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UN ATOLL EMBLÉMATIQUE DES RISQUES

ENVIRONNEMENTAUX ? FUNAFUTI (ARCHIPEL DE TUVALU)


ENTRE MENACE PLANÉTAIRE ET CONTRAINTES QUOTIDIENNES
Caroline Rufin-Soler, Yannick Lageat

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Armand Colin | « Annales de géographie »

2015/5 N° 705 | pages 523 à 540


ISSN 0003-4010
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ISBN 9782200930011
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http://www.cairn.info/revue-annales-de-geographie-2015-5-page-523.htm
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!Pour citer cet article :


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Caroline Rufin-Soler, Yannick Lageat, « Un atoll emblématique des risques environnementaux ?
Funafuti (archipel de Tuvalu) entre menace planétaire et contraintes quotidiennes », Annales de
géographie 2015/5 (N° 705), p. 523-540.
DOI 10.3917/ag.705.0523
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Un atoll emblématique des risques
environnementaux ? Funafuti (archipel de
Tuvalu) entre menace planétaire et
contraintes quotidiennes
The atoll of Funafuti (Tuvalu islands): a symbolic
example of environmental risks between global threat

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and daily constraints

Caroline Rufin-Soler
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Université du Littoral Côte d’Opale, TVES EA 4477

Yannick Lageat
Université de Bretagne Occidentale, Géomer, UMR LETG 6554 CNRS

Résumé Sur la disparition programmée de Tuvalu se sont accordées doxa scientifique et


rumeur médiatique : l’élévation du niveau marin ne peut, par la submersion de
cet archipel, qu’apporter la preuve dirimante d’un changement climatique global.
Cette disparition considérée comme inexorable a déjà conduit à s’interroger sur
la réalité juridique d’un État déterritorialisé et sur l’identité d’une communauté
condamnée à l’exil. Peut-on imaginer un décalage plus flagrant entre les fantasmes
qu’inspirent la destinée de ces neuf îles coralliennes et le quotidien de ses
habitants ?
Plus que la perspective d’une inéluctable élévation du niveau marin, et
d’un exode forcé, leurs préoccupations immédiates se portent sur les déficits
pluviométriques, sur la surabondance des déchets ménagers, sur la salinisation
et la pollution de la lentille d’eau douce, autant de contraintes auxquelles se
trouve, en particulier, confrontée l’île-capitale qui rassemble désormais plus de
5 000 habitants sur moins de 150 hectares. Abreuvés de prévisions alarmistes,
les Tuvaluans se refusent néanmoins à se projeter à la fin du XXIe siècle quand ils
seraient inéluctablement appelés à devenir les premiers « réfugiés climatiques »,
et, s’ils marquent un fort attachement à leur territoire, ils sont encore loin de se
mobiliser pour surmonter les difficultés présentes qu’ils y vivent, loin de l’image
idyllique associée aux îles atolliennes.
Abstract Scientific doxa and media rumor have together affirmed the assumption that
Tuvalu is bound to disappear because of the sea level rise. This disappearance
is regarded as irreversible and the clear evidence for the complete responsibility
of global warming. It raises questions therefore about the legal reality of a
deterritorialized State, and about the identity of a community forced into exile.
There is a striking gap between the dreamlike image associated with a tropical
coral archipelago and the hard daily life of its inhabitants in a poor environment.
More than the inescapable sea level rise, they are mostly concerned with rainfall
deficits, the profusion of household waste, water-supply salinization and pollution
of their fresh water lens. This is particularly true on the main island, Fongafale,
where more than 5 000 inhabitants are living on less than 150 hectares. Although
confronted with these alarmist forecasts, the Tuvaluans refuse to anticipate the

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end of the 21st Century presumed to be the moment when they would be forced
to become the first “climate refugees”. They are attached to their territory despite
their hard life, but are still far from being mobilized to overcome the difficulties
they have to face, in obvious contrast with the idyllic image associated with coral
islands.

Mots-clés état insulaire, atoll, élévation du niveau marin, densification, dégradations


environnementales, réfugiés climatiques, souveraineté.
Keywords island state, atoll, sea-level rise, densification, environmental degradations,
climate refugees, sovereignty.

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Introduction

Les Tuvaluans, « canaris du changement climatique »... Il n’est guère de publi-


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cations qui ne filent la métaphore depuis que Chambers et Chambers (2007),


