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ACCOMPAGNEMENT ENTREPRENEURIAL : LE POINT DE BASCULE

Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

De Boeck Supérieur | « Entreprendre & Innover »

2019/1 n° 40 | pages 77 à 93
ISSN 2034-7634
ISBN 9782807392724
DOI 10.3917/entin.040.0077
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2019-1-page-77.htm
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Accompagnement
entrepreneurial :
le point de bascule 
> Fabienne Bornard
> Dominique Frugier
> Dominique-Anne Michel
> Olivier Toutain

Résumé

Le monde de l’accompagnement entrepreneurial connaît un véritable « point de bascule », moment de


transition entre un « avant » révolu et un « après » dont les contours sont encore flous. Ce monde est
aujourd’hui traversé de multiples contradictions. Certaines sont anciennes mais exacerbées. D’autres, radi-
cales, découlent de la transformation du monde du travail et de la digitalisation. Dans ce contexte, nombre
d’acteurs expriment un réel désarroi et un sentiment d’impuissance face aux conséquences de décisions sur
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lesquelles ils n’ont pas toujours prise. Un consensus émerge cependant quant à la transformation en cours.
Les accompagnants évoquent une consolidation darwinienne de l’offre, avec des fusions, regroupements ou
disparitions probables de structures. Ils envisagent une nécessaire prise d’autonomie par rapport aux finan-
ceurs publics, davantage de concurrence mais aussi de coopération entre acteurs, une diversification des
modèles économiques, le recours à de nouveaux outils, en particulier numériques, l’invention de nouvelles
modalités, plus ludiques et pédagogiques, d‘appui. Tous insistent sur le maintien des « fondamentaux » du
métier, en l’occurrence un accompagnement centré sur l’humain, exigeant en temps et en ressources, ce qui
pose la question du financement, moins assuré que jamais.

Abstract

The world of entrepreneurial coaching is experiencing a real «tipping point,» a moment of transition
between a «before» and an «after» whose outlines are, however, still unclear. Today, the world is filled
with many contradictions. Some are old, but recently exacerbated. Others are radical and result from the
transformation of the world of work and digitalization. In this context, many coaches express a real distress
and a feeling of helplessness when faced with the consequences of decisions over which they might have had
no say. However, a consensus is emerging regarding the ongoing transformation of entrepreneurial coaching.
Coaches describe a Darwinian reinforcement of their work, with likely structural mergers, regroupings or

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Pour une approche distanciée de l’entrepreneuriat
Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

deletions. Furthermore, they predict a necessary increase in autonomy from public funders, an increase in
competition as well as cooperation with actors, a diversification of economic models, the use of new tools (in
particular digital ones), the invention of new coaching methods, both more playful and more educational. All
actors insist on maintaining the «fundamentals» of the profession: human-centered support, requiring time
and resources, which raises the question of financing, which is less certain than ever.

Les points forts


• Entre chute des financements publics, attentes croissantes mais hétérogènes
des porteurs de projet, digitalisation du monde et concurrence de nouveaux
acteurs, le monde de l’accompagnement entrepreneurial apparaît en plein
bouleversement et est en proie au doute.
• Quatre membres de la rédaction d’Entreprendre & Innover ont recueilli la
parole de vingt-sept professionnels de l’accompagnement en marge du
colloque ProCréa organisé du 5 au 7 juin 2019 par la CCI et la Chambre des
Métiers et de l’Artisanat Occitanie Pyrénées-Méditerranée.
• Le contenu de ces entretiens, croisé avec les propos tenus lors des ateliers,
traduit une forte ambivalence : d’un côté, une angoisse face à une perte de
reconnaissance et de légitimité, mais de l’autre une réelle dynamique créative
à l’œuvre au sein des réseaux, stimulée par des défis de grande ampleur qui
se dessinent et par l’obligation de se réinventer pour survivre.
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« Dtion provocatrice, posée d’emblée
oit-on continuer ? » Cette ques- été initié par les acteurs de la création et
de la transmission d’entreprise, en parti-
par les organisateurs du salon ProCréa 1 culier les chambres consulaires (chambres
pour stimuler la réflexion des partici- de commerce et d’industrie, chambres
pants, en dit long sur l’état d’esprit qui des métiers et de l’artisanat, chambres
règne dans les réseaux de soutien à la d’agriculture), mais il rassemble bien au-
création et à la reprise d’entreprise. Sous- delà de ces réseaux. Il est unique en son
titré plus positivement « les clefs pour genre car on y échange entre pairs, sans
réinventer l’accompagnement entrepre- langue de bois et sans éluder les difficul-
neurial », cet événement organisé début tés ou les contradictions.
juin 2019 offrait une opportunité unique
Nous avons constitué une équipe mixte
d’étudier la façon dont ceux qui en sont
de quatre personnes, deux chercheurs
les acteurs vivent le bouleversement en
en entrepreneuriat et deux profession-
cours. Ce salon a la particularité d’avoir
nels aguerris pour aller à la rencontre
des participants. Nous avons mené un
1 Toutes les informations sur ce salon, ainsi que les
captations vidéos des principaux moments forts  :
total de vingt-sept entretiens d’une durée
http://procrea-lecongres.blogspot.com de dix à trente minutes au cours de ces

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deux journées, en procédant par sondage business models de l’accompagnement :


aléatoire (voir tableau 2), ce qui a permis doit-on continuer à compter sur les finan-
d’obtenir une représentation équilibrée : cements publics, comment réinventer
conseillers et responsables de services des nos BM ? » Sans oublier le point d’orgue
chambres de commerce et d’industrie de du congrès, une cérémonie d’hommage
différentes régions et chargés d’accompa- mettant en scène avec humour l’enterre-
gnements de réseaux associatifs en par- ment de l’accompagnement « à la papa »,
ticulier. Les entretiens ont été menés sur avec prise de parole des différents acteurs
la base d’un même guide autour de trois concernés.
grands thèmes : les besoins des entrepre-
Globalement, les acteurs expriment clai-
neurs accompagnés, l’impact du digital
rement la réalité de la transition d’un
dans les pratiques professionnelles d’ac-
métier (résumée dans le tableau  1),
compagnement, les évolutions du métier,
même si le vécu individuel varie selon
actuelles et à venir.
les contextes. C’est un changement de
Ces entretiens ont été complétés par grande ampleur qui est unanimement
des observations participantes pendant constaté. Les accompagnants évoquent
certains ateliers, avec prise de notes, en « une petite révolution  », « un effet
particulier à des moments traitant direc- chamboule tout » qui impose de dévelop-
tement de la transformation du système per d’autres pratiques, de « se réinven-
d’accompagnement. Notons en particu- ter »… jusqu’à acter la fin d’une époque
lier les plénières et l’atelier « Évolution des en célébrant joyeusement ses funérailles.

