m³ 100 FCFA/m³
fontaine publique (125 FCFA/m³)
Adduction d’eau à domicile 1-10m³=293 FCFA 200 FCFA/m³ 250 FCFA/m³
Frais de gestion Entretien du compteur = 800 250 FCFA/mois 570 FCFA/mois
FCFA
Pénalité en cas de non-paiement 4500 FCFA 1 000 FCFA 1 000 FCFA
Source : Njoh, 2009.

8
La preuve de ces contributions peut être trouvée dans les reçus délivrés par le Département
pour le développement urbain (Public Works Department), qui a supervisé la collecte de la
redevance.

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L’approvisionnement communautaire en eau. Le cas de Kumbo au Cameroun 71

Le mécontentement de la population a atteint son paroxysme en août 1991


quand elle a décidé de reprendre ce qu'elle affirmait être son dû. Dans un
contexte de chômage des jeunes élevé, la protestation a été menée par des
étudiants de l’université qui ont envahi les installations de la SNEC. Les
manifestants ont accusé la SNEC de faire payer un service qui ne lui appartenait
pas. Cette révolte a conduit au retrait de la SNEC et à la remise de la gestion
aux résidents de Kumbo qui ont organisé les travaux communautaires pour les
réparations. La réponse du gouvernement central de Yaoundé a consisté à
envoyer la troupe armée (mort de six manifestants).
En 1992, le Fon a convoqué des réunions afin de constituer un comité
provisoire de gestion de l’eau pour assurer le bon fonctionnement du projet. Il
a également été décidé que la NSODA (Nso Cultural and Development
Association) se chargerait de la gestion de l'approvisionnement en eau de
Kumbo. Ce processus a conduit à la création d'une communauté autonome
d'approvisionnement en eau, dénommée Kumbo Water Authority (KWA),
censée accomplir les tâches suivantes :
- la collecte, le traitement, le stockage et la distribution d'eau potable à la
population ;
- la facturation, la perception des prélèvements, l'exploitation, l'entretien et
l'extension du réseau, la protection des bassins versants et la surveillance de la
qualité de l'eau ;
- la recherche de possibilités de financement et l’établissement de partenariats
locaux, nationaux et internationaux pour le renforcement des capacités et un
appui matériel pour assurer la durabilité.
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La loi n° 2004/18 du 22 Juillet 2004 sur les règles applicables aux communes
leur donne la responsabilité de la distribution d'eau potable sur leur territoire.
En outre, dans le but de placer la gestion de l'approvisionnement en eau de
Kumbo dans un cadre juridique, Global Water Partnership Cameroun s’est
prononcé pour le transfert de la gestion du projet à la mairie de Kumbo. La
communauté de Kumbo a accepté le transfert de l'approvisionnement en eau
uniquement à la demande du Fon. Celui-ci a rappelé à la communauté les
difficultés rencontrées par le KWA dans la gestion et, partant, a demandé
qu’elle accepte que la mairie prenne le relais ce qui a été fait en 2009 (figure 2).

2.3 La gestion locale de l'eau, un prétexte pour exprimer


des revendications politiques et culturelles
Comment expliquer alors l’hostilité des habitants de Kumbo pendant le violent
épisode de 1991 ? Si l’on s’en tient au prétexte invoqué, à savoir l’augmentation
du prix de l'eau à domicile qui concerne la majorité de la population (figure 3),
on se demande si la différence de 93 FCFA entre les prix de la SNEC (293
FCFA avant 1991) et les prix communautaires (200 FCFA à partir de 1991) a
été le motif réel. La différence peut paraître importante, mais cela ne justifiait
pas une révolte aussi violente. En effet, les prix de 2009 payés à la Mairie
s’élèvent à 250 FCFA et semblent avoir été bien acceptés par la communauté.

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72 Gillian Sanguv NGEFOR

Le mécontentement politique des années 1990 a certes agi comme un facteur


déclenchant, mais au-delà du problème des prix, des éléments d’ordre culturel
contribuent à expliquer ces manifestations sanglantes.
De Bénoist (2004), lors de sa tentative de définition de l'identité, a mis en avant
le fait que les collectivités peuvent parfois être attachées à des objets ou à des
ressources qu'ils considèrent comme leur patrimoine et une partie de leur
identité. Dans une société traditionnelle comme Kumbo, certains territoires ont
été identifiés et préservés en tant que sanctuaires et lieux de rites, alors qu’ils
sont considérés par l’État comme de simples sites de captage potentiels. On
constate combien il peut s’avérer compliqué de mettre en place un mode de
gestion qui ne respecte pas ces principes. Par conséquent, dans des sociétés où
la relation État et communautés a été fortement dégradée, est-il possible
d'établir un partenariat efficace qui assure un système de gestion durable ?