qu’elles oublient habituellement de citer, ont sollicité la comparaison avec ces
volatiles traditionnellement employés dans les galeries de charbon pour prémunir
les mineurs de coups de grisou. Les habitants de l’archipel seraient, de ce fait,
les augures de la submersion programmée des îles basses exclusivement coral-
liennes que sont les autres États indépendants de Kiribati et des Maldives, et
leur pays, qui culmine à + 4,6 m, fait figure de victime expiatoire de l’élévation
jugée inexorable du niveau marin. Si nombre de travaux récents portant sur ces
micro-États insulaires n’envisagent leurs évolutions que sous l’angle du « réchauf-
fement climatique », il paraît opportun de souligner l’intrication contradictoire
des composantes naturelles et anthropiques dans la fragilisation de ces systèmes
insulaires à travers l’exemple de Tuvalu, et plus particulièrement de l’atoll de
Funafuti qui a déjà fait l’objet d’un travail préalable dans le cadre d’une thèse de
doctorat (Rufin-Soler, 2004), alors que l’archipel est plus connu « par le biais
de représentations médiates » que par « l’expérience directe » (Farbotko, 2005).
Deux visites, à dix années d’intervalle, permettent de s’assurer que, derrière une
« habile mise en scène médiatique » (Gay, 2004), la population de l’île-capitale
Fongafale, dans l’atoll de Funafuti, demeure confrontée aux difficultés d’un
quotidien qui frappe de contingence l’avenir qui lui est promis.

1 Un écosystème complexe

L’archipel de Tuvalu, situé dans le sud-ouest de l’océan Pacifique entre les 5e


et 10e Sud, et étiré sur quelque 680 km, réunit 126 îles coralliennes. Il ne tota-
lise qu’une surface émergée de 26 km2 , mais dispose d’une Zone Économique
Exclusive évaluée entre 720 000 et 910 000 km2 puisque le tracé de sa frontière
maritime au sud-est n’a pas encore fait l’objet d’une convention avec la France
qui dispose des eaux territoriales adjacentes à la collectivité d’outre-mer de Wallis-
et-Futuna. Devenu protectorat britannique en 1892, Tuvalu fut administré, avec
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l’archipel de Kiribati, sous le nom de colonie des îles Gilbert et Ellice, de 1915 à
1975, quand les îles Ellice, de peuplement polynésien, et non micronésien, s’en
séparèrent, avant d’accéder à l’indépendance en 1978, en adoptant le nom de
Tuvalu. Il signifie « Huit îles toutes ensemble » (Funafuti, Nanumanga, Nanu-
mea, Nui, Niutao, Nukufetau, Nukulaelae et Vaitupu), quoiqu’une neuvième
(Niulakita) soit désormais habitée depuis qu’elle a été ouverte à l’occupation
permanente à partir de 1989.

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Fig. 1 L’archipel de Tuvalu et l’atoll de Funafuti, C. Rufin-Soler, 2004.


Tuvalu islands and Funafuti atoll, C. Rufin-Soler, 2004.
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1.1 Le contexte géomorphologique


Constructions coralliennes, les îles Tuvalu possèdent des caractéristiques géo-
morphologiques qui les font ranger dans deux familles distinctes (McLean et
Hosking, 1991) :
– cinq atolls (Funafuti, Nanumea, Nui, Nukufetau et Nukulaelae) correspon-
dant à des formations récifales de forme grossièrement annulaire entourant un
lagon central ;
– trois tables récifales (Nanumanga, Niutao, Niulakita), dépourvues d’un
lagon central, mais isolant en leur sein un ou plusieurs lacs, aux eaux salées ou
saumâtres, selon l’évolution de l’édifice ;

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– et un type composite (Vaitupu).
L’attention se portera sur l’atoll de Funafuti, le plus vaste de l’archipel, par
les dimensions de son ellipse (25 × 18 km) et la superficie de ses terres émergées
(270 ha, dont 142 pour la seule île de Fongafale). Il juxtapose classiquement
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trois compartiments :
– l’ensemble fronto-récifal qui correspond à la pente externe de l’atoll,
tombant avec une inclinaison moyenne de 26° jusqu’à des fonds de 2 000 m ;
– l’ensemble épirécifal qui associe aux platiers, externe et interne, une trentaine
d’îles – ou motu –, préférentiellement situées du côté au vent comme dans les
autres atolls du Pacifique (Guilcher, 1988). Disposées en un chapelet, les îles sont
constituées de sables, graviers et galets biodétritiques et épousent la forme des
récifs sur lesquels elles s’accumulent. Ainsi, née de la coalescence de deux levées
sédimentaires, l’île de Fongafale, longue de 11 km, située sur la façade orientale
de l’atoll de Funafuti, possède une forme en « boomerang » (Richmond, 1992)
dont la partie centrale plus développée, correspondant au coude du récif, qui
contenait un marais de quelque 5 hectares de superficie ;
– l’ensemble post-récifal représenté par le lagon, dont la profondeur atteint
55 m dans sa partie septentrionale. Dénommées localement Te Ava, neuf passes,
dont sept se localisent du côté sous le vent où la croissance corallienne est moins
rapide, permettent des échanges hydrologiques avec le large. Deux d’entre elles
sont suffisamment creusées pour avoir été empruntées par le navire de recherche
Albatross à bord duquel se trouvait Agassiz, auteur de The coral reefs of the tropical
Pacific (1903).