Tableau 1 : Synthèse de la perception de la nouvelle donne du métier d’accompagnant


Au niveau des chargés d’accompagnement
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• Quitter la posture d’expert, qui relève d’une relation « descendante » ; faire « avec » la
personne et non plus à sa place (ex : pour le Business Plan) ; recentrer le métier sur la
synthèse et l’analyse d’éléments recueillis auprès de différentes sources (experts, internet,
etc.) et non plus uniquement transmettre des connaissances.
• Organiser les informations et le déroulement du projet.
• Personnaliser les prestations de manière fine selon les types de projets et de porteurs,
passer de l’industrie qui traite du volume à l’artisanat qui s’adapte à chacun.
• Aider à prendre du recul, questionner (posture de la maïeutique), coacher.
Au niveau des structures
• Reconquérir une légitimité : se distinguer de ceux qui disent faire de l’accompagnement
sans en faire, redéfinir le métier, démontrer une capacité à générer de la valeur.
• Changer de culture pour se redéfinir : passer de la culture du service public, du gratuit, à
la culture entrepreneuriale, aux outils et modes de management importés du monde de
l’entreprise ; remplacer « bénéficiaire » par « client » ; apprendre à détecter les besoins
solvables, etc.
• Devenir entrepreneurs : concevoir des prestations, les positionner par rapport à la
concurrence, sourcer les porteurs de projet, créer une image de marque d’expert référent
tout au long de la vie de l’entreprise.
• Changer de modèle économique pour aller chercher des financements auprès des structures
privées, inventer des modèles hybrides, s’ouvrir davantage aux autres acteurs
de l’écosystème.

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Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

Les pratiques qui se sont développées réalité des créations d’emplois dans les
sur le terrain depuis plusieurs décennies entreprises classiques, obligation de fac-
(le réseau des Boutiques de Gestion fête turer des services mais paupérisation
ses 40 ans en 2019 !), sont chahutées de la clientèle (…) ». Ces contradictions
par deux événements majeurs : la trans- ont toujours existé. Elles résultent de
formation du monde du travail et celle l’ambiguïté qui dure maintenant depuis
induite par le digital. Ces phénomènes une quarantaine d’années autour de
convergent, se renforcent mutuellement ce qu’il est convenu d’appeler l’appui à
et génèrent une transformation profonde la « Création d’Entreprise » : la tension
du métier d’accompagnateur. Mais pour entre d’un côté ce qui relève du déve-
aller vers quoi ? loppement économique et de la création
de valeur marchande et de l’autre ce
L’incertitude ressentie par les accompa-
qui relève de l’insertion et du retour à
gnants va de pair avec l’inconfort d’être
l’emploi. S’agit-il d’aider des entreprises
confronté à plusieurs types de situations
rentables à naître et à se développer et/
nouvelles, dans un contexte de baisse des
ou de permettre à des personnes de vivre
ressources : nouveaux métiers que l’on
de leur travail, au besoin en les aidant à
connaît mal, mais également nouveaux
créer leur propre et parfois microscopique
types de modèles d’affaires issus du
emploi ? Autrement dit, peut-on concilier
numérique devant lesquels l’écosystème
l’économique et le social ? Une même
d’accompagnement est parfois désem-
structure, un même dispositif peuvent-ils
paré. Les professionnels sont également
accueillir tout le monde, y compris ceux
confrontés à de nouvelles attentes, en
qui in fine ne créeront rien du tout, « et
particulier à l’évolution du comporte-
en même temps » travailler à la détec-
ment des jeunes qui cherchent plus de
tion et au développement des « gazelles »
sens, « veulent s’amuser », sont soucieux
et autre futures « licornes » ? Est-ce le
d’un équilibre vie privée/vie profession-
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même métier ? Au fil du temps, la réponse
nelle, sont en quête de liberté et s’inté-
a évolué.
ressent peu aux questions financières.
Le tableau 1 synthétise les principales
Ű Ű Au commencement était l’Emploi
problématiques évoquées lors des entre-
tiens. Les politiques de l’emploi constituent
depuis l’origine le sous-bassement histo-
Une ambiguïté persistante rique de l’accompagnement des porteurs
mine les politiques d’appui de projet. Elles ont profondément évolué
depuis l’impulsion donnée par Raymond
à la création d’entreprise Barre en 1979, qui visait à ouvrir de nou-
Dans un propos liminaire, les organisa- velles issues aux chômeurs via le dispositif
teurs de ProCréa 2019 pointaient avec ACCRE 2 alors que le salariat était la norme
justesse quelques paradoxes, tensions dominante. Aujourd’hui, le salariat recule
et contradictions inhérents à l’accompa- et la flexibilité est de mise. La naissance du
gnement entrepreneurial : « explosion statut d’auto-entrepreneur en 2008 scelle
de l’entrepreneuriat de nécessité mais la libéralisation du travail et transfère la
mythe de l’entrepreneur super héros,
affirmation d’une « startup nation » mais 2  Aide aux Chômeurs Créateurs Repreneurs d’Entreprise.

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responsabilité de l’emploi au travailleur, rebours du discours officiel 6 d’harmoni-


invité à s’en créer un s’il n’en a pas. Les sation des organismes et outils d’accom-
organismes d’accompagnement sont en pagnement sur le territoire, l’existence
première ligne face à cette transformation d’une véritable « guerre du sourcing », ou
socio-économique majeure, qui a généré d’actions commerciales de plus en plus
une croissance sans précédent du nombre agressives qui jouent parfois sur le flou de
des candidats à la création et la reprise la nature des prestations réellement pro-
d’entreprise. L’ambiguïté de fond évoquée duites.
plus haut génère deux effets apparemment
Les structures d’accompagnement « his-
contradictoires : d’une part, les réseaux se
toriques  », particulièrement les orga-
plaignent de manquer de moyens pour
nismes consulaires et les grands réseaux
accueillir tous les candidats-entrepre-
associatifs, se retrouvent ainsi confron-
neurs. Écoles et Boutiques de Gestion se
tés à la nécessité de faire évoluer leur
disent débordées face à la demande éma-
culture de service public vers une culture
nant des aspirants au travail indépendant.
libérale incarnée par une concurrence
Mais d’autre part les réseaux se livrent
accrue au niveau de la nature/qualité des
une concurrence larvée pour « sourcer »
prestations, de leur prix de vente et de
les projets. Le propos liminaire du Congrès
leur profitabilité. Certains témoignages
ProCréa parle à ce sujet de « concurrence
soulignent ainsi la nécessité de parler
exacerbée » entre les acteurs.
de « client » et de bannir du vocabulaire
le mot « gratuit » ; et d’ajouter que non
Ű Ű Densification et concurrence
seulement il faut désormais faire payer
L’offre d’accompagnement et de finan- les porteurs de projet et parvenir à les
cement s’est beaucoup densifiée ces fidéliser tout au long de la vie de leur
dernières années. Le paysage, autrefois 3 projet, mais aussi fidéliser de nouveaux
structuré autour de quelques réseaux types de « clients », comme les entre-
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d’accompagnement et de finance- prises qui participent au financement des
ments publics 4 et privés 5 est aujourd’hui prestations.
envahi par de nombreux acteurs régio-
Cette densification de l’offre procure aux
naux et nationaux, publics et privés, qui
porteurs de projet davantage d’oppor-
hébergent, accueillent, accompagnent,
tunités mais rend plus difficile la course
financent sans participation, financent
d’orientation dans le maquis entrepreneu-
avec participation, mettent en réseau,
rial, d’autant que les créateurs d’entreprise
tutorent, mentorent… Pour beaucoup
d’aujourd’hui réfléchissent de manière
d’organismes, l’enjeu de l’accompagne-
globale, intégrant de manière systémique
ment fondé sur l’accueil repose de plus en
des contraintes familiales et personnelles
plus sur la fidélisation. Dès lors, certaines
(mobilité, séparation/recomposition fami-
personnes interviewées ont souligné, à
liale/vie monoparentale, prise en charge
3  Des années 80 aux années 2000.
6 Prônant à ce titre depuis bien longtemps la mise en
4 Consulaires et incubateurs régionaux (Loi Allègre), place d’un guichet unique qui oriente, à l’échelle régio-
Plateformes d’initiatives Locales, Cigales, ADIE… nale, les porteurs de projet vers les structures d’accompa-
5 Grands réseaux associatifs d’accompagnement tels gnement les plus adéquates ; une vision harmonique et
que BGE, France Initiative Réseau, Union des Couveuses, rationaliste des outils complémentaires présentées par les
Pépinières d’entreprises et des cabinets de consultants… organismes dans l’intérêt du bien commun…