2.4 Quel partenariat entre l'État et la communauté?


Le cas de Kumbo montre que les habitants sont favorables à un partenariat
basé sur la réciprocité entre le village et les donateurs étrangers plutôt qu’avec
l'État. Les acteurs publics, notamment les maires, sont plus considérés comme
agissant conformément à leur appartenance à des partis politiques que pour la
défense des intérêts de la communauté. À Kumbo, les habitants ne souhaitaient
pas recevoir un soutien de l'État à travers la mairie pour résoudre la crise de
l'eau de 1990-1991 suite à un manque de crédibilité. Ce cas peut être interprété
comme une conséquence de l’ambiguïté historique des rapports entre
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l’organisation de la communauté et l’administration publique.
À Kumbo, on privilégie la coopération avec une organisation comme Helvetas
ou d'autres ONG tout en associant, éventuellement, l'administration publique.
Cette façon d'aborder la question de l'approvisionnement en eau est
l'expression d'un raisonnement stratégique où le maintien de l'autonomie des
villages reste essentiel. Collaborer avec l'administration publique et les ONG
permet d’assurer une autonomie de la communauté dans la gestion des
adductions d’eau, en fonction de leurs propres principes de développement.
Un argument supplémentaire pour la coopération trilatérale réside dans le fait
que les contributions des villageois, en espèces et en nature, sont minimisées
par l’État, alors que les ONG les valorisent. La solution trilatérale est aussi
mentionnée comme un mécanisme permettant un contrôle de la corruption,
pratique courante dans l'administration publique, parce que les ONG
constituent une garantie pour une gestion plus transparente des fonds comparé
à la coopération bilatérale (public/communauté).
Un autre élément qui limite la confiance des villageois dans la potentielle
coopération entre les villages et l'État (mairies et organismes relevant de l'État)
est le fait que les mairies sont un espace d'autonomie “amputée”. Même si les
maires sont légitimés démocratiquement, le préfet, nommé par le
gouvernement central, peut opposer son veto aux plans et aux budgets de la
mairie. Tant que cet obstacle structurel existe, le risque d'une ingérence à

Mondes en Développement Vol.39-2011/3-n°155


L’approvisionnement communautaire en eau. Le cas de Kumbo au Cameroun 73

motivation politique est latent et entrave la confiance que les populations


pourraient placer dans cette forme d'organisation sociale et politique.
Un problème supplémentaire auquel l'organisation communautaire doit faire
face concerne la façon de concilier l’organisation traditionnelle et le pouvoir
prétendument démocratique officiel (tel qu'il est utilisé pour élire les membres
de la mairie). Selon la constitution nationale, le maire, en raison de sa légitimité
démocratique, est le "chef" de tous les villages sur son territoire. Néanmoins,
selon la perception de la population, le Fon est la seule personne qui peut être
considérée comme "chef" du village. Cette ambiguïté conduit à des relations
complexes et potentiellement conflictuelles entre les formes “modernes” et
“traditionnelles” de l'organisation. Un maire (de Tubah) explique : « La mairie
n'est pas isolée de l'organisation traditionnelle. Dans tous les villages, nous
avons élu certains membres du conseil traditionnel. Pour moi, en tant que
maire, ce n'est pas un inconvénient parce que quand nous avons à décider
quelque chose, les mairies doivent d'abord en discuter avec le Fon et les autres
chefs traditionnels. Quand ils reviennent et acceptent un projet, je sais déjà qu'il
a été approuvé par l'organisation traditionnelle. Cela me donne l’assurance que
le projet peut compter sur le soutien de la communauté, parce que sans ce
soutien, aucun projet ne peut être véritablement efficace. En tant que maire, je
ne suis pas le “chef” des communautés et je n'ai que la tâche de les rassembler
afin que nous puissions unir nos efforts car c'est ensemble que nous pouvons
réussir, et non lorsque nous marchons séparément. Mais je n'ai jamais pu
penser de moi-même être plus élevé que le Fon, parce que quand je vais dans
ma communauté, je le respecte toujours comme mon chef » (Rist, 2001, 25).
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Ce témoignage reflète l'opinion de beaucoup d'autorités locales. Plutôt que de
mettre en avant les limites de l'organisation traditionnelle en vue de sa
suppression, il vaudrait mieux promouvoir, dans le cadre d'un processus
d'innovation, des formes “modernes” de l'organisation sociale locale clairement
attachée à son identité culturelle traditionnelle. Dans cette perspective, les
mairies pourraient devenir des plates-formes au sein desquelles différents
villages organisés de manière autonome se rencontreraient afin de rechercher
des solutions aux problèmes qu'ils sont incapables de résoudre isolément. En ce
qui concerne l'approvisionnement en eau communautaire, Kumbo, avec l’aide
d’Helvetas, a démontré que ce potentiel peut être exploité de manière efficace
pour l'amélioration des efforts généralement insuffisants afin d’assurer une
protection optimale des bassins versants. Comme de nombreux bassins
versants sont des biens publics utilisés par les différentes communautés, les
mairies peuvent devenir des espaces pertinents pour la renégociation du
système de gestion des ressources en eau de ces zones. On aboutirait alors à la
protection des bassins versants en vue de maintenir ou même d’augmenter le
débit d'eau.
Ce type de relation conflictuelle entre “traditionnel” et “moderne” a été observé
partout, dans les comités de développement villageois, les comités de
développement de projets, les comités de maintenance de l'eau, les
coopératives, les associations de jeunes et les clubs de football ou les groupes