1.2 Une longue histoire


La Royal Society of London avait, dès 1896-1898, financé une première expédi-
tion scientifique, la Funafuti Coral Reef Boring Expedition, qui avait permis de
réaliser le premier forage dans une couronne corallienne. Poussé jusqu’à 339 m,
sans atteindre le substratum volcanique, il avait néanmoins permis d’apporter un
argument de poids à la théorie de la subsidence postulée par Darwin, en infirmant
par avance les critiques que lui a adressées Daly (1948).
Sans intéresser une telle tranche d’eau, il ne fait guère de doute, toutefois, que
les variations glacio-eustatiques ont introduit des complications dans le schéma
darwinien, comme l’a révélé le réexamen par Ohde et al. (2002) de carottes
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conservées au Natural History Museum de Londres. Les datations isotopiques de


35 échantillons ont mis en évidence, depuis 1,5 Ma, l’aptitude des constructions
coralliennes à s’accommoder à la fois d’un affaissement continu du substrat
estimé à 3 m 100 ka-1 et de fréquentes émersions prolongées associées aux
périodes glaciaires. Le sommet karstifié du récif édifié pendant la dernière période
interglaciaire se rencontre à – 26,4 m, épaisseur minimale de l’édifice holocène
dont la formation a débuté à 8 100 BP.
Les motu s’accrochent sur du corail mort qui témoigne d’un niveau de la mer
supérieur à l’actuel au milieu de l’Holocène où un niveau relatif à + 2,2/2,4 m a
été identifié par Dickinson (1999), avant le « siphonage de l’océan équatorial »

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(Mitrovica et Peltier, 1991) : postérieurement à l’achèvement de la transgression
flandrienne s’est, en effet, produit un reflux vers les moyennes latitudes, provoqué
par la subsidence hydrostatique qui a accompagné la détumescence des « bour-
relets périphériques » jalonnant les limites extrêmes des inlandsis laurentidien et
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fennoscandien.

1.3 Un constant réaménagement


L’apport du matériel biodétritique, qui construit une levée de tempête au vent et
un cordon de plage du côté du lagon, provient des aires productrices épirécifales
amont et post-récifales où il est libéré à la fois par la fragmentation mécanique des
coraux et par la bioérosion assurée par des éponges, des poissons et des oursins.
Si, en raison de la latitude de Funafuti (8,5°S), les cyclones sont rarement
formés lorsqu’ils atteignent l’île, les recherches menées dans les archives du
Service météorologique tuvaluan ont permis d’identifier six de ces événements
météomarins destructeurs (1914, 1928, 1958, 1972, 1993 et 1997) de faible
fréquence mais de forte énergie, qui, responsables de forts dommages, n’en ont
pas moins été des agents de construction sédimentaire extrêmement actifs.
L’exemple du cyclone Bebe, le plus morphogène, est bien connu qui, en 1972,
a frappé violemment l’atoll de Funafuti, faisant 6 victimes, privant 800 ressor-
tissants de leurs habitations et détruisant les trois quarts des cocoteraies (Lewis,
1989 ; Aalbersberg et Hay, 1991). Le 21 octobre, les vagues poussées par des
vents de 280 km.h-1 , ont édifié sur le platier oriental un rempart littoral de 19 km
de long, 37 mètres de large et 4 m de haut. Le volume sédimentaire accumulé,
sous forme de blocs d’un diamètre moyen de 10 cm, a été estimé à 2,8.106
m3 (Maragos et al., 1973 ; Baines et McLean, 1976), représentant une aggra-
dation de quelque 10 à 20 %. Cet événement morphogène a été extrêmement
dommageable pour l’ensemble frontorécifal, avec l’arrachage de blocs coralliens
jusqu’à 20 m de profondeur et la fracturation du rebord du platier. Les premières
observations, réalisées par Mergner (1985) en juillet 1973 ont montré, à la faveur
de sept transects, l’amorce d’une recolonisation scléractiniaire, assurée, entre 75 et
80 %, par des coraux branchus appartenant aux genres Acropora (essentiellement
A. humilis et A. hyacinthus). Mais, a contrario, l’ensemble épirécifal a bénéficié
de cette accumulation qui a assuré aux îles situées au vent une défense naturelle
contre les attaques océaniques. Si, dans certains secteurs de la façade orientale
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de l’atoll, peuvent être encore observés les vestiges de ce rempart, dans d’autres,
ils ont totalement disparu et se confondent avec le trait de côte actuel dont les
travaux de Webb (2006), menés entre 1984 et 2003, ont montré la progradation
puisque, à l’échelle de l’atoll, le gain surfacique s’élève à 2,75 ha.
À l’état naturel, les îles basses coralliennes représentent des formes d’équilibre
dynamique qui connaissent une série d’ajustements physiques en réponse à des
conditions limites changeantes, l’élévation du niveau marin n’étant qu’un des
facteurs de contrôle, et leur robustesse a été récemment rappelée par Kench et
al. (2006), à partir de l’examen de 13 atolls inhabités de l’archipel des Maldives
qui avaient été frappés, pendant 6 heures, par une succession de vagues, lors du