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Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

parentale) avec une évolution profession- professionnalisation s’est matérialisée


nelle faite de fins et de commencements par la mise au point de dispositifs basés
(perte d’emploi, changement d’em- sur des process, avec des phasages de
ployeurs, formation continue), désormais la création-reprise d’entreprise qui sont
davantage marquée par une vision épiso- bien établis, prédéterminés. Le processus
dique que carriériste… Cela conduit le por- d’accompagnement à la création-reprise
teur de projet à rechercher de nouvelles repose ainsi sur un langage commun aux
formes d’expertise, l’invitant plus que accompagnateurs, financeurs et porteurs
jamais à penser la valeur ajoutée socio-­ de projet. Les techniciens de la créa-
économique réelle de l’activité entrepre- tion d’entreprise sont apparus dans ce
neuriale, tant pour lui-même et ses proches contexte : de nombreux emplois ont été
que pour la société à laquelle il souhaite créés, destinés aux jeunes en quête d’une
contribuer. première expérience professionnelle. Des
formations internes ont été déployées
Ű Ű La transformation du monde pour les accompagner dans le démarrage
du travail influe sur les projets de leur carrière professionnelle.
et les parcours
Ű Ű La conception administrative
La transformation du monde du travail
reflète une évolution des modes de pensée
de l’accompagnement a vécu
et d’agir qui tendent à privilégier l’adapta- Aujourd’hui, l’offre aux porteurs de pro-
tion aux situations d’incertitude dans une jet repose toujours sur le déploiement de
échelle du temps présent, rompant ainsi réponses techniques et financières dans
avec la construction sociale, politique et le but de réaliser une étude de faisabilité
prédéterminée de futurs possibles. En (but à atteindre, déterminé à l’avance),
d’autres termes, la planification, l’orga- de monter un ou des dossiers facilitant
nisation hiérarchisée et structurée des l’accès aux financements et l’entrée dans
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entreprises, la relative stabilité de l’infor- le réseau des créateurs-repreneurs du ter-
mation et du marché, tout cela est remis ritoire. Le modèle d’affiliation exclusive,
en question. L’information abonde, les contrainte, d’un porteur de projet à une
opportunités économiques également, structure ou un guichet unique pouvant
sans qu’elles s’inscrivent pour autant de ce fait prétendre à une subvention
nécessairement dans une perspective de publique semble obsolète. La vieille idée
moyen/long terme. Dans le monde sala- du guichet unique qui ferait gagner du
rial, les conditions de travail continuent temps au futur entrepreneur n’a jamais
de se durcir, la pérennité et la stabilité de été validée. Cette vision administrative de
l’emploi de se détériorer. Dans un même l’accompagnement, confiant à une ou plu-
temps, les organismes d’accompagne- sieurs structures un monopole sur des por-
ment – et particulièrement les réseaux teurs de projets indépendants, n’a jamais
fondateurs, consulaires ou associatifs – se pu trouver de cohérence. Après tout, les
sont professionnalisés. Les territoires se porteurs de projets n’appartiennent à
sont pourvus, dès les années 90, de dis- personne ! Ils s’affilient ou collaborent
positifs de financements dédiés aux struc- simultanément avec plusieurs dispositifs
tures d’accompagnement comme aux d’accompagnement. Ils picorent, ce qui
entreprises en phase de création. Cette agace les picorés. Mais d’un autre côté ils

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font valoir que la diversité des structures l’accompagnement des créateurs d’entre-
accroît l’offre de services utiles au créateur. prises, par exemple dans le cadre des CCI
ou des CMA ? Pourquoi se poseraient-elles
Ű Ű Faut-il continuer d’aider la question « doit-on continuer ? » Après
les créateurs potentiels tout, elles ont par essence vocation à
et le faire gratuitement ? aider les entrepreneurs à se développer…
Il y a encore dix ans, personne n’aurait L’enjeu des politiques publiques territo-
posé la question de la légitimité ou de riales et le niveau d’aide financière per-
la pertinence d’un dispositif universel, tinent se situerait en fait dans la volonté
disponible sur l’ensemble du territoire et de conforter des projets plus ou moins
financé sur fonds publics pour les porteurs sélectivement, en fonction d’objectifs de
de projets. On considérait alors que les valeur ajoutée (par le degré d’innovation)
Français manquaient d’esprit entrepreneu- ou de création d’emploi (par type d’em-
rial. Pour y remédier, il fallait les sensibi- ploi dans des zonages). Le choix public est
liser, les accompagner en pré-émergence, ouvert entre aide à la personne payant
en émergence, en pré-­incubation, en incu- pour une prestation et aide à la struc-
bation, en accélération, en financement, ture (on retrouve ici une analogie avec la
en création. Aujourd’hui, l’esprit d’entre- problématique du logement social). Les
prendre est là. L’appui lors des phases accompagnants évoquent d’ores et déjà
amont du processus demeure pertinent, un glissement naturel de leur activité vers
mais les moyens à y consacrer deviennent l’aide au développement des jeunes entre-
nettement moins importants. La volonté prises. Pourquoi en effet ne pas transpo-
publique de faire croître la création d’en- ser le savoir-faire des accompagnants à
treprise a généré du service incitatif gra- la création vers l’accompagnement des
tuit pour le bénéficiaire. jeunes entreprises ?
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Une première question est de savoir si un
Ű Ű Les financements publics
créateur d’entreprise a besoin d’accompa-
gnement. Cette question pas si théorique
sont-ils en adéquation
mériterait un travail de recherche. À ce avec les besoins ?
stade, considérons que la création est un Des financements publics de structures
acte complexe pour lequel l’accompagne- d’accompagnement liés au critère d’en-
ment est bienvenu. À l’heure où l’utilité trée des candidats à la création d’entre-
du coaching personnel est reconnue dans prise dans la structure sont-ils toujours
tous les domaines, celle du coaching pour pertinents ? La question se pose. Certes,
créateur d’entreprise a du sens et une la progression de l’entrepreneuriat de
contrepartie : il génère une activité et de nécessité est forte et les décideurs publics
la valeur économique. le considèrent d’abord comme une solu-
tion au chômage de masse. Mais tout le
Seconde question  : doit-on désormais
secteur s’attend à une généralisation de
faire payer le service à des utilisateurs
systèmes d’aides aux structures basés
dans un secteur devenu concurrentiel ? La
davantage sur les résultats en matière de
réponse demeure éminemment politique
créations que sur la capacité d’accueil pri-
au niveau national comme au niveau terri-
maire des candidats.
torial. Alors où se situerait le problème de