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74 Gillian Sanguv NGEFOR

religieux. Une caractéristique commune à ces institutions “modernes” peut être


soulignée : elles ne peuvent pas subsister sans avoir des relations formelles et
informelles avec l'organisation traditionnelle.

CONCLUSION
Cet article avait pour but de montrer comment l'organisation communautaire
dans la région du Nord-Ouest du Cameroun a influencé les relations entre les
collectivités locales et la politique à travers la gestion de l'approvisionnement en
eau. L'objectif spécifique était d'analyser les réactions des populations face à la
politique étatique ainsi que leur impact sur la gestion de l'approvisionnement en
eau. Il nous a permis de discuter du concept de communauté dans ses
dimensions perceptive, fonctionnelle et politique. L'argument que nous
retenons ici est que les communautés peuvent réagir très violemment face aux
actions gouvernementales en utilisant l’adduction d'eau potable comme un
prétexte. Nous attribuons ce phénomène à la complexité du processus
historique des politiques nationales qui prétendent prendre en compte les
réalités locales alors que celles-ci sont ignorées quand elles n'ont aucun lien avec
les intérêts politiques nationaux.
Cette situation confirme la nécessité de rechercher une complémentarité entre
l'organisation traditionnelle des villages, l’État et les ONG, comme le montre
l’exemple de la gestion locale de l'eau à Kumbo. Les contributions extérieures
sont les bienvenues, mais elles ont une chance accrue d’être acceptées si elles
s’intègrent dans l'organisation communautaire en place. Nous avons par ailleurs
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montré que la présence de plates-formes d’acteurs informels est d'une
importance majeure quand il s'agit de la mise en œuvre durable des régimes de
gestion des ressources sur de longues périodes de temps. Toutefois, il est aussi
essentiel de comprendre comment des compromis durables peuvent être
élaborés entre les institutions formelles et informelles.
Le principe de gestion participative a souvent été critiqué sur de nombreux
plans. La participation et la décentralisation ne permettraient pas de
promouvoir réellement l'intégration des parties prenantes. Cet article souligne
une autre alternative, celle d'un paysage d’acteurs hétérogènes et dynamiques
dans lequel la gestion efficace de l'eau ne peut être atteinte par des hiérarchies
bureaucratiques, mais plutôt par la collaboration entre les acteurs et la
recherche de compromis. Il insiste, également, sur la nécessité d’un processus
d'apprentissage social en vue de promouvoir la participation des intervenants
pour la réalisation des objectifs communs de gestion de l'eau.
Notre analyse suggère que le développement et la consolidation de liens plus
étroits entre instances formelles et informelles pourraient assurer la viabilité de
la gestion de l’eau dans un cadre flexible basé sur la confiance. La nature multi-
échelle du changement institutionnel, avec en toile de fond l’objectif de faire
participer le plus grand nombre à la prise de décision, est un domaine très
pertinent de la recherche au cœur de cet article.

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L’approvisionnement communautaire en eau. Le cas de Kumbo au Cameroun 75

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