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tsunami généré par le séisme de Sumatra de décembre 2004. L’étude de Webb et
Kench (2010) montre que l’élévation du niveau marin est insuffisante à entraîner
une érosion généralisée du littoral, et, quand la ligne de végétation permanente,
extraite de photographies aériennes, puis d’images satellites à haute résolution, est
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utilisée comme marqueur des modifications du linéaire côtier, elle n’indique pas,
en raison des incertitudes liées au géoréférencement et à la digitalisation du trait
de côte, d’évolutions sensibles, en dehors d’un allongement de quelque 150 m
de l’extrémité méridionale du boomerang (Rufin-Soler, 2004 ; Xue, 2005).
Le 5e rapport du GIEC (IPCC, 2014) insiste, au travers de plusieurs exemples
de micro-États insulaires, sur les mécanismes d’ajustement naturel qui leur
permettent de s’adapter aux pressions d’origine météo-marine. Mais, sur ces
îles par nature très exiguës, une mauvaise gestion de leur environnement exacerbe
leur vulnérabilité conjoncturelle et fait peser des contraintes sur le long terme.

2 Un écosystème fragile

L’archipel de Tuvalu totalisait 12 373 habitants en 2009, après avoir compté


3 600 habitants à la fin du XIXe siècle et 7 300 habitants au moment de l’indé-
pendance (Ambroz, 2009). On suivra volontiers Wyrtki (1990), lorsqu’il affirme,
à propos de Fongafale, que « la croissance exponentielle de la population est sans
aucun doute plus préjudiciable que l’élévation du niveau de la mer, de l’effet de
serre additionnel ou de toute autre prévision sur les changements climatiques ».

2.1 La concentration de la population


Alors que l’atoll de Funafuti rassemble désormais 47 % des Tuvaluans, il n’en
hébergeait que 7 % en 1884, quand 240 habitants vivaient sur Fongafale (Hedley,
1896). Après l’indépendance, les migrations en provenance des outer islands se
sont multipliées vers l’île devenue capitale, qui a gagné 653 habitants entre 1991
et 2002, tandis que la part de six îles régressait durant cette même période
intercensitaire (Nanumea, Nanumaga, Niutao, Nui, Nukufetau et Nukulakita). À
partir de 1999 s’est ajouté le retour des travailleurs employés dans les carrières de
phosphate de Nauru et Banaba (Kiribati). Aucune île-capitale dans le Pacifique n’a
connu une augmentation aussi rapide de sa population, en raison de l’installation
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des départements ministériels, de l’implantation de nouvelles infrastructures et


de la création d’emplois citadins (Connell, 1999 ; Connell, 2003). Ainsi, la
communauté de Lofeagai, occupant le nord de l’île, s’est accrue, entre 2002
et 2011, de 399 à 637 individus, dont 75 % sont originaires du reste de l’archipel.
Cette forte croissance démographique, qui engendre des conflits fonciers en lien
avec un considérable morcellement des terres, s’accompagne d’un développement
spontané du bâti.

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Fig. 2 Évolution de l’occupation du sol dans la section médiane de l’île de Fongafale,


d’après H. Yamano et al., 2007.
Changes in land use in the central section of Fongafale Island, according to H.
Yamano et al., 2007.

2.2 La fragilisation du support


La densité de population de la capitale de Tuvalu est passée de 280 habitants
au km2 au sortir de l’indépendance à 3 500 (contre 220 dans les outer islands)
d’après les dernières études, et une telle croissance s’est évidemment accompagnée
de modifications considérables de son environnement.
Durant la guerre du Pacifique, l’armée américaine s’est massivement installée
dans l’archipel de Tuvalu, y rassemblant jusqu’à 6 000 soldats en octobre 1942
(Roberts, 1958). L’île de Fongafale, attaquée à neuf reprises par l’aviation nip-
pone en 1943, après l’occupation de l’atoll de Tarawa, capitale de l’actuel État
de Kiribati (îles Gilbert) par l’armée japonaise, a été rendue rapidement opéra-
tionnelle par des aménagements massifs : construction d’une piste de 1 900 m de
long, création d’une aire de stationnement pour hydravions, édification d’un quai
d’embarquement, aménagement de chenaux de navigation... Si les prélèvements
lagonaires ont assuré un apport en matériaux, ils n’ont pas suffi pour répondre
aux travaux entrepris, notamment au comblement partiel du marais central, et
les plus gros prélèvements ont dû être opérés dans la structure même de l’île
par le creusement de dix borrow pits. Ces trous béants ont privé les habitants de
52 hectares de terres constructibles et/ou cultivables, et des études ont estimé
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Fig. 3 Vue aérienne de la section médiane de l’île de Fongafale, Y. Lageat, 2012.