Entreprendre & Innover / 83


Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

Une offre d’accompagnement en pleine consolidation


Les plus grosses structures se concentrent réseaux de mentorat, caisses de retraite,
sous l’effet d’une politique de financements associations d’anciens, clubs de chefs d’en-
publics plus restrictive et en réaction aux treprise et anges du business, coopératives
procédures d’appels d’offres et de mise en d’activités, éducation populaire, régies de
concurrence. La concentration est aussi quartier, communautés de communes, etc.
motivée par des stratégies de différencia- C’est un vrai fourre-tout ! Mais faut-il ratio-
tion par rapport aux nouveaux besoins des naliser tout cela, ou profiter de la profusion
créateurs. Cela se traduit dans une sophis- d’initiatives et de la concurrence ?
tication des offres et l’apparition d’outils en La concurrence des acteurs privés se pré-
ligne, par la création d’espaces collaboratifs cise. Les accélérateurs privés, les fonds d’in-
physiques ou numériques, par la création vestissement et le crowdfunding assisté se
de FabLab’, le tout exigeant de nouvelles développent. Les structures privées allient
compétences des accompagnants et de nou- financement en fonds propres et accompa-
veaux moyens. gnement. Dans un passé récent, les acteurs
Les grandes agglomérations tirent profit de la création d’entreprise estimaient que les
de cette concentration. C’est le cas à Paris, capitaux privés ne s’investissaient pas assez
qui est devenu un véritable aspirateur à pro- dans la création d’entreprise. Ce n’est plus
jets. La ville ne se considère d’ailleurs pas vrai actuellement. Doit-on s’en plaindre ? Il
en concurrence avec les autres métropoles reste que les structures privées sont sélec-
françaises, mais avec Londres, San Francisco tives et que la création d’entreprise est deve-
ou Berlin. Les agglomérations de Bordeaux nue à l’inverse un phénomène de masse.
et de Toulouse s’interrogent sur leur capa- Un besoin de régulation territoriale com-
cité d’accueil face à une demande très forte, mence à s’exprimer. Certains acteurs ont
d’une part, et souhaitent, d’autre part, que pris l’habitude de collaborer, tout au moins
des politiques régionales et territoriales au niveau des accompagnants, mais pas tou-
assurent un meilleur équilibre des localisa- jours au niveau des structures. Cette colla-
tions. Les petites associations travaillant sur boration est peut-être en train de muter en
des territoires ruraux se trouvent, elles, en coopération, par exemple pour répondre en
difficulté dans certaines régions, lorsqu’elles commun à des appels d’offres afin d’obtenir
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ne peuvent plus répondre aux conditions des fonds publics permettant à chacun d’as-
d’accès aux fonds publics. La concentration surer son fonctionnement. La coopération
régionale se produit dans les structures. pourrait être une voie très prometteuse, que
De nouveaux acteurs publics et éducatifs les territoires et leurs acteurs publics pour-
apparaissent. Des communautés territo- raient encourager et réguler.
riales créent leur propre politique de soutien Dans les territoires ruraux délaissés par les
à la création d’entreprises, avec des points réseaux d’accompagnement en concentra-
d’accueil classiques, des incubateurs, des ac- tion, l’initiative des acteurs publics territo-
célérateurs, des espaces de coworking et des riaux apparaît primordiale, les structures
fabLab’. Les établissements d’enseignement locales ayant du mal à satisfaire aux condi-
supérieur, déjà présents pour une partie tions d’agrément et à accéder aux appels
d’entre eux dans le secteur, développent dé- d’offres. L’éloignement géographique des
sormais tous leur offre. L’accompagnement centres de décision est encore accentué par
n’est donc plus l’apanage des acteurs his- la formation des nouvelles Régions. Mais la
toriques. Tout le monde en fait (ou croit en création d’entreprise se développe tout aussi
faire ou veut en faire) : grandes ou moins fortement sur ces territoires. Les bons pro-
grandes écoles, universités, cabinets RH ou jets existent, mais il faut aller les débusquer,
de conseil en reconversion, grandes entre- mettre en confiance et surtout en réseau les
prises qui dégraissent et essaiment, coaches, porteurs potentiels.

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Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

Nouveau monde, nouveaux un début et une fin consciemment envi-


paradoxes sagés, sans que ces bornes soient pour
autant déterminées précisément par le
Naguère, le porteur de projet poussait
porteur de projet lors de sa préparation et
la porte des organismes d’accompagne-
de son lancement. Une phase de salariat
ment pour accéder à la connaissance.
ou une nouvelle période entrepreneuriale
Aujourd’hui, toute l’information est
(entrepreneurs récidivistes) ouvrant vers
disponible en ligne. Cela questionne la
le développement d’un nouveau projet
légitimité des pratiques d’accompagne-
professionnel devient banale dans une
ment traditionnellement ancrées dans
vie faite de mobilité et d’expériences mul-
la dispense d’informations et dans leur
tiples.
mobilisation planifiée pour le montage
technique du projet. Cela remet plus
Ű Ű Disruption digitale
généralement en question les fonde-
ments mêmes d’un écosystème entre- En première analyse, le digital apporte à
preneurial qui soutient les dispositifs la fois des ressources à l’accompagné et
d’accompagnement (particulièrement des méthodes à l’accompagnant. Sur le
les Régions). Tout est organisé autour net ou via les réseaux sociaux, les por-
d’une vision linéaire et planificatrice, les teurs de projets ont accès rapidement
financements permettant l’accompagne- à l’information et aux ressources : les
ment du travail autour « d’étapes » enca- accompagnants notent que cela accélère
drant la progression théorique dans la notablement le montage de projets. C’est
construction d’un projet sur une échelle un bon point pour le digital. Les entre-
de temps planifiée. Cette forme de sta- preneurs ont besoin de communiquer
bilité, voire de rigidité dans l’accompa- entre eux et ils en retirent de la valeur.
gnement, et la vision du parcours lié Second bon point. Mais plus fondamen-
au montage du projet d’entreprise, est talement, l’évolution digitale semble
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aujourd’hui dissonante avec l’évolution venir concurrencer (ou « ubériser ») les
d’un contexte dominé par le mouvement pratiques traditionnelles. L’accumulation
permanent. des données via des plateformes dédiées
au conseil à la création-reprise d’entre-
Parmi les nouvelles contraintes impo-
prise, combinée avec des outils de plus en
sées par la transformation du monde,
plus performants d’intelligence artificielle
deux semblent incontournables et liées
permet déjà de délivrer du contenu per-
entre elles  : l’expérience entrepreneu-
sonnalisé de conseil et de formation aux
riale à durée limitée (voire hybride) et la
entrepreneurs. Dans un avenir proche,
concurrence digitale. En effet, si de plus
l’automatisation des réponses, via des
en plus de personnes aux profils divers
chatbots, adaptées à une grande série de
sont attirées par la création d’entreprise,
questions générales et sectorielles sur la
leurs manières de mobiliser l’entrepreneu-
création-reprise d’entreprise, rendra en
riat s’inscrivent de plus en plus en mode
partie caduques celles apportées actuel-
projet, sur une échelle de temps variable.
lement par les réseaux d’accompagne-
En d’autres termes, la création et la
ment. La réponse digitale va plus vite,
reprise d’entreprise sont perçues comme
est disponible n’importe où, n’importe
une étape de la vie professionnelle avec
quand…