Aerial view of the central section of Fongafale island, Y. Lageat, 2012.

entre 645 000 m3 et 780 000 m3 le volume de sédiments qui serait nécessaire
pour combler ces cavités (Gibb Australia, 1985). Aussi s’est-on contenté de leur
remblaiement partiel par des déchets verts ou des déchets ménagers qu’il n’est
pas rare de voir flotter à leur surface en période de grandes marées de vive-eau.
Le prélèvement des matériaux, passé ou actuel, reste un problème majeur
pour Tuvalu, comme pour tout autre micro-territoire insulaire, bien que loi
relative aux remblais et à l’exploitation des fonds marins l’interdise, sauf octroi
d’une licence par l’Island Council (Government of Tuvalu, 1978). Il n’est pas
surprenant que des matériaux accumulés sur les côtes orientales, lors du cyclone
Bebe, aient été démantelés par la population, comme, par exemple, au droit de
la station météorologique de Fongafale (Yamano et al., 2007), et utilisés, après
broyage, comme granulats pour la construction des habitations et des routes qui,
accroissant l’imperméabilisation, réduisent le rechargement de la nappe.

2.3 La contraction des ressources en eau douce


D’après Roy et Connell (1991), toutes les îles d’origine corallienne d’au moins
1,5 ha et 200 m de diamètre sont pourvues d’une lentille d’eau douce (dite de
Ghyben-Herzberg) flottant hydrostatiquement sur l’eau salée, dont le volume
est proportionnel à la largeur et la surface de l’île (Fetter, 1972). Son origine
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Fig. 4 Un borrow-pit dans le nord de Fongafale, C. Rufin-Soler, 2001.


A borrow-pit in the northern part of Fongafale, C. Rufin-Soler, 2001.

est liée à l’infiltration et à l’accumulation dans le sous-sol poreux d’une fraction


des précipitations qui s’élèvent en moyenne à 3 100 mm par an à Funafuti
(1980-2009) : l’île se localise entre les deux positions moyennes de la « Zone de
Convergence du Pacifique Sud » (ZCPS), structure pluviogène qui se détache
de l’équateur météorologique à partir de la Papaouasie-Nouvelle-Guinée (5°S-
140°E) et s’étire jusqu’à l’extrémité méridionale de l’archipel des Tuamotu
(30°S-120°W), à l’aplomb d’un appendice de la « piscine chaude du Pacifique
occidental ».
Sur l’île de Fongafale, la lentille d’eau douce n’est plus sollicitée pour la
consommation humaine depuis la Seconde Guerre mondiale, les puits étant,
selon les mois de l’année, soit pollués, soit saumâtres, soit même salés. L’approvi-
sionnement en eau est désormais assuré par la collecte de l’eau pluviale grâce à
l’adoption des toits en tôle et des citernes individuelles (tanks) et par une unité
de dessalement de l’eau de mer, installée en 1999 et remplacée en 2006, dont
la capacité journalière serait de 40 000 litres. Toutefois, l’irrégularité pluviomé-
trique est grande, oscillant entre 2 225 et 6 770 mm selon les années entre 1942
et 2009. Ainsi, durant l’automne et l’hiver 2011, entre mars et septembre, le total
des précipitations n’a représenté que 40 % de la normale 1980-2009 du fait d’un
épisode de Niña, marqué par un renforcement des alizés et un déplacement des
eaux chaudes de surface vers les côtes occidentales de l’océan Pacifique soumises
dès lors à une pluviosité supérieure ; dans le même temps, Tuvalu, dont s’éloigne
la cheminée d’ascendance de la Zone de Convergence, est exposé à une pénurie
532 • Caroline Rufin-Soler, Yannick Lageat ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N° 705 • 2015

d’eau. L’état d’urgence fut proclamé le 28 septembre et ne sera levé qu’un mois
plus tard, imposant un rationnement de l’eau douce, à raison de 40 litres par
famille et par jour. Afin de remédier à une situation devenue dramatique, la
Nouvelle-Zélande acheminera par avion une unité mobile de désalinisation, tan-
dis que l’Australie financera le transport par bateaux d’un million de litres d’eau
potable de Suva (Fidji) à Funafuti. Depuis lors, ce dernier atoll et les outer islands,
dont l’approvisionnement par mer n’est assuré que par trois ou quatre rotations
annuelles, disposeraient, au total, de quelque 2 000 citernes en polyéthylène de
10 000 litres de capacité respectivement fournies par la Communauté européenne
(pour les deux tiers) et l’Australie.

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En raison de sa surexploitation, mais aussi des prélèvements massifs par les
cocotiers (Cocos nucifera) et les pandanus (Pandamus tectorius), la lentille d’eau
douce amincie est particulièrement vulnérable à l’intrusion latérale d’eau de
mer préjudiciable à la culture traditionnelle du tarot géant pulaka (Cyrtosperma
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chamissonis) qui, cultivé dans des fosses, manifeste une faible tolérance au sel. Il
s’y ajoute les pollutions diverses qui rendent la consommation de l’eau des puits
impropre : effluents animaliers dus à l’élevage porcin développé dans les années
1960 pour apporter des engrais naturels aux cultures, et effluents organiques liés
à l’usage des côtes lagonaires ou océaniques comme lieux d’aisance. En l’absence
d’un réseau d’assainissement collectif et de traitements bactériologiques se posent
des problèmes de santé publique, puisque la population consomme indirectement
l’eau douce contaminée par des fèces animales ou humaines, les micro-organismes
pathogènes étant rejetés de nouveau dans l’environnement.
Il est vrai que, contrairement aux Maldives, les préoccupations hygiénistes
sont absentes de Tuvalu, tenu à l’écart des flux touristiques puisqu’il n’accueille
guère plus de 1 000 à 1 500 visiteurs par an, et il est grandement excessif de
s’émouvoir de l’attrait voyeuriste qu’exercerait ce “hotspot” du changement
climatique (Farbotko, 2010).