Entreprendre & Innover / 85


Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

Par ailleurs, s’exprime dans les réseaux sur les projets et leurs porteurs, on les
la prise de conscience d’un déficit de connecte aux moyens déployés dans une
ressources quant à la maîtrise du digital approche de contrôle de gestion. Il en
et du numérique. Les structures et leurs résulte des tentatives de normalisation de
écosystèmes ne savent pas répondre cor- l’acte d’accompagnement qui vont à l’en-
rectement à la demande des porteurs de contre de l’innovation, dans ce secteur
projets en compétences digitales. Deux comme ailleurs, mais surtout à l’encontre
publics distincts d’accompagnés sont de la primauté accordée à l’humain. Cette
insatisfaits : 1) ceux qui sont très au fait question est aussi liée à celle de l’évalua-
des technologies et veulent qu’on les tion, dont les critères ne peuvent pas être
aide à les mobiliser dans leur business ; définis uniquement dans une perspective
2) les personnes plus âgées ou plus éloi- purement productiviste. Recueillir des
gnées culturellement, qui ont encore une données sur le suivi des projets procure
pratique et une formation au digital très aussi une fabuleuse opportunité d’affiner
faible. Les professionnels de l’informa- l’évaluation en la centrant elle aussi sur
tique et du numérique sont « sur-deman- l’humain. Les structures d’accompagne-
dés » ailleurs, dans des organisations qui ment auraient avantage à organiser en
rémunèrent mieux que celles de l’accom- leur sein des comités d’éthique sur cette
pagnement en création. Question ouverte question.
et problème à résoudre.
La combinaison d’une vision expérientielle Un métier en voie
du projet entrepreneurial (la création- de disparition ?
reprise d’entreprise en tant qu’expérience
Au cours de notre enquête, un des répon-
professionnelle parmi d’autres) avec l’ac-
dants a affirmé que « le métier de tech-
cès facilité à l’information en temps réel
nicien à la création d’entreprise » était
accroît l’asymétrie temporelle et fonction-
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appelé à disparaître. Une manière de dire
nelle entre le parcours proposé par les
que l’offre d’accompagnement répond
institutions, collectivités et organismes
de moins en moins à la demande… Dans
d’accompagnement et les besoins des por-
l’ancien modèle, l’accompagné était déjà
teurs de projet. Cela affecte également la
content que l’on s’occupe de lui ; les
relation accompagnateur-accompagné,
enquêtes de satisfaction montraient que
obligeant l’accompagnateur à bricoler en
les accompagnés étaient plutôt satisfaits
adaptant ses pratiques, prenant parfois
et ne savaient pas bien ce qu’on aurait pu
beaucoup de distance avec le discours
faire de mieux pour eux. Mais l’aspirant
officiel tenus par sa structure et ses finan-
entrepreneur est devenu exigeant et bien
ceurs…
informé. La concurrence entre structures
l’y aide. Les besoins des accompagnés
Ű Ű Data, reporting et normalisation
sont maintenant exprimés. Cela devrait
La technologie impacte également l’orga- sans doute aider à en faire des « clients »…
nisation interne et le reporting au sein Notre enquête montre que les accom-
des dispositifs d’accompagnement. Elle pagnants ont d’ailleurs une vision claire
rend possible une mesure de productivité et juste des besoins : guidage et décryp-
très précise. En accumulant des données tage (faire le tri dans les informations,

86 /
Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

les hiérarchiser, repérer ce qui est perti- compétences nécessaires pour accompa-
nent), soutien psychologique, assistance gner la personne plutôt que le projet.
à la recherche de financements, accès à
des méthodes et des outils de gestion de Ű Ű Développer des
projet, enrichissement des projets par les « compétences douces »
mises en relation, les effets de réseau,
Les compétences mobilisées par l’accom-
guidage pour éviter les erreurs adminis-
pagnateur vont s’approfondir dans trois
tratives.
domaines : analyse du besoin, mobilisa-
tion de « soft skills » et aptitudes péda-
Ű Ű Du côté des accompagnants :
gogiques. L’analyse du besoin suppose
changer de posture d’inverser le processus d’accompagne-
« Le changement de posture » est un leit- ment en partant non pas des méthodes
motiv dans les discours des personnes prédéterminées requises par l’accompa-
interrogées. Mais qu’est-ce que cela sous- gnement technique, visant à atteindre le
tend ? Deux idées apparaissent, dessi- but final (la création ou la reprise de l’en-
nant les contours des transformations treprise) mais plutôt des besoins et des
à venir. Tout d’abord la transition d’un moyens présents au départ pour ensuite
service préfabriqué vers un service per- bâtir une démarche non anticipée (par
sonnalisé, qui répond d’abord au besoin l’accompagnateur et le porteur de pro-
initial du porteur de projet. Comme pré- jet) en vue de tendre vers la vision finale
cisé plus haut, le porteur de projet est (créer ou reprendre son entreprise) 8.
aujourd’hui bien mieux informé sur les Cela requiert des capacités d’écoute et
modalités de création-reprise d’entreprise d’adaptation permanente et fait évoluer
et sur le milieu entrepreneurial (connais- la position de l’accompagnateur : il n’est
sance du territoire) grâce au ressources plus le détenteur du savoir mais l’artisan
digitales faciles d’accès 7. Du coup, le pro- collaborateur dans l’édification progres-
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cessus d’acculturation entrepreneuriale sive du savoir et de l’expertise du por-
fonctionne alors même que les porteurs teur de projet. Il concentre des moyens
de projet ne sont pas encore entrés en matériels, intellectuels, sociaux (réseaux)
contact avec les structures d’accompa- possiblement mobilisables par le porteur
gnement. Cela remet ainsi en question la de projet, selon ses besoins ressentis.
fonction d’expertise de l’accompagnateur. Dans ce contexte, l’accompagnateur tra-
L’information générale, voire sectorielle, vaille en collaboration, voire en coopé-
n’est plus véritablement une composante ration avec lui afin de l’aider à acquérir
de l’expertise (bien qu’elle soit toujours un savoir et une expertise au fil de ses
nécessaire à maîtriser par l’accompa- démarches et rencontres avec les parties
gnateur). Les éléments définissant la prenantes de son environnement socio-
valeur de l’expertise se recentrent sur les économique. Il prépare son émancipa-
tion. Les connaissances techniques, aussi
7  Ce qui n’est pas antinomique avec le constat évoqué importantes soient-elles, ne sont plus au
par plusieurs personnes interrogées concernant l’aug-
mentation de l’asymétrie d’information selon les profils
type de publics (certains se trouvant très peu familiarisés/
connectés avec internet et le monde digital en général) et 8  Une vision finale qui peut se transformer tout au long
les territoires (particulièrement certains territoires ruraux du processus et aboutir in fine au retour à l’emploi salarié,
défavorisés). ou à un projet de formation professionnelle.

Entreprendre & Innover / 87


Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

centre de la relation. Les compétences Ű Ű Du côté des structures :


douces (« soft skills »), liées au compé- mettre l’humain au centre
tences relationnelles et émotionnelles 9,
Quel sera, dans un proche avenir, le rôle
deviennent primordiales. Dans le contexte
des organismes d’accompagnement ? La
des pratiques d’accompagnement, elles
digitalisation leur enlève une part d’acti-
se traduisent par un rapprochement
vité, mais elle ouvre en même temps de
sémantique entre « accompagnateur » et
réelles opportunités de développement :
« facilitateur ».
quel accompagnement réinventer avec le
temps libéré grâce aux outils digitaux ?
Devenir un facilitateur du projet La référence à « l’humain », fortement
Le verbe « faciliter » revient dans différents présente dans les discours des personnes
entretiens. Cette expression familière au interrogées, traduit une volonté de recen-
monde du coaching et de l’accompagne- trage vers une relation de conseil/coa-
ment comporte un double sens qui prête
ching de qualité, voire de haut niveau.
à réflexion. Faciliter c’est à la fois aider et
rendre facile. Ces deux composantes sont Qu’est-ce que «  l’humain » pour les
exprimées. D’une part le numérique aide répondants  ? L’analyse des entretiens
les porteurs de projets et les accompagna-
montre que cette composante est ressen-
teurs. Les accompagnateurs constatent que
les outils numériques facilitent la tâche tie comme un invariant du métier. D’une
des porteurs de projets. Le premier niveau part elle n’est pas remise en cause par les
d’information technique est désormais ac- différentes évolutions et d’autre part elle
cessible sur internet. Or ce sont générale- constitue un facteur de motivation intrin-
ment des questions techniques que posent sèque essentiel à l’exercice du métier.
d’abord les porteurs de projet, même si
Le conseiller, par son action, s’implique
ce ne sont pas les plus importantes. Tant
qu’ils n’ont pas obtenu ces réponses, les dans le projet. Il se sent donc utile et peut
futurs entrepreneurs ne sont pas en capa- en tirer une forme de reconnaissance. Il
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cité d’aborder les réflexions de fond. Le faci- s’agit d’un ressort motivationnel essen-
litateur aide ainsi à repérer les informations tiel. Le « robot accompagnateur » n’est
importantes, à prendre du recul sur celles- pas une option envisagée sérieusement
ci et à transformer les plus pertinentes en
par les accompagnateurs.
connaissances utiles. Ceci correspond à la
posture émergente que décrivaient Schmitt « L’humain » exprime également la dimen-
et Husson 10 en 2015. L’accompagnateur-
sion non routinière, liée à la diversité des
facilitateur ne donne pas les solutions mais
aide à réfléchir, à prendre du recul, à rede- profils et situations rencontrés. Une forme
venir acteur et créateur de son avenir en d’expertise est ainsi revendiquée dans la
mobilisant les compétences douces énon- capacité à « faire du sur-mesure ». En fili-
cées précédemment. grane, c’est aussi l’absence de reconnais-
sance institutionnelle de cette complexité
particulière du métier qui transparait…
9  Parmi celles-ci, nous retrouvons par exemple la résolu- Le numérique est parfois brandi comme
tion de problèmes complexes, la pensée critique, la créati-
vité, la gestion des équipes, la coordination, l’intelligence LA solution pour améliorer l’efficacité et
émotionnelle, le jugement et la prise de décision, le souci faire des économies (illusoires ?). Mais
du service client, la négociation, la souplesse cognitive.
cela revient à oublier la part du métier
10 Article paru dans Entreprendre & Innover n° 27, Du
réparateur au facilitateur : changement de regard sur
qui touche à la maîtrise de la complexité
l’accompagnement (déc 2015). des interactions interindividuelles et ne

88 /
Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

pourra pas être traitée par une solution en Mooc et wébinaires, « bootcamps », hac-
ligne ou par de l’intelligence artificielle. katons, autobiographie raisonnée, etc.
Les acteurs constatent l’apparition de nou- L’accompagnement va intégrer du collec-
veaux outils numériques, qu’ils utilisent tif et du « pair 2 pair » ou se rapprocher du
avec plus ou moins d’envie et de facilité. compagnonnage, qu’il faut savoir animer
Mais ce ne sont que des outils, « comme et encadrer. Accompagnement en présen-
en a un artisan qui change d’outil » : tout tiel, à distance, collectif : les porteurs de
le savoir-faire lié aux années d’expérience projets souhaitent les trois modes d’ac-
reste majeur pour faire correctement cès à l’accompagnement. Le présentiel
le métier. Seul ce savoir-faire permet à (s’occuper de moi, me rassurer) demeure
l’artisan-accompagnateur de modeler un souhaité. La communication numérique à
accompagnement adapté exactement distance facilite bien entendu les contacts.
aux besoins. De plus, s’ils constatent que Au départ d’un projet, le collectif n’est pas
le numérique permet au porteur de projet demandé, mais les séances collectives
de faire une première recherche d’infor- sont vite perçues comme efficaces, por-
mation, les professionnels de l’accompa- teuses de contacts et stimulantes.
gnement constatent que d’une certaine
Ces besoins, qui ont été à plusieurs reprises
manière cet accès plus simple aux infor-
mentionnés par les personnes interrogées,
mations techniques met plutôt en valeur
montrent les limites du bricolage entrepris
leur rôle.
par certains accompagnateurs – souvent
les plus expérimentés – pour transformer
Ű Ű De nouvelles compétences
une relation procédurale et processuelle
pour les chargés d’accompagnement centrée sur le projet, en relation de coa-
Cette volonté d’améliorer sensiblement la ching centré sur la personne. L’évolution
relation avec le porteur de projet bouscule du contexte actuel incite ainsi certains
encore un peu plus les conditions finan- professionnels de l’accompagnement à
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cières et techniques actuelles. Le renforce- prôner un coaching de haute qualité, pro-
ment de la relation centrée sur l’humain duisant une valeur ajoutée d’un nouvel
entraîne plusieurs conséquences. Tout ordre qui transforme les pratiques d’ac-
d’abord, l’information, la connaissance compagnement actuelles.
technique et le processus de planification
Cette évolution implique un question-
du montage de projet deviennent des res-
nement à trois niveaux : 1/ quel est le
sources, des moyens de second plan. Ils ne
sens de l’accompagnement recherché ?
sont pas une fin en soi. L’ensemble du pro-
2/ quelle est la nature des connaissances/
cessus d’accompagnement, tel qu’il a été
compétences proposées au porteur de
bâti et généralisé, est remis en question.
projet ? 3/ comment permettre l’acquisi-
Cette évolution génère le besoin de nou-
tion de ces connaissances/compétences ?
velles compétences de la part des accom-
pagnateurs, une maîtrise numérique mais
Ű Ű La montée en puissance
aussi en coaching. C’est d’autant plus vrai
que les modalités d’action se diversifient.
de la pédagogie
Des méthodes venues d’autres univers Si l’accompagnement semble tendre vers
se répandent  : approches effectuales, le renforcement des capacités des per-
« design thinking », « serious games », sonnes pour entreprendre dans leur projet