3 Un écosystème condamné ?

Raisson (2010) s’est livrée à un exercice de prospective à l’horizon de 2033 :


« Encore peuplé de 8 400 habitants (contre 12 000 en 2010), répartis sur neuf
atolls, Tuvalu constitue le plus petit État du monde après le Vatican. Depuis
2025, près d’un tiers de ses ressortissants ont répondu positivement aux plans
d’évacuation volontaire vers l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’île Maurice et
Madagascar ». Telle est, en effet, l’avenir promis aux Tuvaluans depuis que
Brian Fisher, alors directeur exécutif de l’Australian Bureau of Agricultural and
Ressource Economics, avait appelé, en 1996, à la mise sur pied d’une stratégie
de relocalisation des populations des îles atolliennes, que Yamano et al. (2007)
estiment à 700 000 habitants dans l’aire indo-pacifique.
Articles Un atoll emblématique des risques environnementaux ? • 533

3.1 Les marges d’incertitude


La réalité de l’élévation eustatique du niveau marin sur les rivages de l’archipel
tuvaluan est l’objet de débats contradictoires, sinon polémiques. Eschenbach
(2004a) avance un taux annuel de + 0,07 mm.an-1 (– 1 à + 0,5 mm.an-1 ), et
des pêcheurs soulignent même les difficultés croissantes qu’ils rencontrent pour
franchir certaines passes (Morgan, 2002). Hunter (2004), qui s’inscrit en faux
contre de telles assertions et retient le chiffre de 2,3 ± 1,6 mm.an-1 , s’est attaché
à justifier ces discordances :
– la brièveté des enregistrements fournis par deux marégraphes opérés respec-
tivement par le Sea Level Centre de l’Université d’Hawaï (UHSLC) de 1977 à

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1999 et par le National Tidal Centre australien (NTC) depuis 1993 ;
– une différence probable de 1,2 mm entre les deux sites due à l’affaissement
de la digue de béton portant la jauge de l’UHSLC ;
– la grande variabilité interannuelle, qui impose un allongement des enre-
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gistrements pour une estimation fiable des taux d’élévation, qu’il s’agisse de
submersions périodiques, lors des King Tides – pleines mers de février à avril
et de septembre à novembre, pouvant atteindre + 1,50 m, comme les 19 et
20 février 2004 –, ou d’ondes de tempête apériodiques, à l’occasion de passages
cycloniques, comme le 5 mars 1997, quand Gavin provoqua une surcote de
3,33 m qui, fort heureusement, coïncida avec un faible coefficient de marée (Lin
et al., 2014).
Il faut y ajouter l’impact prolongé des événements ENSO (acronyme formé
par les initiales d’El Niño et de Southern Oscillation) qui se manifestent par
un transfert d’eaux chaudes de surface vers les côtes sud-américaines et par
un renversement du champ barométrique, les hautes pressions passant de l’est
à l’ouest du Pacifique : celui de 1997-1998 s’est marqué par un abaissement
spectaculaire du plan d’eau océanique de 35 cm en mars-avril 1998 à Funafuti,
ce qui pourrait expliquer, selon Hunter (2004), les conclusions d’Eschenbach
(2004b) qui surestimerait l’impact de cet événement en les appuyant sur une série
trop courte. Essayant de pallier cet inconvénient par des méthodes statistiques
(combinant séries marégraphiques et réponse des océans aux variabilités régionales
entre 1950 et 2009), les derniers travaux réalisés par Aung et al. (2009) et Becker
et al. (2012) estiment qu’à Funafuti, la hausse du niveau marin atteint plus de
4,5 mm/an depuis le milieu du XXe siècle, voire 5 mm/an si l’on y ajoute l’effet
de la subsidence.
Bien qu’elle soit très supérieure, dans l’ouest du Pacifique, à la hausse moyenne
globale estimée sur cette période à 1,8 mm/an, l’analyse de la mobilité du trait
de côte réalisée sur deux atolls de Polynésie française confirme qu’au cours des
cinquante dernières années, le facteur de contrôle est moins l’eustatisme que
l’hydrodynamisme (Yates et al., 2013).
Quoi qu’il en soit des difficultés théoriques et pratiques que soulève l’éta-
blissement d’une tendance, on sait que les constructions coralliennes peuvent
accompagner (keep-up reefs), voire rattraper (catch-up reefs), l’élévation du niveau
marin quand les conditions écologiques l’autorisent, comme tout au long de
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Fig. 5 Variations du niveau marin à Funafuti depuis 1950, d’après M. Becker et al., 2012.
Sea level variations in Funafuti since 1950, according to M. Becker et al., 2012.