Entreprendre & Innover / 89


Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

-et dans leur vie professionnelle en géné- collectifs eux-mêmes sont en nombre
ral-, cette relation devrait donc reposer croissant. Apparaît également un moindre
en partie, nous l’avons mentionné, sur attachement à la pérennité  : je vais
la mobilisation et l’acquisition de “soft m’amuser quelque temps avec ce projet,
skills”. La question qui survient corollai- et après on verra. Plus délicat : les tout
rement est « comment permettre leur jeunes accompagnants pensent qu’il faut
acquisition » ? De manière assez inédite, en conséquence rajeunir les cadres pour
la pédagogie est apparue dans plusieurs animer les structures. On peut aussi miser
discours des personnes que nous avons sur la capacité des porteurs de projets à
interrogées. L’appel à la pédagogie, fon- faire eux-mêmes du gaming et des actions
dement de l’éducation, est relativement collaboratives entre accompagnés. Le col-
nouveau dans le champ de l’accompa- lectif et le collaboratif sont perçus par tous
gnement. Son apparition signe-t-elle une (accompagnants et accompagnés) comme
évolution sensible des pratiques d’accom- d’une redoutable efficacité.
pagnement basées sur le métier de conseil
Ces nouveaux comportements ancrés
vers celui du coaching et de la formation
dans l’instantanéité génèrent des défis
qui reposent sur la maîtrise profession-
et requièrent des compétences d’un
nelle de la relation ? Si tel est le cas, quels
genre nouveau pour l’accompagnateur.
en seraient les premiers contours ? Quelle
Car l’accès à la surabondance des infor-
pédagogie ? Faut-il privilégier certaines
mations, des méthodes et des outils via
approches plus que d’autres ?
le digital rend nécessaire de savoir sélec-
Dans certains entretiens, des accom- tionner, analyser et transformer cette
pagnateurs ont exprimé le fait que les masse d’informations en connaissances
outils numériques permettent de rendre utiles et actionnables. Comment concilier
facile ce qui était rébarbatif, en particu- le ludique, l’immédiateté dans la réponse
lier l’accès aux informations techniques. avec des fonctions de type maïeutique,
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Ils évoquent également une dimension d’analyse, de prise de recul, ou encore
ludique, incitant les porteurs de projets d’exercice de la critique ? Un paradoxe de
à enquêter tels des « Sherlock Holmes ». plus à gérer…
Dans ce contexte, la promesse du numé-
Enfin, l’orientation de certaines per-
rique est souvent celle visant à tout
sonnes interrogées vers un accompagne-
rendre facile : trouver facilement en un
ment humain de haute qualité implique
clic toutes les réponses à toutes nos ques-
de revoir les critères d’évaluation actuel-
tions. Aller plus vite, avec moins d’étapes,
lement centrés en grande partie sur le
trouver des « recettes », supprimer des
projet 11. Or l’évaluation est aussi sen-
obstacles, des freins, avoir plus de mobi-
sible que cruciale : comment remettre en
lité, de fluidité pour zapper d’une chose
question l’image populaire de l’entrepre-
à l’autre et transformer la vie en jeu (la
neuriat défini par la création d’entreprise
fameuse «  gamification  »). Les jeunes
(le projet) plus que par l’accompagne-
porteurs de projets veulent s’amuser. Ils
ment humain (la personne) ? En d’autres
veulent du « gaming » dans l’accompa-
termes, comment transformer l’image de
gnement, de l’événementiel (start up
week-ends par exemple). Pour s’amuser,
il vaut mieux être plusieurs. Les projets 11  Particulièrement le nombre d’entreprises créées.

90 /
Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

l’accompagnement traditionnel auprès porteur de projet à se repérer entre le


des élus et des financeurs publics afin maquis des offres, la qualité de l’oppor-
de faire évoluer les perceptions sur la tunité économique dans le marché digital
performance et la valeur ajoutée de l’ac- et la complexité de sa situation socio-­
compagnement (au-delà de la création professionnelle ?
d’entreprise) ? Quels critères retenir pour
−− La mise en place de la formation conti-
évaluer l’accompagnement humain  ?
nue des accompagnants apparaît comme
Comment rendre compatible et accep-
une nécessité dans un métier qui évolue
tables un accompagnement centré sur
sans cesse pour intégrer de nouvelles
le développement de la personne avec
méthodes pédagogiques et d’animation.
des critères de développement socio-éco-
nomique et de création de valeur sur le −− L’évolution des pratiques s’impose.
territoire ? Quels nouveaux indicateurs Il s’agit de passer d’une approche de la
inventer ? Avec qui ?… nécessité à une approche centrée sur le
besoin. L’auto-entrepreneuriat décom-
La forêt s’épaissit… plexe en effet les porteurs de projet,
invisibilise le risque, ôte toute obligation
Des individus cheminant de projet pro-
d’entrer dans un processus d’accompagne-
fessionnel en projet professionnel, d’une
ment. Ainsi le secteur de l’accompagne-
aventure à l’autre, sur un parcours faci-
ment se structurerait désormais comme
lité par les technologies digitales qui
tout secteur économique concurrentiel
permettent d’accéder à une information
selon une approche du client par le besoin
pléthorique et de s’affilier à une multitude
et non plus par la nécessité.
de réseaux… au risque de s’y perdre… La
forêt s’épaissit… Des accompagnateurs −− Les actions collaboratives entre accom-
dont les outils et méthodes basés sur pagnés vont se développer. Le collectif et
une vision linéaire et planifiée sont loin le collaboratif sont perçus par tous (accom-
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de la nécessaire souplesse, agilité et rapi- pagnants et accompagnés) comme d’une
dité d’exécution requise pour s’adapter redoutable efficacité : les porteurs de pro-
à un environnement mouvant… La forêt jets apprécient le travail collaboratif, l’in-
s’épaissit… Les défis sont nombreux, les sertion dans des communautés d’usagers,
opportunités et les risques inédits. « C’est la possibilité d’échanger sur les pratiques.
une question de survie », souligne l’un L’accompagnement doit savoir manier les
des interviewés. Les chances de réussite outils collaboratifs et être en veille sur les
reposent sur une remise en question pro- nouvelles technologies dans ce domaine.
fonde des pratiques, autour des axes de
−− Les nouvelles méthodes seront axées
réflexion que sont la formation des accom-
sur la gestion de l’information et de l’ins-
pagnateurs, le positionnement des exper-
tantanéité, l’analyse, l’esprit critique, la
tises sur les territoires et l’évaluation.
construction de réseau, la mobilisation
de ses propres ressources métacognitives
Ű Ű La formation des professionnels
(apprendre à apprendre) par le porteur de
au sein des réseaux  projet selon ses besoins et son expérience,
Quels sont les rôles compétences atten- et plus généralement son développement
dues de l’accompagnateur pour aider le personnel.

Entreprendre & Innover / 91


Accompagnement entrepreneurial : le point de bascule

Ű Ű L’évaluation  de présentiel, mais où est aussi perçu le


L’évaluation sera plus que jamais une pré- besoin de recherche du renforcement de
occupation majeure des structures et de lieux identitaires facilitant l’appartenance
leurs financeurs. L’évaluation doit prendre à une communauté.
en compte l’objectif des porteurs de pro-
Le positionnement de chaque structure
jets de faire de l’entrepreneuriat un projet
dans l’écosystème local et numérique va
d’un moment de leur vie. Il conviendrait
devenir crucial. Quelle valeur ajoutée ?
que l’évaluation des projets et du travail
Quelle fidélisation du porteur de projet ?
des structures d’accompagnement incor-
Quels partenariats ? Quelles sources de
pore la valeur sociétale des projets.
revenus 12 ?
Ű Ű Le positionnement des expertises Parler de coopération et sans doute de
sur le territoire  coopétition des structures pour éviter
les effets brutaux de la concurrence et
Le lieu redevient une question, dans un
préserver les précieux savoir-faire acquis
moment où le numérique n’impose pas
en accompagnement est un discours

Tableau 2 : Le profil des répondants


Type de Structure Nombre et fonction du répondant
4 dont 2 CCI métropoles : 2 conseillers,
Chambre de Commerce et d’Industrie
2 responsables d’équipe
Chambre des Métiers et de l’Artisanat 3 dont 2 conseillers et 1 directeur
3 dont 2 accompagnateurs et 1 responsable
Boutiques de Gestion
de service
Réseau France Initiative 3, dont 1 directeur(trice)
Incubateur, couveuse 2 responsables
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Cabinet Ressources Humaines 2
Accompagnateur(trice) secteur associatif 2
Boutiques à l’essai 1
Entrepreneur(e) 1
Enseignant chercheur en entrepreneuriat 1
BPI France (Banque Publique
1 cadre
d’investissement)
DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises,
de la Concurrence, de la Consommation, du 1 cadre
Travail et de l’Emploi)
Direction développement économique
1
d’agglomération
Formateur de cadres en reconversion 1
Retraité de l’accompagnement et initiateur de
1
réseaux d’accompagnement nationaux
Nombre total de répondants 27

12  Par exemple centrer la communication de sa presta-


tion sur l’argument de la « relation humaine » est-il ven-
dable auprès des financeurs ?

92 /
Fabienne Bornard, Dominique Frugier, Dominique-Anne Michel, Olivier Toutain

Dominique Frugier a été jusqu’à 2013 responsable


acceptable. Demeure à étudier la meil- des formations et de l’accompagnement en entre-
leure façon de concevoir l’écosystème. preneuriat à l’Ecole Centrale de Lille. Il se consacre
Les pouvoirs publics nationaux et ter- désormais au prosélytisme de l’entrepreneuriat et
ritoriaux y ont un rôle de régulation de l’innovation. Il est président d’Alice Lab’, secré-
à jouer. taire général de l’Académie de l’Entrepreneuriat et
de l’Innovation et membre du comité de rédaction
Tous ces axes de réflexions dessinent
de la Revue Entreprendre & Innover.
autant de doutes que d’espoirs quant à
l’avenir du métier de l’accompagnement. Dominique-Anne Michel est journaliste écono-
Les pratiques actuelles s’inscrivent plu- mique, spécialiste des questions du travail et
tôt dans le contexte d’un voyage en eaux de l’emploi, des problématiques du handicap et
troubles dont l’avenir est très incertain. du dialogue social. Elle a co-fondé, en 2008, la
Est-ce la fin de ce monde pour autant ? revue Entreprendre & Innover avec Alain Fayolle
et Bernard Surlemont. En tant que rédactrice en
Peut-être pas, car la créativité, la passion
chef du magazine l’Entreprise (2000 à 2007), elle a
et la détermination des acteurs, via les
piloté de nombreux numéros spéciaux sur la créa-
propos que nous avons collectés lors du
tion d’entreprise, destinés à un large public. Elle est
salon Procréa, pour défendre dans l’effort également associée de la Coopérative d’Activités
des valeurs humaines tout en s’adaptant et d’Emploi Coopaname depuis 2010 et enseigne
aux grandes mutations, inciterait plutôt à le journalisme dans diverses institutions.
s’approcher de ceux de Martin Luther : « si
l’on m’apprenait que la fin du monde est Olivier Toutain est professeur associé en entrepre-
neuriat et membre du centre d’expérimentation et
pour demain, je planterais quand même
d’innovation pédagogique en entrepreneuriat TEG
un pommier. »
“The Entrepreneurial Garden” (https://www.bsb-
Fabienne Bornard est professeur assistant à l’IN- education.com/the-entrepreneurial-garden/pres-
SEEC School of Business & Economics, spécialisée entation.html) de l’école BSB (Burgundy School of
en Entrepreneuriat, Stratégie et Innovation, avec Business, Dijon) et impliqué dans le monde profes-
© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 19/01/2022 sur www.cairn.info (IP: 196.121.3.46)

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une première partie de carrière comme fondatrice sionnel de l’entrepreneuriat depuis 20 ans. Il mène
d’une société de conseil et de formation dédiée des recherches dans le champ de l’éducation à
au développement des petites entreprises. Ses l’entrepreneuriat, autour de trois axes majeurs : la
intérêts de recherche sont l’entrepreneuriat et plus construction sociale des connaissances, la coopé-
particulièrement la cognition et l’éducation entre- ration, l’émancipation et la liberté d’entreprendre ;
preneuriale de l’entrepreneur. Elle est associée le milieu éducatif entrepreneurial via l’étude de la
au Centre de Recherche en Entrepreneuriat et au formation et du développement des Écosystèmes
Centre de Recherche en Éducation à l’Entrepreneu- Éducatifs Entrepreneuriaux (EEE) ; l’éducation à
riat de l’EM Lyon et membre du comité éditorial de l’entrepreneuriat via l’Intelligence Artificielle et le
la Revue Entreprendre & Innover. Big Data.

Entreprendre & Innover / 93

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