la transgression flandrienne. Toutefois, leur état de santé fait désormais l’objet


d’interrogations en raison de leur blanchiment. Il s’agit d’une réaction naturelle
face à un stress, naturel ou externe, qui se traduit par l’expulsion massive de
zooxanthelles symbiotiques. Si le stress est limité dans le temps, les coraux peuvent
survivre (Rufin-Soler et Laborel, 2007). Toutefois, s’il se prolonge, la « mort
blanche » des récifs peut être massive, comme lors de l’ENSO de 1997-1998
quand plus de soixante pays en ont été affectés. Tuvalu, qui, comme tout le
Pacifique central, en avait été préservé, a été fortement marqué par une phase
de blanchiment en 2002, laquelle, en l’occurrence, n’était pas associée à un
événement El Niño (Samasoni, 2002).
Articles Un atoll emblématique des risques environnementaux ? • 535

En dépit des possibilités de résilience dont disposent les îles basses coralliennes,
que vérifient des observations réalisées au sein de l’archipel des Maldives (Rufin-
Soler, 2004 ; Kench et Brander, 2006) et des Tuvalu (Rufin-Soler, 2004 ; Webb,
2006), un large consensus fait état des menaces qui pèsent sur leur avenir (IPCC,
2007), entretenant ainsi l’image d’« Atlantides modernes ».

3.2 Un scénario déjà écrit ?


Il est curieusement admis que le peuple tuvaluan se préoccuperait de son futur
exode, montrant la voie à d’autres. À preuve cette affirmation de Brown (2001,
in McNamara et Gibson, 2009) : « Tuvalu est le premier pays que sa population

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tente d’évacuer (where people are trying to evacuate) à cause de la montée des
eaux marines, mais il est presque certain qu’il ne sera pas le dernier. Il cherche
un hébergement pour ses 11 000 ressortissants, mais qu’en sera-t-il des 311 000
qui seraient forcés à quitter les Maldives ? ». Selon Farbotko (2005), le mot
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“tuvaluan” est devenu synonyme de “réfugié environnemental” dans la langue


anglaise depuis la publication, en 2001, dans le Sydney Morning Herald, d’un
article faisant explicitement référence à la menace que fait peser le réchauffement
climatique sur l’avenir de la nation archipélagique. On s’interroge même sur
la possibilité qu’aurait cet État insulaire de conserver sa souveraineté sur sa
Zone Économique Exclusive, et donc le contrôle de ses ressources naturelles,
et Yamamoto et Esteban (2010) et Bracq (2012) explorent les concepts d’état
déterritorialisé et de gouvernement en exil, à l’image de l’ordre souverain militaire
et hospitalier de saint Jean de Jérusalem.
En fait, les habitants de Tuvalu possèdent une longue tradition migratoire
qui a poussé, pour des raisons économiques jusqu’au tiers de la population
masculine adulte à s’employer sur les plantations de Samoa et du Queensland,
puis dans les mines de phosphate de Nauru et de Banaba, et, enfin, comme
hommes de mer sur des navires ultramarins, leurs envois représentant quelque
18 % du PNB (Munro et Bedford, 1990 ; Mortreux et Barnett, 2009). Ces
mêmes auteurs ont souligné l’attachement des habitants de Funafuti à leur terre
quoique l’échantillon sur lequel repose cette assertion soit trop étroit. Mais, de
fait, l’exode ne semble pas relever d’un scénario acceptable pour les Tuvaluans,
comme l’avait vigoureusement affirmé l’envoyé spécial du Premier ministre à la
Conférence sur le changement climatique en 1997, et ancien Premier ministre
lui-même, Toaripi Lauti : « Il n’y a aucun endroit sur Terre qui peut se substituer
au foyer que nous a donné Dieu. L’option de la relocalisation, que quelques pays
ont soulevée, est absolument indifférente et irresponsable » (utterly insensitive
and irresponsable).
S’il est vrai que 3 000 expatriés tuvaluans résident en Nouvelle-Zélande, et
principalement dans la région d’Auckland, on ne saurait en déduire qu’un accord
explicite lie les deux pays sur un accueil des futurs « réfugiés environnementaux ».
La politique d’immigration de Wellington, qui a été récemment rappelée en
2008 par son ministre des Affaires étrangères, évacue tout lien avec les problèmes
environnementaux engendrés par l’élévation du niveau marin : elle ne permet
536 • Caroline Rufin-Soler, Yannick Lageat ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N° 705 • 2015

l’installation que de 650 habitants des Pacific Access Countries, Tuvalu disposant
d’un contingent annuel de 75 individus qui est d’ailleurs loin d’être satisfait tous
les ans, tandis que l’Australie, qui a augmenté ses émissions de gaz à effet de
serre de 32,2 % entre 1990 et 2011, n’en accorde aucun, en cohérence cynique
avec son refus de ratifier le protocole de Kyoto.

3.3 Quel avenir ?


Le fait qu’un micro-État puisse susciter tant d’inquiétudes résonne comme
un signal d’alarme pour la communauté internationale, malgré la profonde
asymétrie des responsabilités : les populations, qui auraient précisément le plus

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à pâtir du changement climatique, sont des contributeurs très marginaux aux
émissions mondiales de gaz à effet de serre additionnel, et renvoient les puissants
à leurs responsabilités. Avant la conférence de Copenhague d’août 2010, l’AOSIS
(Alliance of Small Island States), créée en 1990, avait émis la revendication que
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l’objectif d’augmentation maximale de la température moyenne de l’atmosphère


terrestre soit ramené de 2 à 1,5 °C à l’échéance de 2100. Elle n’a pas obtenu gain
de cause, et, sur les 33 États insulaires qu’elle réunissait, 18 ont paraphé l’accord
de Copenhague, 12 se sont abstenus, et seulement 3, Tuvalu, Nauru et Cuba,
l’ont dénoncé. Le Premier ministre tuvaluan, Apisai Ielemia, qui a pris la tête
de la fronde, a résisté aux pressions de son homologue australien Kevin Rudd,
pressions auxquelles se sont pliées les autorités des Kiribati et des Maldives à qui
était proposé un fonds dédié à l’adaptation au changement climatique (Farbotko
et McGregor, 2010).
Ainsi, loin de partager le « sort silencieux » de l’atoll de Kilinailau, dépendant
de la Papouasie-Nouvelle-Guinée qui serait inhabitable dès 2015 (Vanney, 2009),
Tuvalu entretient une posture « victimaire », ses habitants, qui vivraient en parfaite
harmonie avec la nature, étant les innocentes victimes d’une injustice planétaire
(Farbotko et Lazrus, 2012). « Aider à sauver Tuvalu signifie aider à sauver
également votre monde » (selon la formule popularisée par des organisations
non gouvernementales). Le pays est, de fait, un des premiers bénéficiaires de
l’aide internationale, supérieure à son PNB, qui s’ajoute à la vente de licences de
pêche (à Taïwan, au Japon, à la Nouvelle-Zélande ou aux États-Unis) et du nom
du domaine Internet « .tv ». Quelles que soient la surenchère médiatique et la
compassion internationale, il ne disposerait pour l’avenir que de deux options
que Vanney (2009) a ainsi formulées :
– « laisser faire la nature, c’est-à-dire reculer en abandonnant l’île aux lois
naturelles de sa mort » ;
– « se maintenir coûte que coûte », malgré l’inanité et le coût des mesures
ingénieurales : à Funafuti, pour protéger les 2,7 km2 de surface, il faudrait
construire 54 km de défenses côtières (Lewis, 1989), chaque kilomètre de
tétrapodes exigeant un investissement de 2,5 millions de dollars pour une durée
de vie vicennale à cinquantennale.
Poursuivant son voyage aux « Îles de la Disparition », après la traversée
des océans Atlantique et Indien, et examinant, dans l’océan Pacifique, où elles
Articles Un atoll emblématique des risques environnementaux ? • 537

trouvent leur terrain de prédilection, les dossiers de candidature de quelques-uns


de ces États-archipels voués à la « noyade », Vanney (2009) estime que « le triste
sort des Tuvaluans puis des Tuvalu semble bel et bien jeté ».

Conclusion

F. Gemenne (2010) a souligné les risques que faisait courir la rhétorique des
« canaris » sur les possibilités d’adaptation de la population tuvaluane au risque de
submersion : si, « en Occident, elle a joué un rôle important dans la sensibilisation

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aux impacts du changement climatique », il s’en faut qu’elle « trouve un écho
dans une réalité empirique locale ».
Les habitants de l’archipel, abreuvés de prévisions alarmistes, mais privés de
tout scénario qui chiffrerait l’espérance de vie de l’État “titanique” sur lequel ils
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seraient embarqués, tendent à se déresponsabiliser, et leur attitude est, de fait,


ambivalente : alors qu’ils se refusent à considérer comme inéluctable l’exode qui
leur est promis, le poids de traditions séculaires les conduit, dans le même temps,
à sacrifier leurs intérêts immédiats à des pratiques négligentes.
Le contraste est donc flagrant entre le pessimisme radical entretenu par la
doxa scientifique, qui appelle au repli, et l’optimisme théologique, qui anime une
communauté protestante se refusant à abdiquer, mais se montrant fort insoucieuse
d’une gestion raisonnée de son environnement proche.
L’avenir de l’archipel n’est pas seulement compromis par l’inaction de la
communauté internationale : il l’est, à échéance plus proche, par la posture
victimaire de sa population, qui, invitée au renoncement, n’est cependant pas
condamnée à l’inaction.

Université du Littoral Côte d’Opale


TVES EA 4477
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Université de Bretagne Occidentale


Géomer
UMR LETG 6554 CNRS
Institut Universitaire Européen de la Mer
Technopôle Brest-Iroise
29280 Plouzané
yannick.lageat@univ-brest.fr

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